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Sommaire octobre - novembre 2012 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours Bureau de la SOFOP Président : C. ROMANA - 1 er Vice-Président : J. LECHEVALLIER - 2 e Vice Président : C. KARGER Ancien Président : C. BONNARD - Secrétaire Général : J.L. JOUVE - Trésorier : P. LASCOMBES Membres du Bureau : B. de BILLY, F. CHOTEL, A KAELIN, P MARY, J. SALES DE GAUZY (SOFCOT), P WICART la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse www.livres-medicaux.com Fondateur J.C. POULIQUEN † Editorialiste H. CARLIOZ (Paris) Rédacteur en chef C. MORIN (Berck) Membres J CATON (Lyon) P CHRESTIAN (Marseille G FINIDORI (Paris) J L JOUVE (Marseille R KOHLER (Lyon) P LASCOMBES (Nancy) G F PENNEÇOT (Paris) M RONGIERES (Toulouse) J SALES DE GAUZY (Toulouse) R VIALLE (Paris) et le GROUPE OMBREDANNE” Correspondants étrangers M BEN GHACHEM (Tunis) R JAWISH (Beyrouth) I. GHANEM (Beyrouth) Editeur SAURAMPS MEDICAL S.a.r.l. D. TORREILLES 11, boulevard Henri IV CS 79525 34960 MONTPELLIER Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80 Fax : 04 67 52 59 05 La Gazette de la SO ciété F rançaise d’ O rthopédie P édiatrique N°37 Editorial SO.F.O.P. Considérations de Michel Rongières sur l’histoire des réformes des études médicales au XX ème siècle ........................................... 2 Enseignement de l’orthopédie à Adélaïde (Australie) par F. Accadbled................................................................................................................................................................................................................. 7 Consultation avancée d’orthopédie pédiatrique en Australie La réalité réelle ou virtuelle par B. Foster et F. Accadbled ................................................................................................................................. 8 Le réseau de chirurgie pédiatrique de Midi Pyrénées par J-P. Cahuzac............................................................................................................................................................................................................... 12 Des classifications de Risser ou une contribution inestimable (invaluable) par J. Sales de Gauzy ..................................................................................................................................................................................................... 15 L’éminente question de la for- mation du futur médecin était déjà au centre de la réflexion inaugurée par Hippocrate et symbolisée à grands traits par le Serment. Les quelques textes rassemblés dans ce numéro de la Gazette abordent, chacun à leur manière, un des multiples aspects de cette question inépuisa- ble qu’on peut réduire à trois objectifs : le savoir, le savoir-faire et le savoir-être. - l’enseignement des spécialités médicales a connu un premier bouleversement, retentissant, celui de la réforme de 1958. Le texte de Rongières nous en rappelle le contexte historique. Cette réforme qui associait l’Université aux Centres Hospitaliers, de salutaire qu’elle était à l’époque, car destinée à créer des synergies, est devenue la cible de nombreuses objections, notamment celle de l’immuabilité des statuts. Le second bouleversement est passé quasi inaperçu, au regard de ses implications ; la réforme de l’internat a transposé l’acquisition du savoir et d’une grande partie du savoir-faire dans un cadre universitaire alors que le concours de l’internat était un concours hospitalier. En d’autres termes, la formation qui se faisait naguère exclusivement par compagnonnage s’édifie désormais autour d’un curriculum vitae. A ce propos, notre collègue F. Accadbled nous fait part, à travers son expérience, de la progression de la formation chirurgicale, en Australie. - « L’universitarisation » de l’enseignement des spécialités était sans nul doute nécessaire ; elle a substitué le regard critique à l’argument d’autorité, et par là même elle a relativisé les connaissances théoriques. L’article de J Sales de Gauzy nous mon- tre avec force que les classifications ne sont qu’une construction de l’esprit pour tenter d’unifier la mul- tiplicité du réel. - L’exercice professionnel, qui découle naturelle- ment du savoir et du savoir faire, a connu, lui aussi, de profonds remaniements au cours des deux der- nières décennies. Le modèle d’après guerre d’une médecine libérale, individualiste, fondée sur le colloque singulier avec le patient, et oublieuse des impératifs de santé publique, a vécu. D’ores et déjà, les notions d’équipe soignante, de transversalité, de parcours de soins, sont au centre de la prise en charge des patients. Le fonctionnement en réseau décrit par JP Cahuzac est à l’ordre du jour et peut servir d’exemple. Mais il est permis d’aller plus loin ; les groupements interprofessionnels de santé mis en place récemment dans certaines régions déshé- ritées sont une réponse globale à la question des modalités de l’exercice professionnel. - Reste l’acquisition du savoir-être, autrement dit le comportement médical, somme des multiples attitudes du médecin confronté à des situations toujours singulières. Certains brandissent l’innéité mais feignent d’oublier que cette conception impli- querait une sélection à l’entrée du cursus, d’autres soutiennent que l’expérience aide à forger les bonnes attitudes… Les uns et les autres occultent la possibilité d’une formation du comportement, au sens profond de « donner forme à », sans tom- ber dans le travers d’une standardisation. Car on peut croire, certes, à la vertu de l’exemplarité, mais l’étudiant futur chirurgien aura tendance à repro- duire ce qu’il aura vu faire ; il lui manquera la dis- tance critique. C’est pour cette raison qu’il faut sérieusement en- visager un enseignement universitaire de la façon de dire, de voir, d’écouter, de transmettreDe timides approches, encore marginales, ont vu le jour. Elles reposent sur ce qu’il est convenu d’appeler la simulation au sens large du terme et qui regroupent toutes les techniques de mise en situation. L’essentiel est bien dans cette nouvelle exigence de la formation car la confiance d’une population n’est pas dans les prouesses techniques mais dans les comportements ajustés des déposi- taires du savoir. CR Romana et AC Masquelet

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Som

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octobre - novembre 2012 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours

Bureau de la SOFOPPrésident : C. Romana - 1er Vice-Président : J. LeChevaLLieR - 2e Vice Président : C. KaRgeR

Ancien Président : C. BonnaRd - Secrétaire Général : J.L. Jouve - Trésorier : P. LasComBes Membres du Bureau : B. de BiLLy, F. ChoteL, a KaeLin, P maRy, J. saLes de gauzy (soFCot), P WiCaRt

la Gazette est dorénavant publié en format A4, afin d’être directement imprimée à partir de votre ordinateur via notre adresse www.livres-medicaux.com

FondateurJ.C. POULIQUEN †

EditorialisteH. CArLIOz (Paris)Rédacteur en chef C. MOrIN (Berck)

Membres J CATON (Lyon)

P CHrESTIAN (MarseilleG FINIDOrI (Paris)

J L JOUVE (Marseille

r KOHLEr (Lyon)P LASCOMBES (Nancy)G F PENNEÇOT (Paris)

M rONGIErES (Toulouse)J SALES DE GAUzY (Toulouse)

r VIALLE (Paris)et le GrOUPE OMBrEDANNE”

Correspondants étrangersM BEN GHACHEM (Tunis)

r JAWISH (Beyrouth)I. GHANEM (Beyrouth)

EditeurSAUrAMPS MEDICALS.a.r.l. D. TOrrEILLES

11, boulevard Henri IVCS 79525 34960 MONTPELLIEr Cedex 2 Tél. : 04 67 63 68 80Fax : 04 67 52 59 05

La Gazette de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique

N°37

Editorial SO.F.O.P.

Considérations de Michel rongières sur l’histoire des réformes des études médicales au XXème siècle ...........................................2

Enseignement de l’orthopédie à Adélaïde (Australie)par F. Accadbled .................................................................................................................................................................................................................7

Consultation avancée d’orthopédie pédiatrique en AustralieLa réalité réelle ou virtuelle par B. Foster et F. Accadbled ................................................................................................................................. 8

Le réseau de chirurgie pédiatrique de Midi Pyrénéespar J-P. Cahuzac ...............................................................................................................................................................................................................12

Des classifications de risser ou une contribution inestimable (invaluable)par J. Sales de Gauzy ..................................................................................................................................................................................................... 15

L’éminente question de la for-mation du futur médecin était déjà au centre de la réflexion inaugurée par Hippocrate et symbolisée à grands traits par le Serment.Les quelques textes rassemblés dans ce numéro de la Gazette abordent, chacun à leur manière, un des multiples aspects de cette question inépuisa-ble qu’on peut réduire à trois objectifs : le savoir, le savoir-faire et le savoir-être.

- l’enseignement des spécialités médicales a connu un premier bouleversement, retentissant, celui de la réforme de 1958. Le texte de Rongières nous en rappelle le contexte historique. Cette réforme qui associait l’Université aux Centres Hospitaliers, de salutaire qu’elle était à l’époque, car destinée à créer des synergies, est devenue la cible de nombreuses objections, notamment celle de l’immuabilité des statuts. Le second bouleversement est passé quasi inaperçu, au regard de ses implications ; la réforme de l’internat a transposé l’acquisition du savoir et d’une grande partie du savoir-faire dans un cadre universitaire alors que le concours de l’internat était un concours hospitalier. En d’autres termes, la formation qui se faisait naguère exclusivement par compagnonnage s’édifie désormais autour d’un curriculum vitae.

A ce propos, notre collègue F. Accadbled nous fait part, à travers son expérience, de la progression de la formation chirurgicale, en Australie.- « L’universitarisation » de l’enseignement des spécialités était sans nul doute nécessaire ; elle a substitué le regard critique à l’argument d’autorité, et par là même elle a relativisé les connaissances théoriques. L’article de J Sales de Gauzy nous mon-tre avec force que les classifications ne sont qu’une construction de l’esprit pour tenter d’unifier la mul-tiplicité du réel.

- L’exercice professionnel, qui découle naturelle-ment du savoir et du savoir faire, a connu, lui aussi, de profonds remaniements au cours des deux der-nières décennies. Le modèle d’après guerre d’une médecine libérale, individualiste, fondée sur le colloque singulier avec le patient, et oublieuse des impératifs de santé publique, a vécu. D’ores et déjà, les notions d’équipe soignante, de transversalité, de parcours de soins, sont au centre de la prise en charge des patients. Le fonctionnement en réseau décrit par JP Cahuzac est à l’ordre du jour et peut servir d’exemple. Mais il est permis d’aller plus loin ; les groupements interprofessionnels de santé mis en place récemment dans certaines régions déshé-ritées sont une réponse globale à la question des modalités de l’exercice professionnel.

- Reste l’acquisition du savoir-être, autrement dit le comportement médical, somme des multiples attitudes du médecin confronté à des situations toujours singulières. Certains brandissent l’innéité mais feignent d’oublier que cette conception impli-querait une sélection à l’entrée du cursus, d’autres soutiennent que l’expérience aide à forger les bonnes attitudes… Les uns et les autres occultent la possibilité d’une formation du comportement, au sens profond de « donner forme à », sans tom-ber dans le travers d’une standardisation. Car on peut croire, certes, à la vertu de l’exemplarité, mais l’étudiant futur chirurgien aura tendance à repro-duire ce qu’il aura vu faire ; il lui manquera la dis-tance critique.C’est pour cette raison qu’il faut sérieusement en-visager un enseignement universitaire de la façon de dire, de voir, d’écouter, de transmettre…De timides approches, encore marginales, ont vu le jour. Elles reposent sur ce qu’il est convenu d’appeler la simulation au sens large du terme et qui regroupent toutes les techniques de mise en situation. L’essentiel est bien dans cette nouvelle exigence de la formation car la confiance d’une population n’est pas dans les prouesses techniques mais dans les comportements ajustés des déposi-taires du savoir.

CR Romana et AC Masquelet

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Considérations de Michel Rongièressur l’histoire des réformes des études médicales au XXème siècle

Le fil conducteur ou un siècle en quelques secondesAu cours du XXe siècle, la médecine a une structure empi-

rique, peu scientifique, avec une approche très clinique du malade ; le médecin est pétri d’humanisme au sens le plus noble du terme, mais souvent peu humain ou peu éthique, parce que ce n’est pas la préoccupation du moment. A la fin du siècle, nous aboutirons à une médecine qui revendique le statut de science, et c’est là sa première erreur, sous pré-texte que les sciences fondamentales et les technologies médicales ont fait de grands progrès, mais cette médecine est mécanique, technique, plus humaniste du tout voire in-culte, mais tend à être plus humaine, par nature éthique ou par force juridique. Mais le statut épistémologique de cette « médecine » change. C’est dans les années d’avant la Gran-de guerre, une « praxis », c’est après la drôle de guerre, une « théoria ». Le concept est pauvre en 1900, réduit à la noso-graphie et à l’espoir de grandes découvertes, puis devient un bouillon paradigmatique intense actuellement où des concepts mijotent avec des technologies sophistiquées, mé-diatisées qui font rêver à des jours meilleurs, mais souvent réservées à une élite, ou restant encore dans le domaine de la science fiction. Cette science théorique qui n’existe pas sans applications techniques est hors du champ de la compréhension du pu-blic des patients potentiels, si tant est qu’elle soit accessible à tous les médecins du temps. Mais elle est spectaculaire et rentable pour les médias, ce qui permet d’occulter les vrais problèmes de la Santé en général et de la médecine en par-ticulier. C’est encore, comme dans un texte récent d’Axel Kahn, l’argument des progrès d’une science médicale qui ne serait efficace que depuis 1945, parce que la thérapeutique apparaît alors. Ce qui me gêne c’est le mépris de l’histoire et de la vérité historique. Parce que des faux historiens ont dis-tillé l’idée que le Moyen âge fut stérile, et que la médecine d’avant la modernité (mot qui ne veut rien dire) ne traitait pas, il est difficile de faire comprendre qu’il n’en était rien. Comme le dit Danielle Jacquart (E.P.H.E) non seulement les médecins antiques et médiévaux expérimentaient, mais ils apprenaient la thérapeutique. Ce qu’omettent certains auteurs, c’est que le degré de dé-veloppement d’une médecine dépend du rapport entre les connaissances théoriques validées et expérimentées et leurs applications thérapeutiques. Je pourrais donner de nom-breux exemples qui démontreraient que ce ratio était moins élevé il y a quelques siècles qu’aujourd’hui, je sais c’est sur-prenant voire choquant. En effet, les connaissances réelles comparables à ce que l’on appelle une connaissance opé-ratoire en bio-médecine aujourd’hui étaient infimes. Alors qu’aujourd’hui, les connaissances sont immenses. A l’op-posé les possibilités thérapeutiques, les potions à base de plantes, les onguents, les gestes empiriques des chirurgiens étaient plus nombreux que ce que les historiens amateurs veulent faire croire. Et aujourd’hui, le ratio qui existe entre les maladies connues et ce que la médecine moderne peut traiter et guérir autrement que symptomatiquement est très grand. Par exemple il existe 5000 maladies orphelines com-prises et décrites, mais elles sont sans traitement.L’illusion irresponsable des grands mandarins des géné-rations médiatiques des années 70 a prétendu comme le scientisme de la fin du XIXe, que la médecine devenait toute

puissante, qu’elle pourrait comme la chimie de Marcellin Berthelot en 1860 avoir réponse à tout. Triste démenti de la réalité.

A l’époque de Léon Daudet, le médecin pouvait exercer avec une éthique riche et personnelle, (ce qu’elle doit être) ou se couvrir de l’apparence de l’humaniste savant en grec et latin, mais sans compassion pour le malade autre qu’au moment des honoraires. Cette époque manquait d’huma-nité et tous les écrits sur l’époque le confirment, sans parler de l’eugénisme qui ne choquait personne, confondant la découverte de la génétique avec son application dégénérée en sociologie. N’en déplaise à l’image que nos médecins en ont. La fin du siècle dernier évolue vers une pratique peu clinique, où l’image est plus qu’un examen complémentaire, mais de-vient un double épistémologique du patient. Ces examens complémentaires sont plus qu’une application tardive de l’idéologie bernardienne du « tout laboratoire », scientisme plus qu’idéologie d’un génie en avance. Sachant que 50 % des examens de laboratoire au moins ne sont pas lus par ceux qui les ont demandés et que 90 % des examens radio-graphiques demandés et faits sont normaux. Ils ne sont plus des examens complémentaires car ils ne sont complémen-taires de rien. Car il n’y a souvent plus d’examen clinique avant. La pression médico-légale ajoute la peur (déjà exécu-toire aux USA) et fait pratiquer en conscience des examens inutiles, mais que les experts et les juges pourraient exiger au cas où !En résumé nous avons glissé d’une médecine d’érudits culti-vés mais ignorants au sens de Michel Serres, à une médecine quasi-scientifique pratiquée par des savants incultes. D’un médecin cultivé et clinicien mais paternaliste à un praticien inculte et savant mais suspect et sans aucun pouvoir.D. Folscheid souligne parfaitement cette évolution et ses im-plications éthiques et épistémologiques :« Il est vrai que le contexte actuel largement dominé par le souci de la connaissance scientifique et la course aux performances, ne facilite pas ce type de questionnement. A cet égard, le sté-réotype courant selon laquelle la médecine qui serait un art, est devenue une science, est symptomatique d’une dangereuse dérive » [1]

Si la seule science qualifiait la médecine alors seul le pur scientifique serait un bon médecin ce qui justement n’est pas. Le pur chercheur ne peut plus soigner, de même que le bon médecin praticien de son art ne peut faire un vrai cher-cheur. Ne nous faisons pas d’illusion, ou alors dans la seule recherche clinique. La médecine est devenue scientifique mais elle reste une praxis, un art une tékhné, mais pas une technique. Elle ne fait que s’en servir.L’évo lu tion et le pro grès des sciences médi ca les que l’on peut cons ta ter actuel le ment, est tout au plus un pro grès des tech ni ques et des moyens d’explo ra tion et de com pré-hen sion des phé no mè nes phy si o lo gi ques. On fait donc des pro grès en ce qui concerne la connais sance, en ce qui concerne les métho des d’expé ri men ta tion en Méde cine, mais on n’a pas plus de ren sei gne ments sur le sens de ce que serait une Science uni que médi cale.

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On béné fi cie au plan his to ri que d’une somme évo lu tive de diff é ren tes sciences appli quées, avec un enri chis se ment pro gres sif autour de l’acti vité opé ra toire des méde cins.Descartes nous renseigne aussi ; il nous fait comprendre que si l’on demande de quoi il y a science, il faut répondre qu’il ne peut y avoir de science que du corps-machine, corps séparé de l’âme que le processus d’objectivation transforme en une sorte de double épistémologique du corps vivant réel. (la radiographie par exemple). En revanche si l’on demande de quoi il y a médecine il faut répondre qu’il ne peut y avoir de médecine que du corps vivant réel, uni à ce point à l’âme que le sens commun ne les distingue même pas. Ce qui montre que le dualisme de Descartes est une pure « méthode » pour reconstruire l’homme machine en le dé-construisant en ses parties [2].

Premier chapitre : le PASSIF de 1900 à 1958Il ne semble pas y avoir eu d’importantes réformes jusqu’à

1958, année de la grande réforme qui restructure complète-ment, non seulement l’enseignement de la médecine, mais également le fonctionnement des hôpitaux en France. Au début du Siècle dernier les études de médecine sont do-minées par les concours au détriment de la Faculté de mé-decine, on apprend dans les conférences d’Externat et d’In-ternat, et à l’hôpital, pendant la visite des internes des chefs de clinique et du patron, on dissèque, mais on ne se cultive pas en dehors de la pure clinique. C’est une médecine sen-sorielle et d’observation [3]. Ce caractère a été dénoncé par d’autres médecins dans d’autres pays. Si c’est à Paris que naît la médecine moderne entre 1800 et 1850, on reproche aux médecins français, un certain nihilisme thérapeutique et une pratique trop clinique plus préoccupée par la connaissance que par la guérison des malades. Broussais accusa même un jour Laënnec de s’intéresser davantage aux autopsies qu’aux moyens de les éviter [4].Ecoutons Léon Daudet :« J’ai décrit dans les morticoles, au chapitre des lèchements de pieds quelques-uns des abominables et incessants passe-droits auxquels donnent lieu les concours ». Les diverses épreuves qui vont de l’internat à l’agrégation étaient en réalité, et de plus en plus à mesure que l’on montait en grade, des cérémonies falla-cieuses, réglées d’avance. De moins en moins probantes quant à leur supériorité scientifique des vainqueurs…Combien de chercheurs ont été étouffés, traqués, traités en ennemis publics parce que leurs travaux contredisaient les conclusions d’un pontife en robe rouge, d’un mandarin. Ce qui m’a toujours étonné, c’est la docilité avec laquelle jusqu’à ces toutes dernières années, les victimes se laissaient molester ou dépouiller, subissaient des iniquités sans nom un joug intolé-rable…La Faculté de Paris se meurt de la centralisation jacobine, de la filière napoléonienne des concours, de l’intrusion de la po-litique et des clans dans la profession médicale. Cela est clair comme la lumière du jour. Des gens dont le métier de remon-ter des effets aux causes ne peuvent pas en douter une minute alors qu’entendent-ils pour se libérer ? (Daudet fut royaliste, an-tisémite et anti-Dreyfusard)C’est à peu près ce que pensera robert Debré qui l’exprime-ra toutefois en termes différents et parlera de ce qui freine l’évolution de la médecine française et qui sera à l’origine

entre autres de sa réforme des études médicales et de la création des CHU. En effet, ce texte a été écrit par Léon Dau-det [5] quelques années avant la première guerre mondiale, texte qu’il a révisé en 1914 sans y changer une seule ligne. En effet, l’enseignement des études médicales se fait à l’épo-que exclusivement auprès du malade, les étudiants se font un devoir (voir Daudet, Debré, Pujol) de boycotter les cours à la Faculté pour ne faire que de la formation auprès du pa-tient. C’est-à-dire l’extrême contraire de ce qui se faisait il y a peu. La réaction d’ailleurs a été vive puisqu’au moins dans notre Faculté à Toulouse une réorganisation de l’enseigne-ment des matières cliniques en particulier a été faite, il y a quelques années, ce qui est heureux.

rappelons comment étaient organisées ces études de mé-decine et l’hôpital au début du siècle :« Tout d’abord l’organisation de la Faculté, qui n’a pas changé depuis 1886, est centralisée c’est-à-dire jacobine, et despotique, c’est-à-dire impériale. En bas un véritable prolétariat médical envahi maintenant par les étrangers et les métèques (c’est le mauvais côté de Daudet mais ce fut l’option majoritaire des internes français à l’aube de la guerre) ou sévit cruellement la concurrence. En haut, une série de mandarins créés par les concours à échelon et le contrôle continu, mandarins qui se haïssent au fond mais s’entendent sur le dos des candidats perpétuels. Entre les deux un peuple d’élèves soumis et craintifs sans volonté comme sans initiative, que le succès ou l’insuccès fera tantôt monter au mandarinat, tantôt rejettera dans la foule anonyme et misérable des cours-la-visite et des coupe-le-ventre. Ajoutez à cela les influences politiques et électorales qui peuplent les chaires et les laboratoires de nullités alliées aux Ministres et femmes de Ministres, et demandez-vous comment un jeune homme de valeur mais sans appui, ni argent, ni bas-sesse, pourrait traverser ces rangs, pressés de fonctionnaires et intrigants ? Ainsi s’explique la déchéance extraordinairement rapide d’une science où nous avons jadis tenu la corde avec les Bichat, les Laennec, les Duchenne de Boulogne, les Morel de Rouen, les Claude Bernard, les Charcot, et les Potain ; sans compter le grand Pasteur qui est à part mais dont l’Institut est lui aussi à l’heure actuelle en complète décomposition. » [6] L’étudiant entrait directement dans le vif du sujet, dès la seconde année, il pénétrait dans les services cliniques, les matinées étaient remplies par la visite hospitalière comme le décrit très bien robert Debré [7] :« le petit groupe des étudiants en blouses blanches entourait le patron qui allait de lit en lit, accompagné de son interne et de la surveillante. L’interne présentait les malades, la surveillante sur quelques papiers rassemblés sur un modeste carnet inscrivait les prescriptions que le chef de service dictait après nous avoir expliqué les raisons de son diagnostic, et nous avoir appris à regarder et à ausculter et à palper. On donne alors beaucoup d’importance à l’observation, au flair clinique, à un esprit qui ressemble en tout à celui des enquêteurs policiers, et ce n’est pas pour rien d’ailleurs que beaucoup des plus grands créa-teurs de détectives célèbres étaient médecins ». Toutefois dans l’enthousiasme de robert Debré, cette initiation clinique qui était possible en France au début du siècle car l’école fran-çaise comptait parmi les meilleures des cliniciens du monde, était faite au lit du malade, sans beaucoup de véritables re-lations médecin-malade, sans véritable éthique. Le patient était un objet d’observation.

Considérations de Michel Rongièressur l’histoire des réformes des études médicales au XXème siècle

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Mais il est clair que ce sont les praticiens riches et aisés, ins-tallés dans une pratique privée, et donnant de leur temps à l’hôpital public qui faisait une véritable recherche empirique certes mais utile. Ils ont aussi réalisé de grands travaux ana-tomiques qui s’y rapportaient et ont accéléré le développe-ment de la médecine moderne. Ces grands médecins étaient des privilégiés de la fortune, pour pouvoir se consacrer à la recherche et ne pas avoir une pratique purement « clienté-larde »[8]. Mais cet hôpital était plus proche de ce qu’il était avant la révolution, un hôpital hospice pour les pauvres.

Mais quid de l’apprentissage de l’enseignement. La péda-gogie est soit idéalisée, soit inexistante. Elle est soit réelle dans les sciences fondamentales de l’époque et c’est la tra-dition des sciences morphologiques, anatomie et histologie, ou bien inexistante en clinique. « L’Université semble avoir oublié pour les médecins la prépara-tion à l’enseignement. Elle n’a pas d’institution destinée à l’édu-cation des maîtres…Il n’y a pas d’Ecole Normale de Médecine. » [9]. Cette phrase a été écrite dans les années 1900 !

D’autre part la pauvreté de la thérapeutique qui se rédui-sait à la quinine, l’aspirine, la digitale, le mercure, l’iode et quelques autres produits dont disposaient surtout les phar-maciens qui s’occupaient également des quelques examens de laboratoire comme le dosage du glucose, était ou absente ou inefficace ou extrêmement limitée sirop calmant la toux, potion réconfortante, régime alimentaire. Peu de différence en fait avec la médecine d’Hippocrate ou celle de Molière, les saignées et les purgatifs en moins. Mais cette synthèse de certains écrits des années 60 est dans la lignée de la pensée contre l’histoire, pour justifier une médecine qui serait une science. Déconstruire pour construire.La formation était très particulière, peu de choses étaient obligatoires comme l’écrit robert Debré : « ..par la fréquentation de l’hôpital, nous recevions la connais-sance des maladies en ordre dispersé, au hasard des entrées. La pathologie nous était apprise dans des conférences d’exter-nat puis plus tard d’internat, c’est qu’en effet nous donnions à honneur de ne point suivre les cours de la Faculté, nous pre-nions part de mauvaises grâces aux travaux pratiques qui nous étaient imposés. Personnellement, je l’avoue à ma honte, je ne suivais même pas sérieusement l’enseignement de la physiolo-gie. Nous jouissions d’une liberté telle, celle que l’on considérait comme fondamentale dans l’enseignement supérieur, qu’il nous était possible d’éviter les cours qui ne nous plaisaient point et les stages pour lesquels nous n’avions point d’attrait » [10]. On réussissait le concours d’Externat dès la troisième année, l’Internat vers la cinquième année, les études de médecine se réduisaient donc à une formation le matin au lit du ma-lade et l’après-midi en la préparation théorique grâce à des conférences à une médecine purement clinique.Mais le même robert Debré regrette : « mais plus tard, nous avons tous bien vu que nous avions manqué de connaissances fondamentales et dû faire un grand effort pour nous adapter aux courants scientifiques dont tout jeune nous n’avions point suffisamment senti la puissance. »Donc nous voyons décrit un monde hiérarchisé, jacobin, peuplé de mandarins de grandes écoles cliniques certes, mais où il faut suivre la parole du maître au risque d’être désavoué et mis au banc de l’institution. Peu de place pour l’originalité, pour l’intelligence ou l’esprit d’invention, c’est ce qui arrivera à Maurice Nicolle qui deviendra plus tard chef de laboratoire chez Pasteur, et qui eut le tort de ne pas être

l’élève de Charcot, meilleur des trois candidats au concours de médaille d’or, il fut mis à l’écart.Ce fut une cause essentielle qui fit que Léon Daudet aban-donna la médecine. Ce système de concours où il faut être une machine qui apprend par cœur plus qu’un esprit clair et inventif s’intègre dans une période historique pour la mé-decine, où la médecine commence à savoir beaucoup mais ne sait toujours pas agir. C’est pourquoi philosophiquement parlant on pourrait dire que les grands médecins ont plus de pouvoirs au sens de pouvoir sur les autres et peu de pouvoir de au sens de pouvoir agir contre la maladie. Des progrès très importants vont survenir dans le même temps en France mais surtout dans les pays anglo-saxons, toutes les découvertes qui seront faites en Europe et aux Etats-Unis mais également en Angleterre et en Allemagne vont aboutir à la véritable révolution qui fait de la médecine une discipline quasi scientifique et moderne.Le développement des sciences fondamentales, de la biolo-gie, de la biochimie, de l’immunologie, de la génétique.Il va sembler indispensable à robert Debré, d’associer cette clinique française très en avance grâce à la formation de l’in-ternat, à une formation complémentaire de ce que l’on ap-pellera les sciences fondamentales.

Le cas DebréC’est probablement pour cela qu’un certain nombre de

réformes ont été faites dès 1958 et plus récemment avec l’introduction des sciences humaines et sociales, mais égale-ment avec l’introduction d’un certain nombre de certificats d’éthique médicale, de formation à la médecine générale, etc… robert Debré pense exactement la même chose, il raconte que lors d’une conversation avec Charles Péguy, le grand homme, il lui expliquait qu’il parlait à ses élèves de conférence d’internat dans les termes suivants : « vous savez le régime est mauvais, ce régime d’école, de piston, de patron, c’est déplorable et puis tout le monde est grisé par la clientèle, on n’a même pas le temps de faire des recherches », tout est là. Ses voyages en Angleterre, en Autriche, aux Etats-Unis l’ont incité à faire cette réforme fondamentale qui fût de faire ve-nir les grands maîtres de la médecine dans les hôpitaux, à une époque où les riches pouvaient se faire soigner dans les cliniques. Il y avait très peu de différences entre un hôpital général avant la deuxième guerre mondiale et ce que cela pouvait être au XIXe siècle.Cet homme était un visionnaire, on en prend et ceci a été soulevé lors d’un symposium consacré à la réforme Debré intitulé La réforme Debré, un tiers de siècle après (Colloque de Caen décembre 1996) se rend compte que si l’on avait écouté Debré et appliqué toutes ses idées, nous n’en serions peut-être pas là. Nous allons les résumer. Il dit lui-même en 1973 : « la vraie révolution a consisté à créer au milieu de ces hôpitaux l’élément biologique sans lequel l’élé-ment clinique est aveugle et d’ajouter à ces renseignements biologiques l’élément très important le stimulus fondamental pour l’intelligence, la recherche. Et bien vous ne ferez quelque chose de valable dans le domaine qui vous intéresse que si vous faites le même effort, c’est-à-dire, comme il a été ajouté à la mé-decine clinique la médecine biologique, intriquer, insérer dans le même lieu et de la même façon la santé publique. ».Cette idée est une idée absolument visionnaire. Certes sa réforme était basée sur les travaux de l’américain Flexner à propos du rapport qu’il avait présenté devant le Ministre de l’Éducation des Etats-Unis en 1910.

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C’était la fondation rockefeller qui avait demandé à Simon Flexner, grand savant d’origine germanique, de faire une étude sur les facultés de médecine, sur les universités et sur les écoles de médecine américaines et de donner ses conclu-sions. La première proposition de Flexner fût le plein temps qui n’existait pas aux Etats-Unis, cette réforme fût quasiment imposée, ce chercheur non-clinicien fondateur du journal de médecine expérimentale, a orienté les nouvelles universités américaines seules celles qui acceptaient la réforme purent bénéficier de fonds, de subventions de la fondation rocke-feller. C’est cela qui fût visé par robert Debré, et clairement exposé dans ses mémoires, faire rentrer les grands profes-seurs dans les hôpitaux, fusionner la faculté de médecine avec le grand Centre Hospitalier Universitaire – CHU - créer le plein temps, obliger ces grands professeurs à être à l’inté-rieur de leur hôpital et de ne pas se contenter d’une visite tôt le matin ou tard le soir après leur activité en Clinique. Ce fût également l’intégration de la biologie et des labora-toires d’analyse dans les hôpitaux, ce ne fût plus aux phar-maciens de l’hôpital de réaliser quelques dosages simples. Ce fût également l’intégration de la recherche à l’origine progressivement des unités d’enseignement et de recher-che – UEr - des facultés de médecine dépendantes des CHU. La médecine comportait donc trois parties clinique, biolo-gie, et santé publique avec bien sûr l’intérêt pour l’épidémio-logie mais surtout le concept de médecine préventive. On lit très clairement dans les mémoires de robert Debré comme je l’ai déjà expliqué son dégoût pour le « système » de la médecine universitaire (piston, concours truqué, influence d’école etc.), son souhait de moderniser la médecine et d’y intégrer les dernières découvertes, le but étant de montrer que la médecine est en évolution, que la médecine se base sur la science tout en conservant un grand intérêt pour la clinique. Il lui semblait que l’intégration de l’enseignement, de la recherche, de la biologie, et de la clinique à l’intérieur d’une même structure constituait un ensemble cohérent qui pouvait motiver à la fois les cliniciens, les chercheurs, les bio-logistes, et pouvait surtout aboutir à un enseignement de haut niveau.C’était une conviction qu’il avait formé progressivement tout au long de sa vie et le plaçait à l’origine d’un nouveau mode de pensée contre le conformisme, contre la tradition, pour un homme féru d’éducation classique, de littérature, qui avait commencé à s’orienter vers la philosophie à la Sor-bonne et qu’il avait abandonné pour la médecine à la plus grande tristesse de son mentor Charles Peguy. Cet homme visionnaire certes fût également influencé par l’exemple américain qui était comme il le dit lui-même dans une très mauvaise situation, bien pire que la situation de la médecine française au début du siècle, mais là où ce vision-naire se révèle vraiment comme quelqu’un de génial c’est qu’il pensait qu’on ne pouvait plus désormais enseigner la médecine sans faire appel largement à des disciplines qui en sont loin, les statistiques, la psychologie médicale, les notions d’économie de santé, la sociologie. Pour lui médi-cament, présence, parole c’est-à-dire l’humain plus que les humanités devenaient des concepts importants.En fait, c’est très précocement au moins 40 ans avant la ré-forme vers 1993 de l’enseignement des sciences humaines et sociales que l’on appelait alors la Culture générale. Certes on pourrait discuter de l’opportunité d’enseigner cette disci-pline en première année et de quasiment l’abandonner dans les années suivantes, alors que des textes avaient recom-mandé dans des circulaires du Journal Officiel de 1995 de

poursuivre cet enseignement. Cela est regrettable d’autant que le rapport de Dominique Lecourt, professeur au Collège de France, recommande un enseignement obligatoire d’his-toire et de philosophie des sciences dans les Facultés de Sciences mais aussi dans les Facultés de Médecine.Je suis bien passé et vous l’êtes également ici puisque vous êtes venu écouter un colloque d’histoire de la médecine bien conscient de ce problème.

Les réformes modernesrappelons qu’il y avait en France en 1947, 35 000 méde-

cins, en 1960 60 000 et 200 000 en 2002. Ces réformes sont dites modernes car intervenant dans le dernier tiers du siècle. A Toulouse en 1957 il y avait 400 re-çus. La première année était une mise à niveau scientifique avec le PCB à la fin du mois de Juin. Puis certains étudiants pas-saient le concours d’Externat, avec 60 reçus. Les autres d’em-blée s’engagent dans la médecine générale. Dès la fin de la troisième année l’étudiant avait 5 tentatives possibles pour passer le concours d’Internat. Puis on aboutissait au chef de clinique à mi-temps, élément clef avec l’interne et tout puis-sant. Le problème de 1968 est clair, cet accident de l’histoire a fait doubler le nombre d’étudiants de 60 000 à 120 000 en France. Ce nombre fut bloqué pour des raisons idéologiques post-68. Peu de recalés entre 1968 et 1978, il ne fallait pas faire de vague. Le retour de baton fut très dur à Toulouse. En 1997, 65 places ! L’excès inverse, pour remonter en urgence et trop lentement à 94 places en 2003. La pénurie de médecin sera sensible dès 2008 et gravissime vers 2015. Ce numerus clausus a été appliqué sans réel consensus de la profes-sion, sur des arguments économiques et syndicaux : ne pas partager le gâteau dans le secteur libéral (source vérifiée, conseiller d’un ministre de l’éducation nationale). retour de bâton. Il n’y a eu qu’un contrôle quantatif sans réflexion sur les véritables solutions à apporter au problème de la démo-graphie médicale et surtout sans anticiper sur l’arrivée à la retraite de la génération du Baby boom. Les étudiants n’ont pas été mieux formés pour autant, on ne demande jamais à ceux qui font les cours leur avis, au mieux à ceux qui en ont fait il y a longtemps, les sages oui mais d’une autre généra-tion. C’est le principe de l’autorité hiératique plutôt que dé-mocratique et professionnelle. La réforme des Sciences hu-maines et sociales en 1993, partait d’un bon sentiment, mais elle n’a pas aidé les littéraires. Surtout elle intervient peut-être trop tôt dans le cursus et n’est pas suivie par des ensei-gnements obligatoires, philosophie des sciences et histoire des sciences, psychologie de la relation soignants-soignés, éthique véritable mais par une pseudo-éthique obsédé par le Droit, enseignement de la clinique sur le terrain etc…Faire comprendre à l’étudiant la nécessité de s’autoévaluer, de s‘autocritiquer c’est lui apprendre les rapports entre épistémologie et science biomédicale, car de l’éthique en découle. On aurait pu ainsi éviter l’accrédiation l’évaluation externe et tous ces systèmes administratifs de contrôle de notre art par des non médecins. Car je veux bien être évalué, mais par qui ?

Nous devons faire comprendre aux politiques que nous refusons maintenant d’être les esclaves d’une administration inutile et néfaste.

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Considérations de Michel Rongièressur l’histoire des réformes des études médicales au XXème siècle

Nous voulons participer avec les malades à la politique de santé. Comme le propose le Doyen Guiraud-Chaumeil une médecine sobre où notre valeur ajoutée serait reconnue et rémunérée à sa juste valeur comme celle des infirmières.Nous sommes les soignants les plus mal payés en Europe et dans pays développés. Qui voudra être médecin ?

L’inversion des valeurs ou le changement de paradigmeIl y aura après la guerre et surtout avec Debré et 1958, de

nombreuses réformes globales ou suivant les cycles d’étu-des, essayant de respecter l’autonomie des facultés de mé-decine défendue par la conférence des Doyens. Doit-on regretter la disparition du concours d’Externat, doit-on regretter la disparition programmée du concours d’Inter-nat ?

Ou ne peut-on pas se poser une autre question. Les concours sont-ils véritablement la garantie d’une meilleure forma-tion médicale ? Doit-on alors conserver le concours extrê-mement sélectif de la première année de médecine qui fait des études de médecine déjà les plus longues du cursus uni-versitaire français, une course de sac qui continue au fil des années après l’Internat, si l’on veut faire une carrière hospita-lo-universitaire, par des diplômes, des thèses et autres DEA, thèses de sciences etc…renforçant le caractère scientiste de la médecine du XXIe siècle, comme si on exigeait aussi des chercheurs d’UNIVErSITÉS DE SCIENCE de prendre des gardes à l’hopital et d’enseigner tout en cherchant. Pratique qui progressivement est en train d’éloigner les internes de ce type de carrière. Vouloir que les médecins universitaires soient plus scientifiques c’est bien, mais cela ne doit pas les éloigner des patients alors qu’ils n’ont déjà pas le temps de faire ce qu’ils doivent faire. rTT oblige. La recherche clinique faite dans les services est plus utile que la recherche fonda-mentale que l’on voudrait qu’ils fissent, mais alors quid du malade. La quadruple fonction des universitaires, clinique, administrative, d’enseignement, et de recherche fait rire les commissions européennes. Tout faire même en 65 heures de travail c’est impossible. Ou l’on fait tout mal, ou l’on ne fait pas tout, et qui enseigne, qui cherche alors ?Je voudrais dire dès maintenant que nous sommes actuelle-ment à l’opposé de cette époque pré-Debré. Avant, la méde-cine souffrait d’être trop orientée vers la clinique pure et to-talement déconnectée des progrès des sciences fondamen-tales, génératrices des progrès futurs de la thérapeutique et de la technologie. Actuellement, nous sommes malheureu-sement tombés dans l’extrême contraire, l’étudiant suit une formation trop orientée vers les sciences fondamentales, la course de sac n’est plus clinique, elle est scientifique nous sommes dans un scientisme médical très dangereux.Imaginez que la formation de l’étudiant en médecine ne dépende quasi exclusivement que des sciences fondamen-tales, de la connaissance des molécules développées dans l’espace, de la biochimie pure. Imaginez que l’ultra-structure du moindre organite cellulaire aboutisse à faire croire aux fu-turs médecins, dont on sait que 60 % d’entre eux auront une pratique purement clinicienne et qu’ils n’utiliseront jamais plus ces connaissances de base, qu’ils sont des savants, qu’ils sont des scientifiques purs et durs. (Voir note FOLSCHEID)Joint à cela leur grande ignorance en France de l’histoire, de la philosophie des sciences et de la psychologie de la rela-tion soignants-soignés, dans une ambiance créée par un en-

seignement qui n’amène que des résultats à apprendre par cœur, sans pratiquement jamais d’apprentissage des métho-des qui ont abouti à trouver ces résultats. Ne pas savoir com-ment on raisonne, comment on crée une théorie, comment on fait et l’on mène une recherche, ne pas connaître les sour-ces de la connaissance médicale et l’origine de la pratique clinique, c’est ne faire qu’une médecine de concepts et non une médecine de soins. C’est aussi pour cela qu’un certain nombre de réformes ont été mises en place pour initier aux sciences humaines, ensei-gnement que nous avons fait dans le mépris généralisé de la plupart de nos collègues méprisant l’histoire, la psychologie, l’épistémologie, dénigrant la philosophie, comme inutiles à la médecine. Aveu d’ignorance grave et de grande bêtise. Je rappellerai cette phrase que m’avait gentiment dite le Doyen Guy Lazorthes pour me consoler de cela lorsque je commençais à enseigner dans le module de sciences humai-nes : « Mon cher ami, de tous les médecins que j’ai rencontrés, seuls ceux qui étaient cultivés et mettaient leurs connaissances au service des autres, sont devenus de grands médecins » qu’il en soit ici remercié.Les réformateurs et les grands mandarins étaient tellement occupés à enseigner les sciences fondamentales exclusives, émerveillés à juste raison de la richesse et de la rapidité des découvertes qui permettaient à plus ou moins long terme des applications efficaces et qui aboutissaient à une théra-peutique positive, que personne ne s’est rendu compte que les médecins généralistes, mais surtout les spécialistes s’éloi-gnaient complètement de la réalité clinique et oubliaient que les malades étaient exactement les mêmes qu’au temps d’Hippocrate. Toujours souffrants, inquiets, plus impatients que patients. Dans un monde où l’évolution de l’information est rapide et trop pregnante, et très mal faite, et ou un glis-sement des mœurs se fait vers un monde de victimes déres-ponsabilisées, on a fabriqué un patient plus obsédé par ses droits, que par son sens de la responsabilité, orienté vers le besoin de se plaindre contre un état coupable et qui accepte de payer, d’indemniser même la responsabilité sans faute, c’est à dire traiter par la justice ce qui devrait être seulement pris en compte par la solidarité.

Le devenir : Humain jamais trop humainCette médecine qui n’était plus humaniste vue la formation des médecins, avait de plus en plus de matériels scientifi-ques. Les praticiens de même rang qui n’avaient plus la même « culture » qu’un médecin de l’époque de Daudet et même de robert Debré, sont-ils devenus plus humains pour cela ?Ce que les patients demandent derrière leur procès, leur plainte, leur méfiance vis-à-vis des médecins qui savent, alors même qu’ils sont près à admirer leur capacité à les guérir et à les sauver, ce que les patients veulent c’est que les médecins les regardent en face, les écoutent, leur expliquent, les infor-ment. Ceci n’enlève rien au fait qu’il serait souhaitable, pour une meilleure relation médecin-malade que les patients entendent ce que les médecins leur disent, respectent un certain nombre de consignes et aient aussi si leur état le leur permet, au moins un certain sens de la responsabilité, car nous savons, mais personne ne le dit, qu’un échec thérapeu-tique est souvent dû à une erreur faite par le patient.

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Références1 - FOLSCHEID D. La question de la médicalité in « Philosophie, Ethique et Droit de la Médecine ». Thémis, PUF, Paris 19972 - FOLSCHEID D. op cité pp114-53 - PUJOL M. C’est grave Docteur ?4 - SHYrOCK rICHArD H. Histoire de la médecine moderne Paris, Colin, 1956 et « Bouleversements scientifiques et options possibles » in Sociologie de la décision, La réforme des études médicales et des structures hospi-talières, s Jamous H, Commaille J et Pons Vignon B eds. Editions du Centre National de la Recherche Scientifique, 1969

5 - DAUDET L. Souvenir des milieux littéraires : devant la douleur in Souve-nirs et Polémiques, Robert Laffont, Bouquins pp. 182-36 - DAUDET L. Ibid p 148.7 - DEBrÉ r. L’honneur de vivre. Les études médicales8 - KOUrILSKY r. Conceptions actuelles de l’enseignement médical, Problè-mes, 1962, n° 809 - BOUCHArD CH. recrutement et préparation des maîtres de l’enseigne-ment médical. Paris, Steinbel10 - DEBrÉ r. Op cité, p. 86

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disponible en mars 2013

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Enseignement de l’Orthopédie à Adélaïde (Australie)par F. Accadbled

La sélection dans les écoles de médecine varie en Aus-tralie en fonction des facultés (pouvant être privées ou pu-bliques). Le modèle classique comprend 6 années et une entrée directement après le lycée (undergraduate). Depuis le milieu des années 90 s’est développée une tendance vers un programme de 4 ans et la nécessité d’avoir au préalable une licence dans n’importe quelle discipline (post graduate). Adélaïde est restée fidèle au système traditionnel. Autrefois la sélection se faisait sur les notes obtenues en terminale mais désormais existe un examen d’entrée UMAT (Under-graduate Medicine and Health Sciences Admission Test). Les 10 % les plus performants peuvent passer une interview structurée avant d’être admis en 1ère année. Les 6 années se composent de 3 années « pré cliniques » suivies de 3 années « cliniques » durant lesquelles les étudiants sont exposés aux soins. Un examen sanctionne la fin de la 5ème année. La 6ème année n’est pas validée par un examen, bien que des propo-sitions en ce sens aient été faites récemment. Les étudiants font une rotation entre les services de médecine, chirurgie viscérale, orthopédie, gynécologie obstétrique, pédiatrie, psychiatrie et urgences. Nombre d’entre eux font également des stages de médecine générale et « rurale » dans des lieux reculés, ainsi que dans des cliniques chirurgicales.

Après la fin du 1er cycle des études médicales, tous les étu-diants doivent accomplir un internship de 1 an qui corres-pond à la succession de stages de 8 à 13 semaines dans des services de médecine, chirurgie et urgence. L’ intern est dans le service, prend les observations, assure la surveillance des patients et organise les examens complémentaires. Les mo-dalités d’accès à la formation dans une spécialité médicale dépend ensuite des collèges respectifs. La plupart des étu-diants débutent en tant que general resident avant de débu-ter une spécialité.

Jusqu’à très récemment, la formation en chirurgie débutait par un basic training composé de stages cliniques de 3 mois dans les différentes spécialités chirurgicales, les soins inten-sifs et les urgences mais aussi de cours. En pratique, le désor-mais resident est plus impliqué dans les activités cliniques même si le service reste la priorité. Il examine les patients traumatisés aux urgences et propose des conduites à tenir, fait des réductions de fracture sous sédation. Il participe dès que possible à la consultation et au bloc opératoire. Cette phase était sanctionnée par un examen écrit et au « lit du malade », avant que l’impétrant ne puisse s’inscrire dans la spécialité chirurgicale de son choix en advanced training et ainsi devenir orthopaedic registrar.

En 2008 est apparu un nouveau système de formation ap-pelé « SET » pour Surgical Education and Training dans lequel les étudiants s’inscrivent d’emblée dans la spécialité chirur-gicale souhaitée (chirurgie viscérale, plastique, vasculaire, urologie, neurochirurgie, orthopédie, OrL, pédiatrie et car-dio thoracique).

Les pré requis varient selon la spécialité mais généralement l’inscription se fait après un intership de un an et après avoir réalisé obligatoirement des stages dans la spécialité choisie et en soins intensifs. Le SET dure 5 ans.

Les étudiants doivent passer un examen en fin de 1ère année qui évalue les connaissances en anatomie, chirurgie géné-rale et orthopédie. L’évaluation est ensuite basée sur l’ac-quisition progressive des compétences. En fin de formation est organisé le final fellowship exam. Cet examen se prépare pendant environ 1 an de manière intensive. Les registrars se réunissent 2 soirs par semaine pour travailler ensemble une pathologie. Leur référence écrite principale est l’OKU (Ortho-pedic Knowledge Update), ouvrage américain en plusieurs volumes édité par l’AAOS.L’épreuve comprend une épreuve écrite de QCM et cas cliniques, une partie clinique avec examen de patients en condition de consultation et au bloc opératoire. Il s’agit d’un examen national, commun avec la Nouvelle zélande qui sanctionne ainsi la formation en Orthopédie. En 2008, le pourcentage de succès a été exactement de 50 %. Pour se présenter à cet examen, le candidat doit en être jugé capable par ses maîtres et avoir accompli un minimum de recherche dans son cursus. En cas d’échec, le candidat se représente à la session suivante. Certains (rares) n’arrivent jamais à passer cet obstacle et sont ainsi condamnés à rester service regis-trars, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent prétendre à un poste de consultant ou Praticien Hospitalier et ne peuvent non plus avoir une activité libérale. Ils restent ainsi généralement en poste dans des hôpitaux (très) périphériques et espèrent avoir à nouveau l’autorisation de passer l’examen. Quant au lauréat, il part effectuer un fellowship d’un ou 2 ans à l’étranger pour progresser dans la spécialité de son choix (rachis, Epaule, Pédiatrie…) avant de rentrer au pays et s’installer. Le registrar est en réalité un hybride d’interne et de chef de clinique. En effet, il soigne sous l’autorité de son consultant ou chirurgien senior. La décision thérapeutique appartient au consultant. Tous les registrars d’Australie du Sud (une vingtaine) se réunissent tous les vendredis pour la Bone School. L’un d’entre eux prépare la session en collabora-tion avec un consultant expert dans le sujet traité (travaillant dans le public ou privé). Il revoit la littérature, présente des diapositives et convoque des malades. Chacun est tour à tour confronté au patient, puis aux examens d’imagerie et dans les 2 cas décrit à voix haute ce qu’il recherche et ce qu’il constate. Les registrars sont de manière quotidienne assaillis de questions que ce soit en consultation, au bloc ou durant les réunions. Il n’y a pas de formation spécifique en Orthopé-die Pédiatrique, chaque registrar passe au moins 6 mois en Orthopédie pédiatrique. Leurs connaissances en orthopédie sont générales à la fois en orthopédie adulte et pédiatrique et le final fellowship exam évalue les 2.

L’Orthopédie Pédiatrique fait en Australie partie intégrante de l’Orthopédie dans son enseignement.

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Consultation avancée d’Orthopédie Pédiatrique en AustralieLa réalité réelle ou virtuelle

par B. Foster et F. Accadbled (Fig. 1)

Ces réflexions sont le fruit d’une expérience positive ces dernières décennies au cours desquelles j’ai pu offrir une assistance clinique (et psychologique) à mes confrères de l’Australie « du bush ». Cette expérience a été réciproque-ment positive.

Le concept de consultation avancée se développa lors de mon fellowship au Alfred Dupont Institute de la Fondation Nemours à Wilmington, Delaware, USA de 1980 à 1981. Nous étions chargés en tant que fellows des consultations en mi-lieu rural des états de New York, Pennsylvanie et Delaware. L’Institut Dupont ne prenait en charge que des pathologies d’Orthopédie pédiatrique. Ainsi, grâce à une consultation avancée mensuelle nous rendions un service d’intérêt col-lectif tout en assurant le programme opératoire de l’Institut. L’isolement n’était pas toujours géographique car nous inter-venions parfois dans des zones très proches des grands cen-tres mais isolées économiquement. Néanmoins, l’éloigne-ment ou la « tyrannie de la distance » a complètement évolué ces dernières années avec internet et la télémédecine.

Après mon installation au Flinders Medical Center d’Adé-laïde en 1981, un proche ami médecin généraliste Peter Jef-fries me proposa d’organiser une consultation et des vaca-tions opératoires à l’Hôpital local des Kangaroo Island (KI). A cette époque, j’étais orthopédiste généraliste et la pédiatrie n’était pas ma seule activité. Ainsi se mit en place une visite mensuelle avec bloc le matin et consultation l’après midi, les patients nécessitant une chirurgie étant opérés le mois sui-vant. A cette époque, KI comptait 2 médecins généralistes résidants. J’ai poursuivi cette visite mensuelle ces 30 derniè-res années. La complexité des cas à traiter a augmenté de même que la possibilité d’adresser les cas les plus difficiles à des collègues plus spécialisés d’Adélaïde. Actuellement, je continue des interventions standard comme canaux car-piens, hallux valgus ou arthroscopies du genou et occasion-nellement, je donne un coup de main pour une césarienne !

Il y a désormais 7 médecins généralistes sur l’île et un confrè-re orthopédiste visite 3 fois par an les patients porteurs d’arthroplasties du membre inférieur.Visiteur fréquent depuis tant d’années, j’ai maintenant la sensation de faire partie de la petite communauté. J’ai pro-bablement soigné au moins une fois un membre de chaque famille ! Le fait de passer la nuit sur place pour surveiller les opérés de la veille a certainement participé à mon intégra-tion sociale et j’y compte désormais de vrais amis. J’ai pu également devenir le correspondant privilégié des généra-listes de l’île en cas d’urgences traumatiques pour faciliter la prise en charge voire le transfert des blessés.

Parallèlement, les chirurgiens du service d’Orthopédie pé-diatrique se sont rendus disponibles pour intervenir dans toutes les maternités d’Adélaïde et examiner les nouveaux nés suspects de pathologies orthopédiques. Des consulta-tions hebdomadaires d’Orthopédie pédiatrique débutèrent au Flinders Medical Centre et au Modbury Hospital ainsi qu’au royal Adélaïde Hospital pour le rachis pédiatrique (y compris traumatique). Avec du recul, nos journées étaient chargées mais ainsi, les patients n’étaient envoyés au Wo-men’s and Children’s Hospital (WCH) qu’en cas de nécessité et, la plupart du temps, les problèmes étaient réglés en pé-riphérie. Les relations établies au cours des années facilitent et simplifient toujours aujourd’hui notre fonctionnement au WCH. Le Children’s Hopital est devenu le WCH lorsqu’il fut rejoint par le Women’s Hospital dans le quartier nord d’Adé-laïde. Un changement important est survenu dans le fonc-tionnement de l’association pour les enfants handicapés quand le centre de regency Park a éclaté en 4 satellites aux 4 points cardinaux de la ville. Une consultation a alors été organisée dans chacun des centres tous les 3 mois associant un orthopédiste pédiatre et un rééducateur. Toutes les in-terventions chirurgicales en commençant par les multisites sont réalisées au WCH.

Suite au succès de la consultation avancée à KI, j’ai été char-gé d’en organiser dans d’autres régions isolées, à Mont Gam-bier, Port Augusta, Whyalla, Mildura puis vers le centre du pays à Alice Springs. Cela fait maintenant 25 ans qu’a débuté la consultation à Alice Springs et plus récemment à Darwin, à 2300km, depuis 6 mois. Ces consultations de 3 jours 4 fois par an ont permis la formation continue des praticiens lo-caux. Initialement, ils s’agissaient de chirurgiens généralis-tes souvent étrangers qui ont pu ainsi obtenir un diplôme national de chirurgie orthopédique. Ce fut très valorisant d’accompagner et de superviser ces chirurgiens dans leur progression jusqu’à l’examen final (fellowship exam). J’ai pu observer l’acquisition de leur compétence mais également apprendre des autres notamment sur la culture aborigène, mais aussi sa pathologie (infections ostéoarticulaires chro-niques et présentation tardive de la traumatologie). Un sys-tème d’audit et de surveillance extérieure a permis de main-tenir un service de soins de qualité. Un kinésithérapeute ex-périmenté participe à tous les voyages vers Alice Springs et nous avons récemment introduit la prise en charge du pied bot par la technique de Ponseti.

Fig. 1 : Le professeur Bruce K Foster , chef du service d’Orthopédie du Children’s hospital d’Adélaide et son « fellow » Franck Accadbled à l’ori-gine et à la traduction de ce texte dissertant tous deux sur l’organisa-tion des soins dans les territoires du sud australien

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Consultation avancée d’Orthopédie Pédiatrique en AustralieLa réalité réelle ou virtuelle

par B. Foster et F. Accadbled

Il y a eu des moments très agréables (Fig. 2) et notre fellow Franck Accadbled en son temps a pu aussi apprécier l’expé-rience.

Toutes ces opportunités ont fait que le concept de « tour d’ivoire » qu’elle soit centrale ou périphérique a été détruit. Aujourd’hui nous couvrons au WCH le « couloir central » mais aussi l’ouest de Victoria et New South Wales et à l’Ouest jusqu’à Kalgoorlie. Approximativement 1/3 du continent !!! (Fig. 3)

La consultation virtuelle de traumatologie représente une autre innovation récente en évitant de longs voyages vers Adélaïde pour des contrôles de fractures sous plâtre.

Ces réflexions sur 30 ans de consultations avancées met-tent en évidence l’intérêt de ce service ainsi que la difficulté d’assurer des soins d’Orthopédie pédiatrique dans des lieux reculés.

Fig. 2 : En visite à Alice Springs, B. Foster sur la gaucheavec « fellows » et « physiotherapist »

Fig. 3 : Les provinces australiennes SA : South Australia, WA : Western Australia, NA : Northern Australia,Q : Queenslans, NSW : New South Wales, V : Victoria

31 janvier - 1er février 2013Lyon - Hôpital Femme Mère EnfantCours de formation à la méthode Ponseti

22-23 mars 2013Nancy45ème congrès du [email protected]

27-29 mars 2013Strasbourg - Palais des CongrèsLes Journées de la Sofop(Séminaire médical, paramédical et enseignement)www.mcocongres.com

17-20 avril 2013AthènesEPOS meetinghtttp://www.epos2013.gr/home.html

1-4 mai 2013TorontoPOSNA meetinghtttp://www.posna.org/meetings/anmeet/anmett.asp

13-15 juin 2013Nice- AcropolisCongrès de la SFCRhtttp://www.sfcr.fr/congres-sfcr/presentation/index.phtml

Réunions à venir

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Le réseau de chirurgie pédiatrique de Midi Pyrénéespar J.-P. Cahuzac

En mai 2011, l’ArS de Midi Pyrénées a reconnu le réseau de chirurgie pédiatrique de Midi Pyrénées et lui a donné les moyens de son existence. On peut se demander quelles ont été les raisons de cette création, les buts poursuivis, les modalités de la mise en place et les moyens retenus pour en contrôler l’efficacité.

Rappel de quelques faitsQuelques éléments vont amener à une réflexion des

chirurgiens pédiatres.En 1997, l’ADArPEF (Association des anesthésistes pédiatres) fait une analyse bibliographique des risques de l’anesthésie pédiatrique et tire deux conclusions :• Le risque est d’autant plus grand que l’enfant est plus

jeune, notamment chez les enfants de moins de 1 an et de moins de 3 ans.

• Cette société préconise le recours à une anesthésiste ayant une « compétence » pédiatrique pour tous les en-fants de ces âges.

En 1998, la Société Française de Chirurgie Pédiatrique (SFCP) fait une étude sur la démographie des chirurgiens pédiatres (définis comme ayant une activité quasi exclusive de chirur-gie pédiatrique). Il en ressort deux conclusions :• Le renouvellement des chirurgiens pédiatres n’est pas

assuré dans les 10 ans à venir.• Les chirurgiens pédiatres sont en très grande majorité

des chirurgiens hospitaliers et notamment de CHU.En 1999, la SFCP organise une table ronde sur l’activité de la chirurgie pédiatrique en France. L’étude porte sur l’analyse du PMSI des années 1997 et 1998 dans 5 régions françaises représentant 1/3 de la population française. Cette étude va permettre pour la première fois de connaître pour chaque établissement public ou privé d’une région, le nombre d’en-fants opérés, l’âge de ces enfants et la pathologie en cause. Quatre conclusions seront tirées de cette étude :• La chirurgie pédiatrique est diversifiée puisqu’elle est

composée à 50 % par la chirurgie céphalique (OrL, OPM, MF et neurochirurgie) et à 50 % par toutes les autres spécialités chirurgicales pédiatriques.

• La chirurgie pédiatrique est dispersée puisque tous les établissements font de la chirurgie pédiatrique mais à des degrés divers.

• La chirurgie pédiatrique est essentiellement réalisée par des chirurgiens non pédiatres (70 %) et le secteur privé assure 50 % de la chirurgie pédiatrique.

• La chirurgie de CHU ne représente que 30 % des actes chirurgicaux mais les GHM les plus élevés sont réalisés presque exclusivement au CHU.

Enfin entre 2003 et 2007, on a constaté au CHU de Toulouse, une augmentation du nombre d’hospitalisations dans les urgences chirurgicales pédiatriques de 12,5 % par an en moyenne, en provenance notamment des autres départe-ments.

Au total, à partir de ces données on peut penser que si on ne propose rien, la chirurgie de proximité va disparaître car la «spécialisation » de l’anesthésie pédiatrique se fera aux dé-pens des « anesthésies généralistes ».

Dès lors, les transferts d’enfants pour des cas non justifiés vers des centres pédiatriques vont augmenter mais ces cen-

tres ne pourront faire face à une trop forte augmentation d’activité en raison du faible nombre de chirurgiens pédia-tres spécialisés.Tout ceci justifie que la SFCP mette en place en 2002 un sé-minaire pour réfléchir à ce que devrait être l’organisation de la chirurgie pédiatrique au niveau national. Il sera proposé une organisation de la chirurgie pédiatrique en 3 niveaux : centre de proximité, centre de chirurgie spécialisé et centre de recours sans que les périmètres précis d’activité de ces di-vers centres ainsi que les moyens nécessaires à la réalisation de cette activité, aient été définis. Ainsi, les raisons d’un réseau de chirurgie pédiatrique sont données mais il reste encore à le définir et à le mettre en place.

Phase de réflexion sur la création d’un réseau de chirurgie pédiatrique régional

L’ArH de Midi Pyrénées en 2005, constatant la faible place de la chirurgie pédiatrique dans le SrOS, constitue un grou-pe de réflexion ayant pour but de proposer une organisation de la chirurgie pédiatrique régionale. Ce groupe comprend des chirurgiens céphaliques, des chirurgiens spécialisés (chirurgie digestive, urologique), des chirurgiens pédiatres viscéraux et orthopédistes, des anesthésistes dont certains ayant une activité pédiatrique exclusive, des pédiatres, des directeurs de clinique ou hospitaliers et des membres de la CrAM et de l’ArH. Au total, 15 membres vont se réunir 12 fois en 2 ans. Cette étape régionale est une nécessité car aucune région ne se ressemble du fait de la diversité des établisse-ments et parce que la présence d’unité de pédiatrie ou de chirurgie pédiatrique est plus liée à l’histoire locale qu’à une réflexion sur la chirurgie pédiatrique au niveau national.Ainsi seront définis :• Les buts d’un réseau :

- Favoriser l’offre de proximité pour la chirurgie des enfants. Au moins 1 centre de chirurgie pédiatrique dans le secteur privé ou public est souhaitable par département. - Sécuriser la prise en charge chirurgicale des enfants en urgence ou non. Ce gage de sécurité sous entend que chaque type de centre doit répondre à un niveau d’organisation et de moyens nécessaires à la prise en charge du type de pathologie défini pour chaque centre. - Optimiser le réseau en définissant les modalités de fonctionnement du réseau et les modalités de trans-fert des malades entre les centres tout en respectant le principe de proximité. De plus, le bureau du réseau devra recueillir les données concernant la prise en charge des enfants de chaque établissement.

• Les moyens nécessaires à la labellisation des établisse-ments ainsi que le périmètre d’activité de chaque type de centre :

- Les centres de proximité sont composé de chirur-giens non pédiatres qui peuvent opérer des enfants après l’âge de 1 an ou 3 ans (le seuil est défini préa-lablement avec chaque centre) mais il n’est jamais inférieur à 1 an. Les urgences doivent être admises 24h/24 et si elles ne peuvent être opérées sur place le transfert est as-suré par un chirurgien de l’établissement. L’établisse-ment doit mettre en place une astreinte de pédiatrie

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Le réseau de chirurgie pédiatrique de Midi Pyrénéespar J.-P. Cahuzac

24h/24 et doit organiser, identifier et sécuriser les divers secteurs où les enfants sont pris en charge. En-fin, le périmètre d’activité de chaque centre est défini avec les chirurgiens et les anesthésistes de chaque établissement. Sachant que le périmètre d’activité proposé est celui d’une chirurgie pouvant être pra-tiquée par les chirurgiens spécialistes mais non pé-diatres.- Les centres spécialisés en chirurgie pédiatrique sont composé de chirurgiens pédiatres « généralistes » ou spécialisés en chirurgie viscérale ou orthopédi-que, mais aussi de chirurgiens céphaliques plus ou moins spécialisés en pédiatrie. Ils peuvent prendre en charge les enfants de la naissance à 18 ans et leur pé-rimètre d’activité est très large seulement limité par l’absence de réanimation pédiatrique ou d’équipes pluridisciplinaires pédiatriques en cancérologie. Les établissements doivent recevoir les urgences 24h/24, organiser une astreinte de pédiatrie 24h/24 et avoir des secteurs individualisés et identifiables pour l’hos-pitalisation quelque en soit le type. Enfin, il doit exis-ter une unité médico-chirurgicale de surveillance continue pédiatrique.- Les centres de recours sont composés de chirur-giens pédiatres spécialisés en orthopédie et en chirurgie viscérale et de chirurgien céphalique ayant une activité pédiatrique prononcée. Par définition, ces centres ont une réanimation pédiatrique polyva-lente, une réanimation néonatale et doivent prendre en charge toutes les pathologies chirurgicales. Il doit exister une garde chirurgicale par spécialité et une garde pédiatrique 24h/24. Le secteur d’imagerie est accessible 24h/24. Enfin, les urgences pédiatriques sont spécifiques.

Phase de labellisation des centresEn 2007, l’ArH a mis en place un comité technique régio-

nal ayant pour but de labellisée les centres de Midi Pyrénées pouvant participer au réseau.Dans un premier temps, un questionnaire a été adressé à l’ensemble des établissements de Midi Pyrénées. Quatre thèmes étaient principalement abordés :• Précisions sur l’établissement : bassin de population,

nombre d’accouchements dans le département et dans l’établissement, distance par rapport au centre de re-cours

• Précisions sur l’activité de chirurgie pédiatrique : nombre d’enfants opérés en urgence et en chirurgie program-mée, type de pathologie en fonction de l’âge, nombre et spécificité des équipes chirurgicales et pédiatriques médicales.

• Précisions sur l’organisation de la prise en charge des enfants en urgence et en différé.

• Précisions sur les moyens que l’établissement met au service de l’enfant : charriot d’urgence, astreinte de pé-diatrie et type d’astreinte en chirurgie, secteur organisé pour les enfants en hospitalisation complète, de jour et ambulatoire, personnel para médical (nombre et quali-fication) et chirurgical (nombre et qualification) partici-pant à la prise en charge des enfants.

• En l’absence de moyens humains ou matériel ou d’orga-nisation, il était demandé si la mise à niveau était pré-vue et à quelle échéance ?

Ces questionnaires ont été adressés sous l’égide de l’ArH à tous les établissements. Tous ont répondu, ce qui a permis après analyse et demande complémentaire, de pouvoir en 2011 réunir sous l’égide de l’ArS les 23 centres de proximité labellisés sur les 33 demandes, les 4 centres spécialisés sur les 5 demandes ainsi que le centre de recours qui est dans la région Midi-Pyrénées l’hôpital des Enfants de Toulouse.Il faut noter que les centres de proximité et spécialisés ont été labellisés pour des activités chirurgicales variables. Cer-tains ont été labellisés pour toute la chirurgie pédiatrique (5/23), d’autres en chirurgie céphalique exclusive (1/23) et la grande majorité pour des activités chirurgicales « à la carte » dépendant des spécialités chirurgicales présentes dans l’éta-blissement. Il en est de même pour les centres spécialisés.Ainsi, 24 établissements ont été « labellisés » comme centres de chirurgie pédiatrique en Midi Pyrénées. L’originalité de ce réseau est liée à la « labellisation à la carte » à la fois sur le plan du type de chirurgie reconnue et sur le fait qu’un même établissement peut être à la fois centre spécialisé et centre de proximité mais pas dans la même spécialité.

Avenir du réseauPour qu’un réseau fonctionne, il y a lieu de prendre en

compte un certain nombre de faits.• Un réseau ne peut exister sans l’aide de l’ArS. Cette aide

est cependant limitée sur le plan financier à une coor-dinatrice à mi temps, ce qui semble suffisant pour l’ins-tant.

• Les établissements doivent passer obligatoirement une convention avec le réseau et avec le centre recours pour formaliser le fonctionnement.

• Il faut vérifier que les moyens humains et matériels ont bien été, ou vont être mis en place rapidement. Cela sous entend une visite sur place de tous les établisse-ments avec la possibilité de suspendre temporairement la « labellisation » donnée.

• Il ne peut y avoir de mise en place d’un périmètre d’ac-tivité pour chaque établissement sans une discussion avec l’ensemble des chirurgiens et anesthésistes de ces mêmes établissements. Le périmètre d’activité et l’âge minimum à partir duquel l’établissement prend en char-ge les enfants est propre à chaque établissement.

• Il y a lieu de mettre en place un système de commu-nication inter établissements qui permette une relation rapide et directe entre les chirurgiens et anesthésistes appartenant au réseau. Ce système doit comprendre la transmission de documents radiographiques tout en respectant la confidentialité des personnes. L’interne ne peut pas être l’intermédiaire entre les médecins spécia-listes.

• Le réseau doit mettre en place des formations, notam-ment pour les anesthésistes et le personnel para médi-cal.

• Enfin, à partir du PMSI recueillie par le réseau il faut re-chercher des indicateurs témoignant de son fonction-nement :

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Le réseau de chirurgie pédiatrique de Midi Pyrénéespar J.-P. Cahuzac

- L’âge et le périmètre d’activité sont ils respectés dans chaque établissement ?- Les transferts de malades entre les établissements favorisent-ils la chirurgie de proximité ?Quelle pathologie a-t-elle justifié d’un transfert ? Dans quelle condition médicale s’est effectué le transfert (dossiers, lettre de transfert écrite par un chirurgien) ?- Participation à la formation dans chaque établisse-ment ?

Ce réseau fonctionne depuis 1 an. A t-il répondu à nos at-tentes ?Il est trop tôt pour le dire et il faut se donner une marge de 5 ans pour tester les indicateurs mis en place.Mais pour l’instant, il a eu au moins deux effets : d’une part, l’ArS a fait connaître dans toute la région les établissements labellisés pour prendre en charge la chirurgie de l’enfant ren-forçant l’image de la chirurgie pédiatrique et d’autre part il aura permis de focaliser un certain nombre d’établissements sur le fait que faire de la chirurgie pédiatrique nécessite des moyens humains et matériels pour sécuriser cette chirurgie.

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QU’EST-CE QUE LA BIOMÉCANIQUE ?A. I. Kapandji

Isbn : 978 284023737 2 82 €592 pages882 dessins de l’auteur sur plus de 1.200 illustrationsnovembre 2011

Ce qui rend exceptionnelle l’oeuvre du Dr. Adalbert I. Kapandji, c’est qu’il a su ini-tier à la Biomécanique tous ses contemporains cliniciens. A l’aide d’un langage simple et de dessins lumineux, il a révélé à tous ceux qui étaient confrontés à la compréhension de la mécanique ostéo-articulaire humaine, les principes et

règles qui régissent les structures du vivant. C’est pourquoi de nombreuses générations d’étudiants, particulièrement du milieu médical, le considèrent comme une référence incontournable.

Cependant, en fin de carrière, loin de goûter aux charmes d’une retraite plus qu’honorable, il semble que Adalbert I. Ka-pandji ait été saisi d’un doute et qu’il se soit interrogé ainsi : « Et si au lieu d’éclairer l’esprit de mes lecteurs je l’avais obs-curci ? Aurais-je involontairement ravalé la mécanique humaine au rang de celle des rouages d’un pantin ? ».

Et, pour conjurer cette funeste inquiétude, il s’est lancé dans la réalisation d’un nouvel ouvrage dans lequel il reprend une partie de ses synthèses biomécaniques, qu’il accompagne cette fois de réflexions philosophiques sur les Sciences, et l’Être Vivant, en particulier.Il nous rappelle ainsi tout au long du livre, que sa conception de la biomécanique s’inscrit dans un univers « enchanté » où l’ordre règne sur le chaos, et aussi que le vivant est constitué d’une substance mystérieuse : le Temps.

Pr Levon DOURSOUNIAN - Hôpital Saint Antoine - Paris

PREFACE

Disponible sur notre site internet

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1. Si la Biomécanique m’était contée...!2. Introduction : la Biomécanique3. L’Utilité de l’Appareil Locomoteur4. Les Différences Fondamentales entre Mécanique et Biomécanique5. Les Différences Structurelles entre les deux Mécaniques6. L’Inscription dans le Temps7. Nous sommes des êtres à Quatre Dimensions8. La reproductibilité de l’Appareil Locomoteur9. Le Prototype des vertébrés10. Lois propres à la Biomécanique11. Le corps humain dans l’espace12. La Loi d’Économie Universelle13. Le développement embryologique14. Le Squelette...La Charpente... Le choix entre Exo et Endo-squelette15. Les Différents types d’Os constituant le squelette16. Les Différents type d’articulations17. L’Auto-conformation des Surfaces Articulaires18. Les Articulations synoviales à un axe19. Les Articulations synoviales à deux axes20. Explications sur le CArDAN21. Les Articulation synoviales à trois axes22. Explication du Paradoxe CODMAN23. Les Articulations sans axe défini, Les Arthrodies24. Les Amphiarthroses25. Le rôle Dynamique des Ligaments26. Les Muscles : Constitution27. Les Muscles : Propriétés28. Les Muscles : Fonctionnement29. Qu’est-ce que la relation d’Antagonisme-Synergie30. La Théorie des Leviers

31. Les Tendons32. Le rôle du Tissu conjonctif33. Une Science nouvelle : la Tensegrité34. Le rachis dans son ensemble35. Les caractéristiques propres du rachis Lombaire36. Les caractéristiques propres du rachis Dorsal37. Les caractéristiques propres du rachis Cervical38. Le Modèle Mécanique de rachis Cervical39. La Ceinture Pelvienne40. La Ceinture Scapulaire41. Biomécanique du carpe42. Le Tarse, Cardan Asymétrique43. Les Grandes Fonctions44. L’Examen Hippocratique de l’Appareil Locomoteur45. Pourquoi le zeugopode comporte-t-il Deux os ?46. Pourquoi la Main comporte-t-elle Cinq doigts ?47. Le Schéma Corporel48. L’Auto-réparation de l’Appareil Locomoteur49. Qu’est-ce que Les Fractals50. Le Centre de Gravité51. Le Balancement des Membres Supérieurs dans la marche et la course52. Les routines et les Algorithmes53. Les Grands Ancêtres54. La Place de la Vie dans le Monde Physique55. La vie dans l’Univers56. Mots de la FinBibliographieNotices Biographiques sur les Auteurs citésAttracteurs Étranges : Mots ClésIndex

www.livres-medicaux.com

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Des classifications de Risserou une contribution inestimable (invaluable)

par J. Sales de Gauzy

L’ossification de l’apophyse iliaque alias « le Risser » est in-dissociable du pronostic d’évolutivité des scolioses idiopa-thiques.Elle est cependant sujette à de nombreuses critiques qui rendent sa valeur très controversée. Paradoxalement, le « Risser » est toujours enseigné et reste sujet à de nombreux travaux et publications dans la littérature récente, plus de 50 ans après la publication de risser. Il nous a semblé intéressant de remonter l’histoire au travers des différentes publications faites autour du signe de risser.

La classification de Risser ?Nous n’avons pas retrouvé trace dans la littérature d’un

article princeps décrivant la « classification de Risser ». Selon nos sources, risser n’a jamais proposé de classification pour quantifier l’ossification de l’apophyse iliaque. Si nous ne sa-vons pas exactement qui est à l’initiative de la classification de risser, il semblerait qu’elle apparaisse dans les années 1960 simultanément aux Etats-Unis et en France, mais sous 2 formes différentes.Il n’existe donc pas une, mais deux classifications de Ris-ser : la française et l’américaine.Elles comportent toutes les deux 6 stades. Le stade 0 est identique et correspond à l’absence d’ossification de l’apo-physe iliaque.La classification Française divise l’apophyse iliaque en 3 tiers représentant les stades 1, 2 et 3. Le stade 4 correspond à la fusion de l’apophyse iliaque. Le stade 5 correspond à la fu-sion complète.La classification Américaine divise l’apophyse iliaque en 4 parties représentant les stades 1, 2, 3 et 4. Le stade 5 corres-pond à la fusion complète de la crête iliaque.Il est évident que la coexistence de ces 2 classifications est responsable de confusion dans la littérature, d’autant que dans la majorité des publications, la classification à laquelle les auteurs se réfèrent n’est pas détaillée dans l’article, même si on peut la supposer en fonction de l’origine de l’auteur.

Il serait logique de faire correspondre le risser 3 français avec le risser 4 américain et le risser 5 américain avec les risser 4 et 5 français. Cependant Bitan et col ont montré qu’il existait des discordances dans l’interprétation du risser qui rendent difficile une correspondance parfaite entre les 2 systèmes. Ils concluent que la classification française tend à prolonger le concept de maturation et représente mieux la croissance chez le garçon ; à l’opposé la classification américaine tend à sous-estimer la fin de la maturation et serait plus adaptée aux filles.

Critiques du « Risser »L’ossification de l’apophyse iliaque et son intérêt pour

apprécier la croissance du rachis sont l’objet d’attaque en règles depuis des décennies.En vrac : Difficultés d’analyse sur une radiographie de face, la partie postérieure de l’apophyse iliaque étant masquée par l’ilion.Des anomalies de l’ossification de l’apophyse iliaque dans 40 % des cas, qui débute parfois par le milieu, parfois simul-tanément en avant et en arrière.La radiographie de face ne permettant pas de visualiser l’en-semble de l’apophyse iliaque, d’où la proposition de faire une radio de trois-quarts.Une ossification tardive de l’apophyse iliaque, débutant alors que les 2/3 de la puberté sont déjà passés, donc sans corré-lation avec la période ou le risque d’aggravation est majeur ; d’où la proposition de séparer le risser 0 en 2 groupes, selon que le cartilage triradié est ouvert ou fermé.L’absence de corrélation entre l’âge osseux et le risser Une faible reproductibilité inter-observateur et notamment une différence d’interprétation entre radiologue et orthopé-diste dans 50 % des cas.Pour finir, la condamnation à mort est prononcée par Little et Sussman dans “The Risser Sign : A Critical Analysis” : « The risser sign is less accurate than chronologic age as a predic-tor of skeletal age and should not be used as a substitute for hand and wrist in most cases ».

Les deux classifications de Risser : à gauche (A) celle des américains, à droite (B) celle des français (d’après Bitan et col)

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Des classifications de Risserou une contribution inestimable (invaluable)

par J. Sales de Gauzy Risser (1892-1982) et ses publications

Né en 1892 à Des Moines (Iowa), Joseph risser a obtenu son diplôme de médecin en 1923 à l’Université d’Iowa. Puis il travailla comme resident au New-York Orthopedic Hospital, où il fût l’élève de russell Hibbs. Par la suite il poursuivit sa carrière à Pasadena (Californie). Ses travaux sur les scolioses qu’il poursuivit pendant plus d’un demi-siècle ont apporté une contribution majeure à la communauté scientifique. Ils peuvent être résumés en 3 dates clefs.1936. Publication dans le JBJS de « Scoliosis : its prognosis ». Dans cet article écrit en collaboration avec Albert Ferguson, et basé sur l’étude de 296 patients scoliotiques, risser ap-porte des éléments fondamentaux sur le pronostic des sco-lioses : « la scoliose s’aggrave avec la croissance ». « L’aggrava-tion est d’autant plus importante que la vitesse de croissance est élevée ». « Entre 5 et 10 ans, l’aggravation est modérée ». « En fin de croissance il n’y a plus d’aggravation ». Il signale ce-pendant que quelques cas échappent à ces règles.1947. Communication à l’American Academy of Orthopae-dic Surgeons (AAOS) de ses travaux sur le développement de l’apophyse iliaque et la croissance du rachis.1958. Publication dans le Clinical Orthopaedics de « The iliac apophysis : an invaluable sign in the management of sco-liosis ». risser décrit l’ossification progressive de l’apophyse iliaque qu’il nomme « capping » et sa fusion (« excursion ») avec l’ilion ; cependant, Il n’est pas fait mention d’une quel-conque classification. Dans cet article tout est déjà parfaite-ment décrit et l’on peut y trouver les réponses (anticipées) aux nombreuses critiques auxquelles sera soumis le signe de risser par la suite. risser mentionne entre autre : que l’ag-gravation de la scoliose est majeure avant l’ossification de l’apophyse (qui deviendra le risser 0), que quand l’ossifica-tion de l’apophyse iliaque est complète, (risser 3 français et 4 américain) le risque d’aggravation de la scoliose devient très faible, que l’ossification de l’apophyse peut être limitée, ne pas s’étendre sur le versant médial, et débuter sa fusion avec l’ilion vers le milieu de la crête iliaque, ce qu’il nomme « short excursion ». Ce signe qui pourrait correspondre au risser 4 français est également contemporain de la fin de croissance du rachis. L’article de Risser très dense et précis est à lire en inté-gralité ; son accès est facile car il a été réédité en 2010 dans le clinical Orthopaedics (n° 468 : 646-653).

Une proposition, quelques réflexions et une conclusion• Il existe 2 classifications de risser, qui ne sont pas super-

posables. Pour éviter la confusion actuelle, une harmo-nisation semble nécessaire. La SOFOP pourrait se pen-cher sur cette question.

• L’étude de la littérature sur une période d’une cinquan-taine d’années, montre que les articles les plus anciens sont régulièrement cités, mais parfois à mauvais escient

et semblent souvent avoir été survolés (pour ne pas dire non lus) par les auteurs des citations, qui ne font que reprendre des citations d’articles qui citent un auteur qui cite etc… On peut faire un parallèle avec Le jeu du « téléphone arabe » qui consiste à dire une phrase à son voisin, qui la répète à son voisin, qui la répète etc… le dernier répétera une phrase souvent très différente de l’originale, ce qui amuse beaucoup l’assistance.Il en est de même de l’article scientifique qui au fil du temps peu perdre ainsi toute sa crédibilité et sa valeur alors qu’il reste un article fondamental pour qui prend la peine de le lire. Ceci doit être un encouragement à lire ou à relire les articles fondamentaux, même des dizai-nes d’années après leur parution, ce d’autant que l’ac-cès à ces articles est grandement facilité par internet.

• L’évolution tant sur la forme que sur le fond des articles scientifiques, de la publication de risser de 1936 aux publications les plus récentes, est également intéres-sante, mais cela est un autre débat. Cependant on peut se demander si les 2 articles de risser basés sur une ob-servation minutieuse et une expérience exceptionnelle auraient passé la barrière actuelle de la statistique et de l’evidence based medecine, et pourtant !

• Il faut lire l’article de risser, et d’une manière générale, tous les auteurs auxquels on se réfère.

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ABÉCÉDAIRE : PROPoster, Résumé, présentation OraleO. MouterdeIsbn : 978 284023 841 6106 pagesnovembre 2012

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