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UN DIALOGUE INTERGÉNÉRATIONNEL SUR LE MODÈLE COOPÉRATIF

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Claude Béland, Jean-Emmanuel Bouchard,

Jean-Pierre Girard

UN DIALOGUE INTERGÉNÉRATIONNEL SUR LE MODÈLE COOPÉRATIF

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Conception de la couverture : Gianni CacciaIllustration de la couverture : © Belinda Pretorius/Shutterstock.comMise en pages : Yolande Martel

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Béland, Claude, 1932-

Un dialogue intergénérationnel sur le modèle coopératif

isbn 978-2-7621-3500-8 [édition imprimée]isbn 978-2-7621-3501-5 [édition numérique PDF]isbn 978-2-7621-3502-2 [édition numérique ePub]

1. Coopératives – Québec (Province). 2. Coopération – Québec (Province). 3. Coopératives. 4. Coopératives – Aspect social. I. Bouchard, Jean-Emmanuel, 1990- . II. Girard, Jean-Pierre, 1958- . III. Titre.

hd3450.a3q8 2012 334.09714 c2012-942012-3

Dépôt légal : 3e trimestre 2012 Bibliothèque et Archives nationales du Québec

© Groupe Fides inc., 2012

La maison d’édition reconnaît l’aide fi nancière du Gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour ses activités d’édition. La maison d’édition remercie de leur soutien fi nancier le Conseil des Arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC). La maison d’édition bénéfi cie du Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres du Gouvernement du Québec, géré par la SODEC.

imprimé au canada en septembre 2012

remerciements

Claude Béland et Jean-Emmanuel Bouchard se sont engagés sans réserve dans ce dialogue. Sans cette participation généreuse, ce livre n’aurait vu le jour. Qu’ils en soient chaleureusement remerciés ! Je salue également la collaboration de Franklin Assoumou-Ndong pour la rédaction d’un texte inédit sur le cas le plus important de dé-coopérativisation au Canada depuis des décennies.

Jean-Pierre Girard

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Introduction

La proclamation de 2012 Année internationale des coopératives par l’Organisation des Nations Unies est une formidable occa-sion de réfl échir sur l’apport de ce modèle unique d’entreprise dans notre société et, plus globalement, à l’échelle mondiale. Après tout, n’est-ce pas la première fois dans son histoire que l’ONU souligne ainsi la contribution d’un modèle d’aff aires ?

Cela tombe sous le sens : ainsi que l’exprime le Secrétaire général Ban Ki-moon, « la coopérative est un rappel à la com-munauté internationale qu’il est possible de concilier viabilité économique et responsabilité sociale. Se fondant tout particu-lièrement sur la notion de valeurs, les coopératives ont montré qu’elles constituaient un modèle commercial robuste et viable, susceptible de prospérer même pendant les périodes diffi ciles. Ce succès a contribué à empêcher de nombreuses familles et communautés de sombrer dans la pauvreté. »

À la suite de la crise de 2008, de l’explosion de la bulle fi nancière et de la crise des fi nances publiques, les deux mythes fondateurs de la modernité, à savoir la croissance économique sans limites et l’État-providence sans limites, tiennent de moins en moins la route. Étant donné que la promesse d’un

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progrès sans limites et sans fi n est abandonnée, sauf dans quelques cercles de partisans inconditionnels du néolibéra-lisme, on relève un intérêt de plus en plus marqué pour un avenir orienté vers le développement durable, un commerce plus équitable, la responsabilité partagée par tous, la recherche d’un meilleur équilibre Nord-Sud, on est prêt à reconnaître que « les citoyens sont des constructeurs de cités, non des receveurs de services », comme dit Jacques Grand’Maison. Dès lors, n’est-on pas justifi é de prôner ce genre de modèle d’aff ai-res dans les échanges d’idées concernant l’édifi cation d’un monde meilleur ? L’organisation coopérative n’est-elle pas porteuse de sens, du fait qu’elle s’inscrit dans la continuité et qu’elle respecte le milieu qui l’a vue naître ? Du fait aussi qu’elle transcende l’individualisme eff réné, les valeurs matérialistes, la cupidité ?

Au lieu de réfl échir chacun isolément sur le sujet, pourquoi ne pas le faire en groupe en confrontant les valeurs, les sensi-bilités, les perceptions de personnes qui toutes font valoir les mérites du modèle, mais qui appartiennent à diff érentes géné-rations ? N’est-ce pas là un excellent moyen de dégager des éléments de continuité ou de renouveau ? Cela permettrait de mettre en évidence l’existence de ponts ou de fractures entre les générations en ce qui concerne la manière de concevoir les coopératives.

Dans le fond, entamer un dialogue intergénérationnel sur la coopération, c’est, dans une certaine mesure, retracer l’his-toire du développement coopératif. Une histoire qui a com-mencé il y a près de 170 ans à à Rochdale, une ville d’Angleterre qui a participé à la révolution industrielle et, si on se limite au

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9Introduction

Québec, il y a environ 110 ans, avec la création de la première caisse Desjardins à Lévis. En défi nitive, depuis leur apparition au xixe siècle, les coopératives ont subi diverses infl uences, elles se sont adaptées et transformées, en continuant de défen-dre des principes d’action tels que la démocratie, elles sont demeurées une association de personnes plutôt que de capi-taux et, par conséquent, elles ont toujours donné la primauté à la satisfaction des besoins des membres plutôt qu’à la recher-che du rendement sur le capital investi. Les promoteurs, les mouvements sociaux qui contribuent à son développement changent aussi, mais il y a constamment un noyau d’hommes et de femmes désireux de faire des aff aires, mais soucieux également d’écarter le gain pécuniaire destiné à une minorité ou, en d’autres termes, de créer de la richesse plutôt que des riches.

Le père de Claude Béland, Benjamin, a participé à la fon-dation de la caisse d’Outremont et a longtemps été dirigeant bénévole à l’Union des caisses de Montréal, qui a été à l’origine de la Fédération des caisses Desjardins de Montréal et de l’Ouest du Québec. Ainsi, le monde de la coopération que Claude Béland découvre au début des années 1940 diff ère grandement de celui que l’on connaît maintenant, de celui dans lequel s’est investi Jean-Emmanuel Bouchard, qui a fait la connaissance des coopératives en milieu scolaire à la fi n des années 2000. Dans les années 1940, la technologie n’avait pas l’importance qu’elle a aujourd’hui, les réseaux sociaux du type Facebook et Twitter, avec leur formidable capacité à infl uencer et à mobiliser les gens, ne faisaient pas partie de la vie quoti-dienne. L’économie n’était pas non plus mondialisée.

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Il y a 60 ans, l’Église catholique régnait non seulement sur les aff aires religieuses, mais aussi sur le milieu de l’enseigne-ment, comme peut en témoigner Claude Béland, qui a étudié au Collège Brébeuf, sur celui des services de santé et même, dans une certaine mesure, sur le monde politique. Qui n’a pas déjà entendu l’expression : « L’enfer est rouge, le ciel est bleu », qui refl ète la sympathie du clergé à l’égard du parti de l’Union nationale de Maurice Duplessis (la couleur bleue) et son oppo-sition au Parti libéral (la couleur rouge) ? En outre, l’Église était favorable aux coopératives, car elle y voyait un contre-poids au capitalisme sauvage et au socialisme. Celles-ci étaient conformes à la doctrine énoncée dans l’encyclique Rerum Novarum de Léon XIII. À la fi n des années 1930, la création à Montréal de La Familiale et d’autres coopératives de consom-mation ne marquait-elle pas la volonté de leurs fondateurs d’assurer aux Canadiens français un meilleur contrôle de leur économie, de les rendre maîtres de leur destin ! En raison de la multiplication des coopératives dans le domaine forestier, de l’habitation, de la consommation, la période allant de 1937 à la fi n de la Seconde Guerre mondiale est d’ailleurs considérée comme l’âge d’or de la coopération au Québec !

On connaît la suite du parcours de Claude Béland : il a exercé son métier d’avocat, a assumé la direction générale de la Fédération des caisses d’économie et, de 1987 à 2000, la présidence du Mouvement Desjardins, sans compter de multi-ples autres fonctions, dont celles de président du Conseil de la coopération du Québec. Moins connue est sa carrière parallèle d’enseignant de la coopération au sein de divers programmes universitaires, qui lui a donné très souvent l’occasion d’entrer

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11Introduction

en rapport avec des personnes avides de mieux connaître cette forme d’organisation et qui l’a amené à s’interroger sur les fondements de la coopération. En résumé, une connaissance profonde de la coopération et de ses racines, étendue sur plu-sieurs décennies. Sans compter le fait d’avoir été, sur la scène internationale, président de l’Association internationale des banques coopératives ou membre du conseil d’administration de l’Alliance coopérative internationale, sans compter non plus les multiples conférences prononcées ou séjours eff ectués en divers endroits dans le monde.

En ce qui me concerne, ce sont surtout les mouvements alternatifs procédant de la mentalité peace and love qui, à la fi n de la décennie 1970, m’ont familiarisé avec le monde des coopératives même si j’avais eu une première expérience à la caisse scolaire de mon école primaire à LaSalle en 1966-1967. Les acteurs et les actrices des coopératives d’aliments naturels et des coopératives de travail ou d’habitation – la révolution féministe était déjà en cours – vivaient souvent en marge de la société de consommation ou la contestaient – manger autrement, travailler autrement –, et appliquaient toujours ce modèle unique de démocratie économique que constitue la coopérative. Ces organisations, appartenant à ce que l’on appelait au début des années 1980 les mouvements alternatifs, poursuivaient des idéaux – en quelque sorte intemporels et en apparence utopiques – de démocratie directe et délibérative, de république et d’économie coopératives. Le capital au service de l’être humain, et non pas l’inverse. On ne sera pas étonné d’apprendre que, dans ces milieux, l’effi cacité économique

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n’était pas toujours au rendez-vous, mais que les débats, eux, l’étaient toujours !

Après l’obtention de ma maîtrise en coopération, faisant partie de la troisième cohorte diplômée de l’Institut de recher-che et de l’éducation pour les coopératives et les mutuelles de l’Université de Sherbrooke (IRECUS), j’ai travaillé une dizaine d’années dans le milieu coopératif, notamment à la direction générale de la Confédération québécoise des coopératives d’habitation, puis me suis consacré à temps plein à la recherche universitaire sur les coopératives et, depuis 2001, j’ai le statut de consultant, avec une très grande variété de mandats au Québec et à l’étranger. J’ai aussi le plaisir d’enseigner la coo-pération depuis 1989 ici et en Afrique. Ma participation au Sommet mondial des jeunes coopérateurs en Pologne en 1985 m’a familiarisé avec les coopératives des autres pays et m’a amené à vouloir en apprendre plus sur la façon dont des hom-mes, des femmes, des groupes d’individus de croyances et de cultures diff érentes appliquent le modèle d’aff aires collectif. J’étais aussi témoin à cette époque des dernières manifesta-tions des mouvements coopératifs contrôlés par les partis communistes. L’organisation de missions d’études, l’accompa-gnement d’étudiants depuis un peu plus d’une dizaine d’an-nées, les mandats de consultation à l’étranger et le fait d’être membre du conseil d’administration d’un organisme affi lié à l’Alliance coopérative internationale (ACI), l’International Health Co-operative Organization ont accru mes connaissan-ces sur les coopératives, m’ont mis à même d’apercevoir les progrès et les transformations survenus, mais aussi parfois, hélas ! de noter certains reculs.

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13Introduction

Jean-Emmanuel a fait un apprentissage accéléré de la coopération, dans un premier temps à la coopérative en milieu scolaire du Collège Maisonneuve, communément appelée Coopsco, puis à Coopérative UQAM. Depuis 2011, il préside la Fédération québécoise des coopératives en milieu scolaire, ce qui l’a mis en relation avec le Conseil québécois de la coo-pération et de la mutualité et la Fondation d’éducation à la coopération et à la mutualité. Il a aussi eu l’occasion de parti-ciper à un stage organisé en Amérique du Sud par SOCODEVI et à une rencontre de l’ACI au Mexique, puis, récemment, de décrire aux Saskatchewanais l’expérience remarquable du réseau Coopsco.

Engager un dialogue intergénérationnel sur les coopérati-ves, c’est donc accepter d’échanger, de réfl échir, de découvrir, d’apprendre, de revenir sur des idées. Les trois participants à l’exercice ont d’emblée accepté les règles de discussion qui ont été tracées au moment de la conception de ce livre. Ces règles consistent à être ouverts aux idées des autres et à se livrer à un échange raisonné. De multiples idées ou références plus poin-tues ont été exprimées au cours de nos séances de travail. Nous avons introduit des encadrés qui ont pour but d’assurer la fl uidité de l’échange et d’aider le lecteur qui le désire à appro-fondir le sujet en le munissant de références à des sites Internet pertinents. Nous rappelant qu’il importe de connaître le passé pour ne pas répéter les erreurs déjà commises, nous avons fait une large place aux références historiques.

Même si nous avons convenu d’organiser la réfl exion sur les coopératives autour de grands thèmes, de principes et de valeurs défi nissant ce que l’on appelle la déclaration d’identité

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coopérative (DIC), inévitablement des idées ou des concepts se trouvent répétés sous des formes diff érentes. Par exemple, la notion de participation peut être abordée du point de vue des assemblées générales et aussi du point de vue fi nancier, ainsi que le précise le troisième principe de la DIC. De plus, les coopératives sont loin d’évoluer en vase clos, elles s’inscri-vent dans les mouvements sociaux ou font face à d’importants enjeux de société. Cela nous a amenés parfois à en parler. Dans le fond, nous ne pouvions faire abstraction des liens existant entre coopératives et société, car les coopératives sont des organisations qui font partie d’un monde en devenir, un monde que l’on aimerait voir servir de nobles aspirations plutôt que l’avidité et la cupidité.

Jean-Pierre Girard

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Histoire des coopératives ou de la coopération au Québec, l’infl uence

de l’Église catholique, etc.

Claude Béland (CB) Je crois qu’au départ il faut distinguer l’histoire de la coopération et celle des coopératives.

Le coopératisme s’inscrit dans la manière de voir des huma-nistes qui veulent créer des sociétés égalitaires et solidaires plutôt que des sociétés fondées sur l’individualisme. Il y a eu dans le passé, et encore de nos jours, opposition entre politique individualiste et politique associative ou collective. Pour peu que tu examines la question, tu découvres que l’idée d’asso-ciation remonte à une époque très éloignée de l’histoire.

L’Antiquité a fait prévaloir l’orientation individualiste. D’un côté, les rois, les empereurs, et de l’autre, le peuple. Il faudra attendre jusqu’au xviiie siècle pour qu’apparaisse la tendance civilisatrice. Cela ne veut pas dire que, dans les temps les plus reculés, il n’y avait pas de forme d’organisation collective. Ainsi, des nomades caravaniers avec leurs chameaux s’asso-ciaient en vue de se protéger contre le vol ou la mort de leurs

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chameaux. Les caravaniers s’engageaient à dédommager le propriétaire en cas de perte. (Sans le savoir, on faisait de l’assu-rance !) On en est peu à peu venu à mettre de l’argent de côté pour assurer l’avenir.

Jean-Pierre Girard (JPG) Tout à fait ! Ici au Québec, ce courant civilisateur, celui qui défend l’idée de coopération subit fortement l’infl uence de l’Église catholique et des valeurs qu’elle prône, du moins à une certaine époque.

Jean-Emmanuel Bouchard (JEB) Je crois que l’on peut aussi faire un parallèle avec d’autres pays, notamment avec l’Espagne. Arrêtons-nous un moment sur le cas du père Arizmen diarrieta, un prêtre espagnol qui a joué un rôle de premier plan dans le développement du mouvement coopératif dans le Pays Basque.

Le père Don José Maria Arizmendiarrieta (1915-1976) et

l’expérience exceptionnelle de Mondragón (Espagne)

Prêtre-ouvrier républicain qui cherchait dans la région du Pays Basque espagnol une alternative au développement économique inégalitaire, opposée à la fois à la dictature franquiste et aux révolutionnaires, le père Don José Maria Arizmendiarrieta, crée en 1943 dans la municipalité de Mondragón une école professionnelle.

En 1955, des anciens élèves de cette école reprennent une entreprise en diffi culté, à partir de laquelle ils créent la coopéra-tive Ulgor, acronyme formé des initiales des cinq fondateurs. Ulgor, devenue ultérieurement Fagor, est alors une entreprise coopérative qui vend des unités de chauff age électrique.

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17Histoire des coopératives au Québec

En 1958, les salariés associés d’Ulgor créent un organisme de prestations sociales, Lagun Aro, car ils n’ont pas accès au système mis en place par l’État espagnol. Simultanément, de nouvelles petites coopératives voient le jour dans le sillage d’Ulgor. En 1959, le père Arizmendiarrieta suscite la création d’une caisse de crédit, la Caja Laboral Popular, afi n de permettre à ces nouvelles petites coopératives d’accéder à un crédit que leur refusent les banques. La suite est celle de la constitution d’un complexe coopératif unique en son genre.

En 2012, ce qui s’appelle désormais simplement Mondragón œuvre dans quatre grands secteurs : la fi nance, l’industrie, la distribution et la connaissance. Devenu le plus important groupe industriel du Pays Basque, il occupe le septième rang en Espagne. Le groupe compte 83 000 employés dont 85 % sont des membres coopérateurs. Quelque 9000 élèves fréquentent ses institutions. Quatre grands principes sont au cœur de l’action du groupe :

la coopération ;la participation ;la responsabilité sociale ; l’innovation.Dans le bel environnement vallonné de cette région du nord de

l’Espagne, des milliers de personnes visitent chaque année cette coopérative exceptionnelle.

<www.mondragon-corporation.com/FR/Introduction.aspx><www.alternatives-economiques.fr/mondragon_fr_art_223_31275.html>

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CB Le message du prophète Jésus de Nazareth a certai-nement nourri le courant civilisateur. Les valeurs judéo- chrétiennes sont toujours présentes de nos jours. Comme tu le mentionnes, Jean-Pierre, ce sont ces valeurs qui ont infl uencé le fondateur des caisses populaires au Québec. Alors qu’Alphonse Desjardins était sténographe à la Chambre des communes à Ottawa, il a entendu un député raconter l’histoire d’un de ses commettants qui avait emprunté 150 dollars à un prêteur qui avait réclamé des intérêts de 5000 dollars ! L’avocat qui avait plaidé la cause devant les tribunaux avait fait valoir que c’était de l’usure. Le juge avait conclu qu’aucune loi n’empê-chait d’exiger un taux élevé et il avait donc obligé l’emprunteur à payer ! Cela va à l’encontre des valeurs d’Alphonse Desjardins.

Alphonse Desjardins voyait également des agriculteurs perdre leur ferme à cause d’un endettement trop élevé. Il a décidé de trouver une solution. Il s’est rendu à la bibliothèque du Parlement, à Ottawa, et y a trouvé un livre écrit par un des fondateurs et le premier président de l’Alliance coopérative internationale (ACI), Henry W. Wolff , People’s Bank. Désireux de s’informer davantage, Desjardins a écrit à des personnes engagées dans la mise en place de coopératives fi nancières en Europe. S’inspirant de l’action de Raiff eisen en Allemagne et de Luzatti en Italie, il a trouvé une formule convenant au Québec : une coopérative d’épargne et de crédit dans laquelle l’emprunt se fait à partir des épargnes des membres, sans responsabilité solidaire de la part de l’ensemble des membres, comme cela existait dans certaines coopératives européennes.

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Introduction 7

1 Histoire des coopératives ou de la coopération au Québec, l’infl uence de l’Église catholique, etc. 15

2 Motivation à créer des coopératives et stratégies de développement 48

3 L’appartenance du membre à sa coopérative 56

4 Les assemblées générales des coopératives 72

5 Les principes coopératifs 76

6 Les valeurs des coopératives 124

7 2012, Année internationale des coopératives 137

8 Les coopératives et les grandes tendances de la société 140

9 Les coopératives en 2025 150

Table des matières

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La proclamation de , année internationale des coopératives par l’Organi-sation des Nations unies, est une formidable occasion de réfl échir sur l’apport de ce modèle unique d’entreprise dans notre société et, plus globalement, à l’échelle mondiale. Au cœur de la relance économique du Québec, qu’elles portent le nom de coopératives de services de proximité ou de coopératives de solidarité, ces organisations démontrent toujours une grande souplesse quant aux besoins des diverses communautés.

Émaillé de nombreux exemples de coopératives à l’avant-garde de l’innova-tion, ce livre propose un partage d’idées basé sur un dialogue intergénérationnel de trois personnes séparées par l’âge et nécessairement par leur expérience, mais éprouvant le même intérêt à l’égard de la coopération. Claude Béland, qui a présidé le Mouvement Desjardins durant ans, enseignait les fonde-ments de l’action coopérative dès les années . Premier directeur général de la Confédération québécoise des coopératives d’habitation, à la fi n des années , Jean-Pierre Girard a multiplié les activités de recherche et d’interven-tion sur les coopératives de solidarité et de santé. Président étudiant de la Fédé-ration québécoise des coopératives en milieu scolaire (le réseau COOPSCO) depuis , Jean-Emmanuel Bouchard compte déjà à son actif une mission coopérative au Pérou et la fréquentation des congrès de l’Alliance coopérative internationale.

Engager un dialogue intergénérationnel sur les coopératives, c’est donc accepter d’échanger, de réfl échir, de découvrir, d’apprendre, de revenir sur des idées. Les trois participants à l’exercice ont d’emblée accepté les règles de dis-cussion qui ont été tracées au moment de la conception de ce livre. Ces règles consistent à être ouvert aux idées des autres et à se livrer à un échange raisonné.

Un dialogue intergénérationnel sur le modèle coopératif

www.groupefi des.com

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