modèles pour la conception de learning ... - thèses en ligne
TRANSCRIPT
HAL Id: tel-00702237https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00702237
Submitted on 29 May 2012
HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.
L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.
Modèles pour la conception de Learning Role-PlayingGames en formation professionnelle
Christelle Mariais
To cite this version:Christelle Mariais. Modèles pour la conception de Learning Role-Playing Games en formation pro-fessionnelle. Médecine humaine et pathologie. Université de Grenoble, 2012. Français. �NNT :2012GRENS011�. �tel-00702237�
THÈSEPour obtenir le grade de
DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE GRENOBLESpécialité : Ingénierie de la Cognition, de l'interaction, del'Apprentissage et de la créationArrêté ministériel : 7 août 2006
Présentée par
Christelle MARIAIS
Thèse dirigée par Florence MICHAUet codirigée par Jean-Philippe PERNIN
préparée dans le cadre d’une convention CIFRE au sein du Laboratoired’Informatique de Grenoble, Equipe METAHet de la Société SYMETRIXdans l'École Doctorale EDISCE
Modèles pour la conception deLearning Role-Playing Gamesen formation professionnelle
Thèse soutenue publiquement le 02 avril 2012,devant le jury composé de :
Bernadette CHARLIERProfesseur, Université de Fribourg, Rapporteur
Jean-Marc LABATProfesseur, Université Pierre et Marie Curie, Paris 6, Rapporteur
Jean-Marie BURKHARDTDirecteur de Recherches, IFSTTAR, Examinateur
Michel DUBOISProfesseur, Université Pierre Mendès France, Grenoble, Président du jury
Florence MICHAUProfesseur, Grenoble INP, Directrice de thèse
Jean-Philippe PERNINMaître de conférences, Université Stendhal, Grenoble, Co-directeur de thèse
Luca BISOGNINResponsable R&D, Société SYMETRIX, Membre invité
REMERCIEMENTS
Je me suis parfois demandée pourquoi je m’étais engagée dans cette drôle d’aventure :
aujourd’hui je n’ai aucun regret et je suis heureuse du chemin parcouru ! Je souhaite maintenant
que l’aventure se prolonge car j’ai le sentiment que beaucoup de choses restent à faire : le
voyage au pays des jeux pour la formation ne fait que commencer…
Merci à tous ceux qui ont été présents et qui ont cru en moi même lorsque moi-même j’avais des
doutes…
Merci tout particulièrement aux initiateurs de ce travail au sein de Symetrix : Vincent Dupin et
Pascal Stievenard. Je les remercie de m’avoir lancée sur cette voie, même si la direction prise
n’a pas toujours fait l’unanimité. Merci de m’avoir fait confiance. J’espère que notre collaboration
continuera à être aussi riche.
Merci à Florence Michau et Jean-Philippe Pernin qui ont encadré ce travail. Je n’ai pas compté
les heures passées ensemble à échanger, mais une chose est sure : votre implication est pour
beaucoup dans la réussite de ce travail et les fruits qui en découlent sont en grande partie les
vôtres ! J’ai beaucoup apprécié ces trois années de travail à vos côtés. J’ai beaucoup appris
grâce à vous. Merci pour vos encouragements et votre motivation sans faille.
Merci aux collègues de l’équipe MeTAH du LIG qui ont partagé mes pauses déjeuners et mes
pauses café du lundi. Merci à ceux qui m’ont accompagnée pendant ces trois ans et m’ont
prodigué des conseils avisés jusqu’aux derniers moments de préparation de la soutenance. Merci
tout particulièrement à Nadine Mandran qui m’a aidée dans la mise en place des
expérimentations menées au cours de cette thèse et m’a beaucoup appris sur l’approche
qualitative. Merci à José-Luis Aguirre qui a permis à ce travail de prendre vie à travers le
développement d’un prototype informatique.
Merci à mes collègues de Symetrix pour leur intérêt pour mon travail et leur soutien, même s’ils
posaient parfois des questions que tout doctorant préfère ne pas entendre… Merci tout
particulièrement à ceux qui ont participé aux expérimentations : votre implication a été une aide
précieuse et un apport riche pour ce travail ! Merci aux graphistes qui ont travaillé sur ces petits
pictos qui, mine de rien, constituent un élément-clé de ce travail…
Merci à François-Gilles, notre ludopathe, de partager avec moi sa passion et d’accepter mes
rappels à l’ordre « sérieux » lorsqu’il se lance avec entrain dans la conception d’un jeu… Merci à
Luca pour ses encouragements et sa reconnaissance de mon travail.
Merci à Sophie et Franck de l’équipe Perform (INPG) pour avoir accepté de jouer les cobayes.
Merci aux ingénieurs de formation de l’Université de La Poste qui se sont eux aussi prêtés au jeu
et m’ont permis de recueillir des données pertinentes pour alimenter mon travail.
Merci à tous les chercheurs et doctorants rencontrés lors des conférences (ISAGA, ECGBL,
EIAH…) et projets de recherche (LGF, SEGAREM, SLI) auxquels j’ai participé : les échanges de
points de vue ont été riches d’enseignement.
Merci à ma famille, et tout particulièrement à mes parents qui m’ont toujours soutenue malgré un
chemin un peu tortueux…
Merci à mes amis pour leur présence : merci d’être là pour partager les bons moments mais
aussi pour votre soutien dans les moments difficiles.
Enfin, un grand merci à Jurek qui a été embarqué malgré lui dans cette folle aventure : merci
d’avoir pris soin de moi, soin de nous, et d’avoir créé un climat favorable pour que j’arrive au bout
du chemin dans les meilleures conditions… Dzi kuj bardzo anio ku !
v
RESUME
L’évolution des besoins de la formation professionnelle continue en entreprise, ainsi que la
modification des exigences des apprenants font apparaître de nouveaux enjeux. Il s’agit en
particulier de proposer des solutions de formation combinant efficacité pédagogique et
engagement des participants. Ces enjeux, associés au contexte socio-technologique actuel,
orientent de plus en plus vers l’utilisation du jeu pour la formation. Cette orientation a
nécessairement une influence sur le métier des concepteurs pédagogiques chargés de définir
des dispositifs de formation, que ce soit au sein de sociétés prestataires spécialisées en
ingénierie de formation ou au sein de services de formation internes aux entreprises.
Ce travail de thèse a réalisé en partenariat avec la société Symetrix dans le cadre d’une
convention CIFRE. Il vise à apporter une contribution pour assister les concepteurs dans la
création de dispositifs de formation adaptés et dans la communication autour des solutions
conçues. Pour répondre aux contraintes particulières du terrain d’application ciblé, nous basons
notre approche de l’utilisation du jeu pour la formation sur la conception de Learning Role-Playing
Games (LRPG) ou jeux de rôle pour l’apprentissage, dispositifs de formation collectifs basés
notamment sur des principes du jeu de rôle.
Dans un premier temps, afin de cerner notre objet d’étude et de définir des hypothèses de travail,
nous avons mené une étude exploratoire et structurante des domaines liés à l’intégration du jeu
dans la formation. Cette étude, qui touche à plusieurs disciplines (sciences de l’éducation,
sciences cognitives, sciences de l’information et de la communication, informatique), et les
hypothèses formulées ont guidé l’élaboration des propositions destinées à répondre à la
problématique d’assistance visée. Une démarche globale pour la conception de scénarios LRPG
a ainsi été définie pour structurer l’activité des concepteurs. Cette démarche a la particularité de
mettre en œuvre une approche axant la réflexion sur des facteurs de motivation de l’apprenant :
sept ressorts de jeu applicables à un dispositif de formation ont été définis. Dans notre approche,
le langage de formalisation ScenLRPG, exprimé à l’aide d’un système de notation visuel, est
proposé pour soutenir plus spécifiquement la conception d’esquisses de scénarios et la
communication entre les acteurs du projet.
Deux outils d’assistance implémentant ces propositions ont été mis au point. Ils ont été utilisés au
cours d’expérimentations validant l’intérêt de nos propositions pour assister la conception de
scénarios LRPG et mettant en évidence certains manques ou ajustements nécessaires. Les
conclusions détaillent plusieurs perspectives de recherche ouvertes par ce travail s’inscrivant
dans un secteur en pleine mutation.
Mots-clés : jeu de rôle, formation professionnelle, conception pédagogique, jeu sérieux,
assistance, motivation, réutilisation, scénario pédagogique.
vi
SOMMAIRE
RESUME ............................................................................................................................................ v
PARTIE 1 : INTRODUCTION.............................................................................................................. 1
Chapitre 1. Problématique et objet de recherche ........................................................................ 21.1. Contexte de notre recherche ................................................................................................ 2
1.1.1. Formation professionnelle en entreprise et nouveaux modes de formation.................................21.1.2. Une thèse CIFRE pour un ancrage des problématiques de recherche sur le terrain ......................41.1.3. Implications pour les concepteurs pédagogiques ..........................................................................5
1.2. Spécificités du contexte et orientation choisie : définition de notre objet d’étude.................... 61.2.1. Dispositifs LRPG et jeu de rôle ........................................................................................................71.2.2. Assistance à la conception ..............................................................................................................8
1.3. Questions, hypothèses et objectif de recherche .................................................................... 81.3.1. Hypothèses liées à l’assistance à la conception..............................................................................81.3.2. Hypothèses liées à la place du jeu dans les scénarios de formation à concevoir ...........................9
1.4. Approche méthodologique .................................................................................................. 101.4.1. Des propositions alimentées par une étude théorique et des évaluations ..................................101.4.2. Champs disciplinaires concernés ..................................................................................................11
1.5. Enjeux et retombées escomptées de la recherche .............................................................. 12
PARTIE 2 : ETUDE EXPLORATOIRE ET STRUCTURANTE ........................................................... 14
Chapitre 2. Le jeu : un objet d’étude complexe ......................................................................... 152.1. Définition(s) du jeu ............................................................................................................. 15
Synthèse : définitions du jeu ......................................................................................................... 202.2. Etude de classifications de jeux .......................................................................................... 21
2.2.1. Classifications de jeux dits « traditionnels » .................................................................................212.2.2. Classifications de jeux vidéo .........................................................................................................242.2.3. Classification de jeux pour la formation professionnelle..............................................................292.2.4. Classifications de jeux informatiques à finalités sérieuses ...........................................................302.2.5. Une classification transversale : la taxonomie de Klabbers ..........................................................322.2.6. Classifications étudiées : analyse ..................................................................................................35
Synthèse : classifications de jeux ................................................................................................. 38
Chapitre 3. Jeu et formation : une association source de paradoxe et d’intérêt ......................... 393.1. Naissance d’un paradoxe ................................................................................................... 39
Synthèse : paradoxe de l’association jeu / formation..................................................................... 423.2. Mise en perspective du jeu avec les principales théories d’apprentissage et méthodespédagogiques associées ........................................................................................................... 43
3.2.1. La théorie behavioriste .................................................................................................................433.2.2. La théorie constructiviste .............................................................................................................443.2.3. La théorie cognitiviste...................................................................................................................453.2.4. La théorie socio-constructiviste ....................................................................................................463.2.5. L’approche de la didactique professionnelle ................................................................................47
3.3. Jeu et principes d’apprentissage ........................................................................................ 48Synthèse : jeu et apprentissage ................................................................................................... 50
3.4. Jeu et formation : un panorama de solutions mises en œuvre............................................. 513.4.1. Evolution terminologique et définition de notre périmètre d’étude ...........................................513.4.2. Le jeu pour la formation vu sous l’angle de la simulation ............................................................523.4.3. Les jeux de rôle : un type de simulation spécifique ......................................................................553.4.4. Jeux pour la formation et simulation ............................................................................................613.4.5. Des jeux de formation sans simulation .........................................................................................71
vii
Synthèse : exemples d’utilisation du jeu pour la formation ............................................................ 723.5. Le débriefing : un moment-clé de la formation par le jeu ..................................................... 73
3.5.1. Origines et définition ....................................................................................................................733.5.2. Rôles du débriefing dans un contexte pédagogique.....................................................................743.5.3. Organisation du processus de débriefing .....................................................................................76
Synthèse : le débriefing ................................................................................................................ 78
Chapitre 4. La question de la motivation ................................................................................... 794.1. La notion de motivation ...................................................................................................... 794.2. La théorie de l’autodétermination........................................................................................ 804.3. Engagement dans l’activité : la théorie du flow.................................................................... 824.4. Motivation et apprentissage ................................................................................................ 85
4.4.1. Motivation d’adultes en formation professionnelle .....................................................................854.4.2. Une approche socio-cognitive de la motivation scolaire ..............................................................87
Synthèse : théories de la motivation et apprentissage .................................................................. 914.5. Différentes approches pour identifier les caractéristiques motivantes d’un jeu ..................... 92
4.5.1. S’intéresser à l’attitude du joueur : retour aux travaux fondateurs de Caillois ............................924.5.2. Les caractéristiques du jeu mises en lien avec la théorie du flow ................................................944.5.3. Le jeu mis en lien avec l’approche de l’autodétermination..........................................................964.5.4. Le courant de la gamification .......................................................................................................97
Synthèse : caractéristiques motivantes d’un jeu.......................................................................... 102
Chapitre 5. La conception....................................................................................................... 1035.1. L’activité de conception en général : point de vue des sciences cognitives ....................... 103
5.1.1. Définition de la notion de conception ........................................................................................1035.1.2. Rôle de la représentation externe en conception ......................................................................1065.1.3. Des besoins d’assistance identifiés .............................................................................................1075.1.4. Conception et créativité .............................................................................................................108
Synthèse : l’activité de conception .............................................................................................. 1105.2. La conception de scénarios pédagogiques ....................................................................... 111
5.2.1. Le concept de scénario pédagogique .........................................................................................1125.2.2. Le processus de conception de scénarios pédagogiques ...........................................................1135.2.3. Différentes approches de la conception pédagogique ...............................................................119
Synthèse : conception pédagogique (1/2) ................................................................................... 125Synthèse : conception pédagogique (2/2) ................................................................................... 126
5.3. L’apprentissage collectif et ses problématiques de conception.......................................... 1275.3.1. Définitions ...................................................................................................................................1275.3.2. L’intérêt de l’apprentissage collectif à distance .........................................................................1285.3.3. Caractéristiques des situations d’apprentissage collectif ...........................................................1295.3.4. Concevoir des situations d’apprentissage collectif .....................................................................130
Synthèse : conception et activités d’apprentissage collectives .................................................... 1345.4. Conception de dispositifs de formation aux multiples dimensions...................................... 135
5.4.1. E-learning, formation mixte, formation hybride.........................................................................1355.4.2. Caractéristiques d’un dispositif de formation mixte ..................................................................1375.4.3. Spécificités liées à l’hybridation distance – présence .................................................................140
Synthèse : conception et dispositifs de formation mixtes............................................................. 1425.5. Conception de jeux et de jeux pour la formation ............................................................... 143
5.5.1. Approches de conception de jeux ..............................................................................................1435.5.2. Caractéristiques de la conception de jeux pour la formation.....................................................148
Synthèse : conception de jeux .................................................................................................... 151
Chapitre 6. Assistance à la conception pédagogique .............................................................. 1526.1. Principes-clés d’un dispositif d’assistance......................................................................... 1526.2. Les dimensions de l’assistance ........................................................................................ 1536.3. Les agents ou systèmes conseillers ................................................................................. 153
viii
6.4. Soutien à la conception et réutilisation .............................................................................. 1546.4.1. Principes généraux......................................................................................................................1546.4.2. L’approche basée sur les patrons de conception .......................................................................157
Synthèse : assistance à la conception pédagogique ................................................................... 1596.5. Formalisation et représentation de scénarios pédagogiques ............................................. 160
6.5.1. Intérêt et rôle des langages de conception ................................................................................1606.5.2. Les langages de modélisation pédagogique ...............................................................................1616.5.3. Approches de formalisation, systèmes de notation visuels et environnements d’assistance à laconception ...............................................................................................................................................164
Synthèse : langages de formalisation et systèmes de notation visuels ........................................ 179
PARTIE 3 : NOS PROPOSITIONS, EXPERIMENTATIONS ET RESULTATS................................. 180
Chapitre 7. Objectifs et méthodologie ..................................................................................... 1817.1. Rappel de notre objectif.................................................................................................... 1817.2. Aspects méthodologiques ................................................................................................ 181
7.2.1. Démarche générale et propositions élaborées...........................................................................1827.2.2. Notre approche de l’expérimentation ........................................................................................184
Chapitre 8. Phase 1 : définition et délimitation de notre objet d’étude ...................................... 1868.1. L’orientation vers les dispositifs Learning Role-Playing Game........................................... 186
8.1.1. LRPG et jeu de rôle .....................................................................................................................1878.1.2. LRPG : un dispositif hybride ........................................................................................................1908.1.3. Les interactions humaines au cœur du dispositif .......................................................................190
8.2. Identifier les propriétés descriptives caractéristiques des scénarios LRPG ........................ 1918.2.1. Caractéristiques générales de la grille de description ................................................................1918.2.2. Description détaillée : application de la grille sur un scénario LRPG ..........................................1948.2.3. Conclusions à propos de la grille de description.........................................................................197
Chapitre 9. Phase 2 - Proposition 1 : Structurer la démarche de conception ........................... 1999.1. Positionnement par rapport à l’étude exploratoire ............................................................. 1999.2. Démarche globale de conception : de la définition du projet à l’exécution ......................... 201
Synthèse : spécificités de la démarche de conception ScenLRPG .............................................. 205
Chapitre 10. Phase 2 - Proposition 2 : Centrer la réflexion sur les ressorts de jeu ..................... 20610.1. Principes directeurs ........................................................................................................ 20610.2. Identification de ressorts de jeu, facteurs de motivation .................................................. 207
10.2.1. Des éléments de mise en œuvre associés aux ressorts de jeu ...................................................20810.2.2. Les quatre ressorts de jeux issus des travaux de Caillois ............................................................20910.2.3. Les autres ressorts de motivation proposés ...............................................................................213
Synthèse : centrer la réflexion sur les ressorts de jeu ................................................................. 215
Chapitre 11. Phase 2 – Proposition 3 : Structurer et guider l’expression des scénarios ............. 21611.1. Origines de cette proposition et principes directeurs ....................................................... 216
11.1.1. Principes directeurs du langage de formalisation ScenLRPG ......................................................21611.2. Formaliser la définition du problème de conception ........................................................ 21811.3. Formaliser la conception initiale du scénario LRPG ........................................................ 219
11.3.1. Une métaphore pour structurer la description des scénarios ....................................................21911.3.2. Structuration de la description d’un scénario LRPG ...................................................................22011.3.3. Composants de base d’un scénario LRPG ...................................................................................22111.3.4. La « fonction » des espaces d’activité ........................................................................................22211.3.5. Des propriétés descriptives communes aux composants de base .............................................22311.3.6. Des composants spécifiques : constitution de groupes et attribution de rôles .........................227
11.4. Positionnement du langage de formalisation ScenLRPG par rapport à la grille dedescription initiale ................................................................................................................... 22811.5. Le système de notation visuel ScenLRPG ...................................................................... 229
11.5.1. Positionnement par rapport à l’étude exploratoire ...................................................................22911.5.2. Système de notation visuel ScenLRPG et esquisse de scénario ..................................................230
ix
11.6. Une approche de formalisation multiperspectives ........................................................... 233Synthèse : spécificités du langage de formalisation ScenLRPG .................................................. 234
Chapitre 12. Phase 3 : Mise en œuvre et expérimentation n°1 .................................................. 23512.1. Caractéristiques des expérimentations mises en place ................................................... 235
12.1.1. Méthodes et techniques de recueil de données ........................................................................23512.1.2. Travail préparatoire préalable aux expérimentations ................................................................237
12.2. Un prototype « papier » d’outil de conception ................................................................. 23812.2.1. Un jeu de cartes comme outil d’assistance à la conception .......................................................23812.2.2. Ressources d’assistance à la conception ....................................................................................23912.2.3. Des exemples de scénarios LRPG ................................................................................................239
12.3. Expérimentation 1 : présentation .................................................................................... 24112.3.1. Objectifs de l’expérimentation ...................................................................................................24112.3.2. Public cible ..................................................................................................................................24212.3.3. Présentation détaillée du protocole d’expérimentation ............................................................242
12.4. Expérimentation 1 : résultats .......................................................................................... 24612.4.1. Importance d’une phase initiale de recueil des besoins.............................................................24612.4.2. Utilité d’un système de notation visuel au cours de la conception ............................................24712.4.3. Utilité d’un système de notation visuel pour la présentation au client......................................24812.4.4. Utilité du système de notation visuel pour le partage et la capitalisation .................................24912.4.5. Conception pédagogique et ressorts de jeu ...............................................................................249
Synthèse : mise en œuvre et évaluation n°1 (1/2)....................................................................... 254Synthèse : mise en œuvre et évaluation n°1 (2/2)....................................................................... 255
Chapitre 13. Phase 3 : Mise en œuvre et évaluation n°2........................................................... 25613.1. Présentation du prototype informatique d’environnement d’assistance ............................ 256
13.1.1. Organisation globale de l’environnement ..................................................................................25613.1.2. Spécifications fonctionnelles : implémentation de la démarche de conception ScenLRPG .......257
13.2. Expérimentation n°2 : présentation ................................................................................. 26113.2.1. Objectifs et public cible...............................................................................................................26113.2.2. Présentation détaillée du protocole expérimental .....................................................................26113.2.3. Données recueillies .....................................................................................................................26413.2.4. Présentation du scénario LRPG à s’approprier ...........................................................................26413.2.5. Un jeu de mission à formaliser ...................................................................................................268
13.3. Résultats : analyse des questionnaires introductifs ......................................................... 26813.3.1. A propos des pratiques de réutilisation ......................................................................................26813.3.2. A propos de la mutualisation des travaux ..................................................................................270
13.4. Résultats issus des phases 1 et 2 de l’expérimentation .................................................. 27213.4.1. Phase 1 : une approche de formalisation qui nécessite la mise en œuvre d’une démarched’appropriation spécifique ......................................................................................................................27213.4.2. Phase 2 : une approche de formalisation opérationnelle qui laisse place à la « créativité » .....27513.4.3. L’approche de formalisation ScenLRPG comme support à la discussion ....................................279
Synthèse : mise en œuvre et expérimentation n°2 ...................................................................... 280
PARTIE 4 : CONCLUSION ............................................................................................................. 281
Chapitre 14. Bilan et perspectives ............................................................................................ 28214.1. Contributions de nos travaux .......................................................................................... 282
14.1.1. Un cadre théorique et applicatif .................................................................................................28214.1.2. Des propositions pour répondre à notre problématique ...........................................................28214.1.3. Des résultats transférables dans le contexte d’application ciblé ...............................................283
14.2. Limites de notre travail ................................................................................................... 28414.2.1. Limites des partis pris initiaux et du cadre théorique ................................................................28414.2.2. Limites de nos résultats ..............................................................................................................285
14.3. Perspectives de recherche ............................................................................................. 28614.3.1. Des prolongements directs de nos travaux ................................................................................28614.3.2. Pour aller encore plus loin… .......................................................................................................287
x
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................... 289
LISTE DES FIGURES..................................................................................................................... 299
LISTE DES TABLEAUX ................................................................................................................. 301
ANNEXES ...................................................................................................................................... 302
1
PARTIE 1 : INTRODUCTION
Cette première partie introduit le contexte de notre recherche : la formation professionnelle en
entreprise et le recours à de nouveaux modes de formation intégrant l’apprentissage collectif à
distance et l’utilisation du jeu. Nous présentons la manière dont cette thèse, en lien étroit avec
une société spécialisée en ingénierie pédagogique multimédia, se trouve ancrée dans les
problématiques de terrain et est nourrie par les pratiques mises en œuvre dans l’entreprise. La
définition du contexte nous amène à mettre en évidence les implications des nouveaux modes de
formation identifiés pour les concepteurs pédagogiques chargés de les définir. A partir de ce
contexte de recherche qui se révèle très vaste, nous définissons plus précisément notre objet
d’étude : les dispositifs Learning Role-Playing Game, dispositifs de formation à distance ou
mixtes, accordant une place centrale au jeu de rôle et à la mise en œuvre de ressorts de jeu
dans des activités collectives. Nous formulons nos questions, hypothèses et objectifs de
recherche autour des problématiques relatives à la conception de dispositifs Learning Role-
Playing Game et portant plus spécifiquement sur l’assistance à la conception de tels dispositifs et
sur la manière d’y intégrer le jeu. Nous détaillons ensuite l’approche méthodologique adoptée
dans nos travaux. Nous concluons cette partie introductive en présentant les enjeux et retombées
escomptées de nos travaux de recherche.
2
Chapitre 1. PROBLEMATIQUE ET OBJET DE RECHERCHE
1.1. Contexte de notre rechercheDans un contexte de forte concurrence, accompagnée d’une évolution rapide des technologies et
des organisations, le secteur de la formation professionnelle est aujourd’hui confronté à des
enjeux majeurs en termes d’attractivité et d’efficacité. L’exploration de nouvelles solutions pour
répondre aux besoins ouvre des questions de recherche larges et de nature pluridisciplinaire.
Les travaux présentés ici proposent d’apporter une contribution partielle à ces questions avec
comme terrain d’application la conception de dispositifs1 de formation professionnelle continue en
présentiel, à distance ou hybrides.
1.1.1. Formation professionnelle en entreprise et nouveaux modes deformation
Au niveau de la Commission Européenne, la formation professionnelle continue, ou formation
tout au long de la vie, est mise en avant comme un facteur-clé de compétitivité. Dans ce
domaine, la France s’est dotée d’un cadre légal pour offrir à tous les salariés des droits en
matière de formation (Droit Individuel à la Formation, Congé individuel de formation, Validation
des Acquis de l’Expérience2). Si la formation est d’abord le projet individuel d’un salarié, elle se
révèle également porteuse de forts enjeux pour les entreprises. Les grandes entreprises
devancent d’ailleurs la législation en proposant de nombreuses formations à leurs salariés.
On remarque que la formation dans les entreprises a évolué au cours des dernières décennies
pour s’orienter aujourd’hui vers une démarche de professionnalisation, mettant au centre des
préoccupations un lien plus fort entre la formation et la situation de travail. Cette logique de
professionnalisation correspond par ailleurs à des enjeux centraux pour les entreprises mis en
évidence dans une étude de l’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail
(ANACT) (Conjard & Devin 2009) : transfert des compétences des salariés expérimentés vers les
novices ; intégration et formation des nouveaux collaborateurs ; développement de l’esprit
d’entreprise et du travail en équipe ; adaptation des compétences des salariés à des postes de
travail en perpétuelle évolution ; offres de mobilité motivantes.
Dans le domaine de la formation professionnelle continue, les formations dispensées portent
majoritairement sur des besoins de formation métiers, des formations linguistiques ou des
formations portant sur le développement personnel et le management (Cristol 2009). Elles
1 Le terme dispositif désigne un système constitué d’un ensemble de moyens méthodologiques, techniques, matériels ethumains.2 http://www.travail-emploi-sante.gouv.fr/informations-pratiques,89/fiches-pratiques,91/formation-professionnelle,118/la-formation-des-salaries,1068.html
3
s’adressent principalement aux catégories d’employés les plus qualifiées, et concernent en
particulier les cadres.
Outre l’évolution de la formation professionnelle vers des problématiques de professionnalisation,
les générations actuelles d’apprenants ont des pratiques et des exigences nouvelles vis-à-vis de
leurs aînés. Ces exigences portent sur le sens et l’apport de la formation, son adaptation à leurs
besoins personnels ou encore son caractère motivant. Les apprenants se positionnent dans une
logique de rendement vis-à-vis de la formation en l’appréhendant sous l’angle des efforts fournis
et du temps passé par rapport aux bénéfices qu’ils en retirent. Aujourd’hui, l’éclatement
géographique des nouvelles organisations et l’accélération de l’ensemble des processus métiers
ajoutent une complexité de mise en œuvre en rendant difficiles les regroupements en sessions
de formation présentielles.
La généralisation de solutions développées ces dernières années en s’appuyant sur l’évolution
des technologies de l’information et de la communication, telles que les solutions e-learning, ne
répond que partiellement aux attentes exprimées. Les dispositifs de formation à distance mis en
place, le plus souvent constitués de parcours individuels et séquentiels se sont révélés peu
motivants et non-adaptés à tous les contextes et objectifs de formation.
On peut bien sûr déplorer que les potentialités de la formation à distance ne soient pas exploitées
à leur juste mesure (Lisowski 2009). Outre les aspects technologiques, l’ensemble des
dimensions de la formation professionnelle à distance (dimension pédagogique,
organisationnelle, économique) doivent faire l’objet de réflexions. Un rapport du projet HELIOS3
(2007) sur l’innovation dans l’e-learning en Europe souligne les principales orientations à suivre
parmi lesquelles nous retenons :
le recours à des modèles pédagogiques privilégiant les méthodes actives de construction
des connaissances ;
le renforcement de la dimension sociale et des interactions avec la prise en compte des
contextes ;
les processus d'apprentissage informel ;
le renforcement de la qualité et des processus d’apprentissage ;
l’intégration de l’apprentissage dans des processus de transformations organisationnelles
et sociales.
Comme déjà souligné pour le e-learning, l’un des écueils majeurs dans le domaine de la
formation professionnelle continue est la faible motivation des apprenants. La motivation, comme
nous le verrons dans le chapitre 4, est considérée comme un facteur-clé de l’apprentissage. Si
elle semble naturellement présente dans le cadre d’une formation émanant d’une demande
émise par le salarié lui-même, la motivation des apprenants constitue généralement un aspect
peu pris en compte dans des formations imposées par la hiérarchie. Lorsqu'elle est abordée,
3 http://thor.lrf.gr/helios
4
cette motivation s'avère souvent d'autant plus complexe à susciter que la formation traite de
sujets peu attrayants ou complexes.
L'objet de cette thèse est de fournir aux acteurs de la formation professionnelle un ensemble de
clés permettant de prendre en compte la question de la motivation dès les phases initiales de
conception. Nous posons des hypothèses de travail portant sur le choix d’approches
pédagogiques (nous privilégions les formations actives et collectives) et sur l'intégration de
ressorts de jeu dans la formation.
Le périmètre de nos travaux se concentre sur l’activité des concepteurs pédagogiques ou
ingénieurs de formation, travaillant au sein de sociétés spécialisées en ingénierie de formation ou
au sein de services de formation internes à des entreprises. Leur fonction consiste à concevoir
des dispositifs répondant à des besoins de formation émis par les différents acteurs
décisionnaires au sein d’une entreprise (services de formation, ressources humaines,
management, direction, etc.). Nos travaux de recherche se focalisent sur les méthodes et outils
mis à disposition des concepteurs pour produire des dispositifs de formation répondant à
certaines propriétés bien définies (la mise en œuvre de ressorts de jeux par exemple). Si le choix
de ces propriétés et l'intérêt de tels dispositifs sont justifiés dans la partie 2 de ce document, nous
ne nous intéressons pas ici à la mesure de la qualité (en termes de motivation pour l'apprenant
ou d’efficacité pédagogique) des dispositifs pouvant être produits grâce aux méthodes
proposées. Nos hypothèses, propositions et expérimentations concernent donc uniquement les
méthodes de conception.
1.1.2. Une thèse CIFRE pour un ancrage des problématiques derecherche sur le terrain
Ce travail de thèse s’est déroulé dans le cadre d’une convention CIFRE4 au sein de la société
Symetrix5. J’ai moi-même occupé un poste de conceptrice pédagogique multimédia avant
d’occuper la fonction de consultante au sein du pôle recherche et développement pendant le
déroulement de la thèse. Cette recherche a donc été nourrie par les expériences vécues, les
pratiques observées et les problématiques terrain identifiées à travers les différents projets clients
menés au sein de l’entreprise.
La société Symetrix est spécialisée dans l’ingénierie pédagogique multimédia. Son cœur de
métier est la conception et la réalisation de modules e-learning6 sur-mesure à destination de
clients de secteurs variés (industrie, automobile, banque et assurances, pharmaceutique,
distribution, services), majoritairement des entreprises grands comptes.
4 Conventions Industrielles de Formation par la Recherche : http://www.anrt.asso.fr/fr/espace_cifre/accueil.jsp5 http://www.symetrix.fr/6 Un module e-learning peut être défini comme une ressource numérique proposant des contenus et activités pédagogiquesmédiatisées (cf. définitions plus complètes § 5.4.1)
5
Les évolutions du marché de la formation professionnelle et de la formation à distance ont amené
Symetrix à s’intéresser à de nouvelles modalités pédagogiques et notamment à l’utilisation du jeu
pour la formation. En 2007, Symetrix a donc tout d’abord fait évoluer son offre avec le concept de
Learning Game dont le principe fondateur est d’intégrer des éléments de jeu dans un module e-
learning. Pour approfondir la réflexion et les développements dans ce domaine, Symetrix
participe à des projets de recherche sur la thématique de l’utilisation du jeu pour la formation, en
partenariat avec d’autres industriels et des laboratoires de recherche universitaires : Learning
Games Factory7 (janvier 2009 - décembre 2010), SEGAREM (SErious GAme et REalité Mixte)
(janvier 2010 - décembre 2012), Serious Lab for Innovation (janvier 2010- décembre 2011).
De façon plus récente, afin de diversifier les contextes d’usage du jeu pour la formation et
exploiter pleinement les intérêts de cette approche, Symetrix a développé le concept de Serious
Game Session (Mariais & Dupin 2010). Un SGS est un dispositif visant à dynamiser les sessions
de formation en présentiel à travers des activités collectives basées sur le jeu et l’utilisation de
supports technologiques innovants et interactifs (tablettes tactiles en réseau, smartphones,
dispositifs de type Ipod, etc.).
Les travaux menés dans le cadre de cette thèse se nourrissent de ces pratiques innovantes. Ils
témoignent également de la volonté de l’entreprise Symetrix d’explorer d’autres modalités
d’application du jeu à la formation : l’objectif est de tirer profit des nombreux avantages de la
formation à distance et des technologies, de dépasser les frontières du « e-learning individuel » à
travers l’application de nouvelles modalités pédagogiques et techniques.
1.1.3. Implications pour les concepteurs pédagogiques
Ce contexte, caractérisé par l’évolution des besoins et finalités de la formation professionnelle,
invite à repenser la conception des dispositifs de formation et impacte nécessairement le métier
des concepteurs pédagogiques. Comme nous l'avons indiqué plus haut, nous prenons comme
hypothèse de travail que cette évolution doit reposer sur l'introduction plus importante des
méthodes actives pour l'apprentissage et sur le recours aux ressorts de jeu. Les appels d’offres
de projets de formation et les propositions de solutions des concepteurs pédagogiques montrent
que cette hypothèse est d’ailleurs de plus en plus fréquemment adoptée sur le terrain.
L’étude des processus de conception des dispositifs de formation, à travers une revue de la
littérature scientifique et en s’appuyant sur les pratiques de sociétés telles que Symetrix, permet
d’identifier un ensemble de verrous.
Le principal verrou concerne l'absence de méthodologie pour accompagner et guider le
processus de conception de formations utilisant le jeu. Si les concepteurs disposent de méthodes
personnelles éprouvées ou de méthodes formelles mutualisées pour concevoir et modéliser des
7 http://www.learning-games-factory.com/
6
dispositifs de formation « classiques », l’introduction du jeu dans les dispositifs repose sur
l’adoption de démarches intuitives personnelles mobilisant des capacités créatives. Nous nous
trouvons ici face à un besoin d’accompagnement des concepteurs, spécialistes de la pédagogie
mais manquant d’expertise dans l’utilisation pédagogique du jeu. Cette absence de méthodologie
induit par ailleurs une difficulté à communiquer avec les autres acteurs du projet, à échanger en
particulier sur l’adéquation du dispositif aux objectifs de formation. Enfin chaque nouvelle
conception, en ne se référant pas à un cadre méthodologique précis, limite les possibilités
d’optimisation des coûts et des délais.
A cela viennent s’ajouter d’autres obstacles/verrous provenant de contraintes présentées dans la
section suivante.
1.2. Spécificités du contexte et orientation choisie : définitionde notre objet d’étude
Dans le contexte de la formation professionnelle continue en entreprise, parmi les
caractéristiques qui doivent être prises en compte pour la définition d’un dispositif de formation
nous avons retenu les suivantes.
L’évolutivité des contenus de formation : leur durée de vie relativement courte
implique des besoins réguliers de mise à jour des contenus pédagogiques. C’est le cas
de la plupart des formations portant sur la vente ou le service, ainsi que les formations
dans les domaines techniques ou législatifs.
Le déploiement géographiquement distribué : les dispositifs de formation sont
aujourd’hui déployés à une échelle nationale ou internationale, et pris en charge par des
équipes locales de formateurs ou tuteurs. Une appropriation rapide et aisée de ces
dispositifs par les formateurs, une facilité d’adaptation de leur mise en œuvre à différents
terrains de déploiement ainsi qu’une homogénéité des résultats obtenus en termes de
compétences acquises par les apprenants sont des exigences courantes.
Le rôle central du collectif : les enjeux de professionnalisation mettent en évidence
pour les apprenants des besoins de travail collaboratif, de capitalisation et de
formalisation des connaissances et compétences, ce qui justifie le recours à des
méthodes d’apprentissage collaboratives et de co-construction des savoirs.
Les solutions qui ont émergé ces dernières années sous l’intitulé serious game ou jeu sérieux
combinent difficilement les caractéristiques citées précédemment. Elles privilégient souvent des
aspects narratifs, des principes de jeu ainsi que des technologies immersives issues du jeu vidéo
(moteurs graphiques 3D par exemple). La spécification de telles applications repose
généralement sur des modèles complexes, issus d’une expertise métier très poussée, et les
scénarios qui en résultent, encapsulés dans le game play et l’application logicielle, s’avèrent peu
7
adaptables. Ce type de dispositif est générateur d’un coût financier important pour une
conception et un développement d’applications possédant une durée de vie limitée.
Les spécificités et besoins des contextes de formation visés et les constats concernant les
solutions actuellement proposées ont orienté la définition des caractéristiques de notre objet
d’étude. Nous nous focalisons sur la conception de dispositifs de formation que nous avons
appelés Learning Role-Playing Games ou jeux de rôle pour l’apprentissage. Ces dispositifs de
formation collectifs sont basés sur des principes du jeu de rôle pris au sens large (leurs
caractéristiques détaillées sont décrites dans le chapitre 8). Leur modalité de mise en œuvre peut
être présentielle, hybride ou totalement à distance.
1.2.1. Dispositifs LRPG et jeu de rôle
En suivant les préconisations du rapport HELIOS (cf. § 1.1.1) et en tenant compte des
caractéristiques présentées dans le paragraphe précédent, nous avons retenu les orientations
suivantes pour les dispositifs de formation qui constituent notre objet d’étude :
des dispositifs ouverts, facilement adaptables ;
des dispositifs faciles d’appropriation et de mise en œuvre pour les différents acteurs ;
des activités favorisant les interactions et la dimension sociale de l’apprentissage ;
des dispositifs qui créent une dynamique favorisant la motivation et l’implication des
participants ;
une articulation des connaissances et compétences qui font l’objet de la formation avec
les situations professionnelles dans lesquelles elles seront mises en œuvre ;
des méthodes actives de construction des connaissances.
Ces orientations nous ont amenés à nous focaliser sur le jeu de rôle dont l’utilisation à des fins de
formation est depuis longtemps reconnue. Nous considérons le jeu de rôle dans une acception
large qui recouvre à la fois des activités courtes simulant des situations de communication
synchrones entre quelques acteurs, et des missions plus longues composées d’activités
synchrones ou asynchrones faisant intervenir un nombre de participants plus grand.
Le jeu de rôle remplit les caractéristiques retenues pour notre objet d’étude : une appropriation
facile par les formateurs et les apprenants avec des scénarios comportant généralement peu de
règles ; une facilité d’adaptation rendue possible par le recours à des ressources externes
aisément modifiables (scénarios et fiches de personnage) ; la mise en œuvre d’une pédagogie
active reposant sur des activités collectives favorisant la co-construction de savoirs ; enfin une
dynamique de jeu apte à susciter la motivation des participants.
8
1.2.2. Assistance à la conception
En nous centrant sur la question de la conception de dispositifs de formation utilisant le jeu, nous
nous intéressons particulièrement aux questions d'assistance à l'activité du concepteur. Nous
nous appuyons sur les travaux récents portant sur la scénarisation pédagogique (Hotte et al.
2007), qui s’intéressent à la modélisation de dispositifs de formation instrumentés. Nous nous
basons également sur différentes approches de la conception pédagogique (approches centrées
sur les connaissances, les ressources, les activités, les interactions ou les intentions) afin de
concilier la volonté de mettre en œuvre une réflexion centrée sur les activités d’apprentissage, le
besoin de prendre en compte le contexte et la nécessité de mettre en œuvre une pédagogie
active (cf. préconisations du rapport HELIOS - § 1.1.1) basée sur le jeu et les activités collectives.
Dans le contexte présenté, nous envisageons l’assistance à l’activité de conception de deux
manières (Dufresne et al. 2003) : d’une part à travers la définition de principes méthodologiques
et la formalisation d’un processus de conception de scénarios pédagogiques intégrant les
spécificités liées à l’utilisation du jeu, d’autre part à travers la mise à disposition d’outils de
conception implémentant le processus de conception défini, notamment un environnement
informatique d’assistance.
Nous centrons nos travaux au niveau des phases amont du processus de conception (définition
d’un scénario avant sa mise en œuvre opérationnelle) avec comme buts de guider les réflexions
et choix du concepteur pour la scénarisation du dispositif de formation, de faciliter la structuration
de ses idées et la communication avec les autres interlocuteurs impliqués dans le projet. Enfin,
même si ce n’est pas l’objet final de nos travaux, notre réflexion sur les solutions
méthodologiques et les outils d’assistance à la conception intègre des éléments qui préparent
l’opérationnalisation des scénarios.
1.3. Questions, hypothèses et objectif de rechercheNos travaux visent à assister la tâche de conception de dispositifs de type Learning Role-Playing
Game. Dans cette optique, la problématique soulevée est la suivante : Comment assister
efficacement le concepteur à la fois dans la création de dispositifs adaptés et dans la
communication, avec les autres personnes impliquées dans le projet, autour des solutions
conçues ? Cette problématique fait apparaître plusieurs questions sous-jacentes à partir
desquelles des hypothèses ont été formulées pour orienter notre travail.
1.3.1. Hypothèses liées à l’assistance à la conception
La première question porte sur l’assistance à la conception de manière générale et la définition
d’une méthodologie pouvant soutenir la conception : Quelles sont les caractéristiques d’une
9
méthodologie visant à soutenir la conception de dispositifs de formation utilisant le jeu dans le
contexte visé ?
Plusieurs hypothèses ont été formulées comme pistes de réponse à cette question :
Une méthode ouverte et flexible, non prescriptive, proposant une aide à la définition du
problème de conception (spécification du contexte et des besoins), offrant des ressources
d’assistance et notamment des exemples de solutions (scénarios réutilisables), constitue
une aide pour les concepteurs.
Une méthode centrant la réflexion du concepteur sur l’activité de l’apprenant, sur les
interactions entre les apprenants et prenant en compte les intentions des commanditaires
et du concepteur lui-même en termes de formation et de jeu, facilite la conception de
scénarios de formation adaptés aux contraintes du projet.
Un formalisme visuel de description des solutions élaborées facilite l’expression des
représentations du concepteur au cours du processus d’élaboration de la solution,
l’explicitation des scénarios, leur partage avec des pairs ou leur présentation à un client,
leur réutilisation (mise à disposition dans une bibliothèque) ainsi que leur mise en œuvre
opérationnelle.
1.3.2. Hypothèses liées à la place du jeu dans les scénarios deformation à concevoir
Une autre question centrale dans notre problématique concerne l’approche adoptée pour
l’intégration du jeu dans la conception des scénarios LRPG. L’utilisation du jeu dans un dispositif
de formation vise à mettre en place une méthode d’apprentissage active suscitant l’engagement
et la motivation des participants. Dans cette optique, nous cherchons à répondre à la
problématique suivante : Comment peut-on assister des concepteurs dans l’utilisation du jeu pour
générer la motivation des apprenants ?
Plusieurs hypothèses sont émises à ce sujet :
L’identification de ressorts de jeu et principes sources de motivation et susceptibles d’être
intégrés dans un dispositif de formation doit servir de base de réflexion au concepteur
pour l’élaboration de sa solution.
La mise à disposition d’exemples de scénarios de formation ou de composants, mettant
en œuvre des principes de jeu, doit servir de soutien et être source d’inspiration pour les
concepteurs.
10
1.4. Approche méthodologique
1.4.1. Des propositions alimentées par une étude théorique et desévaluations
La première étape de notre travail, présentée dans la partie 2, est consacrée à une étude
théorique qui constitue un travail qualifié d’exploratoire et de structurant en ce qu’il permet d’avoir
une meilleure connaissance du champ pluridisciplinaire dans lequel s’inscrivent nos travaux et
nous a conduit à en fournir une représentation structurée. D’une part, cette étude est alimentée
par un état de l’art des domaines de recherche et d’application relatifs à l’utilisation du jeu pour la
formation. D’autre part, elle est également nourrie par l’expérience de terrain au sein de la
société Symetrix, qui peut être rapprochée des modalités de l’observation participante telle
qu’elle est mise en œuvre par les sociologues (Peneff 2009).
L’étude exploratoire et structurante, guidée par des postulats et hypothèses de recherche
formulés, aboutit à la définition de phases de travail organisant notre recherche et visant
l’élaboration de propositions destinées à répondre à l’objectif général spécifié : assister la
conception de scénarios de formation utilisant le jeu dans le contexte de la formation
professionnelle en entreprise.
Figure 1 - Notre approche méthodologique
Trois phases de travail ont ainsi organisé notre recherche et conduit à l’élaboration de
propositions pour répondre à la problématique retenue (cf. figure 1).
11
Une première phase de travail a consisté à délimiter notre objet d’étude par rapport à la
multiplicité des possibilités d’utilisation du jeu pour la formation rencontrées lors de notre
étude exploratoire. Elle a abouti à la définition du concept de Learning Role-Playing
Game. Cette phase a également porté sur la définition des hypothèses et des postulats
qui ont guidé nos travaux.
Une seconde phase est plus spécifiquement consacrée à la définition de propositions
visant à répondre à la problématique définie autour de l’assistance à la conception de
scénarios Learning Role-Playing Games. Ces propositions prennent la forme d’une
démarche de conception de scénarios LRPG, axant la réflexion sur l’utilisation de
ressorts de jeu et proposant un langage de formalisation et un système de notation visuel
pour la description des scénarios.
Une troisième phase porte sur la mise en œuvre et l’évaluation des propositions à
travers la spécification de deux prototypes d’outils d’assistance et leur utilisation dans des
expérimentations menées auprès de notre public cible (ingénieurs de formation travaillant
au sein d'un département formation d'un grand groupe et concepteurs pédagogiques
d’une société prestataire dans la réalisation de dispositifs de formation multimédia).
Ces trois phases de travail, s’appuyant sur l’étude exploratoire, s’alimentent mutuellement.
L’élaboration des propositions (phase 2) est centrée sur l’objet d’étude délimité (les scénarios
Learning Role-Playing Game) et s’appuie sur les hypothèses et postulats définis (phase 1). Les
prototypes spécifiés et les expérimentations menées (phase 3) permettent la mise en œuvre et
l’évaluation des propositions élaborées dans la phase 2. Enfin, les résultats issus de l’utilisation
des prototypes apportent des éléments de validation des propositions, ils permettent de les
affiner et de les enrichir.
1.4.2. Champs disciplinaires concernés
Notre thématique de recherche se trouve au croisement de quatre champs disciplinaires
principaux :
les sciences de l’éducation où notre recherche s’appuie sur des travaux traitant des
théories de l’apprentissage, de la motivation en contexte d’apprentissage et de l’utilisation
du jeu pour la formation ;
les sciences de l’information et de la communication qui alimentent notre réflexion en
matière de définitions et d’approches de l’activité de jeu ;
les sciences cognitives et notamment la psychologie qui fournissent des éléments sur
la motivation, l’activité de conception et l’assistance à cette tâche ;
l’ingénierie des EIAH (Environnements Informatiques pour l’Apprentissage Humain)
(Tchounikine 2009) qui nous intéresse notamment pour les aspects liés à la scénarisation
12
de dispositifs d’apprentissage instrumentés et à l’élaboration d’outils pour soutenir cette
tâche. Nos travaux se situent dans la continuité des recherches sur la scénarisation
pédagogique (Pernin & Lejeune 2004a, Pernin 2007) et l’assistance à la conception
(Villiot-Leclercq 2007, Emin 2010) menées au sein de l’équipe MeTAH du Laboratoire
d’Informatique de Grenoble.
1.5. Enjeux et retombées escomptées de la rechercheLa recherche sur l’utilisation du jeu pour la formation professionnelle est un domaine dont de
nombreux aspects demeurent actuellement peu approfondis. Elle concerne des pratiques sur
lesquelles nous possédons peu de recul. La pluridisciplinarité du domaine rend le champ
d’investigation d’autant plus large, ce qui n’est pas sans poser quelques difficultés. C’est aussi ce
qui rend le sujet très riche et permet d’envisager de mutliples possibilités de recherche : de notre
côté, nous avons choisi de cibler nos travaux sur l’assistance à la scénarisation de dispositifs de
formation utilisant le jeu et des activités collectives dans un contexte de formation professionnelle
hybride.
Sur le plan théorique, les retombées escomptées de nos travaux concernent plusieurs
domaines :
l’ingénierie des EIAH où notre recherche étend le travail mené sur la scénarisation
pédagogique et l’assistance à la conception en s’intéressant à des dispositifs encore peu
explorés, les Learning Role-Playing Games, et en proposant une approche de
formalisation dédiée à ce contexte (cf. chapitre 11) avec, en particulier, une proposition
pour exprimer et représenter les ressorts de jeu.
les sciences de l’éducation où notre recherche apporte, avec la proposition LRPG (cf.
chapitre 8), une orientation très différente des orientations courantes en serious game et
fournit des résultats relatifs à la compréhension et à l’appropriation de ce type de
dispositif de formation par des concepteurs pédagogiques.
les sciences cognitives où notre travail aborde la question de la créativité dans le champ
de la conception de dispositifs pédagogiques basés sur le jeu.
Sur un plan plus pragmatique, les retombées de nos travaux pourraient :
accompagner les sociétés prestataires en ingénierie de formation dans l’innovation et la
diversification des solutions destinées à la formation professionnelle. Cet
accompagnement s’appuierait sur nos propositions concernant une démarche de
conception et un outil d’assistance destinés à la conception de dispositifs de formation
mettant à profit les potentialités offertes par le contexte technologique, social et
professionnel actuel (interactions sociales, méthodes actives de pédagogie et utilisation
du jeu, formation à distance ou hybride, etc.) ;
13
favoriser le développement de l’usage du jeu pour la formation professionnelle à travers
le concept de dispositifs Learning Role-Playing Game défini pour répondre aux
contraintes évoquées dans la section 1.2.
14
PARTIE 2 : ETUDE EXPLORATOIRE ETSTRUCTURANTE
Dans cette seconde partie nous présentons l’étude exploratoire et structurante portant sur les
différentes notions et domaines relatifs à notre objet d’étude. D’une part, nous abordons le jeu et
le jeu pour la formation. D’autre part, nous nous intéressons à l’activité de conception au sens
large vue sous l’angle des sciences cognitives et de la psychologie, ainsi qu’à la conception
pédagogique dans le domaine des EIAH et à la conception de jeux pour l’apprentissage. Enfin
nous étudions les aspects relatifs à l’assistance à la conception.
L’objectif de cette partie est de mettre en évidence les travaux sur lesquels s’appuie notre
recherche et qui alimentent notre réflexion. Le travail présenté ici va plus loin qu’un simple état
des lieux de l’existant : étant donné le caractère pluridisciplinaire du champ d’investigation
concerné (la conception de jeux pour la formation), cette phase exploratoire vise à fournir une
vision structurée afin d’y situer plus précisément nos travaux.
Beaucoup de notions abordées dans cette partie doivent être définies alors même qu’elles ne
font pas l’objet de définitions consensuelles dans les domaines qui les étudient : nous en
fournissons donc tout d’abord une vision large à travers la présentation de différents points de
vue, puis nous précisons la définition retenue dans nos travaux. C’est en cela également que
notre démarche s’avère plus qu’un simple état de l’art : nous nous attachons à interroger des
aspects parfois trop systématiquement considérés comme acquis comme, par exemple, le fait
d’utiliser le jeu pour la formation.
15
Chapitre 2. LE JEU : UN OBJET D’ETUDE COMPLEXE
Dans ce chapitre, nous tentons de cerner ce qu’est le jeu de manière générale à travers l’étude
de différentes définitions et l’analyse de classifications mettant en avant divers critères de
caractérisation.
2.1. Définition(s) du jeuDepuis longtemps, nombre de chercheurs de domaines variés se sont intéressés au jeu :
Huizinga (1938) et Caillois (1958) l’ont étudié d’un point de vue sociologique, le définissant
comme un élément central de toute culture et civilisation ; d’autres comme Piaget (1945) s’y sont
intéressés sous un angle psychologique en étudiant son lien avec le développement de l’enfant ;
d’autres encore, tels que Salen et Zimmerman (2004), adoptent une approche conceptuelle
destinée à alimenter des travaux sur le game design (conception de jeu). Le jeu apparaît ainsi
comme un objet pluriel dont l’analyse, pour être complète, nécessite une approche
multidisciplinaire.
« The word [game] is used for so many different activities that it is not worth insisting onany proposed definition. All in all, it is slippery lexicological customer, with many friendsand relations in a wide variety of fields. » (David Parlett 1992 in Salen and Zimmerman2004).
Malgré les difficultés de l’exercice, certains auteurs se proposent de définir le jeu. Les travaux les
plus reconnus, sur lesquels toutes les nouvelles tentatives de définition du jeu semblent
s’appuyer sont ceux de Huizinga (1938). Huizinga définit le jeu de la manière suivante :
« Le jeu est une action ou une activité volontaire, accomplie dans certaines limites fixéesde temps et de lieu, suivant une règle librement consentie mais complètementimpérieuse, pourvue d'une fin en soi, accompagnée d'un sentiment de tension et de joie,et d'une conscience "d'être autrement" que la "vie courante". »
Cette définition est souvent critiquée, notamment par Caillois dont les travaux font suite à ceux de
Huizinga. Caillois prend le travail de Huizinga comme point de départ de sa réflexion et en
discute certains points pour élaborer sa propre définition, jugeant celle de son prédécesseur « à
la fois trop large et trop étroite ».
Caillois propose de définir le jeu comme une activité :
Libre : l'activité doit être choisie pour conserver son caractère ludique ;
Séparée : circonscrite dans des limites d'espace et de temps ;
Incertaine : l'issue n'est pas connue à l'avance ;
Improductive : qui ne produit ni biens, ni richesse (même les jeux d'argent ne sont qu'un
transfert de richesse) ;
16
Réglée : elle est soumise à des règles qui se substituent aux lois ordinaires ;
Fictive : accompagnée d'une conscience que l’activité se distingue de la réalité première.
Toutefois, comme le souligne Brougère dans son ouvrage Jouer/Apprendre (2005), la volonté de
distinguer le jeu des autres activités à travers une définition qui en fixerait des barrières
infranchissables semble vouée à l’échec. La grande diversité des activités ludiques a conduit ce
chercheur en sciences de l’éducation à mener un travail de définition du jeu qui « se contente de
déterminer les caractéristiques d’une activité aux frontières floues. »
Le jeu est pluriel : le terme jeu lui-même est utilisé dans des expressions et contextes très divers.
Comme Caillois le fait remarquer dans ses travaux datant de 1958, il est intéressant de
considérer les différents emplois du mot jeu en dehors de son sens propre. Selon lui, ces
différents emplois peuvent permettre de saisir des notions implicites liées au concept de jeu dans
toute sa diversité et ainsi mieux le comprendre. Caillois a notamment identifié les sens suivants
que peut recouvrir le terme jeu :
le jeu désignant l’activité, le fait de jouer ;
le jeu désignant les instruments nécessaires à cette activité (par exemple le « jeu de
cartes ») et faisant référence à un ensemble fermé et complet d’objets ;
le jeu désignant le style d’un comédien ou d’un musicien, sa manière d’interpréter (« le
jeu d’un acteur ») ;
le jeu désignant l’association de l’intervention de la chance et de compétences mises en
œuvre par un individu comme dans l’expression « avoir beau jeu » ;
le jeu portant l’idée de prise de risque (« mettre en jeu ») ;
le jeu en tant que système de règles qu’il faut respecter, sens porté dans l’expression
« jouer le jeu » ;
le jeu évoquant « l’idée de latitude, de facilité de mouvement, une liberté utile, mais non
excessive », une « liberté qui doit demeurer au sein de la rigueur », tel que le jeu d’un
engrenage nécessaire au fonctionnement du mécanisme.
Selon Caillois, cette variété de significations montre que les dispositions psychologiques que le
jeu traduit et développe sont d’importants facteurs de civilisation. Pour beaucoup, cette diversité
du mot jeu montre avant tout toute l’ambigüité que comporte cette notion :
« Est ambigu le référent lui-même, le fait qu’on l’appelle "jeu", l’intention de celui qui ledénomme ainsi, le sens même du terme, etc. » (Sutton-Smith 1979 in Brougère 2005, p.17).
Brougère lui aussi met en évidence différentes réalités que recouvre le mot jeu :
Le jeu en tant qu’objet (jeu de cartes, jeu vidéo, jeu de société).
Le jeu en tant qu’ensemble de règles et de principes distinct du jeu en tant qu’objet.
Le jeu en tant qu’activité, action de « jouer ».
17
Par ailleurs, d’une langue à l’autre, on remarque des disparités dans la façon de nommer le jeu :
soit, comme en français, un terme unique jeu va être utilisé (ou le verbe correspondant jouer),
soit, comme c’est le cas pour l’anglais, on va trouver deux termes faisant référence à ce concept :
game et play. L’utilisation de ces deux termes est intéressante à approfondir puisque chacun met
en avant une facette différente du jeu. On retrouve cette analyse des termes game et play dans
la plupart des travaux de recherche qui s’intéressent au jeu.
Dans les travaux de Klabbers (2008), le game est considéré comme un type d’activité impliquant
des joueurs, avec un but et des règles définis, et est présenté comme une forme de play. Le play
quant à lui désigne une activité ou une occupation, dont les règles sont librement acceptées.
Cela rejoint l’analyse proposée par Salen et Zimmerman (2004) selon laquelle « la plupart des
formes de "play" sont moins précises et moins organisées que les "games" ».
Dans leur ouvrage Rules of play, considéré comme une référence dans le milieu du game design,
Salen et Zimmerman (2004) se sont également interrogés sur les termes play et game, se
demandant quelle différence ils exprimaient, pourquoi deux termes étaient utilisés. Conscients
que cette situation n’était pas commune à toutes les langues et persuadés que l’emploi de deux
termes distincts devait avoir une explication logique et justifiée, ils ont voulu la saisir. Au final les
auteurs mettent en évidence une relation complexe entre les deux notions.
D’un côté les jeux au sens de games apparaissent comme un sous-ensemble du jeu au sens de
play. Le play désigne un ensemble d’activités qui ne sont pas toutes des games (cf. figure 2).
Figure 2 - Les games comme un sous-ensemble du play (Salen et Zimmerman 2004)
D’un autre côté, le jeu au sens de play est considéré comme un aspect des games (cf. figure 3).
Dans leur approche conceptuelle qui s’inscrit dans le domaine du game design, Salen et
Zimmerman s’intéressent aux différents aspects du jeu : le play, les règles et la culture.
18
Figure 3 - Le play comme une composante des jeux (Salen et Zimmerman 2004)
Cette analyse des différences entre play et game qui met en évidence deux facettes du jeu rejoint
d’une certaine manière le point de vue de Caillois (1958) qui a défini deux pôles pour situer les
jeux en fonction de la présence plus ou moins forte de règles : la païda des jeux libres, non
réglés, s’oppose au ludus des jeux respectant des conventions bien définies, de la même
manière que le play désigne des activités peu cadrées alors que le game renvoie à une forme de
jeu bien spécifique aux règles communément admises et définies.
A partir de l’analyse des différences entre play et game présentée précédemment, certains
auteurs se sont interrogés sur la nécessité de faire un choix : doit-on s’intéresser au play de
manière générale, sachant qu’il inclut des activités qui ne sont pas considérées comme des jeux
au sens de games, ou bien se focaliser sur le game ? Brougère (2005) décide de s’intéresser au
jeu en tant qu’activité ludique, ce qui correspond au champ d’application du terme play :
« Je me concentre sur ce qu’il en est quand quelqu’un (ou quelques-uns) joue(nt). Qu’est-ce que le jeu en tant que jouer ? » (Brougère 2005)
Brougère propose ainsi cinq caractéristiques du jeu dont certaines font écho à des définitions
proposées par d’autres auteurs tel que Caillois :
Le second degré : le jeu est une activité basée sur le « faire semblant », le « c’est pour de
faux ».
La décision : « Jouer, c’est décider ». Parce que Brougère considère que parler de liberté
de jouer, tel que le propose Caillois, est trop complexe et constitue un critère peu
opérationnalisable, il préfère mettre en avant la décision qui est au cœur de tout jeu :
d’une part il n’y a pas de jeu sans décision des joueurs d’y prendre part ; d’autre part on
constate que le déroulement d’un jeu résulte d’un enchaînement de décisions prises par
les joueurs.
Ces deux premiers critères, second degré et décision, constituent selon l’auteur les
caractéristiques fondamentales du jeu. Toutefois trois autres caractéristiques sont mises en
évidence :
La règle. Règle et décision sont indissociables : c’est la règle qui organise la décision
dans le jeu. La règle n’est pas un critère discriminant mais permet plutôt de comprendre
les conséquences des deux premiers critères proposés. Brougère distingue deux types
19
de règles : d’un côté les règles définies préalablement au jeu, par exemple dans le jeu
d’échecs ; de l’autre, les règles produites au fur et à mesure du jeu par les joueurs eux-
mêmes, comme dans les jeux symboliques des enfants.
La frivolité attribuée au jeu est liée à la dimension de second degré et à la décision. C’est
un critère proche de la notion de gratuité de Caillois, mais qui est ici présenté
différemment à travers « la notion d’activité sans conséquence ». Le jeu étant une activité
de « faire semblant », les décisions qui y sont prises sont sans conséquence. Il est
intéressant de noter que c’est cette minimisation des conséquences qui favorise
l’implication du joueur dans les décisions relatives au jeu.
L’incertitude est le dernier critère retenu par Brougère. Cette caractéristique est
considérée comme fortement discriminante : elle caractérise le fait qu’on ne sait jamais
comment va se terminer un jeu. Même si le scénario s’appuie sur une trame prédéfinie, il
se construit au fur et à mesure du déroulement du jeu.
Les caractéristiques retenues par Brougère se veulent pour la plupart discriminantes et dotées
d’une certaine capacité opératoire afin de constituer un outil opérationnel d’analyse du jeu.
Il serait facile de rassembler ces critères afin d’en faire une définition du jeu en posant l’équation
suivante : Jeu = second degré + décision + règle + frivolité + incertitude. Mais Brougère s’y
refuse. Il préfère les considérer comme des caractéristiques qui permettent de « comprendre la
logique des activités de jeu mais aussi des activités proches du jeu » (Brougère 2005), ce qui,
selon nous, rejoint sa décision de s’intéresser au play et non pas uniquement au game.
Brougère cite ainsi les travaux de Lardinois (2000 in Brougère 2005) qui va lui aussi dans ce
sens en proposant de « dynamiser les critères » : en considérant que les caractéristiques
retenues pour décrire le jeu peuvent être plus ou moins présentes, on peut attribuer à une activité
un « potentiel ludique » plus ou moins important. En suivant ce raisonnement, Brougère présente
« l’optimum ludique », non comme la présence d’un maximum de critères mais comme « un
équilibre entre les différents critères permettant de maximiser l’intérêt du jeu et le plaisir qu’on en
retire. » Les critères de Brougère permettent ainsi de « donner du sens à l’intensité de la
dimension ludique » d’une situation et correspondent à la notion « d’indice de ludicité » définie
par Lardinois. L’approche proposée par Brougère (2005)
« permet de saisir la variété du jeu à travers l’idée qu’une activité est plus ou moins dujeu, que le jeu connaît des frontières floues où se développent des pratiques qui ont descaractéristiques ludiques partielles, que l’on peut, selon le point de vue, rapprocher ouéloigner du jeu ».
20
Synthèse : définitions du jeu
Beaucoup se sont essayés à définir le jeu. La somme des travaux sur le sujet
devient tellement importante et hétérogène qu’il paraît vain de tenter de les
synthétiser pour proposer une définition consensuelle qui s’avérerait sans doute au
final trop réductrice et non opérationnelle pour nos travaux.
Par rapport aux différents points de vue présentés sur la définition du jeu, dans nos
travaux nous nous intéressons principalement au jeu en tant qu’activité au sens
large, nous positionnant ainsi dans le périmètre couvert par la notion de play. Nous
adoptons la démarche de Brougère qui met l’accent sur le besoin de comprendre
« la logique des activités de jeu » et non pas d’en définir un périmètre clos et définitif.
Comme nous le verrons dans la section 3.1, l’adoption de cette démarche, qui ne
tente pas de fixer des frontières rigides au jeu, est justifiée par les spécificités
induites par l’association du jeu et de l’apprentissage, association souvent
considérée comme paradoxale. Afin d’analyser et de comprendre les activités
associant jeu et apprentissage, les caractéristiques du jeu identifiées dans ces
travaux (second degré, décision, frivolité, règle, incertitude) seront confrontées aux
caractéristiques des situations d’apprentissage (section 3.2).
21
2.2. Etude de classifications de jeuxPlutôt que de proposer une nouvelle définition du jeu, nous préférons adopter une approche
descriptive, comme Brougère, en identifiant un ensemble de critères qui pourraient être plus ou
moins présents dans un jeu. Le but ici est également de dégager des critères non pas pour
définir le jeu mais pour mieux le comprendre, en s’inspirant de l’approche proposée par Propp
(1970) dans le domaine du conte. Dans les toutes premières pages de son ouvrage, Propp
avance que pour cerner son objet d’étude il souhaite en étudier toutes ses diversités en
établissant une classification. Nous adoptons une démarche un peu similaire à la sienne à la
différence que nous n’étudions pas directement les diverses formes de jeu. Nous étudions des
classifications de jeux existantes dans le but d’en dégager une méta-classification. A travers cette
étude de classifications existantes, nous cherchons de plus à identifier des critères opérationnels
pouvant servir de support à la conception et à la description de scénarios de jeux pour la
formation.
Afin d’offrir une vision large du domaine, nous avons étudié des classifications portant sur les
jeux dits « traditionnels », les jeux vidéo, les jeux pour la formation professionnelle, réalisées
aussi bien par des chercheurs que des professionnels du secteur. Nous avons également étudié
des classifications de jeux informatiques à finalités sérieuses (aussi appelés serious games) ainsi
qu’une classification de jeux numériques plus spécifiquement destinés à l’éducation et à
l’apprentissage.
Onze classifications ont été retenues pour couvrir une variété de points de vue et d’objectifs ainsi
que différentes périodes de l’histoire des jeux. Pour chacune des classifications étudiées, nous
nous sommes intéressés au profil des auteurs et à leur domaine d’activité ainsi qu’à l’objectif
sous-jacent poursuivi par leurs travaux.
2.2.1. Classifications de jeux dits « traditionnels »
Nous abordons ici deux classifications qui portent sur des jeux qualifiés de « traditionnels »,
s’intéressant à des jeux existant indépendamment du développement des technologies
numériques : d’une part nous détaillons la classification établie par Caillois en 1958, d’autre part
nous présentons le système de classification élaboré par Garon à partir de 1982. Bien que
s’intéressant à des objets similaires, ces deux travaux différent au niveau des domaines dans
lesquels ils s’inscrivent, des buts poursuivis et des approches de classification adoptées.
Une classification structurante : les travaux de Caillois
Caillois (1958) adopte un point de vue sociologique et anthropologique et étudie le rôle social du
jeu dans le but d’ « élaborer une théorie de la civilisation et de proposer une nouvelle
interprétation des différentes cultures ». Comme nous l’avons déjà précisé dans la section
22
précédente, Caillois définit le jeu comme « une activité libre, séparée, incertaine, improductive,
réglée et fictive ».
Afin de mieux comprendre son sujet d’étude, Caillois a cherché à élaborer une classification
capable de proposer « un principe de classement qui permette de répartir [tous les jeux] en un
petit nombre de catégories bien définies ». Caillois englobe dans sa réflexion des jeux issus de
différentes cultures, des sociétés primitives aux sociétés contemporaines. En s’intéressant plus
précisément au caractère fondamental du jeu qui pousse le joueur à s’y adonner, c’est-à-dire à
« l’attitude du joueur » dans l’activité de jeu, Caillois dégage quatre catégories (étudiées de
manière plus approfondie section 4.5.1) :
Agôn pour les jeux basés sur la compétition tels que le football ;
Alea pour les jeux dans lesquels le joueur se livre au hasard tels que les jeux de dés ;
Mimicry pour les jeux de simulacre, dans lesquels les participants endossent des rôles
(ex. jouer à la poupée) ;
Ilinx pour les jeux reposant sur la poursuite du vertige tels que la balançoire.
Caillois définit également deux pôles pour situer les jeux en fonction de la présence plus ou
moins forte de règles : la païda des jeux libres, non réglés, caractérisés par les notions de
« turbulence », « d’épanouissement insouciant », s’oppose au ludus des jeux respectant des
conventions « arbitraires » bien définies.
Les travaux de Caillois permettent de structurer le domaine au sens large car ils reposent sur des
exemples issus d’époques et civilisations variées. Ils constituent une référence : le cadre de
description qu’ils définissent, basé sur l’étude de « l’attitude du joueur » est toujours valide et
applicable aujourd’hui.
Une approche multifacettes : le système ESAR
En 1982, dans sa thèse de doctorat en psychopédagogie, Garon propose un système d’analyse
et de classement des jeux et des jouets appelé le système ESAR. Basé sur une analyse
psychologique du jeu, ce système vise à répondre au besoin des ludothèques quant à la
classification de leurs collections de jeux et jouets.
Dans sa première définition datant de 1982, le système ESAR fait apparaître quatre facettes du
jeu (facettes A à D) se rapportant aux grandes formes d’activités ludiques définies par Piaget
(1945) (facette A), aux dimensions cognitives de l’activité (facette B), à ses dimensions
fonctionnelles (facette C) ainsi qu’aux dimensions sociales de l’individu joueur (facette D). Ce
système a ensuite été complété par d’autres travaux : ceux de Filion (1993 in Garon et al. 2002),
psychopédagogue, qui a étudié les habiletés langagières mises en œuvre dans les jeux (facette
E) ; et les travaux de Doucet (1987) qui s’est intéressée à la mise en relation du jeu avec les
conduites affectives chez les enfants (facette F).
23
En 2002, certains principes d’organisation du système ESAR (Garon et al. 2002) ont été revus ou
mis à jour d’après les retours d’expérience issus de son utilisation par les professionnels dans les
ludothèques, mais également afin de prendre en compte des nouveaux types de jeux, et les
évolutions technologiques qui conduisent au développement de ce que Garon nomme les jeux
virtuels. Ainsi, des descripteurs ont été supprimés ou ajoutés au sein des différentes facettes du
système ESAR. Par ailleurs, dans cette nouvelle version, Garon présente le système ESAR non
plus comme un simple outil de classification, mais comme une méthodologie organisationnelle
complète permettant la gestion d’ensemble d’une ludothèque.
La nouvelle version du système ESAR (Garon 2002) propose ainsi six facettes composées de
deux niveaux de descripteurs. Des descripteurs principaux définissent des catégories générales
au sein des facettes (cf. tableau 1) et regroupent une série de descripteurs secondaires.
Facettes Descripteurs principaux
Facette A : Formes de l’activité Jeu d’Exercice, Jeu Symbolique, Jeu d’Assemblage, Jeu de Règles
Facette B : Conduitescognitives
Conduite sensori-motrice, Conduite représentative, Conduite intuitive,Conduite opératoire concrète, Conduite opératoire formelle
Facette C : Habiletésfonctionnelles
Exploration, Reproduction, Compétence, Performance
Facette D : Caractéristiquessociales
Activité individuelle, Activité associative, Activité compétitive, Activitécoopérative
Facette E : Habiletéslangagières
Langage réceptif oral, Langage productif oral, Langage réceptif écrit,Langage productif écrit
Facette F : Manifestationsémotionnelles
Confiance, Autonomie, Initiative, Travail, Identité
Tableau 1 - Les six facettes du système ESAR et leurs descripteurs principaux (d’après Garon et al. 2002)
Les descripteurs de la première facette (facette A) correspondent aux grandes formes de l’activité
ludique telles qu’elles se succèdent au cours du développement de l’enfant (Piaget 1945). La
facette A classifie ces types de jeux selon quatre descripteurs principaux qui ont donné son nom
au système ESAR : jeu d’Exercice, jeu Symbolique, jeu d’Assemblage et jeu de Règles.
Pour les autres facettes, les descripteurs correspondent à des concepts psychopédagogiques.
La facette B analyse le jeu sous l’angle des conduites cognitives. Les descripteurs de cette
facette sont liés aux principaux niveaux de complexité mentale mis en jeu dans l’activité. La
facette C concerne les habiletés fonctionnelles mises en œuvre dans les jeux. La facette D
présente les types d’activités sociales mises en place dans les jeux. La facette E répertorie les
habiletés langagières sollicitées dans les jeux. La facette F s’intéresse aux manifestations
émotionnelles induites par les jeux et propose un répertoire des conduites affectives.
Même si le système ESAR est orienté vers les jeux destinés aux enfants, le principe de définition
de critères fondés sur des dimensions cognitives, fonctionnelles, sociales, langagières et
affectives est intéressant : ces dimensions ont un sens et un rôle à prendre en compte dans un
contexte d’utilisation du jeu à des fins d’apprentissage.
24
2.2.2. Classifications de jeux vidéo
Avec les avancées technologiques, les jeux évoluent et de nombreux travaux s’intéressent aux
formes spécifiques constituant l’univers du jeu vidéo. Nous présentons ici quelques travaux
sélectionnés afin de fournir des points de vue correspondant à différentes périodes (de 1982 pour
la classification la plus ancienne, à 2010 pour les travaux les plus récents) et à deux cultures
différentes (américaine et française). Ces travaux sur les jeux vidéo émanent pour la plupart de
professionnels du secteur, à l’exception de ceux menés par Alvarez et Djaouti (2010) dans un
contexte de recherche universitaire.
Crawford et le Computer Game Design (1982)
Crawford, concepteur de jeux vidéos dans les années 1980-1990, est considéré comme une
référence dans le domaine du game design, notamment à travers son ouvrage intitulé The Art of
Computer Game Design publié en 1982. Il y caractérise le jeu vidéo comme un système fermé
qui représente de manière subjective une partie de la réalité.
Dans cet ouvrage, Crawford (1982) propose notamment l’une des premières taxonomies de jeux
vidéo qui poursuit un objectif commun au nôtre : guider la conception. Cette taxonomie distingue
deux grandes catégories relatives au type d’habileté mis en œuvre dans le jeu :
les « skill-and-actions games », jeux d’action et d’adresse basés sur des compétences
motrices et sensorielles. Ces jeux sont répartis en différentes sous-catégories :
o les jeux de combats ;
o les jeux de labyrinthe ;
o les jeux de sport calqués sur des sports populaires ;
o les jeux de raquettes ;
o les jeux de course ;
o les jeux divers qui ne trouvent pas leur place dans les catégories précédentes.
les « strategy games », jeux de stratégie mettant principalement en œuvre des
compétences cognitives. Dans cette catégorie on distingue notamment :
o les jeux d’aventure dans lesquels un aventurier doit parcourir un monde complexe
afin de remplir l’objectif qui lui a été assigné ;
o les jeux de rôle fantastiques dit Donjons & Dragons (D&D) qui mettent en scène
exploration, coopération et conflits dans un univers de châteaux, dragons,
sorciers et nains issus des contes de fées ;
o les « wargames » ou jeux de stratégie militaire ;
o les jeux de hasard ;
o les jeux éducatifs.
25
Le premier niveau de catégorisation de la taxonomie de Crawford apparaît homogène et
distingue deux grandes catégories de jeux reposant sur les compétences mises en œuvre. Les
sous-catégories, quant à elles, font appel à des critères très hétérogènes comme la référence à
des activités réelles pour les jeux de sport ou la référence à l’usage d’un artefact central comme
dans les jeux de raquette.
Jolivalt : l’éclectisme des jeux vidéo (1994)
Jolivalt, auteur français spécialisé dans les domaines de la bureautique et de l’informatique,
utilise dans son livre de 1994 une classification des jeux vidéo afin de mettre en évidence leur
éclectisme qu’il juge prometteur. La classification présentée fait apparaître six grandes catégories
de jeux, ou « thèmes », non exclusives dans le sens où plusieurs d’entre elles peuvent être
présentes au sein d’un même jeu :
les jeux d’action qui concernent la gestion d’éléments en mouvement et font appel aux
réflexes :
o jeux de tirs ;
o jeux de plateformes ;
o jeux de combat ;
o jeux d’inertie ;
o combats spatiaux ;
o robots ;
les jeux d’aventure dont la principale caractéristique est d’être construits sur un scénario
articulé suivant une arborescence. Ils appartiennent à différents genres tels que l’enquête
policière, l’espionnage, la science fiction ou la saga médiévale et sont soit des jeux en
mode texte, soit des jeux en mode graphique ;
les jeux de rôles décrits comme une version informatisée des parties de jeu de rôle qui se
déroulent autour d’une table, animées par un maître de jeu ;
les jeux de réflexion tels que les échecs, les jeux de société, les apparentements, les
mécanismes, les labyrinthes ;
les simulations qui constituent une reproduction de la réalité basée sur un modèle
mathématique ou physique. On y distingue :
o les simulations techniques qui reproduisent le comportement d’un mécanisme
(simulation de vol, simulation automobile, simulation sportive, etc.) ;
o les simulations économiques ;
o les simulations écologiques.
les jeux de stratégie décrits comme une adaptation informatisée des jeux de guerre
utilisés par les états majors ou des jeux de plateaux de type « wargames ».
26
L’identification de ces catégories repose sur des critères très hétérogènes et donc difficilement
utilisables : parfois elle prend en compte les compétences mises en œuvre (par exemple pour les
jeux d'action), parfois elle se base sur la structure du jeu (par exemple pour les jeux d'aventure),
voire elle se fonde sur des analogies avec des versions non informatisées des jeux. Le travail de
Jolivalt ne propose pas de réelles catégories discriminantes mais il met en avant des
caractéristiques descriptives d’un jeu.
Les frères Le Diberder : une cartographie du domaine (1998)
Les frères Le Diberder sont considérés comme des pionniers dans la mise à disposition des
technologies immersives auprès du grand public (cf. Le Deuxième Monde, une communauté
virtuelle francophone ouverte de 1997 à 2001). De leur intérêt pour le domaine des jeux vidéo est
également né un ouvrage (Le Diberder 1998) où la classification présentée vise à donner une
bonne vision d’ensemble du secteur du jeu vidéo et à orienter les utilisateurs dans leurs choix.
Cette classification est issue d’un travail de compilation des principales tentatives de classement
de l’époque (notamment les nomenclatures utilisées par les principaux vendeurs de jeux vidéo et
les magazines spécialisés) et d’un test de plus de 1500 jeux. Fondée sur l’histoire de la
constitution du secteur des jeux vidéo, cette classification, construite comme une cartographie du
domaine, distingue :
les jeux de réflexion, catégorie qui regroupe essentiellement des jeux préalablement
existants ayant été transposés sur ordinateur ou console de jeu. Elle se décline en quatre
sous-catégories : jeux de stratégie, jeux de société, jeux d’aventures et jeux de rôles ;
les jeux d’arcade ou d’action, jeux ayant la particularité d’être simples et courts et de
nécessiter un faible apprentissage de règles. Cette catégorie regroupe les jeux de
réflexe, les jeux de tirs (shoot them up), les jeux de combats (beat them all), les jeux de
sport, d’adresse ou de vitesse (qui se déroulent dans un contexte réaliste contrairement
aux jeux de réflexe) et les jeux de plates-formes ;
les simulations, catégorie qui distingue les systèmes complexes, les simulations de sport,
les simulations de transports civils ou de territoires, les simulateurs de véhicules
militaires.
Les frères le Diberder soulignent le fait que de plus en plus de jeux sont hybrides et
appartiennent à plusieurs catégories. De plus, cette classification étant destinée à constituer une
cartographie d’un secteur en perpétuelle évolution, ils mettent en garde sur le fait qu’elle n’est ni
parfaite ni stable.
La classification des frères Le Diberder est basée sur l’évolution historique du domaine, elle ne
propose par conséquent pas une structuration pérenne. Les critères de classification ne sont pas
homogènes et s’avèrent difficilement utilisables. Par exemple, la première catégorie mêle deux
critères de nature différente : le type de compétence mise en jeu d’une part, et la préexistence
d’un jeu sous une forme non numérique d’autre part.
27
Prensky : une classification des jeux vidéo (2001)
Prensky, consultant et concepteur spécialisé dans le domaine de l’apprentissage et des
nouvelles technologies est l’auteur de plusieurs ouvrages. Il est reconnu comme l’inventeur de
l’expression « digital native » désignant les personnes nées à partir de la fin des années 1980,
période où les technologies numériques font partie du quotidien dès le plus jeune âge. Prensky
s’est intéressé à la génération des digital natives et à leur façon d’appréhender les technologies
numériques, considérant que c’est une particularité à prendre en compte lors de la conception de
dispositifs de formation qui leurs sont destinés.
Dans son livre consacré au «Digital Game-Based Learning » (2001), au sein d’un chapitre qui
vise à mieux cerner ce qu’est le jeu vidéo, Prensky s’appuie sur une classification courante axée
sur le « genre ». Cette classification distingue huit genres :
les jeux d’action (jeux d’arcades ou jeux sur consoles tels que les jeux de plateforme, les
courses de voiture, etc.),
les jeux d’aventure où il faut découvrir un monde, ramasser des objets et résoudre des
énigmes,
les jeux de combat où deux personnages s’affrontent jusqu’à ce que l’un d’eux ne se
relève pas,
les jeux de réflexion où des problèmes ou énigmes doivent être résolus,
les jeux de rôles où le joueur incarne un personnage qui doit accomplir une quête, la
plupart du temps dans un monde médiéval,
les jeux de simulation où il s’agit de piloter des avions, de conduire des véhicules, de bâtir
un monde ou de gérer une entreprise,
les jeux de sport qui peuvent être rapprochés de jeux d’action avec la particularité que
l’on y dirige généralement les actions de plusieurs protagonistes,
les jeux de stratégie où il s’agit de gérer des entités complexes et d’une taille plutôt
importante telle qu’une armée ou une civilisation entière.
Bien que la catégorisation par « genres » soit couramment utilisée dans le secteur des jeux
vidéo, notamment auprès du grand public, elle ne repose pas sur des critères homogènes :
action, aventure, simulation, sport, combat, n’ont pas de réel dénominateur commun. A nouveau,
si ce manque d’homogénéité rend les catégories peu discriminantes et donc difficilement
utilisables dans une optique de classification, elles offrent un panorama intéressant de la diversité
des caractéristiques associées aux jeux vidéo.
Alvarez et Djaouti : des briques et un système GPS pour la description et la classification
des jeux vidéos (2007 et 2010)
Alvarez, chercheur en sciences de l’information et de la communication, a cherché à comprendre
ce qu’est un jeu vidéo en essayant de décrire cet objet d’un point de vue formel à travers une
28
classification indépendante des évolutions technologiques. Ce travail a pour objectif final de
déterminer les spécificités d’un serious game par rapport à un jeu vidéo classique. (Alvarez
2007). Le concept de serious game désigne pour cet auteur :
« Une application informatique dont l’intention initiale est de combiner avec cohérence, àla fois des aspects sérieux (serious), tels de manière non exhaustive et non exclusive,l’enseignement, l’apprentissage, la communication ou encore l’information, avec desressorts ludiques issus du jeu vidéo (game). » (Alvarez & Djaouti 2010).
Alvarez s’appuie sur deux définitions du jeu vidéo pour délimiter le périmètre de son objet
d’étude. Tout d’abord la définition de Zyda (2005) pour qui :
« le jeu vidéo est un défi cérébral, joué avec un ordinateur selon des règles spécifiquesdédiées à l’amusement, à la reconstitution simulée, ou pour gagner dans le cadre d’unenjeu ».
Ensuite la définition de Salen et Zimmerman (2004) selon lesquels :
« un jeu est un système dans lequel les joueurs s’engagent dans un conflit artificiel, définipar des règles, il en résulte un résultat quantifiable. »
A partir de ces définitions, Alvarez a déterminé un corpus de 588 jeux vidéo qui constituent la
base de son étude. Les jeux vidéo retenus dans ce corpus répondent aux conditions suivantes :
jeux individuels, sur ordinateur, possédant une interface de sortie sonore et visuelle. Les jeux de
simulation considérés comme des « jouets vidéo » sans but du jeu précis sont exclus de l’étude.
Alvarez adopte une approche transversale pour cerner le jeu vidéo. Il s’intéresse donc aux
systèmes culturel, pragmatique et formel qui entourent son objet d’étude. C’est l’étude du
système formel qui amène Alvarez à analyser le gameplay des jeux vidéo, selon le sens donné à
cette expression par Portugal8 (2006 in Alvarez 2007), c’est-à-dire comme une composante
correspondant aux modes de commande et aux règles gérant le jeu vidéo : règles du jeu,
contraintes et libertés fixées au joueur, objectifs globaux et locaux, structures temporelles,
spatiales et dramatiques.
Sur le corpus de jeux délimité par Alvarez, un examen approfondi des règles du jeu a été mené à
travers une indexation dans une base de données. L’analyse de ce corpus aboutit ainsi à la
définition d’une classification des jeux à travers l’identification de briques réparties en deux
catégories :
les briques game relatives aux objectifs globaux ou locaux du jeu. Elles sont au nombre
de quatre : Avoid = éviter ; Destroy = détruire ; Create = créer ; Match = faire
correspondre ;
les briques play représentant les moyens pour atteindre ces objectifs. Elles sont au
nombre de cinq : Shoot = tirer ; Manage = gérer ; Moove = bouger, se déplacer ;
Randomize = action aléatoire ; Answer = répondre ;
8 Portugal, J.N. (2006) intervention à la 2e édition du Serious Games Summit Europe, Lyon
29
Suite à ces travaux, le système de caractérisation GPS (Gameplay Purpose Scope) a été
développé. Ce système de classification est proposé sur un site Internet9 pour être utilisé dans le
but de constituer collaborativement un répertoire de jeux commun et partagé. Le système GPS
reprend l’analyse formelle du jeu issue de la définition des briques Gameplay (aspect formel)
complétée par deux autres aspects : le Purpose (aspect culturel, intention de l’auteur) et le Scope
(aspect pragmatique, utilisation du jeu).
En pratique, Alvarez (2007) signale que l’identification des briques gameplay dans un jeu s’avère
assez subjective, limitant ainsi leur efficacité pour une description homogénéisée de jeux. Par
contre, la méthodologie du système GPS est à retenir en ce qu’elle offre une présentation des
aspects formels du jeu, des intentions du concepteur et d’informations sur l’utilisation du jeu.
Cette description est à rapprocher du cadre de Klabbers (2008) (cf. § 2.2.5) distinguant les
spécifications générales du jeu (notamment les intentions sous-jacentes), ses aspects
syntaxiques (sa structure) et pragmatiques (informations liées à son usage).
2.2.3. Classification de jeux pour la formation professionnelle
En raison de notre contexte de travail, nous nous intéressons ici à des travaux menés sur les
jeux destinés à la formation professionnelle d’adultes. Dans ce domaine, peu de travaux
scientifiques proposent une classification, c’est pourquoi nous nous appuyons sur les travaux de
Thiagarajan alias Thiagi, un praticien reconnu dans le domaine de la formation active basée sur
le jeu, s’intéressant principalement aux sessions de formation conduites en présentiel.
Thiagi est l’auteur de nombreux livres et articles traitant notamment de l’un des concepts dont il
est le créateur : les « jeux-cadres » (Thiagarajan 2004), visant à définir des modèles de jeux pour
la formation professionnelle :
« Le concept de jeu-cadre , au départ, est de considérer un jeu comme une structure videpouvant être remplie de différents contenus, permettant ainsi de l’adapter à de trèsnombreuses circonstances d’apprentissage, de réflexion, de recherche d’idées, desimulation, etc. » (Hourst & Thiagarajan 2007)
Dans l’ouvrage co-écrit par Hourst et Thiagi (Hourst & Thiagarajan 2007), la présentation des
« jeux-cadres » est organisée autour d’une classification basée sur leur emploi : jeux pour les
conférences, jeux pour les débriefings, jeux pour les évaluations, jeux pour les réunions, jeux
pour lire un document, etc.
Sur le site Web de Thiagi10, qui propose un grand nombre de jeux-cadres, un autre critère de
classification est également utilisé : les jeux-cadres y sont caractérisés selon le type de support
ou le type d’activité qu’ils mettent en œuvre. On y distingue ainsi les jeux de rôle, les jeux de
cartes, les jeux de réflexion, les jeux sonores, les jeux basés sur l’utilisation d’une matrice (grille),
etc.
9 www.gameclassification.com10 http://www.thiagi.com/
30
Ce travail sur les jeux-cadres utilisés en formation professionnelle s’appuie sur des applications
concrètes du terrain et possède une finalité pragmatique : il est destiné à guider l’utilisation des
jeux-cadres par des formateurs. Les classifications utilisées par Thiagi ne sont pas entièrement
homogènes. Même si la première classification présentée repose a priori sur un critère unique, le
type d’emploi des jeux-cadres, il s’avère que les catégories qu’elle distingue se rapportent soit à
des objectifs (par exemple les jeux pour le débriefing) soit à des contextes d’utilisation (par
exemple les jeux pour les réunions). De la même manière, la seconde classification utilisée ne
porte pas sur un critère unique mais effectue une distinction portant à la fois sur le support du jeu
et sur le type d’activité, critère par ailleurs peu discriminant et peu consensuel. Toutefois, ces
différentes approches de classification de jeux montrent la diversité des points d’entrée possibles
pour qualifier et étudier ce type d’activité : objectif visé, contexte d’utilisation, support utilisé, sont
autant de propriétés permettant de caractériser un jeu.
2.2.4. Classifications de jeux informatiques à finalités sérieuses
Pour compléter notre étude de classifications de jeu existantes et parce que notre contexte
d’application est caractérisé par le recours aux technologies numériques, nous nous intéressons
ici aux jeux informatiques possédant des finalités sérieuses : au sens large tout d’abord avec les
travaux de Sawyer (2008) sur les serious games, puis des applications plus spécifiquement
destinées à l’apprentissage avec les travaux de Prensky (2001) sur le game based learning.
Sawyer : une classification des serious games
Sawyer, consultant spécialisé dans les nouvelles technologies, et plus particulièrement les jeux
vidéos et le game design, est une figure reconnue dans le domaine du serious game. La notion
de serious game possède ici le même sens que celui retenu par Alvarez et présenté
précédemment (cf. section 2.2.2). Sawyer est fortement impliqué dans l’organisation d’initiatives
s’adressant aux professionnels, industriels et spécialistes des jeux vidéo (i.e. organisateur du
premier Serious Game Summit11 en 2004 dans le cadre de la Game Developers Conference aux
Etats-Unis ; co-fondateur de la Serious Game Initiative12).
Pour mieux appréhender le domaine des serious games, en établir un panorama et balayer
certaines idées fausses communément répandues, Sawyer (2008) a défini une taxonomie à
destination principalement des industriels. Le premier niveau de la classification présente :
les types d’usage, c’est-à-dire les objectifs sérieux visés tels que la santé, la publicité, la
formation, etc.
les domaines d’applications : gouvernement, organisations non gouvernementales,
marketing et communication, santé, défense, etc.
11 http://www.gdconf.com/conference/sgs.html12 http://www.seriousgames.org/
31
Un niveau plus détaillé propose une catégorisation spécifique pour chaque type d’usage. Par
exemple, pour les serious games destinés à la formation, la taxonomie de Sawyer propose les
critères suivants de distinction :
d’un côté le caractère formel ou informel du contexte dans lequel le serious game
s’inscrit,
d’un autre côté, le périmètre concerné : le serious game aborde-t-il une seule tâche bien
spécifique ou propose-t-il un parcours de formation complet plus global ?
enfin, le domaine de compétences visé : compétences élémentaires, bien-être et santé
des employés, orientation professionnelle, sensibilisation, compétences
communicationnelles, compétences managériales, compétences professionnelles et
techniques, etc.
Pour les serious games destinés à la santé, les critères suivants sont quant à eux proposés :
le contexte d’utilisation, le public cible : utilisation personnelle, utilisation par les
praticiens, recherche ou utilisation académique, santé publique ;
le type d’objectif visé par le jeu : prévention, thérapie, évaluation, éducation.
Les critères de classification définis par Sawyer sont spécifiques pour chaque grand type d’usage
identifié (santé, publicité, formation, etc.). Il apparaît ainsi que selon l’objectif sérieux visé, on ne
s’intéresse pas aux mêmes propriétés du jeu. Ce travail met également en évidence l’importance
d’une présentation des usages possibles d’un jeu, à travers des exemples notamment, afin de
guider le choix des clients ou concepteurs.
Prensky et le game-based learning
Dans le même ouvrage que celui cité précédemment, après s’être intéressé à une classification
des jeux vidéo, Prensky (2001) propose une catégorisation des digital learning games ou jeux
numériques pour l’apprentissage, à travers différents critères de description. Ce travail est
destiné à guider les enseignants dans l’intégration d’un jeu avec leurs contenus de formation.
Prensky présente ainsi plusieurs caractéristiques possibles sur lesquels il faut faire un
choix lorsque l’on souhaite concevoir un jeu à des fins pédagogiques :
jeux intrinsèques (dans lesquels le contenu est étroitement lié au gameplay, à la structure
du jeu, tel que le jeu de simulation Les Sims) vs. jeux extrinsèques (dans lesquels
n’importe quel type de contenu peut être intégré, tel que le jeu de questions Trivial Pursuit
où les thématiques traitées avec une même structure de jeux peuvent être très variées) ;
jeux codés en dur qui ne peuvent être adaptés ou modifiés d’une session de jeu à l’autre
vs. « moteur », « templates » ou « coquilles » qui offrent plus de flexibilité, par exemple
au niveau de la personnalisation de certaines informations auxquelles l’application fait
appel ;
jeux de réflexion vs. jeux d’action ;
32
jeux synchrones (se déroulant en temps réel) vs. jeux asynchrones (se déroulant au tour
par tour) ;
jeux à un joueur vs. jeux à deux joueurs vs. jeux multijoueurs vs. jeux massivement
multijoueurs ;
jeux en sessions vs. jeux persistants ;
jeux possédant un univers graphique réaliste basé sur des vidéos vs. jeux avec un
univers graphique moins réaliste, de type « cartoon » avec des animations ;
jeux basés sur une narration vs. jeux basés sur les réflexes.
Les éléments mis en évidence par Prensky se démarquent des aspects abordés dans les autres
classifications en ce qu’ils font apparaître des spécificités propres aux jeux pour l’apprentissage
telles que le caractère intrinsèque ou extrinsèque du jeu, c’est-à-dire le lien plus ou moins fort
entre le contenu du jeu et les principes de jeu ou gameplay. Toutefois, certaines dichotomies
définies par Prensky sont discutables. Par exemple, l’opposition entre les jeux basés sur une
narration et les jeux basés sur les réflexes relève de deux domaines différents. Un autre axe de
choix retenu par Prensky apparaît pour sa part limitatif en opposant les univers graphiques basés
sur des vidéos aux univers graphiques avec des animations de type « cartoon ». Avec l’évolution
des possibilités techniques et graphiques, ces deux catégories ne se révèlent en effet pas les
seules possibles. De plus, le caractère réaliste ne dépend pas uniquement de la ressource
technique utilisée (vidéo ou animation) : une animation peut en effet créer un univers réaliste, tout
comme une vidéo peut définir un univers peu réaliste. Là encore, même si certains critères de
description sont discutables, la catégorisation proposée par Prensky met en évidence des
caractéristiques des jeux pour l’apprentissage qu’il est intéressant de considérer et qui viennent
compléter les propriétés identifiées à travers les autres travaux étudiés.
2.2.5. Une classification transversale : la taxonomie de Klabbers
Au cours de notre recherche de travaux scientifiques proposant une classification des jeux pour
la formation, nous nous sommes intéressés plus spécifiquement à ceux menés par Klabbers
(2008) qui ont la particularité de proposer une taxonomie transversale au domaine du jeu.
Klabbers est un chercheur néerlandais en sociologie qui s’est intéressé dès les années soixante-
dix au domaine de la simulation informatique, ce qui l’a ensuite amené à s’intéresser à l’utilisation
du jeu dans la formation en entreprise. A travers l’élaboration d’une taxonomie pour classifier les
jeux et simulations, Klabbers (2008) vise la construction d’un cadre transversal capable de
décrire des jeux « traditionnels » ou des jeux vidéo, destinés au loisir ou à la formation. Klabbers
part de la définition suivante d’un jeu :
« A game is a contest (play) among adversaries (players) operating under constraints(rules) for an objective (winning, victory or payoff). »
33
Nous en proposons la traduction suivante : « un jeu est un concours (l’activité de jouer) entre des
adversaires (les joueurs) qui agissent selon des contraintes (les règles) pour atteindre un objectif
(gain, victoire ou résultat). »
Le cadre de description de Klabbers est élaboré dans le but de remplir deux principaux objectifs :
d’une part permettre de « déconstruire » les jeux existants afin d’en comprendre l’architecture et
de pouvoir les comparer ; d’autre part guider la conception de nouveaux jeux. Il est destiné aux
novices qui souhaitent découvrir le domaine, aux professionnels qui utilisent le jeu ou encore aux
chercheurs qui l’étudient.
Pour élaborer sa taxonomie, Klabbers a étudié des classifications de jeux existantes. Celles-ci se
sont révélées inadaptées pour répondre à ses objectifs car elles ne permettaient notamment pas
de décrire la structure des jeux et/ou ne prenaient pas en compte les acteurs impliqués dans le
jeu, élément incontournable pour comprendre le jeu selon Klabbers. Klabbers a donc construit
une taxonomie se démarquant des autres classifications en considérant le jeu comme un
système social (Giddens 1993 in Klabbers 2008) constitué de trois éléments :
les acteurs, c’est-à-dire les participants humains impliqués dans l’activité,
les règles définissant les interactions entre les participants, les actions possibles,
l’organisation du jeu,
les ressources disponibles et utilisables par les participants dans le jeu.
Ces éléments sont mis en lien de la manière suivante : dans un jeu, les participants (acteurs)
interagissent les uns avec les autres, en respectant des règles et en utilisant des ressources.
Klabbers considère également chaque jeu comme un langage permettant de transmettre un
message aux joueurs. C’est pourquoi son analyse des jeux utilisant les cadres de référence liés
aux systèmes sociaux est complétée par des éléments correspondant à une approche
linguistique de la théorie sémiotique des jeux (Marshev & Popov 1983 in Klabbers 2008). Chacun
des éléments du jeu en tant que système social est décrit selon les trois points de vue de
l’approche sémiotique :
la syntaxe s’intéresse à la forme du jeu, à l’agencement des éléments et aux règles du
jeu ;
la sémantique présente l’interprétation et la signification des éléments constitutifs du jeu ;
la pragmatique se rapporte aux informations relatives à l’utilisation et à la mise en œuvre
du jeu.
L’approche assimilant les jeux à des systèmes sociaux associée à l’approche linguistique va ainsi
permettre d’élaborer une taxonomie et de construire un cadre précis pour décrire les jeux (cf.
tableau 2).
Afin d’utiliser ce cadre à des fins de conception, Klabbers y ajoute les éléments de spécifications
suivants à définir par le concepteur :
34
qui est le client commanditaire du jeu ?
quelle est l’intention visée avec le jeu ?
quel est le sujet traité ?
quel est le public cible ?
quel est le contexte d’utilisation ?
Architecture of games
Designspecifications
1. Client2. Purpose3. Subject matter4. Intended audience5. Context of use
Social system Syntax
Form
Semantics
Content
Pragmatics
Usage
Actors Number of players
Number of game placesof actors
Roles
Composition of roles insocial organization
Learning context: typesof steering
Learning goals: kinds ofknowing
Rules Game manipulation set :preparatory rules; startand stop rules;
Rigid-rules; principle-based rules; free-form.
Initial game positions;Allowable moves; Finalgame positions
Relationships betweenroles, communicationrules, procedures
Evaluation of places forresource allocation, andrelative position withinteam of players
Team of gamefacilitators
Format & instructions forrigid-rule vs. free-form
Assessment functions
Resources Game space ; Set ofgame positions; Set ofpieces
Positioning of pieces:meaning of cultural,socio-economic situation
Set of occupied availablepositions
Materials:
Equipment
Paraphernalia
Facilities
Tableau 2 - Cadre de description de l'architecture des jeux (Klabbers 2008)
Grâce au cadre de description qu’il a ainsi défini, Klabbers (2003) distingue plusieurs catégories
d’activités appartenant aux domaines du jeu et/ou de la simulation :
d’une part les « simulations pures » dans lesquelles aucun acteur humain n’est impliqué
et où la présence de règles est plus ou moins forte (ex. simulation de processus,
simulation de systèmes d’information, etc.),
d’autre part les activités sans ressources explicitement définies, qui impliquent seulement
des acteurs et des règles, telles que le théâtre (où les règles sont plutôt rigides) ou le jeu
de rôles (où les règles sont plus souples),
enfin les jeux à proprement parler où les acteurs, les règles et les ressources sont
clairement définis.
35
La taxonomie de Klabbers poursuit des objectifs semblables aux nôtres : elle vise notamment à
révéler la structure des jeux existants et à guider la conception de nouveaux jeux, quels que
soient leur support ou leur objectif, numériques ou non, à visée sérieuse ou non. Le cadre de
description défini grâce à l’assimilation des jeux à des systèmes sociaux mettant en jeu des
acteurs, des règles et des ressources, semble constituer un outil efficace, reposant sur des
critères homogènes, pour mieux catégoriser la diversité des activités associées au jeu ou à la
simulation.
2.2.6. Classifications étudiées : analyse
Les classifications de jeux présentées reflètent la diversité des approches liées à l’étude des
jeux. Dans le tableau 3 nous proposons une synthèse des principales caractéristiques identifiées.
Nous mettons ainsi en évidence la variété des profils des auteurs qui se sont intéressés à
classifier les jeux, notamment des chercheurs ou praticiens dans les domaines des sciences de
l’information et de la communication, de la psychopédagogie, de la sociologie, de la formation ou
encore des nouvelles technologies et de l’informatique.
Les travaux étudiés s’échelonnent sur une longue période, de 1958 pour le plus ancien à 2008
pour les plus récents. L’objet d’étude a évolué avec le temps : à l’époque de Caillois (1958) et
lors de la mise au point de la première version du système ESAR (Garon 1985), les jeux
informatisés ne faisaient pas partie du périmètre d’étude. On remarque d’ailleurs que certains
auteurs se sont par la suite spécifiquement focalisés sur les jeux informatisés ou jeux vidéo. Un
autre facteur différenciateur de l’objet étudié (le jeu) est sa finalité : la plupart s’intéressent à sa
finalité première, le divertissement, alors que certains, et c’est un phénomène plus récent,
s’intéressent à son articulation avec des intentions sérieuses, telles que la formation.
36
Année
1958
1982
-20
02
1982
1994
1998
2001
2007
2007
2008
2001
2008
Auteur
Cai
llois
Gar
on-F
ilion
-Dou
cet
Cra
wfo
rd
Joliv
alt
Le D
iber
der
Pre
nsky
(1)
Alv
arez
- D
jaou
ti
Thia
gara
jan
- Hou
rst
Saw
yer
Pre
nsky
(2)
Kla
bber
s
Prof
il au
teur
Che
rche
ur Sciences de l’information et de la communication
Psychopédagogie
Sociologie
Pra
ticie
n Formation - éducation
Informatique – Nouvelles technol. – jeux vidéo
Obj
ectif
Fournir une vision globale du domaine du jeu, diffuserdes connaissances
Guider le choix d’un jeu par des prescripteurs ou desjoueurs pour un but ou un public spécifique
Décrire/ analyser / comprendre un jeu
Guider la conception d’un jeu
Form
edu
jeu
étud
ié Jeux non-informatisés
Jeux informatisés
Fina
lité
du je
uét
udié Jeu destiné au divertissement
Jeu visant une intention sérieuse(ex. la formation)
Les
critè
res
de la
cla
ssifi
catio
n pe
rmet
tent
Une
caté
goris
atio
nde
s je
ux s
elon
Leur caractéristique fondamentale quiengage le joueur
Le type de jeu ou genre ~ ~ ~ ~ ~
Les compétences mises en œuvre ~ ~ ~ ~ ~
Une
des
crip
tion
fine
des
jeux
Sel
on u
neap
proc
he
Formelle ou syntaxique = Quoi ?(structure, organisation…)
Culturelle ou sémantique = Pourquoi ? ~
Pragmatique = Comment ?(conception et utilisation) ~
Por
tant
sur Les acteurs
Les règles
Les ressources ~
Tableau 3 - Classifications de jeux étudiées : synthèse
(Le symbole ~ indique que l’utilisation du critère n’est pas homogène dans la classification concernée. Le symbole indiqueles aspects alimentant plus particulièrement notre recherche)
37
A travers ces travaux de classification, les auteurs poursuivent différents objectifs. Classifier les
jeux peut viser à :
fournir une vision globale du domaine du jeu, circonscrit à un périmètre défini (jeux non-
informatisés ou informatisés, utilisés pour le seul divertissement ou à des fins sérieuses)
ou diffuser des connaissances sur le jeu ;
décrire, analyser, comprendre un jeu de manière fine ;
guider un prescripteur (formateur, enseignant, parent…) ou un utilisateur (joueur) dans le
choix d’un jeu correspondant à des besoins spécifiques (contexte d’utilisation, but
recherché, public cible) ;
guider la conception d’un jeu.
Selon ces différents objectifs, on peut donc distinguer deux grands types de classification :
Les classifications proposant une « simple » catégorisation des jeux selon des critères
tels que la caractéristique fondamentale du jeu poussant le joueur à s’engager dans
l’activité (Caillois 1958), le type ou genre de jeu (critère le plus répandu mais qui manque
généralement d’homogénéité, à l’exception des types de jeux distingués dans le système
ESAR d’après les travaux de Piaget) ou le type de compétence mis en œuvre dans le jeu.
Les classifications permettant de décrire de manière plus fine les jeux selon différents
points de vue. Le point de vue formel ou syntaxique s’intéresse à la structure du jeu, il
répond ainsi à la question « Quoi ? ». Le point de vue culturel ou sémantique s’intéresse
au contenu du jeu et plus particulièrement à son sens, aux intentions qui y sont associées
et répond ainsi à la question « Pour quoi ? ». Le point de vue pragmatique quant à lui se
focalise sur les éléments liés à l’utilisation du jeu, à sa mise en œuvre et répond à la
question « Comment ? ».
En utilisant l’un ou plusieurs de ces points de vue, les auteurs s’intéressent aux acteurs
du jeu, à ses règles ou à son gameplay, aux ressources utilisées dans le jeu ou encore
parfois aux éléments qui ont guidé la conception du jeu (tels que le commanditaire du
projet, le contexte d’utilisation, le public cible, etc.).
38
Synthèse : classifications de jeux
Comme indiqué précédemment, notre étude de ces classifications vise à identifier
des critères de description afin :
d’une part, de comprendre et analyser les jeux,
d’autre part, de guider la conception de jeux pour la formation.
Les différents points de vue adoptés pour catégoriser les jeux alimentent notre
réflexion et nous sensibilisent au fait qu’il n’existe pas une unique approche pour
analyser et comprendre un jeu : l’axe d’étude envisagé peut se focaliser sur les
motifs d’engagement des participants, les compétences mises en œuvre ou le
type de jeu (nous notons que ce dernier point d’entrée est la plupart du temps peu
consensuel et homogène). Parmi les travaux étudiés, nous retenons également
que ceux possédant des objectifs similaires aux nôtres (Alvarez 2007, Thiagarajan
& Hourst 2007, Prensky 2001, Klabbers 2008) proposent pour la plupart une
description fine des jeux et de leurs différents composants (acteurs, règles,
ressources, etc.) et à nouveau selon différents points de vue (structure,
signification, usage).
Dans un contexte de formation, nous notons qu’il serait intéressant d’approfondir
le lien éventuel entre les compétences mises en œuvre dans les jeux (destinés au
divertissement) et les composants du jeu, notamment les aspects relatifs aux
règles : cette analyse pourrait permettre d’identifier les associations les plus
fréquentes et alimenter un système d’assistance à la conception. Cette approche
n’a pas été approfondie à ce stade de notre recherche mais fait l’objet de
perspectives de prolongement de nos travaux.
Dans nos travaux, cette étude des classifications de jeu a alimenté l’élaboration
d’une grille de description traduisant les approches identifiées et regroupant
l’ensemble des critères que nous avons retenus en lien avec notre objectif et notre
contexte de recherche : une présentation détaillée de cette grille de description de
jeux pour la formation est proposée dans la section 8.2.
39
Chapitre 3. JEU ET FORMATION : UNE ASSOCIATION SOURCE DEPARADOXE ET D’INTERET
Dans ce chapitre, nous cherchons à identifier les spécificités liées à l’utilisation du jeu dans un
contexte de formation en insistant sur le paradoxe qui y est associé. A travers la mise en
perspective du jeu avec les différentes théories éducatives nous cherchons à mettre en évidence
les raisons pour lesquelles le domaine de la formation s’intéresse à son utilisation.
Nous établissons également un panorama de solutions mises en œuvre pour la formation
d’adultes par le jeu. Après le constat d’un manque d’opérationnalité des classifications de jeu
étudiées, nous choisissons d’organiser la présentation des différentes solutions identifiées selon
une logique liée au contexte d’application spécifique de nos travaux, en nous intéressant à la
place et à la nature de la simulation présente dans le jeu.
Nous consacrons ensuite une section spécifique au débriefing, activité qui s’avère primordiale
dans un dispositif de formation utilisant le jeu et plus spécifiquement le jeu de rôle.
3.1. Naissance d’un paradoxeDès l’Antiquité, le jeu a été associé à l’apprentissage chez les enfants. Dans l’approche éducative
définie par Aristote, il est indiqué que jusqu’à l’âge de cinq ans, avant l’instruction prodiguée par
un enseignant, les enfants se formeront par des jeux (Hummel 1993). Socrate et Platon
conseillaient eux-aussi l’utilisation des jeux pour instruire les enfants. Plus tard, Piaget (1945)
s’est intéressé à étudier le jeu sous l’angle de la psychopédagogie, mettant en évidence sa place
essentielle dans le développement de l’enfant. Piaget considère que « le jeu est un levier
d’apprentissage chez l’enfant » (Piaget 1935 in Brougère 2005).
Malgré ces approches considérant de manière évidente le jeu comme source d’apprentissage
pour les enfants, se pose le problème de son utilisation dans un contexte scolaire. Par nature, le
jeu est autotélique (Kellner 2007), c’est-à-dire qu’il comporte en lui-même sa propre finalité « le
jeu n’a pas ce que nous pourrions appeler une valeur instrumentale. Il ne sert à rien sinon à jouer
et à y prendre plaisir ». On joue pour le jeu lui-même, pour le plaisir que procure l’activité, sans
autres finalités. J.M. Baldwin (1897) oppose ainsi le jeu qui n’a pas de but, au travail qui en a
toujours un. Dans le jeu, le joueur se retrouve plongé dans un univers spécifique, caractérisé par
un espace et un temps qui le distinguent du monde réel : c’est la notion de « cercle magique »
définie par Huizinga (1938).
Dès l’instant où on lui attribue des finalités autres que lui-même, le jeu devient hétérotélique. Le
« cercle magique » est rompu, l’univers du jeu n’étant plus complètement distinct du monde réel
puisque les finalités du jeu lui sont au contraire directement associées à la réalité. Le jeu utilisé à
des fins sérieuses perd ainsi certaines de ces caractéristiques fondamentales telles que la liberté
ou la gratuité selon la définition proposée par Caillois. Pour les auteurs qui définissent des
40
critères en vue de délimiter des frontières entre ce qui est jeu et ce qui ne l’est pas, dès lors que
l’on utilise le jeu à des fins sérieuses on ne peut donc plus parler de jeu.
Brougère (2005) souligne lui aussi que l’utilisation du jeu dans un contexte d’enseignement va
altérer certaines de ses caractéristiques (cf. section 2.1 pour la liste complète de caractéristiques
définies par Brougère). Par exemple, le caractère incertain de l’activité est supprimé lorsqu’un but
précis est fixé au jeu. La « frivolité » du jeu va également être atténuée avec la présence
d’objectifs opérationnels en termes d’apprentissage. La libre décision de prendre part au jeu est
elle aussi remise en question puisque le jeu est imposé par l’enseignant. Les seules
caractéristiques qui semblent être préservées sont le second degré et les règles du jeu. Brougère
refuse de fixer des barrières à la définition de l’activité de jeu et souhaite de ce fait « proposer
des points de repère afin de disposer de caractéristiques du jeu, en concédant qu’elles puissent
être plus ou moins présentes. » (Brougère 2005, p.42). De la même manière qu’Henriot (1989),
Brougère distingue ainsi la situation (le jeu) et l’attitude ludique (l’attitude du joueur). Cette
approche lui permet de ne pas exclure du périmètre du jeu les jeux utilisés à des fins
pédagogiques, mais de considérer qu’une situation peut être caractérisée comme plus ou moins
proche du jeu selon la présence des caractéristiques retenues.
En adoptant nous-mêmes cette démarche, nous souhaitons identifier les caractéristiques qui
justifient l’intérêt de l’utilisation du jeu à des fins d’apprentissage : en quoi le jeu est-il intéressant
pour l’apprentissage ? Une réponse est, par exemple, que le jeu est considéré comme un moyen
de mettre en place un apprentissage actif. Même si dans le cas d’un jeu destiné à l’apprentissage
certains auteurs considèrent que l’on n’est plus vraiment dans un jeu dans le sens où l’on en perd
le caractère autotélique, certaines des caractéristiques ludiques subsistent et sont à relier à des
bénéfices du côté de l’apprentissage. Notamment, les règles et le second degré sont des
caractéristiques qui persistent dans un jeu hétérotélique : elles font partie des éléments
fondamentaux qui devront être mis en lien avec les théories d’apprentissage pour mieux
comprendre les vertus pédagogiques du jeu (section 3.2).
L’existence d’interrogations sur le paradoxe qui associe jeu et apprentissage, y compris lorsqu’il
s’agit du développement des enfants, permet de comprendre plus facilement en quoi la place du
jeu dans la formation des adultes est source de nombreuses réticences. Le jeu est une activité
naturellement nécessaire au développement de l’enfant mais qui serait dénaturée dès lors qu’on
la place dans un contexte sérieux et qu’on lui attribue ouvertement des objectifs pédagogiques.
Le jeu chez les adultes n’a pas la même légitimité que le jeu des enfants : on lui confère ici une
place moins naturelle car il n’est plus associé au développement cognitif ou moteur, mais le plus
souvent opposé au côté sérieux du travail. Ceci explique que faire jouer les adultes dans un but
sérieux demeure aujourd’hui l’objet de réticences, que ce soit de la part des apprenants comme
de celle des instances organisatrices (hiérarchie, etc.). Du point de vue des apprenants/joueurs
adultes, une autre problématique s’ajoute à la précédente : lorsque le jeu est utilisé pour des
enjeux de formation voire d’évaluation au sein d’une entreprise, la disparition de la frivolité
41
s’avère d’autant plus problématique. Cette situation est en effet source d’ambigüité puisque les
participants sont placés dans une activité au premier abord frivole alors que les enjeux,
notamment lorsqu’il s’agit d’évaluation de compétences professionnelles, sont eux au contraire
très importants. Cette problématique soulève des questions éthiques qu’il ne faut pas négliger
lorsque l’on s’oriente vers une utilisation du jeu en entreprise.
Plusieurs auteurs se sont penchés sur le paradoxe entre jeu et sérieux pour trouver un moyen de
dépasser les réticences évoquées et se sont interrogés sur la manière d’articuler jeu et
apprentissage. Lors d’un atelier consacré aux jeux sérieux en 2009, Brougère (2009) proposait
d’accepter ce paradoxe, notamment en jouant le jeu pour lui-même puis en procédant à un
débriefing de l’activité de jeu. C’est à travers le débriefing que les aspects liés à l’apprentissage
sont mis en œuvre. Nous reviendrons plus en détails sur la place du débriefing dans la section
3.5. Avec ces approches mettant en avant le rôle du débriefing et des autres activités
pédagogiques entourant le jeu, le jeu est essentiellement utilisé pour sa capacité à susciter
l’implication et la participation des apprenants. Cette capacité à motiver et à engager est
d’ailleurs l’un des effets du jeu auquel nous nous intéressons tout particulièrement et qui est
abordé dans le chapitre 4 et plus spécifiquement dans la section 4.5. Suivant les mêmes
principes que Brougère, certains auteurs considèrent comme bénéfique une approche consistant
à mettre en place un projet proposant de multiples activités pédagogiques et réflexives autour
d’un jeu : cette approche est désignée par certains sous l’appellation serious gaming (Jenkins et
al. 2009).
42
Synthèse : paradoxe de l’association jeu / formation
Au cours de nos recherches sur le jeu, nous avons tout d’abord été confrontés à
la difficulté de définir le jeu en raison de son caractère pluriel (le jeu désignant à la
fois un objet, une activité, une attitude, etc.). Par la suite, comme nous venons de
le détailler, nous nous sommes heurtés aux difficultés inhérentes à la définition du
jeu associé à des finalités sérieuses. La plupart des définitions proposées nous
conduiraient en effet à dire que le jeu ne peut être sérieux, qu’il ne peut servir à
apprendre. La notion de gratuité du jeu souvent mise en avant comme l’un des
éléments fondamentaux de définition du jeu s’oppose en effet à la notion
d’apprentissage. Ces éléments justifient la pertinence de l’adoption de la
démarche de Brougère dans notre contexte : arrêter de vouloir à tout prix fixer des
limites au jeu, et plutôt que d’essayer de distinguer jeu et non-jeu, s’intéresser au
« potentiel ludique » des activités, c’est-à-dire aux caractéristiques du jeu qu’elles
possèdent plus ou moins (cf. présentation section 2.1). Dans notre contexte, cela
nous oriente donc vers une étude du « potentiel ludique » des activités
pédagogiques, mais également une étude du potentiel pédagogique des activités
de jeu. Au-delà de son approche de la définition du jeu, nous retenons aussi la
position de Brougère concernant l’intégration du jeu dans l’apprentissage, que
nous associons de façon plus large à l’approche serious gaming : jouer le jeu pour
lui-même et mettre l’accent sur les apprentissages dans des activités spécifiques,
notamment le débriefing (concept détaillé dans la section 3.5).
43
3.2. Mise en perspective du jeu avec les principales théoriesd’apprentissage et méthodes pédagogiques associées
Lorsque l’on s’intéresse à l’utilisation du jeu dans un contexte de formation, il est important de
s’interroger sur les théories d’apprentissage et les méthodes pédagogiques sous-jacentes. Dans
cette partie, nous passons donc en revue les principales théories d’apprentissage qui ont été
développées à partir des grands courants de la psychologie : behaviorisme, constructivisme,
cognitivisme, socio-constructivisme. En raison des spécificités de notre champ d’application,
nous nous intéressons également à l’approche de la didactique professionnelle. Nous nous
appuyons sur des travaux qui mettent en évidence la manière dont ces théories d’apprentissage
sont mises en pratique à travers des méthodes pédagogiques, et plus spécifiquement comment
leur prise en compte se concrétise dans des jeux destinés à l’apprentissage. Pour finir, au regard
de ces différents courants théoriques sur l’apprentissage et de ces méthodes pédagogiques,
nous mettons en évidence les éléments retenus pour délimiter plus précisément le contexte de
nos travaux et guider la définition des dispositifs de formation qui font l’objet de notre étude.
3.2.1. La théorie behavioriste
Le behaviorisme est une théorie psychologique apparue au début des années 1900. Cette
approche a notamment été formalisée par Watson en 1913 dans un article considéré comme le
manifeste du behaviorisme.
L’objet d’étude des behavioristes est le comportement observable de l’individu mis en relation
avec l’environnement dans lequel il se produit. Les behavioristes voient l’individu comme une
boîte noire qui réagit à des stimuli à travers des réponses ou comportements observables.
L’apprentissage est ainsi considéré comme une modification durable d’un comportement
observable suite à un renforcement issu d’un entraînement basé sur des stimuli et des réponses.
Selon cette approche, apprendre consiste donc à associer une récompense (renforcement
positif) à une réponse spécifique. Par ailleurs, enseigner c’est ici stimuler, créer et renforcer des
comportements observables appropriés par rapport à l’objectif d’apprentissage visé. Parmi les
méthodes pédagogiques associées au courant behavioriste se trouvent les programmes
d’autoformation assistée par ordinateur, basés sur les principes de l’enseignement programmé
linéaire tel que défini par Skinner (1971) ou ramifié tel que proposé par Crowder (1963).
Egenfeldt-Nielsen (2006) s’est intéressé à mettre en perspective l’usage de jeux vidéos pour
l’éducation avec les principales théories sur l’apprentissage. Il expose ainsi que, dans les jeux
informatisés, l’approche behavioriste se traduit par la répétition, encouragée de manière
extrinsèque, par exemple par l’intermédiaire de récompenses. Avec ce genre d’approche, les
situations de jeu et les situations d’apprentissage sont généralement faiblement intégrées.
Egenfeldt-Nielsen (2006) illustre cette approche avec l’exemple d’un jeu pour l’apprentissage des
mathématiques, intitulé Math Missions Grades 3-5 : The Amazing Arcade Adventure, où les
44
joueurs gagnent de l’argent pour chaque réponse juste donnée et l’argent gagné permet
d’acheter du temps de jeu dans une salle de jeux d’arcade : dans cet exemple, la motivation est
extrinsèque, c’est-à-dire liée à une récompense externe à l’activité (cf. chapitre 4), et le jeu et
l’apprentissage ne sont pas intégrés (cf. § 5.5.2), c’est-à-dire qu’il n’y a pas de lien entre l’activité
de jeu (les jeux d’arcade) et les contenus d’apprentissage (questions de mathématique).
3.2.2. La théorie constructiviste
La théorie constructiviste de l’apprentissage a été développée en réaction au behaviorisme
auquel il est reproché de limiter l’apprentissage à l’association stimulus-réponse. L’approche
constructiviste de l’apprentissage met en avant le rôle central de l’apprenant et sa participation
active dans le processus d’apprentissage.
En France, ce sont les travaux de Piaget (1923) qui ont permis le développement d’une approche
constructiviste de l’apprentissage. L’apprentissage y est défini comme une construction active du
sens par l’apprenant, à travers une confrontation entre ses connaissances actuelles et les
nouvelles connaissances à acquérir qui amène à une réorganisation de ses schèmes internes.
L’enseignement vise donc à proposer des situations obstacles qui vont questionner les
représentations internes des apprenants et les amener à les réorganiser pour élaborer des
représentations adéquates du problème permettant d’aboutir à une solution : il s’agit de créer des
conflits cognitifs que l’apprenant devra surmonter grâce à un processus d’assimilation-
accommodation.
Aux Etats-Unis, une approche constructiviste de l’apprentissage apparaît dès les travaux de
Dewey (1938) qui prône l’apprentissage par l’action, en anglais learning by doing et met l’accent
sur les bénéfices de l’apprentissage en situation réelle.
Les principes de l’apprentissage par l’expérience développé par Kolb (Kolb & Fry 1975),
experiential learning en anglais, s’appuient sur les travaux de Dewey et Piaget. Dans son
approche, Kolb considère que l’apprentissage passe par une nécessaire réflexion sur l’action
issue de l’expérience. Le modèle developpé par Kolb & Fry (1975) repose sur quatre principes
fondamentaux qui constituent les étapes d’un processus cyclique amené à se répéter :
l’expérience concrète ;
l’observation et la réflexion sur cette expérience ;
la création de concepts abstraits basés sur cette réflexion ;
le test de ces nouveaux concepts.
Les méthodes pédagogiques associées à l’approche constructiviste sont des méthodes dites
actives, laissant une place à l’erreur. Elles correspondent en particulier aux activités
d’apprentissage par problèmes et aux études de cas. Parmi les approches basées sur le jeu, les
théories constructivistes sont notamment associées au jeu de rôle (Sandford & Francis 2006) qui
45
peut être mis en œuvre lors de formations en présentiel ou dans des environnements
informatiques plus ou moins ouverts (de la plateforme de formation à distance au dispositif de
type jeu de rôle massivement multijoueur). Associé au débriefing, le jeu de rôle pédagogique met
en œuvre les principes du modèle de l’apprentissage expérientiel défini par Kolb et Fry (1975).
Des exemples d’utilisation du jeu de rôle pédagogique sont détaillés dans la section 3.4.3.
3.2.3. La théorie cognitiviste
Le cognitivisme est un courant psychologique dont la naissance, dans les années 1950-1960, est
notamment liée à l’apparition des ordinateurs et à l’intérêt porté au traitement de l’information.
L’approche cognitiviste s’intéresse aux variables internes de l’individu pour expliquer son
comportement. Elle s’oppose au behaviorisme et rejette ainsi le concept de boîte noire en se
centrant sur la prise en compte de la manière dont l’individu construit ses représentations
internes du monde. Selon la perspective cognitiviste, l’apprentissage est vu comme un
changement dans les structures internes de l’individu : apprendre c’est traiter et emmagasiner de
nouvelles informations de façon organisée, c’est-à-dire en élaborant des stratégies cognitives et
métacognitives. Tardif (1992) a développé une conception cognitiviste de l’apprentissage en
posant les principes suivants :
l'apprentissage est un processus dynamique de construction des savoirs. Le sujet est
actif, constructif et motivé,
l'apprentissage suppose l'établissement de liens entre les nouvelles informations et celles
déjà organisées, c’est-à-dire les représentations préalables de l’apprenant,
l'apprentissage exige l'organisation incessante des connaissances,
l'apprentissage suppose la mobilisation de stratégies cognitives et métacognitives ainsi
que des savoirs disciplinaires,
l'apprentissage produit renvoie aux connaissances déclaratives, procédurales et
conditionnelles.
En se basant sur ces principes, une approche cognitiviste de l’enseignement consiste donc à
définir des situations d’apprentissage relatives au contenu à enseigner, prenant en compte les
connaissances antérieures des apprenants sur ce contenu, favorisant le développement de
stratégies cognitives et métacognitives propres au traitement du contenu. Les situations
d’apprentissage proposées doivent présenter l’information de manière structurée, hiérarchique,
déductive pour favoriser son traitement par l’apprenant.
Par ailleurs, dans l’approche cognitiviste, la motivation intrinsèque apparaît comme un concept
central. Dans la lignée des travaux de Bruner (in Paquette 2002) sur la théorie cognitiviste de
l’apprentissage, les jeux pédagogiques construits selon cette approche placent généralement
l’apprenant dans une situation de découverte ou d’investigation (Egenfeldt-Nielsen 2006). Dans
46
ce type de dispositif, le jeu et l’apprentissage sont intégrés de manière intrinsèque : les actions
effectuées dans le jeu sont directement liées aux objectifs d’apprentissage et mettent en œuvre
les aptitudes à développer. Cette approche s’appuie sur une motivation intrinsèque, c’est-à-dire
liée à l’intérêt et au plaisir procurés par l’activité elle-même, en dehors de toute récompense
extérieure. Dans le chapitre 4, nous revenons de manière plus approfondie sur la notion de
motivation, notamment en nous intéressant à son rôle dans l’apprentissage et à la manière dont
le jeu en est un vecteur.
3.2.4. La théorie socio-constructiviste
S’appuyant sur les travaux de Piaget, un nouveau courant de recherche en psychologie s’est
intéressé au rôle de l’interaction sociale sur le développement cognitif individuel. A la différence
de Piaget, les psychologues du courant socio-constructiviste considèrent le processus de
développement cognitif en lien avec les interactions humaines. Ces travaux mettent en avant le
rôle du conflit socio-cognitif dans la construction des savoirs. De la même manière que dans
l’approche constructiviste, l’apprentissage se fait suite à la confrontation de représentations
différentes d’une même situation, mais cette fois le conflit n’a pas lieu exclusivement entre les
représentations de l’apprenant et les informations issues de la situation-problème, le conflit est
aussi engendré par les représentations divergentes exprimées par des pairs confrontés à la
même situation. L’apprentissage est ici vu comme un acte collectif qui associe un aspect social
au conflit cognitif. Apprendre c’est co-construire des connaissances en confrontant ses
représentations à celles des autres.
Par ailleurs, l’une des notions-clés issues des travaux de Vygotski1(1997), qui se retrouve dans
les approches pédagogiques associées au socio-constructivisme, est le concept de zone
proximale de développement chez l’enfant. Il s’agit de la distance entre ce qu’un enfant peut
apprendre seul et ce qu’il peut apprendre avec l’aide de personnes plus expertes. Le concept de
zone proximale de développement a une influence sur le rôle de l’enseignant : cela le place dans
un rôle de guide dont le but est d’amener l’apprenant au niveau supérieur de sa zone proximale
de développement. Cette approche a été développée par Bruner (1983) notamment à travers le
concept d’étayage qui se rapporte aux actions d’assistance de l’enseignant dans ce type de
situation d’apprentissage.
Comme le souligne George (2001) à propos de l’approche socio-constructiviste,
« ces travaux ont permis de mettre en évidence l’articulation du cognitif avec le social, ensoulignant l’importance du dialogue et des expériences partagées dans la constructiondes connaissances. »
Dans une perspective socio-constructiviste, l’enseignement vise donc à organiser des situations
favorisant le dialogue et les interactions entre les apprenants dans le but de provoquer des
1 Première version publiée en anglais en 1933
47
conflits socio-cognitifs. Différents types d’interactions peuvent être envisagées : interactions entre
deux apprenants, interactions entre l’apprenant et l’enseignant, interaction entre l’apprenant et le
groupe (Lasnier 2000 in Villiot-Leclercq 2007).
Les méthodes pédagogiques associées à une approche socio-constructiviste font elles aussi
partie des méthodes de pédagogie active : approche par projet, approche par étude de cas,
approche par résolution de problème. Dans ces méthodes le caractère collectif de
l’apprentissage est particulièrement important.
3.2.5. L’approche de la didactique professionnelle
L’approche de la didactique professionnelle est née en France dans les années 1990. Elle a pour
objectif d’analyser les situations de travail afin de définir des dispositifs de formation visant le
développement de compétences professionnelles. La didactique professionnelle articule :
une vision de l’apprentissage centrée sur la prise en compte et l’analyse de l’activité
(professionnelle) ;
une approche de l’apprentissage basée sur le développement des compétences.
Cette approche développementale s’appuie sur les travaux menés par Piaget et Vygostki dans le
domaine de la psychologie (cf. sections 3.2.2 et 3.2.4). Elle en constitue une application
étendue : l’approche de la didactique professionnelle applique ces travaux au développement des
compétences professionnelles des adultes alors que ceux-ci sont initialement centrés sur le
développement des enfants (Pastré 1997).
« L’approche développementale retenue en didactique professionnelle vise à intégrer ladimension épistémologique piagétienne (l’analyse de la tâche est le pendant de l’analysedu savoir disciplinaire) avec la dimension socio-constructiviste vygotskienne (lacommunauté de pratique étant un médiateur dans l’acquisition des compétencesprofessionnelles). » (Rogalski 2004)
Selon l’approche de la didactique professionnelle, l’acquisition de compétences est indissociable
des activités dans lesquelles elles sont utilisées. En effet, d’après Pastré (2006), la théorie seule
(la construction d’un modèle cognitif) n’est pas une condition suffisante à l’acquisition d’une
compétence, la pratique (la construction d’un modèle opératif) doit y être inévitablement
associée. Selon cet auteur, un apprentissage professionnel se déroule en deux temps :
tout d’abord une phase de construction d’un modèle cognitif (le volet théorique d’une
activité, correspondant au « savoir quoi faire »),
ensuite la construction d’un modèle opératif (le volet pratique, correspondant au « savoir
comment faire ») à partir de l’activité réelle elle-même, ce modèle opératif s’articulant
avec le modèle cognitif.
48
Les méthodes pédagogiques utilisant la simulation, et plus spécialement des simulateurs1 (cf.
section 3.4.2 où nous nous intéressons aux liens entre jeu et simulation), sont souvent conçues
selon des principes retenus dans l’approche de la didactique professionnelle : l’élaboration du
cadre théorique de la didactique professionnelle s’est notamment appuyée sur l’étude de
plusieurs exemples d’usage de simulateurs pleine échelle2 pour la formation (comme par
exemple dans le cadre de la formation à la conduite de centrales nucléaires) (Pastré et al. 2006).
3.3. Jeu et principes d’apprentissageDes chercheurs se sont intéressés aux principes d’apprentissage intrinsèquement présents dans
les jeux non destinés à des fins sérieuses. Gee (2003) a notamment identifié 36 principes utilisés
dans les jeux vidéo pour apprendre aux joueurs les règles et fonctionnalités du jeu et leur
permettre d’acquérir les connaissances et compétences nécessaires pour atteindre le but final du
jeu. Rejoignant les théories de l’apprentissage ou les méthodes pédagogiques évoquées
précédemment (cf. § 3.2), les jeux mettent notamment en œuvre les principes suivants :
un apprentissage actif, centré sur le joueur, le jeu étant une activité par nature
participative ;
des principes socioconstructivistes avec un apprentissage collaboratif dans les jeux à
plusieurs ;
un apprentissage par l’erreur et une prise de risque favorisée par l’action dans un univers
de jeu séparé de la réalité (cf. concept de « cercle magique » défini par Huizinga (1938)
et évoqué section 3.1) ;
un engagement fort engendré par l’identité virtuelle revêtue par le joueur et son
implication dans un monde à part entière ; une motivation liée aux buts intrinsèques du
jeu dont l’accomplissement est source de satisfaction et de récompense ;
des principes de l’approche behavioriste avec le renforcement positif ou négatif créé par
les nombreux feedbacks issus des actions du joueur ; une pratique répétée des actions
nécessaire au succès et à l’atteinte des objectifs du jeu. ;
un apprentissage par la découverte favorisé par le jeu, où l’intégralité des informations
n’est pas dévoilée, incitant le joueur à explorer et découvrir par lui-même ;
un apprentissage soutenu par la mise à disposition de ressources adaptées, consultables
sur demande et au moment opportun (just in time) ;
un apprentissage dans l’action avec une performance qui a du sens et est contextualisée
dans l’univers du jeu ; un apprentissage qui passe par l’interaction avec d’autres
1 « Appareil ou logiciel permettant de créer les conditions de travail d'un autre appareil afin de le tester, d'en permettre uneinitiation plus rapide, ou encore d'utiliser certains logiciels » - Source : http://cnrtl.fr/2 Dispositifs conçus pour reproduire de façon la plus fidèle possible un objet ou une situation du monde réel. Ex : pilotage detrains, d’avions, conduit de central nucléaire, etc.
49
individus, lieux et objets ; des compétences de base acquises, non pas de manière
isolée, mais en lien avec le problème posé et le monde environnant.
S’intéressant à un objet un peu différent, Kriz (2010) a lui aussi identifié les approches de
l’apprentissage rattachées à l’usage des jeux de simulation pour la formation. Il caractérise ainsi
les jeux de simulation comme des méthodes mettant en œuvre un apprentissage coopératif,
expérientiel, situé, basé sur la résolution de problèmes.
50
Synthèse : jeu et apprentissage
Comme nous avons pu le constater à travers les travaux de Gee (2003), les jeux
vidéo, même lorsqu’ils ne sont pas destinés à l’apprentissage, mettent en œuvre
des principes d’apprentissage pouvant être associés à des approches différentes
de l’apprentissage (behaviorisme, cognitivisme, constructivisme, socio-
constructivisme, etc.). De manière plus large, les jeux sont le plus souvent
associés à un apprentissage actif, approche qui rassemble des méthodes
considérées comme bénéfiques sur l’apprentissage (Prince 2004), justifiant ainsi
en partie l’intérêt de l’utilisation des jeux à des fins de formation. Kirkley & Kirkley
(2004) estiment d’ailleurs qu’il s’agit de la meilleure approche pour concevoir des
environnements d’apprentissage et intégrer dans la formation l’usage de
nouvelles technologies, notamment basées sur l’utilisation du jeu.
Un autre principe caractérisant les jeux joue en la faveur de leur utilisation pour
l’apprentissage : ils permettent notamment de plonger l’apprenant dans le « cercle
magique » (Huizinga 1938), un monde parallèle favorisant l’expérience d’une
seconde réalité et permettant de les confronter à des contextes et activités
pouvant être porteuses d’authenticité et de réalisme tout en étant sans
conséquence sur la réalité première.
Dans le cadre de notre recherche, nous tentons d’articuler différents principes
d’apprentissage identifiés. Nous nous intéressons notamment aux principes issus
des approches constructivistes et socio-constructivistes tels qu’ils sont plus
particulièrement intégrés dans l’approche de la didactique professionnelle.
Notre réflexion intègre ainsi différentes facettes du jeu associé à l’apprentissage :
le jeu en tant que simulation d’une situation de référence permettant lamise en œuvre de l’approche de la didactique professionnelle où lescompétences sont indissociables de l’activité ;
le jeu en tant que situation problème visant à générer un conflit cognitifchez l’apprenant (apprentissage constructiviste) ;
le jeu en tant que source d’interactions entre pairs et accès à l’expertisepour un apprentissage socio-constructiviste.
Pour articuler ces différentes facettes, nous nous inscrivons plus précisément
dans le contexte de l’utilisation du jeu de rôle pour l’apprentissage (cf. section
3.4.3) : il s’agit d’amener, par ce type d’activité de jeu, les apprenants à construire
ensemble de nouvelles connaissances en interagissant au sein de situations
simulant, de façon plus ou moins fidèle, le contexte professionnel dans lequel ils
sont amenés à évoluer.
51
3.4. Jeu et formation : un panorama de solutions mises enœuvre
Dans cette section, nous précisons tout d’abord le périmètre auquel nous nous intéressons en
nous positionnant par rapport aux évolutions terminologiques relatives à l’utilisation du jeu pour
l’apprentissage. Nous nous focalisons plus particulièrement sur l’utilisation du jeu pour la
formation professionnelle. Avant de présenter différentes possibilités dans ce champ d’application
spécifique, nous nous attachons à préciser l’approche adoptée pour organiser cette présentation.
En effet, malgré une étude préalable de divers points de vue sur la classification des jeux (section
2.2), nous avons été confrontés, pour la structuration de notre présentation, à la difficulté de
catégoriser les solutions que nous souhaitions aborder.
3.4.1. Evolution terminologique et définition de notre périmètred’étude
Nous nous attachons dans cette section à délimiter et définir notre périmètre d’étude : pour cela
nous nous situons par rapport aux concepts et définitions utilisées pour désigner les dispositifs de
formation basés sur le jeu.
La dénomination serious game est, depuis les années 2000, de plus en plus utilisée lorsque l’on
parle de jeu pour la formation. Comme nous l’avons déjà précisé précédemment (cf. § 2.2.2), elle
désigne généralement :
« Une application informatique dont l’intention initiale est de combiner avec cohérence, àla fois des aspects sérieux (Serious), tels de manière non exhaustive et non exclusive,l’enseignement, l’apprentissage, la communication ou encore l’information, avec desressorts ludiques issus du jeu vidéo (game).» (Alvarez & Djaouti 2010).
Toutefois, il s’avère que le concept de serious game était utilisé bien avant la diffusion de
l’informatique et des jeux vidéo. Dès 1970, Abt abordait le sujet dans un livre intitulé Serious
Games où il s’intéressait à l’usage à des fins éducatives de jeux de l’époque, essentiellement des
jeux de plateau et des jeux de cartes. Il propose une définition des serious games qui rejoint celle
d’Alvarez, à la différence qu’elle concerne spécifiquement des jeux destinés à l’apprentissage et
qu’elle s’applique de façon plus large à tous types de jeux et non exclusivement aux jeux vidéo :
« We are concerned with serious games in the sense that these games have an explicitand carefully thought-out educational purpose and are not intended to be played primarilyfor amusement. » (Abt 1970 – p.9)
Tout comme le terme serious game, on constate une évolution de l’emploi de l’expression game-
based learning, autre appellation utilisée dans le domaine. Le game-based learning ou
apprentissage basé sur le jeu se réfère désormais assez systématiquement à des dispositifs
informatisés. Il constitue ainsi un sous-ensemble des serious games tels que définis par Alvarez
& Djaouti (2010) et désigne plus particulièrement les dispositifs qui possèdent une finalité
52
d’apprentissage, que ce soit dans un contexte d’éducation scolaire (de l’enseignement primaire à
l’enseignement supérieur) ou dans le domaine de la formation des adultes.
De notre côté, nous envisageons le game-based learning ou apprentissage par le jeu dans son
acception large, c’est-à-dire désignant tout dispositif technique et humain utilisant le jeu à des fins
d’apprentissage, nous rapprochant ainsi de la définition de serious game proposée par Abt
(1970). Nous nous intéressons ici à des jeux utilisés en formation, plus particulièrement pour un
public adulte, quels que soient le support ou la modalité de mise en œuvre. Notre objectif est de
dresser un panorama de la diversité des solutions existantes afin d’y positionner notre travail.
Nous considérons par ailleurs que toutes les solutions adoptées pour associer le jeu à la
formation sont autant de possibilités réutilisables et adaptables à d’autres contextes (différents
publics, objectifs de formation, etc.). Qu’il soit informatisé ou non, à distance ou en présentiel,
individuel ou collectif, tout dispositif de formation intégrant le jeu a été pensé pour allier de
manière adaptée aspects pédagogiques, jeu et motivation : nous considérons qu’il il y a des
principes utiles et intéressants à retirer de tous ces exemples.
3.4.2. Le jeu pour la formation vu sous l’angle de la simulation
Quel point de vue adopter pour présenter les utilisations du jeu pour la formation
professionnelle ? C’est à cette question que nous avons été confrontés pour organiser cette
section. S’interroger sur la façon d’organiser notre présentation revient finalement à se demander
quelle classification des jeux pour la formation nous allons utiliser. Comme nous l’avons montré
dans la section 2.2, il existe différentes approches pour classifier les jeux, mais aucune ne peut
aboutir à une classification consensuelle, homogène et discriminante des jeux.
Pour organiser notre présentation, nous adoptons un éclairage particulier mettant en lumière un
point commun identifié dans la majorité des jeux pour la formation professionnelle : la simulation.
Ce critère de classification peut être considéré comme réducteur et insatisfaisant mais il possède
l’intérêt de mettre en avant une caractéristique du jeu qui s’avère essentielle dans le cadre de
son utilisation pour la formation professionnelle.
Nous constatons en effet, sans doute en raison des thématiques abordées et du type de
compétences visées, que très souvent les jeux utilisés dans la formation professionnelle sont
basés sur une simulation, terme que nous utilisons dans une acception large et commune
désignant le fait de « reproduire artificiellement une situation réelle à des fins de démonstration
ou d'explication1 ». Les travaux de Sauvé et al. (2007) ont mis en évidence, à travers une étude
de l’état de l’art, les caractéristiques fondamentales que l’on peut rattacher à la simulation dans le
domaine de l’apprentissage et la définissent comme
1 Définition du Trésor de La Langue Française informatisé : http://atilf.atilf.fr/tlf.htm
53
« une représentation simplifiée, dynamique et précise d’une réalité définie par unsystème1 ».
Dans le domaine de l’apprentissage toujours, Crookall et al. (1987) distinguent le jeu et la
simulation par leur degré de représentativité du monde réel : ils considèrent que contrairement
aux simulations, les jeux n’ont pas pour objectif premier d’être représentatifs du réel.
En nous référant à ces travaux, nous nous intéressons à une activité désignée sous l’appellation
« jeu de simulation », cette activité possède à la fois :
des caractéristiques d’une simulation avec un certain degré de représentativité d’un objet
ou d’une situation réelle ;
des éléments fondamentaux du jeu tels que le second degré, la frivolité ou les règles (cf.
caractéristiques définies par Brougère détaillées dans la section 2.1) ou d’autres ressorts
de jeu (identifiés à travers des travaux présentés dans les sections 4.5 qui alimentent la
proposition détaillée chapitre 10) tels que la compétition, le hasard ou le jeu de rôle.
Cette approche du jeu de simulation rejoint la description proposée par Peters et Vissers (2004)
selon laquelle les jeux de simulation constituent une classe d’outils dans lesquels des techniques
de jeu sont utilisées pour simuler une situation ou un système de référence.
Jeux de simulation : critères distinctifs
Nous considérons l’utilisation de jeux de simulation pour la formation comme une solution pour
mettre en œuvre les principes de l’approche de la didactique professionnelle (cf. section 3.2.5) :
mise en situation des apprenants, acquisition de compétences dans des contextes entrant en
résonance avec leur pratique professionnelle, de façon réaliste ou transposée.
Béguin et Pastré (2002) ont étudié les simulations conçues à des fins de formation
professionnelle. Même lorsqu’il s’agit de simulations pleine échelle, c’est-à-dire ne possédant pas
de caractéristiques de jeu et se voulant le plus proche possible de la réalité, Béguin et Pastré
mettent en évidence que l’une des particularités de ces dispositifs est de simplifier les situations
simulées, en les focalisant sur les problèmes auxquels on souhaite confronter les apprenants et
en accentuant les aspects sur lesquels on souhaite attirer leur attention.
Cette différence entre le modèle simulé et le modèle réel s’avère d’autant plus marquée dans les
jeux de simulation : ces derniers intègrent souvent des éléments supplémentaires propres au jeu,
qui ne sont pas initialement présents dans la situation réelle (par exemple la notion de score liée
à la compétition).
Selon le type de situation ou d’objet à reproduire, on peut distinguer :
les simulations basées sur un modèle calculable, nécessitant le recours à des outils
informatiques gérant les modèles physiques ou mathématiques sous-jacents,
1Simulation is a simplified, dynamic and precise representation of reality defined as a system
54
les simulations non ou faiblement contraintes par un modèle calculable, catégorie dans
laquelle nous positionnons les jeux de rôles.
Selon la présence ou non d’un modèle sous-jacent et en fonction de la nature et de la complexité
de ce modèle, la simulation s’appuie sur des ressources et supports d’implémentation de
différentes types, et l’on distingue ainsi :
les jeux de simulation utilisant un plateau ou des cartes (cf. § 3.4.4, section Simulation et
jeux de plateau) ;
les jeux de simulation grandeur réelle, proches de simulations pleine échelle, c’est-à-dire
se déroulant dans des conditions fidèles à la réalité (non abordés dans ce document) ;
les jeux de simulation implémentés dans un univers informatique virtuel (cf. § 3.4.4,
section Simulation et jeux informatisés,).
Les possibilités d’implémentation sont nombreuses, et encore plus aujourd’hui avec le recours à
la réalité mixte1 (Klopfer et al. 2005).
Comme expliqué précédemment, nous allons nous intéresser à des jeux destinés à la formation
mettant en œuvre une simulation s’appuyant sur une simplification d’un processus ou d’une
situation de référence. Cette simplification est d’autant plus importante pour les jeux de plateau
non informatisés pour lesquels le niveau de complexité du modèle mis en œuvre ne peut être
trop élevé (le nombre de paramètres pouvant être gérés par les joueurs est limité du fait de
l’absence d’outil informatique pour automatiser l’analyse). Les caractéristiques fondamentales de
la situation de référence présentes dans la situation simulée sont ainsi définies en fonction des
objectifs visés : par exemple, illustrer et structurer les connaissances à acquérir par les
participants, schématiser un processus métier à acquérir et/ou mettre en évidence des principes
liés au travail d’équipe.
En résumé, dans la présentation suivante, nous choisissons de caractériser les dispositifs de
formation utilisant le jeu selon deux axes principaux relatifs à la simulation (cf. figure 4) :
d’une part le degré de représentativité du réel recherché,
d’autre part la présence d’un modèle sous-jacent calculable, plus ou moins complexe et
contraignant.
Figure 4 - Axes de description des dispositifs de formation utilisant le jeu
1 Notion désignant à la fois les dispositifs de réalité augmentée et de virtualité augmentée, définie par Milgram & Kishino (1994)
55
3.4.3. Les jeux de rôle : un type de simulation spécifique
Le jeu de rôle utilisé dans un contexte pédagogique apparaît comme une activité de simulation
possédant des caractéristiques spécifiques que nous souhaitons détailler ici. A côté de son
utilisation à des fins pédagogiques, le jeu de rôle possède d’autres applications auxquelles nous
allons nous intéresser afin de mieux cerner ce que recouvre cette activité.
Les différents types de jeu de rôle
Il s’avère, comme le faisaient très justement remarquer Feinstein & Cannon (2002), que le jeu de
rôle fait partie de ces termes dont la définition est source d’ambigüité. Un manque d’homogénéité
est effectivement souvent constaté dans l’emploi de cette notion.
Une première cause d’ambigüité dans l’emploi de la dénomination jeu de rôle vient sans doute
des multiples facettes et fonctions qu’il revêt. Daniau (2005) a dressé une liste des différentes
variantes du jeu de rôle selon l’ordre chronologique de leur apparition dans la société. Parmi ces
variantes nous retenons :
le jeu de rôle libre des enfants, qui concourt à leur développement, notamment sur le plan
social ;
le jeu de rôle spectacle qui se réfère au théâtre, dont le but est de divertir ;
le jeu de rôle thérapeutique utilisé en psychothérapie, sous la forme du psychodrame
(Moreno 1965) ;
le jeu de rôle pédagogique utilisé pour la formation où il permet une mise en situation
vivante et l’application de compétences sociales et communicationnelles notamment ;
le jeu de rôle ludique, activité récréative de pur divertissement qui possède différents
formats : du jeu de rôle sur table1, au jeu grandeur nature en passant par le jeu vidéo ;
le jeu de rôle formatif, basé plus spécifiquement sur les principes du jeu de rôle ludique
sur table (interprétation d’un personnage au sein d’une équipe comprenant un meneur de
jeu qui guide les joueurs au sein du monde imaginaire dans lequel ils évoluent), il est
destiné à des formations d’adultes relatives au développement personnel et au
développement du lien social.
Le jeu de rôle apparaît comme une activité présente très tôt et de manière naturelle dans la vie
d’un individu puisqu’il constitue la base de l’apprentissage de la vie sociale chez les enfants
(Winnicott 1971, Piaget 1945, Chamberland et Provost 1996).
« Le fait de jouer à être quelqu'un d'autre correspond à une propension innée de l'êtrehumain qui se manifeste dès le plus jeune âge. L'enfant s'y adonne spontanément, etcette forme d'activité devient pour lui un instrument de développement très important (…)De toutes les techniques de jeux, c'est celle qui pose le moins de contraintes. »(Chamberland et Provost 1996).
1 http://www.ffjdr.org/le-jeu-de-role/definitions-du-jeu-de-role
56
Certains auteurs voient le jeu de rôle ludique comme une catégorie de jeux à part : c’est le cas de
Salen et Zimmerman (2004) qui considèrent le jeu de rôle comme un objet à la frontière de leur
définition du jeu puisqu’il ne possède pas obligatoirement de but clairement défini ni de résultat
quantifiable.
De notre côté, nous proposons de définir le jeu de rôle de façon générale en nous basant sur une
caractéristique commune aux différentes variantes identifiées et en nous appuyant sur la
définition de Grellier (2008) : le jeu de rôle apparaît ainsi comme la simulation d’une situation, à
laquelle les participants prennent part en endossant les rôles de personnages spécifiques
interagissant les uns avec les autres. C’est une activité collective dans laquelle les échanges et la
communication entre les protagonistes sont centraux.
Un cas spécifique : le jeu de rôle pédagogique
Dans notre contexte d’application, nous nous intéressons plus spécifiquement au jeu de rôle
pédagogique. Même s’il nous semble nécessaire de bien définir l’objet que nous étudions ici,
nous conservons une approche ouverte tel que le suggère Brougère. Même si le jeu de rôle est
souvent défini en opposition à la simulation et au jeu, nous n’essaierons pas de fixer des
frontières infranchissables entre ces trois notions. Nous adoptons ainsi le point de vue de
Crookall et al. (1987) qui expliquent que tout comme une simulation peut contenir des éléments
d’un jeu, elle peut également utiliser des principes d’un jeu de rôle. Par ailleurs, Crookall et al.
vont même jusqu’à considérer le jeu de rôle comme étant toujours une simulation. Le jeu de rôle
est plus spécifiquement défini comme une simulation d’une situation sociale, mettant en jeu la
pratique de compétences interpersonnelles et comportementales. Gredler (2004) va également
dans ce sens en définissant le jeu de rôle comme un sous-ensemble des simulations se
différenciant par sa longueur et sa complexité.
Dans le jeu de rôle, les participants vont se comporter tel qu’ils imaginent que le personnage
qu’ils incarnent le ferait dans une situation comparable. A travers cette expérience, on vise un
apprentissage portant sur les rôles mis en jeu ou sur la situation. L’une des caractéristiques des
jeux de rôle est de laisser une place assez grande à l’improvisation. Cette activité offre ainsi une
occasion à l’apprenant de tester des comportements nouveaux liés au changement de rôle ou de
situation, d’explorer d’autres facettes de son propre rôle et d’étudier les interactions de groupe
avec lesquelles s’articulent ses propres actions.
Daniau (2005) décrit ainsi les jeux de rôle pédagogiques :
« Dans ce cadre, les participants sont amenés à explorer de nouvelles situations, à testerleurs qualités d’improvisation, à s’ouvrir ludiquement à l’usage d’une langue étrangère, ouencore à gérer les relations interpersonnelles. Dans ce dernier cas, il s’agit de fairedécouvrir à chacun ses attitudes, son mode d’interaction avec autrui notamment dansl’activité professionnelle. »
57
Avantages du jeu de rôle pédagogique
Un certain nombre d’avantages pour l’utilisation du jeu de rôle pédagogique sont mis en avant
(Van Ments 1999) :
Le principal intérêt du jeu de rôle pour la formation est « celui qu’il partage avec toutes
les activités de jeu ou de simulation : il est hautement motivant »1.
Par ailleurs, le jeu de rôle crée un climat positif et procure une certaine sécurité
favorables à l’expression de sentiments et d’attitudes. Ladousse (1986 in Van Ments
1999) met également ce point en avant dans sa définition précisant que, dans
l’expression « jeu de rôle », le « jeu » est associé à un environnement sûr et à une
activité motivante, tandis que le « rôle » se réfère au fait de prendre part à une situation
spécifique. La caractéristique du jeu de rôle mise en évidence ici correspond à la notion
de second degré identifiée comme centrale dans les activités de jeu (Brougère 2004), elle
fait référence au « cercle magique » (Huizinga 1938) dans lequel les joueurs sont plongés
et qui les protègent du monde réel.
Enfin, le jeu de rôle en tant que simulation d’une situation procure un espace pour
s’exercer à la mise en œuvre de compétences dans des situations métiers spécifiques. Il
offre la possibilité de répéter l’exercice afin de s’améliorer. Il apparaît ainsi comme une
activité pédagogique mettant en œuvre un apprentissage expérientiel et une approche de
la didactique professionnelle (cf. § 3.2.2 et § 3.2.5).
Le jeu de rôle possède par ailleurs d’autres avantages pour une utilisation en formation :
son appropriation par les formateurs et les apprenants est facile, les règles du jeu et la
structure sont en effet assez simples : « utiliser le jeu de rôle est à la fois simple et
agréable »2 (Van Ments 1999) ;
c’est une activité dont le contenu est facilement adaptable puisqu’il repose sur des
documents indépendants du fonctionnement de l’activité (description du scénario et du
contexte, fiches de personnages, etc.). On peut considérer que le jeu de rôle est par
essence un jeu-cadre réutilisable (tel que défini par Hourst & Thiagarajan 2007, cf. §
2.2.3) ;
le jeu de rôle est basé sur des activités de groupe, sur des interactions entre les
participants et met ainsi en œuvre des principes socio-constructivistes de co-construction
des connaissances et d’apprentissage collaboratif.
Jeux de rôle pédagogiques : quelques principes
Le jeu de rôle pédagogique consiste à mettre en situation les apprenants à travers des scènes ou
sketches généralement courts (10 à 20 minutes) (Gredler 2004). Intégré dans un dispositif de
1 “the major advantage of role-play is the one it shares with all simulation and gaming activities in that it is highly motivating”2“Using role-play is basically both simple and enjoyable”
58
formation, le jeu de rôle est nécessairement précédé d’une phase d’introduction qui vise a
minima à présenter le scénario du jeu de rôle et les objectifs pédagogiques visés. Il est ensuite
suivi d’un débriefing qui a pour fonction de faire le point sur la situation vécue au cours du jeu de
rôle (les rôles plus précis de cette phase incontournable dans l’intégration d’un jeu à un dispositif
de formation sont détaillés dans la section 3.5).
Van Ments (1999) distingue les jeux de rôles pédagogiques en fonction de leur objectif. Il en
dégage tout d’abord deux grandes catégories : d’un côté, les jeux de rôles visant la mise en
application de compétences, de l’autre les jeux de rôles visant la prise de conscience ou un
changement portant sur des attitudes, des sentiments ou la perception d’une situation. Six
fonctions plus spécifiques sont ensuite identifiées par l’auteur :
1. Décrire ou illustrer une situation : le jeu de rôle est utilisé pour communiquer un
message, pour partager la façon dont une situation est perçue que ce soit par les
participants ou par le formateur.
2. Faire une démonstration : de manière assez similaire à la fonction précédente,
le jeu de rôle est par exemple utilisé pour illustrer un comportement, à la différence qu’ici
l’idée présentée fait office de modèle à reproduire pour les apprenants.
Si ces deux premières fonctions du jeu de rôle en contexte pédagogique sont assez rares, les
deux suivantes apparaissent comme les plus courantes :
3. Faire pratiquer : le jeu de rôle est utilisé comme un terrain d’entraînement pour la
mise en application de compétences sociales, langagières (pratique d’une langue
étrangère par exemple), managériales, communicationnelles et de connaissances
métiers spécifiques.
4. Faire réfléchir : dans ce type d’usage du jeu de rôle qui est très lié au précédent,
l’accent est davantage mis sur l’observation et la réflexion que sur la pratique. Le but est
de faire réfléchir les participants sur les raisons de leurs actions.
La cinquième fonction identifiée apparaît comme assez délicate à utiliser, elle est très similaire au
psychodrame et touche à des aspects psychologiques :
5. Sensibiliser : l’analyse de la situation de jeu de rôle porte ici sur des aspects
émotionnels et personnels, elle vise à faire prendre conscience de l’impact de la situation
sur ses propres émotions ou sur les autres.
La dernière fonction mise en évidence est utilisée de façon plus anecdotique dans la formation :
6. Faire créer/S’exprimer : le jeu de rôle est alors utilisé comme moyen
d’expression, se rapprochant de l’art dramatique, il vise à fournir aux élèves un moyen
d’exprimer leur créativité.
Les jeux de rôle visant une mise en pratique (type n°3) se déclinent par ailleurs en deux grandes
catégories selon la nature des situations qu’ils simulent et le type de compétences mises en
œuvre. On identifie ainsi :
59
Des jeux simulant des situations de communication entre deux ou trois participants.
L’objectif de ce type de jeu de rôle est l’amélioration ou l’acquisition de compétences
interpersonnelles telles que la gestion de conflit (cf. le jeu de rôle Fight Right présenté §
3.4.4) ou des compétences métiers spécifiques telles que le conseil client (cf. le jeu de
rôle sur le conseil client en assurances (Courau 2006) présenté § 3.4.4).
Des jeux de rôle centrés sur un projet ou la résolution d’un problème, simulant une
mission à accomplir par une équipe. Cette situation amène les participants à une
production collective ou à une prise de décision (cf. jeu de rôle de Guéraud & Peyrin
(1988) présenté § 3.4.4). Ce type de jeu de rôle est considéré par Glenn et al. (1982)
comme un bon moyen d’impliquer des apprenants dans une activité de résolution de
problème.
En plus de la mise en pratique de compétences professionnelles, les situations simulées dans les
jeux de rôle font également appel à des connaissances métiers spécifiques, plus ou moins
transposées, démarche correspondant à l’approche de la didactique professionnelle.
Les différentes fonctions associées au jeu de rôle ont une influence sur la façon dont il est intégré
dans la formation et plus précisément sur les caractéristiques et contenus des phases
introductives, du débriefing et la mise en œuvre du jeu de rôle lui-même. Glenn et al. (1982) ont
par exemple étudié différentes manières d’intégrer le jeu de rôle à un dispositif de formation et
l’influence sur l’apprentissage qui en résulte. Leur étude porte plus spécifiquement sur l’utilisation
du jeu de rôle pour l’apprentissage de la résolution de problème. Elle montre que dans ce
contexte, pour une meilleure efficacité pédagogique, l’utilisation du jeu de rôle doit être précédée
d’une phase de présentation de la méthode de résolution de problème objet de l’apprentissage ;
un feedback sur leur application de cette méthode doit être fourni aux apprenants durant le jeu de
rôle ; enfin un débriefing doit être mené à la suite du jeu de rôle.
Une autre façon de caractériser les jeux de rôle porte sur la manière dont les rôles proposés aux
participants sont définis. Cette définition peut être basée sur :
La fonction, la position hiérarchique. Par exemple : responsable ou client.
Les objectifs assignés au personnage à l’aide d’une formulation du type « Votre rôle est
de… ».
L’histoire, le contexte dans lesquels les personnages sont plongés.
Les compétences ou habiletés que possèdent les personnages.
Les caractéristiques sociales, par exemple « Vous êtes un jeune papa qui travaille dans
une banque. »
Les traits de personnalité.
Les jeux de rôles se distinguent également selon une autre caractéristique présentée dans la
définition proposée par Mann et Mann (1956 in Yardley-Matwiejczuk 1997) : soit les participants
60
incarnent des rôles différents de leur rôle réel, soit ils incarnent leur propre rôle dans une
situation différente des situations habituelles. Ces auteurs ne prennent pas en compte d’autres
cas, tels que ceux où les participants incarnent des rôles différents de leur rôle réel, dans une
situation elle aussi éloignée de leur quotidien. En pratique, les deux distinctions présentées par
Mann et Mann ne sont pas suffisantes. Nous préférons parler d’une proximité plus ou moins
grande du rôle ou de la situation jouée avec le réel. En effet, un participant peut incarner un rôle
proche de son rôle réel, avec par exemple uniquement quelques différences au niveau des
objectifs qui lui sont assignés ou au niveau d’un trait de personnalité.
Pour récapituler les principes distinctifs évoqués précédemment concernant le jeu de rôle
pédagogique, nous proposons la synthèse suivante :
un jeu de rôle est caractérisé par une fonction qui précise la finalité pédagogique de
l’utilisation du jeu de rôle (ex. sensibiliser ou faire pratiquer),
il propose une situation définie en termes de :
o compétences mises en œuvre (de l’ordre de la communication ou plus
opérationnelles) ;
o proximité avec les situations réellement vécues par les participants.
il fait jouer des rôles :
o dont la définition est axée selon un critère spécifique (fonction, objectifs, etc.) ;
o qui correspondent ou non au rôle réel de l’apprenant.
Le jeu de rôle pédagogique en ligne : caractéristiques et intérêt spécifiques
L’évolution de l’Internet a amené le développement de dispositifs de jeu de rôle dont la mise en
œuvre s’effectue majoritairement sur des plateformes en ligne, où les participants,
géographiquement distants, communiquent avec des outils de manière synchrone ou
asynchrone. Le jeu de rôle en ligne peut être intégré à un dispositif de formation mixte associant
sessions de formation en ligne et sessions en présentiel (Wills et al. 2010).
Dans la continuité des définitions présentées précédemment, Wills et al. (2010) définissent le jeu
de rôle pédagogique en ligne, qu’ils appellent « online role play » ou « role-based e-learning »,
comme
« un type de simulation dans laquelle les participants interagissent les uns avec les autrespar l’intermédiaire d’un ordinateur, à la différence d’une simulation traditionnelle où lesparticipants interagissent avec le modèle implémenté par l’ordinateur1. »
Cette définition met en évidence les spécificités de la simulation proposée par le jeu de rôle. Elle
met à nouveau en avant une distinction entre : d’un côté, les simulations faiblement contraintes
par un modèle telles que les jeux de rôle, et de l’autre les simulations contraintes par un modèle
1 “An online role play is a type of simulation in which participants interact with each other, via the computer, rather than thetraditional simulation in which participants interact with a computer model.”
61
calculable telles que les simulations informatisées (cf. § 3.4.4, section Simulation et jeux
informatisés).
Les jeux de rôle en ligne utilisés à des fins de formation peuvent être basés sur des échanges
synchrones ou asynchrones. Malgré l’appauvrissement de la communication entre les acteurs et
quelques inconvénients sur lesquels nous revenons dans la section 5.4.2, les jeux de rôles en
ligne combinent :
des avantages du jeu de rôle tels que présentés précédemment : apprentissage
expérientiel ; rôles qui offrent l’opportunité de s’ouvrir à d’autres points de vue sur une
situation ; activités collectives basées sur les interactions entre participants pour une co-
construction des savoirs, etc. ;
avec des avantages des dispositifs de formation à distance tels que l’allégement des
contraintes organisationnelles, souvent très lourdes à gérer dans les sessions de
formation continue en présentiel que ce soit en termes de coût ou en termes de
planification du travail pour les entreprises.
Dans un autre registre, Wills et al. (2010) mettent en avant deux avantages majeurs du jeu de
rôle en ligne : le caractère potentiellement asynchrone des échanges et l’anonymat. Les
échanges asynchrones permettent en effet aux participants de prendre du recul sur la situation et
leur laisse un temps pour réfléchir de manière plus approfondie à leurs décisions. Contrairement
aux jeux de rôle en présentiel, les jeux de rôle en ligne peuvent ainsi être menés sur de plus
longues périodes, offrant un format propice à la réflexivité qui s’avère nécessaire pour certains
contextes et objectifs de formation. La possibilité d’anonymat offerte par les dispositifs en ligne
offre par ailleurs l’opportunité aux participants timides de s’exprimer plus facilement.
3.4.4. Jeux pour la formation et simulation
L’organisation des exemples de dispositifs que nous proposons est basée sur les deux critères
distinctifs identifiés pour caractériser la simulation mise en œuvre : nous présentons des
exemples de jeux pour la formation mettant en œuvre une simulation avec un degré de
représentativité du réel plus ou moins grand et un modèle calculable sous-jacent plus ou moins
complexe. Nous abordons ainsi des exemples variés : simulation et jeux de plateau, simulation et
jeux tangibles, simulation et jeux informatisés, simulation et jeux de rôle pédagogiques.
1- Simulation et jeux de plateau
Les jeux de plateau mettant en œuvre une simulation possèdent un degré de représentativité du
réel assez faible et s’appuient sur un modèle calculable sous-jacent généralement simple (cf.
figure 5).
62
Figure 5 - Simulation et jeux de plateau : caractéristiques
Un exemple de ce type de jeu est le jeu Dev&Co développé par la société Erudia1. Ce jeu
coopératif a pour objectif de sensibiliser les collaborateurs d’une entreprise à la mise en place
d’un commerce responsable. Le but du jeu de chaque participant est de satisfaire ses objectifs
personnels, tout en s’assurant d’atteindre les objectifs environnementaux, économiques et
sociaux de l’entreprise. Ce jeu, et donc la manière dont la situation est simulée, sont conçus pour
mettre en évidence les points clés de la thématique de formation abordée, à savoir : les
principaux leviers d’action d’une entreprise permettant la mise en place d’un commerce
responsable ; la difficulté, pour un collaborateur, d’allier ses objectifs personnels avec les
objectifs de l’entreprise (gestion de priorités et prise de décision sont au cœur du gameplay) ; la
nécessaire collaboration des apprenants pour atteindre les objectifs de l’entreprise.
La société Northgate2, développe elle aussi des jeux de plateau traitant de thématiques de
formation variées : par exemple, le jeu Leadership Challenge (cf. figure 6) vise à mettre en
évidence les différents styles de leadership, à mettre en pratique des compétences de leadership
et les principes de gestion d’une équipe de collaborateurs.
Figure 6 - Matériel du jeu Leadership Challenge
1 http://www.erudia-jeux.com/fiche-jeu.php?id=212 http://www.northgatetraining.co.uk/leadership/leadership-challenge.html
63
Parfois la situation simulée est basée sur une métaphore de la situation réelle, ce sont alors
uniquement les mécanismes sous-jacents ou la structure de la situation réelle qui sont repris
dans le jeu. Le jeu Mission Improbable1 (Northgate) est un exemple de situation métaphorique : il
confie aux participants la mission de transporter des œufs dans une région montagneuse,
l’objectif de formation étant de développer des compétences de travail en équipe et de
coopération. Dans ce jeu, les participants sont placés dans une situation détachée de leur
contexte de travail réel : cette transposition de contexte vise à focaliser leur attention sur les
objectifs de la formation en les éloignant de leurs préoccupations quotidiennes.
2- Simulation et jeux tangibles
Certains jeux utilisés en formation visent à mettre en œuvre des simulations plus proches de la
réalité en utilisant des objets tangibles et en respectant certaines contraintes d’organisation
spatiale des activités réelles. Ils visent ainsi un degré de représentativité du réel plus grand que
les dispositifs précédents, tout en se basant sur des modèles calculables peu complexes et
pouvant être gérés « manuellement » (cf. figure 7).
Figure 7 - Jeux de simulation et tangible : caractéristiques
C’est le cas du Lego LEAN Game, un dispositif de formation utilisé en présentiel qui vise à
illustrer les concepts du Lean manufacturing, une méthode de gestion de la production destinée à
améliorer la performance des entreprises par l’amélioration continue et l’élimination des
gaspillages. Le Lego LEAN Game simule une chaîne de production dont les ouvriers sont les
apprenants. Les ouvriers effectuent les actions correspondant à la fonction qui leur a été
attribuée selon un process défini, en manipulant des briques Lego représentant les pièces à
assembler pour réaliser les produits. Entre chacune des phases de simulation, un débriefing,
basé sur les résultats obtenus, est organisé afin de mettre en évidence les dysfonctionnements et
définir une stratégie d’amélioration pour la simulation suivante.
3- Simulation et jeux informatisés
Dans cette partie, nous nous intéressons plus spécifiquement aux jeux de simulation
implémentés à l’aide d’un outil informatique. Nous nous focalisons sur les applications mises en
œuvre sur ordinateurs et n’abordons pas le cas spécifique des simulateurs pleine échelle.
1 http://www.northgatetraining.co.uk/teamwork-cooperation/mission-improbable.html
64
Le recours à un environnement informatique permet à la simulation de se rapprocher davantage
de la situation réelle, en se basant sur un modèle calculable plus complexe, prenant en compte
de multiples paramètres (cf. caractéristiques présentées figure 8). Un environnement
informatique de type monde virtuel ajoute par ailleurs la possibilité d’immerger le participant dans
un contexte proche du contexte réel, approchant encore davantage la situation simulée de la
situation réelle. C’est ce type de dispositif proche du jeu vidéo auquel il est aujourd’hui souvent
fait référence sous l’appellation serious game (Alvarez & Djaouti 2010), tel que défini au début de
ce chapitre (section 3.4.1).
Figure 8 - Simulation et jeu informatisé : caractéristiques
Starbank1 développé par la société KTM Advance2 est un jeu initialement destiné aux nouveaux
collaborateurs du groupe BNP Paribas. Basé sur une simulation du fonctionnement économique
réel du groupe bancaire, le jeu donne comme mission au joueur de déployer les services d’une
banque fictive dans une cité orbitale du futur.
Figure 9 - Ecran de l'application Starbank : accès aux différentes zones de la cité orbitale
1 http://www.ktmprod.com/jeux/launch.html2 http://www.ktm-advance.com
65
Jeux de simulation informatisés et jeu de rôle
Beaucoup de jeux de simulation informatisés, comme ceux auxquels nous nous intéressons dans
la suite, accordent une place importante au jeu de rôle tout en étant basés sur un modèle
calculable de la situation simulée.
Le jeu Pulse!1, par exemple, immerge les étudiants en médecine dans un hôpital virtuel où ils
doivent gérer des situations d’urgence avec des patients virtuels aux caractéristiques
physiologiques très réalistes.
Figure 10 - Pulse! : intervention à l’unité de soins intensifs
Le LeanG2 quant à lui vise les mêmes objectifs pédagogiques que Lego LEAN Game présenté
précédemment, mais à la différence de ce dernier, il s’agit d’un serious game qui plonge les
joueurs dans un univers virtuel où ils se retrouvent dans la peau du directeur d’une usine qui
fabrique des petits camions en bois. De nombreux exemples de serious games de ce type
existent, proposant des scénarios plus ou moins proches de la situation professionnelle réelle.
1 http://www.breakawaygames.com/serious-games/solutions/healthcare2 http://www.lean-game.com
66
Figure 11 - LeanG : l’atelier de production des camions en bois
De son côté, HairBe121, jeu développé pour la société L’Oréal, est basé sur la modélisation
virtuelle du fonctionnement économique d’un salon de coiffure. Il est destiné aux professionnels
de la coiffure. A travers la simulation des activités quotidiennes d’un salon de coiffure, il vise
notamment à faire évoluer les comportements des collaborateurs en les initiant aux nouvelles
techniques de merchandising, en valorisant des problématiques-clés telles que la relation clients
ou la fidélisation marketing.
Figure 12 - HairBe12 : mise en situation
1 http://www.hair-be12.com
67
Le dispositif développé par la société Daesign1 pour une formation de managers à la conduite
des entretiens annuels2 accorde une place centrale à un jeu de rôle basé sur des interactions
verbales et gestuelles avec un personnage virtuel. Ici, le jeu de rôle repose sur un modèle
prédéfini de la situation de communication simulée.
Figure 13 - Jeu de rôle virtuel pour la formation à l'entretien annuel d'évaluation (Daesign pour BNP Paribas)
4- Simulation et jeux de rôle pédagogiques
A la différence des applications présentées précédemment, les jeux de rôles pédagogiques
abordés ici :
soit ne reposent pas sur un modèle calculable pré-défini : le scénario se construit alors
autour des échanges entre les participants ;
soit s’appuient sur un modèle pré-défini peu complexe et faiblement contraignant (cf.
figure 14).
Figure 14 - Simulation et jeux de rôle pédagogiques : caractéristiques
Applications « classiques » du jeu de rôle pédagogique
Comme l’illustrent les différents exemples que nous avons choisis de présenter ci-après, le jeu de
rôle pédagogique est utilisé depuis de nombreuses années, en formation présentielle, sur des
1 http://www.daesign.com/2 http://www.daesign.com/fr/realisations/bnp-paribas.html
68
thématiques de formation variées (gestion de conflits, conseil client et vente, résolution de
problème, ou encore développement informatique, etc.).
Fight right1 (Thiagarajan), le premier exemple que nous développons, illustre selon nous assez
bien l’intégration d’un jeu de rôle dans un dispositif de formation, et correspond de manière plus
large à la façon dont il est préconisé d’intégrer les jeux, simulations ou toute activité expérientielle
dans une formation : le dispositif alterne des phases de jeu de rôle et des phases de débriefing
qui vont permettre d’introduire progressivement les notions et de mettre en pratique les
compétences-clés relatives aux objectifs de la formation.
Fight right est destiné à être utilisé dans des sessions de formation en présentiel et vise
l’acquisition de compétences relatives à la gestion de conflits, et plus particulièrement les
techniques d’auto-médiation. Ce dispositif est composé de trois jeux de rôle suivis de phases de
débriefing. Chaque session de jeu de rôle a lieu en trinôme. Dans le premier jeu de rôle, deux
participants jouent les rôles de collaborateurs qui ont un conflit et le troisième joue le rôle
d’observateur. La phase de débriefing amène les participants à analyser la situation de conflit
vécue et met en évidence l’utilité potentielle d’un médiateur dans ce type de situation. Dans le
second jeu de rôle, deux participants jouent les collaborateurs en conflit tandis que le troisième
endosse le rôle d’un médiateur qui les aide à trouver une solution à leur conflit. Le débriefing qui
suit introduit la notion d’auto-médiation qui est ensuite mise en pratique dans le troisième jeu de
rôle. Le troisième scénario propose à deux participants de prendre le rôle d’acteurs d’une
situation conflictuelle et d’appliquer les méthodes d’auto-médiation afin de trouver eux-mêmes
une issue à leur désaccord. Le troisième participant intervient en tant qu’observateur de la
situation. Un débriefing final est mené sur la situation qui vient d’être jouée afin, notamment, de
faire une comparaison avec ce qui s’est passé dans les autres jeux de rôle pour mettre en
évidence l’utilité de l’auto-médiation et les points à améliorer concernant la mise en œuvre des
techniques d’auto-médiation.
Dans un autre domaine, Courau (2006) propose un jeu de rôle destiné aux collaborateurs d’une
compagnie d’assurance. Cette activité vise à leur faire prendre conscience des attentes des
clients et à les amener à comprendre l’intérêt de l’utilisation d’un guide destiné à les aider à bien
mener un entretien client. Le jeu de rôle leur propose d’incarner des clients d’une compagnie
d’assurance, réunis par une agence d’études afin d’identifier leurs attentes vis-à-vis du conseil
client dans cette société. Les clients répartis en trois groupes (jeunes, adultes et seniors) doivent
élaborer une « charte du client satisfait » décrivant ce qu’ils attendent d’un conseiller dans le
cadre de la vente d’un contrat d’assurance. Chaque groupe présente sa charte aux autres. Un
débriefing est mené sur le travail qui a été effectué et la manière dont les chartes ont été
élaborées. Pour conclure le débriefing, le formateur met en évidence les points-clés des chartes
qui portent sur les attentes des clients en matière de conseil notamment, et les met en relation
avec la fonction du guide d’entretien proposé par la société.
1 http://www.thiagi.com/pfp/IE4H/december2001.html#FeaturedActivity
69
Guéraud et Peyrin (1988) proposent quant à eux un jeu de rôle destiné à des étudiants en
informatique. Le jeu de rôle vise notamment à les faire réfléchir sur l’importance du travail de
spécifications d’un projet. Dans ce jeu, un client (incarné par le formateur), un scénariste et un
dessinateur doivent coopérer pour produire une page de bande dessinée. La difficulté à
surmonter par chaque participant est de répondre à la demande du client tout en respectant ses
intérêts propres. Chaque participant dispose d’un ordinateur comme seul moyen de
communication possible. Dans ce jeu de rôle, l’ordinateur a un rôle à part entière : il arbitre en
contrôlant par exemple le respect de certaines règles dans le déroulement du projet ; il anime le
jeu en introduisant des évènements aléatoires dans le scénario, obligeant les participants à
adapter leurs actions pour prendre en compte ces nouvelles contraintes. A l’époque où il a été
conçu, ce jeu était utilisé en sessions présentielles à l’aide d’ordinateurs connectés en réseau
local.
Exemples de jeux de rôle pédagogiques en ligne
Dans leur ouvrage The power of role-based e-learning, Wills et al. (2010) présentent plusieurs
exemples de jeux de rôles en ligne qui diffèrent notamment au niveau de l’environnement dans
lequel ils sont mis en œuvre : plateforme LMS (Learning Management System) classique ou
plateformes web spécifiques (Fablusi1, SIMPLE2), ou encore univers virtuels (par exemple
Second Life3).
Un premier exemple issu de cet ouvrage : Management science : the music festival est un jeu de
rôle mis en œuvre sur la plateforme SIMPLE. C’est un jeu de rôle organisé autour d’un projet : les
participants, répartis en groupes, jouent le rôle de consultants auprès d’une entreprise qui
souhaite organiser un festival de musique dans une ville. Dans ce contexte, les consultants
doivent élaborer le chemin critique du projet pour la planification, l’organisation et le déroulement
du festival.
Un second exemple tiré du même livre (Wills et al. 2010) porte sur un jeu de rôle utilisé dans un
tout autre domaine, le secteur santé-environnement. Ce jeu intitulé Accident Investigation est mis
en œuvre dans l’univers virtuel Second Life et vise des objectifs pédagogiques en lien avec la
conduite d’une enquête suite à un accident du travail. Les participants, organisés en binômes,
incarnent des agents du Health and Safety at Work Act (équivalent britannique de l’inspection du
travail) qui doivent mener l’enquête pour trouver les causes d’un incident (interview des témoins,
inspection des locaux pour trouver des indices, consultation de documents relatifs à l’entreprise
où s’est produit l’accident, etc.).
Le troisième exemple que nous détaillons ici, vise à illustrer l’utilisation du jeu de rôle dans un
dispositif de formation mixte. Dans le cadre du programme Life-Long Learning (apprentissage
1 http://www.fablusi.com/2 SIMulated Professional Learning Environment : http://simplecommunity.org/3 http://secondlife.com/?lang=fr-FR
70
tout au long de la vie) financé par la Commission Européenne1, le projet InterAct2, lancé en 2007,
a notamment abouti à l’élaboration d’un jeu de rôle en ligne. Le scénario Healthcare est conçu
pour une formation visant le développement de compétences de base concernant l’utilisation des
nouvelles technologies ainsi que le développement de compétences sociales (communication
interpersonnelle, travail en équipe et négociation). Ce dispositif est destiné à des personnes
travaillant dans le domaine de la santé (infirmières, aide-soignantes, etc.). La formation se
déroule sur cinq semaines à raison d’une journée de formation par semaine, systématiquement
suivie d’une phase de débriefing. Les participants sont géographiquement répartis en quatre
groupes se situant dans quatre pays européens différents. Chaque équipe est regroupée dans
une même salle au moment des sessions de formation. Le jeu met les participants dans le rôle
de membres du comité européen du bien-être et de la longévité. L’une des missions confiées à
ce comité est de collecter les théories et mythes à propos de la longévité afin de faire apparaître
les différences de points de vue des pays participants concernant cette thématique. Le scénario
est conçu de telle sorte qu’à un moment donné les équipes sont confrontées à une situation qui
les oblige à mettre en œuvre des compétences de négociation. Ici par exemple, une fois qu’une
liste de cinq théories et cinq mythes a été élaborée par chaque groupe, une nouvelle instruction
est envoyée au comité lui signalant qu’il ne doit finalement en retenir que dix au total. Ce jeu de
rôle fera l’objet d’une étude plus approfondie dans la section 8.2.2).
Des environnements informatiques en ligne spécifiques sont parfois développés pour
l’implémentation d’un jeu de rôle à des fins de formation. C’est le cas pour le dispositif
Laboratorium of Epidemiology ou Loé3 (Goncalves et al. 2010) qui plonge les étudiants en
médecine dans un environnement simulant un hôpital. Loé est notamment destiné à la mise en
pratique de compétences concernant la conception et la réalisation d’une étude épidémiologique.
Figure 15 - Laboratorium of Epidemiology : interview d'une patiente
1 http://ec.europa.eu/education/lifelong-learning-programme/doc78_fr.htm2 http://www.statvoks.no/interact/handbook_on_cd/handbook_uk.htm3 http://www.tel-laboratorium.fr/
71
3.4.5. Des jeux de formation sans simulation
A la différence des exemples présentés précédemment, d’autres jeux destinés à la formation ne
visent pas à simuler une situation ou un processus réel : ce type de dispositifs porte plus
spécifiquement sur la mémorisation ou la structuration de savoirs théoriques utiles à un
apprentissage plus global (correspondant à la première phase d’un processus d’apprentissage
séparant théorie et pratique tel qu’évoqué par Pastré 2006, cf. § 3.2.5). Pour aborder ce type
d’objectif d’apprentissage, les jeux utilisés s’appuient souvent sur des structures de jeux existants
(tels que le Trivial Pursuit1 ou le jeu de l’oie pour les plus classiques) ou ont recours à des jeux-
cadres pour la formation en présentiel (cf. § 2.2.3 et le jeu de classification conçu par Thiagi
détaillé plus loin) ou à des coquilles de jeux numériques, versions informatisées des jeux-cadres
(Sauvé et al. 2002).
L’une des solutions rencontrées pour acquérir et mémoriser des connaissances est leur
intégration dans un jeu de cartes. Dans les jeux-cadres de Thiagi2, il en existe plusieurs parmi
lesquels les jeux de cartes de classification. Ces jeux visent à favoriser la compréhension d’un
système de classification (par exemple dans le cadre d’une formation à la pédagogie,
l’identification des différents profils d’apprenants) ou d’un processus (tel que les étapes d’un
processus de résolution de problème) et à faciliter la mémorisation des éléments du système.
Développé par deux médecins américains, le jeu Healing Blade3 (cf. figure 16) est un jeu de
cartes destiné aux étudiants en médecine. Ce jeu vise l’acquisition de connaissances sur les
maladies infectieuses et les remèdes associés. Les principes du jeu reposent sur une
métaphore : les joueurs sont plongés dans un univers fantastique où les Apothecaries (solutions
thérapeutiques) affrontent les Lords of Pestilence (agents infectieux). Les connaissances visées
sont au cœur du jeu puisque le choix de solutions thérapeutiques adaptées constitue le seul
moyen d’atteindre la victoire.
1http://jeuxsoc.fr/?principal=/jeu/trivi2 http://www.thiagi.com3 http://www.thehealingblade.com
72
Figure 16 - Cartes du jeu Healing Blade
Des jeux de plateau vont également être utilisés pour appliquer des nouvelles connaissances et
en faciliter l’intégration. Thiagi propose une variété de jeux-cadres de ce type dans lesquels les
connaissances à acquérir sont confrontées avec les autres participants et leur bonne maîtrise est
nécessaire à la victoire. Louise Sauvé et les chercheurs du SAVIE1 s’intéressent à la conception
et à l’usage de versions informatisées de ce type de jeux et ont développé, dans le cadre de leur
travail, le Carrefour Virtuel des Jeux Educatifs2, plateforme web qui met à disposition des jeux
pour l’apprentissage.
1 http://www.savie.qc.ca2 http://www.savie.qc.ca/CarrefourJeux2
Synthèse : exemples d’utilisation du jeu pour la formation
Les exemples d’utilisation du jeu pour la formation présentés ici donnent une idée de
la variété des possibilités. Ils offrent notamment un éclairage sur quelques supports
d’implémentation possibles en fonction du degré de représentativité du réel
recherché et du niveau de complexité du modèle calculable sous-jacent à la
simulation : plateaux de jeu et cartes, utilisation d’objets tangibles proches de la
situation réelle, supports informatisés ou simplement interactions entre les
participants dans le cas des jeux de rôles pédagogiques. Au vu des contraintes de
notre contexte d’application (cf. § 1.2), parmi les caractéristiques identifiées à travers
les possibilités entrevues, nous avons choisi de nous intéresser à des dispositifs :
principalement basés sur le jeu de rôle pédagogique, c’est-à-dire proposant
une simulation de la situation réelle ne dépendant pas d’un modèle
calculable complexe,
intégrant par ailleurs certains aspects des jeux tels que le second degré, les
règles et autres ressorts de jeu.
73
3.5. Le débriefing : un moment-clé de la formation par le jeuComme évoqué dans la section 3.1, l’utilisation de jeux à des fins de formation est source de
paradoxe et aboutit souvent à une dénaturation du jeu et à une perte de ses bénéfices potentiels.
Devant ce constat, le recours au débriefing est considéré comme une solution pour pouvoir
profiter pleinement du jeu, en évitant de le dénaturer avec les intentions sérieuses pour
lesquelles il est utilisé. Brougère (2005) considère d’ailleurs que
« l’apport le plus intéressant dans la réflexion sur le jeu dans la formation d’adultes estl’accent mis sur ce qui suit le jeu stricto sensu. ».
Selon lui c’est en effet cette phase de débriefing qui distingue nettement l’utilisation du jeu dans
la formation des adultes, de son utilisation dans un contexte scolaire avec des enfants (Brougère
1999).
Tous les chercheurs qui s’y intéressent semblent unanimes sur le caractère incontournable du
débriefing dans un dispositif de formation utilisant le jeu (Crookall 1992, Stewart 1992,
Steinwachs 1992, Peters & Vissers 2004, Kriz 2010). Kriz (2010) va même jusqu’à dire qu’utiliser
un jeu sans conduire une phase de débriefing est inutile. Pour Petranek et al. (1992), dans ce
type de dispositif, l’apprentissage a lieu à trois niveaux : au sein même du jeu, lors du débriefing
oral qui suit le jeu et enfin à travers le compte-rendu écrit éventuellement réalisé par chaque
participant après le débriefing.
Malgré l’importance qu’elle revêt dans le processus d’apprentissage, les mêmes auteurs
déplorent que la phase de débriefing soit trop souvent négligée aussi bien du côté des pratiques,
que du côté de la recherche où les travaux sur les jeux concernent le plus souvent la conception
ou le développement plutôt que le débriefing.
3.5.1. Origines et définition
Le concept de débriefing est initialement issu de trois domaines distincts.
Le domaine militaire où le débriefing consiste à réunir les soldats afin qu’ils décrivent ce
qui s’est passé lors d’une intervention, qu’ils fassent le point sur les actions menées et
définissent la stratégie à appliquer par la suite. Dans le domaine militaire, le débriefing
désigne également les entrevues avec d’anciens prisonniers, otages ou victimes.
La recherche en psychologie où le débriefing est utilisé après des sessions
d’expérimentation afin que l’expérimentateur expose aux sujets sur quoi portait
réellement l’expérimentation.
L’éducation où le débriefing est utilisé après une activité d’apprentissage expérientielle
(cf. § 3.2.2) en tant qu’outil d’analyse.
Malgré une hétérogénéité manifeste dans les contextes d’usage du débriefing, une notion
commune ressort : quel que soit le domaine dans lequel il est utilisé, le débriefing est considéré
74
comme un moyen de fournir un « insight »1 de la situation. Dans tous les cas cités, le débriefing
vise à fournir une meilleure compréhension de la situation, que ce soit pour la personne qui a
vécu la situation (comme dans le cas des expérimentations en psychologie ou de l’utilisation du
débriefing en contexte d’apprentissage) ou pour une personne extérieure à la situation.
Par rapport à notre domaine d’étude, nous allons ici nous intéresser plus spécifiquement au
débriefing utilisé dans un contexte de formation, en nous basant notamment sur une définition
proposée par Thiagarajan (1992) selon laquelle
« le débriefing est un processus pédagogique utilisé après un jeu, une simulation, un jeude rôle, ou toute autre activité expérientielle. Il vise à aider les participants à réfléchir àl’expérience vécue afin d’en retirer une compréhension significative2. »
Dans un contexte d’apprentissage, le débriefing se déroule généralement sous la forme d’une
discussion guidée visant à questionner les participants sur l’expérience d’apprentissage et à les
amener à analyser ce qu’ils ont vécu (Petranek 1992). Le processus de débriefing sera présenté
de manière plus détaillée dans la section 3.5.3.
3.5.2. Rôles du débriefing dans un contexte pédagogique
La finalité principale donnée au débriefing est l’analyse réflexive portant sur une situation vécue
précédemment. Cette réflexivité est considérée comme une phase nécessaire à l’apprentissage
(Thiagarajan 1993 in Brougère 2005). Plusieurs rôles peuvent néanmoins être distingués selon le
contexte d’utilisation du débriefing et les objectifs du dispositif dans lequel il est intégré (Peters et
Vissers 2004). Dans le cas des jeux de simulation dont la finalité pédagogique est clairement
définie (formation ou évaluation des individus), le débriefing a une utilité à la fois pour le
formateur et pour les apprenants.
Pour le formateur, il permet de mettre en lumière ce qui s’est passé pendant l’activité, de
percevoir ce que les participants ont compris de la situation, la manière dont ils l’ont vécue et
éventuellement d’évaluer les apprentissages qu’ils en ont retirés.
Utilisé dans un but de formation, le débriefing se focalise sur les actions et performances des
apprenants mises en lien directement avec les objectifs définis dans l’activité de jeu. Dans ce
cas, le débriefing aide les participants à établir le lien entre l’expérience issue du jeu et les
expériences issues de la vie réelle, à faciliter le transfert des savoirs et savoir-faire développés
dans le jeu vers le monde réel.
L’importance du débriefing est également mise en évidence par des spécialistes de la didactique
professionnelle tel que Pastré (2006) qui considère que l’apprentissage a principalement lieu
dans l’activité en situation, et que l’analyse réflexive que constitue le débriefing est un moyen de
revenir rétrospectivement sur l’activité passée et d’en avoir une meilleure compréhension. Ce
1 En français : “compréhension”2 “ Debriefing is an instructional process that is used after a game, simulation, roleplay, or some other experiential activity forhelping participants reflect on their earlier experiences to derive meaningful insights.”
75
débriefing est notamment essentiel dans les dispositifs d’apprentissage basé sur l’utilisation de
simulations : c’est cette analyse réflexive qui permet la construction du modèle pragmatique,
c’est-à-dire la transformation d’un modèle de connaissances en modèle de diagnostic,
l’établissement d’un rapport entre des concepts scientifiques (la théorie) et des concepts
pragmatiques (la pratique) (Pastré 2002).
Peters et Vissers (2004) soulignent par ailleurs que le débriefing s’avère d’autant plus utile quand
le jeu et le système de référence qu’il simule ont, en apparence, peu de points communs. C’est le
cas pour les jeux basés sur une métaphore de la situation réelle de référence. Dans ce cas le
débriefing va aider les apprenants à prendre conscience des mécanismes sous-jacents, de la
manière dont la métaphore est construite et fonctionne afin de favoriser le transfert des
connaissances acquises vers la situation réelle. Dans le cas d’un jeu se rapprochant de façon
relativement fidèle d’une situation réelle, le rôle du débriefing consiste principalement à éviter des
généralisations hâtives et erronées issues de parallèles trop facilement effectués entre l’univers
du jeu et la réalité. Par ailleurs, étant donné que dans un jeu les participants ont une appréciation
de la situation limitée au point de vue du rôle qu’ils endossent, le débriefing, à travers le partage
des points de vue de tous les participants, a également pour objectif de fournir une plus large
vision de la situation et d’en assurer une compréhension plus globale.
Pour Lederman (1992), le processus réflexif engendré par le débriefing permet également de
mettre en relation les savoirs issus de la situation avec les connaissances préalables des
participants. Tout comme Dewey (1938), elle évoque la nécessité de cette étape qui vise à faire
comprendre aux apprenants de quelle manière ils pourront utiliser ce nouveau savoir dans
d’autres situations.
Le débriefing vise ainsi à faire sortir les participants du « cercle magique » créé par le jeu
(Huizinga 1938) tout en conservant les bénéfices de l’expérience vécue, des connaissances et
compétences acquises. C’est lors du débriefing que vont être explicités les contenus
d’apprentissage, qu’ils vont être rendus visibles aux apprenants. Ce rôle du débriefing est à
rapprocher du concept d’institutionnalisation défini dans la théorie des situations didactiques de
Brousseau (1998) de la manière suivante : « L’institutionnalisation est le passage pour une
connaissance de son rôle de moyen de résolution d’une situation d’action, de formulation ou de
preuve, à un nouveau rôle : celui de référence pour des utilisations futures, collectives ou
personnelles. » Le débriefing, en tant qu’activité d’institutionnalisation, vise à favoriser le transfert
d’une connaissance ou compétence acquise dans un contexte spécifique, celui de la situation de
jeu par exemple, à d’autres situations de la vie réelle.
Associé à des activités visant l’évaluation des apprenants, l’objectif du débriefing change, il ne
vise plus à favoriser un apprentissage chez les participants, mais est alors essentiellement
destiné aux formateurs et évaluateurs et vise à leur fournir des informations sur la performance
réalisée par le participant. Dans ce cas précis, le recueil d’informations à travers le débriefing a
76
une utilité uniquement si les informations recueillies dans l’activité (les traces laissées) sont
insuffisantes à une évaluation complète et pertinente.
Outre son rôle de médiation entre la situation d’apprentissage et la situation de jeu, le débriefing
utilisé à la suite d’un jeu a également une fonction cathartique. Comme nous le verrons dans le
paragraphe suivant à travers les processus de débriefing préconisés, cet espace de discussion
vise à permettre aux participants d’un jeu d’exprimer les émotions ressenties, les frustrations
vécues afin d’évacuer les tensions, de calmer l’excitation éventuelle résultante de la situation de
jeu. Cet exutoire, ce rituel de retour au calme est à mener au début de la session de débriefing,
comme un préalable nécessaire à la phase de réflexivité conduite par la suite.
3.5.3. Organisation du processus de débriefing
Le débriefing a généralement lieu après le jeu, mais dans le cas d’un dispositif qui se déroule sur
une période plus longue et composé de plusieurs sessions de jeu, des débriefings intermédiaires
peuvent être envisagés.
Thiagarajan (1992) souligne que l’une des difficultés dans l’organisation d’un débriefing est de
trouver un juste équilibre entre une discussion très structurée et des échanges plus libres. En se
basant sur les travaux de Thiagarajan (1993 in Kriz 2010) et sur des éléments issus de travaux
qu’il a menés auparavant, Kriz (2010) propose d’organiser les débriefings autour de six grandes
phases ou questions afin de s’assurer que ce moment joue pleinement son rôle.
Tout d’abord, le débriefing vise à décrire l’expérience vécue :
La phase 1 s’intéresse aux émotions ressenties et pose la question « Qu’avez-vous
ressenti ? » Les participants font ici part des émotions ressenties au moment même du
débriefing, c’est-à-dire après le jeu, mais ils se remémorent également ce qu’ils ont
ressenti pendant le jeu. L’objectif est relâcher les tensions éventuelles et de favoriser la
concentration pour la suite du débriefing. Cette phase va également permettre aux
participants de prendre de la distance par rapport à l’expérience de jeu et de se détacher
des rôles qu’ils ont joués.
La phase 2 revient sur l’expérience vécue afin d’en élaborer une description issue des
différents points de vue des participants. Elle est menée autour de la question « Que
s’est-il passé ? » qui initie une discussion autour des perceptions, observations et
réflexions portant sur l’activité elle-même. Le formateur peut orienter ces échanges
autour des objectifs pédagogiques ou des dynamiques de fonctionnement qui se sont
mises en place au sein des groupes selon les éléments sur lesquels il souhaite attirer
l’attention. Le but ici est de reconstituer ce qui s’est passé.
Ensuite, à partir de cette description, une analyse de l’activité va être menée.
77
La phase 3 va inciter les participants à établir un lien entre le jeu et l’expérience réelle par
l’intermédiaire d’une question du type « De quelle manière le jeu et la réalité sont-ils
connectés ? ». C’est ici qu’on initie un transfert de ce qui s’est passé dans le jeu
(compétences et connaissances mises en œuvre et acquises) vers la vie réelle, et plus
particulièrement dans le cas d’une formation professionnelle, vers le contexte
professionnel. Dans cette phase le jeu va être déconstruit : les rôles, règles et ressources
du jeu sont comparés avec les rôles, règles et ressources du système réel. L’accent est
tout particulièrement mis sur l’identification de similarités et de différences entre
l’expérience de jeu et la réalité pour éviter que les participants n’aboutissent à des
conclusions et généralisations inappropriées.
La phase 4 constitue une synthèse sur les apprentissages, basée sur les éléments issus
des trois phases précédentes. A travers la question « Qu’avez-vous appris ? » les
participants sont invités à identifier les apprentissages issus de l’expérience de jeu. On
vise ici à mutualiser, formaliser voire généraliser les conclusions issues de cette
expérience. L’expérience vécue et les nouveaux apprentissages commencent à être
intégrés aux structures cognitives des participants et sont consolidés à travers les
échanges avec les autres participants (approche constructiviste et socio-constructiviste
de l’apprentissage).
Afin de favoriser davantage le transfert des apprentissages issus de l’expérience de jeu et en vue
de préparer l’application des nouvelles compétences acquises, la fin de la discussion peut être
organisée autour de deux phases supplémentaires.
La phase 5 s’intéresse à des prolongements de l’expérience de jeu, à l’élaboration de
scénarios hypothétiques répondant à la question « Que serait-il arrivé si… ? ». Les
participants sont invités à réfléchir à ce qui aurait changé dans leur comportement, dans
celui de l’équipe ou des autres participants si les règles, les conditions ou un paramètre
quelconque du jeu avaient changé. De cette façon, ils sont incités à envisager
l’application de ce qu’ils ont appris à des contextes différents.
La phase 6 vise plus précisément à préparer la mise en application des compétences
acquises. La question « Que fait-on maintenant ? » invite à définir des objectifs clairs,
réalistes et mesurables en termes d’actions futures qui seront menées par les participants
dans des situations analogues à celles abordées dans le jeu.
Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour mener un débriefing selon la structure présentée
précédemment (Kriz 2010) : présence ou non d’un animateur menant les échanges, débriefing
oral ou écrit, débriefing individuel, en binôme ou avec l’ensemble des participants, etc. La plupart
du temps, un débriefing va faire appel à une combinaison de plusieurs méthodes.
Petranek et al. (1992) détaille notamment l’intérêt d’un débriefing individuel écrit, prenant la forme
de la rédaction d’un journal. Cette méthode a l’avantage de permettre à chaque apprenant
78
d’organiser et de poser concrètement, de manière personnelle, les connaissances issues du jeu
et les informations issues du débriefing collectif oral. Elle permet de garder une trace et favorise
la prise de recul, accentuant davantage la réflexivité sur l’expérience vécue et favorisant
l’intégration des nouveaux apprentissages.
Synthèse : le débriefing
Dans notre contexte d’intégration du jeu dans un dispositif de formation, le recours
au débriefing s’avère incontournable. C’est au cours du débriefing que se fait le lien
entre l’expérience de jeu et le réel, favorisant ainsi la prise de conscience des
objectifs de formation et le transfert, dans la situation professionnelle réelle, des
compétences acquises. Le débriefing s’avère d’autant plus utile lorsque la situation
proposée dans le jeu n’est pas strictement fidèle à la réalité : c’est le cas lorsqu’une
métaphore de la situation réelle est utilisée pour décontextualiser les connaissances
et les mettre en exergue. Afin de s’assurer d’atteindre au mieux les objectifs qui lui
sont assignés, la phase de débriefing doit être organisée et conduite de manière
rigoureuse, selon les méthodes détaillées précédemment.
79
Chapitre 4. LA QUESTION DE LA MOTIVATION
Dans les pages précédentes, nous avons montré que l’un des intérêts du jeu pour la formation
réside dans sa capacité de simulation de situations réelles et la mise en œuvre d’un
apprentissage expérientiel (cf. § 3.2.2). Un autre intérêt est fréquemment mis en avant : le jeu
aurait la capacité de renforcer la motivation des participants. Cette caractéristique constitue l’un
des principaux arguments justifiant l’utilisation du jeu en contexte de formation, la motivation
étant une question centrale dans le domaine de l’apprentissage. L’hypothèse sous-jacente est de
développer, grâce au jeu, des comportements favorisant l’apprentissage tels que l’engagement
dans l’activité et la persévérance. Comme nous allons le voir, le jeu fait en effet partie de ces
activités capables d’engager pleinement les participants et de les mettre dans un état de flow
(Csikszentmihalyi 1990), état optimal de motivation intrinsèque où l’individu est complètement
immergé dans l’activité.
Notre volonté d’expliciter le lien entre jeu et motivation vise un but opérationnel : guider la
conception de dispositifs de formation utilisant le jeu afin de favoriser la motivation des
participants. Cette finalité nous amène donc à chercher des réponses aux questions suivantes :
pourquoi jouons-nous ? Qu’est-ce qui, dans le jeu, pousse les individus à jouer ? Qu’est-ce qui va
créer cet état de flow, d’engagement des participants dans l’activité de jeu ?
Dans ce chapitre, nous nous attachons tout d’abord à comprendre ce qu’est la motivation et à
présenter des théories de la motivation en lien avec l’apprentissage et/ou le jeu. Nous présentons
ensuite des travaux visant à identifier les facteurs du jeu générant l’engagement des participants.
Enfin nous nous intéressons au triptyque jeu - motivation - apprentissage et tentons d’identifier la
nature des relations entre ces éléments.
4.1. La notion de motivationLa motivation apparaît comme un dénominateur commun au jeu et à l’apprentissage. C’est avant
tout un objet de recherche qui intéresse depuis longtemps de nombreux chercheurs : Fenouillet
(2009b) a répertorié 101 théories de la motivation, les premières datant de la fin du XIXe siècle
(James 1890 et McDougall 1908 in Fenouillet 2009).
La motivation a notamment été beaucoup étudiée dans le domaine de la psychologie où
Vallerand et Thill (1993) proposent une définition sur laquelle nous appuyons notre réflexion et à
partir de laquelle nous retenons que la motivation décrit :
« les forces internes et/ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensitéet la persistance du comportement ».
D’après Roussel (2000), les éléments constituant cette définition de la motivation peuvent être
décrits de la manière suivante :
80
le déclenchement du comportement correspond au passage de l’inactivité à l’activité.
L’activité est considérée comme une exécution de tâches requérant une dépense
d’énergie soit physique, intellectuelle ou mentale. A ce niveau, la motivation apparaît
comme la source d’énergie nécessaire au déclenchement du comportement ;
la direction du comportement : la motivation dirige le comportement vers les objectifs à
atteindre, elle est dans ce sens étroitement liée aux objectifs que se donne l’individu de
façon consciente ou non ;
l’intensité du comportement désigne l’énergie dépensée et donc le niveau des efforts
fournis pour atteindre les objectifs. Cette intensité est réglée par la motivation ;
la persistance du comportement se réfère à la continuité dans le temps des
caractéristiques de direction et d’intensité du comportement, c’est-à-dire au maintien des
efforts pour atteindre le but visé. La motivation influe également sur la persistance du
comportement.
Dans la suite de ce chapitre, nous nous intéressons plus spécifiquement à deux théories de la
motivation, retenues parce qu’elles alimentent très souvent soit les travaux sur l’apprentissage
(théorie de l’autodétermination, cf. § 4.2), soit les travaux sur le jeu (théorie du flow, cf. § 4.3), et
sont aussi en mesure de fournir des éléments pour nourrir la réflexion sur l’association de ces
deux activités, jeu et apprentissage.
Nous étudions ensuite des approches spécifiques de la motivation en lien avec la formation et
l’apprentissage. Nous nous intéressons dans un premier temps à des travaux menés sur la
motivation en formation d’adultes mettant en lumière la problématique de l’engagement dans la
formation. Pour compléter cette approche, nous étudions la motivation dans le contexte scolaire,
qui s’attache davantage à l’étude de l’engagement dans l’apprentissage, notamment avec le
modèle de la motivation scolaire défini par Viau (1998). Même si le profil du public diffère de
notre champ d’application (enfants d’un côté, adultes de l’autre), le contexte scolaire permet
d’étudier le cas des situations non choisies par les apprenants, fournissant ainsi un éclairage
intéressant sur l’engagement dans l’apprentissage.
4.2. La théorie de l’autodéterminationL’une des théories sur laquelle s’appuient de nombreux travaux portant sur la motivation en
contexte d’apprentissage est la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan 1985). Elle part du
principe que l’individu, de manière innée, tend à la satisfaction de trois besoins psychologiques
fondamentaux (Deci & Ryan 1985) :
le besoin d’autonomie qui se réfère au fait que l’action réalisée par l’individu est le fruit de
sa propre décision,
81
le besoin de compétence qui se réfère au sentiment d’efficacité de l’individu sur son
environnement et qui est par ailleurs lié au désir d’explorer et de relever des défis,
le besoin de relation à autrui qui est associé au sentiment d’appartenance à un groupe,
au sentiment d’être signifiant aux yeux de personnes que l’individu estime importantes
pour lui.
Les recherches de Deci & Ryan (1985) mettent en évidence deux grands types de motivation : la
motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque.
La motivation intrinsèque renvoie à la nature autotélique d’une activité, elle correspond à
l’engagement d’un individu dans une activité qu’il juge intéressante en elle-même (pour le plaisir,
la satisfaction qu’elle procure), sans qu’il n’y ait d’autres récompenses ou pressions extérieures à
l’activité elle-même. Ce type de motivation est associé à un meilleur apprentissage et à un bien-
être général plus important de l’individu (Deci & Ryan 1987).
La motivation extrinsèque, quant à elle, désigne l’engagement dans une action qualifiée
d’instrumentale dans le sens où elle vise à produire un résultat autre que l’activité en elle-même.
L’engagement extrinsèque est issu de facteurs extérieurs tels que la récompense ou la pression
sociale par exemple. La motivation extrinsèque est composée de plusieurs niveaux, qui se
distinguent selon la nature de la régulation gouvernant le comportement de l’individu.
La régulation externe : l’action de l’individu est contrôlée par des éléments extérieurs,
l’individu se sent obligé de s’engager dans l’activité, généralement pour obtenir une
récompense ou pour se soumettre à des contraintes sociales.
La régulation introjectée : l’action de l’individu est due à des pressions internes telles
qu’un sentiment de culpabilité ou de honte.
La régulation identifiée : l’action est menée car l’individu la juge importante pour
accomplir d’autres buts personnels.
La régulation intégrée : elle est liée à l’estime de soi, l’individu s’engage dans l’activité car
elle correspond à ses valeurs.
Des études, citées par Laguardia & Ryan (2000) ont montré une influence négative de facteurs
extrinsèques de motivation sur la motivation intrinsèque : les récompenses tangibles, les
menaces, l’évaluation, les feedbacks négatifs sont par exemples des facteurs qui diminuent la
motivation intrinsèque.
Les types de motivations identifiés constituent différents degrés d’une échelle de
l’autodétermination (Sarrazin et al. 2006) : le niveau le plus élevé est la motivation intrinsèque et
le niveau le plus faible l’amotivation ou absence de motivation (cf. figure 17).
82
Figure 17 - Les différents types de motivation identifiés dans la théorie de l'autodétermination (Sarrazin et al. 2006)
Deci et Ryan ont défini qu’une motivation autodéterminée correspond soit à une motivation
intrinsèque, soit à une motivation extrinsèque à régulation intégrée ou identifiée.
Dans le domaine scolaire, des études (citées par Laguardia & Ryan 2000) ont prouvé que la
motivation autodéterminée a des effets positifs sur l’apprentissage de façon générale, elle
améliore par ailleurs la compréhension en lecture, l’attitude de l’apprenant vis-à-vis de l’école et
les résultats scolaires.
4.3. Engagement dans l’activité : la théorie du flowNous présentons ici la théorie du flow, une approche de la motivation qui s’intéresse à un état
particulier d’engagement dans une activité. Mais avant d’aborder plus en détails la théorie du
flow, nous souhaitons éclaircir la notion d’engagement. Au premier abord, il s’avère difficile de
trouver une définition usuelle qui corresponde à l’utilisation de la notion d’engagement dans notre
contexte, c’est-à-dire telle que l’utilise Brougère (2005) :
« cet engagement qui renvoie à la motivation du joueur dont l’intensité est souventsoulignée ».
Les définitions proposées par le Petit Robert1 sont nombreuses mais aucune ne coïncide
totalement avec cet emploi. Lorsque l’engagement d’un individu dans une activité est évoqué, il
exprime l’idée d’entrée dans l’activité correspondant à l’une des définitions proposées : « Action
d’engager, de commencer (une action) ». Toutefois, une autre idée sous-jacente ressort de
l’usage qui nous intéresse et semble essentielle, il s’agit d’une notion commune à plusieurs des
définitions usuelles proposées : l’engagement exprime l’idée d’être dans une situation à laquelle
on ne peut pas se soustraire, de laquelle il est difficile de se défaire. Selon cette perspective, dire
que le jeu engage les participants revient à dire qu’il les entraîne dans une activité qu’ils ne
peuvent ou ne veulent pas quitter. C’est à cette approche que se réfère la notion d’engagement
utilisée dans la théorie du flow.
Selon Brougère (2005), le fort degré d’engagement du jeu est en partie dû au fait que le joueur
décide d’y participer librement parce qu’il y trouve un intérêt. Ceci rejoint le besoin d’autonomie
identifié dans la théorie de l’autodétermination présentée précédemment (Deci & Ryan 1985) –
cf. § 4.2 - comme l’un des besoins fondamentaux qu’un individu cherche à satisfaire. C’est, pour
1 J Rey-Debove, A. Rey (sous la direction de), Le Petit Robert de la langue française 2006, Paris, Dictionnaires Le Robert, 2004
83
Brougère, ce fort degré d’engagement des joueurs qui explique l’intérêt porté à l’utilisation du jeu
dans un contexte éducatif.
Brougère fait également partie des nombreux auteurs qui proposent de se tourner vers la théorie
du flow (Csikszentmihalyi 1990) pour mieux comprendre la nature et les autres facteurs de
l’engagement provoqué par le jeu. A la différence de la théorie de l’autodétermination qui nous
amène à comprendre ce qui va créer la motivation qui pousse un individu à entrer dans une
activité (et concerne donc la composante « déclenchement » de la motivation), la théorie du flow
nous dirige vers la compréhension de ce qui maintient l’individu dans une activité, de ce qui
génère un fort degré de persévérance, de concentration et d’implication (et concerne donc les
composantes « intensité » et « persistance »). Par ailleurs, l’une des particularités intéressantes
de la théorie du flow est qu’elle porte sur l’étude du comportement des adultes, contrairement à la
plupart des travaux sur le jeu qui concernent les enfants.
Le concept de flow, traduit en français par flux ou flot, a été introduit dans les années 70 par le
psychologue Csikszentmihalyi. Il décrit l’état psychologique dans lequel se retrouve une
personne qui est complètement engagée, absorbée dans une activité. Csikszentmihalyi (1975)
décrit le flow comme
« une sensation holistique1 qu’un individu ressent quand il agit avec une implicationtotale »2.
Il est intéressant de noter que le terme flow experience vient du fait que lorsqu’ils sont dans cet
état psychologique, les individus décrivent leurs pensées et leur actions comme spontanés et
faciles, ils ont l’impression de ne pas avoir besoin de fournir beaucoup d’efforts même si ce qu’ils
sont en train de faire est difficile et risqué. Le terme flow a été choisi par analogie avec le courant
d’une rivière, flow en anglais : l’état de flow place les individus dans un processus aussi facile et
entraînant que de se laisser porter par le courant d’une rivière, un processus qui ne demande ni
effort ni contrôle (Csikszentmihalyi 2000). Nous retrouvons ici une caractéristique qui nous
semble centrale dans la notion d’engagement : l’idée d’être entraîné dans le flow de l’activité.
Csikszentmihalyi a identifié plusieurs dimensions de l’expérience de flow. Quatre d’entre elles
correspondent aux conditions qui rendent une activité propice au flow, il s’agit de :
la définition d’objectifs précis à chaque étape ;
un juste équilibre entre le défi et les compétences mises en jeu (cf. figure 18) : pour le
maintenir dans un état de flow et éviter l’ennui (boredom) ou l’anxiété (anxiety), l’activité
doit proposer des défis (challenges) à portée des compétences (skills) de l’individu, sans
qu’ils ne soient ni trop faciles ni trop difficiles ;
le caractère autotélique de l’activité : elle est une récompense en elle-même ;
1 Holistique : qui englobe, totale, qui affecte l’individu dans sa globalité2 “the holistic sensation that people feel when they act with total involvement”
84
des rétroactions immédiates fournies lors de l’activité, entraînant des ajustements des
actions de l’individu.
Figure 18 - Le flow, un équilibre entre le niveau de challenge proposé et le niveau de compétences requis(Csikszentmihalyi 1990).
Les autres dimensions décrivent quant à elles l’état de conscience modifié vécu lors du flow :
l’attention est focalisée sur un domaine précisément délimité, la concentration est intense,
les préoccupations ordinaires sont mises de côté ;
la conscience de soi disparaît, action et conscience ne font plus qu’un : le sujet fait partie
de l’action ;
l’effacement de la peur de l’échec : les individus ont un sentiment de contrôle de soi et de
l’environnement ;
l’altération de la perception du temps qui passe.
La théorie du flow, mettant notamment l’accent sur le caractère autotélique de l’activité, apparaît
comme une autre façon d’aborder la motivation intrinsèque : cela explique sans doute son
utilisation dans les travaux sur l’apprentissage (cf. § 4.2 à propos de la motivation intrinsèque et
de son lien avec l’apprentissage). Etudié sous l’angle de la théorie du flow (Csikszentmihalyi
1990), l’engagement créé par le jeu favoriserait l’apprentissage, les comportements exploratoires
et l’attitude générale des individus vis-à-vis de l’activité (Webster et al. 1993; Skadberg & Kimmel
2004 et Ghani 1991 in Kiilii 2005).
Parmi les caractéristiques du flow, le sentiment de compétence est lui-aussi particulièrement
intéressant dans un contexte d’apprentissage : le flow donne en effet au joueur le sentiment de
pouvoir réussir la tâche dans laquelle il est engagé, l’incitant ainsi à s’y consacrer pleinement et à
y investir un haut niveau d’efforts.
85
4.4. Motivation et apprentissageDans cette section nous nous intéressons à des travaux axés sur la motivation en lien avec
l’apprentissage. Qu’est-ce qu’un apprenant motivé ? Garris, Ahlers et Driskell (2002), en se
basant sur la théorie de l’autodétermination, identifient les caractéristiques suivantes chez un
apprenant motivé : un apprenant motivé est « enthousiaste, concentré et engagé », il est
« intéressé et apprécie ce qu’il est en train de faire, il fait des efforts et persiste dans le temps. ».
Pour mieux cerner les conditions permettant de créer cet état de motivation chez les apprenants,
nous abordons tout d’abord des études relatives à la motivation dans le contexte de la formation
professionnelle d’adultes s’intéressant à la problématique globale de l’engagement dans la
formation. Pour compléter cette approche, nous étudions ensuite des travaux menés dans le
contexte scolaire, davantage étudié, et apportant un éclairage sur le volet plus précis de
l’engagement dans l’activité d’apprentissage.
4.4.1. Motivation d’adultes en formation professionnelle
Dans le contexte de la formation professionnelle d’adultes, la motivation est traitée selon deux
points de vue (Bourgeois 1998) :
d’une part l’étude de la motivation concerne l’engagement dans la formation (au sens ici
d’entrée dans la formation), qui comprend les motifs qui poussent l’individu à s’inscrire et
à participer à une formation ;
d’autre part l’étude de la motivation s’intéresse à l’engagement dans l’apprentissage, ou
plus précisément dans les activités d’apprentissage, c’est-à-dire (du point de vue
cognitiviste) dans un processus de transformation de connaissances préalables de
l’individu.
L’engagement dans l’apprentissage a surtout été étudié dans le contexte scolaire, nous nous y
intéressons plus spécifiquement dans la section 4.4.2 qui suit. L’engagement dans la formation
est quant à lui plus spécifique à la formation professionnelle d’adultes où il peut résulter d’un
choix personnel de l’individu, alors que dans le contexte scolaire il est la plupart du temps
contraint.
Bourgeois (1998) précise que l’engagement dans la formation est favorisé si l’individu identifie
clairement les bénéfices qu’il pourra en retirer et qu’il a le sentiment d’être en mesure de réussir.
Ceci rejoint, comme nous le verrons dans la section suivante, les facteurs améliorant la
motivation à apprendre en contexte scolaire.
Carré (1998) caractérise les motifs d’engagement en formation pour les adultes selon 2 axes (cf.
figure 19) : d’une part, l’orientation intrinsèque ou extrinsèque du motif, d’autre part son
orientation vers l’apprentissage ou vers la participation à la formation.
86
L’orientation intrinsèque correspond au cas où l’engagement est motivé par le fait même d’être
en formation, c’est-à-dire que la formation en elle-même est l’objet de l’engagement. A l’opposé,
un motif à orientation extrinsèque porte sur des objectifs extérieurs à la formation elle-même
(rémunération, acquisitions de compétences, etc.).
L’orientation vers l’apprentissage caractérise les motifs qui concernent les contenus de la
formation. De son côté l’orientation vers la participation se réfère aux motifs d’engagement
relatifs à l’inscription et à la présence à la formation.
Figure 19 - Motifs d'engagement en formation (Carré 1998)
Carré (1998) identifie dix motifs d’engagement dans la formation pour adultes. Ces motifs
caractérisés selon les deux axes présentés précédemment (cf. figure 19) ne sont pas exclusifs
les uns des autres mais se combinent au contraire généralement au minimum par paire. Trois
types de motifs correspondent à une orientation intrinsèque :
les motifs épistémiques concernent l’envie d’apprendre et sont donc orientés vers
l’apprentissage ;
les motifs socio-affectifs correspondent à une recherche de contacts sociaux et sont donc
orientés vers la participation à la formation ;
les motifs hédoniques sont eux aussi orientés vers la participation à la formation ; ils sont
indépendants du contenu de la formation et concernent le plaisir lié aux aspects matériels
et au déroulement de la formation (outils, documents, lieu, etc.).
Les sept autres motifs identifiés par Carré (1998) correspondent à une orientation extrinsèque :
les motifs économiques où l’engagement dans la formation se fonde sur les retombées
économiques qui en découleront, liées par exemple à une promotion professionnelle ;
87
les motifs prescrits où la formation est suivie suite à une prescription, par exemple venant
de la hiérarchie ;
les motifs dérivatifs, dans ce cas la participation à la formation vise à éviter une situation
considérée comme désagréable, elle est par exemple considérée comme un moyen
d’échapper à la routine habituelle ;
les motifs opératoires professionnels correspondent à un engagement dans la formation
motivé par le développement de compétences nécessaires pour réaliser une activité
professionnelle ;
les motifs opératoires personnels sont similaires aux motifs précédents mais portent sur
des activités relatives à la vie privée ou au loisir ;
les motifs identitaires considèrent l’engagement dans la formation comme un moyen de
transformer ou de préserver les caractéristiques identitaires de l’individu, ces motifs
concernent l’image sociale de l’individu, son identification professionnelle, culturelle,
sociale ou familiale ;
les motifs vocationnels ont une portée plus lointaine que les motifs économiques ou
identitaires et visent, à travers la formation, l’obtention d’un emploi ou sa transformation.
Le motif opératoire professionnel apparaît comme l’objectif le plus courant, surtout du point de
vue de l’entreprise ou de la hiérarchie qui décide de la mise en place d’une formation. Il est de
plus souvent associé à un motif prescrit.
Les motifs relatifs à l’engagement dans la formation apparaissent comme des motifs sur lesquels
le formateur ne peut avoir de réelle influence. Pour la plupart, ils ne dépendent pas réellement de
la façon dont sont conçues ou menées les activités pédagogiques. C’est pourquoi, par rapport à
notre objectif de recherche, nous nous intéressons plus spécifiquement aux facteurs relatifs à
l’engagement dans les activités d’apprentissage.
4.4.2. Une approche socio-cognitive de la motivation scolaire
La motivation a été tout particulièrement étudiée dans le contexte scolaire, par Viau (1998)
notamment, qui la définit comme
« un état dynamique qui a ses origines dans les perceptions qu’un élève a de lui-même etde son environnement et qui l’incite à choisir une activité, à s’y engager et à persévérerdans son accomplissement afin d’atteindre un but. ».
Cette définition et le modèle de motivation scolaire proposés par Viau (cf. figure 20) sont basés
sur une approche sociocognitive (Bandura 1986, Schunk 1989, Zimmerman 1990, Pintrich &
Schrauben 1992 et Dweck & Legget 1988 in Viau 1998).
L’approche sociocognitive considère la motivation, et de façon plus générale l’ensemble des
phénomènes humains auxquels elle s’intéresse, au regard des interactions qui existent entre les
88
comportements d’un individu, ses caractéristiques individuelles et l’environnement qui l’entoure.
Selon l’approche du déterminisme réciproque (Bandura 1986 in Viau 1998), toutes ces variables
s’influencent mutuellement. La motivation, en tant que caractéristique individuelle, est elle aussi
soumise à cette dynamique d’influences mutuelles. C’est un phénomène dynamique qui change
constamment sous l’influence de facteurs internes et externes eux aussi changeants. En contexte
scolaire, cela signifie que la motivation d’un apprenant influence ses propres comportements, sa
relation avec l’enseignant et avec l’activité d’apprentissage (considérés ici comme éléments de
l’environnement), mais cela signifie aussi qu’elle est influencée par eux.
D’après le modèle de motivation en contexte scolaire de Viau (cf. figure 20), la motivation est :
déterminée par les perceptions de l’élève concernant le contexte, et plus spécifiquement
ici ses perceptions sur la valeur de l’activité, sa compétence à réaliser cette activité et sa
possibilité de contrôle sur l’activité,
traduite par le choix de se lancer dans une activité, un certain niveau d’engagement
cognitif et de persévérance dans l’accomplissement cette activité, facteurs qui vont quant
à eux influer sur la performance (le résultat de l’activité).
Figure 20 - Modèle de motivation en contexte scolaire (Viau 1998)
Barbeau (1994) qui adopte une approche socio-cognitiviste de l’apprentissage similaire à celle de
Viau, présente l’engagement cognitif comme « la qualité et le degré d’effort mental dépensé lors
de l’accomplissement de tâches d’apprentissage. ».
Viau (1998) souligne que la motivation n’influence pas directement la performance mais agit sur
d’autres facteurs (tels que persévérance et engagement cognitif) qui eux ont une influence
directe sur l’apprentissage. Fenouillet et Tomeh (1998), qui se sont intéressés à l’effet de la
motivation sur la mémoire, vont également dans ce sens en soulignant que la motivation permet
d’activer des stratégies d’apprentissage efficaces qui favorisent l’intégration des informations
89
dans la mémoire à long terme (attention, connexions avec les connaissances antérieures et
organisation des informations).
Comment favoriser la motivation des apprenants ?
En s’intéressant à la dynamique motivationnelle et non aux origines neurobiologiques ou
psychologiques de la motivation, Viau vise à proposer une définition et un modèle qui apportent
des explications sur la façon dont la motivation se développe et sur ses effets sur le
comportement. Le but final est ici assez proche de nos préoccupations : aider les enseignants à
mettre en place des situations d’apprentissage favorisant la motivation des apprenants. Tout en
n’oubliant pas, comme le précise Viau (1998), que
« si le devoir de l’enseignant est de créer un environnement qui favorise la motivation del’élève, celle-ci dépend d’abord et avant tout de la volonté de l’élève. »
L’activité d’apprentissage proposée fait partie des nombreux facteurs qui influent sur la motivation
des apprenants. En s’appuyant sur diverses études, Viau (2004) a identifié les conditions qu’une
activité doit remplir pour susciter la motivation des apprenants :
le sens : l’activité doit être signifiante pour les apprenants,
la variété : l’activité doit être diversifiée tout en s’intégrant de façon cohérente à
l’ensemble des activités d’apprentissage,
le défi : l’activité doit proposer un défi à l’apprenant,
l’authenticité : l’activité doit revêtir un caractère authentique pour l’apprenant,
l’engagement cognitif : l’activité doit mettre en jeu un certain effort mental,
la responsabilité : l’activité doit responsabiliser l’apprenant en lui offrant la possibilité de
faire des choix,
la collaboration : l’activité doit favoriser les interactions et la collaboration entre plusieurs
apprenants,
l’interdisciplinarité : l’activité doit faire appel à des compétences ou connaissances issues
de plusieurs domaines,
la clarté des consignes : l’activité et son but doivent être expliqués de manière claire aux
apprenants,
la durée : l’activité doit être organisée sur une durée adaptée.
90
Motivation scolaire et dévolution
La question de la motivation dans une situation d’apprentissage rejoint par ailleurs des aspects
liés au processus de dévolution de la tâche tel que défini par Brousseau (1998) dans sa théorie
des situations didactiques. La dévolution est vue par Brousseau comme jouant un rôle central
dans le cadre d’une approche active de l’apprentissage où l’apprenant doit prendre en charge la
construction de ses connaissances. La dévolution consiste en
« l’acceptation par les élèves de la responsabilité du problème à résoudre, à leur prise deconscience que la résolution du problème ne dépend que des connaissances qu’ilsengageront dans la situation » (Brousseau 1998).
Même si Brousseau souligne que la dévolution est en majeure partie une problématique d’ordre
didactique, la motivation apparaît comme un élément important de ce processus qui suppose que
l’apprenant s’approprie les buts de l’activité qui lui est proposée afin de s’y investir pleinement et
de persévérer jusqu’à ce qu’il trouve lui-même la solution du problème. Du côté de l’enseignant,
la mise en œuvre d’une situation propice à la dévolution s’apparente à la création d’une
motivation extrinsèque autodéterminée (cf. § 4.2, travaux de Deci & Ryan). Dans les travaux de
Brousseau, le jeu apparaît comme un type d’activité qui peut répondre à ce besoin de dévolution
des activités d’apprentissage, tant du point de vue motivationnel que du point de vue de
l’approche didactique que sa conception nécessite.
91
Synthèse : théories de la motivation et apprentissage
La motivation recouvre deux grands aspects dans le contexte de la formation
professionnelle d’adultes : l’engagement dans la formation tout d’abord, qui
apparaît lié à des motifs personnels et individuels. Dans notre contexte
d’application, les motifs d’entrée dans la formation ont très souvent un caractère
prescrit et opératoire professionnel. L’engagement dans la formation n’est pas
l’élément principal sur lequel l’enseignant ou le concepteur pédagogique peut
avoir une influence. C’est davantage au niveau de l’engagement dans
l’apprentissage, second aspect de la motivation dans un contexte de formation
d’adultes, que le travail du concepteur pédagogique peut agir : l’activité
d’apprentissage fait en effet partie des facteurs influençant la motivation (cf.
caractéristiques identifiées par Viau 1998).
Les théories de la motivation étudiées et leur mise en relation avec
l’apprentissage font apparaître d’un côté des facteurs suscitant l’engagement
dans l’activité (cf. éléments de la théorie de l’autodétermination), et d’un autre
côté des facteurs favorisant la persévérance et le maintien dans l’activité (cf.
théorie du flow et caractéristiques d’une activité motivante définies par Viau).
Nous en retenons les principes suivants que nous intégrons à notre réflexion sur
la conception de dispositifs de formation favorisant la motivation des apprenants :
selon la théorie de l’autodétermination, l’engagement d’un individu dansune activité vise à satisfaire trois besoins fondamentaux : le besoind’autonomie, le besoin de compétence et le besoin de relation à autrui ;
parmi les différentes formes de motivation, la motivation autodéterminéeest celle qui a des effets positifs sur l’apprentissage ;
la théorie du flow et les travaux de Viau, rejoignent la théorie del’autodétermination en mettant en avant un équilibre nécessaire entre défiet compétence pour maintenir l’engagement dans l’activité.
92
4.5. Différentes approches pour identifier les caractéristiquesmotivantes d’un jeu
Même si la corrélation directe entre le jeu et un apprentissage plus performant est difficile à
démontrer (Egenfeldt-Nielsen 2005), le jeu apparaît comme une source de motivation et d’intérêt.
Ce sont ces qualités qu’il nous intéresse d’exploiter dans un contexte de formation car elles
contribuent à créer un environnement favorable à l’apprentissage.
Selon cette approche, notre but en intégrant le jeu dans un dispositif de formation est, entre
autres, de favoriser et maintenir la motivation des participants. Si le jeu a des effets bénéfiques
sur la motivation, nous verrons que c’est notamment parce qu’il met en œuvre des principes qui
sont au cœur des théories de la motivation abordées précédemment. Afin de guider la conception
de dispositifs de formation utilisant le jeu pour favoriser la motivation, il nous importe d’identifier
ces principes du jeu susceptibles de créer un engagement des participants.
De nombreux chercheurs se sont intéressés à cette identification des facteurs de motivation
inhérents au jeu. Nous nous attachons ici à présenter les approches qui nourrissent nos travaux
et sur lesquelles s’appuient les propositions que nous présentons dans le chapitre 10.
4.5.1. S’intéresser à l’attitude du joueur : retour aux travauxfondateurs de Caillois
Dans son intervention lors de l’atelier Jeux sérieux de la conférence EIAH 2009, Gilles Brougère
soulignait que « le jeu est une affaire d’attitude plutôt que de structure ». Cette idée nous amène
à approfondir les travaux de Caillois (1958) qui s’est penché sur l’attitude des joueurs et en a fait
la base de sa classification des jeux (travaux déjà évoqués § 2.2.1). L’amplitude du champ
d’étude investigué par Caillois confère à ses propositions un certain niveau de généricité et une
validité durable : Caillois s’est intéressé à des jeux de cultures, civilisations et époques diverses,
possédant ou non des règles et s’adressant à des publics variés (adultes ou enfants).
Le fait que ce travail ne porte pas sur les jeux informatisés, contrairement à la majorité des
travaux ultérieurs portant sur le jeu et la motivation, correspond à l’approche du game-based
learning que nous adoptons, dans laquelle nous souhaitons considérer le jeu au sens large en
incluant l’étude de jeux autres que les jeux informatisés (cf. § 3.4.1).
Dans le but de proposer « un principe de classement qui permette de répartir [tous les jeux] en
un petit nombre de catégories bien définies », Caillois (1958) s’est intéressé au caractère
fondamental du jeu qui pousse le joueur à s’y adonner et le positionne dans une attitude de jeu
spécifique. Il distingue ainsi quatre catégories de jeux, selon que prédomine la compétition, le
simulacre, le hasard ou la recherche du vertige.
Agôn, vient du mot grec signifiant compétition. Il désigne les jeux où le rôle de la compétition est
central. A travers ce type de jeux les participants cherchent à démonter leur supériorité dans un
93
domaine spécifique. La victoire est basée sur un niveau de maîtrise d’une compétence supérieur
à celui de l’adversaire :
« Il s’agit donc chaque fois d’une rivalité qui porte sur une qualité (rapidité, endurance,vigueur, mémoire, adresse, ingéniosité, etc.), s’exerçant dans des limites définies et sansaucun secours extérieur, de telle façon que le gagnant apparaisse comme le meilleurdans une certaine catégorie d’exploits » (Caillois 1958).
La compétence mise en jeu peut relever du domaine physique ou mental. Le désir de l’individu
qui accompagne l’engagement dans un jeu de type agôn est de voir ses compétences
reconnues.
Alea vient du mot latin qui désigne le jeu de dés. Cette dénomination désigne les jeux où le rôle
du hasard est prédominant. Contrairement aux jeux d’agôn où la victoire repose sur les seules
compétences des participants et le triomphe vis-à-vis d’un adversaire, dans les jeux de type alea
la victoire est due au destin. Dans ce type de jeux, les participants se livrent donc aux choix du
hasard, synonymes de fortune ou d’infortune, sans compter sur leurs compétences personnelles.
Mimicry correspond au terme anglais signifiant mimétisme ou imitation. Il désigne les activités
dans lesquelles les participants jouent un rôle : « devenir soi-même un personnage illusoire et se
conduire en conséquence », « le sujet joue à croire, à se faire croire ou à faire croire aux autres
qu’il est un autre que lui-même. » (Caillois 1958). Dans ces jeux, les participants recherchent le
plaisir lié au fait d’être un autre. L’imitation et le travestissement sont leurs moyens d’endosser un
rôle. Le fait de jouer un rôle apparaît également comme source de plaisir car il offre une certaine
liberté : le joueur est libéré de sa personnalité réelle et tout, ou presque, lui est permis.
Ilinx se réfère au terme grec qui désigne un tourbillon d’eau et est apparenté au mot ilingos qui
désigne le vertige. Ilinx désigne les jeux dans lesquels les participants recherchent des
sensations de vertige, où ils tentent de
« détruire pour un instant la stabilité de la perception et d’infliger à la conscience lucideune sorte de panique voluptueuse » (Caillois 1958).
Caillois définit également deux pôles pour situer les jeux en fonction de la présence plus ou
moins forte de règles : la païda s’oppose au ludus, deux pôles du jeu qui révèlent des attitudes
de jeu radicalement différentes. D’un côté, la païda correspond aux jeux libres, non réglés, elle se
réfère à la liberté première des jeux enfantins basés sur l’improvisation. De l’autre, le ludus
correspond aux jeux réglés, respectant des conventions définies pour confronter le joueur à une
difficulté qu’il devra relever. A la différence de l’agôn qui fait intervenir un adversaire, le ludus met
l’accent sur le challenge personnel : le joueur est seul face au jeu, il met en œuvre ses
compétences pour relever le défi proposé par le jeu.
Caillois met en évidence des combinaisons possibles entre les différentes natures de jeux
identifiées. Les quatre attitudes se combinent le plus souvent par paire, certaines associations
étant considérées comme « interdites » par Caillois : c’est le cas par exemple de l’association du
ilinx et de l’agôn. Vertige et compétition ne peuvent se combiner car le premier viendrait
94
corrompre la nature fondamentale du second. L’agôn repose en effet sur la maîtrise (d’une
habileté) alors que l’ilinx recherche au contraire la perte de contrôle.
Parmi les associations possibles, certaines apparaissent comme fondamentales telles que les
combinaisons d’alea et d’agôn d’un côté, et mimicry et ilinx de l’autre. La chance et la compétition
se révèlent complémentaires. Elles ont des caractéristiques communes : elles sont basées sur un
principe de départ d’égalité des chances et reposent sur des règles précisément définies. Par
contre, leurs méthodes pour déterminer le vainqueur sont totalement opposées : dans le cas de
l’agôn la victoire repose sur le principe de maîtrise, alors que dans l’alea la victoire est mise entre
les mains du destin. La combinaison de ces deux ressorts est riche puisqu’elle se rapproche des
situations réelles de la vie où l’individu oscille entre la maîtrise des évènements et les aléas du
destin. Par ailleurs, mimicry et ilinx sont compatibles car tous deux, à la différence de l’agôn et de
l’alea, ne reposent pas sur des règles strictes et mettent plutôt en œuvre le pouvoir de
l’improvisation.
Caillois remarque par ailleurs que, dans les alliances mises en évidence, l’un des éléments
apparaît toujours comme actif et productif alors que l’autre est plus passif, l’un repose sur le
contrôle alors que l’autre correspond à un laisser-aller : « La compétition et le simulacre peuvent
créer, et créent en effet des formes de culture auxquelles une valeur soit éducative, soit
esthétique est volontiers reconnue. » Caillois donne comme exemples représentatifs de ces
formes de culture reconnues le sport et le théâtre. Et il précise : « Au contraire, la recherche de
la chance, la poursuite du vertige, sauf de rares exceptions, n’aboutissent à rien, ne créent rien
qui soit capable de se développer ou de s’établir ».
A travers les quatre types de comportements qu’un joueur va rechercher dans un jeu, nous
identifions des besoins définis dans la théorie de l’autodétermination comme ceux qu’un individu
cherche à satisfaire de façon innée. Nous pouvons en effet associer les jeux de type agôn ou
ludus au besoin de compétence et au besoin de relation à autrui (qui correspond à un besoin de
reconnaissance par les pairs). Par ailleurs l’ensemble de ces attitudes (se confronter à un
adversaire, se livrer au hasard, jouer un rôle, rechercher le vertige, se laisser aller à
l’improvisation ou relever un défi) révèlent le caractère autotélique de l’activité de jeu et
correspondent ainsi à des facteurs de motivation autodéterminée.
4.5.2. Les caractéristiques du jeu mises en lien avec la théorie du flow
Des chercheurs basent leur identification des caractéristiques d’un jeu qui favorisent la motivation
et l’engagement sur la théorie du flow. Kiili (2005) s’intéresse à l’état de flow dans les jeux pour
l’apprentissage. Il s’appuie à la fois sur les facteurs jugés propices pour qu’une activité génère du
flow et prend également en compte les caractéristiques fondamentales de l’état de flow (cf. § 4.3)
pour mettre en avant les critères suivants :
95
le jeu doit être intrinsèquement source de récompense ou de satisfaction afin que le
joueur soit prêt à y jouer,
le jeu doit offrir un niveau de défi adapté aux compétences du joueur,
les buts du jeu doivent être clairement définis afin que le joueur sache à tout moment quel
est l’objectif de son action,
le jeu doit fournir des rétroactions claires et immédiates sur les actions de l’utilisateur,
notamment sur l’état de sa progression vers le but,
le jeu doit permettre au joueur de ressentir un sentiment de contrôle sur l’activité,
le jeu doit favoriser la concentration du joueur et éviter de le distraire avec des éléments
non pertinents pour l’activité centrale.
Deux caractéristiques des jeux pour l’apprentissage, identifiées par Kiili comme favorisant l’état
de flow, s’éloignent légèrement des dimensions initialement définies par Csikszentmihalyi (cf. §
4.3) mais peuvent être rattachées à l’aspect « concentration » évoqué précédemment : elles
concernent la jouabilité et la structure narrative du jeu (Kiili 2005).
La jouabilité est mise en relation avec la perte de conscience de soi entraînée par l’état
de flow. Cette non-distinction entre conscience et action s’avèrent problématique dans un
contexte d’apprentissage, Kiili propose une solution pour favoriser cette dimension du
flow tout en évitant ses effets négatifs sur l’apprentissage : il applique la perte de
conscience de soi uniquement aux aspects liés à la manipulation de l’interface du jeu,
généralement désignée par le terme jouabilité. De cette manière, Kiili vise à conserver
comme conscient et réfléchi le processus mental de construction des connaissances mis
en œuvre dans le jeu. Selon lui, les effets potentiellement négatifs sur l’apprentissage de
la perte de conscience de soi sont ainsi écartés.
La nécessité d’une structure narrative1 homogène est associée à la concentration et à
l’immersion dans l’activité, caractéristiques relatives à l’état de flow. Pour ne pas
perturber voire interrompre la concentration des participants, le jeu doit proposer une
structure narrative cohérente, sans éléments parasites. Tous les éléments du jeu doivent
être intégrés de manière harmonieuse dans la narration. Les buts fixés aux joueurs
doivent notamment être intégrés dans le scénario narratif de manière cohérente, ce qui
rejoint un autre principe propice au flow, la nécessité de proposer des buts clairs et
signifiants.
1 au sens d’histoire
96
4.5.3. Le jeu mis en lien avec l’approche de l’autodétermination
Malone et Lepper (1987) ont mené des travaux visant la conception d’environnements
d’apprentissage intrinsèquement motivants1. Cet intérêt repose sur deux constats : d’une part la
motivation intrinsèque est nécessaire pour impliquer les individus dans des activités
d’apprentissage qui ne sont pas obligatoires ; d’autre part, même dans les activités obligatoires
(extrinsèquement motivées), l’efficacité de l’apprentissage est dépendante du niveau de
motivation intrinsèque des apprenants.
Pour atteindre leur but, Malone et Lepper se sont attachés à identifier les caractéristiques d’un
jeu qui favorisent la motivation intrinsèque, notion notamment au cœur de la théorie de
l’autodétermination (Deci & Ryan 1985). Leur taxonomie des motivations intrinsèques d’un jeu
repose sur des travaux antérieurs menés dans le but de définir ce qui rend les jeux vidéo
amusants : « What makes computer games fun ? » (Malone 1981).
Leur taxonomie fait apparaître deux grandes catégories : d’une part les motivations individuelles,
d’autre part les motivations interpersonnelles.
Les motivations individuelles suscitées par un jeu correspondent pour la plupart à la satisfaction
du besoin de compétence.
Le défi, associé aux caractéristiques de l’état de flow (niveau optimal de défi, buts
clairement définis, rétroactions sur les performances, etc.).
La curiosité, stimulée par un niveau optimal de complexité des informations et par un
déséquilibre relatif entre les attentes des individus et les informations fournies dans
l’activité. La curiosité s’applique à la fois au niveau des perceptions sensorielles et au
niveau des structures cognitives.
Le contrôle, favorisé par un environnement qui laisse des choix aux utilisateurs et
propose un éventail de possibilités, avec l’idée que l’impression de contrôle est plus
importante que le niveau réel de contrôle.
La « fantasy », que nous traduisons par univers fictionnel, est définie comme « un
environnement qui évoque des images mentales de situations physiques ou sociales qui
n’ont pas réellement lieu ». Malone et Lepper distinguent les jeux à fantasy endogène des
jeux où la fantasy est exogène. Dans un jeu pour l’apprentissage avec une fantasy
endogène, la compétence à acquérir dans le jeu et la fantasy sont liées l’une à l’autre de
façon réciproque. L’habileté mise en œuvre influe sur la fiction du jeu et, inversement, la
fiction du jeu a des conséquences sur l’habileté à utiliser. C’est le cas par exemple dans
le jeu de simulation Pulse! présenté dans la section 3.4.4, où le joueur/apprenant incarne
un médecin et ses capacités à prendre ou non les bonnes décisions auront un impact sur
la santé du patient virtuel et sur la suite du scénario, agissant ainsi sur ce qui sera
1 “designing intrinsically motivating learning environment”
97
demandé au joueur. Dans un jeu à fantasy exogène, seule la fiction est influencée par les
compétences utilisées, l’influence ne fonctionne pas dans les deux sens. C’est le cas par
exemple d’un jeu où un vaisseau spatial avance vers son objectif en fonction des
réponses données à des questions totalement extérieures à la fiction. Le jeu du pendu
rentre lui aussi dans cette catégorie des jeux à fantasy exogène.
Cet univers fictionnel agit à la fois au niveau émotionnel et au niveau cognitif où il crée
des effets positifs sur l’apprentissage. A travers l’identification à des personnages
imaginaires, il permet en effet à l’individu de satisfaire certains besoins émotionnels tels
que l’expérimentation d’une situation de puissance ou de célébrité, et se rapproche en
cela du jeu de rôle. Sur le plan cognitif, les métaphores fournies par certains univers
fictionnels favorisent l’intégration de nouvelles informations et leur compréhension en
créant des liens avec des connaissances antérieures.
Les motivations interpersonnelles d’un jeu correspondent au besoin de reconnaissance sociale,
de relation à autrui :
La coopération et la compétition sont de puissants générateurs de motivation qui
nécessitent de définir clairement et de façon signifiante un but aux participants. Au
contraire de certains préjugés selon lesquels la coopération est positive alors que la
compétition est forcément néfaste, Malone et Lepper considèrent que la compétition tout
comme la coopération peuvent avoir des effets bénéfiques sur l’apprentissage, à
condition d’être utilisés de façon pertinente.
La reconnaissance est une autre source de motivation intrinsèque dans un jeu. L’individu
apprécie de voir ses actions et ses efforts reconnus et appréciés par ses pairs. Dans un
jeu, cela correspond au fait de rendre visible aux autres les activités des participants ou
les résultats des activités. La motivation est identifiée comme plus grande lorsque le
processus de reconnaissance est endogène à l’activité, c’est-à-dire inclus de façon
naturelle et logique.
A travers cette taxonomie, Malone et Lepper ne visent pas à fournir une recette qui garantirait la
réussite d’une conception de jeux pour l’apprentissage intrinsèquement motivants. Ils proposent
ici des lignes directrices, des principes à avoir à l’esprit lors de la conception d’un environnement
d’apprentissage utilisant le jeu.
4.5.4. Le courant de la gamification
La gamification1 est un concept qui désigne l’application de principes de jeu dans des activités
qui ne sont pas des jeux afin de favoriser l’engagement des participants. Depuis 2007, la
gamification est utilisée dans de nombreux domaines tels que l’éducation, le travail, le marketing.
1 http://gamification.org/wiki/Encyclopedia
98
Dans le concept de gamification les notions de plaisir, de récompenses et les liens sociaux sont
centraux. Cette approche nous semble intéressante car elle diffère des approches précédentes :
elle ne vise pas à créer des jeux à part entière, mais elle cherche à intégrer des principes de jeu
dans des activités qui, même si elles en revêtent certains caractères comme la capacité à
motiver et engager, ne deviendront pas pour autant des jeux. Pour exemple, nous pouvons citer
l’application Chore Wars1 qui applique le concept de gamification aux tâches ménagères. Le
principe est simple : vous et votre conjoint par exemple, créez chacun un personnage dont le
niveau d’expérience augmente en fonction des tâches ménagères que vous effectuez dans la vie
réelle. Le but de Chore Wars est de créer la motivation pour effectuer une activité en utilisant des
mécaniques de jeu comme le gain de points d’expérience (cf. concept de motivation extrinsèque -
§ 4.2).
Tout comme les travaux sur l’utilisation des jeux à des fins d’apprentissage présentés
précédemment (Kiili 2005, Malone & Lepper 1987), les travaux sur la gamification supposent une
identification préalable de ces principes de base qui rendent un jeu « amusant » et engageant.
Kim (2009), chercheuse en neuroscience comportementale et conceptrice de jeux, travaille sur le
concept de la gamification. Elle a identifié des mécaniques de jeu2 à travers une comparaison
entre des jeux massivement multijoueurs tels que World of Warcraft3 et des plateformes sociales
telles que Facebook4. Il s’avère en effet que ces deux types d’applications, bien que de natures
différentes, s’appuient sur les mêmes mécaniques pour engager et fidéliser les participants.
Le principe de collection, basé sur la prédisposition des individus à apprécier le fait de
compléter une collection d’objets. Ce principe vise à fidéliser les participants en les
incitant à revenir sur l’application. Par exemple, sur Facebook, chaque membre a une
« collection » d’amis. Dans le jeu World of Warcraft les joueurs collectionnent des pièces
d’équipement pour leur personnage (épée, armure, etc.).
Le principe de points à accumuler, de niveaux à gravir. Les points sont attribués soit par
le système (on parle alors de « game points »), soit par les autres participants (on les
appelle alors « social points »).
Les rétroactions fournies au joueur sur son activité : ce principe vise à attirer l’attention
des utilisateurs sur ce qui change dans l’environnement (système de notifications), à leur
donner un retour sur leurs actions (évaluations, commentaires, annotations de leurs
activités) dans le but de favoriser leur implication.
Les possibilités d’échanges entre les participants. Ces interactions sociales constituent le
cœur des communautés en ligne. Les échanges peuvent être explicites (acheter/vendre,
inviter des amis) ou implicites (offrir des cadeaux, faire des commentaires).
1 http://www.chorewars.com/2 Sens correspondant ici à celui utilisé dans le domaine de la gamification : “Game Mechanics are constructs of rules andfeedback loops intended to produce enjoyable gameplay. They are the building blocks that can be applied and combined togamify any non-game context.” Source : http://gamification.org/wiki/Game_Mechanics3 http://eu.battle.net/wow/fr/4 www.facebook.com
99
La personnalisation de l’environnement : donner la possibilité aux utilisateurs de
personnaliser leur profil ou l’interface de l’application favorise leur engagement en leur
permettant d’exprimer leur personnalité et de créer un espace qui leur correspond.
Kim (2009) applique ces mécaniques de gamification dans les applications développées par la
société Shufflebrain1 dont elle est co-fondatrice.
Priebatsch (2010) de la société SCVNGR, également spécialisée dans la gamification, a mis au
point une méthodologie spécifique de conception organisée autour de principes de jeu appelés
dynamiques de jeu. Cette approche constitue une application pragmatique du concept de
gamification qui se base sur des éléments différant quelque peu des mécaniques retenues par
Kim. Priebatsch met en avant plus spécifiquement quatre dynamiques de jeu :
Le rendez-vous dynamique incite les participants à effectuer une action spécifique à un
moment précis et selon un rythme déterminé.
Le statut change en fonction des actions du joueur, les plus fidèles ayant les plus hauts
statuts. Ce principe amène les joueurs à tout faire pour figurer dans la liste des meilleurs.
La progression dynamique consiste à découper l’objectif final en tâches plus petites qui
sont réalisées de manière successive. Le joueur visualise ainsi pas-à-pas sa progression
vers le but et le chemin à parcourir semble moins insurmontable.
Le principe de découverte collective réunit une communauté entière autour d’un même
défi à relever, d’un même but à atteindre.
Gamification et formation
Dans le domaine des dispositifs de formation utilisant le jeu, Charles et al. (2009a et b) adoptent
une approche similaire à celle de la gamification. Ils partent d’une application existante qui n’est
pas un jeu, dans leur cas un cours universitaire, et ils y intègrent quelques principes de jeu afin
de le rendre plus engageant et motivant. De la même manière que les approches précédentes,
Charles et al. ont tout d’abord identifié les éléments de jeu à incorporer à leur dispositif de
formation afin de favoriser motivation et engagement. Pour cela, ils se sont basés sur différents
travaux : d’une part des travaux mettant en avant des facteurs considérés comme source
d’engagement dans l’apprentissage (similaires aux facteurs proposés par Viau 1998), d’autre part
des travaux sur les facteurs d’engagement dans les jeux.
Les travaux sur l’apprentissage aboutissent à l’identification des facteurs d’engagement suivants :
le défi avec des tâches offrant un niveau de difficulté adapté (ni trop facile, ni trop
difficile) ;
la collaboration avec des tâches à mener en groupe ;
1 http://www.shufflebrain.com/
100
l’identité et les rôles donnés aux apprenants afin de les insérer au sein d’une
communauté ;
des objectifs clairs et ciblés ;
des feedbacks réguliers pour que les apprenants puissent ajuster leur comportement et
atteindre l’objectif fixé ;
des critères d’évaluation clairs et signifiants ;
l’authenticité avec des tâches signifiantes et pertinentes pour les apprenants ;
la reconnaissance des progrès de chacun, par des personnes autres que l’enseignant ;
le choix laissé dans la manière de travailler ou dans les méthodes utilisées afin d’engager
les apprenants en leur donnant un certain contrôle sur leur apprentissage.
Charles et al. affinent ensuite cette liste en la recoupant avec des facteurs de motivation issus du
game design :
Le fun ou plaisir, caractéristique centrale des jeux, peu prise en compte dans les activités
d’apprentissage.
Les obstacles contenus intrinsèquement dans les jeux.
La structure organisée autour de règles du jeu et d’objectifs à atteindre.
L’identité avec la représentation visuelle que les joueurs ont d’eux-mêmes au sein de
l’univers de jeu.
Les rétroactions sur les activités, centrales dans le jeu tout comme dans l’apprentissage.
Les aspects sociaux à l’intérieur même du jeu mais aussi dans les échanges qui ont lieu
hors du jeu.
Comme le montre le tableau de synthèse suivant (tableau 4), élaboré d’après les travaux de
Charles et al. (2009b), de nombreux points communs existent entre l’engagement dans
l’apprentissage et l’engagement dans le jeu : le défi, les aspects sociaux (collaboration,
reconnaissance), l’identité et les rôles, les objectifs ciblés, les feedbacks sur l’activité. Certains
facteurs apparaissent comme spécifiques aux situations d’apprentissage tels que les critères
d’évaluation et l’authenticité de la tâche. Seul un facteur d’engagement apparaît comme
spécifique au jeu : le fun.
101
Equivalences entre :Facteurs d’engagement dans les activités
d’apprentissageFacteurs d’engagement dans un jeu
Défi ObstaclesCollaborationReconnaissance des progrès
Aspects sociaux
Identité et rôles IdentitéObjectifs clairs et ciblésChoix
Structure organisée autour de règles du jeu etd’objectifs
Feedbacks réguliers FeedbacksCritères d’évaluation clairs et signifiantsAuthenticité de la tâche
FunTableau 4 - Apprentissage et jeu : des facteurs d'engagement communs (d’après les travaux de Charles et al. 2009b)
102
Synthèse : caractéristiques motivantes d’un jeu
C’est à partir des caractéristiques de jeu identifiées dans ces travaux comme
facteurs de motivation que nous avons défini ce que nous appelons par la suite
des ressorts de jeu et de motivation (cf. chapitre 10). Dans notre approche, ces
ressorts visent à fournir un cadre structurant et fonctionnel pour la conception de
dispositifs de formation.
Etant donné les caractéristiques des dispositifs de formation auxquels nous nous
intéressons, nous adoptons une démarche proche de la gamification : dans notre
cas il s’agit de réfléchir à l’intégration de ressorts de jeu dans un dispositif de
formation. Les ressorts de jeu et de motivation retenus dans notre proposition ont
été sélectionnés en fonction de notre objectif final : guider les concepteurs dans
l’élaboration de dispositifs de formation utilisant le jeu. Nous avons donc cherché
à constituer une liste de ressorts assez brève afin qu’elle soit opérationnelle.
L’aspect collectif des dispositifs auxquels nous nous intéressons et la finalité
d’apprentissage qui les caractérise orientent notre analyse de ces travaux et
l’identification des ressorts que nous retenons : comme nous le détaillons dans la
présentation de notre proposition (chapitre 10), nous nous basons principalement
sur les ressorts de jeu définis par Caillois, complétés et affinés par des éléments
issus des travaux en lien avec le flow (Kiili 2005), des facteurs de motivation
intrinsèque (Malone & Lepper 1987) et des mécanismes relatifs à la gamification.
103
Chapitre 5. LA CONCEPTION
Nos travaux portent sur l’assistance à la conception de dispositifs de formation. L’activité de
conception étant au centre de notre réflexion, nous avons tout d’abord souhaité nous intéresser à
la façon dont elle est étudiée dans le domaine des sciences cognitives. Cette approche offre un
éclairage intéressant sur le processus de conception au sens large, vu comme une activité de
résolution de problème. Elle fournit par ailleurs des éléments de réflexion pour la définition d’une
méthodologie et d’un environnement d’assistance à la conception. Dans un second temps, nous
nous intéressons plus spécifiquement à la conception pédagogique. Nous étudions différentes
approches de scénarisation pédagogique qui servent de base à nos travaux et alimentent nos
réflexions sur la conception telle qu’elle est plus spécifiquement étudiée dans notre domaine
d’application. Nous abordons ensuite la conception de scénarios spécifiques en commençant par
le domaine de la formation avec la conception de scénarios de formation mettant en œuvre des
activités collectives et de scénarios de formation hybrides. Puis nous nous intéressons au cas
particulier de la conception de jeux, et à la conception de jeux pour la formation.
5.1. L’activité de conception en général : point de vue dessciences cognitives
5.1.1. Définition de la notion de conception
Dans nos travaux, lorsque que le terme conception est utilisé, il renvoie au terme anglais design.
Ce terme, comme l’indique Todd Lubbart dans la préface de l’ouvrage Créativité et conception de
Bonnardel (2006), « puise ses origines dans le mot français "dessein" » utilisé jusqu’à la fin du
17e siècle dans le domaine de l’art pour désigner à la fois le dessin (le tracé) et le projet ou l’idée
sous-jacente. Le terme design est donc, de manière intrinsèque et dès son origine, porteur d’une
double signification portant sur les aspects concrets et abstraits de l’activité. La notion de design
s’applique aujourd’hui de façon plus large à la conception d’objets concrets ou à la conception de
dispositifs plus abstraits tels que des programmes informatiques, des plannings, des jeux ou des
scénarios de formation.
En tant qu’activité, la conception est un objet d’étude pluridisciplinaire qui intéresse à la fois la
psychologie cognitive, l’ergonomie cognitive et l’informatique. Dans les travaux de recherche sur
le design, ceux de Simon (1969 in Mor & Winters 2007) sont souvent cités comme fondateurs du
domaine. Simon est le premier à avoir considéré le design comme une science, le positionnant
dans les sciences de l’artificiel afin de le distinguer des « sciences naturelles »1. La science du
design, de l’anglais design science, est née du besoin d’étudier de manière empirique le
1“natural sciences”
104
processus de conception. A la différence des « sciences naturelles » qui s’intéressent à analyser
l’existant, la science de la conception s’intéresse au potentiel, à ce qui pourrait être, dans le but
généralement d’améliorer ce qui existe. L’approche initiée par Simon vise à adopter un point de
vue théorique générique de la conception, indépendant des domaines d’application.
Cette approche permet de mieux comprendre les situations de conception en les considérant
comme des activités de résolution de problèmes complexes (Simon 1973) : les concepteurs ont
un but à atteindre, sans disposer d’une procédure directement utilisable et adaptée pour y arriver.
Le terme problème désigne ici « toute tâche qu’un individu cherche à accomplir » (Lubart et al.
2003). Appréhendées comme des situations problèmes spécifiques, les situations de conception
possèdent les caractéristiques suivantes (Darses et al. 2001, Falzon 2005) :
le problème initial d’une activité de conception est considéré comme mal défini (au sens
de Simon 1973), c’est-à-dire qu’il est incomplet, ambigu et complexe et que les variables
de la situation de départ sont nombreuses et variées ;
il n’y a pas une solution unique et correcte au problème de conception mais un éventail
de solutions acceptables ;
les phases de définition du problème et de recherche de solution ne s’enchaînent pas de
manière séquentielle : la définition du problème et la construction d’une solution
s’élaborent conjointement et se nourrissent mutuellement, selon un processus itératif ;
la conception est une activité opportuniste : l’appréhension du problème et le processus
pour aboutir à la définition d’une solution diffèrent d’un concepteur à l’autre selon leur
expérience et la manière dont ils prennent en compte les contraintes de la situation à un
moment donné ;
la résolution du problème fait appel à des compétences multiples et nécessite souvent de
travailler en collaboration pour mettre en commun les compétences nécessaires.
Lebahar (2003) propose une approche qu’il qualifie de « psycho-sémiologique » afin de prendre
en compte d’autres dimensions de l’activité de conception non abordées par l’approche de
Simon. Lebahar définit la situation de conception comme « la construction et la communication
du modèle de réalisation d’un artefact ». Le modèle de réalisation de l’artefact répond à une
commande et doit satisfaire aux contraintes qui y sont liées. Il est construit dans le but de guider
les personnes qui seront en charge de la réalisation finale de l’artefact, ce qui explique la facette
« communication » de la situation de conception. Lebahar juge par ailleurs trop limitante
l’approche considérant la conception comme une activité de résolution de problème en ce qu’elle
considère le concepteur uniquement comme un système de traitement de l’information. Dans son
approche, Lebahar prend en compte des dimensions supplémentaires :
les dimensions liées aux objets de médiation intervenant dans l’activité, c’est-à-dire les
divers modes de représentation (dessin, représentation mentale, verbale, etc.) utilisés par
le concepteur ;
105
les dimensions liées aux différentes sources de signification intervenant dans le
processus de conception et influençant les choix du concepteur (sources de
connaissances externes, compétences et connaissances du concepteur par exemples).
Selon l’approche de Lebahar, la situation de conception est un système d’interactions au centre
duquel se trouve le concepteur. Elle est régie par les principes représentés sur la figure 21 et
décrits ci-après.
Figure 21 - La situation de conception (Lebahar, 2003)
Le concepteur, élément central, est en lien avec les différents constituants de la
situation : la tâche de conception, les sources de connaissances externes, les autres
sujets intervenant dans la situation, les moyens de représentation et de communication,
ses propres compétences. Il agit également sur ses propres actions afin de les réguler et
de les diriger vers l’atteinte du but défini, sans cesse soumis à de potentielles évolutions.
Les interactions entre le concepteur et les constituants de la situation sont des cycles
d’assimilation / accommodation : l’assimilation désigne l’interprétation des données de la
situation par le concepteur, basée sur les savoirs et compétences qu’il possède ;
106
l’accommodation correspond à l’adaptation des savoirs et compétences du concepteur
par rapport aux données de la situation. Ces cycles d’assimilation / accommodation
visent à adapter l’action du concepteur aux contraintes spécifiques de la tâche de
conception.
La tâche de conception vise à proposer une représentation de la solution à réaliser qui
réduise au maximum l’écart entre la représentation initiale issue des données brutes de la
commande et la représentation finale (le résultat qui sera produit). Durant la tâche de
conception, des représentations intermédiaires de l’artefact sont produites (brouillons,
notes, maquettes).
La définition initiale du problème de conception étant incomplète et imprécise, le concepteur est
amené à définir sa propre représentation du but à atteindre. Ces représentations mentales
évoluent au cours du processus de conception en fonction de quatre facteurs principaux
(Bonnardel 2006) :
les données de la situation ou du contexte,
les représentations élaborées au cours de la conception,
la réalisation d’analogies,
la gestion de contraintes.
Si la conception se base sur des connaissances liées à la situation, elle passe également par la
réutilisation de solutions développées pour répondre à des problèmes analogues (Détienne
2001). Même si la tâche de conception vise la création d’une solution originale, le concepteur ne
part jamais réellement de rien, il fait appel, consciemment ou non, à des connaissances ou
expériences antérieures analogues.
5.1.2. Rôle de la représentation externe en conception
Les représentations externes font partie des facteurs jouant un rôle sur l’évolution des
représentations mentales du problème et de la solution lors de la conception (Bonnardel 2006).
Elles permettent tout d’abord une meilleure compréhension du problème. L’expression des
données de la situation et des idées à travers une représentation externe est un moyen de
décharger la mémoire de travail saturée en informations, favorisant ainsi l’activité réflexive vers la
résolution du problème de conception. En ayant recours à des expressions plus précises et
structurées, les représentations externes permettent par ailleurs d’exprimer la solution finale.
Les représentations externes permettent également au concepteur d’évaluer sa solution. Elles
constituent des « moyens de contrôle et de régulation de son activité » (Lebahar 2003) et en cela
vont contribuer à l’évolution de ses représentations mentales. Par ailleurs, ce sont ces
représentations externes qui constituent un moyen pour le concepteur de communiquer ses
travaux et d’échanger avec ses pairs dans le cadre d’un travail de conception collectif.
107
L’esquisse est un type de représentation externe qui intervient dans les premières phases d’un
processus de conception. Elle fait l’objet d’études dans les travaux sur les activités de
conception, notamment dans le domaine de l’architecture (Lebahar 1983). Des définitions
courantes présentent l’esquisse de la façon suivante :
d’après le Trésor de la Langue Française informatisé1, l’esquisse désigne « la première
étude d’une composition picturale, sculpturale, architecturale, indiquant les grandes
lignes du projet et servant de base à son exécution définitive. » ;
dans le Petit Robert, elle est définie comme : « 1. Première forme (d’un dessin, et par
analogie d’une statue, d’une œuvre d’architecture) qui sert de guide à l’artiste quand il
passe à l’exécution de l’ouvrage définitif. Cf. premier jet. 2. par extension : plan
sommaire, notes indiquant l’essentiel d’un travail, d’une œuvre littéraire. »
A travers ces définitions, nous retenons que l’esquisse est une première étape dans un projet de
création, qu’elle en indique les grands principes et sert de base et de guide à la suite du projet.
5.1.3. Des besoins d’assistance identifiés
Tout comme on cherche à optimiser les processus de production dans l’industrie, des travaux
visent à optimiser le processus de conception en tentant de réduire la durée et les coûts liés à
cette phase d’un projet. Toutefois, comme le signalent Darses et al. (2001), la mise en place de
méthodologies de conception prescriptives n’offre pas des résultats très concluants. Ils doutent
notamment de la réelle application par les concepteurs des méthodologies définies. Par ailleurs,
les méthodologies habituellement proposées sont basées sur des processus linéaires et
séquentiels de conception qui ne correspondent pas au processus spontanément mis en œuvre
par les concepteurs, dans lesquels la nature des situations de conception suppose des aller-
retour permanents entre la définition du problème et l’élaboration de la solution. Néanmoins, les
méthodes de conception qui ont été définies et testées fournissent des propositions de bonnes
pratiques intéressantes à considérer. Elles ont notamment mis en évidence (Darses et al. 2001) :
les bénéfices issus d’une phase initiale d’analyse complète de l’objectif, de définition
précise du problème ;
l’intérêt de définir dans un premier temps plusieurs solutions correspondant à plusieurs
points de vue avant de s’attacher à en développer une seule de façon plus précise ;
des avantages à rester à un niveau abstrait de conception et des inconvénients à se
lancer trop vite dans un développement précis des solutions.
Si les méthodologies prescriptives ne semblent pas concluantes comme moyen d’assister les
concepteurs en vue d’optimiser le processus de conception, d’autres solutions doivent être
étudiées pour répondre aux besoins d’assistance qui persistent (Darses et al. 2001), notamment
1 http://atilf.atilf.fr/tlf.htm
108
sur les phases amont de la conception. Naturellement en lien avec les bonnes pratiques mises
en évidence précédemment, ces besoins concernent plus spécifiquement :
d’une part, l’assistance à l’identification des besoins liés au problème initial de
conception,
d’autre part, l’assistance à l’élaboration des solutions dans les phases conceptuelles
amont, essentielles dans le processus d’élaboration de solutions en ce qu’elles visent à
éviter une réduction trop précoce de l’incertitude des solutions. Ces phases conceptuelles
correspondent notamment aux phases de production d’esquisse.
5.1.4. Conception et créativité
La créativité est aujourd’hui présente dans de nombreux domaines et l’objet de nombreuses
réflexions. L’une des particularités actuelles de cette notion est qu’elle se cantonne de moins en
moins aux « activités artistiques, aux découvertes scientifiques ou aux innovations
technologiques » (Bonnardel 2006).
La créativité est aujourd’hui présente dans les activités du quotidien où elle désigne notamment
plus largement la capacité à trouver une solution originale à un problème.
A nouveau, définir la créativité fait apparaître une multitude d’approches et révèle que cette
notion, comme bien d’autres, est l’objet de nombreux débats. Bonnardel (2006) met en évidence
les points communs aux différentes définitions communément proposées : la notion de créativité
évoque ainsi généralement « la capacité à avoir une idée ou à réaliser une production à la fois
nouvelle et adaptée au contexte dans lequel elle se manifeste ». Le travail de Bonnardel s’appuie
sur sa propre définition de la créativité :
« capacité à produire une idée exprimable sous une forme observable ou à réaliser uneproduction, qui soit à la fois novatrice et inattendue, adaptée à la situation et [danscertains cas] considérée comme ayant une certaine utilité ou de la valeur ».
Si nous nous intéressons ici à la créativité c’est que, comme le montre Bonnardel à travers ses
travaux (2006), la créativité et les activités de conception possèdent des points communs :
« l’expression d’une idée, d’un processus ou la réalisation d’une production en vued’atteindre certains buts ».
Toutefois, les activités de conception ne visent pas systématiquement la production d’idées
nouvelles. Seules les activités de conception qui confrontent les concepteurs à des problèmes
« non routiniers » et qui supposent de leur part la création d’un objet nouveau peuvent être
considérées comme des activités créatives.
Bonnardel aborde une problématique qui nous intéresse tout particulièrement car en lien avec
notre objectif de travail : l’assistance, et plus particulièrement l’assistance aux activités de
conception créatives. Dans cette perspective, Bonnardel met en avant trois grands principes.
109
1. La génération d’idées nouvelles s’appuie sur des connaissances préalables et sur
la réalisation d’analogies. A ce niveau, un « processus d’évocation de sources
d’inspiration » permet d’élargir l’espace de recherche d’idées et favorise ainsi la
génération d’idées.
2. Les contraintes sont nécessaires à la création. Le processus de gestion de
contraintes est central dans l’activité de conception qui vise à élaborer une solution
adaptée à une situation ou à un contexte.
3. Une évaluation des solutions en cours de conception intervient nécessairement
avant d’arriver à l’élaboration de la solution finale. Cette évaluation s’appuie notamment
sur les représentations externes élaborées.
A partir de ces trois processus fondamentaux identifiés et d’expérimentations menées, trois
objectifs principaux relatifs à l’assistance à l’activité de conception créative sont mis en avant
(Bonnardel 2006) :
« - favoriser l’évocation d’idées créatives,
- faciliter la gestion des contraintes et l’évaluation des solutions de conception en coursd’élaboration,
- faciliter la "conversation réflexive" entre le concepteur et des représentations externescréées. ».
110
Synthèse : l’activité de conception
Par rapport à notre contexte d’application, nous retenons que l’activité de
conception est assimilable à une activité de résolution de problèmes complexes.
Pour alimenter notre travail d’élaboration d’une démarche de conception de
dispositifs LRPG, nous notons ainsi que les phases de définition du problème de
conception et d’élaboration de solution font l’objet d’un processus itératif dans
lequel elles s’alimentent mutuellement.
En complément de cette approche, les travaux de Lebahar (2003) nous amènent
à prendre en compte l’ensemble des éléments de la situation de conception : le
concepteur se trouve au centre d’un système dans lequel il interagit avec la tâche
de conception elle-même, ses propres compétences, des connaissances
externes, les moyens de communication et de représentation, d’autres sujet.
Les travaux étudiés, et notamment ceux portant sur l’assistance à la conception,
nous conduisent à retenir les notions clés suivantes :
Les méthodologies prescriptives sont inadaptées pour assister les
concepteurs dans leur tâche,
une assistance sur les phases de définition du problème de conception et
d’identification des besoins est nécessaire,
une attention particulière doit être apportée à l’assistance aux phases
amont de conception dans lesquelles les représentations externes, et
notamment le recours aux esquisses de solutions, jouent un rôle
important.
Dans certains cas, l’activité de conception que nous étudions entre dans la
catégorie des activités de conception créatives : elle demande au concepteur
pédagogique d’élaborer une solution nouvelle pour répondre de manière adaptée
à un problème de formation généralement défini de façon incomplète. Notre
réflexion sur l’assistance à la conception ne doit pas perdre de vue cette
caractéristique et se trouve par conséquent alimentée par les principes définis par
Bonnardel (2006) concernant l’assistance aux activités de conception créatives.
111
5.2. La conception de scénarios pédagogiquesNos travaux sont ancrés dans le champ de l’ingénierie pédagogique tel que défini par Paquette
(2002) :
« Par "ingénierie pédagogique" ou "ingénierie de la formation", nous désignonsl'ensemble des principes, des procédures et des tâches qui permettent de définir lecontenu d'une formation au moyen d'une identification structurelle des connaissances etdes compétences visées, de réaliser une scénarisation pédagogique des activités d'uncours définissant le contexte d'utilisation et la structure des matériels d'apprentissage et,enfin, de définir les infrastructures, les ressources et les services nécessaires à ladiffusion des cours et au maintien de leur qualité. »
A travers cette définition, le concept de scénarisation pédagogique apparaît comme une activité
centrale dans l’ingénierie pédagogique.
La scénarisation pédagogique est considérée par certains (Pernin & Villiot-Leclercq 2006, Jullien
et al. 2007) comme une évolution de l’approche de construction de séquences pédagogiques
utilisée dans les IUFM1 pour structurer la démarche de préparation des cours des professeurs-
stagiaires. Dans ce domaine de l’ingénierie pédagogique en milieu scolaire, cette évolution se
produit sous l’influence de différents facteurs (tels que l’intégration des TICE, le plus grand
recours à des situations d’apprentissage collectives, l’augmentation des effectifs dans les
classes) qui « incitent à une plus grande anticipation des imprévus » (Villiot-Leclercq & Pernin
2006) et modifient le rôle de l’enseignant. La scénarisation est considérée comme une piste pour
surmonter la difficulté à
« prendre en compte la complexité d'un espace hétérogène d'interaction associant despériodes de préceptorat présentiel, des périodes de travail autonome de l'élève, despériodes de préceptorat distant/téléprésent. Une approche pragmatique de cette questionpourrait être développée en étudiant des scénarios jouant sur les modalités de distributiondes acteurs » (Balacheff et al.1997).
Dans ce contexte, les principes de scénarisation mis en place sont basés sur le rapprochement
avec la notion de scénario issue du domaine théâtral.
Une autre origine de la scénarisation pédagogique, plus spécifiquement liée au domaine de
l’apprentissage instrumenté par les TICE, se trouve dans la scénarisation médiatique issue du
domaine de l’audiovisuel (Henri et al. 2007) où la notion de scénario est empruntée au cinéma.
Elle est appliquée dans ce cas à l’utilisation des supports audiovisuels comme outils
pédagogiques, et concerne à ses débuts la scénarisation des contenus d’apprentissage, la
médiatisation des savoirs. La transmission du contenu pédagogique étant prise en charge par les
ressources audiovisuelles, les enseignants ont été progressivement amenés à réfléchir à la
scénarisation des activités des apprenants par rapport à ces ressources. Avec le développement
des EIAH et de la formation à distance, ce changement d’approche a été d’autant plus marqué,
et, au-delà de la réflexion sur la scénarisation des contenus, l’accent a été davantage mis sur la
scénarisation des activités d’apprentissage. De façon globale, dans le domaine de l’ingénierie de
1 Institut Universitaire de Formation des Maîtres
112
dispositifs de formation instrumentés, le concept de scénario d’apprentissage est considéré
comme lié à une évolution des approches de l’apprentissage mises en œuvre : la scénarisation
correspond au passage d’une vision centrée sur la transmission des connaissances à une vision
centrée sur l’acquisition, mettant au centre du processus l’apprenant.
5.2.1. Le concept de scénario pédagogique
A quoi se réfère précisément le concept de scénario ? A nouveau, il nous semble important de
clairement définir une notion qui occupe une place centrale dans nos travaux. La définition du
concept de scénario peut être source d’ambigüité car, comme d’autres concepts abordés dans
nos travaux, elle est elle aussi traitée avec des points de vue variés. Notre réflexion s’appuie
principalement sur la définition proposée dans le domaine de l’ingénierie des EIAH par Pernin et
Lejeune (2004a) qui définissent un scénario d’apprentissage comme la
« description effectuée a priori et a posteriori, du déroulement d’une situationd’apprentissage ou unité d’apprentissage visant l’appropriation d’un ensemble précis deconnaissances, en précisant les rôles, les activités ainsi que les ressources demanipulation des connaissances, outils, services et résultats associés à la mise en œuvredes activités ».
Ces auteurs utilisent le terme scénario dans un sens proche de son sens originel :
« ce terme italien, qui signifie "décor", désignait le canevas d'une pièce de commediadell'arte. Le scénario donnait des indications sur l'argument, l'action, la manière de jouer,en particulier les lazzis. Le mot n'est plus guère employé aujourd'hui qu'au cinéma, où ilcomprend des indications sur "l'argument", l'action, la manière de jouer à l'exclusion desindications techniques, mais avec le texte des dialogues des comédiens. » (Pavis, 1996in Pernin 2007).
Afin de faire apparaître les différentes réalités que recouvre cette définition qui se veut assez
large, Pernin et Lejeune (2004a) proposent une taxonomie des caractéristiques que possèdent
les scénarios d’apprentissage :
La finalité du scénario : un scénario est soit prédictif, c’est-à-dire défini en amont du
déroulement de la situation d’apprentissage afin de l’organiser, soit descriptif c’est-à-dire
élaboré après la situation d’apprentissage, dans ce cas il inclut des informations issues
du déroulement effectif des activités (productions des apprenants, retours d’expérience
du formateur par exemples).
La granularité du scénario : un scénario décrit soit une activité élémentaire, soit une
séquence d’activités soit un ensemble encore plus large (ensemble de séquences
d’activités constituant un cours complet par exemple).
Le degré de contrainte : il correspond au degré de liberté laissé lors de la mise en œuvre
du scénario. Un scénario contraint décrit de manière précise toutes les activités sans
113
aucune place à l’improvisation. Un scénario ouvert et adaptable donne uniquement des
grandes lignes de mise en œuvre du scénario et laisse certains choix ouverts.
Le degré de personnalisation : un scénario peut ou non s’adapter en fonction des
circonstances d’utilisation. Un scénario générique a un déroulement identique d’une
utilisation à une autre. Un scénario adaptatif a un déroulement qui s’adapte à certaines
conditions et diffère donc d’une exécution à l’autre selon les paramètres de la situation
(profil de l’apprenant, résultats obtenus lors de la réalisation des activités, etc.)
Le degré de formalisation : on distingue les scénarios informels, les scénarios formalisés
selon un langage de modélisation spécifique et les scénarios automatisables qui peuvent
être exécutés automatiquement sur une plateforme LMS par exemple.
Le degré de réification : un scénario abstrait est indépendant des conditions spécifiques
liées à l’exécution ; un scénario contextualisé est défini pour une situation particulière et
inclut des informations liées à l’identification précise des participants de la formation,
(apprenants et formateur), aux rôles qu’ils joueront dans le scénario, à la spécification
des ressources et outils qui seront effectivement utilisés et à la définition du planning
précis du déroulement, etc.
5.2.2. Le processus de conception de scénarios pédagogiques
Processus de conception pédagogique défini dans la littérature
Selon la définition du scénario pédagogique présentée précédemment, la conception
pédagogique consiste à produire la description du déroulement de l’activité d’apprentissage,
c’est-à-dire du scénario qui sera suivi par les apprenants afin d’atteindre les buts de formation
visés. En nous basant sur les propos d’Henri et al. (2007), nous considérons que l’activité de
scénarisation ne porte pas uniquement sur les contenus, mais qu’elle englobe l’activité de
l’apprenant et de l’ensemble des acteurs de la formation. Nous retenons par conséquent la
définition de Hotte et al. (2007) qui voient l’activité de scénarisation comme :
« l’orchestration d’un ensemble d’activités d’apprentissage auxquelles s’ajoutent, d’unepart, la description des ressources utiles à leur réalisation et, d’autre part, les productionsde l’apprenant qui en découlent. »
Dans la continuité de cette approche, Pernin (2007) décompose le processus de conception de
scénarios pédagogiques en sept étapes (cf. figure 22) :
La conception initiale qui porte sur la définition générale d’un scénario abstrait, non
contextualisé. Elle est prise en charge par un ingénieur pédagogique qui possède des
compétences en conception pédagogique. A cette étape, les scénarios sont soit
totalement nouveaux, c’est-à-dire créés de toute pièce, soit élaborés à partir de scénarios
ou morceaux de scénarios existants (réutilisation d’éléments d’une bibliothèque) qui
114
peuvent être adaptés au nouveau contexte d’utilisation ou aux nouveaux objectifs de
formation.
La contextualisation pédagogique vise la définition d’un scénario spécifiquement adapté
au contexte particulier auquel il est destiné. A cette étape, un formateur ou un tuteur
apporte des précisions sur les paramètres liés à l’exploitation concrète du scénario,
notamment les acteurs, ressources et outils qui seront utilisés.
L’implémentation technique concerne le développement des ressources médiatiques et
outils nécessaires à l’exécution. Elle porte également sur l’intégration éventuelle du
scénario dans un environnement d’exécution spécifique tel qu’une plateforme LMS. Selon
les besoins, elle fait intervenir des développeurs en informatique, des graphistes, des
intégrateurs et des administrateurs de plateforme.
L’exécution ou exploitation correspond à l’utilisation du scénario dans la situation réelle
de formation par les acteurs à qui il est destiné. Dans cette phase interviennent donc un
formateur et/ou un tuteur, ainsi que les apprenants concernés par le dispositif.
La phase d’exploitation amène à une évaluation du scénario et à son adaptation si les
retours d’usage en indiquent la nécessité éventuelle.
La décontextualisation permet de définir un scénario type à partir du scénario
contextualisé qui a été éventuellement adapté. Ce scénario type est stocké dans une
bibliothèque et vise à être réutilisé comme point de départ d’un nouveau cycle de
conception afin de répondre à un nouveau besoin de formation.
Figure 22 - Etapes du processus de conception d’un scénario pédagogique (Pernin 2007)
115
Ces étapes font apparaître les différents niveaux de réification d’un scénario pédagogique (du
scénario abstrait au scénario contextualisé). Comme précisé à travers les rôles impliqués à
chaque étape, dans le contexte de l’ingénierie de formation où nous nous situons (sociétés
prestataires spécialisées en ingénierie de formation ou services de formation de grandes
entreprises), ce n’est généralement pas la même personne qui prend en charge toutes les étapes
du cycle de vie d’un scénario. Dans nos travaux, nous nous focalisons plus spécifiquement sur la
phase de conception proprement dite des scénarios, prise en charge par les ingénieurs
pédagogiques. C’est pourquoi nous n’approfondissons pas les étapes d’implémentation et
d’exécution du scénario.
Pernin et Lejeune (2004a) considèrent la conception pédagogique comme un processus créatif.
A travers ces propos et comme le souligne par ailleurs Paquette (2002), la conception
pédagogique s’apparente aux activités de conception telles qu’elles sont étudiées par les
sciences cognitives, c’est-à-dire qu’elles peuvent être considérées comme des processus de
résolution de problèmes complexes. La conception pédagogique correspond en effet à une
activité de résolution de problème de conception dans un domaine spécifique, la pédagogie,
faisant appel à un concepteur au profil spécifique, le plus souvent un enseignant ou, dans le cas
qui nous intéresse, un expert en pédagogie ou en formation professionnelle. La solution ou
l’artefact visé par cette activité de conception est lui aussi spécifique : dans notre cas, il s’agit
d’un scénario pédagogique utilisant le jeu et des activités collectives. Comme dans toute activité
de conception, le concepteur d’un scénario pédagogique, confronté à un nouveau problème, va
s’appuyer sur ses connaissances, sur son expérience et faire appel à un « répertoire implicite de
situations qu’il maîtrise » (Emin 2010) en prenant en compte les contraintes spécifiques du
nouveau problème. Pernin et Lejeune (2004a) mettent en avant que la conception d’un scénario
pédagogique doit s’appuyer sur des « usages préexistants et proposer des systèmes
flexibles » que chaque concepteur puisse adapter à ses besoins.
Emin (2010) a mené des travaux en vue de définir le processus-métier de conception de
scénarios pédagogiques mis en œuvre par des enseignants du secondaire (cf.
figure 23). Ce processus fait notamment apparaître un premier niveau de définition du scénario
pédagogique visant à répondre au problème de conception spécifié. Cette première étape aboutit
à la définition d’une esquisse de scénario qui sera ensuite affinée et précisée avec la prise en
compte des différentes contraintes du contexte. De plus, le processus-métier défini met en
évidence le recours à une banque de composants (démarches, situations, scénarios existants) à
plusieurs moments du processus de conception : dès la phase initiale de définition de l’esquisse
d’un scénario et lors de la contextualisation plus précise du scénario. Dans un processus de
conception spontané, non assisté, cette banque d’idées n’est pas concrètement formalisée et
correspond à des schémas intériorisés par les concepteurs experts, à des routines ou à des
situations analogues qu’ils ont en mémoire et sur lesquels ils s’appuient (Dessus et al. 2007).
116
Un autre principe intéressant mis en évidence est le caractère itératif et progressif de certaines
étapes du processus de conception. Ce principe confirme les similarités de ce processus avec
les activités de conception telles que définies par les sciences cognitives et que nous avons
abordées dans la section 2.1.
Figure 23 - Processus-métier de conception pédagogique (Emin 2010)
Il existe une différence entre la démarche de concepteurs experts et celle de novices (Emin 2010,
Dessus et al. 2007) : si le processus de conception décrit précédemment comme faisant appel à
des schèmes connus (banque de scénarios) est naturel pour des concepteurs experts, il
nécessite d’être davantage explicité pour accompagner des concepteurs novices dans
l’apprentissage de leur nouvelle fonction. Dans ce cas précis, la nécessité de formaliser les
répertoires de situations existantes afin de les partager est particulièrement importante.
Processus de conception pédagogique : un exemple appliqué sur le terrain
Afin que les propositions issues de notre recherche soient adaptées au contexte d’application
dans lesquelles elles s’inscrivent, nous nous intéressons ici au processus de conception de
dispositifs pédagogiques tel qu’il est mis en œuvre sur le terrain, par des concepteurs
pédagogiques spécialisés dans la formation professionnelle en entreprise. Nous présentons plus
spécifiquement le processus appliqué au sein de la société Symetrix, partenaire de cette thèse
CIFRE (cf. présentation § 1.1.2).
Ce processus concerne plus spécifiquement la conception et le développement de modules e-
learning sur-mesure, activité principale de la société Symetrix1. La dénomination module e-
learning désigne dans ce cas une ressource numérique de formation (contenus et activités
pédagogiques médiatisées) utilisée en autoformation (cf. figure 24). On se trouve donc ici
davantage dans un contexte de scénarisation de contenus pédagogiques que de scénarisation
1 Exemples de réalisations : http://www.elearning-symetrix.fr/clients/galerie/#
117
des activités des apprenants. Plus d’explications sur la définition du e-learning et une mise en
perspective avec d’autres dénominations du domaine sont proposées dans la section 5.4.1.
Figure 24 - Ecran d'un module e-learning réalisé par Symetrix pour la société Team Up
Le processus appliqué au sein de la société Symetrix est organisé autour de 6 phases (cf. figure
25).
Figure 25 - Processus de conception et de réalisation de modules e-learning de la société Symetrix
Phase 1 : spécifications et architecture pédagogique
Le processus de conception débute par une étape de spécifications fonctionnelles, techniques et
graphiques. Il s’agit de définir avec le client commanditaire du projet, selon les besoins et
contraintes exprimées, les spécifications du module qui définiront un cadre et guideront les
étapes suivantes de conception et de réalisation.
Dans cette première phase, une architecture pédagogique du module e-learning est élaborée : le
concepteur définit la structure du module e-learning et les grandes lignes des activités qui le
composeront. Il s’appuie sur le référentiel de compétences qui fait l’objet de la formation et les
objectifs pédagogiques visés. A ce stade le concepteur pédagogique travaille également en
collaboration avec des experts métiers afin de s’approprier le référentiel, de cerner le public cible
et d’avoir une vision claire de la situation métier de référence dans laquelle s’inscrivent les
compétences ciblées par la formation. Pour concevoir l’architecture pédagogique, le concepteur
118
peut se référer à un répertoire de scénarios ou d’activités préalablement conçus par lui-même ou
par des pairs. Ces scénarios réutilisés sont éventuellement modifiés pour être adaptés aux
nouveaux besoins. Selon les projets, le concepteur peut être amené à créer des scénarios ou
des activités pédagogiques totalement nouvelles. L’architecture pédagogique élaborée dans cette
phase fait l’objet d’une présentation et d’une discussion avec le client commanditaire. Une fois
validée, elle sert de support à la conception plus détaillée du module.
Phase 2 : rédaction des cahiers de conception
Dans cette phase, il s’agit de concevoir de manière détaillée chaque activité composant le
module de formation. Cette conception détaillée vise notamment à ce que les personnes
chargées de la réalisation aient toutes les informations à leur disposition : dans le cas d’un
module e-learning le concepteur rédige donc l’ensemble des textes qui apparaissent à l’écran, il
décrit les médias qui seront utilisés (images, vidéos, etc.), il spécifie l’interactivité de l’écran
(fonctionnement de l’activité), etc. Les cahiers de conception visent également à présenter de
façon détaillée les propositions définies afin que le client commanditaire juge de leur adéquation
avec sa demande. Tout comme l’architecture pédagogique, les cahiers de conception font donc
l’objet d’une discussion avec le client commanditaire. Ce n’est qu’une fois leur validation actée
par le client que la phase suivante débute.
Phase 3 : médiatisation d’un prototype
Cette phase marque le passage de la conception pure au développement plus technique de la
solution. Il s’agit ici de développer un prototype de l’application implémentant une partie du
scénario proposé (quelques activités). Le but du prototype est de rendre plus concret et
opérationnel ce qui a été conçu et présenté à l’aide des cahiers de conception. Des ajustements
éventuels de la solution conçue sont effectués en fonction des commentaires effectués par le
commanditaire sur le prototype réalisé.
Phase 4 : médiatisation finale
Une fois que le prototype est validé, qu’il reflète la solution finale souhaitée par le client,
l’ensemble du scénario est réalisé. Une phase de recette interne et de test par le client est
menée. Les commentaires éventuels sont pris en compte et les modifications effectuées afin de
finaliser le module de formation.
Phase 5 : enregistrement des voix comédien
Les voix comédien finales éventuellement utilisées sont enregistrées et intégrées dans le module.
Phase 6 : implémentation sur une plateforme
Une fois le module finalisé, il est implémenté dans son environnement de diffusion final, le plus
souvent une plateforme LMS (Learning Management System).
Dans ce processus, la communication avec d’autres membres du projet, autour de la solution en
cours de conception, tient une place centrale. Il s’agit d’une part d’échanger avec le client
119
commanditaire à chaque étape de la conception et du développement du module afin de
s’assurer que la solution est en accord avec sa demande. Une autre particularité du travail des
concepteurs pédagogiques concerne les échanges avec des experts métier : en effet, à la
différence d’un enseignant, le concepteur pédagogique n’est pas expert dans le domaine qui fait
l’objet de la formation qu’il doit concevoir.
Tout comme le processus métier présenté par Emin (2010) (cf. figure 23), le processus de
conception de modules e-learning fait apparaître différents niveaux de conception : tout d’abord
une esquisse du scénario avec l’architecture pédagogique, puis le scénario détaillé du module
avec les cahiers de conception. De plus à travers les échanges avec les autres membres du
projet, des ajustements de la solution sont effectués : le scénario se construit donc
progressivement au sein d’un processus itératif.
A la différence du processus défini par Pernin (2007 – cf. figure 22), ici la contextualisation du
scénario pédagogique est assez marginale, elle intervient éventuellement au niveau de
l’implémentation du module e-learning sur la plateforme, c'est-à-dire dans la phase finale du
processus. Ceci s’explique par la nature particulière des solutions conçues : les modules
d’autoformation sont généralement identiques d’une session de formation à une autre et ne
nécessitent donc pas de contextualisation particulière.
5.2.3. Différentes approches de la conception pédagogique
Dans le domaine des EIAH, plusieurs approches de la conception pédagogique sont utilisées.
Elles correspondent à différents domaines de recherche sur lesquels s’appuie la scénarisation
pédagogique : ingénierie documentaire, langages de modélisation pédagogique et ingénierie
pédagogique notamment. D’autre part, de façon générale, ces approches de la scénarisation
pédagogique traduisent différentes approches de l’apprentissage telles que nous les avons
détaillées dans la section 3.2.
Nous nous attachons ici à présenter cinq approches de la conception pédagogique appliquées au
domaine des EIAH : l’approche centrée sur les connaissances, l’approche centrée sur les
ressources ou approche documentaire, l’approche centrée sur les activités, l’approche centrée
sur les interactions et l’approche centrée sur les intentions. Ces approches ne sont pas
exclusives mais au contraire complémentaires sous certains aspects.
L’approche centrée sur les connaissances
L’approche centrée sur les connaissances considère l’ingénierie des connaissances comme point
de départ de l’ingénierie pédagogique. C’est l’approche adoptée par Paquette avec la méthode
MISA (Méthode d’Ingénierie d’un Système d’Apprentissage) (Paquette 2002) où « l’identification
des connaissances » associées à la formation ou plus précisément à l’unité d’apprentissage qui
120
fait l’objet de la conception, « leur explicitation, leur représentation et leur formalisation »
constituent l’étape préalable au processus d’ingénierie pédagogique.
Quatre grands axes de réflexion composent la méthode MISA : la modélisation des
connaissances, la conception pédagogique, la conception médiatique et la planification.
La modélisation des connaissances définit de manière organisée les contenus d’apprentissage. A
partir du modèle de connaissances défini, une compétence principale est retenue comme objectif
d’apprentissage pour chaque unité d’apprentissage et sert de base à la conception du scénario
pédagogique. Une compétence est l’association d’une habileté à un ensemble de connaissances.
Paquette la définit comme
« un énoncé de principe qui régit une relation entre un public cible, ou "acteur", unehabileté et une connaissance. ».
Une connaissance est quant à elle
« une structure pouvant être stockée dans la mémoire d’une personne ou d’un systèmecognitif et pouvant faire l’objet de divers traitements par d’autres connaissances. »
Il peut s’agir de faits, de connaissances abstraites mais aussi d’habiletés.
L’habileté, enfin, est de son côté définie comme
« un processus générique (métaconnaissance) qui permet à une personne ou à unsystème artificiel de traiter des connaissances dans différents domaines ».
On distingue 4 grands types d’habiletés, intégrant chacun des éléments appartenant aux
domaines cognitifs, psychomoteur, affectif et social : recevoir, reproduire, créer et autogérer.
Les approches centrées sur les connaissances, comme celle proposée par Paquette, proposent
une démarche utile dans les toutes premières phases du processus de conception : l’analyse du
périmètre de connaissances ciblé par la formation amène à une définition plus précise du
problème de conception, étape-clé pour la conception d’une solution adaptée.
L’approche documentaire, centrée sur les ressources
L’approche documentaire basée sur les ressources, ou objets d’apprentissage, repose
notamment sur des principes de partage et de réutilisation des ressources pédagogiques. C’est
l’objet du projet européen ARIADNE1 qui a abouti à la réalisation d’outils visant à favoriser ce
partage et cette réutilisation des ressources pédagogiques. Plusieurs conditions déterminent
l’efficacité de l’approche documentaire (Pernin et Lejeune 2004b) : l’indexation des objets ; leur
interopérabilité ; l’intégration des services au sein d’un environnement pour adapter, réutiliser,
structurer les objets d’apprentissage et suivre les activités des apprenants portant sur ces objets ;
la mutualisation des ressources. Au cœur de cette approche, des travaux sur l’indexation ont
conduit à des efforts de normalisation, notamment visibles à travers la définition de la norme
LOM2. La norme SCORM1 a été élaborée dans le but de constituer une implémentation technique
1 http://www.ariadne-eu.org2 http://ltsc.ieee.org/wg12
121
de la norme LOM favorisant l’interopérabilité et offrant un modèle pour la mise en œuvre des
solutions. L’intégration de services s’est quant à elle matérialisée par le développement de
plateformes LMS respectant les standards LOM et SCORM.
Le projet SCENARI (Crozat et Trigano 2002) est né du constat que l’approche documentaire
n’était pas suffisante pour l’application d’approches pédagogiques autres que la simple
consultation d’informations. Le projet SCENARI a pour objectif de s’assurer de l’adaptation des
ressources au contexte d’utilisation. Fondés sur la problématique de l’industrialisation de la
conception de ressources pédagogiques, les travaux du projet SCENARI visent à optimiser la
conception et à pérenniser les ressources produites en favorisant leurs mises à jour et leur
réutilisation dans des contextes variés avec une adaptation facilitée aux besoins des
enseignants. L’approche mise en œuvre repose sur des principes issus de l’ingénierie
documentaire et de l’ingénierie des systèmes d’information. Elle s’appuie notamment sur une
structuration logique de l’information et une séparation entre le scénario pédagogique et le
contenu pédagogique. Dans cette approche, le scénario pédagogique désigne un parcours au
sein de ressources, défini de façon plus ou moins ouverte. Les activités d’apprentissage se
résument ainsi à des interactions entre un apprenant et des ressources.
L’approche centrée sur les activités
L’approche centrée sur les activités est celle adoptée par Koper dans l’élaboration du Langage
de Modélisation Pédagogique (EML : Education Modelling Language) qui a inspiré par la suite la
spécification IMS-LD (Koper & Olivier 2004). Ce modèle structure les situations d’apprentissage
en Unités d’Etude (UE). Chaque UE vise un objectif d’apprentissage précis et est composée
d’activités réalisées par des acteurs (apprenants ou enseignant) dans un environnement qui met
à leur disposition les ressources et outils nécessaires (Pernin 2004).
Figure 26 - Présentation simplifiée du modèle EML (Pernin 2004)
1 http://www.adlnet.gov/capabilities/scorm
122
Le modèle proposé par EML est considéré par Pernin (2004) comme offrant cinq apports majeurs
dans la réflexion pédagogique :
La position centrale conférée à l’activité d’apprentissage favorise une scénarisation
pédagogique tournée vers l’activité des apprenants et non pas centrée sur les contenus.
La réflexion sur les activités d’apprentissage entraîne par ailleurs un questionnement sur
les stratégies pédagogiques à mettre en œuvre.
Ce modèle laisse à l’enseignant ou au concepteur pédagogique le choix du type de
dispositif d’apprentissage qu’il souhaite adopter (traditionnel ou utilisant des outils
numériques), il est donc ouvert, ce qui le rend tout à fait compatible avec la conception de
scénarios de dispositifs de formation hybrides.
Le modèle EML, en séparant les activités d’apprentissage des ressources utilisées, offre
la possibilité de concevoir des patrons de scénarios réutilisables dans des contextes
différents en y associant des ressources et des contenus nouveaux, adaptés à la
nouvelle situation.
Le modèle EML est indépendant des plateformes d’exécution, ce qui favorise la pérennité
des scénarios élaborés.
L’approche centrée sur les interactions
Un autre type d’approche de la conception place les interactions au centre de la réflexion. Il porte
sur des scénarios qui proposent des activités collectives (collaboratives ou coopératives). Nous
étudions plus spécifiquement les particularités de ces scénarios dans la section 5.3.
La mise en œuvre d’une approche spécifique pour l’apprentissage collaboratif vise à exprimer les
interactions sociales entre les acteurs du scénario et les différentes modalités qui y sont
associées.
Dans la recherche autour des CSCL (Computer Supported Collaborative Learning – cf. § 5.3.1),
la conception de scénarios pédagogiques collaboratifs est étudiée à travers le concept de script
(Dillenbourg 2004) assimilable à la notion de scénario pédagogique mais possédant des
spécificités induites par la nature collaborative des activités d’apprentissage mises en œuvre :
« Scripting is some compromise between the constraints usually induced by instructionaldesign and the freedom of collaborative learning. » (Dillenbourg 2004)
Dillenbourg (2002) retient cinq attributs pour décrire les phases composant un script : la tâche
que les apprenants doivent accomplir, la composition des groupes, la manière dont la tâche est
distribuée entre les groupes mais aussi au sein d’un groupe (définition de rôles, de sous-tâches),
la modalité d’interaction (face-à-face, synchrone ou asynchrone, etc.), la durée.
Le modèle de participation présenté par Ferraris et al. (2005), issu des travaux de Martel (1998)
et à l’origine du langage de modélisation LDL (Learning Design Language) (Martel et al. 2006),
correspond lui aussi à une approche centrée sur les interactions. Il propose un cadre pour décrire
123
les activités de groupe à l’aide des notions d’enceintes, d’acteurs ayant un rôle et une position,
de scénarios d’interactions et d’outils (des explications plus détaillées sont proposées à travers la
présentation du langage LDL dans la section 6.5.2).
L’approche centrée sur les intentions
Une autre approche de conception pédagogique vise à prendre comme point de départ les
intentions des concepteurs ou enseignants-concepteurs (Emin 2010). Dans cette approche, une
intention pédagogique est définie comme une orientation générale exprimant les effets attendus
suite à la formation. Les intentions se différencient des objectifs pédagogiques et ces deux
notions sont complémentaires : les objectifs pédagogiques portent sur les capacités visées chez
les apprenants et expriment de façon plus concrète les intentions ; les intentions quant à elles
donnent du sens aux objectifs pédagogiques en les positionnant dans une perspective plus
globale (elles portent de façon plus générale sur les connaissances et compétences visées, sans
formulation de résultats mesurables chez les apprenants). Emin (2010) donne les exemples
suivants afin de distinguer intention et objectif pédagogique : la phrase « Je veux que les jeunes
comprennent l’importance de l’argent dans la vie quotidienne » formulée par un enseignant est
une intention, et la phrase « le jeune doit être capable d’établir un budget prévisionnel équilibré à
partir des informations suivantes… » constitue un objectif opérationnel.
Le modèle ISiS (Intentions, Stratégies, interactional Situations) (Pernin et al. 2008 ; Emin 2010) a
été élaboré suite à plusieurs constats : d’une part, les EML (langages de modélisation
pédagogique) existants (tels que IMS-LD ou LDL) sont difficilement utilisables par les
concepteurs ; d’autre part ces EML ne prévoient pas l’expression des intentions des concepteurs,
qui apparaissent pourtant comme essentielles dans le processus de conception et de réutilisation
de scénarios pédagogiques (Emin 2010). Les intentions ont la particularité d’être liées à des
concepts et processus métiers spécifiques au domaine de conception concerné. Une phase
préalable à la définition du modèle ISiS a consisté à décrire le processus-métier de conception de
scénarios pédagogiques (décrit précédemment
figure 23) en faisant apparaître la place des intentions dans le choix de la démarche didactique et
pédagogique mise en œuvre.
Dans ce contexte, le modèle ISiS a été défini pour
« structurer la démarche de conception d’un scénario pédagogique et pour favoriser laréutilisation et les échanges de pratique entre concepteurs » (Emin 2009).
Selon ce modèle (figure 27), un scénario pédagogique est tout d’abord décrit à l’aide d’un
scénario structurant appelé scénario intentionnel qui exprime les différents niveaux de décision
du concepteur : intentions, stratégie, tactique. Ce scénario structurant doit par la suite être
instancié en faisant correspondre les éléments abstraits définis (activités types, rôles types,
ressources types, lieux types) à des éléments concrets de mise en œuvre (ressources concrètes,
124
services offerts par la plateforme choisie pour le déploiement). Le modèle ISiS est détaillé de
manière plus complète dans la section 6.5.3.
Figure 27 - Schéma descriptif du modèle ISiS (Emin 2010)
125
Synthèse : conception pédagogique (1/2)
Dans le contexte de nos travaux, la conception de dispositifs de formation utilisant
le jeu est abordée sous l’angle de la scénarisation pédagogique présentée dans
les sections précédentes. Nous retenons que la scénarisation pédagogique ne
porte pas exclusivement sur les contenus mais englobe les activités de l’ensemble
des acteurs de la formation et les ressources utiles pour réaliser ces activités.
Considérant la scénarisation pédagogique comme une activité de conception au
sens large, nous prenons en compte les résultats de certains travaux en sciences
cognitives (cf. section 5.1). Nous notons que la scénarisation pédagogique
s’inscrit dans un processus de conception caractérisé notamment par :
une phase de conception initiale basée sur la réutilisation d’idéespersonnelles, pas obligatoirement formalisées, ou de solutionsmutualisées au sein d’une communauté de concepteurs ;
différents niveaux de scénarisation : de l’esquisse au scénario détaillé,l’activité du concepteur est basée sur un processus d’affinementprogressif et itératif ;
une place importante conférée à la communication entre les différentsacteurs du projet autour du scénario en cours d’élaboration.
Dans nos travaux de thèse, nous nous intéressons plus spécifiquement à la
conception initiale du scénario par un ingénieur pédagogique cherchant à
répondre à une demande de formation formulée par un commanditaire (client
externe dans le cas d’une société prestataire en ingénierie de formation ou
besoins de formation internes dans le cas d’un service de formation d’une
entreprise). L’importance des échanges avec le commanditaire du projet doit de
ce fait être prise en compte.
126
Synthèse : conception pédagogique (2/2)
Nous relevons qu’il existe différentes approches de la conception pédagogique
traduisant différentes approches de l’apprentissage. Nous retenons plus
particulièrement que l’approche centrée sur les activités favorise la mise en œuvre
de démarches pédagogiques cognitivistes et constructivistes en plaçant la
réflexion sur l’apprenant.
Nous notons également que l’approche centrée sur les connaissances constitue
un point d’entrée pertinent pour la phase de définition du problème de conception,
et nous la rapprochons de la démarche définie par la didactique professionnelle
où l’étape d’analyse des compétences en situation apparaît comme un préalable à
la conception d’un dispositif de formation (cf. section 3.2.5).
Dans l’étape initiale du processus de conception, l’approche centrée sur les
connaissances peut être complétée par la prise en compte des intentions afin de
définir les objectifs de la formation et les stratégies. De son côté, l’approche
documentaire apporte un éclairage utile sur les problématiques de mutualisation,
réutilisation et pérennisation des ressources pédagogiques qui constituent un
enjeu important dans notre contexte d’application.
Enfin, l’approche centrée sur les interactions apporte des éléments essentiels
pour la définition d’activités collectives, centrales dans les dispositifs de formation
que nous étudions.
127
5.3. L’apprentissage collectif et ses problématiques deconception
L’un des principes caractérisant notre orientation vers les dispositifs LRPG est la volonté de
proposer des activités collectives. Nous mettrons en évidence un peu plus loin les points qui
justifient ce parti pris, mais avant toute chose, il convient de définir ce qu’est l’apprentissage
collectif, et pourquoi nous avons préféré, à l’instar de George (2001), l’utilisation de cette
appellation plus large plutôt que l’emploi des dénominations fréquemment rencontrées
apprentissage collaboratif ou apprentissage coopératif.
5.3.1. Définitions
Lorsque l’on s’intéresse à ce sujet, l’un des premiers réflexes est de se pencher sur la distinction
que certains auteurs font entre les notions de collaboration et de coopération.
La collaboration se rapporte généralement à des « situations où les acteurs partagent les
mêmes buts tout au long de la tâche » (Rogalski 1998).
La coopération désigne le plus souvent des situations dans lesquelles les participants ont
un but général commun mais des sous-buts, et donc des tâches individuelles différentes.
Qu’en est-il de l’apprentissage coopératif et de l’apprentissage collaboratif ? Ces deux types
d’apprentissage possèdent des points communs : ils mettent en œuvre une pédagogie active
basée sur des activités effectuées en groupes où le formateur joue un rôle de facilitateur ou
d’animateur ; outre l’acquisition des connaissances ou compétences cibles de la formation, ils
visent généralement à développer des compétences de travail en groupe. Comme le met en
évidence George (2001), les différences entre l’apprentissage collaboratif et l’apprentissage
coopératif portent sur la structuration des activités, le contrôle exercé par l’enseignant sur les
activités et les rôles des apprenants. Dans le cadre d’un apprentissage coopératif, les activités
sont structurées de manière précise, l’enseignant exerce un plus grand contrôle que dans des
activités collaboratives. Dans une activité d’apprentissage coopérative les rôles sont assignés de
manière spécifique alors que dans l’apprentissage collaboratif les rôles sont définis suite à une
négociation entre les apprenants ou avec le formateur. Dans ses travaux, George s’intéresse à
ce qu’il dénomme de façon plus globale l’apprentissage collectif. Il considère que l’apprentissage
collaboratif et l’apprentissage coopératif sont des formes d’apprentissage collectif. Une activité
collective alterne très souvent des phases de travail collaboratives et des phases de travail
coopératives. Le concept d’apprentissage collectif est ainsi défini comme :
« une approche pédagogique visant à impliquer les apprenants dans des activitéscollectives et les incitant ainsi à partager leurs connaissances dans le but de favoriser laconstruction sociale des savoirs. » (George 2001).
128
L’utilisation d’outils informatiques pour soutenir les activités d’apprentissage collectif, plus
particulièrement dans le cadre d’un dispositif de formation à distance, est désignée et étudiée
sous l’appellation CSCL ou Computer Supported Collaborative Learning. Le domaine de
recherche des CSCL est un domaine pluridisciplinaire qui s’intéresse à la fois à l’apprentissage, à
ses aspects collaboratifs, aux principes qui soutiennent les activités d’apprentissage
collaboratives et à l’utilisation des outils informatiques dans ce contexte. Dans le CSCL, le
concept de script (Dillenbourg 2004) est généralement utilisé pour désigner ce que nous avons
appelé jusqu’ici scénario, terme utilisé quant à lui dans le domaine de la conception pédagogique
en général. De notre côté, y compris pour parler des scripts d’apprentissage collaboratif, nous
utilisons le terme générique scénario.
5.3.2. L’intérêt de l’apprentissage collectif à distance
Nous nous intéressons ici tout particulièrement à la dimension collective des dispositifs de
formation à distance (instrumentés numériquement), considérée comme « l’apport pédagogique
le plus important de l’enseignement en ligne. » (Walckiers & De Praetere 2004).
Walckiers & De Praetere (2004) mettent en évidence des avantages pédagogiques relatifs à
l’utilisation de l’apprentissage collectif en ligne en comparaison de l’apprentissage collectif en
présentiel. Certains des avantages cités apparaissent comme plus particulièrement liés aux
caractéristiques asynchrones de ce type de dispositif. Les dispositifs d’apprentissage collaboratif
à distance possèdent les avantages suivants :
la flexibilité et l’autonomie offerte aux apprenants ;
la réflexivité sur l’apprentissage : l’exercice de l’esprit critique et la prise de recul sont
favorisés par les modalités de communication asynchrones ;
la communication par texte est plus formative, elle demande des efforts de formalisation
des idées pédagogiquement bénéfiques, dans la lignée de la mise en œuvre d’une
pédagogie constructiviste ;
la communication par écrit possède comme autre avantage de mettre l’accent sur le
contenu du message et d’atténuer l’influence de caractéristiques liées à la personnalité
des participants. La communication à distance permet également aux plus timides de
s’exprimer plus facilement que dans des sessions de formation en face à face ;
les échanges observés dans les dispositifs de formation collaboratifs en ligne s’initient
assez naturellement et sont généralement conviviaux ;
la mutualisation et le partage des informations y sont par ailleurs facilités, d’autant plus
que les participants sont géographiquement isolés. Ceci est également favorisé par la
permanence des contributions écrites.
129
un effet d’émulation et d’entraide est généralement observé au sein des groupes de
travail de petite taille (8 apprenants maximum).
A travers les avantages listés ici, l’apprentissage collectif à distance instrumenté apparaît comme
tout particulièrement adapté à une approche socio-constructiviste. Il cumule par ailleurs certains
avantages de la formation collective en présentiel avec des avantages de la formation en ligne,
notamment : flexibilité et autonomie octroyés aux participants, mutualisation des connaissances,
prise de recul et réflexivité. Wallet (2004) nuance toutefois les propos de Walckiers & De
Praetere (2004) en indiquant que « Rien n’est faux là dedans mais c’est un peu réducteur quand
même ». On considère en effet généralement que la formation à distance possède quelques
« inconvénients » par rapport au présentiel, ou en tout cas quelques spécificités qui rendent son
utilisation plus ou moins bien adaptée selon les compétences qui font l’objet de la formation et le
profil du public cible (cf. problématiques communes avec la conception de dispositifs mixtes
abordées dans la section 5.4) : par exemple, dans un dispositif à distance, les interactions entre
les participants sont plus difficiles et changent de nature, même lorsque la communication se fait
de manière synchrone ; de plus, dans une formation à distance le formateur et les autres
participants sont moins présents, ce qui requiert une plus grande autonomie et une motivation
plus forte des apprenants (Amiel et al. 2004).
5.3.3. Caractéristiques des situations d’apprentissage collectif
L’apprentissage collectif est basé sur les interactions qui ont lieu entre les participants. L’un des
défis de la conception d’une situation d’apprentissage collectif est par conséquent de définir un
contexte qui favorise ces interactions. Dans le cadre d’un dispositif CSCL, cela suppose donc
pour le concepteur de réfléchir à deux aspects : d’une part aux méthodes et activités
pédagogiques susceptibles de produire des interactions entre les participants, d’autre part aux
outils adaptés pour soutenir les interactions dans le contexte spécifique des activités choisies.
L’étude des dispositifs CSCL est l’objet des approches de conception pédagogique centrées sur
les interactions. Dans la section 2.2.3, nous avons par exemple évoqué le cadre défini par
Ferraris et al. (2005) qui décrit les activités de groupe à l’aide des notions d’enceintes, d’acteurs
possédant un statut, un rôle et une position, de scénarios, d’outils, de médiateur (cf. explications
plus détaillées à travers la présentation du langage LDL dans la section 6.5.2).
De leur côté, David et al. (2008) ont défini une structuration de ce qu’ils appellent une situation
d’apprentissage collective instrumentée (SACI). Leur travail met en évidence les dynamiques
impliquées dans la conception de telles situations à travers l’identification de différents niveaux
de structuration d’une SACI :
un niveau transversal qui définit le contexte global de la situation d’apprentissage
composé des objectifs pédagogiques, du public cible, des modalités spatiales et
temporelles d’organisation ;
130
le niveau de l’activité pédagogique qui correspond au choix d’un type d’activité selon
l’intention visée et à la définition du scénario de l’activité ;
le niveau des actions à réaliser dans le cadre de l’activité qui présente le type de modalité
de travail (individuel, coopération, collaboration ou compétition), le nombre d’apprenants
dans les groupes de travail constitués, les rôles joués et la temporalité (activité synchrone
ou asynchrone) ;
le niveau le plus bas qui décrit les outils de production, de communication, de gestion et
de coordination mis à disposition des apprenants pour réaliser l’activité.
L’approche de David et al. (2008) met en évidence des caractéristiques que l’on retrouve dans
tout processus de conception : ils notent que les différents niveaux ainsi identifiés s’influencent
mutuellement et font partie d’un processus dynamique.
Weinberger et al. (2009) proposent également une structuration des situations d’apprentissage
collaboratives à l’aide d’un nombre d’éléments limités. On y retrouve les informations relatives
aux participants et aux activités auxquelles ils prennent part, les rôles qu’ils jouent, les
ressources qu’ils utilisent et les groupes qui sont constitués. En plus de ces éléments communs
aux approches précédentes, les activités collectives sont abordées de façon originale avec le
concept de mécanismes décrivant les aspects relatifs à la distribution : répartition des participants
dans les groupes, répartition des tâches entre les groupes ou les participants, distribution des
outils entre les participants, et distribution des outils et participants en fonction du déroulement
temporel de la situation.
Dillenbourg (2002) retient quant à lui cinq critères descriptifs pour les phases d’un scénario
collaboratif : la tâche que les apprenants doivent accomplir, la composition des groupes, la
distribution de la tâche entre les groupes et entre les participants d’un groupe, la modalité
d’interaction (face-à-face, synchrone ou asynchrone, etc.) et la durée prescrite pour la tâche.
A travers ces travaux, les distinctions qui apparaissent entre une activité d’apprentissage
collective et une activité individuelle portent sur : la multiplicité possible des rôles des acteurs, la
constitution des groupes, le caractère synchrone ou asynchrone des échanges et surtout les
aspects distribués qui s’appliquent aussi bien aux tâches, aux participants et aux outils.
5.3.4. Concevoir des situations d’apprentissage collectif
Un scénario de formation est qualifié de collaboratif lorsque l’intention initiale qui a guidé sa
conception est la mise en place d’un apprentissage collaboratif, par définition centré sur les
interactions (Dillenbourg 2002). Dans ce cas les phases-clés du scénario reposent sur des
activités collectives. Toutefois, un scénario d’apprentissage collaboratif inclut également des
phases complémentaires d’introduction de concepts, de débriefing, d’entraînement ou
131
d’évaluation, qui peuvent être menées individuellement : un dispositif CSCL peut donc être
qualifié de dispositif de formation mixte (cf. explications détaillées dans la section 5.4).
Les scénarios collaboratifs sont le plus souvent séquentiels, parfois itératifs (Dillenbourg 2002).
La nécessité de proposer des scénarios facilement appropriables par les formateurs, tuteurs et
apprenants justifie le faible recours à des scénarios non-linéaires, dont le degré de complexité est
obligatoirement plus élevé.
Les situations d’apprentissage collectif composant un dispositif CSCL ont besoin d’être
scénarisées afin de s’assurer que le déroulement effectif de l’activité corresponde au mieux à ce
que le concepteur a prévu (David et al. 2008 ; Dillenbourg 2002) et génère les interactions
adaptées pour atteindre les objectifs pédagogiques visés. La conception de ce type de situation
d’apprentissage se focalise en premier lieu sur les interactions à obtenir entre les apprenants :
dans un scénario d’activité collective, plus que le contenu pédagogique, c’est le processus de
collaboration qui est central (Weinberger et al. 2009). La particularité des scénarios collaboratifs
est de définir un ensemble de consignes concernant la façon dont les participants doivent
interagir (Dillenbourg 2002), il s’agit de spécifier
« une histoire ou un scenario que les étudiants et tuteur doivent jouer de la même façonque des acteurs interprètent le script d’un film1. » (Dillenbourg 2002).
Dillenbourg (1999) identifie plusieurs approches pour concevoir les situations d’apprentissage
collaboratif. Ces approches se répartissent en deux grandes catégories complémentaires :
structuration de l’activité a priori (définition d’un scénario prescrit) et régulation des interactions
en cours d’activité.
Approches basées sur la structuration du scénario en amont de l’activité.
L’une de ces approches consiste à définir les conditions initiales de l’activité, c’est-à-dire les
principes concernant l’organisation des groupes (taille du groupe, constitution définie par le tuteur
ou laissée aux choix des apprenants, etc.) et les consignes des tâches à effectuer.
Une autre approche vise à définir un contrat de collaboration à travers un scénario basé sur des
rôles. Dans ce cas, ce sont les rôles spécifiés qui génèrent des interactions spécifiques entre les
participants. On retrouve ici des caractéristiques des jeux de rôle pédagogiques (présentés dans
la section 3.4.3). Certaines méthodes consistent par exemple à créer des déséquilibres entre les
participants au niveau des savoirs ou compétences détenus. De cette façon, dans la mesure où
la résolution de la mission proposée suppose de réunir l’ensemble des informations ou de mettre
en œuvre des compétences complémentaires, les échanges entre participants sont
indispensables. Ce principe de définition de rôles asymétriques est à la base de la méthode
jigsaw, activité devenue désormais un classique dans le domaine du CSCL (Hernández-Leo
2007). Une autre démarche consiste à placer les apprenants dans la peau de personnages ayant
des fonctions ou des points de vue différents des leurs afin de leur faire prendre du recul ou
1 “A script is a story or scenario that students and tutors have to play as actors play a movie script.”
132
d’envisager une situation sous un angle différent. D’autres types de rôles les placent au cœur
d’une situation conflictuelle les forçant à adopter un autre regard sur les évènements.
Approche basée sur la régulation de l’activité lors de sa mise en œuvre.
Cette approche de l’apprentissage collaboratif met l’accent sur le contrôle et la régulation des
échanges par un tuteur au cours de l’activité. Le formateur ou tuteur a, dans ce cas, un rôle
central dans l’activité, d’autant plus crucial dans les groupes de grande taille et lorsque les
activités ont été moins structurées en amont de l’exécution. Outre les interactions entre les
apprenants, parfois régulées par le tuteur, des interactions constructives ont également lieu entre
le tuteur et les apprenants, notamment à travers les rétroactions fournies par le tuteur sur les
activités effectuées.
Dans la logique de la première approche de scénarisation visant à décrire les activités a priori,
Walckiers et De Praetere (2004) soulignent que, lors de la conception de dispositifs
d’apprentissage collaboratif, il ne faut pas négliger la définition du planning du déroulement de la
formation afin de s’assurer de conserver une dynamique continue du dispositif, tout en octroyant
une certaine liberté aux participants.
A l’inverse du besoin de scénarisation mis en évidence ici, une caractéristique spécifique de la
conception de situations d’apprentissage collectif concerne la nécessaire flexibilité de ces
situations. Dillenbourg (2002) indique qu’une scénarisation trop prescriptive d’une activité est
contre-productive : si les situations d’apprentissage collectif doivent imposer un certain niveau de
contraintes pour s’assurer d’une certaine efficacité de l’activité, une collaboration trop contrainte
risque de parasiter les mécanismes naturels d’interaction entre les participants.
Hernández-Leo (2007) identifie problèmes-clés relatifs à la conception de CSCL :
la conception de scénarios collectifs visant à générer des interactions spécifiques entre
les participants est une activité complexe. Elle doit être effectuée avec beaucoup
d’attention et encore plus lorsque le public cible (enseignants et apprenants) n’est pas
familier avec ce type de situation d’apprentissage. Les difficultés résident par ailleurs
dans le délicat équilibre à trouver au niveau de la scénarisation ;
un langage de modélisation devrait être utilisé pour formaliser les scénarios afin qu’ils
soient automatiquement interprétés par les ordinateurs ;
les formateurs ou concepteurs pédagogiques ne sont pas familiers avec les langages
informatiques.
A partir de ces constats, Hernández-Leo propose donc de recourir à un environnement auteur
graphique pour soutenir la formalisation des scénarios d’apprentissage. Ce type d’outil est
également jugé intéressant par Weinberger et al. (2009) qui insistent sur sa nécessaire capacité
à permettre l’élaboration de scénarios à différents niveaux de granularité, d’une simple activité à
un cours global. Les environnements d’aide à la conception et les langages de formalisation qui y
133
sont intégrés doivent permettre l’orchestration d’activités de natures diverses, et notamment
l’articulation entre des activités d’apprentissage individuelles et des activités collectives.
De plus, Hernández-Leo se dirige vers une approche de l’assistance à la conception basée sur
l’utilisation de patrons. Cette approche est considérée comme plus fonctionnelle et moins rigide
que les approches traditionnelles de conception pédagogique. Dans le chapitre 6 différentes
approches de l’assistance à la conception, et notamment l’approche par patrons, sont étudiées.
134
.
Synthèse : conception et activités d’apprentissage collectives
A travers les cadres de description étudiés ici nous retenons que la conception
d’activités collectives d’apprentissage passe par la définition d’un scénario
d’interactions se traduisant par :
la définition de rôles parfois différents pour les acteurs du scénario,
la spécification des paramètres de constitution des groupes,
l’indication du caractère synchrone ou asynchrone des échanges,
et surtout la spécification des aspects distribués du scénario s’appliquantaussi bien aux tâches, aux participants et aux outils.
Ces principes de conception alimentent notre travail, les scénarios LRPG ayant
comme caractéristique principale de mettre en œuvre des activités
d’apprentissage collectives. Nous nous situons plus particulièrement dans une
approche de conception de scénarios en amont de l’exécution et laissons donc de
côté les aspects liés à la régulation du scénario en cours d’activité.
L’une des particularités de la conception de scénarios d’apprentissage collectif
consiste à trouver le bon équilibre de scénarisation : il s’agit de susciter des
interactions sources d’apprentissage tout en prenant soin de ne pas adopter une
démarche trop prescriptive qui risquerait d’altérer les caractéristiques qui rendent
justement ces échanges sources d’apprentissage.
135
5.4. Conception de dispositifs de formation aux multiplesdimensions
Les dispositifs de formation que nous étudions mettent en œuvre de multiples dimensions de
l’apprentissage : l’une d’elles concerne l’association de la formation à distance et de la formation
en présentiel. Nous nous intéressons en particulier à l’impact de la prise en compte de ces
multiples dimensions sur l’activité de conception.
Pour mieux comprendre les caractéristiques de notre objet d’étude, les dispositifs Learning Role-
Playing Games, nous souhaitons les situer par rapport à un concept couramment utilisé dans
notre contexte d’application : le e-learning. Nous verrons que les définitions du e-learning nous
invitent ensuite à nous intéresser aux expressions « dispositifs de formation mixtes » et
« dispositifs de formation hybrides ». L’identification de spécificités de conception relatives à ces
dispositifs s’appuie à la fois sur des travaux issus de la recherche et sur des travaux menés par
des professionnels de la formation.
5.4.1. E-learning, formation mixte, formation hybride
Le terme e-learning, couramment utilisé dans le contexte d’application de nos travaux, est né à la
fin des années 1990 de la fusion des mots anglais electronic (électronique) et learning
(apprentissage). Des définitions variées en sont proposées, celle présentée en 2000 par la
Commission Européenne semble même peu objective en associant le e-learning à des effets
obligatoirement bénéfiques sur l’apprentissage :
« l’utilisation des nouvelles technologies multimédias et de l’Internet, pour améliorer laqualité de l’apprentissage en facilitant l’accès à des ressources et des services, ainsi quedes échanges et la collaboration à distance ».
De cette définition nous retenons néanmoins les premiers éléments qui rejoignent la définition la
plus communément admise caractérisant le e-learning comme une « formation ayant recours à
un support électronique » (Depover & Marchand 2002). D’autres définitions restreignent parfois le
support électronique à Internet. Il s’agit par exemple de la position adoptée dans l’édition 2012 du
dictionnaire Le Petit Robert1 qui fait entrer pour la première fois le terme e-learning dans un
dictionnaire français : « apprentissage, formation par le moyen d’Internet ». Même si les
dispositifs e-learning sont très souvent basés sur l’utilisation de ressources ou d’outils Web, ils
peuvent recourir à d’autres outils numériques (Depover & Marchand 2002). En lien avec
l’étymologie du mot, l’utilisation d’outils et ressources numériques constitue la principale
caractéristique du e-learning. L’expression module e-learning, utilisée par les professionnels du
secteur de la formation professionnelle (comme les sociétés prestataires telles que Symetrix)
désigne une ressource numérique fortement typée (contenus et activités pédagogiques
médiatisées) utilisée dans le cadre d’une formation e-learning.
1 J Rey-Debove, A. Rey (sous la direction de), Le Petit Robert de la langue française 2012, Paris, Dictionnaires Le Robert
136
Col & Fenouillet (2007) distinguent deux grandes dimensions constitutives d’un dispositif e-
learning :
le e-learning peut être en ligne ou hors ligne ;
le e-learning peut être effectué en autonomie ou de manière collaborative.
Ces dimensions peuvent être combinées au sein d’un même dispositif : certaines activités
pouvant être hors ligne et autonomes alors que d’autres sont effectuées collaborativement en
ligne par exemple.
L’aspect multi-dimensionnel des dispositifs de formation est une caractéristique que nous
souhaitons approfondir. Pour qualifier un dispositif de formation mettant en œuvre différentes
modalités, deux appellations sont fréquemment utilisées : les expressions « dispositif de
formation hybride » et « dispositif de formation mixte » (blended learning en anglais). Comme
pour la plupart des problèmes terminologiques auxquels nous sommes confrontés, il n’existe
actuellement aucun consensus sur les définitions de ces deux appellations. Si certains auteurs
les utilisent de manière indifférente, d’autres préfèrent en distinguer le sens.
Dans la suite de cette section, nous tenons à conserver la terminologie utilisée par les auteurs
des travaux étudiés, et les deux appellations sont par conséquent présentes.
Les travaux présentés utilisant l’expression « dispositif de formation mixte » font référence de
manière très large à la combinaison de dimensions variées (Singh 2003, Fraysse 2011, Carman
2002, Ausburn 2004) : apprentissage individuel ou collaboratif, en ligne ou hors-ligne, formel ou
informel (Collis et al. 2005), synchrone ou asynchrone, etc. (cf. liste plus détaillée de dimensions
d’un dispositif de formation mixte section 5.4.2). L’expression « formation hybride » est quant à
elle utilisée pour faire référence à l’association de la formation à distance et de la formation en
présentiel (Deschryver 2008 ; Charlier, Deschryver et Peraya 2006). Dans ses travaux,
Deschryver préfère employer l’expression formation hybride à celle de formation mixte car elle
juge le concept d’hybridation plus adapté en ce qu’il
« réfère à la création d’une nouvelle entité issue du croisement de deux autres dont ellereprend et réorganise les caractéristiques ».
Si le terme e-learning met en avant les aspects technologiques, les qualifications « mixte » ou
« hybride » permettent quant à elles de proposer un point de vue différent sur le dispositif de
formation en prenant en compte un éventail plus large de dimensions et en se décentrant du
point de vue outil.
Dans la synthèse de la section 5.4 nous positionnons nos travaux par rapport à ceux présentés
ici et mettons en évidence les choix terminologiques effectués pour présenter nos propositions
dans la partie 3.
137
5.4.2. Caractéristiques d’un dispositif de formation mixte
Différents travaux académiques se sont attachés à identifier les dimensions les plus courantes
d’un dispositif mixte (Singh 2003, Carman 2002, Ausburn 2004, Collis et al. 2005). De son côté,
Fraysse1 (2011) (cf. figure 28) a élaboré une grille qui présente des dimensions supplémentaires
issues d’une analyse de pratiques terrain en formation professionnelle. Au final, nous retenons
les dimensions suivantes d’un dispositif de formation mixte :
modalités d’apprentissage :
o collective ou individuelle ;
o autonome ou non-autonome (encadrée par un tuteur ou un enseignant) ;
modalités de mise en œuvre :
o à distance ou en présentiel ;
o en ligne ou hors ligne ;
o synchrone ou asynchrone
o sur un lieu de formation spécifique ou sur le lieu de travail ;
ressources et outils :
o numériques (e-learning)
o « traditionnels » (documents papier) ;
approches pédagogiques :
o pédagogie active (échanges) ou pédagogie transmissive (réception) ;
o basée ou non sur le jeu ;
o formelle (formation organisée) ou informelle (échanges formateurs libres).
Si l’association de plusieurs modalités permet de bénéficier des avantages inhérents à chacune
d’elles, il ne faut perdre de vue les inconvénients qui subsistent. Si nous comparons plus
spécifiquement la formation à distance et la formation en présentiel, nous identifions les
avantages suivants comme les plus cités (Deschênes & Maltais 2006) :
la formation à distance possède des contraintes spatio-temporelles et organisationnelles
plus faibles, une plus grande liberté et flexibilité sont accordées à l’apprenant ;
la formation à distance permet la diffusion d’une formation à grande échelle et à moindre
coût ;
la formation à distance s’appuie « traditionnellement » sur une approche centrée sur
l’apprenant (Deschryver 2008), contrairement aux formations présentielles qui sont
encore très souvent basées sur un modèle transmissif descendant.
1 http://elearning-strategy.com/fr/?p=454
138
La comparaison formation à distance / formation en présentiel fait également apparaître des
spécificités de la distance souvent considérées comme des inconvénients :
le manque de contact humain, l’enseignant mais aussi les autres apprenants étant moins
présents ;
la nécessité d’un fort degré d’autonomie et de motivation de la part des apprenants,
contre-pied de la liberté spatio-temporelle et organisationnelle ;
le recours à des dispositifs technologiques, notamment pour la communication
synchrone, peut faire l’objet de dysfonctionnements techniques qui viennent parasiter les
activités pédagogiques et compromettre le bon déroulement de la formation.
La mise en évidence de ces spécificités souligne que la conception d’un scénario pédagogique
destiné à une formation à distance n’est pas la simple transposition d’un scénario de formation en
présentiel. Dans le cadre de la conception d’une formation mixte, les spécificités de chaque
modalité de formation, présence et distance notamment, doivent être considérées et les choix de
scénarisation effectués selon le contexte et les besoins.
Figure 28 - Les dimensions de la formation mixte ou blended learning (Matrice de Sébastien Fraysse, 2011)1
Un dispositif de formation mixte, par la mise en œuvre de dimensions variées de l’apprentissage
offre des intérêts à plusieurs niveaux (Singh 2003) :
il permet de toucher un public plus large, que ce soit grâce aux modalités de mises en
œuvre utilisées (association de sessions en présentiel et de sessions à distance), ou
grâce à la diversité de méthodes et activités d’apprentissage proposées ;
1 http://elearning-strategy.com/fr/?p=454
139
il est également considéré comme un moyen d’optimiser le rapport coût / efficacité d’une
formation en adoptant les modalités les plus adaptées aux divers paramètres de la
situation de formation (objectifs poursuivis, types de contenus pédagogiques, public
cible, contraintes organisationnelles, etc.).
L’une des particularités dans la conception d’un dispositif mixte consiste à faire des choix
concernant les différentes dimensions identifiées. Ces dimensions et les critères sur lesquels
reposent les choix (spécificités du contexte de formation, public cible, etc.) étant nombreux,
l’étude de la littérature ne fait pas apparaître de méthode prescriptive pour guider le concepteur.
Les travaux menés dans le domaine définissent en effet généralement des principes directeurs
assez généraux. C’est le cas des travaux de Carman (2002) qui propose cinq principes-clés à
prendre en considération dans la conception d’un dispositif de formation mixte :
mettre en place des activités synchrones animées par un formateur ;
proposer des activités d’auto-formation asynchrones que les apprenants puissent suivre à
leur rythme et selon leurs besoins ;
mettre en œuvre des situations d’apprentissage collaboratives, synchrones grâce à des
outils de chat par exemple, ou asynchrones par l’intermédiaire d’un forum de discussion ;
inclure une phase d’évaluation pertinente dans le dispositif de formation afin que les
apprenants se positionnent par rapport aux objectifs visés et ajustent leur parcours en
fonction de leurs besoins ;
fournir des documents supports (documentation ressource, documents de travail, etc.)
pour favoriser l’apprentissage juste-à-temps et améliorer la rétention des informations par
les apprenants.
Dillenbourg (2002) formule lui aussi quelques conseils pour la conception de dispositifs mixtes :
ne pas négliger les activités en présentiel et les privilégier notamment dans des phases
cruciales du scénario, car la communication en présentiel autorise certains types
d’échanges qui s’avèrent absents de la communication à distance ;
les activités synchrones étant source de contraintes pour les participants (nécessité de
fixer un rendez-vous commun avec les autres apprenants, outils parfois d’utilisation plus
contraignante…), il est préférable de les réserver à des phases-clés du scénario ou à des
activités pour lesquelles la communication asynchrone est difficilement envisageable.
Les résultats d’une étude menée par Ausburn (2004) mettent en évidence les modalités que
préfèrent des apprenants adultes dans un dispositif de formation mixte. Les préférences ainsi
mises en évidence résonnent avec certains principes-clés présentés précédemment :
les apprenants apprécient la communication avec un tuteur et avec leurs pairs,
ils ont besoin que la formation ait du sens par rapport à leur travail et à leurs besoins
réels,
140
ils apprécient la formation d’une communauté d’apprentissage en lien avec leur pratique
professionnelle,
ils estiment comme important que l’apprentissage puisse être personnalisé et le parcours
de formation choisi.
L’enquête menée par Ausburn (2004) met également en évidence que les apprenants adoptent
des stratégies d’apprentissage variées. Ceci justifie l’intérêt d’un dispositif de formation mixte
dont l’une des caractéristiques est justement de mettre en œuvre différentes approches de
l’apprentissage pour répondre aux besoins variés du public cible.
5.4.3. Spécificités liées à l’hybridation distance – présence
Dans cette section, nous nous intéressons à identifier plus particulièrement les spécificités liées à
l’association de modalités de formation en présentiel et de modalités de formation à distance.
Pour cela, nous nous appuyons sur les travaux de Deschryver (2008) menés autour de dispositifs
de formation hybrides qui :
« articulent à des degrés divers des phases de formation en présentiel et des phases deformation à distance, phases soutenues par un environnement technologique comme parexemple une plate-forme de formation ».
A travers cette définition, on voit que les environnements hybrides possèdent deux
caractéristiques majeures : l’articulation présence-distance et l’environnement
technopédagogique.
L’étude de l’articulation présence-distance dans un dispositif hybride fait apparaître que la place
de chaque modalité est variable : par exemple, la formation peut se dérouler majoritairement en
présentiel et proposer quelques ressources complémentaires en ligne ou bien la formation peut
avoir lieu en majeure partie en ligne avec quelques séances de regroupement en présence. Lors
de la conception du dispositif, une réflexion sur le choix des modalités en fonction du besoin de
formation doit donc être menée.
Pour comprendre les spécificités des dispositifs de formation hybrides, il convient également de
s’intéresser à l’environnement technologique sur lequel ils reposent. C’est lui qui permet de faire
le lien entre les phases de formation à distance et celles en présentiel. Pour désigner ces
technologies, Deschryver s’appuie sur le concept d’ « environnement technopédagogique qui met
l’accent sur la double composante de ces environnements, technique et pédagogique. ». Selon
Charlier, Deschryver et Peraya (2006), la présence de cet environnement technopédagogique
oblige à prendre en considération deux notions-clés, la médiatisation et la médiation :
« Un dispositif de formation hybride se caractérise par la présence dans un dispositif deformation de dimensions innovantes liées à la mise à distance. Le dispositif hybride,parce qu’il suppose l’utilisation d’un environnement technopédagogique, repose sur desformes complexes de médiatisation et de médiation. »
141
La place des dispositifs techniques et des médias étant prépondérante en formation à distance,
le processus de médiatisation est une phase importante de la conception (Charlier, Deschryver et
Peraya, 2006) :
« la médiatisation désignerait le processus de conception et de mise en œuvre de telsdispositifs de formation et communication médiatisée, processus dans lequel le choix desmédias les plus adaptés ainsi que la scénarisation occupent une place importante. Leprocessus de médiatisation – de "mise en" dispositif médiatique ou en "dispositif decommunication médiatisée" – relève en conséquence de l’ingénierie de la formation et dudesign pédagogique et porte sur deux dimensions du dispositif de formation : les objets etles fonctions. »
La médiatisation concerne les différents niveaux de granularité d’un dispositif de formation :
informations ou concepts de base plus ou moins complexes (ressources) mais aussi l’ensemble
des activités constituant le scénario d’apprentissage. L’usage de dispositifs informatisés et le
développement de la communication en réseau élargissent même davantage le processus de
médiatisation. Au départ cantonné à l’information, la médiatisation concerne aujourd’hui
l’ensemble des fonctions mises en œuvre dans le dispositif de formation (Peraya 2005, Michau &
Ploix 2003) : l’activité de production menée par les apprenants, la gestion des apprenants,
l’évaluation, l’organisation des groupes, la communication et la collaboration entre les participants
sont autant de fonctions qui peuvent désormais être supportées par des dispositifs
technologiques.
142
Synthèse : conception et dispositifs de formation mixtes
Dans cette section nous avons abordé la variété des dimensions constitutives
d’un dispositif de formation, et nous sommes intéressés aux caractéristiques liées
à l’association de la présence et de la distance.
D’après les définitions étudiées, nous choisissons de qualifier les dispositifs LRPG
de « dispositifs hybrides », en élargissant la notion d’hybridation à l’ensemble des
dimensions du dispositif. Nous trouvons pertinent de considérer que les dispositifs
LRPG constituent une nouvelle entité née de la rencontre entre plusieurs
dimensions, notamment : le jeu et la formation, la distance et la présence, le
synchrone et l’asynchrone, l’individuel et le collectif, la pédagogie active et la
pédagogie transmissive.
L’un des intérêts des dispositifs hybrides réside dans cette variété de dimensions
qui permet de les adapter à la diversité des besoins du public cible et aux
contraintes organisationnelles du contexte de formation. Lors des choix de
conception, il convient de prendre en considération les avantages et les
inconvénients de chaque dimension. Nous notons par exemple que si la
communication synchrone peut être utile pour certaines activités, elle impose aux
participants des contraintes organisationnelles et techniques non négligeables.
L’une des caractéristiques des dispositifs hybrides concerne le recours à des
outils et ressources technologiques. Si la médiatisation est une phase cruciale du
processus de conception de ces dispositifs, dans nos travaux, nous prenons le
parti de ne pas la faire intervenir dès les premières phases d’élaboration du
scénario pédagogique. Notre approche traduit une volonté d’accompagner la
conception de scénarios indépendants de toute implémentation, constituant ainsi
des modèles génériques réutilisables dans des contextes d’application variés.
143
5.5. Conception de jeux et de jeux pour la formationDans cette section, nous abordons la conception de jeux et plus particulièrement la conception
de jeux vidéos, souvent désignée par le terme anglais game design. Notre objectif est d’avoir une
meilleure vision des approches utilisées en game design, d’en identifier les caractéristiques, liées
à l’objet « jeu » lui-même ou relatives au processus mis en œuvre pour concevoir cet objet. Nous
visons en particulier à mettre en perspective les principes du game design avec ceux de la
conception pédagogique évoqués précédemment. Nous mettons également en évidence
quelques particularités relatives à la conception de jeux pour la formation. Les éléments abordés
dans cette section visent à alimenter nos propositions pour assister la conception de dispositifs
de formation utilisant le jeu (cf. partie 3).
5.5.1. Approches de conception de jeux
Une majorité de travaux relatifs au game design sont menés par des professionnels de l’industrie
du jeu vidéo, alors que peu de travaux académiques traitent de ce sujet. Selon Albinet (2010), la
théorisation du game design est un phénomène récent qui date des années 2000. Elle a été
initiée avec la diffusion du jeu vidéo et concerne majoritairement cette modalité particulière de
médiatisation du jeu. Toutefois les principes mis en avant sont souvent applicables à la
conception de jeu de manière plus large : c’est notamment le cas des travaux s’intéressant au
processus de conception qui mettent en évidence des principes indépendants du média utilisé
pour l’implémentation du jeu (i.e. support informatique pour les jeux vidéo, cartes et plateau pour
les jeux de société plus traditionnels).
Spécificités du jeu en tant que problème de conception
Au niveau de la recherche académique, Frasca (2003a) met en évidence que le jeu, et en
particulier le jeu vidéo, a d’abord été étudié sous l’angle de la narratologie. Le jeu est en effet
considéré par certains comme une forme d’œuvre narrative analysée à l’aide d’outils de la
sémiotique narrative issus par exemple des travaux de Greimas (Genvo 2006). Ceci n’est pas
valable pour l’ensemble des jeux vidéo. Et même lorsqu’ils sont basés sur une narration, les jeux
vidéos possèdent des spécificités qui amènent les chercheurs à vouloir les étudier à travers une
approche spécifique : la ludologie ou science du jeu. La ludologie s’intéresse aux différents
éléments composant le système de jeu : sa structure, ses règles et les principes qui le
caractérisent plus particulièrement, indépendamment du média qui supporte l’activité.
Si certains chercheurs ont dans un premier temps considéré comme distinctes les approches de
ludologie et de narratologie, d’autres proposent de les associer de façon complémentaire afin de
produire une analyse complète des jeux (Genvo 2006, Frasca 2003b).
144
Genvo identifie également deux pôles à prendre en compte dans l’analyse d’un jeu : d’une part la
structure de la situation définie par le système de règles soumis au joueur et d’autre part l'attitude
du joueur à l'égard de la structure.
Beaucoup de travaux sur le game design s’inscrivent dans l’approche ludologique. C’est le cas
notamment de Djaouti et al. (2010) pour qui la conception de jeu ou game design s’intéresse à
concevoir « l’interactivité ludique », c’est-à-dire les possibilités d’interactions entre le joueur et le
jeu, qui sont plus particulièrement relatives aux règles du jeu, indépendamment du support et
donc de la manière dont ces règles sont appliquées. De son côté Genvo (2006) indique que
« le travail du game designer consiste à communiquer l’idée de jeu à l’utilisateur parl’intermédiaire d’une structure afin de lui faire adopter une attitude ludique. »
Une troisième définition, celle proposée par Salen et Zimmerman (2004) désigne le game design
comme un processus :
« Game design is the process by which a game designer creates a game, to beencountered by a player, from which meaningful play emerges. »
Dans la suite, nous nous intéressons à différentes approches du game design reprenant les
notions mises en évidence par ces définitions : le game design comme définition de règles du
jeu, le game design et la recherche d’une attitude spécifique chez le joueur, le game design en
tant que travail sur le lien entre la structure du jeu et l’attitude du joueur, le game design en tant
que processus.
Le game design : des approches multiples adaptées aux besoins de conception
Djaouti et al. (2010) ont dressé un état de l’art de méthodologies de game design s’inscrivant
dans l’approche ludologique présentée précédemment. Leurs travaux distinguent ainsi deux
grandes catégories de méthodologies :
d’un côté les méthodologies basées sur un modèle formel s’intéressant soit au jeu, soit
au joueur, soit à la relation entre le joueur et le jeu, soit au processus de game design ;
de l’autre des méthodologies moins formalisées proposant soit des conseils pour la
conception, soit des listes d’éléments possibles à combiner pour concevoir un jeu.
Dans les premières approches, le jeu est considéré comme un objet et on s’intéresse à sa
structure. Des éléments constitutifs du jeu sont identifiés et alimentent la conception : selon cette
approche, notamment adoptée par Elverdam & Aarseth (2007) (cf. figure 29), la conception d’un
nouveau jeu consiste à renseigner les propriétés des dimensions identifiées dans le modèle.
145
Figure 29 - 17 dimensions du jeu (Elverdam & Aarseth 2007)
Les approches de conception s’intéressant au joueur cherchent quant à elles à « comprendre les
joueurs et leurs motivations pour prendre part à l’interactivité ludique » (Djaouti et al. 2010). C’est
dans cette catégorie que sont situés les travaux de Caillois. Ces derniers, qui ne portent pas à
l’origine sur des questions de conception, s’avèrent cependant souvent cités comme référence
dans des travaux sur la game design (Salen & Zimmerman 2004, Bateman & Boon 2005, Albinet
2010). Dans ces travaux, les catégories de jeux identifiées par Caillois (1958) (cf. section 4.5.1)
servent par exemple de base à l’identification de catégories de joueurs : on distingue ainsi les
joueurs qui s’intéressent à la compétition, ceux qui aiment se livrer au hasard, ceux qui
apprécient le jeu de rôle, ceux qui recherchent le vertige. Les approches de conception basées
146
sur un « modèle du joueur » utilisent ce type de catégorisation comme point de départ à la
conception d’un jeu.
Enfin, certaines méthodologies de game design s’appuient sur un modèle formel de la relation
joueur/jeu. Dans ce cas on retrouve une combinaison des deux types de modèles précédents à
travers notamment la mise en évidence des relations qu’ils entretiennent. Cette approche
multiperspective paraît particulièrement intéressante en ce qu’elle offre une vision plus complète
du jeu : joueur, jeu, articulation joueur/jeu.
Salen et Zimmerman (2004), qui s’inscrivent dans cette approche, définissent un cadre de
conception des jeux basé sur la notion de game design schemas, correspondant à des points de
vue différents (cf. figure 30) :
les règles (rules) : point de vue formel qui concerne les structures mathématiques
intrinsèques au jeu ;
le play : point de vue expérientiel, qui analyse les interactions entre le joueur et le jeu et
entre les joueurs eux-mêmes ;
la culture : point de vue contextuel qui s’intéresse au contexte plus large dans lequel
s’inscrit le jeu.
Figure 30 - Les 3 schémas primaires du jeu (Salen & Zimmerman 2004)
Un autre exemple de méthodologie s’intéressant à la relation joueur/jeu est présenté dans le
modèle MDA de Hunicke et al. (2004). Dans ces travaux le jeu est appréhendé selon trois
niveaux :
le niveau mechanics : concerne les règles du jeu,
le niveau dynamics : s’intéresse au système qui résulte de l’utilisation du jeu par le
joueur,
le niveau aesthetics : se focalise sur le ressenti du joueur (à ce niveau on retrouve des
notions liées à l’attitude du joueur proches de celles définies par Caillois 1958).
Selon cette perspective, le travail du concepteur vise à définir les mechanics qui vont agir sur les
dynamics et ainsi susciter des réactions émotionnelles spécifiques du joueur au niveau des
aesthetics (cf. figure 31).
147
Figure 31 - Modèle MDA (Hunicke et al. 2004)
D’autres travaux sur le game design visent à formaliser un processus de conception, c’est-à-dire
à définir les étapes constituant le game design. Tout comme nous avons pu constater une
certaine diversité dans les approches de game design abordées précédemment, il n’existe pas
non plus de processus unique de game design. Certains auteurs retiennent d’ailleurs ceci comme
un principe visant à préserver le caractère créatif et innovant de l’activité de game design (Knizia
2004, Crawford 1982) et à adopter un processus adapté aux besoins du projet. C’est aussi le cas
de Bateman & Boon (2005) dont les travaux reposent sur deux postulats de base :
« 1- There is no single method to design.
2- Game design reflects needs. »
Pour illustrer leur premier principe, Bateman & Boon établissent ainsi une liste de 7 types de
processus de game design (cf. liste complète en Annexe I), parmi lesquels on distingue par
exemple :
Le processus « First principles » : Définition des objectifs -> Abstraction de l’univers de
jeu -> Design -> Réalisation du jeu La première étape de ce processus consiste pour le
concepteur à définir les objectifs visés par son projet. Il précise ensuite la nature de
l’univers de jeu avant de se lancer dans la conception à proprement parler.
Le processus « Clone and tweak » (Copie et amélioration) : Utilisation d’un design
existant -> Modifications -> Réalisation du jeu. Présenté comme le plus couramment
utilisé, ce processus de conception s’appuie sur un jeu existant qui est ensuite modifié
afin d’être adapté aux besoins du nouveau projet.
Le processus « Story-driven design » : Ecriture d’une histoire -> Design -> Réalisation du
jeu. Dans cette approche une histoire sert de point de départ et de fil conducteur à la
conception du jeu.
D’autres approches, identifiées par Djaouti et al. (2010), sont caractérisées comme des « livres
de recettes » car elles proposent une formalisation moins poussée. Ces approches se traduisent
par exemple par des listes de conseils à destination des concepteurs, relevant généralement de
bonnes pratiques issues de retours d’expériences. Ces approches peu formalisées reflètent elles
aussi la volonté de ne pas enfermer le game design dans un processus rigide afin de ne pas
limiter les possibilités d’innovation et de créativité.
148
5.5.2. Caractéristiques de la conception de jeux pour la formation
La conception de jeux pour la formation peut être considérée comme l’association de principes
issus des travaux sur la conception pédagogique (cf. section 5.2), les théories d’apprentissage
(cf. section 3.2) et le game design (cf. section 5.5.1). La principale difficulté de cette association
est de faire coïncider des principes de natures différentes et qui se révèlent parfois
contradictoires (Gunter et al. 2006) : le concepteur se retrouve face à des choix complexes, les
principes pédagogiques ne devant pas aller à l’encontre des principes de jeu, et réciproquement.
Il revient au concepteur de faire les choix les plus adaptés afin de minimiser cette influence du
jeu sur l’apprentissage et de l’apprentissage sur le jeu : on retrouve ici les problématiques plus
globales relatives au paradoxe qui naît de l’association du jeu et de l’apprentissage, et plus
généralement de l’attribution d’enjeux « sérieux » à un jeu (cf. section 3.1).
Plusieurs manières de concevoir un jeu pour la formation peuvent être proposées (Moreno-Ger et
al. 2008) selon que la réflexion du concepteur se base en premier lieu sur le jeu ou sur les
contenus d’apprentissage.
Une première approche consiste à insérer dans un dispositif de formation un jeu existant,
initialement destiné au divertissement. Par exemple, dans le contexte de la formation en
management ou pour des finalités de team building, des sociétés de formation, telles que la
société danoise Mannaz1, proposent aux entreprises d’utiliser le jeu en ligne massivement
multijoueur World of Warcraft2..
Une autre approche de la conception de dispositifs de formation basés sur le jeu consiste à partir
d’un dispositif pédagogique existant et à y ajouter des principes de jeu (approche similaire à la
démarche de gamification, cf. § 4.5.4).
Enfin, l’approche la plus courante consiste à créer une solution spécifique pour le besoin de
formation identifié en cherchant à obtenir un équilibre optimum entre jeu et apprentissage. Cette
approche se concrétise de deux manières possibles :
soit le concepteur crée une solution totalement nouvelle ex nihilo,
soit le concepteur s’appuie sur une structure de jeu existant qu’il adapte éventuellement
et dans laquelle il intègre les contenus pédagogiques visés : c’est l’approche mise en
œuvre par Thiagarajan (2004) avec le concept des jeux-cadres pour la formation
présentielle et celle adoptée par Burgos et al. (2007) dans le domaine du e-learning.
Nous proposons de situer ces différentes approches de conception de dispositifs de formation
utilisant le jeu sur un axe comprenant à une extrémité le jeu et à l’autre extrémité les contenus
d’apprentissage (cf. figure 32), exprimant ainsi que le point de départ de la conception est soit le
1 http://www.mannaz.com/articles/are-you-an-orc2 http://eu.battle.net/wow/fr/
149
jeu soit les contenus d’apprentissage. Les approches accordant, dans la réflexion de départ, une
place égale au jeu et aux contenus apprentissage se trouvent alors au centre de l’axe.
Figure 32 - Jeu et/ou apprentissage comme point de départ de la conception
L’une des spécificités de la conception de jeux pour la formation réside dans la manière dont les
éléments du jeu et les éléments relatifs aux contenus d’apprentissage sont précisément associés.
Cette relation est étudiée et caractérisée selon deux points de vue :
premier point de vue : l’association jeu et apprentissage est considérée sur la base de la
fiction servant de socle à la situation de jeu (Malone & Lepper 1987). Selon cette
perspective (comme nous l’avons déjà abordé dans la section 4.5.3), on distingue :
o la fiction endogène ou « endogenous fantasy » lorsque les aspects pédagogiques
sont intégrés dans le monde fictionnel du jeu et que les compétences mises en
œuvre ont des conséquences sur la fiction et réciproquement ;
o et la fiction exogène « exogenous fantasy » qui désigne des situations dans
lesquelles les compétences utilisées et/ou les connaissances mises en œuvre
vont avoir une influence sur la fiction mais où la réciproque n’est pas valable,
c'est-à-dire que les apprentissages visés ne sont pas liés à la fiction.
second point de vue : l’association jeu et apprentissage est construite sur la base du
fonctionnement du jeu de manière plus globale, et non uniquement de l’intégration au
niveau de la fiction. Les auteurs (Habgood 2007, Fabricatore 2000) parlent d’intégration
intrinsèque quand les contenus pédagogiques et le jeu sont abordés conjointement, à
travers la poursuite des mêmes objectifs et la réalisation des mêmes activités.
L’intégration extrinsèque caractérise quant à elle des jeux dans lesquels les tâches
pédagogiques sont détachées des objectifs du jeu, c’est-à-dire que la résolution des
tâches cognitives supports de l’apprentissage ne constitue pas un moyen de progresser
dans le jeu.
Comme précisé précédemment, l’une des approches de conception consiste à utiliser des
structures de jeux dans lesquelles intégrer les contenus d’apprentissage visés : c’est la démarche
poursuivie par Thiagarajan (2004) avec la définition de jeux-cadres pour la formation. Dans leur
ouvrage, Hourst et Thiagarajan (2007) utilisent une méthode de description visant à structurer la
présentation des jeux-cadres afin d’en faciliter l’appropriation et l’adaptation par les formateurs.
150
La présentation de chaque jeu propose ainsi des éléments qu’il est intéressant de considérer
dans l’optique de concevoir des scénarios de jeu mutualisables et réutilisables :
une histoire imaginaire introduit le jeu et permet de l’appréhender dans son contexte
d’utilisation ;
un topogramme présente visuellement la structure, les règles et l’agencement des
différentes phases du jeu ;
des exemples d’emploi du jeu illustrent plus concrètement et donnent des idées
d’utilisation plus précises ;
la description détaillée fournit les informations complètes pour la mise en œuvre du jeu ;
et enfin des variantes et modifications possibles du jeu donnent des pistes pour adapter
le jeu selon les contraintes spécifiques du contexte d’application.
151
Synthèse : conception de jeux
Dans le contexte d’application de nos travaux, nous nous adressons à des
concepteurs pédagogiques ou ingénieurs de formation et nous n’avons pas pour
objectif d’en faire des game designers. Nous adoptons une approche de
conception centrée sur le joueur/apprenant et sa relation avec l’activité, en ayant
pour objectif de susciter motivation et engagement. Pour alimenter notre réflexion
et l’élaboration de nos propositions, nous nous appuyons sur les méthodologies
basées sur un modèle de la relation joueur/jeu (Salen & Zimmerman 2004,
Hunicke et al. 2004). Notre proposition de démarche de conception devra rester
flexible afin de répondre au caractère créatif et innovant de l’activité de conception
de jeu.
Parmi les approches identifiées pour la conception de jeu pour la formation, nous
envisageons plusieurs possibilités : à la fois l’intégration de principes de jeux dans
des scénarios pédagogiques, mais aussi l’utilisation de structures de jeux dans
lesquelles différents contenus d’apprentissage peuvent être intégrés (par exemple
le jeu de rôle ou des jeux-cadres tels que ceux de Thiagi).
Le jeu de rôle étant au cœur des dispositifs de formation sur lesquels nous
travaillons, l’intégration intrinsèque et la fantasy intrinsèque caractérisent
principalement notre point de vue sur l’association jeu/apprentissage. Toutefois
l’intégration extrinsèque n’est pas exclue de notre réflexion, et peut s’avérer utile
selon le contexte et les contenus de formation.
Nous retenons par ailleurs la méthode de présentation structurée définie par
Thiagi et Hourst, notamment la notion de topogramme, c’est-à-dire le recours à
une représentation visuelle de la structure et des règles du jeu. Ces éléments
alimentent notre réflexion portant sur la proposition d’une approche de
formalisation (cf. chapitre 11) destinée à guider la spécification de la structure d’un
dispositif LRPG et les règles qui le régissent.
152
Chapitre 6. ASSISTANCE A LA CONCEPTION PEDAGOGIQUE
Comme nous l’avons déjà souligné, la conception de scénarios pédagogiques, à l’instar de toute
activité de conception est une tâche complexe, notamment en raison du caractère mal défini du
problème posé aux concepteurs (Baylor & Kitsantas 2005). Le processus de conception est une
tâche d’autant plus complexe pour des concepteurs novices (Villiot-Leclercq 2007, Emin 2010).
Dans ce contexte, l’une des solutions étudiée par les chercheurs est l’assistance à la conception
pédagogique. Nous présentons ici les différents travaux abordant cette problématique.
6.1. Principes-clés d’un dispositif d’assistanceSelon Dufresne et al. (2003), le soutien à une tâche de conception s’effectue principalement à
deux niveaux : tout d’abord en fournissant aux concepteurs des outils permettant de réaliser leurs
activités de manière efficace, et ensuite en intégrant dans ces outils une assistance informatisée
adaptée à la tâche à réaliser. Dans ses travaux visant l’assistance à l’élaboration de scénarios
pédagogiques, Villiot-Leclercq (2007) se base sur cette approche et propose la spécification d’un
dispositif d’assistance (premier niveau de soutien à la tâche identifié par Dufresne), dans lequel
elle cherche à intégrer un accompagnement pédagogique au processus de scénarisation.
Etant donné que le soutien à la tâche a été dans un premier temps étudié pour l’assistance aux
apprenants, les travaux sur le soutien aux concepteurs s’inspirent naturellement des résultats
obtenus dans ce domaine. Villiot-Leclercq (2007) s’appuie ainsi sur des dimensions issues de
l’apprentissage situé pour définir les bases de sa méthodologie d’assistance à la conception. Elle
s’appuie également sur des travaux issus du domaine de l’ergonomie des interfaces mettant en
avant certains principes-clé. Il s’agit de :
définir des environnements de soutien le plus proche possible des activités humaines ou
des pratiques professionnelles habituelles ;
favoriser la compréhension par des choix adaptés, notamment au niveau de la métaphore
utilisée pour structurer l’environnement, la terminologie et la navigation mise en œuvre
dans l’outil d’assistance ;
favoriser la mémorisation par une structuration des contenus en petites unités (Dufresne
et al. 2003), pouvant se traduire notamment par une multi-représentation des contenus ;
laisser à l’utilisateur un maximum de contrôle sur son activité, sans négliger de le guider
quand cela s’avère nécessaire.
Les travaux sur l’assistance aux apprenants dans les environnements d’apprentissage mettent
également en avant les bénéfices d’outils permettant de soulager la charge cognitive et facilitant
ainsi la tâche des usagers. L’utilisation de ce type d’ « outils cognitifs » peut être étendue aux
environnements de conception : aides en ligne, glossaires, exemples de bonnes pratiques,
153
conseils d’experts, etc. Les patrons de scénarios font également partie des outils cognitifs, nous
en approfondissons l’étude dans la suite de cette section (cf. § 6.4.2).
6.2. Les dimensions de l’assistanceLe modèle théorique de conception d’un système d’aide élaboré par Dufresne et al. (2003) met
en évidence différentes dimensions définissant une fonctionnalité d’assistance :
« Les principales composantes d’une intervention d’assistance sont l’identification del’assistance (son nom), l’objet d’assistance, le thème d’assistance, le mode d’accès àl’assistance, les buts de l’assistance et les différentes règles d’assistance permettant deréaliser l’intervention » (Dufresne et al. 2003).
L’objet de l’assistance peut être un concept, une ressource, une procédure ou un principe utilisé
dans le système. Parmi les thèmes sur lesquels peut porter l’assistance, Dufresne distingue : le
fonctionnement de l’application, l’adaptation et l’exécution de la tâche, la qualité des productions
(cohérence, complétude, pertinence, clarté…), la collaboration éventuellement mise en œuvre
entre plusieurs utilisateurs au sein de l’environnement, l’autogestion par l’utilisateur de son
processus de travail dans l’application. De plus, une intervention d’assistance dans un logiciel
peut se faire selon différents modes (cf. figure 33) : l’intervention peut dépendre ou non du
contexte dans lequel elle a lieu, elle peut être ou non associée à un modèle de l’usager (c’est-à-
dire dépendre des traces laissées par l’utilisateur lors de son utilisation de l’application).
L’identification de ces différentes dimensions de l’assistance doit servir de guide dans un travail
de conception d’un outil d’assistance, il importe donc de les prendre en considération dans nos
travaux.
Figure 33 - Modes d'accès à l'assistance (Dufresne et al. 2003)
6.3. Les agents ou systèmes conseillersLes systèmes conseillers constituent un type d’outil développé pour assister les utilisateurs dans
leur usage d’un outil informatisé. Winkels (1992 in Paquette & Tchounikine 2002) les définit de la
manière suivante :
« un système conseiller est un système informatique qui propose une aide activeintelligente aux utilisateurs d’un logiciel particulier, conseils fondés sur une analyse desactions et des productions de l’utilisateur ».
Les systèmes conseillers proposent souvent des agents artificiels à forme humaine, et prodiguent
des conseils dans le but de soutenir le processus métacognitif des utilisateurs, c’est-à-dire de
154
leur faire prendre conscience des actions effectuées lors de la réalisation de la tâche. Dans un
dispositif d’aide à la conception, cette prise de conscience métacognitive est d’autant plus
importante pour des concepteurs novices car elle vise à faciliter leur compréhension du
processus de conception avec lequel ils sont en train de se familiariser.
Dans un système conseiller, le conseil prend en compte le contexte de l’action effectuée par
l’utilisateur et les objectifs qu’il poursuit (Paquette & Tchounikine 2002). Paquette et Tchounikine
ont travaillé à la définition d’une méthodologie pour l’élaboration d’un système conseiller. L’un
des principes de cette méthodologie est de s’appuyer sur une modélisation de la tâche effectuée
dans le logiciel afin d’identifier les conseils à intégrer dans le système conseiller.
6.4. Soutien à la conception et réutilisationComme le montrent les travaux portant sur l’activité de conception étudiée du point de vue des
sciences cognitives (cf. § 5.1), ou ceux s’intéressant au processus de conception pédagogique
(cf. § 5.2) : un concepteur s’appuie fréquemment sur des analogies, sur des solutions déjà
existantes pour élaborer un nouveau scénario. L’une des approches du soutien à la conception
concerne donc la réutilisation de scénarios.
6.4.1. Principes généraux
Paquette (2005) précise que :
« Les scénarios concrétisent des méthodes pédagogiques qui ont fait leur preuve et dontdes répertoires existent dans les ouvrages de science de l’éducation […]. Réutiliser desmodèles de scénarios de qualité, éprouvés dans de nombreux contextes éducatifs peutsouvent apporter davantage de qualité que la simple réutilisation de ressources decontenu. »
La réutilisation suppose que des objets réutilisables aient été partagés. Dans le domaine de la
scénarisation pédagogique, plusieurs types de scénarios peuvent être partagés pour être
réutilisés (Emin 2010 ; Villiot-Leclercq 2007) :
des scénarios instanciés, plus ou moins contextualisés par rapport à une situation
spécifique ;
des gabarits de scénarios, ossatures à partir desquelles les concepteurs vont définir plus
précisément leurs propres scénarios ;
des patrons : version opérationnelle d’un modèle de scénario identifié comme une
solution éprouvée pour répondre à un problème de conception récurrent identifié. (Ce
type de scénario spécifique est abordé de manière plus approfondie dans la suite de
cette section – cf. § 6.4.2).
155
Les scénarios réutilisables dans un processus de conception concernent également différents
niveaux de granularité et de généricité : activités ou séquence d’activités, « patrons (ou
squelettes) d’unités complètes, mais aussi d’activités génériques dont le déroulement demande
une description fine […]. Nous devons travailler dans cette optique à recenser des séquences
types d’activités, aussi bien sur un plan générique, c’est-à-dire transdisciplinaire, que dépendant
du domaine d’apprentissage et/ou du type de pédagogie mise en œuvre » (Ferraris et al. 05).
Selon la nature de l’objet réutilisé (scénario instancié, gabarit ou patron), un concepteur va
pouvoir faire appel à différentes stratégies (Emin 2010) :
Des stratégies d’imitation dans le cas où les concepteurs s’inspirent de scénarios
instanciés existants. Ces stratégies supposent que le concepteur effectue une
décontextualisation du scénario exemple, c’est-à-dire qu’il identifie les caractéristiques
liées aux spécificités du contexte initial afin de les adapter à son propre contexte.
Des stratégies d’instanciation lorsque l’activité porte sur la réutilisation de gabarits. Ce
type de stratégies se focalise sur la contextualisation d’éléments pré-identifiés du gabarit.
Des stratégies de composition où il s’agit d’associer différents scénarios ou composants
de scénarios.
Au sein d’une même activité de conception, un concepteur est susceptible de faire appel à
plusieurs de ces stratégies : par exemple, il peut tout d’abord effectuer une composition
d’éléments, puis instancier certains des composants agrégés et adopter une stratégie d’imitation
pour adapter d’autres composants à son contexte.
Dans ses travaux de recherche, Villiot-Leclercq (2007) s’est attachée à définir un modèle pour
assister la réutilisation de scénarios : le modèle MOSCA (Modèle de soutien à l’élaboration et la
réutilisation de scénarios d’apprentissage). Ce modèle est basé sur le processus CAA qui fait
apparaître trois grandes étapes dans un processus de réutilisation de scénarios : le Choix,
l’Appropriation et l’Adaptation.
Le choix d’un scénario parmi l’ensemble des scénarios existants, faisant partie des
références internes du concepteur ou mis à sa disposition dans une bibliothèque, est la
première étape du processus de réutilisation nécessitant une assistance. Il s’agit ici de
guider le choix d’un scénario adapté en identifiant des critères pertinents par rapport à la
tâche de conception demandée (contexte de formation, objectif et public cible par
exemple), aux intentions du concepteur, à ses représentations préalables de solutions au
problème.
La seconde étape identifiée dans le processus de réutilisation d’un scénario est
l’appropriation du scénario par le concepteur. Un objectif de l’assistance est de faciliter
cette appropriation à travers : des scénarios structurés et formalisés, exprimés dans un
langage familier des concepteurs ; des représentations multiples des scénarios qui visent
à correspondre aux différents types cognitifs, préférences et habitudes des concepteurs
156
(niveaux de description plus ou moins détaillés, représentations textuelles ou
graphiques).
La troisième étape du processus de réutilisation sur laquelle va également porter
l’assistance est l’adaptation du scénario aux besoins spécifiques de la situation et aux
souhaits du concepteur. A ce niveau, il est notamment nécessaire d’offrir une certaine
flexibilité et une facilité d’adaptation des scénarios réutilisables afin de favoriser la
créativité et l’innovation (Bonnardel 2006).
Villiot-Leclercq s’est par ailleurs appuyée sur des principes issus de l’apprentissage situé dont
elle a retenu :
la modélisation des processus qui l’a conduite à la définition du formalisme des Pléiades
en vue d’une expression formalisée des scénarios (cf. section 6.5.3) pour une
présentation détaillée du formalisme) ;
l’accès a l’expertise, principe à partir duquel elle s’est intéressée à l’usage de patrons de
conception ;
l’approche multi-perspectives ;
l’approche par étayage qui l’a amenée à intégrer un système de suggestions dans son
modèle d’assistance.
Le modèle de soutien MOSCA a à la fois été défini à partir de ces principes et du processus de
réutilisation CAA. Il fait apparaître quatre niveaux de soutien dans lesquels des « artefacts » ou
outils supports sont proposés pour mettre en œuvre les interventions d’assistance :
le niveau 1 offre une vue d’ensemble du processus de réutilisation visant à favoriser la
conscience métacognitive des concepteurs. A ce niveau, le processus de réutilisation est
représenté sous forme d’un graphe des tâches ;
le niveau 2 concerne la mise à disposition de patrons décrits avec le formalisme des
Pléiades ;
le niveau 3 propose un accompagnement à la sélection d’un scénario adapté aux besoins
du concepteur ;
le niveau 4 a pour objectif d’accompagner l’adaptation du scénario choisi en fournissant
au concepteur des suggestions.
Pernin & Lejeune (2004a) adoptent une approche complémentaire à celle de Villiot-Leclercq. Ils
s’intéressent de manière plus large aux problématiques de partage et de réutilisation en jeu dans
le processus de conception de scénarios pédagogiques (présenté dans la section 5.2.2). Ainsi, ils
identifient de leur côté trois principaux niveaux du processus de conception pour lesquels ils
proposent de fournir des outils informatiques d’assistance :
La conception de scénarios abstraits : assister la création ou la modification de scénarios
pédagogiques abstraits, c’est-à-dire décrits en termes génériques.
157
La contextualisation des scénarios : assister la définition d’un scénario opérationnel pour
une situation spécifique, c’est-à-dire faciliter la définition plus précise du scénario,
l’affectation des rôles-types du scénario abstrait à des acteurs réels identifiés, la
planification concrète des activités, l’association de ressources et outils réels aux
activités, etc.
L’indexation et la recherche de scénarios dans une bibliothèque : proposer des outils
pour faciliter le catalogage des scénarios créés et les recherches ultérieures dans le
répertoire de scénarios indexés afin de favoriser la réutilisation des scénarios existants.
6.4.2. L’approche basée sur les patrons de conception
Dans une optique de capitalisation et de réutilisation, le recours à des patrons de scénarios
apparaît comme une approche de plus en plus étudiée pour soutenir la conception. Selon
l’approche originelle développée par Alexander (1977), les patrons sont définis comme des
solutions à des problèmes-types récurrents rencontrés dans l’activité de conception. Les
principales caractéristiques d’un patron sont : sa forme structurée, la description qu’il propose de
la solution et du problème auquel elle répond, ainsi que sa capacité à être réutilisé. Tels ceux
utilisés par certains artisans (en couture par exemple) (Villiot-Leclercq 2007), les patrons sont
plus que de simples exemples à suivre et sont considérés comme de véritables outils au service
de la conception.
L’approche de conception basée sur l’utilisation de patrons est utilisée par Hernández-Leo (2007)
qui la considère comme une approche flexible et pragmatique correspondant à ses besoins
portant sur la conception de scénarios d’apprentissage collaboratifs. Elle a en particulier identifié
un ensemble de patrons, proposant des solutions-types à des problèmes de conception de
scénarios. Les patrons représentent ici les manières d’organiser les participants et d’agencer les
activités pédagogiques pour atteindre des objectifs pédagogiques définis (cf.Annexe II).
L’approche par patrons apparaît difficile à appliquer dans notre contexte, l’identification de
problèmes récurrents et de solutions éprouvées à ces problèmes étant prématurée.
Une approche intéressante est celle de Björk et al. (2003) qui se basent sur la démarche de
conception par patrons pour définir un modèle de soutien à la conception de jeux. Les auteurs se
fixent comme objectif la définition de patrons de mécaniques de jeu (définis ici comme des
composants dont l’association constitue un jeu). S’ils jugent l’approche par patrons intéressante
en ce qu’elle offre un cadre et un langage structuré pour décrire les mécaniques et leurs
relations, elle n’est selon eux pas totalement adaptée aux problématiques de la conception de
jeux : selon ces auteurs, considérer un patron uniquement comme une solution-type à un
problème récurrent est réducteur. Björk et al. adaptent donc le concept de patrons au domaine du
jeu en considérant l’activité de conception comme une activité artistique et créative, où l’un des
158
objectifs est de générer des effets et des attitudes spécifiques et non pas uniquement de
supprimer des effets indésirables.
159
Synthèse : assistance à la conception pédagogique
De l’étude de ces travaux nous retenons que l’assistance à la conception s’exerce
à différents niveaux.
Le soutien passe, d’une part, par le fait de fournir aux concepteurs une vue
d’ensemble du processus de conception favorisant une prise de conscience
métacognitive de la tâche à réaliser. Dans notre contexte, nous estimons qu’une
approche de l’assistance mettant en œuvre un système conseiller n’est pas
adaptée : en effet la méthodologie de conception et l’outil d’assistance associé
doivent être stables pour envisager un système de ce type, ce qui ne correspond
pas à l’état de maturité de nos travaux. Nous retenons néanmoins l’importance du
soutien au processus métacognitif des concepteurs dans leur tâche de
conception.
Le soutien à la conception concerne, d’autre part, des aspects de réutilisation. Il
se traduit par la mise à disposition d’éléments réutilisables de différents types
(scénarios instanciés, gabarits, patrons) et de différents niveaux de granularité,
ainsi que par une aide à l’appropriation de ces éléments grâce à une description
structurée, formalisée et multiperspective.
Si la définition de patrons de scénarios semble prématurée dans notre contexte,
nous nous situons dans une démarche proche de celle de Björk et al. (2003) :
nous considérons que l’activité de conception vise à élaborer un produit, dans
notre cas un scénario LRPG, avec lequel on cherche à créer des effets
spécifiques, dans notre cas motiver les apprenants. Dans cette situation, nous
jugeons inadapté de parler de patrons de scénarios : nous nous dirigeons plutôt
vers la mise à disposition d’exemples de scénarios (modèles instanciés ou
gabarits) pour lesquels certaines caractéristiques susceptibles de favoriser la
motivation seront mises en avant afin de guider l’activité des concepteurs.
160
6.5. Formalisation et représentation de scénariospédagogiques
Des travaux étudiés dans nos recherches mettent en évidence que l’une des problématiques
récurrentes dans l’assistance à la conception et la réutilisation de scénarios concerne le besoin
de représentation formalisée des scénarios. Un langage de formalisation associé à un système
de notation visuel apparaît à la fois comme un support à l’expression des représentations
externes du concepteur (rejoignant ainsi les travaux en sciences cognitives présentés § 5.1), une
aide à la conception et un soutien à la mutualisation et à la réutilisation des scénarios.
6.5.1. Intérêt et rôle des langages de conception
Botturi et al. (2006) soulignent que l’utilisation d’un langage de conception spécifique est au cœur
de toute activité de conception, quel que soit le domaine concerné (conception graphique,
conception de logiciels, architecture, etc.). Un langage de conception est ici défini comme :
« a set of abstractions used to give structure, properties, and texture to solutions ofdesign problems. Design languages provide building blocks for designs. » (Gibbons et al.2006)
Dans les domaines cités plus haut, l’utilisation d’un langage de conception est déjà reconnue
(Gibbons et al. 2006) pour ses effets bénéfiques sur la communication entre les participants
impliqués dans un projet de conception (concepteurs, personnes en charge de la production,
clients), le partage et la comparaison de solutions de conception, la formation des concepteurs
novices et l’automatisation du processus de production.
Un langage de conception intervient à différents niveaux du processus d’élaboration de solution
pour exprimer un scénario (Fowler 2003 in Gibbons et al. 2006) : un niveau conceptuel où il s’agit
de décrire les grands principes de la solution ; un niveau de spécification plus détaillé ; un niveau
opérationnel qui fournit l’intégralité des informations nécessaires à la production et à
l’implémentation de la solution. C’est ainsi que l’on peut distinguer deux catégories de langages
utilisés dans le domaine de la conception pédagogique:
d’une part les langages de modélisation pédagogique : qualifiés de productifs (Bézivin et
al. 2004), ces langages visent une formalisation computationnelle et sont utilisés au
niveau opérationnel, où ils sont manipulés par des informaticiens et interprétés par des
systèmes informatiques (cf. § 6.5.2) ;
d’autre part les langages de formalisation : qualifiés de contemplatifs, ces langages visent
à soutenir la communication et la compréhension (Bézivin et al. 2004), ils sont utilisés
dans les phases amont de la conception par des enseignants ou concepteurs
pédagogiques, préalablement à la modélisation computationnelle (Villiot-Leclercq 2007).
Ces deux grands types de langages de conception peuvent être exprimés à l’aide d’un système
de notation, c’est-à-dire :
161
« a set of signs and icons that allow representing a design problem or solution so that it isperceivable by our senses. » (Botturi et al. 2006)
La formalisation d’un scénario à l’aide d’un système de notation constitue un soutien à la
conception en structurant la solution que le concepteur est en train d’élaborer. Elle organise de
manière explicite une représentation externe de la solution, en facilite la compréhension et
favorise la réflexivité pour amener à d’éventuelles évolutions. La formalisation d’un scénario à
l’aide d’un langage structuré et communicable vise par ailleurs à faciliter le partage des scénarios
et leur appropriation. Dans le contexte de la scénarisation pédagogique, la formalisation vise à
mettre en évidence les caractères formels des scénarios, c’est-à-dire leur structure et les règles
qui les régissent (Villiot-Leclercq 2007).
6.5.2. Les langages de modélisation pédagogique
Nous présentons ici les langages IMS-LD et LDL qui proposent un formalisme computationnel se
voulant indépendant de toute implémentation technique pour favoriser la réutilisabilité et
l’interopérabilité des scénarios.
Le langage de modélisation IMS-LD
Le langage IMS-LD (Instructional Management Systems-Learning Design) (Koper & Tattersall
2005) s’inscrit dans une démarche de standardisation. Il permet la description d’une unité
d’apprentissage (Unit of Learning ou UoL) où les activités ont un rôle central. Ce langage définit
les relations entre les objectifs pédagogiques, les rôles des acteurs (enseignants ou apprenants),
les activités et les ressources (environnement). Il est structuré selon trois niveaux de conception
(Lejeune 2004) (cf. figure 34) :
Le niveau A permet de décrire une unité d’apprentissage à l’aide de tous les éléments de
base, c’est-à-dire sans les éléments propriétés, conditions et notification. A ce niveau il
n’y a pas de personnalisation de l’unité d’apprentissage, son exécution sera donc
identique d’une session à l’autre.
Le niveau B complète le niveau A avec la spécification des propriétés et des conditions
permettant de personnaliser l’exécution de l’unité d’apprentissage selon les profils des
apprenants.
Le niveau C propose l’ajout de notifications au niveau B, ce qui permet de créer des
structures complexes et dynamiques en adaptant l’orchestration des activités selon des
évènements liés à l’exécution de l’unité d’apprentissage (par exemple un résultat obtenu
à une précédente activité).
La terminologie d’IMS-LD s’appuie sur une métaphore théâtrale : les différents niveaux de
granularité de la structuration d’une unité d’apprentissage correspondent aux notions de pièce,
162
d’acte et de partition. Pernin (2005) détaille le fonctionnement de cette métaphore de la façon
suivante :
« Le déroulement d’une unité d’apprentissage est décrit par un élément nommé méthodequi en organise les différents déploiements sous forme de pièces (mises en scène). Unepièce est composée d’actes exécutés en séquence. Les actes sont formés de partitionsqui associent un rôle à une activité effectuée dans un environnement (décor). Le scénariopédagogique correspond à la méthode qui fournit la trame, l’orchestration générale de laformation (pièce) et qui en permet l’exécution ».
Figure 34 - Modèle conceptuel d’IMS Learning Design (IMS LD, 2003, traduit par Lejeune 2004)
LDL : Learning Design Language
LDL (Learning Design Language) (Martel et al. 2006) est un langage de modélisation
pédagogique constituant une alternative à IMS-LD. Il s’appuie sur un métamodèle, le modèle de
participation élaboré par Ferraris et al. (2005), défini selon une approche de la conception
pédagogique centrée sur les interactions. LDL est ainsi plus particulièrement destiné à prendre
en compte les spécificités liées à l’apprentissage collaboratif. Le langage LDL est organisé autour
des notions suivantes (Martel & Vignollet 2008) (cf. figure 35) :
Une structure organise les interactions qui ont lieu au sein d’une activité. Elle correspond
à une phase spécifique d’un scénario caractérisée par l’ordre ou l’enchaînement des
interactions qui la composent. On distingue ainsi : les structures séquentielles où les
interactions s’enchaînent les unes après les autres ; les structures de type « sélection »
où des interactions sont choisies parmi un ensemble d’interactions possibles pour être
enchaînées par la suite de manière séquentielle ; les structures où toutes les interactions
sont à effectuer mais dans un ordre non prédéterminé.
Une enceinte correspond au lieu où se déroule l’activité, à l’espace délimité où travaille
un groupe.
163
Les membres d’un groupe sont les acteurs qui agissent dans l’enceinte. Les acteurs
possèdent un statut, un rôle et une position dans le groupe.
Le rôle d’un acteur est un rôle thématique (correspondant à sa place dans le groupe) qui
lui-même est associé à plusieurs rôles actanciels (définissant les actions qu’il peut
effectuer).
La position désigne la manière dont un participant réagit et perçoit un élément du
scénario (par exemple une activité, un autre acteur, une production). Elle peut être prise
en compte dans des règles qui régissent le déroulement des interactions.
Les interactions possibles définissent les échanges qui ont lieu entre les participants, par
exemple sous forme d’une communication verbale ou d’une production collaborative.
Elles sont dépendantes de règles et exprimées en termes d’actions dont les
caractéristiques répondent aux questions suivantes : quelle est l’action ? Qui fait
l’action (acteur) ? A destination de qui (acteurs destinataires) ? Avec quoi (outils de
l’enceinte) ?
Un médiateur est un acteur particulier qui gère les scénarios. Il s’assure du respect des
règles et intervient si nécessaire.
Des outils sont utilisés par les acteurs pour manipuler des objets au sein des enceintes.
Figure 35 - Version simplifiée du métamodèle LDL (Martel &Vignollet 2008)
Limites des langages de modélisation pédagogique par rapport à nos besoins
Les langages de modélisation pédagogique présentés ont fait l’objet de critiques concernant
notamment leur utilisation potentielle par des concepteurs pédagogiques ou des enseignants
(Emin 2010, Lejeune 2004, Dessus & Schneider 2006). Tout d’abord, les concepts proposés
sont éloignés de ceux habituellement utilisés par les concepteurs, ce qui rend ces langages
difficiles à manipuler par des non spécialistes. Ensuite ils sont peu adaptés à une utilisation lors
des phases initiales de conception de scénarios pédagogiques. En effet, ces langages visant en
164
premier lieu à répondre à des besoins de réutilisation et d’interopérabilité produisent des modèles
computationnels à la formalisation très fine et rigide, destinés à être interprétés par des machines
et non par des humains. Dans ces premières étapes de la conception, des modèles proposant
une formalisation moins détaillée et plus souple et permettant une compréhension plus intuitive
doivent être utilisés afin de permettre aux concepteurs de créer des représentations externes
correspondant à leurs représentations internes de la solution en cours de conception. Or, comme
l’a également montré Nodenot (2005) à travers une étude qu’il a réalisée, ce n’est pas le cas d’un
langage de modélisation comme IMS-LD.
En cours de conception, le concepteur ne doit pas être trop rapidement contraint à décrire de
façon détaillée les éléments de son scénario, il doit avoir la possibilité de structurer ses idées à
partir d’objets possédant un certain niveau d’abstraction. Pour répondre à cette contrainte, le
langage de conception doit être plus proche du langage naturel (Laforcade et al. 2005), tout en
correspondant au langage métier des concepteurs. Pour assister les concepteurs, les langages
de formalisation semblent donc plus adaptés.
Par ailleurs, le soutien aux concepteurs passe par la définition d’une méthodologie associée à la
mise en œuvre du langage de formalisation (Villiot-Leclercq 2007) ainsi que par la mise à
disposition d’un outil adapté. Même s’il existe déjà des éditeurs visant la production de scénarios
suivant la normalisation IMS-LD, il a été montré (Botturi & Stubbs 2008) que leur utilisation était
trop complexe pour un utilisateur ne possédant pas de compétences techniques. Dans ce cas, un
outil basé sur une métaphore visuelle de plus haut niveau est envisagé comme une réponse plus
adaptée au besoin d’outillage soulevé.
6.5.3. Approches de formalisation, systèmes de notation visuels etenvironnements d’assistance à la conception
Même s’ils proposent des concepts de scénarisation structurants, les langages computationnels
de modélisation pédagogique ne sont pas adaptés au soutien des concepteurs dans les phases
initiales du processus de conception.
Dans cette section, nous nous intéressons donc plus particulièrement à des langages de
formalisation utilisant des systèmes de notation visuels afin de proposer des représentations
graphiques des scénarios pédagogiques. Si l’utilisation de représentations visuelles pour
analyser des problèmes de conception, réfléchir aux solutions possibles et les communiquer aux
autres membres du projet est répandue dans le domaine de l’architecture, elle peut concerner
toutes les activités de conception. Dans les étapes initiales d’un projet, l’utilisation de schémas
d’abord informels et incomplets puis s’affinant progressivement de façon itérative est considérée
comme une solution efficace pour concevoir des solutions adaptées à de nouveaux problèmes.
Dans le domaine de la conception pédagogique, la plupart des travaux sur l’utilisation de
systèmes de notation visuels se sont d’abord appliqués aux langages de modélisation
165
pédagogique (Nodenot 2007). Aujourd’hui toutefois, de plus en plus de travaux portent sur
l’utilisation de langages visuels pour assister la réflexion dans les premières phases du
processus de conception, à un niveau d’élaboration plus conceptuel qu’opérationnel. Les
langages élaborés à cette fin, et notamment ceux auxquels nous nous intéressons plus en détails
dans la suite de ce document, possèdent pour la plupart les caractéristiques suivantes mises en
évidence par Nodenot (2007) :
Ils sont semi-formels, c’est-à-dire qu’ils définissent des principes visant à guider la
réflexion, à « catalyser les idées des concepteurs » (Nodenot 2007) dès les étapes
initiales du processus de conception.
Respectant un principe de pluralité des points de vue, la plupart de ces langages
proposent une approche multiperspectives : le changement de perspective est considéré
comme un moyen de guider la réflexion et de réduire la charge cognitive des
concepteurs, facilitant ainsi le processus de conception.
Dans le but de soutenir le travail d’affinement progressif des solutions en cours de
conception, certains langages proposent plusieurs niveaux de stratification,
correspondant à des niveaux différents d’abstraction pour décrire ou analyser les
constituants du scénario pédagogique.
Ils utilisent des primitives proches des besoins et usages des concepteurs pédagogiques.
Ces primitives sont fréquemment basées sur des métaphores permettant d’aller au-delà
d’une simple approche descriptive. L’usage de métaphore favorise une approche
conceptuelle en associant plus intuitivement des principes et propriétés aux primitives
utilisées. Pour exemples, citons la métaphore théâtrale qui permet la structuration du
scénario dans le langage IMS-LD, ou le formalisme des Pléiades (Villiot-Leclercq 2007)
qui propose une métaphore astronomique pour exprimer les relations entre les activités
d’un scénario pédagogique.
Par ailleurs, les langages de formalisation étudiés visent à être implémentés dans des
environnements informatiques destinés à soutenir la conception pédagogique.
Dans le but de fournir une vision plus concrète de la mise en œuvre des principes présentés
précédemment, nous allons maintenant nous attacher à présenter ces langages de formalisation
et leur implémentation dans des outils informatiques d’édition de scénarios. Les systèmes de
notation visuels et environnements étudiés ont notamment été retenus pour la volonté de leurs
créateurs de proposer des outils accessibles à des enseignants ou concepteurs pédagogiques
non experts en informatique. Ces langages correspondent à deux grandes approches :
Des approches basées sur un langage de modélisation pédagogique, et plus
particulièrement liées à IMS-LD : les outils COLLAGE (Hernández-Leo 2007) et LAMS
(Dalziel 2003).
166
Des approches qui s’appuient sur des modèles spécifiquement définis, proches de
langages métiers : le formalisme des Pléiades et son implémentation dans l’outil
ExploraGraph (Villiot-Leclercq 2007), le modèle ISiS et son implémentation dans
l’environnement ScenEdit (Emin 2010).
COLLAGE : conception de scénarios d’apprentissage collaboratif à base de patrons
COLLAGE1 (COLlaborative LeArning desiGn Editor) (Hernández-Leo et al. 2006, Hernández-Leo
2007) est un éditeur de scénarios d’apprentissage axé vers l’apprentissage collaboratif (CSCL).
Cet outil est destiné à des enseignants familiers avec les méthodes d’apprentissage collaboratif.
COLLAGE est une extension de l’éditeur Reload2 et est conforme au niveau A du langage IMS-
LD. Il implémente un processus de conception basé sur la réutilisation et l’adaptation de patrons
de type « Collaborative Learning Flow Patterns » (CLFPs). L’outil vise à être utilisé dans les
phases initiales du processus de conception, et ne concerne pas la création de scénarios
immédiatement exécutables. Tel que présenté à la figure 36, COLLAGE porte sur la phase de
scénarisation et vise plus spécifiquement la production d’un document définissant le scénario
pédagogique IMS-LD.
Figure 36 - Positionnement de COLLAGE dans le processus de conception préconisé par IMS-LD
Les étapes du processus de conception mises en œuvre dans COLLAGE ne sont pas
séquentielles. Le parcours proposé sert de guide mais les actions offertes dans l’environnement
sont effectuées dans l’ordre choisi par le concepteur (cf. figure 37) :
Sélection d’un CLFP (patron). Cette étape se décompose en deux actions : tout d’abord
le choix d’un patron en fonction des spécificités de la situation (objectifs visés, etc.), puis
l’accès à des informations plus détaillées sur la structure et le déroulement du scénario
sélectionné.
1 http://www.gsic.uva.es/collage2 http://www.reload.ac.uk/new/editor.html : Reload est un outil auteur de scénarios respectant la norme IMS-LD
167
Edition du ou des patrons sélectionnés : spécification du titre du scénario, des objectifs
d’apprentissage et des pré-requis ; adaptation du déroulement du scénario au contexte,
dans la mesure des possibilités offertes par le patron choisi ; description des activités
composant le scénario, des rôles et des modalités de constitution des groupes ; définition
des ressources et outils requis et association avec les activités dans lesquelles ils sont
requis.
La description plus détaillée de ressources et d’outils supports aux activités du scénario, ainsi
que leur création n’est pas prise en charge dans COLLAGE.
Figure 37 - Processus de conception soutenu dans COLLAGE
L’éditeur COLLAGE propose plusieurs outils pour soutenir le concepteur : la bibliothèque de
patrons (cf. Annexe II) correspondant à des scénarios pédagogiques éprouvés dans le domaine
de l’apprentissage collaboratif (Jigsaw, Brainstorming, Pyramide, Simulation, TPS ou Think Pair
Share, TAPPS ou Thinking Aloud Pair Problem Solving) ; une fonctionnalité d’aide au choix des
patrons en fonction des objectifs d’apprentissage visés, du type de problème mis en œuvre par le
patron et du niveau d’expérience requis en matière d’apprentissage collaboratif ; des informations
détaillées sur les patrons (contexte d’utilisation, déroulement).
Afin de faciliter la conception et rendre l’outil accessible à des utilisateurs non spécialistes du
langage IMS-LD, COLLAGE propose une représentation graphique des scénarios qui masque
des concepts d’IMS-LD jugés difficiles à appréhender. Les diagrammes UML initialement
168
proposés par IMS-LD sont ici remplacés par des diagrammes plus intuitifs exprimant les
dimensions-clés des patrons de scénarios :
Le scénario est structuré en phases. Par exemple le diagramme du patron Jigsaw (cf.
figure 38) met en évidence une structuration en trois phases qui, du côté du langage IMS-
LD, correspondent à trois actes d’une pièce organisée par une méthode.
Les différents rôles sont représentés par des éléments graphiques. L’enseignant est
représenté par un rond gris. Les apprenants sont représentés soit par des pièces de
puzzles de couleurs différentes dans le diagramme Jigsaw, soit par des carrés de couleur
variable dans les autres patrons (chaque patron de scénario est représenté par un
diagramme unique - cf. Annexe II).
Des formulaires sont utilisés pour préciser textuellement les objectifs pédagogiques, les
pré-requis de la formation, la description détaillée des activités, les informations à propos
des rôles ainsi que les ressources et outils associés.
Figure 38 - Diagramme du patron Jigsaw
LAMS : conception de scénarios d’apprentissage collaboratif en ligne
LAMS (Learning Activity Management System) (Dalziel 2003) est un environnement informatique
pour la conception, la gestion et l’exécution de scénarios d’apprentissage collaboratif en ligne. Il
est destiné à être utilisé par des enseignants. LAMS est composé d’un environnement
d’exécution pour les apprenants, d’un environnement de suivi pour les tuteurs, d’un
environnement auteur pour la conception par des enseignants et d’un environnement
d’administration pour la gestion des serveurs par un informaticien.
Nous nous intéressons ici plus spécifiquement à l’environnement auteur de LAMS qui adopte une
approche de la scénarisation pédagogique centrée sur les activités et supporte l’intégralité du
cycle de vie d’un scénario : de la conception initiale à l’implémentation dans l’environnement
d’exécution. Il offre la possibilité de réutiliser des scénarios créés par l’utilisateur ou par des pairs.
169
Toutefois, il ne propose pas de fonctionnalités d’assistance à la recherche et à l’indexation des
scénarios, ce qui limite les possibilités de réutilisation.
La principale caractéristique de LAMS est de proposer un outil auteur visuel dans lequel les
scénarios sont créés par simple glisser-déposer d’éléments de base (les briques représentant les
activités élémentaires) et l’ajout de liens entre ces éléments pour structurer le déroulement du
scénario. Différents types de parcours d’apprentissage peuvent être conçus et associés au sein
d’un même scénario : des séquences d’activités à suivre dans un ordre prédéfini, des séquences
d’activités que l’apprenant pourra effectuer dans l’ordre de son choix, ainsi que des parcours à
embranchements. Des conditions de passage, portant par exemple sur le résultat obtenu à une
précédente activité, peuvent être spécifiées à certains endroits du scénario. Les activités
proposées dans un scénario sont soit individuelles, soit effectuées en groupe, soit proposées à
l’ensemble des apprenants de la session de formation.
Les activités élémentaires proposées dans LAMS sont associées à des outils spécifiques. Elles
peuvent être classées en quatre grandes catégories (cf. figure 39) : activités d’évaluation (ex :
questionnaire à choix multiple, soumission de fichiers) ; activités collaboratives (ex : chat ou
conversation synchrone, conférence en ligne, forum de discussion, wiki, Google Maps) ; activités
de réflexion (ex : collecte de données, mindmapping, sondage, vote, bloc-notes) ; activités
d’information (ex : galerie d’images, page d’informations, partage de ressources).
Figure 39 - LAMS : liste des activités élémentaires
La création d’un scénario s’appuie principalement sur des éléments graphiques (cf. figure 40) :
Les briques de base, c’est-à-dire les activités-types sont représentées par des rectangles
identifiés avec un pictogramme symbolisant l’outil associé ou l’activité elle-même. Une
brique spécifique est destinée à la constitution de groupes d’apprenants.
Les liens entre les activités, permettant de définir l’enchaînement du parcours, se font par
l’ajout de flèches à l’aide de l’outil transition représenté par un crayon.
Les points de passage conditionnels (« gate » en anglais) sont représentés par des
panneaux « stop ».
170
La description des activités est organisée autour de plusieurs niveaux de stratification :
l’inspecteur de propriétés permet de définir les propriétés de base qui varient selon le
type d’activité concerné (titre, organisation des apprenants en groupes, lien avec des
compétences définies dans l’outil d’édition de référentiel, etc.) ;
la fenêtre de description détaillée disponible sur chaque activité est elle-même composée
de plusieurs niveaux : la description basique pour la spécification du contenu minimal
requis pour l’activité, c’est-à-dire les consignes, questions et ressources nécessaires ; le
paramétrage avancé pour définir un fonctionnement plus spécifique selon les possibilités
offertes par l’activité ; le volet instructions pour ajouter des informations à destination soit
du tuteur qui supervisera l’exécution du scénario, soit des enseignants qui réutiliseront le
scénario.
Figure 40 - Interface de l'éditeur LAMS
LAMS propose quelques outils cognitifs pour assister les utilisateurs : une description des
activités sélectionnées pour aider le choix des concepteurs parmi les éléments proposés dans la
« boîte à outils » (« activities toolkit ») ; une fonctionnalité de notification en cas d’incohérence ou
d’incomplétude du scénario au moment de sa sauvegarde ; une aide en ligne générale à propos
de l’outil, ainsi que des aides contextualisées à chaque type d’activité.
Le formalisme des Pléiades et son implémentation dans ExploraGraph : assistance à la
réutilisation de scénarios pédagogiques
La méthode des Pléiades (Villiot-Leclercq 2007) propose un cadre de description et une méthode
opérationnelle pour la réutilisation de scénarios pédagogiques. Elle est principalement destinée à
171
des enseignants et à des concepteurs pédagogiques pour lesquels elle vise à faciliter le partage,
la réutilisation, l’adaptation et l’instrumentalisation des scénarios.
Le formalisme des Pléiades est défini autour du concept d’« entité signifiante d’apprentissage »
où une entité représente un ensemble d’activités qui a du sens dans une situation
d’apprentissage et possède un ensemble défini de propriétés paramétrables. Pour exprimer ces
entités, Villiot-Leclercq a défini un formalisme reposant sur une métaphore issue de l’astronomie,
le formalisme des Pléiades. Trois types d’entités sont identifiés, correspondant à différents
niveaux de granularité d’un scénario pédagogique : l’étoile, activité élémentaire d’un scénario
pédagogique ; la pléiade, regroupement d’étoiles ou séquence d’activités ; la constellation,
regroupement de pléiades. Chaque entité est décrite à l’aide de 13 propriétés réparties en deux
catégories (cf. tableau 5).
Des propriétés descriptives : granularité, famille de regroupement (élément significatif à
l’origine de la constitution de l’entité, par exemple le but, le thème traité, etc.), la stratégie
d’enseignement, la stratégie d’apprentissage (cognitive, affective, de gestion,
métacognitive), le statut obligatoire ou optionnel, la densité ou nombre de constituants,
les éléments de connaissances en jeu.
Des propriétés organisatrices : les constituants de l’entité, son orchestration, la
distribution des rôles (élève, enseignant, expert), les conditions de clôture, les éléments
de support.
Tableau 5 - Propriétés des entités du formalisme des Pléiades (Villiot-Leclercq 2007)
Le formalisme des Pléiades a été implémenté dans l’outil ExploGraph opérationnalisant ainsi un
outil d’aide à la conception où les scénarios pédagogiques sont exprimés graphiquement (cf.
figure 41) :
Une étoile d’activité est représentée par une ellipse ou un rectangle arrondi ; une pléiade
correspond à un regroupement d’étoiles (une étoile parent et des fils) ; une constellation
correspond à un regroupement de pléiades et d’étoiles.
172
Les traits entre les étoiles indiquent des relations de précédence (trait horizontal bleu) ou
des liens hiérarchiques de composition (trait vertical jaune).
Les liens entre des ressources ou outils et des étoiles représentent soit une relation de
production (trait rouge) soit une relation d’utilisation (trait violine).
Les autres propriétés telles que statut, stratégies, temps sont précisées dans le champ
texte de la fenêtre de propriétés d’un nœud.
Figure 41 - Représentation graphique d'un scénario pédagogique : formalisme des Pléiades implémenté dansExploraGraph (Villiot-Leclercq 2007)
La méthodologie opérationnalisée par Villiot-Leclercq dans ExploraGraph implémente par ailleurs
les différents niveaux d’aide du système MOSCA (présenté dans la section 6.4.1) : un graphe de
tâches détaillant le processus de réutilisation basé sur le modèle CAA ; des représentations
multiples des patrons disponibles dans l’outil, exprimés selon le formalisme des Pléiades
(représentation à l’aide d’un graphe ExploraGraph, représentation sous forme de tableau et
représentation sous forme de carte mentale) ; des suggestions contextualisées.
ISiS et ScenEdit : une approche de la scénarisation pédagogique dirigée par les intentions
ISiS (Intentions, Stratégies, interactional Situations) et son implémentation dans l’environnement
ScenEdit (Emin 2010) visent à offrir des modèles, méthodes et outils complémentaires aux EML
pour soutenir la conception de scénarios pédagogiques. Ils ont été définis à l’intention des
enseignants du secondaire en activité et des enseignants novices en formation en IUFM. ISiS
adopte une approche de la scénarisation pédagogique basée sur les intentions, le partage et la
réutilisation de scénarios pédagogiques au sein de communautés d’enseignants.
173
Selon le modèle ISiS (figure 27), un scénario pédagogique est tout d’abord décrit à l’aide d’un
scénario structurant qui exprime les différents niveaux de décision du concepteur : intentions,
stratégie, tactique.
Le niveau intentionnel du scénario structurant s’appuie sur le contexte de connaissances
(connaissances, compétences, habiletés) de l’unité d’apprentissage qui fait l’objet de la
conception. A ce niveau, le concepteur formule ses intentions par rapport au résultat qu’il
recherche à l’issue de l’unité d’apprentissage, concernant les apprenants et le contexte
de connaissances. Une intention peut être par exemple : « approfondir la capacité à
travailler en équipe » (Emin 2010).
Le niveau stratégique concerne le choix d’une stratégie adaptée pour réaliser une
intention formulée au niveau précédent. Une stratégie organise des phases logiques, il
s’agit alors d’une stratégie de séquencement, ou définit un parcours selon des cas
spécifiques identifiés, dans ce cas on parle de stratégie de distribution (Emin 2010). Par
ailleurs, plusieurs stratégies peuvent se combiner entre elles. La « démarche
expérimentale » est un exemple de stratégie pouvant être choisie pour réaliser une
intention spécifique.
Le niveau des situations types d’interaction correspond au niveau tactique et concerne la
définition d’une solution type correspondant aux intentions et stratégies choisies. Ces
situations-types d’interaction sont soit celles présentes dans le répertoire personnel du
concepteur soit des situations partagées par des pairs. Une situation-type d’interaction
décrit les grands principes de la solution correspondant à une phase du scénario en
cours de conception : l’activité-type, les rôles-types, les ressources-types et les lieux-
types.
174
Figure 42 - Schéma descriptif du modèle ISiS (Emin 2010)
Implémenté dans l’outil ScenEdit, le modèle ISiS supporte l’activité des concepteurs dans
différentes phases du processus de scénarisation pédagogique sans contraindre l’ordre
d’exécution de ces phases :
Un module permet de définir le contexte de connaissances et le contexte situationnel
(périmètre de connaissances concerné, caractéristiques de l’environnement de
formation) ;
Un module vise la spécification du scénario intentionnel correspondant à la problématique
de formation (définition des objectifs visés pour les apprenants, identification des
stratégies à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs) ;
Un module permet le choix et la création de situations-types d’interaction à partir de
composants réutilisables et adaptables au contexte défini (cf. figure 43) ;
Des banques de composants permettent d’indexer les scénarios élaborés en vue d’une
réutilisation.
175
Figure 43 - ScenEdit : module d'édition d'une situation d'interaction (Emin 2010)
Dans la zone principale d’édition (cf. figure 44), la conception d’un scénario repose sur une
représentation graphique reprenant les niveaux hiérarchiques du modèle ISiS :
Au premier niveau, les intentions sont représentées par un rectangle arrondi ;
Au second niveau les stratégies sont représentées par un rectangle ;
Au troisième niveau les phases sont représentées par des cercles ;
Enfin les situations d’interactions sont représentées par des dessins ou des
photographies.
176
Figure 44 - ScenEdit : interface d'édition du scénario (Emin 2010)
Concernant les fonctionnalités d’assistance à la conception, ScenEdit propose pour le moment
uniquement une banque de patrons qui nécessite d’être enrichie pour constituer un réel outil de
soutien pour le concepteur. L’intégration de fonctionnalités plus poussées de soutien à la
conception, telles que des suggestions pour guider la conception, fait partie des perspectives de
travail du projet.
Analyse des approches de formalisation présentées
Différents travaux portent sur la définition d’un cadre d’analyse des langages de conception
(Botturi et al. 2006, Gibbons et al. 2008, Nodenot 2007), et offrent des critères pour décrire et
comparer les langages de formalisation de scénarios pédagogiques. Tout d’abord, nous pouvons
organiser ces langages selon deux axes (Botturi et al. 2006) :
L’axe de la communication : des langages « réflexifs » sont plutôt destinés à un usage
personnel par le concepteur en vue d’accompagner sa réflexion dans les étapes initiales
de la conception ; des langages « communicatifs » vont avoir quant à eux comme objectif
principal de favoriser la communication avec d’autres concepteurs ou participants d’un
projet. COLLAGE, l’approche des Pléiades et ScenEdit peuvent être considérés comme
des langages réflexifs et communicatifs car ils visent à guider le concepteur dans sa
réflexion initiale sur le problème de conception, et également à faciliter les échanges et le
partage des scénarios. L’approche de LAMS, qui présente également les deux aspects
est davantage orientée sur le côté réflexif, avec une utilisation principalement
personnelle, les aspects de partage et de réutilisation des scénarios n’étant pas centraux
dans cet outil.
177
La créativité : certains langages sont principalement destinés à accompagner la
production de solutions par le concepteur et interviennent donc dans les premières
étapes du processus. C’est le cas des approches précédentes, à l’exception de LAMS qui
a un objectif supplémentaire d’opérationnalisation, similaire aux langages de modélisation
pédagogique tels qu’IMS-LD.
En nous basant sur les travaux de Nodenot (2007), nous comparons les langages de
formalisation étudiés selon les propriétés des scénarios pédagogiques qu’ils expriment (tableau
6).
Description des rôles et responsabilités des acteurs du scénario. Ces aspects sont
abordés dans COLLAGE et ScenEdit, ainsi que dans la méthode des Pléiades où ils ne
sont, par contre, pas présentés de façon graphique.
Description des modalités d’apprentissage distinguant les activités effectuées en
présentiel et à distance, à l’aide ou non d’un outil informatique, dans des temps
synchrones ou asynchrones. Ces caractéristiques sont mises en évidence dans LAMS et
dans ScenEdit.
Identification du contexte de connaissances concerné. La méthode des Pléiades et
ScendEdit abordent cet aspect sans pour autant le représenter de manière graphique
dans le système de notation utilisé.
Spécification des objectifs d’apprentissage. Toutes les méthodes étudiées permettent de
faire apparaître les objectifs d’apprentissage guidant la définition du scénario, toutefois
seul ScenEdit, avec l’indication des intentions, les intègre à la représentation graphique
du scénario.
Présentation de la structure du scénario : tous les langages de formalisation étudiés ont
recours à des représentations mettant en évidence la structuration du scénario.
Indication des collaborations entre les participants au cours d’une activité : seule la
méthode des Pléiades ne met pas en évidence cet aspect.
Tous ces éléments ne sont pas obligatoirement présents au niveau le plus élevé de
représentation du scénario. Par exemple dans ScenEdit, les rôles et responsabilités des acteurs,
les modalités de l’activité et les collaborations sont indiqués au niveau des situations
d’interaction, dans une fenêtre dédiée (figure 43), et non représentées sur le schéma général du
scénario.
Dans le tableau 6, nous récapitulons également les caractéristiques générales des langages
abordés : COLLAGE, la méthode des Pléiades et ScenEdit mettent en œuvre des approches
basées sur un principe de réutilisation ; COLLAGE en tant que méthode pour la conception de
scénarios collaboratifs adopte une approche basée sur les interactions ; ScenEdit utilise une
approche basée sur les intentions ; LAMS et la méthode des Pléiades sont basés sur une
approche de la conception centrée sur les activités, avec une entrée par les outils pour LAMS.
178
Nous proposons également dans ce schéma de qualifier les représentations visuelles offertes par
ces langages selon leur caractère intuitif pour la compréhension et la création de scénarios. Ainsi
nous jugeons que seul LAMS propose un formalisme visuel réellement intuitif et explicite à
travers l’utilisation d’éléments graphiques signifiants (figure 40). En effet, le formalisme de
COLLAGE, même s’il est compréhensible assez intuitivement, n’est pas homogène d’un patron à
l’autre ce qui parasite son appropriation (figure 38 et Annexe II). La compréhension du
formalisme des Pléiades tel qu’implémenté dans ExploraGraph (figure 41) n’est pas immédiate,
elle nécessite d’avoir recours à une légende détaillée, notamment pour comprendre la
signification des liens entre les activités dont le sens repose sur leur couleur. Enfin, les éléments
graphiques utilisés dans ScenEdit, notamment au niveau du scénario global (Intentions,
Stratégies, Situations d’interaction), ne semblent pas intuitivement porteurs de sens, même si la
structure hiérarchique du modèle ISiS est simple et clairement représentée (figure 44).
COLLAGE LAMS Pléiades ScenEdit
Eléments décrits dans le formalisme
Rôles etresponsabilités NV
Modalitésd’apprentissage
Contexte deconnaissances NV NV
Objectifsd’apprentissage NV NV NV
Structure duscénario
Collaborations entreacteurs
Caractéristiques générales du formalisme
Approche deconception
Interactions etréutilisation Activités (et outils) Activités et
réutilisationIntentions etréutilisation
Représentationsvisuelles intuitives Non Oui Non Non
Tableau 6 - Synthèse des éléments décrits et caractéristiques des approches de formalisation étudiées( : décrit de façon visuelle ; NV : décrit et non représenté visuellement)
179
Synthèse : langages de formalisation et systèmes de notation visuels
L’étude de ces différents langages de formalisation et de leur expression sous
forme de systèmes de notation visuels alimente notre réflexion autour de la
définition d'une approche pour décrire les scénarios LRPG (cf. chapitre 11).
Nous visons principalement la mise en œuvre de principes issus de l’approche de
conception centrée activités, tout comme dans LAMS ou dans le formalisme des
Pléiades. De façon complémentaire, notre réflexion autour de l’élaboration d’un
langage de formalisation prend également en compte des principes des approches
de conception s’intéressant aux interactions et aux intentions comme c’est le cas
dans COLLAGE et ScenEdit.
Cette analyse nous permet d’identifier certains principes utiles pour exprimer les
caractéristiques d’un scénario LRPG à l’aide d’un système de notation visuel : nous
nous intéressons notamment aux méthodes pour décrire la structure du scénario,
les rôles et responsabilités des acteurs, les modalités des activités d’apprentissage
(synchrone/asynchrone, distance/présence, etc.), les collaborations entre acteurs.
180
PARTIE 3 : NOS PROPOSITIONS,EXPERIMENTATIONS ET RESULTATS
A la lumière de l’étude exploratoire menée (cf. partie 2), la partie 3 présente les propositions
élaborées en vue de répondre à notre problématique de recherche : comment assister la
conception de dispositifs de formation utilisant le jeu ?
Dans cette partie, nous commençons par rappeler les objectifs de notre travail et exposons la
méthodologie de recherche suivie. Trois grandes phases de travail, succédant à l’étude
exploratoire, sont ainsi mises en évidence. La première phase portant sur la délimitation de notre
objet d’étude est détaillée dans le chapitre 8. La seconde phase de travail est répartie en trois
chapitres (9 à 11), chacun abordant une proposition visant à alimenter notre réponse à la
problématique de recherche définie. La troisième phase consacrée à l’élaboration de prototypes
d’outils d’assistance et aux expérimentations est abordée dans les chapitres 12 et 13.
181
Chapitre 7. OBJECTIFS ET METHODOLOGIE
7.1. Rappel de notre objectifNos travaux de recherche portent sur la conception de dispositifs de formation mettant en œuvre
des ressorts de jeu dans le but de motiver les participants. Nous nous situons plus
particulièrement dans un contexte de formation professionnelle continue. Nous nous intéressons
à des dispositifs de formation à distance ou hybrides qui visent à s’intégrer au contexte particulier
de l’entreprise, où les formations sont souvent dispensées sur le lieu de travail et regroupent des
participants géographiquement répartis.
Notre recherche porte plus spécifiquement sur l’assistance à la conception de ces dispositifs de
formation. Les sujets cibles de nos travaux sont les concepteurs pédagogiques ou ingénieurs de
formation, travaillant au sein de sociétés prestataires en ingénierie de formation ou dans les
services de formation des grandes entreprises.
Comme nous l’avons déjà précisé en introduction de ce document (cf. § 1.3), notre travail de
recherche est organisé autour de la question suivante :
Comment assister efficacement le concepteur à la fois dans la création de dispositifsadaptés et dans la communication, avec les autres personnes impliquées dans le projet,autour des solutions conçues ?
Cette question principale se décompose en deux questions plus spécifiques auxquelles notre
travail cherche à répondre.
D’une part, une question relative à l’assistance à la conception : Quelles sont, dans le
contexte visé, les caractéristiques d’une méthodologie qui vise à soutenir la conception
de dispositifs de formation utilisant le jeu ?
D’autre part, une question portant sur l’approche adoptée concernant la place et le rôle
du jeu dans les dispositifs de formation à concevoir : Comment peut-on assister des
concepteurs dans l’utilisation du jeu pour générer la motivation dans apprenants ?
7.2. Aspects méthodologiquesDans cette section, nous rappelons la démarche méthodologique suivie pour atteindre l’objectif
défini (démarche déjà présentée § 1.4). Nous listons également les différentes propositions
élaborées pour répondre aux questions de recherche formulées. Nous détaillons enfin l’approche
expérimentale mise en œuvre dans nos travaux.
182
7.2.1. Démarche générale et propositions élaborées
L’étude exploratoire présentée dans la partie précédente a été guidée par des postulats formulés
à l’issue de la définition de notre problématique de recherche. Ces postulats concernent l’intérêt
du jeu dans la formation et la possibilité de conduire des jeux de rôle pédagogiques à distance.
Même si nous ne cherchons pas à valider expérimentalement ces postulats dans nos travaux,
l’un des objectifs de l’étude exploratoire conduite est d’en avoir une meilleure compréhension et
de les valider d’un point de vue théorique.
Un autre objectif majeur de l’étude exploratoire est de définir les hypothèses guidant les réponses
à la question de recherche initiale (cf. § 1.3). L’étude exploratoire a donc porté sur les principaux
domaines relatifs à notre problématique : l’assistance à la conception de dispositifs de formation
utilisant le jeu, et plus spécifiquement le jeu de rôle. Dans cette perspective, nous nous sommes
donc attachés à :
cerner ce qu’est le jeu de manière générale,
étudier le jeu utilisé à des fins d’apprentissage,
mettre en perspective des informations relatives à l’activité de conception, et à la
conception pédagogique en particulier, avec un focus plus précis sur les spécificités de
conception des situations d’apprentissage collectives, des dispositifs de formation
hybrides, des jeux et des dispositifs de formation basés sur le jeu ;
explorer le domaine de l’assistance à la scénarisation pédagogique et les langages de
conception pédagogique.
Cette étude exploratoire et structurante associée aux hypothèses de recherche et postulats
formulés aboutit à la définition de phases de travail structurant notre recherche (cf. figure 1). Ces
phases de travail visent l’élaboration de propositions destinées à répondre à l’objectif général
spécifié.
Phase 1 (cf. chapitre 8) : définition et délimitation de notre objet d’étude.
L’étude des différentes approches du jeu et de son utilisation à des fins de formation, au
regard de notre contexte d’application (la formation professionnelle continue) et des enjeux
exposés dans le chapitre 1, nous a amenés à nous centrer sur les dispositifs Learning
Role-Playing Game. Afin de mieux définir l’objet d’étude ainsi délimité, nous avons élaboré
une grille regroupant des critères destinés à décrire les scénarios Learning Role-Playing
Game.
Phase 2 : élaboration de propositions pour assister la conception des dispositifsLRPG.
o Proposition 1 (cf. chapitre 9) : structurer l’activité de scénarisation des dispositifs
LRPG à travers la définition d’une démarche de conception. L’une des
hypothèses sous-jacentes est que le fait de donner de la visibilité sur un
183
processus de conception, c’est-à-dire sur les étapes qui amènent de la
formulation d’un problème de conception à la définition d’une solution, va
constituer un soutien pour l’activité du concepteur. La démarche de conception
proposée a été élaborée d’après un principe directeur visant à « guider avec
flexibilité » afin de s’assurer d’une meilleure adéquation avec les habitudes
individuelles de notre public cible.
o Proposition 2 (cf. chapitre 10) : guider la réflexion des concepteurs
pédagogiques pour l’intégration du jeu dans un dispositif de formation.
Etroitement lié au type de dispositif de formation qui a été retenu suite à la phase
1 de notre travail, cette proposition concerne les aspects liés au jeu et à la
motivation : nous adoptons ici une approche centrant la réflexion sur l’utilisation
de ressorts de jeu, que nous définissons comme des principes reconnus pour
susciter l’engagement des participants dans un jeu.
o Proposition 3 (cf. chapitre 11) : offrir un langage de formalisation pour faciliter
l’explicitation des solutions lors de leur conception (pour le concepteur lui-même
ou pour communiquer avec les autres membres du projet) et simplifier
l’appropriation dans les phases de réutilisation et de partage. Le langage de
formalisation et le système de notation visuel proposés s’appuient principalement
sur une approche de scénarisation pédagogique centrée sur les activités, tout en
intégrant des principes issus des différentes approches de conception étudiées
(cf. § 5.2.3).
Phase 3 (cf. chapitre 12) : mises en œuvre et évaluation des hypothèses et des
propositions.
La mise en œuvre des propositions s’est faite à travers l’élaboration de deux prototypes
d’outils d’aide à la conception implémentant et opérationnalisant nos propositions afin de les
expérimenter auprès des utilisateurs : un prototype « papier » et un prototype
d’environnement informatique.
Même si nous proposons une démarche de conception globale (proposition 1), seules les phases
amont du processus, portant sur la définition d’une esquisse de scénario LRPG, ont été
approfondies avec le travail sur les propositions 2 et 3, leur mise en œuvre dans les prototypes
d’outils et les expérimentations menées (phase 3).
La définition des propositions de réponse à la problématique de recherche et le développement
des prototypes d’outils d’assistance s’alimentent mutuellement : les résultats issus des
expérimentations sur les prototypes amènent à ajuster les propositions initiales et ces
ajustements devront ensuite être répercutés sur les spécifications des prototypes.
184
7.2.2. Notre approche de l’expérimentation
Notre démarche positionne les expérimentations dans le cheminement classique d’un travail de
recherche : à partir de la question initiale, l’exploration du domaine mène à la formulation d’une
problématique et d’hypothèses de travail, puis à l’élaboration de propositions à partir des
hypothèses formulées, et enfin à la mise en place d’un dispositif d’expérimentation visant
l’évaluation des solutions proposées.
Une approche qualitative centrée utilisateurs
Nos expérimentations sont basées sur une approche qualitative issue des sciences sociales
(Combessie 2007), alimentée principalement par des techniques d’observation de pratiques au
cours de mises en situation, des entretiens semi-directifs et des questionnaires.
Nous adoptons des principes de l’approche de conception centrée utilisateur (Site UPA 20111),
issue du domaine de la conception de logiciels auquel sont en partie reliés nos travaux : le
recours à cette approche a pour but de s’assurer d’une plus grande utilisabilité des outils ou
méthodes en cours de conception, de leur adéquation par rapport aux besoins et usages du
public cible ainsi que d’une meilleure acceptabilité (Maguire 2001). L’approche de conception
centrée sur l’utilisateur pour le développement de « systèmes interactifs » fait l’objet d’une norme
(ISO 9241-210) qui présente des préconisations pour appliquer et mettre en œuvre cette
démarche à différents niveaux du processus d’élaboration du produit. Nous en retenons
notamment les principes suivants :
implication active des utilisateurs lors du recueil des besoins en amont et lors de la
conception du dispositif ;
distribution appropriée des fonctions assurées par le système et de celles prises en
charge par l’utilisateur lors de l’activité (utilisation du dispositif) ;
processus de conception itératif pour prendre en compte les besoins et exigences
exprimées par les utilisateurs, effectuer les adaptations nécessaires et procéder à de
nouvelles vérifications.
Dans cette approche l’un des concepts centraux est l’utilisabilité, définie par la norme ISO 9241-
11 relative à l’ergonomie des logiciels, comme :
« le degré selon lequel un produit peut être utilisé, par des utilisateurs identifiés, pouratteindre des buts définis avec efficacité, efficience et satisfaction, dans un contexted’utilisation spécifié. »
On constate que, même si elle est à la base issue de l’ergonomie des systèmes interactifs,
l’approche de conception centrée utilisateur est applicable à d’autres domaines qui peuvent
concerner la conception de solutions plus abstraites.
1 http://www.upassoc.org/
185
Dans notre cas, les utilisateurs-cibles sont des concepteurs pédagogiques travaillant au sein de
sociétés prestataires dans le domaine du e-learning ou plus globalement de l’ingénierie de
formation ou au sein de services de formation internes de grandes entreprises. Dans une
approche de conception centrée utilisateurs, l’intégration des utilisateurs finaux peut avoir lieu à
différents moments du processus de conception (cf. démarche préconisée dans la norme ISO
9241-210) : dans notre travail, la prise en compte des utilisateurs finaux est au cœur de la
réflexion menée tout au long du processus de recherche, c’est-à-dire dès la phase d’analyse
(correspondant dans notre cas à l’étude exploratoire du domaine), et elle se concrétise à travers
les expérimentations menées dans les phases d’élaboration des solutions mettant en œuvre un
processus itératif de conception - évaluation.
186
Chapitre 8. PHASE 1 : DEFINITION ET DELIMITATION DE NOTREOBJET D’ETUDE
Ce chapitre présente la première phase de notre travail visant la définition et la délimitation des
dispositifs de formation auxquels s’intéresse étude. Comme nous l’avons constaté à travers
l’étude exploratoire présentée dans la partie 2 (chapitres 2 à 6), le domaine du jeu pour la
formation est vaste : cette étude, croisée avec les besoins et contraintes de notre domaine
d’application, nous a permis d’identifier les caractéristiques d’un type de dispositif de formation
utilisant le jeu sur lequel faire porter nos travaux.
8.1. L’orientation vers les dispositifs Learning Role-PlayingGame
L’étude exploratoire présentée dans la partie 2 nous a conduits à identifier plusieurs
caractéristiques qui expliquent l’intérêt potentiel de l’utilisation du jeu à des fins de formation (cf.
chapitre 3), confirmant et précisant notre postulat de base concernant l’intérêt d’utiliser le jeu en
formation.
L’étude exploratoire a également permis d’établir un panorama de solutions possibles pour
l’utilisation du jeu dans la formation (cf. § 0). D’après les possibilités identifiées, nous avons
choisi de focaliser nos travaux sur un type spécifique de dispositif de formation utilisant le jeu,
correspondant aux orientations définies par rapport aux besoins et problématiques de notre
contexte d’application (détaillés chapitre 1) :
Orientation 1 : un apprentissage étroitement associé au contexte professionnel dans
lequel il s’inscrit,
Orientation 2 : des méthodes d’apprentissage actives,
Orientation 3 : un apprentissage collaboratif et des interactions sociales entre les
participants,
Orientation 4 : un dispositif de formation générant motivation et implication des
apprenants,
Orientation 5 : une flexibilité et une adaptation facile des contenus du dispositif de
formation,
Orientation 6 : une facilité d’appropriation et de mise en œuvre du dispositif par les
apprenants comme par les formateurs et tuteurs,
Orientation 7 : une mise en œuvre adaptée aux contraintes organisationnelles des
entreprises (répartition géographique des apprenants, contraintes de disponibilité des
participants, etc.).
187
La mise en relation de ces orientations avec les éléments issus de l’étude exploratoire a abouti à
la définition du concept de Learning Role-Playing Game (LRPG).
L’expression Learning Role-Playing Game, dont une traduction française serait « jeu de rôle pour
l’apprentissage » est construite sur la base des éléments suivants :
- l’expression serious game désignant, au sens large, l’utilisation du jeu dans un but
sérieux (cf. § 3.4.1), que nous restreignons dans notre cas à une utilisation dans un but
d’apprentissage en parlant de learning game (en français « jeu pour l’apprentissage ») ;
- le jeu de rôle ou role-playing game en anglais, activité centrale des learning games
auxquels nous nous intéressons.
Nous définissons plus précisément le LRPG comme un dispositif de formation technologique et
humain utilisant principalement le jeu de rôle et des activités collectives comme ressorts
d’engagement des apprenants (cette approche de l’utilisation du jeu basée sur l’identification de
« ressorts » de motivation notamment issus du jeu est expliquée de manière détaillée dans le
chapitre 10). Les dispositifs LRPG sont des dispositifs de formation ouverts : se différenciant des
applications serious game de type jeux vidéo (tels que ceux présentés § 3.4.4 ), ils s’apparentent
davantage aux dispositifs de formation à distance ou hybrides exécutés sur des plateformes LMS
(Learning Management System) ou d’autres environnements technologiques permettant l’accès à
des ressources multimédias et la communication en ligne (des exemples de ce type
d’implémentation sont présentés § 3.4.4, section « Exemples de jeux de rôle pédagogiques en
ligne »).
En résumé, les dispositifs LRPG sont caractérisés par les principes suivants :
un dispositif réservant une place centrale au jeu, notamment au jeu de rôle pédagogique,
ainsi qu’à la mise en œuvre d’une pédagogie active ;
un dispositif hybride pouvant associer diverses modalités, telles qu’une utilisation à
distance et en présentiel, des activités synchrones et asynchrones, individuelles et
collectives, etc.
Ces caractéristiques fondamentales des dispositifs LRPG font l’objet d’explications détaillées
dans la suite de cette section.
8.1.1. LRPG et jeu de rôle
Le jeu de rôle, et plus particulièrement le jeu de rôle pédagogique, est la principale
caractéristique des dispositifs LRPG. Le jeu de rôle est ici considéré selon une acception large
qui le définit comme une simulation d’une situation, à laquelle des participants prennent part en
endossant les rôles de personnages spécifiques interagissant les uns avec les autres (cf. §
3.4.3). Les deux grands types de jeux de rôles retenus dans notre approche sont présentés plus
loin dans cette section.
188
De façon générale, notre choix du jeu de rôle est conforté par l’intérêt déjà avéré de son
utilisation en formation professionnelle dans des sessions présentielles (cf. § 3.4.3). D’autres
exemples font également état de possibilités d’utilisation du jeu de rôle dans des dispositifs de
formation en ligne (dispositifs synchrones ou asynchrones, implémentés sur des plateformes
d’exécution variées, etc.).
Le jeu de rôle possède également certaines caractéristiques qui correspondent aux spécificités
du public cible et aux besoins de formation de notre contexte d’application. Le jeu de rôle peut en
effet être utilisé dans divers buts, similaires à ceux les plus souvent visés dans notre contexte :
mettre en pratique des compétences notamment sociales, langagières, communicationnelles,
managériales ; appliquer des connaissances métiers spécifiques ; réfléchir, prendre du recul et
analyser les pratiques ou comportements mis en œuvre dans certaines situations ; sensibiliser à
des aspects émotionnels et personnels de la situation jouée.
Par ailleurs, en tant que jeu, le jeu de rôle met en place des dynamiques de motivation
permettant d’impliquer les participants dans l’activité, problématique centrale dans notre contexte
d’application (cf. orientation 4).
Du point de vue de l’approche pédagogique adoptée, le jeu de rôle peut mettre en œuvre un
apprentissage collectif (cf. orientation 3) et favorise les interactions sociales, coïncidant ainsi
également avec les enjeux de professionnalisation liés à notre contexte : co-construction et co-
formalisation des savoirs et compétences métiers, travail d’équipe, etc. De plus, le caractère
collectif et les interactions entre participants sont des facteurs qui contribuent à augmenter la
motivation des participants (cf. chapitre 4).
En tant qu’activité de simulation (cf. § 3.4.2), le jeu de rôle pédagogique constitue une méthode
en accord notamment avec les principes de la didactique professionnelle (cf. § 3.2.5) et de
l’apprentissage expérientiel (cf. § 3.2.2). Ces approches s’avèrent particulièrement adaptées à la
formation professionnelle continue en entreprise puisqu’elles considèrent l’apprentissage à
travers des mises en situation où les apprenants acquièrent et exercent des compétences dans
des situations métier proches du réel (orientation 1). Dans ce sens, l’utilisation du jeu de rôle
s’inscrit également dans une approche active de la pédagogie en rendant les apprenants acteurs
de leur apprentissage à travers la simulation (cf. orientation 2).
Du point de vue de leur élaboration par des concepteurs pédagogiques et de leur mise en œuvre
par les formateurs, les jeux de rôle répondent également aux orientations retenues dans notre
contexte d’application. Contrairement à de nombreuses applications du jeu et de la simulation
pour la formation (cf. exemples cités § 3.4.4 - section « Simulation et jeux informatisés »), les
dispositifs LRPG ne reposent pas sur un modèle computationnel de la situation simulée : le
scénario du jeu se construit autour des interactions entre les participants et non autour des
interactions entre les participants et un modèle implémenté dans un environnement informatique.
La mise en œuvre du jeu de rôle nécessite de définir les rôles joués par les participants et les
scénarios des situations simulées : il repose ainsi en grande partie sur des ressources
189
indépendantes de l’exécution des scénarios telles que des fiches de personnages et des
documents de présentation de la situation. Ces caractéristiques confèrent au jeu de rôle une
grande flexibilité, une simplicité de mise à jour ainsi qu’une certaine facilité de conception et de
développement. Elles le rapprochent ainsi d’un « jeu-cadre » (cf. § 2.2.3), c’est-à-dire une activité
qui propose une structure et des règles réutilisables associées à des contenus facilement
adaptables : caractéristique intéressante au regard d’une approche de conception basée sur la
réutilisation que nous préconisons (cf. chapitre 9).
La fréquente simplicité des règles du jeu de rôle est une caractéristique supplémentaire justifiant
son intérêt dans notre contexte : des règles et un fonctionnement simples favorisent une
appropriation facile des dispositifs, tant pour les formateurs qui vont le mettre en œuvre, que pour
les apprenants qui vont l’utiliser, parfois en autonomie, sans la supervision d’un tuteur.
Du point de vue de l’intégration dans le contexte de la formation professionnelle en entreprise, les
jeux de rôles répondent aux exigences de flexibilité et aux contraintes organisationnelles
identifiées en permettant :
une mise en œuvre en présentiel, à distance ou au sein de dispositifs hybrides,
ainsi que le recours à des modalités de communication synchrones ou asynchrones dont
le choix dépend des spécifications du projet et notamment du type de situation simulé (cf.
les deux grands types de dispositifs LRPG identifiés et décrits ci-dessous).
En nous appuyant sur une analyse de pratiques existantes en matière d’utilisation du jeu de rôle
pour la formation professionnelle, et d’après le panorama de dispositifs étudiés, nous avons
choisi de travailler sur deux types de jeux de rôle, se différenciant en termes de modalités
d’interaction et d’organisation (cf. tableau 7).
Des jeux de communication, de courte durée (généralement de 10 à 20 minutes),
simulant des situations de communication synchrone entre deux ou trois protagonistes.
Ce type d’activité permet d’exercer des compétences interpersonnelles telles que la
gestion de conflit et/ou des compétences métiers tel que le conseil client. Le dispositif
Fight Right1 (Thiagarajan) (cf. § 3.4.2 - section « Simulation et jeux de rôle
pédagogiques » et la présentation détaillée en Annexe III) est basé sur des jeux de rôle
de ce type.
Des jeux de mission, d’une durée plus longue (pouvant se dérouler sur quelques heures
ou plusieurs semaines), confiant une mission ou la résolution d’un problème à une équipe
de participants et aboutissant la plupart du temps à une production ou à une prise de
décision commune. Ce type d’activité permet d’exercer à la fois des compétences
transversales (ex. travailler en équipe) et/ou de formaliser des connaissances métiers. Le
jeu de rôle proposé par Courau (2006) (cf. § 3.4.2 – section « Simulation et jeux de rôle
pédagogiques ») entre dans la catégorie des jeux de mission puisqu’il vise l’élaboration
1 http://www.thiagi.com/pfp/IE4H/december2001.html#FeaturedActivity
190
collective d’une « charte du client satisfait ». Le projet InterAct (cf. § 8.2.2) est lui aussi un
jeu de mission organisé autour de l’élaboration collective de documents de synthèse
autour de la thématique de la longévité en Europe.
Compétencespratiquées
Situation Communication Nb departicipants
Durée Exemple
Jeu decommunication
Compétencesinterpersonnelles,compétencesmétiers
Situation decommunication
Synchrone 2 ou 3 (pargroupe)
10 à 20mn Fight Right(Thiagarajan)
Jeu de mission Compétencestransversales,formalisation deconnaissancesmétiers
Mission ourésolution deproblème
Asynchrone ousynchrone
2 à n De quelquesheures àplusieurssemaines
InterAct
Tableau 7 - Jeu de communication et jeu de mission : caractéristiques principales
8.1.2. LRPG : un dispositif hybride
Une autre caractéristique fondamentale des dispositifs LRPG est leur caractère hybride (cf. §
5.4). Dans les dispositifs LRPG, le mélange de modalités s’applique à différents aspects :
activités à distance ou en présentiel, activités individuelles ou collectives, activités de jeu de rôle
et activités pédagogiques plus traditionnelles, pédagogie active (principalement) ou transmissive
(le cas échéant), mise en œuvre ou non de ressorts de jeu. Ces différentes modalités, dont le jeu,
peuvent s’appliquer à différents niveaux de granularité, c’est-à-dire à des activités spécifiques
(grain le plus fin) ou sur le scénario global.
Comme nous l’avons mis en évidence dans la section 5.4, une approche hybride offre un panel
de possibilités permettant d’adapter de façon fine le dispositif aux contraintes du projet de
formation auquel il est destiné et de répondre au mieux aux besoins et styles d’apprentissage
variés des apprenants cibles (cf. orientation 7). Ce panel de possibilités va également permettre
de proposer des activités variées au sein d’un même dispositif, contribuant ainsi à favoriser la
motivation des participants (cf. § 4.4.2).
8.1.3. Les interactions humaines au cœur du dispositif
Notre besoin de flexibilité exige de dépasser les contraintes inhérentes aux applications serious
game de type jeux vidéo. Ceux-ci reposent la plupart du temps sur des modèles calculables,
parfois complexes, ou sur des ressources incorporées au jeu de manière rigide, impliquant
généralement des coûts de conception et de développement importants ainsi que des mises à
jour complexes et coûteuses. Selon notre approche, les interactions complexes qui ont lieu dans
un dispositif LRPG concernant la conduite du scénario, son adaptation en temps réel ainsi que
les aspects de supervision des activités, les feedbacks (explications, arbitrages, régulation, etc.)
et les apports de connaissances sont assurées par les acteurs humain (apprenants et tuteurs). Il
191
s’agit donc de fournir aux acteurs les ressources et outils nécessaires à l’accomplissement de
ces tâches plutôt que d’automatiser leur prise en charge par l’environnement informatique.
8.2. Identifier les propriétés descriptives caractéristiques desscénarios LRPG
Après avoir délimité notre objet d’étude aux scénarios Learning Role-Playing Game, nous avons
cherché à en identifier des propriétés descriptives caractéristiques à travers l’élaboration d’une
grille de description. Cette grille a fourni un cadre conceptuel à l’approche de formalisation des
scénarios LRPG que nous proposons plus loin comme un élément d’assistance à la conception
(cf. chapitre 11).
La grille de description est principalement issue de l’étude de classifications de jeu existantes.
Elle regroupe les critères retenus d’après ces travaux et associe plusieurs principes issus des
approches de description de jeux analysées (cf. synthèse 2.2.6) :
- divers points d’entrée sont possibles pour analyser ou décrire un jeu : motifs
d’engagement des participants, compétences mises en œuvre, type de jeu ;
- une description fine des jeux et de leurs composants est nécessaire ;
- une représentation visuelle sous forme de schéma est utile.
Ces éléments sont associés à une approche stratifiée de la description, proposant différents
niveaux de détails (de l’esquisse du scénario global à la description détaillée de chaque
composant), principe notamment issu des travaux sur l’activité de conception abordés dans les
sections 5.1 et 5.2.
8.2.1. Caractéristiques générales de la grille de description
Notre grille de description est principalement basée sur la taxonomie de Klabbers (2008) (cf.
§ 2.2.5). Si nous avons décidé, dans un premier temps, de nous baser sur les travaux de
Klabbers c’est parce qu’ils poursuivent des objectifs similaires aux nôtres :
le premier objectif de la taxonomie élaborée par Klabbers est de révéler la structure des
jeux existants, afin de les comprendre, de les analyser, de les comparer ;
le second objectif de cette taxonomie est de guider la conception de nouveaux jeux.
Par ailleurs les deux objectifs visés par cette taxonomie s’appliquent à tout type de jeux, quels
que soient leurs formats ou leurs finalités : jeux vidéo ou jeux de plateau, sérieux ou pour le seul
divertissement. Cet aspect est intéressant dans la mesure où la réutilisation de scénarios
existants est au cœur de notre démarche de conception : le processus de réutilisation peut être
alimenté aussi bien par des scénarios de formation « classiques », c’est-à-dire sans jeu, que par
des scénarios de jeu sans finalité pédagogique ou encore par des scénarios LRPG existants.
192
En complément des travaux de Klabbers, la grille de description que nous proposons utilise des
critères de description issus des autres classifications étudiées (cf. § 2.2.6). L’élaboration de la
grille est intervenue avant la définition complète de notre approche basée sur les ressorts de jeu
(cf. chapitre 10) : à ce stade, la grille intègre toutefois déjà les quatre critères de classification de
Caillois (1958) que nous dénommons « ressorts de jeu » et prenons par la suite comme base de
notre approche. Notre objectif, en insérant cette identification des ressorts de jeu dans la grille de
description, est, à plus longue échéance, de pouvoir établir des corrélations entre les ressorts de
jeu et les caractéristiques du contexte de formation (objectifs pédagogiques, public cible, types
de connaissances ou compétences visés, etc.).
Le type de compétences mis en œuvre dans l’activité est d’ailleurs l’un des critères utilisé dans
certaines des classifications étudiées (notamment le système ESAR défini par Garon 1982) :
indispensable dans un contexte de formation, ce critère se trouve logiquement présent dans
notre grille de description.
La grille de description est divisée en deux grandes parties (cf. figure 45) :
Tout d’abord les spécifications générales offrent une définition globale du dispositif et du
contexte : client, secteur d’activité, intention générale, compétences visées, public cible
(profil, effectif, contraintes organisationnelles, contraintes liées aux spécificités de
l’entreprise), place dans la formation, synopsis, durée et planification.
Ensuite la description du scénario organisée autour de son architecture est décrite à
plusieurs niveaux selon la granularité du dispositif.
Ce premier cadre de description de scénarios LRPG intègre également des éléments issus de
travaux sur les approches de formalisation de scénarios pédagogiques (cf. § 6.5.3). Dans la
partie destinée à la description des spécifications générales du dispositif et du contexte
d’application, la grille présente les intentions formulées par les commanditaires, ainsi que, le cas
échéant la présentation d’usages pré-existants. Ces informations sont destinées à faciliter la
réutilisation et l’appropriation des scénarios LRPG par d’autres personnes que le concepteur
initial.
Dans cette grille, nous appelons niveau macro un niveau de description qui fournit une vision
globale de l’organisation et des principes du jeu (équivalent des informations fournies sur une
esquisse de scénario) et niveau micro un niveau de description qui présente de façon détaillée
chacune des phases identifiées au niveau macro. La grille repose sur la méthode de description
définie par Klabbers selon laquelle un jeu est un système composé d’acteurs, de règles et de
ressources qui peuvent être décrits selon trois points de vue : syntaxique (quoi ?), sémantique
(pour quoi ?) et pragmatique (comment ?). Nous avons adapté l’un des composants utilisés par
Klabbers afin de mieux répondre à nos besoins : nous parlons de « fonctions » plutôt que de
« ressources », afin de désigner les ressources mais aussi les outils nécessaires dans le
dispositif (par exemple un forum de discussion ou un outil de chat).
193
Figure 45 - Organisation de la grille de description
La description des règles et des fonctions au niveau macro se focalise essentiellement sur la
syntaxe. La sémantique et la pragmatique ne peuvent généralement être détaillées qu’au niveau
micro car elles sont très liées aux phases du jeu : il est souvent impossible d’en faire une
présentation synthétique qui ait du sens sans les rattacher étroitement aux phases du scénario
de jeu qu’elles décrivent.
La description des acteurs du point de vue syntaxique s’intéresse au nombre de participants
(joueurs et animateurs) et à la composition des équipes. Le point de vue sémantique présente le
rôle des participants. L’aspect pragmatique définit notamment la ou les stratégie(s)
d’apprentissage mise(s) en œuvre (apprentissage par interaction entre les participants, par
acquisition, etc.).
La syntaxe des règles stipule le degré de liberté du jeu : du jeu sans règles (similaire à la païda
définie par Caillois) au jeu très réglé (le ludus). La description syntaxique des règles précise
également la présence de phases préparatoires au jeu, elle mentionne les règles de départ et de
fin. C’est également à ce niveau que sont présentés le nombre et l’organisation des phases du
jeu accompagnées de propriétés telles que leur statut (obligatoire ou optionnel), les modalités
des activités (collectives ou individuelles) et leur durée. Représentées à l’aide d’un schéma, les
différentes phases constituent la structure du jeu. Le niveau sémantique détaille le rôle des règles
pour chaque phase, et précise la présence des ressorts de jeu agôn, mimicry, alea, ilinx (Caillois
1958). L’aspect pragmatique présente pour chaque phase les actions des animateurs et les
modalités des évaluations éventuelles.
La partie « fonctions » concerne les fonctionnalités et supports utilisés pour la mise en œuvre du
jeu : par exemple un plateau, des cartes, un ordinateur, etc. Au niveau syntaxique, on indique la
présence ou non de fonctions que nous répartissons en trois catégories :
les fonctions ressources désignent les documents fournis ou produits, les outils tels que
simulateurs, etc.
194
les fonctions de communication désignent le recours à des outils ou services support des
interactions de communication entre les participants,
les fonctions d’organisation désignent les outils ou services nécessaires à la planification
des activités (agenda par exemple) et à la gestion des participants.
Le rôle de ces fonctions (aspect sémantique) et les fonctionnalités et supports concrets de leur
mise en œuvre (aspect pragmatique) sont également précisés à ce niveau.
8.2.2. Description détaillée : application de la grille sur un scénarioLRPG
Deux tests de la grille ont été effectués dans le but de vérifier l’expressivité du modèle sous-
jacent, c’est-à-dire sa capacité à fournir une description complète, non ambigüe de scénarios
LRPG afin d’alimenter l’approche de formalisation que nous cherchons à définir par la suite.
Pour vérifier si la grille propose une structure et des critères de description adéquats, nous nous
sommes appuyés sur des documents décrivant les scénarios LRPG sur lesquels nous avons fait
porter notre test : nous avons transposé dans la grille les informations de description disponibles
à propos de ces scénarios. Nous avons choisi d’appliquer la grille aux deux types de scénarios
LRPG identifiés : un jeu de mission constituant un dispositif de formation hybride (décrit ci-après)
et un jeu de rôle de type communication utilisé en présentiel (cf. jeu-cadre Fight Right - Annexe
III).
Le jeu de mission utilisé pour tester la grille est un scénario du projet InterAct1 (déjà abordé §
3.4.4). Ce dispositif destiné à la formation professionnelle est basé sur un principe de résolution
de problème.
Interact – Healthcare scenario : spécifications générales
Le dispositif de formation Interact, et plus particulièrement le scénario Healthcare, s’adresse à
des employés du secteur médico-social (infirmières, assistantes sociales, etc.). Il vise le
développement de compétences relatives à l’utilisation des nouvelles technologies ainsi que de
compétences sociales liées à la communication, au travail en équipe et à la négociation. Les
spécifications générales du dispositif sont présentées dans le tableau 8.
1 http://www.statvoks.no/interact/handbook_on_cd/handbook_uk.htm
195
Spécifications générales du dispositifClient Non spécifié
Secteur d’activité Médico-social
Intention générale / Objectifspédagogiques
Développer des compétences de base : utilisation des TIC, communication,interactions sociales
Compétences visées - Etre capable d’utiliser des outils de communication de base, faire des recherchessur internet, utiliser un outil de traitement de texte- Etre capable de négocier pour définir une solution commune à un problème- Etre capable de travailler en équipe
Publiccible
Profil professionnel Employés d’une maison de retraite en Norvège, employés d’un hôpital en Angleterreet en Espagne et employés d’une agence de services sociaux en Roumanie
Choix liés aux contraintesorganisationnelles
Disponibilité : un jour par semaineContraintes géographiques : groupes géographiquement répartis, les participantsd’un même pays sont réunis au même endroit=> Impacts sur l’organisation du jeu :
Modalités : Présentiel réparti et distancePossibilité d’activités synchrones : Oui
Effectif global 2 à 5 participants dans chaque lieu.Effectif total ici : 8 à 20 participants
Choix liés aux habitudes detravail, à la philosophie del’entreprise
Dispositif collaboratifPar équipe
Scénario proche du contexte professionnel
Contexte d’utilisation Jeu autonome
Sujet du jeu (synopsis) Les théories et mythes européens concernant la longévité.En tant que membres du Comité Européen du Bien-être et de la longévité(ECOWAL), les participants doivent collecter des théories et des mythes à proposde la longévité dans leur pays. L’objectif du comité est de définir les différences quiexistent dans les pays européens à ce sujet.
Durée / Planification 5 semaines / un jour par semaine
Tableau 8 - Interact : spécifications générales
Description du dispositif niveau macro
Dans ce scénario de formation, les participants incarnent des membres du Comité Européen du
Bien-être et de la Longévité. Ils sont encadrés par des tuteurs (un dans chaque pays) qui animent
les sessions et assistent les participants sur les aspects pédagogiques et organisationnels de la
formation. La figure 46 présente l’organisation globale du scénario.
Figure 46 - Interact : structure du scénario
196
Description de la phase 03 au niveau micro
Pour tester la grille de description au niveau micro, nous nous attachons ici à décrire la phase 03
du scénario « Négociation : sélection de théories et mythes ».
A partir de la liste de théories et de mythes élaborées grâce aux contributions des quatre pays
participant au projet, les membres du Comité doivent définir une liste plus courte en ne retenant
que 15 éléments de chaque type. Cette phase de négociation entre les équipes des différents
pays est composée de 5 étapes (cf. figure 46) :
1. consignes ;
1. négociation sur la liste de théories ;
2. négociation sur la liste des mythes ;
3. sélection finale ;
4. débriefing.
La description des fonctions requises dans la phase 03 du scénario Interact (cf. tableau 9) met en
évidence le caractère hybride du dispositif : il fait à la fois appel à des documents papier et à des
documents numériques ; la communication entre les participants a lieu en face-à-face au sein de
chaque groupe et à l’aide des outils de communication de la plateforme LMS pour les échanges
inter-groupes.
197
Fonctions
Syntaxe Sémantique Pragmatique EtapeSupport principal Jeu de rôle
(communication enface-à-face)/ plate-formeLMS
Fonctions ressources Oui / Non
Documents consignesConsignes Indiquée sur le LMS
ADoc papier
Documents répertoriant les théorieslistées par chaque groupe
Doc numérique sur leLMS B
Documents répertoriant les mytheslistés par chaque groupe
Doc numérique sur leLMS C
Documents ressources recherchésRessources Internet InternetDocuments produits
Sélection finale de 17 théories Doc numérique sur leLMS D
Sélection finale de 17 mythes Doc numérique sur leLMS D
Fiches d’évaluation Doc numérique sur leLMS E
Fonctionscommunication Oui / Non
Interactions sociales Communication oraleen face-à-face
TousOutils decommunication du LMS
Tâches collectives Communication oraleen face-à-face B, C, D
Negociation Communication oraleen face-à-face
B, C
Outil e-mail du LMS B, CChoix - Convergence Documents partagés
sur le LMS D
Fonctionsorganisation Oui / Non
Gestion de profils N/A
Planification :Gestion des activités et déterminationdes deadlines
Outils de planificationet de gestion desactivités du LMS
Tous
Tableau 9 - Interact - phase 03 : description des fonctions
8.2.3. Conclusions à propos de la grille de description
L’utilisation de la grille de description sur des exemples de scénarios LRPG a permis une
première vérification de l’expressivité du modèle sous-jacent et des critères de description
retenus : la grille s’avère en mesure de décrire la plupart des informations indiquées dans la
description des deux scénarios LRPG choisis, que ce soit pour le scénario Interact, un jeu de
mission utilisé dans un dispositif de formation hybride, ou pour le scénario Fight Right, un jeu de
communication mené en présentiel (cf. Annexe III). Nous constatons que l’un des éléments
incontournables pour soutenir la compréhension du scénario est un schéma représentant sa
structure : c’est effectivement grâce à ce schéma que nous avons une vue d’ensemble de
l’organisation du scénario et que nous pouvons appréhender l’articulation des différents
composants.
L’application de la grille a permis de repérer plusieurs problèmes. D’une part, la structuration de
la grille présentée ici sous forme de tableau est peu opérationnalisable. D’autre part, les critères
198
de description s’avèrent parfois peu explicites dans l’optique d’une assistance à la conception.
Enfin, la structuration reprenant l’ensemble des critères de description à chaque niveau de
granularité n’est pas adaptée : elle conduit à des redondances ou à des interrogations pour
déterminer à quel niveau de granularité les informations doivent être indiquées.
A partir de ces constats issus de notre propre utilisation de la grille pour décrire deux exemples
de scénarios LRPG, nous avons travaillé à intégrer et adapter les critères et principes de la grille
au sein d’un formalisme plus opérationnel, associé à un système de notation visuel plus explicite
(cf. proposition 2 - chapitre 10).
199
Chapitre 9. PHASE 2 - PROPOSITION 1 : STRUCTURER LADEMARCHE DE CONCEPTION
Après avoir consacré une première phase de travail à la délimitation de notre objet d’étude – les
dispositifs Learning Role-Playing Game – la deuxième phase de travail vise à élaborer des
propositions pour répondre à la problématique d’assistance à la conception de ces dispositifs. La
première proposition, présentée dans ce chapitre, consiste à structurer la démarche de
conception. Il ne s’agit pas ici de définir une méthodologie de conception prescriptive mais de
guider la conception à l’aide d’un cadre et de grandes lignes directrices structurant l’activité.
9.1. Positionnement par rapport à l’étude exploratoireNotre approche pour définir une démarche de conception de dispositifs LRPG s’appuie sur le
concept de scénarisation pédagogique (cf. § 5.2).
Il est important de noter que le terme scénario revêt différents sens dans nos travaux. Il désigne
tout d’abord le scénario d’orchestration défini comme un arrangement de phases visant
l’acquisition ou l’amélioration de compétences et/ou de connaissances. Le scénario
d’orchestration présente notamment les activités, les acteurs impliqués, leurs rôles, les règles
organisant les différentes activités, les fonctions utilisées (ressources, outils et services) et, dans
le cas d’un dispositif LRPG, les ressorts de jeu mis en œuvre (cf. proposition présentée chapitre
10). Par défaut dans ce document, le terme scénario utilisé seul désigne le scénario
d’orchestration. Nous utilisons également la notion de scénario pour désigner le scénario narratif,
c’est-à-dire l’histoire dans laquelle est plongé le participant, soit au niveau d’une activité de jeu de
rôle spécifique soit sur l’ensemble du dispositif LRPG où le scénario narratif peut alors faire office
de fil conducteur entre les différentes activités (cf. Annexe XI - description du module 2 « Bien
conduire un entretien client »).
En complément des travaux de recherche sur la scénarisation pédagogique, notre démarche de
conception s’appuie également sur le processus métier mis en œuvre dans le secteur
professionnel de l’ingénierie pédagogique, et notamment celui de la société Symetrix pour la
conception de modules e-learning (cf. § 5.2.2) : ce processus a la particularité de mettre l’accent
sur la place primordiale du dialogue avec le client commanditaire.
Notre travail de définition d’un processus de conception structurant est par ailleurs alimenté par
les travaux étudiant l’activité de conception du point de vue des sciences cognitives (cf. § 5.1),
mettant notamment en avant l’aspect itératif des phases de définition du problème de conception
et d’élaboration d’une solution, l’importance de la gestion des contraintes et la place essentielle
des représentations externes de la solution en cours d’élaboration.
200
Les processus de game design abordés dans l’étude exploratoire (cf. § 5.5.1) ne font pas
apparaître de spécificité majeure pour la conception de jeux : du point de vue de son
organisation, la démarche de conception de jeux est similaire aux autres activités de conception.
Les travaux menés dans ce domaine nous sensibilisent une nouvelle fois au fait qu’il n’existe pas
de processus unique. Ils confirment également qu’il ne faut pas proposer de démarche de
conception trop rigide et prescriptive : il convient de proposer une démarche de conception qui
mette en avant les phases incontournables du processus tout en autorisant une certaine
flexibilité.
L’un des éléments communs à plusieurs approches de la conception étudiées, que ce soit dans
le domaine des sciences cognitives, dans celui de la scénarisation pédagogique ou dans les
processus de game design, est le principe de réutilisation de solutions (fonctionnement par
analogies, utilisation de modèles ou de patrons). Ce principe de réutilisation de scénarios, qui fait
par ailleurs l’objet de travaux sur l’assistance à la conception pédagogique (cf. § 6.4), est intégré
dans la démarche de conception que nous définissons.
Notre proposition d’une démarche de conception correspond à une première approche de
l’assistance au concepteur alimentée par les travaux abordés dans l’étude exploratoire (cf. §
chapitre 6). D’une part, par rapport à notre public cible, cette démarche vise plusieurs objectifs :
pour les concepteurs novices, cette démarche vise plus particulièrement à structurer
l’activité de conception et à favoriser une prise de conscience de cette structuration,
pour les concepteurs plus expérimentés, cette démarche fournit un cadre les aidant à être
exhaustif et à ne rien oublier,
pour l’ensemble des concepteurs ciblés, proposer une démarche de conception vise à
offrir un cadre commun de référence afin de favoriser le travail collectif et le dialogue
autour d’un même projet.
D’autre part, cette proposition vise à alimenter les spécifications des prototypes d’outils
d’assistance (phase 3) et à identifier leur place dans le processus de conception, guidant ainsi les
spécifications des fonctions qu’ils doivent proposer.
201
9.2. Démarche globale de conception : de la définition du projetà l’exécution
La démarche globale que nous proposons est organisée autour du cycle de vie d’un scénario
LRPG et fait apparaître cinq phases d’action clés (cf. figure 47) : la spécification de la demande
(définition du problème de conception et recueil des besoins) ; les activités de documentation ; la
conception du scénario (définition d’une esquisse, puis du scénario générique et enfin du
scénario contextualisé) ; l’exécution du scénario ; la capitalisation.
Figure 47 - Processus de conception de scénarios LRPG
1. Spécification de la demande : définition du projet et recueil des besoins
Cette étape correspond à la définition du projet avec le client commanditaire. Elle consiste, du
point de vue du concepteur, à définir le problème pour lequel il doit concevoir une solution, c’est-
à-dire un scénario LRPG répondant à la demande formulée par le commanditaire. Cette définition
passe par le recueil des besoins et des informations permettant d’identifier les contraintes
spécifiques du projet : contexte de l’entreprise, public cible, intentions et objectifs de formation,
contraintes organisationnelles éventuelles, etc.
L’identification des intentions du commanditaire, notamment concernant l’utilisation du jeu, passe
par un état des lieux des pratiques de formation existant au sein de l’entreprise à laquelle est
destiné le dispositif de formation.
C’est également à ce niveau que doivent être définis le contexte de connaissances et le contexte
situationnel ciblés selon le besoin de formation (cf. approches de conception pédagogique §
5.2.3), qui constituent des éléments-clés de la définition initiale du projet et font partie des
202
premiers éléments qui orientent les choix de conception relatifs aux différentes dimensions d’un
dispositif de formation hybride (cf. § 5.4.2).
2. Documentation
La documentation est une activité transversale qui désigne des moments au cours desquels le
concepteur a recours à des ressources existantes pour alimenter sa réflexion et soutenir son
travail de conception. Dans la démarche de conception proposée, il s’agit notamment de
s’appuyer sur des scénarios LRPG existants mis à disposition dans une bibliothèque dans le but
d’être réutilisés. Nous considérons cette démarche de réutilisation comme centrale dans nos
travaux car elle fait partie du processus de conception naturellement mis en œuvre par les
individus : même lorsqu’une telle bibliothèque de solutions réutilisables n’existe pas, l’individu
confronté à un problème de conception construit ses solutions par analogies avec des situations
déjà connues, il s’appuie sur des modèles de solutions personnels qu’il a en mémoire.
Dans le cas plus spécifique de la conception de scénarios LRPG, l’activité de documentation
consiste également à s’appuyer sur des informations plus particulièrement liées au jeu pour la
formation. Nous mettons ainsi à la disposition du concepteur un outil cognitif (cf. § 6.1) qui prend
la forme d’un « guide » présentant des informations sur l’utilisation des ressorts de jeu dans un
dispositif LRPG. Le contenu de ce guide est basé sur la proposition détaillée dans le chapitre 10.
3. Conception
La conception proprement dite du scénario LRPG, c’est-à-dire la définition d’une solution
répondant au problème de conception posé par le commanditaire, est constituée de deux
grandes phases :
d’une part, une phase de conception initiale portant sur un scénario abstrait et passant
par l’élaboration d’une esquisse du scénario avant d’arriver à l’élaboration d’un scénario
générique (cf. explications ci-après) ;
d’autre part, une phase de contextualisation du scénario où il s’agit d’affecter les
ressources et outils qui seront effectivement utilisés, d’attribuer les rôles définis dans le
scénario à des apprenants précis. Si cette phase n’est pas approfondie dans nos travaux,
l’approche de formalisation proposée dans le chapitre 11 est guidée par la volonté de
préparer cette contextualisation et d’envisager une automatisation du passage du
scénario générique au scénario contextualisé exécutable : cet aspect amène notamment
à réfléchir à la manière de guider la spécification des fonctionnalités utiles pour la mise en
œuvre du scénario (telles que les fonctionnalités de communication entre les participants,
les fonctionnalités de collaboration, l’affectation de rôles, etc., éléments déjà pris en
compte dans la grille de description à travers le point de vue pragmatique des fonctions
du LRPG, cf. § 8.2).
Nos travaux se sont intéressés de manière plus poussée à la phase de conception initiale des
scénarios LRPG. Cette phase est organisée selon un principe de stratification : nous considérons
203
la définition des différents constituants du scénario comme progressive et retenons plusieurs
niveaux de description des scénarios LRPG :
Le premier niveau de description vise à élaborer une esquisse indiquant les grands
principes du scénario en cours de création. L’esquisse sert de base à la discussion et à la
négociation autour des choix effectués et constitue un guide pour la suite du projet. Ce
niveau de description s’intéresse donc à préciser les informations essentielles à une
compréhension globale du scénario.
Le niveau de description suivant vise à définir un scénario générique de manière
détaillée et complète : il précise toutes les informations nécessaires au développement
éventuel des ressources, aux outils à mettre à disposition, et à l’exécution du scénario
par les apprenants et le tuteur (consignes, etc.). A ce niveau le scénario est générique
dans le sens où il n’est pas contextualisé à une session de formation spécifique et
n’intègre donc pas de manière concrète les informations relatives aux participants et
outils réels : les rôles ne sont pas affectés à des apprenants précis, la spécification des
outils désigne des classes d’outils (par exemple : un forum) et non des outils spécifiques
qui eux dépendent de l’environnement d’exécution du scénario. C’est à ce niveau, et non
au niveau de la création d’une esquisse, que nous positionnons la description des
ressources et outils. En effet, l’un des nos partis pris consiste à commencer par la
définition d’une solution s’affranchissant des contraintes techniques de mise en oeuvre
afin d’élargir le champ des possibles, de favoriser la créativité et de rendre les scénarios
ainsi construits réutilisables dans des contextes variés. Nous verrons dans les résultats
de la première expérimentation menée (cf. § 12.4) qu’il faut rester flexible sur ce point car
cette absence de contraintes peut s’avérer bloquante pour certains concepteurs.
4. Exécution
La phase d’exécution du scénario LRPG correspond à sa mise en œuvre au sein d’une session
de formation où les apprenants suivent les règles définies par le scénario, réalisent les activités,
endossent les rôles attribués. Les activités sont éventuellement encadrées par un tuteur qui, lui
aussi, agit selon le rôle qui lui a été assigné dans le scénario LRPG.
Au terme de l’exécution, la phase de retour d’expérience permet de mettre en évidence les points
positifs et négatifs du scénario, ce qui a bien fonctionné et ce qui a moins bien marché. Des
ajustements éventuels sont effectués sur le scénario en fonction des ces retours d’expérience
avant une nouvelle exécution ou avant capitalisation du scénario par indexation au sein d’une
bibliothèque.
5. Capitalisation
La phase de capitalisation consiste à indexer le scénario créé, de manière à ce qu’il puisse être
retrouvé ultérieurement pour servir de modèle à la conception d’un nouveau dispositif LRPG :
cela implique donc de recourir à un système d’indexation fonctionnel et partageable, de fournir
204
des informations synthétiques et pertinentes pour permettre l’appropriation du scénario par un
pair. Dans nos travaux, si la réutilisation et le partage des scénarios produits occupent une place
centrale, nous n’avons pas approfondi les méthodes d’indexation et d’annotation. A notre niveau,
pour répondre aux préoccupations de réutilisation et de partage, nous proposons une approche
de formalisation de scénarios visant à faciliter les échanges en faisant office de langage commun
partageable (cf. chapitre 11).
Dans la démarche de conception telle que nous la structurons, certaines étapes du processus de
conception diffèrent quelque peu de l’ordre défini dans le cycle de vie d’un scénario pédagogique
proposé par Pernin (2007) (cf. § 5.2.2). Les pratiques de scénarisation pédagogique observées
au sein de la société Symetrix nous invitent en effet à considérer que la contextualisation du
scénario a lieu après une première phase de développement technique, lui-même se
décomposant généralement en deux temps distincts : d’un côté le développement des
ressources médiatiques et des outils spécifiques éventuellement nécessaires dans le scénario,
d’une autre côté la configuration ou l’implémentation du scénario dans l’environnement
d’exécution (par exemple une plateforme LMS). Il est à noter que cette seconde étape n’est pas
présente dans le cas d’un scénario de formation destiné à une session présentielle.
205
Synthèse : spécificités de la démarche de conception ScenLRPG
Dans la démarche de conception proposée, nous considérons que l’étape de
définition du problème de conception est une étape primordiale préalable à la
phase de conception initiale. Nous admettons également qu’il existe un processus
itératif entre les phases de définition du problème et de conception initiale, celles-
ci s’alimentant mutuellement jusqu’à arriver à une vision claire du problème.
Dans notre démarche de conception de scénarios LRPG, l’étape de conception
initiale apparaît en elle-même comme un processus itératif au sein duquel les
représentations de la solution finale vont s’affiner progressivement. Le scénario
abstrait fait apparaître plusieurs niveaux de représentation : on distingue
notamment la description d’une esquisse de scénario qui constitue une première
représentation servant de base à une description de plus en plus fine du scénario,
jusqu’à aboutir à un scénario détaillé générique.
L’un des aspects importants de notre approche concerne le soutien au dialogue
entre le concepteur et le client commanditaire. Ce dialogue intervient dans
chacune des phases-clés du processus d’élaboration d’un scénario LRPG,
notamment dans les phases itératives de définition du problème / élaboration
d’une solution. L’objectif est d’avoir le plus tôt possible une vision la plus claire
possible des attentes afin d’éviter de perdre du temps avec de trop nombreuses
boucles d’itération.
La démarche de conception proposée permet une adaptation des scénarios à
différentes étapes du processus :
soit des adaptations du scénario interviennent directement après sonexécution, en fonction des retours d’usage, et le scénario modifié estensuite stocké dans une bibliothèque pour être réutilisé ultérieurement ;
soit des adaptations sont effectuées dès la phase de conception initialesur un scénario issu de la bibliothèque, afin de l’ajuster au contexte dunouveau problème de conception.
Nos travaux se focalisent plus particulièrement sur l’activité de conception au
niveau esquisse et fournissent des éléments pour alimenter la phase de
documentation (cf. figure 47). Même si elles n’ont pas été soumises à des
expérimentations, les autres phases, particulièrement la phase de recueil de
besoins et de définition du projet, ainsi que les étapes de conception détaillée, ont
fait l’objet d’une réflexion et d’une spécification en vue de leur implémentation
dans un prototype informatique d’environnement d’assistance.
206
Chapitre 10. PHASE 2 - PROPOSITION 2 : CENTRER LAREFLEXION SUR LES RESSORTS DE JEU
Après la définition d’une démarche globale de conception, cette seconde proposition s’intéresse
plus particulièrement à assister l’intégration du jeu dans les scénarios LRPG. Nous proposons ici
une approche qui centre la réflexion sur les ressorts de jeu pouvant être mis en œuvre pour
susciter la motivation des participants.
10.1. Principes directeursL’une des spécificités de la conception de scénarios LRPG porte sur la façon d’y mettre en
œuvre le jeu. Cet aspect peut être source de difficultés pour des concepteurs pédagogiques non
spécialistes du jeu et de son utilisation dans la formation.
Comme nous l’avons vu à travers l’étude de différentes définitions, il est difficile de cerner au
premier abord ce qu’est le jeu (cf. § 2.1). Le jeu peut en effet désigner un objet, un ensemble de
règles, une activité ou encore une attitude. De plus, son utilisation dans un contexte de formation
peut se justifier de différentes manières : amélioration de l’apprentissage (même si cet effet n’est
pas formellement prouvé) ? Accroissement de la motivation ? Mise en situation à travers des
simulations ? Selon les objectifs visés par l’utilisation du jeu et le contexte de formation dans
lequel il est intégré, nous observons également que les dispositifs associant jeu et formation
peuvent se présenter sous des formes variées (cf. § 3.4).
A partir de ces constats, nous avons été amenés à définir une approche visant à orienter les
concepteurs dans cet univers aux multiples possibilités.
S’il est difficile d’avoir de réelles preuves des effets bénéfiques du jeu sur l’apprentissage, parmi
les différentes raisons qui expliquent le recours au jeu pour la formation, outre la possibilité qu’il
offre de simuler des situations réelles, nous retenons principalement sa capacité à engager et à
motiver les participants. Même si cette motivation n’est pas directement associée aux objectifs
d’apprentissage, elle est intéressante à obtenir car elle permet de créer un climat favorable à
l’apprentissage (cf. chapitre 4) : c’est le parti pris que nous adoptons en cherchant à tirer profit
des « ressorts de jeu » suscitant l’engagement dans l’activité. Nous nous inscrivons ainsi dans
une démarche proche de la gamification (cf. § 4.5.4).
Nous manquons de retours d’expérience pour mettre en place un guidage du choix de ressorts
de jeu en fonction des caractéristiques de la situation de formation (compétences visées, public,
etc.). A ce stade, notre approche consiste donc à soutenir l’auto-réflexion des concepteurs : nous
nous appuyons sur leur capacité à analyser leur terrain d’application pour choisir les ressorts les
plus adaptés et les mettre en œuvre de façon appropriée. Il revient aux concepteurs d’ajuster
leurs choix pour que les aspects jeu n’interfèrent pas avec les aspects pédagogiques (cf. § 5.5.2).
Dans cette perspective, nous cherchons à apporter une aide au concepteur à plusieurs niveaux :
207
En assistant la formalisation des informations collectées dans la phase de recueil des
besoins et de définition du problème de conception. Il s’agit par exemple de préciser les
objectifs et intentions du projet de formation, d’identifier les caractéristiques du public
cible en terme de rapport au jeu notamment et les recommandations de l’entreprise par
rapport à l’utilisation du jeu (cf. détails dans l’approche de formalisation présentée §
11.2).
Dans la phase de conception à proprement parler :
o en fournissant un guide sur les ressorts de jeu et en amenant le concepteur à
formuler les ressorts de jeu sur lesquels il souhaite s’appuyer et la façon dont il
envisage de les mettre en œuvre ;
o en mettant à disposition une bibliothèque de scénarios réutilisables ;
o en invitant le concepteur, que ce soit à travers le guide sur les ressorts de jeu ou
les exemples fournis, à envisager des modalités innovantes d’opérationnalisation
des activités (par exemple le recours à la visio-conférence pour les jeux de
communication).
A ce stade de nos travaux, nous ne nous soucions pas des précautions que le concepteur devrait
associer à ces choix, que ce soit en termes de contraintes techniques ou éthiques (par exemple :
garantir aux apprenants le non usage des captures vidéo à des fins d’évaluation).
La conception des dispositifs LRPG soulève par ailleurs des questions de coûts et temps de
conception et de développement, d’évolutivité des contenus, d’adaptabilité et de réutilisabilité des
scénarios (cf. § 1.1) que notre approche du jeu cherche à prendre en compte.
10.2. Identification de ressorts de jeu, facteurs de motivationPour répondre à l’interrogation portant sur ce qui pousse un individu à s’engager dans une
activité, nous proposons au concepteur de s’appuyer sur un ensemble de critères élaborés à
partir d’une étude de l’état de l’art (cf. § 4.5) mise en perspective avec les caractéristiques des
scénarios LRPG (présentées dans le chapitre 8).
Au final, sept ressorts ont été retenus : la compétition, le jeu de rôle, le hasard et la perte de
contrôle, principalement issus des quatre critères définis par Caillois (1958) (cf. § 10.2.2),
auxquels ont été ajoutés, au regard des spécificités de notre contexte d’application, la
reconnaissance, l’activité collective et le défi individuel (cf. § 10.2.3). Le tableau 10 présente les
liens qui peuvent être établis entre les principes issus des différents travaux étudiés : il expose
ainsi la façon dont sont alimentées la définition de notre liste de ressorts et l’identification de
propriétés de mise en œuvre que nous y associons (cf. § 10.2.1).
208
ScenLRPG : ressortsde jeu et motivation
Caillois(1958)
Kiili (2005) Malone & Lepper(1987)
Kim (2009) Priebatsch(2010)
Charles et al.(2009a)
Etre en compétition Agôn -Compétition
Niveau dechallengeadapté auxcompétencesdu joueur*
Compétition Collection* Progressiondynamique*
Défi : obstacles*
Relever un défiindividuel
Buts du jeuclairementdéfinis*
Curiosité Points àaccumuler,niveaux à gravir*
Objectifs clairset ciblés*Défi individuel
Jouer un rôle (plusglobalement fiction etnarration)
Mimicry -Jeu de rôle
Structurenarrativehomogène
Fantasy Identité et rôles
Se livrer au hasard Alea -Hasard
Perdre le contrôle Ilinx -Vertige
Agir collectivement Coopération Echanges entreles participants
Découvertecollective
Collaboration
Etre reconnu Rétroactionsclaires etimmédiates
Contrôle Rétroactionsfournies au joueursur son activité
Statut quichange enfonction desactions dujoueur
Feedbacksréguliers
Contrôle Reconnaissance Personnalisationdel’environnement
Reconnaissancedes progrèsJouabilité
Tableau 10 - Synthèse des travaux sur les ressorts de jeu(Les éléments suivis d’un * sont communs à la compétition et au défi individuel)
10.2.1. Des éléments de mise en œuvre associés aux ressorts de jeu
Pour chacun des ressorts retenus, des propriétés pour guider la mise en œuvre ont été
identifiées (détaillées dans le tableau 11 et le tableau 12 et dans les sections 10.2.2 et 10.2.3) :
elles constituent une liste non exhaustive de choix possibles visant à orienter la réflexion du
concepteur lors de l’élaboration d’un scénario LRPG. Certaines de ces propriétés sont plus
spécifiquement liées à la mise en œuvre du dispositif LRPG dans un environnement numérique
tels que le degré d’immersion proposé par l’environnement, critère associé au ressort « jouer un
rôle ».
Ces propriétés de mise en œuvre des ressorts ont été définies à la fois d’après des travaux sur
l’apprentissage et l’étude de pratiques existantes d’utilisation du jeu dans la formation. Elles
reprennent ainsi :
des caractéristiques des situations d’apprentissage collectif pour le ressort « agir
collectivement » (cf. § 5.3) ;
des caractéristiques du jeu de rôle et des jeux de simulation pour les aspects liés aux
rôles et au scénario narratif du ressort « jouer un rôle », et notamment la proximité avec
le contexte réel (cf. § 3.4.2 et 3.4.3).
Les travaux étudiés dans le but d’identifier les caractéristiques motivantes d’un jeu (cf. § 4.5)
alimentent également la réflexion sur la mise en œuvre et le choix de ressorts de jeu (cf. tableau
10) : Kiili (2005) oriente vers les conditions propices à engendrer un état de flow ; Malone et
Lepper (1987) identifient des propriétés en lien avec la théorie de l’autodétermination ; Kim
(2009) et Priebatsch (2010), qui s’inscrivent dans le courant de la gamification, mettent en
209
évidence des mécaniques de jeu1 pour fidéliser et engager les participants ; Charles et al.
(2009a) soulignent les points communs entre une activité d’apprentissage motivante et un jeu.
Les propriétés de mise en œuvre ainsi identifiées et associées à chaque ressort de jeu visent à
affiner la conception d’un scénario LRPG et à favoriser l’identification des fonctionnalités
nécessaires lors de l’exécution du scénario.
10.2.2. Les quatre ressorts de jeux issus des travaux de Caillois
Parmi les travaux étudiés, ceux de Caillois (1958) constituent le point de départ de notre étude et
le socle de la liste de ressorts élaborée. Ces travaux mettent en avant les caractéristiques
fondamentales qui poussent le joueur à s’engager dans un jeu et le positionnent ainsi dans une
attitude spécifique (cf. explications détaillées § 4.5.1) :
agôn pour la compétition ;
mimicry pour les activités où les joueurs endossent des rôles ;
alea pour les situations où le joueur se livre au hasard ;
ilinx pour la poursuite du vertige, la recherche de la perte de contrôle.
Dans nos travaux, agôn, mimicry, alea et ilinx ont été spécialisés à notre contexte d’application et
renommés pour être davantage explicites auprès des concepteurs pédagogiques qui constituent
notre public cible. Ces quatre premiers ressorts de jeu et les propriétés de mise en œuvre que
nous y associons sont détaillés dans le tableau 11.
« Etre en compétition »
Ce ressort correspond aux caractéristiques de l’âgon. Sa mise en œuvre est caractérisée par
deux principaux critères : d’une part les modalités de la compétition (a-t-elle lieu entre individus
ou entre équipes ?), d’autre part le type de victoire (la victoire correspond-elle à
l’accomplissement d’une mission ou à un classement des participants selon un score obtenu ou
la constitution d’une collection d’objets ? etc.) La collection d’éléments (amis sur le réseau social
Facebook, objets d’équipement pour les personnages dans le jeu en ligne massivement multi-
joueur World of Warcraft, etc.) et le gain de points attribués par le système « game points » ou
par d’autres utilisateurs « social points », sont considérés comme des mécanismes de
compétition dans le sens où ils incitent les utilisateurs à faire mieux que leurs pairs (avoir le plus
grand nombre d’amis ; posséder le meilleur équipement ; être le mieux noté, etc.) ou à se
comparer aux autres pour donner le meilleur d’eux-mêmes.
1 Sens correspondant ici à celui utilisé dans le domaine de la gamification : “Game Mechanics are constructs of rules andfeedback loops intended to produce enjoyable gameplay. They are the building blocks that can be applied and combined togamify any non-game context.” Source : http://gamification.org/wiki/Game_Mechanics
210
La compétition s’avère être un ressort à manier avec précaution : même si elle est utilisée de
manière fréquente dans les formations basées sur le jeu, la compétition n’est pas obligatoirement
adaptée à tous les objectifs de formation, profils de collaborateurs ou cultures d’entreprise.
« Jouer un rôle »
Ce ressort correspond au mimicry, défini initialement comme le fait de jouer un rôle, concept que
nous élargissons ici aux aspects liés à la présence de fiction et à la narration. Les propriétés liées
à la mise en œuvre de ce ressort sont réparties en trois ensembles :
les propriétés relatives aux rôles joués par les participants (proximité du rôle joué avec le
rôle professionnel réel ; pouvoirs spéciaux associés aux rôles ; modalités de choix des
rôles ; permanence des rôles) ;
les propriétés s’appliquant au scénario narratif (proximité du scénario narratif avec le
contexte professionnel vs. transposition dans un contexte éloigné ; degré de fiction du
scénario narratif) ;
les propriétés concernant l’environnement d’opérationnalisation (degré d’immersivité).
« Se livrer au hasard »
Ce ressort désigne pour nous l’alea. Les propriétés de mise en œuvre de ce ressort concernent
d’une part les effets escomptés de l’intervention du hasard (sont-ils facilitateurs, contrariants ou
simplement déstabilisants pour le participant ?), et d’autre part la portée de l’évènement aléatoire
(l’évènement s’applique-t-il à l’ensemble des participants, à un groupe de participants ou à un
individu spécifique ?).
« Perdre le contrôle »
Ce ressort est assimilé à l’ilinx. Le ressort ilinx désignant initialement la recherche du vertige et
« qui consiste en une tentative de détruire pour un instant la stabilité de la perception et d’infliger
à la conscience lucide une sorte de panique voluptueuse » (Caillois 1958) est ici reformulé pour
correspondre au contexte des jeux pour la formation. Il est rapproché des jeux de formation
fondés sur la perte de contrôle, la gestion de crise ou de catastrophe, qui font vivre aux
participants une situation de panique avec perte des repères usuels, tout en les inscrivant dans
une situation simulée et donc sans risque. Les propriétés de mise en œuvre du ressort « perte de
contrôle » concernent essentiellement le degré de gravité de la situation dans laquelle le
participant est plongé (s’agit-il d’une crise mineure pour laquelle il existe des procédures de
gestion ? ou bien s’agit-il d’une crise majeure pour laquelle il n’existe aucune procédure
usuelle ?).
RESSORTS DE JEU
RESSORTS POUR LE CONCEPTEUR IL S’AGIT DE …
CRITERES PROPRIETES DE MISE EN ŒUVRE
Etre en compétition
Soi vs. les autres
Définir un but commun àatteindre par tous les participantset les modalités de la victoire
Modalités de la compétition La compétition est : entre équipes entre individus
Type de victoire La victoire repose sur : un classement des participants (points gagnés, élémentscollectionnés)
la réussite d’une épreuve, d’une mission
Jouer un rôle
Ou plus largementnarration/fantasy (imagination)
Soi vers autre soi, soi dansautre univers
Définir un scénario narratifimmersif dans lequel inscrire lescénario pédagogique
Proximité du scénarionarratif avec le contexteprofessionnel
Le scénario narratif est : proche du contexte professionnel réel transposé dans un contexte différent du contexte
professionnel réelDegré de fiction du scénarionarratif
Le scénario narratif est : réaliste ou fictionnel
Proposer aux participants desrôles à jouer
Proximité avec le rôle réel Le participant joue un rôle : identique à son rôle professionnel réel différent de son rôle professionnel réel
Pouvoirs spéciaux associésà un rôle
Les rôles : ont tous des pouvoirs similaires offrent parfois des pouvoirs spécifiques (ex. un espion peut
accéder à des informations sans être vu)Choix des rôles Les rôles sont : choisis librement
imposésPermanence des rôles Le rôle joué par un
participant : est le même sur l’intégralité du scénario change au cours du scénario
Choisir un environnementd’opérationnalisation adapté auniveau d’immersivité souhaité
Degré immersif del’environnement d’exécution
Le scénario LRPG est mis enœuvre :
dans un environnement neutre (ex : plateforme LMS, sallede classe, etc.) dans un environnement avec des éléments graphiques et
une structuration inspirés du scénario narratif (ex : plateformeLMS au design adaptable) dans un environnement simulant le contexte du scénario
narratif (ex : univers virtuel, simulation pleine échelle, etc.)Se livrer au hasard
Fortune, infortune,déstabilisation
Action du monde sur soi
Définir des situations laissantune place au hasard, à l’imprévu
Effet de l’intervention duhasard
L’intervention du hasard a uneffet :
facilitateur contrariant déstabilisant
Sujet auquel s’appliquentles effets
Les effets du hasards’appliquent à :
un participant spécifique un groupe tous les participants
Perdre ses repères
Action du monde sursoi
Définir des situations de crisepour faire perdre aux participantsleurs repères habituels et lesdéstabiliser
Qualification de la situationde crise
Le participant est confrontéà :
une crise mineure (existence de procédure(s) de gestion decrise)
une crise majeure (on est hors des procédures usuelles)
Tableau 11 - ScenLRPG : ressorts de jeu (1/2)
211
RESSORTS POUR LE CONCEPTEUR IL S’AGIT DE …
CRITERES PROPRIETES DE MISE EN ŒUVRE
Agir collectivement
Soi avecautrui
Proposer des activités degroupes, faire interagir lesparticipants
Type de l’activité collective Les activités sont : collaboratives coopératives
Modalités La collaboration oucoopération a lieu :
au sein d’un groupe entre plusieurs groupes entre tous les participants
Etre reconnu
Autrui vers soi
Mettre en place des conditionspour valoriser et faire partager lesactivités de chacun, montrer auxparticipants que leurs actions ontun effet et sont prises en compte,permettre une personnalisationdu personnage et/ou del'environnement
Type de partage d’informations La reconnaissance se fait àtravers le partage :
des productions des participants des résultats des participants (scores, notes)
Personnalisation Les participants ont lapossibilité de personnaliser :
leur environnement de jeu leur personnage
Rétroactions/Notifications Le scénario prévoit : des rétroactions sur les activités des notifications sur l’évolution de l’environnement (ex.
activités des autres participants)
Relever un défiindividuelSoi vs. soiSoi vs. lesystème
Proposer un challenge individuelaux participants en définissant unobjectif personnel à atteindreavec un niveau de difficultéadapté
Modalités de la victoire La victoire repose sur : une amélioration de ses propres performances (scoreobtenu, quantité d’éléments collectionnés, etc.)
la réussite d’une épreuve, d’une mission
Tableau 12 - ScenLRPG : ressorts de jeu (2/2)
212
213
10.2.3. Les autres ressorts de motivation proposés
La classification de Caillois s’avère robuste et constitue une base solide pour notre travail mais
elle ne prend en compte les spécificités des situations de jeu qui nous intéressent. Pour notre
contexte d’application, hormis les adaptations présentées plus haut (renommage des catégories,
reformulation du ressort illinx, ajout de propriétés de mise en œuvre), nous avons enrichi cette
classification de ressorts supplémentaires, résultant de la synthèse de travaux récents sur la
motivation et plus particulièrement sur l’engagement par le jeu évoqués précédemment (cf.
chapitre 4 et § 10.2.2) : cette synthèse est présentée dans le tableau 12.
« Etre reconnu »
Malone et Lepper (1987) mettent en évidence la reconnaissance comme l’un des ressorts de
motivation caractéristiques des jeux vidéo. Le concept de reconnaissance désigne le fait pour un
participant d’« être reconnu » pour ses activités. La mise en œuvre de ce principe consiste
notamment à rendre visible aux autres les résultats des activités des utilisateurs : cela se traduit
concrètement soit par l’affichage d’un classement suite aux performances réalisées au cours
d’une activité, soit par le partage des résultats obtenus ou des productions réalisées par les
participants. Les mécanismes de rétroaction, correspondant aux notifications du système sur les
changements qui ont lieu dans le dispositif, aux évaluations, aux commentaires, aux annotations
des pairs sur les actions ou productions des participants (Kim 2009, Charles et al. 2009) sont un
autre moyen de mettre en œuvre cette reconnaissance. Les possibilités de personnalisation de
l’environnement d’exécution ou des personnages incarnés sont également un moyen d’agir sur le
sentiment de reconnaissance (Kim 2009).
Certains mécanismes relatifs au facteur d’identité (Charles et al. 2009) peuvent également
favoriser la reconnaissance : même si nous les associons prioritairement aux ressorts « jouer un
rôle » et « agir collectivement », le fait de confier au joueur un rôle clairement défini et visible par
tous ou de proposer des modalités de travail en groupe concourent également à générer un
sentiment de reconnaissance chez les participants.
« Agir collectivement »
La possibilité d’agir collectivement, qui constitue une caractéristique fondamentale des dispositifs
LRPG, est également fréquemment identifiée comme un ressort de motivation : qu’il s’agisse de
collaboration ou coopération, le fait de participer à une activité de groupe s’avère être une source
de motivation interpersonnelle au même titre que la compétition (Malone et Lepper 1987). Dans
les travaux sur la gamification, cet aspect social de l’activité est perçu comme facteur
d’implication des participants : les échanges avec les autres utilisateurs (Kim 2009) constituent
214
par exemple le cœur des réseaux sociaux tels que Facebook1 et plus globalement des
communautés en ligne (généralement organisées autour de forums de discussion).
La collaboration et la coopération apparaissent ainsi comme des ressorts intéressants à exploiter,
et ils sont particulièrement adaptés au contexte de la formation professionnelle où les enjeux de
professionnalisation visent notamment à forger un esprit d’équipe entre les collaborateurs.
« Relever un défi individuel »
Le ressort « relever un défi individuel » apparaît comme une source de motivation dans
beaucoup d’activités solitaires. Même s’il ne fait pas partie des quatre caractéristiques
fondamentales qu’il a définies, on trouve cet aspect des jeux décrit dans les travaux de Caillois à
travers la notion de ludus :
« dans le ludus, la tension et le talent du joueur s’exercent en dehors de tout sentimentexplicite d’émulation ou de rivalité : on lutte contre l’obstacle et non contre un ou plusieursconcurrents » (Caillois 1958).
Même si les activités de type ludus ne mettent pas en scène d’autres compétiteurs, elles
s’avèrent étroitement associées à l’âgon dans la mesure par exemple où ces activités à l’origine
individuelles, telles que les mots-croisés, peuvent faire l’objet de compétitions ou de concours.
On peut également considérer le défi personnel comme une compétition entre le joueur et lui-
même : le but est d’améliorer ses propres performances.
La notion de défi apparaît également dans les travaux sur la motivation (cf. chapitre 4) : c’est
l’une des conditions identifiées par Viau (1998) et Charles et al. (2009) pour qu’une activité
d’apprentissage suscite la motivation des apprenants ; c’est également l’une des motivations
individuelles identifiées par Malone & Lepper (1987) comme caractéristique des jeux vidéo. Le
défi individuel constitue par ailleurs une caractéristique du flow dont un aspect fondamental est
de proposer un niveau de difficulté adapté aux compétences du participant afin de maintenir son
engagement (Csíkszentmihályi 1990, Kiili 2005).
1 https://www.facebook.com/
215
Synthèse : centrer la réflexion sur les ressorts de jeu
Notre orientation vers l’utilisation du jeu pour la formation est basée sur ses effets
bénéfiques sur la motivation. C’est pourquoi nous avons cherché à identifier des
propriétés applicables aux scénarios LRPG pour favoriser la motivation : pour cela
nous nous sommes appuyés sur les travaux s’intéressant à la motivation et plus
spécifiquement à ceux mettant en évidence les caractéristiques des jeux favorisant
la motivation. Nous retenons une liste de sept ressorts : « Etre en compétition »,
« Jouer un rôle », « Se livrer au hasard », « Perdre le contrôle », « Etre reconnu »,
« Agir collectivement » et « Relever un défi individuel ».
Afin de guider les concepteurs dans l’utilisation du jeu pour la conception de
dispositifs LRPG, nous avons pris le parti de nous orienter vers une approche
visant à favoriser l’auto-réflexion sur les possibilités offertes dans ce contexte.
C’est pourquoi les ressorts de jeu retenus, associés à des éléments possibles de
mise en œuvre, sont présentés dans un document constituant un outil cognitif de
soutien pour les concepteurs (cf. phase de documentation de la démarche de
conception proposée, § 9.2).
216
Chapitre 11. PHASE 2 – PROPOSITION 3 : STRUCTURER ETGUIDER L’EXPRESSION DES SCENARIOS
Dans le cadre d’une approche de conception basée sur la notion de scénarisation, notre
troisième proposition vise à offrir un langage de formalisation et un système de notation visuel
afin de structurer et guider l’expression des scénarios LRPG : la dénomination ScenLRPG,
signifiant « scénarisation de Learning Role-Playing Games » est utilisée pour qualifier ces
propositions.
11.1. Origines de cette proposition et principes directeurs
11.1.1. Principes directeurs du langage de formalisation ScenLRPG
Pour structurer et guider l’expression des scénarios LRPG nous avons tout d’abord élaboré un
langage de formalisation (cf. § 6.5.1), c’est-à-dire un ensemble de principes visant à structurer et
homogénéiser la description des scénarios LRPG par les concepteurs pédagogiques. Ce langage
est ensuite exprimé à l’aide d’un système de notation visuel, c’est-à-dire un ensemble de signes
visant à traduire sous forme graphique le langage proposé afin de fournir une représentation
visuelle du scénario que le concepteur souhaite décrire.
L’élaboration de cette proposition s’est tout d’abord appuyée sur la grille de description de
dispositifs LRPG présentée précédemment (cf. § 8.2). La section 11.4 présente la manière dont
les éléments issus de cette grille alimentent l’approche de formalisation ScenLRPG détaillée ici.
La réflexion autour de la définition d’une approche de formalisation des scénarios LRPG est
également alimentée par :
des principes issus des différentes approches de conception pédagogique étudiées (cf.
synthèse § 5.2.3) ;
la mise en relation des langages de formalisation et systèmes de notation visuels étudiés
dans la phase exploratoire (cf. § 6.5.3) avec les besoins liés à notre contexte
d’application.
Plusieurs principes ont ainsi été retenus pour orienter la définition du langage de formalisation
ScenLRPG :
proposer un langage à la fois réflexif et communicatif dans le but, d’une part, d’assister la
réflexion personnelle du concepteur et, d’autre part, de faciliter le dialogue avec les
autres participants du projet de conception ;
217
proposer un langage favorisant la créativité en offrant notamment un premier niveau de
formalisation peu détaillé et en définissant un système de notation reposant des concepts
aisément appropriables et non ambigus ;
définir des propriétés descriptives conformes aux particularités et besoins des scénarios
LRPG, permettant notamment d’exprimer les ressorts de jeu et les propriétés nécessaires
à la spécification d’activités collectives ;
proposer un langage et un système de notation visuel correspondant à la nature stratifiée
de la description des scénarios LRPG ;
définir un système de notation visuel à la lecture intuitive afin de faciliter la
compréhension de scénarios LRPG, notamment lorsqu’ils ont été conçus par des pairs.
Le langage de formalisation que nous proposons doit également s’articuler avec des pratiques de
terrain dans le domaine de la conception pédagogique pour la formation professionnelle : dans
cette perspective, il s’agit notamment de prendre en compte les besoins relatifs à la spécification
initiale d’un projet et au recueil des besoins auprès d’un client commanditaire.
Notre langage de formalisation vise à être aisément appropriable par les différents acteurs
concernés. Il est plus spécifiquement conçu pour les scénarios LRPG mais se veut suffisamment
générique pour décrire des scénarios de formation plus « classiques », c’est-à-dire ne faisant pas
appel à des situations collectives ou à des jeux. En effet, l’un des principes de notre approche de
la conception de scénarios LRPG est de pouvoir s’appuyer sur des scénarios de formation
traditionnels et d’y introduire des ressorts de jeu, d’articuler des activités de formation
« classiques » et des activités de jeu.
Nous nous sommes plus particulièrement intéressés à la conception d’un scénario au stade de
l’esquisse, où notre approche se centre sur l’activité des apprenants, et incite à ce stade à
s’abstraire des modalités de mise en œuvre (présentiel ou distance) ainsi que des outils.
Le langage de formalisation ScenLRPG est structuré en deux grandes parties (cf. figure 48),
correspondant aux deux premières étapes de la démarche de conception de scénarios LRPG :
d’une part la définition générale du problème et le recueil de besoins,
d’autre part la conception initiale du scénario.
Sur la figure 48, le triangle indique que la conception devient de plus en plus précise : de
l’élaboration d’une esquisse jusqu’à la définition du scénario générique.
218
Figure 48 - Structuration de l'approche de formalisation ScenLRPG
11.2. Formaliser la définition du problème de conceptionNotre approche de formalisation s’intéresse dans une première partie à définir précisément le
problème de conception auquel le concepteur doit répondre, et à guider le recueil des besoins
associés.
Le recueil de besoins s’organise autour de quatre grandes facettes. Pour chacune d’elles, les
informations à collecter concernent d’une part une description du contexte et d’autre part la
formulation d’intentions et d’objectifs. Les intentions (cf. approche de conception pédagogique
orientée intentions § 5.2.3) constituent des orientations générales concernant le dispositif de
formation et, de façon plus spécifique, des orientations sur l’utilisation des ressorts de jeu. Au
niveau des connaissances et compétences ciblées par le dispositif de formation, les objectifs
pédagogiques formulés matérialisent de façon plus concrète les intentions.
Lors de la définition d’un projet LRPG, l’un des enjeux de la discussion avec le client
commanditaire du projet consiste à identifier l’opinion de l’entreprise et du public cible concernant
l’utilisation du jeu dans un dispositif de formation (cf. 0 pour une description plus détaillée de
cette formalisation). Il s’agit alors d’identifier :
la position de l’entreprise et de la hiérarchie vis-à-vis de l’utilisation du jeu dans un
contexte de formation professionnelle : l’entreprise est-elle plutôt réfractaire, enthousiaste
ou convaincue vis-à-vis de cette démarche ?
les retours d’expérience sur des utilisations préalables du jeu pour la formation, tant au
niveau de l’entreprise qu’au niveau du public cible : expériences passées positives ou
négatives ? problèmes éventuellement rencontrés ?
les profils du public cible par rapport au jeu de manière générale : les apprenants sont-ils
plutôt « joueurs » ou non ?
219
les ressorts de jeu envisagés ou envisageables par rapport aux informations définies
précédemment.
L’objectif est ici de s’assurer que le dispositif LRPG, et en particulier les aspects relatifs au jeu,
seront adaptés au contexte afin de garantir un accueil le plus favorable possible et une adhésion
des différents membres du projet (commanditaires et apprenants), dans le but final d’obtenir un
maximum de réussite du nouveau dispositif.
Les informations formalisées dans cette partie destinée à la spécification des besoins ne
constituent pas un inventaire exhaustif à renseigner obligatoirement. Certaines d’entre elles ne
peuvent d’ailleurs parfois pas être spécifiées à ce stade du processus de conception et seront
affinées lors des premières phases de conception du scénario LRPG, notamment lors de
l’élaboration d’une esquisse : ceci respecte le caractère itératif de la démarche de conception.
Une liste synthétique des items proposés dans chacune des facettes est présentée dans
l’Annexe IV. Cet aspect de la formalisation ScenLRPG destiné à accompagner la définition du
projet et le recueil de besoins n’a pas fait l’objet d’une étude approfondie dans nos travaux et
n’est pas traité dans les expérimentations menées.
11.3. Formaliser la conception initiale du scénario LRPG
11.3.1. Une métaphore pour structurer la description des scénarios
L’un des principes directeurs du langage de formalisation ScenLRPG repose sur l’utilisation d’une
métaphore qui organise l’ensemble des critères et principes de description retenus, et qui guide
la définition du système de notation visuel des scénarios LRPG. Cette métaphore vise à fournir
une vision plus claire de la structure des scénarios et de l’articulation des différentes propriétés
descriptives (cf. § 6.1 et 6.5.1).
La métaphore choisie assimile un scénario LRPG à la description d’un parcours au sein d’un
centre culturel scientifique. Le concepteur pédagogique prend ainsi le rôle d’un muséologue
ayant en charge la préparation d’une exposition fondée sur un parcours d’activités : il lui faut
définir les thématiques abordées, les activités proposées aux visiteurs, l’organisation des
différents espaces composant l’exposition et le ou les parcours que les visiteurs pourront
effectuer au sein de l’exposition. Nous ne sommes pas là dans une logique de représentation
spatiale de type plan d’architecte, mais bien sur une logique de parcours où l’on s’intéresse à la
spécification de l’enchaînement des activités grâce à des opérateurs d’algorithme habituels
(enchaînement séquentiel, boucles d’itération, branchements conditionnels, etc.).
La métaphore du centre culturel scientifique a été plus particulièrement choisie pour les raisons
suivantes :
220
Elle possède une capacité à centrer la réflexion du concepteur sur les activités et
interactions entre les participants en les exprimant et les organisant à l’aide de lieux
correspondant à différents espaces du centre culturel. Chaque lieu est associé à une
fonction-type de la typologie ScenLRPG (cf. typologie détaillée dans la suite de ce
chapitre, § 11.3.4). La métaphore définit par exemple les associations suivantes : des
activités de consultation de documents se déroulent dans une bibliothèque ; les échanges
entre les visiteurs sont menés dans une salle de débat ; une salle de spectacle est
disponible pour jouer une scène ; des ateliers de production/création sont utilisés pour les
activités de production individuelles ou en groupes ; des points de constitution des
groupes visent à répartir les visiteurs dans différents groupes auxquels, par la suite,
différentes activités ou différents parcours de visite seront proposés ; un vestiaire est le
lieu où les visiteurs endossent un rôle spécifique avant de jouer une scène.
La métaphore autorise également une description stratifiée, c’est-à-dire différents niveaux
de détails correspondant à notre approche de description d’un scénario LRPG. La
description détaillée des espaces d’activité du parcours consiste par exemple à indiquer
quel « équipement » (outils et ressources) y est mis à disposition.
La métaphore utilisée, en ce qu’elle repose sur des références communément partagées
(i.e. les principes d’une visite dans un centre culturel scientifique), vise à faciliter
l’appropriation et la compréhension du langage visuel ainsi qu’à offrir une représentation
visuelle intuitive et explicite.
Outre ces intérêts pour les concepteurs pédagogiques, utilisateurs cibles de l’approche de
formalisation ScenLRPG, la métaphore s’est également avérée utile pour notre propre travail :
elle a guidé la définition et la structuration des critères destinés à décrire les scénarios LRPG.
11.3.2. Structuration de la description d’un scénario LRPG
L’approche de formalisation ScenLRPG est organisée selon plusieurs niveaux de description des
scénarios. Un premier niveau de description présente l’esquisse du scénario LRPG. Il se focalise
principalement sur l’orchestration des composants du scénario et la spécification de propriétés
essentielles à un premier degré de compréhension (cela correspond essentiellement aux
éléments retenus pour le point de vue syntaxique défini dans la grille de description initiale cf. §
8.2.1). C’est ce niveau de description que nous avons plus particulièrement approfondi dans nos
travaux et dans les expérimentations mises en œuvre.
Nous avons également défini des propriétés constituant un niveau de description plus détaillé. Ce
second niveau de description vise à préciser des informations relatives à la description du
scénario générique en vue de sa contextualisation et de son implémentation ultérieures.
Certaines informations renseignées à ce niveau visent par ailleurs à faciliter l’appropriation et la
réutilisation du scénario LRPG par un autre concepteur.
221
11.3.3. Composants de base d’un scénario LRPG
Dans le langage de formalisation ScenLRPG, un scénario est composé d’espaces d’activité
pouvant être regroupés au sein de salles (cf. figure 49). Les salles regroupent des espaces
d’activité poursuivant un but commun, liés à une même thématique ou appartenant à une même
phase du scénario. Par exemple, dans le scénario « Bien conduire un entretien client » (présenté
de manière détaillée § 12.2.3 et figure 52) : une salle intitulée « Simulations : entretien client »
regroupe des espaces d’activité qui en lien avec cette phase du parcours (l’étape de gestion des
rôles de la simulation, l’activité de simulation en elle-même et l’étape de débriefing). Au même
niveau de granularité que les espaces d’activité, on trouve également les points de constitution
de groupes et les vestiaires (espaces de gestion des rôles) qui sont abordés dans la section
11.3.6.
Figure 49 - Composants d'un scénario LRPG et niveaux de granularité
L’une des caractéristiques de l’organisation des composants d’un scénario LRPG est la
flexibilité : la structure hiérarchique proposée se veut plutôt ouverte, peu de contraintes sont
définies pour l’agencement des composants d’un scénario. Par exemple, les espaces d’activités,
correspondant au grain le plus fin d’un scénario LRPG, ne sont pas obligatoirement regroupés au
sein de salles, à un même niveau peuvent ainsi être orchestrés des composants de différentes
granularités (cf. figure 49). Par exemple, le scénario « Bien conduire un entretien client »
commence par un espace d’activité intitulé « S’informer sur la formation », suivi d’un « Point de
constitution de groupes » puis de la salle « Simulations d’entretiens clients ».
Chaque composant est ainsi décrit par un titre. Pour les salles, ce titre, par exemple
« Simulations d’entretiens clients », exprime la nature du regroupement d’espaces d’activité.
222
11.3.4. La « fonction » des espaces d’activité
Le titre des espaces d’activité vise plus particulièrement à exprimer l’activité à réaliser du point de
vue des apprenants. Dans notre scénario exemple : l’espace d’activité correspondant à la
simulation s’intitule « Simuler un entretien client », celui de l’activité de débriefing suivant la
simulation a pour titre « Echanger sur l’entretien client simulé ».
La caractérisation des espaces d’activité passe par ailleurs par la spécification d’une « fonction »
générique. Vis-à-vis de la métaphore choisie, le titre et la fonction visent à répondre à la question
« que va-t-on faire dans cet espace d’activité ? ».
Afin de guider la réflexion des concepteurs, mais surtout de favoriser les échanges avec le
recours à un formalisme commun, nous nous sommes interrogés sur une façon homogène et
explicite de caractériser les espaces d’activité. Dans le cadre d’une approche centrée sur les
activités, il s’agit notamment de s’intéresser à définir une liste de « fonctions ». Dans les
approches de conception pédagogique et les approches de formalisation de scénarios étudiées
au cours de notre travail exploratoire (cf. § 5.2.3 et 6.5), plusieurs proposent des typologies
d’activités, notamment : la méthode MISA de Paquette (2002) (cf. Annexe V), le formalisme des
Pléiades de Villiot-Leclercq (2008) (cf. § 6.5.3, tableau 5), les activités élémentaires définies dans
l’environnement LAMS (Dalziel 2003) (cf. § 6.5.3, figure 39).
L’étude de ces travaux a été orientée par des intentions visant à définir :
un nombre limité de « fonctions » ;
des « fonctions » correspondant au niveau de granularité des espaces d’activité,
composants élémentaires les plus fins d’un scénario LRPG ;
des « fonctions » qui expriment, du point de vue de l’apprenant, le type d’activité effectué
en termes de production et traitement de l’information. Les « fonctions » doivent donner
une information sur le but des interactions qui vont avoir lieu entre l’apprenant et les
ressources (par exemple « S’informer ») et/ou entre l’apprenant et les autres participants
(par exemple « Débattre ») ;
des « fonctions » explicites et partageables, c’est-à-dire compréhensibles et utilisables
par tous les concepteurs, sans ambigüité ;
des « fonctions » possédant un caractère suffisamment générique pour être utilisables
dans une variété de situations et répondre de façon la plus exhaustive possible aux
besoins des concepteurs. Il s’agit donc de définir des activités indépendantes d’un
contexte précis d’utilisation, de rôles, d’outils et ressources ;
des « fonctions » auxquelles on peut associer intuitivement une gamme d’outils et de
ressources nécessaires à la conduite des activités ;
223
des « fonctions » adaptées et pertinentes au regard des spécificités d’un scénario LRPG,
notamment le caractère central des activités collectives et de l’usage du jeu de rôle.
L’ensemble de ces principes directeurs a abouti à la définition de la typologie de « fonctions »
présentée dans le tableau 13. Nous proposons notamment des espaces d’activités-types
favorisant les interactions entre participants : par exemple les fonctions « Débattre (et
converger) » ou « Exposer (partager) ». La fonction « Jouer une scène » est quant à elle liée aux
jeux de rôles de type communication où des apprenants participent à une simulation. L’usage du
jeu de rôle dans les scénarios LRPG explique par ailleurs, en partie, la présence des fonctions
« S’informer » et « Débriefer » : en effet, comme nous l’avons évoqué dans la section 3.5, pour
une meilleure efficacité pédagogique, la mise en œuvre d’un jeu de rôle doit être précédée d’une
phase d’information et suivie d’une phase de débriefing.
Fonction Signification
S’informer Consultation d’informations
S’organiser Planning, outils de prise de rendez-vous
Recevoir un rôle Attribution ou choix d’un rôle et appropriation
Jouer une scène Jeu de rôle, simulation de situations de communication
Produire Création de documents, production d’information, etc.
Débattre (et converger) Echanges sur un sujet pour éventuellement aboutir à unedécision commune (convergence)
Exposer (partager) Présentation de ses travaux aux autres participants,commentaires et échanges
Sélectionner (voter) Vote ou sélection pour donner son avis
Débriefer Discussion-bilan des activités effectuées
Capitaliser Archivage et partage de documentsTableau 13 - ScenLRPG : typologie d’espaces d'activité
11.3.5. Des propriétés descriptives communes aux composants debase
Les propriétés descriptives retenues dans notre approche de formalisation (cf. tableau 14) sont
organisées en trois catégories principales :
la structuration du scénario ;
l’organisation des activités : aspects relatifs aux acteurs et à la mise en œuvre ;
les ressorts de jeu.
Elles s’appliquent soit au niveau esquisse, soit à un niveau de description plus détaillé. Dans le
tableau 14, les propriétés sur fond gris sont celles correspondant à la description de l’esquisse du
scénario.
224
Les composants auxquels s’applique chaque propriété sont indiqués, sachant que la plupart des
propriétés sont applicables quel que soit le niveau de granularité d’un composant (scénario
global, salles et espaces d’activités). L’application d’une propriété descriptive au niveau global du
scénario ou au niveau d’une salle correspond à la notion d’héritage proposée dans l’approche par
objets en informatique : c’est-à-dire qu’appliquer une propriété au niveau d’une salle signifie que
l’ensemble des espaces d’activités contenus dans la salle hérite de cette propriété.
Scénarioglobal
Salle Espaced’activité
Vestiaire Constitution degroupe
Niveau de granularité 1 = niveau le plus global ; 3 = grain le plus fin 1 2 3 3 3Titre/Nom du composant X X X XFonction (type d’activité) X X X
Propriétés de structuration Règles decomposition
Type de parcours : libre ou séquentiel X XParallélisme X X XPassage multiple X X XEmbranchements X
Intention visée d’un point de vue pédagogique X X XIntention d’un point de vue narratif (place du composant dans le scénario narratif) X X XDurée ou délai imparti X X X
Propriétésd’organisationdes actions
Propriétés desacteurs
Apprenants Modalités d’organisation (individuel, binôme, par trois, par quatre, par groupe de n,tous les participants)
X X X X
Effectif des groupes XNombre : mini-maxi X X XModalités de constitution des groupes XRôles (liste) XRôles (description détaillée) : scénario pédagogique / scénario narratif XModalité d’attribution des rôles X
Tuteur Nombre X X X XRôles : scénario pédagogique / scénario narratif X X
Modalités demise en œuvredes actions
Présentiel ou distance X X X X XSynchrone ou asynchrone (propriété destinée aux activités collectives) X X X X XEquipement Support principal X X X
Fonctions documentation Documents ressources X X X X
Documents produits X X X XFonctions communication Interactions sociales X X X X
Tâches collectives X X X XNégociation X X X XChoix - Convergence X X X X
Fonctions organisation Gestion de profils X X X XPlanification X X X X
Propriétés liées au jeu Ressorts de jeu mis en œuvre X X X XPour chaqueressort
Pour quoi est-il utilisé ? (intérêt d’un point de vue pédagogique et ludique) X X X XComment est-il mis en œuvre dans le scénario ? X X X X
Tableau 14 - Propriétés descriptives des scénarios LRPG
225
226
Les propriétés peuvent être rattachées aux différents points de vue identifiés lors de l’élaboration
de la grille de description initiale, par exemple :
l’indication d’un ressort de jeu appartient au point de vue syntaxique et répond à la
question « Quoi ? »,
la justification de l’utilisation du ressort correspond au point de vue sémantique et répond
à la question « Pour quoi ? »,
les précisions liées à sa mise en œuvre concernent le point de vue pragmatique et
répondent à la question « Comment ? ».
Les propriétés liées à la structuration du scénario sont utilisées pour décrire l’agencement des
composants du scénario dès le niveau esquisse. Cette description est basée sur la spécification
de différentes règles de composition :
Le type de parcours organisant les composants : parcours séquentiel (espaces d’activités
ou salles parcourus selon des règles pré-définies par le concepteur) ou parcours libre
(espaces d’activités ou salles parcourus dans un ordre choisi par le participant).
La notion de « parallélisme » vise à mettre en évidence le fait qu’une même activité est
menée par plusieurs groupes en même temps. Elle consiste à associer des groupes à un
espace d’activité ou à une salle. Cette règle de composition offre la possibilité d’indiquer
si les activités ou salles parcourues par les différents groupes sont strictement identiques
ou juste similaires, c’est-à-dire qu’ils diffèrent au niveau d’une caractéristique mineure.
Dans ce dernier cas, il convient de préciser sur quoi portent les différences (par exemple :
le thème de réflexion d’une activité de débat, le rôle joué dans une activité de jeu de rôle,
etc.).
Le passage multiple est une règle de composition qui vise à indiquer qu’un même espace
d’activité ou une même salle sont parcourus plusieurs fois. Cette règle requiert l’indication
de paramètres spécifiques : nombre de passages requis/condition d’arrêt et
éventuellement caractéristiques de l’activité qui changent à chaque passage (ces
caractéristiques sont du même ordre que celles données en exemple précédemment
concernant les caractéristiques mineures de différenciations entre plusieurs activités
similaires).
La création d’embranchements permet de définir plusieurs parcours possibles. Les
conditions d’orientation des participants vers l’une ou l’autre branche sont à définir par le
concepteur et peuvent être de natures diverses : appartenance à un groupe spécifique,
résultats obtenus à une activité antérieure, profil des participants, choix personnel du
participant, etc.
Les propriétés relatives à l’organisation des activités regroupent :
les propriétés liées aux acteurs qui concernent tout d’abord les modalités
d’organisation des apprenants pour effectuer les activités définies : sont-ils seuls ou en
227
groupes ? Ces propriétés précisent également la présence ou non d’un tuteur pour
encadrer les activités. Au niveau de description détaillée, les rôles des acteurs sont
précisés.
les propriétés relatives aux modalités de mise en œuvre des activités qui s’attachent
par exemple à spécifier si l’activité est effectuée en présentiel ou à distance. Pour les
activités collectives, il pourra également être utile de préciser si l’activité possède un
caractère synchrone ou asynchrone. Ces propriétés vont avoir une influence directe sur
le choix de l’équipement, c’est-à-dire des ressources et outils qui seront définis au niveau
de la spécification du scénario contextualisé.
Les propriétés liées au jeu visent à mettre en évidence les ressorts de jeu utilisés sur le
scénario global. Le concepteur peut éventuellement préciser sur quels espaces d’activité un
ressort s’exprime de manière prépondérante. Le niveau de description détaillé précise :
le but visé par l’utilisation de chaque ressort : pour quoi ? Il s’agit de mettre en évidence
l’intérêt du ressort d’un point de vue pédagogique et ludique.
la manière dont chacun des ressorts spécifiés est mis en œuvre dans l’activité et les
outils spécifiques éventuellement nécessaires (outil de tirage aléatoire, gestion de scores,
etc.).
Pour certains aspects un double point de vue est adopté : les propriétés définies sont justifiées
selon leur rôle dans le scénario pédagogique ainsi que selon leur rôle dans le scénario narratif.
Ce double point de vue correspond à la double nature des dispositifs LRPG alliant scénario
pédagogique et scénario narratif. Il est notamment utilisé au niveau de la description détaillée des
modalités de mise en œuvre des actions : l’équipement est décrit d’une part du point de vue de
son rôle pédagogique et d’autre part du point de vue de son intégration dans le scénario narratif.
Par exemple des documents ressources fournis aux apprenants pour la présentation des
personnages peuvent être directement intégrés dans le scénario narratif. Le double point de vue
est également mis en œuvre lors de la description détaillée des rôles des acteurs :
d’un côté le rôle des apprenants dans l’activité pédagogique est précisé,
de l’autre le rôle est décrit par rapport au scénario narratif auquel il est lié.
11.3.6. Des composants spécifiques : constitution de groupes etattribution de rôles
Deux composants se distinguent des composants présentés précédemment. Tout d’abord, les
espaces associés à la fonction « Recevoir un rôle » : désignés sous l’appellation « Vestiaire »
selon la métaphore utilisée, ils constituent des espaces d’activité spécifiques étroitement
associés à la mise en œuvre du jeu de rôle. Ces espaces d’activité correspondent à des phases
où les participants se voient attribuer des rôles et en prennent connaissance. Ils possèdent des
228
propriétés descriptives spécifiques par rapport aux autres espaces d’activité : dès le niveau
esquisse, on détaille les rôles disponibles dans le vestiaire. Au niveau de la description détaillée,
la modalité d’attribution des rôles est spécifiée parmi des paramètres tels que « attribution au
hasard », « choix du tuteur », « choix de l’apprenant », etc.
Le second composant possédant des propriétés descriptives spécifiques est l’« espace de
constitution de groupes » qui indique une répartition des participants en groupes. Il possède des
propriétés descriptives visant à spécifier les paramètres sur lesquels est basée la constitution des
groupes, tels que le nombre de participants par groupe ou le nombre de groupes. On pourrait
également envisager des paramètres de constitution des groupes reposant sur le profil des
participants, les résultats obtenus à certaines activités, etc. Là aussi, des propriétés visent à
spécifier les modalités de constitution des groupes (hasard, choix du tuteur ou choix des
participants eux-mêmes par exemple).
11.4. Positionnement du langage de formalisation ScenLRPG parrapport à la grille de description initiale
Le langage de formalisation ScenLRPG que nous venons de présenter est basé sur la première
grille de description que nous avons définie (cf. § 8.2). Nous avons ici cherché à simplifier cette
grille qui avait été élaborée essentiellement à des fins d’analyse de scénarios existants. A travers
l’élaboration de l’approche de formalisation ScenLRPG, l’objectif est de transposer la grille de
description sous un autre format afin de la rendre opérationnelle, dans le cadre d’une démarche
d’assistance à la conception de scénarios a priori. Nous avons retenu la majeure partie des
critères proposés, en rendant le vocabulaire plus explicite et intuitivement compréhensible, et en
adaptant la structuration des éléments à la démarche de conception que nous proposons (cf.
chapitre 9).
L’approche de formalisation ScenLRPG possède une organisation globale similaire à la première
grille de description élaborée avec :
une partie s’intéressant à la définition générale du projet de conception et au recueil de
besoins qui vont guider la conception du dispositif ;
une partie se focalisant sur la description du scénario, basée sur une définition de
l’architecture du scénario.
Cette seconde partie, dans les deux propositions élaborées, considère les composants du
scénario selon plusieurs niveaux de granularité : le scénario global et des constituants de
différents niveaux hiérarchiques.
Dans la première grille définie, la description du scénario est organisée autour des composants
du système social constitué par le jeu (selon les travaux de Klabbers 2008) : les acteurs, les
règles et les fonctions y sont décrits selon trois points de vue (syntaxique, sémantique et
pragmatique). Comme illustré précédemment, dans l’approche de formalisation ScenLRPG, ces
229
différents points de vue sont présents à travers les propriétés retenues, mais ils n’organisent pas
la description. L’approche de formalisation ScenLRPG structure en effet la description des
scénarios LRPG principalement selon deux niveaux de description : tout d’abord une esquisse du
scénario, puis une description plus détaillée du scénario générique. La description du scénario
contextualisé constitue un autre niveau de description que nous n’avons pas approfondi dans nos
travaux et qui correspond exclusivement au point de vue pragmatique utilisé dans la première
grille de description.
11.5. Le système de notation visuel ScenLRPGL’opérationnalisation de notre approche de formalisation se traduit notamment par la définition
d’un système de notation visuel permettant de représenter graphiquement l’esquisse du scénario
LRPG conçu.
11.5.1. Positionnement par rapport à l’étude exploratoire
Ce recours a un système de notation visuel s’appuie sur les travaux en sciences cognitives (cf. §
5.1) qui mettent en évidence que l’assistance à la création de représentations externes d’une
solution est un moyen de soutenir le processus de conception. Le choix de proposer un système
de notation visuel pour opérationnaliser l’approche de formalisation ScenLRPG est également
soutenu par des travaux sur l’assistance à la conception pédagogique (cf. chapitre 6) et les
langages de conception (cf. § 6.5.3) : ces travaux soulignent notamment qu’un système de
notation visuel permet de « faciliter la production / la compréhension d’un modèle conceptuel »
(Nodenot 2007). Enfin certaines approches de la conception de jeux pour la formation nous
orientent elles aussi vers l’utilisation d’une représentation visuelle pour décrire les scénarios et
faciliter leur réutilisation, c’est le cas des travaux de Thiagarajan et Hourst (2007) (cf. § 5.5.2).
La représentation visuelle du scénario constitue un point-clé de notre approche d’assistance à la
conception de scénarios LRPG. L’étape de formalisation graphique de l’esquisse est en effet
centrale car c’est sur elle que s’appuient les phases suivantes du processus de conception
(description détaillée du scénario générique et description du scénario contextualisé) ainsi que la
discussion entre les différents interlocuteurs du projet (concepteur, commanditaire, etc.).
230
11.5.2. Système de notation visuel ScenLRPG et esquisse de scénario
Figure 50 - Plan global d’un scénario décrit à l’aide du langage visuel ScenLRPG
Le scénario présenté sur la figure 50 est utilisé ici pour illustrer notre présentation du système de
notation visuel ScenLRPG. Il s’agit du scénario « Bien conduire un entretien client », déjà évoqué
précédemment, qui a été utilisé dans la première expérimentation mise en œuvre (présentation
détaillée § 12.2.3). Dans le but de faciliter la compréhension du système de notation visuel
ScenLRPG par les sujets et pour focaliser l’attention sur les éléments utiles à l’expérimentation,
ce scénario est volontairement simple en termes de structure et de principes de jeu.
Le scénario LRPG représenté figure 50 est constitué d’espaces d’activité , parfois regroupés au
sein de salles . Les « couloirs » entrent les espaces d’activité indiquent ici que leur
enchaînement est séquentiel et suit le parcours prescrit par le scénario. Pour représenter un
parcours « libre » aucun « couloir » n’est présent entre les salles (cas non représenté sur la
figure 50). La présentation d’un parcours à embranchements n’est pas détaillée ici car elle n’est
pas exploitée dans les expérimentations (elle a toutefois été spécifiée au niveau du prototype
d’environnement informatique – cf. Annexe XXVII).
Un point de constitution de groupes signale la répartition des participants en plusieurs groupes
et précise les modalités de constitution de ces groupes (nombre de participants par groupe et/ou
nombre de groupes, etc.).
La démultiplication d’une salle (tel que ) ou d’un espace d’activité signifie que l’activité ou
l’ensemble d’activités sont effectués par plusieurs groupes en parallèle. Le symbole du passage
multiple indique qu’une salle ou un espace d’activité est parcouru plusieurs fois
successivement et les éventuels changements à chaque passage sont précisés (ex. rôle joué
différent).
Des pictogrammes (situés au bas de la figure 50) mettent en évidence les ressorts de jeu mis
en œuvre sur le scénario ou sur un espace d’activité. La liste complète des représentations
visuelles des ressorts de jeu retenus est présentée dans le tableau 15.
231
Ressorts de jeu
Pictogramme Propriété
Etre en compétition
Jouer un rôle
Se livrer au hasard
Perdre le contrôle
Agir collectivement
Relever un challenge personnel
Etre reconnu
Tableau 15 - Représentations visuelles des ressorts de jeu
Sur chaque espace d’activité apparaissent, de manière graphique pour la plupart, les
informations nécessaires à une compréhension globale de l’esquisse du scénario (cf. tableau 16
pour la liste complète des pictogrammes dans leur version finale implémentée dans le prototype
d’outil informatique) :
le titre formulé à l’aide d’un verbe à l’infinitif exprimant synthétiquement, du point de vue
l’apprenant, l’activité qui sera effectuée (ex : Faire le bilan) ;
le pictogramme exprimant visuellement la fonction type de l’espace d’activité ;
le pictogramme indiquant la modalité d’organisation des acteurs ;
le pictogramme indiquant le cas échéant la présence d’un tuteur ;
le pictogramme indiquant si nécessaire les modalités de mise en œuvre.
232
Pictogramme Propriété
Fonctions des espaces d’activités
Capitaliser
Débattre (et converger)
Débriefer
Exposer (partager)
Jouer une scène
Produire
Recevoir un rôle
S’informer
S’organiser
Sélectionner (voter)
Organisation des acteurs
Organisation des apprenants
Individuel
Avec l’ensemble des participants
En binôme
En trinôme
En groupe de 4
En groupe de n participants
Tutorat
Activité tutorée
Activité non tutorée
Modalités de mise en œuvre
Présentiel
A distance
Communication synchrone
Communication asynchrone
Tableau 16 - Liste des pictogrammes du système de notation visuel ScenLRPG
233
11.6. Une approche de formalisation multiperspectivesEn référence aux travaux sur l’assistance à la conception pédagogique qui mettent en évidence
les bénéfices d’une présentation multiperspectives du scénario conçu (cf. § 6.4.1), nous
proposons l’application d’une démarche similaire dans l’approche de formalisation. Ainsi, nous
prévoyons une représentation du scénario en cours d’élaboration de différentes manières :
Une représentation visuelle du scénario avec le langage de notation, qui offre en elle-
même plusieurs perspectives :
o une visualisation de l’esquisse du scénario centrée sur les activités (telle que
nous venons de la présenter),
o une visualisation du scénario centrée sur les acteurs, mettant en évidence la
distribution des acteurs sur les activités, leurs rôles, etc.
o une visualisation du scénario centrée sur les ressorts de jeu mis en œuvre
permettant d’accéder directement aux informations justifiant leur utilisation (pour
quoi ?) et la façon dont ils sont mis en œuvre (comment ?).
Une représentation du scénario sous forme de tableau reprenant de manière textuelle,
pour chaque composant du scénario, les informations plus particulièrement liées aux
aspects pédagogiques (objectif) et ainsi que les aspects liés à la mise en œuvre du jeu et
au scénario narratif (place de l’activité dans le scénario narratif éventuellement utilisé
comme fil conducteur du scénario LRPG).
Seul le mode de visualisation graphique de l’esquisse, centré sur les activités, a été spécifié et
développé dans nos travaux.
234
Synthèse : spécificités du langage de formalisation ScenLRPG
Le langage de formalisation ScenLRPG est défini dans le but de soutenir l’activité
de conception et les échanges qu’elle implique autour des solutions en cours
d’élaboration.
Il est associé à un système de notation visuel destiné à fournir une représentation
graphique claire et partageable des scénarios LRPG.
Les spécificités de l’approche de formalisation ScenLRPG sont liées aux
caractéristiques des scénarios LRPG qui entraînent le besoin d’exprimer à la fois :
des aspects pédagogiques,
des aspects relatifs au jeu (explicitation des ressorts de jeu, distribution derôles, double point de vue pédagogique et narratif),
des aspects relatifs au caractère collectif des activités,
des aspects liés au caractère hybride et instrumenté du dispositif.
235
Chapitre 12. PHASE 3 : MISE EN ŒUVRE ETEXPERIMENTATION N°1
La phase 3 de notre travail est consacrée à l’évaluation de nos propositions portant sur la
démarche de conception de scénarios LRPG (cf. proposition 1 - chapitre 9), une réflexion
orientée vers l’utilisation de ressorts de jeu (cf. proposition 2 - chapitre 10) et un langage de
formalisation des scénarios LRPG exprimé à l’aide d’un système de notation visuel (cf.
proposition 3 - chapitre 11). Dans un premier temps, cette évaluation a consisté en la mise en
œuvre d’une expérimentation basée sur l’utilisation d’un prototype « papier » d’outil de
conception de scénarios LRPG. Dans ce chapitre, nous présentons l’expérimentation conduite
ainsi que les résultats qui en sont issus. Une seconde expérimentation a été menée dans le
cadre de cette phase d’évaluation de nos propositions : elle est présentée dans le chapitre 13.
12.1. Caractéristiques des expérimentations mises en placeAvant de nous focaliser sur la présentation de la première expérimentation, nous détaillons ici les
méthodes et techniques de recueil de données utilisées dans les deux expérimentations
conduites. Nous détaillons également le travail préparatoire réalisé en amont des sessions
d’expérimentation.
12.1.1. Méthodes et techniques de recueil de données
Les deux expérimentations menées dans le cadre de nos travaux possèdent des caractéristiques
communes au niveau des méthodes et techniques de recueil de données utilisées même si elles
diffèrent au niveau des objectifs d’évaluation et des outils supports :
La première expérimentation (détaillée dans la suite de ce chapitre) porte sur le
processus de conception, l’approche de formalisation ScenLRPG et le système de
notation visuel proposés, ainsi que sur des exemples de scénarios LRPG que nous avons
définis. Elle s’appuie sur l’utilisation d’un prototype « papier » d’outil de conception. Les
résultats issus de cette expérimentation ont permis de valider certaines hypothèses,
d’ajuster nos différentes propositions et d’alimenter la spécification d’un prototype
informatique d’outil de conception.
La seconde expérimentation (détaillée dans le chapitre 13) concerne l’utilisation de
l’approche de formalisation ScenLRPG implémentée dans un prototype d’environnement
informatique. Les résultats issus de cette expérimentation consolident ceux de la
première expérimentation, tout en évaluant d’autres hypothèses liées à nos propositions.
236
L’un des principes centraux de nos deux protocoles d’expérimentation est de proposer aux sujets
un jeu de rôle : les participants endossent le rôle de concepteurs pédagogiques confrontés à des
demandes client.
Dans la première expérimentation les sujets doivent proposer un dispositif de formation
répondant à des besoins exprimés par un client commanditaire et les présenter à ce
dernier.
Dans la seconde expérimentation, les sujets doivent s’approprier le travail de
scénarisation commencé par un collègue afin de le présenter à un client.
Au cours des phases de jeu de rôle où les sujets sont activement impliqués dans le processus de
conception, les expérimentateurs observent et prennent des notes. Cette approche de simulation
d’une activité de conception a été choisie car elle permet de faire tester aux sujets les méthodes
et outils proposés dans des conditions proches de la réalité.
Nos protocoles d’expérimentation utilisent par ailleurs des méthodes reconnues dans l’approche
de conception centrée utilisateurs (Maguire 2001) :
L’expérimentation 1 repose sur un prototype papier d’outil d’assistance à la conception.
Cette technique appelée en anglais paper prototyping ou lo-fi prototyping (prototype
basse fidélité) (Rettig 1994) permet de simuler les principes de la démarche de
conception que nous proposons (notamment réutilisation d’exemples de scénarios et
réflexion centrée sur l’utilisation de ressorts de jeu) ainsi qu’une première implémentation
du système de notation visuel.
L’expérimentation 2 repose quant à elle sur l’utilisation du prototype logiciel
d’environnement d’assistance à la conception et permet ainsi de recueillir l’avis de futurs
utilisateurs de cet outil.
Différentes techniques de recueil de données qualitatives, correspondant à la nature de nos
questions de recherche et des informations à récolter, sont mises en œuvre dans les
expérimentations :
les animateurs observent et prennent des notes au cours des activités (mises en
situation) effectuées par les sujets ;
dans l’expérimentation 1, nous avons également recours à des techniques de
verbalisation visant à faire s’exprimer les sujets sur leurs intentions et leurs actions lors
des phases de conception, permettant ainsi d’avoir « accès » aux processus cognitifs mis
en œuvre (Kovacs et al. 2004, Bisseret et al. 1999) ;
des entretiens semi-dirigés sont menés lors des phases de débriefing (Berthier 2006,
Blanchet & Gotman 2005) qui ponctuent les sessions d’expérimentation. L’objectif est de
recueillir le ressenti des sujets et d’approfondir certains points observés lors des mises en
situation ;
237
des questionnaires (De Singly 2005) sont soumis aux sujets afin de recueillir des
informations sur leurs profils et leurs représentations initiales de concepts-clés mis en
œuvre dans l’étude, de collecter des données concernant leurs habitudes de travail et, en
fin d’expérimentation, de recueillir leur avis sur les méthodes et outils utilisés
(expérimentation 1).
Les expérimentations menées ont permis de recueillir des données sous différentes formes :
des notes écrites issues des observations des expérimentateurs ;
des enregistrements audio des verbalisations des sujets au cours des phases de
conception, des entretiens semi-directifs et des échanges entre les sujets dans
l’expérimentation 2 ;
des scénarios LRPG produits par les sujets dans l’expérimentation 1 : d’une part des
scénarios exprimés sous forme de prise de notes ou de schémas correspondants à des
méthodologies personnelles des sujets ; d’autre part des scénarios exprimés à l’aide de
l’outil « papier » de conception basé sur le système de notation ScenLRPG ;
des documents de travail des sujets (prises de notes et schémas « brouillon ») ;
des productions effectuées au sein du prototype informatique d’environnement
d’assistance à la conception utilisé dans l’expérimentation 2 ;
des captures vidéo des actions réalisées dans le prototype lors de l’expérimentation 2.
12.1.2. Travail préparatoire préalable aux expérimentations
Afin de garantir une homogénéité maximale du déroulement des différentes sessions conduites
par des expérimentateurs différents, des grilles d’animation ont été conçues au préalable : leur
objectif est de définir un cadre structuré pour l’animation en présentant de manière détaillée le
déroulement des sessions et en fixant le discours de chacune des interventions de
l’expérimentateur (consignes, entretien des débriefings) (cf. Annexe VI pour l’expérimentation 1,
et Annexe XVI pour l’expérimentation 2).
Lors de la préparation de l’expérimentation, pour faciliter le traitement ultérieur des données qui
allaient être recueillies, une grille d’analyse a été élaborée d’après les hypothèses à valider. Pour
chacune des hypothèses formulées, la grille d’analyse spécifie à quel moment de
l’expérimentation les données utiles peuvent être recueillies et, le cas échéant, précise les
questions à poser ou les points particuliers à observer par les animateurs.
Les données recueillies ont été traitées selon un processus itératif et exploratoire : l’analyse de
données qualitatives de ce type fait parfois ressortir des éléments « inattendus » (Runeson &
Höst 2009), non identifiés comme des hypothèses ou résultats potentiels lors de la construction
initiale de la grille d’analyse, mais intéressants à prendre en compte. L’apparition d’un résultat
238
inattendu peut conduire à reprendre l’étude de données déjà analysées afin de les considérer au
regard de ce nouveau résultat.
12.2. Un prototype « papier » d’outil de conceptionLe prototype « papier » d’outil de conception vise plus particulièrement à implémenter les aspects
suivants de nos propositions relatives à l’assistance à la conception de scénarios LRPG :
l’utilisation d’un langage de formalisation exprimé à l’aide d’un système de notation visuel
pour la description d’esquisses de scénarios LRPG (cf. chapitre 11),
une réflexion centrée sur des ressorts de jeu possibles à mettre en œuvre dans un
dispositif de formation (cf. chapitre 10),
une démarche de conception de scénarios LRPG basée sur le recours à des exemples
de scénarios (cf. chapitre 9).
12.2.1. Un jeu de cartes comme outil d’assistance à la conception
Dans l’outil « papier », les composants d’un scénario LRPG et leurs propriétés descriptives (cf.
11.3) sont matérialisés de différentes manières (cf. figure 51).
Des cartes (format cartes à jouer) représentent les espaces d’activité. Le pictogramme
correspondant à la fonction-type de l’espace d’activité (par exemple « Débriefer » ou
« Jouer une scène ») est imprimé sur chaque carte. Un espace vierge est réservé au titre
de l’espace d’activité qui est inscrit à la main par le concepteur.
Des cartes « espace d’activité » vierges, c’est-à-dire ne comportant pas de fonction type,
sont proposées afin que les concepteurs puissent ajouter une fonction si aucune parmi
celles proposées ne convient à leur besoin.
Des cartes spécifiques représentent les vestiaires et les points de constitution de
groupes.
Des vignettes reprennent les pictogrammes de différentes propriétés descriptives du
niveau esquisse : la réitération éventuelle d’une activité, les modalités d’organisation des
apprenants, la présence d’un tuteur et les ressorts de jeu.
Les salles (regroupements d’espaces d’activité) ainsi que la démultiplication d’une salle
ou d’un espace d’activité (signifiant qu’une activité est effectuée en parallèle par plusieurs
groupes) sont dessinés au crayon par les concepteurs.
Les cartes et les vignettes sont autocollantes et repositionnables afin d’en faciliter la manipulation
par les concepteurs et permettre des modifications du scénario en cours de conception (l’outil
vise ainsi à être adapté au caractère itératif du processus de conception).
239
Figure 51 - Utilisation de l'outil de conception "papier" lors de l'expérimentation 1
12.2.2. Ressources d’assistance à la conception
Deux documents faisant office de ressources d’assistance à la conception accompagnent l’outil
« papier » et sont fournis aux concepteurs sous la forme de documents papier :
un guide de conception (cf. Annexe XIV) fournit des indications concernant les livrables
attendus (niveau de détails et type d’informations) pour la description d’une esquisse de
scénario LRPG et présente la signification des éléments du formalisme LRPG ;
un guide sur les ressorts de jeu est également fourni aux concepteurs (cf. Annexe XV). Il
reprend de manière synthétique les ressorts de jeu présentés dans le chapitre 10. Le
tableau présent dans ce guide (une version allégée du tableau 11 et du tableau 12) liste
les ressorts de jeu identifiés et spécifie pour chacun les implications du point de vue du
concepteur (colonne : « pour le concepteur il s’agit de… ») : le but de ce document est de
favoriser une attitude réflexive du concepteur quant à l’utilisation des différents ressorts.
12.2.3. Des exemples de scénarios LRPG
L’un des principes de la démarche de conception de scénarios LRPG est la réutilisation : l’idée
directrice est de guider la conception de nouveaux scénarios LRPG en s’appuyant sur des
scénarios existants. Lors de l’expérimentation 1, deux exemples de scénarios LRPG formalisés à
l’aide de l’outil de conception « papier » ont été mis à disposition des sujets.
240
Nous avons nous-mêmes définis ces deux exemples en tant que scénarios répondant à un
besoin de formation fictif1 : ils font partie d’un même dispositif de formation intitulé « Opt’Immo
conseil », destiné à être mis en œuvre au sein d’un groupe bancaire dans le but d’améliorer le
conseil et la vente de crédits immobiliers.
Ces deux exemples s’appuient sur des scénarios ou des activités existants :
le premier scénario (cf. figure 52) intitulé « Bien conduire un entretien client » est un jeu
de communication s’appuyant sur un jeu de rôle proposé par Courau (2006),
le second scénario (cf. figure 53) intitulé « Répondre aux objections clients » est un jeu
de mission qui met en œuvre des activités collectives issues de jeux-cadres de Thiagi
(Hourst & Thiagarajan 2007).
Les figures ci-dessous présentent les scénarios formalisés à l’aide du système de notation
ScenLRPG implémenté dans le prototype logigiciel (présenté § 13.1). Dans l’expérimentation 1,
les exemples fournis aux sujets étaient formalisés avec la version « papier » du formalisme
(cartes et vignettes) tel qu’on le voit sur la figure 51.
Figure 52 - Esquisse du scénario "Bien conduire un entretien client"
1 Ce besoin est pertinent vis-à-vis de notre contexte d’application : il cadre bien avec des pratiques du milieu bancaire et desprojets de formation qui sont mis en place dans ce secteur.
241
Figure 53 - Esquisse du scénario "Répondre aux objections clients"
Le dispositif LRPG global « Opt’Immo conseil » et deux scénarios mis à disposition en tant
qu’exemples réutilisables dans l’expérimentation 1 sont présentés de manière plus détaillée en
annexes (cf. Annexe XI).
12.3. Expérimentation 1 : présentation
12.3.1. Objectifs de l’expérimentation
La première expérimentation mise en place avec le prototype « papier » d’outil de conception
vise à valider un certain nombre d’hypothèses liées à nos travaux avant d'aborder le
développement d'un prototype d’environnement logiciel d’assistance à la conception. Les
hypothèses à valider sont les suivantes :
les utilisateurs comprennent les concepts de base de l’approche ScenLRPG, tels que
« scénario LRPG » ou encore « ressorts de jeu » ;
les utilisateurs se servent des ressources d’assistance à la conception, c’est-à-dire des
exemples de scénarios réutilisables et du guide sur les ressorts de jeu ;
le système de notation visuel ScenLRPG est utile et utilisable et il apporte des bénéfices
reconnus pour les concepteurs ;
242
la démarche de conception et l’approche de formalisation ScenLRPG possèdent un bon
niveau d’acceptabilité1 potentielle.
Cette expérimentation a également permis de recueillir des données sur les habitudes de travail
des sujets, leurs démarches personnelles de conception et leurs besoins. Une comparaison des
productions spontanées des sujets et des productions réalisées avec l’approche de conception et
le langage de formalisation ScenLRPG a été effectuée. Les résultats ont permis d’évaluer nos
propositions, d’identifier des modifications nécessaires et de guider les spécifications de
l’environnement informatique d’assistance.
12.3.2. Public cible
L’expérimentation a été menée à l’automne 2010 auprès de seize sujets (douze femmes et
quatre hommes) :
4 ingénieurs de formation et 2 conseillers TICE de l’Université de l’Enseigne La Poste
(service formation du groupe) ;
9 concepteurs pédagogiques de la société Symetrix (conception et accompagnement de
projets de formation, plus particulièrement de type e-learning) ;
une conseillère pédagogique de l’équipe Perform (accompagnement pédagogique des
enseignants et utilisation des TICE) de l’Institut Polytechnique de Grenoble.
La moitié des sujets possède une expérience professionnelle inférieure à 4 ans dans le domaine
de la conception pédagogique. La plupart (12 sujets) sont novices en matière de conception de
jeu pour la formation, et plus spécifiquement de dispositifs possédant les caractéristiques des
LRPG (dispositif de formation utilisant le jeu, principalement pour des activités collectives à
distance) : 5 sujets n’ont jamais conçu de dispositif de formation basé sur le jeu, et 7 autres n’en
ont jamais conçu pour une formation à distance ou des activités collectives.
Ces sujets ont été choisis car ils représentent les utilisateurs cibles de nos propositions et leurs
domaines d’activité correspondent aux domaines d’application de nos travaux : concepteurs de
dispositifs pour la formation professionnelle, en charge de projets e-learning, ou plus largement
de projets de formation destinés à des sessions présentielles ou hybrides.
12.3.3. Présentation détaillée du protocole d’expérimentation
16 sessions d’expérimentation ont été menées. Chaque session se déroule avec un seul sujet et
dure environ 4h. Une session est constituée de deux grandes phases (cf. figure 54) alternant des
activités de production et des débriefings.
1 L’acceptabilité d’un outil ou d’une méthode peut être définie comme « la valeur de la représentation mentale (attitudes,opinions, etc. plus ou moins positives) […] de son utilité et de son utilisabilité » qui « conditionnerait la décision d’utilisation »(d’après Tricot et al. 2003).
243
Phase 1 (figure 55) : phase de conception libre où le sujet endosse le rôle d’un
concepteur d’une société fictive spécialisée en ingénierie de formation et conçoit
l’esquisse du scénario d’un dispositif de formation répondant à une demande client
(commande 1). Particularité : la demande porte sur un dispositif de formation innovant qui
doit favoriser l’engagement des apprenants grâce à l’utilisation de ressorts de jeu.
Après la première phase, la démarche de conception et l’approche de formalisation
ScenLRPG sont présentés aux sujets afin qu’ils les mettent en œuvre dans la seconde
phase de conception.
Phase 2 (figure 56) : phase de conception mettant en œuvre la démarche de conception
et de formalisation ScenLRPG. Dans un premier temps, le sujet reprend la commande 1
et élabore sa proposition à l’aide du système de notation visuel ScenLRPG. Il dispose du
guide sur les ressorts de jeu et de deux exemples de scénarios réutilisables. Dans un
second temps, une nouvelle commande (commande 2) est proposée au sujet. A
nouveau, il conçoit l’esquisse d’un scénario et le décrit avec le système de notation
ScenLRPG.
Figure 54 - Organisation globale de l'expérimentation 1
Le protocole expérimental de cette première expérimentation a été défini de façon à permettre
une comparaison entre une situation de conception de référence (phase 1) et une situation de
conception mettant en œuvre les propositions que nous avons élaborées (phase 2). En
comparant l’attitude et la satisfaction des sujets dans ces deux situations ainsi que les
productions auxquelles ils ont abouti, l’un des objectifs est d’évaluer l’utilisabilité de nos
propositions et d’en identifier les points positifs et négatifs.
244
Le déroulement détaillé de l’expérimentation est présenté dans le tableau 17. La grille
d’animation destinée aux expérimentateurs et présentant de manière plus précise les activités
proposées aux sujets et le rôle des expérimentateurs est fournie en annexes (cf. Annexe VI).
Figure 55 - Expérimentation 1 : structure phase 1(décrite avec le formalisme ScenLRPG)
Figure 56 - Expérimentation 1 : structure phase 2(décrite avec le formalisme ScenLRPG)
Un questionnaire initial, proposant des questions ouvertes (cf. Annexe VII), permet de recueillir
des informations sur le profil des sujets et leurs représentations préalables de notions telles que
la motivation, le jeu de rôle et les ressorts de jeu. Un questionnaire final (cf. Annexe IX) recueille
l’avis des sujets sur les principaux éléments expérimentés : le guide sur les ressorts de jeu, le
système de notation visuel et les exemples de scénarios proposés. Le questionnaire permet
également d’évaluer l’acceptabilité de la méthodologie globale proposée.
245
Activités ObjectifsQuestionnaire d’introduction
Le sujet remplit un questionnaire papier.Etablir le profil des sujets : données socio-démographiques, habitudes de jeu (personnelleset professionnelles), représentations préalables surles notions d’activité motivante, de jeu de rôle et deressorts de jeu
Phase 1 : Conception libreConception commande 1Le sujet endosse le rôle d’un concepteur d’une sociétéspécialisée en ingénierie de formation. Il doit concevoirl’esquisse du scénario d’un dispositif de formationrépondant à une demande client. Particularité: la demandeporte sur un dispositif de formation innovant et favorisantl’engagement des apprenants grâce à l’utilisation deressorts de jeu.
Recueillir des informations sur les démarches deconception habituelles des sujets, leurs réactionsface à une demande mettant l’accent surl’utilisation des ressorts de jeu, la façon dont ilsprennent en compte ces spécificités dans leurconception, les difficultés éventuelles rencontrées.
Présentation de la productionLe sujet « concepteur » doit présenter sa proposition auclient (joué par un expérimentateur différent de celui qui aassisté à la conception).
Recueillir des informations sur la manière dont lessujets présentent leur scénario au client et leurschoix relatifs à l’utilisation des ressorts de jeu.
Débriefing conceptionL’expérimentateur interroge le sujet sur la conception duscénario et la présentation faite au client.
Compléter les informations recueilliesprécédemment et recueillir les réactions dessujets.
ScenLRPG : méthodologie, langage visuel et modèlesL’expérimentateur présente la méthodologie ScenLRPG, lelangage visuel de description niveau esquisse et deuxexemples de scénarios décrits à l’aide du langageScenLRPG.
Familiariser les sujets avec les principes de laméthodologie et du langage visuel et avec deuxexemples de scénarios de la « bibliothèque ».
Phase 2 : Conception ScenLRPG – 1ère partieLe sujet reprend la commande proposée dans la phase 1 etdoit élaborer une proposition en utilisant le langage visuelScenLRPG. Il peut éventuellement repartir du premierscénario conçu. Il dispose du guide sur les ressorts de jeu etdes exemples de scénarios réutilisables.
Recueillir des données sur l’utilisation et lacompréhension du langage visuel ScenLRPG, desexemples de scénarios et du guide sur les ressortsde jeu.
Phase 2 : Conception ScenLRPG – 2e partieConception commande 2Une nouvelle commande est proposée au sujet. Il doit,comme précédemment, concevoir l’esquisse d’un dispositifde formation et le décrire à l’aide du langage visuelScenLRPG.
Même objectif que lors de la phase de conceptionprécédente.
Présentation de la proposition pour la commande 2Idem phase 1
Recueillir des données sur la manière de présenterle scénario à l’aide du langage visuel.
DébriefingL’expérimentateur qui a assisté à la conception interroge lesujet sur son travail sur les commandes 1 et 2 (utilisationdu langage visuel et des ressources à disposition) et sur saprésentation de la commande 2 au client.
Compléter les données recueillies lors des phasesprécédentes et faire s’exprimer le sujet sur lesavantages et inconvénients de l’utilisation de laméthodologie ScenLRPG.
Questionnaire finalLe sujet remplit un questionnaire papier.
Recueillir l’avis des sujets sur les élémentsexpérimentés (avantages et inconvénients duguide sur les ressorts de jeu, du langage visuel,des exemples de scénarios), évaluer l’acceptabilitéde la méthodologie.
Tableau 17 - Expérimentation 1 : déroulement
246
12.4. Expérimentation 1 : résultatsLes résultats présentés dans les sections suivantes sont issus de l’analyse des différentes
données qualitatives collectées : réponses aux questionnaires (cf. Annexe VIII et Annexe X),
productions des sujets dans les phases 1 et 2 de l’expérimentation (cf. figure 57), remarques des
sujets issues des débriefings. Vu que nous adoptons une approche d’expérimentation qualitative,
il est à noter que chaque donnée est importante à considérer : même si une remarque n’émane
que d’un seul sujet, elle doit attirer notre attention et ne pas être mise de côté trop vite.
Les nombres entre parenthèses correspondent au nombre de sujets concernés par le résultat
présenté sur un total de 16 sujets ayant participé à l’expérimentation.
Figure 57 - Expérimentation 1 : Exemple de production issue de la phase 2
12.4.1. Importance d’une phase initiale de recueil des besoins
Dans la phase 1 de l’expérimentation, on observe qu’avant d’entamer la conception proprement
dite, les sujets font le point sur les informations mises à leur disposition. Tous les sujets (16)
prennent note d’informations sur une feuille libre avec, pour 5 sujets, une mise en évidence des
informations (mots soulignés ou entourés) sur la fiche descriptive de la commande fournie.
Les sujets semblent avoir besoin de mettre en relief les informations sur lesquelles ils
s’appuieront pour la conception de leur réponse. Cette étape préalable est clairement distincte de
la phase de génération d’idées qui suit. On observe que lorsqu’ils figurent sur une même feuille,
les informations sur la commande et les éléments issus de la réflexion personnelle des sujets
sont généralement « séparés » par un trait.
Ces résultats mettent en évidence l’importance d’un recueil complet et d’une
reformalisation des informations disponibles sur la commande qui correspond à la première
phase spécifiée dans la démarche de conception ScenLRPG (cf. § 9.2).
247
12.4.2. Utilité d’un système de notation visuel au cours de laconception
Durant la phase 1 de l’expérimentation, les documents de travail des sujets font apparaître que
les idées, formulées sous forme de notes brèves (11) ou de phrases plus complètes (5), sont
structurées de plusieurs manières : à l’aide de listes à puces ou de paragraphes (4), d’un schéma
(4) (cf. figure 58), d’un tableau (2), ou à l’aide de plusieurs de ces techniques (5).
Cette démarche spontanée semble soutenir un besoin de formalisation structurée des
scénarios.
Figure 58 - Expérimentation 1 - Phase 2 : Schéma de formalisation
Suite à l’utilisation du système de notation visuel ScenLRPG lors de la phase 2 de
l’expérimentation, tous les sujets ont indiqué au moins un point positif tel que : son caractère
visuel (7), sa capacité à présenter une vue synthétique du scénario (3), son côté pratique et facile
d’utilisation (5), son caractère lisible, clair et parlant (4), sa nature flexible, offrant par exemple la
possibilité de créer des espaces d’activités supplémentaires (6) personnalisés selon les besoins.
L’utilité du système de notation visuel a été évoquée à différents titres, notamment en ce qu’il
facilite la conception, fait gagner du temps, constitue un cadre de conception, structure la
pensée, offre une visualisation des étapes, des acteurs ou des buts du scénario, aide à la
vérification de la cohérence ou de la présence de tous les éléments nécessaires dans la
description du scénario. De manière générale, seuls 3 sujets jugent le système de notation visuel
peu utile : l’un d’eux utilise déjà un autre système de notation, un autre n’apprécie pas qu’on lui
impose un cadre, et pour le dernier, le système de notation proposé ne correspond pas à sa
manière habituelle de représenter un scénario.
La liste de fonctions-types des espaces d’activité, proposée dans le langage de formalisation
ScenLRPG, est elle aussi jugée pertinente : elle favorise la mise en œuvre d’une pédagogie
248
active centrée sur l’apprenant (1) et constitue une bonne synthèse des types d’activités possibles
(3). Toutefois, les espaces d’activités créés par les sujets à partir des cartes vierges fournies et
l’usage hétérogène de certaines fonctions signalent des manques de la typologie proposée. Par
exemple des sujets ont eu des difficultés à choisir la fonction des espaces d’activité
correspondant à des activités telles que « effectuer un module e-learning » (5) ou à des activités
liées au jeu (3) telles que « paramétrer son avatar » ou « jouer un match – s’affronter ».
Certains sujets expriment des besoins non couverts par le niveau esquisse de la formalisation
ScenLRPG, comme l’indication des ressources ou outils qui seront utilisés dans les activités (5),
la description détaillée des activités (6), les modalités d’organisation des acteurs (7), l’indication
d’éléments spécifiques à l’aspect jeu (3) tels que le « gain de points ». Paradoxalement, un sujet
trouve au contraire que le système de notation visuel présente trop de détails.
Les carences exprimées ici concernent des éléments dont nous avons prévu la spécification à un
niveau de description plus détaillé non proposé dans l’expérimentation. Ces remarques
renforcent l’idée que l’approche de formalisation doit être flexible et ouverte et que la démarche
de conception doit être itérative et non séquentielle. Dans l’optique de l’implémentation du
système de notation visuel dans un environnement informatique, il faut donc veiller à spécifier
des fonctionnalités pour que chaque concepteur puisse, selon ses besoins, faire figurer les
propriétés descriptives au niveau souhaité, voire même personnaliser certaines propriétés (par
exemple les modalités de configuration des acteurs ou les types d’espaces d’activité).
12.4.3. Utilité d’un système de notation visuel pour la présentation auclient
Lors de la phase 1 de l’expérimentation (conception libre sans cadre structurant fourni), 6 sujets
ne recourent pas à un document spécifique pour présenter leur scénario au client, ce qui
s’explique sans doute en partie par les contraintes imposées par l’expérimentation (temps et
matériel à disposition limités). Dans les cas où un document spécifique a été conçu il prend les
mêmes formes que celles utilisées pour la structuration des idées lors de la conception : schéma,
tableau ou liste à puces.
La moitié des sujets (8) semblent peu satisfaits de leur présentation dans cette phase de
l’expérimentation et expriment un besoin de structuration ou d’un support de présentation. Des
sujets précisent des éléments qui auraient pu les aider tels qu’un outil de présentation (1) ou un
ordinateur pour préparer la présentation (2). Un sujet s’interroge notamment sur l’existence
d’outils qui aideraient à la formalisation et faciliteraient la présentation des scénarios, remarque
qui conforte notre volonté de proposer un tel outil.
Lors de la phase 2 de l’expérimentation, certaines caractéristiques du système de notation visuel
ScenLRPG sont d’ailleurs mises directement en lien avec leur intérêt pour la présentation du
scénario au client : son caractère visuel (5), sa capacité à faire apparaître la structure du scénario
249
(2) et à le rendre plus lisible (4). Le langage visuel est considéré comme un support de
présentation adapté qui facilite la présentation par le concepteur (9) et la compréhension par le
client (3).
Ces informations confirment l’intérêt du langage visuel de description ScenLRPG pouraider le concepteur à présenter son scénario au client.
12.4.4. Utilité du système de notation visuel pour le partage et lacapitalisation
Même si cet aspect n’était pas directement évalué et approfondi lors de l’expérimentation, à
l’issue de la phase 1 deux sujets jugent spontanément leur formalisation inadaptée à une
mutualisation éventuelle de leur travail, preuve d’une certaine préoccupation à ce sujet.
Lors de la phase 2 de l’expérimentation, la capacité du système de notation ScenLRPG à
favoriser la capitalisation a été mise en avant par 2 sujets et sa capacité à faciliter le partage des
scénarios en ce qu’il peut constituer une norme commune de description a été évoquée par 4
sujets.
L’intérêt du système de notation visuel ScenLRPG pour faciliter le partage et lacapitalisation des scénarios semble être une piste à approfondir.
12.4.5. Conception pédagogique et ressorts de jeu
Adéquation d’une méthodologie de conception initiant une réflexion autour des ressorts
de jeu
Les commandes proposées incitent les sujets à proposer un dispositif mettant en œuvre des
ressorts de jeu et des activités collectives pour favoriser la motivation des apprenants. Les
réponses au questionnaire initial (cf. Annexe VII) montrent que les sujets possèdent des visions
variées de la notion de « ressort de jeu » : leur définition de cette notion est parfois assez
éloignée de la définition que nous adoptons (6), et 4 sujets n’arrivent pas à fournir de définition de
cette notion. Malgré cette relative méconnaissance initiale du concept de « ressort de jeu »,
l’analyse des réflexions verbalisées et des scénarios créés lors de la première phase de
l’expérimentation témoignent d’une utilisation de ressorts de jeu identiques à ceux retenus dans
l’approche ScenLRPG (cf. chapitre 10). Les sujets avaient ainsi spontanément proposé das
solutions basées sur le jeu de rôle (4), la collaboration (6), le défi individuel (5), la compétition (4),
le gain de points potentiellement associé à la compétition ou au défi individuel (4), la
reconnaissance (3).
Dans la première phase de l’expérimentation, la notion de ressorts de jeu a constitué une source
de difficultés pour 4 sujets (interrogations et doutes sur ce qui était demandé), et 2 sujets se sont
250
interrogés sur la démarche qu’ils ont adoptée pour mettre en œuvre du jeu dans leur dispositif de
formation.
Même si les concepteurs font spontanément appel à des ressorts de jeu dans leurréflexion, les difficultés exprimées montrent qu’un cadre méthodologique et uneassistance pourraient être utiles pour guider l’intégration de ces ressorts dans un
dispositif de formation.
Utilité du guide sur les ressorts de jeu
Le guide proposé aux sujets lors de la phase 2 de l’expérimentation (cf. Annexe XV) vise à
répondre en partie au besoin d’assistance exprimé. Les résultats montrent que le guide est
globalement bien accueilli : tous les sujets (16) ont relevé au moins un point positif à son sujet. La
fonction du guide est mise en avant par 11 sujets qui le voient notamment comme une aide à la
conception (6), un outil de validation du scénario (2), ou un support à l’argumentation des choix
effectués face au client (1).
Ces résultats montrent que le guide remplit assez bien sa fonction d’aide à la conception. Dans la
deuxième phase de l’expérimentation, même si des sujets éprouvent toujours des difficultés
d’utilisation de certains ressorts de jeu, les remarques relevées indiquent que la plupart (7) les
intègrent assez facilement à leur démarche de conception.
Par ailleurs, des sujets (3) ont établi un lien entre les ressorts de jeu et le contexte pédagogique :
ils expriment que les ressorts de jeu « rendent les choses concrètes » car ils permettent de
définir l’impact du dispositif de formation, d’expliquer le but de la formation, l’un d’eux explique
que les ressorts peuvent être choisis selon les objectifs visés. Ces remarques nous invitent par
ailleurs à envisager comme une perspective de travail l’approfondissement des liens entre
ressorts de jeu et spécifications pédagogiques.
La plupart des points négatifs exprimés sont des questionnements relatifs aux ressorts de jeu :
liste de ressorts trop limitée (2) ; difficulté de compréhension ou interrogation sur l’intérêt de
certains ressorts ou sur la façon de les mettre en œuvre (9) ; interrogation sur la façon d’intégrer
les ressorts dans la démarche de conception (3).
Les sept ressorts de jeu identifiés semblent être une base intéressante de réflexion et
nous souhaitons nous concentrer sur cette liste qui apparaît utilisable car limitée.Toutefois pour répondre aux critiques énoncées, il est prévu d’étoffer le guide sur lesressorts de jeu avec une description plus fine de caractéristiques à définir pour chaque
ressort et de choix à effectuer pour leur mise en œuvre.
Une démarche de conception basée sur la mise à disposition d’exemples de scénarios
Dans la phase 1 de l’expérimentation, certains sujets indiquent que pour les aider dans leur
travail ils auraient souhaité pouvoir se documenter soit sur ce qui se fait ailleurs sur ce type de
demande (1), soit sur l’utilisation du jeu en formation et le Serious Game (1). Un sujet avance que
251
son manque d’expérience en tant que joueur constitue un handicap pour concevoir un dispositif
de formation utilisant le jeu.
Pour assister les concepteurs, un principe de la démarche ScenLRPG est la mise à disposition
d’exemples de scénarios réutilisables (cf. figure 59) : ce principe pourrait a priori répondre aux
besoins exprimés précédemment.
D’autres difficultés exprimées concernant, par exemple, la définition d’activités collaboratives (5)
pourraient également être résolues grâce à des exemples de scénarios.
Dans la phase 2 de l’expérimentation, les exemples fournis sont d’ailleurs jugés utiles en tant que
source d’inspiration (4), donnant plus particulièrement des idées d’activités (6), des pistes sur la
manière de constituer des groupes (2) ou de structurer le scénario (4) et fournissant des
séquences d’activités réutilisables (9).
Figure 59 - Expérimentation 1 - phase 2 : utilisation des exemples
Les exemples sont également jugés utiles pour l’appropriation du système de notation
ScenLRPG (8) et pour éviter l’oubli d’éléments (3). La bibliothèque d’exemples est aussi mise en
lien avec la fonction de capitalisation (5).
Quelques points négatifs concernent les scénarios eux-mêmes (4) : jugés trop ciblés, peu variés,
linéaires ou ne présentant pas l’ensemble des éléments du langage visuel. 2 sujets jugent les
exemples inutiles soit pour eux-mêmes (1) soit pour des concepteurs seniors (1), et notamment
pour la conception de dispositifs sur-mesure innovants (1).
Même si elles doivent être relativisées par rapport au contexte de l’expérimentation où seuls deux
exemples étaient fournis, les remarques sur le fait que les scénarios proposés sont trop ciblés et
peu variés confortent la nécessité d’une bibliothèque riche offrant un panel de scénarios plus
large : des modèles génériques, des exemples de scénarios contextualisés, variés au niveau des
publics cibles, des objectifs, des activités proposées, des ressorts de jeu et de leur mise en
252
œuvre, des modalités d’exécution, des outils utilisés, etc. Ce besoin d’enrichissement de la
bibliothèque est exprimé par les sujets eux-mêmes dans le questionnaire final (2). Une plus
grande diversité de scénarios est également demandée, notamment au niveau des types de jeu
sur lesquels sont basés les scénarios. Dans notre approche, les scénarios LRPG sont
essentiellement basés sur du jeu de rôle.
Il est intéressant de remarquer que les scénarios produits par les 16 sujets sur les deux
commandes présentent déjà une variété importante. Ce premier panel d’exemples va permettre
d’alimenter la bibliothèque dont nous prévoyons l’enrichissement progressif par les utilisateurs
eux-mêmes au sein de l’environnement logiciel.
Les principes d’assistance ScenLRPG : une aide qui risque de freiner la créativité ?
L’approche de formalisation ScenLRPG et les exemples de scénarios sont globalement jugés
utiles par les sujets. A travers les questions posées lors du débriefing, pour 9 sujets, on remarque
une évolution positive du niveau de satisfaction entre le travail de la phase 1 et celui de la phase
2. Des verbatims nous permettent d’associer cette augmentation de la satisfaction à certaines
caractéristiques du système de notation ScenLRPG (par exemple, sa capacité à clarifier ou à
faciliter le travail, son caractère visuel) ou à la mise à disposition d’exemples.
En contrepartie, les gains suggérés semblent s’accompagner d’une impression de perte
d’originalité. Cette idée d’une influence trop forte, d’un frein à la créativité ou à l’innovation liés
aux exemples de scénarios ou à l’approche de formalisation est évoquée par 8 sujets.
L’influence des scénarios exemples mis à disposition est perceptible à travers des modifications
apportées à la commande 1 lors de l’utilisation des outils ScenLRPG en phase 2 de
l’expérimentation (notamment des ajouts d’espaces d’activité ou de points de constitution de
groupes). Quelques séquences d’espaces d’activité identiques à celles des scénarios exemples
ont également été utilisées dans les scénarios de la commande 1 et dans ceux de la commande
2.
L’évocation par certains sujets d’une trop grande influence est à interpréter dans le contexte de
l’expérimentation où seuls deux exemples de scénarios étaient fournis. Une plus grande diversité
de scénarios offrirait des pistes de réflexions plus nombreuses et variées. Toutefois, ces résultats
nous invitent à poursuivre la réflexion sur l’assistance à la conception en lien avec la créativité en
approfondissement notamment les travaux dans le domaine (cf. § 5.1.4).
Par ailleurs, nous estimons que cette influence peut être considérée comme positive : elle amène
en effet les sujets à adopter certains principes de notre approche de conception, comme par
exemple la conception d’esquisses de scénarios indépendantes des modalités de mise en œuvre
(présentiel ou à distance) et des outils qui seront utilisés. Ces principes de conception nous
semblent intéressants en ce qu’ils permettent d’aboutir à des esquisses de scénarios utilisables
dans différents contextes, laissant ouvertes et facilitant potentiellement les possibilités
d’adaptation. Sur la commande 1, on remarque que 14 sujets ont associé des outils aux activités
253
de leur scénario alors que sur la commande 2 seuls 2 sujets ont indiqué ce type d’information. 15
scénarios de la commande 1 étaient accompagnés de leur modalité de mise en œuvre alors que
sur la commande 2 ces modalités étaient précisées uniquement pour 6 scénarios.
Place de la formalisation visuelle et des exemples dans le processus de conception
Les remarques concernant l’influence du système de notation ScenLRPG et des exemples de
scénarios sur la créativité du concepteur doivent nous amener à une certaine prudence.
Pour limiter cette influence et éviter ce potentiel frein à la créativité, il semble nécessaire d’ajouter
une étape préliminaire dans la démarche de conception ScenLRPG : une phase de pré-
conception, de réflexion « libre » (Stubbs & Gibbons 2007 in Nodenot 2007). L’environnement
logiciel pourrait par exemple proposer un espace permettant aux concepteurs d’exprimer leurs
idées sous forme de « brouillon » comme ils le font assez systématiquement sur papier. Le
langage visuel interviendrait dans un second temps pour décrire de manière plus structurée le
scénario.
Cet usage est d’ailleurs indiqué par un sujet dans le questionnaire final et certaines observations
effectuées dans les deux phases de l’expérimentation vont également dans ce sens. Les
démarches de conception des sujets dans la phase 1 de l’expérimentation mais aussi dans la
phase 2, où 5 sujets font précéder l’usage du système de notation ScenLRPG d’une phase de
prise de notes au brouillon, ainsi que les remarques de 8 sujets mettent en évidence la nécessité
d’une telle phase de réflexion libre où les premières idées concernant le scénario en cours de
conception sont « jetées » sur une feuille.
Résultats concernant l’acceptabilité potentielle de nos propositions
Les propositions ScenLRPG sont bien acceptées : un seul sujet a répondu négativement à la
question « Seriez-vous prêt à utiliser cette méthodologie d’aide à la conception dans votre
contexte professionnel ? ». Six sujets ont répondu « Oui, tout à fait », et neuf « Oui plutôt ».
Cela signifie que la perception des sujets à propos de l’utilité et de l’utilisabilité de nos
propositions (i.e. les scénarios LRPG, la méthode basée sur les ressorts de jeu et le langage de
formalisation ScenLRPG) est suffisamment bonne pour qu’ils envisagent leur intégration dans
leurs pratiques professionnelles.
254
Synthèse : mise en œuvre et évaluation n°1 (1/2)
Par rapport aux hypothèses que nous souhaitions valider, cette première
expérimentation nous apporte des résultats globalement positifs :
les concepts de scénario LRPG et de ressorts de jeu sont compris etutilisés par tous les sujets ;
les ressources d’assistance fournies dans notre approche, guide sur lesressorts de jeu et exemples de scénarios, sont jugées utiles et sontutilisées ;
l’approche de formalisation et le système de notation visuel ScenLRPGcorrespondent plutôt bien aux pratiques spontanées des sujets, ils sontappréciés et jugés utiles que ce soit pour la description des scénarios lorsde la conception ou pour la présentation à un tiers ;
nos propositions pour assister la conception de dispositifs LRPG fontl’objet d’une bonne acceptabilité des sujets qui sont pour la plupart prêts àles utiliser.
Les résultats de cette expérimentation permettent également de valider la
typologie de fonctions définie pour caractériser les espaces d’activités : elle
semble assez complète pour l’expression d’activités collectives et est appréciée
notamment parce qu’elle oriente vers la mise en œuvre d’une pédagogie active.
Certains besoins sont mis en évidence. Nous notons par exemple que :
l’approche de formalisation de scénarios doit rester flexible concernant lespropriétés de description rattachées au niveau esquisse : il semblenécessaire de permettre aux concepteurs de choisir à quel niveau dedescription ils souhaitent faire apparaître les différentes propriétés duscénario ;
pour éviter d’influencer trop tôt la réflexion et de restreindre le champ despossibles prématurément, la formalisation et le recours aux exemplesdoivent intervenir après une première phase où le concepteur réfléchit« librement » à quelques pistes de solutions.
Les résultats soulignent des aspects à étoffer :
la typologie de fonctions définie pour caractériser les espaces d’activitédoit être enrichie, notamment pour exprimer des activités individuelles plustransmissives ou des activités de jeu possédant des caractéristiquesparticulières,
la liste de ressorts de jeu, même si elle est jugée utile dans son étatactuel, nécessite d’être complétée au niveau des caractéristiques de miseen œuvre relatives à chaque ressort ;
les exemples de scénarios, même s’ils sont jugés utiles pourl’appropriation du système de notation et pour donner des idées, ne sontpas assez variés et nombreux.
255
Synthèse : mise en œuvre et évaluation n°1 (2/2)
Enfin, ces résultats soulèvent des perspectives de travail à plus long terme,
notamment :
autour des problématiques relatives au frein à la créativité potentiellementgénéré avec le recours à des exemples de scénarios et à l’approche deformalisation ScenLRPG ;
vers une analyse plus poussée des liens entre ressorts de jeu etcompétences visées.
256
Chapitre 13. PHASE 3 : MISE EN ŒUVRE ET EVALUATION N°2
Une seconde expérimentation a été menée afin de compléter les résultats de la précédente et
tester des hypothèses supplémentaires. Elle s’appuie sur un nouvel outil d’assistance à la
conception de scénarios LRPG, prenant la forme d’un prototype d’environnement informatique.
13.1. Présentation du prototype informatique d’environnementd’assistance
Notre prototype se présente sous la forme d'une application Flash accessible en ligne. Au niveau
technique, il a été développé avec l’environnement de programmation Flex 3 Software
Development Kit proposé par la société Adobe.
Le prototype d’environnement d’assistance spécifié est structuré autour de la démarche de
conception ScenLRPG (cf. proposition 1 – chapitre 9) et réserve une place centrale à
l’implémentation du système de notation visuel pour la description d’esquisses de scénarios
LRPG (cf. proposition 3 – chapitre 11).
Tout comme la réflexion sur la démarche de conception et la définition du langage de
formalisation, la spécification de cet outil est elle aussi alimentée par :
des principes généraux issus des travaux sur l’assistance à la conception pédagogique
(cf. chapitre 6),
des principes plus fonctionnels issus de l’étude d’environnements d’assistance à la
conception pédagogique existants, plus particulièrement abordés dans la section 6.5.3.
13.1.1. Organisation globale de l’environnement
Basée sur les grandes étapes de la démarche de conception que nous retenons, l’organisation
de l’environnement informatique est structurée en trois grandes parties (cf. figure 60) :
une zone de spécifications du projet et d’aide au recueil des besoins (cf. ),
une zone de documentation et de capitalisation permettant l’indexation de scénarios dans
une bibliothèque (cf. ) et leur réutilisation lors de la conception de nouveaux dispositifs
LRPG,
une zone centrale (cf. ) réservée à la conception et basée sur la description de la
structure des scénarios à l’aide du système de notation visuel ScenLRPG.
257
Figure 60 - Interface du prototype d'environnement d'assistance ScenLRPG
13.1.2. Spécifications fonctionnelles : implémentation de la démarchede conception ScenLRPG
Dans cette section, nous présentons les principales fonctionnalités spécifiées pour implémenter
nos propositions dans l’environnement d’assistance ScenLRPG. Une présentation plus détaillée
de ces fonctionnalités est disponible en annexes (cf. Annexe XXV) : elle s’appuie sur un cas
d’usage fictif reflétant l’utilisation finale attendue de l’environnement par les utilisateurs cibles.
Nous nous intéressons principalement ici à l’étape de conception de l’esquisse d’un scénario et,
à travers elle, à la manière dont le système de notation visuel est implémenté : c’est en effet cet
aspect du processus de conception qui a été principalement approfondi et mis en œuvre lors de
la seconde expérimentation.
Pour illustrer nos propos, nous nous appuyons sur le scénario LRPG « Bien conduire un entretien
client » utilisé dans la première expérimentation (cf. § 12.2.3) : la figure 61 présente la
formalisation de l’esquisse de ce scénario dans l’environnement ScenLRPG.
258
Figure 61 - Formalisation d'un scénario LRPG dans l'environnement ScenLRPG
Pour créer un tel scénario ex nihilo, le concepteur a à sa disposition une palette de composants
(cf. figure 62) à partir de laquelle il ajoute, par glisser-déposer, un nouvel espace d’activité, une
salle ou un point de constitution de groupes dans l’espace de conception.
Figure 62 - Palette de composants ScenLRPG
Différentes informations peuvent être indiquées sur un espace d’activité (cf. figure 63). Une zone
de texte à compléter permet au concepteur d’indiquer le titre de l’espace d’activité : par exemple
« S’informer sur le module ». La fonction d’un espace d’activité est indiquée en cliquant sur le
point d’interrogation présent sur les espaces d’activité « vierges » : une fenêtre propose les
pictogrammes des fonctions-types (cf. figure 64), un clic sur l’un d’eux l’affiche sur l’espace
d’activité à la place du point d’interrogation.
259
Figure 63 - Détails d'un espace d'activité ScenLRPG
Figure 64 - Palette fonctions ScenLRPG
Les propriétés des espaces d’activité sont renseignées à partir d’une palette spécifique (cf. figure
65). Dans cette palette les propriétés sont organisées en quatre catégories : les ressorts de jeu,
les modalités de mise en œuvre de l’activité, les modalités d’organisation des acteurs, la
présence d’un tuteur.
Les propriétés relatives à la structuration du scénario (type de parcours au sein d’une salle,
itération, parallélisme, etc.) sont renseignées à partir d’une autre palette (cf. figure 66).
Figure 65 - Palette des propriétés descriptives ScenLRPG
260
Figure 66 - Palette des règles d'organisation du scénario
Une fenêtre de propriétés permet de renseigner des informations complémentaires nécessaires à
la définition de l’esquisse du scénario (cf. un exemple Annexe XXVI). Par exemple, pour le point
de constitution de groupes le concepteur indique le nombre de participants constituant les
groupes. Pour le vestiaire, il précise les rôles qui seront attribués aux participants : par exemple,
« conseiller client », « client », « observateur ». Pour une salle possédant une itération, le
concepteur précise les conditions de cette itération (nombre de passages et changements
éventuels à chaque passage) : par exemple ici, le concepteur indique que la salle « Simulations
d’entretiens clients » est parcourue au minimum 3 fois avec, à chaque passage, un changement
de rôle au niveau du vestiaire afin que chaque participant joue au moins une fois chacun des
rôles disponibles. Dans le prototype utilisé lors de l’expérimentation, ces fenêtres de propriétés
n’ont pas été développées telles que spécifiées initialement (cf. Annexe XXVI). Elles se
présentent sous la forme d’un champ texte où le concepteur précise les informations utiles (cf.
figure 67).
Figure 67 - Fenêtre de propriétés d'un composant
Le concepteur peut également renseigner certaines propriétés au niveau global du scénario,
notamment les ressorts de jeu mis en œuvre : pour cela une palette de propriétés identique à
celle de la figure 65 est proposée.
Des fonctionnalités liées à un niveau de description plus détaillé du scénario ont fait l’objet de
spécifications mais n’ont pas été développées dans le prototype utilisé lors de
l’expérimentation 2.
261
13.2. Expérimentation n°2 : présentation
13.2.1. Objectifs et public cible
La deuxième expérimentation est basée sur l’utilisation du prototype informatique
d’environnement d’assistance à la conception présenté dans la section précédente. Elle a été
réalisée auprès de 8 concepteurs pédagogiques de la société Symetrix ayant déjà participé à la
première expérimentation et ayant donc été familiarisés avec la notion de scénario LRPG et les
principes du langage de formalisation ScenLRPG.
A la différence de la première expérimentation qui s’intéressait à la place de l’approche de
formalisation ScenLRPG dans l’activité de conception, cette deuxième expérimentation est
davantage axée sur l’activité de compréhension et de description de scénarios avec la
formalisation ScenLRPG. Cette seconde expérimentation vise plus spécifiquement à valider les
hypothèses suivantes :
l’approche de formalisation ScenLRPG mise en œuvre dans l’environnement d’assistance
permet la compréhension et l’appropriation d’esquisses de scénarios élaborées par
d’autres concepteurs ;
l’approche de formalisation ScenLRPG mise en œuvre dans l’environnement d’assistance
permet une expression homogène et partageable des scénarios,
l’approche de formalisation mise en œuvre dans l’environnement d’assistance est un
support utile pour la communication et les échanges des concepteurs autour des
scénarios produits.
Cette expérimentation vise également à :
recueillir des données qualitatives sur les pratiques des concepteurs concernant le
partage et la capitalisation de scénarios ;
récolter des propositions concernant les critères que les concepteurs jugent utiles pour
effectuer une recherche dans une bibliothèque afin de trouver un scénario à réutiliser.
Les propositions effectuées par les sujets à ce stade sont davantage axées sur leurs
pratiques actuelles, et donc en référence au type de dispositifs de formation qu’ils
conçoivent habituellement (des « modules e-learning » ou des « learning games ») et non
pas spécifiquement adaptées aux scénarios LRPG.
13.2.2. Présentation détaillée du protocole expérimental
4 sessions d’expérimentation ont été organisées. Chaque session réunit deux sujets et propose
une alternance d’activités individuelles et de phases d’échanges verbaux entre les sujets pour
une durée totale d’une heure et demie. L’expérimentation est organisée en deux phases.
262
Une première phase (figure 68) porte plus spécifiquement sur la compréhension et
l’appropriation d’une esquisse de scénario. Dans cette phase les sujets endossent le rôle
d’un concepteur pédagogique qui doit s’approprier un scénario conçu par un collègue afin
de le présenter à un client commanditaire.
Figure 68 - Expérimentation 2 : structure introduction et phase 1
Une seconde phase (figure 69) porte sur l’utilisation du système de notation implémenté
dans le prototype pour décrire un scénario. Dans cette phase, les sujets ont pour
consigne d’utiliser l’outil ScenLRPG afin de formaliser un scénario dont la description leur
est fournie sous forme textuelle.
Figure 69 - Expérimentation 2 : structure phase 2
Le déroulement détaillé de l’expérimentation est présenté dans le tableau 18. Le guide
d’animation destiné aux expérimentateurs et présentant de manière précise les activités et le rôle
des expérimentateurs est également fourni en annexes (cf. Annexe XVI).
263
Activité Objectif pour l’expérimentationIntroductionQuestionnaire (cf. Annexe XVII)Le sujet remplit un questionnaire papier.
Recueillir des données sur lespratiques des concepteursconcernant la réutilisation detravaux existants.Identifier des critères utiles à larecherche de scénarios réutilisablesdans une bibliothèque.
Présentation du formalisme et de l’outil ScenLRPGL’animateur présente le langage de formalisation et lesdifférentes fonctionnalités de l’environnement d’assistance.
Rappeler aux sujets les principes dulangage visuel et les familiariseravec son implémentation dans leprototype informatique.
Phase 1 : langage visuel, description niveau esquisse et compréhension de scénariosInterprétation d’un scénario LRPGLes sujets jouent le rôle de concepteurs pédagogiques. Uncollègue est tombé malade. Il devait présenter une propositionde scénario LRPG à un client commanditaire : on demande auconcepteur incarné par le sujet de prendre connaissance del’esquisse de scénario élaboré par son collègue, de lecomprendre et de l’interpréter avec les informations disponiblesafin de pouvoir le présenter au client.
Recueillir des données sur lamanière dont les sujetscomprennent et s’approprientl’esquisse de scénario présentéeavec le formalisme ScenLRPG.
Mise en commun et échangesL’un des sujets présente le scénario à l’autre sujet comme s’ils’agissait du client. Des échanges ont ensuite lieu entre lesdeux sujets qui comparent leurs divergences ou élémentscomplémentaires dans la compréhension du scénario.
Phase 2 : langage visuel et formalisation de scénariosFormalisation d’un scénarioLes sujets doivent utiliser le langage visuel ScenLRPG pourdécrire un scénario dont la description est fournie sous formetextuelle.
Recueillir des données surl’utilisation du langage ScenLRPGpar les concepteurs :- pour la formalisation d’un scénario,- dans leurs échanges avec un autreconcepteur.
Mise en commun et échangesLes sujets échanges autour de la comparaison de leursproductions et mettent en avant les divergences marquantes.
Débriefing du questionnaire introductifL’animateur liste les critères indiqués par les sujets dans lesquestionnaires remplis en début de session. Il demande deséclaircissements sur les critères éventuellement flous. Ildemande aux sujets s’ils pensent maintenant à d’autres critèresqui pourraient être utiles pour la recherche de scénarios LRPG.
Compléter la liste de critèrescollectée à travers lesquestionnaires.
Tableau 18 - Expérimentation 2 : déroulement
Pendant toute l’expérimentation les sujets avaient à leur disposition un document support : le
guide d’utilisation de l’environnement ScenLRPG (cf. Annexe XXIII). Ce document fournit des
informations utiles pour l’utilisation du langage de formalisation implémenté dans l’environnement
informatique :
l’organisation de l’interface principale de l’environnement (espace de description des
scénarios) ;
264
les principes de l’approche de formalisation ScenLRPG (composants d’un scénario et
propriétés applicables) ;
la signification des différents pictogrammes utilisés.
13.2.3. Données recueillies
Les résultats de cette expérimentation s’appuient sur les données recueillies sous la forme de :
réponses écrites aux questionnaires soumis lors de la phase introductive (cf. Annexe
XVIII) ;
fichiers audio des phases d’échanges entre les sujets et du débriefing final sur le
questionnaire ;
scénarios produits lors de la deuxième phase d’expérimentation (sauvegarde
informatique du scénario construit par les sujets dans l’environnement ScenLRPG).
13.2.4. Présentation du scénario LRPG à s’approprier
Dans la première phase de l’expérimentation, le scénario que les sujets doivent s’approprier est
un scénario LRPG de type jeu de mission basé sur des principes de jeu d’investigation. Ce
scénario, intitulé Mener l’enquête est destiné à une formation au diagnostic d’incident sur une
chaîne logistique.
Nous avons élaboré l’esquisse de ce scénario essentiellement à partir de l’analyse de deux jeux
d’investigation existants destinés au divertissement : le jeu Détective Conseil1 et le jeu Mystery
Express2. Ce travail d’analyse a notamment consisté à dégager les grands principes (structure et
règles) et les ressorts de motivation utilisés dans les jeux d’investigation.
La définition de ce scénario LRPG d’investigation est également basée sur notre connaissance
d’un jeu pour la formation mettant en œuvre une démarche d’investigation (PUISSANCE 7
Multimédia3).
Principes retenus à travers l’étude du jeu Détective Conseil
L’élaboration du scénario LRPG Mener l’enquête est principalement basée sur l’étude du jeu
Détective Conseil (cf. Annexe XXII) dont nous avons retenu différents principes :
une association de compétition et de collaboration : collaboration au sein d’équipes
constituées pour favoriser les échanges entre les participants, et compétition entre les
équipes avec pour but d’être celle qui décrochera la victoire,
1Auteurs : Raymond Edwards, Suzanne Goldberg, Gary Grady. Illustrateur : Sydney Paget. Editeur : Jeux Descartes, 1985.2Auteurs : Antoine Bauza, Serge Laget. Illustrateur : Julien Delval. Editeur : Days of Wonder, 2010http://www.daysofwonder.com/mystery-express/fr/3 Conçu par le département Génie Industriel de l’INSA de Lyon et le LIESP : gi.insa-lyon.fr/files/rte/Recapitulatif_jeux-v5.pdf
265
une structure centrée sur une phase d’investigation : analyse de la situation et choix de
pistes qui permettent de collecter des indices,
une victoire basée sur le fait de résoudre l’enquête de manière optimale, c’est-à-dire en
utilisant le moins de pistes possibles,
des ressorts de motivation constitués par le jeu de rôle, la compétition, l’action collective,
la reconnaissance.
Description du scénario : Mener l’enquête : déterminer les causes d’un incident sur unechaîne logistique
Nous avons conçu ce scénario LRPG sur la base d’une demande client fictive (cf. informations
fournies aux sujets en Annexe XIX) : un constructeur automobile souhaite former ses ingénieurs
en logistique dans le but d’optimiser la gestion de la chaîne logistique (essentiellement au niveau
des flux d’approvisionnement pièces). Une partie de la formation porte notamment sur la
démarche de diagnostic d’incidents (par exemple identification du ou des incidents à l’origine d’un
arrêt de la chaîne de production).
Le scénario LRPG proposé pour répondre à cette demande consiste en un jeu de mission où les
participants doivent mener une investigation pour trouver les causes d’un incident qui a eu lieu
sur une chaîne logistique. Il s’agit d’un dispositif de formation se déroulant à distance et
nécessitant des temps de travail synchrones pour certaines activités collectives.
Après une première étape d’information individuelle des participants sur la formation (objectifs,
durée, déroulement, etc.), des équipes de 4 participants sont constituées. Chaque participant
s’informe ensuite sur la mission précise à accomplir : description de l’incident qui a eu lieu et du
contexte, procédure à suivre pour recueillir des indices et conditions de victoire.
L’élément central du scénario est la phase d’investigation, menée en parallèle par chaque
équipe, où les participants collectent des indices afin de déterminer les causes de l’incident et
ainsi résoudre l’enquête. La phase d’investigation débute par une étape d’analyse de la situation
(circonstances de l’incident) et des différentes pistes qui peuvent être investiguées. Sachant que
la victoire reviendra à l’équipe ayant trouvé la solution en explorant le minimum de pistes, les
membres de l’équipe échangent sur les pistes prioritaires à explorer. Après cette étape collective
de discussion, chaque participant vote pour la piste qui lui semble la plus pertinente à creuser. La
piste ayant obtenu le plus de voix est retenue, les participants prennent ensuite connaissance
des indices fournis par cette piste. Si, à l’issue de cette étape, l’équipe a besoin de plus d’indices
pour définir la cause de l’incident et proposer une solution, la phase d’investigation est réitérée
avec les étapes de débat sur le choix d’une piste, vote et prise de connaissance des indices. Dès
qu’une équipe décide de soumettre sa solution concernant les causes de l’incident, la phase
d’investigation s’arrête. Les réponses des différentes équipes sont partagées et présentées à
l’ensemble des participants avec la présence du tuteur qui désigne les gagnants, c’est-à-dire
l’équipe ayant trouvé les causes de l’incident en utilisant le moins de pistes. Chaque participant
266
prend ensuite connaissance de la démarche optimale qui permet, le plus rapidement possible, de
déterminer les causes d’un incident en explorant uniquement les pistes utiles. Au sein de chaque
équipe, les participants échangent ensuite autour de la comparaison entre la démarche optimale
préconisée et la démarche qu’ils ont adoptée afin de mettre en évidence les points éventuels
d’amélioration. Enfin, tous les participants participent au débriefing collectif de la formation animé
par le tuteur dans le but de faire le point sur l’expérience d’apprentissage vécue, aussi bien sur le
plan pédagogique (ce qui a été appris, comment cela s’applique à leur activité professionnelle sur
le terrain, etc.) et sur le plan humain (qu’ont-ils ressenti durant cette formation ? quelle est leur
opinion sur le dispositif ? etc.)
Les informations présentées ci-dessus constituent la description de référence du scénario Mener
l’enquête : dans l’expérimentation, les sujets disposent uniquement de la formalisation graphique
de l’esquisse (présentée figure 70) et de quelques informations (cf. Annexe XIX). Les
interprétations et explications présentées par les sujets de l’expérimentation sont comparées à
cette description de référence. L’objectif est de déterminer le degré de proximité entre la
compréhension des sujets issue de la formalisation ScenLRPG et la description de référence.
Figure 70 - Formalisation ScenLRPG de l'esquisse du scénario Mener l'enquête
267
268
13.2.5. Un jeu de mission à formaliser
Dans la deuxième phase de l’expérimentation, le scénario LRPG que les sujets doivent décrire à
l’aide du langage de notation ScenLRPG correspond au module 1 du dispositif de formation
présenté dans l’expérimentation 1, et dont les modules 2 et 3 ont été mis à disposition des sujets
comme exemples de scénarios LRPG (cf. § 12.2.3 et Annexe XI).
Le module 1 élaboré à destination des conseillers clients d’un groupe bancaire est un scénario
LRPG de type jeu de mission. Dans le cadre du dispositif global de formation visant l’amélioration
du conseil et de la vente de crédits immobiliers, ce module vient en introduction et concerne plus
spécifiquement la sensibilisation des conseillers aux enjeux du conseil client à travers une
meilleure connaissance des attentes des clients et la prise de conscience de l’importance de les
satisfaire au mieux.
La description de l’esquisse de ce scénario LRPG ne précise pas s’il s’agit d’une formation
présentielle ou à distance. Le scénario met essentiellement en œuvre des activités collectives :
les participants incarnent des clients d’une banque qui sont amenés à produire une charte du
client satisfait dans le cadre d’une étude. La description textuelle plus détaillée de ce scénario
telle que fournie aux sujets de l’expérimentation est disponible en annexes (cf. Annexe XX).
L’Annexe XXI présente la description de cette esquisse de scénario réalisée à l’aide du
formalisme ScenLRPG : cette formalisation, correspondant à celle élaborée par le concepteur
initial du scénario, sert de formalisation de référence pour l’analyse des scénarios produits par les
sujets dans la phase 2 de l’expérimentation 2.
13.3. Résultats : analyse des questionnaires introductifsComme indiqué précédemment, les données recueillies à travers les questionnaires (cf. Annexe
XVII et Annexe XVIII) reflètent les habitudes et le contexte de travail propres aux sujets et
concernent donc plus spécifiquement la conception de modules e-learning ou learning games tels
qu’ils sont définis au sein de la société Symetrix.
Dans la présentation des résultats qui suit, les nombres indiqués entre parenthèses
correspondent au nombre de sujets concernés par le résultat sur un total de 8 sujets ayant pris
part à l’expérimentation.
13.3.1. A propos des pratiques de réutilisation
Le questionnaire délivré au début de l’expérimentation 2 permet tout d’abord de recueillir des
données sur les habitudes des concepteurs concernant la réutilisation de travaux existants.
269
Réutilisation de travaux antérieurs personnels
De façon globale, tous les sujets interrogés (8) ont tendance à réutiliser leurs propres travaux
antérieurs lors d’une nouvelle conception : 3 sujets indiquent effectuer « parfois » cette démarche
et 5 sujets adoptent « souvent » ce comportement.
La réutilisation concerne des éléments de nature et de granularité variées. Les concepteurs
réutilisent des architectures pédagogiques (1) ou des scénarios pédagogiques (2) qu’ils modifient
pour les adapter aux spécificités du nouveau projet. Des concepteurs indiquent réutiliser plus
spécifiquement certaines activités en tant que modèles (5).
Un story-board existant peut être réutilisé (2) dans la phase de conception détaillée et de
rédaction des contenus en tant que modèle, il constitue alors un outil pour gagner du temps (2)
ou ne pas oublier d’éléments (1). Un sujet indique également qu’il réutilise des illustrations issues
de projets antérieurs.
Plusieurs raisons sont indiquées pour justifier la démarche de réutilisation de travaux antérieurs.
La réutilisation peut être motivée par une volonté de conserver une homogénéité entre différents
projets d’un même client (2) ; diminuer la prise de risque (1) et capitaliser le travail effectué (4) à
travers la mise en œuvre d’idées ayant déjà fait leur preuve. Dans les phases plus spécifiques de
conception détaillée et de rédaction des contenus, la réutilisation vise à gagner du temps (2). La
réutilisation peut également avoir un impact sur le développement : elle vise à en réduire les
coûts en réutilisant des modèles d’activités déjà développés au niveau informatique (principe de
l’utilisation de modèles d’activités).
Réutilisation de travaux d’autres concepteurs
De son côté, la réutilisation de travaux effectués par d’autres concepteurs est moins fréquente :
un sujet indique ne jamais réutiliser les travaux des autres, 5 sujets disent s’appuyer parfois sur
les travaux de leurs collègues et deux sujets ont souvent recours à cette pratique. La réutilisation
porte sur les mêmes éléments que dans le contexte de réutilisation de travaux personnels :
architectures de scénarios (1), scénarios (4) ou story-boards (1), activités ou modèles d’activités
(3). Parmi les éléments réutilisés dans les travaux d’autres concepteurs, on en voit ici apparaître
certains qui n’ont pas été cités dans le cas précédent : réutilisation d’idées de scénarios narratifs
servant de fil conducteur aux modules e-learning (1), énoncés de consignes ou de feedbacks
d’activités (1). Les raisons initiant une démarche de réutilisation de travaux d’autres concepteurs
sont en partie similaires à la réutilisation de travaux personnels : industrialisation, c’est-à-dire
capitalisation et réduction des coûts au niveau du développement médiatique (1) ; capitalisation à
travers la réutilisation d’idées qui ont déjà été mises en œuvre et ont fonctionné (1) ; gain de
temps (1) ; homogénéité des projets d’un même client (2). La réutilisation de travaux faits par
d’autres vise également à avoir de nouvelles idées (3), à « utiliser des modèles d’activités
auxquels [le concepteur] n’avait pas pensé ».
270
Synthèse
A travers ces résultats, on peut tout d’abord noter l’hétérogénéité des points de vue pour les
membres d’une même société. De plus, la réutilisation de ses propres travaux apparaît comme
plus fréquente que la réutilisation des travaux de pairs. Dans les deux situations les éléments
réutilisés sont de différentes natures et de différents niveaux de granularité : de l’architecture
globale d’un scénario à l’énoncé d’une activité en passant par un modèle d’activité ou un
scénario narratif. Certains objectifs visés sont communs aux deux types de démarche de
réutilisation tels que la capitalisation d’éléments ayant déjà fait leurs preuves ou
l’homogénéisation de différents modules d’un même client. De son côté, l’utilisation de travaux
faits par d’autres concepteurs semble plus spécifiquement viser la recherche de nouvelles idées.
13.3.2. A propos de la mutualisation des travaux
Pour faciliter la mutualisation des travaux et leur réutilisation, 4 sujets utilisent des méthodologies
spécifiques parmi lesquelles ils citent : une méthodologie de rédaction de story-boards interne à
l’entreprise (2) ; une méthodologie personnelle consistant à se constituer une « bibliothèque »
contenant des activités intéressantes collectées dans les travaux d’autres concepteurs ; une
organisation structurée et homogène des documents d’un projet (architecture pédagogique,
story-boards, ressources médiatiques, etc.) commune aux différents concepteurs de la société
(1).
2 sujets indiquent avoir recours à un outil spécifique : une bibliothèque d’activités ou catalogue
qui prend la forme d’un document numérique regroupant les modèles d’activités utilisés au sein
de l’entreprise.
De nombreuses idées sont proposées par les sujets pour faciliter cette mutualisation et ce
partage de travaux entre concepteurs. L’une des propositions la plus citée concerne un principe
de bibliothèque ou base de données partagée (7) offrant des fonctionnalités d’indexation et de
recherche (4) disponible sur un intranet (2), « centralisant les outils, modèles, processus types »
(1), regroupant les scénarios pédagogiques conçus (4). Des critères d’indexation sont cités :
contexte (1), objectifs pédagogiques, degré de scénarisation (présence plus ou moins forte d’un
fil conducteur narratif, d’une fiction) (2), type de e-learning, orientation (sérieuse, comique),
description du scénario, exemples de situations pour lesquelles ces scénarios peuvent être
adaptés. Le partage de retours d’expériences entre les concepteurs et d’échanges sur les projets
réalisés est cité par 3 sujets comme un moyen de favoriser la mutualisation des travaux.
La dernière question posée aux sujets portait plus spécifiquement sur les critères jugés utiles en
vue d’une recherche de scénarios réutilisables dans une bibliothèque. Les critères proposés en
réponse à cette question, issus du questionnaire papier et de la mise en commun finale effectuée
dans chaque binôme (critères indiqués par un soulignement), peuvent être répartis en plusieurs
catégories :
271
Des critères liés aux spécificités de la formation : sujet de formation ou domaine d’activité
concerné (4) ; objectifs de la formation (3) ; type d’objectif (1) ou catégorie de
compétences mises en jeu (1).
Des critères liés au public cible : public cible (2) (âge, domaine d’activité) ; disponibilité
du public ; nombre de participants.
Des critères liés à la mise en œuvre du dispositif : contexte, environnement de formation
(apprenant seul dans son bureau, etc.) ; organisation du dispositif, c’est-à-dire présentiel,
distance (3) ou hybride distance-présence (1) ; moyens de communication, contraintes
techniques (2) ; formation individuelle ou collective ; durée de la formation (1) (2).
Des critères liés au scénario narratif utilisé dans le dispositif : thématique du scénario
narratif ; degré de scénarisation ou niveau de scénarisation, c’est-à-dire proximité du
scénario narratif avec le contexte professionnel réel (3) ; nombre de personnages ou
protagonistes (2).
Des critères liés aux aspects jeu du scénario : ton (sérieux ou comique) (1) ; « part de
ludique et de sérieux » (1) ; type de traitement pédagogique (« e-learning, learning game
ou serious game »1) (2) ; ressorts de jeu au sens de « collecte d’objets ou d’informations,
exploration, challenge, nombre de points à atteindre, récompense » (1) ; type de
gameplay (par exemple jeu de l’oie) ; ressorts de jeu (2) au sens donné dans nos travaux
(compétition, jeu de rôle, etc.)
Autres critères : dispositif sonorisé ou non ; type du modèle activité (par exemple : activité
de vote).
Synthèse
On constate qu’il n’y a pas de réelle méthodologie commune mise en place pour faciliter la
mutualisation et la réutilisation des travaux au sein de l’entreprise à laquelle appartiennent les
sujets. Les propositions formulées par les sujets montrent l’existence d’un réel besoin à ce niveau
et mettent plus particulièrement l’accent sur l’utilité potentielle d’un dispositif de type bibliothèque
mutualisant les scénarios produits par les concepteurs et facilitant leur indexation et leur
recherche en vue d’une réutilisation.
Les critères de recherche proposés par les sujets pour une telle bibliothèque sont à considérer
avec précaution puisqu’ils sont issus de leurs pratiques actuelles et de leur expérience sur la
conception de modules e-learning ou learning game, toutefois ils sont pertinents par rapport à
notre contexte de travail, notamment parce que les dispositifs learning games possèdent des
caractéristiques communes avec le Learning Role-Playing Game et que leurs contextes
1 Ces termes sont ici utilisés avec la définition couramment employée dans l’entreprise où la distinction entre learning game etserious game se situe au niveau du degré de médiatisation et de complexité des scénarios de jeu implémentés : un learninggame possède des règles et un niveau de médiatisation moins complexes qu’un serious game.
272
d’application sont identiques (ils concernent tous les deux la formation professionnelle en
entreprise).
13.4. Résultats issus des phases 1 et 2 de l’expérimentation
13.4.1. Phase 1 : une approche de formalisation qui nécessite la miseen œuvre d’une démarche d’appropriation spécifique
L’étude des données recueillies lors de la phase 1 de l’expérimentation 2 a été principalement
alimentée par les enregistrements audio des échanges entre les sujets où chacun présentait sa
compréhension de l’esquisse du scénario Mener l’enquête formalisée à l’aide du langage visuel
ScenLRPG.
L’analyse de ces données fait apparaître trois attitudes notables chez les sujets :
d’un côté, et il s’agit de la catégorie majoritaire, des sujets (6) cherchent à s’approprier et
à comprendre le scénario en proposant des justifications pour les choix effectués, en
imaginant la manière dont les différentes activités vont se dérouler, en mettant du lien et
du sens entre les éléments épars présentés par l’esquisse du scénario ;
d’un autre côté un sujet (S3) tente de comprendre et de proposer des justifications aux
caractéristiques du scénario fourni mais déclare ne pas y arriver ;
enfin un sujet (S1) ne cherche pas à approfondir sa compréhension du scénario et se
limite à une présentation des informations de surface telles qu’elles apparaissent sur la
représentation visuelle, sans créer de lien entre elles.
Les sujets qui cherchent à s’approprier le scénario et tissent des liens entre lesinformations
La démarche de ces sujets est caractérisée par une volonté de dépasser les informations de
surface fournies par la présentation de l’esquisse du scénario : « c’est un point où pour moi il
manquait des choses. Donc j’ai imaginé qu’il y avait une consultation de scénario plus détaillée
avec la liste des pistes qu’on pouvait explorer. » (S2).
Leur présentation du scénario est notamment émaillée d’extrapolations, d’exemples issus de leur
imagination illustrant le déroulement d’une activité précise. Par exemple, pour l’espace d’activité
où les participants s’informent sur la mission, ceci est visible à travers des verbatims tels que
« par exemple : "ce jour-là à l’usine voilà ce qui s’est passé, etc." » (S2) ou encore « On a eu un
incident sur une chaîne logistique. Il faut trouver les causes qui ont entraîné cet incident. » (S4).
Les sujets n’exposent pas uniquement les informations textuelles ou visuelles présentes sur
l’esquisse du scénario qui leur a été fournie, ils proposent des justifications aux choix des
activités et aux propriétés. Par exemple plusieurs sujets ont justifié le travail en groupes : « Les
273
groupes sont formés de quatre personnes environ pour que ce soit gérable » (S5), « pour
favoriser l’échange d’expérience, de bonnes pratiques par rapport au type de problème qui est
posé » (S3), « pour favoriser les interactions entre les personnes et l’échange de solution » (S4).
Lorsqu’ils estiment qu’il y a certaines zones d’ombres, les sujets cherchent à les clarifier en
s’appuyant sur des éléments présents à un autre endroit du scénario. Ils établissent ainsi des
ponts entre les différentes informations : « Au début je pensais que eux-mêmes trouvaient des
pistes. Et puis quand j’ai vu que chaque piste donnait accès à des indices, c’est à prévoir en
amont en fait, forcément » (S2), « Dans la mesure où c’est l’équipe qui a trouvé la solution en
utilisant le moins de pistes qui est déclarée gagnante, je suis partie de l’idée qu’ils avaient le
même sujet » (S6), « Moi j’avais compris que tant que tu n’as pas trouvé de solution, l’équipe
décidait d’explorer de nouvelles pistes. Bah parce qu’après la solution c’est en fonction du
nombre de pistes que l’équipe a trouvé. L’équipe gagnante c’est celle qui a exploré le moins de
pistes. » (S7).
De façon globale les interprétations du scénario Mener l’enquête proposées par ces sujets sont
très proches du modèle de référence présenté précédemment (cf. § 13.2.4). On relève tout de
même quelques divergences d’interprétation par rapport au modèle de référence, plus
particulièrement notables pour deux sujets.
Plusieurs causes ont été identifiées pour expliquer les interprétations divergentes et les
« erreurs » commises par certains sujets :
la non prise de connaissance d’informations textuelles présentées dans les zones de
commentaires de certains composants du scénario. Plusieurs sujets sont notamment
passés à côté des informations relatives aux conditions de la victoire indiquées sur
l’espace d’activité « Présenter les résultats des investigations » (2) : « t’as vu où l’équipe
gagnante, tout ça ? […] Ah bah moi j’avais pas vu ce commentaire donc je suis passée à
côté de ce point… » (S8). Un autre sujet n’a pas eu connaissance des informations
relatives aux paramètres de l’itération présentes sur la phase d’investigation : « Mais par
contre quand est-ce que ça s’arrête ? Quand tu es sûr d’avoir pris ta décision ? » (S2).
Ceci peut s’expliquer en partie par des faiblesses d’ergonomie du prototype et du fait que
l’environnement d’assistance ScenLRPG n’est pas encore finalisé. Aucun élément visible
ne signale lorsque des informations sont présentes sur un composant particulier du
scénario : « Quand on passe dessus [le pictogramme itération] en plus ça fait rien…»,
« J’ai pas eu le réflexe de cliquer » (S8).
une mauvaise compréhension de certains éléments du langage de notation visuel : par
exemple un sujet a confondu le symbole itération avec la notion de parallélisme des
activités, un autre a présenté le scénario comme se déroulant en présentiel alors que
c’est le pictogramme formation à distance qui était présent.
274
une mauvaise compréhension de certaines notions utilisées dans le scénario. Le concept
de pistes d’investigation permettant de recueillir différents indices n’a pas été compris par
deux sujets, ils semblent avoir assimilé « piste » et « solution » dans le sens où une piste
mène aux causes de l’incident : « Pour moi chaque équipe le fait une fois et présente le
résultat de son travail » (S8) ; « Ensuite ils devront voter pour la solution choisie pour
déterminer la cause de l’incident » (S5).
une interprétation fortement influencée par la vision personnelle des sujets qui diffère de
celle du concepteur initial du scénario. Par exemple à propos du caractère synchrone, un
sujet considère que c’est tout le dispositif qui est en mode synchrone, c'est-à-dire que
même les activités individuelles doivent être effectuées au même moment par tous les
participants : « A partir du moment où on commence la formation, c’est tout le monde
ensemble » (S8), alors que dans le modèle de référence, la notion de synchronicité est
utilisée pour caractériser les activités collectives et indiquer la nécessité d’un rendez-vous
entre les participants.
Un sujet qui n’arrive pas à s’approprier le scénario
On remarque chez ce sujet une volonté d’aller au-delà des informations fournies par l’esquisse
du scénario. Il cherche à donner des explications sur les choix effectués dans le scénario qu’il est
amené à présenter, toutefois ses explications manquent de conviction et d’assurance comme
nous le constatons à travers les verbatims suivants : « J’imagine peut-être… », « Quand je dis
que je nage, je nage… », « Là j’avoue qu’à ce stade là sous quelle forme, j’en sais rien du
tout… », « je suppose… » Le sujet finit par « abandonner » en cours de présentation, n’ayant pas
pu aller plus loin dans son appropriation du scénario. Il donne plusieurs raisons à ses difficultés :
d’une part son manque de disponibilité « mentale », la session d’expérimentation faisant suite à
une activité professionnelle qui a accaparé le sujet ; d’autre part le sujet fait part de son besoin
habituel de disposer de temps et d’informations de départ plus étoffées afin de « rentrer » dans
un sujet nouveau.
Un sujet qui n’essaie pas de comprendre de manière approfondie
La démarche de l’un des sujets (S1) s’est nettement démarquée de celle des autres : à travers sa
présentation, il s’est avéré manifeste que le sujet ne cherchait pas à dépasser les informations
fournies de manière graphique ou textuelle par la formalisation du scénario. Il n’essayait pas de
créer du lien entre les différentes informations ce qui a donné l’impression qu’il ne mettait pas de
sens derrière toutes ces informations, et qu’il n’y avait pas de réelle cohérence dans le scénario
présenté. Le sujet explique sa démarche de la manière suivante : « Moi je me suis concentrée
que sur les outils, voir que c’était individuel, collectif, tout ça… J’ai pas essayé de comprendre. »
Suite aux échanges avec l’autre participant de l’expérimentation, on comprend que ce sujet (S1)
est resté focalisé sur les informations de surface et « n’a pas cherché à comprendre » sans doute
par manque de temps : « j’ai pas eu le temps de réfléchir à ça, j’étais trop concentrée sur les
275
outils et comment ça se déroule ». La discussion avec l’autre sujet (S2) qui a présenté une
interprétation du scénario très proche de l’interprétation de référence, fait apparaître que le sujet
S1 est capable d’adopter la démarche consistant à faire des ponts entre plusieurs informations
présentées de manière distante dans le scénario.
Synthèse
Le niveau de description esquisse n’apparaît pas adapté à tous les profils d’utilisateurs : certains
ont besoin d’informations très détaillées. Pour ceux qui peuvent se contenter du niveau esquisse,
l’approche de formalisation ScenLRPG fonctionne plutôt bien mais demanderait un temps
d’appropriation plus long.
Ce niveau de description, l’esquisse, présenté avec le système de notation ScenLRPG permet la
compréhension d’un scénario LRPG, mais cela se révèle un exercice complexe qui suppose que
les sujets soient en mesure d’adopter une démarche particulière d’appropriation basée sur des
inférences, des extrapolations pour définir les éléments manquants et éclaircir les zones d’ombre,
des ponts à effectuer entre différentes informations. Le concepteur doit être prêt à faire siens les
choix adoptés et à se mettre à la place du concepteur initial du scénario.
13.4.2. Phase 2 : une approche de formalisation opérationnelle quilaisse place à la « créativité »
Les résultats de la phase 2 de l’expérimentation sont issus de l’analyse des scénarios produits
par les sujets à l’aide de l’outil ScenLRPG, ainsi que de l’étude des enregistrements audio des
échanges conduits entre les sujets dans le but de comparer leurs productions.
Avant toute chose, il faut signaler que sur les 8 formalisations du scénario produites, 3 ne sont
pas complètes par manque de temps et une autre a été finalisée oralement par le sujet. De plus,
lors de la phase d’échanges oraux certains sujets ont mis en évidence des modifications à
apporter à leurs scénarios : les scénarios sur lesquels nous basons nos analyses prennent en
compte ces rectifications. Ces précisions apportées dans les échanges nous permettent
notamment de compléter la structure de l’un des scénarios.
Descriptions produites : points communs et différences
Tout d’abord, une première lecture des scénarios formalisés par les sujets met en évidence que 7
productions sur 8 expriment bien les principales idées du scénario. Seule une production
s’éloigne quelque peu du cadre défini par la présentation textuelle du scénario à formaliser,
notamment en proposant un jeu de rôle mettant en scène des rôles différents de ceux indiqués
dans la description textuelle. Le sujet (S4) s’en rend compte lors des échanges avec son collègue
qui lui fait remarquer cette prise de liberté :
S3 : « mais ils étaient pas tous que des clients ? »
276
S4 : « c’est vrai, moi j’ai extrapolé. »
La comparaison des scénarios produits par les sujets avec la formalisation de référence (cf.
Annexe XXI) montre que les principaux points communs se situent sur la phase d’introduction.
Toutes les descriptions produites par les sujets commencent par un espace d’activité
« s’informer » qui vise à présenter la formation, directement suivi d’un point de constitution de
groupes. Une légère variante est observée chez un sujet qui a décomposé la phase introductive
en deux espaces d’activités : l’un pour « S’informer sur la formation » et l’autre pour « S’informer
sur le scénario ».
Dans la phase de conclusion du scénario, sur les 5 scénarios qui sont complets, on observe que
tous font apparaître une activité de débriefing réunissant tous les participants et menée par un
tuteur. On remarque une variation au niveau de la dernière activité du scénario, décrite dans le
scénario de référence comme la prise de connaissance d’une synthèse effectuée par le tuteur et
exprimée à l’aide d’un espace d’activité de type « capitaliser » pour exprimer les aspects
d’archivage et de partage du document. Parmi les 5 productions finalisées, 3 font apparaître une
activité à la suite du débriefing. Cette activité, correspondant à la synthèse élaborée par le tuteur
à destination des sujets est exprimée à l’aide soit d’un espace d’activité « capitaliser » (1), soit
« produire » (1). Dans les deux cas, « capitaliser » ou « produire », l’activité se réfère à l’action
du tuteur et non à celle des apprenants : il est indiqué « rédiger une synthèse » ou « synthèse »
et il n’est fait aucune mention des modalités d’organisation des apprenants sur cette activité,
seule la présence d’un tuteur est spécifiée. Pour la troisième production, la fonction de l’espace
d’activité proposé à la suite du débriefing est inconnue, le sujet l’ayant évoquée oralement.
L’étude des descriptions produites dans la phase 2 de l’expérimentation met en évidence que les
différences majeures concernent principalement la phase centrale du scénario, portant sur
« l’élaboration des chartes clients ». Dans le scénario de référence, cette activité est formalisée à
l’aide d’un espace d’activité de type « produire » : un sujet a formalisé cette étape de la même
manière. Dans les formalisations des autre sujets cette phase est constituée : d’un espace
d’activité « débattre » seul (2) ou associé à « sélectionner » (2) ou « capitaliser » (1) ou
« produire » (1). Un sujet a associé les espaces d’activités « débattre », « sélectionner » et
« produire ». Globalement on note donc que l’espace d’activité « débattre » est celui qui est
majoritairement présent dans la description de la phase d’élaboration des chartes : il est en effet
utilisé au total dans 7 des 8 scénarios produits par les sujets. L’espace d’activité « produire »
appliqué à un groupe d’apprenant comme dans le scénario de référence ne semble pas suffire
aux sujets pour exprimer une activité de production en groupe : la notion d’échanges entre les
sujets n’y est peut-être pas assez présente, d’où l’utilisation plus fréquente de l’espace d’activité
« débattre » en tant qu’« élaboration de la charte client » (2) ou en tant qu’étape préalable à la
rédaction de la charte (3).
L’observation des descriptions produites à l’aide du langage ScenLRPG met en évidence que
tous les sujets ont positionné des ressorts de jeu au niveau du scénario global. Seuls 2 sujets ont
277
indiqué exactement les mêmes ressorts que sur la description de référence, c’est-à-dire « jouer
un rôle », « être en compétition », « être reconnu » et « agir collectivement ». Deux sujets ont
indiqué uniquement « être en compétition » et « jouer un rôle » et les 4 autres y ont ajouté le fait
d’ « être reconnu ». Le ressort « agir collectivement » a donc été le plus « oublié » alors que le
caractère collectif des activités composant le scénario apparaît de façon manifeste dans toutes
les descriptions proposées par les sujets : ceci exprime-t-il le fait que l’action collective n’est pas
considérée au premier abord comme un ressort de motivation ?
6 sujets sur 8 ont également positionné quelques ressorts de jeu au niveau d’espaces d’activité,
notamment le ressort « être en compétition » (6) également utilisé dans le scénario de référence
sur l’espace d’activité intitulé « Elire la charte de référence » pour indiquer qu’une notion de
compétition entre les équipes était mise en œuvre de façon prépondérante à cet endroit du
scénario : « la compétition elle intervient vraiment au moment du vote » (S6), « C’est le top de la
compétition » (S7).
Des divergences qui interrogent certaines règles de l’approche de formalisation
ScenLRPG
L’étude des descriptions produites par les sujets au regard de la description de référence met en
évidence quelques particularités, voire difficultés dans l’utilisation de l’approche de formalisation
ScenLRPG. Certaines problématiques soulevées sont sans doute dues à un manque
d’appropriation du système de notation et/ou à une insuffisance des explications fournies.
Par exemple, l’espace d’activité « recevoir un rôle » n’a été utilisé que dans 5 scénarios alors que
la description textuelle initiale du scénario stipulait « Chaque participant recevra le rôle d’un
client. » Dans les cas où l’espace d’activité « recevoir un rôle » n’a pas été utilisé, on remarque à
la place l’utilisation d’un espace d’activité « s’informer » (2) consistant à « s’informer sur le
scénario » (1), ou « s’informer sur son personnage ». Chez un sujet « recevoir son rôle » est
précédé d’un espace d’activité « s’informer sur la mission ». Enfin chez un sujet nous ne trouvons
pas de trace de l’expression de cet aspect de distribution de rôle. L’utilisation de l’espace
d’activité « s’informer » à la place de « recevoir un rôle » est peut-être dû à une ambigüité relative
à la dénomination utilisée : est-ce que l’espace d’activité « recevoir un rôle » inclut l’aspect prise
de connaissance du rôle ?
Pour l’un des sujets, on constate une ambigüité dans la compréhension des espaces d’activité
« débriefer » et « débattre » : « débriefer » est utilisé pour désigner une activité qui consiste à
« mettre en commun, se décider » qui correspond davantage à un espace d’activité de type
« débattre » présentée dans le guide d’utilisation du langage ScenLRPG comme une « activité
d’échanges sur un sujet pour éventuellement aboutir à une décision commune (convergence) »,
alors que « débriefer » est présenté dans ce guide comme une activité de « discussion-bilan des
activités effectuées ».
278
La formulation des titres des espaces d’activité est variée. 3 sujets utilisent des verbes à l’infinitif,
principe du langage ScenLRPG explicitement indiqué dans le guide d’utilisation fourni aux sujets :
« Titre : formulé à l’aide d’un verbe à l’infinitif qui exprime l’activité qui sera effectuée par
l’apprenant ». 3 autres sujets formulent les titres des espaces d’activité à l’aide de groupes
nominaux : « Elaboration de la charte », « présentation de la charte ». Enfin pour les 2 sujets
restants : les formulations sont hétérogènes, on trouve dans leur scénario des espaces d’activité
nommés à l’aide d’un verbe à l’infinitif alors que d’autres sont formulés à l’aide d’un groupe
nominal. Dans l’approche de formalisation ScenLRPG, la formulation à l’aide d’un verbe à
l’infinitif vise à fournir une description homogène et à lever les potentielles ambigüités en
exprimant les activités du point de vue de l’activité qui sera effectuée par l’apprenant. Ces
observations questionnent le choix effectué lors de la définition de l’approche de formalisation
ScenLRPG : la formulation à l’aide d’un verbe à l’infinitif est-elle la plus adaptée ? Peut-être ne
faut-il pas imposer de norme ? Dans ce cas comment veiller à ce que les formulations restent
homogènes et non ambigües pour constituer un langage partageable ?
D’autres exemples concernant l’usage du composant « salle » sont sans doute également liés
soit à un manque d’appropriation du formalisme soit à un manque d’explication sur son
fonctionnement. Un sujet n’a pas utilisé de salle pour regrouper certains des espaces d’activités
composant son scénario : « sachant que voilà, je patauge encore un peu avec l’outil, par exemple
l’outil « room », je sais pas trop encore… » (S3). Un sujet a quant à lui utilisé une salle contenant
un seul espace d’activité alors qu’une salle a pour fonction de regrouper plusieurs espaces
d’activités, généralement parce qu’ils font partie d’une phase visant le même objectif ou parce
qu’ils possèdent d’autres propriétés communes factorisables au niveau de la salle (modalité
d’organisation des participants, tutorat, etc.)
Synthèse
Les descriptions visuelles produites par les sujets, à partir d’un même scénario de départ,
possèdent des points communs mais aussi une certaine diversité. Ces résultats montrent que le
système de notation ScenLRPG offre une richesse d’expression : il permet à chacun d’exprimer
sa vision d’une situation, se révélant ainsi flexible et propice à une certaine créativité. Il n’impose
pas une solution unique : comme avec tout langage, une même idée peut être exprimée de
différentes façons et avec des nuances variées.
Le positionnement des ressorts de jeu est lui aussi ouvert : à un niveau global il indique les
ressorts de jeu mis en œuvre sur l’ensemble du scénario de manière transversale, alors qu’un
positionnement plus fin sur un espace d’activité spécifique signale l’expression dominante d’un
ressort dans cette activité précise. Ce double positionnement possible est bien exploité par la
majorité des sujets.
279
De plus, les résultats montrent qu’un temps d’appropriation plus long et qu’une information plus
développée sur le fonctionnement du système de notation ScenLRPG sont nécessaires pour
s’assurer d’une utilisation conforme aux règles définies.
Même si le langage ScenLRPG est globalement utilisé de manière appropriée, les résultats
soulèvent des questions relatives à certains de ses principes : ambigüités dans la typologie
d’activités définie, utilisation non prévue de certains composants telle que la salle, non respect de
la formulation des titres des espaces d’activité sont autant de points sur lesquels une réflexion
plus approfondie devra être menée pour s’assurer de leur adéquation dans le contexte
d’application prévu.
13.4.3. L’approche de formalisation ScenLRPG comme support à ladiscussion
L’analyse des échanges qui ont eu lieu entre les sujets dans la phase 1 de l’expérimentation met
en évidence que le niveau de description esquisse, sans doute parce qu’il fournit peu
d’informations sur le scénario, entraîne des divergences de compréhension qui font l’objet de
discussions argumentées. Dans la phase 1, on remarque que certains sujets s’appuient sur des
éléments visuels du système de notation ScenLRPG pour argumenter leur compréhension du
scénario, les échanges entre les sujets S5 et S6 illustrent ce point :
S6 : « Finalement quand tu as présenté on avait l’impression qu’ils étaient tout le temps en
groupe mais en fait non. Y’a souvent des activités à faire seul. »
S5 : « Par exemple : voter pour une piste, on sait pas si c’est le groupe qui vote. »
S6 : « Si c’est individuel ».
Les échanges entre les sujets dans la phase 2 montrent que le langage de formalisation
ScenLRPG fait, dans une certaine mesure, office de langage commun. Lorsqu’on demande à des
sujets de comparer les scénarios qu’ils ont produits, ils sont capables d’identifier très rapidement
des points communs ou des différences entre leurs productions : « c’est la même chose mais
détaillé » (S1 et S2) ; « moi au début je suis partie pareil que toi » (S4), « moi j’ai découpé » (S4).
Synthèse
Que ce soit dans la phase 1 ou dans la phase 2 de cette seconde expérimentation, l’approche de
formalisation ScenLRPG apparaît comme un support aux échanges, elle fait partie intégrante des
discussions et permet aux sujets de dialoguer et de se comprendre mutuellement, d’appréhender
rapidement un scénario formalisé par un autre concepteur.
Cette place de l’approche de formalisation ScenLRPG dans les échanges ouvre des perspectives
quant à son utilité dans un cadre de co-conception de scénarios où plusieurs concepteurs sont
amenés à travailler en collaboration. Cet intérêt de la formalisation ScenLRPG, pour le dialogue
avec le client notamment, avait déjà été évoqué dans l’expérimentation 1 (cf. § 12.4.3).
280
Synthèse : mise en œuvre et expérimentation n°2
Par rapport aux hypothèses que nous souhaitions valider, cette seconde
expérimentation nous amène aux conclusions suivantes :
le langage de formalisation ScenLRPG mis en œuvre dans l’environnementd’assistance permet la compréhension et l’appropriation d’esquisses descénarios élaborées par d’autres concepteur, mais elle suppose que les sujetsaient une aptitude à faire des inférences, à extrapoler et à se projeter à la placedu concepteur initial du scénario ;
le langage de formalisation ScenLRPG mis en œuvre dans l’environnementd’assistance permet une expression homogène pour les activités qui ne sontpas source d’interprétations multiples. Toutefois, comme tout langage, iln’aboutit pas à une solution unique pour exprimer un même scénario : cetteouverture se révèle être un point positif pour supporter la créativité ;
le langage de formalisation ScenLRPG supporte la communication desconcepteurs autour des scénarios LRPG et leur permet de se comprendremutuellement en leur fournissant un langage commun.
Nous notons également à travers les résultats de cette expérimentation que,
même si le langage ScenLRPG est globalement bien utilisé et compréhensible,
certains éléments du système de notation visuel doivent être retravaillés afin de
réduire de potentielles sources d’ambigüité.
Lorsqu’une version complète du prototype d’environnement informatique
d’assistance sera développée, de nouvelles expérimentations devront être
menées afin de tester des hypothèses notamment liées à l’ergonomie du dispositif
et la façon dont le système de notation y est implémenté.
281
PARTIE 4 : CONCLUSION
Dans ce travail de thèse nous avons cherché à élaborer des propositions visant à soutenir la
conception de dispositifs Learning Role-Playing Game. Cette conclusion présente tout d’abord un
bilan des travaux réalisés mettant en évidence les apports et limites de nos propositions. Elle
pose ensuite des perspectives de recherche qui s’ouvrent en prolongement de ces travaux.
282
Chapitre 14. BILAN ET PERSPECTIVES
14.1. Contributions de nos travaux
14.1.1. Un cadre théorique et applicatif
Pour répondre à notre problématique portant sur la conception de dispositifs de formation utilisant
le jeu, notre travail nous a tout d’abord conduits à poser un cadre théorique à travers une étudeexploratoire et structurante des thématiques contribuant à ce domaine transdisciplinaire.
Nous avons ainsi étudié les caractéristiques du jeu et nous nous sommes intéressés à sa place
dans la formation. Nous avons exploré la notion de motivation, trait d’union entre jeu et formation,
que nous plaçons comme fil conducteur de notre réflexion. Nous nous sommes penchés sur
l’activité de conception, et plus spécifiquement sur la conception pédagogique, socle de nos
travaux. Nous avons prolongé cette étude dans le domaine de la conception de jeu ou game
design et avons mis en évidence des caractéristiques propres à la conception de jeux pour la
formation. Pour finir, notre étude exploratoire s’est focalisée sur l’assistance à la conception
pédagogique ainsi que sur des langages de conception utilisés dans ce domaine.
Cette étude exploratoire possède la particularité de réinterroger des fondements trop souvent
considérés comme acquis, tels que l’utilisation du jeu pour la formation, et surtout son orientation
récente vers des formes issues du jeu vidéo. Elle a permis, grâce à une vision large des travaux
menés dans différents champs disciplinaires, et en considérant les contraintes-clés de notre
contexte d’application et de notre public cible (cf. § 1.1 et 1.2), de délimiter un périmètre de travail
et de cibler un objet de recherche peu souvent étudiés. La proposition de dispositifs LearningRole-Playing Game (LRPG) en résultant se démarque des solutions courantes dérivées du jeu
vidéo (souvent appelées serious games) en apportant de nouvelles réponses et en satisfaisant
des critères d’adaptation et d’évolutivité rarement considérés.
Cette thèse CIFRE menée en partenariat avec la société Symetrix bénéficie d’un ancrage réelsur le terrain : le cadre théorique a ainsi été complété par les pratiques et problématiques
identifiées dans ce contexte, conférant à nos propositions une certaine validité opérationnelle.
14.1.2. Des propositions pour répondre à notre problématique
L’étude exploratoire et les pratiques de terrain ont alimenté les différentes propositions élaborées
pour répondre à la problématique de recherche définie.
Deux expérimentations ont été conduites à l’aide de deux prototypes d’outils de conception
spécifiés pour mettre en œuvre nos propositions. Ces expérimentations ont réuni un panel
significatif de sujets correspondant au public ciblé (ingénieurs de formation et concepteurs
283
pédagogiques en charge de la définition de dispositifs de formation). Les expérimentations
menées apparaissent consistantes tant au niveau des hypothèses testées que de la qualité,
diversité et quantité des données recueillies.
Les premières hypothèses formulées concernant l’assistance à la conception de dispositifs LRPG
(cf. § 1.3.1) sont validées par les expérimentations menées. Elles sont notamment mises en
œuvre à travers la proposition d’une démarche de conception structurante basée sur une
approche flexible et non prescriptive de l’assistance, qui vise à fournir des points de repères au
concepteur dès la phase de recueil de besoins. Dans le cadre de la démarche globale ainsi
définie, nos travaux se focalisent sur l’accompagnement dans les étapes initiales de conception,
plus particulièrement sur la définition des esquisses de scénarios LRPG. Pour soutenir la
description des esquisses, nous proposons un langage de formalisation exprimé à l’aide d’un
système de notation visuel.
Au vu des résultats expérimentaux obtenus, ces premières propositions semblent constituer une
méthodologie utilisable et utile pour assister la conception de scénarios LRPG. Le langage de
formalisation ScenLRPG se veut homogène, intuitif, structurant mais flexible et facile
d’appropriation. Outre son système de notation visuel, l’un des points d’intérêts saillants de notre
approche de formalisation est la typologie d’activités proposée. Composée de onze fonctions-
types, cette typologie s’avère fonctionnelle et semble couvrir de façon quasi-exhaustive les
besoins relatifs aux scénarios LRPG. Le langage de formalisation ScenLRPG semble adapté aux
deux principaux objectifs visés : en tant que langage réflexif, il accompagne la structuration
personnelle des idées du concepteur lors de la définition d’un scénario ; en tant que langage de
communication, il soutient les échanges autour des scénarios LRPG conçus.
D’après les résultats issus des expérimentations, l’approche proposée concernant l’intégrationdu jeu dans la formation est valide. Se démarquant d’approches fréquemment rencontrées
focalisées sur la structure et les règles du jeu, notre approche met en avant les facteurs
favorisant l’engagement des apprenants dans une activité : pour accompagner la réflexion des
concepteurs lors de l’élaboration des scénarios LRPG et favoriser la génération d’idées, septressorts de jeu ainsi que des propriétés de mise en œuvre ont été identifiés. Cette approche de
l’intégration du jeu dans la formation semble entrer en cohérence avec les démarches
spontanées et les compétences du public cible, concepteurs experts en pédagogie mais non en
jeu. Associée à la mise à disposition de scénarios LRPG réutilisables, l’approche orientée vers
l’utilisation de ressorts de jeu semble utile pour la génération d’idées et pertinente pour guider la
réflexion.
14.1.3. Des résultats transférables dans le contexte d’application ciblé
Ancrés dans des pratiques de terrain, nos travaux visent à soutenir l’activité de conception
pédagogique pour la formation professionnelle. Certaines de nos contributions sont ainsi
284
directement exploitables par les sociétés prestataires en ingénierie de formation ou par les
services internes de formation des grandes entreprises.
Nos travaux offrent par exemple une ouverture vers des dispositifs aujourd’hui peu connus,
basés sur le jeu de rôle pouvant être mis en œuvre à distance et de manière synchrone.
A un niveau plus général, la démarche que nous proposons tend à ouvrir le champ des
possibles : en se détachant des contraintes d’implémentation dans les étapes initiales de
conception, elle vise à favoriser la créativité et l’exploration de solutions variées. Ce parti pris a
également pour objectif de favoriser l’élaboration de scénarios génériques réutilisables dans une
large variété de contextes. Même si cette approche peut paraître comme inhabituelle dans le
contexte d’application ciblé, nous avons pu constater à travers les expérimentations menées que
les concepteurs sont en mesure de l’adopter et que les productions obtenues sont riches et
diversifiées.
Concernant son transfert dans les pratiques professionnelles, la démarche que nous proposons
semble appropriable et bénéfique grâce aux principes directeurs qu’elle définit. La démarche
globale oriente la réflexion des concepteurs en guidant le recueil de besoins et en favorisant la
réutilisation de scénarios. Elle les engage à se questionner sur les ressorts de jeu possibles et
sur les types d’activités pertinents. Elle leur permet d’exprimer les scénarios dans un langage de
formalisation structurant et communicable.
Les prototypes d’outils de conception développés (outil « papier » et environnement informatique
d’assistance) implémentant la démarche de conception et le langage de formalisation ont prouvé
leur intérêt lors des expérimentations : en tant que prototypes, ils fournissent des bases
intéressantes pour des outils d’assistance utilisables à grande échelle au sein du contexte
d’application ciblé.
14.2. Limites de notre travailEn prenant du recul sur le travail effectué, nous en identifions certaines limites ainsi qu’un
ensemble de points d’amélioration possibles.
14.2.1. Limites des partis pris initiaux et du cadre théorique
L’une des premières limites concerne le domaine de recherche lui-même : nous nous inscrivons
dans le domaine des jeux pour la formation, domaine hétérogène, peu exploré, surtout lorsque
l’on cherche à sortir du cadre actuellement le plus courant des jeux vidéo. Ce domaine est
d’autant plus difficile à explorer lorsqu’il concerne la formation professionnelle en entreprise où
peu de travaux de recherche sont menés et où la communication sur les projets est faible,
contrairement aux travaux portant sur la formation scolaire ou universitaire. Nos travaux
285
apparaissent ainsi comme une première proposition dans un domaine qui va être amené à
évoluer.
Une autre limite qui peut être mise en avant concerne l’objet d’étude que nous avons ciblé : dans
ce domaine hétérogène, nous avons choisi les scénarios LRPG, solutions qui, associant activités
collectives et jeu à distance de manière synchrone, sont encore peu ancrées dans les pratiques
terrain : nos travaux font donc le pari que ce type de dispositif se développera à l’avenir et, dans
cette optique, des ajustements, approfondissements et nouveaux besoins verront le jour.
Nous n’avons pas exploré les aspects relatifs à l’éthique concernant l’usage du jeu dans la
formation professionnelle. Ces aspects sont à étudier soigneusement, en particulier sur les
problématiques liées à l’évaluation des apprenants. Suivant cette remarque, les dispositifs
évoqués plus haut posent par exemple la question délicate de la confidentialité des données
enregistrées.
14.2.2. Limites de nos résultats
Par rapport aux deux expérimentations menées, des critiques pourraient être émises concernant
la faible diversité des sujets composant l’échantillon. Même si le nombre de sujets est acceptable
pour une expérimentation adoptant une démarche qualitative, l’échantillon mériterait en effet
d’être complété avec des sujets venant d’autres entreprises pour consolider les résultats obtenus.
Ce manque de diversité concerne en particulier la seconde expérimentation (portant sur
l’utilisation du prototype d’environnement informatique ScenLRPG) où tous les sujets sont issus
de la même société.
Les résultats obtenus après la première expérimentation (mettant en œuvre l’outil de conception
« papier ») pourraient également être complétés en croisant les données collectées avec les
profils des sujets (âge, expérience en termes de conception de jeu pour la formation, etc.) et le
type de fonction qu’ils occupent (concepteur pédagogique dans une société prestataire en
ingénierie de formation ou ingénieur pédagogique au sein d’un service de formation interne d’une
entreprise).
Dans la seconde expérimentation, pour éviter certains biais, le prototype logiciel utilisé aurait
mérité un développement plus abouti du point de vue des fonctionnalités proposées, ainsi qu’une
réflexion plus poussée sur les aspects ergonomiques.
Des limites peuvent être mises en évidence concernant la validation de nos propositions. On
aurait pu envisager de les tester sur des scénarios LRPG plus variés et complexes. De plus, le
système d’assistance que nous proposons peut sembler « se limiter » à des principes
structurants et à l’identification de ressorts de jeu à mettre en œuvre : nous n’avons à ce stade
pas défini de liens entre ressorts de jeu et compétences ciblées par la formation, ces liens
pourront être établis de manière pertinente et valide seulement au travers d’un usage à plus large
286
échelle de ce type de dispositif, fournissant alors des retours d’expériences et une expertise
réels.
Concernant le transfert de nos résultats sur le terrain visé, on peut noter que l’outil d’assistance
« papier » nécessiterait d’être redéfini pour un usage en situation professionnelle : le prototype
actuel, initialement destiné aux expérimentations, s’avère difficilement réutilisable et peu
opérationnel sur du long terme. Une version plus fonctionnelle a ainsi été élaborée dans le cadre
d’un atelier organisé lors de l’école d’été Game Based Learning1 (Autrans 2011). Il semble
intéressant de poursuivre la réflexion sur la définition d’outils de ce type.
Le prototype logiciel est quant à lui pour le moment limité à la définition d’esquisses de
scénarios : pour être réellement utilisable sur le terrain, l’ensemble des fonctionnalités couvrant la
totalité du processus de conception doivent être développées et une réflexion ergonomique plus
approfondie doit être menée.
14.3. Perspectives de recherche
14.3.1. Des prolongements directs de nos travaux
Approfondir l’assistance à la conception et à la réutilisation
Les premières perspectives de recherche constituent un prolongement direct de nos travaux et
sont liées à certains résultats issus des études et expérimentations menées. D’une part, nous
retenons que la conception d’un scénario LRPG met en jeu de nombreuses modalités (ressorts
de jeu, compétences visées, thématique abordée, formation à distance ou en présentiel, activités
synchrones ou asynchrones, etc.) dont les possibilités de combinaison sont variées. D’autre part,
les scénarios LRPG produits par les sujets lors de la première expérimentation mettent en
évidence une diversité de solutions proposées pour répondre à un même besoin de formation.
Ces deux constats rendent pertinent le concept d’une bibliothèque de scénarios partageables
pour mutualiser les idées et possibilités. Ils confirment également la nécessité d’approfondir
l’assistance à la recherche de scénarios réutilisables et le besoin de guider le choix de modalités
adaptées lors de la définition d’un scénario LRPG.
Dans nos travaux, si nous nous sommes focalisés sur la conception des scénarios, une
perspective de travail consiste maintenant à étudier l’exécution des dispositifs LRPG en contexte
de formation, du point de vue de leurs effets sur les apprenants. Cette étude permettrait
d’identifier l’adéquation entre certains ressorts et certains profils d’apprenants, d’établir des liens
entre ressorts de jeu et caractéristiques du contexte professionnel, mais aussi de déterminer
l’impact de chaque ressort de jeu sur les compétences visées par la formation et sur la motivation
des participants. L’identification de ces éléments concourrait à affiner les fonctionnalités
1 http://gbl2011.univ-savoie.fr/
287
d’assistance à la conception : il s’agirait de définir des critères orientant les recherches des
concepteurs au sein d’une bibliothèque de scénarios et guidant, à travers des suggestions, le
choix des modalités adaptées à leurs besoins.
La définition d’un système de suggestions suppose également une réflexion approfondie sur
l’accompagnement au recueil de besoins tel que nous l’avons amorcée dans nos travaux : en
effet, il convient de recueillir les données pertinentes pour être en mesure de fournir des
suggestions adaptées. Par ailleurs, l’assistance à la réutilisation va de pair avec une recherche
plus approfondie sur les aspects liés à l’indexation de scénarios dans une bibliothèque.
Dans l’optique d’une assistance au choix de modalités adaptées lors de la conception d’un
scénario LRPG, une autre perspective de recherche consiste à approfondir les risques liés à
l’usage de chaque ressort de jeu et à identifier les situations pouvant rendre ces risques critiques.
En particulier l’étude des conditions d’un usage approprié du ressort de compétition devrait être
menée. Plus globalement, il s’agit de repérer les précautions relatives aux problèmes éthiques,
déjà évoqués, de l’utilisation du jeu pour la formation professionnelle.
Prendre en compte les problématiques liées à la créativité
L’une des problématiques soulevées au cours des expérimentations concerne le frein à la
créativité potentiellement induit par le recours à un langage de formalisation et à la réutilisation
de scénarios. Ces aspects, qui sont centraux dans les préoccupations des concepteurs, doivent
être approfondis afin de mettre en cohérence le processus de créativité et le processus de
conception : il s’agit d’affiner les principes à mettre en place pour guider la conception sans brider
la créativité.
14.3.2. Pour aller encore plus loin…
En allant au-delà du cadre défini pour les dispositifs LRPG, c’est-à-dire en s’affranchissant
notamment de la contrainte consistant à définir des activités faciles d’appropriation possédant
peu de règles, la réflexion pourrait s’orienter vers une analyse plus poussée de règles de jeu
(issues par exemple de jeux de plateau de type jeux de négociation, jeux de gestion, etc.) et de
leurs liens avec les ressorts de jeu et les compétences mobilisées dans l’activité. Cette analyse
conduirait à la définition de jeux-cadres qui enrichiraient une bibliothèque de scénarios
réutilisables.
En ouvrant le périmètre défini dans nos travaux, la démarche de conception et le formalisme
ScenLRPG pourraient également voir leur utilisation élargie et adaptée à d’autres types de
dispositifs de jeu à finalités sérieuses tels que des dispositifs basés sur des principes de jeux de
plateaux et utilisés en formations présentielles1, ou encore des serious games de type jeux vidéo.
1 Par exemple les dispositifs Serious Game Session proposés par la société Symetrix
288
Dans un autre contexte d’application, l’atelier mené dans le cadre de l’Ecole d’été Game-based
Learning a permis de mettre en avant des bénéfices de l’utilisation de l’approche de formalisation
ScenLRPG dans le cadre d’une activité de co-conception de scénarios pédagogiques. Dans ce
contexte, plusieurs perspectives sont envisagées. Une première piste à approfondir serait la
définition d’un environnement multimodal destiné à soutenir la co-conception : il s’agirait d’étudier
les possibilités offertes par une solution combinant outil tangible (similaire à l’outil « papier » que
nous proposons) et outil logiciel, afin de tirer parti des bénéfices de chacune de ces modalités.
Dans ce même contexte de co-conception et de co-créativité, une autre perspective viserait à
définir une méthodologie de conception adoptant l’approche ScenLRPG, c’est-à-dire définissant
des activités collectives mettant en œuvre des ressorts de jeu, et cette fois non pas à des fins de
formation, mais à des fins de conception : il s’agirait de proposer une méthode de conception
favorisant l’engagement, en d’autres termes on chercherait à amener les concepteurs à élaborer
des formations en jouant…
Ces différentes perspectives illustrent l’ampleur du travail exploratoire mené pour défricher un
terrain encore peu étudié. Elles soulignent également que les chercheurs ont devant eux un
vaste terrain de jeu à explorer pour répondre aux besoins des concepteurs et apprenants de
demain.
289
BIBLIOGRAPHIE
Abt, C. (1970). Serious Game. New York: The Viking Press.
Adams, E. (2001). Dogma 2001: A Challenge to Game Designers. Consulté en novembre 2011:http://www.designersnotebook.com/Columns/037_Dogma_2001/body_037_dogma_2001.htm
Albinet, M. (2010). Concevoir un jeu vidéo. Tout ce que vous devez savoir pour élaborer un jeu vidéo(1er ed.). FYP EDITIONS.
Alexander, C. (1977). A Pattern Language. Oxford University Press.
Alvarez, J. (2007). Du jeu vidéo au Serious Game - Approche culturelle, pragmatique et formelle,Thèse de doctorat, Université TOULOUSE II - Toulouse le Mirail & Université TOULOUSE III - PaulSabatier.
Alvarez, J., Djaouti D. (2010). Introduction au Serious Game. Paris: Questions théoriques.
Amiel, A., Tricot, A., Mariné, C. (2004). Quels facteurs peuvent influencer l’engagement dans uneformation à distance ? Étude exploratoire auprès de prescripteurs de formation en milieu industriel.Les Dossiers des Sciences de l’Education, 12, 65-78.
Ausburn, L.J. (2004). Course design elements most valued by adult learners in blended onlineeducation environments: An American perspective. Educational Media International, 41(4), 327-337.
Balacheff, N., Baron, M., Desmoulins, C., Grandbastien, G., Vivet, M. (1997). Conceptiond'environnements interactifs d'apprentissage avec ordinateur, tendances et perspectives, Actes des6èmes journées nationales du PRC-GDR Intelligence Artificielle, p. 315-337, Hermès.
Baldwin, J.M. (1897). Social and Ethical Interpretations in Mental Development. A Study inSocialPsychology, New York, London, Macmillan.
Bandura, A. (1986). Social foundations of thought and action. Prentice-Hall, Englewood Cliffs. p. 23. p.391.
Barbeau, D. (1994). Analyse de déterminants et d’indicateurs de la motivation scolaire d’élèves aucollégial. Rapport de recherche. Montréal : Collège de Bois-de-Boulogne, Centre des ressourcesdidactiques et pédagogiques.
Bateman, C., Boon, R. (2005). 21st Century Game Design. Charles River Media.
Baylor, A. L., Kitsantas, A. (2005). Comparative Analysis and Validation of Instructivist andConstructivist Self-Reflective Tools (IPSRT and CPSRT) for Novice Instructional Planners. Journal ofTechnology for Teacher Education, 13(3), 431-455.
Béguin, P., Pastré, P. (2002) Working, learning and designing through simulation. » Proceedings ofthe 11th European Conference on Cognitive Ergonomics : cognition, culture and design. Bagnara,S.,ozzi, S., Rizzo, A., Wright, P. eds. , pp 5-13.
Berthier, N. (2006). Les Techniques d’Enquête en sciences sociales : Méthodes et exercices corrigés,Armand Colin.
Bézivin J., Blay M., Bouzhegoub, M., Estublier J., Favre J.-M., Gérard S., Jézéquel J.-M. (2004).Rapport de synthèse de l'AS CNRS sur le MDA, CNRS, Novembre 2004, 16 p.
Bisseret, A., Sebillotte, S., Falzon, P. (1999). Techniques pratiques pour l'étude des activités expertes,Toulouse, Octarès.
Björk, S., Lundgren, S., Holopainen, J. (2003). Game Design Patterns. Level Up: Digital GamesResearch Conference. Eds. Marinka Copier and Joost Raessens. Utrecht: Universiteit Utrecht, 2003,180-193.
Blanchet, A., Gotman, A. (2000). L’enquête et ses méthodes : l’entretien. Ed. Nathan Université.
Bonnardel, N. (2006). Créativité et conception. Solal Editions.
290
Botturi, L., Stubbs S., (2008). Handbook of Visual Languages in Instructional Design: Theories andPractices. Hershey, PA: Informing Science Reference., USA.
Botturi, L., Derntl, M., Boot, E., Gigl, K. (2006). A classification framework for educational modelinglanguages in instructional design. Communication présentée à la 6th IEEE International Conferenceon Advanced Learning Technologies (ICALT 2006), Kerkrade, Pays-Bas.
Bourgeois, E. (1998). Apprentissage, motivation et engagement en formation, Éducation Permanente,n° 136.
Brougère, G. (1999). Some Elements Relating to Children's Play and Adult Simulation/Gaming.Simulation & Gaming, 30(2), 134-46.
Brougère, G. (2005). Jouer/Apprendre, Paris: Economica/Anthropos.
Brougère, G. (2009). Quelques réflexions sur jeu et apprentissage et les conséquences à en tirer pourpenser la notion de jeu sérieux. Conférence invitée, Actes de l’Atelier « Jeux Sérieux : conception etusages », Conférence EIAH 2009, Le Mans.
Brousseau, G. (1998). Théorie des situations didactiques (Textes rassemblés et préparés par NicolasBalacheff, Martin Cooper, Rosamund Sutherland, Virginia Warfield). Grenoble: La pensée sauvage.
Bruner, J.S. (1983). Le développement de l’enfant: Savoir faire, savoir dire, Paris, Puf.
Burgos, D., Tattersall, C., Koper, R. (2007). Re-purposing existing generic games and simulations fore-learning. Computers in Human Behaviour, 23(6), 2656–2667.
Caillois, R. (1958). Les jeux et les hommes, Paris: Gallimard (éd. revue et augmentée, 1967).
Carman, J. M. (2002). Blended Learning Design: Five key ingredients. Product DevelopmentKnowledgeNet. Téléchargé le 09/12/2011 sur ipislam.edu.my/kplir/bahan/Blended-Learning-Design.pdf
Carré, P. (1998). Motifs et dynamiques d'engagement en formation, Éducation Permanente, n° 136.
Chamberland, G., Provost, G. (1996). Jeu, simulation et jeu de rôle. Sainte-foy : Les Presses deL'Université du Québec.
Charles, M.T., Bustard, D., Black, M. (2009a). Experiences of Promoting Engagement in Game-BasedLearning. In ECGBL 2009 Proceedings.
Charles, M, Bustard, D, and Black, M. (2009b) Game Inspired Tool Support for e-Learning Processes.Electronic Journal of e-Learning, Volume 7, Issue 2 2009, (pp101 - 110).
Charlier, B., Deschryver, N., Peraya, D. (2006). Apprendre en présence et à distance : Une définitiondes dispositifs hybrides. Distances et Savoirs, 4 (4), 469-496.
Col, C., Fenouillet, F. (2007). Déploiement du e-learning en sciences de l’éducation : état des lieux enFrance . International Journal of Technologies in Higher Education, 1, Vol. 4, p. 7-19.
Collis, B., Bianco, M., Margaryan, A., Waring, B. (2005). Putting Blended Learning to Work: a casestudy from a multinational oil company. Education, Communication & Information 5(3), 233-250.
Combessie, J.-C (2007). La méthode en sociologie, collection Repères. Edition la découverte.
Conjard, P., Devin, B. (2009). Acquérir et transmettre des compétences. Et si on se formait au travail ?Editions du Réseau ANACT.
Courau, S. (2006). Jeux et jeux de rôle en formation : clés pour réaliser des formations efficaces, ESFEditeur.
Crawford, C. (1982). The Art Of Computer Game Design: Reflections Of A Master Game Designer.Osborne/McGraw-Hill,U.S.
Cristol, D., (2009). Le marché de la formation en 2009, publié dans 4ème FORUM REGIONALFORMATION POITOU CHARENTE février 2009 : Vers la construction de nouveaux marchés de laformation ?, Poitiers : France.
Crookall, D., Oxford, R. L., Saunders, D. (1987). Towards a reconceptualization of simulation: Fromrepresentation to reality. Simulation/Games for Learning, 17, 147-171.
Crookall, D. (1992). Debriefing. Simulation & Gaming, 23(2), 141-142.
291
Crowder, N. (1963). On the difference between linear and intrinsic programming. In Phi Delta Kappan44 : 250-254.
Crozat, S., Trigano, P. (2002). Structuration et scénarisation de documents pédagogiques numériquesdans une logique de massification. Sciences et Techniques Educatives, vol.9, N°3, Ed° Hermès.
Csikszentmihalyi, M. (1975). Beyond Boredom and Anxiety, San Francisco, CA: Jossey-Bass.
Csikszentmihalyi, M. (1990). Flow: The Psychology of Optimal Experience. New York: Harper andRow.
Csikszentmihalyi, M. (2000) The contribution of flow to positive psychology, In Gillham, Jane (ed.).2000. The Science of Optimism and Hope: Research Essays in Honor of Martin E. P. Seligman.Philadelphia: Templeton Foundation Press.
Dalziel, J. R. (2003). Implementing learning design: The Learning Activity Management System(LAMS). In G.Crisp, D.Thiele, I.Scholten, S.Barker and J.Baron (Eds), Interact, Integrate, Impact:Proceedings of the 20th Annual Conference of the Australasian Society for Computers in Learning inTertiary Education. Adelaide, 7-10 December 2003.
Daniau, S. (2005). Jeu de Rôle Formatif et maturation des adultes, Thèse en Sciences de l’Education,Université de Montpellier III.
Darses, F., Détienne, F. et Visser, W. (2001). Assister la conception : perspectives pour la psychologiecognitive ergonomique. In ÉPIQUE 2001, Actes des journées d’étude en psychologie ergonomique,Nantes, IRCCyN, France, 29-30 Octobre 2001, 11-20.
David, J.P., George, S., Godinet, H., Villiot-Leclercq, E. (2008). Scénariser une situationd’apprentissage collective instrumentée : réalités, méthodes et modèles, quelques pistes. Internationaljournal of Technologies in Higher Education, Vol. 4 n°2
De Singly, F. (1992). L’enquête et ses méthodes : Le questionnaire, Nathan.
Deci, E.L., Ryan, R.M. (1985). Intrinsic motivation and self-determination in human behavior. NewYork: Plenum.
Deci, E.L., Ryan, R.M. (1987). The support of autonomy and the control of behavior. Journal ofpersonality and social psychology, 53, 1024-1037.
Depover, C., Marchand, L. (2002). E-learning et formation des adultes en contexte professionnel.Bruxelles : De Boeck Université.
Deschênes, A.-J., & Maltais, M. (2006). Formation à distance et accessibilité. Québec: Téluq.
Deschryver, N. (2008). Interaction sociale et expérience d’apprentissage en formation hybride. Thèsede Doctorat. Faculté de Psychologie et des Sciences de l’éducation, Université de Genève.
Dessus P., Pernin J.P., Lejeune A. (2007) Prise en compte des schémas cognitifs dans lascénarisation des activités d’enseignement. Actes du colloque EIAH 2007, Lausanne, p. 95-100.
Dessus P., Schneider D.K (2006). Scénarisation de l’enseignement et contraintes de la situation. InPernin J.- P., Godinet H. (2006). Actes du colloque "Scénariser l’enseignement et l’apprentissage :une nouvelle compétence pour le praticien ?", INRP, Lyon, avril 2006, 132 pages, p. 13-18.
Détienne, F. (2001). La réutilisation de solutions particulières en conception : perspective socio-cognitive. Comptes rendus du congrès SELF-ACE 2001 – Les transformations du travail, enjeux pourl’ergonomie. Vol.4. Montréal, Canada, Octobre, pp. 19-23.
Dewey, J. (1938). Experience and education. New York: Collier.
Dillenbourg P. (1999). What do you mean by collaborative learning? In P. Dillenbourg (Ed)Collaborative-learning: Cognitive and Computational Approaches. (pp.1-19). Oxford: Elsevier
Dillenbourg, P. (2002). Over-Scripting CSCL: The risks of blending collaborative learning withinstructional design. In P. A. Kirschner (Ed.), Inaugural Address, Three Worlds of CSCL. Can WeSupport CSCL? (pp. 61- 91). Heerlen: Open Universiteit Nederland.
Dillenbourg, P. (2004). Framework for integrated learning. Kaleidoscope Network of Excellencedeliverable D23.5.1.
292
Djaouti, D., Alvarez, J., Jessel, J-P. (2010). Concevoir l’interactivité ludique : une vue d’ensemble desméthodologies de « Game Design », Actes du colloque "Ludovia 2010", Ax-les-Thermes, 2010.
Doucet, M., (1987). Élaboration et validation de la facette des conduites affectives, dans le modèle declassification des jeux et des jouets : appelé le système ESAR. Mémoire de maîtrise, Université duQuébec à Chicoutimi.
Dufresne, A., Basque, J., Paquette, G., Leonard, M., Lundgren-Cayrol, K.,Prom Tep, S. (2003). Versun modèle générique d'assistance aux acteurs du téléapprentissage. STICEF, 10.
Egenfeldt-Nielsen, S. (2005). Beyond Edutainment: Exploring the educational potential of computergames. Doctoral Thesis, IT-University of Copenhagen. Denmark.
Egenfeldt-Nielsen S. (2006). Overview of research on the educational use of video game. Digitalkompetanse, vol. 1, 2006-3, p. 184–213.
Elverdam, C., Aarseth, E. (2007). Game Classification and Game Design: Construction ThroughCritical Analysis. Games and Culture, 2(1), 3-22.
Emin V. (2009). Modèle et environnement « métier » pour la conception, le partage et la réutilisationde scénarios pédagogiques ». Actes de la conférence EIAH 2009.
Emin V. (2010). Modélisation dirigée par les intentions pour la conception, le partage et la réutilisationde scénarios pédagogiques. Thèse de doctorat, Université de Grenoble.
Fabricatore, C. (2000). Learning and videogames: An unexploited synergy. The InternationalConference of the Association for Educational Communications and Technology.
Falstein, N. (2002). Better By Design: The 400 Project. Game Developer magazine, Vol. 9, Issue 3,March 2002, p. 26. Consulté en décembre 2011 : http://www.theinspiracy.com/400_project.htm
Falzon, P. (2005). Ergonomie, conception et développement. Conférence introductive, 40ème Congrèsde la SELF, Saint-Denis, La Réunion, 21-23 septembre 2005.
Feinstein, A. H., Cannon, H. M. (2002). Constructs of Simulation Evaluation. Simulation & Gaming,33(4), 425- 440.
Fenouillet, F. (2009a). Vers une intégration des conceptions théoriques de la motivation. 1ère partie :Présentation du modèle intégratif de la motivation. Note de synthèse pour l‘habilitation à diriger desrecherches. Université Paris Ouest Nanterre La Défense (Paris X).
Fenouillet, F. (2009b). Vers une intégration des conceptions théoriques de la motivation. 2e partie :Présentation intégrée de 101 conceptions théoriques de la motivation. Note de synthèse pourl‘habilitation à diriger des recherches. Université Paris Ouest Nanterre La Défense (Paris X).
Ferraris, C., Lejeune, A., Vignollet, L., David, J.P. (2005). Modélisation de scénarios d’apprentissagecollaboratif pour la classe : vers une opérationnalisation au sein d’un ENT. Actes de la conférenceEIAH 2005, Ed. Pierre Tchounikine, Michelle Joab et Luc Trouche. INRP. Institut Montpellier II.
Fenouillet, F., Tomeh, B. (1998). La motivation agit-elle sur la mémoire ? Education permanente, 136:37–45.
Frasca, G. (2003a). Simulation versus Narrative: Introduction to Ludology. In: Wolf, Mark J P & Perron,Bernard (Eds.) The Video Game Theory Reader. New York, Routledge.
Frasca, G. (2003b). Ludologists Love Stories Too: Notes From A Debate That Never Took Place. InProceedings of International DiGRA Conference.
Garon, D. (1982). Le système ESAR: Un modèle de classement des jouets et du matériel du jeu àl'intention des éducateurs. Thèse de doctorat inédite. Québec: Université Laval.
Garon, D., Filion, R., Chiasson, R. (2002). Le système ESAR: Guide d’analyse, de classification etd’organisation d’une collection de jeux et jouets. Paris: Cercle de la librairie.
Garris, R., Alhers, R., Driskell, J.E. (2002). Games, motivation and learning: A research and practicemodel. Simulation and Gaming: An Interdisciplinary Journal, 33, 441-467.
Gee, J. P. (2003). What video games have to teach us about learning and literacy. New York:Palgrave Macmillan.
293
Genvo, S. (2006) Le game design de jeux vidéo : approche communicationnelle et interculturelle.Thèse de doctorat en SIC, Université de Metz.
George, S. (2001). Apprentissage collectif à distance. SPLACH : un environnement informatiquesupport d'une pédagogie de projet. Thèse de doctorat en informatique, Université du Maine.
Gibbons, A., Botturi, L., Boot, E. & Nelson, J. (2008). Design languages. In M. Driscoll, M. D. Merrill, J.van Merrienboer and J. M. Spector (Eds.), Handbook for research for educational communications andtechnology (3rd ed.). Mahwah, NJ: Lawrence Erlbaum Associates.
Glenn, A.G., Gregg, D., Tipple, B. (1982). Using Role-Play Activities to Teach Problem Solving: ThreeTeaching Strategies. Simulation & Gaming, vol. 13, 2: pp. 199-209.
Goncalves, C., Croset, M.C, Ney, M., Balacheff, N., Bosson, J-L. (2010). Authenticity in learninggame: how it is designed and perceived. Proceeding of EC-TEL 2010 - European Conference onTechnology Enhanced Learning, Barcelone, Espagne, septembre, 2010.
Gredler, M. (2004). Games and simulations and their relationships to learning. In D. Jonassen (Ed.),Handbook of research on educational communications and technology (pp. 813 - 828). Mahwah, NJ:Edbaum.
Grellier, D. (2008). Socio-anthropologie de l’imaginaire : les pratiques ludiques de simulation. Jeuxvidéo, jeux de rôles, jeux de rôle en ligne massivement multi-joueurs. Thèse de doctorat, UniversitéMontpellier III.
Guéraud V., Peyrin J-P., (1988). Un jeu de rôles pour l’enseignement de la programmation. Premiercolloque francophone sur la didactique de l’informatique, Paris.
Gunter, G. A., Kenny, R. F., Vick, E. H. (2006). A case for a formal design paradigm for seriousgames, The Journal of the International Digital Media and Arts Association, vol. 3, no. 1, pp. 93-105.
Habgood, M. P. J. (2007). The Effective integration of digital games and learning content, Thèse dedoctorat, Université de Nottingham.
Henri, F., Compte C., Charlier B. (2007). La scénarisation pédagogique dans tous ses débats…Revue internationale des technologies en pédagogie universitaire, pp. 14-24.
Henriot, J. (1989). Sous couleur de jouer, Paris, José Corti.
Hernández-Leo, D, Villasclaras-Fernández, E. D., Asensio-Pérez, J. I, Dimitriadis, Y., Jorrín-Abellán, I.M., Ruiz-Requies, I., & Rubia-Avi, B. (2006). COLLAGE: A collaborative Learning Design editor basedon patterns. Educational Technology & Society, 9 (1), 58-71.
Hernández-Leo, D. (2007). A pattern-based design process for the creation of CSCL macro-scriptscomputationally represented with IMS-LD. PhD thesis, E. T. S. Ing. Telecomunicación, Universidad deValladolid.
Hotte, R., Godinet, H., Pernin, J.-P. (2007). Scénariser l'apprentissage, une activité de modélisation.Special issue in International Journal of Technologies in Higher Education, Montreal, 2007 - Vol. 4 - N°2.
Hourst, B., Thiagarajan, S. (2007). Modèles de jeux de formation : Les jeux-cadres de Thiagi, Paris:Eyrolles.
Huizinga, J. (1988) (first edition 1938). Homo Ludens : essai sur la fonction sociale du jeu, Paris:Gallimard
Hummel, C. (1993). Aristote. Perspectives : revue trimestrielle d’éducation comparée (Paris,UNESCO : Bureau international d’éducation), vol. XXIII, n° 1-2, 1993, p. 37-50.
Hunicke, R., Leblanc, M., Zubek, R. (2004). MDA: A Formal Approach to Game Design and GameResearch. In Proceedings of the Challenges in Games AI Workshop, Nineteenth National Conferenceof Artificial Intelligence (pp. 1-5).
Jenkins, H., Camper, B., Chisholm, A., Grigsby, N., Klopfer, E., Osterweil, S., et al. (2009). FromSerious Games to Serious Gaming. In Ritterfeld, U., Cody, M. and Vorderer, P. (eds.) Serious Games:Mechanisms and Effects. New York/London: Routledge.
Jolivalt, B., (1994). Les jeux vidéo. Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Que sais-je ? ».
294
Jullien, J.M., Quentin, I. Vignollet, L., Ferraris, C., Martel, C. (2007). Scénario pédagogique et portfolionumérique, deux outils conceptuels complémentaires pour le développement des compétences desenseignants. Conférence Res@tice, Rabat.
Kellner, C. (2007). Les cédéroms, pour jouer ou pour apprendre? Paris, France : L'Harmattan.
Kiili, K. (2005). On educational game design: Building blocks of flow experience. Tampere, Finland:Tampere University of Technology Press
Kim, A.J. (2009). Putting the Fun in functional. Google TechTalk presentation. Consulté le 09/12/2011sur http://www.slideshare.net/amyjokim/fun-in-functional-2009-presentation?src=embed
Kirkley, S., Kirkley, J. R. (2004). Creating Next Generation Blended Learning Environments UsingMixed Reality, Video Games and Simulations. TechTrends 49/3, pp. 42-89.
Klabbers, J. H. G. (2003). The Gaming Landscape: A Taxonomy for Classifying Games andSimulations. Proceedings. Level Up Digital Games Research Conference: 54 – 67. Copier M. andRaessens J. Eds.. 4 – 6 November 2003, Utrecht, Netherlands
Klabbers, J. H. G. (2008). The Magic Circle: Principles of Gaming and Simulation, 2nd edition,Rotterdam: Sense Publishers.
Klopfer, E., Perry, J., Squire, K., Jan, M.-F. (2005). Collaborative Learning Through AugmentedReality Role Playing. In Proceedings of CSCL '05 (Taipei Taiwan, May 2005), 311-315.
Knizia, R. (2004). The design and testing of the board game Lord of the Rings. In K. Salen & E.Zimmerman (Eds.), Rules of play: Game design fundamentals (pp. 22–27). Cambridge, MA: MITPress.
Kolb. D. A. and Fry, R. (1975). Toward an applied theory of experiential learning. In C. Cooper (ed.)Theories of Group Process, London: John Wiley.
Koper, R. Olivier B. (2004). Representing the Learning Design of Units of Learning, EducationalTechnology & Society, Vol. 7, n°3, p. 97-111.
Koper, R. and Tattersall, C. (2005). Learning Design: A Handbook on Modelling and DeliveringNetworked Education and Training. Springer Verlag.
Kovacs, B., Gaunet, F., Briffault, X. (2004). Les techniques de l’activité pour l’interaction Homme-Machine, Hermes Science, Lavoisier.
Kriz, W.C., (2010). A Systemic-Constructivist Approach to the facilitation and Debriefing of Simulationsand Games. Simulation and Gaming: An International Journal, 41, 663-680.
Laforcade, P., Nodenot, T. et Sallaberry, C. (2005). Un langage de modélisation pédagogique basésur UML. Dans S. George et A. Derycke (dir.), Conceptions et usages des plates-formes de formation[numéro spécial]. Sciences et technologies de l’information et de la communication pour l’éducation etla formation, 12.
Laguardia, J. G., Ryan, R. M (2000). Buts personnels, besoins psychologiques fondamentaux et bien-être : théorie de l’autodétermination et applications. Revue québecoise de psychologie, vol 21(2), pp.281-304.
Lasnier, F. (2000). Réussir la formation par compétences. Montréal : Guérin.
Lebahar, J.C. (1983). Le dessin d’architecte. Simulation graphique et réduction d’incertitude. Marseille,Parenthèses.
Lebahar, J.C. (2003). La conception d’artefact : l’activité cognitive du sujet-concepteur. Mémoired’habilitation à diriger les recherches. Psychologie, Université de Provence.
Lederman, L. C. (1992). Debriefing: Toward a systematic assessment of theory and practice.Simulation & Gaming, 23(2), 145-160.
Le Diberder, A. et F. (1998) L'univers des jeux vidéo, Paris: La Découverte.
Lejeune A. (2004) IMS Learning Design : Etude d’un langage de modélisation pédagogique, RevueDistances et Savoirs, volume 2.
Lisowski, M. (2009), Politiques de FOAD et innovation en formation professionnelle. Actualité de laFormation Permanente n° 220, pp. 17-25.
295
Lubart, T. et al. (2003). Psychologie de la créativité. Paris : Colin.
Maguire, M. (2001). Methods to support human-centered design. International Journal of Human-Computer Studies, 55, 587-634.
Malone, T. W. (1981). What makes computer games fun? Byte, 6: 258-277.
Malone, T.W. Lepper, M. R. (1987). Making learning fun: A taxonomy of intrinsic motivations forlearning. In R.E. Snow and M.J. Farr (Eds.), Aptitude, Learning and Instruction III: Conative andAffective Process Analyses. Hillsdale, N.J.: Erlbaum, 1987.
Mariais, C., Dupin, C. (2010). Le Serious Game Session : les ressorts de jeu au service du présentiel,présentation effectuée lors du Serious Game Expo, 23/11/2010, Lyon.
Martel, C., (1998). La modélisation des activités conjointes. Rôles, places et positions des participants.Thèse de l’Université de Savoie.
Martel, C., Vignollet, L., Ferraris, C. et Durand, G. (2006). LDL: A language to model collaborativelearning activities. Dans E. Pearson et P. Bohman (dir.), Proceedings of World Conference onEducational Multimedia, Hypermedia and Telecommunications (EDMEDIA) 2006 (p. 838-844).
Martel, C., Vignollet L. (2008). Learning Design Language to model the activity supported by services.In International Journal of Learning Technology.
Michau, F., Ploix, S., (2003). Proposition de carte organisationnelle Décrire le rôle d’un Environnementinformatique au sein d’un dispositif pédagogique. Environnement Infomatique pour l’ApprentissageHumain 2003, Strasbourg, 15-17 avril 2003.
Milgram P., Kishino F. (1994). A taxonomy of mixed reality visual displays. In IEICE Transactions onInformation Systems, Vol E77-D, n° 12.
Mor, Y. and Winters, N. (2007). Design approaches in technology enhanced learning. Journal ofInteractive Learning Environments, 15, 61-75.
Moreno, J-L. (1965). Psychothérapie de groupe et psychodrame, éd. Poche.
Moreno-Ger, P., Burgos, D., Sierra, J. L., & Fernández-Manjón, B. (2008). Educational Game Designfor Online Education. Computers in Human Behavior, 24 (6), 2530-2540.
Nodenot T., (2007). Scénarisation pédagogique et modèles conceptuels d’un EIAH : Que peuventapporter les langages visuels? International Journal of Technologies in Higher Education (IJTHE) 4, 2,p. 85-102.
Nodenot, T., (2005). Contribution à l’Ingénierie dirigée par les modèles en EIAH : le cas des situations-problèmes coopératives. Habilitation à Diriger les Recherches. Université de Pau et des Pays del’Adour.
Paquette, G. (2002). L’ingénierie pédagogique : pour construire l’apprentissage en réseau. Sainte-Foy : Presses de l’Université du Québec.
Paquette, G. (2005). Apprentissage sur Internet : des plateformes aux portails d’objets à base deconnaissance. In S. Pierre (Ed), Innovations et tendances en technologies de formation etd’apprentissage. Presses de l’école polytechnique de Montréal, 1-30.
Paquette, G., Tchounikine, P. (2002). Contribution à l'ingénierie des systèmes conseillers : uneapproche méthodologique fondée sur l'analyse du modèle de la tâche. Sciences et TechniquesÉducatives, 9, 3-4.
Pastré, P. (1997). Didactique professionnelle et développement. Psychologie Française, 42(1), 89-100.
Pastré, P. (2002). L’analyse du travail en didactique professionnelle, Revue Française de Pédagogie,n° 138, janvier-février-mars 2002, 9-17.
Pastré, P. (2006). Apprendre à faire. In E Bourgeois et G Chapelle, Apprendre et faire apprendre,PUF, 2006.
Pastré, P., Mayen, P., Vergnaud, G. (2006). La didactique professionnelle, Revue française depédagogie, n°154, 145-198.
Pavis, P., (1996). Dictionnaire du théâtre, 313, Dunod.
296
Peneff, J. (2009). Le goût de l'observation. Comprendre et pratiquer l'observation participante ensciences sociales. La Découverte, coll. « Grands Repères ».
Peraya, D. (2005). La formation à distance : un dispositif de formation et de communicationmédiatisées. Une approche des processus de médiatisation et de médiation. TICE et développement,Revue électronique internationale.
Pernin, J-P. (2004). A propos des objets pédagogiques, in Entre technique et pédagogie : la créationde contenus multimédia pour l'enseignement et la formation, Neuchâtel : IRDP éditeur.
Pernin, J-P. (2005). Langages de modélisation de situations d'apprentissage : l'approche LearningDesign. Séminaire du Groupe Rhône Alpes d'Initiative sur les Normes et Standards dans lesTechnologies d'Information et de Communication pour l'Education, 16 mars 2005, Lyon.
Pernin, J-P. (2007). Mieux articuler activités pour l’apprentissage, artefacts logiciels etconnaissances : vers un modèle d’ingénierie centré sur le concept de scénario. In M. Baron, D. Guin &L. Trouche (Eds.), Environnements informatisés et ressources numériques pour l’apprentissage :conception et usages, regards croisés, Éditions Hermès, Paris, p. 161-190.
Pernin, J-P., Emin, V., Guéraud, V. (2008). ISiS: An Intention-Oriented Model to Help Teachers inLearning Scenarios Design. EC-TEL 2008 Proceedings, in "Times of Convergence. TechnologiesAcross Learning Contexts ", Lecture Notes in Computer Science, Springer, Volume 5192/2008, p.338-343.
Pernin, J-P., Lejeune A. (2004a). Modèles pour la réutilisation de scénarios d'apprentissage. Actes ducolloque TICE Méditerranée, Nice.
Pernin, J-P., Lejeune, A., (2004b). Nouveaux dispositifs instrumentés et mutations du métier del'enseignant. 7ème biennale de l'Education, Lyon.
Pernin, J-P., Villiot-Leclercq E., (2006). Scénarios : représentations et usages. Premières journéescommunication et apprentissages instrumentés en réseau, Amiens : France
Peters, V. A. M., Vissers, G. A. N. (2004). A Simple Classification Model for Debriefing SimulationGames. Simulation and Gaming: An International Journal, 35, 70-84.
Petranek, C., Corey, S., Black, R. (1992). Three levels of learning in simulations: Participating,debriefing and journal writing. Simulation & Gaming, 23(2), 174-185.
Piaget, J. (1923). Le langage et la pensée chez l’enfant. Neuchâtel et Paris : Delachaux et Niestlé,3ème éd., 1966, p. 63.
Piaget, J. (1945). La formation du symbole chez l'enfant : imitation, jeu et rêve, image etreprésentation. Paris : Delachaux et Niestlé.
Prensky, M. (2001). Digital Game Based Learning. New York, McGraw-Hill.
Priebatsch, S. (2010). The game layer on top of the world. Intervention à la conférence TEDx Boston2010, juillet 2010.
Prince, M. (2004) Does Active Learning Work? A Review of the Research. Journal of EngineeringEducation, Vol. 93, N°3, pp. 223–231.
Propp, V. (1970) Morphologie du conte, Seuil (Points / Essais).
Rettig, M., (1994). Prototyping for tiny fingers. Communications of the ACM, 37, 21-27.
Rogalski, J. (2004). La didactique professionnelle : une alternative aux approches de « cognitionsituée » et « cognitiviste » en psychologie des acquisitions. Revue électronique Activités, Vol. 1 N° 2,pp. 103-120.
Rogalski, J. (1998). Concepts et méthodes d'analyse des processus de coopération dans la gestioncollective d'environnements dynamiques. In K.Kotstulski & A. Trognon (Eds.), Communicationinteractives dans les groupes de travail (pp. 27-58). Nancy, France: Presses Universitaires de Nancy.
Roussel, P. (2000). La motivation au travail : concept et théories. Toulouse : Université des SciencesSociales.
Runeson, P., Höst, M. (2009). Guidelines for conducting and reporting case study research in softwareengineering. Empirical Software Engineering, 14(2):131–164, April 2009.
297
Salen, K., Zimmerman, E. (2004). Rules of play: game design fundamentals. Cambridge, Mass.: MITPress.
Sandford, R., Francis, R., (2006). Toward a theory of Games-based pedagogy. Discussion during theJISC Innovating e-Learning 2006 online conference, held in March 2006. Available in Innovating e-Learning Practice - The proceedings of the JISC Online Conference: Innovating e-Learning 2006.Cheltenham. Direct Learn Services Ltd. Consulté le 09/12/2011 à l’adresse :www.jisc.ac.uk/elp_conference06.html
Sarrazin, P., Tessier, D., Trouilloud, D. (2006). Climat motivationnel instauré par l’enseignant etimplication des élèves en classe : l’état des recherches. Revue Française de Pédagogie, 157, 147-177.
Sauvé, L., Power, M., Isabelle, C., Samson, D., St-Pierre, C. (2002). Rapport final - Jeux-cadres surl’inforoute : multiplicateurs de jeux pédagogiques francophones : un projet de partenariat. Québec :Bureau des technologies d’apprentissage/ SAVIE.
Sauvé, L., Renaud, L., Kaufman, D., Marquis, J. S. (2007). Distinguishing between games andsimulations: A systematic review. Educational Technology & Society, 10 (3), 247-256.
Sawyer, B. (2008) Serious Games Taxonomy. Récupéré en décembre 2011 :www.seriousgames.org/presentations/serious-games-taxonomy-2008_web.pdf
Simon, H. (1973). The structure of III structured problems. Artificial Intelligence, n°4, pages 181–201.
Singh, H. (2003). Building Effective Blended Learning Programs. Educational Technology, 43(6), 51-54.
Skinner, B.F. (1971). L’analyse expérimentale du comportement, un essai théorique. Bruxelles, C.Dessart.
Steinwachs, B. (1992). How to facilitate a debriefing. Simulation & Gaming, 23(2), 186-195.
Stewart, L.P. (1992). Ethical Issues in Postexperimental and Postexperiential Debriefing, Simulationand Gaming: An International Journal, 23, 196-211.
Tardif, J. (1992). Pour un enseignement stratégique. Montréal : Les éditions Logiques.
Tchounikine, P. (2009). Précis de recherche en ingénierie des EIAH. Téléchargé le 08/08/2011 àl’adresse http://membres-liglab.imag.fr/tchounikine/Precis.html
Thiagarajan, S. (1992). Using games for debriefing. Simulation & Gaming, 23(2), 161-173.
Thiagarajan, S. (2004). Framegames by Thiagi, Workshops by Thiagi.
Tricot, A., Plégat-Soutjis F., Camps J.-F., Amiel A., Lutz, G., Morcillo, A. (2003). Utilité, utilisabilité,acceptabilité : interpréter les relations entre trois dimensions de l’évaluation des EIAH. Actes de EIAH2003, Strasbourg, France, Desmoulins C., Marquet P., Bouhineau D. (eds), 391-402.
Vallerand, R. J. et Thill, E. E. (1993). Introduction à la psychologie de la motivation. Laval :ÉditionsÉtudes Vivantes.
Van Ments, M. (1999). The Effective use of Role-play, Kogan Page.
Viau, R. (1998). La motivation en contexte scolaire. ( 2e édition). Bruxelles : Éditions de Deboeck
Viau, R. (2004). La motivation : condition au plaisir d’apprendre et d’enseigner en contexte scolaire.Dans A. Colsoul et al. (dir.), Actes du 3e congrès des chercheurs en éducation. (Re)trouver le plaisird’enseigner et d’apprendre. Construire savoirs et compétences (p. 15-30). Administration générale del'enseignement et de la recherche scientifique de la Communauté française de Belgique : Bruxelles.
Villiot-Leclercq, E. (2007) Modèle de soutien à l'élaboration et à la réutilisation de scénariospédagogiques. Thèse de doctorat, Université de Montréal, Université Joseph Fourier (Grenoble).
Vygotski, L. (1997). Pensée et Langage, éditions La Dispute.
Walckiers, M., De Praetere, T. (2004). L'apprentissage collaboratif en ligne, huit avantages qui en fontun must. Distances et savoirs, 2004/1 Vol. 2, p. 53-75. DOI : 10.3166/ds.2.53-75.
Wallet, J. (2004). Entre pratiques réflexives et approches théoriques en formation à distance,questions croisées. Distances et savoirs 1/2004 (Vol. 2), p. 9-23.
298
Watson, J.B., (1913). Psychology as the behaviorist views it. Psychological Review, 20, 158-177.
Weinberger, A., Kollar, I., Dimitriadis, Y., Mäkitalosiegl, K., Fischer, F. (2009). Computer-supportedcollaboration scripts: Perspectives from educational psychology and computer science. In N.Balacheff, S. Ludvigsen, T. de Jong, A. Lazonder, and S. Barnes, editors, Technology-EnhancedLearning: Principles and Products. Amsterdam University Press.
Wills, S., Leigh, E., Ip, A. (2010). The Power of Role-based e-Learning: Designing and ModeratingOnline Role Plays. New York: Routledge.
Winnicott, D. W. (1971, 1975). Jeux et réalité – l’espace potentiel, Gallimard, Paris.
Yardley-Matwiejczuk, K. (1997). Role Play Theory and Practice. London:Sage.
Zyda, M. (2005). From Visual Simulation to Virtual Reality to Games. IEEE Computer Society.
299
LISTE DES FIGURES
Figure 1 - Notre approche méthodologique ...................................................................................... 10Figure 2 - Les games comme un sous-ensemble du play (Salen et Zimmerman 2004) ........................ 17Figure 3 - Le play comme une composante des jeux (Salen et Zimmerman 2004) .............................. 18Figure 4 - Axes de description des dispositifs de formation utilisant le jeu ......................................... 54Figure 5 - Simulation et jeux de plateau : caractéristiques ................................................................. 62Figure 6 - Matériel du jeu Leadership Challenge ................................................................................ 62Figure 7 - Jeux de simulation et tangible : caractéristiques ................................................................ 63Figure 8 - Simulation et jeu informatisé : caractéristiques ................................................................. 64Figure 9 - Ecran de l'application Starbank : accès aux différentes zones de la cité orbitale................. 64Figure 10 - Pulse! : intervention à l’unité de soins intensifs ............................................................... 65Figure 11 - LeanG : l’atelier de production des camions en bois ........................................................ 66Figure 12 - HairBe12 : mise en situation ............................................................................................ 66Figure 13 - Jeu de rôle virtuel pour la formation à l'entretien annuel d'évaluation (Daesign pour BNPParibas) ............................................................................................................................................ 67Figure 14 - Simulation et jeux de rôle pédagogiques : caractéristiques .............................................. 67Figure 15 - Laboratorium of Epidemiology : interview d'une patiente ................................................ 70Figure 16 - Cartes du jeu Healing Blade ............................................................................................. 72Figure 17 - Les différents types de motivation identifiés dans la théorie de l'autodétermination(Sarrazin et al. 2006) ......................................................................................................................... 82Figure 18 - Le flow, un équilibre entre le niveau de challenge proposé et le niveau de compétencesrequis (Csikszentmihalyi 1990). ......................................................................................................... 84Figure 19 - Motifs d'engagement en formation (Carré 1998) ............................................................. 86Figure 20 - Modèle de motivation en contexte scolaire (Viau 1998) .................................................. 88Figure 21 - La situation de conception (Lebahar, 2003) ................................................................... 105Figure 22 - Etapes du processus de conception d’un scénario pédagogique (Pernin 2007)............... 114Figure 23 - Processus-métier de conception pédagogique (Emin 2010) ........................................... 116Figure 24 - Ecran d'un module e-learning réalisé par Symetrix pour la société Team Up .................. 117Figure 25 - Processus de conception et de réalisation de modules e-learning de la société Symetrix ....................................................................................................................................................... 117Figure 26 - Présentation simplifiée du modèle EML (Pernin 2004) ................................................... 121Figure 27 - Schéma descriptif du modèle ISiS (Emin 2010) ............................................................... 124Figure 28 - Les dimensions de la formation mixte ou blended learning (Matrice de Sébastien Fraysse,2011) .............................................................................................................................................. 138Figure 29 - 17 dimensions du jeu (Elverdam & Aarseth 2007) .......................................................... 145Figure 30 - Les 3 schémas primaires du jeu (Salen & Zimmerman 2004) ......................................... 146Figure 31 - Modèle MDA (Hunicke et al. 2004) ................................................................................ 147Figure 32 - Jeu et/ou apprentissage comme point de départ de la conception ................................ 149Figure 33 - Modes d'accès à l'assistance (Dufresne et al. 2003) ....................................................... 153Figure 34 - Modèle conceptuel d’IMS Learning Design (IMS LD, 2003, traduit par Lejeune 2004)..... 162Figure 35 - Version simplifiée du métamodèle LDL (Martel &Vignollet 2008) .................................. 163Figure 36 - Positionnement de COLLAGE dans le processus de conception préconisé par IMS-LD .... 166Figure 37 - Processus de conception soutenu dans COLLAGE .......................................................... 167Figure 38 - Diagramme du patron Jigsaw ........................................................................................ 168Figure 39 - LAMS : liste des activités élémentaires .......................................................................... 169Figure 40 - Interface de l'éditeur LAMS ........................................................................................... 170
300
Figure 41 - Représentation graphique d'un scénario pédagogique : formalisme des Pléiadesimplémenté dans ExploraGraph (Villiot-Leclercq 2007) ................................................................... 172Figure 42 - Schéma descriptif du modèle ISiS (Emin 2010) ............................................................... 174Figure 43 - ScenEdit : module d'édition d'une situation d'interaction (Emin 2010)........................... 175Figure 44 - ScenEdit : interface d'édition du scénario (Emin 2010) ................................................... 176Figure 45 - Organisation de la grille de description .......................................................................... 193Figure 46 - Interact : structure du scénario ...................................................................................... 195Figure 47 - Processus de conception de scénarios LRPG .................................................................. 201Figure 48 - Structuration de l'approche de formalisation ScenLRPG ................................................ 218Figure 49 - Composants d'un scénario LRPG et niveaux de granularité ............................................ 221Figure 50 - Plan global d’un scénario décrit à l’aide du langage visuel ScenLRPG ............................. 230Figure 51 - Utilisation de l'outil de conception "papier" lors de l'expérimentation 1 ........................ 239Figure 52 - Esquisse du scénario "Bien conduire un entretien client" ............................................... 240Figure 53 - Esquisse du scénario "Répondre aux objections clients" ................................................ 241Figure 54 - Organisation globale de l'expérimentation 1.................................................................. 243Figure 55 - Expérimentation 1 : structure phase 1 (décrite avec le formalisme ScenLRPG) ............... 244Figure 56 - Expérimentation 1 : structure phase 2 (décrite avec le formalisme ScenLRPG) ............... 244Figure 57 - Expérimentation 1 : Exemple de production issue de la phase 2 .................................... 246Figure 58 - Expérimentation 1 - Phase 2 : Schéma de formalisation ................................................. 247Figure 59 - Expérimentation 1 - phase 2 : utilisation des exemples .................................................. 251Figure 60 - Interface du prototype d'environnement d'assistance ScenLRPG ................................... 257Figure 61 - Formalisation d'un scénario LRPG dans l'environnement ScenLRPG ............................... 258Figure 62 - Palette de composants ScenLRPG .................................................................................. 258Figure 63 - Détails d'un espace d'activité ScenLRPG ........................................................................ 259Figure 64 - Palette fonctions ScenLRPG ........................................................................................... 259Figure 65 - Palette des propriétés descriptives ScenLRPG ................................................................ 259Figure 66 - Palette des règles d'organisation du scénario ................................................................ 260Figure 67 - Fenêtre de propriétés d'un composant .......................................................................... 260Figure 68 - Expérimentation 2 : structure introduction et phase 1 ................................................... 262Figure 69 - Expérimentation 2 : structure phase 2 ........................................................................... 262Figure 70 - Formalisation ScenLRPG de l'esquisse du scénario Mener l'enquête .............................. 267Figure 71 - Fight Right : structure du scénario ................................................................................... IV
301
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 - Les six facettes du système ESAR et leurs descripteurs principaux (d’après Garon et al.2002) ................................................................................................................................................ 23Tableau 2 - Cadre de description de l'architecture des jeux (Klabbers 2008) ...................................... 34Tableau 3 - Classifications de jeux étudiées : synthèse ...................................................................... 36Tableau 4 - Apprentissage et jeu : des facteurs d'engagement communs (d’après les travaux deCharles et al. 2009b) ....................................................................................................................... 101Tableau 5 - Propriétés des entités du formalisme des Pléiades (Villiot-Leclercq 2007) ..................... 171Tableau 6 - Synthèse des éléments décrits et caractéristiques des approches de formalisationétudiées.......................................................................................................................................... 178Tableau 7 - Jeu de communication et jeu de mission : caractéristiques principales .......................... 190Tableau 8 - Interact : spécifications générales ................................................................................. 195Tableau 9 - Interact - phase 03 : description des fonctions .............................................................. 197Tableau 10 - Synthèse des travaux sur les ressorts de jeu ................................................................ 208Tableau 11 - ScenLRPG : ressorts de jeu (1/2).................................................................................. 211Tableau 12 - ScenLRPG : ressorts de jeu (2/2).................................................................................. 212Tableau 13 - ScenLRPG : typologie d’espaces d'activité ................................................................... 223Tableau 14 - Propriétés descriptives des scénarios LRPG ................................................................. 225Tableau 15 - Représentations visuelles des ressorts de jeu .............................................................. 231Tableau 16 - Liste des pictogrammes du système de notation visuel ScenLRPG ............................... 232Tableau 17 - Expérimentation 1 : déroulement ............................................................................... 245Tableau 18 - Expérimentation 2 : déroulement ............................................................................... 263
302
ANNEXES
ANNEXE I............................................................................................................................................I
Typologie de processus de game design (d’après Bateman & Boon 2005)
ANNEXE II.......................................................................................................................................... II
Diagrammes de patrons COLLAGE (Hernández-Leo 2007)
ANNEXE III....................................................................................................................................... IV
Description du jeu de communication Fight Right à l’aide de notre grille de description
ANNEXE IV ..................................................................................................................................... VII
Langage de formalisation ScenLRPG : recueil de besoins
ANNEXE V ..................................................................................................................................... VIII
MISA : typologie d’activités d’apprentissage (Paquette 2002)
ANNEXE VI ...................................................................................................................................... IX
Expérimentation 1 : guide d’animation
ANNEXE VII .................................................................................................................................... XX
Expérimentation 1 : questionnaire initial
ANNEXE VIII ................................................................................................................................. XXII
Expérimentation 1 : réponses aux questionnaires initiaux
ANNEXE IX ................................................................................................................................ XXVIII
Expérimentation 1 : questionnaire final
ANNEXE X ................................................................................................................................... XXXI
Expérimentation 1 : réponses aux questionnaires finaux
ANNEXE XI ............................................................................................................................... XXXIV
Expérimentation 1 : description des scénarios LRPG exemples
ANNEXE XII .................................................................................................................................. XLII
Expérimentation 1 : commande n° 1
ANNEXE XIII ................................................................................................................................ XLIII
Expérimentation 1 : commande 2
ANNEXE XIV ................................................................................................................................ XLIV
Guide de conception ScenLRPG
ANNEXE XV ................................................................................................................................. XLVI
Guide sur les ressorts de jeu
303
ANNEXE XVI ............................................................................................................................... XLVII
Expérimentation 2 : guide d’animation
ANNEXE XVII ...................................................................................................................................LII
Expérimentation 2 : questionnaire initial
ANNEXE XVIII ................................................................................................................................ LIV
Expérimentation 2 : réponses au questionnaire initial
ANNEXE XIX ................................................................................................................................ LVIII
Expérimentation 2 : scénario à s’approprier
ANNEXE XX .................................................................................................................................... LX
Expérimentation 2 : description textuelle du scénario à formaliser à l’aide du langage ScenLRPG
ANNEXE XXI .................................................................................................................................. LXI
Expérimentation 2 : formalisation de référence du scénario « jeu de mission »
ANNEXE XXII ............................................................................................................................... LXIII
Description du jeu détective conseil
ANNEXE XXIII ............................................................................................................................... LXV
Environnement informatique ScenLRPG : guide d’utilisation
ANNEXE XXIV............................................................................................................................. LXVII
Environnement informatique ScenLRPG : Spécifications des écrans de recueil de besoins liés aujeu
ANNEXE XXV............................................................................................................................. LXVIII
Environnement informatique ScenLRPG : description des fonctionnalités à travers un cas d’usage.
ANNEXE XXVI............................................................................................................................... LXX
Environnement informatique ScenLRPG : exemple de spécification d’une fenêtre de propriétés d’unespace d’activité
ANNEXE XXVII ............................................................................................................................. LXXI
Environnement informatique ScenLRPG : représentation d’un parcours à embranchements
I
Annexe I
Typologie de processus de game design (d’après Bateman & Boon 2005)
Bateman & Boon établissent une liste de 7 types de processus de game design, décrits de manièresimplifiée afin d’en faire apparaître les grandes étapes qui les structurent.
1. Le processus « First principles » : Définition des objectifs -> Abstraction de l’univers dejeu -> Design -> Réalisation du jeuLa première étape de ce processus consiste, pour le concepteur, à définir les objectifs viséspar son projet. Il précise ensuite la nature de l’univers de son jeu avant de se lancer dans laconception à proprement parler.2. Le processus « Clone and tweak » (Copie et amélioration) : Utilisation d’un designexistant -> Modifications -> Réalisation du jeuPrésenté comme le plus couramment utilisé, ce processus de conception s’appuie sur un jeuexistant qui est ensuite modifié afin d’être adapté aux besoins du nouveau projet.3. Le processus « Meta-Rules » : Utilisation de méta-règles -> Design -> Réalisation dujeuCe processus consiste à s’appuyer sur des principes généraux qui vont guider la conception.Les principes de conception proposés sont généralement formulés pour inciter le concepteur àse poser des questions sur ses choix (Falstein 2002, Adams 2001).4. Le processus « Expressing technology » : Choix d’une technologie -> Réalisation du jeuDans cette méthode les game designers sont peu présents. La volonté première qui guide laconception est l’utilisation d’une nouvelle technologie. Le jeu se construit alors à partir de cettetechnologie.5. Le processus « Frankenstein approach » : Contenu de départ provenant de projetsabandonnés -> Design -> Réalisation du jeuCe processus vise à réutiliser des contenus issus de projets précédents n’ayant pas abouti.6. Le processus « Story-driven design » : Ecriture d’une histoire -> Design -> Réalisationdu jeuDans cette approche une histoire sert de point de départ et de fil conducteur à la conceptiondu jeu.7. Le processus « Iterative design » : Réunions entre les membres de l’équipe Design-> Réalisation du jeuCette approche met en œuvre un processus itératif au cours duquel la conception estprogressivement affinée et modifiée suite aux discussions menées par les membres du projetjusqu’à la finalisation de la conception du jeu.
II
Annexe II
Diagrammes de patrons COLLAGE (Hernández-Leo 2007)
Diagramme du patron Brainstorming
Diagramme du patron Thinking Aloud Pair Problem Solving
III
Diagramme du patron Simulation
Diagramme du patron Think Pair Share
Diagramme du patron Pyramid
IV
Annexe III
Description du jeu de communication Fight Right à l’aide de notre grille de description
Second test de la grille : description d’un LRPG de type jeu de communicationAfin de tester notre grille pour la description de dispositifs LRPG, nous l’avons appliquée à un LRPGintitulé Fight Right1 (Thiagarajan). Il s’agit d’un jeu-cadre destiné à une formation à la gestion deconflits, concernant plus particulièrement l’acquisition de techniques d’auto-médiation. En tant que jeu-cadre, ce scénario est un scénario générique, c’est-à-dire qu’il n’est pas contextualisé à une sessiond’utilisation spécifique (ceci explique qu’un certain nombre d’informations ne soient pas renseignées).
Fight Right : spécifications généralesLe jeu Fight Right se déroule lors d’une séance présentielle d’une durée de 90 minutes. Il est composéde trois jeux de rôle basés sur des scénarios réalistes de conflits se déroulant dans un contexteprofessionnel.
Description du jeu au niveau macro
Figure 71 - Fight Right : structure du scénario
Fight Right est destiné à un groupe de 3 à 15 participants répartis en équipes de 3 joueurs. Lesparticipants joueront les rôles définis dans les scénarios (c’est-à-dire soit l’un des acteurs du conflit, soitun médiateur) ou seront observateurs de la scène.Fight Right est composé de trois phases principales, chacune basée sur un jeu de rôle différent etintroduisant ou mettant progressivement en application les principes de médiation et d’auto-médiationde conflits objets de la formation :
phase 01 : jeu de rôle « Gestion de projet » et introduction au concept de médiation de conflits ; phase 02 : jeu de rôle « Satisfaction client », mise en application de principes de médiation et
introduction au concept d’auto-médiation ; phase 03 : jeu de rôle « Deadlines » et mise en application des techniques d’auto-médiation.
Description de la phase 02 au niveau microEn guise d’illustration de l’utilisation de la grille pour la description d’un scénario LRPG au niveaumicro, nous nous focalisons sur l’une des phases du jeu Fight Right, et pour certains points tels que lesrègles de communication entre les acteurs, nous nous intéressons essentiellement à l’étape réservée àla mise en œuvre du jeu de rôle à proprement parler.
1 http://www.thiagi.com/pfp/IE4H/december2001.html#FeaturedActivity
V
La deuxième phase, « Jeu de rôle n°02 : satisfaction client », se déroule par équipe de 3 participants,comme l’ensemble du scénario Fight Right. Dans chacune des équipes, deux participants jouent lesrôles des acteurs du conflit (Cathy et Bob) et le troisième joue le rôle d’un médiateur.Cette phase comporte 6 étapes s’articulant autour de l’activité centrale de jeu de rôle :
1- Briefing des acteurs du conflit ;2- Briefing des médiateurs ;3- Jeu de rôle ;4- Débriefing du jeu de rôle ;5- Discussion autour des fiches d’aide à la médiation ;6- Présentation du concept d’auto-médiation.
Le statut et les modalités de chaque étape (individuelle ou collective, etc.) sont précisées dans la partie« syntaxe des règles » de la grille (cf. extrait de la grille ci-dessous).
RèglesSyntaxeJeu libre ou très réglé Païda (libre) <-|--------> ludus (réglé)Phase préparatoire AucuneRègles de départ Briefing des joueurs (Etapes 1 et 2)Règles de fin / Conditions de clôture A l’initiative du formateur. Quand toutes les phases constitutives ont été
achevées.Densité (nb de phases constitutives) 6
Organisation
EtapesStatut(Obligatoire / optionnel)
Modalités(Collective/Coopérative/Collaborative/Individuelle)
Durée : 30min
1- Briefing des acteurs duconflit
Obligatoire Individuelle
2- Briefing des médiateurs Obligatoire Collective
3- Jeu de rôle Obligatoire Collective 8min
4- Débriefing du jeu de rôle Obligatoire Collective
5- Discussion autour desfiches d’aides à la médiation
Obligatoire Collective
6- Présentation du conceptd’auto-médiation
Obligatoire Collective
Sémantique
EtapesRègles de communications et de coordination entre les rôles
1- Briefing des acteurs duconflit2- Briefing des médiateurs3- Jeu de rôle Communication libre entre les acteurs du conflit guidée par le background des personnages
Communication du médiateur avec les acteurs du conflit guidée par les documents d’aide à la médiationfournis
4- Débriefing du jeu de rôle5- Discussion autour desfiches d’aides à la médiation6- Présentation du conceptd’auto-médiationMotivations issues du jeu Agôn / Mimicry / Alea / IlinxPragmatique
Etapes Actions des animateurs EvaluationQui ? Comment ?
1- Briefing des acteurs duconflit
Formateur
2- Briefing des médiateurs Formateur3- Jeu de rôle Observateur : Observer et noter les
éléments de médiation intéressants pour ledébriefing
4- Débriefing Formateur5- Discussion autour desfiches d’aides à la médiation
Formateur
6- Présentation du conceptd’auto-médiation
Formateur
Fight Right - Phase 02 : description des règles
VI
La description des « fonctions » de la phase 02 précise notamment les documents ressources utiles àl’activité et leur format (aspect pragmatique) : ici, nous avons plus particulièrement mis l’accent sur lesressources nécessaires au jeu de rôle avec les documents de présentation des backgrounds despersonnages qui seront joués par les participants et les documents supports à l’action du médiateur.
Fonctions
Syntaxe Sémantique Pragmatique EtapeSupport principal Jeu de plateau / Jeu
de cartes / Simulateur/ Communicationorale (jeu de rôle)etc.
Fonctions ressources Oui / Non
Docs consignesLe background de Bob : pour acteur duconflit (B) Doc papier 1, 3
Le background de Cathy : pour acteur duconflit (C) Doc papier 1, 3
Check-list médiation pour médiateur Doc papier 2, 3, 5Guidelines médiations pour médiateur Doc papier 2, 3, 5Docs ressources recherchésDocs produits
Notes du formateur concernant leséléments intéressants de médiationobservés pendant le jeu de rôle
Doc papier 3, 4
Fonctionscommunication Oui / Non
Interactions sociales Communication oraleen face à face ToutesTâches collectives
Négociation
Choix - Convergence
Fonctions organisation Oui / Non
Gestion de profils
Planification :Gestion de la durée des jeux de rôles
Chronomètre3
Fight Right - Phase 02 : description des fonctions
VII
Annexe IV
Langage de formalisation ScenLRPG : recueil de besoins
Facettes
Prise en compte dans le processusde conceptionL’objectif pour le concepteur est de…
Définition du contexte Formulation des intentions etobjectifs
Entreprise - se familiariser avec l’entreprise danslaquelle va s’inscrire le dispositif deformation- identifier ses interlocuteursprivilégiés au cours du projet etnotamment les décideurs auprèsdesquels il devra échanger pourcommuniquer sa proposition etl’ajuster à leurs demandes.
Définir les informations relatives aucontexte de l’entreprise.Ex : domaine d’activité, responsabledu projet (interlocuteur privilégié duconcepteur)
Formation - se familiariser avec le public cible- déterminer les contraintesorganisationnelles à prendre encompte lors de l’élaboration dudispositif LRPG- cerner les attentes de l’entreprise etdes apprenants face au dispositif deformation à concevoir et les concilierau mieux lors des choix qui seronteffectués dans la conception dudispositif.
Définir les informations relatives à laformation :- Public cible : profil des apprenantsauxquels est destiné le dispositif deformation- Contraintes relatives àl’organisation de la formation : effectifà former, disponibilité du public cible,répartition géographique, nombre desessions de formation, etc.- Accompagnement de la formation(possibilités de tutorat)- Conséquences des caractéristiquesprécédentes sur les modalités demise en œuvre envisageables pour ledispositif de formation : présentiel oudistance, synchrone ou asynchrone
Préciser les finalités attenduesà travers le dispositif LRPG :- d’une part du côté del’entreprise : « pour l’entreprisele projet de formation viseà… »- d’autre part du point de vuedes apprenants : « pourl’apprenant le projet deformation vise à… »
Connaissances - délimiter le périmètre desconnaissances/compétences qui fontl’objet de la formation- identifier les situationsprofessionnelles de référence danslesquelles lesconnaissances/compétences sontnécessaires- définir les objectifs pédagogiquesvisés
Définir les informations relatives aucontexte de connaissances :- Ressources de référencedisponibles sur le sujet abordé dansla formation- Degré de formalisation de cesressources et niveau d’adaptation à laformation et au public cible- Référentiel de compétences métiers- Cartographie desconnaissances/compétences cibléespar la formation
Définir les objectifspédagogiques associant unverbe d’habileté à un item duréférentiel de connaissance :Ex : « A l’issue de la formation,l’apprenant doit être capabled’analyser une demande clientafin d’y apporter une réponseadaptée »
Jeu - identifier les spécificités du contexted’application concernant l’utilisation dujeu dans le but de proposer undispositif adapté
Définir les informations relatives auxhabitudes de jeu :- Profil de l’entreprise et du publiccible : opinion globale et expériencesantérieures quant à l’utilisation du jeuen formation
Ressorts de jeuenvisagés/envisageables, butvisé et éléments de mise enœuvre associés
VIII
Annexe V
MISA : typologie d’activités d’apprentissage (Paquette 2002)
Type d’activités Définition Exemples
Activités de production Vise à construire des schémasd’informations (instruments) ou desobjets matériels
Travaux pratiques de compositiond’une pièce musicale, d’un texte,d’élaboration d’un rapport, deréalisation d’une sculpture
Activités d’exécution Vise à produire une traced’exécution d’un processus
Exercice aérobique, démarchethérapeutique, techniqued’entrevue, exercice de répétition
Activités de collaboration Vise le partage d’informations, deressources ou de rôles
Partage d’une expérience,discussion, échange d’idées,résolution d’un problème en équipe
Activités de métacognition Vise à construire un modèle de sonpropre processus d’apprentissage
Test d’identification du styled’apprenant, journal de bord, bilanà la suite d’un projet, réflexion surla démarche
Activités de consultation Vise à obtenir l’information en lademandant à un agnet extérieur(matériel pédagogique oupersonne-ressource)
Interrogation d’une banque dedonnées, observation et prise denotes, lecture, interrogation d’unexpert, écoute d’un exposé
Activités de perception Vise à obtenir des sensations enétant réceptif à un agent extérieur
Exercice de dégustation de vin,comparaison de couleurs,observations de la direction desvents, technique de massagecorporel
Activités de motivation Vise à susciter l’attention, l’intérêtet le désir d’agir
Exercice pour « briser la glace »,exercice de visualisation,monologue d’ouverture, théâtre
Activités d’organisation Vise à ordonner et à coordonnerl’exécution des activités selon unmode d’interaction
Exercice de découverte desaffinités pour un regroupement endyades dans une activitépédagogique, planification dutravail en équipe
Activités sociales Vise à favoriser la détente et leséchanges ou la communicationentre les gens dans un cadreinformel.
Rencontre autour d’un café entredeux activités pédagogiques, 5 à 7,souper communautaire, exercicesde yoga entre deux activitéspédagogiques, étirements
IX
Annexe VI
Expérimentation 1 : guide d’animation
Expérimentation ScenLRPG - Déroulement
Phase 1 : conception libre
X
Activité Modalité Action de l’animateur Docs animateur Action du sujet Docs sujets / Matériel Durée Timing
1 Introduction Individuel Accueille le sujet et introduitl’expérimentation (présentation dudéroulement)
• Page 5 2’ 13h00
2 Questionnaire Individuel Distribue le questionnaire • Page 5 Remplit le questionnaire • Questionnaired’introduction
8’
3 Consignes &présentation de lademande client
Individuel 1/ Distribue la fiche « demandeclient n°1 »2/ Présente la demande client etce qui est attendu de la part dusujet de l’expérimentation3/ Explique au sujets qu’il doitverbaliser ses réflexions et sesactions
• Page 5 • Fiche demandeclient n°1
5’ 13h10
4 Conception Individuel Enregistre, prend des photos etprend des notesFait des débriefings réguliers si lesujet ne verbalise pas
• Page 6 Conçoit un scénario répondant à lademande client présentée en verbalisantses intentions
• Fiche demandeclient• Feuilles A4 vierges• Feuilles A3• Post-it• Crayon papier,gomme• Stylos et marqueurs• Scotch, ciseaux• Règle
45’ 13h15
5 Présentation de laproduction
Individuel (Changement d’animateur)Rappelle les consignesA la fin de la présentation, il posedes questions (demande deprécisions, éclaircissements…)Prend des notes
• Page 6 Présente le scénario conçu à un animateur(différent de celui qui a assisté à laconception), comme s’il s’agissait du clientcommanditaire
Répond aux questions éventuelles del’animateur
• Le scénario conçu 15’ 14h00
6 Débriefing conception Individuel (Retour de l’animateur initial)Anime le débriefing en posant desquestions sur le travail deconception et de préparation de laprésentation du scénarioPrend des notes
• Page 6-7 Répond aux questions de l’animateur :principales difficultés rencontrées etc.
10’ 14h15
PAUSE 15’ 14h25
XI
Phase 2 : conception ScenLRPG
Activité Modalité Action de l’animateur Docs animateur Action du sujet Docs sujets / Matériel Durée Timing
7 ScenLRPG :méthodologie etmodèles
Tous Regroupement de tous le sujets del’expérimentation1/ Distribue les docs aux sujets2/ Présente la méthode de conceptionScenLRPG et les modèles de scénarios
• Page 8• Support deprésentation de laméthodologie (ppt)• Exemples descénarios papier
• Guide conception• Guide ressorts• Modèles de scénarios
30’ 14h40
8 Consigne conceptionScenLRPG – scénario1
Individuel 1/ Expose la consigne2/ Rappelle aux sujets qu’ils doiventverbaliser leurs actions
• Page 8 • 5’ 15h10
9 ConceptionScenLRPG – scénario1
Individuel Enregistre, prend des photos et prend desnotesFait des débriefings réguliers si le sujet neverbalise pas
• Page 8 Met en œuvre la méthodologieScenLRPG pour concevoir unscénario répondant à lademande client objectif 1
Verbalise ses intentions
• Guide conception• Guide ressorts• Modèles de scénarios• Fiche demande client• Scénario conçu dans laphase 01• Matériel conception :composants ScenLRPG• Crayon, gomme
30’ 15h15
XII
10 Consigne – scénario 2 Individuel 1/ Expose la consigne (nouvelle demande)2/ Rappelle au sujet qu’il doit verbaliser sesactions
• Page 8-9 Fiche demande client n°2 5’ 15h45
11 ConceptionScenLRPG – scénario2
Individuel Enregistre, prend des photos et prend desnotesFait des débriefings réguliers si le sujet neverbalise pas
• Page 9 Met en œuvre la méthodologieScenLRPG pour concevoir unscénario répondant à lademande client : objectif XX
Verbalise ses intentions
• Guide conception• Guide ressorts• Modèles de scénarios• Fiche demande client• Scénario conçu dans laphase 01• Matériel conception :composants ScenLRPGCrayon, gomme
45’ 15h50
12 Présentation de laproduction ScenLRPG
Individuel (Changement d’animateur)Rappelle les consignesA la fin de la présentation, il pose desquestions (demande de précisions,éclaircissements…)Prend des notes
• Page 9 Présente le scénario conçu à unanimateur (différent de celui quia assisté à la conception).comme s’il s’agissait du clientcommanditaireRépond aux questionséventuelles de l’animateur
• Le scénarioconçu formalisé avec laméthodo ScenLRPG
15’ 16h35
13 Débriefing conception+ présentation
Individuel (Retour animateur initial)Anime le débriefing en posant desquestions sur :
- sur le travail de conception et depréparation de la présentation duscénario
- la présentation du scénarioen mettant en avant la comparaison avecla phase 1.Prend des notes
• Page 9-10 Répond aux questions del’animateur
10’ 16h50
14 Questionnaire final &clôture
Tous Distribue le questionnaire finalRemercie le sujet
• Page 10 Remplit le questionnaire • Questionnaire final 10’ 17h00
XIII
XIV
Phase 1 : conception libre1- Introduction
Remerciements :
« Merci d’avoir accepté de participer à cette expérimentation. Dans le cadre de notre travail,nous nous intéressons à la conception de dispositifs de formation utilisant des principes dejeu et des activités collaboratives pour favoriser la motivation des apprenants.
Je tiens à préciser que nous sommes là pour évaluer notre travail et vous le faire tester. Cen’est pas vous qui êtes évalués mais la méthode que nous allons vous proposer. Les résultatsseront utilisés dans nos travaux de recherche de manière anonyme. Surtout n’hésitez pas àdire ou à écrire tout ce que vous pensez : votre avis nous intéresse !
Je vais vous enregistrer et prendre quelques photos de ce que vous allez produire.
Ne soyez pas surpris par la façon de je vais m’adresser à vous : le cadre particulier del’expérimentation m’oblige à suivre un guide précis avec un discours pré-rédigé.»
Déroulement :
« Cette expérimentation est organisée en 2 grandes phases, séparées par une pause de15min.»
2- Questionnaire
« Pour commencer je vais vous demander de remplir un questionnaire pour faireconnaissance et aussi pour évoquer certaines notions que nous allons aborder à travers cetteexpérimentation. Donnez des réponses brèves et si vous ne savez pas quoi répondre n’hésitezpas à indiquer « je ne sais pas ». Vous avez 10 minutes pour compléter le questionnaire.
Merci. »
Questionnaire recto-verso
3- Consignes & présentation de la commande client n°1
« Nous allons entrer dans le vif du sujet ! A partir de maintenant, vous êtes concepteurpédagogique au sein de la société Learning Concept, spécialisée dans la conception et la miseen place de dispositifs de formations auprès de grands groupes. Vous venez de recevoir unappel d’offre auquel votre société souhaite répondre. On fait appel à vous pour proposer undispositif de formation adapté.
PRESENTATION DE LA COMMANDE (doc word à distribuer aux sujets) : lire ledocument.
Vous avez 45min pour concevoir le scénario d’un dispositif de formation répondant à lademande. Au cours de la conception vous devez exprimer à voix haute vos intentions etdécrire les actions que vous faites.
Pendant la phase de conception, vous ne pouvez pas poser de questions : à vous de faire deschoix qui s’imposent sur des besoins de précisions que vous souhaiteriez, à vous d’interpréterla demande, de concevoir une proposition à votre manière, tel que vous voyez les choses…Nous vous demandons d’exprimer ces interrogations à voix haute ainsi que les choix que vousferez.
XV
A l’issue de cette phase de conception, vous devrez présenter votre scénario au clientcommanditaire. Pour cela vous aurez environ 10min. Point important : vous présenterez leschoix que vous avez faits à propos des ressorts de jeu utilisés, des activités collectives et deleur organisation relativement à la demande client et à l’objectif de motivation desapprenants.
N’oubliez pas de consacrer du temps à la préparation de la présentation que vous ferez àvotre client ! Préparez une présentation tel que vous le feriez dans la vraie vie si vous deviezprésenter votre scénario à un client.»
4- Conception
Lancer l’enregistrement + énoncer l’heure au début de chaque enregistrement
Rappeler la nécessité de verbaliser les intentions et les actions.
Durant cette phase ne pas répondre aux questions afin de ne pas orienter le sujet. Si desquestions sont posées sur la demande client : répondre au sujet qu’il doit faire des choix,poser des hypothèses sur les éventuels points qu’il aimerait voir préciser et verbaliser leschoix qu’il effectue.
Prendre des notes sur :- la façon dont les sujets organisent leur travail (traces d’une
éventuelle méthodo)- les éléments qui révèlent la volonté de mettre en œuvre des ressorts de jeu, des
activités motivantes…
Prendre des photos à différents moments de la conception.
Si le sujet ne verbalise pas suffisamment ses actions et ses intentions : faire desdébriefings réguliers (toutes les 15min). Questions à poser :
- Où en êtes-vous ? Qu’avez-vous fait ?- Pourquoi ? Dans quel but ?- Qu’allez-vous faire ensuite ? Dans quel but ?
5- Présentation de la production & questions
Rappeler la consigne :
« C’est le moment de présenter votre proposition à votre client. Pour cela vous avez environ10min. A l’issue de votre présentation, le client vous posera des questions s’il souhaite deséclaircissements sur certains points. »
Changement d’animateur = joue le rôle du client
Pendant la présentation, noter les éléments relatifs :
- au scénario présenté : structure, activités proposées- aux choix effectués en termes d’activités motivantes, principes de jeu,
activités collectives, jeu de rôle et à la façon dont ils sont présentés ounon
- à la façon dont le scénario est présenté : schéma ? texte ? …
XVI
- aux difficultés de compréhension, à la clarté de la présentation
Après la présentation, poser des questions pour lever des incompréhensionséventuelles.
6- Débriefing conception
Changement d’animateur : l’animateur qui a assisté à la conception faite par le sujetrevient animer le débriefing
« Revenons à la phase de conception de votre dispositif :
- Quelles sont vos réactions par rapport au travail de conception que vous avezeffectué ?Etes-vous satisfait ? Pourquoi ?
- Avez-vous rencontré des difficultés ?- De quoi auriez-vous pu avoir besoin ? Qu’est-ce qui vous aurait aidé ?- Et concernant la formalisation de votre scénario et la façon dont vous l’avez présenté
?
Noter notamment ce qui concerne des difficultés liées à un manque éventuel deméthodologie pour ce type de scénario ; les difficultés liées aux spécificités de la
demande, au manque de familiarité avec ce type de demande (jeu de rôle et autres ressortsde jeu, activités collaboratives, etc.)
XVII
Phase 2 : conception ScenLRPG7- ScenLRPG : méthodologie et modèles
« Je vais maintenant vous présenter une méthodologie que nous avons formalisée afind’assister la conception de dispositifs de formation tels que celui évoqué dans la demandeclient sur laquelle vous avez travaillé. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à les poser.»
Distribuer le guide de conception et le guide sur les ressorts de jeu
Présentation de la méthodologie ScenLRPG et des exemples de scénarios.
8- Consignes conception ScenLRPG – commande n° 1
« Reprenez la commande client présentée tout à l’heure. Vous devez maintenant proposer unscénario en utilisant le formalisme de la méthodologie ScenLRPG que je viens de vousprésenter.
Vous pouvez éventuellement vous inspirer du premier scénario que vous avez conçu.
Vous avez à votre disposition des exemples de scénarios, un guide sur les ressorts de jeu et unguide de conception qui reprend les éléments-clés du formalisme : n’hésitez pas à lesutiliser. Je pourrai vous redonner certaines explications sur les scénarios si vous en avezbesoin.
Vous avez 30min pour réaliser ce travail.»
9- Conception ScenLRPG – commande n° 1
Rappeler la nécessité de verbaliser les intentions et les actions.
L’animateur n’est pas là pour vérifier la « bonne » utilisation de la méthodologieScenLRPG (sinon on introduit un biais concernant son utilisabilité).
Durant cette phase, l’animateur répond uniquement aux questions relatives aux modèles descénarios : rappel ou complément d’informations (cf. doc description détaillée des
scénarios).
Prendre des notes sur :- Les modifications du scénario initial : comment ? pourquoi ?- L’utilisation des exemples de scénarios mis à disposition- L’utilisation du guide sur les ressorts de jeu- Les difficultés ou incompréhensions concernant l’utilisation du formalisme- La volonté de mise en œuvre des ressorts de jeu et des activités collaboratives
10- Consignes conception ScenLRPG – commande n°2
« Voici une nouvelle commande.
PRESENTATION DE LA COMMANDE 2 (doc word à distribuer aux sujets).
Vous devez concevoir une proposition de scénario pour cette nouvelle commande en utilisantle formalisme de la méthodologie ScenLRPG.
XVIII
Vous avez à toujours à votre disposition les exemples de scénarios, un guide sur les ressortsde jeu et un guide de conception qui reprend les éléments clés du formalisme : n’hésitez pas àles utiliser. Je pourrai vous redonner certaines explications sur les scénarios si vous en avezbesoin.
Comme lors de la première phase de l’expérimentation, vous devrez présenter votreproposition au client commanditaire en mettant en évidence les ressorts de jeu mis en œuvredans votre scénario.
Vous avez cette fois 45min pour réaliser ce travail.»
11- Conception ScenLRPG – commande n°2
Rappeler la nécessité de verbaliser les intentions et les actions.
L’animateur n’est pas là pour vérifier la « bonne » utilisation de la méthodologieScenLRPG (sinon on introduit un biais concernant son utilisabilité).
Durant cette phase, l’animateur répond uniquement aux questions relatives aux modèles descénarios : rappel ou complément d’informations (cf. doc description détaillée des
scénarios).
Prendre des notes sur :- L’utilisation des exemples de scénarios mis à disposition- L’utilisation du guide sur les ressorts de jeu- Les difficultés ou incompréhensions concernant l’utilisation du formalisme- La volonté de mise en œuvre des ressorts de jeu et des activités collaboratives
12- Présentation de la production ScenLRPG – commande n° 2
« C’est le moment de présenter votre nouvelle proposition (commande n°2) à votre client.Pour cela vous avez environ 10min. A l’issue de votre présentation, le client vous posera desquestions s’il souhaite des éclaircissements sur certains points. »
Changement d’animateur = joue le rôle du client
Pendant la présentation, noter les éléments relatifs :
- au scénario présenté : structure, activités proposées- aux choix effectués en termes d’activités motivantes, principes de jeu,
activités collectives, jeu de rôle et à la façon dont ils sont présentés ounon
- à la façon dont le scénario est présenté : schéma ? texte ? …- aux difficultés de compréhension, à la clarté de la présentation
Après la présentation, poser des questions pour lever des incompréhensionséventuelles.
13- Débriefing : comparaison des phases 1 et 2
Changement d’animateur : l’animateur qui a assisté à la conception faite par le sujetrevient animer le débriefing
Veiller à interroger le sujet sur les 2 commandes traitées.
XIX
« Revenons à la conception des scénarios :
Commande 1 :
- Quelles sont vos réactions par rapport au travail effectué sur la commande 1 avecutilisation de la méthodologie ? en comparaison de la 1ère phase ?
- Avez-vous modifié votre première proposition ?- Avez-vous utilisé les exemples de scénarios fournis ? Vous ont-ils servi d’une manière
ou d’une autre ?
Commande 2 :
- Quelles sont vos réactions par rapport au travail de conception que vous avezeffectué sur cette nouvelle commande ? Etes-vous satisfait ? Pourquoi ? Encomparaison de la conception de la 1ère phase (sans méthodologie) ?
- Avez-vous rencontré des difficultés ?- Avez-vous utilisé les modèles de scénarios fournis ? Vous ont-ils servi d’une manière
ou d’une autre ?
De manière générale :
- Avez-vous utilisé le guide sur les ressorts de jeu ? Pourquoi ?- Et concernant la formalisation de vos scénarios et les présentations au client ?
Comment ça s’est passé en comparaison de la première fois ? les mieux ? les moinsbiens ? »
Noter notamment ce qui concerne :- les difficultés rencontrées et intérêts trouvés dans l’application du formalisme
ScenLRPG- l’utilisation des modèles de scénarios proposés (réutilisation dans leur scénario ou
consultation uniquement pour comprendre le formalisme)
14- Questionnaire de fin et clôture
Questionnaire :
« Pour finir, je vais vous demander de remplir un questionnaire afin de recueillir voscommentaires sur les éléments de l’expérimentation. Je vous rappelle que le but de cetteexpérimentation est d’enrichir notre réflexion et notre travail, donc n’hésitez pas à nous fairepart de vos remarques ! Merci. »
Remerciements :
« Encore merci pour votre participation. Les résultats de cette expérimentation seront trèsutiles pour nos travaux. Je vous tiendrai informés de l’avancement de ce projet. »
XX
Annexe VII
Expérimentation 1 : questionnaire initial
Quelques questions avant de commencer…
Vous et le jeu
Dans votre vie personnelle…
A quelle fréquence jouez-vous aux jeux suivants ?
Tous lesjours
Une fois parsemaine
Une fois parmois
Quelquesfois dansl’année
Jamais
Jeux de société (jeux de plateaux,jeux de cartes, etc.)
Jeux de rôle
Jeux vidéos (console, ordinateur,téléphone)
Jeux d’extérieur, jeux sportifs(pétanque, foot, tennis, etc.)
Autres jeux auxquels vous jouez(précisez) :
____________________________
____________________________
Si vous ne jouez pas ou n’aimez pas les jeux, pouvez-vous expliquer pourquoi :
Dans votre vie professionnelle…
Dans le cadre d’une formation, vous a-t-on déjà proposé un jeu ou une activité ludique ? oui / non
Si oui, pouvez-vous décrire en quelques mots l’un de ces jeux (type de jeu et objectif) :
En tant que formateur ou concepteur pédagogique, avez-vous déjà conçu un jeu pour la formation :- En présentiel ? Oui / Non- A distance (en ligne) ? Oui / Non- Collectif ? Oui / Non
XXI
Si oui, pouvez-vous décrire l’un de ces jeux (type de jeu et objectif) :
Quelques concepts relatifs à notre étude
Pour vous, une activité motivante, c’est…Donnez quelques mots ou expression
Pour vous, qu’est-ce qu’un jeu de rôle ?
Pour vous, qu’est-ce qu’un principe ludique ou un ressort de jeu ?Donnez des exemples.
Votre profil
Nom : Prénom : Age :
Fonction :
Société : Domaine d’activité :
XXII
Annexe VIII
Expérimentation 1 : réponses aux questionnaires initiaux
Expérience de jeu perso(0 = ne joue jamais ; 4 = joue tous les jours) Expérience jeu apprenant
Jeux société jeux de rôle Jeux vidéos Jeux d'extérieur Autres Précisions Exemple
Sujet 1 3 0 1 1 0 Non
Sujet 2 1 0 0 1 0 Oui Quiz, fléché, à trous, en équipe. A distance ou enprésentiel
Sujet 3 3 1 1 2 4 Jeux avec enfants en bas âge Oui+jdrFormation accueil commercial. jeu de rôle. Obj :prendre conscience de la façon dont un client perçoitcertains comportements
Sujet 4 1 0 0 1 0 Oui+jdr Jeux de rôles divers / caméra + débriefing :simulation…
Sujet 5 1 1 0 1 0 Oui+jdr jeu de rôle dans le cadre d'activités commerciales
Sujet 6 2 1 1 3 0 Non
Sujet 7 1 0 1 1 0J'ai rarement au l'occasion en dehors dutravail. C'est peut-être une question de culture(RM est roumaine)
Oui
Formation sur les capacités cognitives :objectif : faciliter la mémorisationtype de jeu : retenir plusieurs mots dans un ordre pré-établi en se construisant une histoire autour de chaquemot
Sujet 8 1 1 0 1 0 Manque d'occasions Oui+jdr*jeux pour briser la glace lors de la constitution d'ungroupe d'apprenants en langue*jeux de rôle pour l'apprentissage du FLE
Sujet 9
2 1 2 1et mini jeux gratuits sur internet (type jeuxflash) Oui+jdr
jeu de rôle.Mise en situation de dialogue (2 personnes)Evaluation et critique face à une situation conflictuelledans des échanges oraux. Obj : maitriser les conflitsdans les relations interpersonnelles.
Sujet 104 1 3 2 Oui+jdr
formation à l'enseignement supérieur :*jeu de rôle (être soit l'intervenant, soit l'apprenant)*objectif: sensibiliser aux bonnes pratiques
Sujet 111 0 1 1 Oui+jdr
L'activité consistait à donner comme réponse ce quepouvaient penser les membres du groupe sur unequestion.Jeux de rôles
Sujet 12 4 0 3 1 NonSujet 13 3 1 2 3 Non
Sujet 14 2 0 3 1je suis mal à l'aise dans les jeux de rôle(timidité ?) Oui
jeu d'enquête dans le cadre d'un séminaire dédié aujeu. Obj : découvrir les mécanismes du jeu d'enquête
Sujet 15 4 0 4 1 NonSujet 16 2 0 1 1 Non
XXIII
Expérience jeu concepteur/formateur Définitions des notions
Oui
/Non
Prés
entie
l
A dist
ance
Col
lect
if
Exemple Activité motivante Jeu de rôle Ressort de jeu
Sujet1
Non Non Non Non Donner envie de faireLe but a une importance
Interpréter un personnage, une choseque l'on m'impose
Ludique fait que l'on peut exécuterquelque chose en prenant du plaisir- Ressort de jeu ?
Sujet2
Oui Oui Oui Oui Jeu de carte virtuel… * efficace (temps, contenu)* ludique (fait appel à l'apprenant)* progressive (droit à l'erreur,retour à un exercice…)
* se mettre dans la peau d'un acteur,simuler une situation, s'approprier lesréflexions
challenge, scoring, droit à l'erreur,analogie ou environnement detransposition
Sujet3
Non Non Non Non Donner envie de faire, departiciper, d'aller au-delà del'activité, captiver
Un jeu où l'on sort de son contextehabituel (espace, temps, personnalité,fonction…)
Sujet4
Oui Oui Non Oui rédiger un scénariopédagogique global sur unthème quelconque pourcomprendre des principes
Une activité qui prend en comptedes représentations et savoirsindividuels comme point dedépart, et qui propose unpassage organisé par unéchange collectif
C'est une situation de formation danslaquelle le stagiaire agit selon unscénario et des prescriptionsprédéfinis. Par définition il "interprète"son rôle.
"mise en intrigue" => moteur d'intérêt
Sujet5
Oui Oui jeu d'entreprise, dans le cadred'un projet. En cours denégociation. 1er contact avecdes prestataires.
* objectif clair* correspond à ce que j'aime, ouà des critères qui me plaisent
Se mettre à la place de"Vis ma vie"
Amusement… Je ne comprends pas laquestion
Sujet6
Oui Oui Non Oui Jeu de plateau type trivialpoursuite. Acquisition desavoirs fondamentaux législatif/ organisation de la présencepostale territoriale. Jeuquestion pour un champion,(rechercher et acquérir dessavoirs produits pour DET /savoirs de base)
Donner du sens. Acquérir dessavoirs. "Faire"
je suis un autre, je m'identifie à cetautre et je vis son activité…
Utiliser le jeu à des fins d'apprentissage.Faire un pas de côté pour apprendre.
Expérience jeu concepteur/formateur Définitions des notions
Oui
/Non
Prés
entie
l
A dist
ance
Col
lect
if
Exemple Activité motivante Jeu de rôle Ressort de jeu
Sujet7
Non Non Non Non Pr jeu présentiel : (juste encollaboration avec d'autresconcepteurs)
Inciter la curiosité. Accrocheravec une phrase, un mot, uneimage. Interpeler
Se mettre dans la peau d'un perso etconstruire une histoire
Le fil conducteur, ce qui motivel'apprenant, s'aider du jeu pour fairepasser des informations importantes. Ex :j'utilise le perso de James Bond pour fairepasser des informations concernant lesdonnées de sécurité
Sujet8
Oui Oui Oui Oui jeux de rôles pour l'expressionorale en FLE (par exemple jeudans lequel l'apprenant animeune émission de radio et doitrépondre aux questions desauditeurs)
Une activité enrichissante /ludique / originale
Un jeu qui pousse les participants àendosser la peau d'un personnagequ'ils ne sont pas (pour, par exemple,résoudre une situation problème)
Je ne sais pas
Sujet9
Oui Oui Oui Oui Pour un support de cours enprésentiel, les stagiairesforment 2 groupes. Chaquegroupe a un même objectif eta une visibilité sur les travauxde l'autre groupe. Consignesformat papier + affichés enprojection.Objectif : mettre les stagiairesdans une situation réelle, àpartir d'une crise initiale. Seposer les bonnes questions,proposer la bonne marche àsuivre. Désamorcer le conflitinitial.
* Rapidement compréhensible* Porte sur un domaine pur lequell'apprenant porte de l'intérêt* dynamique* doit apporter des connaissancesou à minima satisfaction àl'utilisateur
L'apprenant endosse un rôleinhabituel, on se met dans la peaude…
Une situation conflictuelle, une crise, uneaide => un élément perturbateur (positifou négatif)
Expérience jeu concepteur/formateur Définitions des notions
Oui
/Non
Prés
entie
l
A dist
ance
Col
lect
if
Exemple Activité motivante Jeu de rôle Ressort de jeu
Sujet10
Oui Oui Non Non Adaptation d'un jeu coopératifpour le transposer au mondee-learning dans le cadre d'unséminaire interne Symetrix.Objectif : faire prendreconscience des livrables d'unprojet et du flux tendu existant
* un but clairement identifié* une motivation pour atteindre cebut* la conjugaison de plusieurspersonnes pour y arriver* de l'humour
une immersion dans un universdifférent, l'incarnation d'un autrepersonnage avec une quête à meneralternant phases de réflexion, d'action,de détente
un ressort de jeu représente unemécanique bien huilée de différentsprincipes qui gouvernent un jeu etpermettent de faire entrer une joueurdans cet univers en lui donnant envied'aller jusqu'au bout.Un principe ludique -> par ex. utiliser unequête de type jeu d'aventure de jeuxvidéos dans un module de formation pourle rendre plus attractif
Sujet11
Oui Non Oui Non concernant les jeux à distance: Si les activités proposées parHot potatoes (mots fléchés,match, …) en font partie alorsoui
Qui a du sens, qui n'est pas"sérieuse", qui permetd'échanger, de partager
Un jeu où il est demandé aux "acteurs"de jouer le rôle d'une autre personneou son propre rôle. Collectif
Amusement - Collectif - Echange -Compétition
Sujet12
Oui Oui Non Oui Jeu présentiel en coursd'élaboration… Informer surles différents jalons d'un projete-learning. Jeu de plateau,coopératif
Une activité que l'on a envie defaire. Intéressante. Apportequelque chose.
Un jeu durant lequel les participantsincarnent un personnage, totalementimaginaire ou inspiré de la réalité.
* challenge* compétition* amusement*…-> un ensemble d'éléments reprenant lescritères principaux d'un jeu / d'une activité
Sujet13
Oui Non Oui Non Learning game ou cd-rom ludoéducatif.Cd-rom ludo éducatif (pourniveau scolaire CE/CM)L'apprenant doit rendre leurapparence humaine à des"monstres" (savants à qui on ajeté un sort). Pour cela, il doitréussir des épreuves(épreuves = exercices defrançais).
* ne pas voir le temps passer* être facile à comprendre etmettre en œuvreêtre intéressante (avoir un objectifludique, attractif)
Prendre la place d'un personnageprédéfini et agir +/- librement enrespectant un scénario lui aussiprédéfini
* c'est une thématique, une orientationdonnée au jeu* exemples : collecter des bonus, faireévoluer un personnage, rester le dernier(éliminer des concurrents)
Expérience jeu concepteur/formateur Définitions des notions
Oui
/Non
Prés
entie
l
A dist
ance
Col
lect
if
Exemple Activité motivante Jeu de rôle Ressort de jeu
Sujet14
Non Non Non Non Une activité mobilisatrice, enrapport direct avec les intérêts(pro, perso…) des participants
un jeu où l'on doit prendre la "place"d'un personnage en intégrant sapersonnalité, adoptant sescaractéristiques…
Une caractéristique / un élément que l'onva ajouter à une activité pour lui donnerune dimension ludique : un aléa, duhasard, un évènement qui va "perturber"l'utilisateur…
Sujet15
Oui Non Oui Non Learning Game destiné auxdélégués médicaux d'uneentreprise pharmaceutique.Obj : convaincre différentsintervenants du monde del'hôpital d'utiliser, de prescrireun médicament
* une activité qui donne envie dela suivre et de la terminer* une activité que l'on a plaisir àsuivre* une activité pour laquelle lesobjectifs sont motivants
Un jeu dans lequel on incarne unpersonnage précis, on prend sescaractéristiques (physique, pouvoirs)et on prend des décisions, on joue entenant compte de ces caractéristiques
* Une façon de jouer, une sorte declassification des jeux* le hasard, le hasard couplé à lastratégie, la stratégie
Sujet16
Non Non Non * suscitant la réflexion sansmême que l'on s'en rende compte* un challenge
Un jeu où le ou les joueurs deviennentdes personnages et accomplissentdes missions, ont une quête relative àce personnage
le ressort de jeu est l'élément qui permetde changer des phases dans un jeu.Ex. la carte à tirer qui fait avancer,reculer, gagner qq chose.
XXVIII
Annexe IX
Expérimentation 1 : questionnaire final
Quelques questions pour finir…
Donnez-nous votre avis…
Que pensez-vous de la méthodologie d’aide à la conception qui vous a été présentée ?Pour chacun des éléments proposés, indiquez ci-dessous les points positifs et négatifs que vous avez identifiés.
Points positifs / Ce que vous avez aimé ? Points négatifs / Ce que vous n’avez pas aimé ?
Le guide sur les ressorts de jeu
Les modèles de scénarios
Le formalisme de description desscénarios
Autres éléments que voussouhaitez commenter :
__________________________________________________________________
XXIX
XXX
Seriez-vous prêt à utiliser cette méthodologie d’aide à la conception dans votre contexteprofessionnel ? Oui, tout à fait / Oui, plutôt / Non, plutôt pas / Non, pas du tout
Si oui, dans quelles circonstances ?
Si non, pourquoi ?
Indiquez-nous vos suggestions, idées d’amélioration, ce que vous auriez aimé trouver dansune méthodologie d’aide à la conception de dispositifs de formation basés sur le jeu…
XXXI
Annexe X
Expérimentation 1 : réponses aux questionnaires finaux
Guide ressorts de jeu Modèles de scénarios Formalisme de description ScenLRPG
Points positifs Points négatifs Points positifs Points négatifs Points positifs Points négatifs
Sujet 1Indispensable car nouveau pour moi je ne sais pas trop quoi en
faire (des ressorts de jeu)J'ai pu très vite m'inspirer d'unscénario
* très pratique* sans ce serait tropabstrait
je n'ai pas facilementtrouvé ce qui pouvaitm'intéresser
Sujet 2Donne le sens Pas assez synthétique Donne un exemple Ciblé -> standard Synthétique, graphique,
lisible
Sujet 3
Clarté Clarté Cadre Manquent à monsens : lesressources, le lienavec les objectifspéda, des indicationsde durée
Sujet 4Utile le gagnant implique des
perdantsBonne idée Trop linéaire
Sujet 5Clair Difficultés avec les ressorts
"Etre soumis au hasard" et"perdre le contrôle"
Simple Facile d'utilisation
Sujet 6Valider le contenu de la séquence choisie conforte et rassure
valide le fait que plusieursactivités peuvent prendre placedans un scénario
Aide à la rédaction
Sujet 7
Clair/avoir le guide sous les yeux donnedes idées d'utilisation de ces ressorts
Constitue une bonne base pourproposer d'autres scénarios
J'ai adoré déplacer leséléments.Il aide à structure notreréflexion et ne pasoublier des élémentsimportants.
Sujet 8
très intéressant : je n'ai pas su répondre àla question initiale concernant les ressortsde jeu alors que le les utilisais sans m'enrendre compte. Maintenant je le ferai demanière consciente.
Ils permettent de prendrerapidement en main laméthodologie présentée et dese l'approprier
Permet de vérifierimmédiatement lacohérence et l'intérêt dudispositif proposé et depenser à tous leséléments.
Sujet 9
Pictogrammes explicites "perdre le contrôle" : c'est unpeu fort, non ?Intérêt du hasard dans le jeu :bonne ou mauvaise idée ?
Absence des activités"s'organiser" et"capitaliser" dans lesmodèles présentés.Difficile de différencier"produire" et "jouer unescène"
Sujet 10
Le fait d'avoir une catégorisation surlaquelle se reposer
j'ai juste l'impression d'utilisertrès souvent "relever un défiindividuel" ???
modèles clairs et parlantAssez explicites pour pouvoirles assimiler et les réutiliserimmédiatement
Parfois j'ai été influencépar ces modèles.J'aurais peut-être faitdifféremment sans ?(ou pas :-) )
J'ai beaucoup appréciéce formalisme. Un trèsbon outil pour manipulerson cerveau et sesidées, avec des repères
je me suis restreinteaux cartes pré-remplies. Je n'ai paspensé à utiliser descartes vierges =>
Guide ressorts de jeu Modèles de scénarios Formalisme de description ScenLRPG
Points positifs Points négatifs Points positifs Points négatifs Points positifs Points négatifsvisuels (picto,gommette) trèsappréciable
peut-être égalementque tout ce dontj'avais besoin étaitprésent ?
Sujet 11
je ne l'ai pas lu (j'ai écouté Christelle)mais c'est un outil puissant pourargumenter !
pertinents. réutilisables Attention à rester créatif Du temps pour sel'approprier.Capitalisables. Eviterd'oublier des étapes.Simple
Attention à restercréatif
Sujet 12
clair. Concis …concis !Impression aussi d'être trèslimité ("ces ressorts et riend'autre")
Permettent de comprendrerapidement comment utiliser lescartes
peu variés (concernantles scénarios)
Explique très clairementl'utilisation des cartes etleur signification
ne prend pas toutesles configurations encompte (binôme +groupe + tuteur,récurrence d'uneaction mais avecacteurs différents,…)
Sujet 13
Clair. Concis Intéressants. Utiles facile à utiliserScénario modifiableaisément. Permet devisualiser toutes lesétapes d'une formation
Il manque peut-êtreun picto pourreprésenter unmembre d'un groupequi s'exprime devantl'ensemble desapprenantsPictos individu /tuteur trop similaires
Sujet 14
Très clair+++ = "pour le concepteur il s'agit de…"
Pt d'amélioration : avoirl'équivalent "pour l'apprenant,il s'agit de…"
*les différents niveauxd'activités proposées (unscénario global décomposé enobjectifs, etc…)*la facilité deréutilisation/transposition à uncontexte
*influence peut-êtretrop les choix deconception?
*pertinence des activitéset des vignettes*l'aspect "manipulation"(même si destiné à êtreinformatisé, essentiel dele permettre…
*manque decréativité d'unscénario dû auformalisme.
Sujet 15
Clair, précis Intéressants, pédagogiques,collaboratifs.
Il y a une "contrainte"inconsciente sur lespropositions que l'onfait
Visuel, bonne visibilitédu déroulé global
Sujet 16Le visuel associé à chaque ressortpermet une compréhension rapide
L'inspiration que celareprésente
le manque d'idée quecela entraine de notrecôté
le fait que cela structurevraiment le scénario etnotre pensée ainsi quela présentation
certains éléments ontdu mal à trouver leurplace
XXXIV
Annexe XI
Expérimentation 1 : description des scénarios LRPG exemples
Scénarios : Opt’Immo Conseil
Dispositif de formation pour l’amélioration du conseil et de la vente de crédits immobiliers.
Spécifications générales
Description du contexteLe service formation du groupe Banque de l’Avenir, souhaite mettre en place une formation dansl’optique d’améliorer le conseil et la vente de crédits immobiliers. Dans cet objectif, un guided’entretien a été élaboré pour aider les conseillers financiers lors des entretiens client en créditimmobilier.
Commanditaire : service formation du groupe Banque de l’Avenir
Public cible : les conseillers clients de différentes agences d’une banque.
Effectif : 200 collaborateurs, répartis en 10 sessions de 20 participants
Thème : le conseil client en crédit immobilier
Autres spécifications :
- Des activités collectives
- Une formation motivante basée sur l’utilisation de ressorts de jeu et motivation, etnotamment sur l’utilisation du jeu de rôle
Modalités de mise en œuvreFormation à distance, pas de contrainte technique ou organisationnelle particulière (utilisationd’outils de communication audio, vidéo, etc., activités synchrones et/ou asynchrone)
XXXV
Module 2 : Bien conduire un entretien client
Description globale
Type de scénario : jeu de communication
Objectif pédagogiqueS’approprier le guide d’entretien en conseil client, obtenir les réponses aux questions pour biencerner les attentes du client tout en créant un rapport naturel avec lui.
Description pédagogique globaleDans ce dispositif de formation, les participants devront simuler des entretiens clients en jouanttour à tour le rôle du conseiller, du client ou d’un observateur et en utilisant le guide d’entretienmis à leur disposition.
Scénario narratif global« Le groupe Finances & Vous lance le projet Opt’Immo Conseil afin d’améliorer le conseil et lavente de crédits immobiliers. Dans cette optique, les responsables du projet ont créé un guided’entretien. Ce guide a été spécialement conçu pour faciliter le travail des conseillers financiers lorsdes entretiens tout en répondant au plus juste aux attentes des clients. Pour accompagner lesconseillers dans l’utilisation du guide, des observateurs sont missionnés : ils assisteront à desentretiens clients et feront part de leurs critiques. »
Ressorts de jeu
Quoi ? Pour quoi ? Comment ?
Ressort Caractéristiques dans le scénario Lien avec les spécifications de la formation Description
Jouer un rôle
Un scénario narratif proche ducontexte professionnel réel etréaliste
Immerger le participant dans un scénario quipermette une transposition directe desconnaissances et compétences.Que le participant puisse se référer à sonexpérience du terrain.
Simulation d’entretiens de conseil client encrédit immobilier mettant en scène unconseiller, un client et un observateurLe rôle joué change au cours du
module, il est soit similaire au rôleprofessionnel réel (conseiller) oudifférent (client ou observateur)
La transposition de rôle (jouer le rôle duclient) permet un changement de point de vueet une meilleure prise de conscience desbesoins du client
Agir collectivement Coopération au sein de chaquegroupe et entre les groupes lors dubilan
Favoriser entraide, coopération et motivationConstitution de groupes, définition de rôlescomplémentaires au sein d’un groupe (client,conseiller et observateur).
Etre reconnu Partage des productionsRétroactions sur les activités par lespairs
Motiver et engager dans le dispositif deformation.Faire partager l’expérience des collaborateurs.Susciter les interactions et les échanges pourprogresser ensemble.
Les échanges entre participants sontsystématiquement favorisés par desdébriefings de groupes ou avec l’ensembledes participants en fin de module.Certaines simulations d’entretien peuventêtre enregistrées et partagées lors desdébriefings pour alimenter les échanges,servir d’exemples.
On pourrait y ajouter :
- de la compétition entre équipes : organisant une simulation finale où un membre de chaque équipe jouerait le conseiller face au tuteur quijouerait le client. L’équipe gagnante serait celle qui aurait le mieux mené l’entretien en utilisant le guide (critères d’évaluation définis au préalable etfournis aux participants pour qu’ils puissent s’entraîner)
- du hasard : tirage au sort des simulations jouées, des participants qui joueront la simulation finaleOu introduction d’évènements aléatoires inattendus au cours des simulations.
XXXVI
Description détaillée des espaces d’activité
Espace d’activité Description pédagogiqueIl s’agit pour les participants de…
Scénario narratif
S’informer sur lemodule
Prendre connaissance du sujet du module et de ses objectifsEtre plongé dans le scénario narratif, fil conducteur du modulede formation
Introduction du scénario, fil conducteur : « Le groupe Finances &Vous lance le projet Opt’Immo Conseil afin d’améliorer le conseil etla vente de crédits immobiliers. Dans cette optique, lesresponsables du projet ont créé un guide d’entretien. Ce guide a étéspécialement conçu pour faciliter le travail des conseillers financierslors des entretiens tout en répondant au plus juste aux attentes desclients. Pour accompagner les conseillers dans l’utilisation du guide,des observateurs sont missionnés : ils assisteront à des entretiensclients et feront part de leurs critiques. »
Constituer desgroupes
Etre répartis en groupes de 3 ou 4 personnes.
Simulations : entretiens clients – conseils en crédits immobiliers
Recevoir un rôle Recevoir un rôle (conseiller, client ou observateur) et sel’approprier : un document support est associé à chaque rôle(guide d’entretien pour le conseiller, fiche personnage avecdéfinition du profil, des besoins et attentes du client, grilled’observation pour l’observateur).
Définir des fiches profils des différents personnages du scénario etla mise en situation qui sera jouée
Simuler unentretien client
Simuler une scène de conseil en crédit immobilier en jouant lerôle attribué et en utilisant les documents disponibles.
« C’est l’heure du rendez-vous ! Le conseiller financier et son cliententrent en contact.»
Echanger sur lascène jouée
Echanger sur la scène qui vient d’être jouée. Conseiller etclient font part de leur ressenti. L’observateur fait état de sesobservations et rédige un compte-rendu rapide.
« L’observateur a rédigé un rapport succinct de l’entretien auquel ila assisté. Le client a rempli un «questionnaire de satisfaction » àl’issue de son entretien avec le conseiller clientèle. Un débriefing estorganisé. »
Faire le bilan Echanger sur l’expérience d’apprentissage avec l’ensemble desparticipants pour créer du lien entre le jeu de rôle, les objectifsde formation et les pratiques de terrain.
XXXVIII
Module 3 : Répondre aux objections clients
Description globale
Type de scénario : jeu de mission
Objectif pédagogique- Connaître les principales objections clients et définir collectivement des réponses adaptées.- Partager son expérience avec ses collaborateurs.- Favoriser les échanges entre les collaborateurs.
Description pédagogique globaleAu cours des différentes activités proposées les participants devront de manière collective :
- définir des objections clés émises par les clients lors de la vente de crédits immobiliers ;- formuler des réponses aux objections identifiées.
Les activités proposées constituent un processus de brainstorming qui vise à faciliter l’atteinte d’unconsensus, à construire en groupes des solutions à un problème.
Scénario narratif global« Dans le cadre du projet Opt’Immo, le groupe Finances & Vous met en place tout un dispositif poursoutenir le conseil client en crédit immobilier. L’un des points clés de ce projet repose sur une bonneconnaissance des objections clients clés et des réponses pertinentes qui peuvent être données. »
Ressorts de jeu
Quoi ? Pour quoi ? Comment ?
Ressort Caractéristiques dans lescénario
Lien avec les spécifications de laformation Description
Etre en compétitionCompétition entre équipes Créer motivation, engagement et esprit
d’équipe
Dans la 2e partie « Répondre aux objectionsclients », l’objectif est d’être l’équipe qui proposeles meilleures réponses aux objections.
Jouer un rôleUn scénario narratif proche ducontexte professionnel réel etréaliste
Le rôle joué est similaire aurôle professionnel réel
Ces choix sont liés aux objectifs dumodule : on souhaite que les participantsutilisent et partagent leurs expériencesdu terrain.
Les participants incarnent des conseillers clientsd’un groupe bancaire. Ils participent à un projet quivise à alimenter un outil d’assistance au conseil encrédit immobilier : cet outil propose notamment unrépertoire d’objections clients et les réponsespossibles associées.
Agir collectivementDes activités collaboratives ausein des groupes
Favoriser les échanges et le partaged’expérience. Construire collectivementdes réponses.
1ère partie du module : mise en commun desobjections listées au sein du groupe et discussionpour en retenir 5 ; obtention d’un consensus pourélire les 5 objections jugées essentielles par legroupe parmi la liste de 10 issue des travaux destous les participants
2e partie du module : définition collective descritères d’évaluation ; proposition collective d’uneréponse par objection client.
Etre reconnu Partage des productions
Rétroactions sur les activitéspar les pairs
Motiver et engager dans le dispositif deformation.
Faire partager l’expérience descollaborateurs.
Susciter les interactions et les échangespour construire ensemble et alimenterles réflexions
1ère partie : les résultats des recherchesindividuelles d’objections sont partagés avec lesautres membres du groupe ; les résultats de ladiscussion des groupes sont partagés avec tous lesparticipants.
2e partie : les propositions de réponses de chaquegroupe sont évaluées par les autres et les résultatsdes évaluations sont partagés avec l’ensemble desparticipants.
Description détaillée des espaces d’activité
Espace d’activité Description pédagogiqueIl s’agit pour les participants de…
Scénario narratif
1- Recueillir les objections clients clés
S’informer sur lemodule
Prendre connaissance du déroulement du module et desobjectifs de formation poursuivis.Etre plongé dans le scénario qui sert de fil conducteur audispositif de formation
Introduction du scénario fil conducteur : « Pour garantir uneadéquation la plus proche possible entre les objections formuléespar les clients et les réponses à apporter qui fonctionnent, il asemblé judicieux que ce soit les collaborateurs eux-mêmes quidéfinissent les réponses, en s’appuyant sur leur expérience duterrain et sur les situations auxquelles ils ont déjà été confrontés.Une base de données d’objections clients et de réponses associéessera ainsi constituée, véritable source de partage et decapitalisation d’expériences entre les collaborateurs du groupe .L’outil doit être déployé dans quelques semaines. Vous faites partiedes premiers contributeurs à qui l’on confie la mission d’alimenter labase de données « OCImmo - Objections Clients Immobilier» afinqu’elle soit utilisable dès son lancement ! »
Rechercher desobjections
Fournir un maximum d’objections clients : rédiger uneliste d’objections clients qui paraissentessentielles/problématiques
« On fait appel à votre expérience de conseiller financier pourrecueillir des objections clients : essentielles, fréquentes, délicates,bloquantes… »
Constituer desgroupes
Etre répartis en groupes équilibrés en nombre demembres (max. 5 pers/gp)
Sélectionner 5objections
Au sein de chaque groupe : mettre en commun lesobjections listées par chaque membre du groupe etretenir 5 objections-clés
Produire une liste de10 objections
Etablir une liste d’objections : chaque groupe donne uneobjection de sa liste jusqu’à constituer une liste communede 10 objections
Elire les 5 objectionsclés
Chaque groupe vote pour les 5 objections qui luisemblent essentielles parmi les 10 proposées
Faire le bilan /Echanger
Participer au débriefing de la session en répondant auxquestions du tuteur : s’exprimer sur l’expérience qu’onvient de vivre, sur les activités qui ont été effectuées, surles objections qui ont été retenues, etc.
2- Proposer des réponses aux objections clients identifiées
S’informer sur lemodule
Prendre connaissance du sujet et l’organisation dumodule
« Vous allez participer à la seconde phase du processusd’alimentation de la BDD OCImmo. Il s’agit maintenant de fournir desréponses adaptées aux objections clients identifiées. »
Constituer desgroupes
Etre répartis en 5 groupes équilibrés
Répondre aux objections clients identifiées
Définir des critèrespour évaluer lesréponses à uneobjection
Une objection spécifique est attribuée à chaque groupe.Le groupe définit des critères afin de pouvoirultérieurement évaluer la pertinence des propositions deréponses qui seront formulées à cette objection.
Proposer une solutionpour chacune des 4autres objections
Pour chacune des 4 autres objections, le groupe proposeune réponse : « Que répondriez-vous à une telle objection? »
Evaluer les réponsesproposées àl’objection X
Chaque groupe évalue les réponses proposées pourl’objection dont il a la charge, en fonction des critèresd’évaluation qu’il a définis
Présenter lesréponses et leurévaluation
Résultat de l’évaluation des propositions : pour chaqueobjection, le classement des réponses proposées estprésent.Les groupes qui ont proposé les meilleures réponses sontfélicités.
Echanger, faire lebilan
Débattre autour des solutions proposées : réactions,retour d’expérience, etc.Tuteur : proposer des réponses complémentaires oualternatives, rectifier d’éventuelles réponses nonconformes…
XLII
Annexe XII
Expérimentation 1 : commande n° 1
Votre mission
En tant que concepteur pédagogique de la société Learning Concept, spécialisée en ingénierie deformation multimédia, vous devez proposer un scénario de dispositif de formation pour répondre àla commande présentée ci-après.
Il s’agit pour vous de concevoir une première proposition pour traiter uniquement l’objectif 1 de lademande (récapitulé dans l’encadré gris en bas de page).
A ce stade du processus de réponse au client, une esquisse du scénario est suffisante. Elle vise àprésenter les grands principes du dispositif (sa structure et les activités qui le composeront).
A l’issue de la conception, vous aurez à présenter votre proposition au client, en mettant plusparticulièrement l’accent sur les ressorts de jeu et de collaboration mis en œuvre en vue de susciterla motivation et l’engagement des participants dans la formation.
Commande
Commanditaire : service formation du groupe Banque de l’Avenir
Description du contexte et de la demande globaleLa banque de l’Avenir souhaite aujourd’hui améliorer le conseil et la vente de crédits immobiliers.Dans cet objectif, elle a notamment élaboré un guide d’entretien visant à aider les conseillersfinanciers lors des entretiens client.
Elle souhaite mettre en place une formation pour :
Objectif 1 - sensibiliser les conseillers aux différentes attentes des clients ;
Objectif 2 - valoriser l’utilisation du guide d’entretien et former les conseillers à son usage ;
Objectif 3 - identifier des objections client clés et formuler des réponses adaptées.
Public cible : les conseillers clients de différentes agences d’une banque.
Effectif à former: 200 collaborateurs, répartis en 10 sessions de 20 participants
Autres spécifications : nouveauté et motivation !Le service formation, régulièrement confronté à un manque d’intérêt des apprenants, souhaitemettre en place un dispositif différent des modules e-learning habituellement proposés. Ilsouhaite déployer une formation motivante basée sur des activités collectives et sur l’utilisationde principes (ou ressorts) de jeu.
Modalités de mise en œuvre : formation à distance à privilégier, pas de contrainte technique ouorganisationnelle particulière (utilisation d’outils de communication audio, vidéo, synchroneset/ou asynchrone : il est par exemple possible d’envisager des travaux en groupes à distance dansdes salons virtuels, etc.)
Objectif 1 - sensibiliser les conseillers aux différentes attentes des clients
Résultat attendu :A la fin de cette formation, les apprenants seront sensibilisés aux différentes attentes desclients en matière de conseil en crédit immobilier et ils seront en mesure de formuler descritères de satisfaction client.
XLIII
Annexe XIII
Expérimentation 1 : commande 2
Une nouvelle mission !
Le service formation du groupe Banque de l’Avenir a été convaincu : votre proposition a étéretenue !
Enthousiasmé par le projet, la Banque de l’Avenir souhaite profiter du dispositif de formation pouraborder un autre objectif.
A vous de proposer un nouveau scénario de formation pour répondre à cet objectif complémentaireprésenté ci-après.
A ce stade du processus de réponse au client, une esquisse du scénario est suffisante.
Lors de la présentation de votre proposition au client, veillez à mettre plus particulièrement l’accentsur les ressorts de jeu et de collaboration mis en œuvre en vue de susciter la motivation etl’engagement des participants dans la formation.
Objectif complémentaire
La Banque de l’Avenir souhaite améliorer la communication entre les conseillers financiersdes différentes agences au sein de chaque réseau régional. Pour garantir l’adhésion descollaborateurs, des règles communes de communication seront élaborées collectivementau cours de la formation.
Résultat attendu :A la fin de cette formation :- les apprenants auront élaboré des règles communes d’utilisation des différents outils decommunication (mail, téléphone, intranet, etc.) selon le sujet et le contexte ;- ils seront capables d’intégrer ces règles dans leur pratique.
XLIV
A NOTERLors de la présentation de l’esquisse du scénario au client commanditaire, les trois dernierséléments (présentation des ressorts, description globale et description des espacesd’activité) sont présentés oralement en s’appuyant sur le plan du scénario.
Annexe XIV
Guide de conception ScenLRPG
Ce document contient :- La liste des livrables attendus au niveau esquisse- Des informations sur le formalisme de description ScenLRPG
Livrables attendus au niveau esquisse
La conception de l’esquisse d’un dispositif LRPG aboutit à l’élaboration des élémentssuivants (cf. exemples de scénarios fournis pour plus de détails) :
- Le plan du scénario
- Une présentation des ressorts de jeu mis en œuvre : quel ressort ? pour quoi ?comment ?
- Une description globale du scénario (grands principes de fonctionnements), d’unpoint de vue pédagogique et éventuellement narratif (si le scénario pédagogique estintégré à un scénario narratif global)
- Une présentation synthétique des espaces d’activité constituant le dispositif (cequ’on demande aux apprenants) et éventuellement leur place dans un scénarionarratif
Formalisme de description ScenLRPG
Espace de constitution de groupes : indique que les participants sont répartis engroupes. Les modalités de constitution des groupes sont à préciser (nombre departicipants par groupe et/ou nombre de groupes, etc.)
Démultiplication d’une salle ou d’un espace d’activité : signifie que la même activitéou succession d’activités est effectuée par plusieurs groupes en parallèle.
Passage multiple : indique qu’une salle ou un espace d’activité est effectué plusieursfois successivement. Préciser les éventuels changements à chaque passage (ex. rôlejoué différent).
XLV
Les espaces d’activité
Caractéristique Description
Titre Formulé à l’aide d’un verbe à l’infinitif qui exprime l’activité qui sera effectuéepar l’apprenant
Fonction Type d’activité :
Capitaliser Archivage et partage de documents
Débattre (et converger) Echanges sur un sujet pouréventuellement aboutir à une décisioncommune (convergence)
Débriefer Discussion-bilan des activités effectuées
Exposer (partager) Présentation de ses travaux aux autresparticipants, commentaires et échanges
Jouer une scène Jeu de rôle, simulation de situations decommunication
Produire Création de documents, productiond’information, etc.
Recevoir un rôle Attribution ou choix d’un rôle etappropriation
S’informer Consultation d’informations
S’organiser Planning, outils de prise de rendez-vous
Sélectionner (voter) Vote ou sélection pour donner son avis
Modalitéd’action
Activité effectuée :
de manière individuelle Pas d’interaction avec les pairs
au sein d’un groupe Interactions avec des participantsidentifiés
avec l’ensemble desparticipants
Interactions avec tous les autresparticipants
Tutorat Présence d’un tuteur
XLVI
Annexe XV
Guide sur les ressorts de jeu
Les ressorts de jeu
RESSORT POUR LE CONCEPTEURIL S’AGIT DE…
RESSORTS DE JEU
Etre encompétition Soi vs. les autres
Mettre les participants en compétition endéfinissant un but précis à atteindre et lesmodalités de la victoire
Relever un défiindividuel Soi vs. Soi ou le
système
Proposer un challenge individuel auxparticipants en définissant un objectifpersonnel à atteindre avec un niveau dedifficulté adapté
Jouer un rôle,être immergédans unehistoire
Ou plus largementnarration/fantasy(imagination)
Soi vers autre soi, soidans autre univers
Proposer aux participants des rôles à jouer
Définir un scénario narratif immersif danslequel inscrire le scénario pédagogique
Choisir un environnement d’exécutionadapté au niveau d’immersivité souhaité
Etre soumis auhasard
Fortune, infortune,déstabilisation
Action du monde sur soi
Laisser une place au hasard, à l’imprévu,créer du suspense dans le scénario
Perdre lecontrôle(situation decrise, vertige)
Etre soumis à unesituation de crise, àune situationgénératrice de vertigeet de tensions
Action du monde sur soi
Mettre les participants dans des situationsde crise, leur faire perdre leurs repèreshabituels, les déstabiliser
AUTRES RESSORTS ASSOCIES
Agircollectivement Soi avec autrui Proposer des activités de groupes, faire
interagir les participants, créer du lien
Etre reconnu
Autrui vers soi
Valoriser et faire partager les activités dechacun, montrer aux participants que leursactions ont un effet et sont prises encompte, permettre une personnalisation dupersonnage et/ou de l'environnement.
XLVII
Annexe XVI
Expérimentation 2 : guide d’animation
Expérimentation ScenLRPG 2 - DéroulementIntroduction & Phase 01 : formalisme et compréhension descénarios de la bibliothèque
Activité Modalité Action de l’animateur Docsanimateur/Matériel Action du sujet Docs sujets / Matériel Durée Timing
1 Introduction Binôme Accueille le sujet et introduitl’expérimentation (présentationdu déroulement)
2’
2 Questionnaire Individuel Distribue le questionnaire Remplit le questionnaire • Questionnaired’introduction
10’
3 Présentation duformalisme et del’outil ScenLRPG
Binôme Présente le formalisme et lesdifférentes fonctionnalités del’outil en construisant unexemple de scénario
• Outil ScenLRPG etguide de présentation
15’
4 Consigne Binôme Explique l’activité demandée auxsujets : interprétation d’unscénario
2’
5 Interprétation duscénario
Individuel Prépare la présentation orale du scénariopour le client = décrit le déroulement duscénario tel qu’il le comprend et l’envisageà partir des infos qui lui sont fournies
• Scénario incompletprésenté dans l’outilScenLRPG (1ordinateur par sujet)
15’
6a Mise en commun Individuel Initie et guide les échanges enposant des questionsPrend des notes et enregistre
Un sujet présente le scénario au client(joué par l’autre sujet).
5’
6b Echanges Binôme Echangent sur les différencesd’interprétation.
5’
XLVIII
Phase 02 : formalisme et description de scénarios – un langage commun pour une aide à la mutualisation
Activité Modalité Action de l’animateur Docs animateur Action du sujet Docs sujets / Matériel Durée Timing
7 Consigne Binôme Explique l’activité demandée aux sujets :formalisation d’un scénario à l’aide del’outil
2’
8 Formalisation d’unscénario
Individuel Formalisent le scénario fourni àl’aide de l’outil ScenLRPG
• Fiche descriptive duscénario• Outil ScenLRPG
20’
9 Mise en commun etéchanges
Binôme Initie et guide les échanges • Guide débrief Comparent leurs formalisationset échangent sur lesdifférences
• 5’
10 Débriefingquestionnaires
Binôme Anime le débriefing en exposant lesréponses du questionnaire initial surlesquelles il souhaite des commentaires /approfondissements
• Réponses auquestionnaired’intro
Réagissent aux questions del’animateur, complètent lesréponses données auquestionnaire d’intro
10’
11 Clôture Tous Remercie le sujet et clôt la session
20’
XLIX
L
Introduction1- Introduction
« Merci d’avoir à nouveau accepté de participer à cette expérimentation. Il s’agit d’unprolongement de l’expérimentation précédente. Aujourd’hui, vous allez découvrir et tester leprototype d’environnement d’assistance à la conception qui est en cours de développement.
Pour information, pour garder une trace de vos échanges, certaines phases del’expérimentation seront enregistrées.
Cette expérimentation est organisée en 2 phases. Elle durera environ 1h30.»
2- Questionnaire
« Pour commencer je vais vous demander de remplir un questionnaire. Vous avez 10 minutespour le compléter. »
3- Présentation du formalisme et de l’outil ScenLRPG
Présentation du formalisme et l’outil ScenLRPG à partir du scénario du jeu del’enveloppe
Phase 01 : formalisme et compréhension de scénarios de la bibliothèque4- Consigne
Vous allez tout d’abord travailler individuellement. Dans l’outil ScenLRPG, dans la barre enhaut à gauche, cliquez sur « fichier », puis « ouvrir » puis « Mener l’enquête + initiales dusujet ».
Un scénario s’est ouvert dans la zone de conception.
Le concepteur qui l’a créé n’a pas eu le temps de compléter intégralement les zones decommentaires avec les explications détaillées sur les activités. Vous devez vous charger deprésenter ce scénario à un client…
D’après les informations que vous avez sur le scénario : que comprenez-vous ? Descommentaires sont indiqués sur certains espaces d’activités et sur la salle.
Vous avez 15min pour préparer la présentation au client et lui expliquer, de manière plusdétaillée comment se déroulera le scénario.
Sur ce scénario les modalités de mise en œuvre (distance ou présentiel) n’ont pas étéprécisées. Vous n’avez donc pas à les indiquer.
5- Interprétation du scénario
Vous avez 15min pour vous approprier le scénario de manière à la présenter au client.
6- Mise en commun et échanges6a –Mise en commun
L’un de vous va maintenant présenter le scénario tel qu’il l’a compris, à son collègue, qui jouele rôle du client. Pendant la présentation, celui qui écoute doit être attentif aux différences
LI
entre ce qui lui est présenté et ce que lui-même avait interprété. Vous aurez un moment parla suite pour en discuter.
6b –EchangesQuelle est votre première réaction à cette présentation du scénario ? En comparaison duvôtre ?Quels éléments ou espaces d’activités vous ont posé plus spécifiquement problème ?
Phase 2 : formalisme et description de scénarios – un langage commun pourune aide à la mutualisation
7- Consigne
«Cette fois, c’est à vous d’utiliser l’outil ScenLPRG pour formaliser le scénario décrit sur cedocument : formaliser la structure, l’enchaînement des espaces d’activités tel que vous lecomprenez. Même s’ils n’ont pas été indiqués dans la description fournie, n’oubliez pas depréciser les ressorts de jeu mis en œuvre dans ce scénario.
Ouvrez le scénario intitulé phase02-INITIALES.
N’oubliez pas de sauvegarder régulièrement.»
8- Formalisation d’un scénario
Vous avez 20min pour formaliser le scénario
Rappeler aux concepteurs de sauvegarder régulièrement le scénario (CRTL+S)
9- Mise en commun et échangesL’un de vous commence par présenter son scénario formalisé à son collègue. Celui qui écouterepère les différences avec son propre scénario. A la fin de la présentation, l’autre concepteurmet en évidence les éléments qui se différencient et en discutez : pourquoi avez-vous fait cechoix ?Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?
10- Débriefing questionnairesDans le questionnaire que vous avez rempli en début de séance, on vous demandait quelscritères vous utilisez ou utiliseriez pour rechercher des scénarios dans une bibliothèque afinde les utiliser ou de vous donner des idées pour concevoir une réponse à une demande deformation.Voici les critères qui ont été donnés : (les lister au tableau ?)Qu’en pensez-vous ? En auriez-vous d’autres à ajouter ?
Si besoin, l’animateur demande des précisions à propos de certains critères.
11- Clôture de l’expérimentation
Remerciements :
« Encore merci pour votre participation. »
LII
Annexe XVII
Expérimentation 2 : questionnaire initial
Quelques questions avant de commencer…
Conception de scénarios pédagogiques, capitalisation et mutualisation
Dans votre activité de conception pédagogique, vous réutilisez vos travaux antérieurs :
Jamais / Parfois / Souvent / Toujours
Précisez (comment ? dans quel but ?) et donnez un exemple :
Dans votre activité de conception pédagogique, vous réutilisez les travaux d’autresconcepteurs :
Jamais / Parfois / Souvent / Toujours
Précisez (comment ? dans quel but ?) et donnez un exemple :
Pour faciliter la mutualisation des travaux et leur réutilisation, utilisez-vous :- des méthodologies spécifiques ? Oui / NonSi oui lesquelles ?
- des outils ? Oui / NonSi oui lesquels ?
LIII
Qu’est-ce qui selon vous pourrait favoriser la mutualisation et le partage des scénariospédagogiques au sein de votre entreprise (outils, méthodes…) ?
Bibliothèque de scénarios : quels critères de recherche ?
Pour vous accompagner dans la conception d’un dispositif de formation utilisant le jeu, si vous aviezà votre disposition une bibliothèque de scénarios, sur quels critères feriez-vous des recherches envue de trouver un scénario que vous pourriez réutiliser et adapter à vos besoins ?
Merci !
LIV
Annexe XVIII
Expérimentation 2 : réponses au questionnaire initial
(Dans les réponses concernant les critères de recherche, les informations soulignéescorrespondent à des compléments apportés par l’animateur suite au débriefing avec les sujets.)
Conception de scénarios pédagogiques, capitalisation et mutualisation (1/2)Dans votre activité de conception pédagogique, vous réutilisez vos travaux
antérieursDans votre activité de conception pédagogique, vous réutilisez les travaux d’autres
concepteurs
Jamais Parfois Souvent Toujours Précisions / Exemple Jamais Parfois Souvent Toujours Précisions / Exemple
Sujet 1 X
reprise d'activités (template), reprised'illustrations, idées pour la conception,scénarios pédagogiques. Exemple : donnerune mission à l'apprenant (Euromaster),exemple pris sur le challenge proposé pourPromod
X
Réutilisation d'une nouvelle activitépédagogique, d'un scénarioBut : industrialisation (au niveau de lamédiatisation) Ex: activités sur les expressionsdu visage (nouveau module sécurité) reprised’un learning game existant
Sujet 2 X
Réutilisation d'un storyboard : pour gagner dutemps en rédaction, pour penser à tous leséléments à préciser (pour la mise neproduction)Réutilisation de modèles d'activités : pourretrouver facilement des idées d'activités ayantdéjà fait leurs preuvesPour garder un aspect homogène entre lesdifférents projets d'un client;
X
Rarement, de façon générale.Parfois, par exemple si des conceptions ontdéjà été faites pour le même client
Sujet 3 X
Adaptation d'activités conçues dans uncontexte différent ; si l'activité précédemmentconçue remplit l'objectif visé X
Adaptation d'activités ou de scénariospédagogiques conçus dans un contextedifférent mais transposables au contexte quiest le mien
Sujet 4 X
en capitalisant sur des activités déjà utilisées,et en adaptant parfois certains scenarii déjàcréées comme base de départ pour en créerun nouveau
X
il m'arrive d'aller voir ce qui a déjà été fait danscertains modules sur des thématiques prochespour réutiliser des idées. Ex : reprise duconcept "journal" d’un module existant
Sujet 5 X X
Selon le contenu abordé, il est parfoisintéressant de réutiliser des ficelles qui ontfonctionné. Exemples : scenarii de mise ensituation, énoncées de consigne, feedbackstypes…
Sujet 6 X
Pour gagner du tempsPour utiliser des idées qui ont déjà bienfonctionné (moins de risques)Reprise des architectures / storyboardsconcernés
X
Idem question précédentePour varier et utiliser / acquérir de nouvellesidéesreprise des architectures : storyboardsconcernés et échanges avec d'autresconcepteurs.
Sujet 7 XRéutilisation de modèles d'activités afin de nepas engendrer de développement X
Réutilisation de modèles d'activité auxquels jen'avais pas pensé seule
Sujet 8 X
Même client -> homogénéisation /capitalisationMême cas de figure : client n'ayant jamais faitde e-learningMêmes objectifs pédagogiques
X
Dans les mêmes cas : si on travaille pour lemême client ou si des scénarios peuvents'adapter aux objectifs du client (ex:réutilisation de la structure d’un moduleproposant une approche par cas pratiques)
Conception de scénarios pédagogiques, capitalisation et mutualisation (2/2)
Pour faciliter la mutualisation des travaux et leur réutilisation, utilisez-vousQu’est-ce qui selon vous pourrait favoriser la
mutualisation et le partage des scénariospédagogiques au sein de votre entreprise
(outils, méthodes…) ?des méthodologies spécifiques ? des outils ?
Oui Non Lesquelles ? Oui Non Lesquels ?
Sujet 1 Oui Oui Bibliothèque d'activités Blogs avec exemples de scénarios, bibliothèque
Sujet 2 Oui
Utilisations d'un modèle destoryboardMéthodologie IPM (analyseréférentiel, etc.)
Non
Un site ou espace dédié (intranet) centralisant lesoutils, modèles, processus types…Plus de démonstrations des projets terminés, REX
Sujet 3 Non
Pas vraiment de méthodo ou d'outilsspécifiques, mais il m'arrive bien sûrde consulter des modules conçus pard'autres pour y chercher des idées
Non dans ce cas je consulte les cahiersde conception des modulesconcernés
Peut-être un espace dédié sur l'intranet où nouspourrions déposer et consulter différents types descénarios pédagogiques répondant à différentscontextes et différents objectifs pédagogiques, etavec des degrés de scénarisation différents
Sujet 4 Oui
Méthodo perso : quand je visualised'autres modules et repère uneactivité qui m'intéressegraphiquement ou pédagogiquement,je copie-colle dans un doc perso quiconstitue une petite bibliothèqueperso.
Non
Il serait intéressant de posséder un document ouun outil répertoriant les différents scenarii déjàutilisés avec une typologie fine (type de e-learning,degré de scénarisation, orientation (sérieuse,comique), etc.)
Sujet 5 Oui
Les éléments se situent toujours à unmême endroit dans la structure d'unprojet. Il est aisé de les retrouver.Méthodologie Symetrix de rédactionde story-boards
Non
Dialogue, échanges entre les chefs de projets.Temps accordé pour la veille et la consultation deséléments conçus /réalisés.
Sujet 6 Non NonréférencementREXCommunication en interne sur ce sujet
Sujet 7 Non Oui
Catalogue de templates (PPT avectous nos modèles d'activité)
Un outil de recensement plus fonctionnel et plusfacile pour la mise à jour que le PPT. Quelquechose qui ressemblerait plus à un studio (cf. studioCourseliner ou autre plateforme)
Sujet 8 Non
Copier-Coller :-)
Non
Création de slides "Symetrix" reprenant tous lesscénarios -> possibilité de copier-coller des diaposBase de données d'informations liées auxscénarios pourrait être utile, avec description duscénario, exemple de situation pour lesquelles cescénario pourrait être utile.
Bibliothèque de scénarios : quels critères de recherche ?Pour vous accompagner dans la conception d’un dispositif de formation utilisant le jeu, si vous aviez à votre disposition unebibliothèque de scénarios, sur quels critères feriez-vous des recherches en vue de trouver un scénario que vous pourriez
réutiliser et adapter à vos besoins ?
Autres réponses issues des échanges verbaux(débriefing final)
Sujet 1*Sujet (de la formation)* type de traitement pédagogique* public cible
Sujet 2* La thématique du scénario narratif (espace, aventure, jeu de rôle…)* le ressort de jeu (collecte d'objets ou infos, exploration, challenge, nombre de points à atteindre ou récompense…)
* présentiel ou distance* nombre de participants* durée* moyens de communication / contraintes
Sujet 3
*degré de scénarisationtype de dispositif (e-learning plus ou moins tourné vers le learning game)*objectifs de formation : transmission de connaissances théoriques, procédurales, comportementales*type de public visé
Sujet 4
* type de e-learning (finance…)*degré de scénarisation*ton (sérieux, comique)*e-learning / learning game / serious game*Objectif du e-learning
*ressorts de jeu*durée*modalités : distance / présentiel ; individuel : collectif
Sujet 5*catégorie de compétence (savoir / savoir-faire)* dispositif sonorisé*combien de personnages / interlocuteurs / protagonistes ?* Durée du dispositif et organisation (alternance présentiel / distance par exemple).
Sujet 6
*environnement de formation (contexte dans lequel se déroule la formation: seul dans son bureau…)*nombre de personnages*complexité (pour la durée du module principalement) = suite à la discussion il s'avère que ce critère est difficilementobjectivable et qu'il englobe sans doute l'ensemble des autres critères listés* part de ludique / de sérieux*niveau de scénarisation (= proximité avec le contexte professionnel)
*organisation : distance /présentiel* disponibilité du public*public cible (âge, domaine d'activité…)*contraintes techniques
Sujet 7
*objectif pédagogique*titre du modèle d'activité (ex : activité de vote = type d'activité)*sujet (pour voir ce que d'autres ont pu utiliser pour le même sujet) => à rapprocher du domaine d'activité mais avecbranches plus détaillées (ex pour la banque : l'activité assurances)
Sujet 8*objectifs pédagogiques -> recherche par verbes / expression*type de "gameplay" (ex: jeu de l'oie, jeu de mission)*type d'activité du client (pharma, services, vente…)
*ressorts de jeu
LVIII
Annexe XIX
Expérimentation 2 : scénario à s’approprier
EXPERIMENTATION PHASE 1 : UN SCENARIO A S’APPROPRIER
Spécifications de la demande client
Commanditaire : service formation d’un constructeur automobile
Description du contexte et de la demandeUn constructeur automobile souhaite optimiser la gestion de sa chaîne logistique(essentiellement les flux d’approvisionnement de pièces). Pour cela il souhaite mettre enplace une formation sur une démarche de diagnostic d’incidents (par exemple identificationdu ou des incidents à l’origine d’un arrêt de la chaîne de production).
Public cible : les ingénieurs logistique.
Scénario proposé : Mener l’enquête pour déterminer les causes d’un incident sur une chaînelogistique.
Espaces d’activité et commentaires associés :
S’informer sur la formationConstitution d’équipes = Constitution d'équipes de 4 participantsS’informer sur la missionSalle : Investigation : recherche d'indices = Séquence réitérée jusqu'à ce que l'équipe ou une équipe concurrente décide de soumettre saproposition
o Analyser la situation et échanger sur les pistes intéressantes à explorer = Une piste correspond à une source d’information que l’onpeut explorer (document à consulter, personne à interroger, etc.)
o Voter pour une pisteo Prendre connaissance des indices apportés par la piste choisie
Présenter les résultats des investigations = L'équipe qui a trouvé la solution en utilisant le moins de pistes est déclarée gagnante.Découvrir la démarche optimale d'investigationEchanger : comparaison de la démarche optimale avec la démarche adoptéeFaire le bilan de la formation
LX
Annexe XX
Expérimentation 2 : description textuelle du scénario à formaliser à l’aide du langageScenLRPG
EXPERIMENTATION PHASE 2 : UN SCENARIO A FORMALISER
Contexte : La banque de l’Avenir souhaite aujourd’hui améliorer le conseil et la vente de crédits immobiliers.Dans cet objectif, elle a notamment élaboré un guide d’entretien visant à aider les conseillers financiers lorsdes entretiens client.
Elle souhaite mettre en place une formation pour :
Objectif 1 - sensibiliser les conseillers aux différentes attentes des clients ;
Objectif 2 - valoriser l’utilisation du guide d’entretien et former les conseillers à son usage ;
Objectif 3 - identifier des objections client clés et formuler des réponses adaptées.
Public cible : les conseillers clients de différentes agences d’une banque.
Scénario de formation proposé pour l’objectif 1
Type de scénario : jeu de mission
Objectif : Sensibiliser aux enjeux du conseil client en crédit immobilier à travers une meilleure connaissancedes attentes des clients et une prise de conscience de la nécessité de les satisfaire au mieux.
Scénario narratif global : « Dans l’optique de mieux satisfaire ses clients et d’être plus efficace dans le conseilet la vente de crédits immobiliers, le groupe Finances & Vous lance un grand projet : Opt’Immo Conseil. Lapremière étape de ce projet vise à mieux connaître les attentes des clients. Pour cela, Finances & Vous engageun cabinet d’études qui réunit des clients. Vous êtes l’un de ces clients et vous devez, avec les autres membresde votre groupe, élaborer une « Charte du client satisfait » décrivant ce que vous attendez du contact avec unconseiller financier pour une demande de crédit immobilier. Une seule charte sera retenue et servira deréférence au projet Opt’Immo Conseil. »
Description du scénario de formation
Une phase introductive présentera les objectifs, le contenu et le planning de la formation. Elle introduiraégalement le scénario narratif, fil conducteur du parcours.
Des groupes de 3 participants seront constitués. Chaque participant recevra le rôle d’un client (âge, catégoriesocio-professionnelle et profil différents).
Chaque groupe de clients devra ensuite élaborer une charte du client satisfait. La charte décrira ce que lesclients attendent du contact avec un conseiller financier pour une demande de crédit immobilier.
Les chartes de chaque groupe seront présentées à l’ensemble des participants et les choix seront justifiés. Al’issue d’un vote, parmi les chartes présentées, une seule sera retenue et servira de document de référence.
La formation se conclura par un débriefing mené par le tuteur : il permettra aux participants de s’exprimer surles activités qu’ils viennent d’effectuer et de recontextualiser les résultats des activités par rapport auxobjectifs de formation. Une synthèse des échanges du débriefing collectif sera effectuée par le tuteur qui ferale lien avec la suite de la formation (mise en évidence de l’intérêt de pouvoir satisfaire les attentes des clientset présentation du guide d’entretien élaboré par la Banque de L’Avenir pour aider les conseillers financiers).
LXI
Annexe XXI
Expérimentation 2 : formalisation de référence du scénario « jeu de mission »
LXII
LXIII
Annexe XXII
Description du jeu détective conseil
Détective conseil1 est un jeu d’enquête associant des principes de jeu de rôle et de jeu deplateau. Les joueurs incarnent des enquêteurs qui doivent résoudre une affaire. Selon la modalitéde jeu choisie (individuel, en groupe de manière coopérative ou compétitive), outre le simple faitde trouver la solution de l’énigme, le défi du jeu consiste à résoudre l’enquête plus vite queSherlock Holmes ou plus vite que les autres participants (c’est-à-dire en utilisant un minimum depistes). Les joueurs – enquêteurs disposent de plusieurs pistes à explorer qui leur apportentdifférents indices pour alimenter leur investigation.Le matériel du jeu se compose de plusieurs éléments (cf. photo ci-dessous) :
un livret « mémoires » présentant les affaires à résoudre ainsi que les solutions,notamment la manière dont Holmes a analysé la situation et résolu l’affaire de manièreoptimale ;
un plan pour la visualisation des lieux relatifs à chaque affaire (un lieu constitue une pistepotentielle à explorer) ;
un dossier à partir duquel les enquêteurs approfondissent chacune des pistes qu’ilschoisissent d’investiguer pour y trouver de nouveaux indices (par exemple : présentationdes témoins interrogés et informations recueillies lors des interviews) ;
des journaux d’archives qui peuvent apporter des indices ou des informations pour mieuxcomprendre les affaires ;
un annuaire avec les différents personnages impliqués dans les affaires et les lieux oùl’on peut les trouver ;
un livret d’énigmes qui contient les questions auxquelles il faut répondre pour résoudrechaque affaire (à consulter uniquement au moment de proposer la solution de l’enquête)et les réponses correspondantes.
Matériel du jeu Détective Conseil 2
1Auteurs : Raymond Edwards, Suzanne Goldberg, Gary Grady. Illustrateur : Sydney Paget. Editeur : Jeux Descartes, 1985.2 Photo extraite du site www.trictrac.net
LXIV
Une partie est structurée en quatre grandes étapes : Le choix de l’ordre de jeu : dans une configuration à plusieurs joueurs il s’agit de
déterminer l’ordre dans lequel les différents joueurs vont intervenir. Le choix d’une affaire et la découverte de la mission. Le premier joueur définit la piste qu’il souhaite suivre et la consulte pour recueillir les
indices éventuels qu’elle apporte. Dans le cadre d’une partie coopérative, le choix de lapiste peut faire l’objet d’une discussion, si les joueurs ont des difficultés à arriver à unconsensus, c’est le joueur dont c’est le tour qui a le dernier mot. Une piste est consultée àchaque tour de jeu et comptabilisée. Cette étape se répète avec les joueurs suivantsjusqu’à aboutir à une solution.
Lorsqu’ils pensent avoir une solution, les joueurs consultent les questions du livretd’énigmes, proposent leurs réponses et comptabilisent leurs points.
LXV
Annexe XXIII
Environnement informatique ScenLRPG : guide d’utilisation
LXVI
LXVII
Annexe XXIV
Environnement informatique ScenLRPG : Spécifications des écrans de recueil de besoinsliés au jeu
LXVIII
Annexe XXV
Environnement informatique ScenLRPG : description des fonctionnalités à travers un cas
d’usage.
Ce cas d’usage porte sur la conception du scénario LRPG « Bien conduire un entretien client »utilisé dans l’expérimentation 1 (cf. description détaillée Annexe XI). La figure ci-dessousprésente la formalisation de l’esquisse de ce scénario dans l’environnement ScenLRPG.
Etape 1 : définition du projet et recueil de besoinsPréalablement à la conception proprement dite du scénario LRPG, le concepteur définit, encollaboration avec le client, le contexte du projet de formation et les besoins. Pour celal’environnement d’assistance lui propose de compléter différents formulaires reprenant lesrubriques présentées Annexe IV.
Etape 2 : réutilisation de scénariosUne fois le recueil de besoins effectué et la définition du problème de conception clairementétablie, le concepteur commence par utiliser la bibliothèque de scénarios LRPG : il souhaiteintégrer dans son nouveau scénario LRPG un jeu de rôle de type communication correspondantà un scénario qu’il a déjà conçu précédemment et stocké dans la bibliothèque. Après avoir trouvéle scénario LRPG intitulé « jeu de communication », le concepteur le place par glisser-déposerdans l’espace central de conception.
Etape 3 : conception de l’esquisse du scénarioDans la zone centrale de conception, se trouve maintenant le scénario « jeu de communication »dont l’architecture est représentée à l’aide du langage de notation visuel ScenLRPG : ce scénarioest composé d’un point de constitution de groupes et d’une salle regroupant un vestiaire, unespace d’activité « jouer une scène » et un espace d’activité « débriefer ».
LXIX
Pour compléter sa proposition, le concepteur ajoute tout d’abord un espace d’activité au début duscénario : il ouvre la palette des composants et positionne ce nouvel espace d’activité à l’endroitvoulu par glisser-déposer. Il inscrit dans une zone de texte le titre de l’espace d’activité : «S’informer sur la formation ». Le concepteur spécifie ensuite la fonction de cet espace d’activité :en cliquant sur le point d’interrogation de l’espace d’activité, une fenêtre s’ouvre et propose lespictogrammes des fonctions possibles. Le concepteur clique sur le pictogramme correspondant àla fonction « s’informer » et celui-ci s’affiche sur l’espace d’activité à la place du pointd’interrogation. Les autres propriétés de l’espace d’activité (organisation des apprenants, etc.)ainsi que les éléments relatifs à l’organisation du scénario (type de parcours au sein d’une salle,itération, parallélisme, etc.) sont renseignés à partir de palettes spécifiques (cf. figure 65 et figure66).Une fenêtre de propriétés spécifique selon le type de composant (espace d’activité, vestiaire oupoint de constitution de groupe) permet de renseigner des informations complémentairesnécessaires à la définition de l’esquisse du scénario (cf. l’exemple présenté Annexe XXVI). Parexemple, pour le point de constitution de groupes le concepteur indique que les groupes sontconstitués de 3 participants. Pour le vestiaire, il précise les rôles qui seront attribués auxparticipants : « conseiller client », « client », « observateur ». Pour la salle « Simulationsd’entretiens clients », le concepteur précise les conditions de l’itération spécifiée (nombre depassages et changements éventuels à chaque passage) : ici il indique par exemple que la salleest parcourue au minimum 3 fois avec, à chaque passage, un changement de rôle au niveau duvestiaire afin que chaque participant ait joué au moins une fois chacun des rôles disponibles.Au niveau global du scénario, le concepteur renseigne les ressorts de jeu mis en œuvre à l’aidedes pictogrammes disponibles dans une palette de propriétés.
Etape 4 : conception détailléeUne fois l’esquisse du scénario définie, le concepteur ajoute des informations plus détaillées surles composants de son scénario afin d’aboutir au scénario générique. Ces informations détaillées(présentées dans le tableau 14) sont renseignées à l’aide de champs de formulaires accessiblesau sein d’une fenêtre spécifique associée à chacun des composants du scénario. Cesinformations sont organisées dans les fenêtres selon les rubriques définies dans la section11.3.5.
LXX
Annexe XXVI
Environnement informatique ScenLRPG : exemple de spécification d’une fenêtre de
propriétés d’un espace d’activité
LXXI
Annexe XXVII
Environnement informatique ScenLRPG : représentation d’un parcours à
embranchements