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Relation entre le volume du bulbe olfactif et les capacités olfactives chez l’Homme (par IRM 3Tesla) Bellil D¹, Ltaief-Boudrigua A², Pialat JB, Faure F¹ , Plailly J³. ¹ Service d’oto-rhino-laryngologie du Pr Disant, hôpital Edouard Herriot, Lyon. ² Service de radiologie du Dr Pialat, hôpital Edouard Herriot, Lyon. ³ Laboratoire Neurosciences Sensorielles, Comportement & Cognition , UMR 5020 CNRS – Université Lyon 1, Lyon.

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Relation entre le volume du bulbe olfactif et les capacités olfactives p

chez l’Homme (par IRM 3Tesla)Bellil D¹, Ltaief-Boudrigua A², Pialat JB, Faure F¹ , Plailly J³.

¹ Service d’oto-rhino-laryngologie du Pr Disant, hôpital Edouard Herriot, Lyon. ² Service de radiologie du Dr Pialat, hôpital Edouard Herriot, Lyon. ³ Laboratoire Neurosciences Sensorielles, Comportement & Cognition , UMR 5020 CNRS – Université Lyon 1, Lyon.

LE SYSTÈME OLFACTIF CHEZ L’HOMME

Le bulbe olfactif (BO) est le premier relais de l’information olfactive intracrânien. Il reçoit les informations olfactives provenant de l’épithélium olfactif et les transmet ensuite au cortex olfactif primaire.

Il est appliqué sur la lame criblée de l’éthmoïde. Il est maintenu en place d’une part par les filets olfactifs traversant les orifices de la lame criblée et d’autre part par la tente du bulbe olfactif.

LE SYSTÈME OLFACTIF CHEZ L’HOMME

Chez l’homme le BO est très atrophié, et se réduit a une formation ovalaire et renflée qui se prolonge, en arrière, par le tractus olfactif situé dans le sulcus olfactif.

Son inaccessibilité due à sa très petite taille et à sa localisation sur le plancher de la et à sa localisation sur le plancher de la boîte crânienne expliquent les difficultés rencontrées pendant longtemps pour étudier de manière précise son volume.Cependant, les évolutions techniques de l’imagerie par résonance magnétique permettent maintenant de pouvoir visualiser correctement cette structure.

• Chez l’animal, le BO a été fortement étudié, car plus volumineux et plus

accessible .

• Une des découvertes majeur a été de montrer qu’il existe une plasticité au

sein du BO .

• Cette plasticité est exprimé au niveau globale par une variation du volume

PLASTICITÉ DU BULBE OLFACTIF (BO) CHEZ L’ANIMAL

• Cette plasticité est exprimé au niveau globale par une variation du volume

du BO selon l’environnement sensoriel.

• Cette plasticité est expliqué au niveau locale , par une neurogénèse et

une synaptogénèse continue au sein du BO.

PLASTICITÉ DU BULBE OLFACTIF (BO) CHEZ L’ANIMAL

volume BO

Privation olfanric

hiss

emen

t

olfa

ctif

•On observe en cas de privation olfactive ( diminution de

la fluorescence progressive , sur quelques semaines,

marqueur neuronal utilisé ( TMR= invitrogen) une

réduction du volume du BO , aussi en cas

d’enrichissement olfactif , un retour au volume initial du

BO (environ 9 semaines pour un retour à la taille

normale (Cumming, 2010).

volume BO

ctive

E

- Cummings DM, Henning HE, Brunjes PC. Olfactory bulb recovery after early sensory deprivation. J Neurosci 1997; 17: 7433–40.

- Graziadei PP, DeHan RS. Neuronal regeneration in frog olfactory system.J Cell Biol 1973; 59: 525–30.-Meisami E. Effects of olfactory deprivation on postnatal growth of the rat olfactory bulb utilizing a new method for production of neonatal unilateral anosmia. Brain Res 1976; 107: 437–44.- Agonist binding fraction of dopamine D2/3 receptors in rat brain: a quantitative autoradiographic study.; Minuzzi L, Cumming P.; Neurochem Int. 2010 May-Jun;56(6-7):747-52. Epub 2010 Feb 1.

normale (Cumming, 2010).

• Objectif de l’étude : Etudier l’existence de cette plasticité au niveau du bulbe olfactif humain.

• La taille des BO a déjà été étudiée chez les patients avec:– déficits olfactifs post traumatique (Yousem et al., 1996; Yousem et al., 1999),

– déficits olfactifs post-infectieux (Mueller et al., 2005a, b; Rombaux et al., 2006),

– anosmie congénitale (Yousem et al., 1996a, b; Abolmaali et al., 2002),

PLASTICITÉ DU BULBE OLFACTIF (BO) CHEZ L’HOMME

– anosmie congénitale (Yousem et al., 1996a, b; Abolmaali et al., 2002),

– maladies neurodégénératives (Yousem et al., 1995; Mueller et al.2005a, b).

• Cependant, ces études transversales comprennent des petites séries et seulement certaines avec un petit groupe de contrôle

• Toutes ces études ont été faites avec une exploration des BO sur une IRM 1.5 tesla.

• Notre étude comprend un grand nombre de sujets pour comparer le volume du BO et la fonction olfactive, volumes évaluées à partir d’images acquises sur une IRM 3 Tesla.

Mueller et al. 2005a. Neuroreport 16, 475–478.Mueller et al. 2005b. J. Neural Transm. 112,1363–1370.Yousemet al. 1996a. Am. J. Neuroradiol. 17, 1171–1179.Yousem et al. 1996b. Am. J. Radiol. 166, 439–443.

Reconstrcution axiale, 3D T2Reconstruction sagittale, 3D T1

OB: bulbe olfactifOT: tractus olfactif

MATERIELS ET METHODES

Population:

Un total de 26 patients (11 femmes, 15 hommes) présentant une dysfonction olfactive (hyposmie , anosmie), et 11 témoins (normosmiques) ont été inclus entre Juin 2009 et Aout 2010.

Critères d’exclusion:- les sujets présentant une obstruction de la fente olfactive par des

polypes nasauxpolypes nasaux- infections aiguës, sinusites chroniques, - l'âge en dessous de 18 ans- patients ayant une contre indication à l ’IRM (stimulateur cardiaque,

ou autre implant métallique non compatible avec l’IRM, claustrophobie sévère…).

Les tests olfactifs et l'IRM ont été réalisées après un examen ORL complet, y compris l'endoscopie de la fente olfactive . Tous les patients ont été examinés dans le service de consultation olfactive de l’hôpital Edouard Herriot- Lyon.

MATERIELS ET METHODESSUJETS :

Dysosmiques : 26 sujetsHyposmiques:

- 6 hommes , 3 femmes.- Age : 18 à 80 ans.

Anosmique s:- 9 hommes , 8 femmes.- Age : 18 à 80 ans.

Normosmiques : 11 sujets.3 hommes 8 femmes

PARTICIPATION EN 2 ÉTAPES :

1- Examen ORL + tests olfactifs

2- IRM 3T avec protocole standardisé, conçu spécialement pour l’analyse du système olfactif.

- 3 hommes , 8 femmes.- Age : 18 à 80 ans.

MATERIELS ET METHODES: les tests olfactifs (1)

Test de seuil :

Nous utilisons la méthode à double choix décrite par Doty et al. (1987), appelée aussi méthode « ascendante-descendante ». Dans cette méthode, on présente au sujet à intervalle rapide deux flacons: l’un de 2-phényléthanol dissoute dans une huile minérale, l’autre contient de l’huile minérale pure. Les flacons sont successivement ouverts et placés sous le nez du sujet, on demande au sujet lequel des deux flacons donne l’odeur la plus forte.

Les paires de stimuli (blancs vs odorant) sont présentées à des concentrations croissantes (intervalles logarithmiques) jusqu'à ce que l’on obtienne des réponses cohérentes lors de quatre essais consécutifs. On réalise alors la même expérience à des concentrations

Détermination du seuil olfactif (méthode ascendante – descendante)

Doty et al. (1987)

score de seuil = 9+8+9+8/4 = 8.5

quatre essais consécutifs. On réalise alors la même expérience à des concentrations décroissantes, ce qui permet de déterminer le seuil par la moyenne des valeurs de transition .

Durée du test: 15 à 20 mn.

MATERIELS ET METHODES: les tests olfactifs (2)

Test d’identification et de détection :

Nous utilisons le test ETOC, développé au sein de notre laboratoire d’accueil, qui comprend 16 séries de 4 flacons. Dans chaque série, il y’a un seul flacon odorisé.Pour chaque série :

-Le sujet doit d’abord faire la tache de détection : lequel de ces 4 flacon contient l’odeur?

-Dans un deuxième temps une tache d’identification en donnant le nom de l’odeur qu’il vient de détecter à l’aide de 4 labels qui lui sont proposé.

- à la fin de l’examen on obtient un score de détection et un score d’identification.

Évaluation des capacités de détection et d’identification olfactives (ETOC)

Thomas-Danguin et al., 2003

- à la fin de l’examen on obtient un score de détection et un score d’identification.

Durée du test: 15 à 20 minutes.

MATERIELS ET METHODES: l’IRM

L’exploration des voies olfactives a été réalisée sur une IRM 3Tesla (Achieva, Philips Healthcare), avec une antenne dédiée 16 canaux. Le protocole d’étude en IRM comprend 2 séquences:

- séquence 3D T1 coronale TFE, couvrant l’étage antérieur de la base du crâne, avec les paramètres suivants: 7.6/3.9 ms (TR/TE), matrice de reconstrcution en 512, FOV 180 x 131 x 60 mm; taille du voxel 0.35 x 0.35 x 2mm; 4 excitations; angle de bascule: 8 degrés.

- séquence 3D T2 VISTA coronale, couvrant l’ensemble de l’encéphale, avec les paramètres suivants: 2500/308 ms (TR/TE); FOV 220 x 180 x 200 mm; matrice de reconstruction en 448; taille du voxel 0.49 x 0.49 x 0.5 mm; en suppression de graisse (SPIR); 2 excitations; angle de bascule: 90 degrés.

Des reconstructions multiplanaires ont été réalisées dans les 3 plans.

• Deux lecteurs indépendants ont réalisés les mesures de volumétrie des bulbes olfactifs, de longueur et de profondeur des sulci olfactifs. Ces mesures ont été faites de manière standardisée, sur une console de post traitement Advantage Windows 2.3 GE:

1- Volumétrie des BO: sur chaque coupe coronale T1 et T2 où le bulbe olfactif est individualisable, une mesure de surface bulbaire est faite, successivement pour le BO droit et le BO gauche.

MATERIELS ET METHODES: l’IRM

successivement pour le BO droit et le BO gauche.

Le logiciel procède ensuite à la sommation des mesures surfaciques pour le calcul du volume des BO (mesure semi automatique).

Chaque BO est mesuré indépendamment, à deux reprises (la moyenne des deux mesures sera retenue), et ce sur chacune des séquences T1, et T2, par chacun des lecteur.

MATERIELS ET METHODES: l’IRM

• Les résultats statistiques ont été faits avec des tests ANOVA, comparant les moyennes de mesures des différents paramètres.

• A été étudié l’effet de deux facteurs sur ces moyennes:

– Facteur groupe de sujets: anosmiques, hyposmiques, et normosmiques

RESULTATS

– Facteur groupe de sujets: anosmiques, hyposmiques, et normosmiques

– Facteur latéralité: BO droit et BO gauche

RESULTATS

LES CAPACITÉS OLFACTIVES

6

8

10

12

14

16

18Capacités olfactives

0,50

0,75

1,00

étec

tio

n

Score moyen

***

0

2

4

6

Seuil Détec. Ident.Anosmique Hyposmique Normosmique

0,00

0,25

Anosmique Hyposmique Normosmique

Dét

***

Les tests olfactifs ont permis de différencier trois groupes de sujets: les anosmiques, les hyposmiques et les normosmiques.

Il existe une différences très significatives entre chaque groupe (***:p<0.001), que ce soit pour le seuil, l’identification ou la détection.

RESULTATS

VOLUME DU BULBE OLFACTIFSéquence 3D T1 coronale

0,10

0,15

0,20o

lum

e (c

m3)

Volume du BO en T1

BO gauche

**

***

0,00

0,05

Anosmique Hyposmique Normosmique

Vo

lu gauche

*

-les patients anosmiques ont un volume plus petit - que les patients hyposmiques (*: p<0.05). - que les patients normosmiques (***: p<0.001).

- les patients hyposmiques ont un volume plus petit que les sujets normosmiques (**: p<0.01).

RESULTATS

VOLUME DU BULBE OLFACTIF

Séquence 3D T2 coronale

0,04

0,06

um

e (c

m3)

Volume du BO en T2

BO gauche

BO droit*

***

0,00

0,02

Anosmique Hyposmique Normosmique

Vo

lum BO droit

-Il existe une différence significative entre le volume du BO des sujets témoins et les patients hyposmiques et anosmiques ( respectivement *:p<0.05, et ***:p<0.001).

- Par contre , il n’existe pas de différence significative entre le volume du BO des patients anosmiques et celui des patients hyposmiques .

RESULTATS

PROFONDEUR DU SULCUS OLFACTIF

4

6

8

10

Dim

ensi

on

(cm

)

Profondeur du SO

SO gauche

SO droit

***

0

2

Anosmique Hyposmique Normosmique

Dim

-Il existe une différence significative entre la profondeur du SO- des patients anosmique et celle des hyposmiques (*: p<0.05),- des patients anosmiques et celle des sujets témoins (**: p<0.01).

- Pas de différence significative entre patients hyposmiques et normosmiques.

- Une différence de profondeur entre les SO droit et gauche est retrouvée chez les patients anosmiques uniquement.

RESULTATS

LONGUEUR DU SULCUS OLFACTIF

20

30

40

50D

imen

sio

n (c

m)

Longueur du SO

SO gauche

SO droit

*

**

0

10

Anosmique Hyposmique Normosmique

D

-Il existe une différence significative entre la longueur du SO- des patients anosmiques et celle des normosmiques (*: p<0.05)- des patients anosmiques et celle des patients hyposmiques (**: p<0.05).

Pas de différence significative entre les hyposmiques et les normosmiques.

• Notre étude montre une corrélation entre le volume des BO et la fonction olfactive. Ainsi les hyposmiques et les anosmiques ont un volume des BO de plus petite taille que la population témoin.

• C’est en pondération T1 que la distinction entre les trois groupes de patients (anosmiques, hyposmiques et normosmiques) est la plus significative.

DISCUSSION et CONCLUSION

• En pondération T2, seule la distinction entre les anosmiques et la population témoin est possible. Cette différence entre les deux séquences peut s’expliquer par l’effet de volume partiel est plus important sur le T2, étant donné le différentiel de contraste tissu nerveux bulbaire et LCR (liquide céphalo-rachidien) autour des BO dans la fente olfactive.

• Le volume des BO mesuré en T2 est donc proportionnellement plus sous-estimé chez les normosmiques que chez les hyposmiques ou anosmiques (chez qui la taille des BO est de plus petit calibre); réduisant ainsi l’écart de volume des BO entre les hyposmiques et les normosmiques.

• La profondeur et la longueur des SO est significativement diminuée chez les anosmiques par rapport aux normosmiques, probablement en rapport avec les anomalies morphologiques des gyri et sulci olfactifs (d’origine congénitales, ou post traumatiques) rencontrées chez les anosmiques.

• Nos résultats montrent ainsi une certaine plasticité du volume des BO chez l’homme: on note une diminution du volume des BO lorsque la fonction

DISCUSSION et CONCLUSION

l’homme: on note une diminution du volume des BO lorsque la fonction olfactive est diminuée.

• Une étude complémentaire montrant une augmentation significative du volume des BO chez les patients traités pour obstruction nasale chronique (polypose naso sinusienne, et autres causes) sera intéressante à mener sur un grand nombre de patient. Une étude préliminaire de ce type chez des patients porteur d’une inflammation rhino-sinusienne avait été réalisée par Hummel et al. (Olfactory bulb volume in patients with sinonasal disease; Am J Rhinol. 2008 Nov-Dec;22(6):598-601).