article_rfsp_0035-2950_1991_num_41_2_394553

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Monsieur Philippe-Alain Blerald Théorie du marché politique et rationalité des politiques publiques In: Revue française de science politique, 41e année, n°2, 1991. pp. 235-263. Abstract The theory of political markets And the rationality of public policies The concept of political market seems increasingly fashionable among French political scientists. Its use — often a-critical — justifies a doser analysis of the varions éléments of a theory which purports to derive behavior and political rules from the model of the market economy. Treating political space as a market implies an analogical construction. It is necessary, in the first place, to explicate its postulates and hypotheses. In the second place, the neo-liberal paradigm inherent to the political market leads Public Choice theorists to deconstruct the foundations of the Welfare-State. In conclusion, there appears to be a logical incompatibility between the postulate of egoism and the very existence of public policies inherently redistributive or regulatory. Résumé La notion de marché politique semble de plus en plus en vogue chez les politistes français. Son usage, le plus souvent a-critique, justifie que l'on s'attache à analyser les tenants et aboutissants d'une théorie prétendant dériver les comportements et règles politiques de l'économie de marché. Traiter l'espace politique à l'instar de marché relève d'une construction par analogie. Il incombe, en premier lieu, d'en expliciter postulats et hypothèses. En second lieu, le paradigme néo-libéral immanent au marché politique conduit les adeptes du Choix public à déconstruire les fondements de l'Etat-providence. En conclusion, il apparaît une incompatibilité logique entre le postulat d'égoïsme et l'existence même des politiques publiques, par nature redistributrices ou régulatrices. Citer ce document / Cite this document : Blerald Philippe-Alain. Théorie du marché politique et rationalité des politiques publiques. In: Revue française de science politique, 41e année, n°2, 1991. pp. 235-263. doi : 10.3406/rfsp.1991.394553 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1991_num_41_2_394553

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  • Monsieur Philippe-Alain Blerald

    Thorie du march politique et rationalit des politiquespubliquesIn: Revue franaise de science politique, 41e anne, n2, 1991. pp. 235-263.

    AbstractThe theory of political marketsAnd the rationality of public policiesThe concept of political market seems increasingly fashionable among French political scientists. Its use often a-critical justifies a doser analysis of the varions lments of a theory which purports to derive behavior and political rules from the modelof the market economy. Treating political space as a market implies an analogical construction. It is necessary, in the first place,to explicate its postulates and hypotheses. In the second place, the neo-liberal paradigm inherent to the political market leadsPublic Choice theorists to deconstruct the foundations of the Welfare-State. In conclusion, there appears to be a logicalincompatibility between the postulate of egoism and the very existence of public policies inherently redistributive or regulatory.

    RsumLa notion de march politique semble de plus en plus en vogue chez les politistes franais. Son usage, le plus souvent a-critique,justifie que l'on s'attache analyser les tenants et aboutissants d'une thorie prtendant driver les comportements et rglespolitiques de l'conomie de march. Traiter l'espace politique l'instar de march relve d'une construction par analogie. Ilincombe, en premier lieu, d'en expliciter postulats et hypothses. En second lieu, le paradigme no-libral immanent au marchpolitique conduit les adeptes du Choix public dconstruire les fondements de l'Etat-providence. En conclusion, il apparat uneincompatibilit logique entre le postulat d'gosme et l'existence mme des politiques publiques, par nature redistributrices ourgulatrices.

    Citer ce document / Cite this document :

    Blerald Philippe-Alain. Thorie du march politique et rationalit des politiques publiques. In: Revue franaise de sciencepolitique, 41e anne, n2, 1991. pp. 235-263.

    doi : 10.3406/rfsp.1991.394553

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1991_num_41_2_394553

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_rfsp_2207http://dx.doi.org/10.3406/rfsp.1991.394553http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1991_num_41_2_394553
  • TH ORIE DU MARCH POLITIQUE ET RATIONALIT

    DES POLITIQUES PUBLIQUES

    PHILIPPE-ALAIN BL RALD

    LA

    thorie du march politique ambitionne expliquer le politique par conomique non pas sur le mode de la surdtermination marxiste mais en posant identit comportementale des individus dans les sphres politique et conomique Les politistes tenants de la problmatique du march apparaissent visiblement sduits par la coh rence par la rigueur par la formalisation somme toute par la scientificit de la thorie conomique no-classique Ne agit-il pas par ce dtour mthodologique riger le politique en science1 La thorie du march politique reprsente de ce fait un modle non pas simplement au sens ideel mais au sens pistmologique du terme2 Il convient par consquent de apprhender tel un instrument explicitation de la vie politique partir un ensemble plus ou moins formalis hypothses plus ou moins implicites et de concepts plus ou moins labors Quelles sont les hypothses et les relations constitutives de la thorie du march politique Les rares politistes fran ais avoir utilis la notion de march politique ont le plus souvent fait de manire a-critique sans avoir pralablement questionn ni les conditions ni la teneur une semblable thorie bref sans tre livrs une enqute sur les modalits de son epistemologie cet gard on ne peut tre frapp par le contraste qui se manifeste entre un ct abondance carrment stu pfiante de la littrature anglo-saxone prdominance nord-amricaine et de autre le quasi-mutisme des politistes fran ais sur la question3 Les attraits de la science conomique et des mathmatiques aux yeux des politistes sont synthtiss par C.B Macpherson Market concepts in political theory Canadian Journal of Economies and Political Science 27 4) novembre 1961 490-497 cf gale ment Adair That politics may be reduced to science Huntington Library Quarterly 20 1957 343-360 Tullock Towards mathematics of politics Ann Arbor University of Michigan Press 1967 R.R Pagen Some contributions of mathematical reasoning to the study of politics American Political Science Review 55 dcembre 1961 888-900 S.S Nilson Politometric models theorical note Political Studies 21 3) 1973 280-284 Modliser ainsi que affirme Jacques Attali est accepter de remplacer tude un phnomne concret par celle un objet constitu par sa dfinition dans Analyse conomique de la vie politique Paris PUF 1972 Parmi les rcentes publications en langue fran aise abordant le thme du march politique nous avons relev trois ouvrages le premier sous la direction de Gaxie Explication du vote Un bilan des tudes lectorales en France Paris Presses de la Fondation nationale des sciences politiques 1985 le second sous la codirection de Birnbaum et Leca Sur individualisme Paris Presses de la Fondation nationale des sciences politiques 1986 notamment les chap 11 et 12 respectivement rdigs par Lavau et Pizzorno le troisime est ouvrage de Offri Les partis politiques Paris PUF 1987 Mais ouvrage pionnier reste celui de Favre La dcision de majorit Paris Presses de la Fondation nationale des sciences politiques 1976

    235

  • Philippe-Alain Blrald

    Le march politique correspond-il un modle gadget ou bien renvoie-t-il une construction solide et cohrente dont il importe lu cider la gnalogie pistmologique

    approche en termes de march conduit reconsidrer la nature et le jeu des acteurs que reprsentent la classe politique les lecteurs la bureaucratie. Elle dbouche sur une rfutation des fondements tho riques de conomie du welfare et de Etat-providence Sous cet angle la critique la plus rigoureuse et la plus radicale nous est livre par la Nouvelle Economie Publique autrement baptise Public Choice laquelle nous est prsente en ces mots par James Buchanan un de ses pres fondateurs La thorie du choix public prend essentiellement les outils et les mthodes approche qui ont t dvelopps des niveaux analyse presque sophistiqus dans la thorie conomique et applique ces outils et ces mthodes au secteur politique et gouvernemental aux politiques

    conomie publique Le march politique offre-t-il ainsi que non cent certains de ses adeptes les instruments capables de conjurer hydre bureaucratique

    Il existe plthore de modles politico-conomiques ou politomtriques il serait fastidieux de recenser On se contentera ici dans un premier temps de reconstruire un mta-modle en essayant de synthtiser les caractres gnriques qui se dgagent des contributions inscrivant dans la problmatique du march politique On tudiera dans un second temps la redfinition de la rationalit des politiques publiques induite par leur subordination aux exigences du march politique3

    LE MOD LE DU MARCH POLITIQUE FLEXIONS THODOLOGIQUES

    SUR UN RAISONNEMENT ANALOGIQUE

    On signal la thorie du march politique difie moyennant extrapolation de concepts emprunts analyse conomique Il convient abord examiner les postulats et hypothses sur lesquels se fonde ladite thorie avant de considrer les problmes lis au fonction nement un tel modle

    Cf Aitali Les modles politiques Paris PUF 1972 8-9 Politics without romance sketch of positive public choice and its normative

    implications dans J.M Buchanan R.D Tollinson ed. The theory of public choice Ann Arbor University of Michigan Press 1984 13 traduit par nous de mme que les autres textes cits en anglais

    Le problme de la rationalit est trait par Meny et J.-C Thoenig dans leur rcent manuel Politiques publiques Paris PUF 1989 coll Themis dans une optique proche de la ntre

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  • LA CONSTRUCTION DU MOD LE POSTULATS ET HYPOTHESES

    Le modle du march politique procde de postulats et hypothses dtermins il nous incombe noncer On relve en premier lieu des postulats ordre institutionnel et ordre comportemental

    Sur le plan des institutions on postule que le march politique est applicable aux rgimes de dmocratie reprsentative Car ainsi que le souligne Kenneth Arrow en dmocratie librale il existe deux fa ons effectuer des choix collectifs le vote que on utilise pour prendre des dcisions de caractre politique et le mcanisme de march que on utilise pour les dcisions de caractre conomique La dmocratie librale se dfinit instar du capitalisme comme un systme changes comme un espace transactionnel rgi par la comptition politique On impute au vote un rle rgulateur il est cens contribuer expression des prfrences particulires et conditionner de la sorte la dcision publique enjeu dmocratique consiste faire prendre en charge par un gouvernement reprsentatif les utilits indivi duelles Partant la dmocratie est assimilable un march politique ouvert

    Le second postulat se rapporte la rationalit comportementale de individu Fondamentalement homme est apprhend comme une entit goste m par son seul self interest gosme se trouve lev au rang un axiome par Anthony Downs un des pionniers de la thorie du march politique qui affime que chaque individu quoique rationnel est aussi goste. travers notre modle nous soutenons que chaque agent agit en accord avec cette vue de la nature humaine Ainsi chaque fois que nous parlons de comportement rationnel nous signifions tou jours comportement rationnel originellement dirig vers des fins gostes La problmatique en adquation avec la doctrine utilitariste suppose que chaque personne cherche maximiser ses propres utilits dont le bien-tre conomique reprsente une composante essentielle5 gosme relve non pas simplement de fondements conomiques mais galement de fondements psychologiques Il en rsulte que la rationalit humaine dont il est ici question tient de la double quation que voici homo politicus homo econ micas homme psychologique6 Par

    Choix collectifs et prfrences individuelles Paris Calmann-Lvy 1974 19 Ainsi que explique E.T Haefele utility theory of representative government

    American Economic Review 61 3) juin 1971 350-367 expression est de R.L Curry et de L.L Wade theory of political exchange

    Englewood Prentice Hall 1968 Pour une prsentation en termes de march des traits gnriques des rgimes politiques on se reportera A.J Groth R.L Curry Jr

    Individual system preference model of rational choice Public Choice 1974 11-23 An economic theory of democracy New York Harper and Brothers 1957 27-

    28 Cf J.M Buchanan Individual choice in voting and the market Journal of

    Political Economy 62 1954 334-343 Pour un inventaire des apports de la psychologie la science politique on lira

    H.A Simon Human nature in politics the dialogue of psychology with political science American Political Science Review juin 1985 293-304 Sur la filiation doctrinale de individualisme cf Hollander Adam Smith and the self-interest axiom Journal of Law and Economics 20 avril 1977 133-152 cf galement Birnbaum et Leca dir. Sur individualisme op cit

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  • Philippe-Alain Blr aid

    consquent conformment la tradition behavioriste il agit un individualisme mthodologique lequel dans sa variante pure ou ultra

    vacue la dimension groupale des phnomnes sociaux1 On peut identifier trois niveaux hypothses En premier lieu celles

    qui assimilent activit politique un march On sait que la thorie marginaliste fonde le thorme de la concurrence pure et parfaite sur cinq conditions atomicit du march est--dire le fait que per sonne ne doit avoir assez de poids pour influencer un autre agent la parfaite homognit du produit synonyme absence de monopole de marque la libre entre et sortie du march qui quivaut inexistence de barrires monopolistes la pleine mobilit des facteurs de produc tion la parfaite connaissance du march qui signifie information convenable et transparence intgrale Il rsulte de ces cinq conditions que quilibre est assur par les prix lesquels constituent indice de raret relative des biens ou prestations changes Sans entrer dans des querelles byzantines on admet depuis au moins les travaux Alfred Marshall que le modle paretiano-walrasien de concurrence pure et parfaite doit tre amend sinon invalid dans le sens une concurrence inter-monopoliste2 Il conviendrait bien sr de interroger pour savoir dans quelle mesure les conditions sus-numres sont vrifiables par la thorie du march politique instar de activit conomique on identifie dans le processus politique des trends des cycles des fluctua tions...3 Enfin toujours exemple de conomie la politique est suppose avoir un cot

    En second lieu on considre le march politique comme un lieu expression des choix politiques individuels comme une sphre de confrontation offre et de demande politiques On assimile les procdures politiques des changes une des assertions gnriques de la thorie du march politique est que la gnralisation du systme changes non contraints prserve la libert de individu o son thique dmo cratique4 Le vote en tant que rvlateur des prfrences politiques

    Mancur Oison essaye articuler thique individualiste et action collective dans son tude classique Logique de action collective Paris PUF 1978

    Pareil constat conduit sinon bannir tout du moins redfinir le concept quilibre ainsi que nous invite Neisser Competitive equilibrium existence and approach Journal of Political Economy 76 6) novembre-dcembre 1968 1199-1206

    Cf Alesina Rosenthal Partisan cycles in congressional elections and the macroeconomy American Political Science Review 83 juin 1989 374-398 D.A Hibbs Jr Political parties and macroeconomic policy American Political Science Review 71 1977 1467-1487 Kramer Short term fluctuations in US voting behavior 1896- 1964 American Political Science Review 65 1971 131-143 Ginsburgh Michel Random timing of elections and the political business cycle Public Choice 40 1983 155 et suiv Lchler The political business cycle Public Choice 44 1984 411-

    430 C.D Macrae political model of the business cycle Journal of Political Economy 85 1977 239-263 W.D Nordhaus The political business cycle Review of Economic Studies 42 1975 169-189

    est la thse de F.A Hayek Th constitution of liberty Chicago University of Chicago Press 1960 de Friedman Capitalism and freedom Chicago Chicago Univer sity Press 1962 de Nozick Anarchie Etat et utopie Paris PUF 1988 de Rothbard Power and markets Kansas City St Andrews and McMeel 1977 Conception rfute par L.M Preston qui objecte un point de vue marxisant que les changes sur le march oprent exclusivement sous la forme acquisitions ou de transferts de titres de proprit

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  • March politique et politiques publiques

    individuelles se voit assigner une fonction rgulatrice quivalente au rle indicateur de raret dvolu aux prix1

    On soumet hypothse que la rgulation dmocratique par les lec tions dfaut tre optimale dans la mesure o celles-ci effectuent sur le mode comptitif avre allocation des ressources politiques la moins imparfaite

    En troisime lieu viennent enfin les hypothses relatives la ratio nalit comportementale des acteurs de la vie politique Il dcoule du postulat de gosme que chaque catgorie acteur est cense intervenir sur le march politique non pas en raison une quelconque finalit normative mais en fonction de ce elle considre comme conforne son intrt lecteur le candidat les partis politiques le bureaucrate les groupes de pression bref tous les protagonistes du jeu politique sont assimils des vendeurs ou des acheteurs de biens publics

    individu lecteur m par son egosme est le dpositaire de la souverainet Une question se pose alors est-ce qui en dehors de son propre intrt peut obliger accepter de dlguer son pouvoir une reprsentation parlementaire2 Ce qui signifie que on admet par hypothse que le citoyen attend de la classe politique outre une co nomie de temps et nergie une relative efficacit lecteur reprsente un citoyen consommateur de biens publics qui par son vote sanctionne directement lu ou indirectement le bureaucrate3

    Les lus et les partis politiques sont supposs offrir sur le march des biens ou des prestations publics dans la perspective de la rlection ou de lection qui forme leur fonction-objectif Le march politique parat rgent par les luttes inter-partisanes et intra-partisanes pour hgmonie parlementaire le leader de la majorit est dcrit tel un agent ayant le pouvoir de ngocier et ajuster la donne entre les demandes et les offres de lgislation cette fonction intermdiation est estime rduire les cots intervention sur le march lgislatif vu ses cots accs au march relativement moindres que ceux de ses rivaux le parti majoritaire bnficierait une rente il reverserait totalement ou partiellement ses adhrents4

    La bureaucratie quant elle se voit assimile un entrepreneur qui sous couvert intrt public cherche maximiser la taille de ses bu-

    individuels Freedom markets and voluntary exchange American Political Science Review 78 4) dcembre 1984 959-970)

    Sur la corrlation vote-prix on se reportera aux rflexions de Shubik Voting or price system in competitive market structure American Political Science Review 64 1) mars 1970 179-181 Un commentaire critique de la thse de Shubik est effectu par Ferejohn et Page note on Voting or price system in comptitive market structure American Political Science Review 67 l) mars 1973 157-160

    Comment dans une socit hyper-goste chaque citoyen ne voterait-il pas exclu sivement pour lui-mme Ce est pas le moindre des paradoxes soulevs par la probl matique individualiste ainsi que observe opportunment Tullock dans une brve note

    The paradox of not voting for oneself American Review of Political Science 69 3) septembre 1975 919

    Cf Bowen The interpretation of voting in the allocation of economic resources Quarterly Journal of Economics 58 1943 27-48

    R.E McCormic R.D Tollinson Rent-seeking competition in political parties Public Choice 34 1979 5-14

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  • Philippe-Alain Blr aid

    reaux1 elle assume le monopole de offre des biens publics selon explication retenue soit exclusivement soit concurremment soit conjointement soit de manire subordonne la classe politique On met hypothse que les bureaucrates seraient des lecteurs comme les autres avec leurs prfrences avec cette singularit notable au vu enqutes opinion les employs des administrations gouvernementales nord-amricaines apparaissent plus favorables au secteur public que les lecteurs travaillant dans le secteur priv2

    Les dcideurs politico-administratifs se trouvent soumis une logique entrepreneuriale consistant dterminer les biens qui par le biais du march seront offerts aux citoyens lesquels pour leur part cumulent la fonction duale de consommateur et lecteur Nous proposons par consquent de subdiviser le march politique en deux sous-marchs le sous-march lectoral o affirment les soutiens et les exigences les allgeances et les hostilits le sous-march des dcisions publiques il existe bien sr entre les deux une interdpendance est de cette inter section que autorise Anthony Downs pour avancer titre hypothse fondamentale de son modle que les partis formulent des politiques policies de fa on gagner les lections plutt ils ne gagnent les lections pour formuler des politiques

    En rsum est partir de axiome du self interest que se trouvent labores les hypothses comportementales des agents oprant sur le march politique Il agit un modle qui combine une part la demande des citoyens cherchant maximiser leurs dsirs par des poli tiques publiques appropries et autre part offre des politiques pu bliques manant de la classe politique et des bureaucrates cherchant maximiser la premire la probabilit une r)lection les seconds le volume de leur budget4 intrt une telle dmarche qui drive les politiques publiques du march politique est elle apprhende inter action des attitudes individuelles et des dcisions publiques5

    Voyons comment fonctionne le march politique et quelles objections soulve pareil modle

    OPERATIONALITE ET LIMITES DU MODELE

    Le fonctionnement du march politique soulve une srie de ques tions comment les aspirations individuelles moules par gosme vont- elles se mtamorphoser en volont majoritaire sinon consensuelle Comment les besoins particuliers vont-ils se transformer en besoins

    W.A Niskanen Jr Bureaucracy and representative government Chicago Aldine- Atherton 1971

    B.S Frey W.W Pommerehne How powerful are bureaucrats as voters Public Choice 38 1982 253-262

    An economic theory of democracy op cit. 28 Breton The economic theory of representative government Chicago Aldine

    Publishing Company 1974 Tout vote est-il pas assimil une demande de consommation collective par les

    citoyens ainsi que le suggre Bowen dans son article prcit

    240

  • March politique et politiques publiques

    sociaux Comment passe-t-on de quilibre intra-mdrviauei quilibre mier- nd due Par quel biais aggrgent les fonctions offre et de demande manant des individus La volont gnrale se rduit-elle la rgle majoritaire1 la question par quelle procdure les besoins particuliers sont-ils rvlables les adeptes de la thorie du march politique rpondent grce au vote Toutefois le fonctionnement du march politique ne va pas sans poser problme

    La thorie du vote

    Le modle du march politique se fonde abord sur le vote lequel se voit trait comme une variante formelle de la thorie des choix rationnels attitude de lecteur rationnel apparat synthtise par la clbre formule Anthony Downs2 o le rendement net du vote la probabilit que le vote sera dcisif

    utilit du vote les cots du vote non lis au rsultat == les bnfices du vote

    De fait il agit davantage une micro-conomie que une micro politique du vote La rationalit comportementale implique que tout individu acceptera de voter la condition que les bnfices escompts soient suprieurs aux cots relatifs ou dans le cas inverse de abstenir Le pouvoir de lecteur est rrele directement ou indirectement avec la probabilit que le scrutin parat autant plus serr que le vote individuel pourra en changer issue3 hypothse indiffrence jouera si un citoyen ne trouve aucun intrt dfendre les candidats en comptition on suppose en la circonstance il abstiendra En dfinitive la dcision de voter ou de abstenir dpend de valuation effectue par chaque individu quant impact marginal de son vote

    Le vote peut intervenir sur le sous-march des biens publics dans ce cas de figure les citoyens doivent approuver ou dsapprouver en votant ou en refusant de voter la nouvelle proposition budgtaire alternative se situant entre le nouveau projet de budget et le statu quo4 Il peut tre galement envisag telle une demande de tarification le cadre analyse initialement utilis renvoie un gouvernement majorit simple o les lecteurs confronts une structure prtablie de taxe choisissent simultanment le niveau des taxes et le taux associ de rendement pour un service public collectivement pourvu exemple de

    Sans mme tenir compte des incidences archiconnues des modes de scrutin il importe de signaler il existe non pas une mais plusieurs procdures logico-formelles permettant de calculer la volont gnrale savoir celle de Condorcet celle de Borda ou encore celle Arrow que chacune entre elles aboutit des rsultats diffrents dans attribution des votes aux candidats cf le suggestif article Stoetzel Comment reconnatre la volont gnrale Revue fran aise de sociologie mars 1976 3-11 et Favre La dcision de majorit op cit. 33-93

    On retrouve une formulation similaire dans D.C Mueier Analyse des dcisions publiques Paris Economica 1982 105 et suiv

    Hypothse teste et partiellement rfute par C.B Foster The performance of rational voter models in recent presidential elections American Political Science Review 78 3) septembre 1984 678-690

    G.C Durden Gaynor The rational behavior theory of voting participation evidence from the 1970 and 1982 elections Public Choice 53 1987 231-242

    241

  • Philippe-Alain Blr aid

    ducation Vu issue du scrutin lecteur soupse le bnfice potentiel additif il compare au cot supplmentaire de la taxe et vote en consquence

    Dans le contexte un scrutin gnral lecteur suppos rationnel et correctement inform tablira une balance des gains escomptables pour chaque parti ou chacun des candidats en lice Le parti au pouvoir sera jug positivement ou ngativement aune de ses performances effectives et sanctionn en consquence Si les gains esprs des partis quilibrent et si par ailleurs le citoyen affiche aucune volont de changement il devrait logiquement abstenir

    optimum sur le march politique exprime la situation o chaque lecteur ne peut esprer obtenir davantage au dtriment un autre

    Dans le schma de raisonnement initial il est affirm que la sincrit du vote est de mise que les citoyens pleinement informs voteront irrversiblement aprs leurs prfrences avres Or observation de la ralit nous enseigne que tel est pas toujours le cas Constat qui conduit introduire une hypothse duale une attitude sincre se traduisant par un vote sincre quand le choix de lecteur accorde directement son chelle de prfrence lecteur peut galement dterminer son choix en fonction de calculs dits stratgiques et retenir une option diffrente de ses convictions1

    La thorie formelle du vote fait de lecteur un individu rationnel exclusivement guid par son propre intrt Pareille assertion mrite tre fortement nuance voire partiellement rcuse Car les recherches empiriques des politistes inclinent attester les lections se droulent toujours sous influence Des tudes des enqutes opinion indiquent que individu peut tre influenc dans son choix de vote par la dcision un proche parent ami...) soit par la prise de position publique un leader politique soit par information qui est loin tre neutre2 Dans le mme ordre ides il est largement dmontr concernant les Etats- Unis que la participation lectorale est une fonction croissante des revenus elle varie selon appartenance ethnique que on abstient plus que proportionnellement parmi la minorit noire3 que on vote

    Le mrite initial incombe aux travaux pionniers de C.L Dodgson method of taking votes on more than two issues Oxford Bodleian Library 1876 Discussion of the various methods of procedure in concluding elections Princeton Princeton University Li brary Parrish Collection 1873 Suggestions as to the best method of taking votes Oxford Bodleian Library 1874 qui sont origine de actuelle thorie des jeux illustre par Von Neumann et Morgenstern Theory of games and economic behavior New York John Wiley and sons 1967 On se reportera galement Deutsch Game theory and politics some problems of application Canadian Journal of Economics and Political Science fvrier 1954 76-83 et J.M Buchanan Simple majority voting game theory and resource use Canadian Journal of Economics and Political Science aot 1961 337- 348

    R.M May et Martin ont labor un modle intgrant les phnomnes inter relation entre lecteurs Voting models incorporating interactions between voters Public Choice 1974 37-53 Pour une apprhension de information politique travers sa composante publicitaire cf Nelson Political information Journal of Law and Economies 19 aot 1976 315-336

    Sur la dtermination des attitudes politiques par les variables ethnique et socio- conomique cf D.C Nelson Ethnicity and socioeconomic status as sources of partici pation the case for ethnic political culture American Political Science Review 73 4)

  • March politique et politiques publiques

    variablement selon les tranches ge. sans compter la pression des groupes intrts qui par vocation cherchent interfrer dans le processus lectoral1 Partant il incombe de restituer au vote sa muiti- dimensionalit laquelle est inhrente tout systme politique2

    Le march politique un fonctionnement problmatique

    Les problmatiques du march politique se heurtent trois sries obstacles qui dans leur champ thorique se rvlent autant de ques tionnements cardinaux premirement articulation moins vidente des prfrences individuelles en choix collectifs deuximement le pro blme de la rvlation des besoins politiques par offre et la demande troisimement la contrainte information

    Le problme de agrgation est expos en des termes voisins de aporie par Kenneth Arrow qui se demande il est formellement

    possible tablir une relation entre un ensemble de prfrences indivi duelles et un modle de prise de dcision collective cet gard on sait que intransitivit des choix personnels illustre par le paradoxe de Condorcet conduit Arrow formuler un thorme impossibilit de transformation des rationalits personnelles en rationalit collective4 o pour certains impossibilit thorique de optimum sur le march politique5

    Ds lors que le march ne peut par lui-mme gnrer une allocation optimale des ressources politiques reste en suspens le problme de la rvlation des besoins Quelles sont les principales procdures proposes en vue contribuer

    James Coleman est attel de manire notable la rsolution du problme de la transformation des utilits individuelles en choix collectifs Il propos un systme o les individus sont confronts des squences de choix sociaux et ont dans optique du march parfait la

    dcembre 1979 1024-1038 la variable ethnico-culturelle est empiriquement teste dans le modle forg par Capron et J.-L Kruseman Is rivalry an incentive to vote Public Choice 56 1988 31-43

    J.B Krau et Rubin aprs enqute concluent influence effective de ces derniers dans les votes de la reprsentation lue Public interest lobbies membership and influence Public Choice 34 1979 45-54)

    Pour une analyse de la composante multipartisane partir du cas nerlandais cf Bronner de Hoog Choice models and voting behavior the case of the dutch

    electorate Public Choice 37 1981 531-546 Choix collectifs et prfrences individuelles op cit. 21 Pour une explication approfondie de cette question se reporter utilement

    Lagrange Thorie politique formelle dans Grawitz Leca dir.) Trait de science politique Paris PUF tome 1985 175-239

    est la position de Ecole arrowienne ce propos Abram Bergson attire pertinemment attention sur le fait que le thorme dit impossibilit t dict par Arrow strictement dans le cadre de la dmocratie directe et attle pour sa part tablir dans un contexte de dmocratie reprsentative dans Social choice and welfare economics under representative government Journal of Public Economics octobre 1976 171 90 Certames problmatiques essayent de leur ct de rconcilier rgle majoritaire et

    rationalit cf. notamment A.K Sen possibility of theorem on majority decisions Econometrica 34 2) avril 1966 491-499 A.K Sen P.K Pattanaik Necessary and sufficient condition for rational choice under majority decision Journal of Economic Theory 1969 178-202

    243

  • Philippe-Alain Blr aid

    possibilit changer leur contrle sur des rsultats qui les intressent peu contre un contrle plus important sur des rsultats les intressant davantage tait la porte ouverte tous les travaux mens sur le marchandage

    Le logrolling marchandage entend comme une procdure intgrant intensit des prfrences et susceptible de contourner favorablement impossibilit Arrow2 Il dsigne les transactions formelles ou infor melles effectues au niveau des diffrents sous-ensembles politiques lec tif parlementaire gouvernemental... soit par les citoyens-lecteurs soit par des candidats soit par des lus propose de voter en faveur de telle dcision la condition que engage en retour voter telle autre mesure souhaite par Si le marchandage intervient est bien parce que la dcision publique se trouve affecte un cot montaire le plus souvent synonyme impts titre illustration le vote scu- ritaire implique que on est partisan augmenter les effectifs de police et dispos en supporter le cot additionnel En adquation avec le thorme dit indiffrence on estime que le citoyen acceptera ce calcul

    ce que la courbe des cots marginaux rejoigne la courbe effi cience marginale de investissement scuritaire pass ce seuil la dpense publique devient non rentable et doit tre rationnellement rejete par le citoyen Comment ne pas admettre que cette procdure de marchandage par-del sa sduction novatrice que ce ngoce de voix contrairement aux dngations un Gordon Tulloch dbouche sur une dnaturation du suffrage universel et de la volont gnrale qui en dgage

    Autre type de procdure lecteur mdian La comptition politique la plus franche comporterait avantage de limiter inclination discrtion naire des membres de la classe politique Dans optique de leur rlec tion ils se doivent en effet de proposer des politiques policies collant le plus possible aux dsirs de lecteur de rang mdian celui-ci occupe dans la distribution des votants la position dont cart-type est le plus fort par rapport aux extrmes Par consquent les besoins moyens seraient rvls par lecteur mdian qui la manire un holotype est cens exprimer la moyenne des revendications de bien-tre de la socit3 adaptation des programmes la mdiane jouerait pour

    J.S Coleman Foundations for theory of collective decisions American Journal of Sociology 71 6) mai 1966 615-626

    Pour une prsentation exhaustive du logrolling on consultera Tullock Le march politique Analyse conomique des processus politiques Paris Economica 1978

    49-63 Bernholz Logrolling Arrow and decision rules generalization Kyklos 27 1974 49-62 On the stability of logrolling out-comes stochastic games Public Choice 33 1978 65-82 W.H Ricker S.J Brams The paradox of vote trading American Political Science Review 62 4) dcembre 1973 1235-1247 D.H Koehler Vote trading and the vote paradox proof of logical equivalence et Vote trading

    and the voting paradoxe rejoinder American Political Science Review 69 3) septembre 1975 954-960 967-969 Oppenheimer Some political implications of vote trading and the voting paradox proof of logical equivalence comment American Political Science Review 69 3) septembre 1975 963-966 N.R Miller Logrolling vote trading and the paradox of voting game theorical overview Public Choice 29 1977 51- 75

    Il revient H.R Bowen The interpretation. art cit avoir le premier formul la thse de lecteur mdian et Downs pp cit. de avoir formalise Cf

    244

  • March politique et politiques publiques

    permettre aux candidats non seulement de conqurir lectorat mais aussi de gagner le leadership partisan1 autant dire une telle proc dure revient gouverner par le centre En clair il est soutenu que le rendement une lection correspond la mdiane de optimum indivi duel est--dire aux taux approvisionnement dsir par lecteur mdian2

    notre sens ce thorme appelle la critique tant au niveau de ses prsupposs au niveau de son nonc Car sur un plan logico-formel il est opratoire que sous une triple contrainte unimodalit et la symtrie de la distribution des opinions existence de deux alternatives3 la ralit des scrutins dmocratiques qui le plus souvent confrontent une immensit lecteurs une grande diversit alternatives gnralement suprieures deux candidats invalide le thorme de lecteur mdian4 Cette problmatique se fonde sur une thorie spatiale postulant que les fonctions utilit individuelles ont une configuration homogne et elles sont distribues dans la population de manire rgulire Une telle approche qui se caractrise par une vision isotypique de espace politique procde de ide fort contestable une convergence parfaite sinon une identit intgrale entre tat de opinion publique et la carte des besoins individuels Il agit l de deux ordres de grandeur fonci rement diffrencis Admettons que on traite la demande sociale comme une drive de lecteur mdian A-t-on pour autant explicit la mca nique autorisant mettre existence un recoupement automatique entre une vidence statistique en occurrence lecteur de rang mdian et un fait sociologique savoir la demande sociale manant de la popu lation En bref la position mdiane dans la ventilation des votants est- elle intrinsquement porteuse de signification sociologique Il est permis en douter Dcrit tel un algorithme dans la rsolution du problme de agrgation politique des besoins particuliers le thorme de lecteur mdian relve en vrit de artefact

    Les contraintes lies information On dj soulign que le degr information de lecteur-consommateur conditionne en partie quilibre du march politique observation empirique atteste que information est rarement parfaite o introduction par exemple par Robin Farquharson dans son modle une double hypothse premier cas de figure dit information minimale o lecteur ne dispose

    Tullock Le march politique op cit. 23 et suiv. et R.P Inman Testing political as if proposition is the median income really decisive Public Choice 33 4)

    1978 45-65 Cf J.S Coleman Internal processes governing party positions in elections

    Public Choice 11 1971 35-60 Aranson P.C Ordeshook Spatial strategies for sequential elections dans R.G Niemi H.F Weisberg eds) Probability models of collective decision-making Columbus Merrill 1972

    Cf Barzel R.T Deacon Voting behavior efficiency and equity Public Choice 1974 1-14 Barzel Silberberg Is the act of voting rational Public Choice 1973 51-58

    Corps hypothses qualifi juste titre absurde par D.C Mueller Analyse des dcisions publiques op cit. 85-108

    Les multiples recherches se proposant de reformuler le thorme de lecteur mdian dans une perspective plurimodale se sont il est vrai avres peu convaincantes

  • Philippe-Alain Elevaid

    de donnes que sur son propre choix second cas de figure dit infor mation parfaite o chaque lecteur connat tous les choix possibles1 En ralit il faut considrer que chaque individu se situe dans une position intermdiaire entre ces deux extrmes que sont la mconnais sance totale et la connaissance intgrale Certains modles tentent de mesurer les incidences de information sur le vote tant entendu que sa carence peut tre analyse comme un facteur abstention2 informa tion outre tre rarement complte est jamais idologiquement neutre Par consquent il importe de ne pas la cantonner une fonction mcaniquement communicationnelle car elle apparat modelable en fonc tion enjeux stratgiques conflictuels

    interfrence des trois types obstacles concourt faire ressortir une contradiction entre le postulat hyperindividualiste de la souverainet de lecteur laquelle se trouve frquemment illustre par le dilemme du passager clandestin free rider et mergence une rationalit collective qui puisse fonder le choix social Cette difficult thorique conduit formuler des conceptions divergentes de quilibre sur le march politique il bien sr la variante pessimiste Arrow qui conclut impossibilit gnrale de optimum oppose la variante optimiste de Buchanan et de Tulloch qui prtendent contourner impos sibilit arrowienne par la notion de contrat constitutionnel procdant du libre consentement et de la libre association de tout un chacun3 enfin aucuns arguent que instabilit chronique des processus lgislatifs induit impossibilit de quilibre sur le sous-march de la lgislation4

    Ds lors que on analyse le politique par le march il convient de se demander de quelles logiques procdent les politiques publiques

    INTERVENTION TATIQUE ENTRE GESTION BUREAUCRATIQUE ET MANAGEMENT PUBLIC

    MANTELER LEVIATHAN

    Si on entend par rationalit combinaison cohrente de fins et de moyens il convient examiner les objectifs assigns et les modes appro pris de action publique Quant leur finalit par-del idologie du service public ou de intrt public5 les politiques publiques paraissent

    Theory of voting New Haven Yale University Press 1969 Tollinson Crain Pautler Information and voting an empirical note

    Public Choice 1974 43-49 T.R Palfrey Rosenthal Voter participation and uncertainty American Political Science Review 79 1) mars 1985 62-78

    Thse expose par ces deux auteurs dans leur ouvrage commun The calculus of consent Ann Arbor The University of Michigan Press 1962

    est le point de vue soutenu par W.H Riker Implications from the desequili- brium of majority rule for the studies of institutions American Political Science Review 74 2) juin 1980 432-446 Pour une position adverse cf Koford An optimistic view of the possibility of rational legislative decision-making Public Choice 38 1982

    3-19 Si la forme rationalisatrice de intervention tatique qui prdomine en France

    est la doctrine du service public cf Chevallier dir. Variations autour de idologie de intrt gnral Paris PUF vol et 1978 et 1979) par contre aux Etats-Unis la

    246

  • March politique et politiques publiques

    osciller entre logique bureaucratique et efficience manageriale Concernant leur mode on peut les apprhender travers les successives configura tions structurales du couple Etat-march

    Le secteur public constitue le lieu ancrage privilgi de la bureau cratie Il est thoriquement per soit comme un facteur pervers de bureaucratisation soit comme une sphre propice une croissance conomique mieux matrise au service de intrt gnral

    On tentera dans un premier temps expliciter les soubassements thoriques de action publique au prisme du binme Etat-march On interrogera dans un second temps sur les enjeux et les impratifs de la lutte antibureaucratique tels noncs par les critiques de Etat- providence se rclamant de la Nouvelle Economie Publique

    LES FONDEMENTS THEORIQUES DE INTERVENTIONNISME PUBLIC VARIATIONS SUR LE COUPLE TAT-MARCH

    Par interventionnisme public on dsigne action de Etat au service du public Mais de quel public agit-il Le terme re oit au moins deux acceptions diffrentes la premire relevant de la tradition fran aise du service public assimile public et intrt gnral la seconde de filiation anglo-saxonne inscrit dans la problmatique du march politique o public signifie avant tout ensemble des usagers des consommateurs particuliers de biens publics

    Dans le cadre de conomie librale interventionnisme tatique se justifie par les insuffisances voire par impuissance suppute congnitale du march prendre en charge certains intrts utilit gnrale est la fameuse thse de la faillite du march idologie du welfare se fonde sur ide mythique que le gouvernement se doit par son inter vention de prserver en mme temps que les conditions de la croissance conomique le consensus social sur lequel repose la lgitimit du systme Pour sa part conomie du bien-tre difie partir de oprationalit une fonction de bien-tre social ou utilit collective mise en uvre par Etat2

    Les politiques publiques naissent de la rencontre de Etat et du march cette articulation revt gnralement deux formes elle opre soit par substitution de Etat au march biens collectifs...) soit par contrle du march par Etat rgulation On examinera successivement ces deux modes interventionnisme public avant de prsenter des ap-

    norme prevalente est intrt public ou plus exactement intrt du public au sens de intrt des usagers

    Cf RM Bator The anatomy of market failure Quarterly Journal of Economics 72 1958 351-379 W.J Baumol Welfare economics and the theory of the state Cambridge Harvard University Press 1965 2e d J.G Head Public goods and public policy Public Finance 17 1962 197-219

    P.K Pattanaik Risk impersonality and the social welfare function Journal of Political Economy 76 novembre 1968 1152-1169 Pascallon La thorie du second best en procs premier tat de la question Cahiers de ISEA 2-3) fvrier-mars 1972 srie EM 4)

    247

  • Philippe-Alain Blr aid

    proches drivant les politiques publiques du march et de interroger pour savoir ce qui de intrt public ou de la logique bureaucratique emporte Il agit somme toute de faire le tour des problmatiques explicatives de intervention publique

    La substitution de Etat au march biens collectifs biens publics

    Le point de dpart est bien sr la thorie de Paul Samuelson qui stipule que Etat doit se substituer au march en occurrence inefficient allouer de manire optimale les biens dits collectifs On qualifie de collectif un bien dont on jouit en commun au sens que toute consommation un individu un bien ne conduit aucune soustraction de la consommation aucun autre individu de ce bien Ce que contient cette dfinition est axiome de indivisibilit qui constitue la caractristique premire de tout bien collectif Seconde caractristique les effets externes on dsigne par externalit les effets induits une dcision ou un acte sur des personnes non lies cette dcision ou cet acte De la combinaison de ces deux caractristiques

    indivisibilit et externalit rsulte impossibilit une discrimina tion une limination par le prix o incapacit avre du march

    garantir les prfrences Partant il relve de la lgitimit de la puissance publique de prendre en charge ce type de biens Les biens collectifs sont identifiables un triple niveau au niveau de leur mise en place ils sont crs ou appropris par des institutions collectives Etats collectivits etc. au niveau de leur gestion ils sont administrs par lesdites insti tutions publiques sur le march de consommation ils concourent la consommation socialise Il importe de mentionner existence une controverse sur la question de savoir si la prsence exclusive de une ou autre condition suffit ou si la runion des deux avre indispensable pour qualifier un bien collectif titre exemples-types on cite commu nment la dfense nationale la scurit la justice les ressources naturelles non renouvelables tels air et eau mais galement les quipements socio-culturels. Si on considre les agressions de la pollution indus trielle consquence en la circonstance effets externes ngatifs on comprend il ressortit Etat de sauvegarder espace collectif moyen nant laboration de politiques publiques de environnement

    La caractrisation en tant que biens collectifs des fonctions sociales que reprsentent la sant et ducation divisibles mais gnratrices effets externes est admise par les partisans une dfinition extensive du concept et rejete par les tenants une acception restrictive Pour

    P.A Samuelson The pure theory of public expenditure Review of Economics and Statistics novembre 1954 387 cf galement sur les biens publics Milleward

    Exclusion costs external economies and market failure Oxford Economic Papers 1970 24-38 En langue fran aise on se reportera aux tudes suivantes S.C Kol conomie des services publics Economie applique 1965 557-582 J.-F Besson Centralisation ou dcentralisation le problme des biens collectifs Revue conomique

    juillet 1966 560-602 Culot Problmes de la dfinition du bien collectif Les Annales de conomie collective janvier-mars 1971 3-19 Wolsfeisperger Les biens collectifs Paris PUP 1969

    248

  • March politique et politiques publiques

    dpasser ce dbat nous proposons de distinguer les biens collectifs obissant aux rgles prcites des biens publics ces derniers incorporent de multiples secteurs activit comme lectronique les tlcommuni cations nergie les chantiers navals toutes filires productrices de biens ou de services marchands que on nationalises au nom de intrt gnral Etat intervient ainsi dans la gestion de biens publics outre la sant et ducation certaines actions publiques ont pour cible des couches sociales rputes particulirement vulnrables malades enfants vieillards handicaps pauvres...) temporairement ou dfinitivement in capables de intgrer la logique du march en rgle gnrale les transferts sociaux lis aux politiques publiques de rpartition jouent un rle central dans la dynamique de conomie du bien-tre1 En sorte que le dveloppement des biens collectifs et publics gnre corrlativement la propension expansive des dpenses publiques illustre par la loi de Wagner2

    Le contrle du march par Etat la rgulation Examinons comment opre la justification de interventionnisme

    public au travers des thories de la rgulation La rgulation se dfinit par des contrles tatiques spcifis relatifs aux prix entre de branches ou de firmes par une tarification et des subventions publiques en vue de maximiser efficience conomique

    On recense dans la littrature amricaine une diversit de problma tiques qui partagent le mrite clairer des aspects particuliers nanmoins complmentaires de la rgulation

    La thorie dite de intrt public prescrivant que Etat doit rguler uniquement lorsque des phnomnes conomies chelle ou indivisibilit crent des monopoles naturels ou encore en cas effets externes ngatifs3

    La thorie capture constate que le rgulateur alloue ses sub sides des groupes intrts diffrents afin de maximiser leurs appuis politiques cette approche signale que la rgulation se concentrera essen tiellement dans les secteurs activit ou dans les entreprises ayant tout

    gagner organiser en coalitions politiques4

    Daly J.F Giertz Welfare economics and welfare reform American Eco nomic Review 61 1972 131-138 Transfers and Pareto optimality Journal of Public Economics 1976 179-182

    A.G Cuzan et R.J Heggen concluent la vrification de cette loi dans leur article Expenditures and votes in search of downward sloping curves in United States and

    Great Britain Public Choice 45 1) 1985 19-34 C.E Mc Lure Jr Welfare maxi mization the simple analytics with public goods Canadian Journal of Economics 3) aot 1968 633-639

    est le cas de la dgradation de environnement qui peut contraindre Etat moduler les politiques industrielles dans une optique antipollution Sur les problmatiques fran aises de la rgulation cf Nizard Administration et socit planification et rgulation bureaucratique Revue fran aise de science politique 23 2) avril 1973 199- 229 Ncessaires rgulations planificatrices de appareil Etat dans la France capitaliste aujourdhui Revue fran aise de sociologie 16 1975 625-652 Cf aussi ouvrage collectif Etat et rgulation Lyon PUL 1980

    Cf Keeler Theories of regulation and the deregulation movement Public Choice 44 1) 1984 103-145 Peltzman Toward more general theory of regu lation Journal of Law and Economics 19 1976 211-240

    249

  • Philippe-Alain Blrald

    La rgulation expliquerait par la carence du march laquelle conduirait les bureaucrates essayer de monopoliser les marchs en vue de redistribuer les revenus entre consommateurs1

    Les rgulateurs sont dpeints tels des maximiseurs utilit qui davantage que les autres bureaucrates astreindraient minimiser les attaques provenant un ct des consommateurs de autre des pro ducteurs

    On peut galement identifier la rgulation une forme dguise de taxation un groupe au profit un autre inscrivant dans une politique de redistribution des revenus3

    Une autre approche soutient que les bureaucrates proposent tou jours davantage de rgulation afin de rendre inefficient le secteur priv et accrotre autant attractivit du secteur public lequel recueillerait leurs faveurs par-dessus tout la rgulation se dployerait comme un puissant outil de promotion des intrts bureaucratiques4

    La dmarche en termes de march politique implique une rvision de la conception traditionnelle de la rgulation Bien plus un mcanisme correcteur des distorsions du march en adquation avec les intrts du public elle dsigne un processus de transfert de richesses influenc par le jeu du march politique o les citoyens les groupes intrts de mandent de la rgulation et o les responsables politiques en onrent Sur semblable march les citoyens en tant usagers consommateurs gagnent quand les prix baissent et perdent quand ces derniers augmentent contrario les entrepreneurs de branches rgules ont grand intrt ce que les prix grimpent toute diminution induisant une compression de leur marge bnficiaire la fonction du gouvernement rgulateur consiste grer cet quilibre contradictoire. en intgrant la contrainte de sa rlection5

    Il en rsulte que enjeu de la rgulation ne se cantonne pas aux seuls intrts conomiques Interviennent concurremment des pressions de nature politique telles celles visant modifier la politique de rpartition

    ce propos comment ne pas voquer la planification la fran aise vaste procdure de rgulation par excellence des conflits non pas simple ment chelle une entreprise une branche voire une rgion mais

    la dimension de la nation

    G.J Stigler The theory of economic regulation Bell Journal of Economics 1971 1-21

    Tullock Regulating the regulators dans Pejovich ed. Government controls and the free market the US economy the College Station Texas et University Press 1976 141-159

    R.A Posner Taxation by regulation Bell Journal of Economics and Manage ment Science 1971 22-50

    R.B Mc Kenzie H.H Mac Aulay bureaucratic theory of regulation Public Choice 35 1980 297-313

    J.-L Mig Controls versus subsidies in the economic theory of regulation Journal of Law and Economics 20 avril 1977 213-221

    Cf Planification et socit actes du colloque Uriage octobre 1973) Grenoble PUG 1974 Nizard De la planification fran aise production de normes et concer tation Revue fran aise de science politique 22 5) octobre 1972 1111-1132 Plani fication processus dcisionnel et changement Bulletin de Institut international administration publique 24 octobre-dcembre 1972 673-709

    250

  • March politique et politiques publiques

    II convient indiquer que la rgulation apparat conditionne par la conjoncture conomique est ainsi elle semblerait plutt oriente en phase dpressive vers la protection du producteur et en phase expansive vers la protection du consommateur

    ce stade de analyse nous mettrons un constat et une interro gation Observons que la rgulation opre non seulement comme un arbitrage entre intrts divergents de groupes de pression mais galement comme enjeu conflictuel entre fractions rivales ou allies de la bureau cratie Quant la question elle est la suivante dans quelle mesure peut-on image de entreprise dpendant des consommateurs traiter instance rgulatrice comme satisfaisant la demande et des usagers et de la reprsentation lue En clair la rgulation se dploie-t-elle sur un mode dmocratique ou sur un mode bureaucratique

    Logique marchande ou logique bureaucratique

    La problmatique du march politique se fonde sur ide que la comptition lectorale produit les politiques publiques Ce qui se rvle loin tre acquis car on signal certaines approches drivent les politiques publiques de la bureaucratie Sous cet angle ce dernier courant apprhende les dcisions gouvernementales comme le rsultat des po litiques bureaucratiques dans lesquelles les bureaucrates essaient de maximiser les gains de leur agence Le produit la politique gouverne mentale est une rflexion des prfrences politiques des bureaucrates chacune tant pondre par le pouvoir relatif de son agence Il existe un dbat entre tenants du paradigme de Downs expliquant les politiques publiques par le march et ceux qui tels Buchanan Tullock Niskanen les identifient prioritairement aux intrts de la caste bureaucratique qui serait globalement encline maximiser sa fonction utilit4

    Il est plus besoin de souligner impossible thorique pour des raisons dj largement explicites une allocation de deux ou de plus de deux biens par quilibre gnral du vote sur le march politique5 o allocation par Etat Toutefois est-il prcis le gouvernement

    Peltzman Toward more. art cit 227 Cf B.R Weingast The congressional-bureaucratic system principal agent

    perspective with applications to SEC Public Choice 44 1) 1984 147-191 Hettich Bureaucrats and public goods Public Choice 1974 15-25

    R.E Goodin The logic of bureaucratic back scratching Public Choice 1974 53

    Cf Brennan J.M Buchanan The power to tax analytical fundations of fiscal constitution Cambridge Cambridge University Press 1980 G.A Boyne Median voters political systems and public goods an empirical test Public Choice 53 1987 201- 219 J.M Buchanan V.J Vanberg The politization of market failure Public Choice 57 1988 101-113 R.E Mc Cormick R.B Mc Kenzie The cost of voting its fiscal impact on government Public Choice 34 1979 271-283

    Cf A.M Feldman model of majority voting and growth in government expenditure Public Choice 46 1985 3-17 G.H Kramer On class of equilibrium conditions for majority rule Econometrica 41 1973 285-297 R.D Mc Kelvey

    Intransitivities in multi-dimensional voting models and some implications for agenda control Journal of Economic Theory 12 1976 472-482 C.R Plott notion of equilibrium and its possibility under majority rule American Economic Review 57 1967

    787-806

    257

  • Philippe-Alain Blr aid

    consigne sur agenda les prfrences mises occasion lections Pa reille dmarche dduit accroissement des dpenses publiques non pas une quelconque mission de service public mais de expression majo ritaire du march politique Des recherches empiriques ont t menes inscrivant dans cette problmatique

    Des investigations se fixent comme objectif tablir une interdpen dance entre politique budgtaire et cycle lectoral Ainsi tude des scrutins gubernationaux aux Etats-Unis rvle une part accroissement relatif de la dette des Etats fdrs durant la priode pr-lectorale et autre part sa diminution pendant les deux annes suivant lection1 Ce qui expliquerait par le fait que dans 47 des 50 Etats de Union Office du gouverneur initie la procdure budgtaire tandis que dans les

    Etats restants Office partage cette responsabilit avec les groupes parlementaires et que dans 46 Etats la lgislature dispose de la prro gative illimite augmenter les propositions budgtaires

    Autre sphre exprimentation du march politique les politiques publiques de la sant est ainsi t labor un modle offre et de demande appliqu aux politiques de sant dans les Etats fdrs2 les mcanismes politiques ont pour fonction agrger les demandes des citoyens afin que les services gouvernementaux les transforment en actions offre conditionne par des contraintes normatives et tech niques procde du dveloppement de services spcialiss habilits payer hypothse retenue ingalit accs au march de la consom mation mdicale rsultant entre autres de incidence conjugue du statut social et de degrs diffrencis de matrise de information La recherche est axe sur tude du Medicaid programme fdral cr en 1966 ayant pour finalit de garantir accs aux soins mdicaux aux pauvres et nouveaux pauvres Etat finance ce programme qui articule secteurs public et priv le financement fdral calcul par une formule base sur le revenu per capita des Etats fdrs intervient hauteur de 50 77 de la dpense totale Il se dgage trois conclusions principales De larges portions des budgets fdral et fdrs se trouvent accapares par une minorit par quelques intrts bien orga niss Les associations de professionnels de la sant ont systmatiquement rcupr leur avantage les diverses rformes les plans successifs pro poss pour amliorer les performances du programme On relve que sur le march mdical certaines catgories de professionnels qui par intrt cherchaient maximiser offre ont vu leur influence sensiblement entame par la monte en puissance des compagnies assurances mues par des mobiles inverses Interprt travers le code de idologie librale et les justificatifs bureaucratiques comme exigence altruiste le

    W.R Baber P.K Sen The political process and the use of debt financing by state governments Public Choice 48 1986 201-205 En plus des auteurs cits la note 238 cf B.S Frey Politico-economic models and cycles Journal of Public Economies 1978 203-220 R.E Wagner Economie manipulation for political profit macroeconomic consequences and constitutional implications Kyklos 30 1977 395- 410

    C.J Barrilleaux Miller The political economy of state medicaid policy American Political Science Review 82 4) dcembre 1988 1089-1107

    252

  • March politique et politiques publiques

    Medicaid dsigne prosaquement le lieu de convergence des fractions dshrites de la population et des trusts mdico-pharmaceutiques les quels trouvent communment avantage un emballement de offre Il est statistiquement tabli que les citoyens vivant dans les Etats les plus opulents ont proportionnellement davantage re au titre du Medicaid que ceux rsidant dans les Etats plus pauvres Il va sans dire que pareille dviation lgitime la critique nonce par les thoriciens du Choix Public aprs laquelle au lieu de rduire les ingalits sociales Etat-providence les accentue

    Autre procdure de dtermination des choix collectifs lecteur mdian Des enqutes corroborent le rle-clef du revenu mdian dans les politiques budgtaires singulirement par le truchement de la demande de biens ducatifs De mme le modle de lecteur mdian permet valuer les niveaux des dpenses hospitalires1

    ensemble de ces approches soulignent chacune sa fa on que intervention publique assortit inluctablement une emprise bureau cratique Par consquent il revient de se questionner sur la nature du pouvoir bureaucratique Couche autonome ou dpendante du pouvoir politique Dfenseur du secteur public ou du secteur priv Agent au service de Etat de lecteur de lu ou de ses propres intrts

    Thoriquement on recense trois types de rponses la premire indique avantage de la bureaucratie le monopole de offre conjugu au contrle de la mise sur agenda des dcisions publiques et stipule une subordination du personnel politique la bureaucratie est la thse dite de imposition bureaucratique2 La seconde estime que dans un Etat de droit est le lgislateur qui fixe le cadre rglementaire de activit bureaucratie thse de la soumission politique de la bureaucratie aux organes centraux de Etat lesquels sont eux-mmes soumis par le biais de impratif de rlection la logique du vote3 Enfin la troisime observe il se manifeste une telle intrication entre bureau crates et lus il vaut mieux parler leur sujet de coexistence que de conflit de collaboration que de concurrence de ngociation que im position4

    Au regard de la ralit la rponse ne saurait tre unilatrale car la logique de action bureaucratique obit un faisceau complexe de variables En sorte il incombe baucher partir de problmatiques forcment partielles une amorce de synthse

    R.P Inman Testing political as if proposition is the median income voter really decisive Public Choice 33 4) 1978 45-65 R.D Fort The median voter setters and non-repeated construction bond issues Public Choice 56 1988 213- 232

    est la thse de W.A Niskanen Bureaucracy and representative government op cit. de Romer et H.R Rosenthal Political resource allocation controlled agendas and the statu quo Public Choice 33 1978 27-45 de Denzau Mackay et Weaver Spending limitations agenda control and voter expectations National Tax Journal 32 juin 1979 189-199 suppi.

    est la thse de Downs et de ses mules est la thse de C.L Eavey et de G.J Miller Bureaucratie agenda control

    imposition or bargaining American Political Science Review 78 3) septembre 1984 719-733

    253

  • Philippe-Alain Blr aid

    Les thories abordes concordent imputer intervention publique la cause de inflation bureaucratique Une dsinflation du phnomne bureaucratique est-elle possible et quelles conditions

    LE FI DE LA LUTTE ANTIBUREAUCRATIQUE RENDRE AU MARCH CE QUI APPARTIENT AU MARCH

    Les thories critiques de la bureaucratie estiment que la condition sine qua non une dbureaucratisation rside dans le dsengagement de Etat dans sa subordination au march On envisagera successivement deux aspects lis on recensera en premier lieu les griefs ordre thorique noncs par Ecole des choix publics contre Etat-providence on considrera en second lieu les procdures labores par les doctrines anti-interventionnistes en vue affaiblir Etat

    La critique de Etat du bien-tre par Ecole du choix public de la failite du march la faillite du non-marchand

    Les adeptes de la Nouvelle Economie Publique se livrent une critique tous azimuts de conomie du welfare de Etat-providence de idologie pseudo-galitaire du service public masque dont se parerait la bureaucratie afin de perptuer sa mainmise monopoliste et antid mocratique sur les leviers dcisionnels des politiques publiques La caste bureaucratique est globalement accuse de approprier la majeure partie voire intgralit du surplus du consommateur sans offrir ses interlocuteurs une contrepartie quivalente en termes de biens publics ou de prestations clientlistes1

    On reproche Etat sous couvert de prosprit laborer des politiques o utilit des usagers compte incomparablement moins que intrt de certains groupes de pression par consquent est de inter action entre ces derniers et le complexe politico-administratif que sur gissent les situations de changement ou de blocage dans la conduite des politiques publiques2 action tutlaire adresse des couches sociales dans le besoin qualifie de paternaliste se voit dcrie comme gnratrice effets pervers3 Etat du bien-tre contribuerait aggraver les ingalits de revenus ce qui situerait son action aux antipodes de sa prtendue mission galitariste Pareille inefficience pratique enracinerait dans des prmisses pistmologiques errones savoir impossibit tre de toute fonction utilit collective

    Si dans le schma keynsien on considre accroissement des dpenses gouvernementales comme une incitation propice la croissance gnrale de conomie la vision sous-jacente au Choix public est tout autre qui

    W.A Niskanen op cit Tullok Le march politique op cit McCallum Biais Government special interest groups and economic

    growth Public Choice 54 1987 3-18 Les principales problmatiques des politiques publiques sont passes en revue par

    S.C Littlechild et Wiseman dans The political economy of restriction of choice Public Choice 51 2) 1986 161-172

    254

  • March politique et politiques publiques

    identifie en raison de la prdation colossale perptre par la bureau cratie comme la cause une pression inflationniste insoutenable singulirement en phase de rcession laquelle conduirait irrversiblement

    une rduction drastique des dpenses sociales elles-mmes1 Semblable diagnostic autorise noncer suite au thorme slogan de Laffer aprs lequel trop impts tuent impt2 que dans optique du Choix public trop de dpenses sociales tuent la dpense sociale trop Etat tue Etat..

    Et la rgulation et les biens collectifs font objet de rcusations ordre thorique Aucune raison ne fonde penser que la rgulation bureaucratico-administrative sujete aux pressions les plus incohrentes contribuerait tant soit peu relever efficacit ensemble de cono mie3 Les attaques se focalisent galement sur un des piliers de la thorie des biens collectifs en occurrence le postulat de indivisibilit Des travaux tentent tablir que certains types de consommation ap paremment indivisibles au niveau macro-conomique national se rvlent divisibles chelle plus rduite des services municipaux4 Incidence politique majeure rsultant un tel constat on revendique comme antibureaucratique et dmocratique le transfert de gestion des biens publics de Etat central en la circonstance des instances fdrale et fdre vers les collectivits les plus dcentralises les plus petites en taille et en population de ces institutions apparaissent plus aisment et moins onreusement grables au besoin en privatisant des pans soit et de la production soit/et de la distribution de biens publics5

    Sur fond de crise de Etat-providence est opr un dplacement du point de mire de la critique thorique accus ce est plus le march et ses carences mais bien le secteur public source de tous les maux En sorte que de la thse nagure hgmonique de la faillite du march on est pass la prdominance de la thse de la faillite du non- marchand ou du hors march

    est ce essaye de prouver Landau dans une tude consacre aux 16 principaux pays capitalistes du monde Government expenditure and economic growth in the developped countries 1952-76 Public Choice 1985 459-477

    Gre e conomie politique de la bureaucratie Paris Economica 1988 155- 158

    J.M Buchanan V.J Vanberg The politization of market failure Public Choice 57 1988 101-113

    Cf Bergstrom Goodman Private demand for public goods American Economic Review mars 1973 280-296 Borchedering Deacon The demand for the services of non-federal governments American Economic Review dcembre 1972

    992-901 M.Mc Millan W.R Wilson Arthur The publicness of local public goods evidence from Ontario municipalities Canadian Journal of Economics novembre 1981 596-608 Pack J.R Pack Metropolitan fragmentation and public local expenditures National Tax Journal dcembre 1978 349-362 Vehorm Market interaction between public and private goods the demand for fire protection National Tax Journal mars 1979 29-40

    Cet antijacobinisme cette exaltation de la dmocratie locale explique vraisembla blement que certains thoriciens du Choix public revendiquent Tocqueville comme un de ses prcurseurs Cf L.L Wade Tocqueville and public choice Public Choice 47 3) 1985 491-508

    Wolf Jr The theory of non market failure framework for implementation analysis Journal of Law and Economics 1979 107-139

    255

  • Les procdures affaiblissement de Etat

    La drgulation introduction de rgles de management dans ad ministration publique la concurrence inter-bureaucratique la rvlation des prfrences voil quelles sont les principales techniques recomman des et testes pour limiter en mme temps que pour rationaliser inter ventionnisme public

    Un vent de rformes des politiques de rgulation souffle aux Etats- Unis depuis le milieu des annes 1970 avec la double finalit aug menter efficience conomique et de mieux prendre en compte les aspi rations de usager Ce mouvement imprim par une constante administrative allgement des rglementations) touche des branches aussi diverses et vitales que les transports ariens les chemins de fer le camionnage les tlcommunications extraction et la distribution du ptrole et du gaz naturel les banques et autres institutions financires1 Au dbut de la dcennie 1980 le rythme de la drglementation se trouvera singulirement acclr en raison du dsengagement financier massif de Etat lequel dcoule de impratif de la lutte anti-inflationniste et de la compression des dpenses budgtaires prvalant alors dans tous les pays capitalistes industrialiss

    Ea drglementation tendra galement la politique sociale est que le systme des transferts sociaux inter-gnrationnels un des axiomes des politiques du bien-tre auquel la problmatique redistri butrice inspiration samuelsonienne impartissait de parachever opti mum partien se voit critiqu par la Nouvelle Economie Publique et prfr une formule assurances prives base sur les anticipations individuelles2 cet gard les tenants de approche conomtrique ont confront les performances relatives des transferts publics et des alloca tions prives On labor cet effet un modle public de rpartition des revenus qui ne peut atteindre optimum cause de biais bureau cratiques et faute informations suffisantes On construit en vis--vis un modle alternatif de dons privs o quilibre des transferts drive des anticipations de maximisation de utilit effectues par les donateurs Ea simulation compare des deux modles permettrait aprs nos auteurs identifier les conditions auxquelles le systme allocations prives porterait le bien-tre des donateurs autrement dit des cotisants

    un point plus lev que ne pourrait le permettre la redistribution financement public contrle par le gouvernement Ea conclusion ressor tant une semblable analyse est il avrerait imprieusement conforme intrt de usager de dmanteler les procdures publiques de redistribution au profit un systme de charit prive4 Cependant

    Keeler Theories of rgulation. art cit Sjblom Voting for social security Public Choice 1985 225-240

    J.J Cordes R.S Goldfarb H.S Watson The relative efficiency of private and public transferts Public Choice 49 1) 1986 29-45

    On consultera sur cette question S.H Long Social pressure and contributions to health charity Public Choice 28 1976 55-67 Spann Collective consumption of private goods Public Choice 20 1974 63-81 Tullock Charity of the

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  • March politique et politiques publiques

    cette substitution de la protection sociale publique par des transferts privs de type caritatif se heurte une contradiction de taille dans un cas de figure o acteur parat essentiellement voire exclusivement motiv par go sme on imagine mal en absence de toute contrainte tatique quel intrt matriel tangent le prdisposerait se proccuper de autre par la mdiation de la solidarit caritative Pour sortir de impasse certains analystes temprant voire contredisant les prmices hyper-individualistes se sont trouvs dans obligation de recomposer homme dans son intgrale ambivalence en le dfinissant comme un tre

    la fois goste et altruiste1 Pour les tenants du Choix public il importe de drguler de manire

    systmatique afin de revigorer conomie afin assainir nouveau un corps social gangren par le virus bureaucratique Or exprience indique que souvent loin de opposer antinomiquement la drgulation travaille au ur de la rgulation il agit des deux faces un processus identique assortissant de la perptuation moyennant adaptation du pouvoir du complexe politico-bureaucratique Ce dernier tout en int grant les ajustements induits par la dynamique du march cherche maintenir son contrle sur les secteurs affects sur les rythmes et sur ampleur de la drgulation En quoi la drgulation peut se rvler aussi bureaucratique que la rgulation

    Le management public dsigne application au secteur public de critres de gestion ayant dj fait leurs preuves dans les entreprises prives Cette innovation dcoule du grief inefficience port contre la bureaucratie Dans une telle perspective comment ne pas partager le jugement aprs lequel la dmarche des auteurs de cole du Public Choice les rflexions ils mnent sur efficacit des interventions publiques au regard de leurs cots relvent manifestement du manage ment public Si bien que ce que semble remettre en cause la rationalit manageriale ce est pas tant la rationalit juridique que le paradigme bureaucratico-administratif wbrien3

    Bien plus encore que la rgulation le management public inscrit dans un procs de rationalisation des mthodes de mobilisation et organisation des ressources de administration publique Car en- contre des reprsentations conventionnelles postulant inefficience ou irrationalit de celle-ci la problmatique du management suppose elle

    uncharitable Western Economie Journal dcembre 1971 379-392 P.G Warr Pareto optimal redistribution and private charity Journal of Public Economies 19 1) octobre 1982 131-138

    Cf E.S Phelphs ed.) Altruism morality and economic theory New York Russel Sage 1985 se reporter notamment la contribution de P.J Hammond Charity altruism or cooperative egoism R.D Roberts positive model private and public transfers Journal of Political Economy 92 mars 1984 136-148 Stark On private charity and altruism Public Choice 46 1985 325-329

    J.-M Duffau Avant propos au spcial consacr au management public de la Revue fran aise administration publique 24 octobre-dcembre 1982

    cet gard nous nous trouvons plus en phase avec J.-M Duffau pp cit. avec la position co-dfendue par Chevallier et Loschak dans le mme spcial de la revue prcite contribution significativement intitule Rationalit juridique et rationalit manageriale dans administration fran aise 53-94)

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  • Philippe-Alain Blr aid

    peut agir rationnellement efficacement sous rserve de contraintes d termines La rationalit manageriale chercherait circonscrire une zone de compatibilit entre trois logiques spcifiques celle de administration celle des particuliers et celle de la socit1

    Le management combin la drglementation peut favoriser une tendance insertion marchande du secteur public intervention pu blique apparat de moins en moins dicte par le rgime monopoliste et de plus en plus rgente par des normes concurrentielles Pareille vo lution aboutit un glissement de la tarification correspondant une finalit de service ou intrt public au prix rpondant une finalit gestionnaire On dsigne conventionnellement par tarif ou tarification le prix de vente exig par toute entreprise publique en position de monopole exer ant une activit rpute intrt gnral ou produisant soit des marchandises soit des prestations dont les conditions de distribution sont sous contrle des pouvoirs publics2 Les prix stricto sensu indicateurs de raret relative des biens changs sur le march un moment donn rsultent de la confrontation de offre et de la demande on leur prte comme but de guider rationnellement les agents dans leurs choix Le tarif prix directement ou indirectement administr ne peut tre discut ni par le consommateur ni par usager La tarification dans optique de intrt gnral assume ordinairement une fonction distributive on doit voquer exemple frquent de transferts de revenus provenant du sous-paiement une prestation publique en la circonstance la rgle est le dficit exploitation de entreprise publique compens par les subventions de Etat La crise des finances publiques qui svit depuis le milieu des annes 1970 accul la plupart des gouvernements appliquer au secteur public une politique de vrit des prix Voil qui symbolise les modalits de la mutation une rationalit de service public une rationalit de management public

    Les Etats-Unis ont t parmi les premiers exprimenter le mana gement public dans ce pays la volont rationalisatrice pouss calculer partir une combinaison des paramtres efficacit et ef ficience une productivit de administration publique instar des variables Travail et Capital au sein de entreprise3 En France le management public intervient aprs les checs successifs de opration dite Organisation et mthode et de la rationalisation des choix budgtaires on apprhende comme une tentative amlioration des rsultats de action publique moyennant emprunt de procds supputs plus performants car relevant du mode de gestion des entreprises prives

    Ainsi que indiquent Laufer et Burlaud Les paradoxes du management public dans le spcial prcit de la Revue fran aise administration publique 39- 52

    Berthomieu La gestion des entreprises nationalises Paris PUF 1970 41 et suiv

    C.R Wise Recascino Wise Productivit et valuation de programmes aux Etats-Unis spcial prcit de la Revue fran aise administration publique 25-37 cf Terny une rationalisation des dcisions conomiques de Etat une fonction de prfrence tatique Analyse et prvision juillet-aot 1970 457-507

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  • March politique et politiques publiques

    Pour attrayante que puisse paratre la problmatique du management public elle en repose pas moins sur une hypothse contestable la dichotomie entre le secteur priv et le secteur public dont prcisment il importe de mesurer et de comparer les performances intrinsques Or en ralit leur constante interpntration les incessantes fluctuations de leurs frontires posent le problme de identification public/priv1

    Quant la concurrence inter-bureaucratique le modle de Niskanen qui en la matire fait autorit ne assigne aucunement de supprimer la bureaucratie mais simplement amender de rformer son comporte ment essentiellement en intgrant de manire comptitive au march politique Il peut agir soit une concurrence interne administration entre bureaux soit une concurrence externe confrontant administra tion ou certains de ses segments des entreprises prives Bon nombre de recherches et de propositions ont t effectues en ce sens De cette insertion dans un univers comptitif on escompte la conversion des bureaucrates aux principes du management Or cette mtamorphose est loin tre acquise car ainsi que objecte fort opportunment Armen Alchian est oublier la diffrence notable des entrepreneurs les bureaucrates ne sont pas propritaires de leur bureau2 o des fonc tions de motivation et de maximisation en dplaise Niskanen qui ne peuvent tre identiques concernant les bureaucrates et les chefs entreprise

    Dernier type de procdure envisage pour rationaliser et limiter action publique la rvlation des prfrences Ecole du Choix public constatant infinie difficult laborer des politiques publiques partir des procdures bases soit sur le vote rgle majoritaire directe dans le cadre un gouvernement reprsentatif indirect soit sur la bureaucratie se met en qute une procdure alternative3 Sans entrer dans des dtails par trop sophistiqus tout bien public tant suppos correspondre

    une valeur marchande opration consiste faire ressortir grce un modle conomtrique le prix acceptera de payer tout citoyen dsireux de consommer le bien en question Le prix sera major une taxe destine ddommager ceux qui ventuellement estiment ils sont lss par la production un tel bien Calcul de la sorte ce prix dfinit le cot opportunit et est cens tre applicable importe quelle mesure sociale une des critiques adresses univers partien et par ricochet la problmatique samuelsonienne des politiques publiques

    ce sujet Laufer et Burlaud Les paradoxes. art cit invoquent indtermination tandis que Lavau parle pour sa part de contamination rciproque de la socit civile et de Etat dans propos de trois livres sur Etat Revue fran aise de science politique 30 2) avril 1980 410

    A.A Alchian Some economics of property rights Politico 30 4) 1965 816-829 cit par R.G Hollombe et Price III Optimality and the institutional

    structure of bureaucracy Public Choice 33 1) 1978 55-69 J.N Tideman Tullock new and superior process for making social

    choices Journal of Political Economy 84 dcembre 1976 1145-1159 Groves Ledyard Optimal allocation of public goods solution to the free rider problem

    Econometrica 45 mai 1977 783-809 Margolis thought experiment on demand- revealing mechanisms Public Choice 38 1982 87-91

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  • Philippe-Alain Blr aid

    rside dans ignorance un tel cot1 On dcrit le processus de rv lation par la demande comme administrativement moins coteux comme plus efficient fournir les critres du bien-tre individuel et de la redistribution o sa supriorit prsomptive non seulement par rapport

    la bureaucratie mais aussi par rapport au march Et Tullock avouer quand nous en venons aux biens publics ou biens ayant quelque degr externalit le march ne peut plus logiquement assumer cette fonction de manire efficiente En clair couter les tenants du Choix public le vote avre impuissant rvler les choix collectifs sur le march politique tout autant que les prix sur le sous-march des biens publics Partant quelle validit confrer au fameux cot opportunit et son expression en prix Reste entire la question de dterminer par quelle mdiation oprera la rvlation des prfrences Loin aider contourner le thorme impossibilit Arrow la thorie dite de la rvlation emprunt une voie qui ressemble tonnamment une impasse

    Pour en terminer que penser de ces procdures construites pour dmanteler Etat-providence Au prtexte de rduire interventionnisme public aune de efficacit on lgitime les attaques les plus dures contre les dpenses sociales de solidarit sans pour autant en prendre rellement au pouvoir de la bureaucratie Ces approches participent sans exception de la dngation du principe quit et de la valorisation corrlative du principe efficience

    Quelles conclusions provisoires se dgagent de ces rflexions relatives une matire en pleine gestation identitaire et qui certainement invite

    des recherches ultrieures plus approfondies Il incombe de procder un bilan inventoriant aspects positifs et ngatifs de analyse corrle du march politique et des politiques publiques

    Quels sont les principaux enseignements porter au crdit des problmatiques examines

    Tout abord tude en interconnexion du march politique et des politiques publiques jette un clairage novateur et pertinent sur les fondements non pas thiques mais pistmologiques de agir individuel et de action collective

    Ensuite la thorie du march politique comporte le mrite avoir affranchi la rflexion politique de sa pr-dtermination macro-historique ou macro-sociologique avoir encontre des dmarches holistes redcouvert sinon rinvent individu avoir contribu de la sorte la rhabilitation dans le champ politique de action intentionnelle autre-

    Public Choice consacr un spcial la question printemps 1977 avec des contributions notamment de Tullock Practical problems and praticai solutions

    27-39 et The demand-revealing process as welfare indicator 53-63 et de J.N Tideman Ethical foundations of the demand-revealing process 71-77)

    The demand-revealing problems. art cite 59

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  • March politique et politiques publiques

    ment dit de autonomie des acteurs Elle offre travers explication individualiste du self interest une interprtation formellement cohrente du comportement des protagonistes de arne politique que reprsentent lecteur lu et le bureaucrate

    Enfin autre donne positive les avances de investigation sous angle des politiques publiques autorisent actuellement dmythifier comme une fausse question interrogation-tarte la crme servie par de nombreux spcialistes de la science administrative propos de ineffi cacit des bureaucrates1 Dsormais on tend analyser action de la bureaucratie non plus en termes (in efficience on ne cherche plus

    valuer sa capacit ou son incapacit atteindre des objectifs que lui aurait assigns le systme mais plutt au prisme une logique particulire une stratgie spcifie bref une rationalit incorporant une complexit intrts dont les siens Au-del de ses indniables qualits la thorie du march politique suscite la critique et laisse en suspens beaucoup de questions

    Sur le plan thorique la problmatique du march politique est quelque part victime de son ambition qui consiste traiter le march comme un paradigme interprtation gnrale du politique un peu la manire du modle parsonien ou du systmisme eastonien Dans cet espace oprationalit toutes les attitudes tant sociales conomiques et politiques se ramnent un comportement rationnel prsum type Voil un rductionnisme par holotypie grandement contestable

    Le mimtisme mthodologique amenant construire analyse poli tique par extrapolation de concepts emprunts conomie se rvle pour le moins critiquable Pour ne citer un exemple peut-on assimiler le vote un acte de pure rationalit conomique En autres termes la dcision de voter explique-t-elle exclusivement par anticipation comptable des avantages et des dsavantages a-t-il pas lieu pour apprhender correctement le phnomne lectoral et plus gnralement la dtermination des choix politiques de prendre en considration des aspects tels que la stratification sociale les variables socio-culturelles les reprsentations symboliques2 Autant de composantes que la probl matique du march politique fidle son modle matriciel le margi nalisme) incline vacuer Car ne pas imposer analyse largissement idoine ne pas rintroduire adquatement la perspective axiologique quivaudrait paradoxalement en ces temps de rejet de la vulgate marxiste enliser dans ornire un nouvel conomisme

    Les biais prcdemment enumeres dcoulent de ontologie de homme sous-jacente la problmatique du march politique idologi- quement imprime par le libralisme Car au regard un hyper-gosme

    Cf Breton Wintrobe Are bureaucrats inefficient Working paper for Interlaken Seminar on Analysis and Ideology Interlaken 27-31 mai 1980

    Ainsi que nous convie Weatheford dans son article Economie voting and the symbolic politics Argument an reinterpretation and synthesis American Political Science Review 77 1) 1983 158-174 cf galement D.O Sears R.R Lau T.R Tyler H.M Allen Jr Self interest vs symbolic politics in policy attitudes and presidential voting American Political Science Review 74 3) septembre 1980 670-684

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  • Philippe-Alain Blrald

    auto-finalisant bien malin en effet qui pourrait dceler ce qui pousse homme accepter les valeurs consensuelles constitutives de la cit Il importe par consquent en opposition une approche aussi trique de restituer individu intgralit de sa richesse humaine

    Entre individualisme thique1 sur lequel se fonde la thorie du march politique et thique solidariste condition existence des poli tiques publiques intervient une contradiction insurmontable cette incompatibilit thorique se surajoute objection Arrow qui proscrit carrment expression de intrt gnral partir des intrts individuels et en dduit impossibilit de facto de construire une procdure de choix collectifs obissant aux critres gnriques de la dmocratie sous- entendu rpondant la logique du vote2 La parenthse ferme reve nons-en antagonisme ci-devant dcel et qui tient en ceci comment dans une socit compose agents hyper-gostes instaurer des mca nismes de reprsentation politique Pourquoi laborer des politiques publiques de redistribution sociale Sous le signe de la rationalit manageriale au motif de sonner la charge contre Etat bureaucratico- providence la tendance native de la thorie du march politique im plique-t-elle pas une rfutation des concepts quit et de transferts sociaux La dmarche relevant de individualisme non pas seulement sur un plan mthodologique mais surtout sur un plan thique mine les soubassements de la solidarit organique qui selon la perspective chre Durkheim sert de ciment ordre social3 Quelque part individualisme achoppe sur la dimension collective de la rationalit et de action politiques4

    Le projet pistmologique initial riger le politique en science en adquation avec la rigueu