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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel Figuié Novembre 2003 Markets and agriculture linkages for cities of Asia

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Marché alimentaireet développement agricoleau Vietnam

Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel Figuié

Novembre 2003

Markets and agriculture linkagesfor cities of Asia

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Markets and agriculture linkages for cities of Asia (MALICA)

Le consortium MALICAassocie des instituts de recherche français et vietnamiens (le CIRAD :le centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement ;l’IOS : l’institut de sociologie du centre national des sciences sociales et humaines ; le RIFAV :l’institut de recherche sur les fruits et légumes ; le VASI : l’institut des sciences agronomiquesdu Vietnam; l’université agricole de Hanoi ; l’université agricole et forestière de Ho Chi MinhVille. L’objectif principal est de renforcer la capacité d’analyse des marchés alimentaires et desrelations entre villes et campagnes des chercheurs, étudiants, cadres de l’administration,responsables de groupes privés. MALICA met au point des méthodes qui sont appliquées àdes projets visant à adapter la production alimentaire locale et la demande du marché intérieur,en quantité et qualité : projet régional sur l’agriculture périurbaine (SUSPER), projet sur lescomportements alimentaires et la perception des risques. Les mécanismes d’information et deconcertation des acteurs de l’offre et de la demande sont considérés, en complément aux analy-ses classiques de l’efficacité technique et économique des filières à leurs différents stades.

Les méthodes d’analyse de la consommation et des filières sont appliquées à deux domainesde recherche prioritaires : l’élaboration de la qualité dans le secteur alimentaire ; la régulationdes flux d’origine périurbaine, rurale et extérieure. Les principales activités réalisées concer-nent l’application de ces thématiques aux filières légumes, porc et maïs ainsi que l’analyse desmarchés de gros.

Contact : [email protected]

© 2003Conception et impression

[email protected]

Référence de citation : Moustier P., Dao The Anh, Figuié M., 2003.Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam.

Hanoi, MALICA (CIRAD - IOS - RIFAV - VASI), 108 p.

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Marché alimentaireet développement agricoleau Vietnam

Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel Figuié

Novembre 2003

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Avant-propos

Ce document est le fruit d'un travail collectif,réalisé à la demande du Service de coopérationet d’action culturelle (SCAC) de l'Ambassade deFrance du Vietnam. L’objectif principal est demontrer les enjeux nouveaux apportés par lacroissance du marché intérieur et d’en déduire lesstratégies pour le développement du secteur agri-cole. Conscients de ces enjeux, des chercheursfrançais et vietnamiens, de disciplines et d'ins-tituts différents, se sont constitués en collectif derecherche (MALICA). Le SCAC a souhaitéencourager cette initiative et nous aider à commu-niquer nos premiers résultats aux décideurs duVietnam et de l’aide internationale, à travers cettepublication et sa restitution lors d’un séminaire, le11 décembre 2003, à Hanoi. Nous remercionssincèrement Serge Snrech, conseiller adjoint decoopération, pour son soutien et ses nombreuxconseils avisés.

Ce document est le produit d'un peu plus d'uneannée de collaboration au sein du collectifMALICA. Si tous les chercheurs partenaires n'ontpas directement participé par leurs écrits à cedocument, ils y ont contribué par leurs travaux etleurs interventions dans le débat d'idées qui aanimé cette collaboration. Nous remercions enparticulier Dr Jean-François Lecoq, Dr IsabelleVagneron (CIRAD) et Ms Bui Thi Thai (VASI).Nous espérons que ce débat se poursuivraencore plus intensément après le bilan de cettepremière étape de collaboration.

Nous remercions particulièrement lesdirecteurs des instituts partenaires et le comitéd’orientation de MALICA, présidé par leDr Nguyen Van Bo, responsable du départementsciences et technologies du ministère de l’agri-culture et du développement rural, et constituéde : Dr Tran Van Lai et Dr Vu Manh Hai, respec-tivement directeur et directeur adjoint du RIFAV ;Dr Trinh Duy Luan, directeur de l’Institut de socio-logie du Centre national de sciences sociales ethumaines ; Dr Le Duc Doanh, vice-directeur duVASI ; Dr Dang Kim Son, directeur du Centre d’in-formation de l’agriculture et du développement

rural ; Dr Gilles Mandret, représentant du CIRADau Vietnam. Et également les partenaires univer-sitaires de MALICA : la faculté d’économie et dedéveloppement rural de l’université agricole deHanoi, son doyen, Dr Pham Van Dinh, et sa vice-doyenne, Dr Ngo Thi Thuan ; la facultéd’économie de l’université de Nong Lam à Ho ChiMinh ville, son doyen, Dr Pham Thanh Binh, et savice-doyenne, Dr Phan Thi Giac Tam.

Le document est aussi le fruit de la participationdes relecteurs qui ont bien voulu faire part deleurs commentaires sur notre travail, et ensouligner fort utilement et avec indulgence lescarences : François Geay, assistant technique duministère des affaires étrangères ; Jean-MarieCour, consultant auprès du Forum urbain duVietnam ; Dr Nigel Poole, économiste de ImperialCollege at Wye au Royaume-Uni. Si toutes leursremarques n'ont pu être prises en compte, et sidonc des lacunes subsistent, c'est le plussouvent parce que beaucoup des améliorationsnécessaires exigent des recherches supplémen-taires. Ces remarques nous sont donc extrême-ment précieuses pour orienter la suite de nosrecherches.

C'est aussi le travail patient d'édition réalisé parCorinne Cohen, qui a permis de rendre ces résul-tats de recherche plus attrayants et accessibles.Car nous sommes persuadés que c'est en partiepar une meilleure circulation de l'information entreles acteurs impliqués que le secteur alimentairevietnamien relèvera les défis et saisira les oppor-tunités que lui offre le marché intérieur.

En tant qu'éditeurs scientifiques, nous sou-haitons avoir réussi, à partir de l'ensemble de cescontributions, à dresser un tableau, qui malgrédes zones d'ombre ou des traits parfois grossis,soit susceptible d'orienter utilement les travauxdes chercheurs comme les interventions desdécideurs.

Les éditeurs scientifiquesDr Paule Moustier, Dr Dao The Anh, Dr Muriel Figuié

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Sommaire

Avant-propos .................................................................................................................... 2

Synthèse .........................................................................................................................10Paule Moustier (CIRAD), Dao The Anh (VASI), Muriel Figuié (CIRAD)

Introduction .................................................................................................................... 14Paule Moustier (CIRAD)

Objectifs ....................................................................................................................... 14Plan du document .......................................................................................................... 15

Chapitre 1 : Marché intérieur et marché extérieur .............................................................. 18Paule Moustier (CIRAD)

1. Le poids du marché intérieur ........................................................................................ 182. Spécificités et convergences des débouchés .................................................................. 20

2.1. En termes de filières ........................................................................................202.2. En termes de région ........................................................................................ 212.3. En termes de type d’entreprise ......................................................................... 212.4. En termes de demande de qualité ..................................................................... 21

3. Dynamisme et fragilité des exportations ......................................................................... 223.1. Des exportations dominées par quatre produits ................................................... 223.2. Tendance à la baisse après une croissance rapide .............................................. 223.3. Des marchés internationaux instables ................................................................ 22

Le cas du riz (Nguyen Quoc Que, ICARD) .................................................... 23Le cas du porc (Trang Cong Thang, ICARD) ................................................. 24

4. La menace des importations ........................................................................................ 24Conclusion : respecter les différences, améliorer les synergies ............................................. 25

Chapitre 2 : Les évolutions démographiques et socio-économiques .................................... 28Sylvie Fanchette (IRD)

1. Une population inégalement répartie ............................................................................. 282. Un pays en transition démographique ............................................................................293. Une population en voie d’urbanisation ........................................................................... 294. Stratégies politiques face à l’urbanisation ....................................................................... 315. Les tentatives de rééquilibrage démographique ...............................................................33

5.1. De fortes disparités démographiques ................................................................. 335.2. Emigration des campagnes trop peuplées vers les fronts pionniers ........................ 335.3. Industrialisation, diversification et urbanisation en milieu rural ................................ 34

Conclusion : moins de pauvreté, plus d’inégalités ................................................................35

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Chapitre 3 : L’évolution de la consommation alimentaire ................................................... 36Muriel Figuié, Nicolas Bricas (CIRAD)

1. Des dépenses alimentaires en augmentation rapide ........................................................ 361.1. Une croissance liée à des facteurs multiples ....................................................... 361.2. Le développement de la restauration de rue ....................................................... 371.3. Des différences régionales marquées ................................................................ 38

2. Une évolution quantitative variable selon les produits ....................................................... 382.1. A l’échelle nationale .........................................................................................382.2. A l’échelle individuelle ...................................................................................... 38

3. Des différences dans la consommation des ménages ...................................................... 393.1. Entre urbains et ruraux .................................................................................... 403.2. Selon le revenu .............................................................................................. 403.3. Selon la région ............................................................................................... 41

4. Des importations encore faibles mais en augmentation .................................................... 425. Un défi : la qualité des aliments .....................................................................................42

5.1. Des problèmes sanitaires .................................................................................425.2. Des consommateurs inquiets ........................................................................... 43

6. Des comportements alimentaires nouveaux ................................................................... 46Conclusion : répondre aux évolutions de la consommation ................................................... 46

Chapitre 4 : Les changements de la production alimentaire ............................................... 48Dao The Anh, Vu Trong Binh, Le Duc Thinh (VASI)

1. Des productions globalement dynamiques ..................................................................... 501.1. Le riz ............................................................................................................ 501.2. La patate douce ..............................................................................................511.3. Le maïs ......................................................................................................... 521.4. Les légumes .................................................................................................. 531.5. Les fruits ....................................................................................................... 541.6. La viande ...................................................................................................... 541.7. La production laitière ....................................................................................... 551.8. La production aquatique .................................................................................. 571.9. Des différences régionales ............................................................................... 57

2. Des structures et un environnement contraignants ...........................................................582.1. Des disponibilités foncières inégales .................................................................. 582.2. Une main-d’œuvre abondante et éduquée ..........................................................582.3. Un accès au crédit encore insuffisant ................................................................. 592.4. Une vulgarisation agricole peu coordonnée ........................................................ 602.5. Des services commerciaux à améliorer .............................................................. 61

3. Des différenciations croissantes .................................................................................... 613.1. Le foncier, facteur-clé de différenciation .............................................................. 613.2. Creusement des inégalités de revenu agricole .................................................... 633.3. Un accès différencié aux activités extra-agricoles .................................................63

4. Des relations fluctuantes avec les autres secteurs ........................................................... 644.1. Une contribution variable de l’agriculture au PIB .................................................. 644.2. L’évolution de l’agriculture dans le PIB des régions .............................................. 654.3. Amélioration des termes de l’échange ? ............................................................. 66

Conclusion : surmonter les faiblesses pour satisfaire la demande intérieure ............................ 66

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Sommaire

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Chapitre 5 : La réponse du marché et des filières .............................................................. 68Paule Moustier (CIRAD), Nguyen Thi Tan Loc (RIFAV), Jean-Joseph Cadilhon (Imperial College at Wye - CIRAD), Vu Trong Binh (VASI)

1. Un recours croissant au marché ................................................................................... 692. Des filières globalement efficaces, mais trop segmentées ................................................. 69

2.1. Les filières légumes pour le marché domestique ..................................................69L’organisation spatiale ............................................................................... 70L’organisation des acteurs .......................................................................... 71De faibles marges commerciales .................................................................72Un approvisionnement irrégulier ..................................................................73Une qualité difficile à identifier ..................................................................... 73Des modes de coordination efficaces ...........................................................73

2.2. Les filières de riz du delta du fleuve Rouge ......................................................... 75Dao The Anh (VASI), Franck Jésus (CIRAD)

L’organisation spatiale ............................................................................... 75L’organisation des acteurs .......................................................................... 75De faibles marges commerciales .................................................................75Instabilité des prix, des paiements et de la qualité .......................................... 76Forces et faiblesses des modes de coordination ............................................ 76Conclusion .............................................................................................. 76

2.3. La filière du porc au nord du Vietnam ................................................................. 76Vu Trong Binh (VASI)2.4. Conclusions sur les trois filières .........................................................................77

3. La planification des nouveaux marchés ..........................................................................78Jean-Joseph Cadilhon (Imperial College at Wye - CIRAD)

3.1. Les plans d’aménagement urbain ......................................................................783.2. Deux modèles de marché de gros ..................................................................... 793.3. Des conséquences prévisibles ..........................................................................79

Une plus grande transparence .................................................................... 79Meilleure insertion des producteurs au marché ..............................................80Création d’emplois et de revenus ................................................................ 80

3.4. La nécessité de la concertation ......................................................................... 804. Le développement de la grande distribution .................................................................... 80Nguyen Thi Tan Loc (RIFAV)

4.1. Dans le monde ............................................................................................... 814.2. Au Vietnam .................................................................................................... 824.3. La place des produits alimentaires .....................................................................824.4. Relations avec les producteurs et les consommateurs ..........................................834.5. Des effets négatifs en perspectives ................................................................... 83

Conclusion : inciter les acteurs à contractualiser ................................................................. 83

Chapitre 6 : L’agriculture périurbaine : enjeux et menaces sur l'alimentation de proximité ... 86Hubert de Bon (CIRAD)

1. Une agriculture multifonctionnelle ..................................................................................861.1. Un rôle alimentaire, économique et social ...........................................................861.2. Protéger l’environnement, préserver l’identité culturelle ......................................... 88

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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2. Menaces ................................................................................................................... 892.1. Extension du bâti ............................................................................................ 892.1. Faible durabilité écologiques des systèmes de production .....................................89

Conclusion : une multifonctionnalité à préserver ................................................................. 89

Conclusion : Les moteurs du changement et les pistes d’action ........................................ 92Paule Moustier (CIRAD), Dao The Anh (VASI), Muriel Figuié (CIRAD)

1. Les variables-clé d’évolution .........................................................................................921.1. La croissance démographique .......................................................................... 921.2. Les déséquilibres de population ........................................................................ 921.3. Le niveau de vie des ménages ......................................................................... 921.4. Les exigences de qualité et les crises sanitaires .................................................. 921.5. La concurrence du marché international ............................................................. 921.6. L’accès au foncier ........................................................................................... 931.7. L’instabilité du secteur alimentaire ..................................................................... 931.8. Nécessité d’organisation de la profession et des consommateurs .......................... 93

2. La nécessaire intervention régulatrice de l’Etat ................................................................ 943. Quel rôle pour la recherche ? ....................................................................................... 94

3.1. Observatoire des changements du secteur alimentaire ......................................... 943.2. Recherches sur le foncier .................................................................................953.3. Recherches sur la coordination au sein des filières .............................................. 953.4. Recherches sur l’intensification raisonnée des systèmes de production ...................963.5. Des réponses pour lutter contre la pauvreté ........................................................ 96

Annexe: quelques chiffres ................................................................................................ 98

Bibliographie ................................................................................................................ 100

Liste des sigles ............................................................................................................. 108

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Sommaire

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Tableaux

Tableau 1. Valeur ajoutée de différentes filières ............................................................. 19Tableau 2. Débouchés intérieurs et à l’exportation par type de produit alimentaire .............. 20Tableau 3. Valeur totale des exportations vietnamiennes, 1990-2000 ............................... 23Tableau 4. Marché alimentaire rural et urbain ............................................................... 37Tableau 5. Le marché alimentaire dans les régions du Vietnam ....................................... 38Tableau 6. Evolution des quantités d’aliments consommées par habitant,

selon les sources, 1987-2000 ..................................................................... 39Tableau 7. Répartition de la valeur de la consommation alimentaire

par groupe de produits ...............................................................................40Tableau 8. Répartition de la valeur de la consommation alimentaire

par groupe de produits, dans les différentes régions ....................................... 41Tableau 9. Evolution de la qualité des repas et des produits alimentaires commercialisés

selon les consommateurs de Hanoi ............................................................. 44Tableau 10. Croissance de la production animale en poids vif entre 1990-2000 ................... 55Tableau 11. Production et importations de lait .................................................................55Tableau 12. Taux de croissance des productions agricoles, forestière et aquacoles

entre 1996 et 2000 .................................................................................... 56Tableau 13. La diversification agricole dans les différentes régions du Vietnam, 1996-2000 .... 57Tableau 14. Evolution des surfaces agricoles dans les différentes régions .......................... 58Tableau 15. Part de la main-d’œuvre agricole dans les différentes régions

et évolution, 1996-2000 ............................................................................. 58Tableau 16. Niveau d’éducation de la main-d’œuvre vietnamienne .................................... 59Tableau 17. Superficie agricole par foyer selon les régions ............................................... 62Tableau 18. Superficie agricole par foyer selon le niveau de vie des ménages .....................62Tableau 19. Nombre de paysans sans terre dans le delta du Mékong ................................ 62Tableau 20 Les différentes sources de revenu

des ménages ruraux vietnamiens, 1993-1998 ............................................... 63Tableau 21. Emploi par branche d’activité, pauvreté et rendement de riz

pour les actifs de 15 à 65 ans ..................................................................... 64Tableau 22. Changements de structures économiques

dans les différentes régions,1996-2000 ........................................................ 65Tableau 23. Tendances d’évolution des filières riz, légumes et porc ................................... 78Tableau 24. Données statistiques sur les villes de Hanoi et Ho Chi Minh-ville ...................... 86Tableau 25. Bilan vivrier de Hanoi pour les principales catégories d’aliments ....................... 88

Dans l'encadré 4Tableau A. Importations et exportations de fruits et légumes par la Chine .......................... 26Tableau B. Exportations de légumes et de fruits du Vietnam vers la Chine

à la frontière Tan Thanh ............................................................................. 26Tableau C. Importations vietnamiennes de légumes et de fruits de Chine

par la frontière Tan Thanh .......................................................................... 27Tableau D. Echanges entre la Chine et le Vietnam par le poste Tan Thanh ........................ 27

Liste des tableaux, cartes, figures et encadrés

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Dans l'encadré 14Les grands traits de la production agricole près de Hanoi ..................................................... 87

Cartes

Carte administrative du Vietnam ....................................................................................... 17Les principaux flux de légumes au Vietnam ........................................................................71

Figures

Figure 1. Marché intérieur alimentaire, non comprise la consommation hors du domicile, et exportations agricoles .................................................... 19

Figure 2. Part des débouchés intérieurs et à l’exportation pour les principaux produits alimentaires ................................................................................. 21

Figure 3. Composition des exportations agricoles (en valeur),non compris les produits de la mer .............................................................. 22

Figure 4. Composition des exportations agricoles (en valeur), y compris les produits de la mer .................................................................. 22

Figure 5. Evolution des exportations agricoles (en valeur), non compris les produits de la mer, 1991-2001 ..............................................22

Figure 6. Evolution des exportations agricoles (en valeur), y compris les produits de la mer, 1991-2001 ................................................. 22

Figure 7. Evolution des quantités d’aliments consommées, 1987-2001 .......................... 39Figure 8. Consommation alimentaire et dépenses totales des ménages ......................... 41Figure 9. Consommation de riz et dépenses totales des ménages .................................41Figures 10. Consommation et importation par habitant des principaux produits alimentaires .... 43Figure 11. Produits alimentaires jugés dangereux pour la santé

par les consommateurs et origine perçue des risques .................................... 45Figure 12. Produits alimentaires présentant des problèmes de qualité nutritionnelle

aux yeux des consommateurs de Hanoi ....................................................... 45Figure 13. Evolution de la production moyenne de vivres par habitant, 1990-2001 ............. 50Figure 14. Evolution des surfaces rizicoles dans les différentes régions ............................50Figure 15. Evolution de la production rizicole dans les différentes régions ......................... 50Figure 16. Evolution des rendements de riz dans les différentes régions .......................... 50Figure 17. Evolution des surfaces de patate douce dans les différentes régions ................ 51Figure 18. Evolution de la production de patate douce dans les différentes régions ............ 51Figure 19. Evolution des rendements de patate douce dans les différentes régions ........... 51Figure 20. Evolution des surfaces de maïs dans les différentes régions ............................52Figure 21. Evolution de la production de maïs dans les différentes régions ....................... 52Figure 22. Evolution des rendements de maïs dans les différentes régions ....................... 52

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Sommaire

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Figure 23. Evolution des surfaces de légumes dans les différentes régions .......................53Figure 24. Evolution de la production de légumes dans les différentes régions .................. 53Figure 25. Evolution des rendements de légumes de différentes régions .......................... 53Figure 26. Evolution des surfaces en fruits dans les différentes régions ............................ 54Figure 27. Evolution en valeur de la production fruitière dans les différentes régions ..........54Figure 28. Evolution de la production animale dans les différentes régions ....................... 54Figure 29. Evolution de la production de volailles dans les différentes régions ................... 55Figure 30. Evolution du nombre de porcs dans les différentes régions ............................. 55Figure 31. Evolution de la valeur de la production aquatique des différentes régions .......... 57Figure 32. Evolution de la valeur de la production piscicole des différentes régions ............ 57Figure 33. Evolution des secteurs d’emploi .................................................................. 58Figure 34. Pourcentage d’agriculteurs ayant accès au crédit dans les différentes régions ....60Figure 35. Taux de croissance du PIB général et du PIB agricole .................................... 64Figure 36. La structure du PIB national par secteur ....................................................... 64Figure 37. La structure du PIB rural du Vietnam par secteur ........................................... 65Figure 38. Taux de croissance du PIB agricole et des exportations agricoles .....................65Figure 39. Evolution du prix moyen mensuel du paddy et de l’urée

à Nam Sach, Hai Duong ............................................................................ 66

Dans l'encadré 2. Figure A. Riz : prix au producteur du fleuve Rouge et prix mondial, 1994-1999 ................ 19

Encadrés

Encadré 1. Sources utilisées et fiabilité des données ...................................................... 16Encadré 2. Les exportations sont-elles plus rémunératrices pour les agriculteurs ? ............. 19Encadré 3. Le secteur alimentaire et le marché international ........................................... 23Encadré 4. Les échanges entre le Vietnam et la Chine : le cas des fruits et légumes ........... 26Encadré 5. La ville, pôle d’attraction pour la recherche d’emploi ....................................... 30Encadré 6. La politique des corridors de développement ................................................ 31Encadré 7. Quel rôle pour les villes moyennes ? ............................................................32Encadré 8. La diversité démographique des provinces ................................................... 33Encadré 9. L’autoconsommation en milieu rural ............................................................. 40Encadré 10. La crise du pho ........................................................................................ 44Encadré 11. Les politiques agricoles de 1988 à 2001 ....................................................... 49Encadré 12. Systèmes d’information et de concertation sur les marchés ............................. 85Encadré 13. La mise en place de filières de qualité .......................................................... 85Encadré 14. Les systèmes de production périurbains autour de Hanoi ................................87Encadré 15. L’agriculture périurbaine dans l’approvisionnement des villes ........................... 88Encadré 16. L’agriculture périurbaine en débat ................................................................ 90

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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SynthèsePaule Moustier (CIRAD), Dao The Anh (VASI), Muriel Figuié (CIRAD)

L’objectif principal de ce document est deprésenter les tendances d’évolution du marchéintérieur des produits agricoles au Vietnam et dedégager les opportunités et contraintes que ceschangements représentent pour l’agriculturelocale.

L’intégration du Vietnam au marché régional etinternational est perçue comme le principalmoteur de transformation de l’économie, ce quiexplique que les politiques publiques mettentdavantage l’accent sur les exportations agricolesque sur le marché intérieur. Toutefois, ce traite-ment différent ne s’appuie pas sur une évaluationcomparée de l’intérêt que présentent ces deuxtypes de débouché pour atteindre les objectifséconomiques et sociaux du gouvernement viet-namien, la croissance économique et la réductionde la pauvreté et des inégalités.

Ce document met en évidence l’évolution, aucours de la dernière décennie (1991 à 2000), dela consommation alimentaire (fortement influ-encée par les paramètres démographiques etéconomiques), de la production vivrière et desfilières d’approvisionnement alimentaire. Ilanalyse l’ajustement entre l’offre et la demandealimentaire dans ses différentes dimensions :quantité, régularité, qualité, prix et coûts, distribu-tion des revenus. Enfin, il met l’accent sur lesdispositifs d’information et de coordination entreacteurs privés du secteur alimentaire, qui sont aucœur des ajustements par le marché.

Le poids du marché intérieur

Malgré le boum des exportations entre 1990 et1997, l’agriculture vietnamienne reste toujourslargement tournée vers la demande intérieure,qui absorbe 90 % de la production. En valeur,le marché intérieur des aliments représente plusde deux fois les exportations agricoles, soit5 milliards de dollars en 1998 (et plus de7 milliards en 2002 par extrapolation).

Que ce soit en termes de produit, de région, destructure de production, de qualité ou de prix, ilexiste des différences entre marché intérieur etexportations, mais aussi des recouvrements.

Certaines filières sont tournées à la fois vers lesdeux débouchés (riz, produits de la mer), d’autressont essentiellement à vocation exportatrice(café, caoutchouc), d’autres encore marginale-ment exportées (fruits et légumes, viande). Alorsque pour les produits de la mer, la nature desentreprises et les exigences de qualité diffèrentselon le débouché, elles sont voisines pour le rizet le porc.

Enfin, le marché intérieur peut être amené àpeser sur la balance commerciale si les importa-tions – inférieures à 10 % de la consommationalimentaire en 2001 – augmentent avec l’appli-cation des accords commerciaux (AFTA). Notonsaussi que les importations d’engrais pèsentplus en valeur que les importations de produitsagricoles.

Un marché alimentaire en fortecroissance

De 1993 à 1998, le marché alimentaire intérieura augmenté de 46 % en valeur. Entre 1991 et2000, la croissance annuelle a été particulière-ment forte pour la viande (7 %), les légumes(6 %), ainsi que pour les produits alimentairesimportés comme le blé (8 %) ou les huiles (6 %).

La croissance du marché vietnamien est liée àtrois facteurs principaux : la croissance démo-graphique, l’urbanisation, l’augmentation desrevenus, ces deux derniers facteurs étant liés.

Avec une population de 76,3 millions d’après lerecensement de 1999, et de près de 80 millionsen 2002, le Vietnam est le pays le plus den-sément peuplé de la région, excepté Singapour.La croissance démographique annuelle estestimée à 1,7 %. Le taux d’urbanisation – 25 %en 2002 – reste relativement faible par rapport àla moyenne de l’Asie du Sud-Est (36 %), mais ilest amené à augmenter. En effet, les villesdevraient voir leur population croître de 3,8 % paran pendant la période 1998-2020, alors que letaux en milieu rural ne devrait atteindre que 0,1 %(Cour, 2001).

Bien qu’elles ne concentraient que 23 % de lapopulation en 1998 (et le quart en 2002), les villes

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Synthèse

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représentent 40 % de la valeur du marché alimen-taire (1998), du fait des différences de revenusentre milieu rural et urbain – les villes produisent70 % du PIB – et d’une autoconsommationmoindre en ville (5 %) que dans les campagnes(35 %).

La consommation alimentaire est liée à l’aug-mentation des revenus et à la croissance éco-nomique, qui garde un rythme soutenu depuis lesannées 90 : 7 % par an ces dernières années,bien supérieur au taux des pays voisins (4 %pour la Thaïlande par exemple).

Une demande pour des produitsdiversifiés et de qualité

L’alimentation se diversifie au profit de laviande, des fruits et légumes et de la restaurationde rue. La demande croît pour des produits dequalité spécifiée, comme le riz parfumé ou le porcmaigre.

Toutefois, les consommateurs urbains sont deplus en plus inquiets de la qualité sanitaire desproduits alimentaires, en premier lieu les légumeset le porc. Et les quelques signes de qualité émispour les rassurer, par exemple sur les légumespropres, sont peu crédibles en raison de l’ab-sence de contrôles fiables.

Une réponse de la production localesatisfaisante en quantité…

La production vivrière locale a démontré sacapacité à répondre à la croissance de lademande locale en quantité. Les réformes poli-tiques engagées dans le cadre de la politique duRenouveau (Doi moi) y ont largement contribué(allocation des terres aux paysans, retrait de l’Etatde la commercialisation). Au cours des dixdernières années, la production de porc a aug-menté de 5,8 % par an, celle de maïs de 10,9 %,celle de légumes de 7 % par an.

Quant à la production de riz, elle a crû enmoyenne de 5,6 % par an, grâce à l’augmenta-tion de l’intensité culturale et des rendementspour 80 % et à l’augmentation des surfaces pour

20 %. Cette tendance devrait se poursuivre, caril existe encore un potentiel d’amélioration de cesdeux paramètres dans de nombreuses régions.Cependant, la riziculture étant faiblement rému-nératrice, les producteurs combinent son intensi-fication à la diversification de leurs activités,même si le processus de diversification reste lent– le riz occupe encore plus de 60 % des surfacescultivées (il en occupait 70 % en 1991).

… mais insuffisante en régularité et en qualité

Ce bilan quantitatif masque des problèmesd’ajustement entre l’offre et la demande. Laproduction nationale ne parvient pas à appro-visionner le marché avec régularité tout au longde l’année. Ainsi, la pénurie de légumes tem-pérés et de maïs pendant cinq mois de l’annéeoblige à de coûteuses importations de Chine. Deplus, la production répond mal à la demande enqualité.

Des revenus faibles et inégalement répartis

En termes de création de richesses, le bilan dela croissance agricole est également mitigé. Sil’agriculture occupe encore plus de 60 % destravailleurs de plus de 15 ans (ce pourcentagetend à baisser), elle ne contribue au PIB qu’àhauteur de 23 % (2001), moins que l’industrie(38 %) et les services (39 %). Elle joue cependantun rôle majeur dans les zones rurales (70 % duPIB rural).

Enfin, la croissance agricole se traduit par desécarts croissants de revenu, qui s’expliquent engrande partie par un accès différencié auxfacteurs de production et aux services decommerce, de vulgarisation et de transport. Lerapport entre la taille des exploitations les pluspetites et les plus grandes est de 2 dans leCentre, et de 10 dans le Sud. En moyenne, lesexploitations sont caractérisées par leur petitetaille (9 000 m2, soit moins d’un hectare, parfoyer).

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Une faible interaction de l’agriculture avec les autres secteurs

Al’heure actuelle, c’est dans le secteur agricoleet agroalimentaire que la population rurale trouvedes emplois. En effet, depuis 1990, les secteursnon agricoles ne contribuent aux revenus rurauxque pour 20 %, notamment en raison de l’en-clavement, qui nuit à la rentabilité des entreprisesrurales, et à l’absence de débouchés. Dans ledelta du fleuve Rouge, la main-d’œuvre est sous-employée en milieu rural à hauteur de plus de20 % du temps de travail, mais elle ne peut sedéployer dans le secteur industriel, intensif encapital et peu en travail.

L’agriculture est de moins en moins productivepar rapport aux autres secteurs. Le rapport entrela productivité non agricole et agricole s’est accrude 4,4 en 1986 à 7,3 en 1998 (Cour, 2001). Lesecteur agroalimentaire est toujours faiblementdéveloppé : il ne représentait que 6 % du PIB en1996, soit beaucoup moins que la productionprimaire. Or, comme l’attestent de nombreuxéconomistes, le pays ne pourra s’industrialiser,objectif déclaré du gouvernement, que si laproductivité agricole augmente, et que l’agro-industrie se développe, comme à Taiwan.

L’augmentation de la productivité agricoledevient donc un objectif prioritaire, avec ledéveloppement des activités non agricoles enmilieu rural pour créer des emplois.

Des mécanismes de marché à améliorer

Les réformes économiques ont facilité l’accèsdes producteurs et des consommateurs aumarché, en zone rurale comme en zone urbaine,entraînant une diminution de l’autoconsomma-tion. En 2020, on estime qu’un agriculteur devranourrir un agriculteur plus un non-agriculteur (lerapport de la population non agricole à la popula-tion agricole atteignant 0,96, alors qu’il était de0,39 en 1986 et de 0,47 en 1998).

L’organisation de la commercialisation dépenddu type de produit et de la localisation des zonesde production par rapport au marché destinataire.Les produits périssables comme les légumes-feuilles proviennent principalement des zonespériurbaines (à moins de 50 km du centre) ; lesdétaillants des marchés ou boutiques sont ravi-taillés directement par des producteurs ou par

des collecteurs (souvent aussi producteurs)apportant de faibles quantités – quelquescentaines de kilos par jour –, en deux-roues. Pourles autres produits (oignons, fruits, viande..), desgrossistes achètent aux collecteurs. Qualifiéd’inorganisé par de nombreux auteurs, lecommerce des produits alimentaires parvientpourtant à approvisionner les villes à des prix trèsbas (15 % de marge commerciale pour le riz,20 % pour le porc, 45-50 % pour les légumes), enraison du faible prix de la main-d’œuvre, peuqualifiée et disponible, à des chaînes de ventecourtes, à un commerce concurrentiel et aucaractère peu élaboré des produits.

L’organisation des filières en réseau répond aucaractère dispersé de la production et aux con-traintes du transport (accès difficile aux véhiculesà moteur et à la réfrigération). Les mécanismesde marché s’avèrent cependant insuffisants pourassurer un revenu supplémentaire aux agricul-teurs qui produisent des aliments de qualité. Il estnécessaire que les producteurs s’associent afind’informer sur leur démarche qualité, d’organiserle contrôle interne et externe de la qualité en rela-tion avec les pouvoirs publics et de définir desstratégies de prix différenciés selon la qualité, enrelation avec les commerçants.

La production agricole doit aussi s’adapter à laconcentration des structures de distribution. AHanoi comme à Ho Chi Minh-ville, les munici-palités ont planifié un réseau de marchés de groset la disparition des marchés informels, ainsi quede la vente ambulante. La grande distribution sedéveloppe. S’il n’y a que 3 hypermarchés auVietnam, situés à Ho Chi Minh-ville (78 enThaïlande), le nombre total de supermarchésatteint 70 (dans les deux grandes villes), alors qu’iln’en existait pas il y a dix ans. L’impact de cetteévolution sur l’emploi et le prix au consommateurdoit être mieux quantifié. Le Vietnam suivra-t-ill’exemple des pays européens ou latino-amé-ricains ? Dans ces pays, la concentration de ladistribution s’est traduite par une augmentationdu différentiel de prix entre la production et laconsommation, et par une baisse des emploisdans le commerce alimentaire (partiellementcompensée par le développement du secteurde la transformation) ; et les coûts indirectsde l’alimentation – énergie pour le transport etla transformation – ont également beaucoupaugmenté.

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Synthèse

13

Une agriculture périurbaine menacée

Du fait de leur proximité des marchés urbains,les zones périurbaines jouent un rôle très impor-tant dans l’approvisionnement pour de nombreuxproduits périssables (légumes, viande, œufs, lait).Elles remplissent aussi d’autres fonctions nonéconomiques : insertion sociale de populationspeu diplômées, sans emploi en ville (30 % de lapopulation de la province de Hanoi est employéedans l’agriculture) ; verdissement de la ville ;protection contre les inondations.

Cependant, la production périurbaine est forte-ment menacée par l’extension du bâti (diminutionprévue des zones agricoles de 25 % dans les dixans qui viennent dans la province de Hanoi). Parailleurs, pour se maintenir près des villes, l’agri-culture devra prouver qu’elle ne pollue pas et queses produits sont sains. Une gageure quand onconnaît la surconsommation en intrants chim-iques et l’utilisation d’eaux polluées (actuellementcombattues par des programmes nationaux etinternationaux).

Peser sur les leviers de changement

Ce bilan met en évidence les variables-cléqui vont déterminer les évolutions futures desmarchés intérieurs : la croissance démogra-phique ; les déséquilibres démographiques entrerégions (deltas/montagnes, villes/campagnes) ;le niveau de vie des ménages ; les crises sani-taires ; la concurrence du marché international ;l’accès au foncier ; la capacité d’organisation dela profession et des consommateurs ; l’implicationde l’Etat pour appuyer le secteur privé (contrôlesde qualité, crédit, transport, formation, planifi-cation concertée des marchés). Selon les hypo-thèses sur ces variables, il sera possible desimuler les tendances futures des marchésintérieurs, ainsi que leur impact sur l’emploi et lesrevenus dans les différents secteurs. Pourrontalors être définies de nouvelles politiques, que larecherche pourra accompagner.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Objectifs

Depuis le début des politiques de Doi moi en1986, le gouvernement vietnamien souhaitemaintenir un taux de croissance économiquesoutenu, tout en contrôlant le développement desinégalités et de la pauvreté (Socialist Republic ofVietnam, 2000). Pour atteindre cet objectif, leVietnam doit renforcer la compétitivité desdifférents secteurs économiques sur les marchésrégionaux et internationaux et accélérer l’indus-trialisation.

Lorsque ces stratégies intègrent le secteuragricole, celui-ci est avant tout considéré en tantqu’exportateur (café, caoutchouc, fruits etlégumes, thé, etc.), avec des préoccupations decompétitivité sur les marchés régionaux et inter-nationaux. Quant aux stratégies de lutte contre lapauvreté, elles sont centrées sur l’appui à despopulations ciblées, en zones rurales et urbaines,et des programmes d’amélioration des infrastruc-tures et services (éducation, crédit, etc.). Ellessont conçues comme des « corrections » auxproblèmes posés par la croissance économiqueet rarement articulées avec les politiques dedéveloppement des marchés1.

Malgré des succès passés indéniables, les poli-tiques tournées vers l’exportation et l’industriali-sation connaissent à présent des limites. La filièredu café illustre la fragilité des stratégies d’expor-tation due à l’instabilité des prix internationaux.Entre 1999 et 2003, le cours du café est passé de1 400 à 340 dollars la tonne, ce qui engendre despertes de plus de 400 000 dollars par an pour lesplanteurs de la province de Dac Lac (ThuyPhuong, 2003). La fragilité des exportationsrésulte également des troubles socio-politiquesque peuvent connaître à tout moment les pays

destinataires. Ainsi, jusqu’à la guerre, le premierclient du thé à l’exportation était l’Irak (VietnamInvestment Review, 2003).

Alors que l’attention des politiques, des médiaset des analystes en sciences sociales est tournéevers l’agriculture pour l’exportation, les marchésintérieurs connaissent des évolutions profondesdu fait de trois changements parallèles : l’urbani-sation, l’élévation et la différenciation du niveau devie, des changements culturels en matière deconsommation. Ces évolutions offrent de formi-dables opportunités aux filières agricoles quiseront capables de répondre à la demandelocale. L’expérience d’autres pays en développe-ment montre que la prise en compte conjointe desmarchés intérieurs et des exportations, en évitantles extrêmes de stratégies autocentrées ouextraverties, s’est avérée efficace 2. La volatilitédes marchés internationaux comme les deman-des nouvelles en matière de réduction desrisques environnementaux et alimentairesdoivent inciter à exploiter au mieux les potentia-lités locales, que ce soit en termes de productionou de marché.

Si les marchés intérieurs ont été peu pris encompte jusqu’à présent, c’est en partie parce qu’ilest difficile de rassembler des données, les filièrespour le marché intérieur étant plus diffuses etvariées que les filières d’exportation, et parfoisqualifiées d’informelles ou de peu structurées.C’est aussi la difficulté d’interpréter destendances à évolution très rapide, comme cellesde la consommation alimentaire. Un des objectifsde ce document est de commencer à comblerces lacunes en tenant compte des spécificitésdes marchés alimentaires, qui obligent à centrerl’approche sur les dynamiques et les interactionsentre acteurs.

IntroductionPaule Moustier (CIRAD)

1 Il existe cependant quelques travaux macro-économiques montrant le lien entre le développement du marché à l’exportationet la réduction de la pauvreté (Winters A., 2002). 2 Sur les dangers des stratégies tournées vers les marchés extérieurs voir : Witton R., Browett J., Gertzel C., Leaver L., 1988,sur l’Indonésie ; Hollist W.L., Tullis F.L., 1987, sur le Brésil ; Conroy M.E., Murray D.L., 1996, sur l’Amérique centrale ; Tin-YinLiu,1999, sur les interactions bénéfiques entre marché intérieur et marché d’exportation à Taiwan.

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Introduction

15

Le principal objectif est d’évaluer les opportu-nités et les contraintes que présentent lesmarchés intérieurs de produits alimentaires pourremplir les objectifs de création de richesse etd’amélioration de la santé dans les différentesrégions et secteurs du pays :● Quel est le poids économique des marchés

intérieurs alimentaires ? Quelle place occu-pent-ils par rapport aux marchés d’expor-tation ?

● Quelle est la demande des marchés intérieursalimentaires en termes de quantité, de qualité,de diversité des produits ? La production agri-cole, les filières de mise en marché et de trans-formation sont-elles à même de répondre auxévolutions de la demande alimentaire, en quan-tité, qualité, coût, création de revenus stables ?

● Comment les politiques peuvent-elles influ-encer les évolutions en cours pour atteindredifférents objectifs économiques et sociaux ?Quelle est la place de la recherche et dudéveloppement pour orienter l’action des poli-tiques et des opérateurs privés ?

Plan du document

Le premier chapitre présente les produits – etleur poids –, les régions et les types d’entrepriseconcernés par les marchés intérieurs et les expor-tations.

Une deuxième partie est consacrée à la démo-graphie : croissance de la population, urbanisa-tion, répartition de la population entre régions,impact des politiques. En effet, ces tendances ontdes répercussions directes sur la demandealimentaire, sur la division du travail entre produc-teurs et non-producteurs, et donc sur les possi-bilités de revenus pour le secteur agricole. Lescaractéristiques socio-économiques de la popu-lation vietnamienne sont présentées.

Quelles sont les conséquences de ces évolu-tions démographiques et économiques sur laconsommation alimentaire et donc sur lesdébouchés des productions agricoles ? La

troisième partie présente l’évolution de lademande en quantité et en valeur, les variationsde tendances selon le type de produit et le profilsocio-économique des ménages, ainsi que la partdes produits locaux et importés dans la consom-mation. Les évolutions qualitatives de lademande urbaine sont ensuite analysées, enparticulier les exigences en matière de qualitésanitaire.

Comment la production (quatrième partie) et lesfilières (cinquième partie) peuvent-elles répondreà ces évolutions ? Les réformes politiques sontprésentées en préalable car elles ont permis lacroissance de la production vivrière. Les quantitéssont précisées par produit et par région. Lescaractéristiques structurelles de l’agriculture viet-namienne, déterminantes pour l’évolution futurede l’offre alimentaire, sont analysées, en parti-culier, l’accès au foncier, à la main-d’œuvre, auxservices. Les évolutions de la production entermes de qualité sont brossées. Enfin, la traduc-tion de ces évolutions en termes de revenus pourles agriculteurs et les effets d’entraînement sur lesautres secteurs de l’économie sont exposés.

Les filières de produits alimentaires – l’ensem-ble des acteurs économiques du producteur auconsommateur – font l’objet de la cinquièmepartie. Sont-elles à même de transmettre etd’ajuster les évolutions de l’offre et de lademande ? Leur organisation et leur efficacité entermes de quantité, de qualité, de prix, sont illus-trées par l’exemple des filières des légumes, duporc et du riz. Deux évolutions capitales sontensuite présentées : la planification des marchésde gros et de détail, et l’essor de la grande distri-bution.

La sixième partie est consacrée à l’évolution del’alimentation de proximité, à partir du cas del’agriculture périurbaine, et ses conséquences surles différents rôles de cette agriculture multifonc-tionnelle.

Enfin, les variables-clé d’évolution sont présen-tées, ainsi que le rôle que la recherche peut jouerpour accompagner les politiques.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Les données n’existant pas pour toutes les années de la période deréférence de cette étude (1991-2000), il a parfois été nécessaire d’ex-trapoler. Les sources utilisées ont été les suivantes :● pour la démographie, les recensements de 1979, 1989 et 1999 ;● pour la consommation, l’enquête sur le niveau de vie des ménages

du GSO (1993 et 1998) ; l’enquête du NIN (2000) ; les bilans alimen-taires de la FAO (1987 à 2000) ;

● pour la production et les prix, les données du GSO pour lesdifférentes années ;

● pour la production, les importations et les exportations en valeur,les données de la FAO, qui s’arrêtent en 1999 ;

● pour la production, les importations et les exportations en quan-tité, les données du ministère de l’agriculture et du développementrural, Food Balance Sheets, 2001 – ces données sont différentes decelles publiées sur l’internet de la FAO (FAOSTAT), car elles intègrentdes sources variées de données, officielles et non officielles.

● sur la consommation, les travaux de recherche menés par leCIRAD et l’IOS, en 2002 ;

● sur les filières des légumes, le programme du CIRAD-RIFAV-VASI ;● sur les filières du porc et du riz, les travaux du VASI en collabora-

tion avec le CIRAD (1997–2002) ; sur l’offre et la demande de cestrois produits, les travaux conduits par l’IFPRI en 1999-2000.

Le document se limite à un état des lieux sur les tendances passéeset le présent. Il pourra servir de base à un atelier de prospective quitestera différentes tendances d’évolution sur la base d’une série d’hy-pothèses concernant les paramètres-clé influençant la consommation,les filières et la production.

Les données statistiques doivent être utilisées avec précaution. Eneffet, les échanges commerciaux, notamment avec la Chine sont sous-estimés. La mise en parallèle de données d’origine différente met enévidence des disparités fortes, par exemple entre le GSO, le NIN et laFAO sur la consommation ; ou entre le GSO et nos propres relevés surle prix des légumes. Dans la mesure du possible, nous avons essayéde croiser différentes sources de données, de préciser la méthode decollecte, et nous avons noué des relations de confiance avec lesagents des institutions de statistique et les opérateurs des filières.Certaines données ne sont pas disponibles, par exemple, sur lesentreprises de transformation alimentaire, sans qu’il soit toujours facilede savoir si les données n’ont pas été collectées ou si elles existent– par exemple au ministère de l’industrie – mais ne sont pas encorerepérées. Nous indiquerons les données non disponibles pourlesquelles il serait nécessaire de mettre sur pied des systèmes d’ob-servation pertinents.

Encadré 1. Sources utilisées et fiabilité des données

Taux de change

1 dollar américain = 15 000 dongs (2000)11 500 dongs (1992)

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Introduction

17

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Carte administrative du Vietnam

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Quels sont les produits alimentaires destinés àl’exportation ? Au marché intérieur ? En quellequantité et pour quelle valeur ? Quelles sont lesinterrelations entre ces deux marchés ? Quelleproportion représentent les importations, lesexportations et la production locale ? Tel est l’objetde cette première partie.

1. Le poids du marché intérieur

Que ce soit en quantité ou en valeur, le marchéintérieur est beaucoup plus important que lesexportations. En tonnage, les exportations nereprésentent que 10 % de la production alimen-

taire totale – la production alimentaire comptantpour plus de 80 % de la production agricole (voirtableau 2, p. 20). Selon les calculs de NicolasBricas et Muriel Figuié, la valeur des exportationsagricoles est moitié moindre que celle du marchéintérieur alimentaire (figure 1).

De plus, la comparaison de la filière du porc,tournée vers le marché intérieur, et de celle ducafé, à vocation d’exportation, montre que lapremière dégage une valeur ajoutée supérieureau double de la seconde (tableau 1). Quant à lafilière du riz, la consommation finale intérieurereprésente le double des exportations (Nielsen,1996, à partir des données de la SAM, 1996).

Marché intérieur et marché extérieurPaule Moustier (CIRAD)

Que représentent les débouchés à l’exportation et la demande locale en termes deproduit, de poids économique, d’exigences de qualité et de prix ? Les produits peuventêtre classés selon qu’ils ont un double débouché (riz, produits de la mer...), qu’ils sontuniquement destinés à l’exportation (café, thé, caoutchouc..), ou qu’ils sont peuexportés (fruits et légumes, viande…). Le type d’entreprise et leur localisation varientégalement selon le débouché. La comparaison des débouchés, en valeur et en tonnage, relativise l’importance desexportations au regard du marché intérieur : les exportations agricoles représententenviron 10 % de la production totale en tonnage et deux fois moins que le marchéintérieur en valeur. Pendant les années 90, les exportations agricoles ont fortement augmenté, maisdepuis 1997, la croissance s’est ralentie et une baisse est apparue. La part du rizdiminue, tandis que celle des produits de la mer augmente (les deux produitsreprésentant chacun environ 30 % des exportations). Les marchés internationauxétant très instables – comme l’illustre l’évolution des exportations de riz et de porc –les filières s’en trouvent fragilisées. Dans le même temps, les importations connaissent un accroissement, qui pourrait sepoursuivre du fait de l’ouverture commerciale dans le cadre de l’ASEAN. Lespossibilités de débouchés intérieurs et à l’exportation sont enfin comparées en termesd’exigence de qualité et de prix pour le riz et le porc. Les marchés intérieurs peuventconstituer un test avant l’exportation, même si les exigences de qualité ne sont pastoujours similaires.

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Marché intérieur et marché extérieur

19

valeur des exportationsagricoles

valeur du marché alimentaire intérieur

années97/9892/93

mill

iard

s d

e d

olla

rs

0

1

2

3

4

5

6

Source : estimation de Nicolas Bricas et de MurielFiguié, d’après les données du GSO (VLSS) et de la FAO(FAOSTAT, catégorie « Agriculture products, total exportvalue »), en prix courants.

Source : Nielsen, 1996

Tableau 1. Valeur ajoutée de différentes filières (milliards de dongs)

Figure 1. Marché intérieur alimentaire, non comprise la consommationhors du domicile, et exportations agricoles

Consommation finale localeConsommations intermédiairesExportationsValeur ajoutée

Riz

36 5675 315

12 69332 692

Porc

11 612679

1 0287 023

Café

529483

5 8483 077

Produits dela mer frais

8 4387 9993 656

12 014

Produits de lamer transformés

1 0792 6089 5183 150

Fruits, légumes,noix, thé, jute

17 01410 580

119 6209 856

Encadré 2. Les exportations sont-elles plus rémunératrices pour les agriculteurs ?

Bien qu’ils soient peu nombreux, les élémentsdisponibles suggèrent que les marchés extérieurs nesont pas toujours plus rémunérateurs que les marchésintérieurs. Ainsi, dans le delta du fleuve Rouge, le prixdu riz ordinaire reçu par les producteurs sur le marchélocal est, certaines années, à peine inférieur au prix dumarché international (voir figure ). En revanche, le rizparfumé, dont le prix est de 50 % supérieur à celui duriz ordinaire, offre de meilleures possibilités pouraméliorer les revenus (voir cinquième partie).

Dans le cas de la filière porc, le prix au producteurvietnamien est très inférieur à celui d’autres payscomme l’Australie, Taiwan ou le Japon. Mais le prix dela viande maigre est 1,3 à 1,6 fois supérieur au prix deChicago (Tran Con Thang, 2003). Au Vietnam, le coûtde l’alimentation animale est deux fois plus élevé qu’auxEtats-Unis, ce qui limite la marge de manœuvre pouraméliorer la qualité dans la filière. Autre exemple, en2001, le prix du maïs était de 115 dollars la tonne, alorsqu’il était de 84 dollars la tonne sur le marché mondial(Dao Duc Huan, Vu Trong Binh, Dao The Anh, Jean-François Lecoq, 2003).

Prix au producteur Prix à l'exportation

19941900

2100

2300

2500

2700

2900

3100

3300

3500

3700

3900

1995 1996 1997 1998 1999

Années

Pri

x (d

on

gs/

kg)

Source : CIRAD/VASI-Ecopol.

Figure A. Evolution du prix du riz au producteur sur le marché local et du prix du riz sur le marché mondial, 1994-1999 (dongs/kg)

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

20

2. Spécificités et convergences des débouchés

2.1. En termes de filièresSelon le type de débouché, il est possible de

distinguer trois types de filières ou produits (voirtableau 2 et figure 2) :● les filières tournées à la fois vers les exporta-

tions et le marché intérieur (produits à doubledébouché) - riz, produits de la mer, arachide,

manioc - ; la part exportée représente de 10 à40 % de la production en tonnage ;

● les filières majoritairement tournées vers l’ex-portation (produits d’exportation) – café, caout-chouc, thé, noix, épices – ; la part exportéereprésente plus de 60 % de la production ;

● les filières principalement tournées vers lemarché intérieur – fruits et légumes, viande,produits laitiers, maïs – ; la part exportéereprésente moins de 6 % de la production.

Sources : Food Balance Sheets 1997-2001 (Ministry of Agriculture and Rural Development, 2002). Les données sur les exportations de fruits ont été complétées par l’estimation des exportations de fruits vers la Chine par le RIFAV en 2001 à partir des données des postes de douane. Les données ne comprennent pas l’huile de palme, entièrement importée (171 000 tonnes) et dont une partie (44 500 tonnes) est réexportée, ni le sucre, dont il est difficile de connaître la part prise par les exportations dans la productionlocale vu que le sucre est à la fois produit localement, importé et exporté. Les données sur les produits de la mer semblent ne pas contenir les produits transformés (pour lesquels les données ne sont pas disponibles en 2001), ce qui rajouterait 40 % au total des exportations (392 483 tonnes au total en 2000, au lieu de 250 548 tonnes pour les produits non transformés).Les données sur les exportations de fruits et légumes ne portent que sur les exportations en frais. En 2001, les quantités de fruits transformés se sont élevées à 190 000 tonnes, et celles de légumes à 129 700 tonnes. En considérant que 80 % des produits transformés sont exportés, le taux d’exportation des fruits est de 5 % et celui des légumes de 2 %.

Tableau 2. Débouchés intérieurs et à l’exportation par type de produit alimentaire, en 2001 (tonnes)

Produits à double débouché

Riz paddyProduits de la merArachideManiocProduits d’exportation

Café, théNoixEpices (dont poivre)

Produits peu exportés

FruitsLégumesPorcViandes (hors porc)Oléagineux (hors arachide et huile de palme)Sucre et mielOeufs

LégumineusesMaïsPommes de terre et patates doucesGraisses animalesProduits laitiers

Total

Production

20 620 7151 761 7002 625 5002 806 400

1 218 80070 20047 308

4 286 4006 997 1001 415 500

502 3751 299 6471 396 132

200 500

70 2002 122 8001 970 950

78 362408 946

61 833 735

Exportations

3 729 458235 84578 163

1 218 182

999 41543 67240 182

133 8841 500

73 00000

78 6690

2900000

6 594 160

Utilisation locale(hors imports)

16 891 2571 525 855

184 3371 588 218

219 38526 5287 126

4 152 5166 995 6001 342 500

502 3751 299 6471 317 463

200 500

69 9102 122 8001 970 950

78 362408 946

5 5239 575

Exportations/production (%)

18,09 13,39 29,78 43,41

82,00 62,21 84,00

3,120,02 5,16 0,000,00 5,63 0,00 0,41 0,00 0,00 0,00 0,00

10,66

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Marché intérieur et marché extérieur

21

2.2. En termes de région La plupart des productions destinées à l’expor-

tation sont localisées dans le sud du pays(caoutchouc, café, thé, riz, poisson), tandis queles productions pour le marché intérieur sontcultivées dans toutes les régions. Dans le delta dufleuve Rouge, les filières horticoles et porcinessont à la fois tournées vers le marché intérieur etles exportations.

2.3. En termes de type d’entrepriseLes entreprises tournées vers l’exportation sont

généralement plus spécialisées et de plus grandetaille. La différence est marquée pour la filièrepoisson : ce sont des entreprises privées degrande taille qui dominent sur le marché de l’ex-portation, tandis que, pour le marché local, lesentreprises de production et de commercialisa-tion sont nombreuses et atomisées. La différenceest beaucoup moins marquée dans le cas desfilières fruits, légumes et fleurs : ce sont souventles mêmes producteurs qui vendent sur lesmarchés intérieurs et régionaux (Chine, Japon,Russie), avec des réseaux de collecteursdifférents.

2.4. En termes de demande de qualitéDe meilleures synergies entre marchés à l’ex-

portation et marchés intérieurs peuvent-ellescontribuer à améliorer la qualité des produits ?Pour certains, les exportations poussent àaméliorer la qualité des produits pour les marchésintérieurs ; et les marchés intérieurs peuventconstituer un bon test avant d’exporter.

Ces constats doivent être nuancés. Lesexigences de qualité entre marché d’exportationet marché intérieur ne sont pas toujours iden-tiques ; par exemple, les consommateurs viet-namiens aiment les fruits à noyau cueillis verts,qui ne sont pas exportables sous cette forme.Autre exemple, alors que les préoccupations enmatière de qualité sanitaire à l’exportation pour lepoisson portent sur les résidus d’antibiotiques, lesconsommateurs locaux expriment une demandeforte pour des poissons exempts de conserva-teurs de type formol. En revanche, pour la filièreporc, la demande à l’exportation, comme dans lesvilles vietnamiennes, s’oriente vers le porcmaigre. Or, le taux moyen de viande maigre desporcs vietnamiens est de 34 %, alors qu’elle est

de 55 % en moyenne dans le monde (Tran CongThang, 2003).

Quel que soit le débouché, gagner des parts demarché et augmenter les revenus supposentdonc de répondre aux exigences de qualité. Il estégalement nécessaire que les fournisseurs puis-sent assurer un approvisionnement régulier ethonorer les contrats.

Les efforts consentis sur un marché peuventêtre valorisés sur l’autre débouché. Ainsi, lesmarchés intérieurs peuvent servir de test avant decommencer à exporter, en particulier, vers lesdébouchés les plus exigeants en matière de régu-larité et de qualité (supermarchés, restaurants).Par ailleurs, les expériences de normalisation etd’organisation du contrôle de qualité mises enplace pour les filières d’exportation peuventinspirer des démarches similaires sur lesmarchés intérieurs.

Riz paddy

16 891 257

3 729 458

Exportation

Consommation locale

Produits de la mer

235 845

1 525 855

Café et thé

999 415

219 385

Fruits

133 884

4 152 516

Légumes

1 500

6 995 600

Porc

73 000

1 342 500

Figure 2. Part des débouchés intérieurs et à l'exportation pour les principaux produits alimentaires en 2001 (tonnes)

Source : voir tableau 2.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

22

3. Dynamisme et fragilité desexportations

3.1. Des exportations dominées par quatre produits

En 2001, les exportations agricoles étaientdominées par le riz (31 % de la valeur totale),le café, le thé et le cacao (28 %), les fruitset légumes (13 %), le caoutchouc (8 %) (voirfigure 3).

Les données de 1999 incluant les exportationsde produits de la mer montrent que le riz et lesproduits de la mer occupent une part équivalente,30 % de la valeur totale (voir figure 4).

3.2. Tendance à la baisse après une croissance rapideSi, de 1993 à 1997, la valeur des exportations

a doublé – de moins de 1 milliard de dollars en1993 à plus de deux milliards en 1997 –, cettecroissance s’est ralentie et la pente s’est inverséeà partir de 1999. Depuis 1997, les exportationsoscillent entre 2 et 2,5 milliards de dollars (voirfigure 5 et paragraphe 3.3.).

Pour les produits de la mer (non compris sur lafigure 3), les données de la FAO s’arrêtent en1999 et montrent une progression rapide desexportations jusqu’à cette date (voir figure 6).

En 2000, les exportations de produits de la mer,d’une valeur de 1,5 milliard de dollars, ontdépassé les exportations de riz, évaluées à668 millions par le General Statistical Office(GSO, 2001).

D’après l’ICARD (Nguyen Ngoc Que, 2002), letaux moyen de croissance des exportations agri-coles de 1990 à 2000 a été de 14,7 % pour attein-dre un montant total de 4,2 milliards de dollarsen 2000, représentant 29 % de la valeur totaledes exportations vietnamiennes – ces chiffressont respectivement de 5 et 33 % en 2001 (voirtableau 3).

3.3. Des marchés internationauxinstablesLes exportations de riz et de porc illustrent le

dynamisme, mais aussi la fragilité de ces filièresface à la volatilité des exportations.

fruits et légumes13 %

autres12 %

sucre2 %arachide

2 %viande

4 %

caoutchouc8 % café, thé, cacao

28 %

riz 31 %

19910

1

2

3

4

5

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999

Produits mer

Total(dont pdts mer)

1991

0,50

11,5

22,5

3

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

Fruits etlégumes

Café, thé

Riz

Totalagriculture

Source : FAOSTAT.

Figure 3. Composition des exportations agricoles (en valeur),non compris les produits de la mer, en 2001

Figure 4. Composition des exportations agricoles (en valeur), y compris les produits de la mer, en 1999

Figure 5. Evolution des exportations agricoles, non compris les produits de la mer, 1991-2001 (milliards de dollars)

Figure 6. Evolution des exportations agricoles, y comprisles produits de la mer, 1991-1999 (milliards de dollars)

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Marché intérieur et marché extérieur

23

Le cas du riz Nguyen Ngoc Que (ICARD)

Grâce à une croissance stable et rapide de laproduction de riz, le Vietnam peut non seulementsatisfaire ses besoins intérieurs, mais encoreexporter. En 2001, il était le deuxième pays expor-tateur de riz du monde, après la Thaïlande.Pendant la période 1989-2000, le Vietnam aexporté plus de 30 millions de tonnes de riz, versplus de 30 pays, principalement asiatiques, réa-lisant un chiffre d'affaires supérieur à 7 milliardsde dollars. Cela représente une croissancemoyenne de 13 % par an.

Premier marché importateur du riz vietnamien,l'Asie compte pour plus de la moitié des exporta-tions vietnamiennes. Les principaux clients sontl’Indonésie, Singapour, la Malaisie et Hongkong.Quelques pays du Proche-Orient comme l’Iran etl’Irak sont également des clients importants duVietnam : en 2000, ces marchés ont importéenviron 30 % du volume total des exportationsvietnamiennes.

Le riz représente plus de 12 % de la valeurtotale des exportations du pays sur la période1996-2000. En 1999, la quantité de riz exportéea atteint son plus haut niveau : 4,5 millions detonnes, pour un chiffre d'affaires dépassant le

milliard de dollars. Cependant, en 2000, suite à labaisse du prix de riz sur le marché mondial, lesexportations vietnamiennes sont tombées à3,5 millions de tonnes pour un chiffre d'affaires de668 millions de dollars. Cette baisse nuit auxproducteurs, aux exportateurs et aux intérêtsnationaux.

Les crues survenues dans le delta du Mékongà la fin de 2001 ont gravement touché la produc-tion rizicole. Les exportateurs vietnamiens ontmis tous leurs efforts pour remplir les contratsengagés – certains ont même dû acheter du riz àdes entreprises thaïlandaises concurrentes – etn’ont pas osé signer de nouveaux contrats.

Le Vietnam fait partie des pays dont les coûtsde production sont les plus bas du monde, selondes estimations de l'Institut international derecherches sur les politiques vivrières (IFPRI),pour la période 1995-2000. Cela lui confère ungrand avantage pour s’intégrer au marchémondial. Cependant, l'indice de compétitivité enprix du riz vietnamien a baissé de plus de lamoitié depuis 1995, malgré une hausse en 1998.Cette diminution peut s'expliquer par plusieursraisons : la baisse du prix du riz dans le monde(augmentation de la concurrence, baisse de lademande) ; la politique des changes choisie parle gouvernement ; les exigences croissantes des

A l’heure actuelle, le secteur alimentaire est peu concerné par les bar-rières commerciales, à la différence du secteur industriel. Le riz fait l’objet de quotas d’exportation que le gouvernement viet-namien octroie chaque année aux entreprises patentées et auxprovinces, mais les chiffres d’exportation ont toujours été supérieursaux quotas. Toutefois, le système de quotas entraîne des contraintes :les entreprises désignées par le gouvernement vietnamien n’ont pas

toujours la capacité d’exportation adéquate et les périodes d’exporta-tion autorisées sont contraignantes. La suppression de ce systèmefacilite les exportations de riz (Institute of Economics, 2001). Quant aux restrictions à l’importation, elles visent soit à protéger lessecteurs en développement, soit à équilibrer la balance commerciale.Elles portent essentiellement sur le sucre et l’huile végétale.

Source : Ministère du plan et de l'investissement, cité dans Nguyen Ngoc Que, 2002.

Tableau 3. Valeur totale des exportations vietnamiennes, 1990-2000 (en millions de dollars)

AnnéeValeur totale des exportations du paysValeur des exportations agricoles(au sens large, avec forêt et pêche)Pourcentage des exportations agri-coles (au sens large)

19902 4041 149

47,8

19955 4492 521

46,2

200014 4834 198

29,0

200115 0275 027

33,4

1991-199519 5609 427

48,2

1996-200051 64917 712

34,2

Encadré 3. Le secteur alimentaire et le marché international

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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pays importateurs en termes de qualité (taux degrains non cassés, goût…).

La concurrence exercée par la Thaïlande est deplus en plus forte. Grâce à une dévaluationconséquente du bath, le prix de vente du riz thaï-landais en dollars a diminué. Avant 1998, le prixde vente en gros à la tonne du riz thaïlandaisdépassait de 40 à 50 dollars celui du riz viet-namien. En 1998, la situation s’est inversée : leprix de vente en gros du riz thaïlandais estinférieur de 50 dollars à celui du riz vietnamien.Pourtant, la main-d'œuvre est très bon marché auVietnam, environ 1,5 dollar par jour (le coût estmême plus bas dans les milieux ruraux), ce quireprésente 113 dollars par hectare de rizière, soit24 % du coût de production. Ce coût est doubleen Thaïlande (222 dollars) et compte jusqu'à62 % du coût de production.

Le cas du porcTran Cong Thang (ICARD)

Longtemps, l’Union soviétique a été le principalmarché d’exportation pour la viande porcine duVietnam. Les accords et conventions d’échangesur lesquels se fondaient ces exportations ontocculté la question de la compétitivité du porc viet-namien. Suite à l’effondrement de l’Union sovié-tique et l’embargo de la Russie sur les importa-tions de porcs vietnamiens, les exportations deviande porcine ont fortement diminué au Vietnam.En 1996, elles ne représentaient plus que de4,6 milliers de tonnes, essentiellement desporcelets et des porcs d’un poids moyen pourl’exportation vers Hongkong. En 1997, les expor-tations doublent par rapport à l’année précédente,suite à la levée de l’embargo russe et aux pro-blèmes sanitaires de la filière avicole à Hongkong,qui a provoqué une augmentation de la consom-mation de viande porcine.

Depuis 1998, le marché des porcs vietnamiensest en crise, en raison d’un manque de compéti-tivité de la filière à l’exportation. Les produitsporcins de l’Union européenne, de la Chine, desEtats-Unis ont pénétré le marché russe provo-quant une baisse du prix des porcs exportés de1 700 dollars la tonne à 900-1 000 dollars la tonne.

Après la réintégration de Hongkong à la Chine,le prix d’achat par la Chine des porcs vietnamiensa fortement chuté de 3 000 à 1 200 dollars la

tonne. En effet, les ventes de porc de la Chinecontinentale vers Hongkong ont fortementaugmenté. La Chine exerce une politique de taxa-tion élevée sur les importations de porc pourpréserver ses parts de marché.

Or, le prix de la viande vietnamienne reste tropélevé. Le prix des porcs vifs dans le delta dufleuve Rouge est d’environ 750 dollars la tonne etil atteint 1 000 dollars la tonne dans le delta duMékong en 2001. En 1998, il a atteint certainsmois un niveau minimum de 430 à 470 dollars latonne dans le delta du fleuve Rouge. Le prix devente étant inférieur au prix de revient, les produc-teurs ont freiné leur production.

Quant aux grandes fermes d’élevage industrielpour l’exportation de porc maigre vers Hongkong,leur coût de production reste encore élevé(13 000-14 000 dongs le kilo de poids vif, soitenviron 900 dollars par tonne). Le fonds d’inves-tissement pour ce type de ferme est relativementimportant, les élevages sont industriels et lesfermes reçoivent un appui important de la partdes transformateurs d’aliments (comme de la partdu groupe CP) sur les techniques d’élevage, etles soins vétérinaires. L’essentiel de ces porcs estexporté et peu vendu sur le marché domestique.

Afin de favoriser les exportations, l’Etat a misen place, en 2001, une politique de soutienaux exportateurs en accordant 900 dongs(0,06 dollar) de prime pour 1 dollar de chiffre d’af-faires d’exportation de carcasse et 280 dongs(0,01 dollar) pour 1 dollar de porcelets abattusexportés. Grâce à cette politique et audynamisme des exportateurs pour trouverde nouveaux marchés, le pays a pu exporter30 000 tonnes de porc en 2001, essentiellementdes carcasses vers les marchés traditionnelscomme la Russie (17 à 18 000 tonnes), desporcelets (10 500 tonnes) vers Hongkong,Taiwan et la Malaisie. Néanmoins, vers la fin de2001, l’augmentation des frais d’exportation decarcasses de porc pour le marché russe a provo-qué une perte de 500 dongs au kilo (0,03 dollar).

4. La menace des importations

D’après la FAO, la balance vietnamienne deséchanges agricoles est largement excédentaireet les importations – du blé, pour moitié (Ministryof Agriculture and Rural Development, 2002) – ne

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Marché intérieur et marché extérieur

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représentent qu’une faible part de la consomma-tion locale. D’après les estimations de MurielFiguié et Nicolas Bricas présentées dans latroisième partie, moins de 10 % de la consom-mation alimentaire en valeur proviendrait d’impor-tations, en 1998 comme en 2001.

Cependant, les importations ont fortementaugmenté : ainsi, les importations de blé ontquasiment doublé entre 1997 et 2001. De plus,les importations en provenance de Chine sontlargement sous-estimées. Alors que la FAOévalue les importations totales de fruits à 40 810tonnes en 2001, les importations de Chine par leposte frontière de Tan Thanh (qui représenteraitla moitié des flux par voie terrestre) étaientestimées à 61 000 tonnes, dont 70 % de pommeet de poire (voir encadré 4). Les importations delégumes étaient estimées à 1 900 tonnes, alorsque le poste frontière avait enregistré 47 000tonnes de légumes (pomme de terre, échalote,ail, oignon pour 90 %). Par ailleurs, nous avonsestimé les importations de légumes tempérésfrais en provenance de Chine (tomate, chou,

carotte) à environ 10 000 tonnes entre juin etseptembre 2002, principale période d’importation(Hoang Bang An et al., 2003). Au total, les impor-tations de Chine vers le Vietnam sont largementsupérieures aux exportations du Vietnam vers laChine pour les fruits et légumes.

La levée des barrières commerciales dans lecadre de l’AFTA (Asean Free Trade Agreement)signé en 1995, qui se met en place progressi-vement, pourrait provoquer une augmentationdes importations agricoles, en particulier lesfruits de Thaïlande, ainsi que les produits trans-formés alimentaires de Thaïlande, Singapour etMalaisie.

Enfin, les intrants agricoles pèsent beaucoupplus que les produits : en 2001, les importationsd’engrais représentaient 509 millions de dollars(Institute of Economics, 2001), soit plus que lesimportations de produits agricoles estimées parla FAO à 400 millions de dollars. La filière desengrais demanderait une étude socio-économique spécifique afin d’évaluer les possi-bilités de réduire les importations de ces intrants.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

26

Source : FAOSTAT.

Tableau A. Importations et exportations de fruitset légumes par la Chine, en 2001

Quantité (1 000 tonnes)Valeur (1 000 dollars)

Importations6 1662 604

Exportations6 9294 421

En 2001, la Chine possède la superficie de cultures maraîchères et d’arbres fruitiers la plus grande du monde,avec 16 millions d’hectares, soit 37 % de la superficie mondiale.

La Chine continentale est un pays dans lequel il est relativement facile d’exporter, les exigences en qualité desmarchandises en général, et des légumes et fruits en particulier n’étant pas très élevées. Néanmoins, l’accès n’estpas sans risque, particulièrement en ce qui concerne le paiement et la relation à long terme avec la clientèle.

Pays voisins, le Vietnam et la Chine entretiennent des relations depuis des milliers d’années. De part et d’autre,les clients sont moins exigeants que sur d’autres marchés, en matière de contrôle de qualité notamment.Actuellement, la Chine demeure le premier importateur de légumes et fruits vietnamiens, selon deux formes, con-trôlée et informelle. En 1999, la valeur des exportations contrôlées de fruits et légumes du Vietnam vers la Chineétait de 35,6 millions de dollars soit 34 % des exportations vietnamiennes de fruits et légumes (source : ministèredu commerce vietnamien). En 2001, ce montant est passé à 142,8 millions de dollars (43 %). Les échanges noncontrôlés passent par les marchés proches des provinces frontalières, Quang Dong, Quang Tay, Van Nam, et parles ports frontaliers, comme Mong Cai, Tan Thanh, Lao Cai, pour atteindre les marchés du sud de la Chine qui ontde forts besoins en légumes et fruits du Vietnam. Les données présentées sur les échanges terrestres provien-nent du poste frontière de Tan Thanh, qui représenterait plus de la moitié des flux transfrontaliers.

Source : Rapport du Service de contrôle des végétaux de la région VII, Département de la protection végétale.

Tableau B. Exportations de légumes et de fruitsdu Vietnam vers la Chine à la frontière Tan Thanh (2001)Produit+ Fruit du dragon, longane, ramboutan, litchi+ Longane/litchi séché, chair de longane séché+ Mangue fraîche+ Banane, courge cireuse, sapotier+ Jacque, banane séchée, « thé » de courge amère+ Soja, haricot frais+ Piment+ Pancovier+ Concombre fermenté+ Jacque+ Citron

Quantité (tonnes)49 781,013 903,685 646,755 517,00

91,04130,0087,5995,004,20

44,005,00

Encadré 4. Les échanges entre le Vietnam et la Chine : le cas des fruits et légumesHoang Bang An (RIFAV)

La Chine est le pays d’Asie le plus important pour les échanges de fruits et légumes, à la fois pour les importa-tions et pour les exportations (voir tableau A). Si le montant des importations en valeur de la Chine continentale etde Hongkong est équivalent, la Chine continentale représente 90 % des exportations de l’ensemble du territoire.

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Marché intérieur et marché extérieur

27

Source : Rapport du Service de contrôle de la protection desvégétaux de la région VII, Département de la protection végétale.

Tableau D. Echanges entre la Chine et le Vietnam par le poste Tan Thanh, en 2001 (tonnes)

Chine vers VietnamVietnam vers Chine

Fruits70 54264 987

Légumes46 900

316

Total117 44265 303

Les principales exportations du Vietnam vers la Chine concernent les fruits (tableau B) : fruit du dragon, longane,litchi, banane, ramboutan. De la Chine vers le Vietnam, les échanges portent sur les fruits (pomme, poire, man-darine) et les légumes qui se conservent longtemps (pomme de terre, ail, oignon).

Le tableau D montre que le commerce de la Chine vers le Vietnam est plus important en tonnage que le com-merce du Vietnam vers la Chine.

Conclusion : respecter les différences,améliorer les synergies

La production agricole vietnamienne est large-ment tournée vers la consommation locale, quece soit en tonnage ou en valeur. Les exigencesde qualité et les prix pouvant différer selon le typede marché, chacun nécessite un traitement spéci-fique. Cependant, les articulations sont nom-breuses : exigences de qualité proches pourcertains produits (riz, porc) ; pression à la baissedes coûts de production pour le porc. Ainsi, lesmarchés intérieurs peuvent permettre des testsintéressants avant l’exportation, surtout vers la

grande distribution, qui est très exigeante. Mais ilsne doivent en aucun cas être considérés commedes « résidus » ou des « sous-marchés » parrapport aux marchés d’exportation. Ils peuvent eneffet être plus intéressants en matière de prix etde taille des débouchés.

***La troisième partie nous permettra de mieux

cerner la demande des consommateurs viet-namiens en termes de produits, quantité etqualité. Cette demande est fortement influencéepar les évolutions démographiques, que nousallons présenter maintenant.

Source : Rapport du Service de contrôle des végétaux de la région VII, Département de la protection végétale.

Tableau C. Importations vietnamiennes de légumes et defruits de Chine par la frontière Tan Thanh, en 2001 (tonnes)

Produit+ Pomme et poire+ Mandarine+ Taro+ Pomme de terre+ Echalote, ail, oignon+ Pousse de bambou+ Légumes et fruits transformés+ Légumes et fruits séchés+ Concombre+ Litchi frais+ Pastèque

Quantité55 614,9314 928,502 238,70

14 342,7027 899,56

33,44152,50308,6269,6561,00

1 876,80

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

28

Les évolutions démographiques et socio-économiquesSylvie Fanchette (IRD)

1. Une population inégalement répartie

Avec une population de 76,3 millions d’habi-tants en 1999 – estimée à 79,7 millions en2002 –, le Vietnam est le pays de la région le pluspeuplé excepté Singapour. La population est trèsinégalement répartie sur une superficie de330 900 km2. Le delta du fleuve Rouge et celui duMékong, greniers à riz du pays, concentrent 57 %de la population sur 18 % de la superficie. Ainsi,alors que les densités de population dans leshautes terres sont faibles – de l'ordre de50 hab./km2 dans les Hauts plateaux du Centre –,elles atteignent 400 hab./km2 dans les plainesdu sud (delta du fleuve Mékong) et plus de1 000 hab./km2 dans celles du nord (delta dufleuve Rouge).

Au nord, ces différences marquées s’expliquentpar une occupation humaine ancienne et par leregroupement de la population en localitésdenses et structurées sur le plan socio-politique.Le système de production et d'encadrement despopulations pour réaliser les travaux hydrauliquesà grande échelle que nécessitait la mise en valeurdes deltas a été emprunté à la Chine. Sur le planagricole, il est caractérisé par la prédominancedes productions végétales sur les productionsanimales. Trait marquant de l'aménagement del'espace rural par la civilisation chinoise,l'endiguement, dont l'entretien conditionne lemaintien d'un système menacé par les inonda-tions, nécessitait une discipline collective mini-male. La monoculture du riz et des techniquesagricoles performantes et très utilisatrices de

Le Vietnam est un pays très densément peuplé. Les concentrations sontparticulièrement fortes dans les deltas (jusqu’à 1 000 habitants au km2 dans le deltadu fleuve Rouge), en contraste avec les zones de montagnes (où la densité peutdescendre jusqu'à 50 habitants au km2). Après une période de contrôle autoritaire desnaissances, le pays est entré dans une phase de transition démographique avec untaux de croissance de sa population de 1,7 % par an. Le taux d’urbanisation relativement faible (23,5 %) s’accroît de façon significative (lapopulation urbaine augmente de 3,5 % par an). L’exode rural, d’abord freiné par desmesures autoritaires, est maintenant abordé par diverses politiques : colonisation(souvent encore dirigée) des fronts pionniers vers le sud et les hauts plateauxcentraux ; diversification économique, notamment par le développement industriel ;urbanisation du milieu rural, avec le développement de centres urbains secondairesdans les campagnes.Si les conditions socio-économiques de l’ensemble de la population semblent s’êtreaméliorées – augmentation des revenus, réduction de la malnutrition –, les inégalitésse sont cependant creusées. Deux défis se posent actuellement au gouvernement vietnamien : équilibrerl’occupation géographique du territoire et distribuer équitablement les fruits de lacroissance économique.

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Les évolutions démographiques et socio-économiques

29

main-d’œuvre ont permis l'installation dedensités rurales élevées (Lacoste Y., 1988).

Le delta du Mékong est beaucoup moinspeuplé, du fait de son histoire récente et de saconfiguration spécifique. Occupé progressive-ment par les Kinhs depuis le XVIIe siècle, le frontpionnier a avancé au fur et à mesure de l’arrivéedes migrants originaires du nord du pays sur lesespaces les moins menacés par les inondations.Ce delta a constitué une réserve foncière pour lesplaines surpeuplées du nord et du centre. Lesrisques moindres d’inondation ont favorisé unhabitat plus dispersé et des villages plus aérés etouverts que ceux des plaines du nord (Langlet-Quach Thanh Tam, 2000, p. 187). Les deltas ontété progressivement occupés par des peuplesencadrés par des systèmes politiques de plus enplus structurés, ce qui s’est traduit par unehomogénéisation du peuplement. Au Vietnam,les Kinhs forment l’essentiel de la population,celle des plaines, et le fondement même de l’Etat.Cette homogénéisation s'est traduite par uncontraste démographique et social marqué entreles plaines et les montagnes qui les entourent(Lacoste Y., 1988). Par exemple, les populationsdes plaines ont répondu aux politiques volon-taristes de limitation des naissances de leurgouvernement, alors que les populations minori-taires des zones de montagne continuaient àmaintenir un taux élevé de fertilité (voir encadré8).

L’opposition entre plaines et hautes terresdemeure le trait dominant de l’occupation du terri-toire vietnamien et ce, malgré les efforts dugouvernement pour redistribuer la population pardes migrations et les mouvements migratoiresspontanés, des plaines vers la montagne, du nordvers le sud et de l’est vers l’ouest.

2. Un pays en transition démographique

Depuis la fin des années 80, le taux annuel decroissance démographique s'est fortementralenti : il s’élevait à 2,1 % entre les recensementsde 1979 et de 1989 ; il atteint 1,7 % entre ceux de1989 et de 1999.

Cette situation illustre la fin de la transitiondémographique, commencée au début desannées 50, qui se caractérise aujourd’hui par unaccroissement naturel lent de la population

résultant d’une fécondité et d’une mortalitéfaibles (Hoang Xuyen, 2000).

Conséquence d’une natalité passée élevée, lapopulation vietnamienne est jeune, même si ellecommence à vieillir (Hoang Xuyen, 2000).

Ainsi, en 2000, 54 % des Vietnamiens ontmoins de 25 ans, ce qui a de profondes implica-tions culturelles. En effet, comme le note P. Gubry,en 2000, 62 % de la population n’avaient pasconnu la guerre ou n’en ont pas de souvenirsprécis (ils avaient moins de 5 ans en 1975) ; et40 % n’ont pas connu l’économie totalementplanifiée ou n'en ont pas de souvenirs précis (ilsavaient moins de 5 ans en 1986, date d'adoptionde la politique du Renouveau ou Doi moi), (GubryP., 2000).

Les conséquences sont également éco-nomiques : la population active croît de 3 % paran. Ce sont ainsi 1,4 million de jeunes qui seprésentent sur le marché du travail chaqueannée. Il s’agit d’une main-d’œuvre instruite (en2001, 93 % de la population adulte est alpha-bétisée, alors qu’en 1945, 90 % de la populationétait illettrée) (CNSSH, 2002).

3. Une population en voie d’urbanisation

L'évolution récente de la population vietnami-enne est marquée par l'augmentation de la partde la population urbaine. De 1960 à 1989, lapopulation urbaine s'est maintenue à 20 % de lapopulation totale, du fait du contrôle politique étroitdes déplacements. De 1989 à 1999, la crois-sance annuelle de la population urbaine a été de3,6 %, alors que celle de la population rurale n’aatteint que 1,2 %. En 1999, la population urbainereprésente 23,5 % de la population totale.

Les projections prévoient une accélération del’urbanisation. Pour la période 1998-2020, lapopulation urbaine devrait augmenter de 3,8 %par an et la population rurale de 0,1 %. En 2020,la population urbaine devrait atteindre 39,5 % dela population totale (Cour J.-M., 2001). Ces tauxrestent cependant modestes en comparaison deceux des pays de la région : 36,4 % en moyenneen Asie du Sud-Est, 58 % environ pour lesPhilippines et la Malaisie (2000). En 1980, le tauxd’urbanisation de la Chine et du Vietnam était de20 % ; 20 ans plus tard, il atteint 31,6 % en Chine(2000) et seulement 23,5 % au Vietnam (1999).

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Les villes se regroupent dans les deux deltas etle long du littoral du centre. A la tête de la hiérar-chie administrative figurent deux métropoles,Hanoi, au nord, et Ho Chi Minh-ville, au sud.

La politique du Renouveau, adoptée en 1986,visait à faciliter, dans une économie jusque-làplanifiée, l'émergence d'une économie demarché. Les diverses réformes entreprises ontpermis la constitution d’un embryon de marché dutravail dans les grandes villes, tout en accordantdavantage de liberté aux travailleurs migrants. AHanoi, le relâchement du contrôle des certificatsde résidence a relancé la croissance démo-graphique (4,6 % par an entre 1989 et 1999).Cette croissance se caractérise par une forteimmigration (22 000 personnes par an enmoyenne), mais reste modérée, la transitiondémographique y étant plus avancée (DangXuan Duong et Le Hong Ke, 2000). De 1979 à1990, selon les statistiques du Planning familial,le taux d’accroissement naturel a fortementbaissé passant de 2,3 % à 1,4 % par an, en raisondu recul de l’âge du mariage et de la généralisa-tion des familles nucléaires. Depuis 1990, ce tauxse maintient à 1,3 % par an et reste le plus faibledu pays (Regards & VTGEO, 2002, p. 75).

L'attrait relativement récent des grandes villes,et particulièrement de Ho Chi Minh-ville, estconfirmé par les résultats du recensement de lapopulation de 1999 : en 1994, 9,3 % de la popu-

lation de la province de Ho Chi Minh-ville et 8 %de celle de Hanoi résidaient dans une autreprovince (voir encadré 5).

Si le recensement de 1999 fait état d’un exodesignificatif vers Hanoi et Ho Chi Minh-ville, lespetites villes et certaines agglomérations indus-trielles ont accaparé une part de cet exode. Lacroissance démographique la plus forte s'observedans les villes et provinces qui présentent un attraitéconomique et qui sont relativement urbanisées.La province de Hanoi a ainsi vu sa populationaugmenter de 2,7 % par an entre 1989 et 1999.Mais c’est surtout dans les provinces du sud-estque la population a crû : 2,3 % par an pour la popu-lation de la province de Ho Chi Minh-ville (dont lescitadins sont passés de 2,7 à 4,2, millions d'habi-tants, soit un taux de croissance moyen annuel de4,5 %) ; 4,3 % pour la population de la province deLam Dong (population urbaine à 38,7 %) ; 4 % àBinh Phuoc (population urbaine à 15,2 % seule-ment) ; 3,3 % à Binh Duong (population urbaine à32,6 %) ; 3,1 % à Ba Ria-Vung Tau (populationurbaine à 41,6 %). Les provinces proches de lacapitale économique profitent davantage de lacroissance démographique que Ho Chi Minh-ville.

La population urbaine du Vietnam est doncassez équilibrée : un tiers dans les deux métro-poles, un autre dans les villes moyennes (50 à400 000 habitants), un tiers dans les petites villes(moins de 50 000 habitants). Cette répartition

Si la politique du Doi moi a permis d’augmenter considérablement laproductivité agricole et les revenus des agriculteurs, la part dessecteurs agricole, sylvicole et forestier dans l’emploi total a diminué de72,6 % en 1991 à 61,3 % en 2000. Alors que les mesures visant à créer des emplois non agricoles à lacampagne ont rencontré peu de succès, la ville constitue un pôled’attraction. Les nouveaux emplois (8 421 000 entre 1991 et 1999) ont été essen-tiellement créés par le secteur privé – entreprises familiales, petites etmoyennes entreprises –, dans l’industrie et la construction (13,6 % desemplois en 1991 ; 16,7 % en 2000), ainsi que dans le secteur tertiaire(13,8 % et 22 %) (CNSSH, 2002).De plus, la rémunération horaire moyenne en milieu urbain est près dudouble de celle en milieu rural (rapport de 1,7 en 1998 ; Haughton D.,Haughton J. et al., 2001).

Les possibilités d’emploi, ainsi que de meilleures conditions d’étude,constituent un facteur majeur d’attraction des ruraux vers les centresurbains, comme le montre une enquête réalisée auprès des migrantsd’Ho Chi Minh-ville (Gubry P., Vu Thi Hong et al., 2002). Le niveau trèsfaible d’analphabétisme (9 % de la population) permet aux ruraux d’oc-cuper des emplois non agricoles, notamment en ville. Cette mêmeétude montre que 75 % des immigrants de Ho Chi Minh-ville sont satis-faits de leur migration et que les principaux inconvénients de la vieà Ho Chi Minh-ville concernent la qualité de l’environnement, puis lecoût de la vie. Cet attrait pour la ville se traduit également par des mouvements pen-dulaires journaliers et saisonniers : environ 13 % la main-d’œuvrerurale du delta du fleuve Rouge travaillent en ville (Dao The Tuan & LeThi Chau Dung, 2000).

Encadré 5. La ville, pôle d’attraction pour la recherche d’emploi

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Les évolutions démographiques et socio-économiques

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harmonieuse est un formidable atout, car ellepermet de bien articuler les villes et lescampagnes et elle limite les flux migratoires versles villes moyennes et grandes.

4. Stratégies politiques face àl’urbanisation

Pendant la période collectiviste, le développe-ment des villes, lieu du pouvoir politique, maisaussi de la dissidence, a été freiné. Aux yeux desdirigeants communistes vietnamiens, la ville avaitété le terreau de l’impérialisme américain, au sud,et du colonialisme français, au nord.

Pendant trente ans, les grandes villes, etsurtout Hanoi, ont vu leur extension bloquée. Legouvernement a pris des mesures de contrôle del’immigration en imposant des cartes de rési-dence indispensables pour obtenir des bons deravitaillement. Par ailleurs, les bombardementsmassifs perpétrés par l’armée américaine surHanoi de 1966 à 1972 ont poussé de nombreuxcitadins à se réfugier à la campagne. En 1971, letaux d’urbanisation du nord ne dépassait pas10 %. Dans le sud, c’est le mouvement inversequi s’est produit. Pendant la guerre, les paysansont fui les campagnes pour rejoindre Saigon – en1975, la population urbaine représentait 40 % dela population du Sud-Vietnam (Le Van Thanh,2000, pp. 222-223). Depuis, le taux d’urbanisation

a baissé – 26 % en 1979 (Le Thi Huong, 2000, p.268) –, en raison du départ des réfugiés vers leurvillage d’origine, vers les nouvelles zones éco-nomiques et à l’étranger (boat people).

Le pouvoir révolutionnaire avait mis en œuvreune stratégie volontariste de « disséminationurbaine » : développement d’une centaine devilles moyennes et petites en interaction avec l’in-dustrie et l’agriculture collectivisée. Depuis 1988,parallèlement à la décollectivisation rurale, cettepolitique a été remise en cause, voire abandon-née (Nguyen Duc Nhuan, 1997).

Depuis les années 80, exploitant la forte crois-sance agricole créée par la nouvelle politiqueéconomique, les grandes villes vietnamiennes seredéploient pour attirer les investissements tantétrangers que nationaux. Désormais, elles sontconsidérées comme de puissantes locomotivesde l'industrialisation et de la modernisationaccélérée du pays entier (voir encadré 6).

Si la croissance urbaine est désormais perçuecomme un élément moteur du développementéconomique, le processus de métropolisationrisque de renforcer les inégalités territoriales– entre plaine et montagne, centre et périphérie,ville et campagne –, que le pouvoir communisteavait justement tenté d’enrayer dans les années70. La concentration des flux de capitauxétrangers et publics dans les grandes villes acommencé à distendre le maillage territorial,

Depuis 1990, la politique d’aménagement du territoire, dite « politiquedes corridors de développement », vise à renforcer le pouvoir des troismétropoles raccordées au grand espace économique régional duPacifique grâce à leur accès maritime : au nord, le triangle Hanoi/Quang Ninh/Haiphong ; au sud, le grand losange Ho Chi Minh-ville/Bien Hoa/Donghai/Vungtau ; au centre, l’axe Quynhon/Danang/Hué. Ilest prévu que la superficie des terrains urbanisés soit multipliée par 7,5d’ici 2020. Le degré d’urbanisation du delta du fleuve Rouge devraitpasser de 21 % en 1998 à 40 % en 2020 et celui du delta du Mékongde 17 à 32 %. Le schéma directeur de 1998 prévoit un large dévelop-pement de la nouvelle zone urbaine de Hanoi qui accueillerait 4,5 à5 millions d’habitants à l’horizon 2020 – en 1999, on compte 1,5 mil-lion d’urbains parmi les 2,67 millions d’habitants de la province(Regards & VTGEO, 2002, p. 257).

La stratégie retenue est imposée par la vétusté des infrastructures quiont souffert d’une trentaine d’années de guerre ininterrompue et qui,dans la moitié septentrionale du pays, doivent être entièrement recons-truites. « Cette stratégie comporte cependant bien des risques decréation d’isolats déconnectés d’une organisation régionale, d’inéga-lités sociales et économiques, à l’intérieur de chaque région commeavec les régions avoisinantes, de destruction du patrimoine écologiqueet architectural en raison d’une trop forte concentration d’activités dansdes périmètres réduits » (Le Bris E. et Taillard C., 1998). Le montant des investissements étrangers dans les trois régions métro-politaines, qui en accaparent 85 %, est élevé entre 1988-1998 et à l'ori-gine d'une croissance économique annuelle de l'ordre de 8 à 9 % pourla métropole du nord et de 12 % pour celle du sud, entraînant une crois-sance annuelle de 7 % du PNB pour l'ensemble du pays.

Encadré 6. La politique des corridors de développement

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laissant les villes moyennes à l’écart dudéveloppement économique (Ambassade deFrance au Vietnam, 2002). En 2020, selon lesestimations, les régions métropolitaines des deuxcapitales concentreront 37 % de la populationurbaine, contre 31 % en 1998.

Ces grandes villes qui avaient été construites àl’abri des inondations sur les terres les plusélevées, devront s’étendre sur leurs margessurbaissées, dont le remblaiement, coûteux,reporte les risques d’inondations dans les partiesles plus basses. AHo Chi Minh-ville, les schémasdirecteurs de 1993 et 1998 planifient d’étendre laville sur la rive gauche de la rivière Saigon, dansun site proche du centre, mais situé dans unméandre de la rivière sillonné d’arroyos. Ainsi, cesfuturs quartiers urbains se trouveront dans des

zones partiellement inondables pendant lesmarées hautes, qui peuvent atteindre 1,5 mètre.Le remblaiement des parcelles destinées à laconstruction, effectué de façon anarchique,risque d’accentuer le niveau d’eau en cas d’inon-dation autour des habitations localisées dans lescontrebas (projet Asia Urbs VNM 003).

En réponse à cette politique, certains spécia-listes estiment qu’il serait préférable de favoriserle développement d’un réseau d’une vingtaine devilles moyennes, bien réparties sur le territoire.Ces villes moyennes, chefs-lieux de provinces,dynamiseraient mieux le développement agricoleet la modernisation des campagnes environ-nantes. En effet, elles offriraient des marchéspour les produits alimentaires, des lieux de trans-formation pour les produits agricoles, des centres

Certains auteurs s’interrogent sur le poids et le rôle donné aux villesmoyennes dans le développement régional, alors que le pays est entrédans une phase de transition socio-économique sans que les struc-tures administratives et politiques n’aient, pour le moment, étébouleversées (Weissberg D., 1999, p. 67). En effet, l’héritage delongues années de planification centralisée a réduit le rôle des villesdans la structuration de l’espace. Et la politique d’aménagement du ter-ritoire menée risque de ne pas donner aux villes les moyens d’agircomme des pôles de développement intermédiaires et de limiter lesmigrations vers les trois « corridors ».Le Vietnam possède un réseau d’une quinzaine de villes de plus de100 000 habitants qui sont des pôles de développement en puissance.Cependant, le système hiérarchique urbain privilégie les rapports avecle pouvoir au détriment des relations avec l’environnement immédiat,ce qui empêche la constitution de réseaux urbains fondés sur descomplémentarités de fonctions entre villes voisines (Taillard C., 1995,p. 202). En effet, les villes sont classées selon une hiérarchie de statutsse traduisant par l’étendue des pouvoirs délégués par l’Etat et la naturedes organismes de tutelle (ministère de l’intérieur, province ou district).Cela induit une dépendance des provinces à l’égard du gouvernementcentral, à l’origine de tractations, d'arbitrages et de redéfinitions desquotas de redistribution des ressources fiscales, qui, dans un premiertemps, sont gérées à l’échelon national. Les prérogatives des provincessont importantes, mais insuffisantes pour contrôler et impulser undéveloppement économique à la hauteur de leurs ambitions. Il n’endemeure pas moins que les districts et encore plus les communesoccupent une position d’exécutant. Depuis 1995, les districts sont

devenus de simples unités de collecte des impôts et de « dépense »du gouvernement provincial, et ne disposent d’aucun pouvoir pourgérer leur budget. En revanche, bien qu’elles ne maîtrisent pas lesrevenus fiscaux, les communes ont obtenu un regain de pouvoirpolitique et social. L'Etat permet que les traditions locales soientréactivées et donne davantage de pouvoir aux autorités locales (PorterD. J., 1995).Pour créer un réseau urbain hiérarchisé, dont chaque échelon seraitdoté de prérogatives complémentaires, il faudrait que les villes sortentde la tutelle provinciale et que soit contrecarré le processus de métro-polisation impulsé par Hanoi et Ho Chi Minh-ville, qui a des incidencesmigratoires fortes (Durand F.B. & Le Van Anh, 1996). En leur donnantdavantage d’autonomie financière et administrative, en plus de leursprérogatives en matière d’aménagement urbain et de gestion, ces villespourront jouer un rôle moteur dans le développement agricole et indus-triel de leur hinterland et absorber une partie de la main-d’œuvresous-employée des zones rurales. Le Doi moi pourrait ainsi faireévoluer la fonction des villes, jusqu’ici principalement administrative,vers le développement économique (Durand F.B. et Le Van Anh, 1996). Al’heure de la libéralisation économique et de l’ouverture des marchés,il est probable que les villes petites et moyennes entreront en concur-rence pour capter les investissements nationaux et étrangers et sedifférencieront. De plus, si la métropolisation autour de la ville de Hanoine s’effectue pas au détriment des villes secondaires, l’impact decelles-ci sur le développement des zones rurales ira croissant, notam-ment en raison de l’augmentation des marchés de consommationurbains et des migrations.

Encadré 7. Quel rôle pour les villes moyennes ?

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Les évolutions démographiques et socio-économiques

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5.2. Emigration des campagnes trop peuplées vers les fronts pionniers En 1975, ont été mises en place les NZE

(nouvelles zones économiques) dans lesprovinces du sud, principalement les provincesdes Hauts plateaux du Centre, les zones de plan-tation d’hévéas du sud-est et le delta du Mékong(Gendreau F., Do Tien Dung et Pham Do NhatTan, 2000, p. 198).

L’objectif était de réduire les disparités de densitéde population en transférant la main-d’œuvre excé-dentaire des zones surpeuplées du delta du fleuveRouge vers les zones peu peuplées et dotées depotentialités agricoles et industrielles. On estimaitpar exemple que 2 à 2,5 millions d’hectaressupplémentaires pouvaient être mis en valeur dansle delta du Mékong. Des migrations massives versle sud et les NZE ont été organisées.

Entre 1976 à 2000, environ 5 millions de per-sonnes ont été déplacées vers les nouvelleszones économiques. Entre 1976 et 1997, selon ladirection de la migration et de l’édification desNZE, 726 000 personnes auraient quitté le deltadu fleuve Rouge, qui en compte 14 millions à lafin des années 1990. Les provinces de Thai Binh,Ha Nam et Ninh Binh auraient été le plustouchées (Gendreau F., Do Tien Dung et PhamDo Nhat Tan, 2000).

Ces migrations étaient mal organisées, lesmoyens étaient réduits et les infrastructures d’ac-cueil peu développées. Ainsi, une part très impor-tante des migrants (entre 20 et 50 % selon lesestimations) a quitté les NZE pour se rendre dansles villes du sud ou revenir clandestinement dansleur localité d’origine.

de diffusion des innovations techniques agricoles,de production et d’échange des intrants pourl’agriculture. Elles absorberaient la main-d’œuvrerurale excédentaire dans les industries agro-alimentaires, en utilisant des technologiesmodernes appropriées, intensives en main-d’œuvre, moins énergétivores et polluantes queles petites industries rurales actuelles. De plus,les transferts de revenus ruraux vers ces villes etdes revenus urbains vers les campagnes sontplus faciles. Les villes moyennes sont donc unmilieu favorable à la constitution d’une couched’entrepreneurs dynamiques (Nguyen DucNhuan, 1992) (voir encadré 7).

5. Les tentatives de rééquilibragedémographique

5.1. De fortes disparités démographiquesLe delta du Mékong et celui du fleuve Rouge

restent les deux régions les plus peupléesdu pays, avec respectivement 16,1 millions et14,8 millions d’habitants en 1999. La pressiondémographique dans ces zones est d’ailleurs unepréoccupation majeure des politiques actuelles.

Toutefois, l'augmentation annuelle de leurpopulation n'est pas très forte : 1,1 % pour lepremier et 1,4 % pour le second. En revanche,ces taux atteignent 2,6 % dans le Sud-Est et4,9 % dans les Hauts plateaux du Centre entreles deux derniers recensements (1989 et 1999).Ces taux s’expliquent davantage par la féconditéélevée des ethnies minoritaires qui les peuplentqu'à une immigration massive (voir encadré 8).

L’analyse de la situation démographique permet de distinguer plusieurstypes de provinces :● les provinces où la fécondité est élevée et où l'immigration est forte.

L'accroissement démographique y est le plus fort. C'est le cas desHauts plateaux du Centre. En 1997, l’indice synthétique de fécon-dité – 4,3 enfants par femme – est le plus élevé du pays ;

● les provinces où le niveau de fécondité est faible et l'immigration

forte. L'accroissement démographique y est moins soutenu que ci-dessus. C'est le cas des plaines du Sud-Est. L’indice synthétique defécondité y est le plus faible du Vietnam : 1,9 enfant par femme enmoyenne ;

● les provinces où la fécondité est élevée et l'immigration faible. C'estle cas des montagnes du nord. L’indice synthétique de fécondités’élève à 3,1 enfants par femme en 1997.

Encadré 8. La diversité démographique des provinces

Source : d’après une note rédigée par Scornet C., maître de conférence à l’université d’Aix-en-Provence, dans le cadre d’un appel d’offreCORUS intitulé « Développement du réseau des villes intermédiaires et émergence de pôles économiques ruraux dans l’espace très peuplé dudelta du fleuve Rouge dans le contexte vietnamien du Renouveau (Doi moi), de la métropolisation et de l’intégration régionale ».

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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De plus, ces déplacements ont contribué à ladéforestation et aggravent les risques dedéséquilibre écologique des zones d’immigration– plus d’un million d’hectares y ont été mis enculture (Gubry P., 2000, p. 445).

5.3. Industrialisation, diversification et urbanisation en milieu rural Depuis le Doi moi, la mobilité des personnes, la

libéralisation du commerce et la relance de l’arti-sanat local privé ont réactivé les rapports entre lesvilles et les campagnes. En témoigne le montantélevé des revenus monétaires acquis en dehorsdes communes de résidence, significatif de l’élar-gissement de la sphère d’action des foyers rurauxvivant dans une région très peuplée. Les rapportsville-campagne se sont ainsi intensifiés.

Si les entreprises rurales sont financées auxdeux tiers par des investissements d’origineurbaine, elles vendent leurs produits localementen raison du manque de moyens de transport. Eneffet, les bassins de consommation sont localiséset fragmentés. Les marchés urbains ne pourrontpas se développer si les localités environnantesne sont pas connectées par des réseaux routiersaccessibles en saison des pluies (Porter D. J.,1995). L’aptitude à accaparer des rentes à l’ex-térieur des villages n’est donc pas à la portée detous. Dans le contexte de libéralisationéconomique et d’émergence de marchés deconsommation de produits frais et diversifiés, laproximité des villes et des axes de communica-tion peut intensifier la diversification économiqueet agricole des exploitations villageoises.

L’essor du commerce privé a valorisé la rentede situation à proximité des routes les plusfréquentées. Les habitants du centre du villagesont allés habiter près des axes routiers,accélérant le processus d’urbanisation linéairele long des routes menant aux grandes agglo-mérations.

On peut faire l’hypothèse que le réseau assezdense des bourgades va se renforcer, car cesentités spatiales sont le lieu le plus actif des trans-formations socio-économiques en œuvre du faitde l’ouverture des marchés (stratification sociale,division du travail, développement des secteurstertiaire et secondaire...). C’est dans ces bour-gades que la campagne environnante s’appro-

visionne et que les paysans viennent écoulerleurs produits.

La proximité des réseaux de transport, desmarchés d’emploi et de consommation n’est pasle seul déterminant de l’importance deséchanges. Selon Gironde C. (2001, p. 372),l’analyse des réseaux peut être une grille delecture pour comprendre la complexité de l’évo-lution des systèmes d’activité et de leur distribu-tion spatiale depuis le Renouveau. Desdébouchés pour les cultures commerciales à laprolétarisation en ville, les spécialités des uns etles métiers des autres sont liés à leurs réseaux outraduisent le cas échéant l’absence de réseaux.Cet auteur montre combien l’appartenance à unréseau de migration vers les hautes terres dunord du Vietnam peut favoriser le commercetransfrontalier avec la Chine, ou comment celle àdes réseaux politiques ou professionnels pour lesanciens membres des coopératives peutfavoriser la diversification de l’agriculture et del’économie et permettre d’accéder à desdébouchés. « L’activité des réseaux s’est intensi-fiée avec le démantèlement des structurescoopératives et étatiques, dont les anciens clientstraitent directement avec les anciens villages »(Gironde C., 2001, p. 371).

Dans le delta du fleuve Rouge, les activitésextra-agricoles les plus fréquentes sont l’arti-sanat, la transformation alimentaire et lecommerce, notamment avec la Chine ou lesprovinces frontalières. Les métiers artisanauxtraditionnels, naguère réprimés, renaissent et sepropagent suivant les réseaux de localités etd’échanges matrimoniaux dans les quelque cinqcents villages artisanaux que compte le delta dufleuve Rouge. Les « villages de métier » permet-tent une meilleure utilisation de la main-d’œuvrelocale, parfois experte en la matière depuis desgénérations. Mais beaucoup d’artisans doiventlimiter leur production en raison de l’étroitesse dumarché (Dao The Tuan, Molle F., 2000).

En l’absence de pouvoir politique et écono-mique, les collectivités locales rencontrent denombreux obstacles pour développer leur indus-trie, ou tout au moins leur artisanat. Ainsi, lescadres locaux, agents de l’Etat central, cherchentdavantage à être reconnus par leur hiérarchiequ’à promouvoir le développement local. Seul

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Les évolutions démographiques et socio-économiques

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l’octroi de prérogatives nouvelles aux échelonsadministratifs de base, dans le cadre d’unedécentralisation, pourrait être à même d’inversercette tendance. Une réforme fiscale, donnant auxcommunes et aux districts le pouvoir de gérer lamajeure partie des taxes qu’ils collectent,constituerait une incitation directe au développe-ment économique local, et donc à l’élargissementde l’assiette sur laquelle reposent ces taxes(Bergeret P., 2002).

Conclusion : moins de pauvreté, plus d’inégalités

La politique du Doi moi a permis d’améliorerconsidérablement la situation socio-économiquedes Vietnamiens. Les revenus annuels ontdoublé par rapport au milieu des années 80, pours’établir entre 265 et 400 dollars par habitantselon les sources (GSO, 2002 ; CNSSH, op. cit.).La pauvreté a diminué 1, le taux de pauvretépassant de 75 % au milieu des années 80 à 58 %en 1993 et 37 % en 1998 (CNSSH, op. cit.). Letaux de malnutrition des enfants de moins de5 ans (calculé à partir du rapport taille/âge) abaissé de 56,5 % en 1990 à 36,5 % en 2000(NIN, 2003).

Ces améliorations ne doivent cependant pasmasquer la persistance de faiblesses.

Le Vietnam reste un pays très pauvre (114e

rang en termes de PIB/habitant sur 162 pays, et104e rang en termes d’IDH, en 1999, contre 150e

et 116e rang sur 173 pays, en 1992, CNSSH, op.cit., p 45).

Non seulement les inégalités subsistent notam-ment entre les zones rurales et urbaines, avec45 % de pauvres en milieu rural, contre 9 % enmilieu urbain en 1998 (GSO, 2000), mais elless’accroissent. Si, selon le rapport sur le déve-loppement humain au Vietnam (CNSSH, 2002),l’ensemble de la population a bénéficié des fruitsde la croissance, la répartition est restée inégale

et les inégalités augmentent : en 1994, le revenumoyen par habitant des 20 % les plus riches dela province la plus riche est 25 fois supérieur àcelui des 20 % les plus pauvres de la province laplus pauvre. En 1999, le rapport est de 1 à 50(CNSSH, op. cit.).

Enfin, les améliorations récentes semblentconnaître un ralentissement : après avoir diminuéentre 1991 et 1996, le chômage urbain a denouveau augmenté pour se situer à près de 7 %de la population active en 1999 (CNSSH, op. cit.,p. 35). De même, la croissance annuelle duniveau de vie s’est ralentie de 8,8 % entre 1996et 1999 à 6 % au premier semestre 2002.

La situation de certains foyers aurait récem-ment régressé. Par exemple, les habitants desHauts plateaux du Centre auraient vu leur pouvoird’achat baisser de 22 % entre 1999 et le premiersemestre 2002, suite à la chute des cours ducafé. De même, dans les provinces déshéritéesde Ninh Thuân et Binh Thuân, le pouvoir d’achatdes habitants aurait régressé de 7,2 % pendantla même période (Courrier du Vietnam, 14/01/03).Ces évolutions peuvent être conjoncturelles, maisinvitent à la prudence concernant la stabilité deschangements globaux enregistrés.

L’amélioration des conditions de productiondans les campagnes est un enjeu majeur pourassurer la pérennité des exploitations agricoles,notamment dans les zones de forte pressiondémographique, et pour réduire les inégalitésentre villes et campagnes. Cela passe par ladiversification des activités agricoles, l'intensifi-cation raisonnée des systèmes de culture et l'ex-tension des superficies cultivées. La croissanceactuelle du marché intérieur est un moteur poten-tiel qui suppose d’intensifier l’intégration aumarché en s’adaptant aux évolutions de lademande en termes de quantité et de qualité…Ce point sera développé dans la suite dudocument.

1 On qualifie de « pauvres » les foyers situés en dessous du seuil de pauvreté. Ce dernier est défini comme le niveau minimalde dépenses de consommation (alimentaire et non alimentaire) permettant de couvrir à la fois les dépenses pour acquérir uneration alimentaire couvrant les besoins minimaux caloriques et les dépenses non alimentaires de base (santé, éducation…).Ce seuil de pauvreté est évalué à un peu moins de 1 700 000 dongs par personne et par an en 1998, soit environ 110 dollars(GSO, 2000).

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

36

L’évolution de la consommation alimentaireMuriel Figuié et Nicolas Bricas (CIRAD)

Au cours des dix dernières années, le marché alimentaire vietnamien a vu sa valeurdoubler. Cette croissance est due à trois facteurs : l’augmentation de la population ;l’augmentation des quantités consommées par personne ; la baisse de l’auto-consommation des ménages, surtout des ménages ruraux. Le marché alimentairevietnamien, évalué à 7,2 milliards de dollars en 2002, représente environ deux fois lavaleur des exportations agricoles.La consommation nationale pour l’ensemble des produits alimentaires a crû, àl’exception de celle des racines et tubercules (manioc, patate douce…). Si laconsommation nationale de riz augmente, elle diminue à l’échelle individuelle. Desdifférences apparaissent selon les régions ou les zones, urbaine ou rurale. Le niveaudu revenu induit également des différences. Les plus riches ne mangent passeulement davantage, ils mangent différemment. Au fur et à mesure que leurs revenusaugmentent, les ménages consomment plus de riz au détriment des tubercules ; puis,ils diminuent leur consommation de riz au profit d’autres céréales telles que le blé.Cette augmentation de la consommation est en partie satisfaite en recourant auximportations (cas du blé, du lait et, dans une moindre mesure, des huiles et graisses).Les transformations du secteur agricole et agroalimentaire vietnamien pour répondreà cette demande sont perçues avec suspicion par les consommateurs, ébranlés parles révélations régulières dans la presse d’intoxications alimentaires.Les évolutions de la consommation ont permis de faire reculer la malnutrition.Toutefois, des maladies dites « d’excès » apparaissent (obésité, maladiescardiovasculaires…) et les consommateurs urbains associent certains produits, telsque les graisses animales ou la viande, à une image diététique négative. Enfin, des comportements alimentaires nouveaux apparaissent en milieu urbain :développement des supermarchés et, surtout, de la restauration hors du domicile, quireprésente un enjeu important tant d’un point de vue économique que nutritionnel.

1. Des dépenses alimentaires en augmentation rapide

1.1. Une croissance liée à des facteurs multiples

Le marché alimentaire vietnamien est en fortecroissance : en 1992-93, il représentait 51 500milliards de dongs (3,4 milliards de dollars). Dix

ans plus tard, on peut estimer que ce marché aplus que doublé, pour atteindre près de 110 000milliards de dongs (7,2 milliards de dollars)(tableau 4). Ce marché n’est que faiblementcouvert par les importations : environ 6 % envaleur, soit 0,44 milliard de dollars en 2001(FAOSTAT, 20011).

Cette croissance est liée à celle de la popula-tion et des dépenses individuelles. En effet, les

1 FAOSTAT, http://apps.fao.org, Agriculture and Food, Vietnam, Food excluding fish, importation value at base year price:442 133 millions de dollars.

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L’évolution de la consommation alimentaire

37

quantités d’aliments consommées augmententtant en milieu rural qu’en milieu urbain ; de plus,les ruraux recourent de façon croissante aumarché pour leur approvisionnement.

Notons l’importance du marché urbain : en1998, le marché alimentaire en valeur se partageà 60 % pour les ruraux et 40 % pour les urbains,alors que les urbains ne comptent que pour 23 %de la population. Cette situation reflète la persis-tance de la pauvreté dans les campagnes, bienqu’elle ait fortement reculé. Dans les villes, en1998, 2 % de la population se trouvaient sous leseuil de pauvreté alimentaire (dépenses alimen-taires annuelles inférieures à la somme néces-saire pour acquérir une ration journalière mini-male de 2 100 kcal par personne, soit un peumoins de 1,3 million de dongs – 86 dollars parpersonne et par an). Dans les zones rurales, prèsde 18 % de la population se situent en dessousde ce seuil (contre 7 et 27 % en 1993, HaughtonD., Haughton J. et al., 2001, d’après les donnéesGSO).

1.2. Le développement de la restauration de rueUne attention particulière doit être apportée à la

restauration hors du domicile, souvent négligéedans les bilans économiques ou nutritionnels.

Avant la politique de Doi moi, la population aconnu une période de rationnement alimentairedurant laquelle la restauration de rue était inexis-tante. Les données sur ce type de consommationen 1992-93 (date de la première grande enquêtesur le niveau de vie des ménages, Vietnam livingstandard survey I), ne sont pas disponibles, maison peut supposer que cette consommation étaitencore faible à l'époque. Depuis, elle s’est forte-ment développée, notamment en milieu urbain,augmentant ainsi la part du marché urbain dansle marché national alimentaire. En 1997-98, larestauration hors du domicile représente 20 %des dépenses alimentaires des urbains et seule-ment 5 % de celles des ruraux (VLSS II, 1997-98). En 1998, les dépenses annuelles deconsommation alimentaire des ruraux et des

Source : d’après les données des enquêtes VLSS 92/93 et 97/98 réalisées par le GSO, (GSO, 1994 ; GSO, 2000) et nos propres calculs et estimations, prix constants 1998.

Tableau 4. Marché alimentaire rural et urbain, non comprise la consommation hors du domicile2

Population (en millions d'habitants)Population urbaine (en millions d'habitants)Population rurale (en millions d'habitants)Part de la population urbaine (%)Valeur de la consommation alimentaire des urbains (1 000 dongs/pers/an)Valeur de la consommation alimentaire des ruraux (1 000 dongs/pers/an)Part des achats dans la consommation alimentaire urbaine (%)Part des achats dans la consommation alimentaire rurale (%)Dépenses alimentaires des urbains (1 000 dongs/pers/an)Dépenses alimentaires des ruraux (1 000 dongs/pers/an)% des dépenses alimentaires dans les dépenses de consommation des urbains% des dépenses alimentaires dans les dépenses de consommation des rurauxMarché alimentaire urbain (en milliards de dongs)Marché alimentaire rural (en milliards de dongs)Marché alimentaire (en milliards de dongs)Marché alimentaire (en milliards de dollars)Marché urbain/marché total (%)

1992/1993

70,2814,0656,22

201 4551 00695,256,8

1 38457148,360,3

19 45832 11451 572

3,4037,7

1997/1998

76,1117,5158,60

231 8301 23695,363,6

1 74378639,152,6

30 51346 08976 602

5,0039,8

2002

79,7019,9059,80

252 302

1 519

95,4

71,5

2 196

1 086

29,9

44,9

43 703

64 948

108 650

7,20

40,2

2 Les données de population pour 2002 reposent sur les données fournies par le GSO. Pour le reste, en italique, il s’agitd’estimations. On a supposé des évolutions identiques, entre 1997 et 2002, à celles constatées entre 1992 et 1997.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

38

urbains s’élèvent respectivement à 0,848 et à2,171 millions de dongs par personne, y comprisla restauration hors du domicile.

En 1998, la restauration hors du domicilereprésente donc un marché de près de 11 000milliards de dongs, à 67 % en milieu urbain, surun marché alimentaire total de 87 600 milliards dedongs (0,7 et 5,7 milliards de dollars).

1.3. Des différences régionalesmarquéesLes différences entre les régions sont impor-

tantes (tableau 5) : valeur de la consommationalimentaire des ménages, part des achats dansla consommation alimentaire, part de marché desdifférentes régions. Ainsi par exemple, la régionNord-Est du Sud, qui compte 13 % de la popula-tion, représente à elle seule 26 % du marché.

2. Une évolution quantitative variableselon les produits

2.1. A l’échelle nationaleLa croissance du marché alimentaire corres-

pond à une augmentation en volume de laconsommation de l’ensemble des principauxproduits à l’exception des tubercules, dont laconsommation a chuté de 30 % entre 1991 et2000 (bilans alimentaires de la FAO, figure 7).

Cette augmentation a été particulièrement fortepour les produits suivants : le sucre et autres

produits sucrés et le lait, dont la consommationété multipliée respectivement par 2,6 et 2,8 entre1991-2000 ; le blé, dont la consommation adoublé pendant la même période ; la viande(x 1,8), les légumes et les huiles et graisses(x 1,7). Premier produit de consommation alimen-taire en volume, suivi par les légumes et les fruits,le riz a connu également une augmentation(x 1,3) suite à l'augmentation de la population.

Par ailleurs, indépendamment des régions oudes revenus des ménages, la consommation desménages s’est diversifiée, en particulier pour lesfruits et légumes, dont une plus grande diversitéd’espèces est consommée (IFPRI, 2002).

2.2. A l’échelle individuelleLes enquêtes de consommation (enquêtes de

l’Institut national de nutrition, NIN, 1991 et 2002 ;enquêtes Vietnam living standard de l'Officegénéral des statistiques, GSO, 1994 et 2000)permettent d’apprécier avec précision l’évolutionde la consommation par habitant.

La comparaison des données selon leur sourcen’est pas toujours aisée du fait des différentesméthodologies adoptées ou des catégories d’ali-ments utilisées. Elles révèlent cependant destendances très nettes (tableau 6).

Premier constat, l’augmentation des volumestotaux consommés correspond à celle de laconsommation par habitant des différentsproduits cités, à l’exception du riz (diminution que

Source : d’après les données de l’enquête VLSS 97-98, GSO, Vietnam.

Tableau 5. Le marché alimentaire dans les régions du Vietnam, consommation hors du domicile comprise, 1997-1998

Pop en millions d'habitants

% de la population totale

Valeur conso alim (1 000 dongs/hab/an)

Taux d'autoconsommation (%)

Dépenses alim (1 000 dongs/hab/an)

% population urbaine

Valeur du marché (milliards dongs)

% du marché national

13,618

1 23043

69816

9 50711

14,920

1 57829

1 12219

16 75019

10,514

1 21736

78012

8 2139

8,211

1 42022

1 10126

9 00010

2,84

1 20227

87926

2 4553

9,713

2 5159

2 28350

22 15426

16,422

1 47824

1 12817

18 45321

76,1

100

1 519

25

1 143

23

86 532

100

Région

Montagnes du Nord

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Delta du Mékong

Vietnam

Delta du fleuve Rouge

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L’évolution de la consommation alimentaire

39

ne font pas apparaître les bilans alimentaires dela FAO, mais sur laquelle le NIN et le GSO, plusprécis dans leurs estimations, concordent). Cesenquêtes de consommation confirment égale-ment une diminution importante de la consom-mation de tubercules, de 31 à 15 kg par personneet par an, entre 1987 et 2000 (NIN, 1991 et 2002).Le rapprochement de ces données de celles desbilans alimentaires réalisés par la FAO indiquequ’il s’agit probablement du manioc et de la patatedouce. La diminution de la consommation de riz,de 165 kg par personne et par an en 1987 à145 kg en 2000 (NIN, 1991 et 2002) est concomi-tante à une augmentation de la consommationdes autres céréales (le blé probablement, selonles données de la FAO). En outre, la consomma-tion individuelle de produits aquatiques stagnedepuis quelques années (entre 13,5 et 19 kg parpersonne et par an, selon les sources) et estrattrapée par la consommation de viande.

Les chiffres relatifs à la consommation de fruitsdonnent des résultats extrêmement différentsselon les sources, rendant toute interprétationhasardeuse.

3. Des différences dans la consommationdes ménages

Ces chiffres moyens de consommationmasquent des différences significatives entre lesménages, que révèle un examen plus détaillé desdonnées selon les zones, urbaine ou rurale, selonles régions ou selon le revenu des ménages.

0

1

2

3

4

5

6

7

fruits

autres céréales

sucre et prod sucrés

lait

huiles et graisses

légumes

produits de la mer

viandes

racines et tubercules

1986 1990 1995 2000

Sources : Base de données FAO, Bilan alimentaire du Vietnam.

Figure 7. Evolution des quantités d'aliments consommés,1987-2001 (millions de tonnes par an)

Tableau 6. Evolution des quantités d’aliments consommées par habitant, selon les sources, 1987-2000 (kg/pers/an)(NIN, 1991 et 2002 ; GSO, 1994 et 2000 ; FAOSTAT)

Source

RizAutres amylacées que le rizAutres céréalesTOUS TUBERCULES

tuberculeslégumes tubercules

Légumes feuillesLégumes et haricots secsHaricots et autres légumineusesFruitsViandesProduits de la merHuiles et graissesŒUFS ET LAIT

lait œufs

Œufs (piece)TofuSucre et produits sucrésSucre

NIN

1987

164,83

2,2730,7113,7216,9845,55

1,021,498,91

18,231,101,07

2,48

NIN

2000

145,01

5,8414,783,25

11,5353,66

2,1922,7618,6319,202,473,75

4,88

VLSS

1992-93

153,2614,5

28,63

22,559,61

13,411,36

0,41

14,483,022,660,29

VLSS

1997-98

150,369,72

37,44

17,7614,0413,563,96

0,6

28,24,84,22,9

FAO

1987

150,5

9,473,035,737,348,4

2,144,616,013,01,62,71,31,4

7,0

FAO

1993

161,3

13,460,528,432,150,8

2,443,417,312,92,94,63,21,4

6,3

FAO

1998

170,4

13,612,51,8

10,763,9

2,846,819,514,45,18,46,71,7

10,6

FAO

2000

174,3

16,411,41,89,6

71,2

3,046,321,918,55,0

11,29,12,1

11,0

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

40

3.1. Entre urbains et rurauxLe consommateur urbain se distingue du

consommateur rural par la part importante desproduits animaux dans la valeur de sa consom-mation alimentaire et une moindre importance duriz et autres amylacés (tableau 7).

Il s’agit ici de la valeur de la consommation,c’est-à-dire ce qui est acheté et ce qui est auto-consommé par le ménage. Connaître le détail del’autoconsommation permettrait d’évaluer lavaleur du marché urbain et du marché rural pourchacun de ces produits. Par ailleurs, il est égale-ment important d’évaluer l’incidence des change-ments récents des systèmes de production sur lasécurité alimentaire des ménages agricoles. Desétudes menées à Mong Phu (Nguyen DucTruyen, 2003, voir encadré 9) montrent que lesexploitants demeurent attachés à produire leurs

propres stocks d’aliments de base nécessaires àleur survie alimentaire (riz, légumes fermentés).Les revenus issus du développement de l’éle-vage permettent d’acquérir des produits nouvelle-ment, ou davantage, consommés : sucre,biscuits, vermicelles instantanés, glutamate, laitcondensé ou en poudre, fruits...

3.2. Selon le revenuAvec le lieu d’habitation (rural ou urbain), le

niveau de revenu est un facteur majeur quiexplique les différences de consommation entreles ménages.

Un calcul simple de la consommation dedifférents produits par rapport à la dépense totaledes ménages donne une approximation de l’élas-ticité de la consommation par rapport au revenu3

(8 et 9).Il apparaît ainsi que la consommation en quan-

tité des différents produits augmente avec lerevenu des ménages, à l’exception du groupe« céréales autres que le riz et amylacés ».

Plus précisément, la figure 8 montre, jusqu’auquatrième groupe quintile de dépenses totales(soit 80 % de la population), une augmentationtrès forte de la consommation de légumes et,dans une moindre mesure, de celle des fruits,produits de la mer et viande (produits que l’onpeut qualifier de « supérieurs »). Enfin tofu,produits sucrés, graisses et huiles sont égale-ment sensibles au revenu des ménages, maisdans une proportion moindre.

3 Les enquêtes VLSS partagent les ménages en cinq groupes de taille égale (ou quintile, soit 20 % de l’échantillon)correspondant à cinq tranches de dépenses totales. Ainsi, le premier quintile correspond aux 20 % des ménages les plusmodestes avec une dépense annuelle moyenne de 1,148 millions de dongs par personne et par an. Le cinquième quintilecorrespond aux 20 % des ménages les plus aisés avec une dépense annuelle moyenne de 6,325 millions de dongs parpersonne et par an. C’est la consommation moyenne des membres des ménages des différents quintiles que nous avonsutilisée ici.

Source : d’après les données VLSS 97-98, GSO, non comprise la restauration hors du domicile.

Tableau 7. Répartition de la valeur de la consommation alimentaire par groupe de produits, 1998

Valeur de la consommation %Riz et autres amylacésProduits animauxGraisses et huilesFruits et légumesAutresTOTAL

Urbain

27,141,42,6

11,717,2

100,0

Rural

41,631,62,78,3

15,8100,0

La part de l’autoconsommation a diminué en milieu rural entre 1993 et1998 (de 43 à 36 %, tableau 5). Cependant, l’autoconsommation envaleur est restée relativement stable. Une étude menée à Mong Phu(à 40 km de Hanoi) par Nguyen Duc Truyen (2003) montre que les pro-duits autoconsommés ont peu changé : le riz, les légumes, et en par-ticulier la moutarde fermentée, constituent les aliments de base, quicontinuent d’être produits et consommés dans les exploitations

étudiées et qui garantissent la sécurité alimentaire. L’augmentation dela consommation d’œufs se fonde sur l’autoconsommation. Enrevanche, le porc, dont la production et la consommation croissent, esttoujours acheté, car l’exploitation ne peut pas conserver la viande d’unporc abattu. Enfin, si la consommation de certains produits diminue,leur production ne baisse pas nécessairement, comme dans le cas destubercules davantage destinés aux animaux.

Encadré 9. L’autoconsommation en milieu rural

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L’évolution de la consommation alimentaire

41

Les différences de consommation entre lequatrième et le cinquième groupe de dépensesrévèlent un ralentissement de la croissance de laconsommation pour la majorité des produits avecune nette « saturation » de la consommation desproduits de la mer.

Le riz, les tubercules et autres céréalesconstituent des cas à part. La consommation deriz (figure 9) augmente dans les premiers quintilesde dépenses totales puis chute. Dans un mouve-ment inverse, la quantité consommée de racines,tubercules et autres céréales diminue, puisremonte progressivement. Le recoupement avecd’autres sources de données (quantitatives etqualitatives : FAO et Krowolski N., 1993) permetde faire l’hypothèse d’une diminution de laconsommation de racines et tubercules, toutd’abord au profit du riz, puis d’une diminution dela consommation de riz au profit d’autres céréalestelles que le blé.

3.3. Selon la régionLes différences de structure de consommation

entre les régions est également importante(tableau 8), en particulier concernant la consom-mation de riz et autres amylacés et la restaurationhors du domicile. Ces différences reflètent pro-bablement les différences de niveau de vie et detaux d’urbanisation déjà évoquées plus haut.Toutefois, à ce niveau d’analyse, il n’est paspossible d’identifier des modèles de consomma-tion régionaux.

Source : d’après les données de l’enquête VLSS 1997-1998, GSO.

Figure 8. Consommation alimentaire et dépenses totales des ménages

Figure 9. Consommation de riz et dépenses totales des ménages

Source : d’après les données de l’enquête VLSS 97-98, GSO, Vietnam.

Tableau 8. Répartition de la valeur de la consommation alimentaire par groupe de produits dans les différentes régions, 1998

Riz et autres amylacés

Produits animaux

Graisses et huiles

Fruits et légumes

Autres

Hors domicile

TOTAL

Valeur de la conso. alim. 1 000 dongs/hab.

22,7 %30,9 %2,0 %9,1 %

14,3 %20,9 %

100,0 %2 515

31,9 %31,6 %2,3 %8,2 %

16,1 %10,0 %

100,0 %1 578

33,2 %33,4 %2,3 %9,1 %

12,6 %9,5 %

100,0 %1 478

33,1 %29,4 %2,6 %9,2 %

13,4 %12,4 %

100,0 %1 420

44,8 %29,0 %2,8 %6,4 %

15,0 %2,0 %

100,0 %1 230

39,3 %29,5 %2,7 %7,3 %

16,4 %4,9 %

100,0 %1 217

40,3 %31,1 %2,8 %7,3 %

13,2 %5,3 %

100,0 %1 202

Région

Nord-Est du Sud

Delta du Mékong

Centre Sud

Montagnes du Nord

Centre Nord

Hauts plateaux du Centre

Delta du fleuve Rouge

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

42

Les travaux de l’IFPRI (2002) montrent, àpropos des fruits et légumes, que les modèles deconsommation ont tendance à s’homogénéiserentre les régions et à s’affranchir des caractéris-tiques régionales de production.

4. Des importations encore faibles mais en augmentation

Les importations alimentaires (hors produitsaquatiques) s’élèvent à environ 0,4-0,5 milliard dedollars par an pour la période 1995-2000(FAOSTAT), chiffre à comparer au marché alimen-taire intérieur, qui atteint 5,7 milliards de dollars en1998 (consommation hors du domicile inclue).

La comparaison des volumes de consomma-tion et des quantités importées par tête (figures10) permet de classer les produits alimentaires endeux catégories : ceux qui ne dépendent pas, outrès faiblement, des importations – œufs, fruits,légumes, viandes et produits aquatiques, tuber-cules et riz – ; ceux qui dépendent très fortementdes importations – lait, blé, huiles végétales.

En ce qui concerne les fruits, il semble que lesimportations (pommes, raisins, citrons…) occu-pent une part croissante, bien qu’encoremodeste, de l’offre, en particulier celles en prove-nance de Chine, qui échappent en majeure partieaux statistiques officielles.

Pour le lait et les huiles, le gouvernement a misen place des programmes ambitieux pouraugmenter la production (Programme nationallaitier ; aides aux huileries, en 2003, pour endoubler la production d’ici 2010).

5. Un défi : la qualité des aliments

5.1. Des problèmes sanitairesOutre l’augmentation en quantité de la consom-

mation alimentaire, la demande en matièrede qualité évolue, notamment en raison de pro-blèmes sanitaires et nutritionnels nouveaux.

Si l’augmentation de la consommation alimen-taire a permis de réduire la malnutrition desenfants de moins de 5 ans de 56,5 % à 36 %pendant la décennie 90 (NIN, 2003), de nou-veaux problèmes se posent en matière de santépublique : le taux d’obésité augmente ; 9 % desfemmes, en milieu urbain, en souffrent à ce jour(Ha Huy Khoi, 2002).

De plus, la réponse à la croissance de lademande s’est faite par une intensification de laproduction agricole fondée sur une utilisationaccrue et souvent mal maîtrisée de produitsphytosanitaires (Ha Minh Trung, 1999) et par ledéveloppement d’une industrie agroalimentairefaisant grand usage d’adjuvants alimentaires(colorants, conservateurs…). Depuis quelquesannées, la presse évoque fréquemment des into-xications (par exemple, 351 ouvriers d’une entre-prise de Dong Nai ont été intoxiqués en mars2002 à leur cantine, Courrier du Vietnam, 17 mars2002) ou des pratiques dangereuses pour lesconsommateurs : utilisation de pesticides interdits(Monitor, Wofatox…), fréquence et quantitéspulvérisées supérieures à la norme, résidus depesticides en excès sur les légumes, les fruits etle thé principalement, résidus abondants d’anti-biotiques dans les produits animaux, utilisation deproduits de conservation toxiques (tel que leformol dans le pho, la soupe traditionnelle viet-namienne, l’urée et le borax dans la charcuterieet les poissons…), de colorants interdits (dans90 % des saucisses et de la sauce tomate),présence de métaux lourds dans les emballagesalimentaires…

La qualité bactériologique est égalementdécrite comme catastrophique, en particulier celledes produits transformés : nem chua, nem bao,tripes de porcs… (Nguyen Dinh Quang, 1999).

Le ministère de la santé fait ainsi état de 3 814victimes d’intoxications alimentaires en 2001,dont 63 sont décédées (chiffre très bas àcomparer à près de 700 décès annuels en Francepour une population d'environ les deux tiers decelle du Vietnam). Ce chiffre est très probable-ment largement sous-estimé ; d’autres sourcesfont état de 15 000 victimes.

Le gouvernement fait preuve d’une volontémarquée de traiter ce problème, même siconcrètement les effets pour le consommateursont encore limités. Ainsi, depuis 1998, un moisd’action sur la qualité, l’hygiène et la sécuritéalimentaire (du 15 avril au 15 mai) est organiséchaque année, donnant lieu à des campagnesd’information, des foires, des colloques et descontrôles accrus sur les lieux de vente ou deconsommation. En 1999, une directive duPremier ministre annonce la décision de renforcerles activités de sûreté alimentaire (Dir 08/1999/CT

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L’évolution de la consommation alimentaire

43

consommationd'huiles végétales

importationsd'huiles végétales

consommation degraisses animales

importations degraisses animales

années

kg/p

ers/

an

19860.0

0.5

1.0

1.5

2.0

2.5

3.0

3.5

4.0

4.5

1991 1996 2001

Huiles végétales et graisses animales

Œufs et lait Viande et produits aquatiques

Fruits, légumes, racines et tubercules

Blé

années

consommation de blé

importations de blékg

/per

s/an

1986

0

2

4

6

8

10

12

1991 1996 2001

années

kg/p

ers/

an

19860

2

4

6

8

10

12

14

1991 1996 2001

consommationd'œufs

importationsd'œufs

importationsde lait

importationsde viande

importationsproduits aquatiques

consommationde lait

consommationde viande

consommation deproduits aquatiques

années1986 1991 1996 2001

0

5

10

15

20

25

kg/p

ers/

an

kg/p

ers/

an

années1986

80

70

60

50

40

30

20

10

0

1991 1996 2001

consommationde légumes

consommationde fruits

importationsde légumes

importationsde fruits

consommation deracines et tubercules

Note : pas d'importationsde racines et tubercules

Source : Base de données FAO,Bilan alimentaire du Vietnam.

Figure 10. Consommation et importation par habitant des principaux produits alimentaires

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

44

TTg). Elle se traduit par la création du Bureau del’hygiène et de la sécurité des aliments dépendantdu ministère de la santé.

Toutefois, le contrôle sanitaire des alimentsreste complexe. Selon la nature des produits(frais, transformés, importés) et les lieux decontrôle (lieux de production, de transformation,de vente, de restauration, transport), il impliquedes acteurs très divers (ministères de la santé, ducommerce, de l’agriculture et du développementrural, des pêches, des sciences et technolo-gies…). Les moyens sont limités et les contrôlesse concentrent sur deux périodes : celle du Tet(fête du nouvel an lunaire, pendant la-quelle laconsommation des ménages s’accroît consi-dérablement) et celle du mois d’action évoquéplus haut.

5.2. Des consommateurs inquiets Face à ces problèmes et suite aux campagnes

de sensibilisation, certaines études révèlent de

nouvelles préoccupations des consommateursurbains en termes de qualité des produits (BridierB., 2000 ; Ginhoux V., 2001 ; Figuié M., 2003).

Selon une enquête menée à Hanoi (CIRAD-IOS, 2002, tableau 9), les consommateursurbains estiment que la qualité de leurs repass’est améliorée au cours des dix dernièresannées (les aliments sont jugés plus abondants,plus divers, permettant un choix de la part duconsommateur). Mais plus de la moitié d’entreeux estiment que la qualité des produits alimen-taires a régressé. Au point que, pour 65 % desconsommateurs, les produits alimentairesprésentent aujourd’hui un danger pour la santé.

En ce qui concerne la qualité sanitaire, ce sontsurtout les légumes, puis la viande et enfin lesfruits et les produits aquatiques qui présentent leplus de danger aux yeux des consommateurs(figure 11). Dans le cas des légumes, c’est laprésence probable de résidus de pesticides quiest mise en cause. Concernant les fruits s’ajouteà ce problème l’utilisation de produits de conser-vation dans lesquels seraient trempés les fruitsaprès la récolte (pratique essentiellement asso-ciée aux fruits importés de Chine). Pour la viande,les préoccupations sont plus diverses, maisconcernent principalement l’utilisation de « sti-mulants » (terme assez vague dans le discoursdes consommateurs mais qui semble corres-pondre aux activateurs de croissance utilisésdans l’alimentation animale). Quant aux poissonset autres produits aquatiques (crevettes,crabe…), c’est l’utilisation de produits de conser-vation (urée, formol, borax….) qui est incriminée.

La méfiance est donc massive à l’égard de l’uti-lisation croissante de produits chimiques dans la

Source : enquête CIRAD-IOS, 2002.

Questions posées aux 200 enquêtés : 1. « Pensez-vous que, depuis dix ans, la qualité de vos repas s’est améliorée, estrestée la même, a baissé ? »2. « Pensez-vous que, depuis dix ans, la qualité en général des produits alimentairescommercialisés s’est améliorée, est restée la même, a baissé ? »

Tableau 9. Evolution de la qualité des repas et des produits alimentairescommercialisés selon les consommateurs de Hanoi, 2002 (%) Evolution de la qualitéS’est amélioréeEst restée la mêmeA baisséNe sait pas, pas de réponseTotal

Qualité des repas93,55,01,00,5

100,0

Qualité des produits alimentaires35,56,0

56,02,5

100,0

Le pho est une spécialité culinaire de Hanoi. Il s’agit d’une soupe, con-sommée à toute heure par les Hanoiens, contenant notamment desnouilles de riz. En 1999, suite à une dénonciation adressée par unemployé d’une unité de fabrication de nouilles de pho, des contrôles ontété réalisés dans divers restaurants de rue et ont révélé la présence deformol dans 7 échantillons sur 10 (Nhan Dan, 6 janvier 2000). Le formolest utilisé pour améliorer la consistance des nouilles et prolonger la con-servation de la soupe. La révélation de ces résultats a provoqué ce

qu’on a appelé « la crise du pho ». Les consommateurs ont été forte-ment ébranlés par ce que la presse a qualifié de grave crime à l’égardde la culture gastronomique nationale. Dans les jours qui ont suivi, laconsommation du pho a chuté de près de 80 %. Puis les consomma-teurs ont repris leurs habitudes sans que des mesures réelles aient étéprises. Encore récemment, 172 écoliers d’une école primaire de Ho ChiMinh-ville ont dû être hospitalisés suite à la consommation de pho à lacantine de leur école (Courrier du Vietnam, 17 mars 2003).

Encadré 10. La crise du pho

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L’évolution de la consommation alimentaire

45

filière agroalimentaire : pesticides – l’utilisation depesticides a augmenté de 75 % de 1991 à 1997(Ha Minh Trung, 1999) –, activateurs de crois-sance, produits de conservation. Sont mises encause la nature des produits (produits parfoisinterdits) comme les dates de traitement (tropproches de la récolte) et les quantités utilisées.

La mise en place de filières de produits agri-coles « propres » (légumes, poulets…), quiobéissent à un cahier des charges visant une utili-sation raisonnée des intrants, connaît cependantun succès limité. Les causes sont multiples : lessignes de qualité sont confus, mal définis, malaffichés – il est probable que cette confusion soitparfois volontairement entretenue (cas deslégumes commercialisés en supermarché) – etles contrôles sont insuffisants aux yeux desconsommateurs. Il en résulte un manque deconfiance qui pèse d’autant plus que cette qualitéa un coût pour le consommateur : les légumes« propres » coûtent de 1,2 à 2 fois plus cher queles légumes classiques. Ces surcoûts ne sont pastoujours justifiés. Les études sur les coûts deproduction des légumes « propres » et classiquesdonnent des résultats parfois contradictoires,selon qu’elles émanent de démarches orientéesvers la diffusion des techniques d’IPM (integratedpest management) auprès des producteurs ou dedémarches de promotion de la qualité auprès desconsommateurs.

Pour la consommation de porc, d’autrestravaux (Ginhoux V., 2001) ont montré le peu deconfiance accordée par le consommateur à laprésence d’un cachet des services vétérinairessur la viande, en raison de la fréquence desfraudes.

Avec l’allongement des filières et leur industria-lisation, le consommateur a de plus en plus demal à évaluer les caractéristiques des produitsqu’il consomme et il doit se fier à des tiers (Etat,marque, vendeur, label...). Or, les exemplesprécédemment cités révèlent que cette confiancefait souvent défaut. Se pose alors la question dela construction de signes de qualité crédiblesdans un contexte où les exigences de qualité duconsommateur s’affirment, et, au-delà, de l’adap-tation réelle de l’offre à cette demande. On peuten effet se demander, comme le font les consom-mateurs, si les produits « propres » sont vraimentpropres.

Les préoccupations des consommateursurbains concernent également la qualité nutri-tionnelle de leur alimentation. L’image de certainsaliments est nettement négative de ce point devue (enquête CIRAD-IOS, 2002, figure 12). C’estle cas des graisses animales et, dans unemoindre mesure, de la viande, dont la consom-mation est associée à l’émergence de surpoids,d’obésité, de cholestérol et d’hypertension. Descraintes de maladies dites d’« excès » apparais-sent, marquant la fin d’une ère de pénurie (dumoins à Hanoi, lieu de l’enquête citée). Cescraintes, ajoutées à la facilité d’utilisation,expliquent l’augmentation de la consommation

Question posée aux 200 enquêtés : « Citez les trois types d’aliments qui, selon vous,présentent aujourd’hui le plus de danger pour la santé des consommateurs. »

Figure 11. Produits alimentaires jugés dangereux pour la santépar les consommateurs et origine perçue des risques

Figure 12. Les produits alimentaires présentant des problèmesde qualité nutritionnelle aux yeux des consommateurs de Hanoi

Source : enquête CIRAD-IOS, 2002.

Question posée aux 200 enquêtés : « De quels aliments faut-il limiter la consommation pour être en bonne santé ? »

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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d’huile végétale au détriment du saindoux. Ellespourraient contribuer à freiner la progression dela consommation de viande. Le glutamate, définicomme un produit chimique cancérigène, estégalement craint ; suivent le thé et le café, jugéscomme des excitants néfastes pour le systèmenerveux et enfin le sucre pour des risquesd’obésité et de diabète.

6. Des comportements alimentairesnouveaux

Ces transformations s’accompagnent égale-ment de changements dans les pratiques desconsommateurs. Les plus marquants sont sansaucun doute relatifs aux modes d’approvision-nement et aux prises des repas.

Les exigences nouvelles de qualité s’affirmentdans un contexte d’abondance marqué parl’abandon des tickets de rationnement depuis1989, alors que se multiplient les points de venteet en particulier les petits supermarchés dans leszones urbaines. Ces supermarchés sont essen-tiellement fréquentés le week-end par les clientsvivant à proximité.

En ce qui concerne la prise des repas, le fait leplus marquant est le développement de la restau-ration hors du domicile. L’importance économiquede ce type de consommation a été évoquée plushaut. D’un point de vue nutritionnel, ellereprésente, en 1997, 30 % de l’apport caloriquedes consommateurs urbains de Hanoi (Le DanhTuyen, Bricas N. et al., 2000).

Selon Pham Kim Anh (1997), les repas prishors du domicile sont surtout les petits dé-jeuners, dans une moindre mesure les déjeunerset, plus rarement, les dîners. Ils sont consommésdurant la semaine, dans des petits restaurants derue (57 %) ou auprès des marchands ambulants(37 %). Outre l’économie de temps, les clientspeuvent y consommer des plats généralementlongs à cuisiner ou coûteux à préparer en petite

quantité. Se développent ainsi (Krowolski N.,1993) la consommation de « plats repas », telsque le pho ou le bun cha, et le snacking(consommation en dehors des heures fixes desrepas).

Un autre changement, probablement importantd’un point de vue économique et social, concernela consommation croissante de produits transfor-més (boites de conserve, plats à emporter...). Ilreste à le quantifier.

Conclusion : répondre aux évolutions de la consommation

Ce survol des changements récents de laconsommation alimentaire vietnamienne laisseapparaître l’opportunité que représente cemarché pour le secteur agricole et agroalimen-taire. Une opportunité mais aussi un défi, car ils’agit d’être capable de saisir ces changementsdans leurs dimensions à la fois quantitatives etqualitatives et d’en suivre le rythme, on l’a vu, trèsrapide. A l’heure actuelle, cette dynamique n’estencore connue que partiellement. Quelle est lapart autoconsommée des différents produits ?Comment évoluent les comportements desjeunes par rapport à ceux de leurs aînés ?Quelles différences y a-t-il entre les régions… ?Ce sont autant de questions dont les réponsespermettront de mieux évaluer le moteur potentielque représente la consommation alimentairepour la croissance économique vietnamienne.

L’enjeu est aussi de répondre à cette demandede façon responsable, en incluant des objectifsnon seulement économiques mais de santépublique et des préoccupations d'ordre social etculturel.

Les modèles de consommation évoluent,surtout en milieu urbain, amenant de nouveauxproblèmes de santé publique. Avec l’industria-lisation de la production agricole et de la transfor-mation agroalimentaire, de nouveaux problèmes

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L’évolution de la consommation alimentaire

47

de qualité se posent. Cela exige de dépasser l’ap-proche par filière pour inclure d’autres acteurs, enparticulier ceux de la santé, et d’appuyer un travailde communication avec le public.

Ces changements alimentaires ont égalementdes conséquences sociales et culturelles. Ledéveloppement spectaculaire de la restaurationhors du domicile en ville fait craindre une déstruc-turation des repas et, au-delà, des relations et dela cohésion familiales. Dès à présent se dessinentdes disparités croissantes dans l'accès à l'ali-mentation et dans les modèles alimentaires, entreruraux et urbains, entre riches et pauvres, entre

régions. Enfin, l'ouverture rapide aux échangesinternationaux et l'augmentation des importationsalimentaires qui en résulte posent la question dela capacité du système alimentaire vietnamien àvaloriser sa culture alimentaire tout en restantcompétitif.

Une approche opérationnelle et responsable del’alimentation exige donc d’aborder ce thèmedans toute sa complexité, c’est-à-dire à la foiscomme un acte nutritionnel, social, économiqueet culturel. Il sera ainsi possible de répondre auxenjeux économiques, autant qu’aux enjeux desécurité et de sûreté alimentaires.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Les changements de la production alimentaireDao The Anh, Vu Trong Binh, Le Duc Thinh (VASI)

Depuis la réforme de 1988 et l’allocation des terres aux ménages ruraux, la productionagricole du Vietnam a connu des succès remarquables avec un taux de croissancede 4,2 % par an. Entre 1991 et 2000, la production de riz a crû à raison de 5,6 % paran, celle de maïs de 10,2 %, celle de légumes de 7 %, celle de porc de 5 %. Cettecroissance a permis de répondre aux besoins de consommation alimentaire etd’exporter. Cependant, les transformations structurelles de l’économie rurale sont lentes, surtoutdans les plus grands deltas du Nord et du Sud. Dans chaque région, la diversificationde l’agriculture est réelle, mais le riz couvre encore 60 % des surfaces et la productioncontinue de progresser rapidement. Après avoir visé l’autosuffisance (avant 1993), lesproductions agricoles se sont de plus en plus orientées vers le marché, même dansles zones de montagnes. Cependant, faute d’infrastructures suffisantes et d’un cadrelégal approprié, l’économie marchande s’est développée timidement. Les ménages paysans opèrent aujourd’hui dans un milieu économique et social peufavorable. Les services publics sont limités voire inexistants dans de nombreuxendroits (crédit, vulgarisation, information commerciale). Les nouveaux services privéscollectifs ont du mal à se mettre en place. Ces contraintes freinent la diversification del’agriculture. Déjà pratiquées par les ménages paysans, les activités non agricoles peuvent être unmoteur de changement structurel afin de diversifier les activités économiques desménages dans un contexte de terre agricole limitée. Il s’agit notamment de latransformation et du commerce des produits agricoles. Ces activités fournissent desressources financières supplémentaires, qui peuvent être investies dans l’agriculture.L’Etat a un rôle important à jouer pour catalyser les initiatives locales, en accordantdes appuis adaptés. Le développement agricole orienté vers le marché intérieur, dontla demande est très diversifiée, peut amener à des transformations structurelles via ladiversification agricole et non agricole.

Nous examinons tout d’abord comment laproduction agricole a évolué au cours des dixdernières années, grâce à un contexte politiquefavorable (voir encadré 11, page 49). Nousprésentons les problèmes d’accès aux moyensde production et aux différents services agricoles(crédit, vulgarisation, commerce), qui peuvent

limiter la croissance agricole. Nous soulignons lesdifférenciations croissantes dans le développe-ment agricole et économique entre les différentesrégions et au sein des régions. Les relations entrel’agriculture et les autres secteurs de l’économie,en termes d’effets d’entraînement réciproques,sont exposées dans une dernière partie.

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Les changements de la production alimentaire

49

Avril 1988Reconnaissance des exploitations familiales agricoles comme unitéséconomiques autonomes ; allocation des terres agricoles auxexploitations familiales – pour une durée pouvant aller jusqu’à quinzeans ; orientation des coopératives agricoles vers le service auxagriculteurs (fourniture d’intrants et écoulement des produits) ;augmentation des transferts vers le secteur agricole : de 6 ‰ du PIBnational avant 1988, ils passent à près de 8 ‰ en 1988 pouratteindre 10 ‰ en 1995. Résolution n° 10.Mai 1989Libéralisation des prix ; suppression des subventions à la consomma-tion et des cartes de rationnement. Décision 150-CT.Juin 1991Premiers crédits à destination des exploitations familiales. Directive202.Mars 1993Politique de crédit pour les exploitations familiales. Directive 14-CP.Mise en place d’un système étatique de vulgarisation agricole.Directive 13-CP.Création de fonds de régulation pour stabiliser les cours du riz et dusucre.Juin 1993Nouvelle série de réformes pour améliorer l’environnement socio-économique des exploitations agricoles.Loi foncière : libéralisation du marché de la terre (décret 64/CP,27/09/1993) ; allocation des terres agricoles aux exploitations fami-liales pour vingt à cinquante ans selon les terres, la terre restant pro-priété de l’Etat ; outre le droit d’usage, création de nouveaux droits– transfert, vente et location des droits d’usage, hypothèque, héritage,compensation en cas de réquisition.Poursuite de la réforme du système de crédit agricole : augmen-tation du budget de la Banque agricole ; création d’une banque des« pauvres » pour faciliter l’accès au crédit pour les paysans les plusdémunis.Promotion des exploitations de moyenne et grande dimension.Mars 1996Renforcement des coopératives dans les différents secteurséconomiques ; nouveau modèle de coopérative : « coopératived’actions » à but commercial, dont les actions doivent être financéespar les cotisations des membres. Mars 1997Libéralisation de la circulation intérieure du riz : suppression des con-trôles et des licences de transport ; augmentation des quotas d'expor-tation à 3,5 millions de tonnes (décret 140/TTg du gouvernement) ; taxed’exportation fixée à 1 % pour le riz de qualité et 0 % pour le riz con-tenant plus de 25 % de brisure à partir de 1998 (CIE, 1998) – en 1997,la taxe a varié de 1 à 3 % selon la qualité de riz.

Mai 1997Décentralisation de la responsabilité aux chefs des comités de province(instances administratives locales) du suivi et du contrôle de l’octroi deprêts pour les achats de riz pour l’exportation. Janvier 1998Mesures pour encourager le secteur privé à exporter le riz : aug-mentation des quotas d’exportation (4 millions de tonnes). Décision12/TTg.Début de la libéralisation du marché des engrais : autorisation d’im-porter pour les entreprises privées avec des quotas. Novembre 1998Crédits à taux bonifié pour acheter du riz de stock pour l’exportation. Décembre 1998Fixation d’un prix plancher pour le riz (50/1998/QD-TTg).Utilisation du fonds de régulation des prix pour subventionner lesintérêts permettant l'achat d'un million de tonnes de riz au moment desprix bas pour constituer un stock d'exportation sur deux mois.Quota d'exportation porté à 4,5 millions de tonnes.Mars 1999Achat de stock temporaire porté de 1,5 à 1,8 million de tonnes de rizsur quatre mois au lieu de deux. Lettre 275/CP-KT KH.Septembre 1999Création d’un fonds d'appui à l'exportation. Décision du Premierministre 195/1999/QD-TTg.Décembre 1999Levée des quotas d'importation d'engrais (Décision 242/1999/QD-TTg) ; commercialisation assurée en grande partie par les com-merçants privés.Allocation de quotas d'exportation de riz à des entreprises non éta-tiques : cinq privées et quatre joint-ventures (Décision 273/1999/QD-TTg) ; autorisation donnée à des entreprises d'exportation étrangèrespour acheter le riz directement aux paysans.Autorisation d’emprunt jusqu’à 10 millions de dongs de crédit à courtterme, avec le titre foncier comme garantie. Décision du Premierministre.2000Développement du marché et amélioration de la qualité et la com-pétitivité des produits agricoles par des décisions et des décretssur le foncier, le crédit et les produits autres que le riz. Résolution duParti.Mars 2001Libéralisation totale des exportations de riz : abrogation des quotas ettaxes d'exportation. Décision 223/QD-TTg.Mai 2001Libéralisation totale des importations d’intrants : suppression de tousles quotas d'importation d’engrais et du contrôle de la gestion desentreprises importatrices.

Encadré 11. Les politiques agricoles de 1988 à 2001

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

50

1. Des productions globalementdynamiques

Après les années de réformes, l’intensificationrizicole a permis de consolider la sécurité alimen-taire du pays. Les ménages ruraux se sont alorsdétournés des produits vivriers peu prisés telsque le maïs, la patate douce, le manioc au profitdu riz devenu plus abondant. Durant la dernièredécennie, la quantité moyenne de vivres enéquivalent de riz par habitant a été multipliéepar 1,34. Le seuil de 350 kg de vivres par tête,considéré comme le seuil de l’autosuffisance, aété dépassé en 1993. Pourtant, les régions nebénéficient pas toutes de la même sécuritéalimentaire.

1.1. Le rizPrincipale culture du Vietnam, le riz couvrait

7,7 millions d’hectares en 2000, une superficie quiaugmente régulièrement de 2,4 % par an depuisune décennie.

Le Vietnam se divise en huit zones agro-écologiques selon le classement officiel : delta dufleuve Rouge, Nord-Est, Nord-Ouest, CentreNord, Centre Sud, Hauts plateaux du Centre,Nord-Est du Sud, delta du Mékong. Nous présen-tons ci-dessous l’évolution de la production de rizdans les différentes régions.

C’est le delta du Mékong, région rizicole parexcellence, qui a contribué le plus massivementà la croissance de la production, ceci par desdéfriches et des rotations de culture rapides.Certaines zones sont passées de deux à troiscultures par an. Dans les autres régions, la super-ficie reste stable voire diminue, mais les rende-ments progressent. Le delta du fleuve Rougeconnaît les rendements les plus élevés et encroissance continue, alors que les Hauts plateauxdu Centre et le Nord-Ouest, dont les conditionsagro-écologiques sont peu favorables, ont lesrendements les plus faibles.

La production de riz a connu une croissanceannuelle de l’ordre de 5,6 % par an durant ladernière décennie, plus rapide que celle dessurfaces cultivées. Il a ainsi été possible de satis-faire les besoins de consommation, en augmen-tation de 2,7 % par an, et d’exporter.

Cette progression est due à l’augmentation desrendements et des cycles de culture, notamment

19911990300

320

340

360

380

400

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440

460

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001équi

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1 00

0 h

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0

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

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Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

19911992

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19992000

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0

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

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Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Source : GSO, 2001.

6.00

5.00

4.00

3.00

2.00

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2000

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1991

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Delta du Mékong

Pays

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Figure 13. Evolution de la production moyenne de vivrespar habitant, 1990-2001 (kg par habitant)

Figure 14. Evolution des surfaces rizicolesdans les différentes régions du Vietnam

Figure 15. Evolution de la production rizicoledans les différentes régions du Vietnam

Figure 16. Evolution des rendements de riz dans les différentes régions du Vietnam

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Les changements de la production alimentaire

51

par le développement des systèmes hydrau-liques, pour 80 %, et à l’augmentation des sur-faces (d’après les scénarios de l’offre et lademande de riz réalisés par l’IRRI et l’ICARD),pour 20 %. Le surplus pour l’exportation estpassé de 3 millions de tonnes en 1995 à 7 millionsde tonnes en 2002, avec un niveau de consom-mation domestique de 147 kg de riz par tête et paran (Chu Thai Hoanh, 2002).

Dans de nombreuses régions, il existe encoreun potentiel de croissance des paramètres derendement et du nombre de cycles. En 2000, legouvernement estimait que le Vietnam avaitbesoin de quatre millions d’hectares pour assurersa sécurité alimentaire pour les années suivantes– 4,26 millions d’hectares étaient alors cultivés enriz. En consacrant 250 000 ha à la diversificationde la production agricole, dans un contexte decapacité d’extension en surface agricole limitée,la production de riz devrait croître de 1,1 % par anjusqu’à 2010 principalement grâce à l’augmenta-tion des rendements (Chu Thai Hoanh, 2002),ce qui devrait suffire à nourrir la population. Eneffet, si les tendances d’évolution de la démogra-phie et du niveau de vie se poursuivent, lademande devrait augmenter de 0,5 % par anjusqu’en 2020.

Cependant, la production de riz rémunèrefaiblement les producteurs. Depuis une dizained’années, pour maintenir leurs revenus, cesderniers combinent intensification de la rizicultureet diversification. Dans le delta du Mékong, lespaysans diversifient leurs cultures vers lesvariétés de riz parfumé, dont le prix de vente estplus élevé. Dans le delta du fleuve Rouge, latendance est de remplacer le riz ordinaire par lescultures sèches à haute valeur ajoutée, commele maïs et les cultures maraîchères. Toutefois, enraison des difficultés de commercialisation, l’évo-lution est lente.

1.2. La patate douceLes superficies cultivées en patate douce ont

fortement baissé durant la dernière décennie,surtout dans les régions de diversification agricolecomme le delta du fleuve Rouge et le CentreNord. En effet, la patate douce a été substituéepar le riz pour l’alimentation humaine et par desaliments composés pour l’alimentation des porcs,en particulier dans le delta du fleuve Rouge.

450

400

350

300

250

200

150

100

50

0

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

1 0

00 h

aDelta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

500

1000

1500

2000

2500

3000

0

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

1 00

0 to

nn

es

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Source : GSO, 2001.

16.00

14.00

12.00

10.00

8.00

6.00

4.00

2.00

0.00

2000

1999

1998

1997

1996

1995

1994

1993

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1991

ton

nes

/ha

Delta du Mékong

Pays

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Malgré la baisse des surfaces, les volumesproduits tendent à se stabiliser depuis cesdernières années. Les deux régions dont lescultures sont les plus intensives restent les deltasdu fleuve Rouge et du Mékong.

Figure 17. Evolution des surfaces de patate doucedans les différentes régions du Vietnam

Figure 18. Evolution de la production de patate doucedans les différentes régions du Vietnam

Figure 19. Evolution des rendements de patate doucedans les différentes régions du Vietnam

Page 54: for cities of Asia Marché alimentaire et développement ......Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel

Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

52

1.3. Le maïsLa production de maïs a connu une évolution

profonde au cours des dix dernières annéesfaisant passer le Vietnam d’exportateur à impor-tateur.

Au début des années 90, le maïs était utilisécomme culture vivrière en complément du riz etpour l’alimentation des porcs. La productionintérieure suffisait et le Vietnam exportait. Depuis1995, les éleveurs utilisent de plus en plus d’ali-ments composés comprenant une proportionélevée de maïs. La demande augmente enmoyenne de 12,7 % par an – 28 % pour l’alimen-tation animale (FAOSTAT). Pour y répondre, lessuperficies cultivées en maïs sont augmentées etla production est intensifiée. Les rendementscroissent dans toutes les régions, à l’exception dudelta du Mékong, qui connaît une baisse impor-tante depuis 1996 due à la diversification récentevers les cultures maraîchères.

Toutefois, la production, qui ne croît que de10,9 % par an, ne suffit pas à satisfaire lademande. Il est alors nécessaire de recourir à desimportations, moins onéreuses d’ailleurs que lemaïs local.

Grâce à l’utilisation croissante de variétéshybrides, certaines régions sont devenues d’im-portantes zones de production : le Nord-Est et leNord-Est du Sud pour leur élevage porcin trèsdynamique ; le Nord-Ouest pour approvisionnerd’autres régions, en particulier le delta du fleuveRouge.

0

100

200

300

400

500

600

700

800

2000199919981997199619951994199319921991

1 0

00 h

a

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

0

500

1000

1500

2000

2500

2000199919981997199619951994199319921991

1 00

0 to

nn

es

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Delta du Mékong

Pays

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

0.00

0.50

1.00

1.50

2.00

2.50

3.00

3.50

4.00

4.50

5.00

2000

1999

1998

1997

1996

1995

1994

1993

1992

1991

ton

nes

/ha

Source : GSO, 2001.

Figure 20. Evolution des surfaces de maïsdans les différentes régions du Vietnam

Figure 21. Evolution de la production de maïsdans les différentes régions du Vietnam

Figure 22. Evolution des rendements de maïsdans les différentes régions du Vietnam

Page 55: for cities of Asia Marché alimentaire et développement ......Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel

Les changements de la production alimentaire

53

1.4. Les légumesLa production de légumes en tonnage a

augmenté de 7 % par an entre 1991 et 1998, etla consommation de 6 % de 1991 à 2000 ; lesurplus a permis d’exporter. Si les quantitésproduites satisfont la consommation, la qualité estloin d’être adaptée à la demande. De plus, l’offreest très saisonnière (voir cinquième partie). Lessurfaces cultivées, qui ont augmenté en moyennede 5 % par an, restent très modestes et necouvrent que 6 % des cultures annuelles.

La production de légumes varie selon lesrégions agroécologiques et les possibilités decommercialisation offertes par l’urbanisation. Declimat tropical avec une mousson froide, le deltadu fleuve Rouge dispose d’un hiver marqué favo-rable à la culture maraîchère. Depuis quelquesannées, cette région a diversifié ses cultures etelle produit des légumes destinés au marché localet au sud du pays. Les rendements y sont les plusélevés du Vietnam. Toutefois, l’intensification vade pair avec une utilisation accrue de produitschimiques, ce qui pose des problèmes de sécu-rité sanitaire pour les consommateurs et pour lesproducteurs.

Le delta du Mékong voit également sa produc-tion légumière croître pour des variétés diversi-fiées de légumes d’origine tropicale et dessaisons de production différentes de celles dudelta du fleuve Rouge. Ce dernier, bénéficiantd’une saison d’hiver, peut fournir les légumestempérés à l’ensemble du pays de novembre àavril (par exemple, le chou). Enfin, la région deDalat (Nord-Est du Sud), qui bénéficie d’un climattempéré, produit toute l’année des légumes detype tempéré à destination de l’ensemble desrégions du Vietnam et exporte vers la sous-région.

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

50

100

150

200

250

300

350

400

450

0

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 19981

000

ha

0

1000

2000

3000

4000

5000

6000

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998

1 00

0 to

nn

es

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Delta du Mékong

Pays

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

6.00

8.00

10.00

12.00

14.00

16.00

18.00

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998

ton

nes

/ha

Source : GSO, 2001.

Figure 23. Evolution des surfaces de légumesdans les différentes régions du Vietnam

Figure 24. Evolution de la production de légumesdans les différentes régions du Vietnam

Figure 25. Evolution du rendement des légumesde différentes régions du Vietnam

Page 56: for cities of Asia Marché alimentaire et développement ......Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel

Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

54

1.5. Les fruitsDepuis dix ans, la production fruitière a connu

des changements importants, qui ont permis derépondre aux nouveaux besoins du marchéintérieur.

Dans le delta du fleuve Rouge, les arbresfruitiers, autrefois cantonnés aux jardins familiaux,se constituent en vergers. Cette évolution esttoutefois limitée par la politique de maintien et decontrôle des surfaces rizicoles en vue de garan-tir la sécurité alimentaire. Dans le nord du pays,les programmes de restauration des pentesdégradées ont souvent débouché sur des plan-tations fruitières. Dans le delta du Mékong, lesstratégies de diversification se sont surtout orien-tées vers la production fruitière sur de grandessuperficies. Cette région détenait la moitié dessurfaces fruitières du pays dans les années 90 etplus d’un tiers à la période actuelle.

En revanche, dans les régions côtièrescentrales, les sols sableux et les conditions clima-tiques sont peu favorables à la production fruitièreet sur les Hauts plateaux du Centre, la culture ducafé laisse peu de place au développement del’arboriculture fruitière.

Parmi les arbres fruitiers, le litchi et le longaneont connu un taux de croissance spectaculaireaprès 1993 : 37 % par an en moyenne. Actuel-lement, ces deux espèces occupent à ellesseules 26 % des surfaces fruitières.

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Montagne du Nord(Est-Ouest)

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

100

200

300

400

500

600

0

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999

1 00

0 h

a

0

1 000

2 000

3 000

4 000

5 000

6 000

7 000

1996 1997 1998 1999 2000

mill

iard

s d

e d

on

gs,

199

4

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

0

2 000

4 000

6 000

8 000

10 000

12 000

14 000

16 000

18 000

20 000

1996 1997 1998 1999 2000

mill

iard

s d

e d

on

gs,

199

4

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Source : GSO, 2001.

Figure 26. Evolution des surfaces en fruitsdans les différentes régions du Vietnam

Figure 27. Evolution en valeur de la production fruitièredans les différentes régions du Vietnam

Figure 28. Evolution de la production animaledans les différentes régions du Vietnam

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Les changements de la production alimentaire

55

1.6. La viandeL’élevage est également en progression

constante, notamment celui des porcs et desvolailles. De 1991 à 2000, le nombre de porcs aaugmenté de 5 % par an, celui des volailles de5,7 %. Cette croissance concerne principalementles grands deltas et, dans une moindre mesure,le Nord-Est et le Sud-Est du Sud. Le changementest aussi qualitatif : l’élevage de porcs exotiquesmaigres se développe pour répondre à lademande des marchés urbains locaux, surtoutdans la région du fleuve Rouge.

1.7. La production laitièreRécemment introduite au Vietnam, la produc-

tion laitière ne peut pas encore répondre auxbesoins croissants de la population. En 2000, lelait consommé était importé à 90 %.

Dans un premier temps, cette production s'estdéveloppée essentiellement dans les zones péri-urbaines, en réponse à la demande citadine.Actuellement, deux facteurs tendent à conduire àune redistribution spatiale de cette activité : d'unepart, la pression foncière croissante en zone péri-urbaine et d'autre part, l'ntensification de cetteactivité avec des races importées sensibles à lachaleur et plus exigeantes en fourrage. Ainsi, il estenvisagé de développer des bassins laitiers pluséloignés des villes, mais dans des zones auclimat plus favorable et disposant d’espaces pourles cultures fourragères, comme à Ba Vi et MocChau, dans le nord du pays).

0

1 000

1 500

2 000

2 500

3 000

3 500

500

1996 1997 1998 1999 2000

mill

iard

s d

e d

on

gs,

199

4

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

Delta du Mékong

Delta du fleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateaux du Centre

Nord-Est du Sud

0

5 000

10 000

15 000

20 000

25 000

1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001

1 00

0 tê

tes

Source : GSO, 2001.

Source : GSO, 2001.

Tableau 10. Croissance de la production animale en poids vifentre 1990-2000 au Vietnam

PorcsVolaillesBovinsBuffles

Poids vif (1 000 tonnes)en 2000

1409286,592,248,1

1990-19957,05,44,04,7

Taux de croissance ( %)1990-2000

7,06,65,51,4

1996-20007,07,87,4

-2,7

Source : Nguyen Van Cat, 2000.

Tableau 11. Production et importations de lait

Nombre de vaches laitièresBesoins en lait (milliers de tonnes)Lait importé (équivalent lait frais en milliers de tonnes)Production de lait en milliers de tonnesPart de la production locale dans la consommation (%)

19905 10070,8

65

5,88,1

199518 700

533512

213,9

200032 000

847800

505,9

Figure 29. Evolution de la production de volailles en valeurdans les différentes régions du Vietnam

Figure 30. Evolution du nombre de porcsdans les différentes régions du Vietnam

Page 58: for cities of Asia Marché alimentaire et développement ......Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam Editeurs scientifiques : Paule Moustier, Dao The Anh, Muriel

Marché alim

entaire et développement agricole au V

ietnam

56

Source : GSO, 2001.

Tableau 12. Taux de croissance des productions agricoles, forestières et aquacoles entre 1996 et 2000 au Vietnam (%)

Zones agro-écologiques

Pays

Delta dufleuve Rouge

Nord-Est

Nord-Ouest

Centre Nord

Centre Sud

Hauts plateauxdu Centre

Nord-Est duSud

Delta duMékong

Agricult.ForêtAquacult.

6,79

5,01

6,17

7,07

6,88

6,10

18,87

7,76

5,90

Culturesvivrières

5,43

6,45

6,36

8,27

10,60

4,72

-7,29

-9,98

8,40

Agriculture(culture etélevage)

6,70

4,81

6,47

7,11

7,33

4,41

20,65

8,48

5,11

Fruits

1,79

0,50

14,21

30,55

- 17,98

- 20,47

- 45,07

- 0,40

5,47

Autrescultures

1,61

9,00

- 18,73

- 22,66

- 26,68

- 16,36

- 3,22

1,73

15,57

Porcs,bovins

6,40

16,89

21,02

10,72

15,02

17,66

- 25,33

4,27

- 7,09

Volailles

7,08

11,86

24,10

3,39

6,87

- 0,54

- 23,62

11,09

0,60

Autresélevages

6,69

22,90

8,40

-8,23

15,22

- 1,78

- 35,32

- 10,50

5,60

Servicesagricoles

2,17

- 43,07

- 50,43

- 48,88

- 5,25

- 15,14

- 19,13

- 9,68

32,07

Pêche

3,52

3,52

0,29

- 19,62

7,62

7,88

- 0,42

3,02

2,21

Pisci-culture

6,02

13,73

16,22

0,16

19,31

12,90

3,50

4,73

3,53

Forêts

1,18

-9,49

3,56

7,65

- 0,20

- 4,87

- 5,67

- 0,93

4,83

Légumeset légu-mineuses

5,62

14,95

13,38

- 9,52

- 2,80

7,08

5,66

15,90

- 7,84

Culturesindustriellesannuelles

2,81

- 19,54

- 6,48

19,56

11,32

17,82

-3,87

16,05

1,96

Culturesindustriellespérennes

26,23

- 59,18

- 15,03

- 23,55

- 7,63

- 11,08

125,78

69,35

- 15,75

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Les changements de la production alimentaire

57

1.8. La production aquatiqueEn dix ans, la production aquatique a doublé

pour atteindre 1,88 million de tonnes en 2000. Lapisciculture en est une composante importante.Les surfaces d’eau douce qui y sont consacréescouvrent 50 000 km2. Si le delta du Mékongproduit 50 % de la valeur de la production aqua-cole nationale, le delta du fleuve Rouge fait preuveactuellement d’un dynamisme remarquable, avecle développement de systèmes intensifs.

1.9. Des différences régionalesToutes les régions ont connu une croissance de

la production agricole, mais avec des différencesdans les produits : les légumes et les légu-mineuses dans le delta du fleuve Rouge, lamontagne du Nord-Est et le Nord-Est du Sud (voirtableau 12) ; les cultures industrielles annuellesdans les montagnes du Nord-Ouest et le CentreSud ; l’élevage dans le delta du fleuve Rouge, leNord-Est (mais il diminue dans le delta duMékong) ; l’aquaculture dans les régions côtièrescentrales du pays.

La situation des régions est très différente entermes de diversification des cultures. Le delta dufleuve Rouge et les Hauts plateaux du Centresont les deux régions qui ont le niveau de diver-sification le plus faible. La région Nord-Est du Sudconnaît une diversification forte ces dernièresannées (tableau 13).

Spécialisé dans la production de riz d’exporta-tion, dont les prix baissent, le delta du Mékong aentrepris de diversifier sa production pour lemarché intérieur. Ce processus est déjà bien

Source : GSO, 2001.

engagé dans le delta du fleuve Rouge, mais il estfreiné par l’absence d’institutions de marchéstructurées. Le Nord-Est est encore peu intégréau marché et subit les conséquences de la dégra-dation de ses ressources naturelles. Quant à larégion des Hauts plateaux du Centre, elle estspécialisée dans la caféiculture pour l’exportation.

Source : calculs de Dao The Tuan et Dao The Anh, à partir de GSO, 2001.

Tableau 13. La diversification agricole dans les différentes régions du Vietnam, 1996-2000 (1)

Zones agro-écologiques

PaysDelta du fleuve RougeNord-EstNord-OuestCentre NordCentre SudHauts plateaux du CentreNord-Est du SudDelta du Mékong

Culturesvégétales

0,570,510,560,580,530,560,520,620,50

Cultures végétaleset élevage

0,710,680,720,710,690,710,620,730,65

Agriculture-Forêt-Aquaculture

0,840,770,860,910,840,920,680,850,83

Culturesvégétales

1,44- 6,54- 2,07- 0,66- 6,02- 2,43- 9,186,25

- 4,99

Cultures végétaleset élevage

0,64- 1,65- 0,53- 1,40- 2,26- 0,92

- 11,552,66

- 2,89

Agriculture-Forêt-Aquaculture

- 0,02- 0,210,25

- 0,51- 1,36- 0,70

- 11,740,60

- 1,88

Indice de diversification moyen Taux de croissance de l’indice de diversification

Figure 31. Evolution de la valeur de la production aquatiquedes différentes régions du Vietnam

Figure 32. Evolution de la valeur de la production piscicoledes différentes régions du Vietnam

1 L’indice de diversification utilisé est celui de Simpson. Il varie de 0 à 1. 0 représente la situation extrême de spécialisation,1 celle de la diversification.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

58

2. Des structures et un environnementcontraignants

Dans quelle mesure l’accès aux facteurs deproduction (foncier, travail, intrants et crédit) etl’environnement de la production (vulgarisation,commerce) ont-t-ils favorisé la croissance de laproduction et sa diversification ? Quelles sont lesperspectives pour l’avenir ?

2.1. Des disponibilités foncièresinégalesAu cours des dix dernières années, les

surfaces agricoles ont fortement augmenté,notamment dans le Nord-Est du Sud, dans lesHauts plateaux du Centre et, dans une moindremesure, dans le Nord et le delta du Mékong. Enrevanche, elles stagnent dans le delta du fleuveRouge et le Centre.

Ces évolutions sont liées aux différencesrégionales en termes de disponibilité foncière, dedensité de population et de développementéconomique. Dans les régions du nord, il n’existequasiment plus de terres vierges et les terres agri-coles sont en recul, principalement à cause del’extension des aires urbaines et industrielles. Enrevanche, dans les régions du sud, la densité depopulation est encore faible et des terres viergessont défrichées depuis les années 90. Lesnouvelles terres sont occupées, dans le cadre deprojets de développement de l’Etat, ou demanière informelle par des migrations spon-tanées (voir infra S. Fanchette). Cependant, lamigration organisée par l’Etat s’est heurtée auxconflits entre la population indigène et lesmigrants ; des problèmes d’environnement sontapparus suite à l’intensification excessive deterres pentues.

2.2. Une main-d’œuvre agricoleabondante et éduquéeSi l’agriculture reste le principal secteur d’em-

ploi (en 2000, elle occupait 62,5 % des travailleursde plus de 15 ans), ce chiffre tend à diminuer. Deplus, si tous les adultes ruraux ont accès autravail, ils sont sous-employés : en 2001, la main-d’œuvre rurale n’est employée en moyenne surl’année qu’à 75 % de son temps (GSO, 2001).

La main-d’œuvre vietnamienne se caractérisepar une forte mobilité. Le Nord-Est du Sud

Source : GSO, 2001.

Tableau 14. Evolution des surfaces agricolesdans les différentes régions (1 000 ha)

RégionsTotal du pays

Montagnes du Nord (Nord-Est et Nord-Ouest)Delta du fleuve RougeCentre Nord Centre SudHauts plateaux du Centre Nord-Est du SudDelta du Mékong

19906 993

1 226

801711540445805

2 464

19957 357

1 156

689672536581

1 0132 709

20009 343

1 421

739725546993

1 9492 970

Source : GSO, 2001.

Tableau 15. Part de la main-d’œuvre agricole dans les différentes régions du Vietnam et évolution, 1996-2000 (%)

Zones agro-écologiques

PaysDelta du fleuve Rouge Nord-EstNord-Ouest Centre NordCentre SudHauts plateaux du CentreNord-est du SudDelta du Mékong

Part de la main-d’œuvreagricole (moyenne 1996-2000)

65,5166,2481,9988,9375,1563,7178,2936,9063,51

Taux de diminution de lamain-d’œuvre agricole

- 2,38- 3,91- 1,06- 1,06- 2,59- 2,70- 0,47- 3,21- 1,59

1996 1997 1998 1999 2000

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Agriculture

Industrie

Services

Source : GSO, 2001.

Figure 33. Evolution des secteurs d’emploi au Vietnam

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Les changements de la production alimentaire

59

accueille de nombreux migrants, essentiellementpour le secteur industriel en développementrapide. Avant 1994, les Hauts plateaux du Centreont constitué une zone d’accueil en raison deleurs réserves foncières ; mais celles-ci sontaujourd’hui presque épuisées avec l’expansionde la caféiculture. Les migrants sont principale-ment originaires du Centre Nord et du delta duMékong. Malgré une densité de populationélevée, le delta du fleuve Rouge connaît uneémigration limitée et en régression grâce à ladiversification des activités qui a créé denouveaux emplois.

Autre caractéristique importante, lesVietnamiens ont un niveau d’éducation élevé, enmilieu rural comme en milieu urbain. C’est dansle delta du fleuve Rouge que le niveau d’éduca-tion est le plus élevé. En revanche, dans le deltadu Mékong, il est relativement bas, ce qui pour-rait entraver la capacité de diversification agricoledes exploitations dans le futur. Dans lesmontagnes du Nord-Ouest et dans les Hautsplateaux du Centre, le niveau d’éducation estplus faible que dans les autres régions en raisondu manque de structures d’enseignement et deformation.

La formation technique de la main-d’œuvreprogresse : 13 % de la main-d’œuvre avait reçu

une formation technique en 1997, 15,5 % en2000. Mais, dans le domaine agricole, ces forma-tions sont encore rares, ce qui freine la moderni-sation et la professionnalisation de l’agriculture.

2.3. Un accès au crédit encoreinsuffisantAvant 1991, le crédit d’Etat était réservé aux

coopératives, aux fermes et aux entreprisesd’Etat. Les agriculteurs ne pouvaient ques’adresser aux réseaux d’entraide ou au créditusurier. Après des tests en 1991, une politique ducrédit pour les exploitations familiales est mise enplace. De 1991 à 1995, le nombre de famillestouchées progresse pour atteindre officiellementplus de 50 % des exploitations agricoles en 1995.Chaque ménage reçoit en moyenne près de1 600 000 dongs. En 1999, l’autorisation d’em-prunt a été portée à 10 millions de dongs de crédità court terme, avec le titre foncier commegarantie. Cependant, malgré ces mesures,l'accès des paysans au crédit progresse peu.

La Banque agricole joue un rôle essentiel dansle crédit rural : plus de 60 % des producteurs quiont emprunté l’ont fait auprès de cette banque ;les autres organismes publics de crédit touchent14 % des producteurs, le reste étant assuré pardes privés.

Source : GSO, 1999.

Tableau 16. Niveau d’éducation de la main-d’œuvre vietnamienne, 1999 (%)

PaysUrbainRuralDelta du fleuve RougeNord-EstNord-OuestCentre Nord Centre Sud Hauts plateaux du CentreNord-Est du SudDelta du Mékong

Total

100,00100,00100,00100,00100,00100,00100,00100,00100,00100,00100,00

Pas descolarisation

4,891,434,890.906,05

17,411,913,61

15,273,837,06

Cycle élémentairenon achevé

20,1110,5120,116,99

13,6128,039,92

25,0321,2926,7337,27

Elémentaire

30,6522,7330,6521,6928,9030,7624,2839,2130,9538,8637,36

Secondaire

33,0927,9133,0954,4939,4020,3046,9823,3423,8020,2212,60

Lycée

11,2637,4211,2615,9312,043,50

16,818,818,69

10,365,71

Niveau d’éducation

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

60

Selon des études de l’IFPRI et du MARD(2002), dans la plupart des régions (sauf lesHauts plateaux du Centre), le crédit est majori-tairement utilisé pour acheter les aliments pour lebétail et des matières premières (36 à 66 % descrédits). Selon l’étude menée à Hai Duong(Hoang Vu Quang, 1997), les crédits d’un faiblemontant servent à : l’achat d’engrais (45 %), laconstruction de la maison (15 %), le petit com-merce (9 %), les dépenses courantes familiales(7 %). Dans les familles les plus pauvres, le créditest davantage mobilisé pour soutenir la consom-mation familiale, et moins pour la production.Dans les familles pauvres, les crédits plus impor-tants servent principalement à la construction ouà la restauration des maisons, et aux dépensesfamiliales, mais jamais à la production. Enrevanche, les familles aisées les utilisent pour in-vestir dans la production agricole ou extra-agricole.

Le système actuel de crédit est imparfait àplusieurs titres : ● Les banques manquent de disponibilités pour

le crédit à long terme.● Les paysans ont une faible capacité pour

monter des projets.● Les montants qu’il est possible d’emprunter

sont faibles au regard des investissementsnécessaires aux exploitations qui souhaitent sespécialiser.

● Ne pouvant pas agir indépendamment de laBanque agricole, la Banque des pauvres(renommée « Banque politique ») a un impacttrès faible sur les plus démunis qu’elle estsensée servir en priorité.

● Les modalités de remboursement ne sont pasadaptées aux cycles de production agricole.

Entre 1993 et 1998, les demandes de créditsformels ont stagné. Le crédit informel concernaitplus de 55 % des emprunteurs en 1998. Les diffi-cultés d’accès au crédit d'Etat relèvent moinsd'une insuffisance de ressources financières quede l’absence de structure institutionnelle de distri-bution et de gestion du crédit. Une nouvelleformule de crédit s’est développée récemment, àtravers les groupements de paysans qui gèrent lecrédit en commun. Il existe également despratiques de transfert d’emprunts entre emprun-teurs ; ils représentent 46 % des emprunts et48 % de la valeur du crédit informel. Ces chiffresconfirment la faiblesse du crédit formel (Haughtonet al., 2001). Cependant, les risques de non-recouvrement ne sont pas négligeables ; ils sontliés aux aléas du marché, par exemple lors de laforte chute du prix du paddy en 1997.

2.4. Une vulgarisation agricole peu coordonnéeLa vulgarisation agricole est assurée par le

système public et par diverses organisations. Lesystème officiel de vulgarisation est très hié-rarchique et descendant. Les activités proposéesaux agriculteurs par les centres provinciaux devulgarisation sont définies par le service devulgarisation nationale qui dépend du MARD. Iln’existe pas actuellement de structure officielle devulgarisation à l'échelle de la commune. Selon leMARD, ce système officiel n’assure que 15 à20 % de la vulgarisation, et seulement 9,5 % dansle delta du fleuve Rouge. Ce sont des organisa-tions qui ne sont pas officiellement des servicesspécialisés qui assurent l’essentiel de la vulgari-sation : services agricoles de province ou dedistrict, centres vétérinaires ou de protectionvégétale, coopératives, organisations de massecomme l’association des femmes ou l’associationdes jeunes, instituts de recherche, entreprises...

Cette organisation de la vulgarisation présentede nombreuses limites. Les organismes se coor-donnent peu. Les vulgarisateurs manquent deméthode ; leur formation technique ne leur permetpas d’aborder les questions socio-économiques.Les activités officielles de vulgarisation dépen-dent de projets, sans stratégie sur le long terme.La vulgarisation privilégie les innovations tech-niques au détriment des innovations organisa-tionnelles (organisations de producteurs, organi-

0

10

20

30

40

50

60

CentreSud

Regions

Hautsplateaux

du Centre

CentreNord

Nord-Estdu Sud

Deltadu

Mékong

Nord-Ouest

Nord-Est

% d

e p

rod

uct

eurs

Delta dufleuveRouge

Source : MARD, 2002.

Figure 34. Pourcentage d’agriculteurs ayant accès au créditdans les différentes régions du Vietnam

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Les changements de la production alimentaire

61

sation de la commercialisation) et les messagestechniques nouveaux au détriment de la diffusiondes techniques de base auxquelles les exploita-tions les plus défavorisées n’ont pas encoreaccès. Enfin, les services de vulgarisation nejouent qu’un rôle mineur dans la diffusion d’infor-mations relatives aux prix et à l’état des marchésagricoles : ils fournissent moins de 2 % des infor-mations reçues dans ce domaine par les produc-teurs, lesquels s’informent essentiellement pardes contacts personnels (39 %), des contactsavec les commerçants (35 %), ou par la radio etla télévision (14 %).

2.5. Des services commerciaux à améliorerLes services commerciaux sont essentiels au

développement de la production agricole. Ilscomprennent les services d’amont (fournitured’intrants, par exemple) et d’aval (appui à lacommercialisation). L’analyse des services d’avalsera développée dans la partie sur les filières.

Les services commerciaux d’amont sontassurés par des acteurs étatiques et nonétatiques comme les coopératives, les entre-prises privées, parfois étrangères... Ils fournissentprincipalement des engrais, des aliments pour lebétail, du matériel végétal, des animaux d’en-graissement ou de reproduction, des matériels deproduction...

Selon le MARD, en 1999, il existe 105 usinesde fabrication d’aliments pour le bétail, dont lacapacité atteint 2,8 millions de tonnes par an :62 % sont des usines nationales non étatiques,22 % des usines nationales étatiques ; 12 % desentreprises à capitaux étrangers ; 5 % descompagnies mixtes, avec des capitaux provenantd’actionnaires.

Les fermes nationales de sélection industrielleavicoles ou porcines sont peu nombreuses(respectivement 10 et 12) et de taille réduite(quelques centaines de truies ou quelquesmilliers de poules par ferme). A l’échelle provin-ciale, les fermes, modestes, ne concernent queles porcs. Il n’y a pas d’entreprises étrangèresengagées dans ce secteur d’activité.

Les engrais chimiques sont principalementproduits et importés (516 millions de dollars d’im-portation d’engrais en 2000) par les compagnies

étatiques. La présence de compagnies privéesdans ce domaine est encore faible. La distributionau détail est essentiellement aux mains dusecteur privé.

Quant aux services d’aval, le secteur privéassure la majorité des activités de collecte et dedistribution sur le marché intérieur, les compa-gnies étatiques ne représentant qu’une trèsfaible part. En revanche, l'Etat maîtrise lesmarchés d’exportation grâce à de nombreusescompagnies.

Le dispositif actuel d’appui à l’approvision-nement en intrants et à l’écoulement de la produc-tion présente les limites suivantes. Le contrôle dela qualité des intrants fournis aux producteurs estinsuffisant. Les importations d’intrants sont lemonopole des compagnies étatiques, dont lespratiques (système de quota) contribuent àaugmenter les coûts aux producteurs. Le réseaude collecte des produits agricoles, que ce soitpour l’exportation ou pour le marché intérieur, estentièrement aux mains du secteur privé, sanscontrôle de l’Etat. Dans les districts et lesprovinces, il n’existe pas d’unité administrativechargée du service commercial auprès desproducteurs. Les interventions étatiques sontpour la plupart administratives et tournées versles filières d’exportation.

3. Des différenciations croissantes

3.1. Le foncier, facteur-clé de différenciationMalgré la réforme agraire de 1993 qui visait une

répartition égalitaire des terres agricoles, ladifférentiation foncière entre les régions et à l’in-térieur des régions augmente. Si la taillemoyenne des exploitations est, en 1998, de0,9 ha à l’échelle nationale, elle est beaucoupplus élevée dans le Nord-Est du Sud (1,4 ha) etdans les Hauts plateaux du Centre (1,5 ha), etplus faible dans le Centre Sud (0,55 ha).

Les différences sont également importantesentre zones rurales et périurbaines. Le Vietnamcompte près de six cents villes, de taille variable,dont la population croît de 4 à 8 % par an. Ceprocessus d’urbanisation conduit à d’importantesspéculations foncières à la périphérie de cesvilles.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

62

Source : VLSS 1997-1998.

Tableau 17. Superficie agricole par foyer selon les régions (m2)

Moyenne par foyerPériurbainRural

Moyenne

9 0393 9289 443

Montagne duNord (Nord-Estet Nord-Ouest)

9 5563 936

10 027

Delta dufleuve Rouge

8 5311 5679 154

Centre Nord

5 9821 4706 123

Centre Sud

5 4981 7235 903

Hautsplateaux du

Centre15 109

015 109

Nord-Est duSud

13 6732 981

14 537

Delta duMékong

10 2967 608

10 587

Zones agro-écologiques

Les niveaux de vie sont évalués à travers les quintiles de dépenses, « 1 » correspondant au niveau le plus faible.

Source : VLSS, 1997-1998.

Tableau 18. Superficie agricole par foyer selon le niveau de vie des ménages (en m2)

Niveau de vie des ménages

12345

Moyenne

7 1838 1877 588

13 30410 044

Montagne duNord (Nord-Estet Nord-Ouest)

8 81211 6289 6888 2427 204

Delta dufleuve Rouge

3 1113 8953 127

25 1182 381

Centre Nord

5 4725 9296 9586 8603 196

Centre Sud

8 4454 6025 0414 1244 082

Hautsplateaux du

Centre11 525315 07414 19219 48426 415

Nord-Est duSud

3 1045 7837 722

14 11919 434

Delta duMékong

6 82710 43210 83711 06712 176

Zones

La différenciation foncière est également impor-tante au sein des régions. Dans le Centre, lasuperficie des exploitations les plus grandes estle double de celle des plus petites. Dans le Sud,le rapport est de 1 à 10.

Ces questions sont d’autant plus importantesque la concentration foncière et la proportion depaysans sans terre augmentent rapidement, parexemple dans le delta du Mékong et en particulierdans des provinces comme Tra Vinh et Bac Lieu.

Source : GSO, 1994 et comités populaires des provinces, 1998.

Tableau 19. Nombre de paysans sans terre dans le delta du Mékong

Provinces Long AnTien GiangBen TreSoc TrangVinh LongTra VinhDong ThapCan ThoAn GiangKien GiangBac LieuCa MauTotale du Delta du Mékong

Nombre des ménages769957570

3 668442770168825

1 7211 441

489457

12 250

Pourcentage0,480,450,302,620,340,670,100,441,140,980,630,500,70

Nombre des ménages1 5362 393

11 6749 9009 218

16 19815 51616 14715 8709 376

14 08614 424

136 338

Pourcentage 4,660,885,056,585,20

14,007,165,005,586,59

13,338,245,69

1994 1998

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Les changements de la production alimentaire

63

Si la promotion des exploitations de moyenneet grande dimension est une volonté politique, samise en œuvre demeure ambiguë. Dans lesdocuments officiels, l’Etat encourage le déve-loppement d'exploitations de moyenne et degrande dimension, afin de promouvoir la produc-tion marchande et de faciliter la concentrationfoncière en milieu rural, en particulier dans leszones marginales. Toutefois, ces mesures sontpeu opérationnelles pour plusieurs raisons : lacapacité foncière est limitée ; les filières sont peuorganisées ; l’appui aux secteurs en aval de laproduction est encore insuffisant.

3.2. Creusement des inégalités de revenu agricoleDe nombreux travaux ont montré que la crois-

sance agricole s’est accompagnée du creuse-ment des inégalités de revenu, selon l’accès aufoncier et aux réseaux commerciaux – lespremiers réseaux avaient été mis en placependant la période collectiviste (voir notammentDao the Anh, 2003). Ces tendances devraient semaintenir.

De nouvelles menaces pèsent sur le secteuragricole, notamment l’accroissement des inéga-lités entre régions selon l’accès au transport età l’information. Le rapport entre la productivitéagricole de la province la plus riche (Vinh Long,Mékong) et la province la plus pauvre (Quang

Ninh, Nord-Est) est passé de 4,1 à 6 entre 1986et 1998 (Cour, 2001). Il existe une relation entrela taille des exploitations et la productivité agri-cole : ainsi, la productivité totale des facteurs desexploitations rizicoles de moins de 0,25 hectareest 2,5 fois plus faible que celle des exploitationsde plus de 2 hectares (Cour, 2001).

3.3. Un accès différencié aux activitésextra-agricolesPour les ménages, la diversification vers des

activités non agricoles permet de compléter lesfaibles revenus dus à la taille réduite desexploitations.

Ces dernières années, les activités non agri-coles ont crû de 9 à 10 % par an. En milieu rural,11 % des ménages ont une activité exclusive-ment non agricole et plus d’un quart affichent unedouble activité. D’après des enquêtes récentes,les activités les plus fréquentes sont : l’artisanat,la transformation alimentaire et le commerce, cesdeux dernières bénéficiant de la croissance laplus rapide. Cependant la contribution des acti-vités non agricoles au revenu des ménagesruraux reste limitée – 21 % en moyenne entre1993 et 1998 – et elle augmente moins rapide-ment que celle des activités agricoles.

La diversification des activités va de pair avecune baisse de la pauvreté des régions.

Source : Banque mondiale, 1999, calculé à partir de VLSS 92-93 et VLSS 97-98.

Tableau 20. Les différentes sources de revenu des ménages ruraux vietnamiens, 1993-1998

AgricultureActivités extra-agricolesSalairesAutresTotal

1993

2 867 1 443 1 687 1 710 7 707

1998

4 606 1 884 1 685 1 663 9 838

60,6 30,5 - 0,1 - 2,8 27,6

1993

37,2 18,7 21,9 22,2 100

1998

46,8 19,2 17,1 16,9 100

Revenu moyen des ménages(1 000 dongs, prix 1998)

Croissancesur 5 ans

Part dans le revenudes ménages (%)

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

64

Source : VLSS 97-98.

Tableau 21. Emploi par branche d’activité, pauvreté et rendement de riz pour les actifs de 15 à 65 ans, 1998

Régions

Montagnes du NordDelta du fleuve RougeCentre NordCentre SudHauts plateaux du CentreNord-Est du SudDelta du MékongPopulation totale

Agriculture68,443,058,236,277,915,943,868,1

Commerce et services20,041,826,343,018,657,244,119,6

Autres 11,615,215,420,83,5

27,012,212,2

58,628,748,135,252,47,6

36,937,4

32,951,334,237,026,328,840,739,6

Distribution de la main-d’œuvre dans les différentes branches d’activités(%)

Taux de pauvreté de lapopulation (%)

Rendement du riz(q/ha)

4. Des relations fluctuantes avec lesautres secteurs

4.1. Une contribution variable de l’agriculture au PIBAu cours de la période des grandes réformes

économiques, le PIB national a connu des évolu-

tions variables avec une contribution fluctuante duPIB agricole.

Entre 1988 et 1992, la croissance agricole, bienqu’irrégulière, a nettement contribué à la crois-sance du PIB national, l'industrie et les servicesétant alors encore faiblement développés.

De 1993 à 1998, le Vietnam connaît un fort tauxde croissance du PIB, 8,9 % par an, le classantau quatrième rang mondial de taux de croissancedu PIB (Haughton et al., 2001). Le secteur indus-triel se développe, diminuant la part de l’agri-culture, d’autant que l'agriculture pâtit de chutesde prix de plus en plus importantes.

En 1998, la crise asiatique freine fortement lacroissance de l’industrie et des services danstous les pays de l'Asie de l'Est. Au Vietnam, lacroissance agricole permet de maintenir la crois-sance du PIB national. Les années suivantessont marquées par une baisse du prix du riz surles marchés internationaux et intérieurs, qui serépercute sur la contribution du secteur agricoleau PIB national.

Si le secteur agricole voit sa part baisser dansle PIB national, l'agriculture contribue toujourspour 70 % au PIB rural. Il est probable que lemanque d'institutions nécessaires au fonction-nement du marché ait limité le développementd'entreprises rurales privées, comme celui dusecteur agricole. Nous avons vu plus haut que lamain-d’œuvre rurale est sous-employée àhauteur de 25 % du temps de travail, mais elle nepeut se déployer dans le secteur industriel, inten-sif en capital et peu en travail. Le secteur agro-

Figure 36. La structure du PIB national par secteur

1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Agriculture

Industrie

Services

Source : GSO, 2001.

Figure 35. Taux de croissance du PIB général et du PIB agricole

86

12

20009694929088

10

-2

0

2

4

6

8

98

PIB

PIB agricole

% p

ar a

n

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Les changements de la production alimentaire

65

alimentaire représentait 6 % du PIB en 1996, soitbeaucoup moins que la production primaire(Nielsen, 1996). Pour mémoire, la contribution dusecteur agroalimentaire au PIB français adépassé celle du secteur agricole à la fin desannées 1980. Pourtant, le rapport entre produc-tivité non agricole et agricole est passé de 4,4 en1986 à 7,3 en 1998 au Vietnam (Cour, 2001).

L’agriculture vietnamienne crée peu derevenus, comparée aux services et à l’industrie,mais beaucoup d’emplois en milieu rural (voirpartie sur la main-d’œuvre). L’Etat doit donc gérersimultanément l’augmentation de la productivitéagricole et le soutien à la création d’emplois nonagricoles en milieu rural, sur le modèle de Taiwanou de la Corée du Sud.

Enfin, la comparaison du taux de croissance duPIB agricole et de celui des exportations agricolesmontre que, avant 1994, le PIB agricole évoluaitdans le même sens que les exportations agri-coles. Depuis, la croissance agricole semblemoins liée à celle des exportations, ce quiconfirme le rôle croissant du marché intérieur.

4.2. L’évolution de la part del’agriculture dans le PIB des régionsLes changements de structure économique de

ces dernières années ont différemment affectéles régions. Si les régions les plus agricoles sontles Hauts plateaux du Centre, le delta du Mékonget le Nord-Ouest, celles qui ont connu la crois-sance agricole la plus rapide sont les Hautsplateaux du Centre, le Nord-Est du Sud, le Nord-

Est et le Nord-Ouest. Les régions dont la contri-bution agricole au PIB diminue le plus rapidementsont le Nord-Est, suivies du delta du fleuveRouge.

Figure 37. La structure du PIB rural du Vietnam par secteur

1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998

0%

20%

40%

60%

80%

100%

Agriculture

Industrie

Services

Figure 38. Taux de croissance du PIB agricoleet des exportations agricoles (% annuel)

-2

-1

0

1

2

3

4

5

6

7

8

1986 1988 1990 1994 1996 20001992

80.0

70.0

60.0

50.0

40.0

30.0

20.0

10.0

0.0

-10.0

PIB agricole Exportations agricoles

1998

Source : GSO, 2001.

Source : GSO, 2001.

Tableau 22. Changements de structures économiques dans les différentes régions,1996-2000 (%)

Zones agro-écologiquesEnsemble du paysDelta du fleuve Rouge Nord-EstNord-Ouest Centre Nord Centre SudHauts plateaux du CentreNord-Est du SudDelta du Mékong

Part de l’agriculturedans le PIB

23,9520,3532,7245,0233,2428,1159,25

8,1147,23

Part de l’industriedans le PIB

35,4432,0131,0117,3924,2829,6114,0149,7020,60

Diminutionde la part agricole

- 1,98- 2,69- 2,76- 1,68- 2,06- 1,992,27

- 1,09- 2,16

Croissancede la part industrielle

3,112,793,734,243,524,01

- 1,422,834,02

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Figure 39. Evolution du prix moyen mensuel du paddy et de l’uréeà Nam Sach, Hai Duong (prix constant de 12/1994)

Sep-9

5

Sep-9

6

Sep-9

7

Sep-9

8

Sep-9

9

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0

Jun-

95

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00

Mar

-95

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Mar

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4

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6

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6

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7

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8

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9

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

0

1 000

don

gs/k

g

paddy

urée

Source : Dao The Anh, 2003, d’après GSO, 2001.

4.3. Amélioration des termes de l’échange ? Les données sur les termes de l’échange entre

l’agriculture et les autres secteurs de l’économiesont contradictoires. Haughton et al., (2001) affir-ment, sur la base des VLSS, que les termes del’échange se sont fortement améliorés entre 1993et 1998, ce qui expliquerait la baisse de la

pauvreté : le prix du riz se serait accru de 62 %,alors que celui des produits non alimentairesaurait augmenté de 23 %. Cependant, le suivi desprix du riz dans une commune du delta du fleuveRouge montre que les prix constants du riz dimi-nuent, contrairement à ceux des produits manu-facturés, comme l’urée par exemple.

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Les changements de la production alimentaire

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Conclusion : surmonter les faiblesses poursatisfaire la demande intérieure

La production agricole a donc su répondre à lacroissance de la demande en quantité pour lesprincipaux produits alimentaires (si l’on excepte lemaïs qui fait l’objet d’importations croissantes).

Ce bilan quantitatif masque des problèmesd’ajustement entre l’offre et la demande. D’unepart, la production ne parvient pas toujours àapprovisionner régulièrement le marché tout aulong de l’année. D’autre part, elle ne répond pasbien à la demande du marché en qualité (voirpartie suivante). Enfin, le processus de diversifi-cation reste encore lent : le riz occupe plus de60 % des surfaces cultivées en 2001 (il en occu-pait 70 % en 1991).

Le bilan de la croissance agricole en termes decréation de richesses est également mitigé. Lacroissance de l’agriculture se traduit par une fortecontribution à l’emploi et aux revenus en zonerurale. Cependant, l’impact sur l’économie dupays est moins important que celui de l’industrie

et des services. En zone rurale, il est important defavoriser les activités extra-agricoles, comme lecommerce et la transformation des produitsalimentaires, ou l’artisanat, que les ménagespaysans exercent déjà et qui leur procurent desliquidités pouvant être réinvesties dans le secteuragricole.

Enfin, la croissance agricole se traduit par desécarts croissants de revenus, dus en grandepartie à un accès différencié aux facteurs deproduction et aux services de commerce, vulga-risation et transport. Cette situation sembledavantage marquée dans le delta du fleuveRouge que dans le delta du Mékong, où les ser-vices privés sont mieux organisés. L’Etat a un rôleclé à jouer pour rétablir l’équilibre dans l’accès auxconditions de production et de mise en marché.

Le changement structurel de l’agriculture passepar une approche différenciée pour chaquerégion agro-écologique. En effet, chacune setrouve à une étape différente de développementet possède des avantages spécifiques pourproduire certaines denrées.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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La réponse du marché et des filièresPaule Moustier (CIRAD), Nguyen Thi Tan Loc (RIFAV), Jean-Joseph Cadilhon (Imperial College at Wye - CIRAD),Vu Trong Binh (VASI)

Les réformes économiques ont facilité l’accès au marché pour les producteurs et lesconsommateurs, conduisant à une diminution de l’autoconsommation. La part desachats dans l’approvisionnement dépasse à présent 65 % en zone rurale et 95 % enzone urbaine. Les filières commerciales jouent un rôle essentiel pour transmettre lesbesoins de consommation aux unités de production. Comment ces filières sont-ellesorganisées – flux dans l’espace, acteurs, type de transport ? Leur efficacité estévaluée en termes de concurrence, d’échelle des transactions, de formation des prixet des revenus, ainsi que de qualité, en s’appuyant sur trois filières destinées aumarché intérieur : le riz, les légumes, les porcs. Les filières sont caractérisées par leur caractère atomisé, concurrentiel et par descircuits assez courts, sauf dans le cas des filières de légumes entre le nord et le sud,où des grossistes contrôlent l’information sur l’offre et la demande. La contractualisa-tion est rare. Les filières ont des marges commerciales faibles (15 % pour le riz, 20 %pour le porc, 45-50 % pour les légumes), signe d’efficacité, mais elles ne parviennentpas à contrôler les nombreux risques qui pèsent sur le marché : tricherie sur la qualité ;déficits ou excédents de production ; non-paiement en cas de vente à crédit. Parailleurs, des économies d’échelle peuvent être gagnées en regroupant les productionset en améliorant le transport.Le Vietnam connaît actuellement une certaine centralisation de ses transactions, avecla planification des marchés de gros et de détail – qui va réduire voire supprimernombre de points de vente – et le développement de la grande distribution (le nombrede supermarchés a doublé entre 1997 et 2001). Ces évolutions auront desconséquences négatives sur l’emploi des populations peu qualifiées et serontdéfavorables aux producteurs, commerçants et consommateurs démunis de moyensde transport motorisés ; des mesures compensatoires pourraient les accompagner.Enfin, ces changements renforceront la nécessité pour les producteurs de seregrouper ; ils pourront ainsi signaler et contrôler la qualité de leurs produits etaugmenter leur pouvoir de négociation des prix face aux acheteurs.

Si la production a pu répondre à l’augmentationde la demande intérieure en quantité (quatrièmepartie), la réponse est encore limitée en ce quiconcerne la qualité et la régularité de l’approvi-sionnement, ainsi que la création et la distributionde revenus. Or, la connexion entre production etconsommation est déterminée par l’organisationdu marché, c’est-à-dire l’organisation des tran-sactions entre les acteurs de la production, dumarché et de la consommation.

Producteurs et consommateurs recourent deplus en plus au marché. Comment le marchétransmet-il les évolutions de la demande et del’offre en quantité et en qualité ? La taille et l’or-ganisation du secteur commercial (des transac-tions) permettent-elles la circulation des infor-mations entre producteurs et consommateurs aubénéfice de tous les acteurs ? Comment cela setraduit-il en termes de répartition des revenusdans les filières ? Quel est l’impact sur le secteur

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La réponse du marché et des filières

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alimentaire de deux évolutions récentes de ladistribution alimentaire : le développement de lagrande distribution et la planification de nouveauxmarchés ?

1. Un recours croissant au marché

La réforme économique a facilité l’accès aumarché pour les producteurs et les consomma-teurs, en zone rurale comme en zone urbaine,provoquant une diminution de l’autoconsomma-tion. En zone rurale, la part des achats est passéede 57 % de la consommation alimentaire en1992-1993 à 64 % en 1997-1998 ; elle estestimée à 71 % en 2002. En zone urbaine, cetaux est de 95 % depuis 19921. Le rapport de lapopulation non agricole à la population agricoleest passé de 0,39 en 1986 à 0,47 en 1998 etdevrait atteindre 0,96 en 2020 (Cour, 2001). Acette date, un agriculteur devra donc nourrir unagriculteur plus un non-agriculteur2.

Comme l’écrit C. Gironde (2001), « si parlerd’économie de marché est discutable, enrevanche, le rôle du marché est indéniable, dansle sens d’une demande solvable et d’un systèmede prix qui influencent les choix des systèmeséconomiques ». La croissance des productionscommercialisées est due à l’augmentation desclients potentiels et à la monétarisation des zonesrurales. En effet, les populations rurales doiventfaire face à des dépenses monétaires en aug-mentation – pour le foncier avec le système desadjudications, pour payer taxes et servicespublics payants dans les communes. « Lemarché désigne ainsi un environnementéconomique et social favorable à la transitiond’une économie guidée par l’offre, où l’on trou-vait difficilement à acheter, à une économieguidée par la demande, où l’on se démène pourvendre. »

Le recours au marché diffère selon les régionset les produits. Ce sont les régions de montagne,les plus difficiles d’accès, qui commercialisent lemoins leurs productions. Ainsi, dans les Hauts

plateaux du Centre, la part des fruits et légumescommercialisée représente moins de 50 %,tandis qu’elle dépasse 90 % dans le delta duMékong. Les disparités sont fortes entre lesproduits à l’échelle du pays : la production depommes de terre n’est commercialisée qu’àhauteur de 15 %, alors que ce pourcentage atteint80 % pour la tomate et 95 % pour le litchi et lelongane (IFPRI, 2002).

2. Des filières globalement efficaces,mais trop segmentées

Comment la distribution des produits alimen-taires est-elle organisée entre producteurs etconsommateurs : intermédiaires, types de tran-saction, lieux d’échange ? Comment les stra-tégies des intermédiaires et leur organisationinfluencent-elles la réponse de la productionlocale à la demande en quantité, qualité et coût ?La réponse à ces questions s’appuie sur le cas detrois filières : les légumes, le riz et le porc.

2.1. Les filières légumes pour le marché domestiqueDe nombreux chercheurs et décideurs ont une

appréciation plutôt négative du fonctionnementdes marchés des légumes au Vietnam. « Leschaînes de vente utilisées par les producteurssont inorganisées : les marchés de gros et dedétail ont émergé spontanément et ne sont pasorganisés » (Ngo Van Nam, 2002). « Lesmarchés sont sous-développés et spontanés ».« Le sys-tème de commercialisation des légumesà Hanoi a des caractéristiques spontanées, lesintermé-diaires sont nouveaux et jouent un faiblerôle dans la circulation des produits » (Bui Thi Gia,2002). Toutefois, ces affirmations ne s’appuientpas sur une appréciation rigoureuse de la coordi-nation des transactions, notamment de la circu-lation de l’information et de la prise de décision.

Quelles sont les caractéristiques des filièresdes légumes à destination des villes : fluxgéographiques (organisation spatiale), relations

1 Muriel Figuié, Nicolas Bricas, infra (L’évolution de la consommation alimentaire au Vietnam ; à partir de données GSO, VietnamLiving Standard Survey 1992-93 et 1997-98).2 Les calculs de Jean-Marie Cour résultent d’un modèle démo-économique utilisant comme variables exogènes le peuplement,les flux d’importation et d’exportation ; les chiffres sur la population agricole et non agricole résultent d’hypothèses sur la partde la population des agglomérations de différentes tailles dans les secteurs d’activité. Au moment de la rédaction de cedocument, Jean-Marie Cour préparait une révision des différents paramètres du modèle.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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entre acteurs (organisation fonctionnelle et insti-tutionnelle) ? Comment cette organisationpermet-elle l’ajustement entre besoins deconsommation et potentiels de production ?Quels sont ses avantages en termes de coût etses limites en termes d’échelle et de circulation del’information ?

L’organisation spatialeLa réponse de la production à la croissance du

marché vient logiquement des zones les plusproches, surtout pour les légumes les plus péris-sables. En effet, ces zones bénéficient de coûtsde transport et d’accès à l’information plus faibles.Le marché est également approvisionné par desbassins de production éloignés, qui bénéficient deconditions pédoclimatiques favorables (voircarte). C’est le cas de la région de Dalat pour l’ap-provisionnement de Hanoi et Ho Chi Minh-ville oude la région de Son La et de zones de productionchinoises pour l’approvisionnement de Hanoi.L’importance relative des zones de production– proches (périurbaines, à moins de 30 kilo-mètres du centre), plus éloignées (rurales) etétrangères – est variable selon la nature duproduit (degré de périssabilité, adaptation auxconditions tropicales) et les périodes de l’année(la production de légumes tempérés est plus diffi-cile au nord du Vietnam entre juillet et septembre).Les principales régions de production de légumessont par ordre décroissant le delta du fleuveRouge, le delta du Mékong, la province de LamDong (Dalat).

Ainsi, à Hanoi, plus des trois quarts deslégumes-feuilles, comme le liseron d’eau et lalaitue, sont produits à moins de 20 kilomètres ducentre urbain et sont disponibles toute l’année3.Les légumes tempérés (tomate, chou, carotte)proviennent des zones périurbaines lorsque lesconditions climatiques sont favorables (novembreà mars) et en dehors de cette période d’hiver, parexemple en août, de Chine (80 % de la tomate),de Dalat (15 % de la tomate) et de Son La (5 %de la tomate).

Les enquêtes dans les marchés montrent qu’àchaque produit peut être rattaché un district deproduction dans les zones périurbaines : c’est lecas des districts de Thuong Tin et Hoai Duc dans

la province de Ha Tay pour la tomate d’hiver(représentant à eux deux le quart des flux) et deMe Linh dans la province de Vinh Phuc pour latomate en juin ; Gia Lam dans la province de HaNoi pour le chou en hiver (45 % des flux) ; GiaLam et Tu Liem pour les légumes-feuilles.

Pour les légumes tempérés, les districts deproduction de légumes dans le delta du fleuveRouge approvisionnent la ville de Hanoi etd’autres villes, comme Vinh dans le centre, voireHo Chi Minh-ville. Dans la région du casier de BacHung Hai, plus de 70 % de la production delégumes tempérés seraient destinés à desmarchés lointains du centre et du sud, qui nebénéficient pas de conditions de productionfavorables en hiver, le reste étant commercialiséà Hanoi (Bui Thi Thai, 2000).

Depuis 1994 et les premières réformes dumarché, les communes ont affiné leur position-nement commercial, liant leurs avantages – typede légume et qualité, selon les caractéristiquespédoclimatiques et l’expérience de la région – aumarché destinataire visé.

A Ho Chi Minh-ville, l’approvisionnement estassuré par la région de Dalat, sa zone périurbaineet le delta du Mékong. La province de Lam Dong(Dalat) approvisionnait à plus de 85 % lescommerçants interrogés sur les marchés de nuitde Ho Chi Minh-ville, pour la tomate et lesdifférents types de laitue (février 2003). Quant àla zone périurbaine, elle fournit l’essentiel deslégumes très périssables comme les herbesaromatiques.

L’organisation des acteurs

Des circuits courts et fractionnés pourl’agriculture périurbaine

L’approvisionnement des détaillants de Hanoiet de Ho Chi Minh-ville s’effectue principalementsur les marchés de gros de nuit, mis à part le casdes magasins et supermarchés présenté par lasuite. Pour les produits de l’agriculture périur-baine (légumes-feuilles et légumes tempérésl’hiver), les filières sont généralement trèscourtes, sans intermédiaire entre détaillants etproducteurs. Certains producteurs sont aussicollecteurs pour d’autres producteurs : à Hanoi,

3 Les informations sur les flux de légumes à destination de Hanoi proviennent du projet AVRDC-CIRAD sur l’agriculturepériurbaine, Hoang Bang An, Isabelle Vagneron et al., 2003 ; et pour Ho Chi Minh-ville, des enquêtes menées par le CIRAD;Imperial College at Wye, et l’Université agricole et forestière de Ho Chi Minh-ville.

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La réponse du marché et des filières

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Hanoi

Chine

Son La

Dalat

Ho Chi Minh ville

Cambodge

en ätä(mai µ septembre)

en ätä (mai µ septembre)

Ceinture verte de Hanoi(< 30 km du centre) - lägumes-feuilles - tous lägumes d'hivergumes d'hiver

Ceinture vertede Ho Chi Minh Ville - lägumes - feuilles

tomate

chou

hiver

Les principaux flux de légumes au Vietnam

Source : Données d’enquêtes MALICA, 2002.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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plus de 40 % des grossistes approvisionnant lesdétaillants sur les marchés de nuit sont desproducteurs ; ce pourcentage peut atteindre 65 %en mars. Les quantités quotidiennes apportées,comprises entre 100 et 200 kilos, sont trans-portées en deux-roues pour plus de 80 % desvendeurs. Cet émiettement des transactions nefacilite ni les économies d’échelle sur les coûts decollecte, ni la circulation de l’information entreacheteurs et vendeurs.

Des réseaux de grossistes pour les filières nord-sud

Dans le cas des filières longues – à partir deDalat et de la Chine pour Hanoi, de Dalat ou dudelta du fleuve Rouge pour Ho Chi Minh-ville etles villes du centre –, il existe un maillon intermé-diaire : les grossistes spécialisés. En saisonchaude, 99 % des tomates vendues aux détail-lantes sur les marchés de gros de Hanoi sontapportées par des collecteurs ou des grossistes,en camion dans 15 % des cas. Il en va de mêmepour le chou pommé, dont la commercialisationest assurée à 70 % par les producteurs en saisonfroide et à 100 % par les grossistes en saisonchaude.

Les grossistes collecteurs et distributeurs quicommercialisent des légumes entre le nord et lesud du pays peuvent commercialiser de 50 à 100tonnes par jour (Bui Thi Thai, 2000).

Des filières intégrées pour les produits de qualitéLes supermarchés qui souhaitent s’approvi-

sionner en produits de qualité spécifiée font appelà des filières plus intégrées que celles qui appro-

visionnent les détaillantes sur étal. Ainsi, à Hanoi,supermarchés, magasins, écoles et restaurantssont approvisionnés directement par un petitnombre de coopératives (trois en 2003, représen-tant en tout une trentaine d’hectares), aveclesquelles ils entretiennent des relations de fidéli-sation. Ces coopératives bénéficient de l’appuitechnique des programmes « légumes propres »des services de l’agriculture de la province deHanoi (pratiques d’agriculture raisonnée) et d’uncertificat délivré par le département des scienceset technologies.

La filière des légumes biologiques s’estdéveloppée à l’initiative d’une organisation nongouvernementale (CIDSE) et concerne actuelle-ment une trentaine de familles dans la provincede Hanoi (Tu Liem) et de Ha Tay (Chung My).L’ONG a mis en place une compagnie (HanoiOrganics), qui conclut des contrats avec lesproducteurs d’une durée de trois mois à des prixet quantités fixés ; elle leur fournit engraisorganiques et formation technique. Les produc-teurs ayant des difficultés à trouver desdébouchés, l’ONG s’est aussi impliquée dans lacommercialisation au détail, en ouvrant unmagasin et en livrant aux particuliers (compagnieHanoi Organics). La filière de légumes de Dalatdispose d’une organisation similaire. Elle estpilotée par la société Golden Garden Company,liée par contrat à l’association des fermiers delégumes propres, qui comporte 35 exploitants sur4 hectares (Dini, 2002).

A Ho Chi Minh-ville, une entreprise de libre-service de gros (cash and carry) a passé descontrats d’approvisionnement en légumes dits dequalité avec des producteurs périurbains par l’in-termédiaire d’un réseau de trente-cinq collecteurs(Cadilhon, Fearne, Poole et Moustier, 2003).

De faibles marges commercialesHanoi étant proche des zones périurbaines, les

filières sont courtes, ce qui favorise des prix auconsommateur peu élevés. Les travaux de l’uni-versité agricole de Hanoi (1998) évaluent lamarge commerciale à 30 % pour les légumes-feuilles, à 35 % pour le chou et à 75 % pour latomate (Bui Thi Gia, 1999). Les études de cas duCIRAD-VASI (2002) identifient des marges de 45-50 % pour le chou. Ces données doivent êtreprises avec prudence étant donné les fortes

Filière courte de légumes périurbains (légumes-feuilles, légumes tempérés d’hiver)

Paysan (Collecteur) Détaillant Consommateur

Filière longue légumes tempérés de Dalat, Chine et filières nord-sud

Paysan Grossiste collecteur Grossiste distributeur

Détaillant Consommateur

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La réponse du marché et des filières

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variations de prix au cours de l’année. Dans lesflux de longue distance, les revenus desgrossistes sont plus de dix fois supérieurs à ceuxdes producteurs, détaillants ou collecteurs, maisles risques de faillite sont également beaucoupplus élevés, du fait de l’irrégularité de la produc-tion et du manque de structures d’arbitrage encas de conflit.

Des études menées auprès d’un petit échan-tillon d’acteurs des filières de légumes « propres »suggèrent que les revenus sont plus élevés : ceuxdes producteurs seraient de 33 000 dongs par jour(moyenne sur 9 producteurs), alors qu’ils sontcompris entre 18 000 et 29 000 dongs dans lesfilières de légumes ordinaires (pour 25 produc-teurs). Dans tous les cas, les revenus descollecteurs et des détaillants (34 au total) sont plusélevés que ceux des producteurs (de 30 à 200 %).La différence de prix entre légumes de qualitésignalée et légumes ordinaires est de 20 à 100 %.Les surcoûts de production sont de l’ordre de40 %, du fait des investissements requis et derendements plus faibles (Ho Thanh Son, Bui ThiThai, Paule Moustier, 2003).

Un approvisionnement irrégulierPour les légumes tempérés, comme la tomate

et le chou, la production locale ne parvient pas àapprovisionner la région de Hanoi pendant quatremois, de juillet à octobre. Les légumes sont alorsimportés de Chine. Pendant cette période, les prixaugmentent fortement, du fait de la pénurie de laproduction locale et des coûts de transport desproduits importés. Ainsi, pour la tomate, le rapportentre le prix maximal et le prix minimal corrigé desvaleurs extrêmes (coefficient de variation d’indicede saisonnalité) était de 2,5 entre 1996 et 2001(Hoang Bang An, Vagneron et al., 2003).

Les importations répondent essentiellement àla baisse de la production locale due à l’excèsd’eau et d’humidité, et non pas à une concurrenceirréversible des pays voisins, comme l’affirmentavec fatalisme certains producteurs locaux.Même s’ils apprécient l’apparence des produitschinois, les commerçants préfèrent les produitslocaux pour leur fraîcheur et leur qualité sanitaire.Les producteurs des zones périurbaines etrurales (Son La, Dalat) pourraient donc gagnerdes parts de marché en augmentant leur produc-tion de contre-saison pendant les périodes de

pénurie, en améliorant l’apparence et en promou-vant la qualité sanitaire de leurs produits. Celasuppose une évaluation rigoureuse des résiduschimiques dans les produits locaux et importés.

Une qualité difficile à identifierLes légumes sont les produits alimentaires dont

les consommateurs se préoccupent le plus pourleur santé, essentiellement à cause des pesti-cides. Ils sont donc très attachés à leur qualitésanitaire, ainsi qu’à leur apparence – fraîcheur,homogénéité – (Moustier, Bridier, Nguyen Thi TanLoc, 2002 ; Figuié, 2003). Des travaux confirmentque des producteurs de la zone périurbaine deHanoi utilisent des quantités excessives de pesti-cides et d’engrais, qu’ils ne savent pas choisir lesproduits adéquats, ni les appliquer (Tran KhacThi, 1999 ; de Bon, 2001).

Toutefois, les initiatives de coopératives deproducteurs en matière de production biologiqueou raisonnée se heurtent à des problèmes dedébouchés, comme le montrent les entretiensavec une cinquantaine de producteurs etcommerçants de la région de Hanoi. Les prixpayés aux producteurs sont certes supérieurs de40 % (pour la production raisonnée) à 100 %(pour les légumes biologiques) à celui deslégumes ordinaires. Mais les produits « propres »ou « biologiques » n’occupent qu’une faible partdu marché : moins de 5 % de la consommationtotale, quelques fournisseurs (principalement5 coopératives) et une trentaine de points devente (22 magasins et étals de marché, 13 super-marchés) (Moustier, Nguyen Thi Tan Loc, Figuié,2002). Ce faible développement s’explique parles prix plus élevés et la méfiance des consom-mateurs. En effet, il n’existe ni politique decontrôle rigoureuse, ni stratégie de communica-tion claire : l’origine des produits et les modes deproduction ne sont pas indiqués par les produc-teurs et par les commerçants (sauf pour la ventedirecte au détail par les producteurs) ; et lesmédias confondent légumes de productionraisonnée et légumes biologiques.

Des modes de coordination efficaces ?

Circuits courts et circuits longsLes caractéristiques des circuits courts – faibles

quantités, transport en deux-roues et intégration

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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fréquente de la production, de la collecte voire dela vente au détail – ne favorisent pas la collectedes produits à grande échelle, ni la circulation desinformations sur les besoins du marché et lepotentiel de production.

En revanche, dans les circuits longs, desréseaux relient, de longue date, les grossistes-récepteurs, basés dans les villes destinataires,aux grossistes distributeurs, avec des échangesréguliers d’information, parfois par téléphone (BuiThi Thai, 2000).

L’économie institutionnelle permet d’identifierles formes d’intégration verticale et les relationspersonnalisées entre opérateurs et de les inter-préter comme des réponses à des coûts de tran-saction élevés (Moustier, Vagneron, Bui Thi Thai,2003).

Dans les circuits courts, l’intégration verticalelimite la taille des transactions et implique que leproducteur vende la nuit sur le marché au lieu dese consacrer à son exploitation (mais aboutit àdes prix peu élevés). Dans les réseaux degrossistes, en situation d’oligopole, le mode d’or-ganisation nuit à la répartition des revenus dansles filières, les grossistes ayant des revenus biensupérieurs à ceux des producteurs du fait de leurmaîtrise de l’information sur les débouchésfinaux ; mais cette organisation facilite les tran-sactions à plus grande échelle.

Forces et faiblesses des formes contractuellesLes relations entre acteurs sont davantage inté-

grées dans les filières de qualité que dans lesfilières de légumes ordinaires, l’intégration répon-dant à une stratégie pour minimiser l’incertitudesur la qualité sanitaire. Les producteurs entre-tiennent des relations de fidélisation avec lesdistributeurs : commandes régulières, livraisondans les magasins ; et dans le cas de deuxcoopératives, vente directe au détail par lesproducteurs sur des stands de marché. Parailleurs, deux entreprises, Hanoi Organics etGolden Garden Company à Dalat, spécifient,dans les contrats signés, les quantités, le prix, lesprotocoles de production et de contrôle. Citonsaussi le cas du libre-service de gros Metro à HoChi Minh-ville qui a passé des contrats avec desproducteurs périurbains.

Les contrats entre producteurs et commerçantsrestent peu nombreux. En effet, l’instabilité desquantités et des prix conduit les producteurs àadopter des comportements opportunistes :quand les prix montent, ils préfèrent changerd’acheteurs et, en période de surproduction, ilssont réticents à vendre des quantités fixées. Entémoigne la société Hanoi Organics, qui a desdifficultés à contractualiser avec les producteurs4.Par ailleurs, 10 % seulement des commerçantsinterrogés dans le cadre de l’enquête de l’IFPRIont déclaré avoir des contrats avec des produc-teurs (IFPRI, 2002) ; 85 % qu’ils ne s’engageaientpas dans des contrats en raison de l’instabilitédes prix. Enfin, 70 % ont évoqué des différendsavec leurs fournisseurs au sujet de la qualité desproduits.

Traçabilité et contrôle de qualité La traçabilité et le contrôle de qualité sont

devenus une préoccupation majeure desconsommateurs. Pour y répondre, les produc-teurs doivent s’organiser. Ils pourront ainsiaméliorer la signalisation des produits (embal-lage, étiquetage, information sur les pratiques deproduction et de contrôle) et mettre en place uncontrôle de qualité crédible à leur niveau.

Actuellement, les contrôles sont assurés parplusieurs administrations (département dessciences et de la technologie, ministère de l’agri-culture, ministère de la santé) et sont peu répan-dus : seulement 20 % des vendeurs de légumesinterrogés par les enquêteurs de l’IFPRI (IFPRI,2002) avaient reçu la visite d’un contrôleur dequalité. Il est désormais nécessaire que lesystème de contrôle soit validé par des orga-nismes publics d’accréditation.

Manque d’associations commercialesLes organisations de producteurs sont aussi

une solution pour grouper les produits, avec lavente déléguée à des commerçants membres dugroupe de producteurs, comme le montrent lessuccès obtenus par des coopératives de légumespropres à Hanoi. Dans l’étude de l’IFPRI, aucundes quatre-vingt-cinq commerçants de fruits etlégumes pour le marché intérieur n’a déclaré êtremembre d’une association, tandis que le tiers des

4 Entretiens avec deux producteurs de Tu Liem, contractants de Hanoi Organics et avec les responsables de la compagnie.

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La réponse du marché et des filières

75

exportateurs a déclaré participer à une associa-tion commerciale. Quarante pour cent descommerçants considèrent que les associationssont utiles pour coordonner les actes d’achatet de vente, pour s’assurer contre les fluctuationsdu marché et pour favoriser les contacts commer-ciaux.

RecommandationsDans le cas des légumes, les coûts de tran-

saction sont élevés en raison de l’instabilité del’offre en quantité et en qualité. Leur diminutionpasse par un accroissement et une plus granderégularité de l’offre. Cela suppose une concen-tration foncière, des modes de transport à plusgrande échelle, la fourniture d’intrants adaptés etd’appui technique, l’information des producteurssur la demande et la promotion d’associations deproducteurs pour regrouper les ventes.

En ce qui concerne les problèmes de qualité,producteurs et commerçants doivent concevoirune politique de communication plus précise seréférant à des pratiques de production et de ventebien spécifiées, vérifiables (en termes d’origine etde pratiques) pour les consommateurs commepour des organismes de contrôle.

2.2. Les filières de riz du delta du fleuve Rouge Dao The Anh (VASI) et Franck Jésus (CIRAD) 5

L’organisation spatiale Les observations conduites par l’équipe VASI-

CIRAD ont montré deux cas différents de ventede riz. Quelques provinces, comme Hoai Duc,produisent et vendent de petites quantités pour laconsommation de la province. D'autres zonesproduisent et vendent de plus grandes quantités,destinées, de 60 % à 90 %, à d’autres provinces(grands marchés y compris ceux des villes).

L’organisation des acteursLes producteurs du delta du fleuve Rouge

vendent le riz qu’ils n’ont ni autoconsommé niutilisé pour l’alimentation des animaux. Selon lesestimations, 50 à 60 % des agriculteurs vendent

du riz. Ils vendent 35 à 40 % de leur productiontotale, en utilisent 15 à 25 % pour l’alimentation duporc et 25 à 35 % pour la consommationhumaine.

Au sein des provinces, la vente de riz fait l’objetde filières courtes. Le paddy est vendu auxcollecteurs locaux (hang xao), qui se chargent dele décortiquer (en louant les services de petitsdécortiqueurs privés) et de le vendre directementaux consommateurs locaux. Dans les échangesinter-provinces, les mêmes collecteurs vendentaux grossistes locaux ; les grossistes locaux àdes grossistes inter-provinces de plus grandetaille ; ces derniers aux détaillants. Les grossistesinter-provinces commercialisent de grandesquantités de riz venant de toutes les régions duVietnam.

Le riz-paddy est commercialisé par un réseaudense d’acteurs. En moyenne, un collecteurrassemble le paddy de quinze à trente ménageset un grossiste achète le riz de quinze à trentecollecteurs. Un tel réseau permet de regrouperles petites quantités vendues par un grandnombre de ménages. La plupart des collecteurset beaucoup de grossistes locaux sont aussiproducteurs. Le commerce du riz fournit ainsi desressources additionnelles aux ménages.

De faibles marges commerciales

Filière du riz ordinaireLa marge des commerçants de riz ordinaire ne

représente qu’une faible part du prix au produc-teur. Les consommateurs de Hanoi paient seule-ment 15 % de plus que le prix payé au producteur.

5 Résumé par Dao The Anh de la partie consacrée à la filière riz du rapport : Jésus F., Dao The Tuan, Le Thi Chau Dung, LeThi Nham, Dao Kim Mien, CIRAD (2000).

Filière locale courte de riz (intra-province)

Paysans Collecteurs Consommateurs locaux de riz

Filière locale longue de riz (inter-province)

Paysans Collecteurs Grossistes locaux

Grossistes inter-provinces Détaillants Consommateurs

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Les paysans obtiennent 87 % du prix de détail enville – en Indonésie, les prix de gros sont 40 %plus élevés que les prix aux producteurs(Erwidodo, Prajogo U. Hadi, 1999) et aux Etats-Unis, les paysans obtiennent seulement 8 % duprix de détail des céréales (U.S. Department ofAgriculture, 1998). Cette faible marge est possi-ble parce que les collecteurs locaux vendentaussi le son et que la concurrence est forte, lenombre de commerçants étant élevé.

Filière du riz parfuméLe riz parfumé est une variété de haute qualité

(Tam Xoan) que la plupart des consommateurspréfèrent au riz ordinaire. Le prix au producteurest 50 % plus élevé que celui du riz ordinaire. Lepaysan n’est pas intéressé pour autant à cultiverle riz parfumé, car les rendements sont inférieurset les coûts plus élevés. Le bénéfice est équiva-lent à celui obtenu pour le riz ordinaire (les deuxtiers du prix de vente). En revanche, collecteurs,grossistes et détaillants tirent un bénéfice plusélevé que pour le riz ordinaire. Les consomma-teurs urbains paient le riz parfumé 40 % de plusque le prix au producteur. Encore bassecomparée à d'autres pays, la marge est beau-coup plus élevée que celle sur le riz ordinaire. Ellepeut s’expliquer par une faible concurrence entreacheteurs de riz parfumé, l’offre étant encoreinsuffisante.

Par ailleurs, profitant du déséquilibre entre l’offreet la demande, les commerçants ont développéune filière de « faux riz parfumé » avec desvariétés de riz chinois qui ont une forme de grainidentique à celle du riz Tam Xoan et dont prix està peine plus élevé que celui du riz ordinaire. Aumoment de l’achat, les consommateurs ne sontpas capables de différencier le vrai riz parfumé dufaux. Ces pratiques illégales dissuadent lesproducteurs de cultiver du riz parfumé.

Instabilité des prix, des paiements et de laqualité

Le principal problème cité par les commerçantsde riz, d’autant plus préjudiciable que les margesmoyennes par kilo sont faibles, est l'instabilitédes prix et des quantités disponibles. Un stoc-kage approprié pourrait le résoudre. Autre pro-

blème cité, les retards de paiement en chaîne,des détaillants aux grossistes et de certainsconsommateurs qui achètent à crédit aux détail-lants.

Quant à la qualité physique du riz – propreté,couleur, pourcentage d’humidité et proportion deriz cassé –, elle est très hétérogène et implique untri, que grossistes et détaillants ont des difficultésà faire en raison des provenances variées.

Forces et faiblesses des modes decoordination

Si producteurs et consommateurs tirent avan-tage des faibles marges commerciales de la filièredu riz ordinaire, les producteurs gagneraient à ceque des différences de qualité physique soientvisibles et valorisées en termes de prix. Dans lafilière du riz parfumé, les producteurs de la régiondu Tam Xoan ont créé une organisation pour fairereconnaître leur label et ainsi mieux valoriser leurproduction en termes de prix. Ce type d’organi-sation pourrait être étendu à d’autres zones.

ConclusionLa filière du riz ordinaire est globalement effi-

cace sur le plan de la commercialisation Lesproducteurs de riz rencontrent plus de problèmespour la production que pour la mise en marché :excédents ou déficits en eau liés à la gestioncollective des infrastructures d’irrigation ; pesti-cides et semences souvent inadaptés. Lesaméliorations souhaitables pour la commerciali-sation concernent surtout la filière du riz parfumé.

2.3. La filière du porc au nord du VietnamVu Trong Binh (VASI) 6

Cette partie met l’accent sur les similarités et lesdifférences avec les filières légumes et riz.

La vente de porcs occupe une place variabledans les stratégies paysannes. Pour les deuxtiers des producteurs, qui ont trois porcs enmoyenne, la vente est une activité résiduelle,l’essentiel étant la fourniture de fumier etl’épargne. Pour le tiers restant, la vente de porcspeut représenter plus de la moitié des revenus.

6 Cette partie a été rédigée à partir de : Jesus F., Dao The Tuan, Le Thi Chau Dung, Le Thi Nham, Dao Kim Mien, 2000 et de :Vu Trong Binh (2002).

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La réponse du marché et des filières

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Alors que les riziculteurs mettent en avant desproblèmes de production (accès à l’eau, qualitédes pesticides et des semences), les producteursde porc, comme ceux de légumes, souffrent deproblèmes de commercialisation.

L’approvisionnement des consommateurs estassuré directement par les abatteurs ou par desdétaillants qui achètent aux abatteurs. Basés enzone rurale ou périurbaine, les abatteurs s’ap-provisionnent directement auprès des produc-teurs ou par l’intermédiaire de collecteurs. Lesmarges commerciales, faibles, se situent entrecelles des filières riz et des filières légumes : leprix de détail est seulement 20 % plus élevé quele prix payé au producteur, le producteur reçoit80 % du prix final – aux Etats-Unis, ce pourcen-tage est de 25 à 40 %.

La consommation de porc diffère à lacampagne et à la ville, les consommateursurbains préférant le porc maigre. Les difficultés deproduction du porc maigre sont nombreuses,techniques et structurelles. La race de porcexotique introduite récemment exige de nouvellespratiques d’approvisionnement en porcelets, d’ali-mentation et de soins, que producteurs et vulgari-sateurs ne maîtrisent pas. De plus, la taille réduitedes élevages (7 porcs à Namthanh dans laprovince de Hai Duong) diminue le pouvoir denégociation face aux collecteurs, et donc la valori-sation des efforts de qualité.

A Namthanh, des éleveurs ont testé avecsuccès des actions collectives afin de maîtriserl’approvisionnement en porcelet, passer desconventions avec les services vétérinaires etdévelopper des relations régulières avec lescollecteurs.

Comme pour les autres filières, l’augmentationdes revenus des producteurs passe par unedifférenciation plus nette des qualités (porcmaigre, porc gras). Or, actuellement, les prixd’achat au producteur ne sont pas sensiblementdifférents, alors que, pour le porc maigre, l’ali-mentation et le soin aux animaux sont pluscoûteux. La filière porc souffre aussi de l’instabi-lité des prix et des risques du crédit auxacheteurs.

La ration alimentaire, composée pour moitié demaïs, représente environ 65 % des coûts deproduction du porc . L’efficacité de la filière du porcdépend donc de l’efficacité de la filière du maïs ;

en effet le prix du maïs est élevé (115 dollars latonne au détail, alors que le prix du marché inter-national n’est que de 84 dollars la tonne) et insta-ble (Dao Duc Huan, Vu Trong Binh, Dao The Anh,Lecoq, 2003). Pour savoir comment le prix dumaïs vietnamien pourrait baisser, tout en préser-vant le rôle socio-économique que ce produit joueen zone de montagne, il faudrait identifier leslimites à l’augmentation de la production dans lesdifférentes régions de production (notammentSon La), et les problèmes de transport. Parailleurs, la production de maïs extensive en zonede montagne est peu durable (érosion, perte defertilité des sols). Une solution réside dans l’in-tensification raisonnée des systèmes de produc-tion à base de maïs dans ces zones, en recourantà des pratiques d’agroécologie.

2.4. Conclusions sur les trois filièresLe tableau page suivante résume les

tendances d’évolution des trois filières. Dans lestrois cas, la demande augmentera pour desproduits de qualité spécifique (riz parfumé,légumes propres, porc maigre) ; pour les produitsstandard, la demande restera importante pour lapopulation à faible niveau de vie.

Actuellement, les légumes restent des produitsbon marché alors que le porc constitue un alimentonéreux. La consommation de porc n’aug-mentera que si le prix au consommateur diminue,ce qui passe par une baisse du coût de l’alimen-tation et des soins.

Les producteurs de légumes verront leursrevenus augmenter s’ils se regroupent. Ils pour-ront ainsi bénéficier d’économies d’échelle pour laproduction, la mise en marché et le transport.

Pour rééquilibrer leur position par rapport auxgrossistes, les producteurs des bassins rurauxspécialisés dans la production de légumes (Dalat,Son La) devront améliorer le transport (actuelle-ment camions non réfrigérés) et organiser lacirculation de l’information entre producteurs etcommerçants.

Pour les trois filières, si l’organisation atomiséeet sans relation contractuelle de long termepermet de faibles prix à la consommation et unecertaine flexibilité, elle ne favorise pas la prisede risques pour conquérir des parts de marchésur des produits de qualité porteurs de revenussupérieurs.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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La vente de produits de qualité spécifiéenécessite une organisation de la communicationet du contrôle à trois échelles : les producteursorganisés en groupement ; la filière (avec ledéveloppement de la contractualisation entreproducteurs et commerçants) ; les autoritéspubliques pour accréditer les structures decontrôle en relation avec la profession.

3. La planification des nouveauxmarchés

Jean-Joseph Cadilhon, doctorant, ImperialCollege at Wye (Royaume-Uni) et CIRAD

Depuis quelques années, la distribution connaîtdeux évolutions majeures, qui vont avoir desconséquences sur l’organisation de la commer-cialisation : la planification des marchés de groset de détail ; le développement de la grandedistribution.

3.1. Les plans d’aménagement urbain En relation avec les experts du ministère de

l’urbanisme et du ministère du commerce, les

comités populaires des grandes villes dressentdes plans d’urbanisme, qui incluent des projetspour développer les circuits de commercialisa-tion. Les autorités visent ainsi à :● réduire la circulation des gros camions dans les

villes afin d’améliorer les conditions de trafic ;● concentrer les acteurs de la commercialisation

dans les marchés officiels – fermeture desmarchés de rue informels, éradication de lavente ambulante ;

● améliorer la distribution des produits frais, enconstruisant des plates-formes logistiques dansles zones de production et des centres de distri-bution autour des grandes villes ;

● inciter à produire, commercialiser et consom-mer des légumes propres dans et autour desgrandes villes.Sont ainsi prévues la construction et la rénova-

tion des marchés de gros et de détail. Celapermettra de concentrer les activités de détaildans des marchés officiels construits en dur etdes supermarchés. Afin de planifier le réseau desmarchés de détail, les ingénieurs en urbanismeprocèdent à des calculs de la population parquartier, puis fixent l’emplacement et la taille des

Tableau 23. Tendances d’évolution des filières riz, légumes et porc

Riz

Légumes

Porc

Consommation

En diminution pour le riz ordinaire ; enaugmentation pour le riz parfuméMais le riz ordinaire restera l’aliment debase pour tous les Vietnamiens

En augmentation pour les légumestempérés, stable pour légumes-feuillesLes crises sanitaires peuvent détournerles consommateurs (surtout aisés) deslégumes locaux

En augmentation pour la viande maigreMais toujours limitée par le prix

Production

En augmentationConversion du riz en cultures à plusforte valeur ajoutée

Forte augmentation au nord comme au sudPénuries (saison des pluies) et excès(hiver) pour les légumes tempérésMenaces sur le foncier en zonepériurbaine

En augmentation

Filière

Atomisation et concurrenceFaibles marges commercialesManque d’organisation pour valoriser laqualité du riz parfumé (label, prixdifférencié)

AtomiséeCirculation de l’information absente ;faible échelle des transactions en zonepériurbaine ; dépendance envers lesgrossistes pour la production ruraleManque de contrôle de qualité et decommunication claire sur la qualité

Manque d’organisation de producteurspour signaler et valoriser la qualitéContraintes à la diminution du prix final= coût des aliments

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La réponse du marché et des filières

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marchés à construire ou à réaménager en fonc-tion du nombre de clients potentiels.

3.2. Deux modèles de marché de gros Les plans de construction des nouveaux

marchés de gros périphériques à Hanoi et Ho ChiMinh-ville diffèrent dans leur conception, maissemblent adaptés au contexte local.

A Hanoi, plus de la moitié des légumesconsommés sont produits en zone périurbaine etacheminés en vélo ou moto par des collecteursou des agriculteurs. Les fruits proviennent engrande majorité du sud du pays et de Chine. Lesaxes routiers qui desservent ces zones deproduction aboutissent au sud de Hanoi pour lepremier et sur la rive gauche du fleuve Rougepour le second. Il faut donc traverser le fleuvepour se rendre au centre-ville. Les plans duComité populaire de la ville privilégient laconstruction d’un réseau de sept petits marchéspériphériques, plus proches des zones deproduction, qui seront reliés par un boulevardpériphérique pour la circulation des camions.Deux de ces marchés sont déjà aménagés(Denlu au sud de la ville, Dich Vong au nord-ouest). Par ailleurs, un nouveau marché a étéconstruit dans le sud de la ville pour accueillir lesgrossistes en fruits et leurs chargements impor-tants. Un pont sur le fleuve Rouge doit êtreconstruit à proximité. Ces marchés périphériquesserviront de centres de stockage et de redistri-bution. Les gros camions resteront à l’extérieurde la ville et de plus petits camions apporterontles produits vers les marchés de grossecondaires à l’intérieur de la ville pour les détail-lantes qui ne pourraient pas se déplacer vers cesmarchés périphériques.

AHo Chi Minh-ville, les réseaux de distributionde fruits et légumes sont beaucoup plus concen-trés : chaque nuit, des collecteurs transportentde grosses quantités par camion vers lesmarchés de gros. Les principales zones d’ap-provisionnement en fruits et légumes sont leCentre Sud (notamment la province deLamdong, le delta du Mékong et la zone périur-baine de Cu Chi au nord de la ville). Les routesvenant de ces zones débouchent respective-ment à l’est, à l’ouest et au nord de la cité. LeComité populaire de Ho Chi Minh-ville prévoit la

construction de trois grands centres de distribu-tion à la périphérie : l’un à l’est pour les produitsvenant du Nord, l’un à l’ouest pour les produitsdu delta du Mékong et l’un au nord pour lesproduits de la zone périurbaine. Ces marchés,dont le plus grand, à l’ouest, devrait couvrir 150hectares de superficie, sont placés pour établirune rupture de charge entre gros camions etplus petits camions ; un boulevard périphériquedevrait les relier. Généralistes dans un premiertemps, ils devraient se spécialiser ensuite parproduction.

Par rapport aux marchés de gros spontanés(Long Bien et Nga Tu So à Hanoi, Cau Muoi, MaiXuan Thuong et Tan Xuan à Ho Chi Minh-ville),les marchés de gros planifiés bénéficient d’infra-structures spécifiques (surface couverte etbétonnée, aire de stationnement, éclairage).

3.3. Des conséquences prévisiblesLes conséquences possibles de l’aménage-

ment des nouveaux marchés sont nombreuses ;elles pourront être favorables ou défavorables aufonctionnement des circuits de commercialisa-tion et aux acteurs. Il semble pourtant que lesautorités ne soient pas conscientes de l’ensem-ble de ces effets.

Une plus grande transparence La construction des marchés de gros devrait

résoudre certains problèmes actuellementobservés dans les filières de commercialisationdes fruits et légumes. La concentration dansl’espace et dans le temps de nombreuxcommerçants – dans un marché circonscrit etréglementé – devrait améliorer la transparencede la formation des prix et promouvoir la concur-rence entre grossistes, ce qui bénéficiera auxclients de ces derniers et aux consommateursfinaux. Les nouvelles infrastructures devraientaméliorer les conditions de manutention desproduits frais avec des aires de stockage, de tri etd’emballage, ainsi que des chambres froides, cequi contribuera à réduire les pertes dans lesfilières. Enfin, le déménagement des marchés degros du centre vers la périphérie et l’interdiction decirculation des grands véhicules de transportdans le centre résoudra certainement lesembouteillages en ville.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Meilleure insertion des producteurs aumarché ?

A Hanoi, la construction des marchéspériphériques devrait réduire le temps de trajetdes producteurs qui commercialisent leur propreproduction ou celle des autres. Dans les marchésdéjà construits, l’éclairage et la sécurité face auxvols sont appréciés par les vendeurs.

A Ho Chi Minh-ville, grâce à la grande trans-parence et la meilleure circulation de l’informationentre marchés urbains et ruraux, davantage deproducteurs pourront vendre leur production àdes prix plus représentatifs des conditions del’offre et de la demande.

En revanche, la suppression de la vente ambu-lante de produits alimentaires portera un coup duraux ménages paysans des alentours de la ville.En effet, quand leur main-d’œuvre n’est pasnécessaire sur l’exploitation, les femmes d’agri-culteurs vont à la ville comme marchandes ambu-lantes. Leurs prix, plus élevés que ceux proposéspar les vendeuses des marchés fixes officielsd’Ho Chi Minh-ville, tiennent compte du servicerendu de vente à domicile. De plus, la venteambulante et les marchés informels pouvantreprésenter plus de 80 % des ventes de fruits etlégumes à Hanoi (Quang, 1999), il est importantde prévoir une alternative qui permette une largedistribution des produits.

Création d’emplois et de revenusLes politiques gouvernementales de régulation

des circuits de commercialisation et la construc-tion des nouveaux marchés peuvent avoir desconséquences ambivalentes sur la création d’em-plois et l’augmentation des revenus.

A court terme, il est à craindre une perte netted’emplois du fait de l’éradication des circuitsinformels : marchandes ambulantes et marchésinformels. A Ho Chi Minh-ville, le déplacementdes marchés de gros entraînera une réductiondu nombre de grossistes : seuls les plus gros, quidisposent d’un moyen de transport pour serendre de leur lieu d’habitation en centre ville versles nouveaux marchés de gros périphériques,pourront continuer leur activité. Selon desenquêtes auprès des grossistes menées parl’auteur en 2002, de nombreux petits grossistesont décidé de changer d’activité quand les

marchés déménageront, ce qui s’annonce diffi-cile dans un milieu où le chômage urbain est déjàproblématique.

A long terme toutefois, ces politiques de plani-fication devraient s’accompagner d’une augmen-tation du nombre d’emplois et des revenus desacteurs des filières. Plus généralement, la popu-lation urbaine du Vietnam est amenée àaugmenter avec le développement industriel. Si ledéménagement des marchés est un succès etque les nouveaux marchés de gros deviennentdes lieux attractifs pour la manutention etl’échange de produits alimentaires, le nombrecroissant de bouches à nourrir dans les villes et ledéveloppement de l’industrie agroalimentaireentraîneront davantage d’activité pour lesgrossistes et, en amont, pour les collecteurs et lesagriculteurs. Ce qui devrait déboucher sur un gainnet en termes de création d’emplois et de revenus.

3.4. La nécessité d’une concertationDans le processus de planification des

marchés de gros, aucune concertation n’a étéprévue avec les utilisateurs des marchés, lescommerçants et les producteurs. Or, celle-ci estsouhaitable pour adapter les marchés auxcontraintes et aux besoins des opérateurs : loca-lisation, coûts de location, horaires, servicesrendus. Par ailleurs, pour les commerçants qui nepourront pas utiliser les marchés de gros et dedétail en raison d’une trésorerie insuffisante ou dela localisation, il est important d’imaginer des solu-tions, par exemple un programme de crédit pourcréer une petite entreprise de vente ou pouracquérir un véhicule.

4. Le développement de la grandedistribution

Nguyen Thi Tan Loc, RIFAV

Le secteur alimentaire du Vietnam va-t-ilévoluer comme dans beaucoup de pays asia-tiques, européens, latino-américains, vers uneconcentration de la distribution de détail et unepart croissante occupée par la grande distribu-tion ? Quels effets auront ces évolutions sur laproduction, le commerce, la transformation et laconsommation ?

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La réponse du marché et des filières

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4.1. Dans le mondeLes supermarchés jouent un rôle croissant

dans le commerce des biens de consommationcourante, en particulier des produits alimentaires.

La formule du supermarché est née aux Etats-Unis en 1930. L’innovation consistait à réunir sousun même toit tous les articles alimentaires vendusinitialement par des spécialistes différents et à lesvendre moins cher. Dans les années 50 et 60, lagrande distribution s’est étendue en Europe, puisen dehors de l’Europe à partir des années 80(Moati, 2001).

En Amérique latine, où la pauvreté touche 40 %de la population, les supermarchés ont connu unecroissance rapide tout d’abord dans les grandesvilles (années 80), puis dans les villes moyennes,dans les bourgs (fin des années 90). Les super-marchés se sont d’abord implantés dans lesquartiers favorisés, puis de classes moyennes,enfin dans les quartiers populaires. Leur part dansl’approvisionnement est passée de 10-20 % en1990 à 50-60 % en 2000 – une évolution qui anécessité cinquante ans aux Etats-Unis (Reardonet Berdegué, 2002). Par exemple, au Guatemala,pays le plus pauvre d’Amérique latine, les super-marchés, dont le nombre est passé de 66 en 1994à 128 en 2002, écoulent 35 % de la quantité totaledes aliments vendus au détail (15 % en 1994).

Depuis les années 90, des pays asiatiques, telsque Singapour, la Chine, la Thaïlande, disposentde supermarchés, dont la diversité reflète leniveau de vie de la clientèle. Cependant, lagrande distribution et les magasins ne représen-tent encore qu’une faible part du commercealimentaire : 35 % des achats de produits frais enThaïlande et 20 % à Taiwan (Cadilhon et al.,2003).

Trois facteurs principaux expliquent la crois-sance de la grande distribution : l’urbanisation ; lacroissance des revenus, avec des effets directs etindirects (acquisition de réfrigérateurs et moyensde transport) ; la part croissante des femmesdans l’emploi.

L’essor de la grande distribution transforme lesecteur alimentaire, en raison de la forte concur-rence qui règne dans le secteur et donc de lanécessité de diminuer les prix de vente. Desplates-formes logistiques sont créées, ainsi quedes contrats entre grossistes et producteursspécifiant les volumes et le conditionnement, des

standards privés sur la qualité, la sûreté desaliments. Les circuits directs entre producteurs etvendeurs sont renforcés, directement par lespoints de vente ou par l’intermédiaire descentrales d’achat ; la part de l’approvisionnementdans les marchés de gros diminue.

Les exigences en matière de qualité, de régu-larité d’approvisionnement, de mode de règle-ment peuvent conduire à l’exclusion des petitsagriculteurs. Cependant, des organisations deproducteurs ont réussi à tirer parti de ces évolu-tions, en mettant en place, souvent avec l’appuide l’Etat, une certification et une signalisationadaptée aux supermarchés (Reardon etBerdegué, 2002 ; Lautent, 2001). De manièregénérale, le développement de la grande distri-bution situe plus que jamais le pouvoir de décisionet de négociation au stade du détaillant, aucontact avec le client final et en situation d’oligo-pole (Moati, 2001).

Cependant, des secteurs résistent à la crois-sance de la grande distribution. Quelle que soit lapart de celle-ci dans le commerce alimentaire, lavente de proximité dans des magasins garde desavantages comparatifs : fraîcheur des produits,attention portée à la présentation, soutien à uneproduction de terroir. Par ailleurs, la part des fruitset légumes commercialisés est toujours plusfaible que celle des autres produits alimentaires :50 à 75 % de moins en Amérique latine, surtoutpour des raisons de conservation. En France, en1995, les hypermarchés, supermarchés etsupérettes commercialisaient 60 % des fruits etlégumes (Vernin X., 1998), alors que ce pour-centage est de plus de 80 % pour l’ensemble desproduits alimentaires (Malassis et Ghersi, 1987).Enfin, la grande distribution étant contrôlée pardes oligopoles, les produits proposés onttendance à s’uniformiser, une tendance difficile-ment compatible avec la différenciation despratiques d’achat des consommateurs. Cepen-dant, la grande distribution s’adapte en diversi-fiant la gamme des produits proposés et ennouant des partenariats avec les fournisseurs(Moati, 2001).

L’incidence de la grande distribution sur le prixfinal des produits alimentaires est difficile àétablir ; si elle diminue le prix des produits stabi-lisés ou transformés, elle est beaucoup plus vari-able pour les produits frais ; de plus, les coûts de

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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transport vers les grandes surfaces ne rendentpas forcément l’achat en grande surface pluséconomique que dans les marchés de proximité(Saada, Valentin, 1997).

4.2. Au VietnamAvant 1993, il n’existait pas de supermarchés

au Vietnam (c’est-à-dire de magasin de plus de400 m2). Dans le contexte de l’économie sub-ventionnée, entre 1950 et 1988, le ministère ducommerce gérait directement les magasins. Lesclients achetaient des marchandises avec destickets de rationnement (produits et quantitésfixés). Les premiers supermarchés sont apparusau début des années 90. Ils se sont d’abordconcentrés dans les grandes villes comme HoChi Minh-ville et Hanoi, puis dans les villes envi-ronnantes. Dans un premier temps, les super-marchés, de taille petite (moins de 500 m2) oumoyenne (500 à 1 000 m2), ont été construitsdans le centre ville, comme les points de venteCitimart ou Minimax. Ils se sont ensuite multipliésdans les districts périurbains et leur taille aaugmenté : par exemple, à la périphérie de HoChi Minh-ville, les supermarchés Coop Mart,Fivimart (de 1 000 à 15 000 m2), puis le Cora del’Est, Cora An Lac et Cora Dong Nai, quidépassent 15 000 m2 (et sont donc des hyper-marchés, terme employé à partir de 2 000 m2). Enseptembre 2001, le Vietnam comptait 70 super-marchés, 32 à Hanoi et 38 à Ho Chi Minh-ville7.

La diversité et la quantité des marchandisesvendues dans les supermarchés progressentrapidement du fait de l’augmentation du pouvoird’achat. En témoigne le chiffre d’affaires recordréalisé par les supermarchés lors du Tet en 2003.Les ventes quotidiennes dans les supermarchésIntimex, Fivimart… dépassent le milliard dedongs. Le supermarché Intimex, qui commercia-lisait 10 000 types de produits en 2001, en vendait15 000 en mars 2003 et en prévoit 20 000 d’ici lafin 2003. Le chiffre d’affaires des supermarchésest en augmentation. Par exemple, le super-marché Seiyu à Hanoi a vu son chiffre d’affairesquotidien tripler de 1996 (700 000 dongs) à fin2002 (2 000 000 dongs).

L’efficacité économique des supermarchésn’est pas encore généralisée, ce qui pose pro-blème aux investisseurs. Comme ils représententun nouveau mode de commerce, certains super-marchés ne sont pas encore rentables. Ainsi, surles 70 supermarchés d’Hanoi et de Ho Chi Minh-ville, 14 étaient en déficit en 2001, 14 à l’équilibreet 15 bénéficiaires, de plus de 500 millions dedongs pour dix d’entre eux8. Les commerçantsprévoient l’apparition de nouveaux supermarchésen 2003, non seulement dans les villes maisencore dans les provinces et les grandes zonesindustrielles comme Da Nang, Binh Thuan, CanTho, Tien Giang, An Giang, Vinh Long, HaiPhong, Thai Binh, Bac Giang. Dans le mêmetemps, les supermarchés existants élargissentleur superficie de vente.

4.3. La place des produits alimentairesLa plupart des supermarchés participent à la

commercialisation des aliments (48 sur un totalde 70, soit 70 %), 23 sur 32 à Hanoi, 25 sur 38 àHo Chi Minh-ville. Les produits alimentairesreprésentent 30 % du total des marchandisesdans plus des trois quarts des supermarchés.

Les légumes et les fruits frais étant encom-brants et périssables, tous les supermarchés n’envendent pas. Seulement 14 sur 32 vendent deslégumes frais à Hanoi et 21 sur 38 à Ho Chi Minh-ville. Comme pour les autres produits alimen-taires, la vente de fruits et légumes dans lessupermarchés progresse et se diversifie. Parexemple, pour les légumes frais, en plus deslégumes-feuilles, il est possible de trouver dumini-maïs, du concombre, de l’asperge, dupoivron, de la carotte, des haricots verts, deslégumes préparés ; et pour les fruits, le pample-mousse local Nam roi, et des produits importéscomme les pommes de Nouvelle-Zélande, leraisin des Etats-Unis et les fruits tropicaux deThaïlande. La gamme des légumes locaux estmoins étendue que dans les marchés et lesespèces sont moins nombreuses : à Hanoi, il n’ya que 27 espèces dans les supermarchés, maisplus de 70 dans les marchés.

7 Source : Communication d’un agent du département du commerce, General Statistics Office, 2001.8 Source : Communication d’un agent du département du commerce du GSO, 2003.

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La réponse du marché et des filières

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4.4. Relations avec les producteurs et les consommateurs Afin de disposer d’un approvisionnement

régulier, les responsables de supermarchéscherchent à développer des contrats, verbaux ouécrits, avec des producteurs (responsables decoopératives ou individuels) et, plus rarement,avec des grossistes. Les contrats spécifient laquantité, l’espèce, le prix, la qualité, la livraison etle mode de règlement. Des contrats sont ainsiconclus avec les exploitations produisant du porcmaigre, des produits laitiers, du poulet propre(Proconco), avec des coopératives de productionde légumes propres. Ainsi, les producteurs enga-gent davantage leur responsabilité dans la qualitéfinale des produits et sont poussés à tenir comptedes orientations du marché.

En ce qui concerne les consommateurs, ilconviendrait de conduire des enquêtes sur unlarge échantillon pour mieux connaître dans quelspoints de vente ils préfèrent réaliser leurs achats.La trentaine de clients de supermarchés inter-viewés à Hanoi et Ho Chi Minh-ville évoquent lesraisons suivantes pour acheter dans les super-marchés : une plus grande confiance dans laqualité sanitaire des produits et un recours possi-ble à la responsabilité du supermarché en cas deproblème ; le contrôle par les services de santé ;l’attrait pour des produits spécifiques que l’on nepeut pas trouver sur le marché et pour la présen-tation des produits.

4.5. Des effets négatifs en perspectiveEn résumé, le nombre de supermarchés et leur

chiffre d’affaires augmente de plus en plus rapi-dement. Les supermarchés contribuent à réduirele rôle des marchés ouverts et des marchésambulants. Pour le moment, le développementde la grande distribution n’est pas allé de pairavec une réduction des coûts de distribution. Sices prix élevés sont dus à un faible volume devente, correspondant à la phase initiale dedéveloppement des supermarchés, ils baisserontplus l’échelle augmentera. Cette perspective estprobablement limitée par la préférence actuelledes consommateurs pour l’achat dans lesmarchés de proximité et l’achat auprès devendeurs réguliers.

Les prix étant élevés dans les supermarchés,nombreux sont les consommateurs qui n’ont pas

les moyens d’y faire leurs achats. Le Vietnams’achemine donc vers un système de distributiondual : le supermarché pour les consommateursaisés, le marché traditionnel pour les autres.

Conclusions : inciter les acteurs à contractualiser

Les filières alimentaires sont actuellement frag-mentées. La vente de gros est limitée auxéchanges nord-sud et aux échanges frontaliers ;les grossistes jouent alors un rôle majeur dans lecontrôle de l’information et le pilotage des flux, unrôle toutefois limité par des infrastructures detransport inadéquates (pas de réfrigération).

Les incitations pour développer des produc-tions de qualité sont limitées, malgré la fortedemande des consommateurs en la matière. Cetétat de fait résulte d’au moins quatre lacunes : lemanque d’une communication précise en matièrede pratiques de production et de contrôle, de lapart des organisations de producteurs et decommerçants ; l’absence d’un contrôle de qualitérigoureux associant structures publiques etprivées ; des stratégies peu claires en termes deprix d’achat pour des produits de qualité ; la diffi-culté de mettre en place des contrats entreproducteurs et commerçants pour sécuriser l’ap-provisionnement et les débouchés en qualité eten quantité.

Dans les pays développés, la contractualisationest de plus en plus fréquente ; elle permet destabiliser les flux et les revenus des acteurs. Maisau Vietnam, elle se heurte à plusieurs obstacles :la forte variabilité des prix ; la faiblesse du cadrejuridique en cas de conflit ; la diversité des acti-vités des producteurs et des commerçants. Ilserait nécessaire de sensibiliser ces derniers auxavantages de la contractualisation et aux respon-sabilités qu’elle implique.

Les circuits courts, un coût du travail peu élevéet une faible élaboration des produits favorisentdes coûts bas, comparés à ceux d’autres pays.Toutefois, les prix augmentent rapidement,surtout pour les produits frais, ce qui correspondà la croissance des revenus. Le marché doitpouvoir s’adapter à une demande différenciéeen termes de pouvoir d’achat et offrir des pro-duits avec des gammes de prix et de servicesvariables.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Les tendances actuelles à la centralisation dela distribution (réduction du nombre de marchésde gros et détail, développement de la grande dis-tribution) auront sans doute des effets négatifs entermes d’emploi qu’il conviendra d’évaluer et decompenser en partie (programmes de crédit et deformation à la gestion de points de vente).

Les opportunités offertes par le marchéintérieur aux acteurs de la filière sont imparfai-tement transmises par les mécanismes dumarché. Une meilleure information (technique etcommerciale) et une plus grande coordination ausein des filières agricoles permettraient d’aug-menter l’offre (voir encadrés 12 et 13 pour desexemples concrets).

La réponse de l’agriculture aux opportunités dumarché est donc actuellement limitée à la fois parles structures de production et par les défautsd’organisation des filières. Le cas de l’agriculturepériurbaine en témoigne. En effet, il s’agit d’uneagriculture très réceptive aux opportunités dumarché, mais également menacée par le proces-sus de monétarisation des facteurs de productioncomme le foncier et les intrants agricoles.L’agriculture périurbaine illustre également lesfonctions non économiques de l’agriculture (inser-tion sociale, tampon contre l’urbanisation, recy-clage des déchets), actuellement menacées parl’expansion du bâti sans régulation publique del’usage des terres.

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La réponse du marché et des filières

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Afin d’adapter la production à la demande du marché, il est importantd’apporter une information régulière sur les débouchés encore insatis-faits aux producteurs et commerçants, et d’organiser avec eux un débatsur les stratégies pour adapter l’offre à la demande. Un système d’in-formation et de concertation sur les marchés des légumes à Hanoi aété mis en place à l’Institut de Recherche sur les Fruits et légumes(RIFAV) en mars 2002 dans le cadre du projet régional sur l’agriculturepériurbaine SUSPER (AVRDC/CIRAD/Ministère des affairesétrangères). A quatre périodes de l’année, des informations sur l’étatd’approvisionnement du marché sont collectées dans les principauxpoints de vente en gros des légumes à Hanoi (5 marchés de nuit) : ori-gine des produits, quantités, prix. Ces informations ont trait aux légumesreprésentant 80 % de l’approvisionnement de ces marchés (8 à 14selon les périodes, les légumes présents toute l’année étant la tomate,le chou, le choysum, le liseron d’eau, le chou chinois, le concombre).Ces informations sont restituées sous la forme de bulletins, et par desréunions entre producteurs, commerçants, et agents de développe-

ment. Ainsi, lors d’une réunion en avril 2003, un débat s’est engagé surles importations de tomate et de chou en provenance de Chine quidominent le marché de juillet à septembre. Les raisons en ont étéanalysées. Bien que les consommateurs vietnamiens n’aient qu’uneconfiance limi-tée dans la qualité des produits chinois, ils sont attirés parleur apparence visuelle. De plus, les producteurs locaux ont des diffi-cultés à produire en saison humide, en raison des maladies. C’est à cetype de problèmes que tente de répondre le projet SUSPER, en met-tant en place des essais de production sous abris plastiques, avec desplants résistants aux maladies. Au cours de cette réunion, les produc-teurs ont également exprimé leur souhait de disposer d’une informationquoti-dienne sur les prix de gros et de détail, avec le téléphone commemoyen préféré de communication. Ce type de collecte quotidienne adéjà démarré dans le sud avec l’ICARD pour une dizaine de fruits etlégumes. Les prix collectés sont en ce moment communiqués par le siteweb de l’ICARD. Une diffusion par la télévision est prévue.

Encadré 12. Systèmes d’information et de concertation sur les marchés

Malgré une forte demande des consommateurs, les filières de produitsde qualité ont des difficultés à se développer. Le déficit de communi-cation des producteurs sur leurs modes de production, et le manque decontrôle des pouvoirs publics, entretiennent la méfiance des consom-mateurs.Diverses actions sont en cours pour répondre à ces problèmes dans lecadre des projets SUSPER et MALICA. A travers la revue de l’associa-tion des consommateurs (VINASTAS), les consommateurs sontrégulièrement informés des résultats des recherches sur la demandedes ménages et la qualité dans les filières. Dans la commune de DongDu (district de Gia Lam), en collaboration avec l’ONG danoise ADDAetl’Union des paysans, un appui est apporté aux groupes produisant deslégumes propres afin qu’ils communiquent mieux sur la qualité de leursproduits. Des bulletins ont été élaborés, avec la présentation descahiers des charges de production (utilisation d’eau propre, optimisa-

tion des doses de produits chimiques, emploi de produits naturels pourla fertilisation et le traitement des maladies, observation régulière desplantes). Des étiquettes ont été préparées avec la mention de l’originedes produits. Des contacts ont été organisés entre la coopérative et desvendeurs des magasins, supermarchés et stands de marché. Unedémarche similaire est en cours avec la coopérative de Van Tri (com-mune de Van Noi, district de Dong Anh).Le VASI travaille depuis plusieurs années pour mettre en place une fili-ère de porcs maigres, en collaboration avec l’INRA, le GRET (provincede Hai Duong) et le CIRAD (province de Hatay). Les appuis aux pro-ducteurs visent à établir un cahier des charges commun permettantl’amélioration de la qualité. Ce cahier des charges comprend les racesanimales, les pratiques d’alimentation et de soins vétérinaires. Des réu-nions entre les acteurs de la filière sont également organisées pour dis-cuter des indicateurs de qualité des produits dans les transactions.

Encadré 13. La mise en place de filières de qualité

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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L’agriculture périurbaine : enjeux et menaces sur l'alimentation de proximitéHubert de Bon (CIRAD)

A la périphérie des villes, l’agriculture occupe toujours une grande partie de l’espaceet de la main-d’œuvre. Très diversifiée, cette agriculture comprend de nombreusesspéculations à forte valeur ajoutée. Elle joue un rôle important dansl’approvisionnement des villes en produits frais comme les légumes-feuilles, dans laprotection contre les inondations, dans l’identité culturelle et le recyclage des déchets.Toutefois, cette multifonctionnalité est menacée par de nombreuses contraintes,notamment la pression foncière, ainsi que la faible durabilité écologique des systèmesde production, qui utilisent des produits chimiques de manière excessive.

1. Une agriculture multifonctionnelle

1.1. Un rôle alimentaire, économique et socialLes deux grandes villes du Vietnam – Hanoi

(2,7 millions d’habitants) et Ho Chi Minh-ville (5,1millions d’habitants) – sont organisées adminis-trativement en districts urbains et ruraux. Nousconsidérerons ici les villes dans leur totalité saufmention expresse.

Les zones agricoles autour de ces villes sontessentiellement couvertes de riz : 76 % dessuperficies à Ho Chi Minh-ville et 79 % à Hanoi.Les terres agricoles abritent également desproductions animales et végétales diverses pourrépondre aux besoins du marché urbain (voir

encadré 14). Ainsi, à Hanoi, les culturesmaraîchères (chou pommé, tomate, liserond'eau...), le maïs, les légumineuses (soja, haricotkilomètre), les tubercules (patate douce, taro), lafloriculture (roses, chrysanthèmes), l'arboriculturefruitière et ornementale (pêchers, kumquats)répondent aux besoins de l'alimentation humaine,de la transformation agroalimentaire (canna,manioc), de l’élevage périurbain (patate doucepour les feuilles, soja, maïs) et des loisirs. Notonsaussi la grande diversité des productionsanimales : buffles, vaches, cochons, petites rumi-nantes comme les chèvres et les biches, leschiens, les volailles (canards, poules, oies,cailles), l'aquaculture de poissons d'eau douce etde crevettes (Mai Thi Phuong Anh et al., 2003).

Source : Mai Thi Phuong Anh et al. 2003 et GSO, 1999 et 2001.

Population totale (habitants)Densité de population (hab./km2)Population agricole (habitants)Superficie totale (ha) Superficie agricole (ha)Superficie cultivée (ha)Superficie en étangs aquacoles (ha)Superficie forestière (ha)

Hanoï (2000)2 712 000

2 925829 00092 098

44 705 (48,5%)38 5863 1426 630

Ho Chi Minh-ville (1999)5 097 000

2 434448 000209 400

98 000 (46,8%)

6 50034 657

Tableau 24. Données statistiques sur les villes de Hanoi et Ho Chi Minh-ville

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L’agriculture périurbaine : enjeux et menaces sur l'alimentation de proximité

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L'agriculture périurbaine, que l'on situera àl'intérieur de la ville et dans un rayon de 50kilomètres autour de la ville, assure un emploi àune partie de la population. A Hanoi, on estimeque 30 % de la population vit totalement ou enpartie de l’agriculture. La culture du riz y présente

parfois un caractère spéculatif de conservation del’usage du sol, surtout dans les zones trèsproches de la ville ; les cultures sont en compé-tition avec les autres activités économiques,notamment pour l’espace et la main-d’œuvre.

Encadré 14. Les systèmes de production périurbains autour de HanoiPaule Moustier (CIRAD)

L’analyse de la production agricole près de Hanoi confirme les caractéristiques d’une agriculture périurbaine, où dominent des productionspérissables et des stratégies d’intensification. L’agriculture répond à la fois à des besoins d’autoconsommation et de revenus par la vente. Letableau suivant résume les grands traits de cette agriculture.

Autour de Hanoi, l’agriculture répond principalement à des stratégies de diversification des revenus. Même si elle cohabite avec le commerceou l’artisanat, l’agriculture représente plus de la moitié des revenus dans une commune comme Trung Trac (Lecostey et Malvezin, 2001). Enmoyenne, la main-d’œuvre employée dans le ménage en dehors de l’exploitation représente 0,6 personne en zone périurbaine (contre 0,4 enzone rurale – voir Mai Thi Phuong Anh et al., 2003). La taille des exploitations est également plus faible plus on se rapproche du centre urbain :1 800 m2 en zone urbaine, 2 500 m2 en zone périurbaine, 3 000 m2 en zone rurale.

Peu de travaux existent sur la typologie des exploitations. Cependant, Lecostey et Malvezin (2001) ont tenté d’expliquer les différences derevenus des exploitations d’un village de Tu Liem, Pierre Durand l’a fait pour un village de Thanh Tri (1998). Ils ont identifié les déterminantssuivants : la localisation des terres dans des zones favorables en termes de relief (faiblement inondables) ; la fertilité des sols ; l’accès à desinfrastructures d’irrigation et de drainage ; l’accessibilité en termes de transport ; l’accès à un réseau de commercialisation ; l’accès au capital,grâce à l’accumulation foncière et aux activités extra-agricoles, dans la fonction publique notamment. Dans les foyers agricoles aisés, les revenusde l’accumulation foncière (principalement autour des terres d’habitation) sont investis dans la diversification par rapport au riz (pisciculture,arboriculture), qui demande l’achat d’intrants agricoles, ou dans le commerce. En revanche, les foyers pauvres conservent les rizières et limitentla diversification à la culture du liseron d’eau et à l’élevage de quelques porcs pour la vente ; un membre de la famille rapporte des revenus d’ouvrierou de petit commerçant.

Les principales contraintes exprimées par les producteurs sont les inondations, les déficits hydriques périodiques, le coût des intrants et lemanque de débouchés.

Sources : Fontenelle, Dao The Anh, Defourny, Dao The Tuan, 2001 ; Lecostey et Malvezin, 2001 ; Toscano - Gil, 2000.

Tableau A. Les grands traits de la production agricole près de Hanoi

ProduitsRiz

Maïs, patate douceLégumesFleursPlantes médicinalesSoja

PorcsPoulets

Localisation et périodeTerres basses (printemps,été)

Terres moyennes (hiver)Terres hautes et moyennes(été-saison des pluies) :légumes-feuilles ex choysumTerres basses (hiver) ;légumes-feuilles, choux,pomme de terre, carotte

Destination et objectifsAutoconsommationSpéculation foncière près deHanoiAlimentation animaleVente (Hanoi, centre, sud,nord )

Diversification des revenus

Vente (Hanoi)Diversification des revenus

Spécificités2-3 cycles/anEngraisEn baisse au profit des légumesEn baisse au profit des légumesEngrais et pesticides en excèsEtalement du calendrierSpécialisations par district (ex : carottes à Cam Giang ;fleurs à Tu Liem)Diversification des exploitationsTemps de travail limitant (vente, irrigation et drainage)Efforts de qualité

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Des filières courtes se sont développées pourdes marchés de proximité avec des produitsspécifiques comme les légumes-feuilles ou lesfleurs. Ces filières correspondent aux habitudesalimentaires du pays – les légumes-feuillescomme le liseron d'eau, la moutarde de Chine oule Choysum sont consommés tous les jours aussibien dans les restaurants que dans les foyers.L'agriculture périurbaine contribue à plus de 75 %à l’approvisionnement de Hanoi en légumes-feuilles et en légumes tempérés d'hiver.

La constitution de villes-provinces de grandeétendue avec des densités moyennes de popu-lation répond au besoin d'une certaine autosuffi-sance de la ville en produits vivriers. Actuel-lement, la densité moyenne de la populationde Hanoi est de 2 945 habitants/km2 alors que lamoyenne du delta du fleuve Rouge est de 1 180habitants/km2. Dans le Hanoi urbain, la densitéest très élevée atteignant 32 995 habitants/km2

dans le district de Dong Da. Malgré l’augmenta-tion des rendements agricoles ces dernièresannées, la ville de Hanoi est déficitaire pour laplupart des produits alimentaires. Le déficit totala été estimé à 94 000 tonnes (voir tableau 25).

1.2. Protéger l’environnement,préserver l’identité culturelleOutre l'alimentation de la population urbaine,

l'agriculture autour de Hanoi assure une fonctionde sécurité civile : la protection contre les inon-dations. Al’extérieur des digues de protection descrues du fleuve Rouge, les espaces inondablessont occupés par des cultures de décrue. Cettefonction est assurée sur de grandes surfaces desols fertiles qui permettent le développement defilières spécifiques comme celles des « légumespropres » avec une utilisation moindre et raison-née des intrants. De même, les terres bassessont cultivées en riz, culture la mieux à même devaloriser des terres hydromorphes, parfois trans-formées en bassins aquacoles.

Dans la planification urbaine actuelle de Hanoi,les autorités sont préoccupées par le maintien del'organisation autour du village traditionnel.L’agriculture y tient une place importante avecparfois des spécialités ancestrales (agrumes,plantes médicinales). Elle a donc une fonctiond'identité culturelle. Elle répond aux besoins descitadins cherchant à revitaliser des valeurs tradi-tionnelles en achetant certains produits et en visi-

Source: Mai Thi Phuong Anh et al , 2003.

Tableau 25. Bilan vivrier d’Hanoi pour les principales catégories d'aliments, en 2001 (production - consommation) (1 000 t)

Céréales

18,1

Racines ettubercules

35,0

Légumineuses

- 31,7

Légumes

14,3

Lait et œufs

55,8

Poissons et pro-duits aquatiques

- 7,5

Porc

6,7

Fruits

3,9

Encadré 15. L’agriculture périurbaine dans l’approvisionnement des villesIsabelle Vagneron (CIRAD), Paule Moustier (CIRAD), Hoang Bang An (RIFAV)

AHanoi, la majeure partie des légumes consommés sont produits dansun rayon de 30 km : c’est le cas de plus de 70 % des légumes-feuillesen toutes saisons et des autres légumes en période principale deproduction, de novembre à mars ; 95 à 100 % de la laitue provient dezones distantes de moins de 20 km, tandis que 73 à 100 % du liserond’eau est cultivé à moins de 10 km. L’origine des légumes tempérésest plus variable : alors que 75 % des tomates sont cultivées à moinsde 30 km de Hanoi pendant la saison froide, 80 % des tomatesvendues en saison chaude viennent de Chine et 15 % de Dalat, à plusde 1 000 km au sud de Hanoi. Les filières de vente sont très courtes. Une des caractéristiques les plus frappantes des marchés de gros aunord du Vietnam est la très forte proportion de producteurs venant aumarché à vélo ou à motocyclette pour vendre leur propre production et

parfois celle d’autres producteurs. De manière générale, lesproducteurs sont relativement plus présents durant la saison froide(plus de 40 % du volume total de légumes échangés) que durant lasaison chaude.La proximité des zones urbaines facilite les relations de confiance etd’échange d’informations entre producteurs, vendeurs et consom-mateurs, en particulier pour contrôler la qualité sanitaire des produits.Ainsi, tous les supermarchés et magasins de légumes sains de Hanoisont approvisionnés par des coopératives situées dans la province deHanoi avec lesquelles ils entretiennent des relations régulières ; lesproducteurs livrent les supermarchés tous les matins. A Ho Chi Minh-ville, le supermarché Metro se fournit en légumes « sains » auprès desproducteurs de Cu Chi, à moins de 30 km de la ville.

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L’agriculture périurbaine : enjeux et menaces sur l'alimentation de proximité

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tant un environnement différent. Cette fonction està mettre en relation avec les loisirs des urbains :promenades dans les exploitations agricoles,pêche récréative dans les lieux de productionaquacole à Ho Chi Minh-ville et à Hanoi

Le maintien du cadre de vie est liée à l'espaceouvert de l'exploitation agricole, qu'il soit aqua-tique ou couvert de végétation. Mais cette placelibre est considérée par les planificateurs urbainscomme une réserve foncière plutôt qu'unpaysage améliorant la qualité de la vie.

Enfin, l'agriculture périurbaine a une fonctiond'assainissement en utilisant les déchetsorganiques, animaux ou domestiques, une fonc-tion encore limitée à cause des risques sanitairesque pose l'utilisation des déchets.

2. Menaces

2.1. Extension du bâtiLa concentration spatiale des activités

économiques entraîne une demande exponen-tielle de constructions pour accueillir les loge-ments, les infrastructures de transport, les entre-prises. Ces activités sont d'une rentabilitééconomique bien supérieure à l'agriculture. Deplus, les autorités publiques mettent en avant ledéveloppement des industries et des services.

La part de l'agriculture dans le produit brut de laprovince de Hanoi est de 3,9 % et de seulement0,2 % a Ho Chi Minh-ville. A Hanoi, depuis unedizaine d'années, la superficie totale des terresagricoles a peu évolué. La transformation deterres rurales (agricoles et sylvicoles) en terresurbaines est très contrôlée par l'Etat, qui souhai-terait la limiter à 2,5 % des superficies totales paran. Mais cela entraînera un enchérissement desprix, malgré des indemnités officielles, conduisantà terme à une tendance exponentielle dupassage du statut agricole au terrain bâti. Lesprévisions actuelles envisagent une diminution de26 % des terres agricoles d'ici dix ans.

2.2. Faible durabilité écologique des systèmes de productionFace à cette pression foncière et économique,

les agriculteurs intensifient leur système de

production afin de maintenir leurs revenus : ilsutilisent davantage de main-d’œuvre, d'intrants etd'investissements. Les risques de pollution deI’environnement par les pesticides et Ie lessivagedes engrais azotés sont alors accrus. Par ailleurs,les pollutions des sols et des eaux, qu'elles soientdues à l'agriculture elle-même ou aux autresactivités économiques urbaines, posent Ie pro-blème de la qualité des productions. Le projet encours SUSPER1 tente de répondre à ce problèmeen mettant au point une production maraîchèreutilisant moins d'intrants chimiques, mais fondéesur une intensification des méthodes de produc-tion pour accroître les rendements – développe-ment de productions sous abri par exemple. Ceprojet tente aussi d'améliorer la qualité desproduits agricoles périurbains et sa reconnais-sance par les consommateurs. C’est une voiepour maintenir une agriculture de proximité, maisce n'est pas la seule. Elle doit être utilisée encomplément des autres fonctions et des autrestypes d'agriculture périurbaine décrits précé-demment.

Conclusion : une multifonctionnalité à préserver

L'agriculture périurbaine, que ce soit lessystèmes aquacoles ou les productions végé-tales, semble donc condamnée à s'intensifier.Malgré les ambitions d'accroître l'autosuffisancedes villes en produits vivriers, la part deI'agriculture urbaine et périurbaine dansI'approvisionnement de la ville diminuera sil’espace géographique administratif de référencen’évolue pas.

L'agriculture de proximité aura sa place dans Iedéveloppement urbain, non seulement par desfilières traditionnelles de fournitures d'aliments,mais aussi par les diverses aménités ruralesqu'elle engendre pour ceux qui cherchent à béné-ficier du cadre de la campagne périurbaine et deI'habitabilité de la ville (Fleury, 2002). Mais pourmaintenir cette place, elle doit faire la preuve desa capacité à ne pas polluer I'environnement età ne pas mettre en péril la santé des consom-mateurs.

1 SUSPER, FSP mobilisateur 2000-56 « Développement durable de l'agriculture périurbaine en Asie du Sud-Est »

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Encadré 16. L’agriculture périurbaine en débat Paule Moustier (CIRAD)

Depuis une dizaine d’années, l’agriculture périurbaine fait l’objet d’unelittérature de plus en plus abondante qui fait état de débats. Cet intérêtest dû au processus d’urbanisation rapide et au dynamisme deprogrammes internationaux, comme Cities Feeding People du CRDI,le PNUD-Habitat, le réseau RUAF animé par l’ONG ETC-GTZ, oul’initiative SIUPA du CGIAR. Un premier débat porte sur la définition de l’agriculture urbaine et saspécificité par rapport à l’agriculture rurale. Certaines institutionsinternationales (FAO, CGIAR) différencient l’agriculture urbaine situéedans la ville de l’agriculture périurbaine située autour de la ville. D’autresutilisent un terme unique pour désigner ces deux agricultures et parlent« d’agriculture urbaine » (CRDI, PNUD) ou « d’agriculture périurbaine »(CIRAD, CORAF). Nous utilisons dans ce document l’agriculturepériurbaine au sens large (incluant l’agriculture intra-urbaine). Au-delà de ces différences sémantiques, la question des contoursgéographiques est délicate. Certains auteurs adoptent une définitionlarge de l’agriculture périurbaine, avec une notion floue de « proximitéde la ville », et mettent l’accent sur la fonction d’approvisionnementalimentaire ; cette définition distingue mal l’agriculture périurbaine del’agriculture rurale, qui est de plus en plus tournée vers le marché. Pourd’autres, la spécificité de l’agriculture périurbaine se trouve dans lesrelations d’échange de ressources et de produits qu’elle entretientavec la ville et qui lui apportent opportunités et contraintes (Mougeot,1999). Ainsi, l’agriculture périurbaine concerne un espace où s’ex-priment des concurrences entre usages urbains agricoles et non agri-coles des ressources : terre, eau, main-d’œuvre, déchets (Moustier,2000). Si ces définitions permettent de mieux comprendre ce qui différenciel’agriculture urbaine de l’agriculture rurale, elles restent difficiles à

appliquer pour délimiter une aire géographique précise et doivent êtreadaptées à chaque contexte. Ainsi, pour Hanoi, nous avons considéréune distance de 50 kilomètres du centre ville, dans la province de Hanoiet les provinces périphériques de Ha Tay, Vinh Phuc, Hung Yen etBac Ninh. Un second débat concerne la viabilité de l’agriculture périurbaine et lanécessité d’un appui politique. Etant donné le coût du foncier en milieuurbain et les besoins en logements et en infrastructures encoreinsatisfaits, il semble logique de déplacer l’agriculture vers les zonesrurales, tout en améliorant les infrastructures de transport, comme celas’est passé en Europe. Et ce, d’autant que l’agriculture urbaine estsoumise à de nombreuses pollutions et qu’elle est elle-même polluante(Ellis et Sumberg, 1998). D’autres auteurs mettent l’accent sur lesexternalités positives de l’agriculture urbaine, qui justifient un appuipublic : recyclage des déchets (Midmore et Jansen, 2003) ; insertionsociale de populations défavorisées (Mougeot, 2000) ; créationd’espaces ouverts (Fleury et Donadieu, 2001). Par son caractèremultifonctionnel, l’agriculture urbaine est plus économique pour lasociété que d’autres types d’espaces verts, comme les parcs parexemple (Moustier, 2003). Ainsi, la plupart des auteurs reconnaissent que le déplacement del’agriculture loin des centres urbains est inéluctable si les seules forcesdu marché sont laissées à l’œuvre. Pour évaluer si ce déplacement estsouhaitable, il est nécessaire d’évaluer dans quelle mesure l’agriculturepériurbaine remplit ses fonctions économiques et non économiques.Les pouvoirs publics peuvent renforcer les impacts positifs et diminuerles impacts négatifs, à l’image des projets de développement del’agriculture périurbaine, qui travaillent sur des itinéraires techniques àla fois plus rentables et moins polluants.

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L’agriculture périurbaine : enjeux et menaces sur l'alimentation de proximité

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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ConclusionLes moteurs du changement et les pistes d’actionPaule Moustier (CIRAD), Dao The Anh (VASI), Muriel Figuié (CIRAD)

1. Les variables-clé d’évolution

Quelles sont les variables-clé qui déterminentl’évolution du marché intérieur ? Commentpeuvent-elles évoluer ?

1.1. La croissance démographiqueLa croissance de 1,7 % par an se maintiendra

et devrait même augmenter : en 2003, l’Etat alevé les sanctions en cas de dépassement de2 enfants par couple. Il s’agit donc d’une crois-sance minimale, qui entraînera l’augmentationdes besoins de consommation alimentaire etd’emploi.

1.2. Les déséquilibres de populationLes déséquilibres de population entre zones de

montagne et de delta, d’une part, et zones ruraleset urbaines, d’autre part, risquent de s’aggraver sil’Etat ne conduit pas une politique volontariste,notamment en matière de crédit et de formation,pour développer l’emploi agricole et extra-agri-cole dans les zones rurales – à l’image de ladémarche menée avec succès à Taiwan.

Quelles que soient les évolutions, la proportionde consommateurs non producteurs de denréesalimentaires par rapport aux producteurs agri-coles est amenée à augmenter.

1.3. Le niveau de vie des ménagesLe niveau de vie des ménages détermine la

valeur des débouchés alimentaires et le type deproduits consommés. L’augmentation du niveaude vie s’accompagne d’une baisse de laconsommation de riz et d’une hausse de celle defruits et légumes, viande, produits laitiers, produitstransformés. Elle entraîne également unedemande pour des produits de qualité spécifiée(par exemple, riz parfumé et porc maigre). Enfin,elle favorise le recours à la grande distribution.

Le niveau de vie est lié à la croissance del’économie vietnamienne. Ces dernières années,le taux de croissance a atteint 7 %.

1.4. Exigences de qualité et crisessanitaires Les contrôles de qualité étant aujourd’hui peu

nombreux et les médias étant sensibilisés auxcrises sanitaires, il est à craindre que cesdernières se multiplient comme par le passé(scandale de la soupe au formol, intoxications auliseron d’eau, etc.). Les produits les plus exposéssont les légumes, du fait de l’ampleur de leurconsommation et des conditions de production,mais aussi la viande et le poisson.

Les crises sanitaires augmentent la méfiancedes consommateurs à l’égard des produits locauxet peuvent affecter la consommation pendantplusieurs années. Elles incitent les entreprisescommerciales, la grande distribution notamment,à recourir aux importations d’Australie, deNouvelle-Zélande, etc. Ce phénomène peuts’amplifier si le Vietnam intègre l’organisationmondiale du commerce, selon le souhait dugouvernement. Mais si la profession se montreréactive et organisée, elle peut en tirer profit, enmettant en œuvre des démarches qualité crédi-bles.

1.5. La concurrence du marchéinternationalLes conséquences de la mise en place

progressive des accords de l’AFTA(ASEAN FreeTrade Agreement) sont encore mal connues, caril existe peu de documents clairs relatifs à la régle-mentation commerciale des produits agricoles.

L’ouverture des marchés de l’ASEAN peut offrirde nouveaux débouchés aux produits pourlesquels le Vietnam est compétitif. Cependant,pour beaucoup d’entre eux (riz, café, caout-

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Conclusion - Les moteurs du changement et les pistes d’action

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chouc), les marchés sont saturés et concurren-tiels. De plus, avec l’élévation du niveau de vie,les coûts de production vietnamiens serontamenés à augmenter. Or, selon des études citéespar le rapport sur le développement humain(CNSSH, 2002, p. 84), le Vietnam est moinscompétitif que les autres pays de la région et queles économies en transition (cinquante-deuxièmerang mondial, alors que la Thailande est au vingt-septième rang et la Chine au quarante-sixièmerang). Cependant, l'agriculture ayant été moinsprotégée que les autres secteurs de l'économie(en particulier l'industrie de biens de consomma-tion), la libéralisation du commerce devrait y avoirmoins d'effets négatifs.

Dans le même temps, le Vietnam aura à faireface à des stratégies d’exportation plus agres-sives de la part de ses voisins (Chine, Taiwan) etde pays plus éloignés (Australie, Etats-Unis).Parmi les produits menacés à court terme setrouve le maïs – donc les aliments pour bétail et,de manière dérivée, le porc – et, à moyen terme,les fruits et légumes de type tempéré. En effet,s’ils réussissent à assurer un approvisionnementplus régulier que les producteurs locaux,l’Australie et les Etats-Unis peuvent gagner laclientèle ayant un niveau de vie élevé et qui s’ap-provisionne dans les supermarchés.

Cependant, l’ouverture au marché internationalpeut représenter une opportunité pour ledéveloppement de filières de qualité avec desindications géographiques protégées.

1.6. L’accès au foncierL’accès au foncier est particulièrement

complexe au Vietnam. Les terres sont trèsmorcelées et exiguës surtout dans le nord dupays. La taille des exploitations ne peut êtreaugmentée que de manière informelle.L’information sur les prévisions d’aménagementurbain n’est disponible que pour quelques-uns.Un marché foncier souterrain se développe. Cetteabsence de transparence ne permet pas auxagriculteurs d’agrandir leurs terres et n’est pasfavorable à la protection des terres agricoles enzone périurbaine.

Si un marché du foncier s’officialise, il est àcraindre que des propriétaires absentéistes acca-

parent le foncier et que les paysans n’aient pasles moyens d’accéder à la propriété.

Récemment, l’Etat a favorisé les échanges deparcelles entre agriculteurs, un premier pas versle remembrement et l’augmentation de la tailledes exploitations. Un marché du foncier agricolerégulé par l’Etat, couplé à la sécurisation desdébouchés, serait favorable à l’augmentation dela taille des transactions, et à une agricultureprofessionnelle et spécialisée. Dans le delta dufleuve Rouge, à la différence des autres régions,la taille des exploitations risque cependant derester limitée par la pression démographiqueactuelle et la faible absorption de la main-d’œuvrepar l’industrie.

1.7. L’instabilité du secteur alimentaireLa production vivrière locale a montré sa capa-

cité à répondre à l’augmentation de la demandeen quantité, grâce à des politiques favorables.Cependant, l’offre alimentaire demeure instableen quantité, en prix et en qualité. Cette instabilitéest une caractéristique du secteur alimentairevietnamien.

Les agriculteurs doivent faire face aux aléas duclimat et de l’accès à l’eau d’irrigation, qui pèsentsur la production. L’instabilité des prix qui endécoule est renforcée par le manque d’informa-tion et d’organisation des producteurs sur lesmarchés, ainsi que par des moyens et des infra-structures de transport déficients (zones demontagne enclavées, transport dominé par lesdeux-roues, véhicules à moteur non réfrigérés).Pour minimiser les risques, les producteurs diver-sifient leur production. Mais ces stratégiescontribuent à renforcer l’instabilité du marché : lesproducteurs sont peu enclins à investir temps,compétences et capital dans une de leurs produc-tions, et les commerçants ont des difficultés àtrouver des fournisseurs réguliers. Apparaissentcependant des formes de contractualisation,voire d’intégration verticale, entre producteurs etcommerçants. C’est le cas dans les filièreslégumes et dans la filière du porc de qualité. Cestentatives sont toutefois limitées, car il n’existepas de mécanismes de recours à l’autoritépublique, en cas de désaccords entre les deuxparties par exemple.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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1.8. Nécessité d’organisation de laprofession et des consommateursPour gagner des marchés en quantité et en

qualité, les producteurs devront s’organiser. Ilspourront ainsi mieux communiquer sur leursefforts en matière de qualité, négocier les prixavec les commerçants et organiser le contrôle dela qualité, en interne ou en externe.

Afin d’anticiper les crises sanitaires et, éven-tuellement, les gérer, les acteurs des filièresdevraient instituer des interprofessions à mêmede communiquer avec les consommateurs etles autorités publiques.

Les associations de consommateurs peuventégalement jouer un rôle moteur pour orienter laproduction vers leurs exigences en termes dequalité et de diversité des produits.

Sans cette organisation, la production intérieurerisque d’être substituée en partie par les importa-tions.

2. La nécessaire intervention régulatricede l’Etat

Si l’Etat est intervenu pour favoriser les expor-tations, il n’en a pas été de même pour ledéveloppement du marché intérieur, mis à part laplanification des marchés de gros. Par ailleurs,l’agriculture a bénéficié de beaucoup moins d’in-vestissements publics – et privés – que les autressecteurs de l’économie (CNSSH, 2002). Cettesituation, classique dans les pays en développe-ment, est peu efficace : en effet la modernisationdu secteur agricole présente plus d’effets d’en-traînement sur le reste de l’économie que celle dusecteur industriel. Elle devrait donc être prioritairedans la séquence des interventions publiques(Lipton, 1977). C’est ce qui a été réalisé avec uncertain succès à Taiwan (Kay, 2001).

L’intervention de l’Etat est nécessaire pourorienter les évolutions, compenser les défail-lances du secteur privé, diminuer les risques,investir dans les biens publics. En effet, dans lesfilières alimentaires, les risques sont de naturedifférente : nutritionnels et sanitaires pour lesconsommateurs ; pertes quantitatives pour lesproducteurs ; tricheries sur la qualité pour lescommerçants ; risques économiques liés aux

problèmes de transport pour les producteurs etcommerçants. Face à ces risques, les acteursdéveloppent des stratégies, individuelles etcollectives, dont l’efficacité est limitée. L’Etat peutintervenir dans plusieurs domaines :● les infrastructures – irrigation, drainage, stoc-

kage ;● le transport, en désenclavant les zones de

production de montagne et en identifiant dessystèmes adaptés aux produits alimentaires età la configuration des zones de production ;

● le crédit, en mettant en place des programmespour que producteurs, commerçants et trans-formateurs de produits alimentaires satis-fassent leurs besoins (acquisition de terrenotamment pour les paysans, de points devente, d’unités de conditionnement et de trans-formation, de véhicules) ; en créant desmutuelles d’épargne et de crédit pour desgroupes de producteurs ou de commerçants ;

● la formation technique, notamment auxpratiques d’intensification raisonnée dessystèmes de production (fruits et légumes,porc, maïs) ; ainsi que la formation à la gestionet à la mise en marché ;

● l’appui technique pour la production vivrière ethorticole de contre-saison ;

● l’appui à l’organisation – pour la concertationentre les opérateurs, notamment pour l’amé-nagement des nouveaux marchés ; pourrenforcer les procédures de contractualisationet de recours en cas de désaccords entre lesparties au contrat ;

● le contrôle de qualité, en organisant des inspec-tions inopinées et en accréditant des orga-nismes de contrôle privés ;

● l’information des consommateurs sur lessources de risque sanitaire et des producteurssur les prix ;

● l’appui aux populations à risque par desprogrammes de complément nutritionnelciblés.

3. Quel rôle pour la recherche ?

Comme nous venons de le voir, des politiquesvolontaristes sont nécessaires pour que laproduction locale puisse efficacement répondre

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Conclusion - Les moteurs du changement et les pistes d’action

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aux évolutions de la demande intérieure.Toutefois, les données manquent pour fonder cespolitiques sur des éléments solides. La recherchea un rôle important à jouer pour rassembler cesdonnées et les analyser.

3.1. Observatoire des changements du secteur alimentaireCe document donne des éléments pour

comprendre l’évolution des débouchés desproduits alimentaires. Il est fondé sur uneapproche intégrée des dimensions de l’ajuste-ment de l’offre et de la demande que sont la quan-tité, les coûts et les revenus, la qualité, la coordi-nation des acteurs aux différents stades de laconsommation et des filières d’approvision-nement.

Ce bilan est cependant incomplet. Il manquedes études sur la consommation et l’approvision-nement des villes du centre et du sud du pays.Les informations quantitatives sur la formation desprix et des revenus dans les filières, collectées surun faible échantillon, devraient être confirmées surun plus large échantillon. L’évolution de la régle-mentation commerciale et son impact sur lesimportations et les exportations nécessitent untravail en macro-économie. Les niches de marchépour les produits de diversification agricole (parexemple, produits laitiers, chèvre, fleurs, etc.)doivent être identifiées avec précision.

Par ailleurs, il est nécessaire d’actualiserrégulièrement ce type de bilan. Pour cela, nousrecommandons la mise en place d’un observa-toire de la consommation et des marchés.

Un observatoire des changements alimentairespermettra d'informer régulièrement et en tempsutile les acteurs économiques de la filière sur lesévolutions des quantités consommées, desattentes de qualité, mais aussi des pratiques d'ap-provisionnement (lieux d'achat, fréquences…) etde consommation (modes de préparation, lieuxde consommation…). Il doit aussi être un outilpour les services de santé publique, qui œuvrentà la réduction des carences alimentaires et fontface en même temps aux nouvelles maladiesdites « transitionnelles » (obésité, maladiescardio-vasculaires…). En suivant les pratiques(anti-risques…) et les représentations des con-

sommateurs (image diététique des produits…),l'observatoire pourra orienter efficacement lesactions de communication nutritionnelle et sani-taire.

Un observatoire des marchés doit fournirrégulièrement des informations sur les quantitéset les prix des principaux produits alimentaires,dans les zones de collecte, de vente en gros etau détail. Il doit suivre les variations de la prove-nance des produits au cours de l’année pourcartographier les flux d’approvisionnement. Il doitaussi comprendre un suivi d’exploitations agri-coles, afin d’appréhender les contraintes à la miseen marché. Il actualisera régulièrement les infor-mations sur l’organisation et l’efficacité desfilières, en termes de compétitivité par rapport auxmarchés extérieurs, de distribution des revenus,de formation de la qualité.

Un panel d’opérateurs de la consommation, ducommerce et de la production pourrait être créépour suivre l’évolution des paramètres qualitatifs– préférences des consommateurs en matièrede produit et de lieu d’achat, perception desrisques, réaction aux changements de prix – etpour évaluer l’organisation, l’information et lepouvoir de négociation dans les filières. Desenquêtes sur un échantillon représentatif permet-traient d’estimer les quantités consommées etéchangées et d’identifier comment se forment lesprix, les revenus et les quantités.

3.2. Recherches sur le foncierLa différenciation foncière suggère d’étudier de

plus près les modes de transfert de la terre, large-ment informels (la loi foncière n’étant pas encorefinalisée), les règles et les pratiques en matière decession temporaire (location, métayage, etc.) oudéfinitive (vente, héritage). Par exemple, lesparcelles sont-elles fragmentées ou l’un des filsbénéficie-t-il de l’héritage afin de maintenir laviabilité de l’exploitation ? Les modalités diffèrent-elles selon les régions ou les zones (proximitéurbaine, dynamique des systèmes de production,etc.) ? Existe-t-il des problèmes d'insécuritéfoncière ? Comment les transferts de droits sont-ils actés ou officialisés à l'échelle locale ? Unmarché foncier est-il en train d’émerger ? Quelssont les liens entre différenciation foncière et

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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concentration foncière, diversification/spécialisa-tion et différenciation économique ?

3.3. Recherches sur la coordination au sein des filières La recherche en sciences sociales a un rôle

important à jouer pour identifier les dispositifs d’in-formation et de coordination dans les filières quiseront les plus efficaces pour réguler qualité etquantités. Ces dispositifs devront :● permettre de réaliser des économies d’échelle,

en regroupant les ventes au sein de groupes deproducteurs et de marchés de gros ;

● donner des incitations pour améliorer la qualité,en mettant en place des systèmes de contrac-tualisation ou d’intégration, des paiementsdifférenciés selon la qualité, des sanctions etdes primes ;

● communiquer sur les pratiques de qualité –étiquetage des produits, organisation de latraçabilité ;

● augmenter le pouvoir de négociation vis-à-visdes acheteurs en s’entendant à l’avance sur lesprix, les quantités et le moment de la vente ;

● gérer les crises au sein d’interprofessions(mutualisation des risques, communication auconsommateur). Pour chacune de ces fonctions, plusieurs

dispositifs, publics ou privés, peuvent êtreproposés, testés, évalués. Si le dispositif est privé,il doit être accompagné d’une interventionpublique pour crédibiliser les engagements pris etprévoir des arbitrages en cas de différend.

La recherche en sciences sociales sur la qualitédevrait être couplée à un travail plus techniquesur les sources de risques sanitaires et les inci-dences en termes de santé : mesure deséléments contaminateurs (produits chimiques,microbes, métaux lourds, etc.) aux différentsstades des filières, suivi épidémiologique desconséquences en termes de santé sur lesconsommateurs.

3.4. Recherches sur l’intensificationraisonnée des systèmes de productionPour être compétitives sur le marché intérieur,

certaines filières – maïs, porc, légumes de contre-saison – doivent diminuer leurs coûts de produc-

tion et utiliser de façon optimale les produits chimi-ques, afin de garantir la qualité sanitaire desproduits et la protection de l’environnement. Larecherche doit proposer des itinéraires tech-niques utilisant moins de produits nocifs etévaluer leur rentabilité économique. Elle a aussiun rôle de compilation des savoir-faire locaux surles produits de qualité spécifique.

3.5. Des réponses pour lutter contre lapauvretéLa lutte contre la pauvreté est une priorité pour

le gouvernement vietnamien comme pour lesbailleurs de fonds. Ce document donne despistes pour augmenter la distribution de richessesaux populations pauvres, dans un contexte deforte croissance économique.

Les populations pauvres sont majoritairementlocalisées en zone rurale, mais également, et demanière croissante, en milieu urbain, où les possi-bilités d’emploi sont rares pour les populationspeu qualifiées.

A l’heure actuelle, on compte 60 millions depersonnes en zone rurale et 20 millions en zoneurbaine. En 2020, la population rurale devrait êtreinchangée (60 millions), tandis que la populationurbaine aura doublé pour atteindre 40 millions depersonnes. Pour augmenter les opportunités decréation de richesses en zone rurale, les agricul-teurs devront tabler sur l’ensemble des optionsdisponibles, agricoles et non agricoles, pour lemarché intérieur comme pour les exportations.Le marché des villes est un réservoir de créationde richesses pour les populations agricoles parcequ’il existe encore des débouchés insatisfaits.En témoignent les fortes variations de quantitéset de prix au cours de l’année (surtout pour lesproduits frais), ainsi que la demande pour desproduits de qualité (fruits et légumes sains, porcmaigre, riz parfumé), qui ne se traduit qu’impar-faitement par des achats faute d’une offre satis-faisante.

Plus concrètement, les opportunités apportéespar les marchés intérieurs doivent être déclinéespour chaque zone géographique. Ainsi, chaquezone rurale peut être considérée comme lebassin d’approvisionnement, actuel ou potentiel,

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Conclusion - Les moteurs du changement et les pistes d’action

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d’une agglomération (rurale ou urbaine). L’ori-ginalité de la démarche proposée réside dans lediagnostic de la demande en biens de consom-mation de ces agglomérations, afin d’identifier denouveaux débouchés, en termes de produit,période de l’année, qualité (l’approche adoptéepour les biens alimentaires pouvant être trans-posée aux produits non alimentaires). Le diag-nostic de la demande est suivi de l’analyse desflux d’approvisionnement actuels des aggloméra-tions. Cette analyse spatiale permet de révéler lepositionnement particulier de zones rurales etpériurbaines en termes d’avantages comparatifspour des produits ou des périodes spécifiques,puis d’appréhender les moyens de renforcer cesavantages : par exemple, la zone de Son Lapossède un avantage dans la production detomates en saison des pluies pour alimenter lemarché de Hanoi, qui connaît toujours des déficitsà cette période. Augmenter la production de cebassin à cette période peut apporter un complé-ment de revenu aux habitants. Pour y parvenir, ilest nécessaire d’identifier pourquoi l’offre n’estpas plus abondante (infrastructures de transport,réfrigération) et d’y remédier.

La réduction des inégalités agricoles passe parun rééquilibrage des ressources indispensablespour tirer parti des opportunités du marché, parmilesquelles les infrastructures de transport, l’infor-mation sur les marchés, le crédit, et la formationtechnique.

En zone urbaine, le marché intérieur crée desemplois pour toute une chaîne de services decommercialisation et restauration. Mais beau-coup de ces emplois sont menacés par les initia-tives publiques et privées de « modernisation »ou centralisation de la distribution alimentaire. La

préservation de ces emplois passe tout d’abordpar la reconnaissance de l’utilité sociale de ladistribution de proximité, et également par lacorrection de ses effets négatifs, en particulier lemanque d’hygiène. Des programmes de forma-tion et de crédit adaptés aux projets personnelsde ces petits entrepreneurs permettraient égale-ment une reconversion vers des emplois plusrémunérateurs.

En tant que consommateurs enfin, les popula-tions les plus pauvres sont pénalisées par lamauvaise qualité sanitaire et les prix élevés pério-diques. Les actions visant à améliorer la qualitéet la disponibilité des aliments auront donc uneffet positif sur ces populations si elles ne setraduisent pas par des sur-coûts trop élevés.L’Etat doit garantir au minimum que l’alimentationproposée n’est pas toxique, en organisant descontrôles inopinés suivis de sanctions. En paral-lèle peuvent se développer des filières privées dequalité spécifiée avec des prix plus élevés corres-pondant à un service supplémentaire en termesd’itinéraires techniques, de contrôle et de commu-nication.

Des opportunités d’emploi dans le secteur de latransformation alimentaire, encore embryonnaire,doivent être identifiées par des études de marché,ainsi que par l’appui à l’organisation de l’approvi-sionnement en matières premières.

Ainsi, le développement du marché, intérieur etextérieur, sera une force motrice pour créer desrichesses mieux réparties, si les pouvoirs publics,avec l’appui des chercheurs, favorisent lesliaisons physiques et institutionnelles entre lesproducteurs, les consommateurs et l’ensembledes entreprises intermédiaires.

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Annexe - En quelques chiffres…

République socialiste du VietnamSurface : 330 900 km2

Démographie(d'après le dernier recensement de 1999)Population 76,3 millions d'habitantsCroissance annuelle de la population (entre 1989 et 1999) + 1,7 % Croissance annuelle de la population urbaine (entre 1989 et 1999) + 3,6 %Croissance annuelle population rurale (entre 1989 et 1999) + 1,2 %Espérance de vie 67,8 ansTaux d'alphabétisation des adultes 93,1 %

Main-d'œuvreMain-d'œuvre agricole, 2000 (GSO, 2001) 62,5 % Revenu horaire du travail, 1998 (Haughton et al., 2001) 0,15 dollarSalaire minimum dans les entreprises d'Etat, 2002 520 000 dongs/mois

Pauvreté, malnutritionPIB/hab, 1999 305 dollarsClassement PIB/hab, 1999 (PNUD, 2000) 114ème

Classement IDH, 1999 (PNUD, 2000) 104ème

Croissance du PIB, 2001 + 6,8 % Taux de malnutritiondes enfants de moins de 5 ans, 2000 (NIN, 2003) 36,5 %Taux de pauvreté, 1998 (VLSS, 1998) 37 %

Consommation alimentaire(Figuié et Bricas, infra d'après VLSS 1998)Valeur du marché intérieur alimentaire 5 milliards de dollars Part du marché urbain dans le marché alimentaire 40 %Valeur de la consommation alimentaire hors du domicile 0,7 milliard de dollarsPart des dépenses alimentaires dans la consommation ● 39 % (urbains)

● 53 % ( ruraux)Part de l'autoconsommation ● 4,7 % (urbains)

● 36,4 % (ruraux)

Grande distribution, 2001(communication du Département du Commerce, GSO) 3 hypermarchés,

70 supermarchés Production agricole(GSO, 2001; MARD 2002)Surface agricole par exploitation, 1998 9 000 m2

Part de la production agricole dans le PIB, 1996-2000 23,95 %Part de la production agricole dans le PIB rural, 2001 70 % Part de la production alimentaire dans la production agricole 80 %

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Annexe - En quelques chiffres…

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Principales productions vivrières

riz (2000)

patate douce (2000)

maïs (2000)

légumes (1998)

fruits (1999)

viande (2000)

lait (2000)

produits aquatiques (2000)

surface (1 000 ha)

7 700258 713401485

---

production (1 000 tonnes)

32 5501 6601 9305 1504 1601 900

3501 700

Principaux produits alimentaires d'exportation

produits (2001)

riz

manioc

thé, café

produits de la mer

fruits

sucre, miel

arachide

porc

noix de cajou

volume des exportations (1 000 tonnes)

3 800 1 220

999 392 134 79787344

Principaux produits alimentaires importés

produits (2001)

blé

produits laitiers

huiles végétales

sucre

fruits

volume des importations (1 000 tonnes)

823630 260 87 41

Exportations agricoles(MARD, 2002 et les statistiques du RIFAV)Valeur des exportations agricoles (hors poisson),1997- 2001:

2 à 2,5 milliards de dollars /an

Importations alimentaires(MARD, 2002)Valeur des importations agricoles alimentaires(hors produits aquatiques), 1995-2000 :

0,4 à 0,5 milliards de dollars /an

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Marché alimentaire et développement agricole au Vietnam

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Liste des sigles

AFTAASEANAVRDCCGIARCIDSECIRADCNSSH (NCSSH)CRDIDSAETCFAOGRETGSOGTZICARDIDHIDRCIFPRIINRAIOSIRDIRRIMADR (MARD)NZE (NEZ)NINONGPIBPNUD (UNDP)RIFAVRUAFSAMSCACSIDASIUPASUSPERVASIVLSS

ASEAN Free Trade AgreementAssociation of South-East Asian NationsAsian Vegetable Research and Development CentreConsultative Group on International Agricultural ResearchCoopération internationale pour le développement et la solidaritéCentre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développementCentre national des sciences sociales et humaines du VietnamCentre de recherche pour le développement internationalDépartement des systèmes agrairesConsultants in Development ProgrammesFood and Agriculture OrganisationGroupe de recherche et d’échanges technologiquesGeneral Statistical OfficeGerman Agency for Technical CooperationInformation Centre for Agriculture and Rural DevelopmentIndicateur de développement humainInternational Development and Research CenterInternational Food Policy Research InstituteInstitut national de recherche agronomiqueInstitute of SociologyInstitut de recherche pour le développementInternational Rice Research InstituteMinistère de l’agriculture et du développement rural Nouvelles zones économiquesNational Institute of NutritionOrganisation non gouvernementaleProduit intérieur brutProgramme des nations unies pour le développementResearch Institute on Fruits and VegetablesCentre d’information sur l’agriculture urbaine (Resource Center on Urban Agriculture and Forestry)Social Accounting MatrixService de coopération et d’action culturelle de l’Ambassade de FranceSwedish International Development AgencyStrategic Initiative on Urban AgricultureSustainable Periurban AgricultureVietnamese Agricultural Science InstituteVietnam Living Standard Survey

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Document réalisé pour le Service de coopération et d’action culturellede l’Ambassade de France au Vietnam

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Quelles sont les opportunités de création de richesses au Vietnam pour lespopulations pauvres des villes et des campagnes, en dehors des exportations ?Le marché intérieur représente le double en valeur des exportations agricoles,pourtant considérées comme la priorité pour le développement économique.Il connaît actuellement un fort développement, qui s’explique par la croissancedémographique, l’urbanisation, et l’augmentation des revenus. L’alimentation sediversifie au profit de la viande, des fruits et légumes. La restauration de rue sedéveloppe. La qualité, visuelle, gustative et sanitaire, préoccupe de plus en plusles consommateurs.

La production vivrière locale a démontré sa capacité à répondre à la crois-sance de la demande en quantité, grâce à des politiques favorables. Cependant,l’offre vivrière est souvent instable en quantité (déficits et surplus périodiques)comme en qualité. Par ailleurs, les inégalités de revenus se creusent entrerégions, et la main-d’œuvre, excédentaire en milieu rural, se redéploie difficile-ment dans d’autres secteurs (l’agro-alimentaire, par exemple, est toujours peudéveloppé). En zone périurbaine, l’agriculture est très réceptive aux opportunitésdu marché, et elle est multifonctionnelle. Mais sa durabilité est menacée par lapression foncière et les pollutions d’origine agricole et non agricole.

L’organisation actuelle des filières, caractérisées par leur caractère concur-rentiel et atomisé, est favorable à un faible coût final des produits. Mais faute degroupements de producteurs à vocation commerciale, de contrats entre produc-teurs et commerçants, et de systèmes d’information et de contrôle, la qualité etla régularité de l’approvisionnement ne sont pas garanties. Ainsi, les opportu-nités économiques du marché intérieur peuvent être accrues par un appui à l’in-formation (technique et commerciale) et à l’organisation des acteurs des filièresagricoles.

Contact : MALICA19, Han Thuyen, Hanoi, VietnamTel. : (84) 4 972 06 31Fax : (84) 4 972 06 24Courriel : [email protected]