les instruments de l’État de droit: assainissement : cadre opérationnel

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  • 7/31/2019 LES INSTRUMENTS DE LTAT DE DROIT: Assainissement : cadre oprationnel

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    NATIONS UNIES

    HAUT-COMMISSARIAT

    DES NATIONS UNIES

    AUX DROITS DE LHOMME

    LES INSTRUMENTS DE LTAT

    DE DROIT DANS LES SOCITSSORTANT DUN CONFLIT

    Assainissement :cadre oprationnel

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    HAUT-COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES

    AUX DROITS DE LHOMME

    LES INSTRUMENTS DE LTAT DE DROIT DANSLES SOCITS SORTANT DUN CONFLIT

    Assainissement :cadre oprationnel

    NATIONS UNIES

    New York et Genve, 2006

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    NOTE

    Les appellations employes dans la prsente publication et la prsentation des donnes qui y

    gurent nimpliquent de la part du Secrtariat de lOrganisation des Nations Unies aucune prisede position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorits,ni quant au trac de leurs rontires ou limites.

    La reproduction, en tout ou en partie, de la teneur des documents publis dans la prsentepublication est autorise. Touteois, en pareil cas, il est demand que mention soit aite de lasource et quun exemplaire de louvrage o sera reproduit lextrait cit soit communiqu au

    Haut-Commissariat aux droits de lhomme, Palais des Nations, 8-14 avenue de la Paix, CH-1211Genve 10 (Suisse).

    Cette publication a t ralise avec le concours nancier de lUnion europenne. Les points de

    vue qui y sont exprims ne reftent en aucune aon lopinion ocielle de lUnion europenne.

    HR/PUB/06/5

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    TablE dEs maTirEs

    Pages

    Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . v

    Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

    I. ASSAINISSEMENT, RFORME DES INSTITUTIONS ET JUSTICE DE TRANSITION . . . . . .3

    II. RLE DES ACTEURS INTERNATIONAUX. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

    III. CONDITIONS DE RALISATION DUNE RFORME TRANSITOIRE DU PERSONNEL . . . .9

    A. Contexte postconfictuel ou aisant suite un rgime autoritaire :ncessit du pragmatisme. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

    B. Mandat lgal de rorme du personnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

    C. Priorits dune rorme du personnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

    D. Inormation et consultation de la population . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

    IV. DIRECTIVES OPRATIONNELLES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

    A. valuation de la situation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

    B. Dnition des paramtres, des normes et des rsultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

    C. Conception du processus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

    Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

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    avaNT-prOpOs

    Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de lhomme (HCDH) admet de plus en plusla ncessit de soutenir davantage les eorts dploys au niveau de lensemble du systmedes Nations Unies pour rtablir rapidement et concrtement ltat de droit et ladministrationde la justice grce aux missions menes dans les pays sortant dun confit. lissue des confitset des crises, les pays se trouvent exposs la aiblesse ou linexistence de ltat de droit, linsusance des moyens en matire dapplication des lois et dadministration de la justice, ainsiqu la multiplication des violations des droits de lhomme. Cette situation est souvent aggravepar le manque de conance de la population lgard des autorits publiques et par la pnuriede ressources.

    En 2003, le HCDH, en tant quorgane des Nations Unies charg de coordonner lchelle dusystme les initiatives concernant les droits de lhomme, la dmocratie et ltat de droit, a en-trepris llaboration dinstruments de ltat de droit en vue dassurer long terme et de aondurable la capacit des institutions rpondre ces besoins dans le contexte des missions desNations Unies et des administrations de transition. Ces instruments de ltat de droit ournirontdes conseils pratiques aux missions de terrain et aux administrations de transition dans desdomaines critiques lis la justice de transition et ltat de droit. Chacun de ces instrumentspeut tre utilis de aon indpendante, mais sinscrit par ailleurs dans une perspective pratique

    cohrente ; ils sont censs exposer les principes de base dans les domaines suivants : cartogra-phie du secteur de la justice, poursuites du parquet, commissions de vrit, assainissementetsupervision des systmes judiciaires.

    La prsente publication dnit un cadre oprationnel pour le processus dassainissement et derorme institutionnelle ; elle vise aider le personnel de terrain des Nations Unies rsoudreles problmes poss par la rorme des institutions et du personnel dans les pays sortant dunconfit, par la mise au point de processus dassainissement destins exclure des institutionspubliques les personnes dont lintgrit est dciente. Ce document comprend trois parties : leconcept dassainissement dans le contexte de la rorme institutionnelle et de la justice de tran-sition ; les conditions politiques de la rorme dans les pays sortant dun confit ou dun rgimeautoritaire mise en vidence des sources du mandat en matire de rorme institutionnelle,priorits suggres dune rorme transitoire du personnel, et projet de stratgie de consulta-tion et dinormation de la population ; et enn les directives pratiques proprement dites.

    Les principes invoqus dans ces instruments ont t pour lessentiel tirs de lexprience an-trieure et des enseignements recueillis la aveur de llaboration des processus dassainis-sement. Bien videmment, ce document ne saurait dicter le choix des stratgies et des pro-

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    grammes, lequel doit se aire sur le terrain la lumire des circonstances propres chaquesituation postconfictuelle ; le prsent instrument est nanmoins conu pour ournir auxmissions de terrain et aux administrations de transition les donnes de base requises pourles conseiller utilement quant la mise au point de processus assurant que les personnesdont lintgrit est dciente sont exclues des institutions publiques, et ce conormmentaux normes et aux meilleures pratiques internationales en matire de droits de lhomme.

    La cration de ces instruments nest que le dbut dun engagement de ond du HCDH pour laormulation de politiques concernant la justice de transition.

    Je souhaite exprimer ma reconnaissance et remercier tous ceux qui ont particip la prpara-tion de cette initiative importante.

    Louise ArbourHaut-Commissaire des Nations Unies

    aux droits de lhomme

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    rEmErciEmENTs

    Le HCDH souhaite remercier les personnes et les organisations qui ont contribu llabo-

    ration de cet instrument par leurs observations, leurs suggestions et leur soutien. Il souhaiteen particulier exprimer sa reconnaissance au consultant principalement charg de cette tche,Alexander Mayer-Rieckh. Le HCDH souhaite par ailleurs rendre hommage lorganisation qui aourni un soutien de premire importance au consultant, le Centre international pour la justicede transition.

    Le Programme des Nations Unies pour le dveloppement et la Commission europenne, dontles contributions nancires ont permis de mener bien ce projet et de publier les instrumentsde ltat de droit, mritent dtre tout particulirement remercis.

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    iNTrOducTiON

    La rorme des institutions contribue la ralisation de lobjecti essentiel dune politique vrita-

    ble et lgitime en matire de justice de transition : la prvention des violations utures des droitsde lhomme. Parmi les principaux aspects des rormes institutionnelles menes dans les paysen transition gurent les processus dassainissement visant exclure des institutions publiquesdes personnes dont lintgrit est sujette caution. Les multiples lacunes des institutions publi-ques dans les pays sortant dun confit ou ayant connu auparavant un rgime autoritaire exigenttouteois une conception globale des rormes institutionnelles. Ces directives oprationnellessituent les processus dassainissement dans le contexte plus vaste de la rorme du personneldune institution publique et proposent un cadre dlaboration dun programme de rormeeective et lgitime du personnel dans les pays en transition.

    Le document comprend trois grandes parties. La premire dnit le concept dassainissementdans le cadre de la rorme des institutions et de la justice de transition. La seconde examineles conditions politiques de la rorme mener bien dans un pays sortant dun confit ouprcdemment soumis un rgime autoritaire, identie les bases dun mandat de rorme dupersonnel, recommande des priorits pour la rorme transitoire du personnel et propose lamise au point dune stratgie de consultation et dinormation de la population. La troisimepartie prsente les directives oprationnelles proprement dites et suggre une mthode en troistapes aisant ressortir la ncessit dvaluer la situation et les besoins, de dnir les objectisde la rorme du personnel, et de mettre au point un processus able de rorme du personnel

    respectant les normes ondamentales de ltat de droit.

    Les qualits requises du personnel de la onction publique peuvent tre classes sous deuxgrandes rubriques, celle de la capacit (ou des comptences) et celle de lintgrit. La capa-cit dsigne les qualits qui lui permettent de sacquitter des tches techniques dnies parle mandat de linstitution ; lintgrit correspond aux qualits qui lui permettent de remplir lesexigences de ce mandat conormment aux normes ondamentales des droits de lhomme, dela dontologie et de ltat de droit.

    Il nexiste pas de ormule standard en matire dassainissement et de rorme de la onctionpublique dans le contexte des pays en transition. Aussi le choix dune approche adapte aucontexte, onde sur des consultations de la population et sur une valuation raliste des besoinset des ressources disponibles est-il une condition ondamentale de lecacit de la rorme1. Lesdirectives oprationnelles dnissent une mthodologie pour la mise au point de programmes

    1 Rapport de lexperte indpendante charge de mettre jour lEnsemble de principes pour la lutte contre limpunit, DianeOrentlicher (E /CN.4/2005/102, par. 9).

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    dassainissement et de rorme du personnel adapts au contexte. Tous les lments de cesdirectives ne seront cependant pas adapts toutes les situations ; certains types dinstitutionsposent des problmes particuliers qui restent entiers ; de plus, les ralits politiques et concr-tes dun pays sortant dun confit ou dun rgime autoritaire imposent parois des contraintesconsidrables au processus de rorme. Il est certes judicieux de suivre les trois tapes de basede la mthodologie propose valuation de la situation, dnition des objectis et mise aupoint du processus , mais ces directives sapparentent davantage une bote outils qu unmode demploi.

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    I. ASSAINISSEMENT, RFORME DES INSTITUTIONSET JUSTICE DE TRANSITION

    La rorme des institutions publiques est une tche ondamentale dans les pays en transition quipassent dun rgime autoritaire ou dune situation de confit un rgime dmocratique et untat de paix2. Les institutions publiques qui ont perptu un confit ou servi un rgime autoritai-re doivent tre transormes en institutions qui soutiennent la transition, entretiennent la paix etprservent ltat de droit. Les institutions qui ont commis des violations des droits de lhommeet dendu les intrts partisans dun petit nombre doivent tre changes en institutions quiprotgent les droits de lhomme, empchent les violations et servent de aon impartiale lesintrts de la population. Les institutions inquitables et en proie des dysonctionnements quiinspiraient la crainte doivent imprativement devenir des institutions ecaces et quitables qui

    jouissent de la conance des citoyens.

    En crant des institutions ecaces et quitables, la rorme institutionnelle contribue princi-

    palement de deux aons instaurer une justice de transition : premirement, des institutionspubliques ecaces et quitables jouent un rle dcisi dans la prvention des violations u-tures. Aprs une priode de violations massives des droits de lhomme, la prvention de leurrptition reprsente un objecti central dune stratgie lgitime et oprationnelle de justice detransition3.

    Deuximement, la rorme institutionnelle contribue la justice de transition dans la mesure oelle permet aux institutions publiques, en particulier dans les secteurs de la scurit et de la jus-tice, dassurer la responsabilit pnale des violations passes. Un service de police rorm, par

    exemple, peut enquter de aon proessionnelle sur les violations commises pendant le confit

    2 Voir le rapport du Secrtaire gnral sur le rtablissement de ltat de droit et ladministration de la justice pendant la priodede transition dans les socits en proie un confit ou sortant dun confit (S/2004/616).

    3 Question de limpunit des auteurs de violations des droits de lhomme (civiles et politiques), rapport nal rvis tabli parM. Louis Joinet, suite la dcision 1996/119 de la Sous-Commission, dans lequel il voque des garanties de non-renouvel-lement des violations [] pour viter que les victimes ne soient nouveau conrontes des violations portant atteinte leurdignit (E/CN.4/Sub.2/1997/20/Rev.1, par. 43) ; et Ensemble de principes actualis pour la protection et la promotion desdroits de lhomme par la lutte contre limpunit, principe 35 (E/CN.4/2005/102/Add.1).

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    ou dans le cadre du rgime autoritaire. Un bureau du procureur rorm peut eectivementprononcer des mises en accusation. Enn, un tribunal rorm peut statuer de aon impartialeau sujet de ces violations passes. Par consquent, la rorme des institutions peut constituerune condition pralable ltablissement de la responsabilit pnale, sur le plan intrieur, pourles violations commises pendant le confit ou sous le rgime autoritaire pass.

    Une rorme eective et durable des institutions est une tche complexe et ambitieuse. Les mesu-

    res adoptes cet eet peuvent comporter, par exemple : la cration de procdures de contrle,

    de plainte et disciplinaires ; la rorme ou linstauration de cadres juridiques ; la mise au point ou

    la rvision de principes thiques et de codes de conduite ; la modication des symboles associs

    des pratiques abusives et lattribution de rmunrations, dquipements et dinrastructures ad-

    quates. Dauthentiques initiatives de rorme devront sans doute rexaminer le onctionnement

    de lensemble du secteur public et envisager la usion, le dmantlement ou la cration dinstitu-

    tions publiques. La porte et le contenu prcis de ces mesures dpendront du contexte national.

    Sil est essentiel davoir une conception globale de la rorme des institutions pour garantir sonecacit et sa rapidit, les prsentes directives oprationnelles concernent un domaine dter-min : la rorme du personnel. De ait, une institution publique repose dans une large mesuresur ses employs : elle agit par leur intermdiaire et ces derniers la reprsentent. Les dauts deonctionnement et les abus commis dans le pass ont t souvent la consquence de diren-tes carences du personnel. Aussi la rorme du personnel est-elle un lment central de toutprocessus eecti et durable de rorme des institutions.

    Lassainissement est un aspect important de la rorme du personnel dans les pays en transi-tion4. On peut le dnir comme une valuation de lintgrit des personnes an de dterminerleur aptitude travailler dans la onction publique5. On entend par intgrit lobservation parun employ des normes internationales des droits de lhomme et des rgles dthique proes-sionnelle, notamment en ce qui concerne la gestion nancire personnelle6. Les onctionnairespersonnellement responsables de violations fagrantes des droits de lhomme ou de crimesgraves en vertu du droit international ont dmontr une absence oncire dintgrit et trahi laconance des citoyens quils taient censs servir. Les citoyens, en particulier les victimes desviolations, sont peu enclins avoir conance et sen remettre des institutions publiques qui

    conservent dans leurs rangs ou embauchent des personnes dont lintgrit laisse srieusement dsirer et qui compromettraient radicalement la capacit de linstitution sacquitter de sonmandat. Les processus dassainissement visent donc exclure de la onction publique les per-

    4 E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 36, al.a ; voir galement E/CN.4/2005/102, par. 68.5 Voir galement S/2004/616, par. 52 : Lassainissement de la onction publique implique habituellement un processus ormel

    visant identier et rvoquer les onctionnaires responsables dexactions, en particulier dans les services de police, les servicespnitentiaires, larme et la magistrature.

    6 Voir ci-dessous un examen dtaill de la signication du mot intgrit et des exigences applicables ce titre pour exercer uneonction publique (sect. IV.B.3.b).

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    sonnes dont lintgrit est gravement dciente, an de rtablir la conance des citoyens ainsique la lgitimit des institutions publiques.

    Le comportement dune personne permet de mesurer son degr dintgrit. Aussi les processus

    dassainissement doivent-ils sappuyer sur des valuations du comportement individuel. Les pur-

    ges et autres campagnes de rvocation grande chelle, ondes uniquement sur lappartenan-

    ce un groupe ou un parti, ont tendance ratisser trop large et rvoquer des onctionnaires

    intgres, en aucune aon responsables titre individuel des violations commises dans le pass.

    Simultanment, les rvocations collectives risquent par ailleurs dtre trop cibles et dignorer des

    personnes qui ont commis des violations, sans touteois aire partie du groupe vis. Ces proces-

    sus collectis, interprts de aon gnrale, violent les normes ondamentales de rgularit de la

    procdure, ne sont gure susceptibles datteindre les objectis souhaits de la rorme, risquent

    de destituer des collaborateurs dont lexprience est ncessaire dans la priode postconfictuelle

    ou suite la disparition du rgime autoritaire et, enn, risquent de crer un groupe de collabora-

    teurs mcontents qui pourraient compromettre le bon droulement de la transition.

    Outre le ait dpauler les eorts de rorme institutionnelle, lassainissement de la onctionpublique et lexclusion des auteurs de violations peuvent jouer un autre rle important dans lecadre dune stratgie globale de la justice de transition. La pnurie de moyens et de ressourcesdans une situation postconfictuelle ou suite la disparition dun rgime autoritaire, ainsi que lesobstacles juridiques, linsusance de personnel et le grand nombre de coupables, interdisentdans nombre de cas la poursuite pnale de tous les auteurs de violations, prservant ainsi ceque lon appelle un espace dimpunit. Bien que les processus dassainissement exigent gale-

    ment des moyens importants, ils prsentent une complexit moindre en termes de procdure,par comparaison aux poursuites pnales. Lorsque les poursuites pnales sont limites ou di-res, lexclusion de la onction publique des auteurs de violations des droits de lhomme peutcontribuer rduire lespace dimpunit en instaurant partiellement une obligation non pnalede rendre des comptes7. Les exclusions de la onction publique ont un eet puniti dans la me-sure o elles ont perdre leur emploi aux exclus, ou les empchent dy entrer, et leur enlventlautorit publique et autres privilges et avantages. Lexclusion des auteurs de violation ne doitcependant pas tre un prtexte pour sabstenir dengager des poursuites pnales. Non seule-ment le ait de poursuivre les violations graves des droits de lhomme est une obligation (voir

    sect. V.B.3.b ci-dessous), mais une stratgie en matire de justice de transition sera dautantplus ecace et lgitime sil y a une complmentarit entre les direntes initiatives prises dansce contexte, en particulier les poursuites, les commissions de vrit, les mesures de rparationet la rorme des institutions8.

    7 E/CN.4/2005/102, par. 68.8 E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 1 (Obligations gnrales pour les tats de prendre des mesures ecaces de lutte contre

    limpunit). Voir galement les autres instruments de ltat de droit dans les socits sortant dun confit, dans la mme col-lection, par exemple en ce qui concerne les commissions de vrit et les poursuites du parquet.

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    Assez rquemment, les carences sur le plan de lintgrit ne sont pas les seules lacunes desonctionnaires dans les situations postconfictuelles ou suite la disparition dun rgime auto-ritaire ; aussi, lexclusion des personnes dont lintgrit est insusante napportera pas nces-sairement les transormations ncessaires ltablissement dune institution publique juste etecace et empcher la rptition des violations passes9. Le personnel dune institution publi-que peut, par exemple, inclure des auteurs de violations des droits de lhomme, et aussi navoirni les qualications ni les comptences susantes ; le personnel dans son ensemble risque enoutre de ne pas reprsenter la population quil est cens servir et/ou de ne pas tre dot duneorganisation administrative ecace. Nombre des employs ont peut-tre t nomms de aonillgitime, en violation des rgles de procdure et en matire de qualications. Les multipleslacunes du personnel dune institution publique reprsentent souvent des acteurs complexeset interdpendants lorigine des violations et des dysonctionnements observs dans le pass.Aussi les directives oprationnelles suivantes intgrent-elles les processus dassainissement dansdes programmes plus vastes de rorme du personnel, sans touteois ignorer les dicults pro-

    pres au contrle de lintgrit du personnel dans des situations postconfictuelles ou suite ladisparition de rgimes autoritaires.

    9 S/2004/616, par. 53 : Les oprations dassainissement doivent tenir compte aussi des comptences techniques, des quali-cations objectives et de lintgrit des intresss.

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    II. RlE DES ACTEURS INTERNATIONAUX

    Dans les pays sortant dun confit ou dun rgime autoritaire, les acteurs internationaux jouentsouvent un rle important qui consiste soutenir des institutions nationales ragiles et aiderau renorcement de la paix et de ltat de droit. La participation internationale llaboration

    et la mise en place dun programme de rorme du personnel exige une invitation cet eetde la part des autorits nationales ou, lorsque celles-ci sy opposent, un mandat internationalconrant aux acteurs internationaux lautorit et les moyens dintervenir directement dans lesaaires intrieures et dannuler si ncessaire les procdures nationales. En onction des circons-tances et du mandat, les acteurs internationaux ont pu conseiller les autorits nationales dans lecadre de llaboration dun programme provisoire de rorme du personnel, laider le mettreen uvre par des activits de ormation, de conseil, de suivi et en ournissant des moyens, ouencore jouer un rle pilote en matire de rorme du personnel et tablir un processus interna-tionalis de rorme du personnel.

    En rgle gnrale, les processus de rorme du personnel sous direction nationale seront pr-rables aux processus internationaliss dans la mesure o ils vitent que la population prennenten mauvaise part des rormes imposes de lextrieur, o ils crent des conditions plus propi-ces une pleine adhsion locale et la durabilit du processus et garantissent lapplication dusavoir-aire local. Les processus de rorme du personnel se heurtent souvent une oppositiondans le contexte politique ragile dun pays sortant dun confit ou dun rgime autoritaire, tantdonn quils conditionnent laccs et lexclusion des structures de pouvoir gouvernementales.Tel est le cas notamment lorsque des reprsentants dun prcdent gouvernement auteur de

    violations dtiennent encore une autorit ormelle ou inormelle, quils sont appels perdre duait de la rorme. En pareille circonstance, des processus internationaliss peuvent avoir la orceet lobjectivit ncessaires pour garantir la mise en uvre eective et quitable dune rormedu personnel.

    Lorsquun processus internationalis est institu, il convient de semployer autant que possible aire participer les acteurs nationaux et ce, depuis le dbut et aussi largement que possible,de veiller son intgration au droit national et de mettre en place des dispositions garantissantun passage sans discontinuit du processus de rorme du personnel, pendant une priode

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    de transition, aux procdures normales en matire de recrutement national et de discipline.Il convient denvisager la cration dune commission mixte nationale-internationale, ou dunecommission nationale soutenue par un secrtariat international.

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    III. CONDITIONS DE RAlISATION DUNE RFORMETRANSITOIRE DU PERSONNEl

    A. Contexte postconictuel ou aisant suite un rgime autoritaire :ncessit du pragmatisme

    la n dun confit ou suite la disparition dun rgime autoritaire, le secteur public traverserquemment une crise. Le cadre institutionnel est souvent morcel et vague. Dans nombre decas, le secteur public continue onctionner lintrieur des structures administratives sur les-quelles sappuyait le rgime autoritaire, ou qui perptuaient le confit. Les institutions publiquesconservent souvent des liens avec leurs anciens dirigeants, restent divises par des orientationspartisanes et continuent dendre des intrts politiques lis des actions. Le personnel enposte pendant le confit ou sous le rgime autoritaire reste souvent en place et soppose auxmodications du statu quo. Les eectis sont gnralement excessis. Certaines institutions ne

    onctionnent pas, laissant ainsi un vide de gouvernance. Dans nombre de cas, linrastructurepublique est en proie des dysonctionnements et les dirents besoins de rorme doiventse partager des ressources limites. La conance des citoyens lgard du secteur public restegnralement rduite.

    Les circonstances prsentes la suite dun confit ou aprs la disparition dun rgime autoritaireconstituent un cadre extrmement dicile pour mener bien une rorme des institutions.La ncessit de la rorme et la rsistance sa ralisation rsultent de limplication du secteurpublic avec le pass. Les programmes de rorme institutionnelle doivent tenir compte des

    ralits et des contradictions de la priode daprs confit ou conscutive la disparition du r-gime autoritaire. La rsistance la rorme doit tre surmonte, parce que des institutions nonrormes mettent en pril la consolidation de la paix et ltat de droit. Touteois, les employsrvoqus suite un processus de rorme du personnel risquent eux-mmes de se livrer uneactivit criminelle et de compromettre la transition. Les initiatives de rorme doivent en outreprendre en considration les besoins de la population au cours de la priode postconfictuelleou suite la disparition dun rgime autoritaire. Provisoirement, un service public imparait estdordinaire prrable labsence complte de service. Pour viter un vide de gouvernance, ilpeut savrer ncessaire de mettre en place des dispositions provisoires conclues avec les insti-

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    tutions existantes. La rorme des institutions dans une situation postconfictuelle ou suite ladisparition dun rgime autoritaire exige pragmatisme, dtermination et endurance.

    B. Mandat lgal de rorme du personnel

    La n dun confit ou dun rgime autoritaire est souvent marque par un accord ociel, parexemple un trait de paix, un accord de partage du pouvoir, ou encore une rsolution duConseil de scurit des Nations Unies prescrivant des mesures dapplication de la paix en vertudu Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Ces accords ou ces rsolutions peuvent dnirles conditions dune trve, des mcanismes non violents de rglement du confit, des arrange-ments provisoires de partage du pouvoir, des dispositions lectorales, ainsi quune euille deroute vers la mise en place dun tat constitutionnel. Ils dnissent gnralement les rles et lesresponsabilits des parties et dcrivent les tches accomplir au cours de la priode de tran-sition. Des dispositions concernant une rorme du personnel peuvent gurer dans lun de ces

    accords ou lune de ces rsolutions ou encore aire lobjet dun accord distinct.

    En labsence dun mandat ormel, les programme de rorme du personnel ont moins de chan-ces de se raliser ou risquent dtre dirs. En outre, bien quil aille interprter une dispositiongnrale qui prescrit une rorme des institutions comme devant englober une rorme dupersonnel, les mesures explicites de rorme et dassainissement placent les parties devant uneobligation dpourvue de toute ambigut, laquelle il est plus dicile de se soustraire. Les n-gociateurs de paix doivent donc, si les circonstances politiques des pourparlers le permettent,encourager linclusion de dispositions spciques exigeant que les accords de paix prvoient

    une rorme du personnel, de aon soumettre les parties une obligation claire.

    Lorsquun mandat de rorme du personnel a t tabli, il aut le traduire en responsabilits eten procdures concrtes. Cette tche implique souvent ladoption de mesures sujettes contro-verse ayant des consquences importantes pour ltat comme pour les personnes concernespar le processus. An dviter des priodes prolonges dincertitude, un programme de rormedu personnel doit tre excut aussi rapidement que le contexte politique et oprationnel lepermet, aprs avoir soigneusement pass en revue les avis des principales parties prenantes,notamment, sil y a lieu, dun parlement. En outre, les textes de lois de la rorme du personnel

    doivent respecter les normes constitutionnelles et internationales ; elles doivent tre susam-ment claires et prcises pour instaurer une certitude juridique et viter toute ambigut et in-terrence politique. Lorsquun processus internationalis est mis en place, les rgles correspon-dantes doivent tre intgres au cadre juridique national (voir sect. 2 ci-dessus).

    C. Priorits dune rorme du personnel

    Dans une situation postconfictuelle ou suite la disparition dun rgime autoritaire, lensem-ble de ladministration publique est susceptible de bncier dun programme de rorme du

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    personnel. Les programmes de ce type doivent nanmoins porter en priorit sur larme, lesservices dapplication de la loi, les services de renseignements, la magistrature, et direntesinstitutions sur lesquelles sappuie ltat de droit. Ces institutions publiques sont responsablesau premier che du maintien de la stabilit et de la scurit ondamentale, comme de la protec-tion des droits humains lmentaires. La rorme desdites institutions, notamment celle de leurpersonnel, cre des conditions importantes pour un passage eecti et rapide une situationde paix et de primaut du droit10.

    Les confits et les rgimes autoritaires entranent rgulirement une morcellement des institu-tions publiques, en particulier dans le secteur de la scurit, caractris par un ddoublementou un chevauchement des mandats et une surabondance des eectis. Dans ces circonstances,un programme eecti de rorme du personnel ne doit pas couvrir seulement une seule insti-tution, mais tout le secteur en question. En loccurrence, gnralement lorsque les institutionsconcernes ont des eectis importants, un programme de rorme du personnel peut sint-

    resser en priorit aux dirigeants, tant donn que leur autorit et leur infuence leur conrentun poids rel dans le processus de rorme. Il convient par ailleurs de sintresser plus particu-lirement aux employs notoirement connus pour avoir commis des violations fagrantes desdroits de lhomme ; ils risquent en eet de constituer un srieux handicap pour le processusde rorme tant donn que leur maintien en place compromet la crdibilit de linstitutionpublique.

    D. Inormation et consultation de la population

    An dtablir (rtablir) la conance des citoyens, et tablir (rtablir) la lgitimit des institutionspubliques, la population doit tre tenue au courant et avoir conance dans leort de rormedes institutions. La transparence cet gard et la consultation de la population sur les objec-tis de ce processus contribueront instaurer la conance dans limpartialit et le succs decette entreprise, assurer quelle rpondra vritablement aux besoins rels des victimes et dela socit en gnral, et enn limiter lincertitude dans laquelle se trouve le personnel desinstitutions qui ont lobjet de la rorme. La sensibilisation de la population permet par ailleursdtouer dans lu les tentatives ultrieures visant jeter un doute sur la validit du processuset rintgrer des onctionnaires rvoqus. Un processus de rorme doit non seulement com-

    porter un mcanisme ecace dinormation de la population, mais sa conception proprementdite doit sappuyer sur de vastes consultations de la socit civile, en particulier des groupes devictimes et dirents groupes dintrts anims dun esprit de rorme11. La section IV.A ci-des-sous prsente dirents instruments visant assurer que la rorme sappuie sur une valuationapproondie et sur de vastes consultations publiques.

    10 E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 36.11 Ibid., principe 35 (selon lequel des rormes institutionnelles [] devraient tre mises en place grce de vastes consulta-

    tions publiques, auxquelles participeraient les victimes et dautres acteurs de la socit civile ).

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    IV. DIRECTIVES OPRATIONNEllES

    Pour mettre en place un programme de rorme du personnel dans une situation postconfic-tuelle ou suite la disparition dun rgime autoritaire, il est indiqu de suivre une approche entrois tapes. Premirement, il convient dvaluer la situation actuelle dune institution et de son

    personnel, ainsi que son contexte social, an de dnir les besoins de rorme du personnel(sect. A). Deuximement, sur la base de lvaluation, les caractristiques et les normes structu-relles dune rorme du personnel, concernant en particulier ses eectis, sa composition, lesqualications requises et les rgles dintgrit, peuvent tre dtermines (sect. B). Troisime-ment, une ois ces paramtres et ces normes dnis, le processus de rorme proprement ditdoit tre mis au point (sect. C). Les directives suivantes dnissent un cadre oprationnel derrence pour raliser un programme en trois tapes de rorme du personnel.

    Programme de rorme du personnel : vue densemble

    Ma

    ndat:

    accorddepaix

    Miseenuvre

    Besoins de la

    population

    Le secteur et

    ses institutions

    Mandat

    Niveau individuel

    Structure

    Capacit

    Intgrit

    Remplacements

    Volont politique

    et rsistance

    Composition

    du secteur

    Mandat

    Paramtres

    structurels Effectifs

    Organigramme

    Composition

    Normes

    individuelles

    Comptence

    Intgrit

    Rsultats

    Un Mcanisme

    Indpendance

    Intgrit

    Ressources

    Multidisciplinarit

    2 types de

    processus

    Examen

    Nouvelle slection

    (Mesures disciplinaires)

    3 phases

    Enregistrement

    Slection

    Homologation

    A. valuationde la situation

    B. Dfinitionde normes

    C. Processus demise au point

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    Les dirents types dinstitutions posent des problmes qui leur sont spciques. Par exemple,la rorme des organismes de scurit soulve gnralement dimportantes dicults lies auxeectis considrables du personnel concern. La slection des juges suscite des proccupa-tions particulires en matire dindpendance de la magistrature. Lexamen des candidatures des charges lectives conduit sinterroger quant aux interrences possibles avec la volontdes lecteurs. Les directives oprationnelles numres ci-dessous ne sappliquent pas toutes toutes les institutions publiques ; elles permettent nanmoins dtablir des distinctions entreelles et de mettre au point des programmes de rorme du personnel adapts chacune.

    A. valuation de la situation

    En raison du confit ou suite la disparition dun rgime autoritaire, le secteur public setrouve souvent morcel, les limites entre les direntes institutions publiques sont vagueset poreuses et, enn, les eectis de onctionnaires sont excessis. Dans nombre de cas, les

    onctionnaires taient recruts de aon inormelle et navaient pas de ormation approprie ;de plus, ils participaient souvent au confit ou taient lis au rgime autoritaire prcdemmenten place, tandis que les violations des droits de lhomme taient gnrales et systmatiques ;enn, lissue du confit ou suite la disparition du rgime autoritaire, les consquences deces mmes violations alimentent un dbat. Gnralement dnature au cours de cette prio-de, la structure dune institution ne rpond pas aux besoins dun pays rgi par ltat de droit.Il est par ailleurs courant que le personnel dune institution ne reprsente pas la populationquil est cens servir.

    Les conditions dcrites ci-dessus ne sont pas ncessairement toutes prsentes dans le paysconsidr. lissue dun confit ou aprs la disparition dun rgime autoritaire, les donnesde base concernant le personnel dune institution publique sont rarement disponibles. Aussiconvient-il de procder une valuation approondie de aon dnir les besoins et les risqueslis la rorme du personnel, et de mettre au point un programme appropri. Lvaluation pro-prement dite doit comporter 1) une valuation des besoins de la population et des capacits ; 2)une revue dtaille du personnel de linstitution ; 3) une valuation du bassin de remplacementpotentiel et 4) une analyse de la volont politique de rorme.

    1. valuation des besoins de la population et des capacits

    Les besoins de la population quune institution est cense servir doivent dterminer sa structureadministrative et les qualications requises de son personnel. Par exemple, une socit dans la-quelle les inractions lies lappartenance sexuelle sont nombreuses a sans doute besoin de sedoter dunits spcialises dont le personnel possde les comptences spciques permettantde traiter ces problmes. Une valuation approondie des besoins de la population est indispen-sable avant de dterminer les rormes ncessaires du personnel et de concevoir un programme cet eet ; de vastes consultations de la socit civile et un sondage dopinion permettront

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    didentier les besoins de la population. Il convient de prter une attention particulire aux be-soins des victimes, des emmes, des minorits et des groupes vulnrables.

    Il y a lieu dvaluer non seulement les besoins de la population, mais aussi les capacits et lesressources dont dispose ltat pour tablir et mettre en uvre la rorme du personnel. Or, lescapacits sont gnralement limites et les socits sortant dun confit ou dun rgime autori-taire sourent dune pnurie de ressources. Aussi une planication raliste doit-elle prendre encompte les ressources la disposition du processus.

    2. valuation du personnel

    a) Grille des qualits de capacit et dintgrit

    La grille des qualits de capacit et dintgrit est un outil mthodologique simple permettant

    dvaluer le personnel des institutions publiques et de mettre au point des mesures ralistes de r-orme du personnel12. Cet outil dnit deux aspects ondamentaux du personnel de la onction pu-

    blique, laspect individuel et laspect structurel ; il utilise deux rubriques principales, deux catgories

    de qualits du personnel de la onction publique : la capacit (ou les comptences) et lintgrit.

    Le personnel dune institution publique se compose du nombre total de personnes titulaires depostes. Le personnel prsente donc un aspect individuel et un aspect structurel : dune part, ilse compose dindividus, dautre part, il est dni par une structure administrative.

    Grille des qualits de capacit et dintgrit : instrument simple dvaluation

    12 La grille des qualits de capacit et dintgrit a t mise au point par Serge Rumin et Alexander Mayer-Rieckh ; elle a tapplique dans plusieurs oprations de maintien de la paix des Nations Unies.

    PERSONNELLE

    INTGRIT

    CAPACIT

    STRUCTURELLE

    ducation

    Exprience

    Aptitude

    Droits de lhomme Conduite Gestion financire personnelle

    Effectifs

    Structure

    Composition

    Obligation de rendre des comptes

    Supervision

    Service

    Manda

    t

    Personnel dune institution publique

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    Les qualits du personnel de la onction publique relvent de deux grandes catgories : lacapacit et lintgrit. La capacit dsigne les qualits permettant au personnel de sacquitterdes tches techniques relevant du mandat de linstitution. Lintgrit dsigne les qualits luipermettant de sacquitter des obligations de ce mandat, conormment aux normes onda-mentales des droits de lhomme, aux normes proessionnelles et aux rgles de ltat de droit.

    Les deux colonnes verticales correspondent aux aspects individuels et structurels. Les lignes ho-rizontales correspondent aux deux qualits ondamentales, savoir la capacit et lintgrit. Lesquatre zones ainsi obtenues dnissent une grille danalyse permettant dvaluer globalementltat du personnel dune institution :

    La capacit personnelle rend compte des qualications dun agent, par exemple de

    son niveau dinstruction et de sa ormation proessionnelle, de son exprience et de

    sa comptence proessionnelle, ainsi que de son aptitude physique et mentale.

    Lintgrit personnelle dsigne lobservation, par un agent, des normes internatio-

    nales des droits de lhomme et de la dontologie, notamment sa bonne gestionnancire personnelle.

    La capacit structurelle dsigne les caractristiques institutionnelles du person-nel, cest--dire eectis, structure administrative et composition (par sexe, pargroupe ethnique et par religion).

    Lintgrit structurelle dsigne les procdures utilises an dinstitutionnaliser lesprincipes et les valeurs dune institution, notamment les mcanismes disciplinaireset les procdures de dpt de plaintes, les mcanismes de contrle, les directivesthiques et les codes de conduite.

    b) Mandat de linstitution

    Au moyen de loutil mthodologique constitu par la grille danalyse de la capacit et delintgrit, lvaluation commence par une analyse du mandat de linstitution rormer. D-nissant les tches et les responsabilits dune institution, le mandat indique les paramtresondamentaux de la structure administrative et les attributions associes chaque poste. Ladescription du mandat gure dans les statuts de ltablissement, lesquels xent galementlorganisation et les responsabilits de linstitution, ainsi que les rglements intrieurs ven-

    tuels.

    Pendant un confit ou sous un rgime autoritaire, les institutions publiques assument s rquem-ment des tches direntes des responsabilits prvues dans leur mandat. Certaines institutionsdrogent leurs responsabilits, dautres adoptent le mandat dune autre institution et dautresencore sont marginalises ou cessent de onctionner. Le processus dvaluation doit retracerbrivement les grandes lignes de lhistoire du confit ou du rgime autoritaire de aon pouvoirvaluer les tches eectivement accomplies par les institutions publiques en question. Le ait deretracer leur historique ournit des inormations de base sur les besoins en matire de rorme

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    institutionnelle et acilite en outre la vrication de lintgrit des agents de ltat, en donnantdes indications sur leur conduite passe.

    c) Enregistrement pilote

    la n du confit ou suite la disparition du rgime autoritaire, les inormations ablesconcernant les eectis et le statut des agents de ltat sont souvent limites, en particulier ausein des grandes institutions dans les secteurs de la scurit tant civile que militaire. De ma-nire rquente, les dossiers et les archives personnels nont jamais t crs ou ont ait lobjetde manipulations inadquates ou encore ont t dtruits. Les attributions individuelles restentfoues et la structure administrative dune institution publique est souvent maldnie.

    Lenregistrement est donc la premire tape importante (qui ne prte relativement pas contro-

    verse) dun processus de rorme du personnel. En rgle gnrale, lenregistrement des agentsde la onction publique est possible, mme lorsque les circonstances politiques ne permettentpas encore la mise en uvre dun programme complet de rorme du personnel. Lenregistre-ment ournit des inormations sur lexprience proessionnelle et les comptences des agentsde ltat, ainsi que des donnes de base sur leurs activits au cours du confit ou sous le rgimeautoritaire prcdent.

    Lenregistrement prend beaucoup de temps et mobilise beaucoup de ressources, en particulierlorsque les eectis dune institution publique (ou de plusieurs institutions) sont importants. La

    tenue et la mise jour du registre une ois lenregistrement initial eectu, exigent des moyenssupplmentaires. Au cours de la phase dvaluation, il sut gnralement de raliser un pren-registrement dun chantillon reprsentati de membres du personnel pour pouvoir identierles principaux besoins de rorme et mettre au point un programme cet eet. Voir la sectionIV.C.3.a ci-dessous la description dtaille des processus denregistrement.

    d) Banque de donnes dintgrit

    On constate rquemment une insusance notable dinormations ables concernant lintgrit

    des agents de la onction publique et des postulants, en particulier quant leur conduite pen-dant le confit ou sous le rgime autoritaire. Au cours de ces priodes, les violations des droitsde lhomme sont souvent dissimules et les preuves sont dtruites. La police et la magistraturepoursuivent rarement les violations et sont mme susceptibles de maintenir un climat dimpu-nit. On a souvent ait taire les organisations non gouvernementales (ONG) qui surveillent lesviolations des droits de lhomme et se livrent des enqutes. Bien que lenregistrement rvlecertaines inormations caractre gnral, cette tape savre gnralement insusante pourvaluer compltement et de aon systmatique lintgrit de chacun des agents de ltat et despostulants la onction publique.

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    Lobtention dinormations ables sur lintgrit des agents de ltat ou des postulants exige la

    cration dune banque de donnes dintgrit, au terme dun processus dynamique de collectedinormations gnrales partir de direntes sources. Les donnes pertinentes doivent tre

    enregistres et classes par coupable prsum, plutt que par incident. Parmi les sources din-

    ormation gurent les dossiers personnels, les archives des tribunaux, les dossiers des partis,les listes lectorales, les rapports des Nations Unies, les rapports des ONG, les rapports des

    commissions de vrit, les rapports des mdias et, enn, les rapports tablis par des enqu-

    teurs indpendants. Toutes ces inormations doivent tre croises et values quant leur cr-

    dibilit et leur abilit, en particulier lorsquelles datent de la priode du confit ou du rgime

    autoritaire.

    Les services secrets de la police qui conservent des dossiers condentiels dtaills concernantles individus sont une constante des rgimes autoritaires. Thoriquement, ces dossiers peuvent

    tre introduits dans une banque de donnes dintgrit. Touteois, les inormations contenuesdans ces dossiers condentiels tant souvent douteuses, il aut les utiliser avec la plus grandeprudence. Qui plus est, la vie prive, en particulier celle des victimes, des tmoins, des tmoinspotentiels et des personnes non concernes par la rorme du personnel, doit tre protgeconormment aux normes ondamentales des droits de lhomme.

    Une autre option intressante pour recueillir des inormations sur lintgrit des agents deltat et des postulants consiste donner la population loccasion de ournir les inor-mations quelle dtient. Dans la mesure o la situation de la scurit le permet, une pos-sibilit consiste diuser largement des listes de noms dagents de ltat et de postulantset nommer un point de contact charg de recevoir les inormations concernant leursantcdents.

    e) Risques des rvocations

    Les onctionnaires rvoqus qui ne trouvent pas un autre emploi et ne sont pas intgrsdans la socit risquent de glisser dans la criminalit et dentraver le processus de rorme.En particulier, la rvocation dun nombre important dagents de scurit arms peut consti-tuer un risque rel pour la scurit et menacer la transition proprement dite. Il convientdvaluer les risques potentiels crs par les rvocations avant de mettre au point un pro-gramme de rorme du personnel, et denvisager direntes options en matire dindem-nits de dpart et de mesures daide provisoire, en particulier pour les onctionnaires r-voqus pour des raisons autres quun daut dintgrit. Les programmes de rorme dupersonnel peuvent tre associs aux programmes de dsarmement, de dmobilisationet de rintgration. Touteois, il y a lieu de tenir dment compte des droits des victi-mes : laide aux onctionnaires rvoqus ne doit pas se aire au dtriment des besoins desvictimes.

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    3. valuation du bassin de remplaants potentiels

    Un programme de rorme du personnel peut exiger le recrutement de nouveaux agents deltat pour remplacer ceux qui ont t rvoqus ou pour occuper de nouveaux postes. Or, il nestpas toujours acile de trouver des remplaants intgres. An de rduire au minimum les risquesde vide de gouvernance et de mesurer le temps et les ressources ncessaires lidentication, la prparation et la ormation des nouvelles personnes recrutes, il convient dvaluer le bassinde remplaants potentiels, ainsi que leurs caractristiques gnrales en termes de capacit etdintgrit.

    Dans les pays sortant dun confit ou dun rgime autoritaire, il peut savrer extrmement di-cile de trouver des candidats qualis, ce qui peut demander la mise au point de programmesde ormation spciaux an de crer rapidement les capacits requises. Par ailleurs, il est paroisdicile de persuader des individus plus qualis de joindre les rangs du service public, tant

    donn quen priode de transition la onction publique nest pas ncessairement considrecomme une activit intressante et sre.

    4. valuation de la volont politique et de la rsistance

    La rsistance la rorme est une caractristique couramment observe dans les pays sortantdun confit ou dun rgime autoritaire. Les personnes comme les groupes qui, en raison dunprogramme de rorme, risquent de perdre une partie de leur pouvoir et de leur infuencesopposent rquemment sa mise en uvre. Les dirigeants peuvent, par exemple, continuer

    poursuivre les objectis de lancien rgime ou de lpoque du confit. Les agents de ltat quiont particip ou t complices de violations passes ont intrt les dissimuler et protger leurposte. Lvaluation doit donc identier les rsistances potentielles au processus de rorme dupersonnel et les risques pour le processus de transition, ainsi que les personnes et les groupesdintrts anims dun esprit de rorme susceptibles de participer la conception et la miseen uvre dun programme de rorme du personnel.

    B. Dfnition des paramtres, des normes et des rsultats

    Sur la base de lvaluation, il convient de dnir les objectis du programme de rorme dupersonnel, notamment :1) dnition du mandat de linstitution2) dnition des paramtres structurels (composition et structure)3) dnition des normes demploi individuelles (descriptions de poste, qualications

    requises, etc.)4) quilibrage des objectis concurrents5) dtermination des consquences pour les agents rvoqus du ait du processus de

    rorme

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    L encore, la grille des qualits de capacit et dintgrit peut constituer un outil mthodologi-que permettant de dnir le mandat, les paramtres et les normes.

    Grille des qualits de capacit et dintgrit : instrument simple de planifcation

    1. Dfnition du mandat de linstitution

    La modication du mandat dune institution publique, lissue dun confit ou suite la dis-parition dun rgime autoritaire, peut savrer ncessaire an de rpondre aux besoins et auxexigences dun pays rgi par la primaut du droit. Or, des transormations notables du mandatdune institution publique demanderont en rgle gnrale des transormations structurelles.Il audra, le cas chant, usionner ou regrouper des institutions, rduire ou augmenter leurtaille, les crer de toutes pices ou les supprimer, du ait des modications de leur mandat. Cestransormations structurelles auront un impact majeur sur les besoins en personnel et devrontdonc tre menes bien avant dinstaurer un programme de rorme du personnel. Les modi-cations du mandat dune institution publique devront gnralement aire lobjet dun processus

    politique entranant des modications de la lgislation.

    2. Dfnition des paramtres structurels

    En onction des modications de son mandat et des eorts dploys pour rendre linstitutionpublique plus ecace, un renorcement de sa capacit structurelle est parois ncessaire. Il peuten rsulter des modications de la taille et de la vocation de ses dpartements, du nombre depostes, du nombre de cadres suprieurs par rapport aux cadres moyens et au personnel noncadre, et de la composition du personnel de linstitution.

    CAPACIT

    PERSONNELLE

    CAPACIT

    STRUCTURELLE

    INTGRIT

    PERSONNELLE

    INTGRIT

    STRUCTURELLE

    Man

    da

    t

    Personnel dune institution publique

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    La composition du personnel dune institution publique dun pays rgi par ltat de droit doitgnralement refter celle de la population quelle est cense servir. Les institutions reprsenta-tives ont une meilleure perception des proccupations et des besoins particuliers des direntsgroupes dune socit et gagnent plus acilement la conance de la population. Touteois, lesavis divergent trs largement quant au degr de reprsentativit idal des institutions publiques,lequel dpend du type dinstitution et de son mandat, de ses caractristiques socio-historiqueset de considrations politiques.

    Le degr de reprsentativit est mesur par un certain nombre de critres, notamment le rapport

    hommes-emmes, lappartenance ethnique, lorigine gographique et la religion. Des mesures

    spciales doivent parois tre adoptes pour pouvoir intgrer des actions autreois antagonistes

    et des ex-combattants. La reprsentativit des institutions joue un rle particulirement dcisi

    dans les pays sortant dun confit prsentant une dimension ethnique, gographique ou religieu-

    se, et tout spcialement lorsque la rorme implique lintgration dinstitutions publiques dont la

    composition reposait sur des critres ethniques, gographiques ou religieux.

    Les dcisions en matire de structure administrative et de composition dnissent les para-mtres structurels dune rorme du personnel puisquelles dterminent le nombre et le typedagents de ltat prvoir, aectent les qualications requises pour chaque poste et limitentle nombre de postes ouverts aux personnes dun sexe donn, appartenant tel ou tel groupeethnique ou religieux ou provenant de telle ou telle rgion.

    3. Dfnition de normes demploi individuelles

    a) Dfnition de normes de capacit personnelle

    Une ois dnies la structure administrative et la composition du personnel dune institution,il aut mettre au point des descriptis de onctions nonant les qualications personnelles etproessionnelles requises, savoir la comptence et lexprience proessionnelle ainsi que lesaptitudes physiques et mentales adaptes aux aspects techniques dun poste donn. Les inor-mations recueillies au cours dun processus de prenregistrement ourniront de prcieuses indi-cations pour dnir des normes de capacit personnelle adaptes et ralistes dans un contexte

    donn. La situation qui prvaut lissue dun confit ou suite la disparition dun rgime autori-taire impose parois des normes de comptences proessionnelles initialement peu leves, quidoivent tre progressivement releves une ois la ormation assure.

    b) Dfnition de normes dintgrit personnelle

    Les candidats un poste dans la onction publique doivent non seulement possder les com-ptences requises, mais galement tmoigner de leur intgrit. Lintgrit dune personnesexprime par son acceptation des normes internationales en matire de droits de lhomme

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    et de dontologie, y compris ses qualits de gestion nancire personnelle. Bien que lonsentende gnralement sur le ait que lintgrit constitue une exigence ondamentale pourtravailler dans la onction publique, les avis sont trs partags quant sa signication pr-cise, et quant la nature et au niveau dintgrit ncessaire pour occuper un poste dansla onction publique, notamment dans le cas des pays sortant dun confit ou dun rgimeautoritaire.

    Si lintgrit dune personne se mesure son comportement, les violations passes ne sontquune indication quant son comportement utur. Le contexte du confit et du rgime autori-taire est parois une circonstance attnuante pour certains actes commis dans le pass ; selonle type de violation en cause, il nest donc pas impossible que lintgrit de la personne sertablisse au moins partiellement au l du temps. Touteois, les personnes qui ont commis desviolations graves des droits de lhomme ou des crimes graves en vertu du droit international nedoivent pas occuper de onction publique. Ces violations comprennent en particulier les actes

    de gnocide, les crimes de guerre, les crimes contre lhumanit, les excutions extrajudiciaires,la torture et les actes ou traitements similaires, cruels, inhumains ou dgradants, les disparitionsorces et lesclavage13. Il sagit de crimes graves qui dnotent une absence dintgrit propre aecter radicalement la capacit dune personne exercer une onction publique. Lorsquunepersonne a t condamne et sanctionne pour des crimes de cette nature les tats sont danslobligation de poursuivre ces crimes , il est normal quelle soit exclue de la onction publique14.Lagent de ltat qui a commis de tels actes a perdu la conance spciale dont il bnciait etdoit tre rvoqu15. Une nouvelle recrue qui a commis des crimes graves ne peut gagner laconance ; son maintien en poste ou son embauche risque de compromettre la rputation de

    linstitution publique dans son ensemble.

    En ce qui concerne les violations et les manquements de gravit inrieure celle des violationsfagrantes des droits de lhomme ou des crimes graves selon le droit international, certains l-ments peuvent indiquer si une personne a retrouv son intgrit ou si elle peut la retrouver lavenir. Les questions suivantes peuvent tre poses :

    13 La dnition des violations graves des droits de lhomme et celle des crimes graves en vertu du droit international se recoupelargement. La dnition des crimes graves selon le droit international gure dans les documents E/CN.4/2005/102/Add.1,

    p. 6, et E/CN.4/2005/102, par. 13. Voir galement lobservation gnrale n 31 du Comit des droits de lhomme (CCPR/C/21/Rev.1/Add.13, par. 18).

    14 La rvocation ne supprime aucunement lobligation de aire valoir la responsabilit pnale des agents de ltat auteurs de vio-lation. Voir, par exemple, les observations nales du Comit des droits de lhomme concernant le Guatemala, (CCPR/CO/72/GTM, par. 13). Sur lobligation denquter et de poursuivre les violations graves des droits de lhomme et la jurisprudencecorrespondante, voir galement le document E/CN.4/2004/88, par. 24 56.

    15 Voir les observations nales du Comit des droits de lhomme concernant lArgentine (CCPR/CO/70/ARG, par. 9), danslesquelles le Comit a recommand lArgentine de prendre des mesures pour que les personnes ayant particip desviolations fagrantes des droits de lhomme soient dmises de leurs onctions militaires ou publiques . Voir galement lesobservations nales du Comit concernant la Bolivie (CCPR/C/79/Add.74, par. 15) ; laaire Velasquez Rodriguez, Cour intera-mricaine des droits de lhomme, n 4 (Srie C), par. 175, arrt du 29 juillet 1988 ; E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 36.

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    Quelle tait la nature prcise de la violation commise ou du manquement en question etdans quel contexte sest-il produit ?

    Sagissait-il dune pratique institutionnelle gnralise (par exemple, corruption gnrali-se dun certain milieu proessionnel ?)

    La violation ou le manquement en question ont-ils pris n ou se poursuivent-ils ? Sils ont pris n, y a-t-il eu reconnaissance des aits ? Une amlioration des comportements

    a-t-elle t observe ? Lacte commis a-t-il ondamentalement aect la conance des citoyens ? Si tel est le cas,

    sera-t-il possible de la regagner ? Dans quelles conditions ?

    Un certain nombre de codes internationaux noncent des principes susceptibles de aciliter la

    mise au point de normes concrtes dintgrit adaptes des situations postconfictuelles ou suite

    la disparition dun rgime autoritaire. Parmi ces derniers gurent les codes proessionnels des

    Nations Unies, en particulier les Principes ondamentaux relatis lindpendance de la magistra-

    ture, les Principes directeurs applicables au rle des magistrats du parquet et le Code de conduitepour les responsables de lapplication des lois, la Convention des Nations Unies contre la corrup-

    tion, et, enn, le droit pnal international, le droit international des droits d lhomme et le droit

    international humanitaire16. Linormation recueillie dans la base de donnes dintgrit ournira

    de prcieuses indications quant aux carences actuelles cet gard et aidera dnir des normes

    dintgrit adaptes et ralistes pour la situation considre. Il nexiste cependant pas de critres

    indniables permettant de dnir prcisment la nature et les limites des normes dintgrit appli-

    cables aux manquements moins graves ; il audra donc les dnir en onction du contexte.

    4. Harmonisation de normes concurrentes

    Les paramtres et les normes dnis dans les catgories de la grille danalyse des qualits decapacit et dintgrit (capacit structurelle, capacit personnelle, et intgrit personnelle)risquent de xer des objectis contradictoires en matire de rorme du personnel. Aussi la miseau point dun programme dans ce domaine est-elle susceptible dexiger des compromis et desarbitrages dlicats.

    En rgle gnrale, la lgitimit dun programme de rorme du personnel dpendra de lobserva-

    tion de certaines normes minimales concernant chacune des trois catgories mentionnes ci-des-sus. Une institution publique dont le personnel est comptent, mais compos dune seule ethnie,

    par exemple, nest gure susceptible davoir la conance des autres groupes ethniques et risque

    de ne comprendre ni leur langue ni leurs proccupations. Le personnel dune autre institution

    peut trs bien prsenter des niveaux dintgrit levs, mais manquer par ailleurs des comp-

    tences requises. Bien quil soit anim des meilleures intentions, le personnel ne sera alors pas en

    16 En ce qui concerne les codes proessionnels et autres normes de base, voir le document intitul : Human Rights and Law Enfor-

    cement : A Manual on Human Rights Training for the Police (publication des Nations Unies, numro de vente : E.96.XIV.5).

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    mesure de sacquitter du mandat de linstitution. Tandis quil ne aut pas maintenir en poste des

    collaborateurs prsentant des carences graves en matire dintgrit, il convient de procder

    une valuation soigneuse qui gre les squelles politiques dun confit ou dun rgime autoritaire

    particulier, tout en semployant mettre en place une institution publique quitable et ecace.

    5. Dfnition des consquences

    Le daut de conormit dun agent de ltat aux normes minimales exiges pour son maintienen poste peut avoir direntes consquences. Il convient de dnir les consquences corres-pondant chaque norme. Lorsquun agent de ltat a t rvoqu pour grave daut dintgrit,son accs utur des emplois publics comparables doit tre restreint puisque sa abilit rduitecompromet lecacit et la lgitimit de linstitution publique ; ainsi, il pourrait tre disqualipour une certaine catgorie de postes, soit pour tous les postes dune institution publique, soitpour la onction publique en gnral. La disqualication pourrait tre permanente ou temporai-

    re et la rintgration dans la onction publique pourrait dpendre de la vrication de certainesconditions, par exemple la reconnaissance de certains actes ou de certains manquements ouleur indemnisation. Lagent de ltat pourrait galement tre mut, engag lessai, rtrogradou interdit de promotion. Les mesures de disqualication pourraient galement entraner la pri-vation de privilges et de dirents avantages. Le choix des consquences appropries seec-tue en onction de chaque contexte. Les employs qui ont commis des violations fagrantes desdroits de lhomme ou des crimes graves en vertu du droit international doivent en gnral treexclus de la onction publique, mais la dtermination des consquences appropries dpenddans une large mesure des circonstances particulires de la transition.

    Lorsquun agent de ltat a t rvoqu uniquement la suite de modications de la structureadministrative, des eectis ou de la composition du personnel, cela ne devrait avoir aucuneconsquence pour son aptitude uture lemploi. Il peut alors postuler immdiatement unautre emploi public. Linsusance des comptences proessionnelles dun agent de ltat peuttre corrige par une ormation complmentaire, de sorte que lintress peut postuler nou-veau pour le mme emploi ou pour un emploi similaire ds quil aura acquis les qualications quilui aisaient daut. Il aut certes viter de sembler rcompenser les auteurs de violations, touten prenant grand soin par ailleurs dviter, ou du moins dattnuer les eets prjudiciables quepourraient avoir des rvocations sur des agents de ltat rvoqus pour des raisons autres que

    leur daut dintgrit. Le processus de rorme du personnel pourrait par exemple prvoir desemplois de substitution, des indemnits de licenciement, ainsi quune aide la rintgration ouencore des activits de recyclage.

    C. Conception du processus

    Une ois tablis les paramtres structurels et les normes demploi dune institution publique, leprocessus de rorme proprement dit doit tre mis sur pied. La section suivante propose desdirectives en matire de conception de la rorme du personnel proprement dite.

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    1. Mcanisme spcial

    Lauto-rorme est gnralement dicile tant donn que les intrts en place compromettentune valuation objective des besoins de rorme et sopposent une mise en uvre relle etquitable du processus. Dans les circonstances politiques complexes dun pays sortant dunconfit ou dun rgime autoritaire, la capacit des institutions publiques se rormer elles-mmes est encore plus restreinte. Souvent, elles ont intrt touer les violations commisesdans le pass et sopposer la rorme. Dans nombre de cas, elles conservent des liens avecdanciens dirigeants et persistent dans la poursuite des objectis de lancien rgime ou de lapriode du confit. Le besoin de rormes rsulte touteois dans une mesure importante desliens inextricables des institutions avec le pass. De plus, la limitation des ressources dont ellesdisposent dans une situation postconfictuelle ou suite la disparition dun rgime autoritaireleur laisse peu de marge pour appliquer une rorme du personnel lourde grer tout en assu-mant leurs responsabilits courantes.

    Pendant la priode de transition, une rorme du personnel doit donc, en rgle gnrale, treadministre par un mcanisme spcialement cr, sous la orme dune commission. Cette com-mission spciale doit tre indpendante pour garantir une mise en uvre quitable, impartialeet lgitime du processus. Or, il nest pas toujours acile de crer une commission indpendanteet de veiller limpartialit de ses membres, dans le contexte politique tendu dun pays sortantdun confit ou dun rgime autoritaire. Ses membres doivent tre des citoyens intgres mi-nents, sans lien avec un parti politique ou une ancienne partie belligrante. La participation demembres trangers ou de non-ressortissants est susceptible de renorcer lindpendance et la

    lgitimit de la commission. De vastes consultations doivent prcder la nomination par uneinstance indpendante suprme cour constitutionnelle, che de ltat ou institution internatio-nale de ses membres les plus hauts placs. Pour que les principaux dirigeants de la commissionbncient dune large acceptation, leur nomination pourrait tre sujette lapprobation duneinstance bnciant de la conance gnrale des citoyens. Les dirigeants doivent tre nommspour la dure du processus de rorme du personnel et ne doivent pas tre rvocables pendantce temps. En onction des circonstances politiques et des missions concrtes mener bien, ilpourrait y avoir une commission pour lensemble du secteur public ou des commissions spa-res pour certaines institutions.

    Les processus de rorme du personnel sont complexes, prennent beaucoup de temps et ab-sorbent des ressources considrables, en particulier lorsquils concernent des institutions dontles eectis sont importants. Leur succs ou leur chec dpend dans une large mesure dunevaluation approondie des exigences oprationnelles et de la possibilit de disposer du tempset des ressources ncessaires ; lenregistrement des agents de ltat, leur slection, lvaluationde leurs comptences, et en particulier lexamen de leurs antcdents, sont autant de tchescomplexes qui prennent du temps et exigent des comptences spcialises. La commission sp-ciale aura besoin dun secrtariat bien pourvu en personnel pour rassembler les inormations

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    ncessaires et prter son concours au processus dcisionnel. Le personnel du secrtariat doittre multidisciplinaire et compter dans ses rangs des gestionnaires de systmes dinormation,des juristes et des experts techniques. La commission et son secrtariat doivent en outre tredots de ressources nancires et matrielles appropries, notamment de locaux scuriss, desystmes de classement et de gestion de linormation, de moyens de transport, et du matrielncessaire pour raliser des enqutes.

    La cration dun mcanisme spcial indpendant risque au demeurant de poser de graves di-cults pour les conomies mises rude preuve des pays en transition. Eu gard limportancedes processus de rorme de personnel dans les priodes de transition, la communaut interna-tionale doit prendre en charge la mise en place de ces mcanismes.

    La commission spciale risque de devoir prendre des dcisions impopulaires, pouvant compro-mettre la scurit de ses membres. Il aut donc mettre en place des dispositions pour garantir

    leur scurit.

    2. Principaux types de processus de rorme du personnel

    En priode de transition, on distingue deux principaux types de rorme du personnel : lexa-men individuel et le renouvellement des nominations. Dans un processus dexamen individuel,le cas de chaque agent en activit est vri pour dterminer le bien-ond de son maintienen place. Dans un processus de renouvellement des nominations, on procde dans un premiertemps la dissolution de linstitution, puis tous les employs doivent postuler auprs dune

    nouvelle institution, dont tous les postes sont pourvus en mettant en concurrence tous lescandidats. Ces deux types de processus correspondent deux grandes conceptions de larorme des institutions : leur rorganisation et leur reondation. Ce choix dpend en parti-culier de lampleur de la rorme gnrale du personnel. Un troisime type moins courant derorme est dcrit la n de la prsente section : il sagit des procdures disciplinairesnormales.

    a) Processus dexamen individuel restructuration de linstitution

    i) Concept

    Dans un processus dexamen individuel, on institue gnralement un mcanisme transitoirespcial charg de vrier le cas des agents de ltat en activit et de dterminer leur aptitude conserver leur poste. Lobjecti essentiel est de rvoquer les agents jugs inaptes lexercice deleurs onctions. Dans ce processus, les normes ondamentales dune procdure quitable sap-pliquent, la charge de la preuve incombant linstance examinatrice, lexamen des preuves etde leur orce probante constituant alors la norme applicable (on trouvera ci-dessous un examendtaill des normes juridiques ondamentales).

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    La dcision de mettre en place un processus dexamen individuel sappuie sur les deux principessuivants : premirement, il aut prvoir un mcanisme spcial pour raliser les rormes du per-sonnel ncessaires au cours de la priode postconfictuelle ou suite la disparition dun rgimeautoritaire. Les mcanismes disciplinaires normaux et les procdures de licenciement seraientdpasss ou insusants. Deuximement, il est possible datteindre les objectis de la rormeen rvoquant les agents de ltat inaptes au service, tandis que les autres modications structu-relles ne sont pas absolument ncessaires ou sont ralisables sparment. Un processus dexa-men individuel implique une continuit contractuelle et une continuit de linstitution au niveaustructurel. Chacun des agents de ltat reste en activit tant que linstance examinatrice ne les

    juge pas inapte occuper leur poste. Au niveau structurel, un processus dexamen des dossiersindividuels est une restructuration progressive dune institution qui continue dexister. Ce typede processus convient davantage pour sattaquer aux carences individuelles en termes de capa-cit et dintgrit que pour sattaquer aux carences structurelles. Les modications structurellesimportantes sont prises en charge de aon plus ecace par un processus de renouvellement

    des nominations (voir section IV.C.2.b ci-dessous).

    ii) Exigences lgales

    Les garanties ondamentales de procdure rgulire sappliquent galement aux procduresnon pnales17. Les agents de ltat qui ont lobjet dun examen de leur dossier doivent doncbncier des garanties lmentaires dune procdure administrative rgulire18.

    Un processus dexamen doit tre individualis. Ainsi, lorsquil sagit de rvoquer une personne

    qui occupe un emploi public en raison dune inraction pnale, sa responsabilit personnelledoit tre tablie (pas ncessairement selon le critre dtablissement de la preuve appliqu dansles aaires pnales ; voir ci-dessous). La notion de responsabilit collective est gnralementcontraire aux garanties lmentaires dune procdure rgulire19.

    17 Pacte international relati aux droits civils et politiques, art. 14 (qui dcidera [] ses droits et obligations de caractre civil).De lavis de la Cour europenne des droits de lhomme, les garanties de traitement quitable de la Convention europennedes droits de lhomme ne sappliquent pas en rgle gnrale aux confits entre les onctionnaires et ltat ( Pellegrin c.France, 8 dcembre 1999). Les onctionnaires aisant lobjet dun processus dassainissement dans le cadre europen ris-

    quent de ne pas tre protgs par les exigences de procdure rgulire dnies dans la Convention. Le Comit des droitsde lhomme a adopt une approche dirente en dclarant que le concept de conormit la loi selon larticle 14 du Pacteinternational relati aux droits civils et politiques reposait sur la nature du droit en question et non sur le statut de lunedes parties (CCPR/C/51/D/441/1990, par.5.2). Dans une dcision plus rcente, la Chambre des droits de lhomme de laBosnie-Herzgovine sest carte du prcdent de laaire Pellegrin et a reconnu le bien-ond de la cause dun ocierde police qui contestait son licenciement. (Rusmir Daferovic c. Fdration de Bosnie-Herzgovine (3 dcembre 2003),CH/03/12932).

    18 Dans la lgislation internationale des droits de lhomme, les exigences de procdure rgulire dans le cas des procdures nonpnales sont moins explicitement dnies que dans celui des procdures pnales. Les garanties ondamentales prsentesci-aprs sappliquent nanmoins toute procdure rgulire.

    19 Voir, par exemple, Conseil de lEurope, rsolution 1096 (1996) de lAssemble parlementaire, par. 12.

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    Les agents de ltat qui ont lobjet dun examen doivent bncier du respect des droits de ladense. Ces droits comprennent certains lments ondamentaux : lancement de la procduredans un dlai raisonnable et gnralement de aon publique ; notication aux parties misesen examen des procdures dont elles ont lobjet et des charges pesant contre elles ; possibilitpour celles-ci de prparer leur dense, notamment accs aux donnes appropries ; possibilitpour celles-ci de prsenter des arguments et des preuves et de rpondre aux arguments et auxpreuves contradictoires devant linstance qui gre le processus dassainissement, possibilit dereprsentation par un avocat ; et notication aux parties de la dcision et des motis qui la jus-tient. En rgle gnrale, une instruction doit obir au principe de l galit des armes . Deplus, les agents soumis une procdure dexamen doivent avoir le droit de aire appel dunedcision davorable auprs dun tribunal ou dune autre instance indpendante20.

    Gnralement, la charge de la preuve incombe linstance examinatrice qui doit dmontrerquun agent de ltat est inapte lexercice dune onction publique. Dans des circonstances

    exceptionnelles, la charge de la preuve peut tre inverse, lorsque le groupe ou le service dontaisait partie le onctionnaire pendant le confit ou sous le rgime autoritaire se caractrisepar des antcdents bien connus de violations des droits de lhomme. Cette situation creraitune prsomption contestable dinaptitude lexercice dune onction publique21. Touteois, ilconvient denvisager un processus de renouvellement des nominations ds lors que la pratiquedes violations sest banalise dans toute linstitution et que la rvocation dun grand nombredagents de ltat risque de savrer ncessaire (voir ci-dessous).

    Comme dans toute procdure administrative, le critre dtablissement de la preuve applica-

    ble dans une procdure dexamen sera celui de la orce probante des preuves et non celui delintime conviction exig dans le cadre des procdures pnales22. Suivant ce critre, linstanceexaminatrice doit suivre la version des vnements qui semble la plus probable, raisonnable ouvraisemblable, compte tenu de tous les lments de preuve.

    Les agents de ltat (notamment les juges) qui ont t nomms de aon illgitime en viola-tion des exigences de procdure ou de qualication peuvent tre lgalement relevs de leursonctions. Leur rvocation na pas besoin dautre justication23. Un rexamen de la dcision parune instance indpendante et impartiale peut touteois tre demand.

    20 E/CN.4/12005/102, par. 69.21 Conseil de lEurope, Assemble parlementaire, Mesures de dmantlement de lhritage des anciens rgimes totalitaires

    communistes : directives garantissant que les lois de lustration et les mesures administratives analogues sont compatiblesavec les exigences dun tat de droit (document 7568, par. 16, al.h, 3 juin 1996.

    22 La norme de preuve applicable est onction des consquences potentielles des procdures. Etant donn que les consquen-ces des procdures dassainissement sont moins graves que celles des procdures pnales, la preuve au-del de tout douteraisonnable (lintime conviction) nest pas exige.

    23 E/CN.4/2005/102/Add.1, principe 30 (selon lequel les juges qui ont t dsigns illgitimement ou qui ont tir leur pouvoirjuridict ionnel dun acte dallgeance peuvent tre dmis de leurs onctions par la loi en application du principe du paralllismedes ormes .

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    Les obligations contractuelles rsultant du licenciement dagents de ltat du ait dune proc-dure dexamen, doivent tre honores, en particulier lorsquils sont rvoqus pour des raisonsautres quun daut dintgrit. Ces dispositions peuvent comporter des indemnits de licencie-ment, ainsi que dirents avantages, des pensions, etc.24

    b) Processus de renouvellement des nominations reondation de linstitution

    i) Concept

    Un processus de renouvellement des nominations inverse la dynamique dune procdure dexa-men. Linstitution publique concerne est dmantele dans un premier temps, puis une nouvelleinstitution est cre et la totalit des postes pourvoir sont mis au concours. Tous les agents enactivit doivent aire acte de candidature sils souhaitent continuer travailler dans la nouvelleinstitution publique. An dviter un vide de gouvernance, ils peuvent rester en place jusqu

    ce quune dcision nale soit prise quant leur uture situation proessionnelle. Lorsque la can-didature dun agent de ltat en activit nest pas retenue, il est mis un terme ses onctions.Alors que lobjecti premier dune procdure dexamen consiste rvoquer les personnes inap-tes au service public, le but dun processus de renouvellement des nominations est de pourvoirles postes en choisissant les personnes les plus aptes et les mieux qualies.

    Un processus de renouvellement des nominations est une intervention importante, tant auniveau individuel quau niveau structurel. Au niveau individuel, les agents de ltat deviennentdes postulants, leur maintien en place tant conditionn par le renouvellement de leur nomi-

    nation. Ce type de processus dplace le ardeau de la preuve sur le demandeur, lequel doitdmontrer que sa candidature est la mieux adapte au poste vacant. linverse des onction-naires limins au cours des procdures dexamen, les postulants dans le cadre dun processusde renouvellement de leur nomination nont gnralement aucun droit une audition ou un recours en rvision sils ne sont pas choisis, puisque la nomination une onction publiquenest aucunement un droit. Ces procdures simplies, notamment linversion du ardeau dela preuve, allgent notablement le processus de rorme du personnel. Dans un pays sortantdun confit ou dun rgime autoritaire, un processus de ce type acilite la slection des agentsles plus aptes, et ne se limite pas liminer ceux dont le maintien est maniestement inaccep-

    table.

    Au niveau structurel, un processus de renouvellement des nominations correspond la crationdune nouvelle institution publique. Lancienne institution cesse dexister. Cette approche aciliteles processus de rorme du personnel qui non seulement remdient aux dcits individuelsde capacit et dintgrit, mais qui exigent aussi lintroduction de modications notables de la

    24 Conseil de lEurope, rsolution 1096 (1996) de lAssemble parlementaire, par. 14.

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    structure administrative et de la composition dune organisation. Un processus de renouvelle-ment des nomination ournit une meilleure occasion dannuler les ingalits structurelles et demettre en place les rormes institutionnelles ncessaires (par exemple, modication signica-tive de la composition par sexe ou par origine ethnique dune institution publique) et acilite parailleurs la limitation ou la raectation des eectis dans le cadre dun regroupement ou dundmantlement des institutions publiques.

    Le nombre de remplaants qualis limite les possibilits de rorme dune institution publiqueau moyen dun processus de renouvellement des nominations. En rgle gnrale, ce processusest ouvert aux candidatures extrieures an de pouvoir remplacer les agents de ltat jugsinaptes ou pour occuper de nouveaux postes suite aux changements introduits dans la compo-sition ou la structure administrative dune institution publique.

    ii) Exigences lgales

    Dans des conditions normales, les consquences du point de vue procdural du processus derenouvellement des nominations, en particulier le dni daudition et de recours judiciaire, ainsique linversion du ardeau de la preuve, violeraient les droits ondamentaux une procdurergulire des agents de ltat en activit dont la nouvelle candidature nest pas retenue. Cesretournements de procdure sont justiables au titre dun processus de transition qui exige laralisation de changements majeurs quant aux eectis du personnel, la structure administra-tive et/ou la composition du personnel de linstitution publique considre.

    Qui plus est, dans un pays rgi par ltat de droit, il existe des garanties constitutionnelles, enparticulier la sparation des pouvoirs, qui protgent ltat de droit et vitent les interrences

    politiques entre les institutions publiques, notamment la dsignation arbitraire de remplaants

    et la rorganisation du secteur public par le pouvoir excuti. Lindpendance de la magistrature

    ore des garanties spciales pour les juges, notamment le principe de linamovibilit. Des disposi-

    tions lgales protgent gnralement lindpendance de la police en service et autres organismes

    de scurit. Un processus de renouvellement des nominations pourrait compromettre gravement

    ltat de droit et orir des possibilits dingrence arbitraire dans le onctionnement de dirents

    secteurs publics normalement indpendants. Aussi un tel processus doit-il tre limit aux cas de

    graves dysonctionnements de linstitution publique considre et lorsquune amlioration globalede ltat de droit nest gure susceptible dtre observe en son absence. Qui plus est, un processus

    de renouvellement des nominations doit se drouler aussi rapidement que possible et aussi vite

    que le contexte politique le permet an dviter des priodes prolonges dincertitude juridique.

    Il convient galement de respecter les droits contractuels suite au licenciement des agents deltat dans le cadre dun processus de renouvellement des nominations, en particulier lorsquilssont licencis pour des raisons autres quun daut dintgrit. Ces dispositions peuvent com-porter des indemnits de licenciement et dirents avantages, des retraites, etc.

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