peut-on ré-enchanter l’apprentissage avec le jeu ? analyse

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International Conference CREE2019 Entrepreneurship Education, rethinking connections: Implications, Opportunities and Challenges Roanne 7 – 8 March, 2019 Page1 Peut-on ré-enchanter l’apprentissage avec le jeu ? Analyse au travers du prisme des concepts seuils Julien Annart, détaché pédagogique auprès de FOr'J Julie Hermans, Professeure d’entrepreneuriat, UCLouvain, Louvain Research Institute in Management and Organization Amélie Jacquemin, Professeure d’entrepreneuriat, UCLouvain, Louvain Research Institute in Management and Organization Emilie Malcourant, Conseillère en pédagogie universitaire, UCLouvain, Louvain Learning Lab

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Peut-on ré-enchanter l’apprentissage avec le jeu ? Analyse au travers

du prisme des concepts seuils

Julien Annart, détaché pédagogique auprès de FOr'J

Julie Hermans, Professeure d’entrepreneuriat, UCLouvain, Louvain Research Institute

in Management and Organization

Amélie Jacquemin, Professeure d’entrepreneuriat, UCLouvain, Louvain Research

Institute in Management and Organization

Emilie Malcourant, Conseillère en pédagogie universitaire, UCLouvain, Louvain

Learning Lab

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1. Problématisation et intérêt de la recherche

Un nombre croissant d’enseignants intègrent les mécaniques du jeu dans leurs dispositifs

pédagogiques (Ney, Goncalves, & Balacheff, 2014) et l’éducation en entrepreneuriat ne fait pas

exception (Thavikulwat, 1995; Verzat, 2009; Verzat, Byrne, & Fayolle, 2009). Plusieurs raisons

sous-tendent cette tendance. Certains pédagogues suggèrent que l’on apprend forcément mieux

en s’amusant puisque l’apprenant développe de l’intérêt pour la matière à apprendre. Dans son

ouvrage « Jeu et Education », Brougère (1995) cite Yon (1940) pour souligner que la

dichotomie jeu/travail n’a pas toujours été de mise. Ainsi, le mot « Ludus » a désigné

concurremment une activité libre et spontanée, qui est le jeu, et une activité imposée et dirigée

qui est le travail scolaire. De la même manière, jeu et éducation sont désignés par le même

terme « paideia » en grec ancien, (Botturi & Loh, 2008). Papert (2002) reprend d’ailleurs l’idée

que les caractéristiques du jeu ne sont pas antinomiques de celles de l’éducation lorsqu’il

souligne que si l’on prend du plaisir à jouer à un jeu, il faut néanmoins y investir des efforts.

De plus, le contexte socio culturel a changé. Les étudiants ont accès à l’information de multiples

façons : les livres sont nombreux et facilement accessibles et l’accès à Internet a radicalement

transformé l’accès à la connaissance. Néanmoins, accès à la connaissance ne signifie pas

apprentissage. Si un étudiant en entrepreneuriat découvre au détour d’un livre la distinction

entre risque et incertitude, sera-t-il capable d’en appréhender le sens ? Sans avoir vécu leurs

implications en termes d’action entrepreneuriales (Wiltbank, Read, Dew, & Sarasvathy, 2009),

l’apprenant s’engagera-t-il dans un effort mental pour intégrer ces deux nouveaux concepts ?

Cette problématique fait écho au phénomène de désenchantement qui touche nos universités.

Comme le suggère Weber (1946), le savoir enseigné à l’université est parfois considéré comme

abstrait et déconnecté de la réalité. Il cite l’allégorie de Platon où les prisonniers de la caverne

– nos étudiants – ne découvrent la réalité du monde d’en haut qu’au travers des ombres

déconnectées de ce qu’elles sont pourtant censées représenter.

Notre équipe pédagogique a choisi d’intégrer le jeu dans ses dispositifs d’éducation à

l’entrepreneuriat parce qu’il permettrait d’engager l’étudiant dans son apprentissage en

favorisant une approche active de ce dernier. Nous avons détourné des jeux existants (jeux

vidéos, jeux de rôle, story-telling existant) pour soutenir l’apprentissage de concepts clés en

entrepreneuriat et le développement de compétences en termes de synthèse et d’évaluation

(Bloom, 1956). En d’autres termes, nous avons fait le pari que le jeu permettrait d’appréhender,

dans une certaine mesure, le désenchantement qui touche nos universités. A travers le jeu, les

apprenants découvriraient les concepts scientifiques – non pas de manière abstraite et

déconnectée de la réalité – mais en action. De même, nous mobilisons le jeu pour faire face au

désenchantement non plus du savoir mais des pratiques qui y sont associées (Suddaby, Ganzin,

& Minkus, 2017), comme le plan² d’affaire et les études de marchés. Ces pratiques sont parfois

vues comme étant au service d’une rationalité froide, instrumentale, qui ne laissent que peu de

place à l’humain. Le journaliste Duff McDonald pointe notamment vers un « Un échec moral »

des écoles de gestion américaines dans son ouvrage Golden Passport. A travers le jeu, nous

pourrions adresser ce désenchantement en questionnant les règles du jeu ainsi que les stratégies

appliquées par chaque joueur. Le jeu apporterait alors plus de latitude pour déconstruire les

règles du jeu de la gestion et pour mettre en œuvre une vision plus critique de l’action

entrepreneuriale.

Néanmoins, l’utilisation du jeu fait encore débat. Neil Postman, en 1985, avait mis en garde

contre le grand danger qui consisterait à « nous amuser jusqu’à en mourir » (Postman, 1985). Il

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affirmait qu’apprendre ne peut pas être un amusement. Nous devons enseigner à nos enfants

« la discipline et le goût du travail difficile, et non nous plier à leurs caprices et envies »

affirmait-il. Dans cet article, nous questionnons notre rapport au jeu au sein des dispositifs

d’éducation à l’entrepreneuriat et posons la question de recherche suivante : « A quelles

conditions le jeu permettrait-il de ré-enchanter l’apprentissage de l’entrepreneuriat ? ». Nous

identifions ces conditions et soulignons les écueils possibles, notamment pour la

compréhension de l’action entrepreneuriale en situation d’incertitude. Pour ce faire, nous

mobilisons les travaux en éducation portant sur la notion de « concepts seuils » (Meyer & Land,

2003; Meyer & Land, 2005). Nous développons brièvement ce cadre théorique dans la section

suivante.

2. Le cadre théorique

Notre cadre théorique sera double dans la mesure où le phénomène à éclairer porte tant sur les

notions de jeux que d’apprentissage.

Dans une première section, nous mobiliserons les travaux sur la gamification et y

positionnerons les différentes écoles de l’apprentissage (behaviourisme, cognitivisme et

constructivisme). Cet éclairage permettra de mieux comprendre les objectifs d’apprentissages

mise en avant par chaque école ainsi que les types de jeux qui y correspondent (Bruckman,

1999). Les compétences visées revoient au triptyque classique des savoirs, savoir-faire, savoir-

être. Bloom a fourni une typologie intéressante à cet égard pour aider l’enseignant à identifier

le type de compétences visées par le dispositif pédagogique et les mécaniques de jeu à mobiliser

pour chacune d’elles. Ainsi, par exemple, on pourrait ambitionner le niveau 1 (transmettre des

savoirs) à travers des mécaniques de quiz ou de pairage de mot (mécanique de drill plus

étroitement liée au behaviourisme) alors qu’un niveau 5 (synthétiser) s’obtiendrait à travers des

simulations et des jeux de rôles, plus étroitement liés au constructivisme.

Néanmoins, ce cadre s’est révélé insuffisant pour comprendre pourquoi le jeu permettait

d’atteindre nos objectifs d’apprentissages pour certains concepts et pas pour d’autres, alors que

les niveaux d’abstraction visés étaient les mêmes. Nous mobilisons alors les travaux sur les

concepts seuils (Meyer & Land, 2003; Meyer & Land, 2005) pour éclairer les conditions

limitatives du jeu pour l’apprentissage des concepts de niveaux cinq et supérieur.

2.1. Jeu et apprentissage : état de l’art

2.1.1. La place du jeu d’un paradigme à l’autre

Les théories de l’apprentissage décrivent la position de l’enseignant et de l’élève face au savoir

ainsi que la posture de l’enseignant face à la mise en place des activités.

La théorie behavioriste (de l’anglais « behavior », comportement) poursuit l’objectif de trouver

les conditions observables qui amènent la réponse à un stimulus donné grâce à un système de

renforcements (Pavlov et Skinner). L’application des théories béhavioristes de Skinner a été

introduite dans l’enseignement assisté par ordinateur. Une information découpée est présentée

à l’apprenant. A chaque étape, le programme s’assure que l’apprenant a bien compris en lui

posant une question. Suivant la réponse, l’utilisateur reçoit un renforcement positif ou négatif

et recevra de nouvelles informations avec de nouvelles questions. Le béhaviorisme donne à

l’enseignant un rôle central puisque c’est lui qui doit créer les conditions environnementales

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qui vont permettre l’atteinte des objectifs. Au travers d’un système de renforcements positifs et

de récompenses, l’enseignant change le comportement des apprenants en provoquant de

nouvelles réponses à des stimulus spécifiques. L’apprentissage s’effectue essentiellement par

le biais de la répétition (un drill) et essais-erreurs.

Le jeu Math Blaster [montrer la vidéo du jeu à l’écran] s’inscrit dans ce type d’approche

puisqu’il s’agit de rendre l’apprentissage des mathématique ludique et appétissant à travers des

points glanés au fil des exercices réussis.

En plus du couple stimulus-réponses, l’approche cognitiviste va chercher à savoir ce qui se

passe dans la boîte noire (« black box ») correspondant aux processus mentaux mis en œuvre

lors de l’apprentissage. Le travail de la recherche des sciences cognitives est de comprendre la

manière dont est traitée l’information en analysant comment se réorganise la structure cognitive

d’un sujet après avoir assimilé une nouvelle information. L’approche cognitive accorde une

grande place au travail de la mémoire, la façon dont celle-ci stocke et rappelle l’information.

En plus de donner des informations nouvelles (comme les béhavioristes), l’approche

cognitiviste incite à développer de nouvelles stratégies d’apprentissage en rendant l’apprenant

actif grâce à un traitement cognitif et métacognitif. Les situations d’apprentissage doivent aussi

tenir compte de la diversité des apprenants.

L’approche constructiviste (Piaget, 1929) se centre sur la manière dont le sujet organise le

monde et élabore des connaissances (ses propres connaissances) au travers de ses expériences

personnelles et de ses schémas mentaux. En ce sens, le constructivisme se détache fortement

des 2 approches précédentes en mettant au centre de l’apprentissage l’apprenant tout en restant

dans le prolongement des travaux cognitivistes. Il s’agit de faciliter l’apprentissage et non de le

prescrire. L’enseignant a pour tâche d’amener les apprenants à construire du sens et non

d’imposer un modèle en construisant un environnement qui favorise l’apprentissage.

Un premier courant constructiviste qui en marque l’origine (Piaget) considère que

l’apprentissage est une activité essentiellement individuelle : l’apprentissage est le fruit d’une

interaction permanente entre le sujet et le milieu, milieu auquel l’individu s’adapte par deux

mécanismes indissociables : l’assimilation et l’accommodation. Pour Piaget, le développement

précède l’apprentissage et la connaissance est une interprétation active des données de

l’expérience par le biais de structures ou de schémas préétablis.

Le jeu My Make Beleive Castle, par exemple, s’inscrit dans cette premier courant

constructiviste. Il permet au joueur soit de se concentrer sur la résolution d’énigmes pour

lesquelles il y a toujours plusieurs chemins de solutions possibles, soit de jouer librement, ce

qui permet de de développer son imagination, sa capacité à résoudre des problèmes et sa pensée

critique.

Un deuxième courant considère que l’activité est une activité essentiellement sociale

(Vygotsky). À la différence de Piaget, Vygotsky insiste sur le contexte social et met l’accent

sur les effets de l’interaction effective avec les autres apprenants dans la construction des

savoirs.

Les jeux qui reposent sur des communautés d’apprentissage s’inscrivent dans le socio-

constructivisme. Dans le jeu MOOSE Crossing, par exemple, je enfants construisent ensemble

un monde virtuel et, se faisant, améliorent leurs capacités à lire, à écrire de façon créative et à

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programmer. Ce sont les membres de la communauté qui fournissent des modèles de rôle, des

modèles de projets, du support technique et du soutien émotionnel.

Certain décline le constructivisme en « constructioniste » (on apprend particulièrement bien

quand on nous demande de créer, de construire des choses par nous-mêmes). On retrouve ici

tous les jeux qui fonctionnent autour de kits de construction fourni au joueur comme Sim Tunes

par exemple. L’idée sous-jacente est que l’apprentissage est meilleur quand l’apprenant

s’amuse et prend du plaisir à faire quelque chose pour laquelle il a de l’intérêt.

Les pédagogies dites « actives » sont fondées sur les modèles constructiviste de l’apprentissage.

L’activité n’est pas un but en soi, ni un moyen d’occuper, mais un détour pour provoquer de

l’apprentissage.

Les chercheurs en sciences cognitives parlent aujourd’hui davantage d’Apprentissage Actif et

non plus de Pédagogies Actives. Les mots révèlent un changement de paradigme.

En effet, lorsque l’enseignant était la seule référence pour les étudiants en matière d’acquisition

de connaissances, la démarche transmissive prévalait. Le contexte socio culturel a changé, les

étudiants ont accès à l’information de multiples façons : les livres sont nombreux et facilement

accessibles et l’accès à Internet a radicalement transformé l’accès à la connaissance. Le contexte

actuel où l’audiovisuel prévaut rend les étudiants à la fois exigeants et passifs. Exigeants quant

aux qualités de communicateurs qu’ils attendent des enseignants et quant à la nouveauté des

informations qu’ils entendent et passifs parce qu’habitués à « regarder » plus qu’à « faire », à

zapper pour être mieux distraits plutôt qu’à s’impliquer dans une démarche réflexive qui exige

une concentration soutenue.

En étudiant les démarches d’apprentissages les chercheurs en sciences cognitives ont mis en

évidence l’aspect constructif de l’apprentissage : on apprend en construisant la connaissance.

Un nouveau concept sera vraiment acquis s’il s’articule à un concept acquis préalablement.

L’image couramment utilisée est celle de l’escargot qui construit peu à peu sa coquille en

spirale.

On sait grâce aux nombreuses recherches menées dans ce domaine que les étudiants apprennent

beaucoup les uns des autres, que leur apprentissage se construit grâce aux liens cognitifs, aux

liens sociaux, à l’expérience ; etc. Ils n’apprennent donc pas exclusivement selon le modèle

écoute - transcription – mémorisation - répétition.

Des enseignants et chercheurs en pédagogie réfléchissent depuis les années soixante à des

modes d’enseignement adaptés à ce modèle complexe d’apprentissage.

Le paradigme de l’enseignant au centre du système (pédagogie) a été remplacé par celui de

l’apprenant au centre (apprentissage). Les deux termes ne sont pas exclusifs l’un de l’autre mais

permettent d’affiner la réflexion.

L’apprentissage actif, quelle que soit sa forme (étude de cas, mise en situation, apprentissage

par problème ou par projet, etc.), implique l’étudiant, le met en situation d’autonomie guidée,

encourage l’interaction entre étudiants. L’enseignant conçoit le dispositif qui permettra aux

étudiants d’acquérir de nouvelles connaissances et compétences. Les méthodes d’apprentissage

actif permettent à l’étudiant de construire sa connaissance à partir de ce qu’il sait déjà et pas de

ce que l’enseignant pense qu’il devrait savoir. Plus l’étudiant est autonome dans la gestion du

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travail, plus il pourra travailler à son rythme et selon son style d’apprentissage. Par un travail

collaboratif, les étudiants s’aideront mutuellement grâce aussi à leurs différentes démarches

d’apprentissage.

2.1.2. Du jeu à la ludification

Le terme « jeu » est utilisé pour nommer des objets et des activités aussi différentes que des

cartes à jouer (un jeu de carte), une activité sportive (le jeu de tennis), artistique (le jeu de

l’acteur) ou l’espace entre deux pièces mécaniques (le jeu entre le piston et la paroi du cylindre).

Ce caractère polysémique rend le terme jeu particulièrement difficile à définir et circonscrire.

Caillois reprendra les travaux de Huizinga et retiendra les attributs suivants pour décrire un jeu

(Caillois, 1958) : une activité libre (On ne joue que si l’on veut, que quand on veut, que le temps

qu’on veut), séparée (circonscrite dans des limites de temps et d’espace précises et fixées à

l’avance), fictive et réglée (Les lois confuses et embrouillées de la vie ordinaire sont

remplacées, dans cet espace défini et pour ce temps donné, par des règles précises, arbitraires,

irrécusables, qu’il faut accepter comme telles et qui président au déroulement correct de la

partie), incertaine dans son déroulement, même si elle est soumise à des règles et, improductive

(ne créant ni bien, ni richesses, ni éléments nouveaux).

Caillois (1958) distingue quatre attitudes ludiques distinctes qui fondent quatre catégories

fondamentales de jeux mais qui peuvent se combiner : l’ambition de triompher grâce au seul

mérite dans une compétition réglée (agôn), la démission de la volonté au profit d'une attente

anxieuse et passive de l'arrêt du sort (alea), le goût de revêtir une personnalité étrangère

(mimicry) et la recherche du vertige (ilinx).

D’autres auteurs se sont attachés à proposer des attributs qui permettent de caractériser les jeux.

Ainsi, Crowford (1982) insiste sur la notion de prise de décision du joueur, Csikszentmihalyi

(1990) sur l’engagement du joueur qui se traduit par son absorption par le jeu et sa concentration

(le flow) ou Zimmerman (2004) sur la présence d’un résultat quantifiable (« quantifiable

outcome »). Pour ce dernier auteur, ce critère permet de distinguer les jeux structurés par des

règles explicites, les « toy-games », des « puzzle-games », qui permettent une activité libre et

spontanée. Caillois (1958) avait déjà distingué ces deux catégories de jeux en les nommant

respectivement païda et ludus. Winnicott (1971) insiste sur la distinction importante entre le «

game » qui est un jeu structuré autour de règles, et le « play », jeu « qui se déploie librement »

et constitue un espace transitionnel entre le moi et le non-moi de l’enfant. Game et play ne

s’opposent pas nécessairement puisque l’expression jeu de rôles peut être traduite en anglais

par « role playing game » et c’est également une combinaison de ces deux mots qui permet, en

anglais, de désigner la jouabilité ou l’expérience de jeu (le fameux « gameplay ») comme pour

souligner une tension entre la contrainte des règles imposées par l’architecture du jeu et la

liberté offerte au joueur. Enfin, d’autres définitions du terme jeu ne renvoient pas à la situation

qui se met en place mais à l’artefact qui est utilisé pour jouer. C’est ainsi qu’est forgée

l’expression jeu vidéo.

On peut situer les différentes définitions sur un axe dont les pôles seraient d’une part un pôle

game qui renverrait plutôt aux contraintes imposées par un artefact du point de vue des

interactions qu’il est possible de mettre en place (puzzles, jeux vidéo). L’autre pôle serait le

pôle play qui désignerait plutôt une situation dans laquelle se mettent en place des interactions

et dont les artefacts utilisés seraient moins contraignants du point de vue de ces interactions.

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La « gamification » se définit comme l’utilisation de l’esthétique, des dynamiques et des

mécaniques de jeu dans des contextes de non-jeu (Enders, 2013 ; Kapp, 2012 ; Zichermann et

Cunningham, 2011). Dans le domaine de l’apprentissage, cela permettrait d’engager les

apprenants, de les motiver à agir (Dominguez et al., 2013). On parle d’ailleurs de leviers

d’engagement et de motivation. Comme exemples d’éléments « gamifiés » pouvant être

introduits dans un contexte de non-jeu, on citera les points, les badges, les trophées, les niveaux,

les quêtes, la customisation d’avatars, les activités minutées, ou encore la liberté d’échouer.

La gamification est associée à l’expression « jeu sérieux » (ou « serious games »). On doit à

l’armée américaine les premières initiatives de développement de jeux sérieux dans les années

80. Cette dynamique était utilisée pour la formation des recrues (Egenfeldt-Nielsen, 2007). Elle

s’étend aujourd’hui un peu partout, des musées jusqu’aux entreprises, en passant par les

organisations internationales ou encore les organismes de santé. Il s’agit de mobiliser les jeux

dit « sérieux » pour recruter ou former leur personnel, pour promouvoir leurs produits, pour

sensibiliser leur public à certaines problématiques, etc. L’expression « jeu sérieux » contient

une référence implicite à la notion de jeu vidéo et à l’utilisation des technologies issues du

monde du jeu vidéo pour une utilisation utilitaire (ou « sérieuse »). Dès 2005, le premier Serious

Game Summit Europe qui s’est tenu à Lyon proposait la définition suivante : « Les serious

games sont des applications de simulation/formation qui utilisent les dernières technologies

issues du monde du jeu vidéo et de la réalité virtuelle ». D’autres auteurs (Ney, Gonçalves,

Balacheff, et Schwartz, 2010) proposent une définition plus large en considérant comme «

sérieux » tout jeu destiné à la formation basés sur l’immersion permettant aux apprenants de se

sentir engagés dans une simulation qui modélise une situation réelle, mais sans être limités par

le cadre de l’écran d’un jeu vidéo. En médecine, par exemple, il existe des serious games ne

reposant pas sur du jeu vidéo qui visent à former les futurs médecins à optimiser leur

communication avec leurs patients lors d’une consultation médicale. Dans les deux cas, les

connaissances visées apparaissent comme des instruments que les apprenants-joueurs devront

utiliser pour résoudre les problèmes qui leur sont confiés. C’est ainsi que les actions du joueur

viendraient alimenter les apprentissages de l’apprenant.

Nous préférons l’expression « ludicisation » à celle de la « gamification » pour situer les

différents dispositifs joués que nous avons développés dans nos cours en entrepreneuriat. Cette

nuance permet de revenir sur ce que l’on appelle un jeu. En effet, la ludicisation est un processus

qui consiste à faire entrer un objet dans le monde du jeu, en soulignant que la définition de cette

notion et des objets auxquels elle renvoie est hautement contextuelle et peut être amenée à

évoluer. En effet, un objet qui, dans un contexte social et culturel donné, est reconnu comme

jeu, peut, dans un autre contexte ou à une autre époque, ne pas être perçu ou utilisé comme tel.

La télévision, par exemple, a longtemps été perçue comme un objet « à regarder », avant qu’elle

ne devienne cet objet à jouer depuis l’avènement des consoles de jeux vidéo. Il est donc essentiel

de ne pas tenir pour immanent les caractéristiques et la dimension ludique d’un objet, mais au

contraire de les questionner pour comprendre comment celles-ci ont été construites socialement

et comment elles évoluent. Cette notion de ludicisation permet de comprendre des dispositifs

dans lesquels un jeu est détourné dans le cadre d’une formation (par exemple, à l’EMLyon, des

professeurs en entrepreneuriat utilisent des cartes à jouer figuratives d’un jeu de société pour

accompagner les étudiants dans leur recherche d’idées et de concepts de création d’entreprises)

ou dans lesquels le formateur introduit une situation de jeu par une immersion fictionnelle

(pensez au storytelling que vient de faire Julien sur les Zombies envahissant une dernière

enclave terrestre située à Mons).

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Ce qui est essentiel dans un processus de ludicisation de l’apprentissage, c’est de déterminer

les objectifs visés en termes d’apprentissage pour, ensuite, déterminer l’expérience de jeu (le

fameux « gameplay » dont on a déjà parlé) qui permettra d’atteindre ces objectifs.

Les compétences visées revoient au triptyque classique des savoirs, savoir-faire, savoir-être.

Bloom (2017) a fourni une typologie intéressante à cet égard pour aider l’enseignant à identifier

le type de compétences visées par le dispositif pédagogique et les mécaniques de jeu à mobiliser

pour chacune d’elles. Montrez à l’écran la typologie. Ainsi, par exemple, on peut ambitionner

le niveau un (transmettre des savoirs) à travers des mécaniques de quiz ou de pairage de mot.

Alors qu’un niveau 5 (synthétiser) s’obtiendra à travers des simulations.

Attention toutefois à ne pas se focaliser uniquement sur les mécaniques de jeu. Pour assurer

l’efficacité du dispositif pédagogique, c’est surtout l’expérience de jeu (le gameplay), qui

renvoient aux formes d’amusement recherchées et à une attention sur les profils des joueurs

mobilisés, qu’il faut soigner.

2.2. Théorie des concepts seuils

Les concepts seuils sont définis par Meyer & Land (2003, 2005) comme des concepts

transformateurs et intégrateurs mais relativement complexes. Ils sont transformateurs dans la

mesure où ils modifient la vision du monde de l’apprenant, ou du moins, dans ce cas-ci, de

l’action entrepreneuriale. Ainsi, la distinction entre risque et incertitude peut mener

l’entrepreneur à considérer des principes d’action qui n’étaient pas discernables auparavant,

comme par exemple le passage d’une logique de maximisation des profits en situation risquée

à celle de perte acceptable en situation d’incertitude (Sarasvathy, 2001, 2008). Ces principes

nouveaux transforment le champ d’action entrepreneurial et participent à démystifier l’image

du héros entrepreneur, preneur de risque, pour la compléter d’une vision plus réaliste de

l’entrepreneuriat dans un monde incertain.

Les concepts seuils sont également intégrateurs. Ils ouvrent l’apprenant sur d’autres concepts

et compétences liés qui participent à la compréhension du phénomène entrepreneuriale, comme

la rédaction d’un business plan en situation de risque, lorsque les prédictions sont possibles, ou

l’approche Lean-Startup en incertitude qui encourage l’entrepreneur à confronter son idée le

plus rapidement possible à la réalité d’un marché incertain.

Enfin, les concepts seuils sont difficile à appréhender, soit au travers d’une complexité

intrinsèque (penser par exemple au concept de coût d’opportunité en économie), soit parce

qu’ils nécessitent un effort de déconstruction (Meyer & Land, 2005). Ainsi, nous pourrions

argumenter que risques et incertitudes sont difficiles à appréhender par les apprenants car il

s’agit de concepts familiers aux définitions floues. Pour les apprenants, il pourrait s’agir de

deux concepts identiques, sans en voir les implications ni le sens. Ce sera également le cas de

nos étudiants en entrepreneuriat qui risquent alors de ne pas faire l’effort mental d’intégrer leur

distinction.

3. Méthodologie

Cet article porte sur l’analyse qualitative de deux dispositifs pilotes mobilisant le jeu dans nos

cours d’éducation à l’entrepreneuriat. Le premier dispositif pilote a été mis en œuvre entre le

15 novembre 2017 et le 31 décembre 2017. Les données ont été collectées au travers de deux

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focus groups, le premier portant sur l’organisation des cours en périodes intensives de six

semaines, et le second portant sur l’intérêt des dispositifs gamifiés pour soutenir l’apprentissage

de l’entrepreneuriat. Les échanges du focus group ont été transcrit et leur contenu

systématiquement codé. De plus, deux questionnaires furent soumis à l’ensemble des étudiants

pour évaluer les dispositifs, notamment en termes de ludicisation1.

Cette première vague de travaux à mener à la formulation d’hypothèses, notamment sur le rôle

du jeu comme espace liminal pour l’apprentissage des concepts seuils. Cette dernière guide la

deuxième collecte de donnée qui accompagnera la deuxième étude pilote, qui sera mise en

œuvre enter le 15 novembre 2018 et le 31 décembre 2018. Outre la réplication des focus group

et questionnaires, nous nous alignerons sur Bolinger and Brown (2015) pour l’évaluation de

l’apprentissage des concepts seuils en collectant les cartes cognitives portant sur la notion

d’entrepreneuriat et son articulation aux concepts seuils visés par nos dispositifs

d’apprentissage. En analysant les libres représentations de ces concepts dans les cartes

cognitives des étudiants, nous mobilisons une méthode inductive et indirecte permettant

d’évaluer leur intégration par l’étudiant (Bolinger & Brown, 2015).

4. Résultats

Dans nos résultats, nous revenons sur la question-titre de cet abstract : Peut-on ré-enchanter

l’apprentissage par le jeu ? Notre réponse est positive mais prudente. Notre cadre théorique

permet d’appréhender dans quelle mesure et à travers quels mécanismes, le jeu peut conduire à

une articulation entre des savoirs/savoir-faire/savoir-être et à ancrer l’apprentissage des

étudiants à travers des expériences qui les mettent en mouvement et leur permettent de

s’entreprendre.

Néanmoins, nous répondons par la négative si l’enseignant ne peut pas disposer de soutien et

des ressources spécifiques de la part de son institution. Nous visons notamment aux services

pédagogiques qui fournissent un soutien pour la réflexion et l’évaluation du dispositif. Nous

soulignons également l’intérêt des services de soutien logistique, technique et technologique

pour toutes les questions d’accès Internet, d’outils numériques mis à disposition, de mobilier

roulant, de tableaux intelligents, de tableaux blancs muraux, de moyens financiers pour se

former à l’emploi du jeu en formation, etc. A cet égard, l’enseignant ne pourra pas se contenter

de juste faire appel à différents services, mais il devra monter son dispositif autour d’une

équipe-projet qui rassemble des acteurs de ces différents services.

Enfin, nous attirons l’attention des enseignants sur l’enjeu de penser un dispositif pédagogique

original, cousu-main autour d’un « scénario pédagogique » identifiant les différents temps

pédagogiques : des phases de jeu et des phases non jouées. L’enseignant doit pouvoir introduire

le jeu, l’animer, le cas échéant y jouer et/ou aider à faire jouer, puis débriefer la partie jouée.

En fonction de sa capacité à remplir ces fonctions, la partie ludique de l’activité sera plus ou

moins réussie.

Ce qui nous apparait comme particulièrement délicat, c’est la nécessité durant toute une activité

jouée d’assurer des liens entre la dimension pédagogique (nos objectifs d’apprentissage), le jeu

et les actions des joueurs-apprenants. Cette mise en cohérence ne dépend pas uniquement du

1 Notamment : Dans quelle mesure « je me sens plus à l’aise pour mobiliser les concepts d’empathie et de leadership grâce aux activités ludiques » , « les activités d’apprentissage pratiques qui complètent les cours magistraux sont une réelle plus-value », « les activités ludiques m’ont motivé dans l’apprentissage de la matière », « l’articulation entre les apports théoriques et les activités pratiques est adéquate ».

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jeu, quelle que soit sa qualité, mais aussi de la manière d’assurer l’animation du jeu. Cela

implique que l’enseignant accompagne les apprenants à lire le jeu selon les objectifs

pédagogiques visés, le tout en orientant, questionnant, aidant les apprenants et en suscitant

l’entraide entre eux. Cet enseignant doit, de surcroît, pouvoir jouer les équilibristes, en veillant

à alterner des phases jouées et des phases non jouées, et au sein des phases jouées, varier les

types d’expériences de jeu mobilisées (jeux vidéo, jeux de rôles, jeux de société, etc.). En

d’autres termes, le jeu n'est qu'un dispositif parmi d'autres. Il trouve sa place parmi d'autres

modes d'enseignement et d'autres temps. Contrairement aux récits parfois mobilisés par les

médias et l'industrie du jeu vidéo, ce dernier ne serait pas une solution universelle en lui-même

mais seulement un outil à combiner avec d'autres.

Quand ce cadre est respecté, il faut finalement faire attention aux pièges qui guettent tout

formateur galvanisé par son projet de cours gamifié. Nous attirons tout d’abord l’attention des

enseignants à l’effet que Bruckman (1999) a qualifié de « brocoli enrobé de chocolat ». Il s’agit

d’éviter de rendre appétissant, par le jeu, un contenu éducatif peu appétissant en soi. Un autre

risque que nous avons expérimenté est celui qui consiste, chez certains apprenants, à assimiler,

à travers le jeu, une version tronquée ou simplifiée du concept choisi et transmis à travers le

jeu. Plutôt que du réenchanter l’apprentissage, nous assisterions alors à un « surenchantement »

de ce dernier (Meyer & Land, 2005), lorsque l’apprenant intègre une version naïve du concept

qui agit alors comme un faux proxy difficile à déconstruire par la suite. Le débriefing est sans

doute le seul garant pour éviter cet écueil.

5. Contribution potentielle

En termes de contribution théorique, au-delà d’une synthèse des travaux sur la ludicisation,

nous montrons comment le jeu peut servir d’espace liminal pour l’apprentissage de concepts

seuils en entrepreneuriat (Meyer & Land, 2005). 6. Bibliographie

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