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FRANÇOISCLUZET EMMANUELLEDEVOS un film de XAVIER GIANNOLI Affiche : Pascal LESOINGpour YDEO- Photos : STEPHANIE DI GIUSTO EUROPACORP et RECTANGLE PRODUCTIONS PRESENTENT

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FRANÇOISCLUZET EMMANUELLEDEVOS

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UN FILM DE

XAVIERGIANNOLI

EUROPACORP ET RECTANGLE PRODUCTIONS PRÉSENTENT

SORTIE NATIONALE

14 OCTOBRE 2009

DISTRIBUTIONEuropaCorp Distribution137, rue du Fbg Saint-Honoré75008 ParisTél. : 01 53 83 03 03Fax : 01 53 83 02 04www.europacorp.com

PRESSEBCG

Myriam Bruguière - Olivier Guigues - Thomas Percy 23, rue Malar - 75007 Paris

Tél. : 01 45 51 13 00Fax : 01 45 51 18 19

[email protected]

DURÉE : 2H35

www.alorigine-lefilm.com

FRANÇOISCLUZET EMMANUELLEDEVOS

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D’après l’histoire vraie d’un petit escroc qui aconstruit une autoroute.

SYNOPSIS

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D’où vient l’idée de ce film ?

Il y a quelques années j’ai lu dans unjournal un étrange fait divers : l’histoired’un escroc qui se serait fait passer pourun chef de chantier et aurait construitune autoroute au milieu d’un champ…Pour son chantier il aurait engagé desdizaines d’ouvriers et embarqué touteune région dans son aventure. Cette his-toire m’a autant intrigué qu’amusé et j’aivoulu en savoir plus. Ces quelqueslignes étaient déjà romanesques.

Vous avez donc fait une enquête ?

D'abord je suis rentré en contact avec lejuge Laurent Léguevaque, qui instruisaitl'affaire. Un juge atypique et incroyable-ment érudit qui s’interrogeait beaucoupsur le mystère de cet homme, sur sesmotivations. Aujourd’hui, il n’est plusjuge, il a accepté de me conseiller etmême de jouer son propre rôle à la fin

du film. D’après ses informations, cetentrepreneur imaginaire n’avait pasgagné d’argent avec son escroquerie etl’argent n’était sans doute ni le vrai nil’unique mobile de ses actes. Il ne s’agis-sait donc pas d’une banale escroqueriepour voler de l’argent à des braves genscrédules - ce qui ne m’aurait pas inté-ressé, car les escrocs ne me fascinentpas a priori. C’était plus que ça…

Avez-vous rencontré l’homme en question ?

Le juge m’a délivré un permis de visite,et je suis donc allé le rencontrer plu-sieurs fois en prison. J’ai le souvenird’un homme timide et modeste, c’est entout cas ce qu’il a voulu me faire croire.Sa qualité d’écoute m’avait marqué…Tout se passait comme si les événe-ments décidaient de qui il devait être oudevenir pour obtenir ce qu’il voulait.D’une certaine manière : un homme “de

circonstances”. Rien à voir avec unescroc bavard qui brasse de l’air.

En construisant cette route, il avait fait cequ’il avait à faire, c’est tout. Il avait enquelque sorte “fait son travail” en répon-dant à une nécessité étrange. J’ai alorsessayé de le faire parler, autant qu’il levoulait bien. De sa route, de sa vie, dumonde… et même si cela m’a permis decomprendre en détail comment toutecette histoire avait été concrètementpossible - un peu comme la reconstitu-tion, d’un incroyable braquage - j’ai trèsvite senti la limite de ces entretiens.

Pourquoi ?

D’abord, parce qu’il me racontait les faitsde son unique point de vue, en lesarrangeant à sa manière. Ensuite, parceque le simple énoncé des faits ne per-mettait évidemment pas d’approcher lavérité humaine de ce genre d’histoire.Plus que jamais, la réalité a besoin duromanesque pour devenir lisible, com-préhensible. Les infos, tout comme unepartie des documentaires télévisés, bref,un certain bavardage médiatique nousrend la réalité plus confuse et opaque.Pour se saisir du monde, je le crois sin-cèrement, nous avons plus que jamaisbesoin de la fiction.

Jusqu’où avez-vous poussé l’enquête ?

Un collaborateur, lui aussi passionnépar l’affaire, m’a aidé à enquêter en ren-contrant la quasi-totalité des personnesqui ont été mêlées au chantier.Certaines parlaient de notre hommecomme d’un salaud qui voulait juste“jouer au patron”, d’autres comme d’unhomme généreux qui a voulu les aider.Tous ces éléments contradictoiresm’ont fourni un formidable matérielromanesque, et m’ont surtout permis detrouver la distance avec les faits. Car cequi m’intéressait, c’était de m’emparerde cette histoire et de proposer mon

point de vue, mon interprétation. Je nevoulais pas me limiter à essayer dereconstituer les faits mais en exprimer lavérité, une vérité. Peut-on prétendre àautre chose quand on fait un film“d’après une histoire vraie” ? J’ai biensûr changé les noms etc. D’ailleurs, madémarche n’est pas cynique ou punitive :c’est tout à l’honneur des victimesd’avoir voulu y croire.

Avez-vous écrit seul ?

Je regarde cet homme avec ce que jesuis. J’écris son histoire avec ce quej’en ressens. Travailler cette histoire a étépour moi une aventure particulière, unpeu comme un vertige. En fait, je croisque j’ai fait le film pour comprendrepourquoi je le faisais, et c’est évidem-ment cela qui est troublant : aller plusloin que l’enquête, se chercher dansune aventure humaine où l’on ressentd’une façon plus ou moins maîtriséeque quelque chose de nous-même esten train de se jouer. Ecrire un film, c’estun peu s’inventer une autobiographiepossible, surtout si l’on essaye d’appro-cher le mystère d’un autre. D’abord enétant très concret, en mettant en scèneles mécanismes de son énorme men-songe, et puis en essayant d’emportertout cela dans un autre mouvement.

C’est-à-dire ?

Dans ce fait divers, on pressent très viteles enjeux économiques et sociauxd’une histoire qui voit “l’homme provi-dentiel” débarquer dans une région mar-quée par des problèmes d’emploi. Maisfaire un “film d’actualité” n’était pas dutout mon projet. D’autant plus que le scé-nario a été écrit bien avant la crise, et quece fait divers a eu lieu il y a plus de dixans. Je voulais donc dépasser l’anec-dote. Car s’intéresser au destin d’unimposteur, c’est aussi s’interroger sur lacrise identitaire qu’un individu peut vivreà notre époque, en étant livré à lui même,sans ressource morale, sans idéal politi-

INTERVIEW XAVIER GIANNOLIRÉALISATION/SCÉNARIO

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que ou grand dessin religieux… maissommé de réussir socialement par sespropres moyens. C’est-à-dire par sontravail. On pourrait dire qu’avant, on avaitpeur de mourir, et qu’aujourd’hui, on a enplus peur de ne pas exister.

Ce chantier était justement pour moi unsigne de vie. Le signe insensé d’unbesoin de se sentir exister en se heur-tant au monde, à la nature et au vent,aux femmes et aux enfants. Pour enfinse sentir vivant. Pour qu’enfin quelquechose se passe et que la vie ne soit plusprogrammée, décidée par d’autres. Enremuant ce paysage avec ses machi-nes, je voyais un homme qui essayed’aménager le monde pour le rendresupportable, en refaire une aventure.D’ailleurs, j’aime l’idée que le cinémas’adresse à ce qui n’est pas sage ennous, à ce qui peut être déraisonnableet en colère. Ce qu’a fait cet homme enconstruisant sa route est un acte deliberté, pour le meilleur et pour le pire.Mais la liberté ne se réduit pas à l’auto-

nomie… cela peut être la découverted’autres valeurs. Ce n’est pas qu’unmorceau de route. C’est un trait d’union.

L’imposture ou la crise économiquesont des thèmes déjà visités par lalittérature, le cinéma ou des essais sociologiques, anthropologiques…

Justement, cette route au milieu de nullepart ouvrait pour moi une nouvelle pers-pective. Ce qui m’a touché dans cettehistoire, c’est d’abord le besoin de cethomme d’aller vers les autres. Même siau début c’est simplement pour lesarnaquer…

Mais en rencontrant ces hommes et cesfemmes qui veulent lui faire confiance, ilva se poser la question de la responsa-bilité, de l’égoïsme, de la cupidité. Bref, ils’éveille au monde. Au souci du monde. Là où beaucoup de faits divers impliquantdes imposteurs s’arrêtent sur le meurtre,la fuite ou une simple arrestation, celui-làlibérait donc une énergie nouvelle.

C'est d'abord le personnage quivous intéresse...

Et ce qui a donné son mouvement àcette histoire, c’est qu’il soit peu à peudépassé par sa propre escroquerie,dépassé par lui-même, ce qu’il ressent.Son mensonge va lui échapper. Ce quiétait virtuel devient malgré lui réel,concret, dans la vie. Et à partir de là,qu’est-ce qu’il en fait ?

C’est quelque chose de lui-même qu’ilva sortir de la terre que ses machinesremuent. C’est pourquoi je tenais tant àcette scène avec le danseur et la pelle-teuse, la rencontre de la machine, ducorps et de la terre.

Sa rencontre avec le personnaged’Emmanuelle va l’incarner, le révéler.Elle va le rendre à la vie, aux autres. Il vadécouvrir qu’être aimé c’est déjà êtreutile. Sans cette rencontre rien n’auraitété possible. Rien.

On pourrait dire que votre film poseune question : où commence l’autre ?

En quelque sorte, oui. Est-ce que l’onarrivera, un jour, à s’arracher à l’indivi-dualisme destructeur et déculpabiliséqui, ces derniers temps, a conduit lemonde au bord du gouffre ? Car je necrois pas que l’on réussira à inventerune société rayonnante et heureuse encontinuant à être cupides, matérialisteset cyniques. J’en ai assez du vanda-lisme moral, tant de la part des finan-ciers et des politiques que des com-mentateurs. D’ailleurs, je m’amusaisbeaucoup au moment de filmer monpersonnage en train de redistribuer l’ar-gent qu’il a piqué à tout le monde… cequi ne l’empêche pas de se faire traiterde “salaud” à la fin du film. Car j’ai unpeu de mal à croire aux simples histoi-res de rédemption. Cela me paraît tou-jours insuffisant, incomplet. Je crois que

ce que je ressens est plus chaotique.Tant mieux, ou tant pis.

C’est l’histoire d’un homme qui secherche...

Et comme il n’a pas les mots, il trouveles gestes… en construisant une auto-route au milieu d’un champ. Le cinéma,pour moi, commence là. Sur le tournage,je disais souvent à mon équipe : “Ce nesont pas des camions, ce sont des sen-timents.”

J’essaye de faire des films d’action,mais d’action humaine. Et au fond, j’ai-merais bien vivre le même genred’aventure que mon personnage. C’est-à-dire avoir la sensation que quelquechose s’est dénoué en moi. Pas forcé-ment résolu, mais dénoué.

Le travail est dans le sujet du film.

Je raconte l’histoire d’un escroc, doncd’un insoumis, d’un rebelle. Et pourtantson étrange destin l’amène à construiretous les murs que les insoumis “classi-ques” veulent abattre : d’abord le travail,mais aussi la responsabilité familialepuis sociale, la culpabilité, la morale… Jetrouvais cela contradictoire, donchumain. Il construit une route pour sesentir libre, mais les premiers à roulersur cette route seront les flics qui vien-nent l’arrêter.

Qu’est devenu cet hommeaujourd’hui ?

Personne ne sait vraiment. Les cartonsà la fin du film disent la vérité. Après sadernière incarcération il a disparu…Certains disent qu’il est en cavale dansun autre pays, d’autres qu’il est mortsous une fausse identité et que donc onne le saura jamais. Echapper à la mortgrâce à son imposture donne d’ailleursun sens intéressant à tout cela.

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Comment le film a-t-il été produit ?

Depuis mon premier court métrage, jetravaille avec Edouard Weil chezRectangle. Et comme pour mon précé-dent film, Pierre-Ange Le Pogam chezEuropaCorp a été pour nous un parte-naire attentif et solidaire dans toutes lesépreuves.

Parlez-nous du tournage…

Je devais tourner sur le vrai chantierd’autoroute d’un important groupe deBTP. Et au dernier moment, juste avant ledébut du tournage, le vice-président – qui avait été impliqué dans la véritablehistoire et qui se souvenait des scara-bées – a tout en se foutant totalementdes conséquences que cela pouvaitavoir. Panique à bord car nous n’avionsévidemment pas le budget pourconstruire 2 kilomètres d’autoroute. A cemoment là, nous avions tout perdu. Tout.Or, Rectangle est une société de produc-tion indépendante qui, au même titrequ’EuropaCorp, est partie prenante de

tous les problèmes financiers du film.Bref, la ruine annoncée… A ce momentlà, j’ai bien observé ceux qui restaient soli-daires, et ceux devenaient injoignables.

En attendant, Gérard Depardieu sedémenait avec une générosité incroya-ble pour nous sortir de là. Il était mêmeprêt à conduire un camion ! Il avait biencompris que nous faisions un pari déli-rant, et c’est le genre d’imprévu qui luifait lever ses beaux yeux.

Que s’est-il passé ?

Nous avons continué à dire à tout lemonde “On y arrivera…”. Mais la date dutournage approchait, et nous ne savionstoujours pas comment construire notreautoroute… tout simplement le décor prin-cipal du film. Et puis un jour, j’ai rencontrépar hasard dans le Nord un hommeincroyable : Raymond Legrand et sonchapeau de cow-boy. C’est un ancienpaysan devenu un important loueur indé-pendant de machines de chantier. Je luiai parlé de l’histoire, du personnage… Je

devais tourner en décembre, et l’hiver,personne ne construit d’autoroute àcause de la pluie. Ses machines jaunesdormaient donc au garage. Tout cela l’aamusé, touché. Et un jour il m’a dit : “Bon,ben je vais te la construire ton autoroute !”.Un homme pur et passionné. Il y en a. J’aidonc tourné avec ses engins, mais aussises ouvriers. Il a été mon conseiller tech-nique, tant pour les travaux que pour mefaire saisir ce milieu aussi justement quepossible. Il a tracé mon autoroute avecdes moyens que je n’aurais jamais pum’offrir.

On a parlé d’une aventure épique…

Le projet était par définition un peu fou.Beaucoup d’extérieurs, de personnages,d’imprévus et donc de tensions... et enplus un hiver épouvantable cette année-là ! Mais comme je m’efforce de protégerautant que possible le secret du film pen-dant sa fabrication, certains racontentn’importe quoi... Ce n’est pas important.

Les conditions de tournage ontdonc été difficiles...

Tous les problèmes météorologiques,financiers, humains ou techniques nousfaisaient rentrer un peu plus chaque jourdans la peau du personnage. Au fond,j’avais la chance, pour réaliser mon film,de devoir affronter les mêmes épreuvesque lui pour construire sa route. De nuit,un chantier d’autoroute ressemble d’ail-leurs étrangement à un tournage.

Aviez-vous déjà tourné avecFrançois Cluzet ?

Un court métrage il y a une dizaine d’an-nées. Nous ne nous étions jamaisrevus. J’ai pensé à lui pour ce rôle parcequ’il n’avait jamais joué ce genre de per-sonnage. Il y avait donc quelque chosed’inconnu à conquérir. Or, dans cettehistoire d’imposture, il était question dece que l’on risque en jouant à être

quelqu’un d’autre. Il y avait donc unezone de contact évidente entre ce qu’estle travail d’un comédien et le mensongedu personnage, entre la comédiesociale et la vérité humaine. Ça s’estdonc passé comme ça, en équilibreinstable sur cette frontière à haut risque,sur une faille identitaire. C’est un rôle dif-ficile, tumultueux, traversé par des émo-tions contradictoires.

Et Emmanuelle Devos ?

J’ai écrit pour elle. Dans les films, elleest toujours un signe de vie, une sur-prise recommencée. Je la sentais“intouchable” pour mon imposteur, etc’est cela qui donne de l’énergie à leurrencontre. On ne sait jamais ce qu’elleva risquer, et c’est un scintillement pré-cieux pour faire vivre un personnageloin des clichés et des standardsd’émotion. C’est une grande artiste, élé-gante et généreuse, à la fois rigoureuseet libre, qui n’en finit pas de proposerdes idées qui vont toujours rendre sonpersonnage plus vivant et inattenduque ce qui était écrit.

Vous retrouvez Gérard Depardieu…

J’ai la chance d’avoir avec lui un rapportà la fois très amical et exigeant. Quandon tourne ensemble, c’est pour travailler,chercher, et ne rien lâcher. Jamais. J’enai déjà trop parlé pour Quand j’étaischanteur, même si son rôle de salaudest ici totalement différent, noir. Il est tou-jours resté solidaire du film, concentrésur son personnage à sa façon, hermé-tique à tout ce qui était périphérique, làoù d’autres peuvent utiliser ou inventern’importe quel prétexte pour justifierleurs débordements, leurs limites ouleur peur. Lui n’a pas de limites, on lesait, pour le meilleur et pour… le meilleur !J’ai beaucoup aimé le voir jouer avec unjeune acteur comme Vincent Rottiers.C’est ce genre de rencontre qui pourrarenouveler son rapport au cinéma.

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Il y a beaucoup de seconds rôlesdans le film…

D’abord la belle Soko. Un ami producteurde musique m’a parlé d’une jeune artistemusicienne et poète qui pourrait m’inté-resser pour ce rôle. J’ai écouté sa musi-que et regardé ses vidéos sur Internet.

J’ai compris qu’elle était un “phéno-mène”. Je pense que c’est une actricevraiment intéressante, qui n’a encoremontré qu’une petite partie de ce dontelle est capable. Vincent Rottiers et elleformaient un couple de cinémamoderne. Vincent me fait penser à desacteurs comme Edward Norton ouJoaquin Phoenix. Il a une puissance quimet sous tension le moindre geste, lamoindre situation.

Enfin, tous les autres seconds rôles sontun mélange de comédiens et de vraisouvriers qui s’aidaient les uns les autres.Je repense à Gaby, le conducteur deBulldozer, qui aidait Brice Fournier, lechef d’équipe, à prendre en main sonchantier. L’important, c’est que chacun,connus ou inconnus, avaient une vérita-ble envie de voir le film exister. Je voulaisles en remercier.

FILMOGRAPHIE

2009 À L’ORIGINE 2006 QUAND J’ÉTAIS CHANTEUR2005 UNE AVENTURE2003 LES CORPS IMPATIENTS1998 L’INTERVIEW

(Palme d’Or du court métrage)

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Quand avez-vous entendu parler decette affaire pour la première fois ?

À l’origine, un scarabée servait de biaisaux écologistes pour stopper des chan-tiers d’autoroute, un peu partout enFrance : ce scarabée (le “pique prunes”)était protégé en vertu d’une norme euro-péenne... En protégeant une espèce, onprotège aussi son prédateur (les oiseauxqui s’en repaissent), etc. Et en 1995 j’ap-prends qu’un escroc profite de cette situa-tion de blocage pour débouler dans unepetite ville souffrant d’un chantier arrêté,se faire passer pour le conducteur de tra-vaux de chez X., prétendre que les affairesreprennent, et ainsi vivre à crédit dans lemeilleur hôtel, empocher des enveloppes(tout le monde souhaitant travailler avec legrand chantier de Bâtiments et TravauxPublics)... Puis, probablement, disparaître.

Comment êtes-vous entré enscène ?

J’étais juge d’instruction dans la ville deMâcon. Le procureur me saisit du casd’un sortant de prison qui, après avoirpurgé une énième peine du chef d’escro-querie, avait organisé une fausse sessionde formation A.N.P.E. (dans le B.T.P., pré-cisément) avant de s’évaporer dans lanature avec la caisse. Cet escroc-là avaitdonc volé l’argent des chômeurs, ce quisemblait assez moche. En conséquence,j’ai envoyé une commission rogatoire àun gendarme que je savais particulière-ment tenace en lui intimant de retrouvercet escroc. Et c’est là qu’intervient le sca-rabée “pique-prunes”. Car, au bout dequelques semaines, ce gendarme m’in-forme officiellement qu’il a retrouvé notrehomme... En train de construire une auto-route quelque part en France. Deconstruire une autoroute sans droit ni titre :il était juste un ex-détenu en cavale...

Comment avez-vous retrouvél’homme ?

Au lieu de s’enfuir avec les pots de vin,l’escroc est resté sur place, comme figé. Ala manière d’un lièvre pris dans les fais-ceaux des phares de voiture... Cet immo-bilisme (inhabituel chez les escrocs, ordi-nairement prompts à déguerpir) nous apermis de le “loger” (le localiser, en jargond’enquêteur). Puis, de l’interpeller. Et savez-vous ce qu’il me répondait inva-riablement, au fil des interrogatoires,quand je demandais : “Pourquoi êtredemeuré sur place, au lieu de disparaîtreavec les fonds ?” L’escroc compulsif, ex-taulard, au casier judiciaire imposant merépondait : “Parce que, monsieur le Juge,pour la première fois de ma vie, j’étaisquelqu’un...”J’entendais ça très fort... Pour la premièrefois, il n’était plus un repris de justice maisl’espoir économique de toute une ville.

Qu’est-ce que cela a changé derencontrer l’homme lui-même ?

Prendre conscience de la vérité suivante :un escroc ne cherche pas uniquementl’argent. Il veut avant tout un rôle social,une fonction précise au sein d’un groupehumain. Une fonction l’autorisant à “être”,ou plutôt “devenir quelqu’un”. “Être” et“paraître”, vieille antienne... La démarched’un usurpateur n’est pas seulement cra-puleuse : elle est aussi existentielle.Comme la nôtre.

Que s’est-il passé pour vous personnellement et pour l’affaire, àpartir de là ?

Mise en examen de l’escroc, détentionprovisoire... Il reconnaissait les faits quilui étaient reprochés, comme on dit. Enfin d’instruction, il écopa d’une peine deplusieurs années d’emprisonnement.Moi, je poursuivis ma carrière dans d’au-tres villes, toujours en tant que juged’instruction. Puis, des années plus tard,

je démissionnai par ras-le-bol de cemétier, cette fonction, ce “rôle social” debourreau, justement...

Avez-vous eu de l’empathie pourl’homme ? Qu’est-ce qui crée del’empathie pour le personnage ?

On peut, et l’on doit, même, selon moi,éprouver de l’empathie pour un être anti-pathique lorsque, par son comporte-ment, fût-ce par ses fautes, il nousapprend un rouage essentiel de notrefonctionnement social.

Comment avez-vous rencontréXavier Giannoli et son projet ? De quoi vous a-t-il parlé ?

Ce fait divers le passionnait. Il souhaitaitrencontrer l’escroc, et les acteurs dudossier... Il contacta donc le juge d’ins-truction, moi. Xavier était alors un jeuneréalisateur. Il venait d’être primé àCannes pour un court-métrage quej’avais eu l’occasion de voir. Je fis doncconfiance à l’artiste – à sa démarcheartistique, qu’à juste titre je présumaishonnête. Et je lui permis très officielle-ment de communiquer avec l’escroc,alors en détention.

Est-ce que l’idée d’un film, au premier abord, vous semblait évidente ?

Elle ne semblait alors même pas évi-dente aux yeux de Xavier, qui m’avaitabordé en me confiant : “Je ne sais pasencore ce que je vais construire sur labase de cette histoire : un film ou unlivre...”. Mais il possédait, d’emblée, unevision de l’affaire qui rejoignait absolu-ment la mienne ; en clair, ce qui fascinad’emblée le cinéaste, c’est la questionde l’usurpation d’identité, de l’empruntde fonction... Rencontrant un désirintense du corps social, en ces tempsde crise économique : travailler, et, au-delà, bâtir, faire œuvre commune...

INTERVIEW LAURENT LEGUEVAQUEANCIEN JUGE D’INSTRUCTION EN CHARGE DE L’AFFAIRE

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Ainsi que la notion de route n’allant nullepart, en vive métaphore du destin, dutrajet de vie de tout un chacun... Il m’estapparu que Xavier “visualisait” déjà ceque pour ma part je “conceptualisais”... Une question le taraudait, autant qu’àmoi... C’est quoi, un destin ? Et quelsrapports la destinée entretient-elle avecnos lois, nos us et coutumes, nosconventions sociales ?

Comment s’est finie la véritablehistoire ?

L’escroc a continué sa vie d’errance etd’emprisonnement. Sa trace estaujourd’hui perdue. Détail amusant : l’administration del’équipement a décrété que les travauxlitigieux étaient faits “selon les règles del’art”. Mais un obstacle juridique subsis-tait : dans notre législation, il est interditde “bénéficier, sous quelque forme quece soit, du produit d’une infraction” (souspeine d’avoir à répondre d’une inculpa-tion de “recel”). Une voie moyenne futalors trouvée par l’entreprise dont l’iden-tité avait été usurpée par l’escroc : main-tenir les embauches, mais pas le tron-çon d’autoroute, qu’il fallut démolir puisrefaire, en dépit de sa conformité auxrègles de l’art...

Le film, par ses choix narratifs et l’introduction du romanesque, vous a-t-il apporté un éclairagenouveau ?

Evidemment. Votre mot est bien choisi.C’est bien d’éclairage qu’il s’agit. J’aipensé en voyant ce film : “Me voici encontact avec la poésie du travail”. Xaviera capté quelque chose de la poésie dutravail, la beauté de l’ouvrage en com-mun et réussit à faire vivre un person-nage vraiment hors du commun.

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FILMOGRAPHIES SELECTIVES

FRANÇOIS CLUZET

2009 À L’ORIGINE de Xavier Giannoli2008 PARIS de Cédric Klapisch

LES LIENS DU SANG de Jacques Maillot2007 DÉTROMPEZ-VOUS de Bruno Dega2006 NE LE DIS A PERSONNE de Guillaume Canet2005 QUATRE ÉTOILES de Christian Vincent

LA CLOCHE A SONNÉ de Bruno Herbulot2004 JE SUIS UN ASSASSIN de Thomas Vincent

EMMANUELLE DEVOS

2009 À L’ORIGINE de Xavier GiannoliCOCO AVANT CHANEL d’Anne Fontaine

2008 UN CONTE DE NOËL d’Arnaud Desplechin2007 DEUX VIES PLUS UNE d’Idit Cebula

CEUX QUI RESTENT d’Anne Le Ny2005 DE BATTRE, MON CŒUR S’EST ARRÊTÉ de Jacques Audiard2004 ROI & REINE d’Arnaud Desplechin

GÉRARD DEPARDIEU

2009 À L’ORIGINE de Xavier GiannoliBELLAMY de Claude Chabrol

2008 MESRINE : L’INSTINCT DE MORT de Jean-François RichetASTÉRIX AUX JEUX OLYMPIQUES de Thomas Langmann

2007 MICHOU D’AUBER de Thomas GilouLA MÔME d’Olivier Dahan

2006 QUAND J’ÉTAIS CHANTEUR de Xavier Giannoli2005 LAST HOLIDAY de Wayne Wang

COMBIEN TU M’AIMES ? de Bertrand Blier2004 LES TEMPS QUI CHANGENT d’André Téchiné

SOKO

2009 A L'ORIGINE de Xavier Giannoli 2007 MA VIE N'EST PAS UNE COMÉDIE ROMANTIQUE de Marc Gibaja 2007 MA PLACE AU SOLEIL de Eric De Montalier 2006 DANS LES CORDES de Magaly Richard-Serrano

VINCENT ROTTIERS

2009 A L’ORIGINE de Xavier Giannoli2008 LES FEMMES DE L’OMBRE de Jean-Paul Salomé2007 L’ENNEMI INTIME de Florent Emilio Siri

L’ÎLE AUX TRÉSORS d’Alain Berbérian664 KM d’Arnaud Bigeard

2006 LE PASSAGER d’Eric Caravaca2005 LA MAISON DE NINA de Richard Dembo

MON ANGE de Serge Frydman

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© 2007 EUROPACORP - RECTANGLE PRODUCTIONS - STUDIOS 37 - FRANCE 3 CINEMA

LISTE ARTISTIQUE

PHILIPPE MILLER.........................................................................FRANÇOIS CLUZETSTÉPHANE......................................................................................EMMANUELLE DEVOSABEL.................................................................................................................GÉRARD DEPARDIEUMONIKA.......................................................................................................................................................................SOKONICOLAS.......................................................................................................VINCENT ROTTIERSLOUIS.............................................................................................................................BRICE FOURNIER

LISTE TECHNIQUE

RÉALISATION...............................................................................................XAVIER GIANNOLISCÉNARIO ET DIALOGUES........................................XAVIER GIANNOLI

PRODUCTEURS.............................................................................................EDOUARD WEIL....................................................................................................................PIERRE-ANGE LE POGAM

DIRECTEUR DE LA PHOTOGRAPHIE.........................................GLYNN SPEECKAERTSON......................................................................................................................................FRANÇOIS MUSY....................................................................................................................................................GABRIEL HAFNER................................................................................................................................................................RENAUD MUSYMUSIQUE ORIGINALE.................................................................CLIFF MARTINEZMONTAGE.........................................................................................CELIA LAFITEDUPONT

DECORATION....................................FRANÇOIS-RENAUD LABARTHECOSTUMES................................................................................................NATHALIE BENROS

PREMIER ASSISTANTRÉALISATEUR.........................................................................................ARNAUD ESTEREZDIRECTION DE PRODUCTION.....................MEDERIC BOURLATDIRECTION DE POSTPRODUCTION.........................................................................MELANIE KARLINREGIE ..........................................................................................................................GREGORY VALAIS