judéité, errance et nomadisme - sur le devenir juif de freud

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JUDÉITÉ, ERRANCE ET NOMADISME : SUR LE DEVENIR JUIF DE FREUD Betty Bernardo Fuks ERES | Essaim 2002/1 - no9 pages 15 à 25 ISSN 1287-258X Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-essaim-2002-1-page-15.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Bernardo Fuks Betty, « Judéité, errance et nomadisme : sur le devenir juif de Freud », Essaim, 2002/1 no9, p. 15-25. DOI : 10.3917/ess.009.0015 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 179.197.252.35 - 15/10/2013 22h01. © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 179.197.252.35 - 15/10/2013 22h01. © ERES

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JUDÉITÉ, ERRANCE ET NOMADISME : SUR LE DEVENIR JUIF DEFREUD Betty Bernardo Fuks ERES | Essaim 2002/1 - no9pages 15 à 25

ISSN 1287-258X

Article disponible en ligne à l'adresse:

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Bernardo Fuks Betty, « Judéité, errance et nomadisme : sur le devenir juif de Freud »,

Essaim, 2002/1 no9, p. 15-25. DOI : 10.3917/ess.009.0015

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Judéité, errance et nomadisme : sur le devenir juif de Freud

Betty Bernardo Fuks

Si nous voulons approcher cette question épineuse de la relation entrepsychanalyse et judaïsme, maintes fois exploitée de façon discutable parceux qui prétendaient psychanalyser le judaïsme, judéiser la psychanalyseou construire d’ennuyeuses psychobiographies sur le maître de Vienne, ilnous faut introduire dans la discussion le terme judéité 1. À la différence duterme judaïsme englobant l’ensemble des traditions culturelles et reli-gieuses d’un peuple et ne désignant comme juifs que les personnes néesd’une mère juive ou converties à la religion judaïque, la judéité signifie lemode particulier selon lequel une personne s’affirme en tant que juif. Ren-voyant à quelque chose de strictement subjectif, ce mot exprime la manièredont tout un chacun définit, par l’originalité de certains traits, le judaïsme.

Il nous faut également tenir compte de la définition proposée parJ. Derrida : se fondant, du point de vue conceptuel, sur la lecture qu’ildonne lui-même de la lettre de Freud à Fliess, connue comme Lettre 52, oùil met en évidence l’idée freudienne que le psychique est l’effet d’inscrip-tions qui insistent et se répètent, causant effort de liaison, de recréationconstante d’un trait, Derrida considère la judéité comme une expressionqui fonde un acte, une manière de devenir autre. Il s’agit d’un devenir 2,c’est-à-dire d’un mouvement à travers lequel le sujet s’implique dans unedésidentification, dans la rupture de modèles fixes et immuables et dans

1. Le terme judéité a été proposé par Albert Memmi dans son ouvrage Portrait d’un Juif, Paris, Gal-limard.

2. « Devenir », selon Gilles Deleuze, tout au long de son œuvre, désigne une réalité processuelle etnon pas simplement un processus de transformation d’une chose en une autre qui atteint une réa-lité statique, un être final, régi par le principe d’identité et synonyme d’objectivité et de présence.

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l’exil ininterrompu de soi-même. En d’autres termes, la judéité renvoie à larecherche permanente du non-identique par le sujet, à une construction quiéchappe aux contingences de la naissance : il s’agit d’une expérienced’étrangeté.

Ainsi, une archéologie du judaïsme dans la psychanalyse ne peutapparaître que si l’on tient compte du fait que cette culture a été transfor-mée par Freud lui-même, dans le meilleur style de Goethe, dont la maximeest citée dans Totem et tabou : « Ce que tu as hérité de tes parents, conquiers-le, pour le faire tien 3. » C’est dans ce sens que je voudrais démontrer com-ment le devenir-juif de Freud – quelque chose qui se différencieradicalement de sa condition de juif, car il s’agit moins du hasard de sonpassé que du futur de ce qu’il s’est efforcé de modeler dans d’innombrablesdéterritorialisations réelles ou subjectives – soutient la construction de lapsychanalyse en tant que pratique de désidentification, pratique du désirde différence, ainsi que théorie sur le non-identique.

Deux observations de Freud au sujet des traces de la culture judaïquedans sa pensée et dans son style nous renvoient, de façon significative, à laconstruction de sa judéité. La première se trouve dans le texte « Les résis-tances à la psychanalyse », plus précisément dans ses dernières lignes où ildéclare que le fait d’appartenir à la minorité judaïque et d’avoir appris parconséquent à résister à l’isolement s’est révélé extrêmement positif en cequi concerne la lutte qu’il a dû mener contre les résistances à la psychana-lyse. La reconnaissance de ce que l’imprégnation précoce de l’histoirebiblique a eu une influence directe dans sa formation culturelle – registréedans son « Autobiographie » – peut y être directement liée dans la mesureoù la relation positive de l’homme biblique avec l’étrangeté, comme nousle verrons plus loin, traverse tout l’Ancien Testament.

Le peuple juif, en tant que minorité à part dans une société de sem-blables, remonte à l’exil millénaire qui a lancé le juif dans l’expérience dela Diaspora. À la différence de l’exilé politique, expulsé de sa propre patrie,le sujet de la Diaspora vient d’un pays par rapport auquel il se situe simul-tanément dedans et dehors, dans un entre-deux dont les « frontières » luipermettent de partager l’identité du peuple de la nation où il vit et demaintenir un « morceau de soi » dans l’espace marginal du non-lieu.

Freud utilise de façon avantageuse cette position paradoxale dudedans/dehors en faveur de sa découverte : il a cherché le sujet de la psy-

3. Goethe, Faust, 1re partie, scène 1, apud Sigmund Freud, Totem et tabou, Paris, Payot, 1965, chap.« Le retour infantile du totémisme ».

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chanalyse en dehors du visible pour l’y inclure, rompant les liens appa-rents pour qu’alors surgissent les liens réels. Et lorsque les patientsvenaient vers lui, poussés par la souffrance, il a pu voir que tous, indépen-damment de la culture, de l’ethnie et du sexe, étaient d’une certaine façondes sujets de la diaspora ; cela veut dire que si quelque frontière fixait leuridentité à l’ordre du même, étant donné qu’ils étaient divisés, les patientsde Freud fréquentaient aussi le « Pays de l’Autre 4 » : l’inconscient.

Dès son avènement, la position de la psychanalyse freudienne dans laculture se trouve très proche de celle du peuple juif dans la Diaspora : êtretoujours en mouvement, en dehors de l’espace de la majorité, dans diversespaces autres. Il s’ensuit également que l’invention freudienne vit dansl’« entre-deux » : elle fréquente le « pays » de la science, celui de l’art, del’esthétique, de la philosophie, de la littérature, de la religion et du mythe,en même temps qu’elle exige que soient repensés tous ces topos. C’est celaqui justifie sa fonction de coupure et oblige l’analyste à chercher sa nourri-ture toujours au-delà, ailleurs.

Si la psychanalyse quittait ce lieu insituable de l’étranger, elle seraitcondamnée à mourir : toute tentative qui viendrait nier son atopie rendraitimpossible sa pratique. Par parallélisme, on pourrait même supposer quele peuple juif trouverait la fin de sa singularité, si on lui volait le droit dese déplacer dans la diaspora : ce qui est certain, c’est que l’existence de l’État d’Israël ne sera jamais garant de cette singularité, si tant est qu’il n’ensoit une véritable menace 5. L’homologie concernant cette atopie de la psy-chanalyse et du peuple juif, c’est ce qui les fait communier, en un seultemps, avec une identité et une différence. D’un côté, il y a une identifica-tion entre eux, établie par les traits de l’étrangeté et de l’exil. Mais para-doxalement, ce sont ces traits mêmes qui établissent, d’ores et déjà, unedésidentification, dans la mesure où ce sont des traits qui provoquent deseffets de coupure et de rupture. C’est dans ce paradoxe que résident lagarantie de spécificité ainsi que l’étrangeté viscérale qui constituent aussibien la judéité que la psychanalyse.

Lorsqu’il reconnaît que la lecture précoce de la Bible le marque défini-tivement, Freud laisse ouverte une possibilité de réflexion quant à l’inter-vention d’une logique autre, que celle gréco-latine, dans sa pensée. La

4. Cf. l’ouvrage que Serge Leclaire a consacré à l’expérience analytique : Le Pays de l’Autre, Paris,Éditions du Seuil, 1991.

5. Même après la création de l’État d’Israël, le concept de Diaspora continue vivant parmi les juifs.Le sentiment de non-appartenance chez les juifs qui vivent aux quatre coins du monde ne s’estpas éteint.

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lecture des textes bibliques dans la culture judaïque présente un caractèreabsolument singulier et c’est dans cet esprit-là que Freud a connu les pre-miers signifiants du Livre des livres. À ce sujet, le texte le plus émouvantest la dédicace de Jacob Freud registrée dans la Bible qu’il a offert à son fils.Son écriture suggère que la lecture du Livre fut décisive dans la formeselon laquelle Freud a appréhendé, sur le plan affectif et intellectuel, lesurgences de son temps. Dans Freud’s Moses : judaism terminable and intermi-nable, Yossef Yerushalmi, à la lumière de l’impératif juif qui commande dese souvenir (Zakhor), donne une belle lecture de cette dédicace. Établissantune différence quant au mode selon lequel le peuple juif, dans le sensinverse de celui de l’historiographie occidentale, fait face à l’histoire, cethistorien apporte une contribution importante sur la relation de la psycha-nalyse avec le judaïsme permettant de répondre à de nombreuses ques-tions au sujet de la fonction de la mémoire et du processus d’historicisationdans le traitement analytique 6.

Le point le plus frappant dans la Bible hébraïque concernant le peuplejuif n’est pas seulement celui de l’antériorité d’une expérience nomade surla sédentarisation mais, avant tout, le prolongement de son errance à tra-vers le désert et la reprise d’un exode toujours refait. On observe égalementque l’élection de l’étrangeté des anciens Hébreux est mise en évidence parla recherche de la différence dans ce qui lui est extérieur et par la foiinébranlable dans l’inconnaissable. C’est dans ce contexte que l’on situehabituellement, entre autres épisodes, l’histoire d’Abraham, le patriarchedes Hébreux, aussi bien que l’histoire de la matriarche de la royautéjudaïque, Ruth, la Moabite, l’étrangère qui s’inscrit dans la lignée judaïquecomme ancêtre du Messie du Roi David. En ce qui concerne l’exil, l’histoired’Abraham diffère de celle d’Adam et Ève, ou de la malédiction de l’exil deCham, à l’image de celui d’Œdipe qui, après avoir reconnu ses crimes –inceste et parricide –, est chassé de la ville de Thèbes. Toutes ces figuresconnaissent l’exil par punition à la suite de leurs actes qui marquent uneinfraction. Abraham inaugure une nouvelle conception de l’exil en tant querupture « de l’être face à lui-même 7 », en tant qu’apprentissage de l’altérité, c’est-à-dire en tant qu’expérience de la différence. C’est à cause decet exil que ses descendants ont été appelés les Hébreux. Le signifianthébraïque ivrit pour exprimer l’hébreu – l’homme et la langue – signifie lemigrant. Et dans la langue hébraïque, l’absence de conjugaison du verbe

6. Voir mon ouvrage Freud e a judeidade : a vocação de exílio, J. Zahar, Rio de Janeiro, cap. V, 2000.7. Bernard D. Hercenberg, O exílio e o Poder de Israel e do Mundo. São Paulo, Paz e Terra, 1966, p. 162.

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« être » au présent renforce l’idée du transitoire contenu dans la racinemême du mot qui nomme l’hébreu. Seuls le passé et le futur sont conju-gués, raison pour laquelle l’homme biblique n’« est » pas, car il s’énoncetoujours comme celui qui a été ou qui sera.

De même que pour l’homme biblique exister, c’est devenir, dans lamodernité, l’exercice de la judéité accuse un être-ouvert-au-futur : dans letemps qui succède à la mort de Dieu, le sujet continue à se sentir juif, sicontradictoire que cela puisse paraître. Dans ce sens, la relation de Freudavec le judaïsme devient exemplaire. Dans son devenir-juif, il a toujourschoisi de répondre par la rhétorique du non-contenu de la signification :lorsqu’on lui demandait ou on l’interrogeait à propos de son identitéjudaïque, quoiqu’il se reconnût en tant que juif du fait d’être constammentdisposé à mener une lutte perpétuelle face à la « majorité massive » et« homogénéisée », fût-elle extérieure ou intérieure au judaïsme lui-même,paradoxalement, il soutenait qu’il lui était impossible de définir une telleidentité. Sinon il se contredirait s’agissant du leurre que contient l’idéemême d’identité.

Dans la préface de l’édition hébraïque de Totem et tabou, Freud sedéclare étranger à la religion de ses parents, aussi bien qu’à tout idéalnationaliste judaïque, ce qui ne l’empêche pas d’affirmer son appartenanceau peuple juif. Puis il adresse à son interlocuteur imaginaire une interro-gation traduisant l’idée d’une impossibilité de définir une identité ou une« nature essentielle » judaïque. « Au cas où on lui adressât la question :“Depuis que vous avez abandonné toutes ces caractéristiques communes àvotre peuple, que vous reste-t-il de juif ?”, il répondrait : “Une part trèsgrande et probablement l’essence même, qui, un jour, deviendra sansdoute accessible à l’esprit scientifique 8”. » C’est justement cette « essence »qui chez lui est demeurée, selon l’aveu qu’il en fit à quelques collèguesultérieurement, « suffisante pour rendre irrésistible l’attirance envers lejudaïsme et les juifs, pour fortifier maintes forces émotionnelles obscures,encore que celles-ci fussent peu exprimables en mots 9 ». Il est intéressantde remarquer que si Freud sait désigner avec précision la coupure qu’il faitavec le judaïsme, il lui manque des mots pour parler d’une marque qui l’in-terroge. L’une des déclarations les plus percutantes sur ce processus setrouve dans une lettre qu’il écrivit à Barbara Low, à l’occasion de la mortde son ami et collègue David Edler :

8. S. Freud, Totem et tabou, Paris, Payot, 1965.9. S. Freud, « Allocution aux membres de la société B’nai B’rith » (1926), OCP, vol. XVIII, p. 113-117,

Paris, PUF, 1994.

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Je peux facilement imaginer combien il a souffert de l’amertume de notre époque.Nous étions tous deux juifs et nous savions mutuellement que nous avions en com-mun à porter cette chose miraculeuse – jusqu’à présent inaccessible à toute analyse –qui fait le juif 10.

Curieux argument qui obéit à la logique d’une présence invisible etindicible, au-delà de toute représentation et qui se présente au sujet sousdes formes multiples et plurielles. Tout se passe comme s’il était possiblede surprendre chez Freud un au-delà de l’identité judaïque, c’est-à-direune judéité indéfinissable et innommable, ou interminable, qui se traduitpar la recherche permanente d’un autre en soi-même. En d’autres mots,l’expression de la judéité chez Freud fut son exode permanent d’une iden-tité fixe et immuable qui se réfléchirait en un mimétisme religieux et politique.

On sait que l’invention freudienne opère une séparation radicale dusujet par rapport à l’identique, le conduisant au bout du compte à ce queJuan Nasio a appelé « l’exil ». Cet exil consiste à faire en sorte que le sujetcherche dans les incommodités de la répétition et dans la déconstructionprogressive de sa propre idolâtrie (narcissisme du moi et mandats du sur-moi) la rencontre avec ce qu’il y a de plus étrange par rapport à lui-même,le face-à-face avec l’inconnu. Le travail de l’analyse implique que le sujetmigre et quitte ce qui est familier, affrontant l’isolement d’avec la majoritécompacte et, dans cette traversée, qu’il rencontre, dans la rigueur des mots,sa singularité, son style, sa différence. Cet instrument clinique qui est l’as-sociation libre signifie un apprentissage de l’altérité, dans la mesure oùlorsqu’il institue la parole comme mouvement de rupture avec le même, ilconduit le sujet à s’exiler de soi et à révéler l’inconscient. Par conséquent,il ne serait pas déplacé de faire de l’histoire du patriarche Abraham– lequel, déterritorialisé, entame une aventure qui le fait devenir autre –une métaphore conclusive de l’aventure analytique. Du côté de l’analyste,de la validation de son désir, une fois convoqué par le transfert à uneécoute flottante, il ne lui reste plus qu’à mener le combat quotidien etimplacable de son labeur, duquel pour le moins, parodiant Freud, on n’ensort que clopinant, boitant. Il s’agit d’une allusion à l’épisode biblique dela lutte dans le désert entre Jacob et l’Autre, épisode mentionné par Freuddans Au-delà du principe du plaisir, lorsqu’il annonce son concept de la pul-sion de mort.

Dans la formation de l’altérité, chez les juifs, l’extension de la condi-tion d’étranger de l’homme est en corrélation avec la force et l’intensité du

10. S. Freud, Correspondance 1873-1939, Paris, Gallimard, 1966, p. 466.

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deuxième commandement qui interdit l’idolâtrie. L’idée étrange eteffrayante d’un Dieu qui soit pure absence, sans visage, sans essence, dontle Nom s’écrit en un tétragramme ne se prononçant pas, a plongé la doc-trine mosaïque dans une exigence iconoclaste irréversible. Quoique lejudaïsme connaisse l’hétérogénéité en raison des multiples lectures qui ensont faites, ce qui frappe le plus dans sa fondation, c’est l’abîme radical quis’ouvre entre l’homme et la divinité. Kadosh, terme hébraïque qui désigneindistinctement saint et séparé, accuse la présence inaccessible de Dieu sedéfinissant par l’absence. Selon Emmanuel Lévinas – le philosophe qui aintroduit au cœur de l’économie du texte philosophique l’appel à l’altérité,à travers la loi judaïque d’ouverture à l’Autre –, Kadosh désigne quelquechose d’infiniment séparé, de telle façon que l’inscription du nom de Dieupeut être considérée comme inscription originaire de la différence.

Il ne serait pas difficile, exactement à partir de cette tendance icono-claste du judaïsme, de reconnaître des racines judaïques à la psychanalyse,en particulier si l’on considère que Freud dénonce les effets fétichistes etpervers d’un monde géré par l’idolâtrie à l’égard du moi. En tant qu’ico-noclaste, il détruit, à la façon des Prophètes 11, l’illusion de l’homme et l’hé-gémonie du Moi, il situe la pensée psychanalytique dans un au-delà mûpar le désir de la différence et conscient de ce que toute conquête ayant traitau savoir incorpore et engendre l’inconnaissable. Freud étend à la culturesa lutte contre l’idolâtrie lorsque, prenant pour paradigme le renforcementdu nationalisme allemand et la persécution des juifs, il dénonce la logiqueségrégationniste sous-jacente à ce qu’il a nommé le narcissisme des petitesdifférences. Garantir l’unité-identité de l’État, engendrant la ségrégation etconstituant le juif comme l’un des non-identiques au sein de la masse, tellefut la stratégie de consolidation du nazisme.

Mais le Dieu sans nom et sans visage ne se marque pas seulement parl’absence : sa révélation, comme l’écrit Maurice Blanchot, a lieu par laparole. Les lettres de l’Écriture viennent tisser le tissu infini qui recouvre levide indépassable que le judaïsme a institué entre les hommes et Dieu 12.Nomades, ainsi que les lettres hébraïques qui s’agglomèrent dans la blan-cheur du parchemin ancestral, les studieux du Texte, les talmudistes, osè-rent dire toujours plus que ce qui, dans le Livre, apparaissait commemanifeste, faisant de celui-ci un territoire devenu propice au large accueilde subjectivités naissantes. Ceux qui fondèrent la religion mosaïque sont

11. Voir l’étude de Jean-Joseph Goux, Les Iconoclastes, Paris, Le Seuil, 1978.12. Maurice Blanchot, L’Entretien infini, Paris, Gallimard, 1986, p. 187.

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passés, dans la tradition, à la lecture-écriture de la Parole comprise non pascomme dévoilement mais comme production de sens. Il s’agit d’un travailsemblable à celui que Freud voit à l’œuvre dans le travail du rêve : proces-sus d’élaboration où il ne s’agit plus de penser, ni de calculer, ni d’unefaçon générale de juger, mais de transformer.

Un jour, à Auschwitz – la grande fabrique de mort de la SecondeGuerre mondiale –, les SS ont fait pendre un enfant devant des milliers deprisonniers qui étaient obligés d’assister à cette scène indescriptible. PourÉlie Wiesel, qui plus tard allait recevoir le prix Nobel, raconter cet épisodeétait presque impossible : pour lui, voir la mort de cet « ange aux yeuxtristes » a été l’expérience de la mise à mort de l’humanité. Avec beaucoupd’effort, il raconte qu’à ce moment-là, il a entendu à l’intérieur de lui-mêmeune voix répondre à la question que tous se posaient alors : « Dieu où est-Il, maintenant ? » et la réponse fut : « Le voilà, là, accroché à cet écha-faud 13. » C’est dans ce même camp d’extermination que certains juifsdécidèrent de faire le procès de Dieu, L’accusant d’avoir abandonné sonpeuple aux atrocités des nazis : le conseil formé alors pour Le juger, prisd’un sentiment de perplexité et d’incompréhension face à cette horreur, Leconsidéra comme coupable condamnant l’Éternel à mort. Le rabbin pro-nonça la sentence, à la suite de quoi tous furent convoqués à la lecture dela Torah des vêpres 14.

Il s’agit à ce moment de souligner l’idée que la pratique millénaire delecture-écriture du Texte est le centre structurant du judaïsme ainsi que lagarantie de sa transmission. Mais au-delà de l’exégèse qui se répand ausein d’une culture donnée sur laquelle l’exégète tisse des commentaires quisont immédiatement absorbés par la tradition, le mode de lecture talmu-dique parcourt des itinéraires différents : il se situe, pour des raisons lin-guistiques et de par une exigence éthique, plus proche du champ del’interprétation, où la parole venue du dehors introduit une différence ausein même de la tradition. Faire la lecture des lettres, multiplier les combi-naisons entre elles, les réécrivant dans un mouvement continu de construc-tions signifiantes singulières concernant l’origine, la valeur et le sens de lavie et de la mort, cela constitue le mode à travers lequel chaque sujet, dansle groupe, se différencie du Tout.

L’art de l’interprétation judaïque est ancrée dans ce que Lévinas aappelé le principe éthique de la différence (ou l’éthique de l’Autre) : il n’y

13. Élie Wiesel, Night, New York, Avon Nooks, 1969, p. 77.14. Cf. Karen Amstrong, Uma História de Deus, Rio de Janeiro, José Olympio, 1994, p. 128.

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a pas dans l’interprétation du Texte la conversion de l’Autre au Même. Ets’il est vrai que la religion commence où justement cesse la lecture, le para-doxe du judaïsme est qu’il exige de l’interprète de la Bible la position del’athée, c’est-à-dire quelqu’un qui n’empêche pas l’avènement de la parole,qui ne transforme pas l’Écriture en idole, en totem. Les paradoxes dansl’univers de l’interprétation talmudique sont de tel ordre qu’un discoursconcernant Dieu qui ne soit pas idolâtre, selon le deuxième commande-ment, renvoie inévitablement à l’athéisme.

On sait que Freud a toujours refusé de soumettre sa découverte à larationalité herméneutique et qu’il n’a justement pu découvrir la clef desrêves que parce qu’il a rompu avec la tradition qui restreignait le sujet à unsimple objet, interprétable à partir d’un code préétabli, pour convoquer laparole qui, « même en venant de l’extérieur, vient de l’intérieur 15 », vientde celui qui parle. C’est cette inversion radicale des rapports entre le savoiret la parole de l’autre qui a permis à la méthode psychanalytique de privi-légier l’écoute au détriment de la mêmeté d’un sens préétabli. L’écriture durêve est pour la psychanalyse une des métaphores de l’inconscient. Ellerequiert, depuis des temps immémoriaux, interprétation et lecture. Lire,c’est vouloir savoir, c’est vouloir connaître ce qui n’a pas de nom et quin’admet pas non plus de déchiffrement, ce qui n’a pas de patrie ni detemps. Lire, c’est connaître la force d’une vérité singulière, d’une vérité his-torique : c’est chercher, dans l’exil le plus éloigné, la découverte des lettrespour, encore, les faire naviguer et s’exiler, pour en faire le récit singulierd’un sujet ou d’un peuple en déplacement. Lire, par principe, est une exi-gence éthique que l’analyste doit s’imposer pour assurer, comme athée, ladoctrine freudienne.

Freud, qui prétendait suivre les traces des poètes en faisant de lascience avec un style littéraire – « je continue à être un homme de lettres,même sous l’apparence d’un médecin 16 » –, a inventé une écriture : l’écri-ture de l’inconscient. Cela revient à dire que c’est à partir de la pluralité dessens de la pulsion qu’il se soumet à la primauté de la lettre. Dans le sens decaractère, la lettre, dans la théorie lacanienne, est désignée comme supportessentiellement matériel du signifiant en même temps que ce qui se dis-tingue de lui grâce à sa capacité de marquer l’intrusion de quelque chosede radicalement autre. La lettre est ce qui ne peut pas être fixé, ne peut êtrecontenu dans une signification ou une image.

15. Maurice Blanchot, op. cit., p. 187.16. S. Freud, Interview à Giovani Papini à Vienne, Jornal O Globo, 18/09/99, Rio de Janeiro.

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La lecture à la lettre est le dénominateur commun aux dispositifs del’interprétation psychanalytique et talmudique. Il convient de rappeler quel’effet de cette modalité de lecture est celui de produire un dire qui dépassele dit. Le talmudiste, de par le fait de supposer un vécu constitutif et irré-ductible à toute interprétation et à tout savoir, impose à chaque sujet de serappeler le trait ineffaçable de l’Alliance entre Dieu et son peuple, pourl’annoncer à partir de ce qui vient du futur. Le processus analytiqueadvient toujours sous le signe de l’errance de la lettre obéissant à la marqued’un temps qui va du virtuel à l’actuel, en accord avec la célèbre affirma-tion de Freud : « Wo Es war, soll Ich werden » [« Là où c’était, je dois adve-nir »]. Le temps psychanalytique est devenir.

À Vienne dans les années trente, après une longue période d’assimila-tion, face à ce qui se présentait comme un exode de plus, le juif est allé pui-ser dans la pratique millénaire de l’expérience scripturale de ses ancêtresune stratégie pour faire un deuil qui était nouveau et ancien à la fois. Selonla tradition millénaire, avec la destruction du Temple et l’expulsion de Jéru-salem, plusieurs intellectuels se sont engagés dans la pratique qui consis-tait à supporter et à dépasser le vécu de la déterritorialisation des lettres duLivre des livres, support permanent d’écriture qui réunit le peuple dans ladiaspora.

L’ouvrage Moïse et le monothéisme s’inscrit dans cette lignée : son ori-gine est la relation entre ce nouvel exode du peuple et la judéité de sonauteur. Freud a commencé à l’écrire justement dans une année où plusieursde ses livres étaient brûlés dans les bûchers de Berlin. Si on lui brûlait seslivres, il fallait qu’il se portât en tant que père – ramassant dans le caniveaula calotte jetée dans la boue par un antisémite 17 –, qu’il ramasse les lettresde ses livres des bûchers et en écrive d’autres. À la manière d’un talmu-diste qui dans un processus singulier d’historicisation navigue dans lesespaces blancs d’un parchemin, cherchant des nouveaux sens possibles,Freud écrit un texte dont l’écriture ne se prête pas à la capture : de mul-tiples sens – mais non arbitraires – pétillent en ses pages. Ce qui importe là,c’est le mode selon lequel Freud est confronté à la relation irréductible dujuif avec l’expérience de l’étrangeté, lors de l’ascension du nazisme. Dansle Moïse, l’étranger désigne un statut pour le juif : étranger à soi-même etétranger pour l’autre. Ainsi, malgré l’incompréhension d’un bon nombre

17. S. Freud, L’Interprétation des rêves (1900), Paris, PUF, 1967, chap. V, partie II : « Le matériel d’origineinfantile source du rêve », p. 168. Il s’agit d’un souvenir d’enfance que Freud récupère à partir del’analyse de ses « rêves romains ».

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de personnes, malgré la résistance de la part d’historiens et d’anthropo-logues, Freud a tenu à « destituer un peuple de l’homme qu’il célèbrecomme le plus important parmi ses fils » et à faire de Moïse un Égyptien,pour démontrer que le judaïsme résulte d’une construction qui se fait à tra-vers l’expérience de l’étrangeté étant marquée par l’incomplétude. Il s’agitlà d’une thèse qui est entièrement calquée sur l’impératif de l’Allianceentre Dieu et le peuple du Livre : être celui, venant du dehors et cherchantle dehors, qui témoigne contre l’idée d’une signification fixe et immuablepour le juif. Moïse, l’Égyptien, invente le juif, alors, tout juif est un Égyp-tien, ce qui veut dire qu’il se situe dans un au-delà de la race, de la langue,du nominalisme et de l’identité. Or, seule la présence de l’étranger, celuiqui dénonce la présence d’une différence irréductible au sein de la Totalité,est capable d’assurer une telle éthique.

Et partant de l’idée que le texte révèle aussi une préoccupation deFreud au sujet du destin de la psychanalyse et de l’exigence de la préser-ver en tant que pratique multiple, susceptible de faire apparaître le pluriel,on comprend qu’à travers la métaphore biblique, il élise l’étrangeté commefaçon d’assurer la transmission de la psychanalyse et de garantir son ave-nir. Ainsi dans cet entre-deux, entre le devenir juif et le devenir analyste,pendant qu’il rédigeait le Moïse, il dut fuir l’Autriche annexée par le Reichallemand. C’est à ce moment qu’il proposa au comité directeur de laSociété psychanalytique de Vienne de répéter la stratégie du rabbin Jocha-naan ben Zakkai lors de la destruction de Jérusalem pour garantir la trans-mission de la psychanalyse : « Le rabbin a demandé la permission d’ouvrirà Jabneh une école d’études de la Torah avec l’objectif de transmettre lejudaïsme aux générations futures 18. » À cette occasion, signalant l’analogieentre la condition d’exil et la transmission du judaïsme et de la psychana-lyse, Freud met en action les forces nécessaires pour ceux qui sont en« transit ». Dans cette analogie, il laisse paraître un espoir : pour que la psy-chanalyse se fasse plus forte que la destruction, sa transmission ne doit êtreassurée que par les mots et la lettre, celle-ci éternelle migrante du désir. Siles mots et les lettres inscrits dans le Livre sont les seuls liens capables deréunir le peuple juif dispersé, alors, ils seront aussi capables de maintenirla cause analytique en vie et de garantir son caractère de réinvention per-manente.

18. S. Freud. Apud Ernest Jones, La Vie et l’œuvre de Sigmund Freud, Paris, PUF, vol. III, 1969, chap. VI,« Londres, la fin ».

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