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Lý thuyết trường quan niệm của Vergnaud - một trong 3 lý thuyết nền tảng của Didactic Toán.

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  • This article was downloaded by: [171.235.2.96]On: 20 August 2015, At: 21:17Publisher: RoutledgeInforma Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registeredoffice: 5 Howick Place, London, SW1P 1WG

    Infancia y Aprendizaje: Journal for theStudy of Education and DevelopmentPublication details, including instructions for authors and subscriptioninformation:http://www.tandfonline.com/loi/riya20

    Pourquoi la thorie des champsconceptuels?Grard Vergnaudaa Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)Published online: 23 Jan 2014.

    To cite this article: Grard Vergnaud (2013) Pourquoi la thorie des champs conceptuels?,Infancia y Aprendizaje: Journal for the Study of Education and Development, 36:2, 131-161, DOI:10.1174/021037013806196283

    To link to this article: http://dx.doi.org/10.1174/021037013806196283

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  • Pourquoi la thorie des champsconceptuels?

    GRARD VERGNAUDCentre National de la Recherche Scientifique (CNRS)

    AbstractLa thorie des champs conceptuels sadresse au double problme de lactivit en situation et du dveloppement

    au long terme des comptences et des connaissances. Cest lapprentissage des comptences complexes et lesdifficults rencontres par les lves au cours de cet apprentissage qui ont cr le besoin de ce cadre thorique:principalement lapprentissage des mathmatiques et des sciences. Mais ce cadre a aussi sa valeur pour dautresdomaines. Lactivit en situation est essentielle dans ladaptation au rel, et aux situations scolaires. Celaconduit dune part distinguer entre la forme opratoire de la connaissance, qui se manifeste justement ensituation, et la forme prdicative, qui est une mise en mots et en symboles des objets de pense et de leurs proprits.

    Aprs quelques exemples, larticle traite de la question quest-ce quapprendre?, et montre que le conceptde comptence appelle une analyse de lactivit en termes de schmes. Un schme est, par dfinition, uneorganisation de lactivit pour une certaine classe de situations. Cest un concept pertinent pour tudier aussibien les raisonnements que les gestes.

    Concernant le dveloppement au cours de lexprience, il est important de chercher identifier les filiationset les ruptures, cest la fonction thorique de lide de champ conceptuel: un ensemble de situations, un ensemblede schmes et dinvariants opratoires, et un ensemble de formes symboliques.

    Mots cls: Activit, dveloppement, apprentissage, schme, situation, champ conceptuel, invariantopratoire, filiation, rupture.

    Por qu la teora de los camposconceptuales?

    ResumenLa teora de los campos conceptuales aborda el doble problema de la actividad en situacin y del desarrollo a

    largo plazo de competencias y conocimientos. El aprendizaje de competencias complejas y las dificultades encontra-das por los alumnos en el transcurso del aprendizaje crearon la necesidad de este marco terico: principalmente elaprendizaje de las matemticas y de las ciencias. Sin embargo, este marco tiene tambin valor en otras reas. Laactividad en situacin es esencial en la adaptacin a la realidad y a las situaciones escolares. Esto conduce por unlado a distinguir entre la forma operatoria de los conocimientos, que se manifiesta precisamente en situacin, y laforma predicativa, que expresa en palabras y smbolos los objetos del pensamiento y sus propiedades.

    A partir de algunos ejemplos, el texto aborda la pregunta: Qu es el aprendizaje? y muestra que el con-cepto de competencia exige un anlisis de la actividad en trminos de esquemas. Un esquema es, por defini-cin, una organizacin de la actividad para un cierto tipo de situaciones. ste es un concepto pertinente para elestudio tanto del razonamiento como de los gestos.

    En cuanto al desarrollo en el curso de la experiencia, la funcin terica de la idea de campo conceptual unconjunto de situaciones, un conjunto de esquemas e invariantes operatorias y un conjunto de formas simblicases tratar de identificar las continuidades y las rupturas.

    Palabras clave:Actividad, desarrollo, aprendizaje, esquema, situacin, campo conceptual, invarian-te operatoria, filiacin, ruptura.

    Version en franais dans les pages 131-145 (Rfrences dans la page 161).Versin en espaol en pginas 146-160 (Traduccin: Philippe Cheminade).

    Remerciements: L'quipe ditoriale remercie la collaboration de la Dre. Brbara Brizuela dans l'dition dfinitivede ce travail.Contact avec l'auteur: Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS). 6 rue des Gloriettes, F 78540,Vernouillet, Francia. E-mail: [email protected] reu: le 23 fvrier 2012. Accept: le 6 octobre 2012.

    2013 Fundacin Infancia y Aprendizaje, ISSN: 0210-3702 Infancia y Aprendizaje, 2013, 36 (2), 131-161 PROSPECTIVAS/ PROSP

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  • La connaissance est adaptation. Piaget faisait de la connaissance un processusde dveloppement trs gnral, biologique et social. Cest en tudiant ceprocessus chez les bbs, les enfants et les adolescents quil a pu apporter unpoint de vue scientifique nouveau sur la formation des concepts, par exempleceux despace, de temps, dordre, de nombre, de classe logique etc. Il na pastudi le dveloppement cognitif chez les adultes. Il na pas non plus tudi lesprocessus dapprentissage lcole et dans le travail, notamment du point de vuede leur contenu conceptuel spcifique. Ce contenu nest pas rductible auxcatgories gnrales de pense auxquelles Piaget sintressait, comme dailleursla plupart des psychologues dalors, y compris dans les cas o ils se centraientsur les interactions entre culture et connaissance, tels que Vygotski (1934/1985)et Bruner (1983, 2000). Cest la recherche en didactique qui a commenc decombler cette lacune: on peut la dfinir comme ltude des processus detransmission et dappropriation des connaissances dans ce que ces connaissancesont de spcifique du contenu. En effet, on ne peut pas considrerlenseignement et lapprentissage dune discipline comme tant indpendantsdu domaine concern. Cela tient la fois aux processus de conceptualisationncessaires, la spcificit des situations et des phnomnes tudis, et desformes dactivit appeles tre dveloppes.La recherche en didactique apporte ainsi une vision complmentaire de celle de

    Piaget. Pour comprendre ce quest la connaissance, disait Piaget (1949, 1964,1974a, 1974b; Piaget & Inhelder, 1966), il faut en tudier le dveloppement; onpeut ajouter aujourdhui quil faut entreprendre de la transformer. Mais comment faire? Il ny a pas de rponse gnrale ce dfi, mais on peut

    essayer de dfinir les orientations thoriques et mthodologiques de cetteentreprise. Cest ce que propose la thorie des champs conceptuels. Cette thoriea t dveloppe dabord pour lapprentissage des mathmatiques: les structuresadditives, les structures multiplicatives, lalgbre lmentaire, la gomtrie.Plusieurs autres domaines ont pu tre abords la lumire de cette approche,comme la morale, lducation physique, la comprhension de textes (Vergnaud,1981, 1996a, 1996b; Vergnaud & Rcop, 2000). Pour introduire la thorie des champs conceptuels, la clart me commande

    de partir des questions qui interrogent le plus directement lorientation de larecherche en psychologie: lactivit et le dveloppement. De l est issue ladistinction cruciale entre deux formes de la connaissance, la forme opratoire etla forme prdicative: des exemples permettent alors dillustrer la formeopratoire, avec laquelle les psychologues ne sont gure familiariss aujourdhui. La partie suivante permet de prciser ce que cest quapprendre, et de

    gnraliser tous les registres dactivit, du geste au raisonnement, laproblmatique du dveloppement des formes dorganisation de lactivit. Ilmest alors apparu possible de proposer une dfinition analytique du concept deschme (ses quatre composantes), et de prciser la distinction entre concept etthorme. De l dcoule un certain tableau du dveloppement: un champconceptuel apparat alors comme un moyen de mieux comprendre le rle delexprience. Le texte aurait t trop exclusivement orient vers la formeopratoire si une dernire partie navait abord ses rapports avec la formeprdicative et les systmes de signifiants/signifis.

    Activit en situation et dveloppement

    Reprenons lide dadaptation, chre Piaget: quoi sadapte-t-on? quest-cequi sadapte? La rponse peut tenir en deux points: lindividu sadapte des situations;

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  • ce sont des schmes qui sadaptent, cest--dire des formes dorganisationde lactivit: elles sont modifies dans la rencontre avec des situations nouvelles.Il faut des concepts aussi bien dfinis que possible pour avancer, notamment

    pour conduire des recherches empiriques et interprter des observations. Endonnant une place centrale au couple thorique situation/schme, on abandonnele couple stimulus/rponse, qui a encombr la psychologie depuis des dcennies,et empch les psychologues daborder ltude des comptences complexes dansde bonnes conditions. Ce faisant on circonscrit lanalyse de lactivit des classesde situations aussi bien rpertories que possible, et on est ainsi plus concret quene le permet le couple objet/sujet de la pense philosophique traditionnelle.Lide de dveloppement est essentielle galement, et complte celle du court

    terme de lactivit en situation, par celle du long terme de lapprentissage et delexprience. Cest en effet en annes, et mme parfois en dizaines dannes quesvalue la dure de la formation de lexpertise. Et le dveloppement se manifeste la fois par des continuits et des ruptures: les connaissances nouvelles se construisent la fois en sappuyant sur les connaissances antrieures, et en sopposant parfois elles. Cette dialectique de lancien et du nouveau nest pas facile analyser, encoremoins organiser dans lenseignement. Bachelard (1940, 1947) a apport plusieursexemples, pris dans lhistoire des sciences, lappui de cette dialectique. Les effetsen sont plus importants quon peut imaginer a priori, puisque cela entraine parfoisdes restructurations considrables, et pas seulement des ajouts et complments.

    Forme opratoire et forme prdicative des connaissances

    Nous exprimons nos connaissances la fois par ce que nous en disons (cest laforme prdicative), et par ce que faisons en situation (cest la forme opratoire).En vrit la forme opratoire est beaucoup plus riche que la forme prdicative,comme en tmoigne le dcalage entre la comptence quun sujet est capable demanifester en situation, et ce quil est capable den dire. En outre, dans leprocessus dadaptation, cest lactivit en situation qui est premire, mme si laforme prdicative est concerne elle aussi par cette adaptation. Dailleurslnonciation est elle aussi une activit, de mme que la comprhension desparoles dautrui et des textes. Rien nchappe au thme de lactivit. Mais le thme du dveloppement est incontournable lui aussi puisque lcole,

    la vie au travail et la vie tout court sont inconcevables sans lui. Un champconceptuel est justement ce qui permet danalyser et de situer les unes parrapport aux autres les comptences progressivement formes. Les filiations et lesruptures sont alors considres du point de vue de la conceptualisation, mais enprenant ce processus dans un sens large, celui de lidentification des objets depense et de leurs proprits dans le cours mme de lactivit en situation. Lexpression langagire et la mise en formes symboliques de reprsentation (il

    en existe une grande varit) ajoutent du poids et de la stabilit aux formesconceptuelles ainsi labores au cours du dveloppement, et viennent au secoursde la conceptualisation implicite dans laction. Mais le premier enjeu de lapsychologie comme science cognitive est de mettre en vidence les formes deconceptualisation sous-jacentes lactivit, laquelles sont la fois source etproduit de cette activit. Cest la principale raison thorique de lintroductiondans la dfinition du schme, du concept dinvariant opratoire.

    Quelques exemples danalyse de lactivit

    Commenons par un exemple des mathmatiques (cest pour ce domaine dela connaissance que jai labor la thorie des champs conceptuels). Puis nousallons considrer des exemples relatifs aux activits professionnelles.

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  • Premier exemple

    Prenons donc la rsolution dun problme darithmtique lmentaire, danslequel il faut enchaner plusieurs oprations de multiplication et de divisionpour aboutir: La production dune ferme de la Beauce est de 2485 quintaux de bl.Parmi les questions formules par les lves, figure la question suivante: Combienpeut-on faire de farine avec cette production? Parmi les informations disponibles,figure celle-ci: Il faut 120 kg de bl pour faire 100 kg de farine.Nous allons distinguer deux phases de lactivit: une phase de choix des

    donnes et de lopration effectuer, et une phase deffectuation de cetteopration. La premire phase peut par exemple commencer par une priode derecherche et dhsitation, qui peut durer assez longtemps chez des lves decollge ou des adultes dits de faible niveau. Puis une proposition peut treformule; il en existe une grande varit: Dclarer que 2485 quintaux de bl, cela fait 248.500 kg de bl, et diviser

    248.500 par 120, avec ce commentaire que, de cette manire, on saura parcombien de fois il faut multiplier 100 kg de farine.... Dclarer quil faudrait faire le produit en croix, procdure enseigne partout,

    mais peu frquemment utilise dans les circonstances ordinaires de la vie. Envisager de diviser 120 par 100, sans savoir pour autant comment

    continuer ensuite. Proposer de diviser 100 par 120, et considrer que le rsultat ainsi trouv,

    cest le coefficient qui permet de passer du bl la farine. Essayer de sapprocher progressivement de 248.500 en faisant 1000 fois

    120, soit 120.000; puis nouveau 1000 fois, puis 100 fois, puis 10 fois, etc. Il existe une bonne vingtaine de propositions possibles, dont cinq ou six

    peuvent conduire la solution, les autres lchec. La deuxime phase consiste en leffectuation de lopration dcide dans la

    premire phase: par exemple pose de la division de 248.500 par 120, et conduitede la procdure apprise (limination dun zro au diviseur et au dividende, choixdun dividende partiel suprieur 12, recherche du quotient maximum,effectuation de la multiplication puis de la soustraction, examen du reste etabaissement du chiffre suivant, et ainsi de suite). Elle peut aussi consister enlutilisation dune calculette.Lorganisation de lactivit pendant la deuxime phase est organise par un

    algorithme, qui comporte un but identifiable, des rgles relativementcomplexes enseignes lcole, une certaine reprsentation des objets-signes surle papier et de leur signification, des choix et des attentes. Par exemple certainslves sont pris au dpourvu lorsque le dividende dtape, aprs abaissement duchiffre suivant, est infrieur au diviseur: jabaisse le 8 mais il est infrieur 12. Il est un peu plus dlicat de dcrire lorganisation de lactivit pendant la

    premire phase. Il existe un but, qui se dcline en sous buts diffrents selon lavoie prise. Le choix de tel sous but plutt que de tel autre est un indiceimportant pour le psychologue. Ce choix va en effet de pair avec celui desdonnes et des oprations effectuer en premier, puis en second, etc. Il va ausside pair avec la reprsentation des grandeurs en jeu et de leurs relations, cest--dire avec leur conceptualisation. En effet, les relations entre grandeurs sontdune difficult conceptuelle ingale: Combien de fois plus...? se rfre unerelation entre grandeurs de mme nature; de mme la dcomposition additive1.000 fois 120 et encore 1.000 fois 120, etc. Par contre la division de 120 par100 ou de 100 par 120 concerne des grandeurs de nature diffrente. Ou bien oninterprte ces divisions comme des quotients de dimensions, mais on saitaujourdhui que les lves ont du mal concevoir cette opration de quotient;

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  • ou bien on voit la division de 120 par 100 comme le moyen de trouver laquantit de bl correspondant un kg de farine, auquel cas 100 ne dsigne plus100 kg de farine mais la relation de comparaison 100 fois moins, qui est unnombre sans dimension, un scalaire.

    Deuxime exemple

    Un mcanicien de rparation automobile expriment se voit confier laresponsabilit daccueillir les clients qui apportent leur voiture pour rparation.Dans cette nouvelle fonction, le rceptionnaire a comme premier objectif, dansles 5 15 minutes dont il dispose, dobtenir du client une information aussifiable que possible sur le problme mcanique en jeu; sa comptence demcanicien est donc essentielle. Il lui faut pour cela couter le client, lui poserdes questions pertinentes, soit pour en savoir davantage que ce que le client oula cliente est en mesure de dire de son propre chef, soit pour carter lesdiagnostics errons que le client propose. Une tude approfondie mene parPatrick Mayen (1998, 2000) a montr que, ct de ce premier objectif, il existedeux autres enjeux du dialogue avec le client: le rassurer (sur les dlais, les prix,la garantie offerte), et le fidliser. Il est clair que laccueil doit satisfaire le clientet lencourager revenir la prochaine fois, non pas aller chez le concurrent.Lactivit de dialogue engage par le rceptionnaire est ainsi organise autour

    de ces trois enjeux, sans quil y ait un plan prtabli. Les comptencesconversationnelles du rceptionnaire et sa capacit sadapter aux propos de soninterlocuteur sont aussi ncessaires que ses comptences de mcanicien. Ce nestpas dans latelier seulement quil a pu les dvelopper, mais au cours de toute sonexprience de la conversation, de la politesse, de lamabilit, de lhumour. Ildveloppe en outre une nouvelle professionnalit au cours de son exprience derceptionnaire. Les rceptionnaires ne sont pas galement comptents, loin de l.

    Troisime exemple

    Dans une entreprise de production de bton; les camions toupies sont quipsde pompes eau dune certaine complexit. Il arrive quelles tombent en panne.Les pompes ne sont pas toutes identiques, les pannes non plus, y compris sur lemme type de pompe. Un jour lun des techniciens de maintenance tombemalade et doit se faire hospitaliser. Leffet immdiat est que, dans latelier, on nesait plus rparer un certain type de pannes, que le technicien hospitalis avaitlhabitude de rparer, et qui justement on les confiait rgulirement. Commeson hospitalisation se prolonge, on envoie une petite dlgation de collguespour lui demander comment il sy prend. Il se prte volontiers lentretien,explique le mieux quil peut; les collgues sen retournent contents; mais unefois revenus dans latelier, ils ne parviennent toujours pas rparer les ditespannes. Evidemment lorsque le technicien sort de lhpital, quelques semainesplus tard, il recommence rparer sans problme les pannes rcalcitrantes.Dans les trois exemples, chacune des dmarches susceptibles dtre engages

    par les sujets dans la recherche doprer en situation a vocation devenir un schme-mme dans le cas de llve, le rceptionniste et louvrier. Certains schmes neconduisent pas la russite; ils sont en gnral abandonns, souvent avant mmedavoir t stabiliss. Dautres sont renforcs ce point quils chassent les autres.Le plus frquemment chaque sujet dispose de plusieurs schmes alternatifs entrelesquels il peut choisir en fonction des valeurs des variables de situation (rsoudreun problme arithmtique, accueillir un client ou rparer une panne). Lesrecherches montrent cependant que certains individus disposent de toute unepanoplie alors que dautres nont quune corde leur arc.

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  • Quest-ce quapprendre au fond?

    Ces exemples illustrent tous les trois ce que jappelle la forme opratoire dela connaissance, qui permet de faire et de russir en situation, et quon rsumeaujourdhui sous le terme de comptence. On voit ainsi que la comptenceconcerne aussi bien le travail ouvrier, celui de llve, ou celui du rceptionnairede clients. Il concerne aussi tous les registres de lactivit: les gestes et la prisedinformations perceptives, le langage et le dialogue, le raisonnementscientifique et technique. Tous les registres de lactivit font en effet lobjet decomptences, plus ou moins labores, plus ou moins critiques danslacquisition de la matrise et de la professionnalit.Essayons daller plus loin. La performance est videmment une premire

    approche: X est plus comptent au temps t quau temps t sil sait faire ce quilne savait pas faire. Mais cette dfinition reste silencieuse sur trois autresconsidrations complmentaires de la premire, tout aussi dcisives pourlanalyse: X est plus comptent sil sy prend dune meilleure manire (plus rapide,

    plus fiable, mieux compatible avec la manire dont ses partenaires sy prennent). X est plus comptent sil dispose de ressources alternatives pour traiter des

    situations dun certain type, mais susceptibles, par leurs caractres propres, derendre une mthode plus opportune dans tel cas, moins opportune dans telautre. X est plus comptent sil est moins dmuni devant une situation nouvelle.Ces trois dernires considrations conduisent lanalyse du droulement de

    lactivit, pas seulement celle de son rsultat. La performance est radicalementinsuffisante pour valuer, analyser, et dfinir la comptence. Examinons lactivit du rparateur de pompes eau: bien sr le fait brut est

    quil sait rparer des pannes que les autres ne savent pas rparer. Mais on observeaussi quil excute des gestes subtils dont la fonction nest pas immdiatementinterprtable. En outre les gestes ne sont pas le tout de sa comptence: il prenddes indices perceptifs sur plusieurs parties de la pompe eau, fait des essais defonctionnement partiel, analyse la contribution synchronique et diachroniquedes diffrents mouvements en jeu. Il lui faut pour cela disposer de concepts-en-acte, lui permettant de rechercher linformation pertinente et dignorer dautresaspects du mcanisme et de son fonctionnement. Il questionne ainsi la pompe eau rcalcitrante, et raisonne en situation, sans pour autant tre en mesure deformuler compltement ce quil tient pour vrai ou raisonnable, de mmedailleurs que les mots lui manquent pour dsigner sans ambigut les indicesquil utilise. On peut dire que la forme prdicative de sa connaissance despompes eau est en de de sa forme opratoire. Cest la raison de son chec communiquer son savoir-faire partir de son lit dhpital.Examinons son tour lactivit du rceptionnaire de clients: il se trouve dans

    une situation dans laquelle une autre source que lui-mme contribue donnersa forme la conversation (situation dite dynamique). Linterlocuteur client esten partie prvisible, en partie imprvisible. Le rceptionnaire doit donc disposerde catgories lui permettant dinterprter ce que dit le client par rapport auxtrois buts distingus plus haut (identifier la panne, rassurer, fidliser), et tre enmme temps en mesure de sadapter limprvu. Parce quelle est adaptative,lactivit professionnelle est toujours opportuniste. Mais elle nen comporte pasmoins de fortes rgularits, et les conceptualisations ncessaires. Au fond delaction on trouve toujours la conceptualisation, cest--dire lidentificationdobjets de diffrents niveaux, directement accessibles la perception ou non,ainsi que leurs proprits et relations.

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  • Du geste au raisonnement

    Le geste est un prototype fondamental de lactivit humaine. Cest donc parlui quil est le plus naturel de commencer. Mais ce nest pas le seul domaine delactivit dans lequel intervient un certain dcours temporel des actions, desprises dinformation et des contrles. En outre lactivit gestuelle contientbeaucoup doprations de pense, notamment en termes de reprsentation desobjets matriels, de leurs proprits, relations et transformations, galement desrelations entre les proprits des gestes et les proprits des objets. De telle sortequon est fond regarder le raisonnement et le geste avec des catgories voisinessinon communes. Certes il y a une grande distance entre les gestes du bb qui apprend saisir

    les petits objets de son environnement pour sen servir comme instruments, ouen explorer les proprits, et les gestes de lartisan bniste ou du rparateur depompes eau; de mme quil existe une grande distance entre le geste du bbde huit mois qui se met debout dans son parc, et celui dun champion du saut la perche, ou dune danseuse toile excutant un pas de deux avec sonpartenaire. Pourtant, dans tous ces cas, lorganisation du geste contient lesmmes composantes, relativement simples noncer: Un but, qui se dcline ventuellement en sous buts, organiss de manire

    squentielle et hirarchique la fois. Le squencement, le rglage et lajustement des diffrentes parties du geste

    en fonction des conditions dans lesquelles se trouve le sujet chaque instant. Cerglage concerne la fois lenchanement dans le temps et la coordination desmouvements des diffrentes parties du corps. Lidentification des objets matriels et de leurs proprits: volume, poids,

    caractristiques gomtriques, distance, rsistance la force, temprature etautres proprits physiques. Cette reprsentation des objets entretientncessairement des relations avec les proprits du geste puisquun geste vise tre adapt, et que ses caractristiques principales doivent donc correspondreraisonnablement bien aux caractristiques des objets. Le calcul quasi ininterrompu des actions effectuer, des informations

    prlever, des contrles faire. En dpit de lautomatisation de certaines partiesdes gestes, il existe toujours de nombreuses incertitudes, qui appellentcomplments dinformation et infrences en situation. Mme lorsque lasituation est familire, et quelle appartient une classe bien caractrise, desajustements sont ncessaires. Si la classe de situations voque est moinstroitement dfinie, les infrences ont un rle encore plus important, etcontribuent par exemple au choix dune alternative parmi plusieurs, en fonctionde ses avantages et inconvnients.Ce sont ces composantes de lactivit, dune grande simplicit au fond, qui

    conduisent la dfinition du schme. Mais avant de prsenter cette dfinition,il faut vrifier la valeur descriptive de ce qui vient dtre dit pour dautresactivits que le geste, ou plus prcisment pour des activits dans lesquelles larussite ou lchec ne sont pas dtermins par la prcision et lhabilet du geste,mais par dautres caractristiques.Prenons un autre registre dactivit, celui de la parole, du discours, du dialogue;

    et considrons par exemple lorganisation de lactivit dun enseignant dans saclasse. Les composantes nonces plus haut sont nouveau prsentes, notamment: Le but: faire partager par les lves un certain nombre de jugements de fait

    ou de valeur; soulever des questions et passer pour cela par certains sous butsconcernant tel ou tel point, telle ou telle analyse, telle ou telle argumentation.ventuellement chercher toucher des groupes diffrents de lauditoire.

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  • Le rglage et lajustement des arguments, de la rhtorique, du ton aveclequel les choses sont dites. Cette adaptation repose la fois sur une valuationpar lenseignant des attentes et ractions possibles des lves, sur ses hypothses,sur linterprtation des expressions de leurs visages.Lactivit est la fois rptition et variation. On ne peut pas comprendre la

    pense prsente dans lactivit humaine si on nen voit pas le double caractresystmatique et opportuniste. On ne rpte pas sans systme et sans rgles, onne sadapte pas la contingence, la varit et la nouveaut sans catgories depense pour prendre et traiter linformation pertinente.

    Le concept de schme

    De l dcoulent plusieurs niveaux de dfinition.Dfinition 1: le schme est une organisation invariante de lactivit pour une

    classe de situations donne. Cela ne signifie pas quil existe un schme unique pour une ladite classe de

    situations; il en existe souvent plusieurs.Dfinition 2 : le schme est form ncessairement de quatre composantes: un but, des sous buts et anticipations; des rgles daction, de prise dinformation et de contrle; des invariants opratoires: concepts-en acte et thormes en acte; des possibilits dinfrence en situation.La premire dfinition comporte trois ides essentielles, quil nest pas

    superflu de souligner. Le schme sadresse une classe de situations. On peut donc en droit lui

    associer des quantificateurs universels, qui permettent den dfinir la porte etles limites. Le schme est donc un universel, comme le concept. Cest lorganisation qui est invariante, non pas la conduite observable; les

    schmes ne sont pas des strotypes. Si certains schmes engendrent desconduites relativement strotypes, ce nest pas le cas de la plupart des schmes:ils engendrent des conduites diffrentes en fonction des variables de situation. Le schme norganise pas que la conduite observable, mais galement

    lactivit de pense sous-jacente.La deuxime dfinition est analytique. Il est commode de commenter

    dabord les rgles daction de prise dinformation et de contrle, puisque cesrgles assurent la fonction gnrative du schme, celle qui est le plusimmdiatement responsable du dcours temporel de la conduite et de lactivit.La conduite nest pas forme que dactions, mais aussi des prises

    dinformation ncessaires la poursuite de lactivit, et des contrles quipermettent au sujet de sassurer quil a bien fait ce quil pensait faire et quil esttoujours sur la voie choisie.Or ces rgles sont totalement conditionnes par la reprsentation du but

    atteindre et par les conceptualisations qui permettent didentifier les objets enprsence, leurs proprits et relations, les transformations que la conduite dusujet est cense leur faire subir.La partie intentionnelle du schme quest le but, est essentielle dans

    lorganisation de lactivit. Le but se dcline en sous buts, squentiellement ethirarchiquement agencs; lesquels donnent lieu de nombreuses anticipations.Mme lorsque le but nest que partiellement conscient et que les effets attendusde laction ne sont pas tous prvisibles par le sujet, ce caractre intentionnel dela conduite et de lactivit ne peut pas tre ignor. Il est en effet la sourcedaspects diffrentiels importants de la conduite, dans lducation et le travail enparticulier. La force de lintention est variable; plusieurs intentions distinctes

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  • peuvent coexister dans la mme activit: par exemple satisfaire ou sduireautrui, en mme temps quatteindre un but purement matriel.Plus dcisifs encore du point de vue cognitif, sont les invariants opratoires,

    puisque les concepts-en-acte permettent de prlever dans lenvironnement lesinformations pertinentes, et de slectionner les thormes-en-acte ncessaires aucalcul la fois des buts et sous buts susceptibles dtre forms, et des rglesdaction, de prise dinformation et de contrle permettant de les atteindre.Pour bien comprendre ce dernier point, il faut faire siennes deux ides

    essentielles: la distinction entre pertinence et vrit, et la thse quun calcul nepeut pas tre modlis par des formes qui ne seraient pas des propositions. En termes de la distinction entre pertinence et vrit, les concepts-en-acte

    permettent didentifier des objets, des proprits et relations. Par objets il fautentendre la fois des objets matriellement perceptibles et des objetsconstruits par la culture, la science, la technique, ou par le sujet individuel lui-mme. Par proprits et relations, il faut entendre la fois des prdicatsobservables et des prdicats infrables partir des observables, rsultant deconstructions culturelles ou personnelles. Les thormes-en-acte, eux, sont des propositions tenues pour vraies sur le rel.

    Dfinitions complmentaires

    Un concept-en-acte est un concept tenu pour pertinent dans laction ensituation. Un thorme-en-acte est une proposition tenue pour vraie danslaction en situation. Parmi les concepts-en-acte, certains ont un statut dobjet,dautres un statut de prdicat une place, dautres encore de prdicat plusieursplaces. En outre, les prdicats peuvent devenir des objets et entretenir leur tourdes relations avec dautres objets.Parmi les thormes-en-acte, certains ont un statut de proposition tenue pour

    vraie ici et maintenant, dans la situation prsente; tandis que dautres sontuniversellement vrais, pour toute une classe de situations. Toutefois il fautremarquer que le statut dune proposition peut naviguer entre le particulier etluniversel: par exemple 4 + 5 = 9 est une proposition particulire si on ladistingue de 4 + 6 = 9 ou de 7 + 3 = 10, mais cest une proposition universellesi lon considre quelle est vraie aussi bien quand on dnombre des chevauxdans un champ que lorsquon dnombre des verres sur une table.Lanalyse ci-dessus peut paratre complexe un lecteur non averti. En ralit

    elle est assez simple, et surtout elle est ncessaire. Dans une situation donne, lesujet dispose de plusieurs sortes de connaissances, pour identifier les objets etleurs relations et se donner partir de l des buts et rgles de conduitepertinents. Cest parce que les concepts ne sont pas labors demble avec toutesleurs proprits, quil faut distinguer entre concepts et thormes. Mme quandelles impliquent les mmes concepts, certaines situations ne sont matrisesquavec un grand retard par rapport dautres, apparemment voisines; lesthormes-en-acte correspondant ces situations sont dcals, bien quils fassentappel aux mmes concepts. Ces connaissances-en-acte sont dsignes ici par leterme dinvariants opratoires pour souligner par le lexique que cesconnaissances ne sont pas ncessairement explicites, ni explicitables, ni mmeconscientes pour certaines dentre-elles. Le concept dinvariant opratoirepermet de parler dans les mmes termes la fois de lidentification des objetsmatriels et de leurs relations par la perception, de linterprtation desinformations dans les situations o il y a place pour lincertitude et lhypothse,et des raisonnements qui portent sur des objets hautement labors de la culture.

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  • Un dernier commentaire concerne la quatrime composante du schme.Pourquoi est-il ncessaire de mentionner, dans ces composantes, les possibilitsdinfrences en situation? Justement parce que le schme nest pas un strotype,et ne correspond nullement cette mtaphore dangereuse quil existerait desformes cbles dactivit dans le cerveau. En effet, le schme suppose toujoursune activit intense de calcul en situation, comme en tmoigne dailleursabondamment limagerie crbrale. Ces possibilits rsultent principalementdes thormes-en-acte spcifiques du domaine, et de la classe de situations laquelle sadresse le schme, mais aussi de thormes-en-acte plus gnraux, quicouvrent plusieurs domaines dactivit, et qui sont souvent formaliss dans destermes logiques comme la dduction, linduction, labduction. Il ne faut pas sy tromper cependant, ces thormes-en-acte aussi ont une

    porte locale: par exemple la transitivit des relations dordre peut trespontanment utilise par un enfant de 8 ans dans certaines activits et pas dansdautres. On nchappe jamais totalement au besoin de spcifier le domainedactivit auquel on sintresse, et donc le domaine de conceptualisationspcifique quil faut analyser pour comprendre le fonctionnement et ledveloppement cognitifs.Bien que les analyses prsentes ci-dessus soient relativement diffrentes de

    celles de Piaget (1949, 1964, 1974a, 1974b; Piaget & Inhelder, 1966), ettmoignent dun plus grand souci de dfinition et de gnralit, concernant leconcept de schme au moins, lemprunt Piaget des termes de schme etdinvariant opratoire indique clairement que cest lui le premier inspirateurde cette thorie.

    Champ dexprience et champ conceptuel

    Lexprience consiste dans la rencontre du sujet avec des situations. Chacunedentre elle est singulire, mais lactivit du bb sorganise progressivement demanire traiter de faon semblable des classes de situations distinctes, enfonction des ressemblances et des diffrences quil est en mesure didentifierentre ces situations. Ce sont ces formes dorganisation de lactivit quiconstituent les premiers schmes du bb, quils soient congnitaux etinstinctifs au dpart, ou plus largement dpendant de lhistoire propre du sujet:par exemple la reconnaissance du biberon et la formation des gestes qui lui sontassocis nobissent pas au mme calendrier chez les enfants nourrisexclusivement au sein et chez ceux qui sont nourris trs tt au biberon. Il existeen outre des diffrences culturelles importantes sur ce point. Les schmes dubb, quelque syncrtiques quils puissent tre, ne peuvent pas se dvelopper, sediffrencier et senrichir sans que soient identifis des objets, des proprits, desrelations et leurs transformations. Les invariants opratoires jouent donc un rlecentral dans ladaptation du bb son environnement physique et social. Lesbuts distincts et les rgles distinctes daction de prise dinformation et decontrle associes chaque classe de situations sont galement essentielles danslassimilation des situations nouvelles et dans laccommodation des schmes. Endautres termes les diffrentes composantes du schme sont prsentes ds lespremires formes dorganisation de lactivit du bb. Aprs quelques jours lamanire dont le bb se tourne vers le sein de sa mre et commence tter estdj un peu diffrente de ce quelle tait la premire fois.Ce nest pas le lieu dnumrer les diffrents schmes perceptivo-gestuels qui

    jalonnent le dveloppement cognitif du bb. Il parat utile cependant deremarquer que lexpression schmes sensori-moteurs utilise par Piaget est certains gards une faute conceptuelle, dans la mesure o lorganisation de ces

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  • schmes est faite de perceptions et de gestes organiss. Lexpression schmesperceptivo-gestuels serait donc plus correcte. On peut ajouter quune partimportante du rpertoire de lenfant de 18 mois concerne les propritsphysiques et spatiales des objets, les proprits sociales et affectives despersonnes de lentourage, et les fonctions de communication et de reprsentationdu langage. Le langage du jeune enfant est lui-mme gr par des schmesperceptivo-gestuels de dialogue et de monologue. Il nest donc pas correct deparler de stade sensori-moteur. Le champ dexprience du sujet enfant, adolescent, ou adulte couvre, la fois

    lexprience dite quotidienne de la vie (dans la famille et dans le milieu de vie),et lexprience scolaire, lexprience professionnelle, la formation. On ne peutpas opposer ces expriences les unes aux autres sans prcaution thorique. Parexemple il est excessivement simpliste dopposer les mathmatiques de lcoleet celles de la vie ordinaire: beaucoup de rsultats montrent que les mmesschmes organisent les unes et les autres. Ce sont les conditions qui changent,et bien entendu elles psent; mais les schmes restent tonnamment semblables.Pour analyser le dveloppement des comptences et des conceptualisations du

    sujet dans les diffrents registres de son activit, il est indispensable de dcouperdes objets dtude plus petits que lexprience globale, mme si cette exprienceglobale mrite aussi dtre analyse pour elle-mme, et mme si elle pse surlexprience des domaines particuliers. Cest cette question mthodologique querpond le concept de champ conceptuel: son objectif est de dsigner des souschamps de lexprience, autour des deux ides de situation et de concept. En effet,une approche dveloppementale des comptences et des conceptualisationsconduit inexorablement tudier une varit de situations, puisquun concept nese dveloppe pas dans une seule catgorie de situations, mais dans une certainevarit, qui peut tre trs grande. Corrlativement une situation ne sanalyse pas laide dun seul concept, mais de plusieurs. Le chercheur est donc conduit, sil veutcomprendre le dveloppement, prendre pour objet dtude un ensemble desituations et un ensemble de concepts, cest--dire un champ conceptuel.Pour mieux faire comprendre ce besoin thorique, je reprendrai lexemple de

    lapprentissage de la proportionnalit, dj voqu plus haut avec le calcul de laquantit de farine correspondant 2485 quintaux de bl. Lapprentissage de laproportionnalit implique la rencontre avec une diversit de situations deproportionnalit entre grandeurs continues ou entre quantits discrtes. Ondistingue notamment les situations de multiplication, de division-partition, dedivision-quotition, de quatrime proportionnelle pour ce qui est des proportionssimples; auxquelles sajoutent les situations qui mettent en jeu desproportionnalits doubles ou multiples, dans lesquelles une variable estproportionnelle plusieurs autres variables, indpendantes entre elles. Cestnotamment le cas des aires et des volumes, et de la plupart des grandeursphysiques. Lapprentissage de ces diffrents cas de figure requiert lidentificationet ventuellement lexplicitation, verbale ou symbolique, dune varit deconcepts. La distinction entre une grandeur et sa mesure est indispensable.Pourtant, comme les enfants raisonnent sur des grandeurs et pas seulement surdes nombres, ils prtent attention aux dimensions diffrentes des grandeurs enjeu, et sont souvent troubls par ces dimensions diffrentes: grandeurslmentaires, grandeurs quotients, grandeurs produits. Ils ne conoivent pas dela mme manire les rapports entre grandeurs de mme nature (120 kg de bl et248.500 kg de bl par exemple) et les rapports entre grandeurs de naturediffrente (entre quantits de bl et quantits de farine). Les rapports entregrandeurs de mme nature sont des scalaires, cest--dire des nombres, tandis queles rapports entre grandeurs de nature diffrente appellent une analyse

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  • dimensionnelle. Lemprunt du vocabulaire des espaces vectoriels et desapplications entre espaces vectoriels peut sembler excessif. On peut le justifier parles schmes mis en oeuvre dans les problmes de proportionnalit: par exempleplusieurs proprits des fonctions linaires et bilinaires sont spontanmentutilises par certains lves sans quelles aient jamais t enseignes (lorsque lesvaleurs numriques sy prtent), les proprits des isomorphismes additif etmultiplicatif notamment. Ce sont typiquement des thormes-en-acte. Pour rsumer ce point de vue, le psychologue du dveloppement est conduit

    considrer un concept comme le produit de lexprience, pas seulementcomme le rsultat dune dfinition, mme si les dfinitions sont importantesdans la formation de la rationalit. On est alors conduit dfinir un concept comme un triplet de trois

    ensembles distincts, non indpendants entre eux, mais distincts:

    Concept = def (S, I, L)S lensemble des situations qui donnent du sens au concept,I lensemble des invariants opratoires qui structurent les formesdorganisation de lactivit (schmes) susceptibles dtre voques par cessituations,

    L lensemble des reprsentations langagires et symboliques (algbriques,graphiques, etc.) qui permettent de reprsenter les concepts et leursrelations, et par voie de consquence les situations et les schmes quellesvoquent.

    Le chercheur qui veut comprendre le dveloppement cognitif au cours delexprience, y compris de lexprience scolaire, est donc conduit prendre pourobjet dtude un ensemble de situations et un ensemble de concepts, cest--direun champ conceptuel.

    Dfinition: un champ conceptuel est la fois un ensemble de situations et unensemble de concepts. Lensemble des situations dont la matrise progressiveappelle une varit de concepts, de schmes et de reprsentations symboliquesen troite connexion; lensemble des concepts qui contribuent la matrise deces situations.Ces concepts forment des systmes, dont lorganisation est elle-mme

    progressive, ventuellement jamais acheve: par exemple le champ conceptueldes structures additives se dveloppe sur une trs longue priode de temps partir de 3 ou 4 ans et jusqu la fin des tudes secondaires; des erreurs deconceptualisation subsistent chez de nombreux adultes sinon tous. Le champconceptuel de la morale est galement le lieu dun lent et complexedveloppement qui va des premires annes la vie dadulte (Rochat, 2012).Pour des raisons de faisabilit; on peut identifier des champs conceptuels plusrestreints, dans tel ou tel registre de lactivit, comme la comprhension detextes narratifs lcole lmentaire, la mcanique du mouvement au lyce, laconduite des centrales nuclaires chez les professionnels en activit ou enformation. Mais dans tous les cas, il y a pril prendre des objets dtude troppetits, en ce sens quon risque de ne pas saisir les processus organisateurs dudveloppement des comptences et des conceptualisations. Ces processusreposent en effet sur des analogies, des mtaphores et des glissements de sens. partir de certaines rgularits observes dans le rel, souvent produites parlaction du sujet, ces processus aboutissent des constructions conceptuelles dehaut niveau, qui nont plus de relation aisment identifiable avec les rgularitsdu rel. Sans le langage et les symbolismes dvelopps par la culture, il seraitimpossible didentifier ces constructions conceptuelles.

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  • Systmes de signifiants/signifis et invariants opratoires

    La premire fonction du langage est une fonction de communication, dont lebb a demble une certaine exprience, non analyse. Mais cette fonction decommunication est vite indissociable de la fonction de reprsentation prisedans le sens des rapports entre signifiants et signifis. Que serait lacommunication humaine si nexistait pas dans le langage naturel, des moyensde faire rfrence des objets, des actions, des sentiments et motions, desvnements, des proprits, des relations, des transformations, des processus?Le langage naturel est le registre le plus analytique de lactivit humaine, le plusmodulaire galement, en ce sens quil permet de construire un ensemble infinidnoncs, de dialogues et de textes avec un nombre fini dlments; ce nombredlments parait trs grand si lon considre lexique, syntaxe et conditionsdnonciation, mais il est relativement petit si on le rapporte lensemble desdialogues et textes effectivement produits ou possibles. Comme les autresschmes perceptivo-gestuels, les schmes langagiers du bb sont associs desclasses de situations, notamment des dialogues en situation avec la maman, lepapa ou quelque autre personne. Comme les schmes perceptivo-gestuels, ilssont dabord syncrtiques, et les premires rgularits phonologiques observeschez le bb sont des formes dnonciation qui renvoient davantage dessituations qu des objets, mme si ladulte peut y reconnatre le nom dobjetsfamiliers. On a parfois dsign ce phnomne sous le terme de mot-phrase.Cest la dsarticulation des noncs en mots distincts qui signe les premires

    analyses prdicatives du bb: action-objet, objet-adjectif, sujet-action. On nepossde pas dobservations directes sur les rapports entre cette fonctionanalytique du langage et la fonction analytique des invariants opratoires dansles autres activits gestuelles du bb puisque ces dernires relvent delinterprtation du chercheur. On ne sait pas non plus si les enfants reconnaissentla signification des mots prononcs par autrui, avant dtre capables de lesproduire opportunment eux-mmes. Pourtant on peut soutenir la thse quesans invariants opratoires, le bb serait incapable dapprendre parler, et que,dune certaine manire, ce sont les objets, actions et proprits prsents dans lessituations qui constituent la rfrence oblige des invariants phonologiquesreconnus par le bb dans la communication, invariants qui ne tardent pas sedcliner en invariants lexicaux et syntaxiques.La psychologie du langage ntant pas ma spcialit, il me faut expliquer

    pourquoi jaborde ce sujet ici. La raison principale est que de nombreuxdialogues interviennent dans lducation et le travail, et que les caractristiquesde ces dialogues demandent tre considres la fois du point de vue de leurcontenu (les connaissances explicites quelles contiennent, et les connaissancesimplicites des interlocuteurs) et du point de vue des formes gnrales tudiespar les linguistes et les psycholinguistes. Le plus souvent ceux-ci se soucient peudu contenu conceptuel des connaissances. Ltude de la formation et dufonctionnement des comptences complexes dans lducation et le travaildemande une attention plus grande au contenu des dialogues, en raisonnotamment des diffrences de comptence et de point de vue entreinterlocuteurs. Mais elle nen appelle pas moins un minimum dattention auxformes dnonciation utilises. Elle renvoie ainsi aux travaux des linguistes,notamment de ceux qui sintressent lnonciation en situation et aux actes delangage. Les schmes nonciatifs, comme les autres schmes, sont des formesdorganisation de lactivit en situation, et sont composs, comme eux, de buts,de rgles daction, de prise dinformation et de contrle, dinvariants opratoires,et dinfrences.

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  • Plusieurs ides mritent dtre ajoutes ici: 1. La slection de linformation pertinente, dj impressionnante dans

    laction sur les objets matriels, semble encore plus drastique dans lacommunication, cest--dire dans laction sur autrui et dans la prisedinformation auprs dautrui. La raison en est probablement que, dans ledialogue, on laisse en partie autrui la charge de reconstituer le sens des noncs,non seulement partir de linformation quils contiennent explicitement, maisaussi partir de la situation dnonciation.2. Les formes prdicatives de la connaissance sont plus analytiques que les

    formes opratoires de la connaissance que nous utilisons dans laction, mme si,paradoxalement, ce sont les formes opratoires qui sont la source des formesprdicatives. Les experts les plus expriments ne sont pas capables de mettre enmots une bonne partie des connaissances quils utilisent pourtant dans laction,lesquelles sont justement la marque de leur expertise. De mme les enfants nesont pas capables dexpliciter toutes les connaissances qui contribuent lorganisation rationnelle de leur activit. Ce dcalage entre la forme opratoirede la connaissance et sa forme prdicative motive lui seul lintroduction dansla thorie psychologique du concept dinvariant opratoire.3. linverse, certains invariants opratoires tirent une part de leur identit

    des formes langagires quils prennent dans la culture. Comment identifier lesconcepts de fonction et de variable sans le langage, ou encore les concepts depriode historique et de rgime de gouvernement en histoire? Dune maniregnrale, il semble que les invariants qui ne correspondent pas des percepts,cest--dire en dernier ressort des rgularits observables, ne pourraient guretre conceptualiss sans le secours du langage. Prenons lexemple des couleurs(bleu, rouge, jaune, etc.): la signification des mots du langage naturel quipermettent de les dsigner, sappuie totalement sur la perception, mme si desvariations fines peuvent intervenir pour certains besoins professionnels, ouventuellement dune langue lautre. Par contre le concept de couleur lui-mme rsulte de la mise en relation des couleurs possibles entre elles; de mmele concept de forme rsulte de la mise en relation par ressemblances etdiffrences des formes possibles entre elles. Les concepts de couleur et de formene sont donc pas strictement empiriques; ce sont des constructions, dont lelangage favorise llaboration. Le concept de nombre est un autre exemple,puisquil nexiste pas dobjet nombre dans le monde matriel, et que leconcept de nombre rsulte de la mesure (le dnombrement en premier lieu, suivide beaucoup dautres oprations), et de la diffrenciation entre lobjet mesur etsa mesure. La plupart des concepts difficiles sont des constructions, quisappuient certes sur lexprience, mais dont les caractristiques rsultent dunelaboration intellectuelle, partir de laction sur le rel et partir des relationsentre objets, entre relations, entre transformations, dont la formulationcontribue les identifier.La pense est fondamentalement relationnelle; elle sappuie sur lexplicitation

    des relations entre les proprits de laction et les proprits du rel; elle cre enpermanence de nouveaux objets de pense.

    Conclusion

    On a souvent oppos Vygotski et Piaget sur les deux points cruciaux que sontdune part les rles respectifs de laction et du langage dans la conceptualisation,dautre part le poids de lexprience individuelle et de la culture dans laformation des comptences et de la pense. On peut voir dans cette prsentationun effort pour intgrer ces deux contributions majeures la psychologie

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  • cognitive; elles ne sopposent pas, mais se compltent au contraire utilement. Ilest seulement ncessaire dtre plus prcis et plus rigoureux que lun et lautredans les dfinitions, dans lanalyse des exemples, dans larticulation desdiffrents problmes thoriques poss par lorganisation de laction, du langage,de la communication, et de lactivit des individus dans une culture donne.Lindividu dispose pour sadapter lenvironnement et la socit de moyens

    personnels qui se dveloppent au fil du temps et de lexprience dans desconditions analysables. Parmi ces conditions figurent notamment la richesse etla varit des situations quil est amen rencontrer, et donc la richesse desoccasions qui lui sont offertes de dvelopper ses comptences, dans lducationet le travail notamment. Parmi ces conditions, figurent galement lesmdiations de toutes sortes dont il peut bnficier de la part dautrui et de lapart des institutions. Retenons pour conclure la mdiation par autrui. Autrui peut dsigner ici

    aussi bien la mre ou le pre, les autres membres de la famille ou delenvironnement familial, lenseignant, les autres lves, le psychologue, leformateur, le chef de service ou datelier, les collgues de travail, le compagnonplus expert, lexpert lui-mme.Les actes de mdiation dautrui peuvent tre dcrits et catgoriss la lumire

    de lanalyse du concept de schme faite plus haut. Parmi les actes reprablesfigurent en bonne place lentranement dans lactivit, lidentification du but atteindre, et les ventuels sous-buts et anticipations. Bruner (1983, 2000) a bienvu ce point, de mme quil a bien analys dautres actes de mdiation du tuteur,comme ceux qui consistent attirer lattention sur les informations pertinentes,ou prendre sa charge une partie des actions effectuer, de manire diminuerlespace dincertitude dans lequel lapprenant doit naviguer.Le point le moins bien dvelopp chez ces trois auteurs (Piaget, Vygotski et

    Bruner) reste celui de laide la conceptualisation. Lorsquon veut lanalyser ondbouche trs vite sur laccompagnement langagier. On le comprend, dunecertaine manire, tant le langage intervient dans la conceptualisation, mais cestinsuffisant en mme temps, puisque la formation des invariants opratoires est la base de la conceptualisation, dans le cours mme de lactivit.Le mdiateur a ainsi comme responsabilit de choisir les situations offrir

    lapprenant, de clarifier le but de lactivit, de contribuer lorganisation decette activit, y compris de la prise dinformation et du contrle, de fairemerger, au moins partiellement, les concepts et les thormes pertinents, defaciliter les infrences en situation. La mise en mots et en symboles desconnaissances, des situations et des rgles organisant lactivit forme une partienon ngligeable de lactivit du mdiateur, mais elle nen est quune partie. Lechoix des situations est premier, et essentiel. En outre la communication entrele mdiateur et lapprenant est frappe des mmes ambiguts que toute autrecommunication: il y a un cart entre les propos tenus par le mdiateur et le sensquil leur donne, et le sens entendu par lapprenant, qui est fonction de sonpropre systme dinvariants. La rfrence aux situations reste incontournable.En rsum, lappropriation dune culture par un individu dpend

    ncessairement de sa propre activit, y compris de son propre travail deconstruction ou de reconstruction des concepts constitutifs de cette culture. Elledpend aussi fortement de laide quil reoit de son environnement, et donc dela qualit des mdiations dont il bnficie. Lamlioration de lducation et de laformation, le dveloppement des comptences dans le travail, dpendent doncdans une trs large mesure de lamlioration de la professionnalit desmdiateurs.

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  • Por qu la teora de los camposconceptuales?

    El conocimiento es adaptacin. Piaget daba cuenta del conocimiento comoun proceso de desarrollo muy general, biolgico y social. Es estudiando dichoproceso en los bebs, los nios y los adolescentes como pudo aportar un puntode vista cientfico novedoso acerca de la formacin de los conceptos, por ejem-plo aquellos relativos al espacio, el tiempo, el orden, el nmero, la clase lgica,etctera. No estudi el desarrollo cognitivo en los adultos. Tampoco estudilos procesos de aprendizaje en la escuela y en el trabajo, especialmente bajo elpunto de vista de su contenido conceptual especfico. Este contenido no sepuede reducir a las categoras generales de pensamiento en las cuales se intere-saba Piaget, como, por otra parte, hacan la mayora de los psiclogos deentonces, incluso en los casos en que se focalizaban en las interacciones entrecultura y cognicin, como Vygotski (1934/1985) y Bruner (1983, 2000). Lainvestigacin en la didctica es la que comienza a suplir esta laguna: podemosdefinirla como el estudio de los procesos de transmisin y de apropiacin delos conocimientos teniendo en cuenta los contenidos especficos que dichosconocimientos poseen. De hecho, no podemos considerar a la enseanza y elaprendizaje de una disciplina como independientes del dominio de conoci-miento implicado. Ello depende a su vez de los procesos de conceptualizacinnecesarios, de la especificidad de las situaciones y los fenmenos estudiados, yde las formas de actividad desarrolladas. La investigacin en didctica aporta as una visin complementaria a la de

    Piaget. Para entender qu es el conocimiento, deca Piaget (1949, 1964, 1974a,1974b; Piaget y Inhelder, 1966), hay que estudiar su desarrollo; hoy podramosagregar que se debe encarar la transformacin de dicho conocimiento.Pero cmo llevar a cabo este desafo? No existe una respuesta general, pero

    podemos intentar definir las orientaciones tericas y metodolgicas de estaempresa. Es lo que propone la teora de los campos conceptuales. Esta teora sedesarroll primeramente para el aprendizaje de las matemticas: las estructurasaditivas, las estructuras multiplicativas, el lgebra elemental, la geometra.Muchos otros dominios pudieron ser encarados a travs de este enfoque, talescomo la moral, la educacin fsica, la comprensin de textos (Vergnaud, 1981,1996a, 1996b; Vergnaud y Rcop, 2000). Para introducir la teora de los campos conceptuales, la bsqueda de clari-

    dad me impone partir de las preguntas que interrogan ms directamente laorientacin de la investigacin en psicologa: la actividad y el desarrollo. Deah surge la distincin crucial entre dos formas del conocimiento, la formaoperatoria y la forma predicativa: algunos ejemplos permiten entonces ilus-trar la forma operatoria, con la cual al da de hoy los psiclogos no se hanfamiliarizado.El siguiente apartado me permitir precisar qu es aprender, y generalizar a

    todos los registros de actividad, desde el gesto al razonamiento, la problemticadel desarrollo de las formas de organizacin de la actividad. Me pareci entoncesposible proponer una definicin analtica del concepto de esquema (sus cuatrocomponentes) y precisar la distincin entre concepto y teorema. De ah se derivaun cierto cuadro del desarrollo: un campo conceptual aparece entonces como unmedio para comprender mejor el rol de la experiencia. El texto se habra orienta-do de manera demasiado exclusiva haca la forma operatoria si en una ltimaparte no hubiese abordado sus relaciones con la forma predicativa y los sistemasde significantes/significados.

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  • Actividad en situacin y desarrollo

    Retomemos la idea de adaptacin, tan prxima a Piaget: a qu nos adapta-mos? qu es lo que se adapta? La respuesta puede encontrarse en dos puntos: el individuo se adapta a las situaciones; los que se adaptan son los esquemas, es decir formas de organizacin de la

    actividad: stos se modifican al enfrentarse con nuevas situaciones.Hacen falta conceptos tan bien definidos como sea posible para progresar,

    especialmente para llevar a cabo investigaciones empricas e interpretar observa-ciones. Brindando un lugar central a la pareja terica situacin/esquema, aban-donamos la pareja estmulo/respuesta, que ha obstruido la psicologa desde hacedecenios, e impedido a los psiclogos abordar en buenas condiciones el estudiode competencias complejas. De este modo circunscribimos el anlisis de la acti-vidad a clases de situaciones tan bien registradas como sea posible, y somos asms concretos que lo que permite la pareja objeto/sujeto del pensamiento filos-fico tradicional. La idea de desarrollo es tambin esencial, y completa la de corto plazo de

    la actividad en situacin, con la del largo plazo del aprendizaje y la experien-cia. Es efectivamente en trminos de aos, y a veces de decenas de aos, quese evala la duracin de la formacin de la pericia. Y el desarrollo se mani-fiesta a la vez a travs de continuidades y rupturas: los nuevos conocimientosse construyen sea apoyados en los conocimientos anteriores, como a vecesoponindose a ellos. Esta dialctica de lo antiguo y lo nuevo no es simple deanalizar, an menos de organizar dentro de la enseanza. Bachelard (1940,1947) aport varios ejemplos que apoyaban esta dialctica, provenientes dela historia de las ciencias. Los efectos resultan ms importantes que lo quepodemos imaginar a priori, ya que esto lleva a reestructuraciones considera-bles, y no solo a agregados y complementos.

    Forma operatoria y forma predicativa de los conocimientos

    Expresamos nuestros conocimientos tanto por lo que decimos (es la formapredicativa), como por lo que hacemos en situacin (es la forma operatoria).Ciertamente la forma operatoria es mucho ms rica que la forma predicativa,tal como lo atestigua el defase entre la competencia que un sujeto puedemanifestar en situacin y aquello que es capaz de decir al respecto. Adems,dentro del proceso de adaptacin, la actividad en situacin est en primertrmino, aunque tambin la forma predicativa se encuentra involucrada enesta adaptacin. Por cierto, la enunciacin tambin es una actividad, tantocomo la comprensin de las palabras de otros y de los textos. Nada escapa altema de la actividad. Pero el tema del desarrollo es tambin inevitable ya que la escuela, la vida en

    el trabajo y simplemente la vida en general son inconcebibles sin l. Un campoconceptual es justamente lo que permite analizar y relacionar entre s las compe-tencias formadas progresivamente. Las continuidades y las rupturas son entoncesconsideradas desde el punto de vista de la conceptualizacin, pero considerandoeste concepto en un sentido amplio, el de la identificacin de los objetos de pen-samiento y de sus propiedades en el transcurso mismo de la actividad en situa-cin. La expresin lingstica y la disposicin en formas simblicas de representa-

    cin (existe gran variedad de ellas) agregan peso y estabilidad a las formas con-ceptuales as elaboradas en el transcurso del desarrollo, y acuden al auxilio de laconceptualizacin implcita en la accin. Pero el primer desafo de la psicologaen tanto ciencia cognitiva es poner en evidencia las formas de conceptualizacin

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  • subyacentes a la actividad, las que son a la vez fuente y producto de esta activi-dad. Se trata de la principal razn terica para la introduccin, dentro de la defi-nicin de esquema, del concepto de invariante operatoria.

    Algunos ejemplos de anlisis de la actividad

    Comenzar con un ejemplo de matemticas (pues es para este campo de cono-cimientos para el cul elabor la teora de los campos conceptuales), para luegopasar a ejemplos relativos a actividades profesionales.

    Primer ejemplo

    Encaremos pues la resolucin de un problema de aritmtica elemental, en elcual debemos encadenar varias operaciones de multiplicacin y de divisin parallegar al resultado: La produccin de una chacra en la Beauce es de 2485 quintales detrigo. Entre las preguntas formuladas por los alumnos, figura la siguiente:Cunta harina podemos elaborar con esta produccin? Entre las informaciones sumi-nistradas, figura sta: Son necesarios 120 kg de trigo para obtener 100 kg de harina.Vamos a distinguir dos fases de la actividad: una fase de seleccin de los datos

    y de la operacin a realizar, y una fase de realizacin de dicha operacin. La pri-mera fase puede, por ejemplo, arrancar con un perodo de bsqueda y vacilacin,que puede prolongarse cierto tiempo en el caso de alumnos de colegio o adultoscalificados como de nivel dbil. Luego puede formularse una propuesta; exis-ten gran variedad de ellas: Plantear que 2485 quintales de trigo son 248.500 kg de trigo, y dividir

    248.500 por 120, con el comentario que, de esta manera, sabremos por cuntasveces debemos multiplicar 100 kg de harina.... Plantear que deberamos utilizar una regla de tres simple, procedimiento

    enseado en todos lados, pero de uso poco frecuente en la vida cotidiana. Visualizar la posibilidad de dividir 120 por 100, pero sin tener muy en

    claro cmo seguir luego. Proponer dividir 100 por 120, y considerar que el resultado obtenido es el

    coeficiente que permite pasar del trigo a la harina. Tratar de acercarse progresivamente a 248.500 mediante 1000 veces 120, o

    sea 120.000; y nuevamente 1000 veces, y luego 100 veces, y 10 veces, etctera. Existen al menos veinte propuestas posibles, de las cuales cinco o seis pueden

    conducir a la solucin, el resto al fracaso. La segunda fase consiste en llevar a cabo la operacin elegida en la primera

    fase: por ejemplo el planteo de la divisin de 248.500 por 120, y la ejecucin delprocedimiento aprendido (eliminacin de un cero en el divisor y en el dividendo,eleccin de un dividendo parcial superior a 12, bsqueda de un cociente mxi-mo, realizacin de la multiplicacin y la resta, evaluacin del resto y bajada dela cifra siguiente, etc.). La segunda fase puede tambin consistir en el uso de unacalculadora.La organizacin de la actividad durante la segunda fase se organiza mediante

    un algoritmo que conlleva una meta identificable, reglas relativamente comple-jas enseadas en la escuela, una cierta representacin de objetos-signos sobre elpapel y su significacin, elecciones y expectativas. Por ejemplo, algunos alumnosson sorprendidos con la guardia baja cuando, al bajar el siguiente dgito, encuen-tran que es menor que el divisor: baj el 8 pero es menor que el 12.Es un poco ms delicado describir la organizacin de la actividad durante la

    primera fase. Existe una meta, que se descompone en diferentes sub-metas segnel camino escogido. La eleccin de tal sub-meta antes que tal otra es un ndiceimportante para el psiclogo. Efectivamente, esta eleccin va de la mano de la

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  • eleccin de los datos y de las operaciones a realizar en primer lugar, despus ensegundo lugar, etctera. Va igualmente de la mano de la representacin de lasmagnitudes en juego y de sus relaciones, es decir de su conceptualizacin. Efecti-vamente, las relaciones entre magnitudes son de una notable dificultad concep-tual: Cuntas veces ms...? se refiere a una relacin entre magnitudes de igualnaturaleza, lo mismo que la descomposicin aditiva 1.000 veces 120 y 1.000veces 120, etctera. En cambio, la divisin de 120 por 100 o de 100 por 120concierne magnitudes de distinta naturaleza. O bien interpretamos estas divisio-nes como cocientes de dimensiones, pero hoy ya sabemos que los alumnos tienendificultades para concebir esta operacin de cociente, o bien vemos la divisin120 por 100 como el medio para hallar la cantidad de trigo correspondiente a unkg de harina, en cuyo caso 100 no representa ya 100 kg de harina sino la relacinde comparacin 100 veces menos, que es un nmero sin dimensin, un opera-dor escalar.

    Segundo ejemplo

    A un mecnico de taller automotor le es confiada la responsabilidad de recibira los clientes que traen su automvil para una reparacin. Como parte de estanueva responsabilidad, el recepcionista tiene como primer objetivo, dentro delos 5 a 15 minutos de los cuales dispone, obtener del cliente una informacin tanconfiable como sea posible acerca del problema mecnico en juego; su compe-tencia como mecnico es pues esencial. Para ello, debe escuchar al cliente, plan-tearle preguntas pertinentes, ya sea para enterarse con mayor profundidad de loque el cliente o la clienta est en condiciones de decir por s mismo, o ya sea paradescartar los diagnsticos errneos que el cliente propone. Un profundo estudiollevado a cabo por Patrick Mayen (1998, 2000) mostr que, junto a este primerobjetivo, existen otros dos desafos en el dilogo con el cliente: tranquilizarlo(respecto a plazos, precios, garanta ofrecida), y ganarse su fidelidad. Queda claroque la acogida debe satisfacer al cliente y animarlo a volver la prxima vez, enlugar de acudir a un competidor. La actividad de dilogo entablado por el recepcionista se encuentra entonces

    organizada bajo tres premisas, sin que exista un plan preestablecido. Las compe-tencias de conversacin del recepcionista y su capacidad para adaptarse a las pala-bras de su interlocutor son tan necesarias como su competencia como mecnico.No es nicamente en el taller donde pudo desarrollarlas, sino en el transcurso detoda su experiencia en la conversacin, la urbanidad, la amabilidad, el humor.Desarrolla adems una nueva profesionalidad en el transcurso de su experienciacomo recepcionista. Los recepcionistas no son igualmente competentes nimucho menos.

    Tercer ejemplo

    En una empresa productora de cemento, los camiones mezcladores estnequipados de bombas de agua de cierta complejidad. Ocurre que dejan de fun-cionar. Las bombas no son todas idnticas, los desperfectos tampoco, incluso enel mismo tipo de bombas. Un da, uno de los tcnicos de mantenimiento caeenfermo y debe ser hospitalizado. El efecto inmediato es que, dentro del taller, yanadie sabe reparar cierto tipo de desperfectos, que el tcnico hospitalizado acos-tumbraba reparar, y era a quin, por lo tanto, le eran confiados regularmente.Como su hospitalizacin se prolonga, se enva una pequea delegacin de cole-gas para preguntarle cmo las repara. Con buena predisposicin explica lo mejorposible: los colegas regresan satisfechos; pero una vez que llegan al taller, nologran reparar estas averas. Evidentemente, cuando sale el tcnico del hospital,

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  • algunas semanas ms tarde, retoma sin problema alguno la reparacin de los des-perfectos recalcitrantes.En los tres ejemplos, cada una de las decisiones susceptibles de ser tomadas

    por los sujetos en la bsqueda de operar en una situacin pueden volverse unesquema tanto en el caso del alumno, el recepcionista o el obrero. Ciertosesquemas no conducen al xito, son en general abandonados, a menudo antes dehaber sido estabilizados. Otros son reforzados a tal punto que desplazan a losotros. Con mayor frecuencia, cada sujeto dispone de varios esquemas alternativosentre los cuales puede escoger en funcin del valor de las variables de situacin,se trate de resolver un problema aritmtico, recibir un cliente o arreglar un des-perfecto. Las investigaciones muestran sin embargo que ciertos individuos dis-ponen de toda una panoplia mientras otros tienen slo una cuerda en su arco.

    En el fondo, qu es aprender?

    Estos tres ejemplos ilustran lo que he venido llamando la forma operatoriadel conocimiento, que permite actuar y lograr xito en una situacin, y que hoyresumimos con el trmino competencia. Vemos tambin que la competenciaabarca tanto el trabajo del alumno, del recepcionista de clientes o del obrero.Tambin concierne a todos los registros de la actividad: gestos y bsqueda deinformaciones perceptivas, lenguaje y dilogo, razonamiento cientfico y tcnico.Todos los registros de la actividad son efectivamente objeto de competencias,ms o menos elaboradas, ms o menos crticas dentro de la adquisicin de lamaestra y del profesionalismo.Intentemos ir ms lejos. El desempeo es evidentemente un primer acerca-

    miento: X es ms competente en el tiempo t que en el tiempo t si sabe hacer loque no saba hacer. Pero esta definicin no nos informa respecto a tres considera-ciones complementarias de la primera, igualmente decisivas para el anlisis: X es ms competente si encara su tarea con mejor metodologa (ms veloz,

    ms confiable, ms compatible con la forma de operar de sus pares). X es ms competente si dispone de recursos alternativos para solucionar

    situaciones de cierto tipo, pero susceptibles, por sus caractersticas propias, deofrecer un mtodo ms oportuno en tal caso, menos oportuno en tal otro. X es ms competente si se encuentra menos desprotegido frente a una situa-

    cin nueva.Estas tres ltimas consideraciones conducen al anlisis del desarrollo de la

    actividad, no solo al de su resultado. El desempeo es radicalmente insuficientepara evaluar, analizar y definir la competencia. Examinemos la actividad del reparador de bombas de agua: es un hecho con-

    creto que sabe reparar averas que los otros no saben reparar. Pero observamostambin que ejecuta gestos sutiles cuya funcin no es interpretable de inmedia-to. Por otra parte, los gestos no conforman la totalidad de su competencia: reco-ge indicios perceptivos en varios puntos de la bomba de agua, realiza ensayosparciales de funcionamiento, analiza la contribucin sincrnica y diacrnica delos distintos movimientos que intervienen. Debe disponer para ello de concep-tos-en-accin, que le permiten recabar la informacin pertinente e ignorar otrosaspectos del mecanismo y de su funcionamiento. Interroga a la bomba de aguarecalcitrante, y razona en situacin, sin con ello encontrarse en la posicin depoder formular totalmente lo que considera como bueno y razonable. As tam-bin, le faltan las palabras para designar sin ambigedades los ndices que utili-za. Podemos afirmar que la forma predicativa de su conocimiento de las bom-bas de agua es inferior a su forma operatoria. Es sta la razn de su fracaso en lacomunicacin de su manera de operar encontrndose en el lecho del hospital.

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  • Examinemos ahora la actividad del recepcionista de clientes: se encuentra enuna situacin en la cual otra persona contribuye a darle forma a la conversacin(situacin que llamamos dinmica). El interlocutor cliente es en parte previsi-ble, en parte imprevisible. El recepcionista debe por lo tanto disponer de catego-ras que le permitan interpretar lo que dice el cliente respecto a las tres metasresaltadas ms arriba (identificar el desperfecto, brindar seguridad, obtener lafidelidad del cliente), y estar asimismo en condiciones de adaptarse a lo impre-visto. Porque posee capacidad de adaptacin, la actividad profesional es siempreoportunista. Pero no obstante incluye fuertes regularidades, y las conceptualiza-ciones necesarias. En el fondo de la accin siempre se encuentra la conceptualiza-cin, es decir la identificacin de objetos de distintos niveles, directamente acce-sibles a la percepcin o no, como tambin sus propiedades y relaciones.

    Del gesto al razonamiento

    El gesto es un prototipo fundamental de la actividad humana. Por lo tanto, loms natural es empezar por l. Pero no es el nico mbito de la actividad en elcual interviene un cierto pasar temporal de las acciones, de las captaciones deinformacin y de los controles. Por otra parte la actividad gestual contienemuchas operaciones de pensamiento, sobre todo en trminos de representacinde los objetos materiales, de sus propiedades, relaciones y transformaciones,como tambin de las relaciones entre las propiedades de los gestos y las propieda-des de los objetos. De manera tal que se encuentra justificacin para observar elrazonamiento y el gesto con categoras vecinas e incluso comunes. Ciertamente existe una gran distancia entre los gestos de un beb que apren-

    de a asir pequeos objetos de su entorno para utilizarlos como instrumentos, opara explorar sus propiedades, y los gestos del artesano ebanista o del reparadorde bombas de agua; como tambin existe una gran distancia entre el gesto delbeb de ocho meses que se pone de pie en su corralito, y el de un campen desalto con prtiga, o de una bailarina estrella ejecutando un pas-de-deux con supareja. Sin embargo, en todos estos casos, la organizacin del gesto contiene losmismos componentes, relativamente simples de enunciar: Una meta, que se descompone eventualmente en sub-metas, organizadas de

    manera secuencial y a su vez jerrquica. La secuencia, la regulacin y el ajuste de las distintas partes del gesto en

    funcin de las condiciones en las que se encuentra el sujeto a cada instante. Estaregulacin concierne a la vez al eslabonamiento en el tiempo y a la coordinacinde los movimientos de las distintas partes del cuerpo. La identificacin de los objetos materiales y de sus propiedades: volumen,

    peso, caractersticas geomtricas, distancia, resistencia a la fuerza, temperatura yotras propiedades fsicas. Esta representacin de los objetos mantiene necesaria-mente relaciones con las propiedades del gesto ya que un gesto apunta a ser adapta-do, y ya que sus principales caractersticas deben pues corresponder razonablemen-te bien a las caractersticas de los objetos. El clculo casi ininterrumpido de las acciones a realizar, de las informacio-

    nes a recabar, de los controles por hacer. A pesar de la automatizacin de ciertaspartes de los gestos, siempre existen numerosas incertidumbres, que exigencomplementos de informacin e inferencias en situacin. An cuando la situa-cin es familiar, y aunque pertenece a un modelo bien caracterizado, algunosajustes son necesarios. Si la clase de situaciones evocada est menos estrechamen-te definida, las inferencias adoptan un rol an ms importante, y contribuyenpor ejemplo a la eleccin de una alternativa entre varias, en funcin de sus venta-jas e inconvenientes.

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  • Son estos componentes de la actividad, en el fondo de una gran simplicidad,los que llevan a la definicin del esquema. Pero antes de presentar esta defini-cin, se debe verificar el valor descriptivo de lo que acaba de ser mencionado paraotras actividades aparte del gesto, o, para ser ms precisos, para actividades paralas cuales el xito o el fracaso no se ven determinados por la precisin y la habili-dad del gesto, sino por otras caractersticas.Tomemos otro registro de actividad, el de la palabra, del discurso, del dilo-

    go; y consideremos por ejemplo la organizacin de la actividad de un maestro ensu clase. Los componentes enunciados ms arriba se hallan nuevamente presen-tes, especialmente: La meta: compartir con los alumnos un cierto nmero de juicios de hecho o

    de valor, inducir preguntas y para ello pasar por ciertas sub-metas acerca de tal ocual punto, tal o cual anlisis, tal o cual argumentacin. Apuntar eventualmentea despertar el inters en distintos grupos del auditorio. La regulacin y el ajuste de los argumentos, de la retrica, del tono con el

    cual se dicen las cosas. Esta adaptacin descansa a la vez sobre una evaluacin porparte del maestro acerca de las expectativas y de las reacciones posibles de losalumnos, sobre sus hiptesis, sobre la interpretacin de las expresiones en suscaras. La actividad es a la vez repeticin y variacin. No se puede comprender el

    pensamiento presente en la actividad humana si no se percibe el doble carctersistemtico y oportunista. Uno no repite sin sistema y reglas, uno no se adapta ala contingencia, a la variedad y a la novedad sin categoras de pensamiento paracaptar y elaborar la informacin pertinente.

    El concepto de esquema

    De ah resultan varios niveles de definicin.Definicin 1: el esquema es una organizacin invariante de la actividad para un

    tipo dado de situaciones. Esto no significa que exista un esquema nico para ese tipo dado de situacio-

    nes, a menudo existen varios.Definicin 2: el esquema se compone necesariamente de cuatro componentes: una meta, sub-metas y anticipaciones; reglas de accin, de bsqueda de informacin y de control; invariantes operatorias: conceptos-en-accin y teoremas-en-accin; posibilidades de inferencia en situacin.La primera definicin incluye tres ideas esenciales, que no es superfluo resal-

    tar. El esquema va dirigido a un tipo de situaciones. Podemos entonces asociarle

    cuantificadores universales, que permiten definir su alcance y sus lmites. Elesquema es pues universal, tanto como el concepto. La que es invariante es la organizacin, no la conducta observable; los esque-

    mas no son estereotipos. Si ciertos esquemas engendran conductas relativamenteestereotipadas, no es ste el caso para la mayora de los esquemas: ellos engen-dran conductas distintas en funcin de las variables de situacin. El esquema no organiza nicamente la conducta observable, sino tambin

    la actividad de pensamiento subyacente. La segunda definicin es analtica. Resulta cmodo comentar primeramente

    las reglas de accin de la bsqueda de informacin y de control, ya que estasreglas aseguran la funcin generativa del esquema, la que es la ms inmediata-mente responsable del transcurrir temporal de la conducta y de la actividad.

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  • La conducta no se encuentra formada nicamente por acciones, sino tambinpor las bsquedas de informacin necesarias para la continuacin de la actividad,y de los controles que le permiten al sujeto asegurarse de que ha hecho realmentelo que pensaba hacer y que sigue estando en el camino elegido. Pero estas reglas se encuentran totalmente condicionadas por la representa-

    cin de la meta a alcanzar y por las conceptualizaciones que permiten identificarlos objetos presentes, sus propiedades y relaciones, las transformaciones que sesupone deben imponer a la conducta del sujeto.La parte intencional del esquema, que es la meta, es esencial dentro de la

    organizacin de la actividad. La meta se divide en sub-metas, ordenadas secuen-cial y jerrquicamente, las cuales dan origen a numerosas anticipaciones. Ancuando la meta no es ms que parcialmente consciente y que los efectos espera-dos de la accin no son todos previsibles para el sujeto, este carcter intencionalde la conducta y de la actividad no puede ser ignorado. En efecto, se trata de lafuente de aspectos diferenciales importantes de la conducta, en particular en laeducacin y el trabajo.