qualité de l'audit comptable et financier et du contrôle
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Qualité de l’audit comptable et financier et du contrôledes structures publiques du Bénin
Jean-Noël Chauvey, Maxime José Chanhoun, Sena John Ahyee
To cite this version:Jean-Noël Chauvey, Maxime José Chanhoun, Sena John Ahyee. Qualité de l’audit comptable etfinancier et du contrôle des structures publiques du Bénin. Accountability, Responsabilités et Compt-abilités, May 2017, Poitier, France. pp.cd-rom. �hal-01907571�
Qualité de l’audit comptable et financier et du
contrôle des structures publiques du Bénin
Quality of public organization auditing
arrangement and control in Benin
Jean Noel CHAUVEY
Maxime José CHANHOUN
Sena John AHYEE
Résumé
Dans le cadre de cette recherche, nous
évaluons la qualité du dispositif d’audit des
structures publiques du Bénin au regard
des enjeux qui y sont attachés. En effet, les
remises en cause permanentes des
institutions d’audit suggèrent des
interrogations sur leurs justifications. Pour
ce faire, nous ancrons au plan théorique
notre recherche sur les travaux de
DeAngelo (1981) qui portent sur la
compétence et l’indépendance des
auditeurs. Par la suite, un questionnaire a
été élaboré et administré aux auditeurs des
structures publiques du Bénin. 103
réponses ont été obtenues. De leur
exploitation, il apparaît que les auditeurs
des structures publiques du Bénin semblent
globalement compétents et indépendants,
bien que des questionnements persistent.
Ces conclusions intéressantes ouvrent de
nombreuses perspectives de recherche en
audit au Bénin et plus largement en
Afrique.
Mots clés : Audit – Structures publiques-
Compétence – Indépendance.
Abstract
This research is an attempt to assess the
quality of the arrangement of the public
organizations auditing in Benin, regarding
the challenges in this field. Indeed, the
frequent changes in this auditing
arrangement raise questions about its
quality. Our research is theoretically
grounded in DeAngelo (1981) contribution
that analyzed auditing quality in terms of
auditor competences and auditor
independence. Through a survey with
auditors in public administrations (103
respondants), we collected then some data
related to auditors comptences and
independence. These data show that
globally beninese auditors seem to be
competent and independent. Beyond, based
on these results, it is important now to
research on some other factors that impact
the quality of public organizations
auditing.
Keywords: Audit – Public Organizations –
Compentence – Independence
2
Introduction
Contexte de l’étude
Les entreprises publiques béninoises se portent assez mal. Elles souffrent de graves
problèmes de gouvernance qui ont conduit le gouvernement béninois, à la suite de plusieurs
rapports et alertes, à y consacrer un conseil des ministres spécial le 8 juillet 2011. Ces
problèmes de gouvernance se caractérisent essentiellement par la « défaillance des organes de
gouvernance et par l’irrationalité dans la gestion administrative comptable, financière et du
matériel » (cf. compte rendu du conseil des ministres du 9 juillet 2011). A la suite du
diagnostic opéré, des mesures d’assainissement ont été prises pour améliorer la gouvernance
desdites entreprises publiques. Environ cinq ans après, le gouvernement a décidé, en conseil
des ministres du 30 novembre 2016, de la liquidation de quatre (4) entreprises publiques
parmi la vingtaine encore en activité.
Sur un même plan, la gestion comptable et financière des administrations publiques est très
décriée. Point d’orgue, l’affaire PPEA 2 (Programme Pluriannuel d’appui néerlandais au
secteur Eau et Assainissement) relative au détournement de près de 3 milliards de fcfa de
l’aide des Pays-Bas. Cette affaire a défrayé la chronique durant le premier semestre de l’année
2015 et a entrainé la suspension de la coopération avec les Pays-Bas.
Mis sous pression et contraint de situer les responsabilités afin de sanctionner les
personnes convaincues de détournement et de mauvaise gestion, le gouvernement béninois a,
entre autres, ordonné le recours à un cabinet d’audit étranger pour connaitre le dossier et, par
la suite, prononcé la dissolution de l’Inspection Générale d’Etat (IGE) le 20 juin 2015 en
créant à la place le Bureau de l’Auditeur Général (BAG) avec comme justification principale
la volonté de réprimer avec plus d’efficacité la mauvaise gouvernance au sein de
l’administration publique. Le Bureau de l’Auditeur Général a été dissout au même titre que
l’Inspection Générale d’Etat juste onze mois après sa création.
Auparavant, en juillet 2011, sur proposition de l’Inspection Générale d’Etat, des auditeurs
internes du gouvernement avaient été nommés en conseil des ministres pour prévenir les
dérives en matière de gestion des principales entreprises publiques et alerter les autorités de
tutelle desdites entreprises lorsque des cas de mauvaise gouvernance seraient relevés. Après
18 mois d’exercice, le Chef de l’Etat béninois a mis fin à cette expérience sans justification
précise.
Par ailleurs, des commissaires aux comptes (CAC) sont obligatoirement nommés et
assurent l’audit légal au sein des entreprises publiques quand les dispositions légales et
règlementaires en imposent la présence. Aussi, au sein de chaque ministère, opère à plein
temps un inspecteur général du ministère (IGM) qui assure un premier niveau d’audit et de
contrôle dans la structure concernée.
Malgré toute cette architecture et le maillage des structures publiques en matière d’audit et
de contrôle, elles sont peu performantes et enregistrent beaucoup de cas de détournement et de
mauvaise gestion. Trois principales missions sont exercées par les institutions chargées de
l’audit comptable et financier et du contrôle des structures publiques. Ceux sont les missions
de contrôle, d’inspection et d’audit. Le contrôle :est une activité destinée à s’assurer qu’une
entité se trouve dans une situation conforme à l’ensemble des normes et règles d’organisation
et de fonctionnement édictées par les autorités hiérarchiques. L’inspection est un contrôle
spécifique diligenté lorsqu’il existe des présomptions de dysfonctionnement. L’audit est quant
à lui un processus indépendant et documenté permettant de recueillir des informations
objectives pour déterminer dans quelle mesure une structure satisfait aux exigences d’un
3
référentiel. Le contrôle et l’inspection nécessitent souvent l’utilisation des techniques d’audit
sans en mobiliser tout les référentiels.
Selon la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (CNCC), un audit consiste
à examiner, par sondages, les éléments probants justifiant les données contenues dans les
comptes. Il consiste également à apprécier les principes comptables suivis et les estimations
significatives retenues pour l’arrêté des comptes et à apprécier leur présentation d’ensemble.
Destiné à contrôler l’information à fournir aux tiers, l’audit doit être de qualité et, comme
le souligne DANJOU (2011), un audit de qualité doit être rigoureux, impartial, intelligent,
efficace, ... C’est un processus complexe qui porte notamment sur la gouvernance des
organisations dont la substance consiste en la résolution des conflits d’asymétrie
d’information entre les dirigeants et les actionnaires ou autres parties prenantes. L’audit
constitue un mécanisme de résolution de ces conflits en crédibilisant les informations
financières fournies aux tiers en vue d’améliorer la gouvernance des organisations.
BIGOU-LARE (2011) s’interroge sur le besoin d’audit de l’Afrique pour assurer un
développement économique durable. Cette interrogation est bien valable pour le Bénin et la
succession des remises en cause des institutions chargées de l’audit et du contrôle suggère des
réflexions liées à leur responsabilité dans la faillite collective de la gouvernance des structures
publiques, leur utilité, la pertinence des processus d’audit déclinés, la qualité des auditeurs et
le rôle de l’Etat central. L’institution est un terme polysémique qui désigne communément des
structures organisées ayant pour fonction de maintenir un état social (Tournay, 2011). En
effet, dans un contexte de changements réguliers, on observe que presque rien ne change, ce
que laissent transparaitre les mutations ou évolutions permanentes qui caractérisent les
principales institutions d’audit et de contrôle du secteur public. Aussi et surtout, la
justification de la substitution du Bureau de l’Auditeur Général à l’Inspection Générale d’Etat
par la nécessité de réprimer avec plus d’efficacité la mauvaise gouvernance dans
l’admistration publique soulèvent des interrogations, entre autres, sur la qualité du travail
effectué les inspecteurs/auditeurs de l’ensemble des institutions d’audit et de contrôle des
structures publiques.
« D’un point de vue théorique, l’audit est un mécanisme de gouvernance d’entreprise dont
la fonction est de crédibiliser l’information financière divulguée par l’entreprise » (Pochet,
2009). Dans ces conditions, il est nécessaire de s’interroger sur la qualité de ce mode de
régulation au cœur de la gouvernance des structures publiques du Bénin qu’est l’audit
comptable et financier.
C’est pourquoi, cette recherche a pour objectif d’évaluer la qualité du dispositif d’audit
comptable et financier et de contrôle des structures publiques du Bénin au regard des
enjeux qui lui sont attachés, en nous focalisant plus précisément ici sur les dimensions
« indépendance » et « compétence » des auditeurs. A cette fin, nous mobilisons les
éléments de recherche formalisés par DeAngelo en 1981 pour procéder à cette évaluation en
fonction des déterminants de compétence et d’indépendance de l’auditeur..
Dans ces conditions, cet article se propose, dans un premier temps, d’explorer des ressorts
théoriques relatifs aux déterminants de la qualité de l’audit afin d’apprécier la capacité des
auditeurs à contribuer à la réduction de l’asymétrie d’information et à la crédibilisation des
états financiers.
Dans un deuxième temps, nous présentons le contexte de recherche par une description de
l’architecture institutionnelle dédiée à la mise en œuvre de l’audit comptable et financier et le
contrôle des structures publiques du Bénin ainsi que la démarche méthodologique fondée sur
une enquête à caractère exploratoire.
4
Enfin, dans une troisième séquence, nous présentons et discutons les résultats issus de
l’évaluation faite à l’aide d’un questionnaire administré à des commissaires aux comptes, des
ex-inspecteurs d’Etat, des ex-auditeurs d’Etat, des ex-auditeurs internes du gouvernement et à
des inspecteurs généraux des ministères du Bénin.
1. Une qualité de l’audit perçue essentiellement à travers l’indépendance et
la compétence des auditeurs : revue de travaux ad hoc
Les questionnements actuels se focalisent sur la qualité du dispositif d’audit en place,
précisément sur la capacité des institutions d’audit à remplir leurs missions en crédibilisant les
informations fournies à toutes les parties prenantes. Ces interrogations prennent leur source
dans l’instabilité qui caractérise lesdites institutions chargées de l’audit et du contrôle des
structures (entreprises et administrations) publiques béninoises. Ces entreprises et
administrations fonctionnent souvent en vase clos, déclinent des processus complexes qui ne
sont pas aisés à comprendre, d’où la nécessité de disposer d’audit de qualité pour assurer les
contrôles requis et rassurer les parties prenantes. En effet, selon Perez (2003, 2009), « il faut
comprendre que la vie des entreprises, en particulier pour les grandes firmes et groupes, est,
à l’instar de la métaphore de la caverne de Platon, peu accessible à l’observation directe,
mais seulement par la représentation que l’on en donne. C’est la mission fondamentale de la
comptabilité que de fournir cette « représentation de la firme » qui servira de base aux
appréciations sur la firme elle-même et aux décisions des acteurs concernés ».
La mission de contrôle exercée peut se définir selon Guillaume et Colin (2008) comme une
activité qui « permet de s’assurer que les ressources employées par une structure publique le
sont dans le cadre des normes en vigueur et conformément aux finalités votées par le
Parlement ». Le champ d’intervention des inspecteurs/auditeurs recouvrent aussi des missions
d’inspection dont l’objet, toujours selon Guillaume et Colin (2008), « est généralement de
s’assurer du respect par des opérateurs externes des règles en vigueur et du bon emploi des
ressources allouées par la puissance publique ». Par ailleurs, pour Pochet (2009), « l’audit
peut être considéré comme un mécanisme de la gouvernance d’entreprise à part entière en ce
qu’il contribue à la transparence de la performance financière des dirigeants. Pour assurer
cette fonction correctement, il doit cependant satisfaire des critères de qualité ».
Sur le plan conceptuel, la qualité d’audit externe constitue un concept complexe et
multidimensionnel qui a été largement abordée dans la littérature. Palmrose (1988) envisage
le concept de qualité d’audit en termes du niveau d’assurance. De leur coté, Titman et
Trueman (1986) et Beatty (1989) apprécient la qualité d’audit en termes de niveau
d’exactitude, de précision et de fiabilité des états financiers. Wallace (1980) perçoit la qualité
d’audit en termes de sa capacité à réduire le bruit au niveau de l’information financière
divulguée au public. DeAngelo (1981) définit la qualité d’audit comme « l’appréciation par
le marché de la probabilité jointe qu’un auditeur donné va simultanément découvrir une
infraction dans le système comptable de l’entreprise cliente et rendre compte de cette
infraction ». En se basant sur la définition de DeAngelo (1981), nous pouvons affirmer que la
qualité d’audit dépend essentiellement de deux facteurs à savoir la compétence de l’auditeur
qui détermine sa capacité à découvrir les éventuelles anomalies présentes dans les états
financiers et son indépendance qui conditionne sa capacité à révéler les anomalies
découvertes (Ayadi, 2013).
Cette définition de DeAngelo, qui sert de fil directeur à la présente étude, a été reprise dans
plusieurs études traitant de la qualité de l’audit. Selon Pigé (2011), les recherches associées à
5
cette définition considèrent que la qualité de l’audit est fonction à la fois de la compétence et
de l’indépendance de l’auditeur.
Ces deux déterminants de compétence et d’indépendance sont la traduction de
caractéristiques complexes et multidimensionnelles formalisées par la doctrine et reprises par
les différents ordres professionnels. Il est nécessaire de définir les réalités qu’ils recouvrent
afin de mieux cerner les éléments qui ont servi de base à l’élaboration du questionnaire
administré aux différentes catégories d’auditeurs des structures publiques du Bénin.
1.1. La compétence de l’auditeur
Selon Pigé (2011) « … deux principales variables conditionnent la compétence de
l’auditeur. Il s’agit de la compétence des personnes qui composent l’équipe d’audit, de
l’associé à l’assistant, et de la compétence du cabinet d’audit en matière technologique, c'est-
à-dire sa capacité à disposer de ressources nécessaires pour appréhender et contrôler le
système d’information de l’entreprise auditée ». On peut comprendre que c’est l’ensemble du
dispositif destiné à l’audit qui doit rassurer les parties prenantes sur sa capacité à exploiter
judicieusement les données disponibles afin d’émettre une opinion qui crédibilise les états
financiers.
Par ailleurs, le code de déontologie de la Compagnie Nationale des Commissaires aux
Comptes (CNCC) définit en son article 7 le concept de compétence du commissaire aux
comptes comme suit : « Le commissaire aux comptes doit posséder les connaissances
théoriques et pratiques nécessaires à l’exercice de ses missions. Il maintient un niveau élevé
de compétence, notamment par la mise à jour régulière de ses connaissances et la
participation à des actions de formation. Le commissaire aux comptes veille à ce que ses
collaborateurs disposent des compétences appropriées à la bonne exécution des tâches qu’il
leur confie et à ce qu’ils reçoivent et maintiennent un niveau de formation approprié.
Lorsqu’il n’a pas les compétences requises pour réaliser lui-même certains contrôles
indispensables à l’exercice de sa mission, le commissaire aux comptes fait appel à des experts
indépendants de la personne ou de l’entité pour les comptes de laquelle leur concours est
requis ».
Au-delà, selon Hottegindre et Lesage (2009), les facteurs qui infuencent la compétence de
l’auditeur peuvent être résumés comme suit : la formation initiale de l’auditeur, l’expérience
de l’auditeur, la taille du cabinet, la structure du cabinet, la durée du mandat. En effet, la
synthèse des diverses contributions académiques étudiées leur a permis de retenir qu’une
formation solide est un gage de compétence (Hilaire, 1989 ; Scheid, 2000 ; Datin, 2006 ).
Ensuite, ils relèvent que les auditeurs expérimentés trouvent plus d’erreurs que les
inexpérimentés (Libby et Frederick, 1990 ; Libby et al., 1987 ; Ismail et Trotman, 1995) et
que la taille du cabinet inflence positivement la compétence de l’auditeur en ce sens qu’un
auditeur d’un grand cabinet devrait être plus souvent confronté à une même situation (Emby,
Etherington, 1996). Quant à la structure du cabinet, elle peut avoir un impact positif (Cushing
et Lobbecke, 1986 ; Chemingui et Pigé, 2004 ; Icerman et Hillison, 1991) ou neutre
(Tuntiwongpiboon et Dugan, 1994) sur la compétence de l’auditeur. Enfin, ces deux auteurs
relèvent qu’il existe une durée optimum qui permet d’avoir une connaissance spécifique du
client (Carey et Simnett, 2006).
Pour Prat dit Hauret (2003), « les normes professionnelles recommandent habituellement
à l’auditeur d’être à la fois compétent et indépendant, c’est-à-dire que l’auditeur doit être
d’une part, capable, doté de bonnes connaissances, suffisamment expérimenté pour réaliser
de manière satisfaisante l’ensemble des diligences d’audit et d’autre part, être mentalement
capable d’analyser les comptes et d’en rendre compte dans son rapport de façon non biaisée
6
et sans causer de préjudice aux tiers. La compétence est le niveau d’expertise suffisant pour
atteindre les objectifs d’audit explicités ».
Les différents facteurs qui caractérisent la compétence de l’auditeur influeraient mieux sur
la qualité perçue de l’audit si l’auditeur est capable de résister aux pressions de toutes sortes,
afin d’émettre son opinion tirée de l’exploitation des comptes en toute indépendance.
1.2. L’indépendance de l’auditeur
D’après DeAngelo (1981), « les services d’audit sont recherchés comme dispositifs de
surveillance en raison des conflits d'intérêts potentiels entre les propriétaires et les
directeurs, ainsi que ceux entre les différentes catégories de tenants de titres voir Watts
(1977), Watts et Zimmerman (1981), et Benston (1980) » . Pour ce faire, les auditeurs se
doivent d’être compétents et indépendants. Selon Prat dit Hauret (2003), l’indépendance et la
compétence sont intrinsèquement liées. Au-delà, l’indépendance présentée comme la capacité
à résister à des pressions lors de la mission d’audit se fonde pour lui sur la compétence,
présentée comme la capacité à réaliser de manière satisfaisante la mission.
Par ailleurs, le code de déontologie de la CNCC définit en son article 5 la notion
d’indépendance comme suit : « Le commissaire aux comptes doit être indépendant de la
personne ou de l’entité dont il est appelé à certifier les comptes. L’indépendance du
commissaire aux comptes se caractérise notamment par l’exercice en toute liberté, en réalité
et en apparence, des pouvoirs et des compétences qui lui sont conférés par la loi ».
Au-delà Prat dit Hauret (2003) souligne l’existence de deux composantes dans l’analyse de
l’indépendance de l’auditeur : l’indépendance perçue par les utilisateurs et l’indépendance
réelle. L’indépendance perçue peut être définie comme « tous les moyens mis en œuvre pour
renforcer l’indépendance des auditeurs et la perception que peuvent en avoir l’ensemble des
parties prenantes de la gouvernance des entreprises ». Selon lui, divers facteurs explicatifs de
l’indépendance perçue par les utilisateurs sont liés aux caractéristiques individuelles de
l’auditeur (expérience, compétence, sensibilité éthique), aux caractéristiques du cabinet
d’audit (réalisation de missions de conseil par des co-associés, taille du cabinet, réputation du
cabinet, revue du dossier par un co-associé, rotation des associés sur le dossier, charte
éthique), aux relations auditeur - audité (situation financière de l’audité, mode de
rémunération de l’auditeur, appels d’offres, concurrence), aux mécanismes incitatifs externes
(contrôle de qualité externe, mise en place de comités d’audit, sanctions judiciaires, sanctions
professionnelles, flexibilité des règles comptables, durée du mandat). L’indépendance réelle
« correspond au comportement effectif et à la capacité réelle de l’auditeur à résister aux
pressions des dirigeants pour exprimer son opinion en âme et conscience. ». Soulignons que
la CNCC incite les auditeurs à développer tant l’indépendance perçue que l’indépendance
réelle.
Pigé (2011) précise par ailleurs la nécessité de distinguer l’indépendance individuelle de
l’auditeur et l’indépendance du cabinet. Il rejoint l’analyse de Prat dit Hauret (2003) en
mettant en évidence au niveau de l’indépendance individuelle, l’indépendance intrinsèque (ou
réelle) qui comprend « à la fois l’éthique de la personne, c’est-à-dire les règles de
comportement, et le refus des situations où l’auditeur, en tant que personne, se trouverait pris
dans des intérêts conflictuels » et l’indépendance perçue ou indépendance apparente.
Concernant l’indépendance du cabinet, Pigé (2011) précise qu’elle repose à la fois sur
l’intérêt objectif du cabinet et les processus de contrôle interne mis en place. Pour De Angelo
(1981), la taille constituerait une dimension de l’indépendance des cabinets. Pour lui, les
grands cabinets d’audit seraient plus indépendants que les petits car ils risqueraient de perdre
leur réputation et d’importants revenus potentiels en cas de comportement de dépendance. Ce
point de vue est néanmoins constatable, car comme le suggère Prat dit Hauret (2003), « la
7
disparition du cabinet Arthur Andersen semble infirmer l’hypothèse faite selon laquelle les
grands cabinets seraient plus indépendants que les petits ».
Figure 1 : Les dimensions du concept d’indépendance de l’auditeur
2. Contexte et méthodologie de la recherche
2.1. Contexte de l’étude
2.1.1. Présentation des institutions d’audit et de contrôle
Les activités d’audit et de contrôle des structures publiques (administrations, entreprises,
offices, …..) du Bénin relèvent de plusieurs institutions dont la plus ancienne est l’Inspection
Générale des Finances (IGF) créée par décret n° 7-PR-MFP du 15 janvier 1963. Par la suite,
des organes d’inspection sectoriels ont été créés par département ministériel afin de mieux
couvrir le champ de l’audit, de l’inspection et du contrôle de l’action publique au Bénin.
Les évolutions récentes, précisément des dix dernières années, ont été marquées
principalement par une réorganisation des organes de contrôle et d’inspection de
l’administration publique intervenue par décret n° 2006-627 du 4 décembre 2006. Dans ce
cadre, deux ordres d’organes de contrôle et d’inspection ont été créés à savoir, d’une part,
ceux à compétence nationale et d’autre part, ceux à compétence sectorielle.
Les organes de contrôle et d'inspection à compétence nationale sont :
- l'Inspection Générale d'Etat (IGE) ;
- l’Inspection Générale des Financés (IGF) ;
- l’Inspection Générale des Services et Emplois Publics (IGSEP).
Les organes de contrôle et d'inspection à compétence sectorielle sont les Inspections
Générales de Ministère (IGM) et les Inspections Générales des Services des Administrations
financières (IGS).
Indépendance de l'auditeur
Indépendance individuelle
Indépendance perçue
Indépendance intrinsèque
Indépendance collective
Intérêt objectif du cabinet
Processus de contrôle interne
8
A cette architecture, se sont greffés les auditeurs internes du gouvernement (AIG) placés
auprès des principales entreprises publiques et nommés, sur proposition de l’Inspection
Générale d’Etat, en conseil des ministres du 8 juillet 2011.
C’est cette structuration institutionnelle qui a prévalu jusqu’à la dissolution de l’Inspection
générale d’Etat le 20 juin 2015 et son remplacement par le Bureau de l’Auditeur Général
(BAG) créé par décret n° 2015-394 du 20 juillet 2015 et dissoute à son tour par le conseil des
ministres du 28 avril 2016.
En marge des organes précédemment énumérés, des commissaires aux comptes assurent
l’audit légal au sein des entreprises publiques conformément aux dispositions légales et
règlementaires en vigueur.
2.1.2. Finalités des acteurs de l’audit au Bénin
Le maillage des structures publiques, à tout le moins, semble être assuré par l’existence de
plusieurs organes d’audit et de contrôle dont les principales missions sont destinées à prévenir
et détecter les fraudes et autres types d’infractions, ainsi qu’à s’assurer de la gestion
économique des ressources publiques. En effet, l’un des enjeux importants de l’emploi des
ressources publiques consiste à s’assurer du respect des normes édictées conformément au
vote des institutions politiques légales et règlementaires. On peut comprendre les créations de
plusieurs organes d’audit et de contrôle de l’action publique en général et de la gestion des
ressources en particulier à la lumière des perspectives utilitaristes et à la nécessité d’assurer la
fonction d’interposition et de crédibilisation de la conduite de l’action publique.
Par ailleurs, la restructuration intervenue en 2006, au lendemain d’un changement politique
au sommet de l’Etat s’inscrit dans une logique d’amélioration de l’efficacité en matière
d’audit et de contrôle des structures publiques et marque une forme de redistribution de
pouvoirs, particulièrement entre l’inspection générale des finances et l’inspection générale
d’Etat. En effet, l’IGE se voit rattachée au Président de la République et est chargée d’assurer
la coordination des activités de l’IGF et de l’IGSEP qui sont rattachées respectivement au
ministre chargé des finances et au ministre chargé de la fonction publique.
Cette restructuration est aussi particulièrement caractérisée par la création des inspections
générales des ministères (IGM) qui sont rattachées à chaque ministère, mais dont les activités
sont coordonnées par l’IGE. Ces organes sont toujours opérationnels malgré la dissolution de
l’IGE. Ils exercent principalement des missions d’audit et de contrôle relevant de leur secteur
spécifique.
De même, les nominations d’auditeurs internes du gouvernement (AIG) intervenues
répondent à des préoccupations d’efficacité de l’audit et du contrôle des entreprises publiques.
En effet, compte tenu de la persistance de la mauvaise gestion dans plusieurs entreprises
publiques, il est apparu à l’IGE d’initier ce mouvement institutionnel en faisant nommer des
AIG auprès des entreprises jugées sensibles. Ces AIG, tous intendants militaires, avaient pour
mission d’alerter le gouvernement des cas de dérives dans le management desdites
entreprises. Cette dernière expérience a tourné court au bout de 18 mois d’opérationnalisation
sans évocation des raisons précises.
Chemin faisant, l’affaire PPEA 2 a été révélée, emportant au passage l’IGE, implicitement
mise en cause. Il a été créé à sa place le BAG qui a été chargé d’une mission générale d’audit,
de contrôle et d’investigation du fonctionnement normal et régulier de l’administration
publique. Cette innovation institutionnelle qui s’apparente beaucoup plus à une reproduction
institutionnelle se destinait à plus d’efficacité dans l’audit et le contrôle de l’action publique.
Les fonctions de cette dernière institution ont pris fin dès les premiers jours qui ont suivi le
nouveau changement intervenu au sommet de l’Etat en avril 2016.
9
Aussi, le dispositif d’audit et de contrôle des structures publiques du Bénin est renforcé par
les commissaires aux comptes qui sont tous experts comptables diplômés. Ils sont désignés
pour assurer l’audit légal des entreprises publiques conformément aux dispositions légales et
règlementaires. Il est possible d’inscrire leurs interventions dans une logique fonctionnelle
compte tenu de la nécessité de disposer d’auditeurs compétents et indépendants pour garantir
la qualité d’audit des entreprises publiques.
2.2. Méthodologie de la recherche
Dans le cadre de la présente étude, nous nous focalisons sur l’évaluation de la capacité
du dispositif d’audit à assurer un audit de qualité. A cet effet, nous questionnons la
compétence et l’indépendance des auditeurs dédiés à l’audit et au contrôle des structures
publiques. Pour atteindre notre objectif de recherche nous utilisons une démarche
empirique fondée sur un questionnaire élaboré à partir des déterminants de compétence et
d’indépendance présentées par Pigé (2011) et qui procèdent de la définition de la qualité
d’audit de DeAngelo en 1981.
Cette méthode de collecte de l'information est déclarative. Les réponsss obtenues ne
peuvent donc pas être considérées comme complètement fiables même si l'anonymat rend
les réponses cédibles. Cette limite n'est pas fondamentalement gênante pour une étude à
caractère exploratoire mais il conviendra ultérieurement d'approfondir cette première
étude par une méthodologie de collecte d'information plus solide.
Ce questionnaire est structuré en trois grandes parties : 1) données sociologiques ; 2)
compétence de l’auditeur ; 3) indépendance de l’auditeur.
La première partie permet de recueillir les données sur le sexe, l’âge, l’employeur,
l’intitulé du poste, l’ancienneté de service, la localisation du service, le nombre d’employés de
la structure d’audit.
La deuxième partie permet de collecter les informations sur le diplôme universitaire, le
diplôme en audit, le nombre d’heures de formation par an, le travail en équipe, les diplômes
des collaborateurs, le nombre d’heures de formation par an des collaborateurs, le diplôme en
informatique, l’utilisation des compétences en informatique, le niveau des compétences
utilisées en informatique, l’utilisation des compétences en droit des contrats, le niveau des
compétences utilisées en droit des contrats, l’utilisation des compétences en expertise
financière, le niveau des compétences utilisées en expertise financière, la spécialisation en
droit comptable de l’OHADA, la spécialisation en normes comptables internationales, la
spécialisation en finances publiques, la spécialisation en évaluation du contrôle interne, la
spécialisation en audit des risques.
La troisième partie nous permet de recueillir les données sur la soumission de la
corporation à un code d’éthique, le respect du code d’éthique, les conflits d’intérêt, les
menaces sur l’objectivité, les mesures de sauvegardes, la détention de titres de participation,
l’assurance que les collaborateurs ne participent pas aux missions dans des structures au sein
desquelles un membre de leur famille travaille ou est en relation directe, l’approbation de
montages comptables et financiers discutables, la qualité du contrôle interne du cabinet ou de
la structure d’audit, l’exercice de missions de conseil et d’audit dans une même structure,
l’impact sur l’opinion de l’exercice simultané de missions de conseil et d’audit dans une
10
même structure, l’efficacité de l’audit en cas d’exercice simultané de missions de conseil et
d’audit dans une même structure
Le questionnaire a fait l’objet d’un pré-test auprès d’un membre de chaque groupe
d’auditeurs visé (commissaires aux comptes, ex-inspecteurs d’Etat ou ex-auditeurs d’Etat,
inspecteurs des finances, ex-auditeurs internes du gouvernement, inspecteurs généraux des
ministères).
Par la suite, son administration s’est faite du 15 juillet 2016 au 15 août 2016, d’abord par
une diffusion sur le site internet de l’ordre des experts comptables et comptables agréés
(OECCA) du Bénin et sur la plateforme de discussions du groupe de réflexion pour un
enseignement comptable adéquat (GRECA) avec les appuis et autorisations des présidents
desdites institutions. Le GRECA regroupe essentiellement des professionnels de la
comptabilité, du contrôle de gestion, de l’audit et de la fiscalité qui se consacrent aussi à
l’enseignement desdites matières. Plusieurs membres du GRECA sont assistants, chefs de
mission dans des cabinets et structures d’audit. La seconde étape a consisté à contacter par
téléphone (souvent plusieurs relances) les auditeurs intéressés.
Ainsi, 48 commissaires aux comptes, 12 ex-inspecteurs d’Etat ou ex-auditeurs d’Etat, 11
inspecteurs des finances, 7 ex-auditeurs internes du gouvernement, 18 inspecteurs généraux
des ministères et 32 membres du GRECA ont pu être joints par téléphone avant que le
questionnaire leur soit administré individuellement par voie électronique (mail et/ou
whatsapp). En retour, nous avons recueilli 103 réponses.
Les caractéristiques des répondants, leur effectif en activité, le nombre de réponses
obtenues et les proportions correspondantes sont présentés dans le tableau suivant.
Tableau 1 : Données de l’échantillon
Population d’auditeurs Effectif Nombre de
répondants
Proportion
Commissaires aux
comptes
114 32 28,07%
Ex-Inspecteurs d’Etat 14 12 85,71%
Inspecteurs généraux
des ministères
20 18 90,00%
Inspecteurs des finances 11 9 81,81%
Auditeurs internes du
gouvernement
14 7 50,00%
Assistants Auditeurs
Membres du GRECA
46 25 54,34%
Total 219 103 47,03%
Source : Auteurs
La principale limite méthodologique de notre approche réside dans l’utilisation d’un
questionnaire pour évaluer la compétence et l’indépendance des auditeurs. Malgré la
construction du questionnaire sur la base d’items issus de la littérature et son amélioration sur
la base du pré-test, notre étude reste soumise à un fort risque de biais de désirabilité sociale.
En effet, d’après Bowling (2005), les études par entretiens (directifs, semi-directifs, ouverts)
donnant lieu à une interaction sociale peuvent conduire les répondants à tenir compte des
normes sociales dans la formulation de leurs réponses. Ce phénomène est fortement probable
dans le cas des auditeurs qui sont soumis à un impératif « d’indépendance perçue ». Ce biais
peut conduire à une majoration des réponses conformes aux attentes sociales, et à une
11
minoration des réponses négativement perçue au plan social. Plusieurs méthodes existent pour
minorer cet effet de désirabilité sociale : l’assurance de la condidentialité et de l’anonymat, la
confrontation des données avec des faits réels, le questionnement indirect, la corrélation des
réponses avec des indicateurs des indicateurs de désirabilité sociale, le questionnaire aléatoire
(Bowling 2005). Dans le cadre de la présente étude, première du genre dans le contexte
béninois, nous avons utilisé l’assurance de l’anonymat pour minorer les riques de désirabilité
sociale. Par ailleurs, la synthèse de Bowling (2005) suggère que l’utilisation d’un
questionnaire auto-administré électronique (par Internet) réduit les biais de désirabilité sociale
par rapport aux enquêtes en face-à-face et par téléphone.
En définitive, l’assurance de l’anonymat et l’administration du questionnaire par voie
électronique sont les outils méthodologiques mobilisés pour minorer les risques de désirabilité
sociale associés à notre étude.
3. Résultats de l’étude empirique
3.1. Les caractéristiques de l’échantillon
L’échantillon des répondants est composé de 97 hommes (94%) et 6 femmes (6%). Il s’agit
là d’un échantillon largement masculin. Est-il représentatif de la population des auditeurs au
Bénin ? Il semblerait que la profession d’auditeur soit encore largement masculine au Bénin.
Cet aspect mériterait d’être étudié de manière plus spécifique dans des travaux ultérieurs.
Au-delà, 8 répondants ont moins de 30 ans (8%), 24 ont entre 30 et 39 ans (23%), 41 entre
40 et 49 ans (40%) et 30 répondants ont 49 ans et plus (29%). Il s’agit d’un échantillon dont
92% des individus ont au moins 30 ans. Cela traduit une certaine maturité de l’échantillon.
Cela est par ailleurs confirmé par l’ancienneté puisque 20% des répondants occupent leur
poste depuis moins de 5 an. 17% occupent leur poste depuis 5 à 9 ans, 45% depuis 10 à 19
ans, 17% depuis 19 ans et plus.
Concernant de manière plus spécifique les postes, 45% des répondants exercent leur
activité d’audit et de contrôle dans la fonction publique, 9% dans une organisation publique,
1% dans une organisation internationale, 12% dans une organisation privée marchande, 2%
dans une organisation privée non marchande et 32% comme professionnels libéraux
(commissaires aux comptes).
La grande majorité des répondants est localisée à Cotonou (86%), exerce principalement
dans des entités de moins de 10 collaborateurs (43%) et des entités entre 10-19 collaborateurs
(29%). Par opposition, les répondants localisés hors de Cotonou (14%) exercent
principalement dans des structures de plus grande taille ( 79% dans de organisations de 20-50
collaborateurs).
3.2. Les compétences des auditeurs béninois
Dans le cadre de cette étude, nous nous sommes intéressés dans un premier temps aux
compétences des auditeurs béninois.
Concernant de manière générale le niveau d’étude des répondants, on note un niveau assez
élevé puisque seulement 2% des répondants déclarent un diplôme universitaire inférieur à
BAC+5. Le niveau des commissaires aux comptes (Bac +8) et et le niveau minimum de
recrutement des inspecteurs et auditeurs (Bac + 5 au moins) favorisent ce résultat. Toutefois,
ils sont près du quart de l’échantillon (23%) à déclarer ne pas avoir un diplôme en audit, dont
majoritairement des répondants de niveau Bac+5 (75%).
Tableau 2: Niveau universitaire et diplômation en audit des répondants
Diplôme en audit Total général
12
Diplôme Universitaire Non % Oui % N %
Bac + 3 2 0,08 0 0,00 2 0,02
Bac + 5 18 0,75 52 0,66 70 0,68
Bac+6 2 0,08 2 0,03 4 0,04
Bac + 8 2 0,08 25 0,32 27 0,26
Total général N 24 79 103
% 0,23 0,77 1
Source : Auteurs
Il ressort de ces données qu’en moyenne, les auditeurs béninois ont un niveau universitaire
Bac+5 et un diplôme en audit. Par ailleurs, seulement 18% des répondants déclarent ne pas
faire de formation de mise à niveau en audit. Ils sont 69% à déclarer plus de 10 heures de
formation en audit par an.
Concernant le travail en équipe, 92% des répondants déclarent le faire. Parmi ces 92% (95
répondants), 59% déclarent travailler avec des collaborateurs diplômés en audit et 58% de ces
collaborateurs suivent au moins 10 heures de formation en audit par an.
En définitive, concernant la formation en audit, même si les auditeurs répondants sont
majoritairement diplômés en audit, le taux de diplômation en audit des collaborateurs est plus
bas (59% par rapport à 77%) et le taux de formation annuel supérieur à 10 heures aussi (69%
contre 58%).
Au-delà, les répondants déclarent aussi mobiliser des compétences en informatique (83%),
en droit des contrats (56%), en expertise financière (52%) dans le cadre de leurs missions. Ils
sont aussi 50% à détenir une spécialisation en droit comptable de l’OHADA, 42% une
spécialisation en normes internationales, 63% une spécialisation en finances publiques, 70%
une spécialisation en évaluation du contrôle interne, 57% une spécialisation en audit des
risques.
Tableau 3 : Spécialisations déclarées par les répondants
Spécialisation Oui Non Total
Droit comptable OHADA 51 0,50 52 0,50 103
Normes internationales 43 0,42 60 0,58 103 Finances publiques 65 0,63 38 0,37 103
Evaluation du contrôle interne 72 0,70 31 0,30 103
Audit des risques 59 0,57 44 0,43 103 Source : Auteurs
3.3. L’indépendance des auditeurs béninois
Concernant l’indépendance, nous avons interrogé les auditeurs sur leur éthique et la
gestion des conflits d’intérêts, ainsi que sur certains comportements généralement considérés
comme inadéquats pour un auditeur.
Ainsi, 84% des répondants déclarent appartenir à une corporation soumise au respect d’un
code d’éthique. Sur ces 84% (87 répondants sur 103), 70% déclarent toujours respecter les
préconisations du code d’éthique. 28% déclarent respecter souvent ces préconisations.
Par ailleurs, en cas de conflits d’intérêts, seulement 39% des auditeurs concernés sur les 56
répondants déclarent avoir renoncé à la mission. Parmi ces 56 répondants ayant été confrontés
à un conflit d’intérêt, 92% déclarent n’avoir pas été impactés dans le jugement d’audit final.
13
A propos des situations ayant menacé leur objectivité, les auditeurs concernés sont 97% à
avoir mis en œuvre des mesures pour neutraliser les dites menaces. Aucun auditeur de
l’échantillon n’a exercé des missions dans une entreprise dans laquelle il détenait des titres de
participations. Enfin, ils ne sont que 29% à s’assurer que leurs collaborateurs ne participent
pas à des missions dans des organisations avec lesquelles ils ont des liens familiaux ou autres.
En définitive, sur la base des données collectées, il ressort qu’en moyenne les auditeurs
béninois semblent assez respectueux des codes de déontologie. Toutefois, notons le fait qu’en
cas de conflit d’intérêts, ils sont peu nombreux à se désister. Par ailleurs, les liens de leurs
collaborateurs avec les organisations auditées sont peu scrutés.
Nous les avons aussi interrogés concernant certains comportements généralement
désapprouvés par le code de déontologie.
Globalement, les répondants déclarent adopter un comportement indépendant dans leurs
missions. Ainsi, ils sont 91% à n’avoir jamais approuvé des comptes sur demande de
l’organisation auditée. 98% déclarent n’avoir jamais approuvé des comptes par crainte et 86%
n’avoir jamais approuvé des comptes suite à des pressions hiérarchiques. Toutefois, ils sont
32% à exercer simultanément des missions d’audit et de conseil de manière plus ou moins
occasionnelle. Ils déclarent à 84% que cette double relation d’auditeur et de conseiller
n’influence pas leur opinion sur les comptes.
Tableau 4 : Les auditeurs béninois face à des comportements inadaptés
Eléments Jamais Parfois Souvent Toujours Avez-vous déjà approuvé des comptes ou des montages
comptables et financiers discutables sur demande d’une
entreprise auditée ? 94 8 1 0
Avez-vous déjà approuvé des comptes ou des montages
comptables et financiers discutables par crainte de perdre
un mandat en cas de refus d’approbation ? 101 2 0 0
Avez-vous déjà approuvé des comptes ou des montages
comptables et financiers discutables sur demande de votre
hiérarchie ? 89 8 6 0
Assurez-vous une ou des missions de conseil pour les
structures dans lesquelles vous exercez une mission
d’audit ? 70 20 5 8
En cas d’exercice simultané de missions de conseil et
d’audit au sein d’une même structure, votre opinion sur
les comptes en est-elle affectée ? 87 14 1 1
Source : Auteurs
4. Discussion
Face aux mutations régulières des institutions principales d’audit des structures publiques
du Bénin, plusieurs questions se posent quant à leurs justifications. La nature complexe des
structures publiques, la pluralité des missions qui leurs sont assignées, le mode de désignation
de leurs dirigeants, l’environnement dans lequel elles évoluent et les exigences de perfomance
attendue d’elles nécessitent de disposer d’une gouvernance adéquate. Afin de remplir
convenablement leurs missions, des ressources de toutes natures sont mises à leur disposition.
Les gestionnaires desdites ressources ont l’obligation de rendre compte au public de leur
gestion. La crédibilisation des informations fournies est assurée par les auditeurs dédiés à
cette mission. Dans le cadre cette recherche, nous nous sommes intéressés à la qualité du
14
dispositif d’audit et de contrôle en place. Pour ce faire, il nous est apparu nécessaire de
questionner la compétence et l’indépendance des auditeurs.
Les résultats de notre enquête suggèrent trois principaux types de commentaires. Le
premier point porte sur le contexte, les caractéristiques de l’échantillon et la méthodologie de
recherche. Le second est relatif à la compétence des auditeurs et le troisième traite de
l’indépendance des auditeurs.
Contexte, caractéristiques de l’échantillon et méthodologie de recherche
A notre connaissance, ce type de recherche sur l’audit constitue une première au Bénin. En
effet, en Afrique en général et au Bénin en particulier, les recherches en comptabilité, contrôle
et audit sont encore à leur début. Ceci peut, entre autres, expliquer l’intérêt manifesté par
plusieurs acteurs de l’audit à notre projet. Aussi, il est nécessaire de relever que les
professionnels de l’audit des structures publiques du Bénin sont assez peu nombreux, environ
250 actifs toutes catégories confondues, et sont souvent très occupés par leurs charges. Ils
voyagent beaucoup, aussi bien à l’intérieur du Bénin que vers les pays étrangers, ce qui les
rend souvent peu accessibles. Ceci justifie les relances et appels incessants effectués pour les
joindre et les inciter à prendre 10 à 15 minutes de leur temps précieux pour répondre au
questionnaire soumis à leur attention.
Ensuite, sur un nombre d’auditeurs des structures publiques avoisinant 250, 103 personnes
ont répondu au questionnaire. Les résultats semblent montrer que la profession d’auditeur se
compose essentiellement d’hommes (94% contre 6%). N’intéresse-t-elle pas les femmes qui
sont pourtant inscrites en grand nombre dans les filières d’études en comptabilité, contrôle et
audit ? Ce résultat mérite d’être étudié et analysé de manière approfondie par ailleurs.
Par ailleurs, concernant l’écueil méthodologique qu’est le risque de désirabilité sociale, le
choix d’un questionnaire auto-administrée et électronique (whatsapp / mail) et l’assurance de
l’anonymat permettent de le neutraliser quelque peu. Toutefois, il semble nécessaire sur les
questions étudiées de mobiliser par ailleurs d’autres outils de collecte des données dans le but
de consolider les connaissances acquises
Compétence des auditeurs
Concernant la compétence des auditeurs, nous l’avons évaluée ici par la formation de base,
les remises à niveau annuelles et les capacités technologiques. Selon Prat dit Hauret (2003), la
compétence est le niveau d’expertise suffisant pour atteindre les objectifs d’audit explicités. Les résultats de notre enquête font apparaître que les auditeurs des structures publiques du
Bénin ont des formations de base de niveau relativement élevé. Environ 77% ont un diplôme
en audit de niveau Bac + 5 au moins. Une partie appréciable de ce groupe (24%) possède, en
plus du diplôme en audit, un diplôme universitaire de niveau Bac + 5 au moins. Une
formation solide permet d’être compétent (Hilaire, 1989 ; Scheid, 2000 ; Datin, 2006) cités
par Hottegindre et Lesage (2009). Sur cette base, les résultats obtenus suggèrent une
appréciation positive de la compétence des auditeurs des structures publiques du Bénin.
Par ailleurs, 69% des répondants déclarent suivre plus de 10 heures de formation en audit
par an. Il est nécessaire de comprendre que les obligations en matière de formations imposées
aux commissaires aux comptes par l’OECCA-BENIN pour se maintenir au tableau
concourent favorablement à renforcer leurs compétences. Il en est de même des autres
institutions d’audit (IGE, BAG, IGF, IGM, AIG) qui organisent chaque année plusieurs
séminaires de formation destinés à renforcer les capacités d’intervention de leurs membres.
Aussi, la proportion de collaborateurs (58%) qui suivent au moins 10 heures de formation
par an contribue à renforcer la compétence des équipes d’audit. Toutefois, on peut
15
globalement s’interroger sur les justifications à apporter aux cas des auditeurs et
collaborateurs qui suivent moins de 10 heures de formation et surtout qui n’en suivent pas du
tout par an. Ne constituent-ils pas des maillons faibles des équipes d’audit et susceptibles, de
ce fait, d’engendrer la mauvaise qualité des travaux d’audit ? Une évaluation de la qualité du
contrôle interne des cabinets permettrait de mieux répondre à cette interrogation. En effet,
selon Causse et Ebondo Wa Mandzila (2013), le contrôle qualité des dossiers de travail vise à
s’assurer du respect des diligences et de l’efficacité de l’organisation.
De même, les résultats de notre enquête révèlent que les auditeurs mobilisent
progressivement les compétences technologiques nécessaires et s’approprient les normes
requises pour la conduite d’un audit de qualité. Il reste que des efforts de formation doivent
être faits, particulièrement en matière de normes internationales, de droit comptable OHADA
et d’audit des risques pour renforcer la compétence des auditeurs non formés.
Par la suite, deux principales caractéristiques de l’échantillon méritent d’être appréciées à
la lumière des impacts qu’elles sont susceptibles d’avoir sur la compétence des auditeurs.
En premier lieu la maturité de l’échantillon (80% des répondants occupent leur poste
depuis au moins 5 ans). En effet, les auditeurs expérimentés trouvent plus d’erreurs que les
inexpérimentés (Libby et Frederick, 1990 ; Libby et al., 1987 ; Ismail et Trotman, 1995) cités
par Hottegindre et Lesage (2009). On peut comprendre que la maturité de l’échantillon est un
facteur à même d’impacter positivement la compétence des auditeurs.
En second lieu la taille des cabinets ou structures d’audit. 86% des professionnels exercent
dans des entités de moins de 10 collaborateurs. On en déduit que les institutions d’audit des
structures publiques du Bénin sont majoritairement de petite taille. Or, selon Emby &
Etherington (1996) cités par Hottegindre et Lesage (2009), un auditeur d’un grand cabinet
devrait être confronté plus souvent à une même situation. L’auditeur aux prises régulièrement
à la même situation devrait déceler plus aisément les erreurs ou omissions. Les cabinets de
grande taille, au sein desquels les procédures de revue des dossiers par un co-associé sont
formellement établies et mises en œuvre entretiennent la compétence des auditeurs. Ce qui est
susceptible de faire défaut à la grande majorité des institutions d’audit au Bénin qui sont de
petite taille.
Indépendance des auditeurs
Sur l’indépendance des auditeurs, nos observations et commentaires se concentrent sur
trois axes à savoir, l’indépendance des auditeurs personnes physiques, l’indépendance du
cabinet ou de la structure d’audit et les activités de conseil.
Indépendance des auditeurs personnes physiques
En premier lieu, les résultats de notre enquête révèlent que 84% des auditeurs
appartiennent à une corporation soumise au respect d’un code d’éthique que 70% parmi eux
déclarent toujours respecter et que 28% déclarent souvent respecter. Ces résultats constituent
des signes positifs car l’adoption de comportements éthiques traduit une indépendance
intrinsèque et est de nature à rassurer les parties prenantes sur la capacité de l’auditeur à
résister aux pressions inhérentes à sa mission. Le niveau d’indépendance est fortement corrélé
à son niveau d’éthique puisque l’auditeur est libre d’émettre le jugement qu’il désire (Prat,
2000 ; Tsui et Gul, 1996 ; Shafer et al., 2001 cités par Hottegindre et Lesage 2009). Toutefois,
le fait de ne pas avoir la possibilité d’observer directement les auditeurs quand ils déroulent
leur démarche d’audit conduit à nuancer ces propos dans la mesure où nous n’avons pas une
assurance absolue du respect des codes d’éthique. En effet, Holmquist (1993 cité par Prat dit
Hauret 2003), se pose la question de l’efficacité des codes d’éthique et craint qu’ils ne soient
des guides que pour les personnes qui possèdent déjà un sens moral développé.
16
En second lieu, les résultats de notre enquête montrent principalement que 92% des
auditeurs confrontés à des conflits d’intérêt (56 répondants) n’ont pas été impactés par ces
situations dans leur jugement. Aussi 47 répondants déclarent n’avoir pas été aux prises à un
conflit d’intérêt. Ces résultats induisent une perception positive de l’indépendance des
auditeurs dans la mesure où ceux qui sont en situation déclarent ne pas privilégier leurs
propres intérêts au détriment de la qualité de l’audit. Toutefois, on peut observer que dans un
contexte où presque tout le monde se connait, entretenant des liens familiaux, affectifs ou
amicaux, la tentation existe. « Quand le directeur général d’une entreprise, voyant arriver un
jeune de sa région, collaborateur d’un cabinet, pour faire l’audit de son entreprise et qu’il le
reçoit en disant : “Alors, on vient me voir petit frère ?”, le petit frère, à supposer qu’il ait la
compétence et l’expérience requises, a-t-il toute l’indépendance nécessaire ? » (Causse,
1992). Aussi, le fait qu’il n’y ait que 29% des auditeurs qui s’assurent que leurs collaborateurs
ne participent pas à des missions dans des organisations avec lesquelles ils ont des liens
familiaux ou autres peut influer négativement sur la qualité de l’audit.
Troisièmement, le fait que 97% des auditeurs concernés déclarent avoir mis en œuvre des
mesures de sauvegarde en cas de menaces sur leur objectivité et qu’aucun auditeur n’exerce
des missions dans une entité dont il détient des titres de participation traduit leur
indépendance. Par ailleurs, les réponses négatives apportées par la très grande majorité des
auditeurs sur les questions relatives aux demandes de toutes sortes d’approbation de comptes
discutables sont aussi de nature à donner une perception positive de leur indépendance.
Indépendance du cabinet ou de la structure d’audit
Deux principaux aspects ont fait l’objet de nos préoccupations, à savoir la taille des
cabinets ou structures et le travail en équipe.
En premier lieu, les résultats de notre enquête montrent que 86% des cabinets ou structures
d’audit du Bénin sont de petite taille (moins de 10 collaborateurs). Selon DeAngelo (1981) les
grands cabinets d’audit seraient plus indépendants que les petits car le maintien de leur
réputation en dépend et ils risquent aussi de perdre d’importants revenus en cas de
comportement de dépendance. Est-ce que la caractéristique (petite taille) influe négativement
sur l’indépendance des cabinets ou structures d’audit du Bénin ? La question semble légitime
mais elle ne pourrait avoir une réponse appropriée que si l’on observait les processus d’audit
déroulés ou que des remises en cause fondées des travaux d’audit de ces petites structures sont
enregistrées. Toutefois, la disparition du cabinet Arthur Andersen semble infirmer l’hypothèse
faite selon laquelle les grands cabinets seraient plus indépendants que les petits (Prat dit
Hauret, 2003).
Deuxièmement, notre enquête révèle que 96% des auditeurs travaillent en équipe. Selon
Pigé (2011), « L’indépendance d’un cabinet repose sur des mécanismes concrets de contrôle
qualité. Alors que dans les petits cabinets d’audit, le contrôle qualité est assuré par les
associés et que, par conséquent, il revêt une dimension personnelle très marquée, il est par
contre très formalisé dans les grands cabinets d’audit. L’audit y est considéré comme un
processus industriel en partie standardisé et les règles de contrôle qualité y sont décrites et
font l’objet d’un rattachement hiérarchique spécifique. L’indépendance est traitée comme une
composante à part entière de la qualité du processus d’audit ». Dans ces conditions, la
proportion relativement élevée des petits cabinets et structures d’audit suggère des
interrogations sur la qualité du contrôle interne déployé.
Activités de conseil
Les réponses apportées montrent que 32% (33 sur 103) des répondants exercent
simultanément des missions d’audit et de conseil, mais que cette situation n’affecte pas leur
17
opinion. L’exercice simultané des missions d’audit et de conseil dans la même structure est
interdit par le code de déontologie de l’OECCA-BENIN et ne fait pas partie des attributions
expressément énoncées par les textes de base des autres institutions d’audit des structures
publiques du Bénin. Selon Pigé (2011), « les activités de conseil permettent de mieux répartir
le coût des ressources humaines….et concourent à la formation des collaborateurs ». Il reste
que lorsque cette situation est créée, la question de l’indépendance de l’auditeur se pose avec
elle. Le fait de fournir des prestations de conseil et par conséquent de s’ingérer dans la gestion
d’une structure est susceptible d’influer sur l’opinion émise à l’issue des travaux d’audit en
cas d’exercice simultané de ces deux activités.
Conclusion
L’instabilité prégnante des institutions d’audit des structures publiques du Bénin suscite
des interrogations légitimes sur les justifications plausibles des remises en cause enregistrées.
Dans le cadre de la présente recherche, nous nous sommes intéressés à la capacité du
dispositif d’audit en place à remplir efficacement, à tout le moins, ses missions de réduction
de l’asymétrie d’information et de crédibilisation des informations à fournir aux parties
prenantes. Cette posture procède essentiellement de l’indépendance et de la compétence des
auditeurs dédiés à ces missions que nous avons évaluées à l’aide d’un questionnaire qui leur a
été administré pendant un mois, du 15 juillet au 15 août 2016.
Notre recherche s’appuie principalement au plan théorique sur les travaux de DeAngelo
(1981) relatif à la compétence et à l’indépendance des auditeurs et sur les déterminants d’un
audit de qualité présentés par Pigé (2011).
Les résultats de notre enquête révèlent que les auditeurs des structures publiques du Bénin
semblent globalement compétents, mais qu’il y a des améliorations à apporter. Ils se déclarent
aussi indépendants, bien que beaucoup d’interrogations persistent, particulièrement sur la
petite taille de la grande majorité des cabinets et structures en place, ainsi que sur la qualité de
leur contrôle interne. Ces résultats sur la compétence et l’indépendance des auditeurs
meriteraient d’être confirmés par d’autres travaux mobilisant des méthodologies différentes :
observation non participante, analyse des cas de condamnation d’auditeurs, étude de cas
longitudinale…
Au-delà, sur cette base des résultats de notre étude, la question suivante peut être posée :
quels sont les fondements des multiples remises en cause observées ? Devrait-on questionner
la durée des mandats, la rotation des auditeurs, le montant des honoraires, la concurrence sur
le marché de l’audit, le contrôle par les pairs, la pression des actionnaires, la situation
financière du client ? Est-ce une logique de bouc émissaire qui prévaut et qui fait que les
institutions d’audit servent de rites sacrificiels ? (cf. Girard cité Guenin-Paracini et Gendron,
2006) Ou alors, peut-on comprendre et expliquer ces phénomènes à la lumière des
développements de Thelen (2003) relatifs aux explications historiques et non historiques de
l’évolution des institutions ? Pourrait-on étudier le problème sous les angles théoriques de
stratégies des acteurs ou de la théorie des parties prenantes ? Il s’agit là de pistes théoriques à
expliquer pour une meilleure compréhension des crises institutionnelles relatives au secteur de
l’audit public au Bénin. Au-delà de l’enjeu académique, la principale finalité de ce processus
n’est que la détermination des conditions nécessaires à la stabilité du cadre institutionnel pour
remplir convenablement la mission d’audit des structures publiques du Bénin.
18
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