guy raynaud de lage - introduction a l'ancien francais

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  • 5/14/2018 Guy Raynaud de Lage - Introduction a l'Ancien Francais

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    GUYRAYNAUD DB LAGEl'aonaaztlll A LA FAOULTt DAI Lz'JT l tD

    DB CUIliiOIIT

    I n 1 8 0 0 0 C 1 1 0 - nA

    r A n C I E n F R A n C A I S9" Edition

    Nouvelle edition. revue et corrlg6e

    SOCI!l:TE n'EDITION D'ENSEIGNEMENT SUPERIEUll.88, BOULEVARD SA.INT-GEll.MAIN

    PAll.IS

    III

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    '''I, rv .;-:5 b6U

    SAA . A~~(d.j~)\ ) G -~A~.,

    Lo loi du II mars 1957 n'outori sant, aux termes des alini as 2et 3 de l'Articie 41, d'une part, que les. copies au reproduclionstrictement "'servees a I'usage privi du copi"le et non destiniesa une utilisation cellective > et, d'autre port, ~ue Ie. analyses elles courtes citotions dono Ie but d'el

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    6 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISLa troisisms edition n'apporte a ce petit manuelque quelques retouches et fort peu d'additions;mais, sur Ieconseil de plusieurs oollegues, on a renonceau texte delecture qui terminait le livre; enrevanche,on l'a pourvu d'un index aussi detaille que possible.Apres la troisieme comme apres la seconde edition,l'auteur doit beaucoup de remerciements, pour des

    avis toujours precieux, a son collegue et ami, C. RE~GNIER, de l'Universite de LilIe. .

    I.- L ES T EX TE SDeux traits essentiels distinguent la languemoderne de l'ancien francais : sa fixite relative, sonhomogeneite nationale. Le francais d'aujourd'hui

    est une langue qui s'ecrit et qui se lit autant qu'ellese parle, et, de ce fait, c'est une langue qui evolueassez lentement, car I'eeole, l'imprims et la lecturesont des puissances de conservation; il en est dememe, sur Ie seul plan oral, de l'influence de Ia radio.Ce sont aussi des puissances d'unification, et Isservice militaire, les deplaeements saisonniers etles migrations de la population contribuent encoredans les temps modernes it cette unification; biendes differences subsistent dans l'accent, et msmsdans les formes, mais Ie fait essentiel est qu'il existeune langue commune, outre qu'il y a chez les Fran-eaia un certain souci de purisme.II n'en etait .pas ainsi dans l'ancienne France, au

    MoyenAge surtout; sans doute ily avait des routes,il y avait des pelerinages, des foires, des guerres :mais la circulation n'effacait pas le eompartimsn,tage feodal, l'unification politique etait it peine com-menese au xne siecle ; les traits dialectaux restentfortement marques, meme it I'interiaur de la langued'oil, comme its peuvent l'etre encore dans nospays d'oc, O U les patois sont si differents it peu dedistance. Par ailleurs, la langue est une langue par-lee, qu'aucune ecole n'enseigne (*) et la plupart(* ) Mais de bonne heure ilexiste des Manieres de langage,manuels rediges particulierement a I'usage des Anglais qui

    ont hesoin de savoir Ie fraDQais.

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    8 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISLES TEXTES 9

    I des gens ne savent pas lire j aussi, .quand cett; ~an~uedevient litteraire, elle est ma~lere de A recitationet de declamation, I'oeuvre est Iaite pour etre enten-due.Au-dessus des parlers lo?au;x:, des langues lit~e-raires se sont en effet constituees, en marge, de dia-lectes qui sont surtout au xnB et au xmB siecles Ie francien JJ, qui tire son nom de PIle-d~-France (*),Ie picard et l'anglo-nor~ru;t~. Au xmB .slecle, pour ~emultiples raisons, la vitalite de certains de ces dia-lectes, promus langues litteraires, et ,l'osmose descultures regionales sont assez marquees po~r ,quela langue des auteurs se, truITe de formes ,qm : r ; t ap-partiennent pas a leur dialects propre, mars qui antgagne de proche en proche ~t qui sont gensralementadmises : un Picard emploiera des mots pansiens,un Parisien des formes picardes, si bien que les textespourront oomporter des elements dialectaux hetero-genes qui ne surprennent pourtant pas les contem-porains.Cette langue du reste se transforme plus vite q,ue

    la langue d'aujourd'hui : dans ses sons, et par suitedans ses formes, et comma les notations, les, ~ gra-phies , sont tantot archaiques, tantdt phonetiques,un meme manuscrit prssentera frequemment desformes concurrentes pour un meme no:!? ?u pour lameme personne d'un verbe : les historians de lalangue voudront les ,dissoci~r et disti~guer ce qmest accesaoire et ne bent qu aux graphies (douce 0 : 0 -du ce, fait ou f et ) , de co qui est veritablem,ent faitde langue (ainsi la concurrence de remanotr et de(* ) En fait, it correspond plutot a une aire centrale dansles regions d'oil ,

    remaindre, deux infinitifs -pour un meme verbe).Mais les scribes medievaux n'avaient pas tant descrupules et, bien qu'il y eut deja des traditions orthographiques , personne alors ne se formalised'un peu de disparate. .Dans Ia plupart des cas nous sommes bien em-peches de dire si le texte que nous lisons dans unmanuscrit est conforme dans sa materialite it celui

    de l'auteur; en fait les manuscrits sur lesquels sontfaites les editions modernes ne correspondent quetres exceptionnellement au texte originel; a supposer que l'auteur n'en ait pas redige plusieurs etatssuccessifs, le copiste qui a transcrit la version ini-tiale a pu la modifier si elle ne correspo'ndait pas itses propres habitudes linguistiques, tout au moinsl 'habiller de ses propres graphies j -d'autres copistes,ses confreres, le recopieront a leur tour avec plus oumoins de fldelite, conservant des formes qu'ils con-naissent, meme si elIes different quelque peu decelles qu'ils emploieraient spontanement, oU"aucontraire, leur substituant des formes nouvelles. De telles partioularitss, notait REDlER dans sonedition de L a C ha ste la in e d e V ergi (p. ,VIII), tan totlorraines, tantot ohampenoises ou picardes, se remar-quent dans les anciennes copies de la Chastelained e V er gi , mais elles sont fugitives, elles varient d'unmanuscrit a l'autre et representant l'usage desscribes, non necessairement l'usage du poete.La plupart des editions modernes presentent dansleur introduction un releve des graphies et des faitsde langue qui caracterisent Ie texte edite ; il .faut,bien entendu, en tenir Ie plus grand compte poureviter les bevues et aborder plus facilement l 'auteur.Prenons quelques exemples, pour fixer les idees,

    _ ~ . . ._ _ _ _ _ _ . ~ ~ _ _ . I i . I ! . ----L. -........,_-------iIiiiiiiii!""-------

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    10 iNTRODUCTION A L'ANCIEN FRANI,;AISdans le Tristan de BEROUL et dans Auca9sin etNicolette; dans Tristan, on lira indifferemment :assez, asez, asses, - dedanz, dedenz, - loin, luin_,luien, - mais, maiss, mes, - nepeu, nepo, - set, sou(fr . mod. sait);

    dans A u cassin :donjon dongon, - deul, dol, duel (fr . mod. deuil),- g ue rr e , 'gerre, guere, - cuit, quit , q,! id (i te pers. duverbe cuidier =roire).Le scribe pretend bien dans ces A differents ca.srepresenter les memes mots ~t les I_Demes~on.set 1 1ne s'agit done que de graphies, mars parfois il con-serve des signes qui correspondent a une pronon-elation ancienne abandonnee (ainsi des diphtonguesai oi ue reduites a un son unique), parfois ilemploie, , . tdes signes apparemment divergents pour no er unememe consonne (ainsi i. g, gu). On observe en p~r-t iculier beaueoup de flottements pour .l~ tran.scr~p-tion de 0 ferme, plus ou rnoins ferme a vrai ~lre

    suivant les regions, et note 0, ou, u (cette dernieregraphie etant anglo-normande) : doner, duner (=donner). De msme la vocalisation. de 1 n'a pa.s tou-jours et e notee, et les scribe~ ant so.uvent mamten~des graphies ~o.m~e molt, sort ~n raison de la tradi-tion des ahreviations (mlt) , soit pour permettre aulecteur de traduire a son gre et de faire entendremolt ou motu.La difflculte est plus grande quand un meme textepresente des formes Ioncierement differentes pourla meme personne d'un pronom au d'un verbe;remettant a plustard ~esjustificatio,n~, ~es debutantsse fieront alors au lexique de leur edition : pour ne

    LES TEXTES 11prendre que deux exemples, la 3e personne dn. sub-jonctif present de don(ne)r pent etre, dans Tristan,donst, doinst, donge, et dans A ucassin, la forme tonique (ou forte ) du pronom de la ire per-sonne quand ilest complement, peut etre la formefranC1~nne moi ou la forme picarde mi.La ponctnation et I'usage du trema ou de l'accent

    dans nos textes sont Ie fait des editeurs modernes etne remontent pas au Moyen Age, ou les scribes ontpu cependant recourir a quelques signes pour guiderIe Ieeteur,D'aussi breves observations ne peuvent etrequ'une mise en garde : il s 'agit pour les et.udiantsd'eviter I'anachronisme et . d e ne pas traiter lestextes d'ancien francais comme les textes classiques ;il leur faut tenir compte de I'etat d'esprit et deshabitudes des scribes du Moyen Age. Mais Ia desin-volture de ceux-ci et Ia liherte d'une langue qui n'apas encore ete disciplinee par les grammairiens nepeuvent dispenser le lecteur moderne de la connais-sanee des formes et de l'etude de la syntaxe.

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    II. - LA PRONONCIATIONIIne peut etre question de reproduire avec satonalite propre la prononciation du x~Ie .ou du XI~Iesiecle . mais il faut en connaitre les pnncipaux traitset l'o~ peut essayer d'en donner a . Ia lecture une ver-sion approchee, sans recherch~ pe.dante. Cet aspect

    des choses peut paraitre moms Important que Iaconnaissance des formes ecrites pour une lecturemuette . mais il est impossible de dissocier absolu-ment l~ morphologie de la phonetique, i l est indispen-sable de pouvoir rendre compte des rimes dans lesvers et meme- il n'est pas mauvais de connaitre,app;oximativement au moins, la physionomie oraled'une langue, qui etait surtout une la~gue p~rIee,pour ne pas s'en faire une representation radicals-ment fausse.L'ancien francais est une langue relativeme~tbien notes beaucoup mieux notee que Ie francaismoderne : ~n ce sens que ses graphies correspon~enten gros a ses sons; ilexists c~pe~dant des .notatIOns

    archalques (nous l'avons indique) et des m~uenceslatines : mais c'est peu de chose en comparaison dela ma~ie etymolcgisante qui sevira au XIVe, auxve et au XVle siecles ; aussi, en principe, toutes leslettres se prononcent.Voyelles et dipktongues. - ; - 1 ! n'est jamais m?~tet s'entend comme aujourd hui encore dans le MIdI,sauf naturellement dans Ie cas d'une elision. Les edi-teurs modernes emploient l'acc~nt aigu pour. distin-guer e toni que de e atone: celes, p. ex., mars celes.Dans les monosyllabes toutefois, ils n'y recourentquo quand e toniq?e est ~out ~ f.ait f inal: r e , ou pourevitcr une confusion (nes, distinct de nes).

    LA PRONONCIATlON 13Les diphtongues anciennes se sont reduites pourla plupart : au latin tres anciennement it 0 ouvert,et, des Ie xne siecle, ai it 1 , ue et eu.a re (0 allemand) ;rnais elIes demeurent Ie plus souvent no tees ~vecdeux lettres comme aujourd'hui encore. La diph-tongue oy toutefois n 'evolue en ,w e . (oue ) qu'au c,ou~sdu XIne siecle avant de se redmre souvent a e ;au xne siecle on entendait dono encore it peu pres le

    son de la diphtongue anglaise oy (dans boy).Mais les diphtongues plus recentes, issues de la((vocalisation de l, conserveront Iongtemps leursdeux elements, comma aujourd'hui encore dans lesdialectes d'oc O U la vocalisation a eu lieu; on pro-nonce done autre (aoutre) du latin alierum, - eus(eouss) du latin illos, - coup (cooup), du bas latincolapu, - et (e-a-ou) la triphtongue - eau, ainsi dansbeau, du latin bellus.Des voyelles et diphtongues survies d'une con-sonne nasale, toutes sauf u seront nasalisees avantle XIVe siecle dans la langue parlee, d'apres les tra-vaux de M. STRAKA; a, e, o,ay, ey, avant le xne ou

    au cours du xue, - o y, y e, i au cours du xrus. I'1aisla consonne nasale conserve cependant son articu-lation pendant tout le Moyen Age, comme aujour-d'hui encore dans Ie Midi, c'est-a-dire que 1'0n pro-nonce a peu pres pan (pan-nn), bien (bren-nn), etc,Consonnes. - Ch et j se prononcent (tch) et (dj)encore au xne siecle, tandis que c et g devant lesvoyelles e ou i se prononcent respectivement (t~),(dj) : eire (tsire), genoil (djenoil) ; au cours du xme SH~-cle ces consonnes se reduiront comme dans la languemdderne respectivement (tch) a (ch), (ts) a (s),(dj) a . (j),

    II!

    III....L

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    14 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANt;AISL e mouille J) n'est pas prononce (ye) commeaujourd 'hui, mais comme gl en italian et II en espa-gnol classique ; ainsi fille se prononce (fUlye).Rest roule comme encore aujourd'hui iei et l aen France et comme en espagnol.X n'est generalement qu'une faeon d'ecrire us :ainsi chevax =heoaus (prononce au xme siecle

    chevaos ou chevaous).Z en prineipe vaut ts comme en' allemand, maiscomme on I'a VU, ts se reduit a s au xme siecle.Toutes les consonnes ecrites se font entendre enprincipe i toutefois s s 'est efface a I' inter ieur desmots, devant consonne, au cours du XIe et du xnesieeles (isle se prononee ile), et, d la finale, derriereune consonne et devant la consonne initiale d'unmot suivant, s et t d'abord (bon(s) chiens, vinet) cors),puis les autres consonnes. Mais quand cette consonnefinale se trouve a un arret de la voix, en fin de verspar exemple, elle resiste mieux et se maintient : c'est

    Ie cas de r, finale d'infinitif, d'autant qu'il suit unevoyeUe; des rimes du type arner : amer ( infini ti f :adjectif) qu'on trouve dans RUTEBEUF (Th 218-9,429-30) apparaissent encore chez CORNEILLE.Les indications qu'on vient de lire ne sont qu'ap-proximatives, mais deja assez complexes pour qu'ilsoit difficile de les faire passer dans la lecture i ons'en inspirera sans tomber dans une affectation ridi-cule. .

    III.-LA DECUNAISONAvant d'aborder I'etude du nom, de I'adjectifet du partieipe, de Particle et des pronoms, il fautinsister sur l' importance de Ia deelinaison i le fran-cais moderne ne l'a conserves que dans les pronomspersonnels et relatifs (voir p. 45); et c'est trop peupour nous permettre d'en juger. En ancien francaiselle rend possible une grande souplesse dans l'ordredes mots, et c'est son principal interet; quand nouslisons dans BEROUL

    Li rois Tristran manace (v. 770),en raison du jeu du cas-sujet et du cas-regime, noussaisissons immediatement que c'est Ie roi Marc quimenace Tristan; mais ce rapport de l'un it I'autren'a pas exige comme dans la langue moderne I'ordre grammatical sujet-verbe-compIement, et I'an-cienne langue aurait pu adopter un tout autre ordreque celui qu'elle a prefere ici ; ainsi la declinaison,en compensation de ses servitudes, lihereIa langued'autres servitudes, lui donne de la variete et del'expressivite, ou tout au moins fournit it l'orateurou it I 'ecrivain la possibil ite d'etre varie et expressif.La ruine de' Ia declinaison entrainera des modifi-cat ions profondes dans la phrase Irancaise.La declinaison francaise est un instrument biensimplifle par rapport it Ia declinaison lat ine dont ellederive: deux genres seulement, le neutre ayant pra-tiquement disparu, et deux cas, issus l'un du norni-natif, le cas-sujet (abrege CS), l'autre de l'accu-satif, le cas-regime (ahrege CR). Quelques debrisdemeurent des autres cas de Ia declinaison -Iatine :

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    J~ ~ _ i i l l

    16 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANQAISainsi oendredi (par son premier element), la Chande-leur representant le premier un genitif singulier Iesecond un genitif pluriel : V eneris, cand eloru :n ;Aix correspond a un ablatif pluriel, Aquis. Tout celaest fort peu de chose; en fait la declinaison reposesur Ie cas-sujet et le cas-regime. Toutefois , si s impli-- flee qu'eHe ait ete, on tend aujourd'hui a penser qu'ellea ete maintenue de Iaeon tres volontaire et conscienteet qu'elle survit dans les textes litteraires bien au-dela de ce qu'elle a YGClJ dans l'usage, en admettantmeme qu'eHe n'ai t pas toujours ete le fait des let tres,De toute Iacon s I( de flexion 1I etait indispensablea l 'identif icat ion du cas-sujet masculin dans eo sys-teme d'?ppos.ition, e~tre cas-sujet et cas-regimeet la declinaison etrut condamnee lorsque cet sa-cease d'etre entendu, comme on l'a vu, devant uneconsonne de mot suivant a l 'interieur d'un groupe dem.ots: Au xlye siecle, it ne sera J!lus question de de-clinaison, meme dans les textes litteraires sauf dansla region picarde. '

    IV . - LES NOMSA. - LES NOMS MASCULINS

    Il faut distinguer trois deolinaisona : la premieregroupe presque tous les noms masculins, la secondequelques noms issus de formes latines en -er ettsrmines par -e en francais, la troisieme une cin-quantaine de noms qui ant une double forme ausingulier et qui sont iS8USd'imparisyllabiques latins.

    ire DECLINAISON :

    CSCH

    Singulier( ti ) mars(Ie) mur

    Pluriel(Ii) mar(les) mars

    N. B. i) L'inf init if employe comme nom appar tient acette deolinaison et reeoit un s au CS singulier.2) Certains noms termines par -s ou -z au CH sontindeclinables et ne varient pas; ainsi b ra z, c or s, m oi s,pais. Meme observation pour les noms Mmini,ns analo-gues.

    2e DECLINAISON":Singulier Pluriel

    CS (li) pere ' (li) pereCR(le) pere (les) peresN. B. 3) De meme f re re , g en dr e, l io re , m ai tr e, v en tr e,vespre, et quelques-autres,4) De bonne heure cette deolinaison s'assimile a lapreoedente at ron peut trouver au CSS li pere au liperes.

    I,L

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    18 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAIS3e DECLINAISON :

    csCRSingulier( Ii ) l er re(Ie) larron (Ii) Iarron( le s ) la rrons

    Pluriel

    N. B. 1) C'est le deplacement de l'accent du nominat iflat in (accentue sur a : latro) it l 'accusa. ti f (accentue suro : la tro ne m) qui explique l'ecart entre les deux formesIranoiennes, a et 0 ayant subi un sort different suivantqu'i ls otaient accentues au non.2} De meme, abes, abe - ancestre, ancessor - ber,baron - bris, bricon . - buoere, b uoeor - chantere,chanteor - compain, compagnon - emperere, empe-reor - enfes, enfant - fel, felon - ga igner e, ga igneo r- garz, garfon - g lo ut, g lo uto n. - m en tere , m en teo r -nies, ne(J OU ---: p echiere, p echeor - p restre, p ro ooire -s al oe re , s al oe or - sire, seig nor - traitre; tr ait or, - tri-eh ierre, tric heo r - tro oe re , . tro oeo r - ( Je ne re , ( Je ne or -etc. De meme dans un certain nombre de noms prop resd'origine latine au germanique comme Charles, Charlon.- G uene(s), Ganelon - G ui(s}, Guion - Hugues,H ugo n. - Lazare(s), Lazaron, etc.

    r! 3) Aux noms it double forme, i l faut joindre deux noms. : a u la difference ne tient pas au dsplacement de l'accent :I Singulier Pluriel

    CSCR'CSCR

    (Ii) cuens(le) comteBI') ( h} om , o n, u em(t') (h}om' (Ii) comte{ le s } c om ie s( Ii ) ( h} ome( le s ) ( h )omes4) De bonne heure, cet te declina ison a'ete oontamineepar Ia premiere: rune de ses formes a prevalu et souventa reeu au CSS s de flexion iainsion pourra trouversires au CSS, et au pluriel prestre(s).

    LES NOMS 19ACCIDENTS PHONETIQUES DEVANT S DE FLEXION

    All cas-sujet singulier et au cas-regime pluriel,la consonne finale du radical est sujette it certainsaccidents du fait qu'eHe se trouve devant une autreconsonne, s de flexion j il en est encore ainsi enfrancais dans quelques mots, avec une prononcia-tion correcte qui differencie par exemple Ie singu-lier un reuf (a u f s 'entend) du pluriel d es reu fs (a uf s'efface) . En ancien francais, Ia difference est entreles cas en s et les cas sans s. .IIsuffira de donner des exemples pour Ie singu-lier ; aUKnoms, on joindra quelques adjectifs, ou leproblems se pose evidemment de msme :a) les labiales p, m, f, la velaire c (= k) tombentdevant s :

    CS cous verse< vermis)CR coup verm vise

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    20 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN(::AISCS cheoaus beaus cous* nus nu llu s)CR chepal bel col nu lCS f iz f il iu s ) vieuz reclus) conseuz .CR fil oieil conseil consilium )N. B. Rappelons qu'au cours du xme siecle, z sereduit au son de s.

    B. - LES NOMS FEMININSTrois declinaisons encore : la premiere groupeles noms termines par e, sauf tres rares exceptions;la seconde, les noms a terminaison masculine;la troisieme recueille, avec suer (CR seror) , cinq ousix noms du type none, (CR nonain) et des nomspropres qui ont des formes differentes au cas-sujetet au cas-regime.Mais tous les noms feminins, sans aucune excep-tion, n'ont qu'une forme au pluriel; elle comporteun s de flexion aux deux cas.

    ire Di:CLINAISON :Singulier Pluriel

    CSCR (la) f iUe ( Z e s ) f iUes

    rrLES NOMS 21

    2e DECLINAISONSingulier Pluriel

    CS Amor(s) - (la) cite(z) ( le s) a mo rs _ . ( le s) citezCR Amor - (la) citeN. B. - Dans les textes picards , on peut trouver cites(CS), et eitet (CR) ou se maintient aussi Ie t lat in desmots en - ta s , - u uem .(* ) Peut etre aussi Ie CS de coup.

    3e DECLINAISONSingulier Pluriel

    CS Berte - (la) none l ( Z e s ) .C R Bertain - (la) nonain nonaLnsN. B. _ A cette declinaison appartiennent ante, an-tain - taie, taien=r- pute, putain, mars surtout .d~snomsde riviere et des noms de femme. On peut joindre a

    cett e dea linaison un nom en reali te fort di ffe rent :CS ( la ) s u er I (les) serorsCR (la) seror )La double forme s'explique iei comme dans les mas-culins du type lerre, par un deplacement de l 'accent.

    TABLEAU DE LA DECLINAISON DES NOMS'Mascul ine

    Singulier I II IIICS murs bruz pere lerreCR mu r braz pere larron

    PlurielCS mu r bruz pere larronCR murs braz peres larrons

    FeminineSingulier I II III

    CS fille Amor(s) noneCR fille Amor nonainPluriel

    CS ~ f i u e s amors nonainsCR

    ! !

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    28 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISy) COMPLEMENT CIRCONSTANCIEL :

    surtout de temps, comme en francais moderne :le jor deoant l' autrier=a .veille = l'autre jourl'endemain de la saint Lehan (Be 2147).

    mais aussi d'allure et meme de direction:grant erre, grant alletire, etc.Port a Artur toz les galoz .= porte-Ie itArtur au galop (Be 653).la droite voie=out droitl e s d e s to l ete s=ar les chemins de traverse\.la r io ie re g ra nz s au s s 'en fuit=e long de Ia cate, en bondissant il s'enfuit (Be961).

    rv . - l 'ARTIClEARTICLE DEFINI):

    Masc, : Singulier Pluriel Fern. : Singulier PlurielCSCR u1 0, I e liles la les} ANGLO-NORMANDOn peut trouver Ia forme lu, aulieu de le. PICARD: L'art icIe feminin peut prendre les formesdu masoulin au singulier : li mer, le porte.Elision: toutes les formes du singulier peuvents'el ider devant voyelle ; li (art. plur.) ne s'elide pas.Enclise : sauf tres rares exceptions, les articlesle et le s se soudent it la preposition qui les precedequand il s'agit de a , de, en : Ie resultat de I 'enclisepeut varier beaucoup suivant les textes, selon queIa vocalisation de 1 est notes ou non :a + Ie > al, au a + les > as, aus, auxde + Ie > del, du, dou de + les > desen + Ie > eI, eu, ou, u en + les > esN. B. 1) En picard; le n'est pas sujet it I'enclisequand il est employe au feminin : en le vie (Ni 104).2) Ou < en + le a survecu dans la langue mo-derne par confusion avec au : M. DAUZAT citel'exemple : en mon nom et au sien ; cette confusionremonte a I'ancien francais , Mais ou se retrouveencore au XVIe siscle sous Ia forme on; on lit chez

    RABELAIS : on corps.

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    30 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAIS3) L'enclise se produit meme en~re une p~epo-sition et un article qui n'ont pas de lien syntaxique,lorsque le complement d~ l 'infini ti f se t~?uve. r .ejeteentre la preposition qUI commande I'inflnitif etl 'infinitif meme dont ildepend:

    Ca r canques f )OUSnaus oerres faireSera e ssa mp le s sa ns d ou te rDel miracle rep resenier=ar tout ce que VOllS nous verrez faire sera imagede la representat ion du miracle (Ni_iOS-110).(litteralement: de representer le miracle).

    L e so lei! es t cause des oens fa ire lep er etabessier=e soleil fait naitre et calmer les vents (Meteores).litteralement : de faire lever et calmer les vents).ARTICLE INDEFINI

    Masc, ; Singulier Pluriel Fern. ; Singulier PlurielCSCR }nsun ununs un e unes

    SYNTAXE DE VARTICLEARTICLE DEFINI

    Au chapitre du nom, il figure .ent~e parenthe~es ;c'est qu'il n'est pas automatiquement exprimecomme dans la langue moderne; il s'en faut debeaucoup,Varticle deflni s'applique toujours a. un nomdeja. connu : li rois, c'est celui dont on a deja. parle ;on l'emploie meme parfois OU la IB.?gu~ modern~emploierait un demonstratif (determinatif), ce qUI

    L'ARTICLE 31n'est pas surprenant puisqu'il est issu du demons-tratif latin:l'am e U terpan dragon son pere,et la so n fil et la sa m ere (Yv 663-4).c'est-a-dire I'ame de son fils et celle de sa mere ,etant donne la valeur du cas-regime absolu.

    R ois, si grans tresors ne [u onques i .il a passe I 'Oaeoten. =elui d'Octovien (Ni 1404-5).On l'emploie devant un nom de nombre pour expri-mer une fraction d'un tout:Veant moi a les deus ocis,Et d em ain ocirra les qu atre=evant moi ilen a tue deux et demain iltuerales quatre autres (Yv 3866-7) (il y a en effet s i : : :chevaliers qui sont prisonniers du geant, a I'ori-gine).

    Non-expression de I 'article defini. - On ne I'ex-prime pas:a) quand Ie nom est attribut :

    Les oroilles sont ooie et d oizpar ou s ' an oien t au cuer l a ooiz .=es oreilles sont la voie et le canal par OU la VOlXs'en vient au cceur (Yv. 165-6).b) devant les noms abstraits, personnifles ou non,et ilen sera ainsi encore au XVIe siecle :

    C ar Amors ne se puet celer=ar Amour ne peut se dissimuler (B e 575).. A f)oec se merla ja lou sie,De se sp er an ch e e t d e ro er ie- Jalousie, desespoir et folie s'y melerent (Feu159-60).

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    32 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANgAISc) ni devant leg noms de pays, ni habituellementdevant les noms de peuple; et cet usage se main-tient partiellement [usqu'au XVle siecie :

    Enfers ne m e plest pas='enfer ne me platt pas (Th 422).D roit vers G ales s'en sont a le (Be 2129).Asenble sont Corneualeis (Be 877).E ns i c er ca t re st ou t P oi ta u=insi ilparcourut tout le Poitou (Ba 619) :

    et le nom du Poitou est suivi d'une enumeration deseize noms de province dont un seul est precedede Particle.d) dans un grand nombre de locutions qui ontvaleur generals (et dont certaines se sont censer-vees : crier misere, livrer combat p. ex.), particu-Iierement devant quelques noms d'usage frequent:g u er re c om enc ie r, m e rc i c ri er , m esse o utr, a um osn e[aire, etc.e) quand Ie complement est introduit par un~preposition, ilest frequent aussi que l'article ne soit

    pas exprime :( Am or ) n e ne l l es se a n l it reposer=t Amour ne Ie Iaisse pas reposer au lit (Cli 613).ARTICLE INDEFINI

    Cet art icle s 'applique a un individu distinct etla qualification d'indefini lui convient -mal. La pre-miere fois qu'on parle du heros dans la Chastelained e V ergi, on l'appelle un . c heva li er (v. 19), ensuitel i c heoa l ie r s (v. 21) ; c'est encore ainsi que 1'0n pro-cede en francais,

    L'ARTICLE 33Un garde parfois quelque chose du sens du latinunus et signifie alors un seul , un meme :N ou s so mm es d 'u ne com pa ign ie (Feu 947).Au pluriel, iI n'est p~s courant,. mai~ iI. s'app~-que au sens eollectif, sort a une prore d objets, soita une serie d'objets de msme sorte; cela est encorepossible au XVle s ie o le :

    U n s g an z d e o oi rr e a ij e 0 moi='ai une paire de gants (Be 2032).T ri st an u ne s f or ce s a oe i:=T. avait des ciseaux (Fo Ox:205).O d u ns e sc hi es s e d ed u ie en t=ls se divertissent avec un jeu d'echecs (Mi 200).

    Ainsi encore uns degrez sera un escalier, unsvalles, une domestieite, etc.N on -e xp re ss io n d e l' ar ti cl e i nd ef i, ni . - On ne l 'ex-prime pas:a) quand Ie nom a pour epitMte des mots comme

    t el , a u t re , meme :Qar j'ai tel d u el c 'o nq ues le roi.Out m al p en s d e o os ver s m o~...=ar j'ai un tel chagrin que Ie roi vous ait soup-Qonne a cause de moL. (Be 109-110).

    Q u an t [ e s era i e n autre terre (Be 245) : .et pas davantage devant ces memes mots dans leuremploi de pronoms :

    Por autre amer et mo i l ai ss ie r=our en aimer une autre et m'abandonner (Cha770).

    ]III!

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    34 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISb ) dans des propositions qui comportent une inde-termination : condit ionnelles , interrogatives, nega-tives, et dans cette mesure seulement :

    Ne s ar oi e te rr e n om m er=e ne saurais nommer une terre (Ba 636).V en t n e co rt n e [u elle n e tren ble=as un souffle ne court, pas une feuille ne tremble

    (Be 1826).c) dans des formules de portee generale, par exemplequand on considere une espeee :

    N os n 'a oo ns nu l m estier d e ch ien=ous n'avons nul besoin de chien (Be 1559).Ne gerrai m ais d ed en z maison=e ne coucherai plus sous un toit (Be 1001).

    - Le pluriel servant frequemment aux affirma-tions' generales, on s'y passe facilement d'article :Marc a orelles d e c he va l (Be 1334).Car en no pais n 'a m on no ieA utre qu e p ierres d e moulin=ar en notre pays i1 n'y a pas d'autre monnaieque des meules de moulin (Ni 375~6).Or a p a in es , or a anu is .

    = a present ila des peines, des chagrins (Ba 581).ARTICLE PARTITIF

    II apparatt rarement en ancien francais, et auXVI6 siecle encore son emploi sera plus restreintqu'aujourd'hui :

    L'ARTICLE 35I I r ed ema n de viande=l redemande des vivres (Be 3957-8).o lu i o en oie nt d ui o asle tQu i p o rt o ie n t et pain et vin=vec lui venaient deux valets qui portaient dupain et du vin (Er 3120-1).En tous tans ooloit car mangier=n tout temps il voulait manger de la viande(Ba 47).

    - Mais Ia preposition partitive d e s'emploie apresles adverbes de quantite ( asse z, tro p) , apres point ,ou meme parfois seule avec un sens tres fort:9 a~ an z n 'a p oin t de n os tr e r oi=otre roi n'est pas ici (Iitteralement ici il n'ya pas trace de notre roi) (Ene 4990).Encontre a de s on s ei gn o r=e chien a rencontre la trace de son maitre (Be1498).

    N. B. L'article partitif mod erne est tres rare; ilapparalt pourtant :M olt so nt el bo is del p ai n d es tr oi t=ans Ie bois ils sont bien prives de pain (Be 164~}

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    r-----------

    VI. - A DJE CT IFS E T PA RT IC IP ESOn peut repartir les adjectifs et les participesentre trois declinaisons : la premiere comprenantles adjectifs dont le masculin et le feminin sontdifferents, en particulier Ies participes passes;-la seeonde, les adjectifs qui ant la meme forme au

    cas-regime maseulin et au feminin, en particulierles participes presents; - on peut classer dansune troisieme declinaison les comparatifs de typelat in (dit synthetiques 1) qui presentent une doubleforme au singulier.PREMIERE DECLINAISON

    Mase. : Sing. Plur . Fern. : Sing. Plur, Neutre sing.csCR bons bonbon bons bone bones bonModifications subies par la consonne finale duradical:a) devant s de flexion : se reporter aux noms;on notera surtout l'alternance qui resulte de la voca-lisation de I devant consonne :

    CSS beaus (PICARD: biaus)CRS belb) due aux differences phonetiques qui apparais-sent entre masculin et feminin ; surtout:

    ADJECTIFS ET PARTICIPES 3'1) a la sourde t du masculin correspond au femi-nin la sonore " devant e :

    sauf, sauoe2) a la sourde c issue de g latin correspond -g eau feminin:

    l on e, la ng e3) a la sourde c issue de c, k latin ou germanique-che au feminin :

    s ec , s ec he4) a un z du masculin, -c e au feminin (oil c seprononce d'ailleurs comme z : voir p. 1 3) :

    tiers, .t ierceN. B. 1) Le neutre n'est employs que comme attri-but d'un pronom neutre singulier au d'un infinitif :, Et certes m ou t m 'e st bel que vas '\.../Estes u plus cortois de nos ~=t cela me plait fort que vous soyez le plus cour-tois (Yv 73-4).2) Les adjectifs qui seraient terminsa par un groupede consonnes tr, dr comportent une voyelle d'appui,si bien que le masculin ne differa alors du Iemininque par s de flexion: a u tr es , a u tr e.3) Les adjectifs terminss par -s, -z au en sontindeclinables comme les noms analogues, mais ilsont une forme feminine: tierz, tierce.4) Des influences analogiques ont arnene Ia refec-tion d'un bon nombre d'adjectifs masculins et femi-nins dont l'evolution phonetique avait separe lesformes et quise sont rejoints .

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    38 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISDEUXIEME DECLINAISON :

    Masc. ; Singulier PlurielCS granz grantCR grant granzFern. : Singulier Pluriel Neutre sing.

    cs iCR ~ granz grantrantN. B. 1) De tres bonne heure I'analogie a j~ue enfaveur de la premiere declinaison, mars par ailleurson trouve encore pendant plusieurs siecles (et jus-qu'a aujourd'hui) des feminins sembla~les aux mas-culins (grand mere) et des adverbes qui les attestent(pesamment).2) Au CSS feminin, on trouve assez souvent paranalogie du masculin s de flexion. .3) Le ((gerondif)) .(precede .ou non d~ en) est uneforme verbale invariable (voir plus 10m : Accord).TROIS[EME DECLINAISON ;

    Masc. : Singulier PlurielCS graindreCR graignor'Fem. : Singulier

    graignorgraignorsPluriel Neutre sing.

    CS gra~ndre I graignors graignorCR graignor IN . B. 4) Comme dans le cas des noms analogues,c'est un deplacement de l'accent d'une forme latinea . l'autre qui explique la difference entre les deuxformes franciennes.

    . ADJECTIFS ET PARTICIPES 39COMPARATIFS ET SUPERLATIFS :

    La tras grande majorite des adjectifs a des com-paratifs analytiques (c'est-a-dire formes avec plus) ;sur Ie type graindre-graignor, relevons maire-maior,mendre-menor, mieudre-meiiior, pire-peior.Mais le superlatif ne se distingue pas toujoursdu comparatif par Particle; c'est le contexte quieclaire le lecteur : dans la Chastelaine de .Vergi(v. 691).celedel mont que plus het,

    c'est la femme qu'elle hait Ie plus au monde jCil est ocis qu'il plus dotot=l est mort celui qu'il redoutait Ie plus (Be 1746).

    N. B. On notera que plus n'a que Ie sens quanti-tatif en ancien francais :Celene tint a lui plus plait (Cha 103) ,

    signifie : ((Elle ne lui tint pas plus longue conver-sation; elle ne lui en dit pas davantage ));et non pas:elle ne lui parla plus desormais, elle ne lui adressaplus jamais la parole.

    SYNTAXE DE L'ADJECTIFET DU PARTICIPEPLACE DANS LA PROPOSITION

    Gette place est fort libre en ancien francais, memepour 1'adjectif attribut; cependant l'adj. epitheteprecede tres generalement Ie nom. Quant au parti-cipe, il est souvent disjoint de 1'auxiliaire .

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    _ _ .. _ ~ _ " ._ c _ -- ~ _ _ '_ ' - . .. .. - , -. -- ,- ,- ~ ,- ~ ~ ~ ~

    II' ,I; II, ilI \',I

    ltO INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISACCORD

    ACCORD DE L'ADJECTIF. - IIn'y a lieu de signalerque le cas O U l'adjectif a valeur d'adverhe: ils'accordeet cela durera encore au xvre siecle :t oz q u it es (deux eSS) =out a fait quitte.Marot ecrit : nouoelle ptde : c'est nouvellement

    pAle , celIe qui vient de palir ; voir encore en fran-eais : t ou te s g ra nd ee o uo er te s, [ ra ic he e clo se .ACCORD DU PARTICIPE PRESENT. - IIne se distinguepas de l'adjectif bien qu'il puisse a l'occasion rece-voir un complement d'ohjet.Le e gerondif est invariable; cette forme appa-rait :a) avec Ie verbe aller et quelques autres verbesde mouvement dans des locutions connues :

    Cil...oa derriere a u s t re st ou t cantantet oil pont deoani lu i plourant (Ba 148-9).b) suivie d'un {{ujet (qui est au CR) :

    Voiant toz ceus de l a c ont re e= la vue de tous ceux de la contree (Cha 923)Oiant toz qu i otr le post='entendirent tous ceux qui voulurent l'entendre(Cha 928).

    c) apres les prepositions en (comme aujourd'hui),ii, sur , ou meme sans preposition.Comme l'infinitif, il peut etre substantive apres

    ADJECTIFS ET PARTICIPES 41preposition et precede dans ce cas de Particle oud'un possessif :

    a m on oioa nt (Cha 331)ACCORD DU PARTICIPE PASSE:- Feminin employe avec estre : accord moderneFeminin employe avec aooir : accord habitual , quine se fait pas necessairement quand Ie participe

    precede, mais tres generalement :Issue fU d e P oo re or=lle etait sortie de l'atel ier (Er 442).J' eusse etie l' eoeschie='aurais obtenu l'eveche (Th 306).

    On lit de meme dans Ypain:Il n'ot pas un e archiee alee=lne s'etait pas encore eloign6 d'une portee d'arc(v. 3443).

    - Masculin employe avec estre : participe attributau es .Masculln employe avec aooir : participe comple-ment au CR; l'accord se fait gsneralement quandIe complement dont il est I'apposition precede leparticipe :

    Mo lt o n t l or h a ub er s d e sm a il li ez=eurs hauberts sont largement demailles (Er961) (sur la valeur ((d'aspect qui engage a tra-duire par Ie verbe etre, voir plus loin p. 122 -litte-ralement : ils ont leurs hauberts qui sont largementdemailles).- Neutre employe avec e st re : iln'a pass deflexion.

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    i Ii I

    i , ; ' , 1I,!

    42 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN!;:AISCOMPLEMENT DU COMPARATIF

    La proposition complement est introduite parqu eP lu s o ou s amo ie l a m o it ieque n e [ es oi e mo i meismes=e vous aimais moitie plus que moi-msme (Cha761-3).

    - mais ge~era!~ment Ie ~ronom (quelquefois Ie nom)par la preposition de j il en sera encore ainsi auXVIe siecle :M es je n e q ui er m ei ll or e sp eede c el i q u ej 'a i a p or te e=m, j.~.ne cher~he pas une meilleure epee quecelie qu J at apportee (Er 625-6), - Voir p. 141.

    VII. - LES N U M E R A U XLes trois premiers noms de nombre se declinent ;oingt et cent, seulement quand ils sont multiplies ,

    et encore pas toujours.La declinaison de un est deja. connue.Deux : Masculin Feminin

    dui, doidous, dellsCSC R dous, deusTaus les deux:

    CS andui, andoi, ambedui, ambedoiC R ansdous, ansdeus, ambesdous,ambesdeus l ambesdous,ambesdeus,ansdo us,ansdeusTrois

    trei, troitreis, trois t r ei s, t r oi sseRV ingt et cent:cs oint, centC R o in z, c en z vinz, cenzOn trouve concurremment les formes mil miUe)

    et milie millia) .SYNTAXE

    1) L'ordinal est plus repandu en ancien francaisqu'en francais moderne : on dira : lu i ti er z, s oi q ua rt,c'est-a.-dire avec deux, trois compagnons (et cela

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    INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANyAIS[usqu'au XVle S.) ; on parlera de meme du tiers lioreou du quart liore, de Louis douzieme; de Charles Quint,au XVle sieole encore. -2) Sur I'emploi de l'article devant un nom denombre pour exprimer une fraction d'un ensemble,voir plus haut p. 31 .3) L'accord peut ne pas se faire au pluriel S1 lenom de nombre est termine par un.

    ,

    .L.

    L51S PRONOMS

    :;" = ~S :! ; : : : I.~;. '" 'i ..!~ ~ - .$r : . - . 2 l s_ ~8 Ul~ 0"1 Q ~~(I$ 1>l"t;S~_; .Q!= : U l1 : ... .. .. ~ C 0 p". :l a0 as"'Q)o::l. ....~OO ... S'" I ~ s::4", 0:1 ! - < ~ ;:I"t;S'a'"(I) Qm..!~E;

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    46 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANgAISN. B. 1) On ne confondra pas el, forme reduitedeele, avec le mot neutre el (issu d'un bas-latin *ale)et qui signifie autre :So~ ,he~nois p~ist, ainz ~e. fist el =l commencapar s eqmper (Be 3610) (htteralement : il prit sonequipement, ilne fit rien d'autre avant).2) Le neutre est represente par deux formes quisont aussi masculines: CS u , CR leo3) On peut deja considorer comme un pronom

    (de la 3e personno) Ie CS de home: l'on on (l'anl'en). ." ANGLO-NORMAND: Jeo est une graphie de je. PIC~RD : Speciflquement picardes sont lesformes survantes (formes fortes et formes faiblesdistinguees comme plus haut) :

    Singulier 1re pers. 2e pers. 3e pers.- - - -CS Masc. Fern.[o, jouCR mi ti le

    PlurielCR ausRMIechi si

    o j i ,

    L'ELISIONElle est Iamiliere au francais mod erne , mars ilfaut noter que:a} je peut ne pas s'elider ; dans ce cas on a affairea une forme forte (tonique) ; ,b) des formes fortes comme mot, toi, soi s'eli-

    . dent pourtant devant en et i plus souvent qu'au-jourd'hui:Lessiez m' an pes=aissez-moi en paix (Er 1278 ) .Et.poise m'en por sa franchise ...=t cela me fait de la peine en raison de sa noblesse(Be 1565).

    c) les formes faibles (atones) s'elident constam-ment:- elision de le, la :

    s l: l 'es t tantost alez oeoir=lest aussitot alle la voir (Cha 521) ;msme apres un imperatil, dans les textes qui offrentune forme faible a cette place.- elision de li (seulement devant en) :

    Le serement en te l manierel'en fist, li dus la foi en prist=llui en fit ainsi le serment que le due recut(Cha 238-9).L'ENCLISE

    Comme on l'a vu pour l'article, les formes faiblesdu pronom personnel : le, les, prennent appui sur unmonosyllabe precedent: je, ne, se au si (adv), queou qui, et se soudent a lui. L'enclise n'est jamaisobligatoire et elle s'est faite moins frequemment duxne au xme siecle,Voici la liste des formes que l'on peut rencontrera part ir de le et les :je + Ie > gel, jelne + Ie > nel, nul, nu (nou) je + lea > gesne + lea > nes

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    48 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN sel si + Ie >sil, selque + Ie > qeI qui + le > quil se + les > sesqui + lea > quisOn trouvera de meme :

    qui + i > qu'i qui + en > quinPar exemple dans la Chastelaine de Vergi :

    s el n omma (v. 126)=i Ie nommaj el d e ts se (v. 320)=e Ie deisseJ e n el v eo ie (v. 754)=e ne le veoie.

    SYNTAXE DU PRONOM PERSONNELATTEINTES A LA DECLINAISON

    Des Ie xne siecle, on trouve des formes de CRemployees comme sujet ou apposition de sujet :S'irons tornoiier moi et ( lOS=ous irons jouter, vous et moi (Yv 2501)Moi et Yseut, queje ooi ci,en betimes: demandez li !=Yseut, que je vois ici, et moi, nous en bumes, 'dernandez-le-lui (Fo Ber 174-5).

    Les confusions d'autre part sont frequentes entreIes deux formes de CR lui et Il, dont la premiereest masculine et la seconde feminine:Sai que voudra a lui parler (Be 657),c'est Tristan qui voudra parler a Iseut , on atten-drait Ii pour la designer.

    LES PRONOMS 49 Rois, por li voi s ) ), c e dis: Brengain (Be 523)

    c'est Tristan que Brengain va trouver, on attendraitlui.Cette deuxieme Iaute est moins courante quela substitution a Ii de lui.EXPRESSION DU PRONOM SUJET

    L'ancian francais exprime peu Ie pronom sujet;a la deuxierne et a la troisieme personne en parti-eulier, il s'en passe sans difficulte, et surtout quandl'ordre des mots ferait passer ce sujet derriere sonverbe. De meme, dans le cas de l'impersonnel, ilneutre ne s'impose que lentement et nous avonsencore des formules (< < n'importe I p. ex.) O U nousne l'exprimons pas.Dans Ie vers suivant, aueun des deux sujets n'estexprime, ni je, ni ii :

    Or ai Dieu renoie, ne puet estre teu= present j 'a i renie Dieu, cela ne peut etra tu(Th 388).- Pourtant, au debut d'une proposition, pour evi~

    ter de commencer par une forme faible comme unauxiliaire ou un pronom atone, on recourt au pro-nom sujet. D'autre part, je , tu, il, formes fortes,peuvent etre disjoints du verbe qu'ils precedent(s'ils suivent, c'est immediatement), ou meme em-ployes isolement :Et il, sans point de deponer.lo r fist ar ri er e r e po r te rle tresor...=t lui, leur fit sans delai reporter Ie tresor (Ni91-93)

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    50 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANQAISParler? dyable I J ou, de quoi ? = Parler, diable I moi, de quoi ? (Ba 230).

    Contrairement a notre usage litteraire, l'an.cien.francais rappelle parfois un sujet deja exprll~e,mais loin du verbe - ou encore annonce un sujetpostpose, en utilisant un pronom sujet pleoastique : Il n e set k'iI fait li oarlis =I ne gait ce qu'il fait, le garyon (Feu 542).

    _ Devant un Imperatif enfln, Ie pronom sujet estquelquefois axprime en ancien francais :, Mais vous ploures et je rirai=mais pleurez et moi je rirai (Ba 103).N. B. Un cas particulier de l'smploi isola desformes fortes du pronom personnel au CS.se rencontredans l'afflrmatio et la negation ; derriere un motaffirmatif ou negatif (0 - nen ou non) se place lepronom approprie ala personne qui repond :o je (oie) , 0 tu, 0 il- non ou ,:en + [e, tu, il,Crois le tu, f r e r e ? - 0 Je, dous peres.

    , (Ba 953).I , r l ll La troisieme personne I'a em'po~e/S?r les autres!1 , et _@est issu de@omme nem de ~ "O ie est tres correctement employe dans le J eude la Feuiliee, mais dans BEROUL :

    S ir e, e stie z o os d on e e lpin?- Otl, dame, par saint Martin = Seigneur, etiez-vous donc dms le pin? - Oui ...(v. 475-6).

    On attendrait 0 je ou Die.

    T

    L _

    LES PRONO~jIS 51EXPRESSION DU PRONOM COMPLEMENT

    Devant un pronom qui fait fonction de comple-ment indirect, li, lui, lor (leur), il est courant queIe pronom complement d'objet , le, la, les, ne soitpas exprime ; c'est un phenomena d' eerasement :qui persiste encore dans la langue populaire et - queIa langue ecrite a connu au moins jusqu'au xvnssiecle :. et Ii commandequ'ele li die mainienant (Cha 112-3),

    au lieu de : qu' e le le l i die; J 'a oo ie fe t molt grant fol iequant tolue lia oo ie )= j'avais fait une grande sottise en la lui otant(Th 291-2)

    au lieu de : tolue la li aooie (il s'agit de la baillie deTheophile).- Le pronom complement peut n'etre pas repetedevant un second verbe :

    111 s oos, l a vos tr e grant merci,m 'i o no ra ste s e t s ero is te s=mais, et je vous en ai beaucoup de gril, vous m'yavez honors et servi (Yv 1012-13)

    meme, un seul pronom peut se presenter pour deuxverb es de' construction differente :.M ei smes la fil le au se ignorle sert et porte grant enor

    =merns, la fills dn seigneur le sert et lui temojgnebeaucoup d'honneur (Yv 5411-12).- A I'inverse, ilexiste un emploi pleonastique du

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    52 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANGAISpronom qui annonce ou qui resume un complementplus long:

    Quant li roys l 'ot ens i prove,le haut mirac le du bon saint,lors commanda . ..=uand le roi eut ainsi fait I'experience du grandmiracle du bon saint . .. (Ni 96-8).FORMES FORTES ET FORMES FAIBLES

    A. - La repartition hahituelle des formes forteset des formes faibles est la suivante : avant le oerbe,on emploie les formes [aibles du pronom :que a c ele eure me perdroit ...=u'i l me perdrait des que... (Cha 813)

    les formes fortes, apres le verbe et apres les prepo-sitions, comme aussi deoant l 'infini ti{ et le participe(et Ie gerondif) ;Et quani j'ai avant perdu lui=t puis que je I'ai perdu auparavant (Cha 815).

    B. - Ainsi que Ie montrent ces deux exemples,a . deux vers de distance, Ia langue a Ie ohoix entrela forme faible ou la forme forte du pronom per~sonnel, qui ont, dans ces deux propositions, avecl e m km e o er be , L amsme [ on et io n ; c'est pour des raisonsd'expressivite, c'sst-a-dire de style, que Ie poete apr~fer,r ioil'iiiie etltn'a.ure-:auv~-815, a . la formuleplus courante qu'il avait employee plus haut, ilsuhstitue le pronom postpose et Ia forme forte, pourappeler l'attention sur celui que la chatelaine aimesi tendrement.N. B. Cas memes raisons entrainent meme par-

    I-.-'---_ ._

    rf

    LES PRONOMS 53fois Ia substitution d'une forme forte a . une formefaible avant le verbe :

    Et cil tantost que fa que lase de!:._artent, si li font voie.Et@yst mout tart que il voiedes tauz celi que del cuer voit=t ceux-la aussitot s'en vont de cote et d'autreet lui font place; pour lui, il lui tarde de voir desyeux celIe qu'i l voit du cceur (Yv 4342-5) :Li serait la forme attendue au v. 4344 comme auvers precedent : il s'agit toujours du heros maisIe poete a choisi ici une forme d'insistance, la' formef?rte. Elle se trouve devant Ie verbe plus particu-Iisrement quand celui-ci est un impersonnel (c'est Iecas iei) (voir anssi :

    doni aus ne chaut=ont ils ne se preoccupent pas) (Yv 2739)et . derriere une conjonction ou meme un relatif;VOIrencore :Qui moi moustrez- samblant d'amor (Cha579).

    Les considerations qui suivent pourraient du reateintervenir aussi. .C. - Le choix de la forme forte peut tenir en effetegale.ment it la ~~pugnance de l'ancienne langue aouvnr la proposition par une forme faible (atone);comme Ialangue moderne, elle prsferera alors Donnez-moi a me donnez.Mais quand la presence initiale d'un mot commecar , or, si, ne (de defense) permet d'eviter cet incon-venient, on dira tres hien : Car me donez Ne me donezOr me dites, Si li plot, etc. ' ,

    , !54 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN(_;AIS LES PRONOMS 55

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    N. B. 1) Ce motif, comme le precedent, peut expli-quer la presence inhabituelle d 'une forme fort~ avantIe verbe :Moi n 'a n eovieni il plus proiier=l ne faut pas m'adresser de plus longues prieres(Yv 3992)Moi doiz tu d ir e t on a fe re (Er 2694)Moi d ep es oous t orm en t am er (Ni 364)2) II explique encore qu'on ait recours a un moyenradical pour ne pas commencer par la forme faible :on la place derriere le verbe, particulierement quandIe pronom sujet se trouve postpose :

    Vol es m e oous blasme acueillir ?=onlez-vous jeter le discredit sur moi ? (Ni 1323)S en esc al, g ab es m e t u d on qu es ?=enechal, te moques-tu de moi ? (Ni 1403)

    3) Mais, surtout semble-toi l dans les textes drama-tiques du XIIle siecle, plus proches de la langue parlee,on rencontre pariois l'ordre moderne, avec uneforme faible initiale. Dans les deux premiers desexemples qui suivent, la presence de Comant ? ou dePi, mauoais I au debut du vers peuvent faire passerplus facilement l 'anomalie :

    Comant ? Me q ue riie z v os d on qu es ? I)=me cherchiez-vous ? (Yv 6681)

    F i, m a uo ai s ! Me e uid ie s p ou s p re nd re .. . ? II=ensiez-vous m'attraper ? (Ni 1502)IIn'en est pas de meme dans les exemples ci-des-

    sous: M e m et e le su s sen e nfan t ? =m'attr ibue-t-elle son enfant? (Feu 281)

    Me sie t il b ien l i h u r ep i au s ? )l=me va-t-el ls bien la coiffure P(Feu 590)D. - Nous avons vu qu'apres preposition c'estla form~.for~e. qu~ ron trouve, mais. preoisementquand I'inflnitif depend d'une preposition, Ie pro-nom son complement est rejete sous la forme forteentre cette preposition et l 'inf init if :

    .......... (il) ne fina huide moi proier au lone du jo r=l ne cessa de me prier d'amour tout le jour (Cha126-7)

    ou bien, en l~absence de preposition, ilse place devantle verbe qUI commande l'infinitif mais cette fois ala forme faible : 'M es ele ne la p ot o eo ir (Cha 729)

    Cette double observation, qui vaut aussi pour Iecomplement ~u part icipe, correspond it un etat dela langue qUI se psrpetuera jusqu'au XVlIa siecle,N. B. 1) C'est seulement quand l 'inf init if a valeurd'imperatif qu'il peut etre precede d'une formefaible : N e t e r ec ro ire m ie I='abjure pas ta foi ! (Ni 1278)2) Quand Ie verbe principal est a l' imperat if , Iepronom personnel complement de l' infini tif demeuredevant l 'inf init if , et msme a la forme faible pour latroisieme personne j c'est ce que nous voyons encoreen francais moderne.~) Enfin, a,Pres,une preposition, on recourt pluMtqu au reflechi au pronom personnel de 1a troiBieme

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    56 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISpersonne, si Ie pronom est bien complement dePin finitif :

    E t m ou t enten t a lu i celer=t s 'applique bien it se cacher (Cha 391)tandis que si le pronom depend effeotivement dela preposit ion, on peut maintenir le refleohi :

    Et fist celui a s oi o en ir=t ille fit venir aupres de lui (Cha 151)AUTRES PRONOMS DE LA TROISIEME PERSONNE-1Onl(cas-sujet de~voir p. 18), a tout it faitsa v~ moderne ; mars en et i psuvent se rapportera des personnes comme a des choses :

    E le set b ien qu ' e n tel solazen (era .mieus so n ooloir (Cha 562-4)il s'agit ici du due dont la duchesse medite de fairece qu'elle veut.

    Acord ez m 'i (Be 524) signifie : Heooneiliez-molavec lui;B ien m 'i acort (Cha 644) : J e donne mon accord itcela.- En et i, formes Iaibles, se trouvent toujoursaprss I 'inf lni ti f :

    C ar en B reta ig ne aler en d oi=ar je dois m'en aller en Bretagne (Cli 4266)N. B. - Notre ii y a peut non seulement se pre-senter en ancien francais sans pronom sujet, maismeme se reduire au verbe (a), en particulier quandil s'agit d'exprimer Ie temps (et non pas Ie lieu ) : I!

    I1I__..,L__ ..

    LES PRONOMS 57Trois anz a bien=ily a bien trois ans (Be 2303)S' aooit ti er z j ar q ue l a r e'l nee sto it d e la p riso n v en ue=' etait Ietroisieme jour que... (Yv 4740-1)

    ou encore quand un complement de lieu est dejaexprime dans la proposition:A la cart aooit t ro is b a ro n s=ily avait it la cour... (Be 581)E stra ng e na tu re a en chien=e chien a un etrange naturel (Fo Be 485)ORDRE DES PRONOMS PERSONNELS

    Quand voisinent deux pronoms personnels com-plements, c'est eelui qui est complement d'objetqui precede l'autre : Rois, Pes le chi: [e i t 'amain

    =Roi, Ie voici ; [e te l'amene (Ni 1415) Di Ieme donques I (Ba 750).

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    58

    V'J ,~~ .. .. . . . . .. .w zV'J p~ "~en ~w j;l0'I ll.. r.Il1> 0'I . .w r.Ilr.IlI

    ~ ~. . . : l r.Ilr.Il0p:j ~

    ,I'

    INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANQAIS

    . .I.!! '01ft0 . .~1ftis IIIi :IQ> IIp., :::I IIIII., . . c . . 1ft ~'" c c cCI I GI CI I GI o r CI I:::I :::I :::I :I :::IIII . , . . . . :::I 00 V. .

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    60 INTRODUCTION A L' ANCIEN FRANCAIS

    I ISYNTAXE DU POSSESSIP

    L'emploi des formes atones ou faibles est Ie memeen ancien francais qu'en francais moderne, maiscelni des formes fortes ou toniques est plus etendudans I'anoienna langue; elle peut comme aujour-d'hni leur donner:a) une valeur nominale : [(Ies siens , c'est-a-dire

    sesparents, ses hommes ;b) une valeur d'attribut :il e r t t oz miens (Cha 789).La dame e st m oi e et je sui suens (Er 4800)Mais, A la difference du franeais moderne, elle lesutilise aussi comme adjectifs, avec l'appui de ce queles grammairiens appellent aujourd'hui un deter-minatif :u miens cuers (Cha 773)la nostre redemption (Ba 82).La distinction des formes adjectives et des formespronominales ne sera pas encore faite au XVIe siecle.N. B. 1) Au lieu du possessif feminin elideJe n' irai point, fait il, par m'ame (Ba 396)

    on pent trouver deja. Ie possessif masculin qui nes'elide pas.2) L'ancien francais prefere souvent, sans intentionbien marquee semble-toil, it I 'adject if possessif , Iepronom personnel complement du nom:

    La biautez de u m'aluma (Er 3634)S eu r le c or s etl'ame demoi (Cha 333).3) Valeur objective parfois du possessif:

    Rois, to n trauour, Pe s le chi!=oici celui qui te trahit (Ni 1507).

    II .I

    LES PRONOMS

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    SYNTAXEATTEINTES A LA DECLINAISON

    Confusion frequente entre cestui et c es ti , e el ui etceli, les quatre formes fortes de cette dsclinaison,dont on arrive it confondre les genres.REPARTITION DES DEMONSTRATIFS

    L'ancien francais ne distingue pas une formeadjective et une forme prononiinale, une valeurdemonstrative et un emploi dsterminatif (commedevant un relatif par exemple) ; bien qu'il existe. des l'origine une tendance it preferer cisi commeadjectif et une tendance plus nette encore a . pre-rerer cil comme pronom, on emploie encore auxme siecle cii et cele comme adjectifs, plus rarementcist et eeste comme pronoms :Roys, chii Maham q ui te fist ne=Roi, ce Mahomet, ton createur (Ni 115)C he stes o nt c he nt d ia ole s a u c ors=celles-oi ont cent diables au corps (Feu 318).

    - Dans le principe, cist, qui etait employe surtoutdans le dialogue, correspondait aux deux premierespersonnes tandis que cil, qui dominait dans Ie recit,correspondait it la troisieme ; la nouvelle reparti-tion (adjectif-pronom) a pu affaiblir cette distinc-tion ancienne qui s'efface peu it peu, il reste quependant longtemps cist et ci l se sont opposes, nonseulement it cause des personnes qu'ils represen-taient, mais' par voie de consequence comme ledemonstratif de la prozimite et comme Ie demons-tratif de l'ewignement: proximite et eloignement dansIe temps, plus souvent que proximite et eloigne-

    ment dans l'espace, car eist et ci i repondent rare-ment it un geste. La langue a meme renove cetteopposition avec I'appui des adverbes ci et la. Dame , ki es t chis autres chi ? =ui est cet autre ici ? (Feu 820){dans le cas part iculier chis est un vrai demons-tratif }.Dans le Tristan de HEROUL,Mol t l 'a or a tost ci l grant fe u arsee t L a po ud re c is t v en z e sp ar se=ce grand feu l'aura bientot brulee et ce vent aurabientot eparpille sa poussiere (v. 1169-70). Cil grantfeu, c'est le bucher qui brule a quelque distance;c is t o e nz , c'est le vent qui souffle sur tous les temoinsde la scene. C' es t c ele q ui pristc elu i q ui so n seig no r o cist ='est celle qui epousa celui qui tua son mari(Yv 1809-10). Voila ce qu'on dira de la dame quisonge a epouser Yvain : dans I'avenir, en se report antau passe; mais lorsque Laudine presente effect.ive-

    ment ce nouvel epoux a ses barons, elle le designeainsi : e is t c he va lie rs , q ui l ez m oi s ie t =ce chevalier qui est assis a cote de moi (Yv 2114)_ Dans un emploi particulier, ou sa valeur paraitreduite it celle d 'un art icle, l 'adjectif demonstrat ifs'applique aux etres et aux choses qui paraissentappeles ((par Ie contexte et traditionnellementevoques ; c'est un demonstratif que ron peut dire(~~pique bien qu'on Ie rencontre au-dela des Chan-sons de geste :

    LES PRONOMS 65

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    si oerres ces flors et c es h er be s, s'orres ce soisellons canter (Auc XX 21)Oirre par mi ces sauoecines (Ba 577),c'est-a-dire vous verrez les fleurs et les herbes, vousentendrez les oisillons (de la foret oil on lui con-seille d'aller), - il erre parmi les deserts (dont vousavez entendu parler a propos des saints et des peni-tents). .- Le demonstratif neutre ce(qui peut etre toni queou atone) est d'un emploi plus' etendu dans l'an-cienne langue que dans la langue moderne :a) ilest en concurrence avec il comme sujet duverbe impersonnel, dans la me sure oil ce sujet estexprime (au xvne siecle, on dira encore; il e st v ra i,quand nous disons : c'est vrai); - iI sert souventa annoncer une subordonnee (qui peut etre Ie sujet

    (e reel I ~ : Et ce lor fet grant soatumeque la nuit luisoit cler la lune=et c'est pour eux une grande douceur que ...(Er 4899-4900)comme aussi it resumer toute une proposition:Bien a, ce croi, douze ans passez (Er 6221).

    b) comme attribut, et preeedant Ie verbe etre, iln'entraine pas encore automatiquement un verbe itla troisieme personne ; on dit :ce sui je, ce es tu, ce es t il, ce sommes nous,ce estes vous, ceson: il.N. B. On notera la valeur generale de l'expressioncelui qui, suivie du subjonctif; l'absence du relatifn'en modifie pas Ie sens :N'i a celui ne face duel

    =l n'y en a pas qui ne s'afllige, tous s'afIligent( Be 8 79 )Lors n'i a celui qui n'en.plort=iln'y en a pas qui u'en pleure, tous en pleurent(Cha 930)

    .\..11ADVERBES DEMONSTRATIFS

    Le meme type d'opposition existe entre ci et laqu'entre .cist at cil, ci indiquant Ia proximite et laI'eloignement, qu'un mouoemeni soit ou non indi-que:

    \"I

    \ 1jI.,

    Et tu remaindras ci. .. (Ques p. 104).C i o ie nt une dame m ou t b ele (Er 2803).Car caus dela a si atainz ..._ car ila si bien atteint ceux de la-bas (Yv 3257)- Par contre l'adverbe fa, qui traduit un mouve-ment dans un rayon restreint, ne s'emploie jamaisdans Ie repos :9 'a m es a rm es et mo n cheval I (Yv 4145)

    tandis qu'iluec ne marque jamais le mouvement :... les ehastiaus d'iluec antor (Yv 2475),

    ce sont des chateaux qui se trouvent aux environs.- Ci, la et fa (ici n'est qu'un doublet de ci) entrentdans la composition d'un tres grand nombre d'ad-verbes de lieu; les plus usites sont peut-etre ~aienz

    (> ceans) et laienz (> leans) ; consti tues de formesde ~a et de la avec enz intus) ils sont d'emploi etde sens analogues it ceux de ci et de la , mais sontrelatifs a un espace clos :Trap sereiez fel et trauesse "OS ceanz l'ocieiezIntroduction d "ancien /raTifaia. 3

    I'

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    ----------~--.-.--

    66 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAIS=- vous aeriez trop felon de le tuer ici dedana (Er3354~5):ceanz, c'est dans l 'ostel d'Erec, O U nous sommes ;

    T u it eu ident que ce soit d eab lesqui leanz soit entr 'a oenuz=ons se figurent que c'est un diahle qui est venula au mil ieu d'eux (Er 4832~3):nous semmes dans la salle du comte, roms leanztr~duit la distance respeotueuse que les chevalierslaissent entre eux et Ie diahle.- Un autre adverbe demonstratif est ez ou es "(issu de ecce), qui signifie o oic i ; ilest presque toujourssuivi d'un pronom personnel qui, dans Ie prineipe,etait un pronom expressif d'interet (A l a deuxiemepersonne du pluriel generalement, pour associer lesauditeurs au recit); ce pronom a fini par perdretoute valeur concrete :

    Ez oosl e roi molt despere=voici Ie roi tout consterns (Cha 114).Atant es vos le roi Artus

    =alors voiei Ie roi Artur (B e 3702).

    (*) Es a parfois He pris pour une forme du verbe estreet conjugus au pluriel : Estes la 1 10 US .: Ia voici [Flol 3030).

    LES PRONOMS 67

    D. RELATIFS ET INTERROGATIFSn est normal de les grouper en un meme tableau,car ils ont les memes formes dans les deux emplois,au singulier et au pluriel :

    Mase. et fem. NeutreCS kit qui ke, que

    ~ direct ke, que ke, queCR cui coi, quoiforme uniqueAdverbes relatifs et interrogatifs : done - ou

    On notera que cui, quoi (coi) sont des formes fortes.Cer tains mots ne sont qu 'inter rogatifs :a) CS plur,CR plur. } =comhien de ?

    uant .quanz

    J or z a oo it p ass ez , n e s ai quanz (Yv 5872)b) quels, quel

    qui sert it former Ie compose li quels, rare encoreau XUle s ie ole :Li quel ? (Feu 800)

    G8 INTRODUCTION A L'ANCTEN FRANCAIS LES PRO NOMS 69

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    I.,

    IiIi,1",

    SYNTAXE DU RELATIFAtteintes a la declinaison

    Constantes confusions entre cui et qui, confondusdans la prononciation au moins des Ie xrne siecle,et meme entre qui et que. Voici quelques exemplesde la Chastelaine de Vergi:Li dus a cui samble mout grief=e due a qui cela semble tres penible (v. 141) :

    emploi tres correct de cui; on pourrai t d 'ai lleursse passer ici de la preposition.Plus que moi qui il a trahie (v. 743) :Ie relatif etant complement d'objet, il:faudraitregulieremont cui.Celui qui j 'amoie et trahie m'a (v. 739) :le reIatif est ici objet du premier verbe et sujetdu second, mais l'ancienne langue ne l'exprimequ'une fois.1 1 1a dame a d it ce que li plest

    =rna dame a dit ce qui lui convient (v. 204) :emploi normal du CS neutre, bien que I 'aneien fran-cais connaisse aussi ce qui comme sujet, meme de-vant un verbe impersonnel.

    Expression du relati fLe relatif n'est pas toujours exprime apres desmots comme celui , tel (qu'on appelle aujourd'huides determinatifs) :

    Tel i ara [erai dolent- il Y a ura tel que je rendrai triste (Be 1244)N'i a celui n'ait son puiot=l n'y en a pas qui n'ait sa bequille (Be 1232)

    '., .~~,

    Relatif et antecedentL'anteeedent peut se trouver assez eloigne durelatif :

    , . . . . . .. qui ce m'aoez mis suredont li mien cor el ventre pleure- vous qui m'avez impute ce dont mon creur pleure(B. 557-8)

    IIpeut aussi ne pas etre exprime :. . . . . . . 1 1 1out par fui [ausqui ne ()OUS pendi par les paus (Ni 1412-3),

    c'est-a-dire : je fus bien fou, moi qui. .. (on diraitaujourd'hui : bien fou de ne pas vous avoir pendupar les pouces). .Devant un relatif neutre, il est meme rarementexprime :

    Jete dirai que [eras (Th 258)Voir par contre :

    Si aoertirai chou ke j'ai piech' a s ong ie t=e realiserai ce que j'ai reve depuis longtemps(Feu 3)N. B. C'est eette ell ipse de ce qui permet derendre compte des formules si courantes en ancienfrancais : faire q~te sages, faire que fa us , faire qu eoilains, etc. L'exemple suivant les eclairera :

    Ke fait tes sires Hellekins ?- Dame, ke oostres amis fins. 11 (Feu 615-6), Que fait ton maitre Hellequin ? JJ demande la feeMorgue, et Crokesot repond : n fait; madame,ce que fait votre grand ami J), c'est-a-dire : il se conduitcomme votre amoureux.

    ']0 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN

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    Le relatif masculin qu i s'emploie souvent sansantecedent avec une valeur generals :Qlti si le fet ne crien t assau t=qui agit ainsi ne craint pas d'attaque (Cha 956).

    Cet emploi a meme abouti a faire de qu i I'equi-valent de si l'on :C ar qu i point an ooisist porterne $'an setist james raler=car celui qui aurait voulu emporter de Iii quel-que chose, n'aurait jamais su s'en retourner JJ, oubien: [[si l'on avait voulu ... , on n'aurait . .. (Er 5701-2).

    Cette valeur de qu i est nette encore dans les pro-verbes:Q ui cro it co nsoil n 'est m ie fou s=i Fan eroit aux conseils, on n'est pas fou (Er1219).

    - En ancien francais, les relat ifs oi : * et quoi peuvent.s'employer avec un nom de personne comme ante-cedent... la b ele franche au chief b ioiou it n 'a p oin t d e m au ta le nt

    _ la belle et noble (femme) a la tete blonde, enqui il n'y a point de mechancete (Be 3532-3).M e s F lo ir es p et it i menjapo ur B lan ch eflo r ou il pensa=mais Floire mangea peu en eette occasion, a causede Blanchefleur a laquelle i l songea (Floi 1264).

    (* ) Sur ou conjonction de temps , voir p . 1 .4~.

    li troi felon larronp ar qu ai est d estru ite Yseu t ta d ru e_ les trois felons qui perdent Yseut ton amie (Be1002-3).- Le neutre que , sorte d'adverbe relatif qui a sur-vecu dans la langue populaire, peut etre I'equi-valent de tout autre relatif; mais il semble qu'onIe tronve part iculisrement dans laprose du xms sieele

    La ooilie que li rois o in t=a veille de la venue du roi (Yv 2172)[[I t i a u ne besteque, se vos le poiies prendre, vosn'en d o nr ii es m ie un d es membres po r cin e cens marsd 'a rg en t ... ))=ilY a une bete dont vous ne donneriez pas ...(Aue XXII).

    L a p ro po si ti on r el at iv eLa proposition relative a en principe les memesvaleurs en ancien fraricais qu'en Iraneais moderne.Notons toutefois qu'avec le subjonctif :a) elle pent exprimer un souhait :

    C ist nain , qu i D eu s maud ie I=ce nain, que Dieu maudisse (Be 648)

    b) elle peut exprimer une restriction:Et d isoien t qu 'onques m es han .n 'ie re e sc ha pe z, q ue il seiissent=ls disaient que jamais homme ne s'etait sauvea leur eonnaissance (Yv 5791-2)Q U 'o nq ue s c ho se q ue a m al ta in gn en e d eiste s, d on m oi s ov ain gn c._ vous n'avez jamais dit de parole facheuse dontje me souvienne (Yv 5791-2).

    72 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANQAIS LES PRONOMS

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    I II I\ I I

    I I

    I

    SYNTAXE DE L'INTERROGATIFLe pronom interrogatif sufflt it l'interrogationsans la surcharge moderne qu'est-oe ... :

    Q u e p oe z e str e d eo en a ? (Cha 756)O u pansez p as?deviendra facilement en francais moderne A quoiest-ce que vous pensez ? (Cli 2841)t t l ' Par consequent des formules comme les suivantes

    t sont hien plus pleines qu'aujourd'hui : -Qu i es t qu i se demante si ?=quelle est Ia personne qui se desole ainsi ?(Yv 3571).Qu'est c e qu e . .. (Cha 847).

    Pas plus que Ie relatif neutre n'est habituelle-ment precede d'un antecedent, l'interrogatif n'estprecede de ce dans l' interrogation indirecte :Ne se t q u'il d ie (Be 612).

    - D ont et d' O U sont confondus jusqu' au xvne siedei:de l it l es formules interrogatives suivantes : Ha, amis, dont est c e v en u s? (Cha 755) Et dont e st es vou s P (Feu 530)

    , N. B. L'interrogatif est souvent associe it un rela-tif dont iI est I'antecedent ; Ie groupe qu'ils formenta une valeur concessive:Qu i que l' antande et qu i que l'ie,ja e sso in ee n e le ta nd ra= qui que ce soit qui Ie comprenne et qui I'ecoute,aucun empechement ne I'arrstera (Er 6098-9)Aler quel part que cos oolez (Yv 3592)L i q uels q ue so il iert e ureu s

    = tous tant que nous semmes, nous serons heureux(Ni 1365) :ees derniers exemples nous mettent sur Ia voie dutour moderne quelque . .. que.

    ... Q u an t q u' il voudra ferai=e ferai tout ce qu'il voudra (Be 2424) :eegroupe est parfois soude et Berit quanque(= quoi que ce soit, tout ce que)

    L a p ro po sit io n i nte rr og ati veLe ton peut suffire a marquer l'interrogation,comme dans la langue moderne ; c'est ainsi qu'Iseutpose (au feint de poser) une question indignee aTristan au cours de la scene qu'ils [ouenttous deuxpour Ie roi Marc :

    Il vo s m esc ro it d e m oi to rm en te t j 'e n te nd ra i l e p ar le me nt ?=l vous soupconne fortement a mon propos etj 'ahorderai ce sujet ? (Be 169-70)Autre exemple dans Erec :

    Ois onque s p a rl er , ret il,de l ro i L ac e t d ' E re c so n fil ? ))_ as-tu jamais entendu parler, dit-il, du roi Lac etd 'Erec, son fi ls? (v. 5.987-8)

    Mais la presence d'un mot interrogatif est d'au-tant plus necessaire en ancien Irancais que l'ordrenormal des termes dans l'interrogation, l 'ordre verbe-sujet, risq ue d 'e tre m asq ue en I'absence de sujet, et,comme on I'a VU, le pronom sujet en particuliern'est pas couramment exprime ; on lira: Amis, ou apez v os e st ? (Be 1797),

    phrase de type moderne, "'- mais aussi :

    7~ INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN~AIS

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    ~ - ,__ ~ ---..a=,

    Comment le sez ? (Be 4295) Ouse sont misi (Be 4300).

    L'ordre verbe-sujet n'est modi fie que lorsquec'est Ie mot interrogatif qui est Ie sujet : Qui est ceenz ? (Th 296)

    S'il est utile d'insister sur l'identie de la per-.sonne, on detachera en tete un pronom ou un nom,qu'on rappellera (ou qu'on ne rappellera pas) parun pronom sujet apres le verbe :. Et ceste dame ansamble 0 lui,amis, fet li rois, qui est ele ? (Er 6550-1)

    Et pons, qui estes? (Th 296)N. B. 1) Outre les mots interrogatifs que nonsavons signales et differents adverbes toujours enusage (comment? quand ? etc.), ilfaut mentionnerla particule enne (en, ene) =est-ce que . .. ne . .. pas(reponse : Si In francais moderne) :

    En polespas queje cos oenge ? =ne voulez-vous pas que je vous veng ~ (AucXXXII, 12) En'estes vos sains et haitiez ? ='etes-vous pas bien portant ? (Gra 5143)

    2) On peut trouver nient ou point sans ne, l'inter-rogation alors n'est pas negative: As tu point d'orinal ? (Feu 230),

    l it teralement : as-tu que1que chose en fait d'uri-nal ?De meme naturellement avec rien : Estc pons de rien coreciez ?

    C1 ~te8-voU8 fAche de quelque chose? (FIoi 1467)

    I X . - lE V E R B E

    PLAN DE L'ETUDE

    L'origine des formes impose Ie plan suivant :1} les presents : de l'indicatif, du subjonctif, del'imperatif, du participe;2) l 'imparfait de l 'indicatif;3) Ie passe simple de l'indicatif, I'imparfait du sub-jonctif, Ie participe passe;4) l'infinitif et les temps de creation romane, futur_et conditionnel , dit plus exactement formeen -r oie ;5) les temps composes.

    76 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAIS LE VERBE 77

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    I. - LES PRESENTSOn distinguera trois types de presents, qui cor-respondent :

    a) aux infinitifs en -er, ex. chanter;b) aux infinitifs en -ir, participe -issani, ex. [enir,[enissant ;c) aux autres infinit ifs , ex. partir.lndicatif Subjonctif Imperatii Participe

    a )chant chant chantanichanies chanz chaniechante chantchansons chanions, (chantiens)chaniez chaniez chantezchantent chanientN. B. 1) Quand la desinence -er est precedse d'ungroupe de consonnes du type br-, pr-, t r-, etc., un -ed'appui apparait it la ire pel's. de l'indicatif et aux troisires du subjonetif.2) La conjugaison des verbes dont l'infinitit est en. - ie r ne differe de Ia precedents qu'aux 2e pel's. dupluriel : laissiez.

    b )fen isfenis[enist[enissons[enissiez.-ez[enissent

    [enisse[enisses[enisse[enissons, ( fenissiens)[enissiez[enissent

    [enis [enissant

    [ en is si es , e z

    c)part parte partantparz partes partpart partepartons partons, (partiens)partes partez partezparteni porten tN.B. - Comme dans le cas de la conjugaison en -er,un groupe de consonnes termine par -r appeUe un -e

    d'appui aux 3 premieres personnes de l'indicatif : cuevre.ALTERATIONS DU RADICAL

    Alternance oocaliqueCette alternance resulte du sort different desvoyelles Iatines selon qu' elles sont ou non frappeesde I'accent toni que ; neuf formes accentuees sur Ieradical sont susceptihles de s'ecarter des autres :les trois personnes du singulier et la troisieme per-sonne du pluriel a I'indicatif et au subjonctif, Iadeuxieme personne du singulier de l 'imperatif . Voicides exemples pour I'essentiel :

    a> e: ex. l ef , l eo es , l eo e, l ao on s, l ao ez , l eo en t : lavermais devant nasale c- eyn) :

    a im , a im es , aime, am on s, ame z, aimeni : amere ouvert > ie :

    lie f, lieoes, lieoe, Ieoons, leoez; lieoent : levermais devant y (iey > i) :

    pris, p ri se s, p ris e; p ro is on s, p ro is ie s,prisent : proisier (prisier)

    78 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANc;AIS LE VERBE 79

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    o ouvert > ue :( pu is ), p u ez , puet, poons, poez, p ueen: : pooir

    mais devant y (uey > ui) :a pu i, a pu ies , a pu ie , a po io ns, a po iie z,apu ien t : apoiier

    e Ierme >ei > oi:doi, dois, doit, deoons, deoez, doioent : devoir

    o Ierme >ou > eu: . .pleur , pleures, pleure, plorons , plorez,pleurent : plorerMaintien ou disparition d'une voyelle radicale

    Le deplacement de I'accent latin est ici encore al'origine de ce phenomene ; les formes accentueessur le radical {dites souvent formes fortes ) conser-vent une voyelle qui a disparu des formes accentueessur la desinenee {dites formes ( faibles ))); on peuttrouver ainsi par exemple, it l'indicatif present:1re pers, du sing.aiudesjun.manjl!parol

    1re pers. pI.aidonsdisnonsmangeonsparlons

    (et de meme aux autres per (et de meme a la 2e pers,Bonnesde forme forte ll) du plurieI.)Mod i fi ca t io n s consonan ti que s

    La consonne finale du radical est sujette it diffe-rents accidents dont les exemples suivants peuvent

    tif (des verbes e sc ri re , [ ai re , " a lo ir ) :escrif consonne sonore v assourdie a la finale; de memeg ap _, g ab on s ; p e rt , p erd on s ; b oi f, b el lo na ; r am en -t ot f, r ame nt eo on s ; r er oi f, r ec el lo na .e sc ri s : devant s de flexion, chute des lahiales et desvelaires, combinaison des dentales : dormir,

    d ors ; re nd re , re nzesc rit : devant t de flexion, chute des labiales et desvelaires, confusion des dentales : rendre, rent.= ~ ~ ~ ~ ~ : Smaintien de la consonne sonore devantescrioent ~ voyellefaz: la consonne palatalieee {c + y ( fa cio ) aboutit a ts,note z}f ai z, f ai sfaitfaimes, et par analogie : [aisons.faites .font"ail: l mouille par y (

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    Refections analogiquesSignalons, sans plus, que de multiples influencesanalogiques, qui jouaient des I'ancien francais ouqui sont apparues depuia, ont tendu a reduiro honnorohre des disparates creees par revolution pho-netique ; c'est ainsi que les alternances vocaliquesne subsistent plus que dans la conjugaison desverbes les plus usuels. .

    EVOLUTION DES DESINENCES

    S{ngulier

    :1

    l~e pers. - Bien qu'a I'origine, la ire personnen'ait pas de desinenee propre, des l'ancien francais;des influences analogiques font apparaitre un -efinal dans la conjugaison en -er et un -s dans lesautres; mais on rencontrera jusqu'au xvue siecle,sporadiquement, des formes anciennes. - Au subj.ce sont les 3 prem, pers. qui sont refaites en ~e,dans la conjugaison en -er.2e pers. - La desinence normale est -s (elle n'existepas a I'imperatif), mais dans les verbes dont leradical se termine par une dentale, on note gene-ralement par -z la combinaison ts.3e pers. - 11 n'y a pas .en ancien francais inser-tion d'un t analogique dans les formules interroga-tives pour la conjugaison en -er.

    'i!!'i

    'I IiI'.,

    Pluriel1re et 2e pers. - Au subjonctif, des desinences-iens, -iez, phonetiquement normales dans certainsverbes en raison de Ia presence d'un element pala-tal et plus largement repandues dans certains dia-lectes, gagnent au XIII siecle,

    TRAITS DIALECTAUX

    ANGLO-NORMAND. - On rencontre des 1respers.d'indioatif present qui se terminent par c (~ k) oupar g, ~ous une influence analogique :ex. tienc (Eli 423), preng (Eli 673).Les premieres pers. du pluriel ont courammentles desinsnces de I'Ouest -om ou -um a tous les tempsou Ie francien presente Ia desinence -ons : _ex. apum, finum, serum, etc. chez MARIE DEFRANCE : sason, apon, deorion, etc. dans BEROUL.Le subjonctif present est souvent en -ge : cetteterminaison est l'ahoutissement normal de revolu-tion de formes latines en -gam, mais elle s'est etendueplus largement sous l'effet de l'analogie, sauf en{rancien ide la les formes suivantes :querge (Eli 824), prenge (Yo 174), tienge (Eq 157),oieng (Gui 759), etc.

    82 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANyAIS PICARD.- Dans un certain nombre de verbes,

    83LEVERBE

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    a Ia premiere personne du singulier, it . I'indicatifpresent (et aussi au passe simple), une consonnelatine palatalisee qui aboutissait en francien a ts(note z), puis a s, donnait en picard tch, puis eh.Mais cette terminaison s'est etendue par analogieet d'autre part la consonneen question a ete noteede Iaeon diverse par les scribes, notamment parun simple e. A cote de fae(h) facio, fro faz), tae(h) taceo, fro taz), sene(h) sentio, fro senz), eto.,on rencontre encore par analogie :apore (Feu 346), fro aport - oc (Feu 932), fro oi- prenc (Ni 1071), fro prent - rene (Ni 1495), frorent - etc.La premiere personne du pluriel, au present del'indicatif (et au futur), ofire une desinence en-omes face au francien -ons; toutes deux se ren-contrent par exemple dans Ie Jeu de saint Nicolas :colommes (v. 4), allommes (v. 1188), partirommes(v. 1190), it cote des formes franciennes.En pieard, comme en anglo-normand, et pour lesmemes raisons, mais plus rarement, nous trouvonsdes subjonctifs presents en -ge; mais sont propres

    au picard des subjonctifs presents en -che qui resul-tent, soit d'une evolution phonetique norm ale dansce dialecte, soit d'une extension analogique (ainsidans les verbes en -er) ; ex. {ache (Feu 327), fro {ace;meche (Ni 873), fro mete; meskieche (Feu 1060),fromeschi ee ; p io ch e (Ni 1221), froplace; etc.

    II. - L'IMPARFAITPar generalisation du type latin en -ebam, il n'ya qu'un seul type d'imparfait :

    partoiepartoiespartoitparuens, portionspartiespartoientN. B. Les desinences -'tens (-ions), -tez sont dis-syllabiques a l'imparfait et au conditionnel dansl'ancienne langue.

    TRAITS DIALECTAUX ANGLO-NORMAND. Ce dialecte, comma ceux deI'Ouest, conserve les desinences anciennes prop resaux verbes en -er (issues du type -abam) ;chantoe (chantoue), chantoes (chantoues) , chantot(chantout), ehanuens, chantiez, chantoent (chantouent).La 3e pers. du sing. se rencontre plus frequem-ment que les autres sous cette forme archaique,dans BEROULen particulier ; voir encore amot (Cha146).

    PICARD. - La -ire pers. du pluriel presents unedesinence -iemes (qu'on retrouve au conditionnel) :cuidiemes (Ni 1159), porriemes (Ni 1357). EST: Formes en -eve dans les verbes en -er auxtrois pers. du sing. et ala 3e du pluriel.

    "

    8~ INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN(::AIS LE VERBE 85

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    l' ,I

    IIIPASSE SIMPLE-IMPARFAIT DUSUBJONCTIF

    PARTICIPEPASSEIIfaut partir du passe simple, dont Ia conjugai-son offre des difficultes ; la distinction fondamen-tale est entre les passes faibles, oil l 'accent tonique

    frappe toujours la desinence, et les passes forts, ouil frappe le radical a la ire personne du singulier etaux deux 3e8 personnes (les autres etant faibles).On notera qu'en raison de leur origins, dans tousles cas, on peut retrouver Ie s formes du subj. impft .a partir de la 2e pers. sing. du passe simple.Deux tableaux d'ensemble aux pages de gauche(ci-dessous et p. 86) classent Ies differents types depasse simple dans les deux grandes categories; lapage de droite (ci-contre et page 87) presentera desindications plus completes que ron pourra reserverpour une etude plus detaillee ; en t in on trouvera auxpages suivantes les paradigmes utiles.

    PASSES FAIBLES

    en a : chantai (latin :-ovl) : correspondant aux infi-nitifs en -er et en -ier.en i(1) : parti (lat in: - ivi) : correspondant aux in-finitifs en -ir.en I2) : perdien u (1) : parui l correspondant it des infinitifs en\ ore et en -oir.

    I (1)Quelques verbes en -i r font exception:gesir, loisir, nuisir, plaisir, taisir ont normale-ment un passe fort en -zz, e t ils auraient un infinitifen -oir sans un accident phonetique (l'action d'uneconsonne palatal isee) ; courir et querir sont nor-malement corre et q uerre ; mais venir et tenir ontun passe fort en -i, et morir un passe faible en -u.

    i (2)IIs'agit de verbes qui ont recu tardivement unparfait en -d ed i ; telle est la source des dernierspasses faibles en -i. lIs n'interessent guere qu'unevingtaine de verbes en -d re (ren dre , re sp on dre, d es-c en dre, fen dre, [a nd re, p erd re , etc.), en - tr e ( ba tr e,n a is tr e, o a in t re , etc.) + rompre , viore, siore (= s ui or es ;leurs deux 3e8 pers. - etelles seules - se sontecartees du type precedent : p er di e( t) , p er di er en i.

    Mais au debut du XIIIe siscle, ces formes acheventde s'aligner sur les precedentes : p e rd i, p er di re nt .

    u (1 )Ce type remonte a des parfaits latins en -lui eten -rui (exception : o ol ui > * po li > p oi l, de poloir).I1 ne couvre guere que les passes suivants qui seconjuguent comme fu i (de estre) : coru i (corre),'d olu i (doloir) , molu i (m oud re), m oru i (m orir) , paru i( pa ro ir ), o al ui i oa lo ir ),

    86 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRAN~AISII~

    . LE VERBE 87

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    PASSES FORTS

    an I (3) : p i, p in , t in , pail (latin : oi) des verbes oeoirpe n ir, tenir, ooloir

    en I :mis, mesis, mist,-etc. (Iotln :.. 1) )

    ~poi , pail s, pot , e tc .en u ( 2 ) : (Iotln:oul)dui, deus, dut, etc.

    cortes-p~ndanta desinfinitifsen -re eten -oir,

    i (3 )Type qui differe profondement par son alternancedes deux types faibles en -i.

    I

    Les 3eB personnes du pluriel comportentdesvariantes; -streni, qui s'etait generalise aux depensde -sdreni (misdrent >mistrent), cede au cours duxme siecle devant -reni (mirent) ; mais firent a tou-jours existe,}-

    u (2)Nous trouvons ici une vingtaine de verbes tresusuels, de deux types en fait :a) Cinq verbes de v.oyelle radicale a, plus Ie verbepooir :

    oi habui - avoir) -.poi :pavui - paist~e)ploi placui - plaisir) - so~sapm - savoir)toi tacui - taisir) -poi potui - pooir)Ils ~'ont pas d'alternance vocaliqu~ origineIle-ment; ils presentent une ire pers. en a~, et tr~s Mtune alternance analogique : -oi, -eiis, -ot, etc.b) Une disaine de verbes de voyelle radicale e

    bui *bebui -boivre) - crui

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    ,-------_...

    A. - PASSES FAIBLESen a:

    Passe simple Imp. du subj. Part. passechantai chamassechantas chantasseschama ehantas tchantames c ha nt is so ns ,

    chaniissiens 'chanti,chaniastes chantisses, laissiechantissieschanierent chantassent(laissierent)en i(1)

    parti partissei, partis part issesparti part istpar t imes p ar tis so ns , ,partLSswns partipart istes partissez,

    partirenipartissiez

    partisseni~Iparui parusseporus parussesparut parustparumes p aru sso ns, .parusstens paruparustes parussez,parussiezparuren; parussens

    tIB. - PASSES FORTS

    Passe simple Imparfait du subjonctiC

    vi vm voil veisse venisse oolisseveis oenis oolis veisses etc. etc.oit vint v ol t, v ou t veistvefmes oenimes oolimes v ei ss on s, v ei ss ie nsveistes oenistes colistes ve is sez , ve is s ie zoirent oindrent ooldrent, veissentooudrent

    Part. passeveu - v en u. - oolu.

    N. B. 1) Tenir se conjugue exactement commevenir.2) On not era toutefois que .flowir presente, aussiun parfait en ~ : po~, POUSlS. au .passe .BlIDple,pou(l)sisse a I'imparfait du subjonctif ; mais c estun troisieme type de passe qui l'a emporte final~-ment sous l'influence du participe passe vola : Jeoculus, etc. .

    90 INTRODUCTION A L'ANCIEN FRANCAISPasse simple Imparfait du subjonctif

    LE VERBE '91 ANGLO-NORMAND. II conserve plus tard que

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    en s:mu;mesis ; meismistmesimes >meimes

    mesisse >meissemesisses > meissesmesist >meistmesissons > meissons,meissiensmesiseez > meissez,. meissiezmesisseni >meissenimesistes >meistes

    .1I

    m i st re n t, m i re n iPart. passe,

    m is(mais dans les verbes } ardreit radical a consonne : : ars traire : trait)Passe simple Imparfait du subjonctir

    en u ( : I . ) Ipo i( p oi ls ), p ei is "p ou t, p ot(poiimes),peiimes(poiistes),peiistespourent ,

    Iparent

    duideiisdut

    ( p oi i ss e) , p e ii ss e*etc. deiissedetissesdeiistdeiissons,deiissiensdeiissez;deiissiezdeiissent

    deiimesdeiistesduren t

    Part. passe( p oi i ), p e ii -d e ii(*) Parfois pois (en Champagne).(U) En fait, on trouve aussi potsse etc.

    Ie francien aux 3eB pel's. des passes forts en -ti lesformes en ou, ainsi pout, qui a cede la place a poten francien. Mais il reduira plus tOt Ie hiatus ei oueli dans les passes forts en s et en u. - Plus encoreque Ie francien, il hesite sur Ia yoy. finale des par-ticipes passes; tolir (dont Ie participe est tout enprincipe) offre tali, tolu et toloit (toleit chez BEROUL,v.1281).

    II)ji

    PICARD.- 11 conserve plus tard que le fran-cien s entre voyelles dans les passes en s ; a la 3e pers.du pluriel, il presents des formes en -isent, -isseni,face a -istrent, -ireni du francien : misent ou missent,fisent ou fissent, disent ou dissent, prisent au prisseni,etc (parfois ecrits sans t).Comme a l'indicatif present, le picard offre .aupasse simple des ireB personnes en c(h) (voir p. 82)ex.vaue (Feu 257), froVOltS et ooil.Vimparfait du auhjonctif des verbes en -er aetermine tres souvent en -aisse.Enfin au participe passe feminin des verbes en