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Résu: Droi t Des Obligations  TITRE I. La notion d’obligation Chapitre 1. Première Approche Section 1. Définition Le terme « obligation » est polysémique. - Dans le langage courant, il désigne tout type de devoir auquel le citoyen est astreint en vertu d’une infinie variété de règles (obligations morales, religieuses, sociales, professionnelles,…). Mais ces obligations ne se situent guère sur un terrain de droit, et sont donc dépourvues de sanction juridique ; elles ne sont pas mise en œuvre dans le cadre étatique. - Sur le plan juridique, il existe également plusieurs significations distinctes. On dit qu’il y a obligation lorsque l’on est en présence d’un devoir résultant d’une règle de droit et assortie d’une sanction juridique, impliquant l’intervention de l’appareil étatique, et, au besoin, de la force publique, pour en assurer le respect (obligation de déclarer son enfant,…). - En droit privé, le terme obligation a un sens plus précis et plus étroit. « L’obligation constitue un lien de droit, d’ordre patrimonial, entre deux personnes juridiques (au moins), en vertu duquel l’une (le créancier) est en droit d’exiger quelque chose de l’autre (le débiteur) - une prestation ou une abstention -, au besoin en s’adressant aux cours et tribunaux pour faire exécuter l’engagement pris ou sanctionner la violation de celui-ci ». Section 2. Les deux facettes de l’obligation (créance et dette) - L’obligation confère au créancier un droit de créance (ou plus brièvement une créance) à l’égard du débiteur. - Le droit des obligations constitue la théorie générale des droits de créances. Section 3. Droit de créance et droit réel A. Le droit de créance (droit personnel = entre personne à propos d’une chose) S’exerce par l’intermédiaire d’une autre personne.

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Résumé : Droit Des Obligations

TITRE I. La notion d’obligation

Chapitre 1. Première ApprocheSection 1. Définition

Le terme « obligation » est polysémique.- Dans le langage courant , il désigne tout type de devoir auquel lecitoyen est astreint en vertu d’une infinie variété de règles (obligationsmorales, religieuses, sociales, professionnelles,…). Mais ces obligations nese situent guère sur un terrain de droit, et sont donc dépourvues desanction juridique ; elles ne sont pas mise en œuvre dans le cadre

étatique.- Sur le plan juridique , il existe également plusieurs significationsdistinctes. On dit qu’il y a obligation lorsque l’on est en présence d’undevoir résultant d’une règle de droit et assortie d’une sanction juridique,impliquant l’intervention de l’appareil étatique, et, au besoin, de la forcepublique, pour en assurer le respect (obligation de déclarer son enfant,…).

- En droit privé , le terme obligation a un sens plus précis et plus étroit.« L’obligation constitue un lien de droit, d’ordre patrimonial, entre deuxpersonnes juridiques (au moins), en vertu duquel l’une (le créancier) esten droit d’exiger quelque chose de l’autre (le débiteur) - une prestation ouune abstention -, au besoin en s’adressant aux cours et tribunaux pourfaire exécuter l’engagement pris ou sanctionnerla violation de celui-ci ».

Section 2. Les deux facettes de l’obligation (créance et dette)

- L’obligation confère au créancier un droit de créance (ou plus brièvementune créance) à l’égard du débiteur.

- Le droit des obligations constitue la théorie générale des droits decréances.

Section 3. Droit de créance et droit réel

A. Le droit de créance (droit personnel = entre personne à propos d’unechose)

S’exerce par l’intermédiaire d’une autre personne.

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Tous les types de droit de créance peuvent être imaginés, sous réserve durespect de l’ordre public et des bonnes mœurs. Nombre illimité.C’est un droit relatif : « opposable uniquement à la personne dudébiteur ».

C’est un droit à réalisation médiate : « il transite par la prestation d’unepersonne ». Actif !

B. Le droit réel (pouvoir reconnu à une personne et portant directementsur une chose)Crée un rapport direct et immédiat entre une personne et une chose surlaquelle le sujet peut exercer certains pouvoirs.Seule la loi peut créer des droits réels. Nombre limité.Deux attributs propres et caractéristiques : droit de suite et de préférence.Droits réels principaux = la propriété et ses démembrements (habitation,superficie…)Droits réels accessoires = gage, hypothèque, privilèges,…C’est un droit absolu, opposable à tous (erga omnes)Etablit entre son titulaire et la chose un contact, lui permettant d’entirer profit directement. Passif !

Section 4. L’obligation, élément du patrimoineL’obligation est un des éléments du patrimoine des parties. Pour lecréancier, elle représente une valeur économique qui peut circuler. Pour ledébiteur, l’obligation représente, non un élément de richesse, un actif,mais une charge ; cela signifie donc que le créancier est en droit de saisirses biens jusqu’à obtenir satisfaction.

§1 er . La notion de patrimoine

A. Le patrimoine comme universalité de droit

- Dans le langage courant, le patrimoine désigne la fortune d’unepersonne.Sur le plan juridique, cette représentation du patrimoine renvoie aumontant total qui serait obtenu si la personne transférait l’ensemble deses droits contre de l’argent.

- En réalité, le patrimoine a une signification différente. Il est conçu

comme une universalité de droit, soit un ensemble de droits et de charges,actuels et futurs, indépendant des variations de ses composants. Donc, le

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patrimoine est une notion intellectuelle et abstraite, un contenant (plutôtqu’un contenu) composé d’éléments concrets.Universalité de droit, le patrimoine comprend des droits et des dettes, unactif et un passif inséparables l’un de l’autre.

(≠ universalité de fait : ensemble de choses et de droits sans passif correspondant !)

Chapitre 2. Classification des obligations – Aperçugénéral

Section 1. Selon le pouvoir de contrainte attaché àl’obligation

Entre l’obligation juridique et l’obligation non-juridique, il existel’obligation naturelle. Celle-ci n’est pas définie dans le Code Civil, qui y faittoutefois allusion dans son article 1235 relatif au paiement en général.L’obligation naturelle ne confère à son créancier d’action en exécutionforcée. Cependant, en cas d’exécution volontaire par le débiteur, lepaiement est juridiquement efficace et le débiteur ne peut répéter l’indu(quelque chose qui n’est pas dû). Il n’est pas question de libéralité de lapart du débiteur qui a l’intention de se libérer.

Section 2. Selon l’objet de l’obligation§1 er . Obligation de donner, de faire et de ne pas faire

- Donner ne fait pas référence à une libéralité, mais au transfert d’un droitréel, tel qu’il existe dans une vente, un échange ou une donation.- Faire concerne une prestation positive autre que donner. Il s’agit d’une

catégorie assez disparate : livrer une chose, soigner un malade,…(médecin, coiffeur,…)

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- Ne pas faire concerne une prestation négative comme un engagementde non-concurrence, ou un engagement de ne pas construire, de ne pasvendre, louer ou sous-louer quelque chose. Il s’agit donc d’une abstention.

§2. Obligation pécuniaire, obligation en nature et dette de valeur

- L’obligation pécuniaire n’est à 1 ère vue qu’une variété de l’obligation dedonner, de transférer la propriété d’une certaine quantité de monnaie(d’une chose de genre).- L’obligation en nature désigne, négativement, toute obligation dontl’objet n’est pas une somme d’argent : obligations de donner portant surun corps certain, ou une chose de genre autre que la monnaie, toutes lesobligations de faire et de ne pas faire.(catégorie juridiquement pas très homogène).- La dette de valeur est une expression qui désigne une créance dont leprincipe n’est pas contesté, mais qui doit encore faire l’objet d’uneévaluation par le juge. (ex : obligationalimentaire). A ne pas confondre avec la dette de somme qui a pour objetle paiement d’une somme numérique, déterminée à l’avance parconvention ou par loi.

Section 4. Selon l’intensité de l’obligation

La distinction entre l’obligation de moyens et l’obligation de résultatsrepose sur l’intensité des obligations assurées par le débiteur d’uneobligation contractuelle.Dans certains cas, le débiteur s’engage à atteindre un résultat précis(ex : transporter ou livrer telle chose, pour telle date, à telle heure).

Dans d’autres cas, il promet, à l’instar du bon père de famille (pour sedéfendre, trouver une cause étrangère exonératoire) de faire son possiblepour y parvenir. (ex : le médecin met tout en

œuvre pour parvenir à la guérison, en appliquant les coins d’unprofessionnel diligent, mais ne s’engage pas à guérir son patient).

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- Lorsque le débiteur est tenu par une obligation de résultat et que lerésultat n’est pas atteint, sa faute est en quelque sorte présumée et il nepeut échapper à sa responsabilité qu’en prouvant l’existence d’une cause

étrangère exonératoire.- Le débiteur d’une obligation de moyens, en revanche, n’est responsableque s’il n’a pas agi avec toute la prudence et la diligence requises, ce quedevra démontrer le créancier insatisfait.

Les obligations de donner et de ne pas faire sont, en principe, desobligations de résultat.

- Pour distinguer les deux obligations, il existe plusieurs critères ;Critère de l’aléa : s’il y a très peu d’aléa obligation de résultat (etinversement)Critère du rôle actif du créancier : l’erreur peut survenir par sa faute.Critère du caractère précis pou déterminé d’une obligation .(livrer les pizzas à telle heure est ≠ plus précis qu’aider un patient parexemple)

Section 5. Selon la pluralité des sujetsUne obligation peut avoir plusieurs sujet, soit du coté passif (pluralité dedébiteurs), soit du coté actif (pluralité de créanciers).

§1 er . Obligations conjointes (qui sont en fait divisibles, soit disjointes)

L’obligation conjointe et celle qui se divise en autant de parts qu’il y a decréanciers ou de débiteurs, chacun n’étant créancier ou débiteur que poursa part.Autrement dit, chacun des débiteurs est tenu seulement pour sa part àl’égard du créancier (dettes conjointes) ou chacun des créanciers peutréclamer seulement sa part au débiteur (créances conjointes).

§2. Obligations solidaires

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Il y a solidarité lorsque plusieurs personnes sont soit créancières, soitdébitrices d’une seule et même dette (bien que celle-ci soit par elle-mêmeparfaitement divisible entre ces créanciers ou débiteurs).

- La solidarité active est celle qui existe entre les créanciers ; chacun peutpoursuivre l’exécution de la totalité de la dette contre le débiteur (plutôtrare).- La solidarité passive est plus fréquente et concerne les débiteurs ;chacun de ceux-ci est tenu pour la totalité de la dette vis-à-vis ducréancier, qui peut choisir à qui il va réclamer le remboursement. Il s’agitd’une garantie sérieuse pour le créancier.Par après, le débiteur qui a payé la totalité de la dette, pourra se retournercontre les autres débiteurs pour que chacun paie sa juste part.

Il faut distinguer, en cas de solidarité passive, deux moments :Celui de « l’obligation à la dette » qui concerne les rapports entre lesdébiteurs solidaires et le(s) créancier(s).Celui de « la contribution à la dette » qui concerne les rapports entre lescodébiteurs.

- Une 1 ère source de la solidarité passive est donc la convention. La volontéd’engagement solidaire doit être établie avec certitude, sans qu’aucuneforme spéciale ne soit exigée.- Une autre source de la solidarité est la loi(art. 1887 C. civ : solidarité entre les co-emprunteurs,…).

§3. Obligation in solidumDans les grandes lignes, le mécanisme est le même que pour l’obligationsolidaire. La différence se situe au niveau de la source respective.En effet, l’obligation in solidum est une création jurisprudentielle ; ellerépond au souci de donner une garantie de paiement à la victime dudommage

(donc, prévu non pas par la loi, mais par les juges).

- Il y a obligation in solidum lorsque plusieurs personnes sont tenues, vis-à-vis d’un créancier, à l’exécution intégrale d’une obligation, et ce, enraison de caractéristique de la situation dans laquelle cette obligation estnée.Coresponsabilité en matière délictuelle ou contractuelle (hypothèses danslesquelles les fautes distinctes de plusieurs personnes ont contribué àproduire un dommage unique).

Ex : En soirée, je marche sur le trottoir et tombe dans un trou creusé parun entrepreneur d’Electrabel qui n’était pas balisé et je me casse la

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jambe. De plus, cette nuit là, l’éclairage de la voirie était défectueux. Quiest responsable ?

Section 6. Selon la pluralité d’objet Une obligation eut avoir plusieurs objets.

• On parle d’obligation alternative lorsque ceux-ci sont placés surpied d’égalité.

• On parle d’obligation facultative lorsqu’il y a une obligationprincipale et une de substitution.

§1 er . Obligation alternativeL’obligation est dite alternative lorsqu’elle porte sur différentes prestationsdont une seulement doit être exécutée par le débiteur pour se libérervalablement (C. civ. art. 1189) .

Le choix appartient en principe au débiteur, à moins qu’il n’en soitconvenu autrement. La perte d’un l’un des objets ne libère pas le débiteurqui peut se libérer en exécutant l’autre prestation. « Je m’engage à vouslivrer un… ou bien un… ».

§2. Obligation facultativeCette obligation n’est pas prévue par le Code ; dans ce cas, diversesprestations ne sont pas sur le même plan, sur le même pied d’égalité.Un seul objet est dû (in obligatione) , mais le débiteur peut se libérer enexécutant une autre prestation indiquée au contrat (in solutione) .Maintenant, si l’obligation principale ne peut être exécutée, par suite d’un

cas de force majeure, le débiteur n’est pas tenu d’exécuter l’obligationsubsidiaire.

Section 7. Selon les modalités affectant l’obligationUne obligation peut être pure et simple, c.à.d. immédiatement exigible.Elle peut être aussi affectée par le temps, dans son exigibilité ou sonexistence même.On distingue le terme et la condition (cf. droit romain).

§1er

. Obligation affectée d’un terme (C. civ. art. 1185 à 1188)Le terme est un événement futur et certain .

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• Le terme certain est un événement dont on sait d’avance le momentauquel il surviendra (ex : facture payable à la fin du mois) ;il faut dont qu’il ait été fixé à une date précise.

• Le terme est incertain quand l’époque de sa réalisation est

inconnue, bien qu’il doive certainement se produire (ex : fin decontrat au décès du bailleur).

Il existe deux types de termes :• Le terme extinctif est un événement futur et certain qui met fin à

une obligation sans effet rétroactif ; à l’échéance du terme,l’obligation s’éteint de plein droit. Jusqu’à cettedate, l’obligation existe et est exigible.

• Le terme suspensif est un événement futur et certain qui suspendl’exécution de l’obligation. Donc, l’obligation existe, seule sonexigibilité est suspendue.

§2. L’obligation sous condition (C. civ. art. 1168 à 1184)« L’obligation est conditionnelle lorsqu’on la fait dépendre d’unévénement futur et incertain… » . Il faut indiquerque la condition n’est qu’une modalité, et qu’elle ne peut porter sur unélément essentiel du contrat. De la réalisation de cet événement dépend :

• Soit la naissance de l’obligation, qui existe toutefois en germe(condition suspensive)Ex : « Je n’achète cet immeuble que si j’obtiens un prêt hypothécaire »

• Soit l’extinction de l’obligation (condition résolutoire)Ex : « Je loue un appartement en me réservant la possibilité derompre le contrat en

cas de changement ou de perte d’emploi ».

TITRE II. Les sources des obligations

Chapitre 1. La classification du Code civil

Ainsi qu’on l’a dit, les contrats ou les conventions sont des accords devolontés conclus entre deux ou plusieurs personnes ayant l’intention deproduire les effets juridiques prévus ou adis par le droit. La rencontre des

volontés fait naitre le contrat et déclenche les effets de droit qui y sontassociés.

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• La catégorie des quasi-contrats regroupe un ensemble desituation où, en dehors de toute convention, une personne reçoit unavantage d’une autre personne qui n’avait aucune obligation àl’égard de la première. Il s’agit donc bien d’un fait volontaire ou

involontaire d’une personne, et non d’un accord de volonté.Il existe ainsi : la gestion d’affaire, le paiement de l’indu(ou encore, l’enrichissement sans cause au titre de principe généralde droit)Ex : un voisin aimable qui répare votre toit suite à un orage, alorsque vous étiez en

vacances (il n’y a donc aucun contrat, mais gestion d’affairesutile à vos intérêts,

ce qui vous oblige, à votre retour, de rembourser votre voisingérant s’il a bien

administré l’affaire.• Le délit et le quasi délit sont des fautes ; le premier est

intentionnel, tandis que le second ne l’est pas. Toute faute, quandelle cause un dommage à autrui, engage la responsabilité extra-contractuelle (aquilienne ou encore délictuelle) de son auteur.

Cette classification a fait l’objet de nombreuses critiques.1. La notion de quasi-contrat suggère une analogie trompeuse avec

celle de contrat ; né d’un souci de symétrie avec les quasi-contrats,le quasi-délit est une notion sans intérêt pratique puisque le régimede réparation est le même que celui du délit. La référence au délitn’a pas non plus heureuse car le délit est d’abord une catégoried’infraction pénale.

2. La référence à la loi comme source spécifique d’obligations entreparticuliers est critiquable car toutes les sources non contractuellesne créent d’obligations que par l’effet de la loi. A la limite, la loi estle support de toutes les sources d’obligations, y compris du contrat.

3. Enfin, l’article 1370 ne mentionne pas les engagements par

volonté unilatérale dont il existe des exemples consacrés par la jurisprudence récente.PREMIERE PARTIE : LE FAIT JURIDIQUE

TITRE I. Le fait juridique dommageable comme sourced’obligation :

LA RESPONSABILITE DELICTUELLE

Premier regard

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Le droit de la responsabilité civile couvre l’ensemble des règles suivantlesquelles une personne est tenue de réparer le dommage qu’elle a causépar suite de l’inexécution d’une obligation qui lui incombe.

Si cette obligation est imposée par la loi, son inexécution estsanctionnée par la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle.• Si l’obligation inexécutée découle d’un contrat conclu entre les

parties, son inexécution est sanctionnée par une responsabilitécontractuelle (extra-contractuelle si aucun contrat).

Aujourd’hui, on applique le même régime de responsabilité que ce soitpour un délit ou un quasi-délit. La responsabilité civile ne se confond niavec la responsabilité morale, ni avec la responsabilité politique, ni avec laresponsabilité pénale (C.civ. art. 1382 à 1386bis).

Dans l’abstrait, 3 fonctions peuvent être assignées au système de laresponsabilité civile :

1. Une fonction indemnitaire ou réparatrice (fonction fondamentale)2. Une fonction préventive et régulatrice des relations sociales3. Une fonction répressive

(éclipsée progressivement au profit surtout de la fonctionindemnitaire)

Chapitre 1. Enjeux et contour de la responsabilité civileSection 1. Les différents types de responsabilité

§1 er . Les responsabilités non-juridiquesA. La responsabilité moraleEn substance, la responsabilité morale est celle du sujet devant saconscience, tandis que la responsabilité juridique résulte de latransgression d’une règle de droit, dont l’auteur doit répondre devant lestribunaux.L’ordre moral et l’ordre juridique poursuivent des objectifs différents ;Ils ne sont pas complètement étrangers l’un à l’autre, mais ils necoïncident pas non plus tout à fait.

a) La morale vise la perfection intérieure et le bonheur de l’homme entant que personne ; le droit, quant à lui, vise les rapports sociaux, ila pour visée l’équilibre et le bon ordre des relationsinterpersonnelles.

b) Malgré une différence de perspective et d’objectif, l’ordre moral etl’ordre juridique ont partie liée : le droit a pour visée le bon ordredes relations humaines, qui n’est pas sans rapport avec le respectd’exigences morales. La morale a besoin de l’ordre juridique afin de

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pénétrer efficacement les mœurs. A l’inverse, l’ordre juridique abesoin de la morale sans laquelle il ne serait que désordre.

B. La responsabilité politiqueLa responsabilité politique (fondée sur l’honneur) est une notion à

géométrie variable. Elle varie dans le temps au gré des évolutions de la« culture politique ». Elle est tributaire de la conception que se font lescitoyens et les élus eux-mêmes de la fonction politique.

§2. Responsabilité civile et responsabilité pénaleA. Comparaison sommaire des deux ordres de responsabilité

• La responsabilité pénale concerne la protection de l’ordre socialcontre les comportements qui y porteraient atteinte. Elle a un but répressif : elle vise avanttout à punir les auteurs d’infractions (objectif d’ordre public)

• La responsabilité civile , quant à elle, poursuit principalement unbut indemnitaire : elle tend à réparer un dommage (objectif d’ordreprivé)

RESPONSABILITE CIVILE RESPONSABILITE PENALE

1 . Le délit vise tout comportement àl’origine d’un dommage pour autrui etqui oblige son auteur à le réparer.

1 . Le délit constitue une catégorieparticulière d’infractions, aux cotés descontraventions (trib. depolice) et des crimes (cour d’assises) ;délit (trib. correctionnel).

2 . Peut-être engagée pour toute faute,même la plus légère et parfois mêmesans qu’aucune faute ne puisse êtrereprochée à l’auteur du faitdommageable.

2 . Régie par le principe de légalité desinfractions et des peines, condensés parles adages : « Pas de crime sans loi et

pas de peine sans loi » . (excepté auprocès de Nuremberg)

3 . L’existence d’un dommage est unecondition d’existence de laresponsabilité.

3 . L’existence d’un dommage n’est pasrequise pour justifier une sanctionpénale. (infractionau code de la route,…)

4 . On trouve de nombreux cas deresponsabilité du fait d’autrui (lesparents sont responsables,…)

4 . Ici, il s’agit d’un principe personnel(exception : responsabilité des pers.morales)

5 . La faute civile est appréciée « in abstracto » . Modèle abstrait :« eu égard à des standards decomportement »

5 . Le comportement de l’auteur estapprécié « in concreto » . (entenant compte des particularitésphysiques et psychologiques)

6 . La Cour de cassation consacre la

théorie de l’équivalence desconditions ; le lien de causalité existe

6 . On consacre la théorie de la causalité

adéquate ; La relation causale n’existeque si l’acte délictueux a été la cause

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lorsque le juge constate que, sans lafaute, le dommage ne se serait pasproduit tel qu’il s’est produit inconcreto.

déterminante du dommage.

7 . La faute la plus légère suffit à obligerson auteur à réparer l’intégralité dudommage.

7 . La peine est d’ordinaireproportionnée à la gravité de la faute.

8 . Si la victime a la charge de prouverla faute en lien causal avec ledommage, il appartient au défendeurd’établir, le cas échéant, l’existenced’une cause étrangère exonératoire oud’un fait justificatif.

8 . Le régime de la preuve repose sur laprésomption d’innocence dont bénéficiele prévenu ; il appartient donc à lapartie poursuivante d’établir nonseulement les éléments constitutifs del’infraction mais aussi l’inexistence decauses de justification ou d’excuse.

B. L’identité des fautes civile pénaleOn sait qu’un même fait peut donner lieu à des poursuites pénales et, s’ila causé un dommage, à une action en responsabilité civile. La personnelésée a également la possibilité de greffer son action civile sur l’actionpublique, en se constituant partie civile devant la juridiction répressive.Depuis la fin du 19 e siècle, la Cour de cassation considère que : « le défaut de prévoyance ou de précaution au sens de l’article 418 et suivants duCode pénal correspond à la négligence ou à l’imprudence visées àl’article 1383 du Code civil ; de sorte que se contredit en droit le

jugement déclarant à la fois la faute civile établie et l’infraction nonétablie ».Il est à remarquer que l’identité vaut uniquement sur le terrain de laresponsabilité du fait personne (C. civ. art. 1382 et 1383) et neconcerne ni le fait d’une chose (C.civ. art. 1384, al. 1 er / C. civ. art. 1386) , ni le fait d’un animal (C. civ.art. 1385) .

C. Les conséquences du principe d’identité

Le principe de l’identité des fautes pénale et civile a longtemps eu pourconséquence de soumettre l’action civile résultant d’une infraction pénaleà un régime particulier de prescription. En outre, chaque fois que lavictime a souffert un dommage corporel imputable à une faute, son actioncivile se retrouve soumise au principe de l’autorité de la chose jugée aupénal sur le civil.

1. La prescription de l’action civile résultant d’une infraction pénale

En 1878 , l’action publique et l’action civile reposant sur une infraction,étaient soumises à un régime de prescription identique.

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Puis, en 1961 , ce régime a été remplacé par un régimed’interdépendance ; en effet, selon l’ancien article 26 du Titre

préliminaire du Code d’instruction criminelle , l’action civiledécoulant d’une infraction pénale se prescrivait par 5 ans à compter du

jour où l’infraction avait été commise, sans qu’elle puisse être prescriteavant l’action publique. Cette prescription quinquennale dérogeait à laprescription trentenaire de droit commun

• Un tel régime était justifié par le souci d’éviter qu’une sanction civilepuisse être intentée à un moment où l’action publique n’est pluspossible, et révèle au public des infractions qu’on ne pouvait plusréprimer.

• Le principal reproche adressé à l’article 26 reposait sur la différencede traitement qu’il créait entre les victimes d’une faute civile. Sicette dernière ne trouvait pas sa source dans une infraction pénale,les victimes disposaient d’un droit d’action en justice pendant 30ans ; par contre, si la faute civile était constitutive d’une infractionpénale, elles devaient agir dans les 5 ans de la commission del’infraction.

Il y avait donc discrimination

C’est pourquoi le législateur adopta, le 10 juin 1998, une loi qui modifie lesrègles gouvernant la prescription de l’action en responsabilité civile. Onpeut désormais lire :« L’action civile résultant d’une infraction se prescrit selon les règles duCode civil ou des lois particulières qui sont applicables à l’action endommages et intérêts. Toutefois, celle-ci ne peut se prescrire avant l’action publique » autonomie de l’action civile sur l’action pénale.

Par ailleurs, un nouvel article 2262bis, qui constitue le nouveau droitcommun de la prescription, a été inséré dans le Code civil. Désormais,seules les actions réelles se prescrivent encore par 30 ans. Quant auxactions personnelles, elles répondent à un régime distinct de prescriptionselon qu’elles sont contractuelles ou extra-contractuelles(qui se prescrivent par 5 ans à partir du jour qui suit où la personne léséea eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité dela personne responsable ; elles se prescrivent en tout cas par 20 ans àpartir du jour qui suit celui où s’est produit le fait qui a provoqué ledommage).

2. L’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil En vertu de la règle « le criminel tient le civil en état », le juge civil doit

surseoir à (attendre avant de) statuer tant que la juridictiontant que la juridiction pénale n’a pas rendu sa décision.

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Ainsi, le juge civil doit tenir pour vrai et ne peut remettre en cause ce qui aété définitivement, certainement et nécessairement jugé par le jugerépressif. On évite ainsi qu’une décision pénale soit contrediteultérieurement par un jugement civil.

Donc, si un juge pénal condamne un prévenu pour coups et blessures ouhomicide involontaires, il n’est plus besoin de démontrer une faute pourengager la responsabilité civile du prévenu. A l’inverse, l’acquittement duchef d’infraction involontaire oblige le juge civil saisi ultérieurement àrejeter toute demande d’indemnisation de la victime fondée sur la fauteou une présomption de faute et dirigée contre le prévenu acquitté.

Il n’en est pas de même de l’acquittement par la Cour d’assises du chef d’assassinat ou de meurtre, parce qu’il s’agit dans ce cas d’infractionsvolontaires ; un tel acquittement n’empêche pas que l’acquitté ait pucommettre une faute au point de vue civil.

D. Un principe controverséLe principe d’unité des fautes civile et pénale est contesté par denombreux auteurs qui estiment illogique de lier deux notions qui sontutilisées dans des contextes totalement différents…

Jointe au principe de l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, lathéorie de l’unité des fautes pénale et civile place le juge répressif devantun dilemme lorsqu’il doit juger d’un délit d’imprudence :

• Soit il acquitte le prévenu en tenant compte de ses facultés réduitesde perception et de prévoyance (ce qui prive ainsi la victime d’undroit de réparation) ;

• Soit il privilégie l’indemnisation de la victime et condamnepénalement le prévenu, malgré l’absence de négligencerépréhensible dans son chef.

C’est ainsi qu’en certaines matières, on assiste à une contamination dudroit pénal par les règles plus strictes du droit civil. On voit en effet le jugepénal apprécier la faute pénale au regard du critère du bon père defamille, ou établir le lien causal en se fondant sur la théorie del’équivalence des conditions, lorsqu’il est confronté à un délit de coups etblessures ou d’homicide involontaires. Cette dérive a d’ailleurs étécondamnée par la doctrine…

§3. Responsabilité délictuelle et responsabilité contractuelle (au seinde la resp. civile)

A. Comparaison sommaire des deux ordres de responsabilité

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• La responsabilité contractuelle est engagée lorsque quelqu’uncause un dommage à autrui, à la suite d’une faute consistant dansl’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat qui les lie.

• La responsabilité aquilienne (ou délictuelle) est engagée

lorsque, par son fait ou sa faute, quelqu’un cause un dommage à untiers, en dehors de toute relation contractuelle les unissant.

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE RESPONSABILITE AQUILIENNE

1 . La mise en demeure (acte d’unhuissier de justice ou lettrerecommandée à un débiteur) est, enprincipe, un préalable nécessaire à lamise en œuvre des sanctions de

l’inexécution.

1 . Ici, ce n’est pas le cas ; il y a unavertissement énergique tout au plus,mais pas de mise en demeure d’aucunesorte.

2 . Un mineur est, en principe, incapablede conclure des contrats en sortequ’aucune responsabilité ne peut luiêtre imputée.

2 . Un mineur peut encourir uneresponsabilité aquilienne en cas decomportement fautif, pourvu qu’il ait lacapacité de discernement(en principe, dès l’âge de 7 ans)

3 . Les actions contractuelles sontprescrites après 10 ans, et sont parfoissoumises à des délais de prescriptionsabrégés : 6 mois, 1 an, 5 ans,…

3 . Les actions extra-contractuelles seprescrivent par 5 ans, à partir de jourqui suit celui où la personne lésée a euconnaissance du dommage ou de sonaggravation et de l’identité de lapersonne responsable. Elles seprescrivent en tout cas pour 20 ans (aumax) à partir du jour qui suit celui oùs’est produit le fait qui a provoqué ledommage.

4 . Aucune solidarité de plein droit n’estde mise pour ceux qui sont liés par unemême dette en vertu d’un contrat.

4 . Il y a solidarité de plein droit sur based’une faute commune et dans les casoù la loi particulière le prévoit.

5 . Elle fait souvent l’objetd’aménagements conventionnels(clauses pénales, limitatives,exonératoires,…) Ex : devant uneattraction jugée risquée dans uneplaine de jeu,…

5 . De telles clauses sont plus rares enresponsabilité délictuelle, maisnéanmoins possibles, en matière quasi-délictuelle par exemple,…

B. Vers un rapprochement des deux ordres de responsabilitéLe rapprochement des deux ordres résulte d’une évolution tant jurisprudentielle

que doctrinale.1. Au plan de la faute - F

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En matière contractuelle En matière délictuelleLa faute résulte d’une violationd’une obligation découlant ducontrat : elle s’apprécie à l’aunedes engagements pris par lesparties.En matière d’intensité del’obligation, on distingue lesobligations de moyens et lesobligations de résultats

La faute s’apprécie au regard dudevoir général de prudencedéposé dans les articles 1382 et1383 du Code civil

2. Au pan du dommage – DEn matière contractuelle En matière délictuelleL’article 1150 du C.civ limitel’étendue du dommage au

dommage prévisible ;Seul le débiteur coupable de dol(agissement trompeur) doit réparerl’ensemble du dommage prévisibleet imprévisibleNB : la jurisprudence a restreint laportée de cette règle : il suffit quele dommage soit prévisible quantà son principe et pasnécessairement quant à sonétendue (c.à.d. son montant).

Même si la responsabilitéaquilienne ne connaît pas de règle

comparable à celle de l’article1150 du C. civ ,la Cour de cassation fait de laprévisibilité du dommage unélément de la faute.

3. Au plan du lien causal – LCEn matière contractuelle En matière délictuelleIl est indifférent que le lien decausalité soit direct ou indirect,médiat ou immédiat, du momentqu’il est nécessaire, et ce,nonobstant les termes del’article 1151 du C. Civ . ; la Courde Cassation l’affirme par

plusieurs arrêts

En matière aquilienne, parl’application de la théorie del’équivalence des conditions,doivent être réparés tous lesdommages qui découlentnécessairement de la fautecommise, peu importe qu’ils soient

directs ou indirects, médiats ouimmédiats.

Section 2. La philosophie du système§1. Aperçu des fonctions et fondements de la responsabilité civile

A. La faute comme fondement de la responsabilité « On peut être responsable même sans avoir commis de faute »

Les articles 1382 et 1383 du Code civil subordonnent la responsabilitéaquilienne du fait personnel à la preuve d’une faute ; l’idée est qu’un sujetn’est tenu de réparer toutes les conséquences dommageables de son acte

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que si elles découlent indiscutablement de sa faute ou de son imprudence,si légère soit leur influence sur le préjudice causé, et non des coups dusort, du hasard ou de la fatalité.Un tel système favorise donc l’esprit d’initiative et d’entreprise ; en ce

sens, il représente l’un des piliers de l’économie libérale.Mais l’inconvénient est qu’il appartient à la victime de rapporter la preuvede la faute commise par l’auteur de son dommage, elle court donc lerisque d’échouer dans l’administration de cette preuve ; le poids de lamalchance ou de l’aléa repose donc sur la victime (c’est pourquoi sont nésen 1804 les articles 1384 à 1386).La responsabilité fondée sur la faute prouvée remplit indiscutablementune fonction de réparation, mais aussi une fonction préventive etrégulatrice, voire une fonction répressive.

Enfin, le développement des assurances de la responsabilité a joué ungrand rôle dans l’évolution du concept de faute ; en effet, les juges sontplus enclins à retenir la responsabilité de l’auteur d’un acte dommageablelorsqu’ils savent que ce dernier est assuré et n’aura donc pas à supporterpersonnellement le poids de la réparation.

B. Le risque comme fondement de la responsabilité « On est responsable à partir du moment où l’on est créateur de

risque »

Dans le souci d’assurer une meilleure protection aux victimes, on vu naitreles « responsabilités objectives » qui reposent non plus sur la faute, maisbien sur la théorie du risque ; « toute activité supposant un risque pour autrui oblige son auteur à réparer le préjudice lié à cette activité, sansqu’il y ait lieu de démontrer une faute dans le chef de son auteur et sansque celui-ci puisse prouver son absence de faute afin d’échapper à saresponsabilité ».

Les responsabilités fondées sur le risque sont favorables à la victime (ellesfacilitent l’indemnisation en lui épargnant de devoir prouver une faute)mais pénalisent l’esprit d’initiative et d’entreprise ; elles remplissentvraisemblablement une fonction préventive.

C. L solidarité comme fondement d’un droit à la réparation « On ne sait pas qui est responsable ; catastrophe ! Dans ce cas,

solidarité »

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Une série de lois prévoient une indemnisation (forfaitaire ou fixée enéquité) à charge d’un fonds qu’elles instituent, au profit de certainesvictimes qui resteraient privées de réparation pour divers motifs (telsqu’une catastrophe naturelle, un auteur d’un dommage insolvable ou non

identifié,…).La collectivité va alors prendre sur elle la réparation d’un dommageassimilé à un coup du sort ou à un mal social. On pense notamment aufond de calamités,…

§2. L’évolution de la responsabilité délictuelleA. L’accentuation du rôle indemnitaire de la responsabilitéAu 19 ième siècle, la responsabilité civile était centrée sur son « sujet »,l’auteur de l’acte dommageable ; ainsi fondée sur la faute, laresponsabilité était conçue comme une responsabilité subjective.Mais depuis quelques décennies, on assiste à un mouvementd’objectivation de la responsabilité, qui se traduit par un effacementprogressif du sujet responsable devant la victime : la préoccupationpremière est désormais de faciliter la réparation des dommages causés àcelle-ci.Ce mouvement s’explique surtout en raison de la multiplication desrisques dans nos sociétés modernes issues de la révolution industrielle.

B. L’objectivation de la responsabilité civile à grands traits

D’ores et déjà, on peut relever divers biais par lesquels cette objectivations’exprime :1. Un assouplissement des conditions générales de la responsabilité,

lequel s’observe au niveau de chacune des trois conditions de celle-ci :

I. La faute : on relève une tendance à l’objectivation de lanotion. Tout se passe comme si le comportement de l’auteurdu dommage était évalué au regard du paradigme du« surhomme ». Ainsi, même des « poussières de faute » sont

érigées en fautes ; l’on assiste à une multiplication desstandards objectifs de comportement.

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II. Le lien causal : en ce qui concerne l’appréciation de celui-ci,la faveur accordée, par la Cour de cassation, à la théorie del’équivalence des conditions est de nature à multiplier lenombre des personnes responsables du dommage et à

favoriser ainsi l’indemnisation de la victime.III. Le dommage : certaines interprétations conduisent à étendrele domaine du dommage réparable.

2. Une extension du champ des régimes particuliers du Code civil :I. La « découverte » d’un principe général de responsabilité

objective du fait des choses dans la finale de l’article 1384, al.1er.

II. Un durcissement des régimes de responsabilité du faitd’autrui ;

3. L’institution de divers régimes légaux de responsabilité objective :en matière d’accidents du travail, d’accidents de la circulation et detransport, en matière de choses produites, de risque nucléaire, dedéchets toxiques,…

Véritable régime de responsabilité sans faute.

Chapitre 2. Les conditions communes à tous les régimesde resp. civile

En toute hypothèse, le demandeur doit administrer la preuve :• du dommage subi ;• du lien de causalité entre le fait générateur et le dommage

Section 1. Le dommage§1 er . La notion de dommage réparable

La victime devra donc démontrer qu’elle a subi un dommage ;« Le dommage consiste en la lésion d’un droit subjectif ou d’un intérêt,

pourvu qu’il soit stable et légitime ; pour être réparable, encore faut-il quele dommage soit certain et

personnel ».

A. La lésion d’un intérêt stable et légitime1. La lésion d’un intérêt…

La doctrine définit généralement le dommage comme étant la « perte,totale ou partielle, d’un bien, d’un avantage ou d’un intérêt que l’on avait ou sur lequel on pouvait compter ».

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Depuis 1939, la privation d’un avantage quelconque, même non juridiquement protégé, suffit pour satisfaire à la notion de dommage ausens de l’article 1382 du Code civil.

2. …stable et légitime

Pour entrainer une obligation de réparation, l’intérêt lésé doit de surcroitêtre un intérêt stable et légitime ; il appartient dès lors à la victime deprouver deux éléments.

• D’une part, elle doit montrer au juge qu’elle a perdu un avantage surlequel elle pouvait compter de façon durable (notion d’intérêtstable).

• D’autre part, la personne préjudiciée ne peut invoquer un avantageillicite, c.à.d. un avantage contraire à l’ordre public et aux bonnesmœurs (notion d’intérêt légitime). Cette deuxième exigence sera,logiquement, appréciée en fonction du contexte social.

B. Le caractère certain du dommagePar dommage « certain » , on entend celui qui est incontestable quant àson existence ; en d’autres termes, le préjudice est certain à chaque foisque la victime se serait trouvée indéniablement dans une situation plusfavorable si la faute n’avait pas été commise.

A l’opposé, il y a le dommage « hypothétique » qui, lui, n’est pasréparable ; il s’agit du préjudice qui est purement éventuel quant à saréalisation. Il existe une incertitude, un aléa qui entraine le rejet de laréparation. Néanmoins, le dommage ne doit pas être né et actuel, c.à.d.que le dommage peut être futur à condition qu’il se réalise avec certitudedans l’avenir.

Il y a lieu d’apporter une dernière précision concernant la théorie de laperte d’une chance : la perte d’une chance peut constituer un préjudiceréparable si elle est certaine et évaluable économiquement ; c’est donc laperte d’une chance d’obtenir un avantage probable.

C. Le caractère personnel du dommageSeule la personne préjudiciée, son représentant légal ou ses ayant causeuniversels ont qualité pour postuler la réparation du dommage.En effet, l’action populaire, qui reconnaitrait à tout individu le droit de sepourvoir en justice en vue de la défense d’un intérêt général, n’est pasadmise en droit belge. Seul le Ministère public se voit confier le soin dedéfendre les intérêts de la société.L’actio popularis se différencie de l’action de classe qui est une action

introduite par un individu lésé, qui agit non seulement pour lui, mais

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également pour toute personne se trouvant dans la même situation ; cetteaction n’est pas non plus admise en droit belge.

§2. Typologie des dommages réparables•

Le dommage matériel et le dommage moral• Le dommage aux biens et le dommage aux personnes• Le dommage direct et le dommage indirect• Le dommage positif et le dommage négatif

Chaque dommage présentera toujours 4 de ces 8 caractères.

A. Le dommage matériel et le dommage moralLe dommage matériel est une atteinte patrimoniale qui peut résulter• soit de lésions physiques• soit de dégâts causés à des biens

Le dommage moral, quant à lui, est une atteinte extra-patrimoniale, c.à.d.une atteinte aux intérêts moraux. On a par exemple les atteintes àl’honneur, à la réputation.La Presse peut souvent causer des dommages moraux !

Les deux types de préjudices sont en principe réparables et leurindemnisation peut même se cumuler. Même si l’évaluation du dommagemoral n’est pas toujours une tache aisée, c’est pourquoi, les tribunauxstatuent le plus souvent en équité, ex aequo et bono. Dans certains casmême, la réparation du préjudice moral ne sera pas financière mais plutôtsymbolique (1 euro symbolique).

B. Le dommage aux personnes et le dommage aux biensLe dommage aux personnes touche des personnes, dans leur corps(lésion, décès,…), leur patrimoine ou leurs intérêts moraux.

Le dommage aux biens concerne non pas une personne, mais un ouplusieurs biens de la victime.

1. Le dommage aux personnesa) Le dommage direct de la personne préjudiciée

D’une part, le dommage peut être d’ordre matériel (perte de revenu dufait de son incapacité de travail, la perte de potentiel économique sur lemarché de l’emploi,…) ou bien encore toute une série

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de frais auxquels la victime a du faire face en raison du fait dommageable(médicaments, honoraires du médecin,…

Enfin, si la victime directe décède sur le coup, elle ne pet plus prétendre à

un quelconque dommage matériel ni moral.b) Le dommage indirect des proches de la victime

D’une part, les proches de la victime peuvent, par ricochet, endurer undommage propre (perte du soutien financier qu’apportait la victime à lafamille, les frais funéraires,…)

D’autre part, les proches peuvent également solliciter l’indemnisation dupréjudice « ex haerede ». Ce dommage matériel et/ou moral, est celui subipersonnellement par la victime entre le jour de l’accident et son décès ;elle subit bien un dommage propre, mais dont la réparation sera postuléepar les héritiers au nom et pour le compte du défunt vu que la créanced’indemnisation est tombée dans la succession.

2. Le dommage aux biensLe dommage aux biens peut comporter plusieurs caractéristiques :il peut être direct ou indirect, partiel ou total ou encore, positif ou négatif.

C. Le dommage direct et le dommage indirectLe dommage direct est celui que la personne préjudiciée éprouve elle-même.Le dommage indirect, quant à lui, est celui que supporte une personne dufait qu’un préjudice est causé à un autre, qui est la victime directe(ce que subissent les héritiers de la victime,…)

D. Le dommage positif et le dommage négatif Le dommage positif, appelé aussi « damnum emergens », consiste en laperte pour la personne préjudiciée de ce qu’elle possède ou de ce qu’elleavait acquis (la perte d’unmembre, de revenus la perte d’un chien,…).Le dommage négatif, quant à lui, concerne le manque à gagner, de laperte d’un bénéfice escompté ou d’un accroissement quelconque (suite àun accident de la circulation, la voiture du laitier est en réparation ; de cefait, il ne peut plus assurer sa tourner pendant trois jours, autrement dit, il

est comme qui dirait au chômage).

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Section 1. Le lien de causalité§1 er . Notion de causalité

Pour pouvoir obtenir réparation de son dommage, la victime doit établirnon seulement l’existence du fait générateur (faute prouvée, vice de

chose,…) et la réalité du dommage subi ; mais aussi le lien causalunissant les deux (C. civ. art. 1382 à 1386bis) .

Le lien causal est avéré lorsqu’on peut tenir qu’en l’absence du faitreproché, le dommage ne se serait pas réalisé : dans ce cas, on peutadmettre que le fait en question est la cause (ou en tout cas, l’une descause) du dommage.

§2. Théories relatives à l’appréciation du lien causalA. Les théories de la causa proxima et de la causalité efficienteSelon la théorie de la « causa proxima », seule doit être retenue la causefautive qui est la plus proche du dommage ; il saute aux yeux combiencette théorie est frustre, aussi on ne s’y attarde pas.La théorie de la causalité efficiente est ardemment défendue par MM.PIRSON et DE VILLÉ ; leur idée est de ne retenir que la faute qui a le pluslourdement pesé, c.à.d. ayant joué un rôle prépondérant, dans laproduction du dommage.Autrement dit, cette théorie n’entend retenir que les éléments qui sont lescauses efficientes de la production du dommage, les autres n’étant pasregardés comme des causes proprio sensu (prépondérante).Cette théorie repose essentiellement sur la distinction entre la cause diteefficiente, d’une part, et la condition ou l’occasion, d’autre part. Elle inviteà rechercher si oui ou non, la faute a réellement été à l’origine dudommage ou si elle n’a fait que permettre, libérer ou favoriser le jeu de lavéritable cause du dommage.

B. La théorie de la causalité adéquate (car les précédentes ne sont plus guère à l’honneur)

Pour l’auteur allemand VON KRIES, on ne saurait considérer qu’unévénement est en lien causa avec le dommage sur la seule base duconstat que sans lui, ce dernier ne se serait pas réalisé.

Donc, selon la théorie de la causalité adéquate, seule doit être retenue lafaute qui, dans le cours ordinaire des choses (ou suivant un enchainementnormal des événements) était objectivement de nature à produire ledommage.Ainsi, seule doit être retenue la faute dont l’auteur savait ou devait savoirqu’elle était susceptible de provoquer le dommage tel qu’il s’est réalisé.

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Donc, a lieu un tri entre les différentes causes, en tenant compte du faitque chacune d’elle peut présenter un pouvoir causal différent, et neretenir que celles qui sont dans un rapport de causalité « adéquat » avecle dommage.

Cette théorie a le mérite de restreindre le champ de la responsabilité ; elleménage au juge une marge d’appréciation, qui lui permet de prendre enconsidération les particularités de chaque cas d’espèce.

C. La théorie de l’équivalence des conditions (à laquelle la Cour adonné sa faveur)Elle a été proposée dans la moitié du 19 ième siècle par le juriste allemandVON BURI.Elle repose sur le constat suivant : des causes multiples sont nécessairespour que survienne un dommage, mais aucune de ces conditions n’est, enelle-même, suffisante pour produire le préjudice. Toute sont nécessaires àcet effet puisque le dommage résulte de leur concours ou de leurenchainement. Dès lors qu’il aurait suffi qu’une seule de ces conditionsvint à manquer pour que le dommage soit évité (ou se présente d’uneautre manière), on peut les considérer toutes comme équivalentes, d’où lenom donné à cette théorie).« Chaque coactivité cause toute la conséquence » (DEMOGUE)

« Sans la faute de l’un, le dommage ne se serait pas produit

tel qu’il s’est réalisé in concreto »

Seulement, une application rigoureuse des principes conduit à étendreexcessivement le champ de la responsabilité. Toutefois, elle a le mérited’offrir à la victime un nombre illimité de recours. Ainsi, cette théoriepermet de prendre en compte non seulement les dommages qui dériventdirectement ou immédiatement de la faute, mais également lesdommages indirects ou médiats, pourvu qu’ils soient nécessaires.

A ce titre, la doctrine considère que la certitude du lien causal ne doit pasêtre absolue ; il faut, mais il suffit, que l’existence du lien causal présenteun degré élevé de vraisemblance, considéré comme satisfaisant par le

juge du fond. Les juges prennent donc en considération les données de lascience, les présomptions, le cours normal des choses, le bon sens etl’exclusion d’autres causes probables.

D. Etat du droit belge

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La jurisprudence opte généralement pour la théorie de l’équivalence desconditions, qui est certainement la plus favorable à la victime dans lamesure où elle a vocation à multiplier le nombre de responsables et doncà augmenter ses chances d’obtenir la réparation intégrale du dommage.

Toutefois, certains juges de fond adoptent parfois la théorie de la causalitéadéquate (en matière de vols de voiture par exemple, qui ont été facilitéspar la circonstance que le propriétaire a laissé ses clés dans le véhicule) ;et leurs décisions ne sont pas nécessairement censurées par la Cour decassation.

§3. La causalité multipleDans certaines situations complexes, il n’est pas rare que plusieurs fautes,faits ou événements soient impliqués dans la survenance du dommage ;on parle alors de causalité multiple, ou de pluralité de causes.

A. Le cas des fautes concurrentes de tiers autres que la victimeIl arrive qu’un même dommage résulte de la combinaison de plusieursfautes (C. civ. art. 1382 et 1383) ou faits(C. civ. art. 1384 à 1386bis, art. 544, etc.,…) imputables à despersonnes différentes.Dans ces cas, il appartient au juge de vérifier, pour chaque faute, si, sanscelle-ci, le dommage se serait réalisé tel qu’il se présente in concreto.

1. L’obligation à la dettea) Principe : la notion d’obligation « in solidum »

Lorsque plusieurs fautes ont concouru à provoquer un dommage, le droitbelge prône le principe de la responsabilité in solidum des auteurs defautes concurrentes : chaque auteur est tenu « pour le tout » à l’égard dela victime, quelle que soit la gravité des fautes respectives ou lefondement assigné à la responsabilité de chacun. Pratiquement, celle-cipeut réclamer à l’un quelconque des responsables la réparation intégralede son dommage.

Ce principe s’applique tant en matière délictuelle qu’en matièrecontractuelle, pourvu que sans l’une des fautes commises, celles desautres n’auraient pas suffit à causer le dommage.La victime a un droit d’élection, ce qui lui apporte une précieuseprotection.

Dans cette conception, l’obligation « in solidum » résulte de la coexistencede plusieurs dettes distinctes, ayant un même créancier (la victime) et desobjets identiques (réparer la totalité du dommage),

mais des causes différents

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La subrogation est la substitution d’une personne à une autre, dans unrapport de droit, en vue de permettre à la première d’exercer tout ou enpartie des droits qui appartiennent à la seconde.La subrogation suppose l’existence d’une dette, un paiement effectif et

l’intervention d’un tiers qui réalise le paiement à la place du débiteur. Ence qui concerne plus particulièrement l’article 1251, 3°, il vise nonseulement les hypothèses dans lesquelles plusieurs débiteurs sont tenusen même temps d’une seule et même dette mais aussi le cas de pluralitéde responsables d’un dommage condamnés in solidum.La subrogation a un effet extinctif et un effet translatif :• le paiement de la dette entraine l’extinction de celle-ci ;• et il entraine le transfert de la créance du subrogeant (créancier) au

subrogé (le solvens).

Donc, le responsable qui effectue le paiement acquiert les droits ducréancier (la victime en l’occurrence) àl’égard des coobligés. Le solvens (subrogé) est mis à la place du créancieroriginaire, le subrogeant ; il se substitue à lui dans tous ses droits, actionset privilèges en manière telle que la situation juridique du subrogé devientla situation propre du subrogeant.

II. La responsabilité délictuelleSelon une autre opinion, le solvens devrait pouvoir exercer un recourscontre les coobligés in solidum en se fondant sur une application directedes articles 1382 et suivants du Code civil.Le raisonnement des partisans de cette solution est le suivant : lepaiement effectué en réparation de la totalité du dommage causé à lavictime entraine dans le chef du solvens un dommage distinct étant donnéque sa faute (ou son fait) n’est pas la seule à avoir contribué à laréalisation dudit dommage

III. L’interdiction de l’enrichissement sans causeUn arrêté de la Cour de cassation a admis qu’à défaut d’actionsubrogatoire, le solvens pouvait agir contre ses coobligés sur la base del’enrichissement sans cause dans la mesure où son débours (sommed’agent avancée) a permis la réparation intégrale du « dommage dont iln’était responsable qu’avec d’autres ».Ce fondement n’est pas pertinent pour deux motifs :

• Tout d’abord, l’action « in rem verso » qui sanctionnel’enrichissement sans cause, ne peut être introduite qu’à titresubsidiaire

• Ensuite, et plus fondamentalement, il st contestable d’estimer que

l’appauvrissement du solvens (et donc, l’enrichissement descoobligés) est sans cause. En effet, le paiement du solvens trouve sa

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cause dans la loi de sorte qu’il s’acquitte en réalité de sa propredette.

c) Portée du recours contributoire (!! EXAMEN !!)

Dans leurs relations entre coobligés, les différents responsablespartageront la charge de la réparation proportionnellement à la part deresponsabilité qui incombe à chacun ; cette part est déterminéesouverainement, en fait, par le juge de fond.

I. La gravité des fautes respectivesLa solution traditionnelle consiste à opérer le partage des responsabilitésen fonction de la gravité des fautes respectives.

• Pourtant, cette solution ne fait pas l’unanimité en doctrine ; car lecritère suggéré est d’un maniement délicat dans une série desituations.

• Ensuite, on reproche au critère de la gravité des fautes respectivesd’être imprécis et de ne pas tenir compte de l’influence des fautessur le dommage tel qu’il s’est produit. En effet, une cause trèslégère peut être la cause principale du dommage.

• Enfin, plus fondamentalement, ce critère pose un problème decohérence. Il n’est pas logique, au stade de la contribution à ladette, de s’en remettre uniquement au critère de la gravité desfautes respectives, à l’exclusion de toute référence au lien causal

En matière civile, on tiendra donc compte de l’étendue du dommage, etnon de la gravité de la faute, comme c’est le cas en matière pénale.

II. Le pouvoir causal Le partage devrait se faire en tenant compte du pouvoir causal dechacune des fautes, c.à.d. en fonction de l’incidence de chacune desfautes sur la réalisation du dommage.Il y aurait lieu d’évaluer dans quelle mesure chaque faute ou fait adéterminé le dommage dans son existence et son étendue.

Toutefois, notons que le Cour de cassation n’entend pas rejeter le critèrede la gravité des fautes respectives des coobligés, mais se borneétrangement à le considérer comme équivalent au critère du pouvoircausal de chacune des fautes.

III. Le partage par « parts viriles »

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Conformément à la théorie de l’équivalence des conditions, chacune desfautes retenues et/ou chacun des faits générateurs de responsabilité étaitindispensable à la réalisation du dommage.Par principe, ils ont donc joué un rôle causal identique (équivalent) dans la

survenance du dommage, ce qui justifierait, selon les partisans de cecritère, un partage des responsabilité par « parts viriles » (égales) entreles différents coobligés « in solidum ».

B. La faute de la victime1. Principe : le partage des responsabilités

Il se peut que la victime (ou une personne dont la victime répond), par safaute, ait contribué à la réalisation de son dommage, sans en être la causeexclusive.En cas de concours entre la faute de l’acte dommageable et la faute de lavictime, la jurisprudence préconise un partage de responsabilité. Lavictime (ou ses ayants-droits) supporte une part de la responsabilité et n’ade recours contre le responsable qu’en proportion de la part deresponsabilité mise à charge de ce dernier.

Parce que le droit est le contraire de l’arbitraire, il est :• socialement acceptable• moralement juste• économiquement efficace

En fait, la faute de la victime est certes en relation causale avec ledommage qu’elle a subi, mais elle l’est aussi avec le dommage subi parle(s) coresponsable(s) ; il est clair que sa (leur) dette de responsabilité neserait pas née, ou n’aurait pas eu le même poids, sans la faute de lavictime.Voilà pourquoi la victime doit supporter une part de responsabilité en casde concours entre des fautes ou des faits générateurs de responsabilitésimputables à elle-même et à d’autres personnes ; ce n’est donc pas parcequ’elle a contribué à son propre dommage.

En définitive, chacun des protagonistes est la victime de l’autre et donc, ilspeuvent agir l’un contre l’autre sur base des articles 1382 du Code civil etsuivants pour obtenir réparation de leur dommage. Toutefois, pour obvierà l’effet pervers qu’engendrerait l’extension de dette par compensation, la

jurisprudence a opté (dans un souci d’équité) pour un partage desresponsabilités.

2. Exceptions

La rigueur de cette jurisprudence à l’égard de la victime est atténuéelorsque la victime est privée de discernement : même si elle a commis

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un acte objectivement illicite, le partage ne peut lui être opposé et le tiersresponsable sera donc tenu de la réparation intégrale du dommage.Selon certaines juridictions, le partage des responsabilités n’est pas nonplus de mise lorsque le tiers responsable du dommage a commis une

faute intentionnelle . La faute délibérée absorberait en quelque sortetoute la causalité ; « fraus omnia corrumpit » .

Notons encore que dans le cadre particulier de l’indemnisation desusagers faibles de la route, la victime bénéficiera d’une indemnisationcomplète sans qu’il soit tenu compte de sa faute, à moins que celle-ci soitintentionnelle.Attention la faute intentionnelle ne peut, par ailleurs, être opposée auxmineurs âgés de moins de 14 ans au moment de l’accident.

C. La survenance d’une cause étrangère exonératoire (incidencesur le lien causal)Pour échapper à sa responsabilité, le défendeur peut tenter d’établir quele dommage résulte exclusivement d’une cause étrangère exonératoire :événement de force majeure / fait d’un tiers / faute de lavictime .

Les causes étrangères exonératoires sont des causes d’exonération deresponsabilité, tous comme les faits justificatifs (qui ont une incidence surla faute (cause) et non sur le LC) : légitime défense / état denécessité / contrainte / erreur invincible / …

1. Incidence de la force majeurea) Notion de la force majeure

La force majeure ou le cas fortuit est un événement qui s’impose àl’auteur d’un fait et le contraint à agir ou l’empêche d’agir. Cet événementest :

• Imprévisible• Irrésistible• indépendant de la volonté du défendeur en responsabilité

On pense par exemple au déchainement des forces de la nature :tremblement de terre, raz de marrée, tempête, inondation, grêle,

foudre,…

La force majeure peut aussi consister en une maladie ou un malaisephysique :

crise d’épilepsie ou d’hypoglycémie, crise cardiaque,…

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La force majeure peut aussi être un fait de l’autorité publique ou un « faitdu prince » :

expropriation pour cause d’utilité publique, réquisition,…

La force majeure peut aussi être le fait d’une collectivité :grèves, guerres, émeutes, bousculade,…

b) Conditions de la force majeure Trois conditions doivent être remplies par l’événement en question pourqu’il puisse être qualifié de cas de force majeure.

I. 1 ère condition : un événement imprévisiblePour être constitutif d’un cas de force majeure, l’événement doit êtreimprévu et imprévisible ; en effet, si l’événement était prévisible, ledéfendeur en responsabilité, sous peine de commettre une faute, auraitété dans l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pourl’éviter ou éviter ses conséquences dommageables.Ce caractère prévisible ou non d’un événement doit s’apprécier demanière raisonnable suivant le critère du bon père de famille.

II. 2 e condition : un événement irrésistiblePour être constitutif d’un cas de force majeure, l’événement doit êtreirrésistible ou insurmontable . Le défendeur en responsabilité devaitainsi être dans l’impossibilité d’empêcher la survenance du dommage.Ainsi, si l’obstacle pouvait être surmonté par un homme normalementprudent et diligent, il ne s’agit pas d’un cas de force majeure ; enrevanche, si l’obstacle était exceptionnel et d’une telle intensité que pourl’éviter ou éviter ses conséquences, il aurait fallu faire preuve d’unediligence extraordinaire, la force majeure sera alors admise.

III. 3 e condition : un événement indépendant de

la volonté du défendeurPour être constitutif d’un cas de force majeure, l’événement doit êtreindépendant de la volonté du demandeur en responsabilité . Nepeut être qualifié de force majeure, l’événement qui a été provoqué oufavorisé par une faute, une imprudence ou une négligence du défendeur.

Pourrait ainsi être considérée comme force majeure, la brusque perte deconscience frappant un conducteur et provoquant un accident, pourautant que celle-ci soit survenue de façon tout à fait imprévisible et

inopinée : cela veut donc dire que l’on ne peut pas admettre la forcemajeure si des symptômes se sont manifestés avant de prendre le volant

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ou si la maladie a été diagnostiquée avant la conduite du véhicule. Cardans ce cas, ce n’est pas l’événement qui est imprévisible mais plutôt lemoment où il est susceptible de se produire.

c) Preuve de la force majeureLa preuve du cas de force majeure incombe au défendeur ; puisqu’ils sontde purs faits matériels, ils peuvent être prouvés par toutes voies de droits,y compris les présomptions et les témoignages.

d) Effets de la force majeureLa force majeure n’a un effet exonératoire de responsabilité que dansl’hypothèse où elle apparait comme l’unique cause du dommage.

e) Interventions ponctuelles du législateur On rencontre, ça et là, des régimes particuliers de responsabilité, pourlesquels le législateur exclut, limite ou consacre expressément certainscas de force majeure.

• Les titulaires du droit de chasse répondent du dommage causé auxchamps, fruits et récoltes par le gros gibier provenant des parcellesboisées sur lesquelles ils possèdent le droit de chasse ; sans qu’ilspuissent invoquer le cas fortuit, ni la force majeure.

• Les assureurs qui sont tenus d’indemniser les usagers faiblesvictimes d’un accident de la circulation, ne peuvent invoquer le casfortuit pour se libérer de celle obligation légale.

• …

2. Incidence du fait d’un tiers ou de la faute de la victimeLe fait d’un tiers peut également constituer une cause exonératoire deresponsabilité pour le défendeur qui l’invoque si ce dernier parvient àétablir que ce fait est la cause réelle du dommage, à l’exclusion de sonpropre fait.

La faute de la victime , on l’a vu, peut également conduire à uneatténuation de la responsabilité de l’auteur du fait dommageable ; si elleest la cause exclusive du dommage, elle pourra même être totalementexonératoire.

…. (saut de page) …

§2. Les prédispositions pathologiques de la victime

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La détermination du lien causal entre la faute du tiers et le dommage ainsique l’appréciation de l’étendue du dommage peuvent s’avérer délicatslorsque la victime était affectée préalablement à l’accident deprédispositions pathologiques.

Il est devenu classique de distinguer trois hypothèses :• Soit la victime était déjà affectée d’un mal préalablement à

l’accident(qui ajoute un mal nouveau ou aggrave l’état préexistant) ;

• Soit elle présentait une vulnérabilité particulière aux lésionsrésultant de l’accident(Indépendamment de tout processus d’invalidation en cours)

• Soit elle se trouvait dans un état pathologique, non encoreinvalidant , mais dont il est acquis qu’il eut évolué,indépendamment de tout accident, vers une invalidationprogressive.

A. Première hypothèse : l’état antérieur pur et simpleLa victime était atteinte d’un mal antérieurement à l’accident, mais sonétat s’est trouvé aggravé par celui-ci (ex : un unijambiste qui vient deperdre un bras dans un accident).

Comment apprécier le préjudice subi et fixer son étendue ?Il s’agit de l’évaluation « in concreto » du préjudice, ce qui commande detenir compte des circonstances particulières(ainsi, l’indemnisation pour la perte d’un œil peut varier suivant les casd’espèce).

a) Dans certains cas, le problème est simple : la victime devantêtre replacé dans l’état où elle se serait trouvée si l’accidentne s’était pas produit, elle ne pourra réclamer à charge duresponsable, que la réparation du seul dommage nouveausubi du fait de l’accident ;le tiers fautif devra uniquement réparer l’aggravation du malpréexistant, conséquence nécessaire de sa faute.(ex : la perte d’un bras est à indemniser en faisait di de lésions

antérieures aux jambes)

b) Mais quid lorsque la lésion préexistante a été amplifiéepar la seconde lésion au-delà de la simple addition des

deux lésions ?

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(ex : le borgne qui a la suite d’un accident devient aveugle etne peut désormais plus exercer son travail professionnel)

B. Deuxième hypothèse : la simple réceptivité (des faveurs pour la

victime)La victime n’est atteinte d’aucun mal avant l’accident, mais est affectéed’une fragilité ou d’une réceptivité particulière favorisant la survenance oul’étendue de son dommage suite à l’accident imputable à la faute d’untiers ; deux éléments se conjuguent dans la réalisation du préjudice (uneréceptivité particulière du dommage et la faute du responsable).(ex : une personne décédant d’une allergie au médicament prescrit poursoigner des

séquelles de l’accident)

De nos jours, les cours et tribunaux décident généralement qu’il incombeau tiers responsable de réparer l’intégralité du dommage causé à lavictime ; cela signifie qu’il doit assumer le risque de la réceptivitépersonnelle de la victime.

C. Troisième hypothèse : la préexistence d’un état évolutif La victime était atteinte d’un mal inéluctablement antérieur à l’accident,sur lequel viennent se greffer les effets négatifs d’un fait dommageable.Cette hypothèse est délicate à apprécier et la jurisprudence esttâtonnante.

En principe, l’état morbide préexistant ne supprime ni la faute, nil’obligation de réparer. Néanmoins, le juge tiendra compte descirconstances particulières pour réduire le montant de la réparation : celle-ci portera sur l’anticipation du préjudice lié à la survenance de l’accident.Autrement dit, le préjudice subi par celui qui allait de toute façon mourir à+/- brève échéance des suites de sa maladie évolutive mortelle consistenon dans le décès mais dans l’abrègement de sa vie.

D. Considérations finales1. « L’auteur du dommage doit prendre la victime comme il la

trouve » : dès lors qu’en dépit de ses « prédispositions » au

dommage ou de son état antérieur, elle menait une vie « normale »,c’est bien la faute qui a entrainé l’intégralité de son état actuel.

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On reconnait donc un lien de causalité entre cette faute et le décès,la cécité,…

2. Il est incontestablement fait application de la théorie de

l’équivalence des conditions pour l’appréciation du lien de causalité(sauf décisions marginales).

3. Une fois admis le lien causal entre la faute et le dommage, encoreconvient-il d’évaluer précisément l’étendue du dommage réparable ;étant entendu que cette évaluation :

• D’une part, doit se faire « in concreto »(en prenant en considération l’état antérieur de la victime)• D’autre part, qu’il y a lieu de réparer« tout le dommage, mais rien que le dommage ».

§3. La perte d’une chanceLa théorie de la perte d’une chance reçoit deux acceptions différentes.Au départ créée pour pallier l’absence de dommage certain, elle a étéutilisée ensuite pour contourner le défaut de causalité certaine entre lafaute et le préjudice réellement subi.

A. Les deux conceptions de la théorie de la perte d’une chance1. La conception restrictive : la perte d’une chance d’obtenir un

avantage probable(qui vient se substituer à l’incertitude relative du dommage)

Ce concept a été élaboré à l’origine pour permettre à la victime d’obtenirune indemnisation lorsque, sans pouvoir démontrer un préjudicecertain , elle est en mesure de prouver qu’elle a perdu l’espoir de voir seréaliser une situation meilleure.

• Donc, l’avocat négligent qui n’interjette pas appel dansle délai prescrit à peine de déchéance fait perdre une chance àson client de voir le jugement rendu en première instanceréformé.• Le jockey qui se rendait à une course avec son cheval etqui, en chemin, est victime d’un accident causé par un tiers,de sorte qu’il ne parvient pas à se rendre à temps à la course ;impossible de gagner. Il faudra tenir compte du palmarès ducheval, des chances qu’il avait de l’emporter ce jour là,…)

A travers ces exemples, on constate que, sans le recours à la théorie de laperte d’une chance, la victime ne pourrait bénéficier d’une indemnisation.

En effet, elle ne souffre d’aucun dommage réel, mais c’est seulement

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l’éventualité d’un événement favorable qui disparait avant de pouvoir seréaliser.

2. La conception extensive : la perte d’une chance d’éviter lasurvenance d’un risque

Il s’agit, ici, d’éviter la survenance d’un risque tel qu’un décès, une faillite,une naissance entachée de séquelles,… etc. Cette conception vise dessituations où fait défaut le lien causal certain entre la faute et ledommage réellement subi .

• Lorsque le médecin commet une erreur de diagnostic (nepas déceler une gangrène gazeuse) entrainant pour sonpatient une amputation de la jambe, il va de soit que cepatient subi un dommage.Mais est-il en lien causal certain avec la faute du médecin ?

o Il n’est pas certain que si l’erreur de diagnostic n’avaitpas été commise, le patient n’aurait pas dû être amputéde sa jambe

o Par contre, on peut soutenir avec certitude que si lafaute médicale n’avait pas été commise, le patientn’aurait pas perdu une chance d’éviter l’amputation.

Cette situation montre que la victime subit un préjudice concret(amputation, faillite, etc.) mais qu’à défaut de pouvoir affirmer aveccertitude que sans la faute, ce dommage ne se serait pas produit tel qu’ils’est produit « in concreto », on va raisonner en disant que, sans la faute,la possibilité (ou la chance) d’éviter la survenance du risque n’aurait pasdisparu.Ici encore, la difficulté sera de devoir évaluer la chance perdue…

3. Tableau récapitulatif

PERTE D’UNE CHANCE

CONCEPTION RESTRICTIVE CONCEPTION EXTENSIVE

INCERTITUDE DE DOMMAGE CERTAIN INCERTITUDE DULIEN CAUSAL

Perte d’une chanced’un avantage probable

Perte d’une chanced’éviter la réalisation

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Dans la conception restrictive , il est certain que le dommage estpurement hypothétique ; dès lors qu’il ne s’est pas réalisé et c’est laraison pour laquelle fut consacrée la théorie de la perte d’une chance afinde permettre à la victime d’être indemniséeDans la conception extensive , par contre, un dommage s’est réalisé,mais le lien causal entre la faute et le dommage n’étant, la plupart dutemps, pas évident à démontrer, on a étendu (d’où extensive) dans unsouci d’indemnisation de la victime, la théorie.

Désormais, et ce, depuis le 15 mai 2007, il existe une loi relative àl’indemnisation des dommages résultant des soins de santé instaurant unsystème de responsabilité objective :

• Fonds des accidents soins de santé (art. 12 à 16)• Recours toujours possible en cas de faute intentionnelle ou lourde

(art. 7)• Souscription obligatoire d’une assurance dans le chef du prestataire

de soins (art. 8)Section 4. Clauses d’exonération totale ou partielle de

responsabilité§1. Présentation générale

Songeons aux panneaux :• « Dans tous les cas, la baignade se fait aux risques et périls des

usagers »• « Si vous vous aventurez dans cette propriété, c’est à vos risques et

périls »• …

Le but de ceux-ci est d’atténuer la responsabilité délictuelle (C. civ. art.1385) .En l’absence de dispositions spécifiques dans le Code civil, le régime desclauses d’exonération totale ou partielle de responsabilité estessentiellement l’œuvre de la jurisprudence, parfois confirmée, complétée,infléchie ou renforcée par des interventions, en ordre dispersé, dulégislateur.

Les clauses d’exonération totale ou partielle de responsabilité peuventêtre classées selon différents critères ; ainsi, on peut distinguer :

• D’une part, celle portant sur les conditions d’existence de laresponsabilité :

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(les clauses qui ixes des délais de recours, ou d’action en justice,…)

• D’autre part, celle relatives aux conséquences de laresponsabilité :

(les clauses relatives à la mise en œuvre de la responsabilité ou à lalimitation de la réparation)

§2. La validité du principe des clauses d’exonération (limitative)La validité des clauses exonératoires de responsabilité n’est pas contestéeen droit belge :

• non seulement en matière contractuelle (où la doctrine et la jurisprudence se fondent sur le caractère supplétif des dispositionslégales régissant cette matière et sur le principe de l’autonomie dela volonté)

• mais aussi extra-contractuelle (où il est admis que les articles 1382et 1383 du Code civil ne réglementent que des intérêts privés etn’ont pas pour but exclusif de sauvegarder l’intérêt général ; cesdispositions n’ont donc pas le caractère de lois d’ordre public etqu’on peut y déroger par convention).

§3. Les restrictions à la validité des clausesNonobstant leur validité de principe, admise par la doctrine et la

jurisprudence, ces dernières leur assignent une série de limites.

A. L’ordre public et les lois impérativesLes clauses d’exonération ne sont pas valables lorsqu’elles sont contrairesà l’ordre public ou à des dispositions légales impératives. Ainsi, les clausesd’exonération, totale ou partielle, de responsabilité sont d’office nullesdans le domaine d’application de la loi du 25 février 1991 relative à laresponsabilité du fait des produits défectueux : « La responsabilité du

producteur ne peut être limitée ou écartée à l’égard de la victime par uneclause limitative ou exonératoire de responsabilité ».

B. Le dol et la faute intentionnelle (!! EXAMEN !!)Il est unanimement admis qu’une clause exonératoire de responsabilitédoit être déclarée inapplicable en cas de dol. Cette interdiction des’exonérer du dol serait justifiée par l’adage fraus omnia corrumpit , lafraude se caractérisant par la volonté de son auteur de se soustraire,même sans intention de nuire, mais par un moyen approprié, à

l’application d’une règle obligatoire.

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Un autre auteur propose, pour sa part, une explication nouvelle, qui faitappel à la notion d’abus de droit : dans le cadre de l’appréciation « inconcreto » des circonstances d’espèce, le juge peut estimer que ledébiteur abuse de son droit en invoquant une clause restrictive de

responsabilité pour couvrir son dol. La notion même de dol est égalementcontroversée :a) Selon une première conception, abandonnée depuis 1911, lanotion est particulièrement étroite ; le dol désigne la faute commisedans le but de nuire, de porter préjudice à autrui. Il se caractérisepar la malveillance ou l’intention méchante qui anime l’auteur del’acte.

b) Pour une partie non négligeable de la doctrine, le dol est unconcept large ; l’accent est mit sur le seul caractère intentionnel dela faute, à l’exclusion de toute volonté de causer un dommage. Ainsi,pour J. DABIN, une faute est dolosive lorsque son auteur a manquéintentionnellement et sciemment à ses obligations.

c) Une troisième catégorie d’auteurs adopte une positionintermédiaire ; ils abandonnent toute référence à l’intention denuire, mais restent attachés à l’idée que l’auteur du dol a voulu lesconséquences dommageables de sa faute, ou du moins en a euconscience, et a néanmoins persisté dans son comportement.

C. Quid de la faute lourde ?A la suite d’une célèbre mercuriale (discours d’ouverture de l’année

judiciaire) du Procureur général DE TERMICOURT, la Cour de cassationrejeta, par deux arrêts décisifs, l’assimilation de la faute lourde au dol,admise jusqu’alors ; la Cour a donc confirmé la possibilité de s’exonérerdes suites de sa faute lourde.

a) La différence irréductible entre la faute lourde et le dol est quel’élément intentionnel fait défaut dans le cas de la faute lourde, quel

que soit son degré de gravité ; il est dès lors exclu de les confondre.

b) De l’avis unanime de la doctrine et de la jurisprudence, les termes« faute lourde » et « faute grave » sont synonymes. Il est certainaussi que la faute lourde n’est pas une faute volontaire et que sonauteur ne veut pas la réalisation du dommage.

c) La notion de faute lourde est parfois mise en relation avec laprévisibilité ou la probabilité du dommage, ou déduite de

l’importance du dommage causé ; plus souvent, l’accent est mis surla gravité du manquement.

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« La faute lourde peut être déduite de l’importance de la différenceexistant entre le comportement incriminé et le comportement d’unindividu normalement prudent et raisonnable placé dans les mêmescirconstances de fait ».

D. L’atteinte portée à l’essence du contratUne quatrième limite à la validité des clauses exonératoires concerne plusparticulièrement les contrats.

De manière constante, la jurisprudence déclare inefficaces les clausesexonératoires de responsabilité qui ont pour effet de « détruire l’objet del’engagement » ou, suivant une terminologie fluctuante, qui porte atteinte« à une obligation essentielle du contrat » ou encore « vident laconvention de sa substance ». En effet, la solution contraire permettrait audébiteur de s’obliger à une prestation déterminée, tout en précisant qu’ilne répond pas de l’inexécution de cette obligation.La détermination de ce qui fait partie de l’essence d’une convention estune question d’espèce laissée à l’appréciation du juge de fond.

Chapitre 3. Les conditions propres aux différentsrégimes de responsabilité

L’article 1384, alinéa 1 er du Code civil se présente sous la forme d’untriptyque :« On est responsable

• non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait ;• mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on

doit répondre ;• mu des choses que l’on a sous sa garde ».

Section 1. La responsabilité du fait personnel « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage,oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » proclamel’article 1382 du Code civil .Séduisante par sa généralité, la formule est trompeuse et elle estrapidement corrigée ; l’article 1382 lui-même précise que l’obligation deréparer concerne les dommages causés non pas par un fait quelconque del’homme, mais par un fait fautif.L’article 1383 du Code civil ajoute qu’une négligence ou une imprudencepeut aussi engager la responsabilité civile.

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Indistinctement invoqués aujourd’hui, les articles 1382 et 1383 du Codecivil forment le siège de la responsabilité du fait personnel et constituentle droit commun de la responsabilité délictuelle.

§1. Notion de fauteA. La fauteIl s’agit de

• la transgression d’une norme de droit : objectif • qui peut être attachée à la conscience (caractère imputable) :

subjectif

La faute comprend trois éléments constitutifs :a) la violation (méconnaissance) d’une norme de conduite, d’une

norme de droit ;b) imputabilité (capacité de discernement) ;c) prévisibilité du dommage.

B. Analyse des éléments constitutifs de la fauteSelon les auteurs, l’accent est mis tantôt sur la violation du droitobjectif , tantôt sur l’imputabilité (un comportement n’est considérécomme fautif que si le sujet est doté d’un minimum de conscience et devolonté).

D’autres auteurs définissent la faute comme « lésion d’un intérêtlégitime » ou comme « atteinte à la confiance légitime d’autrui ».

1. La méconnaissance d’une norme de conduitea) La violation d’une obligation déterminée (légale)

Lorsqu’un texte légal ou réglementaire prescrit un comportementdéterminé ou formule une interdiction précise, celui qui ne se conformepas à cette norme impérative est automatiquement considéré commefautif ; il y a faute au sens des arts. 1382 et 1383 C. civ.En effet, l’homme normalement prudent et diligent placé dans les mêmescirconstances eut respecté, en principe, la règle de comportement biendéfinie, exprimée sous la forme d’une interdiction ou d’une obligation.

b) La violation d’une obligation générale de prudence (lebon père de famille)

Il est évident que le législateur ne saurait régler notre vie dans sesmoindres gestes. Les normes de conduites formulées de manière précisesont donc complétées par un devoir général de prudence et de diligences’imposant à tous.

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Et le critère de la faute, en matière aquilienne, est le « bonus ac diligens paterfamilias » .Il revient à comparer le comportement de l’auteur de l’acte dommageableà celui du bon père de famille, normalement prudent et raisonnable, en

principe, adroit, avisé,…, ni surdoué, ni héros, ni saint, ni surhomme… pasplus crapule, abruti ou inepte, mais simplement honnête homme commeest supposé l’être tout citoyen.Cette appréciation se fait « in abstracto » ; cela signifie que lecomportement ne doit pas être jugé en fonction des capacités etcaractéristiques personnelles du défendeur :

• ni l’âge, ni le sexe, ni l’intelligence ;• ni l’éducation, ni l’instruction ou l’expérience.

(on se limite donc bien aux circonstances externes qui ont provoquéle dommage)

Cependant, la comparaison de la conduite du défendeur au type abstraitdu bon père de famille doit se faire en replaçant ce type abstrait (fictif,indéterminé et intemporel) dans les mêmes conditions de lieux et detemps que celles où se trouvait l’auteur de l’acte dommageable aumoment des faits ; le juge se demandera comment aurait agi dans lesmêmes circonstances le type abstrait qui lui sert de référence.

Ex : un journaliste qui est assigné à comparaitre en justice.Le journaliste prudent et diligent serait celui qui :

• émet des réserves• vérifie ses sources• recoupe ses sources• …2. L’imputabilité

a) GénéralitésAucune faute ne peut être commise en l’absence de raison, de faculté dediscernement ; la violation d’une norme de conduite, déterminée ou non,doit avoir lieu librement et sciemment. Autrement dit, il faut que l’acteillicite puisse être imputé à son auteur , c.à.d. rattaché à sa volontélibre, éclairée par la raison ; il est donc requis que l’acte critiqué ait étéaccompli volontairement. Ici, l’exigence du discernement estappréciée « in concreto », en fonction des caractéristiques propres del’auteur.

b) EnfantsIl y a une tendance à estimer qu’à partir de l’âge de 7 ans, l’enfant a lacapacité aquilienne, c.à.d. le discernement suffisant pour que ses actes

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puissent lui être imputés. Il s’agit toutefois d’une simple présomption defait (et non une présomption légale).Ainsi, divers éléments peuvent être pris en considération tels quel’éducation, le milieu social, le développement physique, intellectuel, l’âge,

la nature de l’acte dommageable,…c) Déments et anormaux article 1386bis du Code civil

Les déments et les malades mentaux ne peuvent, en principe, êtrecondamnés à réparer le dommage qu’ils ont causé. Pour obvier à cettesolution (qui peut s’avérer inéquitable pour les victimes) le législateur estintervenu en 1935 en insérant un article 1386bis relatif à « laréparation du dommage causé par des anormaux ».

Fondée sur l’équité, cette disposition déroge à un double titre au droitcommun (!! EXAMEN !!)

I. La condition de faute est évacuée au profit d’une notiond’acte objectivement illicite, c.à.d. un acte qui aurait été

jugé fautif s’il avait été accompli par un individu doué dediscernement ;

II. Le juge peut faire une entorse au principe de laréparation intégrale en fonction des circonstances et de lasituation des parties ; donc, la réparation du dommage estfacultative, tant dans son principe que dans son montant.Le juge prendra en compte divers facteurs tels que :

o la solvabilité de l’auteur de l’acte dommageable ;o l’état de fortune de la victimeo l’existence éventuelle d’une couverture

d’assurance ;

L’article 1386bis s’applique aussi bien en matière contractuellequ’extra-contractuelle.La personne qui est victime d’une crise cardiaque ou d’unehémorragie interne n’est pas considérée comme se trouvant dans unétat grave de démence,…L’article 1386bis ne profite qu’au dément ; aucune autre personnene peut invoquer cette disposition pour réduire sa responsabilité àl’égard de la victime : ni les parent du dément, ni les tiers auteursd’une faute concurrente, tenu in solidum avec lui,…

3. La prévisibilité du dommage

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Pour que la méconnaissance d’une norme générale de prudence puisseconstituer une faute, il faut aussi que le dommage ait été prévisible. Ainsi,quelqu’un n’est responsable du dommage causé que s’il a pu prévoir sonimprudence était susceptible de créer un préjudice quelconque ou s’il a dû

le prévoir (prévision ou prévisibilité du dommage).L’imprévisibilité du dommage supprime la faute, et donc laresponsabilité.

Cette appréciation doit se faire « in abstracto » ; il ne suffit pasd’examiner si le défendeur en responsabilité avait prévu que soncomportement entrainerait le dommage. Pour apprécier la prévisibilité dudommage, on utilise le même critère que pour apprécier laméconnaissance d’une norme générale de prudence, à savoir celui del’homme normalement prudent et raisonnable placé dans les mêmescirconstances. Ce qui veut signifie que la prévoyance et les précautionsque l’on exige de chacun sont seulement celle que l’on peut attendre d’unhomme normalement prudent et raisonnable.

En responsabilité extra-contractuelle , tout le dommage doit être réparé, ycompris le dommage imprévisible, ce qui parait souvent inacceptable ;mais en fait, on parvient à contourner cette difficulté en faisant del’élément imprévisible du dommage un élément de la faute.En responsabilité contractuelle , l’auteur ne paie que le dommage qu’il apu prévoir.

C. La constatation judicaire de la faute1. Preuve de la faute

En responsabilité aquilienne du fat personnel, la charge de la preuve de lafaute repose sur la victime ; il appartient dès lors au juged’apprécier la valeur probante des preuves rapportées par la victime… etdes moyens de défense invoqués par le défendeur. Ce dernier peut eneffet contester les éléments de preuves présentés par la victime, en

faisant valoir :• son absence de faute

(privation de discernement au moment des faits, dommageimprévisible,…)

• ou une clause étrangère exonératoire.

Il arrive que la victime ne parvienne pas à établir positivement la faute,mais démontre que le dommage ne peut être dû qu’à la faute dudéfendeur ; par soucis de faciliter l’indemnisation, le juge se contente

parfois d’une telle preuve négative pas élimination.

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2. Contrôle de la Cour de cassationLa Cour de cassation est compétente pour contrôle :

I. La motivation de la décision du juge de fond (Const.art. 149) ;

II. La correcte application de la notion de faute ;III. La correcte qualification des faits.

Par contre, la Cour ne connait pas des faits en eux-mêmes, telsqu’appréciés par le juge de fond ; tout au plus, peut-elle vérifier si cedernier a pu légalement conclure à l’existence d’une faute sur la base desfaits soumis à son appréciation.A cet égard, son contrôle est dit « marginal ».

§2. Les faits justificatifsA. NotionIl arrive qu’un acte dommageable (a priori illicite) soit accompli dans descirconstances que le droit accepte de prendre en considération pour« justifier » l’acte a posteriori et lui ôter tout caractère délictueux. Le fait

justificatif permet ainsi de faire une distinction entre les actes réellementfautifs et ceux qui ne le sont qu’en apparence.

Les faits justificatifs sont des circonstances extérieures à l’agent danslesquelles, sous certaines conditions, il est excusé d’avoir eu une attitudequi, normalement et sans elles, eût été fautive. L’idée est que lcomportement apparemment fautif n’est pas le fruit d’une décision tout àfait libre de la volonté ; l’auteur du fait dommageable ayant plutôt été le

jouet d’une circonstance externe qu’il n’aurait pu prévoir et à laquelle iln’a pas pu résister.

Le défendeur en responsabilité est certes intervenu matériellement dansla réalisation du dommage, mais il n’était pas totalement maitre de sesactes dès lors que sa volonté était contrainte à l’acte (ou à l’omission)dommageable ; le fait justificatif intervient donc au niveau de

l’imputabilité.

B. Typologie1. La légitime défense

La légitime défense est une cause de justification bien connue en droitpénal.Aux termes de l’article 416 du Code pénal : « il n’y a ni crime ni délit,lorsque l’homicide, les blessures et les coups étaient commandés par lanécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d’autrui ».

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La même notion peut constituer un fait justificatif, exclusif de toute fauteau sens des articles 1382 et 1383 du Code civil. La légitime défenserépond cependant à des conditions strictes. Elle doit s’entendre comme« une riposte immédiate, dommageable et proportionnée face à une

agression injuste et actuelle ou imminente, s’exerçant sur une personneou sur des biens ». La légitime défense implique donc au départ uneagression ; l’attaque doit être actuelle ou imminente ; en effet, il n’y a pasde légitime défense anticipée, ou lorsque tout danger est écarté.

- Enfin, il est unanimement admis que le fait de tirer sur un agresseur enfuite ne peut constituer un cas de légitime défense.- L’agression doit en outre être injuste ; ce qui veut donc dire qu’il n’y apas de légitime défense contre une légitime défense, ni contre uneagression ordonnée par la loi ou commandé par l’autorité légitime.

- Enfin, l’agression peut aussi bien être dirigée contre des personnes quecontre des biens. On assimile en effet la « légitime défense d’autrui » à la« liberté de soi-même ».

- Mais, pour être « légitime », la défense doit avant tout être nécessaire,ce qui suppose qu’il n’y a pas d’autre moyen de protection envisageable,tel que la possibilité de recourir utilement à l’autorité publique.- En cas de rejet de la légitime défense, l’auteur du dommage n’est pasnécessairement condamné à une réparation intégrale ; au contraire, le

juge estimera souvent qu’il y a partage des responsabilités, la victime dudommage pouvant avoir commis, par son comportement agressif, unefaute à l’origine de la riposte. Si cette faute initiale est, en outre,constitutive d’une infraction (vol, coups et blessures,…), le juge pourraitattribuer la majeur partie de la responsabilité à la victime auteur del’infraction, en raison de sa gravité. Il pourrait même lui refuser touteindemnité.

Cette solution, qui fait entorse au système de l’équivalence des conditions,pourrait être justifiée par référence à l’adage fraus omnia corrumpit ou auprincipe nemo auditur suam .

Ex : un garagiste surprend un homme en train de lui voler des outils enpleine nuit. Pris de panique, et n’ayant rien su voler, le voleur courra danssa voiture et tenta de s’enfuit. Le garagiste tira trois coups de fusil dans lepare-brise de la voiture et tua le voleur.

I. Le danger n’est plus réel et actuel

II. La valeur de la vie humaine (qu’il a sacrifié) est plus >que les outils

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III. D’autres moyens possibles : tirer dans les pneus, alerterla police,…

Le tribunal ne considéra pas qu’il s’agisse d’un cas delégitime défense.

2. L’état de nécessité (volonté fortement conditionnée)Il s’agit d’une situation dans laquelle une personne n’a d’autres choix,pour éviter un mal imminent, que d’en causer un autre de moindregravité.

• L’état de nécessité suppose en premier lieu l’existence d’un dangerréel, actuel ou imminent ; la nature du danger est sansimportance.

• L’événement invoqué comme fait justificatif doit également êtreimprévisible, irrésistible et indépendant de la volonté decelui qui l’invoque .

• L’acte dommageable doit être indispensable ; ce doit être la seule,ou du moins, la meilleure façon d’éviter le danger.(l’appréciation de cette condition se fera au regard du critèreabstrait de l’homme normalement prudent et diligent placé dans lesmêmes circonstances).

L’état de nécessité se caractérise par un dilemme ou, plus précisément,un conflit de valeurs ; dans ce contexte, l’intérêt sauvegarder doitprésenter une valeur sociale supérieure (ou au moins égale) à l’intérêtsacrifié. Enfin, l’effet justificatif de l’état de nécessité n’est pas admis sil’alternative devant laquelle l’auteur se trouve est la conséquence de sapropre faute.

Ex : des promeneurs qui marchent sur un lac gelé. Soudain, la glace sebrise, je cours à leur secours, leur temps le bras et les tire de la marre. Entirant sur l’un bras de l’un d’eux, je lui luxe l’épaule et casse le cordon deson appareil photo qui tombe à l’eau.

Il me demande de l’indemniser pour les frais hospitalier, pour son appareilphoto,…Le tribunal me donna raison et me libéra de toute faute car, c’était un étatde nécessité.

3. La contrainte (volonté entièrement détruite)Sous l’effet de la peur, des pressions exercées sur elle, de la confusion

d’une situation ou de la précipitation des événements, il se peut qu’une

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personne commette un acte dommageable « sans le vouloir ». On diraalors qu’elle se trouvait contrainte d’agir ainsi.La contrainte, physique ou morale, ne constitue une cause de justificationque si elle a pour effet d’anéantir la volonté libre de l’auteur du fait

dommageable.Et c’est précisément cet effet destructeur de la volonté qui distingue lacontrainte de l’état de nécessité (où il y a, dans une certaine mesure, laplace au libre arbitre de l’agent).

Il faut, en outre, que le défendeur en responsabilité n’ait pas eu lapossibilité d’adopter un comportement autre que celui qui a entrainé ledommage ; on tiendra compte notamment de l’impossibilité de fuir ou derésister sans armes.

Il faut tout de même garder à l’esprit que la peur, la nervosité, la colère ouune réaction « sous le coup de l’émotion » ne suffiront pas à écarter lafaute.

4. L’ordre de la loi Il est unanimement admis que l’ordre de la loi peut constituer un fait

justificatif, en droit civil comme en droit pénal. Lorsque la loi ordonne,aucune faute ne saurait être reprochée à celui qui s’est conformé à cetordre.

Ex : la loi oblige tout citoyen à porter secours à une personne en danger, àdénoncer aux autorités toute atteinte dont il aurait été témoin, faite àl’encontre de la sureté publique, de la vie d’une personne ou de sapropriété, ou encore à venir témoigner en justice lorsqu’il est cité àcomparaitre. Si, en accomplissant l’un de ces devoirs, il venait à causer undommage à autrui, il pourrait invoquer l’ordre de la loi comme fait

justificatif.L’effet justificatif de l’ordre légal n’est cependant pas absolu ; encore faut-

il que l’ordre soi exécuté sans maladresse, imprudence ou manque desoins et, a fortiori, sans abus.

5. La permission de la loi ou de la coutumeIl arrive que la loi, sans ordonner un comportement, se contente depermettre ou d’autoriser certains actes qui, sans cela, seraient illicites. Onsonge notamment à l’autorisation qui est faite à toute personne de sesaisir (au besoin par la force) d’un individu surpris en flagrant crime ou enflagrant délit, ou à la possibilité de violer le secret professionnel lorsqu’il

s’agit de dénoncer certaines infractions relatives à des mineurs

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Plus fondamentalement, les atteintes à l’intégrité physique portées par lesmédecins sont considérées comme bénéficiant du fait justificatif résultantde la permission de la loi, pourvu qu’ils aient respecté les conditionsauxquelles est subordonné le caractère licite des traitements (but

thérapeutique ; nécessité de l’acte médical ; consentement du maladesauf cas de force majeure ; …).

6. L’erreur ou l’ignorance invincibleUne représentation erronée de la réalité, voire une ignorance, peutconduire une personne à adopter un comportement qui s’avèredommageable pour autrui ; dans de telles circonstances, l’auteur dudommage ne serait en quelque sorte qu’un instrument de son erreur,déterminée par des facteurs qui lui seront étrangers.

Toutefois, l’erreur ou l’ignorance ne peut être invoquée comme fait justificatif que si elle est invincible (ou inévitable), c.à.d. si l’on peutestimer que toute personne responsable et prudente, placée dans lamême situation, aurait agi de la même manière ; le caractère invincible del’erreur se caractérise donc « in abstracto » ; s’il est établi que l’auteur dudommage a agi sur la base d’une erreur réellement invincible, il fautécarter sa responsabilité puisque, agissant dans un environnement nonconforme à la vérité, il n’aurait pas pu adopter un autre comportement.

o L’absence de toute faute de l’intéressé est encore nécessaire pourpouvoir conclure à l’existence d’une erreur invincible ; il convient àcet égard de ne pas confondre erreur excusable (qui peut êtrefautive) et erreur invincible (qui peut porter aussi bien sur descirconstances concrètes [accidents de circulation,…]que sur l’interprétation de la loi).

D. De quelques faits non justificatifsLa doctrine enseigne généralement que le consentement de la victime ouson acceptation des risques ne constituent pas des faits justificatifs. Celane signifie toutefois pas que ces événements n’ont aucune incidence surla responsabilité, mais ils n’ont en tout cas par pour effet de supprimer lafaute de l’auteur du dommage.

1. Le consentement de la victimeIl est parfois fait allusion au consentement de la victime pour exclure la

responsabilité de l’auteur des coups et blessures, volontaires ouinvolontaires ; toutefois, attention, le seul consentement de la victime

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n’est pas suffisant pour justifier une violation de la loi pénale ou del’obligation générale de prudence.

Autrement, techniquement, le consentement de la victime ne constitue

pas un fait justificatif puisqu’il ne supprime pas le caractère fautif ducomportement dommageable ; il n’est qu’une renonciation à la mise encause de la responsabilité. En consentant au comportement fautif et à sesconséquences dommageables, la victime s’engage à renoncer à son droitde réclamer réparation de son préjudice.

2. L’acceptation des risques pour la victimeCela consiste en une acceptation par la victime de l’éventualité d’undommage qui pourrait lui être accidentellement causé par un tiers ;pareille acceptation n’est pas non plus un fait justificatif élusif de faute,mais n’est pas sans influence, à d’autres titres, sur la responsabilité. Ainsi,l’acceptation es risques peut, dans certains cas, constituer une faute dansle chef de la victime, susceptible de conduire à un partage deresponsabilité.Mais dans d’autres cas, le juge pourra exonérer l’auteur du dommage detoute responsabilité, en estimant qu’en raison du comportement de lavictime résultant de l’acceptation des risques, le dommage dont elle seplaint se serait produit de la même façon en l’absence de faite dans lechef de l’auteur.

Le terrain de prédilection de l’acceptation des risques est principalementcelui des sports et des jeux à caractère violents ou dangereux, soit dansles rapports entre les participants, soit à l’égard des spectateurs : « lesincidents faisant partie des risques normaux inhérents à la pratique dusport ».

En d’autres termes, le risque accepté ne fait pas disparaitre, par principe,la faute de l’autre. S’ils assument les risques du jeu, les sportifs ne le fontque dans les limites des règles même du sport ; il faut donc que la faute

de jeu ne suppose pas une violation des règles générales de prudence.

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§3. Aux limites de la faute : l’abus dans l’exercice des droitsA. Position du problème – une création prétorienneDès la fin du 19 ième siècle, on considérait que le fait d’être investi d’un droitne signifiait pas que toutes les manières de l’exercer soient également

acceptables.En réalité, toute règle de droit pose problème aux limites de son champd’application ; le droit doit secréter les moyens de contrôler sa propreapplication. La théorie de l’abus de droit est l’un des instruments majeursde contrôle de l’exercice des droits : on est guère étonné qu’elle soit unecréation essentiellement prétorienne (jurisprudentielle).

De deux choses l’une, en définitive : soit un individu use d’un droit dont ilst investi, et l’acte posé est nécessairement licite ; soit l’acte est illicite caril a outrepassé les limites de son droit. La notion d’abus de droit apparaitainsi contradictoire.

Quoi qu’il en soit, la jurisprudence belge reconnait largement l’abus dedroit, tant en matière contractuelle qu’en matière extra-contractuelle ; onconsidère aujourd’hui qu’il n’existe pratiquement pas de droit « absolu »ou « discrétionnaire », dont le titulaire pourrait faire n’importe quel usagesans avoir aucun compte à rendre.

B. Les fondements de l’abus de droitOn retient trois voies qui ont été explorées pour justifier le pouvoir des

juges de contrôler l’exercice du droit :• La théorie finaliste ;• La responsabilité délictuelle ;• Le principe de l’exécution de bonne foi (en matièrecontractuelle).

1. La théorie finalisteSuivant une première conception, dont L. JOSSERAND est le plus illustrereprésentant, les droits subjectifs sont accordés par le législateur enfonction de finalités sociales bien déterminées. Leur exercice n’est liciteque s’il est conforme aux objectifs en vue desquels ils ont été institués ;

commet dès lors un abus de droit celui qui exerce son droit en ledétournant de sa finalité sociale.

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Toutefois• Il est souvent malaisé d’identifier les finalités précisémentassignées par le législateur ;• Les mœurs évoluant, les finalités peuvent ne plus

correspondre aux nécessités actuelles.• De plus, on reproche à cette théorie de faire rendrel’appréciation tributaire des conceptions philosophiques etpolitiques des juges, au détriment de la sécurité juridique.

Pour ces critiques, la théorie finaliste n’a pas eu un grand écho en jurisprudence.

2. La responsabilité délictuelle (ou aquilienne)L’idée est de considérer qu’il y a abus de droit dès l’instant où le sujet n’apas exercé son droit conformément à ce que l’on peut attendre du bonpère de famille normalement prudent et diligent. Pour évaluer si l’usaged’un droit a été abusif, le juge est donc invité à comparer lecomportement critiqué avec celui d’une personne diligente et soucieusedes intérêts d’autrui.Cette solution a rapidement trouvé grâce auprès d’un grand nombre decommentateurs ; elle présente le mérite du réalisme et évite lesdiscussions à caractère philosophique ou moral.

En définitive, loin d’être une catégorie autonome, l’abus de droit n’estqu’une application particulière de la faute aquilienne ; la théorie généralede la responsabilité délictuelle, avec sa plasticité mais aussi ses garde-fous, est dès lors à la base de l’abus de droit.

3. En matière contractuelle : le principe de l’exécution debonne foi

Dans les années 1980, la Cour de cassation a rendu un premier arrêtconcernant l’abus de droit contractuel. Généralement approuvé endoctrine, il fonde l’abus de droit non seulement sur l’article 1382 du Codecivil, mais sur le principe de l’exécution de bonne foi des conventionsénoncé à l’article 1134, al. 3. La Cour se réfère au critère deproportionnalité consacré en matière extra-contractuelle ; pareil critère,devenu prépondérant, transcende ainsi la division entre le domainecontractuel et le domaine extra-contractuel.C. Les critères de l’abus de droit

1. Le critère génériqueLe critère dit « générique » de l’abus de droit se trouve ainsi défini comme« le dépassement manifeste des limites de l’exercice normal d’un droit par

une personne prudente et diligente » .

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Il importe donc de dégager les hypothèses dans lesquelles doctrine et jurisprudence s’accordent à épingler un dépassement manifeste del’exercice normal d’un droit.

2. Les critères spécifiquesCes critères spécifiques, communs pour la plupart à l’abus de droitcontractuel et extra-contractuel, sont les suivants :

• L’exercice d’un droit dans l’intention de nuire à autrui ;Un propriétaire qui a été condamné à démolir une faussecheminée, construite en face de la fenêtre du voisin, dans leseul but de le priver de sa lumière.

• L’exercice d’un droit sans intérêt ou motif légitime, ou encoresans intérêt raisonnable et suffisant, de façon préjudiciable àautrui ;

• Le choix, entre différents façons d’exercer un droit avec lamême utilité, de l’exercer de façon dommageable à autrui ;

• L’exercice d’un droit entrainant une disposition entrel’avantage obtenu par le titulaire du droit et le préjudice causéou la charge infligée à l’autre partie ;

• Le détournement du droit de sa finalité, s’il s’git d’un droitfonction.

D. Les sanctions de l’abus de droitDès l’instant où l’abus de droit s’analyse en une faute aquilienne, sonauteur sera tenu de réparer le dommage qui en résulte conformément auxrègles de la responsabilité civile ; la victime aura donc droit à la réparationintégrale de son dommage (souventsous forme pécuniaire). Elle se fera toutefois en nature lorsque le jugeestime qu’il s’agit là du mode de réparation le plus adéquat.

Pour ce qui est de la sanction de l’abus des droits contractuels, nousverrons cela en 2 e.

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Section 2. La responsabilité du fait d’autrui Sous-section 1. La responsabilité des père et mère§1. Principe et fondement

La responsabilité des parents est régie par l’article 1384, al. 2 et al. 5 du Code civil .Il est résulte que le père et la mère sont responsables du dommage causépar leurs enfants mineurs… à moins qu’ils ne prouvent qu’ils n’ont puempêcher le fait qui donne lieu à cetteresponsabilité.

Depuis la loi du 6 juillet 1977, les père et mère sont placés sur un piedd’égalité au regard de la présomption instituée ; ils peuvent êtrecondamnés « in solidum », à moins que l’un des conjoints ne parvienne àécarter sa propre responsabilité.

Leur responsabilité repose sur une faute présumée. Celle-ci consiste en unmanquement :

• soit dans l’éducation ;• soit dans la surveillance de l’enfant.

Il s’agit d’une présomption réfragable, encore appelée juris tantum . Celasignifie que chacun des parents est admis à renverser la présomption, enadministrant la preuve de son absence de faute ; pour se faire, ils doivent

• établir qu’ils ont bien éduqué leur enfant• et qu’ils l’ont bien surveillé.

Ce type de responsabilité présente deux objectifs majeurs :a) Elle vise à offrir à la victime des débiteurs plus solvables que ne le

sont habituellement les enfants mineurs.b) Et par ailleurs, elle stimule la vigilance des parents.

§2. Conditions d’applications de la présomptionPlusieurs conditions doivent être remplies pour que puisse jouer laprésomption de responsabilité à charge des parents. A défaut, la victimepeut toujours mettre en cause leur responsabilité sur la base d’ une fauteprouvée (art. 1382 et 1383 du Code civil).

A. La minorité de l’enfant

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Depuis le 1 er mai 1990, la majorité a été abaissée de 21 à 18 ans . Laminorité de l’enfant s’apprécie au moment de la commission du faitdommageable et non au moment du procès.

A l’inverse, l’émancipation mettant fin à l’autorité parentale, une majoritéde la doctrine estime que le mineur émancipé est assimilé au majeur.

B. La qualité de « parents »La deuxième condition d’application de la présomption prévue parl’article 1384, al. 2 est l’existence d’un lien de filiation entre le mineur(auteur du fait dommageable) et la personne appelée à en répondre.Autrement dit, seuls sont visés les père et mère, à l’exclusion du tuteur ousubrogé tuteur ou tuteur de fait (officieux) et de toute autre personne qui,pendant un temps ± long, exerce en fait la garde de l’enfant (grands-parents, autres membres de la famille,…)

Encore faut-il préciser que la présomption pèse non seulement sur lesparents légitimes, mais aussi sur les parents naturels. Evidemment, lesparents adoptifs pourront facilement renverser la présomption, surtoutcelle liée à la faute dans l’éducation, dans la mesure où les défaillanceséducatives épinglées sont imputables à ceux qui assumaient l’éducationde l’enfant avant son adoption.

C. L’exercice de l’autorité parentaleDans la mesure où la responsabilité des parents est un corollaire

(proposition qui découle d'une première qui a déjà été démontrée) del’autorité parentale, il importe que les père et mère soient réellement enmesure de l’exercer pour que la responsabilité puisse être engagée sur labase de l’article 1384, al. 2 du Code civil .

L’article 373 du C. civ. prévoit à cet égard que lorsque les parentsvivent ensemble, ils exercent conjointement leur autorité sur la personnede leur enfant.Et selon l’article 374 du C. civ. , lorsque les père et mère ne vivent plus

ensemble, ils continuent d’exercer conjointement l’autorité parentaleconformément à l’article 373 dudit Code.

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Ainsi, en toute hypothèse, même celui qui n’a pas la garde de l’enfantreste en principe civilement responsable des dommages causés par cedernier et ce, même s’il ne peut plus exercer une surveillance effective surcelui-ci. Et ce n’est qu’en cas de déchéance de l’autorité parentale qu’il

convient d’écarter la responsabilité du parent déchu.D. La « faute » de l’enfant mineurPour que jouent les présomptions de faute et de lien causal pesant sur lesparents, encore est-il requis, en droit belge, que l’enfant mineur aitcommis une faute, à l’origine du préjudice subi par la victime.

Toutefois, comme on le sait, les mineurs, les enfants en bas-âge,… n’ontpas la responsabilité aquilienne, ce qui veut donc dire que la victimedevrait être privée de réparation ; mais la jurisprudence vole cependantau secours des victimes, en se contentant d’un acte objectivement illicitede l’enfant, c.à.d. d’un acte que l’intéressé n’avait pas le droit decommettre et qui aurait été considéré comme fautif dans le chef d’unepersonne douée de discernement. L’appréciation de l’acte illicite se fait« in abstracto » (bon père de famille).Ainsi, l’absence de discernement du mineur fait obstacle à sa proprecondamnation.

• La victime peut mettre en cause un garant généralement solvable• L’enfant échappe aux conséquences pécuniaires d’une faute qui ne

lui est pas vraiment imputable.§3. Effets de la présomption

A. GénéralitésSi les conditions d’application de la présomption sont établies par lavictime, les père et mère sont réputés avoir manqué à leurs devoirs desurveillance ou d’éducation de leur enfant mineur ; à cet égard, ledemandeur ne doit prouver aucune faute, pas plus l’existence d’un lien decausalité entre la faute présumée ans la surveillance ou dans l’éducationet le dommage causé.

Encore, les cours et tribunaux belges admettent-ils que les parentspuissent échapper à leur responsabilité en faisant la preuve qu’ils n’ontcommis aucune faute, ni dansla surveillance, ni dans l’éducation.

B. Le renversement de la présomption de fautePour s’exonérer de leur responsabilité, les parents ont une double preuveà administrer : ils doivent démontrer qu’ils ont bien éduqué leur enfant et

qu’ils l’ont bien surveillé.

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1. La preuve de l’absence de faute de surveillancea) L’impossibilité matérielle de la surveillance

Dans une série d’hypothèses, les parents font valoir, à juste titre, qu’ilsétaient dans l’impossibilité de surveiller l’enfant ; le fait que l’enfant ait

été confié à une personne de confiance (ou supposée telle) peut constituerun indice important de l’impossibilité matérielle de surveiller l’enfant, sanstoutefois qu’on puisse en déduire systématiquement l’absence de faute.

• Ainsi, la surveillance st matériellement impossible lorsquel’enfant s’est engagé sous les armes car il échappe au pouvoir desurveillance et/ou d’éducation ;• La surveillance est également impossible lorsque l’enfant a faitl’objet d’une mesure de placement ou se trouve à l’école (resp.des éducateurs et professeurs).

Toutefois, depuis 1989, la Cour de cassation admet le cumul deresponsabilité de l’instituteur et des parents (dans l’éducation) ;• Lorsqu’un enfant mineur est mis en internat ou vit dans unechambre d’étudiant, les parents pourront sans doute démontrerassez facilement l’impossibilité matérielle de le surveiller, mais illeur restera encore à renverser la présomption de faute dansl’éducation.(idem pour les mouvements d jeunesse, professeur d’équitation,…)

b) L’impossibilité morale de la surveillanceLe devoir de surveillance doit s’entendre raisonnablement ; il n’impliquepas un contrôle constant, une surveillance continue de l’enfant, surtout s’ilest déjà adolescent.Ainsi, le maniement d’une arme chargée ou la conduite d’un véhicule parun enfant de 16 ans, n’établit pas, par lui-même, unmanquement à ce devoir de surveillance.

S’il est vrai que le devoir de surveillance s’atténue à mesure que l’enfantgrandit, le devoir d’éducation subsiste et tend même à prendre uneimportance inversement proportionnelle.

c) L’impossibilité d’éviter le fait dommageableLes parents peuvent également prouver que le comportement de l’enfanta été d’une imprévisibilité et d’une soudaineté telle que même unesurveillance de tous les instants n’aurait pu empêcher l’accident.Certaines décisions admettent, par exemple, que le vol d’une voiture par

un mineur présentait un caractère soudain et imprévisible pour lesparents, qui n’avaient jamais été confrontés à ce genre de situation.

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La Cour de cassation s’est d’ailleurs prononcée en ce sens : le juge defond peut considérer que la preuve contraire est administrée si lecaractère totalement imprévisible du dommage démontre, en soi,

l’impossibilité d’empêcher le fait (dès lors qu’il est établi que les parentsont bien éduqué leur enfant).

2. La preuve de l’absence de faute dans l’éducationa) Une règle mal pensée

L’idée qui est à la base de la présomption pesant sur les parents est quel’enfant n’aurait pas causé de dommage à autrui s’il avait bénéficié d’unebonne éducation. Autrement dit, l’enfant bien élevé ne commet pas defaute dommageable ; ce raisonnement est pour le moins naïf comme l’ontrelevé maints commentateurs.D’ailleurs, on remarque que les dommages causés par des enfantsmineurs sont

• soit imputables à l’insouciance ou à la frivolité propre au jeuneâge• soit sont les conséquences d’une cause purement accidentelle(maladresse, distraction, inadvertance,…)

b) Une jurisprudence incohérente, entre rigorisme et laxisme

La bonne éducation est diversement appréciée par les juges.On relève deux courants jurisprudentiels opposés :

• Le premier tend à déduire automatiquement la mauvaiseéducation du caractère grave de l’acte illicite du mineur ;• Le second considère que la preuve de la bonne éducation estfaite dès lorsque les parents établissent qu’ils ont fait de leurmieux ; ainsi peuvent-ils renverser la présomption, même si l’acteprésente une gravité certaine ou si les résultats de l’éducationsont clairement désastreux.

Il a été jugé que témoigne d’une mauvaise éducation :• L’agression par un jeune de 18 ans d’une dame de 85 ans ;• Le mineur qui exhibe un couteau à cran d’arrêt dans la cour derécréation ;• Le mineur qui annonce une fausse alerte à la bombe pour faireune blague ;• …

A l’inverse, ne témoigne pas d’une mauvaise éducation :

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• L’enfant qui commet une infraction sans gravité au code de laroute ;• Le mineur de 17 ans une vole une voiture, alors que ce fait esttotalement isolé et que le garçon a immédiatement reconnu les

faits et assumé sa responsabilité lorsqu’il a été interpellé par lapolice ;• …

§4. Appréciation critiqueIl saute aux yeux que le régime de responsabilité des parents est inadaptéà l’objectif poursuivi.

• On remarque que sous l’influence de divers courants sociaux,économiques et culturels, les méthodes éducatives s’orientent vers

une autonomie accrue de l’enfant et de l’adolescent ;• Parallèlement, on remarque que les enfants sont confrontés, de plusen plus tôt et de plus en plus fréquemment, à des situationspénibles ou à une diversité d’influence néfastes, difficile àappréhender seul… et à gérer par les parents ;

Bref, l’autorité parentale tend à s’estomper, tandis que se multiplie lessituations dans lesquelles des enfants sot confiés à d’autres personnes ouinstitutions. De surcroit, le régime de responsabilité des parents fait appelà des notions qui sont appréciées diversement par les juges en fonction deleurs propres conceptions en matière d’éducation ; il en résulte une

jurisprudence chaotique et incertaine.

Inspirés par la jurisprudence de la Cour de cassation française, denombreux auteurs préconisent un remplacement de l’article 1384, al. 2 duCode civil, par un régime de responsabilité sans faute, assorti d’uneassurance obligatoire souscrite par les parents pour les dommages causéspar leurs enfants mineurs. Il existe encore d’autres pistes de réformes.

Sous-section 2. La responsabilité des instituteurs et artisans

§1. Principe et justificationLa responsabilité des instituteurs et artisans est régie par l’article1384, al. 4 et al. 5 du Code civil .Elle est la contrepartie du pouvoir de contrôle et de surveillance exercépar l’instituteur ou l’artisan à l’égard des personnes auxquelles il doitfournir un enseignement.

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L’instituteur ou l’artisan est présumé responsable des faits dommageablescausés à un tiers par un élève ou un apprenti pendant le temps où cedernier est sous sa surveillance.

Le régime applicable repose donc bien sur la technique de la présomptionde faute et de lien causal ; on présume une faute de surveillance de lapart des instituteurs ou des artisans, ainsi que le lien causal entre cettefaute et le dommage subi par le tiers.Ils échappent à leur responsabilité en prouvant qu’ils ont exercé unebonne surveillance ou qu’une surveillance correctement effectuée n’auraitpas pu empêcher la réalisation du dommage.

Mutatis mutandis, le régime de responsabilité applicable aux instituteurset aux artisans est similaire à celui applicable aux père et mère.

§2. Conditions d’application de la présomptionA. Les notions d’instituteur et d’artisan

1. L’instituteur La notion d’instituteur au sens de l’article 1384, al. 4 du C. civ . visetoute personne chargée non seulement d’un devoir de surveillance, maiségalement d’une mission d’enseignement.

Toutefois, le concept « d’enseignement » est interprété largement ; laCour de cassation a décidé d’y englober aussi toute autre communicationd’une instruction, qu’elle soit scientifique, artistique, professionnelle,morale ou sociale.

En substance, le critère déterminant est le devoir de surveillance dans lamesure où il est lié à une charge d’enseignement, quel qu’en soit l’objet.Par conséquent, ne sont pas concernés les surveillants qui n’assument

aucun enseignement, ni le directeur d’un établissement scolaire, qui quantà lui, organise la surveillance/l’enseignement. Par ailleurs, aucunenseignement ne peut être dispensé à des jeunes handicapés à 100% desorte que la présomption légale de l’article 1384, al. 4 du Code civil nepeut jouer.

Ainsi, la notion d’instituteur est conçue largement :• Les enseignants de tous les niveaux (enseignement gardien,primaire,…) ;•

En principe, les éducateurs et surveillants-éducateurs ;• Les moniteurs sportifs, les maitres de stage ;

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• Les moniteurs de conduite automobile ;• Les responsables de « maisons de jeunes » ;• Les responsables des mouvements de jeunesse (chefs scouts,chefs du patro,…) ;• …

En principe, l’établissement scolaire ne peut être assimilé à un« enseignant », car il organise seulement et ne dispense lui-même aucunenseignement ; ontrouve cependant des décisions apparemment en sens contraire…

2. L’artisanL’artisan est celui qui procure une formation professionnelle à un apprenti

apprenant un métier sous sa surveillance.Le fait que l’artisan dispense un enseignement théorique et pratique à unapprenti permet de le distinguer du commettant qui ne revêt pas la qualitéd’enseignant.

B. La faute de l’élève ou de l’apprenti, commise pendant ques’exerce la surveillanceL’élève ou l’apprenti doit avoir commis une faute ou un acteobjectivement illicite qui est la cause du dommage subi par un tiers.

Il convient de constater qu’il n’y a pas de condition de minorité dans lechef de l’élève ou de l’apprenti (≠ responsabilité des parents) ; ce qui veutdonc dire que l’instituteur ou l’artisan pourra voir sa responsabilitéengagée, même si l’élève ou l’apprenti est majeur.

Cette faute ou cet acte objectivement illicite doit bien entendu avoir étécommis€ pendant le temps où l’élève se trouvait effectivement sous lasurveillance de l’instituteur ou de l’artisan ; par contre, la présomption de

responsabilité ne pourra pas jouer lorsque l’acte illicite a été commis àl’occasion d’une interruption de cours, lors d’une fugue (à moins que la

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victime ne parvienne à prouver que la fugue est la conséquence d’unefaute de l’instituteur) ou encore, lorsque l’élève est en vacances.

C. Un dommage causé à un tiers

La présomption de responsabilité ne joue qu’en faveurs d’une tiercevictime ; ce qui veut dire que l’élève ou l’apprenti qui se serait occasionnéun dommage à lui-même ou celui auquel un instituteur ou un artisanaurait causé un dommage ne peut invoquer l’article 1384, al. 4 du Codecivil ; il ne peut en effet être considéré comme un tiers.

Attention, il est évident que les autres élèves et apprentis ainsi que lesautres instituteurs et artisans qui font partie de l’établissement sontconsidérés comme des tiers pouvant prétendre au bénéfice de laprésomption de responsabilité.

§3. EffetsA. Une présomption réfragableDès l’instant où les conditions d’application de l’article 1384, al. 2 sontréunies, l’instituteur ou l’artisan est présumé avoir commis une faute dansla surveillance de l’élève ou de l’apprenti qui a causé le dommage ; le liencausal entre cette faute et le dommage est lui aussi présumé.

Ces présomptions sont cependant réfragables (C. civ. art. 1384, al.5) ;l’instituteur ou l’artisan peut dès lors s’exonérer de sa responsabilité enapportant la preuve qu’il n’a pas commis de faute dans la surveillanceexercée ou qu’une correcte surveillance n’aurait pu empêcher ledommage.

B. Administration de la preuve contraireL’étendue du devoir de surveillance incombant à l’instituteur ou à l’artisans’apprécie « in concreto », en prenant en considération toutes lescirconstances de fait :

• L’âge de l’élève ou de l’apprenti : le devoir de surveillance estplus étendu à l’égard des enfants en bas-âge qu’à l’égard desadolescents ;• La personnalité de l’élève ou de l’apprenti, ses antécédents ;• Le nombre d’élèves à surveiller• La nature de l’établissement auquel il est confié, le typed’activités exercées,…

L’instituteur ou l’artisan peut invoquer la soudaineté du fait dommageablepour prouver qu’il n’aurait pas pu prévoir, ni empêcher, la survenance

dudit dommage (coup de poing, jet de ballon,…).

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Cette échappatoire est très souvent invoquée et entendue par les cours ettribunaux.

Enfin, l’article 18 de la loi du 3 juillet 1978 consacre une immunité en

faveur de l’instituteur sous contrat de travail, en vertu de laquelle il nepeut voir sa responsabilité civile engagée pour les fautes qu’il commet àl’égard des tiers (ou de son employeur) dans l’exécution de son contrat detravail, à l’exception des fautes intentionnelles (dol), des fautes lourdes etdes fautes légères et habituelles.Cette immunité est personnelle au travailleur et ne bénéficie pas aucommettant.La loi du 10 février 2003 relative à la responsabilité des agents

des services publics a mis fin a une différence de traitement ; en effet,avant cette date, les instituteurs de l’enseignement libre bénéficiaient del’immunité de l’article 18 et les agents statutaires des services publics,quant à eux, restaient responsables de leurs fautes même légères etoccasionnelles à l’égard des tiers et de leurs employeurs.

C. Autres recoursLe civilement responsable qui a indemnisé la victime dispose d’un recourscontre l’élève ou l’apprenti.

Quant à la victime, elle peut toujours agir contre l’élève ou l’apprenti quilui a causé un dommage, à condition toutefois qu’il ait le discernementnécessaire, ou contre les parents de celui-ci (cumul horizontal desresponsabilités). Elle peut également mettre en cause la responsabilitépersonnelle de l’employeur, par exemple en démontrant un défautd’organisation dans le chef de l’établissement d’enseignement.

La victime peut également agir contre le commettant de l’instituteurpréposé (cumul vertical).

• Dans l’enseignement libre, on considère, en effet, que l’enseignantou le surveillant agit en qualité de préposé du pouvoir organisateurde l’école.

• Dans l’enseignement officiel, les membres du corps enseignant sontdes organes des pouvoirs publics ; on estimait par conséquent queleurs fautes engageaient directement la responsabilité de cesderniers, sur la base de l’article 1382 du Code civil. C’était l’Etat quiintervenait pour indemniser les victimes.Depuis une loi du 10 février 2003, les personnes publiques sontnéanmoins responsables du dommage causés à des tiers par les

membres de leur personnel dans l’exercice de leurs fonctions surbase de l’article 1384, al. 3 du Code civil .

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§2. Conditions d’application de la présomptionA. L’existence d’un lien de présomption

1. Notion de subordination

Pour qu’il existe un lien de préposition entre deux personnes, il fautd’abord que la première (le commettant) emploie la seconde (le préposé)pour son compte, aux fins de réaliser un travail qu’elle lui a confié. Il fautensuite que le préposé se trouve dans un état de subordination parrapport au commettant quant au travail à effectuer. Autrement dit,le préposé doit se trouver sous l’autorité, la direction et lasurveillance du commettant.

Il convient de noter, enfin, que la subordination est un fait juridique ; lapreuve de son existence peut donc être rapportée par toutes voies dedroit par la victime.

2. Situations particulièresDès lors que les conditions sont réunies, il importe peu que le

commettant ait été présent, ou qu’il ait effectivement exercé sesprérogatives au moment où le préposé a commis la faute à l’origine dudommage ; il suffit qu’il ait le pouvoir virtuel d’agir de la sorte.

Dans le même ordre d’idée, il n’est pas nécessaire que ce pouvoirsoit exercé directement par le commettant, qui peut recourir à desintermédiaires (contremaitre, chef de service,…) ; mais attention, tousces intermédiaires ne sont pas considérés comme commettants !

En autre, la subordination n’est pas incompatible avec une certaineautonomie dont le préposé jouirait dans l’exécution de son travail ; lepréposé pourrait se trouver dans un rapport de subordination alorsmême que ses compétences techniques seraient supérieures à celles deson commettant.

On ne tient pas davantage compte d’éléments tels que l’existenceou l’absence de rémunération, le caractère permanent, temporaire oupurement occasionnel de l’activité, les simples rapports decomplaisance ou encore les liens familiaux entre le commettant et le

préposé.

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De plus, le lien de subordination peut exister en dehors de toutrapport contractuel ; il suffit que, dans les faits, le commettant puisseexercer son autorité ou sa surveillance sur les actes du préposé.Inversement, on considère, en principe, que le contrat de mandat et le

contrat d’entreprise n’entrainent pas le lien de subordination, sauf circonstances particulières.

Peut-on considérer que l’évêque est un commettant du curé qui auraitcommis des abus sur des mineurs ?

• Il y a bien un lien de subordination ;• Le préposé est géographiquement opposé au

commettant (autonomie) ;MAIS

On ne peut considérer que le curé agit pour le compte de l’évêque,son commettant. En effet, l’évêque est un intermédiaire entre lecuré et Dieu. L’Eglise n’agitpas pour son propre compte.

• En cas de prêt de préposé, la jurisprudence considère généralementque le préposé prêté devient un préposé du patron emprunteur si, dansles faits, il y a eu déplacement de l’autorité ; il faut donc réellement quele commettant originaire ait placé son préposé au service du tiers, quiexercera effectivement le pouvoir d’autorité.

B. La « faute » du préposé1. Principes

Pour que la responsabilité du commettant puisse être engagée, il fautencore que le préposé ait commis une faute ayant causé un dommage àun tiers ; il appartient à la victime de prouver, par toutes voies de droit,l’existence de cette faute et son lien causal avec le préjudice subi. Il n’esttoutefois pas nécessaire d’identifier personnellement le préposé fautif…

La gravité de la faute importe peu : la responsabilité du commettant peuaussi bien être engagée pour une faute légère que pour une faute lourde,voire intentionnelle, du préposé.

2. L’immunité du travailleur salarié

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Chaque fois qu’un préposé se trouve engagé dans les liens d’un contrat detravail, il bénéficie de l’immunité que l’article 18 dela loi du 3 juillet 1978 lui accorde.D’après ce texte, en cas de dommages causés à l’employeur ou à des tiers

dans l’exécution de son contrat, le travailleur ne répond que de son dol, desa faute lourde ou de sa faute légère habituelle, et ce, tant à l’égard deson employeur qu’à l’égard des tiers.En d’autres termes, la faute légère occasionnelle commise par untravailleur n’engage pas sa responsabilité personnelle, pur autant qu’ellesoit commise dans l’exécution du contrat de travail (et non pour cellescommises sur le chemin du travail).

Ex : lorsque, le 31 décembre, Edouard (firme Dortue) et Marie (firme Petit Jean) s’étaient retrouvé dans les bureaux de la firme Dortue avec d’autrescollègues pour fêter la nouvelle année. Edouard avait lancé un pétarddans le visage de Marie ; immunité de l’article 18 ?

Il s’agit d’une faute légère occasionnelle, donc oui, Edouard bénéficie decette immunité et ce, même en cas d’abus de fonction, à moins que l’acten’ait été commis malgré l’interdiction du commettant dans le seul butpersonnel, pas dans le temps des fonctions, sinon… responsabilité ducommettant !

L’exonération prévue à l’article 18 est personnelle au travailleur ; elle neprofite pas au commettant, qui ne pourrait invoquer l’immunité de sonpréposé pour échapper à la présomption de responsabilité qui pèse sur lui.Ce même article 18 immunise le travailleur non seulement à l’égard destiers, mais aussi à l’égard de son employeur ; ceci permet de paralysertoute action récursoire que l’employeur voudrait exercer contre sontravailleur après avoir indemnisé la victime.

C. L’accomplissement de l’acte illicite dans l’exercice de ses

fonctions1. Principes

Il est bien entendu qu’un commettant ne pourrait être tenu pourresponsable du comportement fautif de son préposé dans le cadre de savie privée.En effet, il suffit que l’acte fautif du préposé ait été accompli pendant ladurée du service du préposé et qu’il soit en relation avec ses fonctions,fut-ce indirectement ou occasionnellement. Ainsi, il appartiendra au jugede déterminer « in concreto » les limites des fonctions attribuées au

préposé.2. L’abus de fonction

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Qu’en est-il lorsqu’un préposé utilise les moyens mis à sa disposition pourse procurer un avantage personnel, en accomplissant un acte interdit ? Onparlera alors d’abus de fonction. Notons qu’à lui seul, l’abus de fonctionn’exonère pas le commettant de sa responsabilité.

Le commettant peut s’exonérer de sa responsabilité si le préposé a agi :a) Sans autorisation

Il doit pratiquement s’agir d’une interdiction, dont le commettant devrafaire la preuve.

b) A des fins étrangères à ses attributionsC'est-à-dire dans son intérêt personnel ou dans celui d’un tiers, et nondans l’intérêt du commettant ;

c) En dehors des fonctions auxquelles il est employéIl faut, pour que le commettant puisse s’exonérer, que l’acte du préposéne présente aucun lien, même indirect ou occasionnel, avec ses fonctions.Ainsi, le commettant n’st en principe pas responsable lorsque son préposéemprunte le véhicule de l’entreprise pour partir en vacances et cause unaccident.

De plus, si la victime avait connaissance de l’abus de fonction, la Cour decassation considère désormais, après une jurisprudence fluctuante, que laresponsabilité du commettant demeure.

§3. EffetsA. Une présomption irréfragableSi les conditions sont réunies, le commettant est présumé responsable dela faute de son préposé. Sont en effet présumés irréfragablement la fautedu commettant ainsi que le lien causal entre cette faute et le dommagesubi par la victime.

L’article 1384, al. 5 du Code civil ne permet pas aux commettantsd’apporter la preuve qu’ils n’ont pu empêcher le fait dommageable ; ils’agit d’une véritable responsabilité objective.

B. L’administration de la preuve contraireLe maitre ou le commettant ne pourra s’exonérer qu’en s’attaquant auxconditions mêmes de sa responsabilité, c.à.d. en établissant :

• qu’il n’est pas commettant ;• qu’il n’y a pas de faute du préposé ;• qu’il n’y a pas de lien entre la faute et les fonctions ;• …

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La responsabilité du commettant n’efface cependant pas la responsabilitépersonnelle du préposé ; les eux sont responsables « in solidum » de sorteque la victime peut choisir d’agir contre le commettant, contre le préposé,

ou contre les deux simultanément.Par ailleurs, après avoir indemnisé la victime, le commettant peut enprincipe exercer un recours contre son préposé. Toutefois, ces deuxprincipes sont largement tempérés… §4. La responsabilité des « organisations » du faite de leursvolontairesOn sait combien le volontariat est puissamment développé dans notrepays. Le phénomène est à ce point significatif qu’il a retenu l’attention dulégislateur ; sensible au sort de toutes ces bonnes volontés, il a cru bond’adopter la loi du 3 juillet 2005 relatives aux droits desvolontaires . L’intention était notamment d’alléger la responsabilité desvolontaires, tout en sauvegardant les droits des victimes éventuelles deleurs négligences.

A. La responsabilité de l’organisationSi le volontaire voit sa responsabilité civile immunisée, l’organisation pourlaquelle il fournit ses acticités répond par contre de ses fautes,conformément à l’article 5, § 1 er ,in fine, de la loi du 3 juillet 2005. Le législateur a voulu aligner laresponsabilité de l’organisation sur celle de l’employeur, d’ailleurs, lasubstance de cette loi ne diffère pas fondamentalement avec l’article1384, al. 3 du Code civil .

1. Conditions d’applicationPremièrement, il doit s’agir d’une organisation visée à l’article 5. Ainsi, ildoit s’agir :

• Soit d’une personne morale de droit privé ou de droit publicsans but lucratif (ASBL, Etat fédéral, communautés et régions,

communes et provinces, CPAS,…) ;• Soit une association de fait employant au moins une personnedans les liens d’un contrat de travail d’ouvrier ou d’employé régipar la loi du 3 juillet 1978 ;• Soit une association de fait constituant une section d’uneorganisation-coupole.

Deuxièmement, pour engager la responsabilité de l’organisation, il fautaussi démontrer un fait susceptible d’engager la responsabilité d’un

volontaire(faute prouvée, fait d’autrui, fait d’une chose).

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De plus, la gravité de la faute du volontaire importe peu.

Troisièmement, le fait dommageable du volontaire doit avoir été accomplidans l’exercice des activités volontaires. Selon les travaux parlementaires,

cette condition doit être interprétée de manière large « afin que ledommage causé par le volontaire sur le chemin parcouru pour se rendreaux activités ou en revenir, par exemple, puisse également être couvert ».

A nouveau, si l’on raisonne par analogie avec l’article 1384, al. 3 du Codecivil, l’abus de fonction du volontaire n’exonère pas automatiquementl’organisation de sa responsabilité. Trois conditions cumulatives doiventêtre respectées pour exonérer l’organisation :

• le volontaire doit avoir agi sans autorisation• à des fins étrangères à l’activité fournie• et en dehors des activités pour lesquelles il est engagé comme

volontaire.

Quatrièmement, la faute du volontaire doit avoir occasionné un préjudiceà un tiers ; par « tiers », il y au lieu d’entendre toutepersonne autre que l’organisation et le volontaire dont la responsabilitéest engagée.

2. EffetsL’article 5 de la loi du 3 juillet 2005 instaure une responsabilitéobjective à charge de l’organisation à réparer le préjudice lié à cetteactivité, sans qu’il y ait lieu de démontrer une faute dans le chef del’organisation et sans que celle-ci puisse démontrer son absence de fauteen vue d’échapper à sa responsabilité.

Pour échapper à sa responsabilité, l’organisation peut contester lesconditions d’application :

• Prouver qu’elle n’est pas une organisation visée par l’article 5 ;• Prouver que la responsabilité de son volontaire ne peut être

engagée ;• Prouver que le fait du volontaire ne rentre pas dans l’exercice de ses

activités ;• Prouver qu’il n’y a pas de lien causal entre le fait du volontaire et le

dommage qui est du à une cause étrangèreexonératoire.

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Enfin, la responsabilité de l’organisation ne fait toutefois pas obstacle à laresponsabilité personnelle du volontaire lorsque ce dernier a commis undol, une faute lourde ou une faute légère habituelle.Dans cette hypothèse, l’organisation et le volontaire sont responsables

« in solidum ».B. L’immunité des volontaires(Voir supra)

Sous-section 4. Y a-t-il un principe général deresponsabilité du fait d’autrui ?

§1. Position de la question« Il n’y a pas de principe général, il n’y a que des cas ».

Souvenons-nous de l’arrêt « BLIECK » :Un handicapé mental, majeur, confié à un centre d’aide par le travail, gérépar l’association des centres éducatifs du Limousin, a mis le feu à uneforêt appartenant à M. Blieck. La cour d’appel de Limoges a estimé que lerisque social créé par les méthodes de rééducation du centre (axées surune large autonomie laissée aux pensionnaires) devait être assumé par cecentre et permettait l’application de l’article 1384, al. 1 er du Code civil « qui énonce le principe d’une présomption de responsabilité du fait des

personnes dont on doit répondre ».

Dès 1930, il est acquis que la finale de l’article 1384, al. 1 er du Codecivil permet de fonder un principe général de responsabilité du faut deschoses que l’on a sous sa garde, alors que la doctrine, (presque) unanime,persiste à considérer que la responsabilité délictuelle du fait d’autrui selimite aux cas visés par les alinéas 2 à 4 de l’article 1384 .

Cette interprétation asymétrique de deux membres d’une même phraseblesse la logique.

§2. Etat de la jurisprudence belgeEn Belgique, comme dans l’hexagone, la doctrine et la jurisprudencedominantes considèrent, de longue date, que la responsabilité du fait

d’autrui se limite aux hypothèses expressément énumérées par lesalinéas 2 et suivants de l’article 1384 du Code civil.

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Mais, il y a peut, inspirée de toute évidence par l’arrêt « BLIECK », la Courd’appel de Mons a également « découvert », dans le premier alinéa del’article 1384, un principe général de responsabilité du fait d’autrui. Elle

n’a cependant pas été suivie par la Cour de cassation.A. L’arrêt de la Cour d’appel de Mons du 27 décembre 1995Un mineur, âgé de 15 ans, avait été confié au centre « Suzanne VanDurme » de Rhode-Saint-Genèse qui dépend de l’A.S.B.L. « Les stations deplein air ». Moins d’une heure après qu’il ait quitté la prison de Mons pourrejoindre le Centre Van Durme, voici qu’il s’échappe et boute le feu à unatelier de réparations automobile et à une station de carburants dePeruwelz. Le centre fonctionnait en régime de semi-liberté de manière àfavoriser l’épanouissement des mineurs délinquants et leur intégrationdans la société ; d’où la difficulté de mettre à jour une faute desurveillance pour engager la responsabilité du centre sur le fondement del’article 1382 du Code civil .Pour ne pas laisser la victime sans indemnisation, la Cour d’appel de Monschoisit néanmoins de retenir la responsabilité du défendeur tenu derépondre du mineur d’âge concerné sur la base de l’article 1384, al. 1 er

du Code civil .

B. La position de la Cour de cassation

Saisie d’un pourvoi introduit contre l’arrêt de la Cour d’appel de Mons, laCour de cassation casse ce dernier, refusant ainsi d’emboiter le pas de sonhomologue française.« L’article 1384 du Code civil n’établit pas, en son alinéa 1 er , un principegénéral de responsabilité du fait d’autrui (…) cette responsabilité n’existeque dans les limites des régimes particuliers, différents les uns des autres,qu’il instaure de manière exhaustive dans les alinéas suivants ».Frilosité de notre Cour suprême ? Respect scrupuleux de la lettre de laloi ?

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§3. Appréciation critiqueA. Les arguments du débatLa découverte d’un principe général de responsabilité du fait d’autrui dansl’article 1384, al. 1 er du Code civil est séduisante, en même tempsqu’elle suscite de multiples interrogations ; le moment est venu deprésenter et dévaluer les principaux arguments du débat.

D’abord, la création prétorienne d’une règle générale de responsabilité dufait d’autrui se heurte à l’absence d’uniformité des régimes prévus aux alinéas 2 et suivants de l’article1384 . Cet obstacle ne se rencontre pas sur le terrain de la responsabilitédu fait des choses. Plus fondamentalement, les mots de l’alinéa 1 er del’article 1384 , sur lesquels serait fondée une règle générale deresponsabilité du fait d’autrui, ne donnent aucune indication quant audomaine de la règle.

La formulation d’une règle générale de responsabilité du fait d’autrui seheurte également au caractère individualiste de la responsabilité civile ;or, il est constant que les dérogations au droit commun doivents’interpréter de façon restrictive. Mais l’on sait que notre droit estincontestablement marqué par le déclin de la responsabilité individuelle :l’argument apparait donc suranné (démodé, désuet).

B. Synthèse et perspectivesDe toute évidence, l’énumération de l’article 1384 n’apparait plus enphase avec les réalités sociales d’aujourd’hui. Les hypothèses danslesquelles, hors les cas expressément envisagés, une personne estappelée à exercer une autorité sur une autre personne sont légion.

A n’en pas douter, l’actualisation de l’article 1384 du Code civil esthautement souhaitable.

Tout d’abord, il y a lieu de déterminer quelle seraient les personnes tenuesde répondre du fait d’autrui. Quid des parents, des baby-sitters,…Nous pensons que le domaine de la présomption de responsabilité devraitêtre restreint aux personnes morales qui, à titre professionnel, prennenten charge, organisent et contrôlent le mode de vie de personnespotentiellement dangereuses qui leur sont confiées.

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Ensuite, on peut e demander si l’on crée une responsabilité objective etdirecte du civilement responsable pour tous les dommages causés par lespersonnes sur lesquelles il exerce un pouvoir d’autorité ou uneresponsabilité à deux degrés, analogues à celles prévues par les alinéas 2

et suivants de l’article 1384 du Code civil.Encore convient-il de s’interroger sur la nature de la présomption : doit-elle être irréfragable ou susceptible de preuve contraire ?

Section 3. La responsabilité du fait des chosesSous-section 1. Le principe général de responsabilité du

fait des choses§1. Principe et origine de la présomption

« On est responsable (…) du dommage causé par le fait des choses quel’on a sous sa garde ».

Cette règle, contenue dans l’article 1384, al. 1 er , in fini du Code civil est longtemps restée morte, « sans portée pratique ».Mais, sus l’influence des progrès de l’industrie et de la fréquence desaccidents dus à la multiplication des choses inanimés dangereuses ; il afallu prévoir une protection meilleure aux victimes, toujours plusnombreuses, d’accidents du travail qui s’étaient multipliés avec ledéveloppement spectaculaire du machinisme et de l’industrialisation.

Animés de cette préoccupation inédite, nos cours et tribunaux ont alors« découvert », dans la finale de l’article 1384, al. 1 er du Code civil , leprincipe d’une responsabilité générale du fait des choses.

§2. Conditions d’applicationLe demandeur doit prouver qu’il a subi un dommage en lien causal avec levice de la chose qui était sous la garde du défendeur. Dès l’instant où ceséléments de preuve sont rapportés, le gardien est responsable de pleindroit du dommage, quelle que soit l’origine du vice et sans pouvoir exciperde l’impossibilité dans laquelle il était de découvrir le vice de la chose.

A. La chose

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On verra que le triple pouvoir qui caractérise la garde doit s’apprécier parrapport à la chose, et non par rapport au vice de celle-ci ; il importe doncde désigner précisément la chose censée être affectée d’un vice.

Il est admis que l’article 1384, al. 1er

du Code civil ne s’applique pasaux animaux, bien qu’ils soient des choses (lato sensu), ni au corpshumain. Ainsi, la notion de chose s’applique à toutes choses corporelles,meubles ou immeubles ; elle couvre aussi bien les solides que les liquides,les gaz ou le courant électrique.

On parle de « chose complexe » lorsqu’une chose simple (sol, pelouse,chaussée,…) en incorpore une autre (pavés, pierre, narre de fer,…) ou encomporte une autre sur sa surface (feuille de salade sur la surface d’unmagasin, flaque d’eau ou d’huile sur la route,…) ; pourvu quel’assemblage ainsi formé apparaisse comme une chose unique, ayant uneidentité propre, aux yeux des tiers.

B. Le vice de la chose1. Digression historique

Le système échafaudé par la Cour de cassation belge s’inspire nettementde la pensée de F. LAURENT. Fondé sur une analogie entrel’article 1384, al. 1 er du Code civil et l’article 1386 du Code civil, leraisonnement tenu par cet auteur parait impliquer que la victime doitprouver le « vice » de la chose pour mettre en cause la responsabilité dugardien de celle-ci, tout comme elle doit établir la « ruine » du bâtimentafin de rendre le propriétaire responsable du dommage subi.

Or, dans les cas de responsabilité du fait d’autrui, la présomption deresponsabilité n’existe qu’à la condition de prouver la faute de la personnedont on doit répondre ; la Cour en déduit que la responsabilité du gardiendoit être subordonné à la démonstration d’une « faute » de la chose, c.à.d.plus exactement d’un « vice de la chose ». Comme pour mieux justifiercette analyse, la Cour (influencée par LAURENT) introduit par ailleurs uneréférence à l’article 1386 du Code civil. La comparaison avec cettedisposition vient conforter son idée que « la responsabilité [du gardien]

dérive du vice de la chose attribué à une faute ».

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En revanche, une pelouse ne revêt pas une caractéristique anormale parle seul fait qu’elle contenait une petite pierre qui a été projetée dans l’œilde la victime lors d’une tonte ; en effet, la Cour considère que le dommagesubi en l’espèce « ne procède que la réalisation d’un risque afférent à la

tonte de toute pelouse, qui est celui de la projection de pierres ou degravillons » .

Il revient malgré tout à la victime de supporter, in fine, le risque de lapreuve, même si l’admission de la preuve indirecte, négative ou déductivedu vice de la chose lui facilite sans doute la tâche.

On également été jugés vicieux :• Des sols de grands magasins sur lesquels trainent des détritus ;• Un soupirail situé à un endroit où il est prévisible que les piétons

passent et qui a cédé sous le poids d’une personne ;• Des routes dégradées ou rendues glissantes par la présence de

gravillons, d’un produit huileux ou graisseux, d’une flaque d’eau oud’une plaque de verglas isolée, …

Encore importe-t-il de déterminer précisément la chose que l’on prétendviciée :Un chapiteau qui avait été installé sur le parking d’un restoroute s’étaitenvolé sous l’effet d’un vent violent pour s’écraser sur deux camions. Laquestion centrale était de savoir quelle était la chose réputée vicieuse : lechapiteau ou le parking ? La Cour considère, en l’espèce, que le parkingsur lequel est monté le chapiteau ne constitue pas une chose complexe ausens de l’article 1384, al. 1 er du Code civil, étant donné que l’ensembleainsi formé n’a pas d’identité propre reconnaissable comme telle par legrand public, au travers de ses propriétés, ni d’une unité d’affectationentre les deux éléments. De l’avis de la Cour, c’est le chapiteau, et non leparking, qui est à l’origine des dommages occasionnés aux camions.

b) Une caractéristique « anormale »Le vice résulterait d’une caractéristique de la chose qui l’écarte de sonmodèle, peu importe le moment où la différence est apparue.Ainsi, la caractéristique anormale d’une chose ne peut être appréciée qu’àla lumière de comparaison de choses d’une même catégorie et d’un mêmetype au moment des faits, plus spécialement à la lumière du caractèrepréjudiciable de la chose en certaines circonstances.

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Il a également été observé que le terme « normal » pouvait revêtir undouble sens :

• L’un faisant référence à une norme de fréquence(serait anormal ce qui n’est pas habituel) :

o

La seule présence de déchets de fruits ou de légumes sur lesol du rayon « fruits et légumes » d’une grande surface n’estpas une caractéristique anormal du sol mais une situationbanale et bien connue de tous les clients ;

o Par contre, une cerise trouvée au rayon des chaussettes ouune feuille de salade au rayon des textiles sont autantd’éléments rendant le sol du grand magasin vicieux.

• L’autre à une norme de valeur (serait normal ce qui n’est pasconforme à la nature de la chose ou à l’usage auquel elle est destinée) :

o Une échelle dépourvue à sa base de patins antidérapantsindispensables à sa stabilité ne répond pas à sa finalité et rendla chose impropre à son usage normal, ce qui suffit pasconstituer le vice de la chose ;o L’éclatement d’un pneu d’un véhicule est unecaractéristique anormale de la chose qui la rend impropre àl’usage normal.

En doctrine, il a finalement été suggéré de préférer une conceptionfonctionnelle :« Une chose serait vicieuse dès l’instant où, privée d’une qualité propre,elle ne présenterait pas le degré de sécurité auquel l’homme prudent et diligent peut légitimement s’attendre, compte tenu des circonstances ».

c) Une caractéristique anormale « susceptible de causer undommage »

Ce troisième élément est le moins important sans doute ; il rappelle toutau plus l’exigence du lien de causalité entre le vice et le dommage,l’accident démontrant, par lui-même, que la chose était susceptible decauser un dommage. Notons toutefois qu’il est des choses dangereusespas nature (une grenade,…) dont la caractéristique normale est deproduire un dommage. En d’autres termes, si le juge estime que lacaractéristique anormale de la chose ne peut entrainer aucun dommage, ilne peut conclure à la responsabilité du gardien (puisque le dommageétait, dans ce cas, imprévisible).

C. Le gardien de la chose (attention, tous les mots comptes)

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« Le gardien de la chose au sens de l’article 1384, al. 1 er du Code civil est celui qui, pour son propre compte, use de la chose, en jouit ou laconserve, avec un pouvoir de surveillance, de direction et de contrôle ».

1. Eléments de la définitionSeul peut avoir la qualité de gardien au sens de l’article 1384, al. 1 er duCode civil , celui qui use de la chose, en jouit ou la conserve ; ainsi, lagarde suggère que le gardien doit avoir une maitrise matérielle de lachose, qu’il l’utilise, en tire quelque profit ou en assure l’entretien.

Toutefois, la seule circonstance qu’une personne use, jouit ou conserveune chose ne suffit pas à la constituer en gardien de celle-ci ; encore faut-il qu’elle dispose à l’égard de la chose d’un pouvoir de surveillance, dedirection et de contrôle.Ces trois composantes sont cumulatives !En réalité, le seul fait d’avoir la chose en main ou à portée de main, de ladétenir ou de l’utiliser, au moment du fait dommageable, n’est ni suffisantni même nécessaire pour l’attribution de la garde.Le pouvoir de commandement qui caractérise la garde est théorique ouabstrait en ce sens qu’il ne doit pas nécessairement être exécuté demanière effective au moment de la survenance du dommage causé par levice de la chose ; aussi son absence au moment du fait dommageable, etdès lors, l’impossibilité de fait dans laquelle il se trouvait d’exercer sonpouvoir de commandement, ne le dégage pas nécessairement de saresponsabilité.

Encore ressort-il de la Cour de cassation que le gardien doit exercer lagarde pour son compte propre ; il arrive qu’une personne utilise une choseou la conserve pour le compte d’autrui, avec la possibilité d’exercer surcette chose un pouvoir de direction, de surveillance et de contrôle.

Cela donne à penser qu’un préposé ne peut être considéré comme gardien

d’une chose qu’il utilise, en exécution de ses fonctions, pour le compte deson commettant. Manifestement, les juges ne sont pas enclins àreconnaitre la qualité de gardien au préposé ; les auteurs tendent àconsidérer que les qualités de préposé et de gardien d’une chose sontincompatibles ; quel que soit le degré d’autonomie dont jouit de facto lepréposé dans l’exercice de ses fonctions, sauf s’il ressort d’un examenminutieux des faits qu’aux moment où le dommage s’est produit, lepréposé usait, jouissait ou conservait la chose pour son propre compte, etnon pour le compte du commettant.

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Donc, en définitive, la qualité de gardien ne peut être reconnue qu’à celuiqui, au moment du fait dommageable, avait la possibilité d’exercercumulativement tous les pouvoirs de la garde sur la chose ; en ce cas, lagarde est dite « indivisible » mais rien n’empêche en revanche que la

garde soit « conjointe » ou « collective » (on pense par exemple à lacopropriété). Dans ce cas de garde conjointe, les différents gardiens sonttenus pour responsables « in solidum » à l’égard de la victime, sanspréjudice des recours contributoires possibles entre eux.

2. ApplicationsEn principe, aucune présomption ne s’attache à la propriété ; il ne revientdonc pas au propriétaire de la chose d’administrer la preuve qu’il atransférer la garde de la chose à un tiers. La charge de la preuve pèse surla victime. Autrement dit, c’est à elle qu’il appartient d’établir, par toutesvoies de droits, la qualité de gardien du défendeur.

a) Location et prêt Il apparait que le locataire d’une chose, mobilière ou immobilière, endevient le plus souvent le gardien ; encore faut-il prouver qu’il a bien la

jouissance de celle-ci, avec pouvoir de surveillance, de direction et decontrôle. Toutefois, il est également régulièrement estimé que la simple

jouissance temporaire d’une chose est insuffisante pour conférer aulocataire la qualité de gardien.En matière de prêt, les solutions sont similaires.

b) Transport Le transporteur est généralement considéré comme gardien de la chosetransportée pendant toute la durée du transport, sauf si l’expéditeur ou ledestinataire se sont personnellement chargés des opérations auchargement ou de déchargement ; dans ce dernier cas, ils sontresponsables du dommage occasionné par la chose au cours de cesopérations.

c) EntrepriseA défaut de convention contraire, l’entrepreneur de constrictionimmobilière est en principe le gardien du chantier et des matériaux,

jusqu’à l’acceptation des travaux par le maitre de l’ouvrage.

Lorsqu’une chose est remise à un professionnel chargé de l’entretenir oude la remettre en état, on considère d’ordinaire que la garde lui esttransférée pendant le temps où il conserve la chose sous son contrôle.

d) Voies navigables

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La Région wallonne a la garde des voies navigables au sens de l’article1384, al. 1 er du Code civil, et elle ne peut transférer cette garde à unentrepreneur en se déchargeant sur lui de la mission d’exploitation desvoies navigables et de réglementation du mouvement des bateaux d ès

lors que cette mission, qui lui incombe en vertu de la loi, est d’ordrepublic.

§3. EffetsA. Présomption irréfragableDès l’instant où les conditions d’applications de l’article 1384, al. 1 er duCode civil sont réunies, le défendeur est responsable de plein droit dudommage causé par le vice de la chose dont il a la garde. Il n’est pasadmis qu’il puisse se libérer en prouvant qu’il n’a pas commis de faute.L’origine du vice, le moment ou les circonstances de son apparitionn’entre pas non plus en ligne de compte ; ainsi, le défendeur ne peut-ilprétendre que le vice est imputable à un tiers ou à un cas de forcemajeure. Dès l’instant où le vice est établi, toutes ces considérationsn’existent plus. Si le vice de la chose résulte du fait d’un tiers et dans lamesure où ce dernier est identifié, le gardien peut exercer un recours enintervention et garantie de la condamnation.

Le défendeur ne pourra échapper à sa responsabilité qu’en s’attaquantaux conditions mêmes de celle-ci :

• Il pourra faire valoir qu’il n’avait pas la garde de la chose au momentdu fait dommageable (au motif qu’elle avait été transférée à untiers) ;

• Conteste l’existence du vice ;• Démontrer l’absence de lien de causalité entre le vice de la chose et

le préjudice.

B. Cause étrangère exonératoire1. Cas fortuit ou force majeure

Le défendeur peut échapper à sa responsabilité en démontrant que ledommage ne résulte pas d’un vice de la chose, mais trouve sa clauseexclusive dans un événement naturel ; il faut qu’il s’agisse donc d’ unévénement imprévisible, irrésistible et indépendant de la volontédu défendeur en responsabilité .

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Le gardien n’échappera à sa responsabilité que si l’événement naturelreconnu comme force majeure est la cause exclusive du dommage ; il nesera pas libéré si la force majeure coexiste avec le vice de la chose.

2. Le fait d’un tiersLorsque le vice de la chose résulte du fait d’un tiers, le gardien n’est pasexonéré ; ce principe est particulièrement sévère pour le gardien d’unechose complexe qui peut avoir à répondre du fait d’un tiers négligent,voire malveillant.En revanche, le défendeur peut échapper à sa responsabilité s’il prouveque, nonobstant la présence d’un vice de la chose, il résulte descirconstances de fait, appréciées souverainement par le juge de fond, quele dommage trouve sa cause exclusive dans le fait d’un tiers. En ce cas, lalibération du gardien sera totale dans la mesure où il aura été considéréque, sans le vice, le dommage se serait produit de la même façon ou, pourle dire autrement, que le vice ne peut être vu comme la condition sine quanon de l’accident.

Il se peut aussi que l’intervention fautive du tiers coexiste avec le vice dela chose en manière telle que, sans le vice de la chose ou sans le fait dutiers, l dommage ne se serait pas produit tel qu’il s’est réalisé « inconcreto ».

3. La faute de la victimeS’il est établi qu’une faute de la victime a contribué à la réalisation dudommage, sans en être la cause exclusive, elle entrainera un partage deresponsabilité ; et ce, chaque fois qu’il est permis d’estimer qu’enl’absence du vice de la chose ou de la faute de la victime, le préjudice subipar celle-ci ne se serait pas produit tel qu’il s’est réalisé « in concreto ».Et inversement, le juge de fond peut aussi considérer que la faute avéréede la victime est sans lien causal avec le dommage ; le gardien peut alorsavoir à assumer la réparation intégrale du préjudice.

Une libération totale u gardien est également possible, du moins enthéorie, lorsque la faute de la victime est la cause exclusive du dommage.Encore le juge du fond doit-il constater que le dommage tel qu’il s’estréalisé in concreto, se serait aussi produit sans le vice de la chose :

• L’imprudence caractérisée de la victime en présence d’un dangersignalé suffit à rompre tout lien causal entre le vice de la chose et ledommage (dérapage d’uncamion sur une route verglacée) ;

Même si l’on considère que le sol d’un grand magasin a été renduvicieux par la présence d’un pot alimentaire sur lequel la victime a

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glissé, il n’y a pas de lien de causalité entre le vice et le dommage,dès lors que celui-ci a été causé par la seule faute de la victime.

Sous-section 2. Les régimes particuliers du Code civil §1. La responsabilité du fait des animaux

A. Principe et fondementDès le début, le législateur était bien conscient des dommages quipouvaient être causés par les animaux. Il a ainsi prévu une responsabilitéparticulière du fait de ceux-ci, consacré à l’article 1385 du Code civil .Cette disposition régissait historiquement la plupart des accidents de lacirculation (accidents d’attelage).

Ainsi, comme nous le dit l’article 1385 du Code civil :« Le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est àson usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit quel’animal fut sous sa garde, soit qu’il fut égaré ou échappé ».

B. Conditions d’application1. Le gardien de l’animal

a) Notion et principesL’article 1385 rend responsable du dommage causé par l’animal le« propriétaire [de celui-ci] ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à sonusage » .Il ressort de ce texte que la responsabilité pèse soit sur le propriétaire, soitsur celui qui se sert de l’animal. Entre les deux, la responsabilité est« alternative » et non cumulative.Ainsi, en aucun cas la victime ne pourra obtenir leur condamnation « insolidum » ; ils ne peuvent être considérés comme co-gardiens au momentdu fait dommageable et tenus, à ce titre, à la réparation intégrale dudommage.

En revanche, il se peut que soient condamnés « in solidum » plusieurs co-gardiens, qui, au moment du fait dommageable, disposaientsimultanément d’un pouvoir incontesté de direction et de surveillance del’animal, sans intervention du propriétaire ; il en est de même en ce quiconcerne plusieurs co-propriétaires d’un animal pourvu qu’il n’y ait pas eutransfert de la garde.

Le propriétaire d’un animal est présumé en être le gardien ; c’est donc surlui que pèse, à titre principal, la responsabilité, sans que la victime ait àétablir sa qualité de gardien au moment du fait dommageable.Si le propriétaire prétend échapper à sa responsabilité, il lui revient de

renverser cette présomption de fait, en démontrant qu’au moment de la

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survenance du dommage, quelqu’un d’autre « s’en servait » et « l’avait àson usage », c.à.d. en était le « gardien ».Il y a donc « transfert de la responsabilité du dommage causé par l’animaldu propriétaire à celui qui s’en sert ».

Suivant l’enseignement de la Cour de cassation, le gardien de l’animalest : « celui qui, au moment de lasurvenance du fait dommageable, a la pleine maitrise de l’animal,comportant un pouvoir de direction et de surveillance non subordonné,sans intervention du propriétaire ; cette maitrise exige que le propriétaireait transmis au gardien un pouvoir d’usage égal au sien » .

Aussi, il faut savoir qu’une détention purement matérielle ne suffit pas.Par conséquent, celui qui passe la laisse de son chien à un compagnon depromenade ne fait pas de lui, ipso facto, un gardien. Il en va de mêmepour celui qui se voit confier par un ami la tache de soigner et de nourrirson chien ou son chat à domicile pendant son absence.

Dès l’instant où quelqu’un disposait d’un incontestable pouvoir decommandement à l’égard de l’animal, on considère qu’il est le gardien ; ilimport peu, à cet égard, que l’animal ait été effectivement gardé ou qu’ilse soit égaré ou échappé.

Dans le cas où un préposé, ayant la qualité de travailleur salarié oud’agent statutaire, est considéré comme gardien d’un animal ayant causéun dommage à un tiers, e pose la question de savoir s’il bénéficie d’uneimmunité de la responsabilité ; à notre connaissance, cette question n’apas encore été tranché. Quoi qu’il en soit, la victime s’y retrouveraitpuisqu’elle semble pouvoir mettre en cause la responsabilité ducommettant sur la base de l’article 1384, al. 3 du Code civil .

b) Le transfert de la garde – applications

On sait que la garde suppose plus que la simple détention matérielle del’animal. Dès lors, le transfert de la garde implique que le propriétaire aittransmis au gardien un pouvoir d’usage égal au sien, c.à.d. la pleinemaitrise de l’animal comportant un pouvoir de direction et de surveillancenon subordonné, sans intervention du propriétaire.

I. Commerce et transport d’animauxEn substance, on peut considérer que l’attribution de la garde nedépend pas du transfert de la propriété, ni du fait de savoir si la

vente était parfaite ou non au moment du fait dommageable.

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En principe, le transporteur d’un animal en devient le gardienpendant toute la durée du transport ; mais sa mission prend fin àl’arrivée, lorsque le propriétaire s’occupe lui-même dudéchargement.

II. VétérinaireLe vétérinaire se voit transférer la garde de l’animal s’il est prouvéque la pleine maitrise de celui-ci lui a effectivement été confiée.Ainsi, si le propriétaire tient son animal à la bride, le vétérinaire en ala garde ; en revanche, si le propriétaire le tient au corps, à lademande du vétérinaire (chargé de la vaccination par exemple), il aété jugé que la garde n’avait pas été transférée.

III. EquitationL’apprenti cavalier n’est généralement pas considéré commegardien car il n’a pas la maitrise du cheval, mais se trouve sous lasupervision de son maitre d’équitation (en manège ou en balade).En revanche, le cavalier chevronné qui part en promenade nonaccompagné est considéré comme gardien car il a, en principe, unepleine maitrise du cheval.

2. Un animal susceptible d’être gardé

Par la force des choses, les animaux qui n’appartiennent à personne (resnullius) sont exclus du champ d’application de l’article 1385. Ainsi en est-il, par exemple, d’un chat sauvage ou d’une abeille sauvage, ou encore dugibier (sauf celui en captivité),…Mais pour le gibier en liberté, il existe d’autres bases légales.

3. Un fait de l’animal Pour que l’article 1385 trouve à s’appliquer, il est nécessaire et suffisantque le dommage ait été causé par un animal. Point n’est besoin d’apporter

la preuve du « vice » de l’animal, comparable au vice de la chose requis,en jurisprudence belge, comme condition de la responsabilité du fait deschoses.

S’il faut effectivement que le dommage soit en lien causal avec un fait del’animal, il n’est toutefois pas nécessaire qu’il y ait eu un contact entre cedernier et la victime ; il suffit de démontrer que sans (le fait) de l’animal,le dommage ne se serait pas produit tel qu’il s’est réalisé « in concreto ».

• Le propriétaire de 4 chiens est responsable du syndrome névrotique

de type anxieux dont souffre un homme de 82 ans en raison de la

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• Contester sa qualité de gardien au moment du faitdommageable ;• Contester le lien de causalité entre le fait de l’animal et ledommage ;•

Démontrer que l’accident est imputable à une cause étrangèreexonératoire.

2. Cause étrangère exonératoirea) Cas fortuit ou force majeure

Le gardien peut invoquer la force majeure et ainsi tenter de convaincre letribunal que le fait matériel de l’animal (dont il n’est pas contesté qu’il aprovoqué le dommage) n’est pas imputable à la faute présumée dugardien, mais à un événement naturel totalement imprévisible et

irrésistible.

b) Le fait d’un tiersLe gardien peut échapper à sa responsabilité en prouvant que ledommage, bien que résultant d’une intervention matérielle de l’animal, aété causé exclusivement par le fait d’un tiers, parfois inconnu, en sortequ’il n’existe pas de lien de cause à effet entre ce dommage t la fauteprésumée du propriétaire ou du gardien.

On pense, par exemple, au tiers qui excite ou provoque un animal, ouencore lance sur lui un projectile.Dans le cas d’animaux échappés d’un enclos, le gardien tente parfois deconvaincre le tribunal que l’animal n’a pu s’échapper que par le fait qu’untiers a ouvert l’enclos ou cisaillé la clôture.

c) La faute de la victimeLe gardien peut échapper à toute responsabilité s’il parvient à démontrerl’absence de lien de causalité entre sa faute présumée et le dommage,celui-ci résultant d’une réaction normale et prévisible de l’animal,provoquée par une faute de la victime qui s’avère être la cause exclusivedu dommage.

• La victime qui s’est dirigée vers la porte d’entrée d’une maisonmanifestement gardée par un berger allemand attaché au boutd’une longue laisse ;

• Une femme mordue au visage par un chien endormi qui a eu uneréaction de défense au moment où elle s’en est imprudemmentapprochée.

Lorsque la faute de la victime a seulement contribué à la survenance dudommage, sans en être la cause exclusive, la responsabilité est partagée :

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• Le gardien d’un taureau et un homme dont la voiture a été défoncéepar l’animal tandis qu’il construisait un mirador un mirador dans laparcelle sur laquelle il possède un droit de chasse.§2. La responsabilité du fait des bâtiments en ruine

A. Principe et fondementAux termes de l’article 1386 du Code civil : « le propriétaire d’unbâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de saconstruction » .

Attention, lorsque les conditions de l’article 1386 du Code civil sontréunies, le recours àl’article 1384, al. 1 er du Code civil est exclu !

B. Les conditions d’application1. Le propriétaire

C’est le propriétaire qualitate qua qui voit sa responsabilité engagée pourles dommages causés par la ruine de son bâtiment ; les co-propriétairessont tenus « in solidum ». Le gardien, le locataire, l’usufruit ou l’occupantne sont pas visés par l’article 1386 du C. civ .

Quant aux bâtiments en construction, ils appartiennent, sauf dispositionlégale ou stipulation contractuelle contraire, au propriétaire du terrain etnon à l’entrepreneur, même s’ils ne sont pas achevés ou réceptionnés.

2. Un bâtiment Sera considéré comme « bâtiment » au sens de l’article 1386 du Codecivil : « toute forme deconstruction immeuble, élevée par l’homme à l’aide de matériaux unis ausol de manière durable ». Sont ainsi visés les maisons, les ponts, leshangars, les digues d’une voie navigable, les murs, les monuments, unestèle funéraire, les caves, les puits de mine,…Par contre, sont exclus de cette notion : les terrains non bâtis, les rochers,les grottes, les arbres ou encore les caravanes ou les baraques dechantiers non fixées au sol de façon durable.

• N’étant pas fixés au sol, ni au bâtiment auquel ils sont liés,les immeubles par destination ne peuvent être considérés commedes bâtiments au sens de l’article 1386 du Code civil ;

• En revanche, en ce qui concerne les immeubles par incorporation, ladoctrine et la jurisprudence ont tendance à les considérer commedes bâtiments au sens précité. Ils font en effet partie intégrante

du bâtiment.

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3. Un bâtiment en ruineIl y a « ruine du bâtiment » lorsque ce dernier se trouve dans un état dedélabrement avancé ou de dégradations graves entrainant la chute oul’effondrement soit de la construction toute entière, soit de matériaux qui

en sont parties intégrantes.Dans cette dernière hypothèse, la ruine doit alors être d’une certaineimportance ; il faut démontrer la chute ou l’effondrement d’une desparties significatives du bâtiment, sans que la solidité de celui-ci doiveêtre nécessairement menacée.

La victime doit établir le lien de causalité entre la ruine du bâtiment et ledommage qu’elle a subi ; et ici non plus, il n’est pas nécessaire qu’il y aitcontact direct entre la ruine et la victime. De même, une causalitéindirecte est suffisante.

4. La ruine doit résulter d’un défaut d’entretien ou d’un défaut de construction

La ruine doit trouver son origine dans :• un défaut d’entretien ;• ou dans un vice de construction.

Peu importe que celui-ci soit imputable au propriétaire ou à un tiers(locataire, architecte,…). Si la ruine est due à une autre cause, tel qu’unincendie, une explosion de gaz ou la foudre, l’article 1386 du Code civil ne s’applique pas.

Il n’est pas toujours évident d’apporter la preuve positive du vice deconstruction ou du défaut d’entretien. Ainsi, la victime peut se borner àdémontrer que la ruine ne peut s’appliquer que par vice, à l’exclusion detoute cause possible

C. Effets1. Une responsabilité de plein droit

Dès lors que les conditions d’application de la responsabilité sont établies,le propriétaire du bâtiment est responsable de plein droit du dommagecausé à autrui par ce dernier.Il ne s’agit pas d’une présomption de faute stricto sensu , il ne s’agit pasnon plus d’un régime de responsabilité à base de faute car si la victimedoit prouver que la ruine trouve son origine dans un défaut d’entretien ouun vice de construction, elle ne prouve pas par là une faute.

L’originalité de l’article 1386 de Code civil est de rendre, dans certainscas, le propriétaire du bâtiment garant du fait d’autrui envers la victime ;

le but poursuivi est de permettre à la victime d’agir dans tous les cascontre le propriétaire dans la mesure où elle ne pourra généralement pas

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connaitre la personne à qui le défaut d’entretien ou le vice de constructionest imputable.

2. Echappatoire et recours du propriétaire

Pour échapper à l’obligation de réparer pesant sur elle, la personneassignée peut uniquement s’attaquer aux conditions même de l’article1386 du Code civil .Elle peut ainsi :

• Contester la qualité de propriétaire ;• Contester l’existence de la ruine ;• Contester l’existence d’un défaut d’entretien ou d’un vice deconstruction ;• Contester le lien causal entre le vice de construction ou le

défaut d’entretien et la ruine, ou encore entre la ruine et ledommage.(pour se faire, elle doit apporter la preuve d’une cause étrangèreà l’origine de la ruine ou du dommage (force majeure, fait d’untiers ou faute de la victime)

Si le propriétaire peut, en théorie, démontrer que le dommage n’a pas étécausé par la ruine mais par une cause étrangère, on voit mal que cemoyen soit admis si la ruine a été préalablement reconnue, sauf erreurflagrante de la victime dans la perception de la cause de son dommage ;dès lors, au lieu de renverser le lien causal entre la ruine et le dommage,le propriétaire démontrera plutôt qu’il n’y a pas eu ruine du bâtiment.

a) Primo, la ruine du bâtiment a été uniquement causée par laforce majeure, la faute d’un tiers ou la faute de la victime. Dansce cas, l’article 1386 du Code civil ne trouve pas à s’appliquercar le lien causal entre le défaut d’entretien ou le vice deconstruction et la ruine fait défaut.

b) Secundo, la ruine du bâtiment a été causée par la forcemajeure, la faute d’un tiers ou la faute de la victime et un défautd’entretien ou un vice de construction. Dans cette hypothèse,l’article 1386 du Code civil est d’application et, en présencede la faute d’un tiers, la victime a la possibilité de postuler lacondamnation « in solidum » du propriétaire et du tiers.

c) Tertio, la victime doit prouver le défaut d’entretien ou le vicede construction, celui-ci peut toutefois être imputable à un tiers :

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Dans ce cas, le propriétaire est tenu vis-à-vis de la victime deréparer son dommage sur la base de l’article 1386 du Codecivil .

Ou bien, la victime doit prouver le défaut d’entretien ou le vicede construction, celui-ci peut toutefois être imputable à lavictime :Dans ce second cas, l’article 1386 du Code civil est inapplicable .

Qu’en est-il des recours du propriétaire ?Lorsque le défaut d’entretien ou le vice de construction est imputable à untiers , le propriétaire dispose, après avoir indemnisé la victime, d’unrecours pour le tout contre celui-ci (action de responsabilitécontractuelle contre le locataire, l’architecte,…en faute).

Le propriétaire dispose aussi d’un recours contre tout tiers qui aurait contribué à la survenance du dommage , c.à.d. lorsque (outre le défautd’entretien ou l vice de construction) un tiers a contribué, par sa faute, àla ruine du bâtiment. Un tel recours ne peut toutefois aboutir qu’à unpartage de responsabilité .

Sous-section 3. Les régimes spéciaux §1. La responsabilité du fait des produits défectueux

A. Philosophie et grandes lignes du systèmeUn régime particulier de responsabilité a été institué par une loi du 25

février 1991 , qui transpose en droit interne une directive européenne

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du 25 juillet 1985 concernant la responsabilité du fait des produitsdéfectueux :« Le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son

produit ».

Il s’agit de l’instauration d’un régime de responsabilité « objective », ousans faute, visant à décharger la victime du fardeau de la preuve d’unefaute dans le chef du producteur. Il lui « suffit »,conformément à l’article 7 :

• de démontrer l’existence du dommage subi, d’un défaut du produit ;• de démontrer le lien de causalité entre le défaut et le dommage.

Il est établi que le produit est défectueux lorsqu’il « n’offre pas la sécurité

à laquelle on peut légitimement s’attendre », compte tenu d’une série decirconstances énoncées à l’article 5 .

Trois caractéristiques majeures du régime méritent d’être soulignées :• Tout d’abord, celui-ci se situe en marge de la distinction

traditionnelle entre la responsabilité contractuelle et laresponsabilité délictuelle ; toute différence de traitement est doncécartée entre les demandeurs selon qu’ils ont acquis l’usage duproduit par un contrat ou non.

• Ensuite, il convient de souligner l’option prise par la loi de canaliserla responsabilité vers le « producteur », dont la notion est définie demanière si large qu’il est pratiquement toujours possible de trouverun responsable tenu de répondre des dommages causés par ledéfaut du produit (articles 3 et 4) .

• Enfin, une autre nouveauté de la loi réside dans l’interdiction faite enson article 10, § 1 er des clauses limitatives ou exonératoire deresponsabilité ; autrement dit, la loi du 25 février 1991 va encoreplus loin puisqu’elle refuse toute efficacité aux clausesd’irresponsabilité, radicalisant ainsi les solutions déjà admises dansnotre droit. Il ne faut toutefois pas perdre de vue l’article 13 de laloi.

Le régime nouveau de responsabilité se superpose donc aux multiplesrégimes de responsabilité déjà existants, susceptibles d’être invoqués parles victimes de produits défectueux. En conséquence, alors même que lerégime de la loi est applicable, les recours de droit commun subsistentlorsqu’ils sont plus favorables à la victime.

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Cette possibilité d’option explique en bonne partie le peu de succèsrencontré, à ce jour, dans la pratique, par la loi du 25 février 1991 .

B. Eléments clés du dispositif 1. Notion de produit

Par « produit » au sens de la loi, il faut entendre tout bien meublecorporel, même incorporé à un autre bien meuble ou immeuble, oudevenu immeuble par destination (article 2) .Le produit est tout bien mobilier corporel ; les matières premières et lesparties composantes sont visées en dépit de leur incorporation dans unproduit final (pièces d’une voiture, substances composant un médicament,…) et il en est de même des meubles et matériaux qui sont incorporés àun immeuble (briques, ciment,…).L’électricité est également un produit au sens de la loi.

Depuis une loi du 12 décembre 2000 , les produits de l’agriculture, del’élevage, de la chasse et de la pêche ont été inclus dans le champd’application de la loi du 25 février 1991 , conformément au souhait dulégislateur européen.

Les biens incorporels (les droits, les créances, les rentes,…) sont exclus dela notion de produit, tout comme les prestations de service d’ailleurs.

2. Notion de mise en circulationOn peut considérer qu’il existe une quatrième condition à la responsabilitédu producteur ; il faut que le produit ait été mis en circulation. Enl’absence d’une telle circonstance, la responsabilité du producteur ne serapas mise en jeu.Cependant, cette « condition » est présumée : la victime n’a pas à

apporter la preuve, mais le producteur peut échapper à sa responsabilités’il établit que la condition n’’est pas remplie.

• La notion doit être prise en compte lors de l’appréciation du défautdu produit, ou de son caractère moins perfectionné qu’un autreproduit mis en circulation postérieurement à lui.

• Le moment de la mise en circulation sert aussi à déterminer le pointde départ du délai de déchéance fixé à l’article 12 de la loi , etconditionne l’application de la loi dans le temps.

• Il sert à apprécier l’état des connaissances scientifiques ettechniques.

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• Enfin, la mise en circulation est importante pour le fabricant d’unepartie composante ou le producteur d’une matière première, dontles produits sont incorporés au produit final ; en effet, dans lamesure où ce dernier est mis en circulation ultérieurement, le point

de départ de la prescription se trouve différé à leur égard.Selon l’article 6 de la loi du 25 février 1991, il ya lieu d’entendre par miseen circulation :« Le premier acte matérialisant l’intention du producteur de donner au

produit l’affectation à laquelle il le destine par transfert à un tiers ouutilisation au profit de celui-ci ».

3. Le dommage réparable Tous les types de dommages ne sont pas visés par la loi. Celle-ci neretient, en son article 11, que deux catégories de dommages réparables :

• Ceux causés aux personnes, y compris les dommagesmoraux ;(les dommages financiers découlant d’un décès,…)• Ceux causés aux biens, à l’exclusion des dommages causés auproduit défectueux lui-même.

o Les dommages doivent concerner des biens « qui sont d’un type normalement destiné à l’usage ou à laconsommation privé » (critère objectif)

o et qui « ont été utilisé par la victime principalement pour son usage ou sa consommation privés » (critèresubjectif) .

4. Le défaut du produit Aux termes de l’article 1 er de la loi du 25 février 1991 :« le producteur est responsable du dommage causé par le défaut de son

produit ». Le défaut apparait ainsi comme la pierre angulaire du régime deresponsabilité institué par la loi ; il constitue le fait générateur de laresponsabilité du producteur.

L’article 5 définit le défaut comme suit :« Un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on

peut légitimement s’attendre, compte tenu de toutes les circonstances et notamment (…) ». Il ressort de cette définition que la notion de défaut est

étroitement liée au concept de sécurité.

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a) Le manque de sécuritéLe critère réside dans le caractère potentiellement dommageable duproduit pour l’intégrité physique des individus ou pour leurs biens. Oncentre donc le débat judiciaire sur le produit et non sur le processus de

production, ni sur le comportement du fabricant.En réalité, l’origine du défaut importe peu. Cela signifie que :

• la victime est dispensée d’apporter la preuve d’un vice affectantintrinsèquement le produit ;

• elle n’a pas non plus à administrer la preuve de la naissance dudéfaut ;

• elle n’a pas à administrer la preuve d’une faute commise dans laconception du produit, dans sa fabrication ou encore dans son

conditionnement.La notion de défaut se distingue aussi, en théorie, du « vice de la chose »au sens de l’article 1384, al. 1 er , in fine du Code civil .Car dans le système de la loi du 25 février 1991 , il ne s’agitnon pas de comparer le produit à son modèle pour y déceler uneéventuelle caractéristique anormale susceptible d’occasionner undommage, mais plutôt de le confronté à une norme de sécurité.

D’ailleurs, il est à remarquer que la seule survenance du dommage nesuffit pas à établir la défectuosité du produit ; en effet, la victime est tenued’apporter la triple preuve (article 7) :

• dommage ;• défaut ;• lien de causalité entre le défaut et le dommage.

Enfin, il faut se garder de confondre le concept de produit défectueux aveccelui de produit dangereux. Car certains produits (tels que le tabac,l’alcool, un flacon de nitroglycérine,…) sont dangereux par nature, sansêtre nécessairement défectueux.La notion de défaut est plus précise que celle de danger du produit.

b) L’appréciation du défaut Une appréciation à la fois « objective » et « circonstanciée »

Pour juger l’état défectueux d’un produit, l’article 5 invite à apprécier lasécurité offerte par ce produit. Mais il y a lieu d’observer que la seuleréférence à l’insécurité eut été insuffisante pour stigmatiser le défaut ; en

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effet, en l’absence d’autres précisions, la survenance d’un préjudice causéà la personne ou aux biens aurait suffi, le plus souvent, à rendre patent lemanque de sécurité du produit.

C’est pourquoi, les auteurs de la directive ont opté pour une approche plusnuancée de la notion de défaut. Celle-ci doit être appréciée d’une manièreobjective, c.à.d. en fonction de l’attente légitime du public, et en tenantcompte des circonstances.

Le critère de l’attente légitimeSuivant l’article 5 de la loi , l’éventuel défaut du produit doit être évaluéau regard du critère de la « sécurité à laquelle ont peut légitimement s’attendre » .

• Le « on » indique que le défaut de sécurité est à apprécier eu égardà l’attente du public en général, et non pas en considération del’atteinte subjective de la victime ou d’un consommateur déterminé(appréciation objective).

• L’adverbe « légitimement » est également de nature à souligner lecaractère objectif de l’appréciation de la sécurité ; il exclut lesattentes éventuellement illusoires du public.

Une appréciation circonstanciéePour apprécier la défectuosité d’un produit, le juge est invité, aux termesde l’article 5, al. 1 er, à tenir compte « de toutes les circonstances et notamment » :

I. De la présentation du produit (information, instructions, moded’emploi,…) ;

II. De l’usage normal ou raisonnablement prévisible du produit ;III. Du moment auquel le produit a été mis en circulation.

Comme l’indique l’adverbe « notamment », cette liste de circonstancesn’est pas exhaustive (qui traite un sujet dans sa totalité).C’est donc bien en fonction de « toutes les circonstances » que doit êtreappréciée la sécurité (!! Il s’agit des circonstances de la consommation, etnon de la production !!).

5. Le lien de causalitéAux termes des articles 4 et 7 de la directive de la loi, la preuve du lien decausalité entre le défaut et le dommage incombe à la victime.En Belgique, comme on le sait, c’est la théorie de l’équivalence desconditions qui a la faveur de la Cour de cassation ; ainsi, le lien de

causalité entre le fait générateur et le dommage est établi s’il est prouvé

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que, sans le fait, le dommage ne se serait pas produit tel qu’il s’est réalisé« in concreto ».

Cette théorie est certainement très favorable aux victimes dans la mesure

où elle permet, plus que d’autres, de prendre en compte les dommagesindirects.

C. Parties à l’action1. Le débiteur de la réparation : le producteur

« Le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de sonproduit » ; il apparait donc clairement que les auteurs de la directive ontentendu canaliser la responsabilité sur le producteur.Ainsi, dans un souci de protection de la victime, le concept de producteurest défini de façon très large, afin que celle-ci trouve pratiquementtoujours un responsable.

• Selon l’article 3 , le terme « producteur » désigne le fabricant d’unproduit fini, le fabricant d’une partie composante d’un produit fini oule producteur d’une matière première, et toute personne qui seprésente comme fabricant ou producteur en apposant sur le produitson nom, sa marque ou au autre signe distinctif.

• Comme le mentionne l’article 4, § 1 er , si le producteur n’est pasétabli dans l’U.E., l’importateur (situé dans l’Union) peut être assignépar la victime ; il est considéré comme producteur au sens de la loiet est dès lors responsable au même titre que ce dernier.

• Aux termes de l’article 4, § 2 , la responsabilité du fournisseur n’estretenue qu’à titre subsidiaire ; c.à.d. si lavictime ne peut identifier le producteur (dans l’U.E.) ou l’importateurdu produit. Le fournisseur peut cependant(à l’inverse des deux précédents) échapper définitivement au

recours de la victime en lui indiquant, dans un délai raisonnable,l’origine du produit (l’identité du producteur dans l’U.E. ou de sonimportateur ou de son propre fournisseur).

Leur responsabilité est solidaire, sans préjudice de leurs droits de recoursrespectifs.

2. Le créancier de la réparation : la victimeEst considéré comme victime toute personne ayant subi un dommage visé

par la loi et causé par un produit défectueux.

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Ainsi, les consommateurs (au même titre que les professionnels) sontprotégés par le dispositif de la loi. De plus, la loi protège d’égale façoncelui qui s’est trouvé en possession du produit par contrat (vente, location,…) et tout autre tiers victime.

D. Causes d’exonération de la responsabilité (article 8 de la loi du 25 février 1991)

1. Le défendeur n’est pas un producteur responsable au sensde la directive

a) L’absence de mise en circulationLe producteur n’est pas responsable s’il prouve qu’il n’a pas lui-même misle produit en circulation. Un producteur peut donc s’exonérer si, parexemple, un voleur s’est emparé du produit et l’a utilisé, ou l’a mis encirculation.

b) L’absence de but économiqueLe producteur peut s’exonérer s’il prouve « que le produit n’a été nifabriqué pour la vente ou pour toute autre forme de distribution dans unbut économique du producteur, ni fabriqué ou distribué dans le cadre deson activité professionnelle ».

Ces deux conditions doivent être réunies cumulativement pour que ledéfendeur puisse échapper à sa responsabilité.

2. Le défaut n’est pas imputable au producteur a) L’antériorité du défaut

Le producteur n’est pas responsable s’il prouve que « compte tenu descirconstances, il y a lieu d’estimer que le défaut, ayant causé ledommage, n’existait pas au moment où le produit a été mis en circulation

par lui ou que ce défaut est né postérieurement ».

b) La conformité du produit à des normes établies par les

pouvoirs publicsLa responsabilité du producteur peut également être écartée s’il prouve« que le défaut est dû à la conformité du produit avec des règlesimpératives émanant des pouvoirs publics » .

c) Le risque de développement (≠ ignorance invincible :cf. supra)

Le producteur n’est pas responsable s’il prouve « que l’état desconnaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en

circulation du produit par lui ne permettait pas de déceler l’existence dudéfaut » .

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Cette cause d’exonération pourrait trouver à s’appliquer essentiellementdans certains secteurs, tels que la chimie ou l’ingénierie.

d) L’absence de défaut d’une partie composante ou d’une

matière premièreLe producteur d’une partie composante ou d’une matière première n’estpas responsable s’il prouve « que le défaut est imputable à la conceptiondu produit dans lequel la partie composante ou la matière première a étéincorporée ou aux instructions données par le producteur de ce produit » .

Ce critère nous dit également que, dorénavant, le producteur du produitfini ne peut plus s’exonérer à l’égard de la victime en invoquant un défautd’une partie composante d’un produit ; en somme, il est tenu pourresponsable de la sécurité globale du produit. En cas de défaut d’unepartie composante, la loi retient le principe de la responsabilité solidairedu producteur du produit fini et du producteur de la partie composante :chacun d’eux sera tenu pour le tout à l’égard de la victime (article 9) .

E. Délais de prescription et de déchéanceLe droit de la victime d’obtenir du producteur la réparation de sondommage sur le fondement de la loi est soumis à un double délai.

1. Le délai de déchéance

Selon l’article 12, § 1 er de la loi , sans préjudice de l’article 2277ter duCode civil , le droit de la victime s’éteint à l’expiration d’un délai de 10ans à compter de la date à laquelle le producteur a mis le produit encirculation, à moins que durant cette période, la victime n’ait engagé uneprocédure judiciaire fondée sur la même loi.

Passé le délai, la victime est définitivement privée de son droit d’obtenirréparation sur le fondement de la loi du 25 février 1991 .

2. Le délai de prescriptionSans préjudice à l’article 2227ter du Code civil, à compter du jour où lavictime a eu ou aurait dû raisonnablement avoir connaissance dudommage, du défaut et de l’identité du producteur, elle dispose d’un délaide 3 ans pour introduire son action sur base de la loi du 25 février 1991 . Ce délai de prescription peut être interrompu oususpendu.

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§2. Le régime d’indemnisation des usagers faibles de la routeA. L’article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 : présentationgénérale

1. Contexte et origine de la loi Les travaux du Professeur André TUNC, entamés dans les années 60’, ontfinalement abouti à l’adoption de la loi du 5 juillet 1985 , dite « LoiBadinter ».Cette loi crée, en faveur de certaines victimes d’accidents de lacirculation, un régime d’indemnisation autonome, indépendant de la faute.

En Belgique, après des années d’immobilisme, le législateur a introduit parune loi du 30 mars 1994 , un article 29bisdans la loi du 21 novembre 1989 . En réalité, cette loi avait pourobjectif principal de réduire les couts importants que les accidents de laroute occasionnaient à la sécurité sociale en les transférant aux assureursen responsabilité civile automobile. La protection des usagers faiblesn’était qu’un objectif second.

Aux termes de l’article 29bis, § 1 er :

« En cas d’accident de la circulation impliquant un ou plusieurs véhiculesautomoteurs, aux endroits visés à l’article 2, § 1 er , et à l’exception des

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dégâts matériels et des dommages subis par le conducteur de chaquevéhicule automoteur impliqué, tous les dommages subis par les victimeset leurs ayant droit et résultant de lésions corporelles ou du décès, y compris les dégâts aux vêtements, sont réparés solidairement pas les

assureur qui, conformément à la présente loi, couvrent la responsabilitédu propriétaire, du conducteur ou du détenteur des véhicules automoteurs(…) ».

2. Philosophie du systèmeDans les grandes lignes, la loi vise à faciliter l’indemnisation de certainesvictimes d’accidents de la circulation causés par un véhicule automoteuret instaure un régime d’indemnisation dissocié de la faute. Les victimesvisées sont les « usagers faibles » :piétons, passagers ou cyclistes.

B. Conditions d’application de la loi1. Un véhicule automoteur (article 1 er , al. 2 de la loi du 21

novembre 1989)Il s’agit des « véhicules destinés à circuler sur le sol et qui peuvent êtreactionnés par une force mécanique, sans être liés à une voie ferrée ; toutce qui est attelé au véhicule est considéré comme en faisant partie ».

2. Un accident de la circulation

La notion d’accident de la circulation n’est pas définie par la loi. L’accidentest un événement soudain et imprévu, générateur d’un dommage ; il fautqu’il s’agisse d’un accident de la circulation, et non d’un accident dutravail ou de compétition.

Il faut que l’accident implique un véhicule se trouvant sur la voie publique,sur un terrain ouvert au public ou sur les terrains non publics mais alorsouverts à certaines personnes ayant le droit de les fréquenter.

Il faut aussi un fait de circulation, ce qui suscite beaucoup de discussionsen jurisprudence.

3. La notion d’implicationLa loi belge ne définit pas en quoi consiste l’implication d’un véhicule ; enintroduisant cette notion, le législateur a tenté d’éviter les discussionsrelatives au comportement du conducteur et au lien de causalité entre lefait générateur et le dommage.

L’implication repose sur un système de rattachement plus souple que celuidu lien causal. Il faut une participation du véhicule dans l’accident. La

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seule preuve de son intervention matérielle, à quelque titre que ce soit,ouvre à la victime un droit à l’indemnisation à charge de l’assureur duresponsable.

A ce titre, les problèmes d’interprétations sont nombreux quand desvéhicules en stationnement sont « impliqués » dans l’accident.

C. Parties à l’action1. Bénéficiaires du régime légal

Seules certaines victimes peuvent bénéficier de la facilité d’indemnisationofferte par le régime légal. Il s’agit des « usagers faibles », à savoir :les piétons, les passagers et les cyclistes.

Selon l’article 29bis, § 2 de la loi , le conducteur d’un véhiculeautomoteur et ses ayants droits ne peuvent se prévaloir de la loi. Tel est leprincipe compréhensible si l’on admet que le conducteur du véhicule estcréateur du risque de circulation et que l’objectif de la loi est de protégerles usagers faibles, ce que n’est pas le conducteur.Celui-ci a donc un statut ambivalent :

• D’une part, il jouit d’une certaine immunité puisque, dans leslimites de l’article 29bis , l’assureur est, aupremier chef, débiteur d’indemnité vis-à-vis de la victime ;• D’autre part, la réparation des dommages qu’il subit du fait del’accident de la circulation ne bénéficie pas du régime prévu parl’article 29bis ; elle relève des articles 1382 et suivants duCode civil , avec toutes les difficultés de preuve que celaimplique.

2. Débiteurs de l’indemnisationL’obligation d’indemnisation incombe à l’assureur de la voiture impliquéeet non au responsable de l’accident, propriétaire ou détenteur du véhicule.

Cela conduit à douter que le régime instauré par l’article 29bis soitvéritablement un régime de responsabilité civile.

Plusieurs assureurs peuvent être solidairement assignés en vertu del’article 29bis si plusieurs véhicules sont impliqués dans le dommagecausé à la victime.Une fois la victime indemnisée, les assureurs procèderont entre eux aurèglement contributoire.

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D. Dommages couvertsLa loi ne s’applique qu’à certains types de dommages, ceux qui résultentde lésions corporelles ou du décès.

Les dommages occasionnés aux prothèses fonctionnelles sont considéréscomme des lésions corporelles ; la définition des « prothèsesfonctionnelles » est donnée par la loi.

Il est surtout important de souligner que les dégâts aux biens ne sont pasvisés par la loi ; les dégâts causés au véhicule, ceux causés aux chosestransportées sont réglés par le droit commun.

E. Restrictions du droit à l’indemnisationLe droit à l’indemnisation n’existe qu’au bénéfice d’une victime faible,n’ayant pas commis de faute intentionnelle.

La loi instaurant un régime d’indemnisation automatique, la faute de lavictime n’autorise pas, en principe, un partage de responsabilité en encoremoins le rejet de toute indemnisation ; ce qui est possible dans un régimefondé sur les principes traditionnels de la responsabilité civile.

La perte du droit à indemnisation n’est prévue que dans des cas extrêmesoù la victime « l’a vraiment cherché ». Depuis le 19 janvier 2001, laréférence à la faute inexcusable a disparu ; l’article 29bis, § 1 er , al. 6indique : « Les victimes âgées de plus de 14 ans qui ont voulu l’accident etses conséquences ne peuvent se prévaloir des dispositions visées àl’alinéa 1 er.

Le législateur entend ainsi étendre le régime de l’indemnisationautomatique en faveur des victimes d’accidents de la circulation etcantonner la déchéance à la seule hypothèse où la victime a commis une

faute intentionnelle.

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§3. La responsabilité du fait des troubles de voisinageA. Principes de baseLes rapports de voisinage peuvent être à l’origine de toutes sortes denuisances et désagréments : infiltrations d’eau, odeurs nauséabondes,pollutions,… Pendant longtemps, ces troubles de voisinage ont étéenvisagés sous le seul angle de la faute, dans le cadre de l’article 1382du Code civil ; or, ils ne sont pas toujours imputables à une (vraie)faute…

Dans deux arrêts du 6 avril 1960 , se fondant sur l’article 544 duCode civil , la Cour de cassation jeta les bases d’une nouvelle théorie destroubles de voisinage, détachée de toute idée de faute. Il est désormaisacquis que les victimes d’un trouble excessif de voisinage peuvent obtenirnon la réparation du dommage subi mais une compensation destinée àrétablir l’équilibre rompu par l’activité illicite dommageable.La Cour de cassation reconnait ainsi à tout propriétaire, sur le fondementde l’article 544 du Code civil , le droit de jouir de sa chose et permet desanctionner une rupture anormale d’équilibre, même non fautive, entredes propriétaires de fonds voisins jouissant de droits égaux dont l’équilibredoit être maintenu.

De façon générale, la matière des troubles de voisinage apparat tirailléeentre :

• le droit des biens et• le droit des obligations

Autrement dit, entre :• une analyse réelle centrée sur les fonds en conflit et• une analyse personnelle centrée sur le comportement des auteurs et

des victimes de troubles.

Depuis un arrêt de la Cour de cassation du 14 juin 1968, il estunanimement admis que la victime du trouble peut librement choisir labase de son action, l’article 544 n’étant pas nécessairement subsidiaire

par rapport à l’article 1382 ; elle peut choisir une seule des deux actions,

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ou intenter parallèlement l’une et l’autre, ou encore, l’une à titreprincipale et l’autre à titre subsidiaire.

• Si la victime invoque l’article 1382 du Code civil , elle devraprouver l’existence d’une faute, d’un dommage et d’un lien de

causalité ; et en pratique, la preuve de la faute n’est pas toujoursaisée à apporter. Si toutefois, la victime parvient à réunir les troisconditions, l’auteur du dommage verra sa responsabilité aquilienneengagée et sera condamné à réparer l’intégralité du dommage.

• Si, en revanche, la victime fonde son action sur l’article 544 duCode civil , elle sera dispensée de prouver la faute dans le chef del’auteur du trouble. Elle devra uniquement établir qu’elle subit untrouble qui excède les inconvénients normaux du voisinage et quel’équilibre, devant exister entre les propriétés voisines, est rompupar le comportement du propriétaire voisin.Ici, la victime ne pourra prétendre qu’à une juste et adéquatecompensation destinée à rétablir l’équilibre rompu, mais elle recevramoins que si elle avait invoqué l’article 1382 duCode civil .

B. Conditions d’application de la théorie1. Le trouble excessif

a) NotionLe trouble de voisinage suppose un déséquilibre résultant de l’usage faitpar les voisins de leurs droits sur leur fonds.Afin de se prononcer sur l’existence d’un trouble de voisinage, la tache du

juge (principalement le juge de paix) est dès lors de définir cet équilibre etde fixer le point de rupture. Il s’agit de déterminer « in concreto » quelssont les inconvénients normaux et quels sont les désagréments excessifsde voisinage.

b) Un fait, une omission ou un comportement quelconqueIl était généralement considéré que le seul acte positif à l’origine du

trouble permettait d’engager la responsabilité de son auteur.Depuis un arrêt de la Cour de cassation rendu le 7 décembre 1992, il estadmis qu’ « est obliger à compenser le trouble devoisinage celui qui a provoqué le dommage par un fait, une omission ouun comportement quelconque » .

c) La nature du troubleIl semble désormais acquis que « le trouble de voisinage n’implique pasque le trouble soit dû à l’aménagement d’un bien immobilier ou qu’il

consiste en la dégradation matérielle du fonds voisin. Il suffit que l’usage

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(même non fautif) fait d’un bien impose à un propriétaire voisin un troubleexcédant les inconvénients ordinaires de voisinage ».On pense par exemple à des nuisances olfactives, l’élevage de chiens,l’installation de ruches,…

d) Critères d’appréciation du caractère excessif du troublePour apprécier le caractère ordinaire ou excessif du trouble dont se plaintun voisin, le juge se livre à une analyse minutieuse des circonstances del’espèce.

La notion de trouble excessif est éminemment relative, mais ne sauraitentrainer un pouvoir d’appréciation arbitraire du juge de fond.

La préoccupationPour déterminer s’il est aux prises ou non avec une rupture d’équilibre, le

juge analysera en détail « la scène du drame ». Un magistrat va portertoute son attention sur l’environnement en cause ; son appréciationdes lieux pourra se faire de deux manières :

• Le critère de la préoccupation individuelle :Le juge ne se braque que sur les seules parties à l’action.Cette préoccupation conférerait au premier occupant d’un quartierou d’une région une sorte de droit acquis lui permettant d’imposeraux nouveaux arrivants de supporter certains désagréments oud’interdire une activité perturbatrice future ; toutefois, ce critèresemble être le plus souvent rejeté parnos cours et tribunaux.

• Le critère de la préoccupation collective :Le juge a une vision plus large sur le voisinage en question (et cecritère semble recevoir un meilleur écho en jurisprudence).L’usage normal de la propriété n’est plus défini par rapport aupremier occupant mais par référence à « un ensemble depersonnes qui déterminent l’usage réservé à un quartier ».Ainsi, en campagne, on constate que le seuil de tolérance desnuisances olfactives est plus élevé que ce qui ne l’est en ville parexemple.

Le facteur temps : le moment et la durée du trouble Tout d’abord, le moment de la journée où intervient le trouble pourrait,selon nous, éclairer le juge sur le caractère excessif du trouble. Ainsi, des

cris d’animaux constitueront sans doute plus facilement un trouble qui

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dépasse la mesure des inconvénients normaux du voisinage, s’ils sontpoussés durant la nuit.

Certaines décisions semblent également faire référence à la période

l’année pour apprécier l’existence de certains troubles excessifs. En effet,la belle saison pousse souvent les voisins à profiter de leur jardin, ce quipeut renforcer l’ampleur du dérangement subi(aboiements intempestifs, présence de ruches à proximités,…).

La réceptivité particulière du voisinIl est évident que tout un chacun ne présente pas la même sensibilité parrapport aux nuisances animales ; songeons, par exemple, aux aboiementsd’un ou plusieurs chiens.Pour que le juge puisse faire intervenir cette donnée dans son appréciationdu caractère excessif du trouble, il faut cependant que la réceptivitépersonnelle présente un certain caractère de normalité.

L’autorisation administrativeL’existence d’une autorisation administrative ne prive pas la victime deson droit d’introduire un recours, qu’il soit fondé sur l’article 544 ou surl’article 1382 du Code civil . Ceci dit, le respect des conditionsd’exploitation, bien qu’elles ne constituent qu’un minimum, pourra servird’indice au juge à l’heure d’apprécier l’existence d’un trouble excessif.

Ainsi, « l’odeur dégagée par un élevage de porcs doit être considérécomme un trouble normal de voisinage si cette entreprise est située dansune région agricole et une commune rurale et s’il est, en outre, établiqu’elle répond aux conditions d’exploitation et qu’elle dispose d’unsystème moderne, adéquat, automatique et électrique de ventilation etd’éclairage ».

2. Le voisinage

La théorie de troubles du voisinage ne trouve à s’appliquer… qu’entrevoisin, cela semble être un truisme (vérité évidente et banale) pourtant, lanotion de voisinage est étendue de manière assez large ; la contiguïté desdeux fonds n’est pas requise.Autrement dit, il est nécessaire, mais suffisant, de prouver qu’unévénement se produisant sur un fonds peut avoir sur l’autre unerépercussion directe.

3. Le champ d’application ratione personae de la théorie

La Cour de cassation a progressivement ouvert l’action en compensationde troubles de voisinage à tous ceux qui, « en raison d’un droit réel ou

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personnel accordé par le propriétaire », dispose à l’égard du fondsperturbateur d’un attribut de droit de propriété, et cette extensions’applique également à l’égard du fonds victime.

C. La compensation du trouble excessif de voisinageSuivant les deux arrêts de principe rendus par la Cour de cassation le 6avril 1960 consacrant la théorie des troubles non fautifs de voisinage, celuiqui, par un fait non fautif, impose à son voisin un trouble excédent lamesure des inconvénients ordinaires du voisinage lui doit « une justeet adéquate compensation ».

Chapitre 4. La réparation du dommage

Section 1. Principes gouvernant la réparationLe dommage est une notion de pur fait ; le juge du fond appréciesouverainement l’existence et l’étendue du dommage, en tenant comptede trois grands principes :

• Le principe de la réparation intégrale du dommage ;• Le principe de la réparation du dommage « in concreto » ;• Le principe du primat de la réparation en nature.

§1 er . Le principe de la réparation intégrale du dommage

Le principe de la réparation intégrale est aussi appelé, principe del’adéquation entre le dommage et sa réparation.La victime doit pouvoir être rétablie dans la situation où elle seraitdemeurée si la faute n’avait pas été commise ; pour rappel, la gravité dela faute n’a aucune incidence sur l’étendue de la réparation.

Ce principe est applicable :• En responsabilité contractuelle :

Il trouve son fondement dans l’article 1149 du Code civil , dont il

résulte que « Les dommages et intérêts dus aux créanciers sont, engénéral, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après » .

• En responsabilité quasi-délictuelle :Il trouve sa justification dans l’article 1382 du Code civil ;l’absence de limites fixées à l’obligation de réparer implique que laréparation du dommage doit être complète.

§2. Le principe de la réparation du dommage « in concreto »

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Conformément au principe dispositif, le juge ne peut statuer ultra petita ;l’article 1382 du Code civil n’étant pas d’ordre public, le juge ne peutprocurer à la victime une indemnisation supérieure à ce qu’elle réclame.

§1er

. La détermination de la date d’évaluation du dommageLe dommage n’est pas toujours une donnée figée ; parfois, il est sujet àévolution (aggravation ou atténuation). Ainsi, des blessures peuvents’aggraver entre le moment de l’accident et le jour de la réparation, voireencore ultérieurement. Or, suivant le principe de la réparation intégrale, ily a lieu de replacer le plus exactement possible la victime dans la situationqui était la sienne avant l’accident ; on retient donc, comme un pis-aller(chose que l’on utilise faute de mieux), la solution qui consiste à se placerà la date la plus proche de la réparation, soit au jour du jugement.

Le splitsingL’évaluation du dommage au moment du jugement conduit à distinguerdeux périodes, de manière à évaluer distinctement :

o le dommage passé (tous les éléments connus au moment du jugement ; atténuation ou aggravation des lésions, le décès ou lasurvie de la victime) ;

o le dommage futur (les éléments nouveaux survenant après le jugement).

Dans la mesure où il est connu, le dommage passé peut être évalué sanscapitalisation ; le dommage futur, par contre, est plus malaisé àdéterminer au moment où le juge statue (on ignore quels auraient été lesrevenus réels de la victime dans l’avenir). On procédera dès lors, soit àune capitalisation, soit à l’octroi d’une rente viagère, en fonction de laperte certaine des revenus futurs appréciés sur la base de la survielucrative probable.

Variations du dommageL’évaluation du préjudice au jour du jugement pose la question de savoirs’il y a lieu de tenir compte des variations survenues entre le moment dela réalisation du dommage et le moment de l’évaluation judicaire.A cet égard, on distingue :

o les variations intrinsèques qui visent l’hypothèse où c’est le

préjudice initial qui subit une évolution (aggravation des blessures,…) ;

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o les variations extrinsèques qui concernent les circonstancesextérieures ayant une incidence sur le préjudice subi (fluctuationsmonétaires qui affectent l’évaluation du dommage sous formepécuniaire,…)

a) Les variations intrinsèquesElles peuvent être de 3 types au moment où le juge statue :connues, prévisibles ou probables.

• Le juge doit prendre en considération les variations connues ,c.à.d. celles qui sont qui sont déjà intervenues au moment dedéterminer l’indemnité due, sauf s’il s’agit d’éléments sans rapportavec la faute à l’origine du dommage.

• Le juge doit tenir compte de toutes les variations vraisemblablesou raisonnablement prévisibles , telles des augmentationsprévisibles de la rémunération, des promotions dont auraitnormalement bénéficié la victime,…

• Enfin, les variations du dommage sont simplement possiblesou probables sans néanmoins être certaines (ex avec les grandsbrulés). Dans ce cas, la victime pourra demander ultérieurement uncomplément d’indemnité pour compenser l’aggravation de son étatsans que l’autorité de chose jugée qui s’attache au jugementintervenu ne puisse lui être opposée.

b) Les variations extrinsèquesOn distingue l’érosion monétaire passée (intervenant entre le jour del‘accident et celui du jugement) et l’érosion monétaire future

(survenant après le jugement).

• Si la victime le demande, le juge doit indiscutablement tenir comptede l’érosion monétaire passée ; pratiquement, il fixera le montant del’indemnité en tenant compte du pouvoir d’achat effectif de lamonnaie au moment où il statue. De la sorte, la victime obtiendra unmontant égal à celui qu’elle aurait obtenu si elle avait étéindemnisée immédiatement après la survenance du faitdommageable.

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• Il est par contre difficile de tenir compte de l’érosion monétairefuture vu son caractère incertain ; le problème est évité sil’indemnité est allouée sous la forme d’une rente viagère indexée.

§2. L’évaluation du dommage aux biensLe préjudice matériel constitue une atteinte patrimoniale résultant soit delésions corporelles ou d’un décès, soit de dégâts causés à des biens.

Lorsqu’une chose est détruite ou endommagée, la réparation consiste, aupremier chef, à reconstituer le patrimoine de la personne lésée, demanière à replacer celle-ci dans la situation patrimoniale qui était lasienne avant de subir la perte ou de consentir les dépenses occasionnéespar le fait dommageable.Mais ce dernier vient, par ailleurs, troubler l’usage que la victime avait dela chose ; il y a donc lieu de prendre enconsidération la perte de jouissance et la perte du gain résultant del’événement dommageable.

Ainsi, l’indemnisation doit permettre à la victime de retrouver l’usage deson bien, moyennant sa réparation ou son remplacement.Pratiquement, lorsqu’une chose a été détruite, le dommage consisteprécisément dans la privation pour la victime de la chose elle-même, nondu prix de celle-ci. La réparation se fait par équivalent et consiste à payerà la victime une indemnité représentant la valeur de remplacement de lachose (comme nécessaire pour acquérir la chose semblable).

S’agissant d’un véhicule automobile, la valeur de remplacement est lemontant à payer pour acquérir un véhicule d’occasion de la mêmemarque, du même modèle et de la même ancienneté et se trouvant à peuprès dans le même état que le véhicule accidenté. S’il n’est pas possiblede trouver sur le marché un bien de remplacement présentant les mêmescaractéristiques que le bien sinistré, la valeur de remplacement

correspond alors au prix d’achat d’un bien neuf.Cela dit, si la chose est simplement endommagée et peut être réparée, lavictime ne peut en principe pas exiger du responsable la valeur d’achatd’un bien similaire.

Par exception, si le cout total des réparations excède la valeur deremplacement du bien sinistré, son propriétaire doit se contenter de lavaleur de remplacement, sans pouvoir exiger le cout de la remise en état,et ce, alors même que le bien est réparable.

§3. L’évaluation des dommages corporels

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Le préjudice résultant d’une atteinte à l’intégrité corporelle comported’ordinaire une composante matérielle (dommage patrimonial) et morale(dommage extra-patrimonial).

Il existe eux méthodes principales de réparation du dommage corporel :• La capitalisationElle consiste à accorder en une fois à la victime un capitaldestiné à compenser les pertes de revenus subies jusqu’audécès probable de la victime ou jusqu’à la fin de sa survielucrative.

• L’octroi d’une rente périodique indexéeElle est calculée en fonction de la survie lucrative (qui rapportede l’argent), évaluée à l’aide de tables de mortalité et de viemoyenne.

Le calcul de la réparation tient compte, le cas échéant, du dommagerésultant d’une incapacité. Le taux d’incapacité est fixé en fonction dudegré d’invalidité .

L’invalidit é est une notion purement médicale, désignant unamoindrissement d’ordre anatomique ou fonctionnel subi par unepersonne, indépendamment des répercussions éventuelles sur sesactivités lucratives.

L’incapacité tient compte des répercussions de l’invalidité sur lepotentiel économique de la victime et sur son aptitude à exercer desactivités lucratives dans le milieu économique et social qui est le sien.L’incapacité n’est donc pas en soi un dommage matériel ; elle ne le seraque si elle a une répercussion sur le potentiel économique de la victime.Elle peut être temporaire ou permanente ; la consolidation marque lepassage (pas obligé !) de l’une à l’autre. Elle détermine le moment oùl’état de la victime n’est théoriquement plus susceptible d’évolution.Elle peut constituer pour la victime un empêchement partiel ou total detravailler.

On distingue donc :• L’incapacité totale permanente (I.T.P.)• L’incapacité totale temporaire (I.T.T.)• L’incapacité partielle permanente (I.P.P.)• L’incapacité partielle temporaire (I.P.T.)

§4. L’évaluation des dommages moraux

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Le dommage moral est, par hypothèse, extra-patrimonial, c.à.d.insusceptible d’évaluation pécuniaire ; il est donc, à l’évidence,difficilement réparable.« L’argent ne peut sécher les larmes ».

Par essence, la réparation ne peut être qu’un « à peu près », un « pis-aller » ; il reste qu’elle doit tendre, dans la mesure du possible, à procurerà la victime une situation équivalente à celle dont elle aurait bénéficié si lepréjudice ne s’était pas produit.

Aussi, réparer « intégralement » par de l’argent ce qui, par essence, n’apas d’équivalent pécuniaire, ne veut rien dire. D’autant que le dommagemoral est évalué de façon forfaitaire ; ce qui revient à nier le principe de laréparation intégrale.C’est donc pourquoi on se contente, faute de mieux, d’une évaluation exaequo et bono.

Dans l’évaluation du dommage moral lié au préjudice résultant d’uneatteinte à l’intégrité physique (préjudice corporel), on distingue d’ordinairedivers postes spécifiques :

• Le dommage moral général Il couvre toute atteinte aux intérêts extra-patrimoniaux de la victime(angoisse, souffrances, craintes pour l’avenir,…), et fait l’objet d’uneévaluation ex aequo et bono, proportionnellement au taux et par

jour d’incapacité.• Le pretium doloris

Il désigne le préjudice lié à la souffrance physique causée par lesblessures et les traitements ; il s’agit d’un aspect particulier dudommage moral lié au traumatisme, sans constituer un préjudiceéconomique. Sa réparation est évaluée selon l’importance de ladouleur (intensité, répétition, durée,…) par l’expert-médecin. Pourcela, il existe une échelle comportant 7 degrés de classification.

• Le préjudice esthétiqueIl renvoie à la souffrance morale liée à la disgrâce physique résultantde lésions corporelles. L’expert médical évalue objectivement lepréjudice et le juge fixe l’indemnité en fonction de diversparamètres (âge, sexe, profession de la victime,…).

o 1/7 : imperceptibleo 3/7 : léger

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o 4/7 : moyeno 5/7 : graveo 7/7 : repoussant

• Le préjudice d’agrément

Il concerne la diminution des plaisirs de la vie résultant du préjudicecorporel subi ; la victime ne peut plus pratiquer son sporthabituel, elle doit renoncer à certains loisirs,…

• Le préjudice sexuel (ou pretium uoluptatis)Il désigne la perte de l’espoir de fonder un foyer et d’avoir une viefamiliale et sexuelle normale : stérilité, absence de plaisir,diminution du potentiel de séduction,… la réparation de ce type dedommage peut être demandée par la victime mais aussi par sonpartenaire (dommage par répercussion).•

Le pretium affectionisOn prend en compte l’atteinte aux sentiments d’affection que lepropriétaire éprouvait à l’égard de son bien disparu ou détérioré(la victime doit démontrer la valeur affective du bien perdu à sesyeux).

TITRE II. Le fait juridique profitable comme sourced’obligation

Les quasi-contrats

Aux termes de l’article 1371 du Code civil, « Les quasi-contrats sont lesfaits purement volontaires de l’homme, dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers, et quelquefois un engagement réciproque desdeux parties » .

En réalité, la catégorie des quasi-contrats regroupe un ensemble desituation où, en dehors de toute convention, une personne reçoit unavantage d’une autre qui n’avait aucune obligation à l’égard de lapremière.

Mais attention, car si les quasi-contrats s’apparentent aux contrats sur leplan de leurs effets de droit, ils s’en distinguent par leur origine car lesdroit et obligations auxquels ils donnent naissance ont pour source un faitvolontaire ou involontaire d’une personne et non un accord de volontés.

Chapitre 1. La gestion d’affaire (art. 1372 à 1375)Section 1. Notion – Comparaison avec le mandat

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Dans la gestion d’affaires, une personne (le gérant) s’occupe des affairesd’une autre personne (le géré), de sa propre initiative, sans en avoir étéchargé et sans avoir été mandaté à cet effet.Si l’intervention du gérant dans les affaires du géré est altruiste, elle n’est

pas gratuite ; d’ordinaire, il tient dès lors à être remboursé des fraisexposés.

La gestion d’affaires se distingue du mandat à plusieurs égards :• Elle nait du fait unilatéral du gérant, alors que le mandat naitd’un accord de volontés (contrat).• Elle a essentiellement pour objet des actes matériels, alors quele mandat implique l’accomplissement d’actes juridiques.• Contrairement au mandataire, le gérant qui contracte avec untiers est parfois personnellement engagé à l’égard de ce tiers ; eneffet, il peut agir en son nom personnel sans révéler qu’il agit entant que gérant des affaires d’autrui.• La gestion d’affaires ne prend pas fin à la mort du géré, alorsque le mandat, quant à lui, prend fin au décès du mandant.

Section 2. ConditionsL’enjeu est de trouver un juste équilibre : il s’agit à la fois de ne pasdécourager l’initiative, inspirée par une intention louable et bienveillante,et d’éviter des immixtions intempestives (action de s’immiscer),

injustifiées ou inefficaces, dans les affaires d’autrui :• 1 ère condition

Une intervention volontaire et spontanée du gérant, en l’absence detoute obligation légale ou conventionnelle

• 2 ième conditionL’absence d’opposition de la part du géré, sous peine pour le gérantd’engager sa responsabilité ; il n’est cependant pas requis que legéré ignore la gestion.

• 3 ième condition

L’intervention du gérant doit être désintéressée• 4 ième condition

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Les actes du gérant doivent être urgents, nécessaires et de bonneadministration.

Section 3. Effets

§1. Les relations entre le gérant et le géréLe gérant est tenu d’agir en bon père de famille et de poser des actes debonne administration ; il doit continuer et achever ce qu’il a entrepris,

jusqu’à ce que le géré puisse s’en occuper personnellement, et même, lecas échéant, au-delà du décès de ce dernier. Enfin, il doit aussi rendrecompte de sa gestion (justifier les actes accomplis).

De son coté, le géré est tenu d’indemniser le gérant des dépensesnécessaires (et de bonne administration) que celui-ci a effectuées dans lecadre de sa gestion. Il doit indemniser le gérant des engagementspersonnels souscrit par lui et remplir les engagements conclus en sonnom.

§2. Les relations avec les tiersPremière hypothèseLe gérant a agi au nom et pour le compte du géré (avec représentation).Dans ce cas, le géré est directement engagé envers les tiers, sans besoind’aucune ratification ; le gérant n’est en principe pas tenupersonnellement.

Seconde hypothèseLe gérant a gi en son nom propre (sans représentation).Dans ce cas, il est personnellement obligé envers les tiers, mais il pourrase faire indemniser par le géré pourvu que les actes passés aient été debonne administration.

Chapitre 2. Le paiement de l’indu (art. 1376 à 1381)Section 1. Notion

Payer l’indu, c’est s’acquitter d’une dette qui n’existe pas ou à laquelle onn’est pas (encore) tenu ou au bénéfice d’une mauvaise personne :

le double virement, le virement adressé sur un compte autre que celui ducréancier,…

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Celui qui paie alors qu’il n’y était pas tenu (le solvens) peut réclamer larestitution (« répétition ») à celui qui a reçu indument (l’accipiens) et quiest obligé de rembourser.

Le paiement de l’indu est l’un des principaux cas d’application de lathéorie de l’enrichissement sans cause, laquelle a toutefois une portéeplus large.

Section 2. ConditionsIl faut un paiement indu ou « sans cause ». Tel est le cas du paiement quiintervient en l’absence de toute dette entre le solvens et l’accipiens. Il està remarquer que l’on n’a pas affaire à un paiement au sens technique dela notion puisque « toutpaiement suppose une dette (…) ».

Section 3. Effets§1. Obligations de l’accipiens

Il est tenu de restituer ce qu’il a indûment reçu ; une distinction s’imposesuivant qu’il est de bonne ou de mauvaise foi.

Si l’accipiens est de bonne foiIl ne pourra subir aucun préjudice de la restitution ; en principe, il peutconserver les fruits civils et naturels (soit les intérêts éventuels). S’il aaliéné la chose reçue, il ne devra restituer que le fruit de la vente, quelleque soit la valeur de l’objet. Sila chose a péri par cas fortuit, il est libéré.

Si l’accipiens est de mauvaise foiLe solvens ne peut subir aucun préjudice ; l’accipiens est tenu derembourser les intérêts et autres fruits depuis le jour du paiement. S’il aaliéné la chose, il doit payer la valeur de celle-ci au jour de la répétition ; il

en est de même en cas de détérioration ou de destruction.

§2. Obligations du solvensLe solvens est tenu de dédommager l’accipiens de toutes les dépensesnécessaires et utiles qui ont été faites pour la conservation de la chose,même en cas de mauvaise foi de l’accipiens.

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Chapitre 3. L’enrichissement sans causeSection 1. Notion

L’enrichissement sans cause désigne l’hypothèse dans laquelle une valeurpasse d’un patrimoine à l’autre, sans justification aucune.Ce transfert injustifié de valeur oblige la personne enrichie de restituer à lapersonne appauvrie la partie de sa fortune dont elle s’est trouvée privéesans fondement juridique ; la personne appauvrie dispose d’undroit d’action particulier, « l’actio de in rem verso » .

La théorie de l’enrichissement sans cause est une création jurisprudentielle ; le Code civil ne la consacre pas en tant qu’institution

autonome, mais il en fait plusieurs applications.Le principe est fondé sur l’équité (il trouve sa raison d’être dans lanécessité de conserver un statu quo patrimonial), mais cette justification,

jamais très prisée par les juristes, est discutée.

!! Il s’agit d’une action subsidiaire ; si je ne dispose d’aucun recours légal,alors seulement dans ce cas je pourrai introduire le principe del’enrichissement sans cause !!

Section 2. ConditionsIl appartient au demandeur, par toutes voies de droit, de prouver que cesconditions sont réunies.

§1. Un enrichissement et un appauvrissement corrélatifs Tout d’abord, il faut un enrichissement dans le chef du défendeur ; toutavantage pouvant être chiffré en une somme d’argent peut être considérécomme un enrichissement.

L’enrichissement peut :• Etre positif

(acquisition d’une plus-value, accroissement de l’actif,…)• Consister en une simple économie de dépense

(baisse d’une charge, extinction d’une dette,…)• Etre de nature matérielle, mais il peut être également moral

ou intellectuel (l’éducation reçue par exemple)

A l’instar de l‘enrichissement, l’appauvrissement du demandeur est conçulargement ; il s’agit le plus souvent d’un appauvrissement patrimonial,

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mais il peut être question aussi d’un effort fourni et qui n’a pas étérémunéré, une d’une perte de temps,…

En tout état de cause, l’enrichissement doit être la conséquence

nécessaire de l’appauvrissement ; cette condition se vérifie à l’aune de lathéorie de l’équivalence des conditions. En d’autres termes, il y a lieu dedémontrer que, sans l’appauvrissement, l’enrichissement ne se serait pasproduit. Notons cependant qu’une stricte équivalence entre les montantsrespectifs de l’enrichissement et de l’appauvrissement n’est pas requise.

§2. L’absence de causeEncore faut-il démontrer que ni l’enrichissement, ni l’appauvrissement netrouve leur justification dans une cause quelconque. Le terme « cause » aici une signification plus large qu’en matière contractuelle.

Il est requis que le transfert de valeurs ne repose sur aucune contrepartie,aucun motif déterminant, ni aucun autre élément qui justifie le transfert.

§3. Le caractère subsidiaire de « l’actio in rem verso « (art. 1108du Code civil)L’action de in rem verso est subsidiaire en ce sens qu’elle s’appliqueuniquement en l’absence d’un autre recours prévu par la loi et, pluslargement, en l’absence d’une cause au sens précité avant.

L’appauvri ne doit disposer d’aucun recours sur la base de la gestiond’affaires ou du paiement de l’indu. Il faut éviter, en effet, que l’actio de inrem verso ne devienne une panacée permettant tant au demandeur qu’au

juge de ne pas rechercher le véritable fondement légal et de se soustraireaux conditions de ce dernier, ou échapper aux conséquences de sanégligence (par exemple, avoir laissé courir un délai de prescription).

L’actio de in rem verso se prescrit après un délai de 10 ans, qui commenceà courir au moment de l’enrichissement.

Section 3. EffetsSi les conditions de l’enrichissement sans cause sont réunies, l’enrichi esttenu ^par une obligation de restituer en faveur de l’appauvri.

Si la restitution en nature est possible, elle se fait par équivalent, sous laforme d’une indemnité ; en ce cas, il y a lieu d’évaluer le montant de

l’appauvrissement et celui de l’enrichissement, l’enrichi étant tenu depayer le montant le moins élevé.

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