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  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    1/19

    L Eglise

    comme communion

    RFLEXIONS A

    PRO PO S

    DU R A P P O R T

    FINAL

    DU SYNODE EXTRAORDINAIRE DE 1985

    (suite)

    4.

    L Eglise

    particulire comme communion e s fidles

    Aprsavoirparl de lacommunionverticale avec

    le

    Dieu Trinit,

    qui

    s'instaure par le

    baptme

    et s'actualise

    dans

    lacommunion eucha-

    ristique,

    nous

    abordons

    un troisime

    aspect

    de

    l'ide

    de

    commu-

    nion:

    la

    communion

    sur

    le plan horizontal, celle

    qui

    lie les fidles

    entreeux.Toute Eglise locale ou

    particulire,

    en

    laquelle

    on clbre

    authentiquement le mmorialdu

    Seigneur,

    est unecommunion fra-

    ternelle, une communia fidelium. Celle-ci se

    ralise,

    selon J.M.R.

    Tillard,

    en trois domaines troitement

    lis

    entre

    eux

    4 0

    .

    a. L eniveau

    le

    plus

    essentiel

    estcelui

    de

    lacommunion dans

    les

    biens

    de grces

    auxquels tous

    les

    fidles

    ont

    part.

    L e peuple

    messianique est tabli

    par

    le

    Christ

    pour

    communier

    la vie,

    la charit et la vrit (Z.G,

    9b).

    Le trsor de

    grces

    ne se limite

    pas

    la

    charit,

    siimportante soit

    elle.

    L'Eglise

    est une

    communion

    de

    foi

    qui

    opre

    dans

    la

    charit

    et

    persvre dans

    l'esprance.

    Elle

    est aussi communion

    de mission,

    qui veut

    communiquer

    tous

    les hommes la communion avec

    Dieu. Cette

    mission

    commune

    se

    ralise

    l'intrieur

    d'une communion de charismes, les dons

    si nombreux

    de l'Esprit, qui se

    sert

    de

    la

    lgitime diversit pour

    difier l'unique Corps du Christ. Dans ce domaine galement, il

    s'agit

    du mystre

    de

    l'unit

    dans

    la

    diversit.

    Loin

    de

    briser l'unit,

    la diversit

    des dons de l'Esprit

    dans chaque

    fidle

    la

    construit

    plutt.En tant quecommunion de charismes, l'unique Eglise

    offre

    un

    espace

    laplunformit. Mais

    l'Esprit

    d'unit la garde de s'enga-

    ger

    dans

    une voie sans issue, soit

    le

    morcellement chaotique,

    le

    pluralisme effrn,o

    la diversit

    particulire

    ne

    peut plusparvenir

    la

    communion

    vritable,

    soit l'uniformit

    monolithique,

    o

    la

    40. Nom suivonsJ .M .R . T I L L A R D L g l i s e d e

    Dieu. . . ,

    cita 22, p . 456461;

    voir galement

    W .

    K A S P E R

    L glise.. , ,

    cit n.

    20 ,

    p. 27-29.

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    2/19

    162 A . D E N A U X

    ncessaire

    pluriformit

    des

    membres individuels est touffe dans

    un systme juridique rigide

    et

    o

    les

    fidles se voient privs du

    droit

    d'exercer

    leurs

    dons

    spirituels (AA, 3, 4). Enf in , les

    fidles

    de

    l'Eglise

    locale

    forment

    aussi

    une

    communion

    de

    rconciliation,

    dans

    laquelle sont surmontes les oppositions entre les

    hommes,

    les

    sexes,

    les

    cultures,

    les

    races

    ainsi

    que

    les

    diffrences historiques.

    Cela signifie que le malheur d'tre priv de

    la communion avec

    soi-mme,

    avec les

    autres

    et avec Dieu est,

    par

    l'Esprit de Dieu,

    rpar dans la

    communion

    de

    salut.

    b.

    Le

    second

    domaine concerne

    1'

    aposto l ic i t

    de

    l'Eglise locale.

    Lacommunaut

    des fidles se sait en

    communion avec

    l'Eglise

    apos-

    tolique.

    Lacommunion

    ecclsiale est enracine dans

    la foi qui

    accueille

    la

    Parole deDieu. Cette Parole

    n'est

    pas une ralit

    abstraite,

    mais

    elle se rvle dans

    la

    figure historique de Jsus-Christ. Toute com-

    m u n a u t ecclsiale doit donc tre relie la

    c o m m u n a u t

    apostoli-

    que,

    plus prcisment

    au

    collge

    des

    Aptres.

    En

    effet,

    nous

    ne

    connaissons

    le Verbe de Dieu que

    par

    cette

    mdiation:

    l'Eglise est

    btie sur

    le fondement des Aptres.

    Cette

    communion historique de

    chaque

    Eglise locale

    avec l'Eglise

    apostolique forme la tradition.

    Celle-ci est

    la

    communion de

    toutes

    lesgnrations

    et

    de tous les

    milieux

    avec leur diversit

    etparticula-

    rit

    dans

    la

    mme

    foi

    apostolique.

    La

    communion

    apostolique

    garantit

    donc

    la

    catholicit de l'Eglise,

    catholicit

    qui est un aspect de la

    communion: le

    fait que

    l'Esprit

    de

    Dieu, commencer

    par la com-

    m u n a u t apostolique et en rfrence son tmoignage, rassemble

    dans l'unit

    du Corps du Christ

    lescommunauts de

    tous

    les lieux,

    tous les temps, tous

    les

    milieux,

    toutes

    les situations historiques,

    toutes

    les

    circonstances sociologiques,

    et

    qu'il

    ralise

    en

    chacune

    d'elles l'unique Eglise

    de Dieu.

    Catholicit

    signifie

    donc

    commu-

    nion

    dans

    la

    diversithistorique, gographiqueet culturelle en laquelle

    se ralise le salut. Grce

    cette

    catholicit, la

    communion

    ecclsiale

    devient

    universelle.

    c.

    Pourgarantir cesdeuxdomainesde

    la

    communion des

    fid-

    les

    l'intrieur de

    l'Eglise

    locale, l'Esprit fait

    surgir galement

    un autre de ses dons, le charisme du ministre, de

    l piscop . Le

    charisme ministriel

    est essentiellement

    au service

    de

    la

    commu-

    nion. Il n'est

    que

    secondairement un instrument de l'ordonnance

    hirarchique.

    A l'intrieur

    de

    l'Eglise locale, le rapport entre la hirarchie

    et

    les

    fidles

    est

    dtermin

    avant

    tout

    par

    l e

    f a i t

    que

    les

    deux forment

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    L'GLISE

    C O M M E COMMUNION

    163

    ensemble

    unecommunia

    fidelium.

    On

    ne

    doit

    donc

    pas

    reprsenter

    l'Eglise localepar une figurepyramidale,

    o

    tout dcoule du

    minis-

    tre, mais selon

    le modle de l'change,

    de

    la concertation

    et de

    la

    collaboration.

    L'Eglise

    locale

    ne

    parvient

    sa

    plnitude que

    par

    la synergia, par le )eu combin de tous les charismes.

    En

    vertu

    de leur

    incorporation

    sacramentelle

    dans

    le Corps

    du

    Christ et

    en vertu du sacerdoce commun qui en procde (LG, 10-12), les

    lacsont,dans l'dification

    de

    l'Eglisecomme communaut

    sacerdo-

    tale, prophtique et royale (Z.G, 34-36), une responsabilit dont

    ils

    ne peuvent se dispenser. Traditionnellement, cette collaboration a

    pris

    la

    forme

    de

    l'activitsynodale,

    dans

    laquelle

    les

    ministresordon-

    ns

    et les lacs jouent leur rle, chacun selon son rang. A l'heure

    actuelle, elle se ralise, entre

    autres,

    de manire permanente, par

    le conseil pastoral diocsain (C7C, 511-514) et, exceptionnellement,

    par

    un

    synode diocsain (C7C,

    460-468).

    L'voque est au cur de l'Eglise locale comme le principe et

    le

    fondement

    visible

    de

    l'unit

    {LG,

    23a). Il a

    pour

    tche

    de

    veil-

    ler

    (episkopein)

    ce que les nombreux charismes s'exercent dans

    un mme

    esprit.

    Comme

    un pre et un pasteur, il doit rassembler

    et former le troupeau qui lui est confi et qui est pour lui comme

    une famille,

    de

    telle sorte que tous,

    pleinement

    conscients

    de leur

    responsabilit, vivent et uvrent dans

    la communion de la charit

    (in

    communione

    caritatis)

    (CD,

    16a).

    L'obissance

    au

    sein

    de

    l'Eglise

    locale

    se situe

    l'intrieur

    de

    cette communion de charit et trouve

    son modle dans l'obissance

    du

    Fils

    son

    Pre

    au sein

    de

    la com-

    munion trimtaire. Ainsi donc l'vque est

    le

    serviteur

    de

    l'unit.

    La mystrieuse

    unit qui rgne entre

    l'vque

    et sa communaut,

    que l'antique

    tradition

    voque par l'image

    des

    noces, trouve une

    expression

    trsparticuliredans

    la

    clbration

    de

    l'Eucharistie.

    Puis-

    que l'Eglise

    est issue de l'Eucharistie, c'est

    l'vque qui, propre-

    ment

    parler,

    la prside

    (SC,

    41). Il

    y apparat

    comme l'image du

    Christ qui fait l'unit

    de

    son

    Corps,

    qui,

    par le don de

    son

    Corps

    eucharistique,

    cre la

    communion

    41

    . Entre l'vque

    et son Eglise

    rgne une communion si profonde

    que saint

    Cyprien

    a

    pu

    dire:

    l 'vque est

    dans l'Eglise,

    et

    l'Eglise dans

    l'vque

    (Epist.

    66,

    8).

    L'vque

    reprsente l'Eglise locale {LG, 23a). Cependant

    l'vque

    et son peuple ne forment

    pas

    une le spare des

    autres

    Eglises

    locales. Ainsi le ministre de

    l'vque

    lui est

    confr

    lors de son

    ordination,

    au cours de la prire

    de

    la communaut rassemble,

    par l'imposition des

    mains

    des vques des environs, qui reprsen-

    41.

    Cf.

    IGNACE

    D ANTTOCHE,

    A ux Smym i em

    Vffl 1-2.

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    164 A . D E N A U X

    tem leurs Eglises. Cela s'opre normalement dans le cadre d'une

    clbration

    eucharistique. L e charisme piscopal, qui vient directe-

    ment de l'Esprit, lui

    est

    donc transmis

    l'intrieur

    de lacatholicit

    de l'glise et

    travers

    la

    succession

    apostolique. L'vque

    consacr

    lui-mme devient alors

    le garant de

    l'apostolicit dans son Eglise,

    qu'i l reprsente au sein de la communion des Eglises. C'est pour-

    quoi, dans son Eglise, l'Eucharistie ne

    peut tre

    clbre en vrit

    que

    sous sa prsidence ou celle d'un

    prtre

    en communion

    avec

    lui.

    La mention de son nom en

    est

    un signe marquant.

    Lesprtres,

    et

    leur manire aussi les

    diacres,

    sont les

    collabora-

    teurs

    de

    l'vque

    dans

    le

    ministre

    de

    Vpiscop.

    Le

    mystre

    de

    l 'uni t et

    de

    la diversit

    se

    reflte galement dans la structure des

    ministres

    de l'Eglise locale.

    L e

    service de

    Vpiscop

    prsente

    un

    aspect la fois personnel (dans la personne

    de

    l'vque)

    et

    synodal

    (dans le collge des

    prtres). La

    conjugaison

    d'une dimension

    per-

    sonnelle et d'une

    autre, synodale,

    qui

    joue au niveau de

    l'Eglise

    universelle

    (le

    pape

    et le

    collge

    des

    vques),

    se

    rflchit

    d'une

    certaine

    manire

    dans l'Eglise locale. Avec leur vque les

    prtres

    formentun unique

    presbyterium

    (LG,28b), un collge

    de

    prtres,

    dont

    l'vque est

    le chef (PO, 8a).

    La relation entre

    l'vque et

    ses prtres peut se

    dcrire comme une

    communia

    hierarchica (PO,

    7a): fonde sur le sacrement

    de

    l'Ordre, elle comporte

    sans

    s'y

    rduire,

    un

    aspect

    hirarchique:

    l'vque

    est le chef

    du

    presbyte-

    r ium

    et les prtres lui doivent obissance. Ils ne

    peuvent

    exercer

    leur tche qu'en communion

    avec

    l'vque {PO,

    7a.

    14c;

    LG,

    29a).

    Par l, les

    prtres ne sont

    pas rduits

    au rang de dlgus sans

    plus,

    de

    simples

    excutants

    des

    dcisions

    ou

    de

    conseillers.

    Lespr-

    tres ne sont pas seulement des cooprateurs aviss de l'vque

    (Z.G,

    28b), mais

    se;;

    auxiliaires

    indispensables

    (PO,

    7a).

    Leur

    res-

    ponsabilit, celle

    d'une communaut

    chrtienne,

    elle-mme

    partie

    de

    l'Eglise

    locale

    qu'est le diocse, inclut u n

    droit

    fond sur

    le sacrement de

    l'Ordre

    l'initiative et la responsabilit. Mais

    ce droit

    ne peut s'exercer qu'

    l'intrieur d'une

    communion hirar-

    chique: aut rement l'unit

    est

    brise et la foi

    apostolique blesse.

    Sur

    ce

    plan

    aussi,

    la

    pratique

    synodale

    est le

    moyen appropri

    de

    donner

    f o r m e

    cette

    communion. Si le conseilpresbytral

    s'impose

    (C/C,

    495), la raison en est que, dans le diocse,

    le ministre de

    Vpiscopn'est pas

    purement

    personnel,

    mais,

    dansson essence

    mme,

    synodale

    et^cea.

    de

    par sa

    dimension

    communionnel le

    4 2

    -

    42.

    Cf.

    E.

    CORECCO,La rception

    deVatican

    dans lecodeded roitcanonique,

    dans

    La

    r c e p t i o n

    d e

    Vat icanII

    cite

    n.

    17,

    p.

    328-391,

    spcialement

    p.

    367-368,

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

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    L G L I S E C O M M E C O M M U N I O N 165

    d.

    Enf in ,

    le

    modle de

    communion

    s'applique galement aux

    art iculat ions internes du diocse

    mme.

    L'Eglise locale qu'est

    le

    diocse

    est

    une communion de

    communauts,

    de

    paroisses.

    Chaque

    paroisse

    est,

    son

    tour,

    une

    communaut

    prcise

    de

    f idles

    qui

    est constitue

    d'unemanire

    stabledans l'Eglise

    particulire, et

    dont

    la chargepastorale est

    confie

    au cur,

    comme

    son

    pasteurpropre,

    sous l'autorit

    de l'Evque

    diocsain

    (C/C, 515

    1).

    Les

    rapports

    entre le cur et

    sa

    communut paroissiale

    sont

    analogues

    ceux

    de

    l'vque avec son

    Eglise.

    Le cur

    doit reconnatre

    et encourager

    la

    participation qui revient aux

    lacs

    dans

    la

    mission de l'Eglise.

    Il

    doit aussi s'efforcer

    de

    rendre les

    fidles attentifs

    la

    bonne

    entente

    dans la paroisse. En mme temps, il

    gardera

    sa

    paroisse

    d'un splendide isolement;

    pour cela, il soulignera l'importance

    des relations extrieures, de

    telle

    sorte

    que

    ses

    paroissiens se

    sentent

    membres et de

    leur

    diocse et de l'Eglise universelle

    (C/C,

    529

    2). Normalement,

    la

    collaboration entre le cur et les fidles

    qui

    lui

    sont

    confis

    s'exprime

    dans

    la

    constitution

    d'un

    conseil

    parois-

    sial (C/C, 536),parfois aussi dans la formation d'une quipe

    parois-

    siale

    compose de

    lacs

    et quipartage

    le

    soin

    pastoral

    de laparoisse

    (C/C, 517, 2), et

    dans

    un

    ensemble d'autres

    formes

    visant

    con-

    struire

    la

    communaut paroissiale.

    La

    paroisse elle-mme

    peut

    son tour treconsidrecomme une

    communion

    de communauts .

    Car

    une paroisse vivante reoit

    ses

    impuisions

    vitales

    des

    commu-

    nauts de

    quartier

    qui

    la

    constituentou descommunauts ecclsiales

    de

    base.

    Le modle decommunion s'applique

    donc

    tous

    les

    niveaux

    de la vie ecclsiale. Pour chacun d'eux, il s'agit toujours de trouver

    un quilibre dlicat entre l'unit et la diversit, entre la responsabi-

    lit personnelle du chef et

    la

    mission particulire des

    membres

    de

    la

    communaut.

    5. La

    communion universelle des

    Eglises

    l oca les^

    Puisque l'Eglise de

    Dieu

    est

    rellement

    prsente en toute Eglise

    locale rassemble dans

    l'Eucharistie,

    toutes

    les Eglises

    locales rpan-

    dues

    par toute

    la

    terre,

    quelque moment que

    ce

    soit

    de

    l'histoire,

    forment l 'unique et

    mme

    Eglise;

    et

    ce qui vaut

    pour la commu-

    nion descroyants l'intrieur de l'Eglise

    localevaut

    semblablement

    pour les

    Eglises

    locales entre elles;

    elles

    constituent une

    communia

    43. Cf.

    J.M.R.

    TILLARD, L Eglise de

    Dieu...,

    cit n. 22,p.

    461-465;

    W. K.ASPER,

    L Eglise..., cit

    n.

    20, p. 23-27;

    D.E. L A N N E , L glise locale et l Eglise

    universelle,

    dans

    Irnikon

    43

    (1970)

    481-511;

    H.

    DE

    LUBAC,

    Les glises

    particulires

    dans

    l glise

    universelle, Paris , 1971.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    6/19

    66 A . D E N A U X

    ecclesiarum.

    Ceci

    nous amne

    un

    cinquime

    aspect du modle

    communionnel, son sens ecclsiologique

    proprement

    technique.

    La

    notion d'Eglise de Dieu comme c o m m u n i o n d'Eglises locales a

    t pour l'Eglise du premier millnaire et a u j o u rd 'hu i

    encore

    pour

    les glises orientales (OE,

    13; UR,

    14s) l'image dominante

    de l'Eglise. Consciemment, le

    II

    e

    Concile

    du Vatican a repris

    cette

    ecclsiologie

    decommunion et

    abandonn l'ecclsiologie

    unilatrale

    de

    l'unit,

    qui

    fut

    celle du second millnaire. Son

    principe

    fonda-

    mental a t

    formul en

    Lumen Gentium,23a:

    c'est dans

    les Eglises

    particulires et

    partir d'elles qu'existe

    l'Eglise

    catholique une et

    unique

    (cf.

    LG,

    26a;

    CD,

    lia;

    AG,

    22b).

    L a

    formule

    in

    quibus

    et

    ex quibus dfinit

    clairement le principe

    de

    la communion:

    il

    s'agit

    d'un

    rapport d'immanence entre

    la

    dimension universelle

    et

    la

    dimension particulire de l'Eglise du Christ

    une et

    unique.

    Ici

    encore,

    le

    modle

    se trouve dans le

    mystre

    trinitaire de l'unit

    dans

    la diversit. P a s plus que l'Eglise

    universelle

    n'est une

    addi-

    tion

    ou une

    confdration

    d'Eglises

    particulires qui lui

    prexistent,

    pas

    plus

    les

    Eglisesparticulires

    ne

    sont

    une subdivision administra-

    tive

    de l'Eglise

    universelle. Eglise universelle et Eglises particulires

    s'impliquent mutuel lement ,et

    il

    rgneentre

    elles

    un rapport d'inha-

    bitation

    rciproque

    4 4

    . C'est prcisment cette immanence plnire

    de la dimension

    universelle et

    particulire qui

    dtermine

    l'interpr-

    tation

    spcifique

    de

    la

    rcente

    ecclsiologie

    catholique

    de

    commu-

    nion et

    qui

    la distingue des interprtations

    en

    cours

    dans les

    Eglises

    ou

    communauts

    ecclsialesqui ne

    vivent

    pas en

    pleine

    communion

    avec l'vque de

    Rome.

    En

    effet,

    seule une

    ecclsiologie qui

    a son

    point dedpart dans l'unique

    Eglise

    du Christ est en

    mesure

    d'vi-

    ter l'impasse o aboutit invitablement une ecclsiologie

    centre

    de

    faon

    exclusive

    sur

    l'Eglise

    universelle ou sur l'Eglise

    locale.

    L'Eglise universelle

    et

    l'Eglise

    particulire

    ne

    sont

    pas deux

    ralits

    concrtes

    spares. Elles

    sont

    deux

    dimensions

    formelles et

    constitu-

    tives de

    l'unique Eglise du

    Christ.L'Eglise

    universellen'existe mat-

    riellement

    que

    l

    o l'Eglise du Christ est prsente dans sa dimen-

    sion

    particulire

    45

    .

    a. Il existe entre les

    Eglises

    locales les mmes liens qu' l'int-

    rieur de l'Eglise locale: communion de foi, de charit et d'esp-

    rance;

    communion

    des

    biens que procure

    la grce; communion

    dans ladiversit

    des

    dons del'Esprit,dans lamission,dans la rcon-

    44. W .

    K A S P E R L g l i s e . , , ,

    dt a.

    20 , p 26.

    45. C f.

    E.

    C O R E C C O

    La

    rception...,

    ctt

    a

    42, p .

    361-365.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    7/19

    L'GLISE C O M M E

    C O M M U N I O N 167

    ciliation et dans

    le

    ministre. L'Esprit du

    Seigneur

    ressuscite en

    est l'oprateur. C'est par lui que l'Eglise universelle est cathol ique:

    elle intgre la diversit et la pluriformit qui font

    partie de

    son

    essence.

    Sur

    le

    plan

    historique

    et

    gographique,

    elle

    porte

    son

    achvement laprire de Jn 17 . Aussi

    fait-on

    mmoire,

    dans lagrande

    prire eucharistique, des saints du

    pass

    ainsi

    que de

    l'ensemble

    des

    voques qui reprsentent toutes les Eglises locales existantes hic

    et

    nunc.

    b.

    La

    communion

    universelle

    des Eglises

    locales

    se

    manifeste

    dans

    la communion

    de leurs

    ministres, les

    vques.

    Leur c o m m u -

    nion

    trouve son

    fondement

    dans

    le

    lien

    qui

    les rat tache aux

    Eglises

    apostoliques et leurs chefs, les Aptres.

    Sur

    la toile de fond

    de

    l 'ecclsiologie

    de communion, Vatican

    II a

    soulign

    la

    collgialit

    piscopale. Tous

    ensemble, les

    vques

    formentun

    collge que l'Esprit

    enracine

    dans le collge

    des

    Aptres,

    institu une

    fois

    pour

    toutes

    et unique tmoin de la foi (LG, 22). Ce qui

    signifie

    non seulement

    qu'ils doivent tre unis dans

    la

    foi, la

    charit,

    la mission et la

    rconciliation, maisqu'ilsparticipent simultanment

    la mme

    res-

    ponsabilit et au mme service l'gard

    de l'Eglise. Vu que

    l'Eglise

    universelle (c'est--dire

    catholique) se

    ralise dans l'Eglise locale, l'v-

    que

    ne peut

    sparer

    sa charge pastorale

    envers

    son Eglise locale

    de celle qu'il assume envers l'Eglise universelle. En

    vertu

    de son

    ordination piscopale, il

    exerce

    la

    charge

    pastorale, particulire et

    immdiate,

    envers

    son

    Eglise

    particulire (CD, Sa.llb),

    mais, en

    t ant

    que membre

    du

    collge piscopal,

    il a

    en

    mme temps pour

    devoir de tmoigner d'une

    relle

    sollicitude l'gard de l'Eglise

    entire

    (LG, 23b). Il doit porter ce souci en communion avec tous

    les

    vques

    qui hic

    et

    nunc assument la responsabilit des Eglises

    locales ainsi

    qu'en

    communion avec les

    vques

    du pass qui ont

    transmis la tradition

    apostolique

    vivante.

    Vu que cette

    communion

    (et

    donc la collgialit)

    se

    fonde sur

    le

    sacrement, elle

    confre

    un

    droit objectif antrieur

    toute rglementation institutionnelle ou

    touteordonnancejuridique. L e souci de l'Eglise universelle,l'Esprit

    le

    confie la communia ep iscoporum,

    sous

    laprsidence de l'vque

    de

    Rome.

    La

    pratique

    conciliaire est

    l'expression,

    laforme

    tradition-

    nelle de cette

    communion.

    L'institution du synode des vques

    lui

    donne une forme actuelle et partielle. Selon Vatican

    II,

    la

    commu-

    nion ministrielle des vques

    n'a

    pas seulement une

    base ontologi-

    que et sacramentelle, mais

    elle

    possde aussi

    une

    dimension

    institu-

    tionnelle

    et

    hira rch i ue:

    C est

    en

    vertu

    de

    la

    conscration

    sacra-

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    8/19

    L'GLISE

    C O M M E COMMUNION

    69

    L e pape est

    avant

    tout

    vque

    de

    Rome,

    le premier des voques,

    parce

    que

    son Eglise locale a une origine plus

    puissante ;

    son

    autorit universelle dcoule de

    ce fait, et

    non

    l'inverse. L'lection

    du pape

    n'a

    jamais

    t

    considre

    comme

    un

    sacrement;

    le

    fonde-

    ment

    sacramentel de la fonction

    ptrinienne,

    c'est la

    conscration

    piscopale

    de l'lu

    au

    sige de Rome.

    La

    charge de

    l'vque

    de Rome

    l'gard des Eglises va

    de

    pair

    avec la

    place particulire qu'occupe son

    Eglise. Pour

    que

    l'pisco-

    pat lui-mme

    ft

    un et indivis, il (le Christ)

    a

    mis saint Pierre

    latte desautres aptres, instituant,dans sapersonne,un principe

    et fondement

    perptuels

    et visibles d'unit

    de

    foi et de commu-

    n i o n (Z.G,

    18b).

    L a responsabilit propre de l'vque de Rome

    est donc

    de promouvoir

    et de

    maintenir

    la communion

    universelle

    des

    vques

    et

    de

    leurs Eglises; elle

    consiste avant

    tout

    veiller

    l'authenticit du tmoignage

    de foi.

    En vertu

    de

    sa

    charge de

    veilleur et de vigie, il interpelle

    les Eglises au

    niveau

    de la vrit,

    de

    la

    foi apostolique,dont lesAptres Pierre et Paul ont

    tmoign.

    Ceci est

    essentiel sa

    mission face

    l'Eglise

    universelle

    et s'accorde

    bien

    avec

    le

    lien

    troit que le Nouveau

    Testament

    tablit entre

    le service ptrinien et la

    confession

    (par le martyre)

    (cf.

    M t 16,

    13-20; Le 22,

    33;

    Jn

    21 ,

    15-19).

    Les

    dfinitions

    dogmatiques

    de

    Vatican 1touchant

    la

    primaut de juridiction

    immdiate,

    ordinaire

    et

    piscopalequi

    revient l'vque

    deRome

    et touchant l'infaillibi-

    lit de

    son

    magistre viennent

    concrtiser

    ce point essentiel.

    Ainsi,

    situe

    dans la prminence

    de

    l'Eglise de

    Rome,

    la

    primaut de

    l 'vque qui occupe

    ce

    sige apparat effectivementcommeune charge

    piscopale.

    Elle

    repose, en effet, sur la

    conscration

    piscopale.

    Elle

    suppose aussi l'octroi dupouvoir piscopal ncessairepour l'exercer.

    La dfinition dogmatique de Vatican 1

    concernant la

    primaut

    de juridict ion immdiate

    du pape

    sur

    l'Eglise

    entire

    a souvent

    tort conduit

    une conception monarchique de l'Eglise, qui

    isolait

    le

    pape des autres

    vques

    et

    rduisait

    ceux-ci un corps

    de vicaires

    apostoliques,

    fonctionnaires ou dlgus du

    pape.

    L'eccl-

    siologie de

    communion

    permet decorriger cette faon devoir erro-

    ne.

    La

    charge de

    l'vque

    de Rome doit tre replace

    l'intrieur

    de l'ensemble du collge piscopal, et non pas au-dessus ou en

    dehors.

    Son pouvoir ne peut se comprendre qu'en relation avec celui du

    collgepiscopal, bien

    qu'il

    failledistinguer l'un del'autre. L epape,

    il

    est vrai, est

    le

    chef du

    collge

    piscopal et les

    vques

    sont

    en

    communion

    hirarchique

    avec

    lui.

    Mais

    la

    vritable

    communion

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    9/19

    170 A . D E N A U X

    suppose unecertaine galit et autonomie desmembres. Les

    vques

    ne se

    trouvent donc

    pas

    sous la tutelle

    de l'vque de Rome, pas

    plus

    qu'ils

    ne sont purement

    et

    simplement dpendants de lui.

    Le

    pouvoir

    de

    la

    primaut

    n'est

    pas une

    force

    d'absorption.

    Pas

    plus

    qu'elle n'est

    la

    source de

    la

    puissance

    du

    collge. La reconnaissance

    de la sacramental i t du

    ministre

    piscopal en LG,

    21

    le montre

    clairement.

    La

    primautdu

    pape

    ne

    secomprend donc

    dans

    sa

    signi-

    fication

    exacte

    que situe l'intrieur de la communia ecclesiarum

    et ep iscoporum.

    Tout

    cequi a trait l'organisation

    et

    la

    centralisa-

    tion de l'administration

    autour

    de

    ce

    plen'appartient pas l'essence

    de

    la

    fonction

    primatiale,

    si

    utile

    et

    si

    ncessaire

    mme que ce

    soit.

    En soulignant le pouvoir

    universel du

    collge

    piscopal

    (LG, 22),

    Vatican II a tir

    de

    son

    isolement

    et relativis le primat universel

    de l'vque de Rome, c'est--dire qu'il l'a mis en relation avec la

    communiaministeriorum des vques,

    sans toutefois altrer en

    quoi

    que

    ce

    soit

    le

    caractre

    propre

    de

    la

    primaut du

    pape. Ainsi

    se

    trouvertabli,mme sur leplan de

    la

    structure

    ministrielle,

    l'qui-

    libre entre

    la dimension personnelle

    et la

    dimension synodale.

    Ici

    encore,

    on retrouve le modle trinitaire de

    l'uni t

    dans la diversit.

    Cet te

    structure

    elliptique ple papal et

    ple piscopal

    est

    de

    droit

    divin.Cette

    unitbi-polaire

    est le fondement de la

    commu-

    nion

    de

    l'Eglise.

    La

    communion,

    lien

    l'vque

    et

    lien

    avec

    le

    successeur

    de Pierre,

    est ainsi unit

    dans la catholicit et catholicit

    dans l 'uni t

    4 9

    . En principe, dans l'Eglise universelle,

    un conflit

    fondamenta l

    entre l'autorit du pape

    et

    celle

    des vques

    est

    exclu,

    puisque l'vque de Rome

    fait

    partie

    du

    collge

    piscopal en

    tant

    qu'il en est le chef. Pourtant le Concile

    n'a

    pas indiqu

    avec

    suffi-

    samment

    de

    clart

    comment

    s'allient

    ces

    deux formes

    de

    service,

    ou

    comment lepouvoir

    du

    collge

    piscopal

    relativise

    effectivement

    celui

    du pape

    et

    le garde de s'exercer de faon

    trop

    monarchique.

    Le Concile limite

    la

    collgialit, entendue au sens strict du mot,

    la

    pratique conciliaire ou au magistre extraordinaire des vques

    rpandus de

    par

    le monde. Dans les faits, cet exercice n'apparat

    que

    rarement

    Tous

    les

    vques

    n'assument

    pas

    avec

    suffisamment

    d'autonomie

    la charge

    (et

    le droit) qui

    leur

    revient en

    vertu de

    leurconscration,

    l'gard et deleur Eglise

    particulire

    et de l'Eglise

    universelle. Cela soit cause d'une habitude profondment

    ancre,

    celle devouloir

    obtenir

    l'approbation

    romaine

    pour

    toutes les

    dci-

    sions

    importantes, soit

    du fait

    que les instances de la curie s'arro-

    49.

    W . K A S P E R

    L glise.. .,

    cit n. 20, p. 26.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    10/19

    L'GLISE CO M M E

    COMMU NION 171

    gent parfois les

    droits

    des vques. Ajoutons

    que

    les derniers papes

    ont visiblement et avec dynamisme exprim

    la

    primaut de juridic-

    tion immdiate:

    les

    voyages

    pastorauxdu pape,

    auxquels

    les

    mdias

    ont

    fait

    largement cho,

    en

    sont

    un

    exemple. Ces

    faits

    amnent

    certains

    observateurs

    craindre

    tort ou

    raison que

    l'image

    pyramidale

    et monarchique de l'Eglise, image

    laquelle

    bien

    des

    fidlesrendent

    encore

    spontanment hommage, en soit

    tout

    simple-

    ment renforce.

    Cela irait

    l'encontre

    des

    intentions de Vatican

    II

    et jetterait une

    ombre

    sur la structure communionnelle de l'Eglise.

    6.

    Formation

    de groupes d Eglises locales

    la

    lumire du modle

    de communion

    En

    reconnaissant la

    sacramentalit

    du ministre

    piscopal,

    Vatican 13

    a

    renforc la place et

    l'autorit

    de

    l'vque

    l'intrieur de l'Eglise

    locale

    en

    mme

    tempsqu'il

    a m is

    en lumire

    la

    dimension

    commu-

    nautaire

    de

    l'autorit ecclsiale

    suprme.

    La

    structure piscopale de

    l'Eglise

    particulire et la dimension synodale

    du

    service

    ecclsial

    suprme

    (le collge

    des vques) possdent

    un statut thologique,

    sacramente l :

    elle

    font

    partie

    de

    la

    structure

    essentielle

    de l'Eglise,

    elles

    sont de

    iure

    divino.

    Par ailleurs, le

    Concile a

    reconnu

    l'opportunit et la

    ncessit

    de

    grouper des Eglisesparticulires

    enprovinces

    et rgions

    ecclsias-

    tiques. Ces

    groupes

    d'Eglises

    particulires

    exercent

    leur

    activit

    t ravers des organismes permanents

    (par exemple,

    les

    confrences

    piscopales

    nationales ou rgionales) ou

    temporaires

    (par exemple,

    les synodes ou conciles particuliers)

    (LG,

    23;

    CD,

    36-41;

    C/C,

    431-459). Depuis

    le

    Concile, les confrences

    piscopales

    ont pris

    une

    place

    de plus

    en

    plus grande

    dans

    la vie

    de l'Eglise.

    A l'chelle

    des

    continents

    se

    sont

    galement dveloppes

    des

    formes

    de

    collabo-

    ration

    entre

    diffrentes

    confrences.

    En

    tmoignent

    la naissance du

    Conseilpiscopal latino-amricain (CELAM), le Symposium

    des

    Con-

    frences

    piscopales

    d'Afr ique et de Madagascar (SCEAM), la Fd-

    ration des Confrences

    piscopales

    d'Asie

    (FABC) et le

    Conseil

    desConfrences piscopales europennes(CCEE).Cenouveau

    dve-

    loppement

    a

    conduit

    un approfondissement

    de

    la

    conscience

    de

    la catholicit et

    de

    la structure

    communionnelle

    de

    l'Eglise.

    De

    nos jours, l'universelle

    communia

    ecclesiarum nes'exprime plus exclu-

    sivement

    par des

    dcrets

    provenant

    de

    l'autorit centrale,

    mais aussi

    par

    le

    tmoignage de groupes

    d'Eglises

    locales.

    Personne

    aujourd'hui

    ne

    conteste plus

    l'utilit

    et

    la

    ncessit pastora-

    les

    des

    confrences oiscoDles.cas

    olus

    aue celle de

    leurs

    associations

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    11/19

    172 A .

    D E N A U X

    l'chelle

    descontinents. Mais

    quel

    statut

    thologique

    faut-il

    recon-

    natre ces niveaux intermdiaires

    entre

    l'Egliseparticulire et l'Eglise

    universel le?D'aucuns inclinent voir ici une expression de

    la

    coll-

    gialit.

    Les

    confrences

    piscopales

    et

    leurs

    groupements

    continen-

    taux sont alors considrs

    comme des

    instances

    collgiales.

    Cepen-

    dant

    le Concile limite

    la

    notion de collgialit au collge piscopal

    dans

    son

    ensemble (Z-G, 22-23; CD, 4-6).

    La collgialit piscopale appartient la structure

    mme de l'Eglise

    reue du

    Christ

    (iure divino).

    Par contre, des

    institutions telles que

    les

    Confrences

    piscopales (et leurs groupements continentaux) rel-

    vent

    de

    l'organisation

    ou

    de

    la

    figure

    concrte

    de

    l'Eglise

    (iure

    e c c l e -

    siastico); l'emploi leur sujet des termes collge, collgialit,

    collgial, ne

    peut

    donc relever que

    d'un

    sens analogique, thologi-

    quement

    impropre

    5 0

    .

    Lanotion de

    collgialit

    ne semble

    donc

    pas offrir l'angled'approche

    adquat de

    la

    question du statut

    thologique

    des confrences

    pisco-

    pales.

    A

    l'oppos,

    d'autres

    dnient

    toute

    base

    thologique

    aux con-

    frences piscopales et leurs groupements. C'est dans ce

    sens

    que

    s'est

    exprim,parexemple, le

    Cardinal

    J.Ratzinger dans l'interview

    accorde Vittorio Messori: Nous ne devons pas oublier que

    les

    confrences piscopales

    n'ont

    pas de base

    thologique,

    elles ne

    font pas

    partie

    de

    la

    structure irrfragable de

    l'Eglise

    telle que l'a

    voulue

    le

    Christ:

    elles

    n'ont

    qu'une

    fonction prat ique

    et

    concrte

    5 1

    .

    Le Cardinal

    et

    d'autres

    encore estiment

    que ce serait

    lser la

    responsabilit

    inalinable

    de

    la personne

    de

    l'vque que

    de

    donner

    aux confrences

    piscopales

    un

    statut

    thologique.

    Le Synode extraordinaire a adopt un point de

    vue

    mitig, en

    formulant

    le

    souhait

    qu'on

    tude

    le

    status

    thologique

    des

    confren-

    ces piscopales, en particulier

    la

    question

    de

    leur autoritdoctrinale

    {Rapport

    final,

    II, B , 8). Le modle de

    communion

    nous parat

    offrir

    maintenant

    une voie

    intressante

    pour tudier

    le statut

    tho-

    logique des confrences piscopales. Car

    la

    structure communion-

    nelle de l'Eglise

    dtermine galement et

    de manire

    essentielle

    sa

    structure

    ministrielle. Cela

    est

    dj

    apparu clairement

    au

    niveau

    de l'Eglise particulire (vque et presbyterium)

    et

    de

    l'Eglise

    uni-

    verselle (pape et collge piscopal).Pourquoi les confrences

    pisco-

    50.

    Commission

    thologique internationale,

    L E g l is e d a n s

    le

    monde,

    dans D o c .

    Cath. 83 (1986) 65.

    51. Card. J. R A T Z I N G E R V.

    M E S S O R I ,

    Entretien s u r l a foi, Paris, 1985,

    p.

    67.

    Voir

    les

    rflexions

    critiques de

    G.

    THILS

    ce

    propos

    dans

    En

    d ia logue

    avec

    l

    Entretien s u r l a o i , Louvain-la-Neuve, 1 9 8 6 , .61-72.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    12/19

    L'GLISE C O M M E C O M M U N I O N 173

    pales et les associations qu'elles forment

    entre

    elles ne pourraient-

    elles

    pas tre

    u ne expression

    de la ralit thologique de la

    commu-

    nio ministeriorum

    ? Peut-on srieusement soutenir que

    je donne

    quelques

    exemples

    les

    dclarations du

    CELAM

    Medel l n et

    Puebla,

    les

    dclarations

    des voques du

    Zare sur

    Notre foi en

    Jsus-Christ (1975), celles

    des vques

    brsiliens

    sur

    les droits

    de

    l'homme, et

    celles

    des vques

    amricains

    sur

    la

    paix

    et la

    justice

    sociale n'ont qu'une

    signification

    prat ique et concrte et

    ne

    sont

    pas l'expression de

    l'autorit doctrinale

    exercedans

    la

    communion

    d'un

    groupe

    d'vques? Lesdclarations degroupesimportants d'v-

    ques sont

    une

    manire d'exercer l'autorit doctrinale q ui

    revient

    aux vques de

    par

    leur conscration

    piscopale.

    En consquence,

    ces

    dclarations sont elles aussi pourvues d'un sens thologique,

    condition qu'elles

    soient

    nonces

    en communion

    avec les autres

    membres

    du collge piscopal et

    avec

    leur chef

    5 2

    .

    La

    structure communionnelle

    de

    la

    charge

    des

    vques

    ne

    se limite

    donc

    pas

    la

    collgialit

    au sens strict. La

    difficult de reconnatre

    aux institutions

    des

    provinces ecclsiastiques et

    des

    rgions

    conti-

    nentales

    un

    statut thologique et ecclsial

    provient

    peut-tre

    du

    fait

    que l'on

    ne

    peroit pas suffisamment

    bien

    le lien

    entre

    la structure

    communionnelle et

    la catholicit de

    l'Eglise. La

    catholicit

    de la

    communion

    ecclsiale

    postule que

    la

    diversit

    rgionale,

    culturelle

    et

    gographique soit intgre

    dans la

    figure visible

    de l'Eglise et

    trouve

    s'y exprimer. La naissance et la reconnaissance des cinq

    grandspatriarcats deJrusalem,Antioche,Alexandrie,Constantino-

    ple et

    Rome, au

    cours

    des

    cinq premiers sicles de l'histoire de

    l'Eglise, en

    sont

    un signe

    loquent.

    Cette pentarchie a t parfois

    une

    source

    de

    tensions,

    d'esprit

    de

    conservatisme

    et de

    particula-

    risme, c'est vrai; mais la reconnaissance

    rciproque des

    rites,

    de

    la discipline et de

    la

    thologie

    propres

    chacun

    des

    patriarcats

    n'a pas entam la communion universelle de

    la

    foi et de la

    charit

    53

    . Il est hors de doute que

    le

    dveloppement de la pri-

    maut

    du sigepiscopalromain a t

    ncessairepour

    garantir l'unit

    profonde des

    cinq

    patriarcats. On

    peut se

    demander si cette forme

    concrte de

    pentarchie, qui,

    dans les premiers

    sicles, a exprim

    remarquablement

    l'unit

    dans la

    diversit,

    est jamais rvolue. Le

    modle de socit, trop

    rigide

    dans le patriarcat de

    Rome (l'Eglise

    52. Dans le mme sens va

    galement W.

    K.ASPER, D er

    theologische Status

    der

    Bischofskonferenzen, dans

    Theol .

    Quart. 167 (1987) 1-6.

    53. Voir

    ce

    sujet H.J. URBAIN

    &

    H. W A G N E R , Handbuch d er kumenik,

    1 Paderborn 1985 .

    101-110.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    13/19

    174

    A . D E N A U X

    latine), n'a-t-il pas empche une

    volution

    semblable l'intrieur

    de

    son

    terri toire?

    Est-il impensable qu'

    l'intrieur

    du

    patriarcat

    de Rome,

    en

    tenant compte des situations historiques, culturelles

    et

    gographiques,

    on

    puisse

    accorder

    aux

    rgions

    ecclsiastiques

    de

    l'Amrique du Nord, de l'Amrique latine, d'Europe, d'Afrique

    etd'Extrme-Orient une autonomieplus

    grande

    oumme une forme

    d'autocphalie

    ?

    Et

    ne

    serait-ce

    pas

    au

    profit de

    la catholicit

    de

    la communion

    ecclsiale

    54

    ?

    Mais cette proposition

    anticipe

    peut-tre trop

    sur

    l'avenir. Du

    Rappor t final du Synode

    extraordinaire, il

    semble se

    dgager

    que

    les

    vques prsents ont

    voulu

    faire

    un

    premier pas

    pour raliser

    leur dsir lgitime d'une

    plus

    grande autonomie face

    l'autorit

    centrale:

    le

    Synode recommande d'tudier l'application du principe

    de subsidiarit dans l'Eglise elle-mme (II, C, 8). Il s'agit

    d'un

    prin-

    cipe emprunt

    la

    philosophie du droit social, suivant lequel

    ainsi

    s'exprime l'Encyclique

    Quadragesimo

    anno

    (15.5.1931)

    l'Etat

    doit

    assigner

    aux particuliers et aux institutions

    intermdiaires

    les

    fonctionsqu'eux-mmespeuvent remplir et leurprocurer

    les

    moyens

    dont ils peuvent se servir.

    C'est

    face aux

    tats

    totalitaires

    qu'on

    voulait,

    en

    cette matire, assurer le rle et la

    place

    de groupes

    intermdiaires et,

    surtout, les droits de la personne humaine. Vati-

    can

    II

    fait,

    en

    quelques endroits, rfrence

    au

    principe

    de

    subsidia-

    rit

    (GE, 3 et

    6;

    GS,

    86c).

    La question

    est de

    savoir

    si

    l'on

    peut

    appliquer galement ceprincipe aux rapports

    l'intrieur de l'Eglise,

    dans

    le

    but degarantir l'autonomie institutionnellepropre aux

    v-

    ques, aux

    glises

    locales, aux confrences piscopales, aux lacs et

    leurs associations.

    Le

    Synode de

    1967,

    qui

    a tabli les

    principes

    pour

    la

    rvision

    du

    Droit

    canon,

    a

    reconnu,

    presque

    l 'unanimit ,

    que

    le

    principe

    de

    subsidiarit tait applicable a . l'Eglise et devait

    trouver, dans

    la nouvelle

    lgislation,

    la

    place

    qui

    lui

    revient

    55

    .

    Pourtant,

    il

    y

    a,

    selon certains, de l'imprudence

    appliquer

    le

    prin-

    cipe de subsidiarit aux rapports

    l'intrieur de l'Eglise.

    Car,

    ce

    faisant, ne retombe-t-on pas dans le

    modle

    de socit? On donne

    l'impression

    que

    le

    caractre

    de

    socit de l'Eglise

    est

    l'origine

    54. Cf.

    J. RATZINGER,

    Le

    nouveau peuple

    de Dieu, Paris ,

    1971,

    p.

    68-69; Y .

    .CONGAR,

    Le

    Pape c omme

    patriarche d Occident ,

    dans Istina 28 (1984) 390;

    G.

    THILS, Le ministre

    des

    Successeurs

    de

    Pierre

    et l e

    service

    de l unit universelle,

    dans RThL 17

    (1986)

    61-68, spcialement p. 67-68.

    55. Cf. De Bisschoppensynode (2), dans Katholtek Archief

    (1967)

    1087-1108,

    spcialement

    1103,

    1242;

    G.

    THILS,

    Vingt

    ans

    aprs

    Vatican

    I I ,

    dans

    NR

    T

    107

    (1985)

    22-42; p. 29-30; l'A. fait rfrence

    l'accord du

    Cardinal J. Dani lou.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    14/19

    L'GLISE C O M M E COMMUNION

    175

    de son ordonnance

    juridique

    5 6

    .

    Il nous parat plus fructueux de

    fonder le but poursuivi, c'est--dire

    l'autonomie

    des Eglises locales

    et

    des

    confrences piscopales,

    sur

    un donn thologique:

    la

    struc-

    ture

    essentielle

    l'Eglise,

    celle

    de

    la

    communion.

    Si

    l'on

    prend

    pleinement au srieux le principe thologique selon lequel l'Eglise

    est une

    communia ecclesiarum,

    on y trouvera rassembles toutes

    les garanties

    ncessaires

    l'autonomie des Eglises locales et

    leurs

    groupements face

    au

    pouvoir central.

    En

    ce

    domaine encore,

    la

    rception

    de Vatican II est

    loin

    d'tre

    acheve.

    7. La tache de

    l oecumnisme:

    tendre

    vers la

    plena communia

    7

    D'un

    point de

    vue

    historique

    et sociologique,

    on doit constater

    que l'Eglise de

    Dieu

    est

    divise.

    L'loignement des Eglisesorientales

    de

    l'Eglise

    d'Occident

    et ensuite, depuis la Rforme, les sparations

    l'intrieur

    de l'Eglise

    d'Occident ont

    eu

    pour consquence que

    certaines Eglises ne vivent plus en

    pleine

    communion (plena com-

    munio -

    UR, 3)

    avec

    le sige

    piscopal de Rome et que d'autres

    ont

    mme

    rompu avec la

    tradition apostolique

    sur

    des

    points

    qui,

    jusqu'alors, passaient pour essentiels. Les liens fraternels ont t

    tranchs.

    La communion eucharistique a

    t brise.

    La visibilit

    de

    la communion universelle

    de l'Eglise

    du Christ

    est

    manifeste-

    m e n t rduite. L'ecclsiologie se trouve ici devant un paradoxe.

    Il

    semble

    qu'uneopposition

    existe

    entre

    la

    division

    de

    fait

    (un

    donn

    de

    l'exprience) et l'unit essentielle

    de

    l'Eglise du Christ (un donn

    de

    foi). Si l'on reconnat tout

    fait

    la division historique et

    visible

    des Eglises, on

    parat

    nier qu'il n'y

    ait qu'un seul

    Corps du Christ

    (Corps ecclsial),

    ralit eschatologique

    qui, envertu de

    lapromesse

    de

    l'assistance divine (M t 28, 20), subsistera au milieu des

    vicissitu-

    des de

    l'histoire.Symtriquement,

    si

    l'on

    tient

    l'unit indfectible

    de

    l'Eglise du Christ, on est comme

    forc

    d'estomper la

    division

    relle

    des Eglises.

    La tradition protestante a tendance rsoudre la question par

    une approchedualiste.

    Leparadoxe

    entre unit et division se rsout

    56. Cf. E . CORECCO, L a rception.. ., cite n.42, p. 343;

    Ph.

    DELHAYE,

    C lair-

    voyance d u Synode 1985,

    dans Esprit

    et V ie 97 (1987)

    73-74;

    J. BEYER, Principe

    de

    subsidiarit

    ou

    juste autonomie dans l Eglise, dans

    NR

    T 108 (1986)

    801-892,

    est

    galement

    oppos l'application du principe

    de

    subsidiarit

    l'Eglise, mais,

    m on avis, il fonde

    trop peu sur l 'ecclsiologie

    de

    c o m m u n i on la

    notion alterna-

    tive

    de

    jus te

    a u t o n o m i e .

    57. Cf.

    A. DULLES,

    T h

    C h u r c h , th

    C h u r c h e s

    and th

    Catholic

    C h u r c h

    dans

    T h

    Du b l in

    P sp e n o n

    E c u m e m s m ,

    dit. P.S.

    D -

    A C H U T F . G U I

    Manila,

    1972;

    p. 118-161; J .M.R . T I L L A R D

    L g l is e

    de

    Dieu. . . ,

    c i t t

    a

    22 ,

    p. 465-468.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    15/19

    76 A . D E N A U X

    en distinguant l'Eglise visible et l'Eglise invisible, ou

    la commu-

    naut

    spirituelle

    et

    les

    institutions ecclsiales historiques. L'unit

    est

    placer dans

    la

    communaut

    spirituelle;

    la division,par contre,

    se

    situe

    au

    niveau

    institutionnel,

    historique

    et

    ne

    blesse

    pas

    l'unit

    essentielle de l'Eglise invisible

    du

    Christ. Mais cette dichotomie

    revient finalement nier

    que l'unique

    Eglise du

    Christ soit gale-

    ment,dans son essence, une ralit historique et visible. Sansdoute

    l'unique glisedu

    Christ possde-t-elle

    une

    dimension visible

    et

    une

    autre,

    invisible;

    les

    deux

    ne

    concident pas

    tout

    fai t ;

    cependant

    l ' assemble

    discernable

    aux

    yeux

    et

    la

    communaut spirituelle...

    constituent,

    au

    contraire,

    uneseuleralit complexefaited'un

    double

    lment humain et divin (Z.G, 8a). L a variante eschatologique de

    cette vue,

    selon

    laquelle

    la vritable

    Eglise du

    Christ

    existe plutt

    en esprance et en

    promesse

    qu'en une

    ralisation actuelle

    et selon

    laquelle

    aucune Eglise

    historique

    ne peut prtendre

    tre

    la

    vritable

    Eglise

    du Christ,mconnat

    la

    dimension essentiellement

    eschatolo-

    gique de

    l'Eglisehistorique du

    Christ.

    Car,

    en l'Homme-Dieu

    Jsus-

    Christ,

    l'eschatologie

    est entredans

    l'histoire.

    Ceci

    vaut

    galement,

    de

    manire

    analogique,

    pour le

    Corps

    ecclsial

    du Christ:son unit

    essentielle

    nepeut

    tre rduite par

    le

    pch

    de

    la

    division

    des hom-

    mes.

    Autrement, on

    ramne

    le

    statut eschatologique de l'Eglise au

    statut provisoire du Peuple

    de Dieu de l'Ancien

    Testament.

    La

    tradition

    anglicane aplutt

    dfendu

    cequ'on appelle la Branch-

    theory:l'Eglise

    catholique existe, dansson actualithistorique,comme

    un arbre

    trois

    branches, la

    branche catholique,

    la

    branche ortho-

    doxe et

    la

    branche

    anglicane.

    On nepeut

    nier la

    force de suggestion

    de

    cette

    image. Cependant il faut

    se demander si

    cette

    mtaphore

    peut rendre suffisamment

    compte

    de l'unit essentielle de l'Eglise

    du

    Christ

    et

    surtout

    si,

    en

    l'utilisant, on

    ne voile pas

    le

    scandale

    de

    la

    division.

    Il y

    a

    peu de temps

    encore,

    la tradition

    catholique

    se posait en

    partisan d'une approche substantialiste du problme: la vritable

    Eglise

    du

    Christ

    existe qttoad

    substantiam

    dans une

    Eglise

    histori-

    que bien dfinie,

    en

    l'occurrence

    l'Eglise

    catholique

    romaine. Cette

    opinion

    prend,

    d'unepart, une forme exclusive: la vritable Eglise

    du Christ est identique

    une certaine dnomination, la catholique

    romaine.

    Ce qui implique

    que

    toutes les autres c o m m u na u t s

    chr-

    tiennes

    ne

    sont

    pas de vraies Eglises

    au

    sens thologique strict du

    mot.

    Si

    nous

    traduisons

    cette

    affirmation

    en termes d'ecclsiologie

    de

    communion,

    cela

    revient

    dire

    que l'glise

    a

    disparu,

    sauf

    dans

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    16/19

    L'GLISE

    COMME COMMUNION 77

    cette

    partie

    qui est reste en continuit

    avec

    le tronc primitif .

    A

    cette

    faon de

    voir

    correspond

    l'cumnisme du retour: les com-

    munauts

    spares ne peuvent redevenir Eglise

    que

    si elles retour-

    nent

    au

    vrai

    bercail du

    Christ,

    c'est--dire

    l'Eglise

    romaine. D'autre

    pan, cette

    conception prend

    aussi une

    forme inclusive:

    bien que

    la

    vritable

    Eglise du Christ

    n'existe

    compltement et parfaitement

    que dans une Eglise,

    elle

    existe aussi

    imparfaitement ou

    par

    mode

    de participation dansd'autres dnominations ecclsiales, dans la mesure

    o celles-ci possdent encore des

    vestigia ecclesiae

    ou, pour le dire

    avec

    un peu plus

    d'irnisme,

    des

    lments de

    la

    vritable

    Eglise.

    Cette vue catholique classique affirme dans son

    intgralit le carac-

    tre essentiellement historique

    et

    visible

    de l'unit eschatologique

    de

    l'Eglise du

    Christ,c'est

    indniable. Mais il estpar ailleursvident

    qu'elle ne tient pas compte, et certainement

    pas dans

    sa forme

    exclusive, de

    la

    ralit

    ecclsiale des

    autres confessions chrtiennes.

    L'ecclsiologie de

    communion

    offre

    la

    possibilit

    de

    prsenter

    de

    faon plus

    mesure

    le paradoxe de l'unit essentielle

    et

    de la divi-

    sion de fait.

    Vatican

    II affirme

    dans

    Lumen gentium

    que

    l'unique

    Eglise du Christ se

    trouve

    dans (subsistit

    in)

    l'Eglise

    catholique

    (Z.G,

    8b). Ce

    faisant,

    il vite dlibrment de dire que l'Eglise du

    Christ se

    trouve exclusivement dans l'Eglise catholique,

    et il recon-

    nat

    que

    l'unique

    Eglise

    du

    Christ

    se

    trouve

    galement

    mme

    si ce

    n'est pas entirement

    dans les

    Eglises qui

    ne

    vivent

    pas

    en pleine

    communion

    avec l'Eglise

    catholique.

    Le

    Concile

    aban-

    donne

    la

    vue

    substantialiste

    dans

    sa

    forme exclusive. Il

    s'appuie

    plutt

    sur sa variante inclusive

    qu'il

    dveloppe

    dans

    un sens plus

    positif,

    grce

    l'ecclsiologie

    de communion.

    Certes, la plnitude

    des

    moyens

    de

    grces

    que

    l'Esprit

    accorde

    l'Eglise

    se

    trouve

    dans

    l'ensemble des Eglises qui

    sont

    en

    communion avec

    le

    sige

    aposto-

    lique romain.Et sil'on se spare decette communion,on se

    spare

    ipso

    facto de certains

    de

    cesmoyens(srement du charisme de l'v-

    que de

    Rome).

    Toutefois,

    ceci

    n'implique pas que tous les liens

    de communion

    avec

    Dieu et

    les

    frres soient rompus.

    L e cur

    d'o

    l'Eglise

    tire

    sa

    vie,

    la

    communion

    invisible

    avec

    Dieu,

    est

    maintenue,

    mme

    si de

    nombreux

    liens fraternels

    sont

    briss.

    Le signe extrieur et l'instrument

    de

    ce lien

    de

    communion avec

    Dieu reste le

    baptme

    au

    nom

    du

    Dieu Trinit.

    Thologiquement

    la reconnaissance mutuelle du baptme par les

    diffrentes

    Eglises

    chrtiennes est une donne d'une importance extrme. Ce

    fait

    est

    indubitablement la

    nreuve

    lanlusnette ou'un lien f n n / i a m e n f a i nm.

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    17/19

    178 A .

    D E N A U X

    mun s'est

    conserv,

    un

    lien

    sacramentel et visible, entre

    les

    parties

    spares de l'Eglise

    de

    Dieu.D'une

    part, le

    baptme est

    une action

    de Dieu,

    par

    laquelle il

    incorpore l'homme

    dans le seul

    et

    unique

    Corps du

    Christ,

    et

    cela

    travers la confession laquelle le baptis

    appartiendra.

    D'autre part,

    le

    baptme

    est

    galement une action

    pose

    par l'homme qui, dans

    la

    foi, accepte l'Evangile de Dieu.

    Ce

    lien de

    la communion baptismale est

    donc

    tout ensemble un

    lien

    profond de

    la

    foi

    commune

    en Dieu, d'un amour commun

    envers

    Dieu, d'unevolont

    commune

    d'tre fidle l'Evangile. Sur

    la base

    de ce lien baptismal,

    d'autres

    liens aussi

    continuent

    d'exister

    :

    communion

    dans

    la

    saintet

    (la

    liste

    des

    saints

    est

    interconfession-

    nelle), dans

    la mission,

    dans l'engagement social, dans le service

    de

    la louange de

    Dieu. Certes,

    ces liens ne

    sont pas tous

    galement

    profonds. Mais ils existent.

    Et

    leur

    existence

    permet

    d'affirmer, en

    dpit du pch de

    ladivision,

    que

    l'unique

    Eglise deDieu continue

    d'exister (existit)

    l'intrieur

    de l'histoire

    des

    hommes. Le subsistit

    in

    de

    Lumen gentium

    autorise prcisment

    confrer

    sa

    valeur

    pleine

    cette existence

    de

    l'Eglise,

    mme en

    dehors des

    limites

    des Eglises qui

    sont en communion

    avec

    le sige apostolique.

    Au

    vrai, il n'y a,

    entre les diffrentes

    confessions

    chrtiennes,

    pas de

    communia p lena, mais une communion ecclsiale pourtant relle

    avec des composantes visibles et invisibles. Cette

    communion,

    qui

    dj

    existe,

    forme

    la

    trame,

    le

    tissu

    qui

    demeure

    et

    sur lequel

    il

    est toujours

    possible

    de rtablir l'unit

    plmre.

    Le

    rtablissement de laplena communia

    entre les

    confessions est

    le

    but particulier du mouvement

    cumnique.

    Ce

    fut

    le

    souhait

    formel des vques

    au

    cours du

    Synode

    extraordinaire Rome en

    1985: Nous dsirons

    ardemment

    que

    la

    communion

    incomplte

    qui existe

    dj

    avec

    les

    Eglises et les

    communauts non catholiques

    parvienne,

    avec la

    grce de Dieu,

    une

    pleine

    c o m m u n i o n (Rap-

    port

    final,II, B ,

    7).

    En

    fait,

    cause

    de leur

    division,

    les c o m m u n a u -

    ts chrtiennes

    ne

    possdent

    pas

    toutes l'ensemble

    des moyens

    de

    grces qu'elle

    devraient

    offrir

    leurs membres

    pour

    les

    aider

    parvenir

    au

    degr de

    communion

    que

    Dieu

    dsire.

    Il

    ne

    suffit

    pas

    que les Eglises

    se

    rconcilient extrieurement

    entre elles

    tout

    en

    restant simplement ce qu'elles sont. C'est

    l

    que rside

    l'ambigut

    de certainespratiques d'intercommunion. Une communaut eucha-

    ristique sans communaut de foi

    n'est qu'un

    simulacre. La tche

    des

    Eglises

    consiste

    ce

    qu'elles se donnent mutuellement

    ce dont

    elles

    ont

    besoin

    pour

    former

    ensemble

    l'Eglise que

    Dieu

    veut:

    celle

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    18/19

    L'GLISE CO M M E COMMUNION

    179

    qui

    vit, dans

    chacune des

    Eglises locales, la plnitude

    de

    l'Evangile.

    Aucune Eglise

    mme pas

    celle

    qui

    bnficie du subsistit

    in

    n'chappe cette ncessit de conversion l'gard des autres. Il

    s'agit

    d'une communion

    de

    repentance

    et

    de

    conversion.

    L'ecclsiologie de communion semble tre

    un

    chemin plein de

    promesses

    pour

    rechercher l'unit plnire

    des

    Eglises.

    Pour les Eglises

    orientales, cette ecclsiologie est, pourrait-on

    dire,

    connaturelle. Au

    II

    e

    Concile du Vatican, l'Eglise romaine

    a

    commenc

    reformuler

    la vision qu'elle a

    d'elle-mme

    travers

    le

    modle

    communionnel

    et, depuis

    lors,

    ses

    thologiens

    en

    ont

    pouss

    l'tude.

    Dans

    la

    tradi-

    tion rforme, la notion de koinnia gagne aussi du terrain

    58

    . Il

    nous semble

    que cette

    ecclsiologie de

    communion est la

    seule

    qui

    puisse, par-del les

    sicles

    de division,

    renouer avec

    l'poque

    o

    l 'Eglise n'tait pas divise. Sans

    doute,

    l'Eglise a toujours connu

    des schismes et des dchirures, mme aux temps

    apostoliques; mais

    elle

    ne

    s'en

    accommodait

    pas.

    Le

    scandale de

    certaines

    ecclsiologies

    de type juridique

    a t

    de donner bonne conscience

    un prix dri-

    soire. S'incliner

    devant

    la

    division

    actuelle et

    lui

    apporter

    un

    fonde-

    ment

    idologique necorrespond

    pas

    la

    volont

    du Christ.Recher-

    cher la communion plnire, la plena communie, c'est un devoir

    cumnique

    voulu par Dieu et

    qui

    concerne tous les chrtiens.

    Conclusion

    Ce qui prcde

    aura

    montr, nous l'esprons, la

    fcondit

    du

    modle de communion

    pour

    l'ecclsiologie. Ce

    modle a de

    solides

    racinesbibliques

    et

    patristiques,

    que

    les

    Eglises

    orientales

    ont

    entre-

    tenues jusqu' ce jour. Il permet d'intgrer d'autres images bibli-

    ques, spcialement

    celles du Corps du Christ

    et mme la notion

    dePeuple de D i eu ,tout enconservant ce que

    le

    modle de socit

    a

    de valable. Sa

    richesse

    spirituelle est

    grande

    du fait qu'il relie

    harmonieusement la dimension

    sacramentelle

    et la dimension mystique

    (communion

    avec

    Dieu)

    l'ecclsiologie.

    De

    plus,

    il

    ouvre

    d'intres-

    santesperspectives

    l'oecumnisme et fait progresser vers

    leur

    solu-

    tion les

    problmes internes

    de l'Eglise quis'yrelient. Enfin, il

    apporte

    une

    rponse au dsir

    de communion

    qui, depuis toujours,

    habi te

    l'homme,

    et

    il s'accorde son besoin

    de

    contacts interpersonnels

    et de participation active. Par

    ailleurs, un

    certain flou et u ne cer-

    taine ambigut

    restent

    attachs

    la

    notion

    de

    communion.

    Et c'est

  • 7/25/2019819-L'glise+comme+communion.+Rflexions+ +propos+du+Rapport+final+du+Synode+extraordinaire+de+1985+(suite)

    19/19

    180 A . D E N A U X

    ic i qu'il

    peut

    y

    avoir un danger,

    soit celui

    d'exploiter l'ide de

    communion

    ou

    d'en abuser au niveau de l'idologie

    pour

    voiler

    les problmes

    rels

    59

    ,

    soit de

    rduire

    le modle de communion

    au point de porter

    atteinte

    la riche complexit de la foi chr-

    tienne.

    Il s'agira donc d'accueillir

    la

    thologie de

    communion au

    sens

    plnier

    et

    spcifique

    qu'il a acquis dans la tradition vivante.

    C'est alors seulement que le modle de

    communion

    sera

    fcond

    pour l'avenir

    de

    l'Eglise

    de

    Dieu.

    B-

    8000

    Brugge Adelbert DENAUX

    Potterierei,

    72

    Prsident

    du

    Grand

    Sminaire

    Sommaire .

    Dans

    son

    Rappor t final, le Synodeextraordinaire de 1985

    a mis en lumire

    le

    modle ecclsiologique

    de

    c om m u n ion . L'article

    situe

    cette prise

    de

    position dans le cadre des changements

    qui

    se sont produits

    avant,

    pendant

    et

    aprs Vatican

    II. Aprs

    un

    bref

    aperu

    du

    modle pr-

    conciliaire (l'Eglise comme

    socit

    ^h irarchique

    parfaite),

    l'auteur

    pr-

    sente le t o ur na nt

    de

    Vatican

    II

    (l'Eglise comme P e u p l e

    de

    D i e u ) et

    la rception

    du Concile dans

    la vie de

    l'Eglise. La

    partie laplus labore

    de

    l'article donne une synthse du modle Eglise-communion dans ses

    diffrents

    aspects: communion avec

    Dieu par Jsus-Christ

    dans l'Esprit

    Saint, l'Eglise commecommunion eucharistique, l'Eglise particulire comme

    communion

    des

    fidles,

    la c om m u n ion

    universelle

    des Eglises locales

    la

    lumire

    du

    modle

    de

    communion,

    enfin

    la

    tche

    de

    l 'cumnisme:

    tendre vers

    la pleine communion.