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1 © Association de Biologie Praticienne - 70 avenue des Gobelins - 75013 - PARIS Enregistrée à la Préfecture de la Région de l’Ile de France, délégation à la formation professionnelle, sous le N°11750 397 375 SIRET : 321 609 489 00034 - APE 913 E Association de Biologie Praticienne 70 avenue des Gobelins 75013 PARIS - Tél : 01 43 31 94 87 - Fax : 01 43 37 39 92 Email : [email protected] Confrontations en Cytologie hématologique Pr Marc ZANDECKI & Dr Franck GENEVIEVE - CHU d’Angers – www.hematocell.fr.st Année 2011 – Correction du 1 er envoi (Mars 2011) 327 / 376 réponses reçues par Internet 2011 1 1. Pyropoïkilocytose (Elliptocytose) héréditaire Avec une pathologie rare et peu connue, ce dossier a été perçu comme difficile et a suscité des discussions ou interrogations très intéressantes. Grande majorité (>80%) de réponses en faveur d’une anomalie membranaire constitutionnelle (évoquée dans l’énoncé), compatible pour la plupart des biologistes avec une sphérocytose héréditaire, mais tout de même 68 sur 327réponses reçues (21%) proposent une PPH ou une HE. Les signes réunis ici ne cadraient pas bien avec ce que l’on a coutume de voir au cours d’une SH, même après splénectomie (Cf. commentaires du dossier) : nous essaierons de revenir plus en détail sur la présentation et le diagnostic des SH lors d’une confrontation future. Une crise hémolytique liée à un déficit enzymatique érythrocytaire ne pouvait pas cliniquement s’évoquer chez ce patient complètement asymptomatique (absence d’anomalie en dehors des crises) ; la cytologie n’était pas tout à fait la même non plus et il s’agit par ailleurs d’une pathologie autosomique récessive (ici l’enfant, son père, sa tante et son grand père sont atteints) Pouvait-on évoquer une hémoglobinopathie (a ou b-thal) associée ? : à notre sens non, car le graphe montre une population normocytaire quantitativement au moins aussi importante que la population microcytaire, ne pouvant pas correspondre aux 0.2 G/L réticulocytes. L’interférence des microcytes avec la numération plaquettaire a bien été interprétée dans l’ensemble. 2011 1 2. Splénomégalie myéloïde chronique (myélofibrose primitive) 84% des réponses en faveur de ce diagnostic, avec un souvent un commentaire soulignant le mauvais pronostic ou la possible évolution blastique. Les dacryocytes sont rapportés dans 87% des réponses, les micromégacaryocytes dans seulement 27%. Le % moyen retrouvé pour les blastes : 3.7% (0-18%) et pour les érythroblastes : 3.7% (0-12%). Le diagnostic de LMC pouvait être proposé comme diagnostic différentiel mais n’était pas logique à envisager en premier lieu (absence d’hyperleucocytose). Compte tenu de la blastose modérée et des dystrophies cellulaire, l’hypothèse d’une myélodysplasie pouvait se discuter, bien que la clinique (énorme splénomégalie) ne soit pas très classique pour ce diagnostic. 2011 1 3. Thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes. Il fallait évoquer ici la possibilité d'une thrombopénie constitutionnelle (tous les diagnostics en ce sens ont été considérés comme convenables: 91 %), et proposer une expertise en ce sens dans un laboratoire spécialisé. Le diagnostic précis était facultatif. En plus il est souvent complexe, avec des variations par rapport aux définitions, comme c'était le cas ici (probable May Hegglin, mais avec très très rares corps de May Hegglin dans les neutrophiles). L'hypothèse d'un PTI était moins crédible, compte tenu de l'histoire de la maladie. Même s'il existait une petite fébricule le jour de la NFS, les N° des PLT précédentes devaient être prises en compte. Dans un PTI les PLT sont parfois grandes ou très grandes, mais seulement pour quelques unes, alors qu'ici les PLT géantes étaient largement majoritaires. L'histoire de cet enfant est très significative: errance diagnostique par insuffisance d'alerte de la part des biologistes qui ont réalisé les NFS successives. Vous êtes au premier plan pour la découverte de ce type d'affection. 2011 1 4. Rechute de myélome avec présence de plasmoblastes dans le sang. La présence de cellules anormales évoquant la rechute ou reprise évolutive du myélome devait être proposée : 86 % de bonnes réponses (quelle que soit la terminologie). Utiliser le terme de leucémie à plasmocytes était un peu excessif (nécessité d'une plasmocytose > 20% ou > 2G/L), mais compréhensible pour le cas présent et retenu comme réponse valide. Le commentaire proposé par l'abonné 800785 : "présence de cellules anormales = plasmocytes dystrophiques" convenait bien. L'hypothèse d'un lymphome disséminé et de la nécessité de phénotyper pour avancer étaient des propositions en retrait. Parfois, quand les plasmocytes éclatent, leur cytoplasme et leur membrane externe peuvent prendre un aspect "villeux", qui a orienté quelques uns vers le diagnostic de lymphome à cellules villeuses, ou l'a fait évoquer (pour l'éliminer parfois aussi). N'oubliez pas le contexte : le patient était algique, et il fallait aller rapidement à l'essentiel.

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Page 1: Association de Biologie Praticienne · Formule Pourcentage Valeur absolue (Giga/l) Polynucléaires neutrophiles 51 % 3.8 Polynucléaires éosinophiles 7 % 0.5 ... Monocytes 9 % 0.7

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Enregistrée à la Préfecture de la Région de l’Ile de France, délégation à la formation professionnelle, sous le N°11750 397 375 SIRET : 321 609 489 00034 - APE 913 E

Association de Biologie Praticienne 70 avenue des Gobelins 75013 PARIS - Tél : 01 43 31 94 87 - Fax : 01 43 37 39 92

Email : [email protected]

Confrontations en Cytologie hématologique Pr Marc ZANDECKI & Dr Franck GENEVIEVE - CHU d’Angers – www.hematocell.fr.st

Année 2011 – Correction du 1er envoi (Mars 2011) 327 / 376 réponses reçues par Internet 2011 1 1. Pyropoïkilocytose (Elliptocytose) héréditaire Avec une pathologie rare et peu connue, ce dossier a été perçu comme difficile et a suscité des discussions ou interrogations très intéressantes. Grande majorité (>80%) de réponses en faveur d’une anomalie membranaire constitutionnelle (évoquée dans l’énoncé), compatible pour la plupart des biologistes avec une sphérocytose héréditaire, mais tout de même 68 sur 327réponses reçues (21%) proposent une PPH ou une HE. Les signes réunis ici ne cadraient pas bien avec ce que l’on a coutume de voir au cours d’une SH, même après splénectomie (Cf. commentaires du dossier) : nous essaierons de revenir plus en détail sur la présentation et le diagnostic des SH lors d’une confrontation future. Une crise hémolytique liée à un déficit enzymatique érythrocytaire ne pouvait pas cliniquement s’évoquer chez ce patient complètement asymptomatique (absence d’anomalie en dehors des crises) ; la cytologie n’était pas tout à fait la même non plus et il s’agit par ailleurs d’une pathologie autosomique récessive (ici l’enfant, son père, sa tante et son grand père sont atteints) Pouvait-on évoquer une hémoglobinopathie (a ou b-thal) associée ? : à notre sens non, car le graphe montre une population normocytaire quantitativement au moins aussi importante que la population microcytaire, ne pouvant pas correspondre aux 0.2 G/L réticulocytes. L’interférence des microcytes avec la numération plaquettaire a bien été interprétée dans l’ensemble. 2011 1 2. Splénomégalie myéloïde chronique (myélofibrose primitive) 84% des réponses en faveur de ce diagnostic, avec un souvent un commentaire soulignant le mauvais pronostic ou la possible évolution blastique. Les dacryocytes sont rapportés dans 87% des réponses, les micromégacaryocytes dans seulement 27%. Le % moyen retrouvé pour les blastes : 3.7% (0-18%) et pour les érythroblastes : 3.7% (0-12%). Le diagnostic de LMC pouvait être proposé comme diagnostic différentiel mais n’était pas logique à envisager en premier lieu (absence d’hyperleucocytose). Compte tenu de la blastose modérée et des dystrophies cellulaire, l’hypothèse d’une myélodysplasie pouvait se discuter, bien que la clinique (énorme splénomégalie) ne soit pas très classique pour ce diagnostic. 2011 1 3. Thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes. Il fallait évoquer ici la possibilité d'une thrombopénie constitutionnelle (tous les diagnostics en ce sens ont été considérés comme convenables: 91 %), et proposer une expertise en ce sens dans un laboratoire spécialisé. Le diagnostic précis était facultatif. En plus il est souvent complexe, avec des variations par rapport aux définitions, comme c'était le cas ici (probable May Hegglin, mais avec très très rares corps de May Hegglin dans les neutrophiles). L'hypothèse d'un PTI était moins crédible, compte tenu de l'histoire de la maladie. Même s'il existait une petite fébricule le jour de la NFS, les N° des PLT précédentes devaient être prises en compte. Dans un PTI les PLT sont parfois grandes ou très grandes, mais seulement pour quelques unes, alors qu'ici les PLT géantes étaient largement majoritaires. L'histoire de cet enfant est très significative: errance diagnostique par insuffisance d'alerte de la part des biologistes qui ont réalisé les NFS successives. Vous êtes au premier plan pour la découverte de ce type d'affection. 2011 1 4. Rechute de myélome avec présence de plasmoblastes dans le sang. La présence de cellules anormales évoquant la rechute ou reprise évolutive du myélome devait être proposée : 86 % de bonnes réponses (quelle que soit la terminologie). Utiliser le terme de leucémie à plasmocytes était un peu excessif (nécessité d'une plasmocytose > 20% ou > 2G/L), mais compréhensible pour le cas présent et retenu comme réponse valide. Le commentaire proposé par l'abonné 800785 : "présence de cellules anormales = plasmocytes dystrophiques" convenait bien. L'hypothèse d'un lymphome disséminé et de la nécessité de phénotyper pour avancer étaient des propositions en retrait. Parfois, quand les plasmocytes éclatent, leur cytoplasme et leur membrane externe peuvent prendre un aspect "villeux", qui a orienté quelques uns vers le diagnostic de lymphome à cellules villeuses, ou l'a fait évoquer (pour l'éliminer parfois aussi). N'oubliez pas le contexte : le patient était algique, et il fallait aller rapidement à l'essentiel.

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Enregistrée à la Préfecture de la Région de l’Ile de France, délégation à la formation professionnelle, sous le N°11750 397 375 SIRET : 321 609 489 00034 - APE 913 E

Participation très conséquente, avec de très nombreuses bonnes réponses, souvent bien étayées. Les Biologistes libéraux ont fait armes égales avec leurs collègues des centres hospitaliers quant à la pertinence des commentaires.

Certains commentaires ou réponses étaient un peu "rapides", montrant une lecture et une assimilation insuffisante des données biocliniques de chaque patient.

Bien confraternellement.

Dr Franck GENEVIEVE Pr Marc ZANDECKI

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Dossier 2011- 1/1: Pyropoïkilocytose (elliptocytose) héréditaire

Données clinico-biologiques: Un hémogramme est réalisé pour cet homme de 32 ans et de type caucasien, en bonne santé, chez lequel existe la notion d'une sphérocytose héréditaire : il a été splénectomisé à l'âge de 5 ans en raison d'une importante hyperhémolyse (sans problème de santé notable depuis et pas de suivi médical régulier) et sa sœur ainsi que son père auraient été également splénectomisés. L'hémogramme montre les chiffres et les courbes suivantes (cf.images): GB : 7.62 G/l, GR : 7.25 T/l, Hb : 15.4 g/dl, hte : 47 %, CCMH : 32.9%, TCMH : 23.1 pg, réticulocytes : 194 G/l Les plaquettes sont comptées à 530 G/l par le canal impédance, avec l'alarme « distribution anormale », à 457 G/l dans le canal optique et à 420 G/l en hématimètre. Le VGM n'est pas rendu mais l'écran « recherche » de l'automate rend VGM1 : 49 fl et VGM2 : 96 fl L'hémogramme est réalisé car son premier enfant, un garçon de 3.50 kg, né à terme il y a quelques jours présente un ictère et un hémogramme montrant une courbe de distribution des hématies et des anomalies morphologiques tout à fait similaires. Que voyez-vous et qu'en pensez-vous ? Quel(s) examen(s) complémentaire(s) proposeriez-vous pour confirmer une hypothèse?

Résultats attendus: Pathologie constitutionnelle de la membrane érythrocytaire Elliptocytose héréditaire Pyropoïkilocytose héréditaire

Poîkilocytose Elliptocytes Microsphérocytes Fragments Corps de Howell-Jolly

Formule Pourcentage Valeur absolue (Giga/l) Polynucléaires neutrophiles 51 % 3.8 Polynucléaires éosinophiles 7 % 0.5 Polynucléaires basophiles 2 % 0.2 Lymphocytes 31 % 2.4 Monocytes 9 % 0.7

Commentaire:

L'hémogramme est particulier de par le nombre élevé des hématies et leur répartition en une courbe bi-modale faisant apparaitre une population très microcytaire (VGM 49 fl) à côté d'une population normocytaire (VGM96 fl) se terminant par une « trainée macrocytaire » avec des éléments autour de 150 fl. Il n'y a pas d'anémie mais le nombre de réticulocytes est augmenté, en faveur d'une anémie régénérative compensée.

Le nombre des plaquettes est vraisemblablement surestimé dans le canal impédance : la courbe montre dans sa partie droite l'absence de retour à la ligne de base, avec une difficulté pour l'automate de positionner un seuil au sein d'éléments pouvant correspondre soit à des plaquettes de grande taille (ou des agrégats plaquettaires), soit à des hématies microcytaires ou des fragments hématiques. En mode optique, le nombre des plaquettes est plus faible, mais le graphe (cf. images) montre une mauvaise dissociation entre des hématies de très petite taille et la population plaquettaire, conduisant à vérifier la numération en hématimètre.

Le frottis sanguin montre une morphologie érythrocytaire très particulière avec une aniso-poïkilocytose très marquée. Les hématies de morphologie normale sont rares et on observe un mélange fait d'elliptocytes plutôt de grande taille associés à de très nombreux fragments et à quelques microsphérocytes. Certains fragments sont minuscules, permettant de comprendre la répartition observée en impédance et l'alarme générée quant à la détermination plaquettaire. De façon étonnante, les corps de Howell-Jolly sont plutôt rares chez ce patient splénectomisé (présence possible d'une rate accessoire).

Que faut-il en en penser ?

L'aspect observé n'est pas celui que l'on observe classiquement chez un sujet porteur de sphérocytose héréditaire splénectomisé :

• on ne s'attend pas à observer une double population érythrocytaire de ce type, notamment avec un pic microcytaire : si une double population peut se voir, elle correspond plus volontiers à la présence d'une population plutôt macrocytaire liée à une hyperréticulocytose importante.

• La CCMH est souvent discrètement augmentée, suggérant une déshydratation des hématies.

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• Le frottis montre habituellement de nombreuses hématies sphériques hyperdenses, parfois des hématies « pincées » ou hématies en « champigon », une polychromasie (réticulocytes) et de nombreux corps de Howell Jolly. Il n'y a habituellement pas de fragments.

La présence, chez le père comme chez l'enfant des mêmes anomalies est cependant en faveur d'une anomalie constitutionnelle de la membrane érythrocytaire : la double population érythrocytaire sur l'histogramme de distribution volumique avec une population normocytaire et une population très microcytaire, la forme elliptocytaire de presque toutes les hématies et les très nombreux fragments sont très évocateurs d'une forme particulière d'Elliptocytose héréditaire (EH), appelée poïkilocytose héréditaire ou encore pyropoïkilocytose héréditaire (PPH).

Les fragments hématiques sont différents de schizocytes d'origine mécanique tels que l'on peut en voir au cours des microangiopathies (absences d'éléments à bord rectiligne ou présentant un angle saillant). Le contexte clinique décrit ici n'est a fortiori pas compatible avec une telle étiologie. Outre les elliptocytoses sévères, on peut observer des hématies fragmentées dans d'autres circonstances : thalassémies sévères, troubles intrinsèques de la vitamine B12 et des folates (parfois dans les états carentiels), l'acidurie orotique (déficit en UMP synthétase).

Une crise hémolytique liée à un déficit enzymatique érythrocytaire ne pouvait pas cliniquement s'évoquer chez ce patient complètement asymptomatique (absence d'anomalie cytologique en dehors des crises) ; la cytologie ne serait pas tout à fait la même non plus (ghosts et hémi-ghosts). Il s'agit par ailleurs d'une pathologie autosomique récessive (ici l'enfant, son père, sa tante et son grand père sont atteints).

Pouvait-on évoquer une hémoglobinopathie (a ou b-thal) associée ? : à notre sens non, car le graphe montre une population normocytaire quantitativement au moins aussi importante que la population microcytaire, ne pouvant pas correspondre aux 200 G/L réticulocytes. Dans le cas d'une thalassémie hétérozygote associée, toutes les hématies seraient microcytaires (et le VGM sans doute pas aussi faible que dans le cas présent)

L'ektacytométrie osmotique, basée sur la détermination de la déformabilité des hématies à l'application d'une force hydrodynamique, a montré dans les deux cas une courbe typique de pyropoïkilocytose héréditaire avec unindex de déformabilité érythrocytaire très abaissé par rapport au témoin

L'analyse des protéines membranaires érythrocytaires par SDS-PAGE, qui permet de mettre en évidence la présence des formes anormales (mutantes) ou l'insuffisance/absence de protéines, est prévue.

Elliptocytoses et pyropoïkilocytose héréditaires : quelques informations ou points de rappel

Source : Dr T. Cynober « Elliptocytose familiale » (septembre 2006) http://www.orpha.net

• Affections du cytosquelette du globule rouge caractérisées par la présence d'un nombre élevé d'hématies en forme d'ellipse, appelées elliptocytes, sur le frottis sanguin.

• Se rencontrent dans toutes les populations : rares en Europe (2 à 5/10 000 personnes), jusqu'à 1% de la population en Afrique équatoriale

• Mode de transmission autosomique dominant. L'anomalie génétique est variable. Dans environ 70% des cas, mutation sur le gène SPTA1 codant pour la chaîne alpha de la spectrine, entraînant un point de faiblesse dans le maillage constituant le squelette érythrocytaire.

• Expression clinique très hétérogène et variable avec l'âge : formes hétérozygotes asymptomatiques ou peu symptomatiques chez le grand enfant et l'adulte, souvent de découverte fortuite sur le frottis sanguin. Existence de formes plus sévères s'accompagnant d'une anémie variable, de modérée à très sévère, et de la présence d'une poïkilocytose composée de cellules fragmentées, de microelliptocytes et de microsphérocytes. Dans ces formes, les hématies ont une membrane beaucoup plus instable, très sensible à la chaleur, et fragmentent dès 37° C, d'où le nom de pyropoïkilocytose héréditaire (PPH).

• Dans les EH simples, les automates à numération ne déclenchent aucune alarme. Dans les cas de PPH, les automates signalent, outre l'anémie, la présence d'une double population érythrocytaire sur l'histogramme de répartition des volumes corpusculaires avec une population normocytaire et une population très microcytaire.

• Dans les formes sévères, des investigations complémentaires s'imposent chez le propositus et chez ses parents (électrophorèse des protéines de la membrane érythrocytaire et recherche du polymorphisme alpha LELY). Les résultats apportent des éléments prédictifs de l'évolution de l'anémie chez l'enfant et permettent de donner un conseil génétique aux parents. Le traitement comporte la prescription d'acide folique en cas d'hémolyse, des transfusions de culots globulaires en cas d'anémie mal tolérée et la splénectomie après l'âge de 5 ans dans les formes qui restent sévères.

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Dossier 2011- 1/1: Pyropoïkilocytose (elliptocytose) héréditaire Le frottis sanguin montre une aniso-poïkilocytose très marquée. Les hématies de morphologie normale sont rares et on observe un mélange fait d'elliptocytes plutôt de grande taille associés à de très nombreux fragments et à quelques microsphérocytes. Certains fragments sont minuscules, permettant de comprendre la répartition observée en impédance et l'alarme générée quant à la détermination plaquettaire. De façon étonnante, les corps de Howell-Jolly sont plutôt rares (F) chez ce patient splénectomisé (présence possible d'une rate accessoire).

A B

C D

E F

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Dossier 2011-1/2: Splénomégalie myéloïde chronique (myélofibrose primitive)

Données clinico-biologiques:

Un hémogramme est demandé chez cet exploitant agricole de 54 ans sans antécédent particulier, dans un contexte d'amaigrissement de 10 kg en un an associé à une asthénie et des douleurs lombaires. L'examen clinique réalisé devant l'altération de l'état général permet de découvrir une splénomégalie massive, descendant jusqu'à la fosse iliaque gauche et ne retrouve ni adénopathie des aires ganglionnaires, ni syndrome fébrile ou infectieux.

Le scanner montre une importante hépatosplénomégalie, prédominant au niveau de la rate qui refoule les structures digestives et vasculaires vers le côté droit mais sans signe de complication associée.

L'hémogramme est le suivant :

GB : 7.5 G/l,GR : 2.48 T/l, Hb : 7.3 g/dl, VGM : 95 fl, hte : 22.3 %, CCMH : 33 %, TCMH : 31.9 pg, Plaquettes : 201 G/l, Réticulocytes : 74 G/l

Quel serait votre diagnostic ?

Résultats attendus:

• Myélofibrose primitive ou splénomégalie myéloïde chronique • Syndrome myéloprolifératif • Acceptable : transformation blastique de SMP

Formule Pourcentage Valeur absolue (Giga/l) Polynucléaires neutrophiles 41 % 3.0 Polynucléaires éosinophiles 1 % 0.1 Polynucléaires basophiles 6 % 0.4 Lymphocytes 17 % 1.6 Monocytes 7 % 0.5 Métamyélocytes neutrophiles 6 % Myélocytes neutrophiles 12 % Promyélocytes neutrophiles 0 % Blastes 7 % Cellules anormales (préciser en commentaire) 3 % Erythroblastes (pour 100 leucocytes) 4 %

Commentaire:

L'hémogramme montre une anémie profonde, normochrome et normocyaire, non régénérative. Les plaquettes sont rendues en nombre normal mais avec l'alarme « suspicion d'agrégats plaquettaires » . Le nombre des leucocytes est normal mais la formule automatisée est associée aux messages « granulocytes immatures », « blastes ? », « érythroblastes ? ». Tous ces paramètres justifient l'étalement et l'expertise cytologique du frottis sanguin.

Le frottis sanguin est particulièrement riche en anomalies morphologiques :

Concernant la lignée érythrocytaire : les hématies montrent une aniso-poïkilocytose importante et la présence de nombreux dacryocytes. Des hématies à ponctuations basophiles sont fréquentes (réticulocytes anormaux). Un petit nombre d'érythroblastes (3 à 5 pour 100 leucocytes) est observé : ce sont essentiellement des érythroblastes acidophiles, assez souvent dystrophiques (cytoplasme feuilleté).

Concernant la lignée plaquettaire : l'anisocytose plaquettaire est franche, avec de nombreuses plaquettes géantes. Des micromégacaryocytes sont souvent observés, leur nombre étant estimé à 3 pour 100 leucocytes décomptés. Certains sont bien identifiables, avec un cytoplasme visible dont la texture se rapproche beaucoup de celle des plaquettes ; d'autres ont un cytoplasme très réduit, limité à quelques petites expansions ou tout à fait invisible et collé contre la membrane nucléaire. Quelques grands fragments cytoplasmiques mégacaryocytaires sont parfois rencontrés.

Concernant les leucocytes : les lymphocytes et monocytes sont peu nombreux et ont une morphologie normale ; les granulocytes neutrophiles matures présentent pour certains une faible segmentation nucléaire. Les granulations sont bien visibles. Il existe une myélémie d'importance modérée (environ 15%), faite surtout de myélocytes et de quelques métamyélocytes et rares promyélocytes. Enfin, on note une blastose circulante estimée à 6%, constituée de blastes évoquant morphologiquement des myéloblastes peu différenciés.

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Au total, le tableau clinico-biologique associant hépatosplénomégalie, anémie normochrome normocytaire non régénérative, érythromyélémie, aniso-poïkilocytose avec dacryocytes est très évocateur d'une myélofibrose primitive ou splénomégalie myéloïde chronique. Le nombre de blastes circulants est encore compatible avec une phase chronique mais peut faire évoquer une possible transformation leucémique.

La biopsie ostéomédullaire réalisée chez ce patient confirme le diagnostic, montrant un syndrome myéloprolifératif chronique de type myélofibrose primitive, stade MF3 selon l'OMS 2008

Le bilan complémentaire a comporté entre autres

- la recherche du chromosome Philadelphie (ou réarrangement bcr-abl) : négative, permettant d'écarter formellement une LMC

- la recherche d'une mutation du gène de la tyrosine kinase JAK2 : négative (positive seulement dans 50% des cas)

Compte tenu de la présence d'éléments de mauvais pronostic (signes généraux, splénomégalie massive, blastose circulante > 1%, anémie sévère et besoins transfusionnels élevés), la décision d'une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques a été prise, avec splénectomie préalable.

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Dossier 2011-1/2: Splénomégalie myéloïde chronique (myélofibrose primitive) A : nombreux dacryocytes. Présence d’hématies à ponctuations basophiles (réticulocytes anormaux = dysérythropoïèse) B : un promyélocyte, un blaste et un micromégacaryocyte (en bas à gauche) C : myélocytes D : érythroblastes E : blastes F : plaquettes géantes G : micromégacaryocytes et fragments cytoplasmiques mégacaryocytaires

A B

C D

E F

G

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9 © Association de Biologie Praticienne - 70 avenue des Gobelins - 75013 - PARIS

Enregistrée à la Préfecture de la Région de l’Ile de France, délégation à la formation professionnelle, sous le N°11750 397 375 SIRET : 321 609 489 00034 - APE 913 E

Dossier 2011-1/3: Suspicion de thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes

Données clinico-biologiques:

Ce petit garçon de 14 mois présente un asthme du nourrisson et, dans le cadre d'un bilan général, un hémogramme a été réalisé il y a 3 mois, qui montrait une thrombopénie (65 G/L) isolée [la recherche d'amas plaquettaires était négative et il était mentionné "présence de grandes plaquettes" sur le résultat].

Un contrôle réalisé quelques semaines plus tard retrouvait une N° PLT = 39 G/L. Le Pédiatre propose aujourd'hui de refaire le bilan de cette thrombopénie. L'examen clinique est normal, notamment sans purpura. L'enfant est un peu fiévreux le jour du prélèvement.

L'automate d'hémogramme retrouve: leuco = 8.4 G/L; Hb = 11.5 g/dL; VGM = 82 fL; CCMH = 32.5 g/dL; N° PLT = 61 G/L, Volume Moyen Plaquettaire = 15.9 fL. Deux messages d'alerte: "suspicion d'amas plaquettaires", et "distribution anormale des plaquettes".

Que voyez - vous? Que pensez-vous?

Résultats attendus:

• Plaquettes géantes (S 28) • Thrombopénie à grandes plaquettes • Suspicion de thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes

Formule Pourcentage Valeur absolue (Giga/l) Polynucléaires neutrophiles 32 % 2.7 Polynucléaires éosinophiles 2 % 0.2 Polynucléaires basophiles 1 % 0.1 Lymphocytes 53 % 4.4 Monocytes 9 % 0.8 Lymphocytes hyperbasophiles (type MNI) 2 % Myélocytes neutrophiles 1 % Commentaire: Que voit-on? - L'examen du frottis sanguin confirme l'absence d'amas de PLT, la thrombopénie vraie, et montre que toutes les PLT sont de très grande taille (taille parfois proche de celle d'une hématie).

- La formule leucocytaire est normale, en dehors d'un petit nombre de cellules immunostimulées (2%). Il n'y a pas de cellules blastiques. L'examen attentif des polynucléaires neutrophiles ne montre pas d'inclusions bleutées (= corps de May-Hegglin, qui auraient aidé à préciser une maladie de May - Hegglin) (en fait il y a de très discrètes taches bleutées dans 5% des neutrophiles, mais ce nombre faible ne permet pas d'affirmer la maladie correspondante).

- La morphologie érythrocytaire est normale (notamment pas de schizocytes).

Trois étapes dans la démarche diagnostique:

1. Il s'agit d'une thrombopénie vraie: dans quelles situations observe-t-on une thrombopénie ?

Thrombopénies d'origine centrale.

• envahissement de la moelle osseuse (leucémies, lymphomes, myélofibrose, métastases de tumeurs solides)

• aplasie médullaire • carence vitamine B12 ou en folates • syndromes myélodysplasiques • toxiques, médicaments (chimiothérapies) • alcool : intoxication aiguë alcoolique • thrombopénies/thrombopathies acquises ou constitutionnelles

Séquestration splénique.

• Thrombopénie de dilution après transfusions massives • Hyperthermie

Thrombopénies d'origine périphérique. - Consommation excessive : CIVD, Microangiopathies thrombotiques (thromboses) - Auto-immunes :

• infections virales (VIH, hépatites B ou C, EBV, CMV,...)

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• purpura thrombopénique immunologique (enfant, adulte) • maladies auto-immunes (lupus, syndrome des antiphospholipides) • médicaments (immuno-allergiques) : risque hémorragique, ou thrombotique (héparine)

- Allo-immunes :

• néo-natale (anti HPA), équivalent de la maladie hémolytique du nouveau né (Rhésus, ABO) • post transfusionnelle (purpura post transfusionnel)

2. Parmi ces situations, lesquelles montrent-elles une thrombopénie isolée?

En pratique, chez l'enfant, le PTI est à évoquer en premier lieu (chez l'adulte il y a plus d'étiologies), et très éventuellement les thrombopénies / thrombopathies constitutionnelles.

3. Ici la thrombopénie est constituée de plaquettes très anormales, géantes, qui évoquent une thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes plutôt qu'un PTI.

Il existe de nombreuses catégories de thrombopénies / thrombopathies constitutionnelles, toutes très rares. On les suspecte devant:

(1) un syndrome hémorragique débutant dès la naissance ou dans l'enfance, et le bilan complémentaire incluant un hémogramme fait découvrir (2) la thrombopénie et/ou (3) des anomalies morphologiques des plaquettes. Parfois il n'y a un syndrome hémorragique que dans un contexte traumatique important ou chirurgical, et parfois le patient est totalement asymptomatique, la découverte de l'anomalie étant fortuite sur l'hémogramme et le frottis sanguin...

Le nombre des PLT est diminué ou normal; la morphologie des PLT sur lame et le volume moyen plaquettaire sont des éléments majeurs d'orientation; la recherche de corps bleus de May - Hegglin (ressemblent aux corps de Döhle) dans la majorité des neutrophiles fait évoquer; chez un patient ayant une thrombopénie à grandes plaquettes, une maladie de May-Hegglin.

Les automates ont souvent des difficultés à énumérer correctement les grandes plaquettes, ce qui explique des résultats de N° PLT variables d'un prélèvement à l'autre, évocateurs d'une thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes.

Les principales thrombopénies/ thrombopathies constitutionnelles à connaître sont:

Petites PLT

Syndrome de Wiskott Aldrich Syndrome hémorragique important Thrombopénie sévère (souvent < 20 G/L) (rare ++)

Grandes PLT

M de Bernard Soulier [déficit en complexe GpIb-IX-V Macrothrombopénie méditerranéenne Anomalie du gène de la chaîne lourde de myosine non musculaire MYH9 : maladie de May - Hegglin (et variants) Syndrome des PLT grises

Syndrome hémorragique important Thrombopénie sévère (souvent < 30 G/L) (rare +++) Incidence inconnue (fréquente ?) Pas de syndrome hémorragique; découverte fortuite Thrombopénie modérée ou absente (90-200G/L) Syndrome hémorragique absent ou modéré (peut se prolonger avec la chirurgie). Thrombopénie modérée : 40-100 G/L (rare +) Saignements modérés à sévères Thrombopénie modérée (50 - 200 G/L) (rare +++)

Une thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes devait donc être évoquée pour notre jeune patient, qui a été ensuite orienté vers un spécialiste pour divers examens complémentaires :

- Cytométrie de flux pour rechercher l'expression de glycoprotéines de la membrane plaquettaire (ici pas d'anomalies retrouvées),

- Etude moléculaire, orientée d'abord vers la moins rares de ces maladies : la maladie de May-Hegglin ou un variant. Le gène MYH9 est retrouvé muté : ceci affirme la maladie de May-Hegglin. L'absence de corps de May-Hegglin est possible (mutant particulier) ou peut correspondre à une forme variante de la maladie (associant parfois une insuffisance rénale, une surdité, une cataracte).

C'est une maladie sans saignement spontané, mais qui nécessite une protection par transfusion de plaquettes normales en cas de fort traumatisme crânien ou de chirurgie. Maladie constitutionnelle, elle est souvent retrouvée dans la fratrie: un grand père semblait atteint (décédé); les deux parents ont ici une N° des PLT normale et une morphologie plaquettaire normale également.

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Dossier 2011-1/3: Suspicion de thrombopénie constitutionnelle à grandes plaquettes Plaquettes de taille très supérieure à la normale, atteignant parfois le diamètre d’une hématie. De très rares polynucléaires neutrophiles montraient une zone bleutée, orientant vers la maladie de May-Hegglin ou l’une de ses variantes (anomalie moléculaire commune sur le gène MYH9). L’enfant était fiévreux le jour de la consultation, et quelques cellules lymphoïdes immunostimulées, d’aspect « plasmocytoïde » ou « lympho-plasmocytaire » étaient présentes sur le frottis.

A B

C D

E F

G

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Dossier 2011-1/4: Rechute de myélome avec présence de plasmoblastes dans le sang

Données clinico-biologiques:

Patiente de 57 ans. Un myélome multiple a été diagnostiqué il y a 18 mois: hypoprotidémie avec hypogammaglobulinémie (5g/L), sans pic monoclonal mais avec excès de chaînes légères libres sériques Kappa; pas de protéinurie. L'hémogramme était normal, le myélogramme irréalisable (aspiration impossible à deux reprises). La Biopsie Ostéo Médullaire était de richesse normal et retrouvait 60% de plasmocytes avec noyau volumineux et volontiers nucléolé. L'immunohistochimie était négative avec les anticorps anti chaînes lourdes mais tous les plasmocytes étaient intensément marqués avec l'anti Kappa. Plusieurs images géodiques étagées. Le diagnostic de myélome à chaînes légères kappa est posé et la patiente traitée selon un protocole de chimiothérapie initiale suivi d'une autogreffe de cellules souches périphériques, cette dernière réalisée il y a 10 mois.

L'électrophorèse des protéines sériques est normale depuis 6 mois. Elle est suivie régulièrement (NFS et électrophorèse des protéines sériques normales il y a 2 mois). Des douleurs dorsales et une fièvre font évoquer soit une reprise de la maladie (douleurs osseuse) soit des douleurs musculaires.

Un hémogramme (leucocytes = 6.2 G/L; Hb = 10.9 g/dL; VGM= 89 fL; PLT= 97 G/L) et une électrophorèse des protéines sériques sont prescrits. Le biologiste vient montrer son frottis sanguin car il est ennuyé par la présence de cellules éclatées et ce qui lui semble être des cellules anormales (rares): lymphocytes activés?

Qu'en pensez-vous?

Résultats attendus:

Rechute de myélome avec présence de plasmoblastes dans le sang

Formule Pourcentage Valeur absolue (Giga/l) Polynucléaires neutrophiles 56 % 3.5 Polynucléaires éosinophiles 2 % 0.1 Polynucléaires basophiles 0 % Lymphocytes 32 % 2.0 Monocytes 8 % 0.5 Myélocytes neutrophiles 1 % Cellules anormales (préciser en commentaire) 1 %

Commentaire:

L'observation du frottis sanguin montre les divers types de leucocytes normaux et des cellules éclatées. L'examen dans diverses régions du frottis (bords, franges, zones épaisses, dépôt de la goutte) montre des cellules de grande taille, avec rapport N/C élevé et noyau (contour régulier ou non) à chromatine finement dessinée mais nettement colorée, avec parfois un nucléole net. Le cytoplasme est très basophile. Il y a une petite myélémie.

Les situations au cours desquelles son rencontre des cellules éclatées sont :

• syndromes mononucléosiques, • LLC (une partie des patients), • Leucémie aiguë lymphoblastique, • Lymphomes à grandes cellules disséminés, • Leucémie à plasmocytes, • Sangs vieillis (et frottis très mal étalés).

Ici les quelques cellules très grandes et très basophiles étaient anormales : elles étaient trop monomorphes et trop immatures pour évoquer des lymphocytes activés d'un état fébrile. Ces cellules ne ressemblaient pas à ce que l'on voit habituellement dans les hémopathies myéloïdes (blastes de LAM ou de myélodysplasie). Sans renseignements cliniques ont pouvait penser à des cellules d'un lymphome à grandes cellules en voie de dissémination. Ici, le contexte clinique orientait vers une rechute de la maladie initiale, avec petite dissémination sanguine : la morphologie particulière évoquait des plasmoblastes (plasmocytes de grande taille, avec rapport N/C > 0.6, présentant une chromatine fine et un nucléole net).

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La présence d'un faible nombre de plasmocytes tumoraux dans le sang (0.5-2%) est fréquente pour les myélomes de forte masse tumorale. En rechute, ils peuvent soit apparaître, soir réapparaître. Le fait d'observer ici des plasmoblastes est un élément supplémentaire de mauvais pronostic (ils étaient présents dans la moelle lors de la BOM initiale). Ils sont souvent présents quand il existe des anomalies du génome de mauvais pronostic [délétion 17p ou translocation (4;14)] ; la recherche de ces anomalies moléculaires n'avait pu être réalisée au diagnostic du fait de l'impossibilité d'obtenir de la moelle osseuse à l'aspiration.

Pour cette patiente l'électrophorèse des protéines sériques a montré la réapparition de l'hypogammaglobulinémie. Le myélogramme, compte tenu des difficultés lors du diagnostic, n'a pas été réalisé.

La conduite thérapeutique est actuellement en discussion: chimiothérapie? Nouvelle autogreffe (il restait 50% du greffon initial) ? Recherche d'un donneur compatible (greffe allogénique)?

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Dossier 2011-1/4: Présence de plasmoblastes dans le sang (rechute de myélome multiple) A. Monocytes. B. Cellule éclatée. C. cellule éclatée et plasmocyte de grande taille, avec rapport N/C élevé, noyau de contour irrégulier, nucléole. D. Neutrophile et grand plasmocyte morphologiquement anormal. E – G. Diverses cellules anormales visibles sur l’étalement sanguin : grande taille, rapport N/C élevé, noyau de contour régulier ou non, chromatine souvent fine, nucléole parfois très net = ces critères désignent une bonne partie des cellules observées comme étant des plasmoblastes.

A B

C D

E F

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