quarante ans de dialogue : évolution des relations politico
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Quarante ans de dialogue : évolution des relationspolitico-diplomatiques entre la France et la Chine
(1964-2007)Qibin Hou
To cite this version:Qibin Hou. Quarante ans de dialogue : évolution des relations politico-diplomatiques entre la Franceet la Chine (1964-2007). Histoire. Université Paul Valéry - Montpellier III, 2014. Français. <NNT :2014MON30009>. <tel-01077902>
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REMERCIEMENTS
Je tiens à exprimer ma gratitude à Monsieur le Professeur Antoine COPPOLANI pour avoir
assuré la direction de ma thèse durant ces dernières années. Merci pour ses enseignements précieux,
ses conseils constructifs et ses encouragements appréciés. Je n’aurais jamais eu la motivation, le
courage et la capacité de réaliser un tel travail sans l’appui de mon directeur de recherche.
Je voudrais aussi remercier Professeur Maurice VAÏSSE, le Professeur François DAVID et
le Professeur Patrick DOAN, membres du jury, pour accepter de lire et d’évaluer mon travail.
J’adresse également mes remerciements aux professeurs de CRISES et de l’école doctorale
de l’UPV qui nous donnent des séminaires et conférences excellents.
J’exprime enfin un grand merci à mes parents qui me soutiennent depuis toujours. Sans leur
encouragement, ce travail n’aura it jamais pu aboutir.
D"
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« The French, - well the French are the people, it seems to me, who can understand and
have understood the real Chinaman and the Chinese civilization best. »
(Je crois que ce sont les Français qui ont le mieux compris les Chinois, qui sont le plus
aptes à apprécier la civilisation chinoise.)
Ku Hung-ming
The spirit of the chinese people
1914
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REMARQUES PRELIMINAIRES
Les caractères chinois sont sous leur écriture simplifiée, leur transcription est en pinyin.
Les patronymes chinois sont cités selon l’usage, le nom de famille se plaçant avant le prénom.
Le terme « République populaire de Chine », régulièrement utilisé dans ce travail, a souvent
été abrégé en « Chine » ou « RPC » pour éviter les répétitions.
Le terme « Parti communiste chinois », régulièrement utilisé dans ce travail, a souvent été
abrégé en « PCC » pour éviter les répétitions.
Le terme «République de Chine (Taïwan)», régulièrement utilisé dans ce travail, a souvent été
abrégé en « Taïwan » pour éviter les répétitions.
F"
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RÉSUMÉ
Title: A dialogue over forty years: The Evolution of Sino-French relations from 1964 to 2007
The purpose of this thesis is to investigate which factors, internal and external, influence the
evolution of Sino-French relations since 1964. France being the first occidental country that
recognized the new China in 1964, the Sino-French relationship is considered a priority of French
government’s Asian policies. And it’s the same situation for the Chinese government. As the
international situation is always changing, this relationship is not the same as forty odd years ago.
The main purpose of this research is to understand such questions as: How did these two
governments decide to establish this relationship in 1964? What are the changes of this bilateral
relationship during the last four decades? Which factors are the reasons of those changes? How the
international society influences this relationship, and in contrast? Etc.
The data used for this study have been collected through published official documents,
interviews, and academic works. I chose the period from 1964 to 2007 in order to limit the field of
my work. And I divide the thesis into five parts in chronological sequence.
The conclusion will be drawn that the development of the relationship between China and
France depends not only on the national interests of the two countries but also on the historical
context of the international society. Internal factors like government alternation, political reform,
external factors like the cold war, the regional interests of the United-States and the European
integration, all of them influence the Sino-French relations, both positively and negatively.
Keywords: Sino-French relations, diplomatic history, 1964 to 2007, international relations.
G"
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RÉSUMÉ
Titre : Quarante ans de dialogue : Evolution des Relations politico-diplomatiques entre la
France et la Chine (1964-2007)
Le but de cette thèse est de trouver les éléments, internes ou externes, qui influencent les
relations politico-diplomatiques entre la France et la Chine depuis 1964. Comme premier grand
pays occidental qui reconnaît la Chine en 1964, les rapports privilégiés avec Beijng (Pékin) sont
devenus l’un des trois grands axes de la politique asiatique de la France. Et du côté chinois, les
dirigeants chinois sont aussi attentifs à cette relation bilatérale. Puisque le contexte international ne
cesse pas d'évoluer durant les quatre dernières décennies, les relations sino-françaises se
développent aussi. Face à cette période, plusieurs questions concernées sont posées : Pourquoi les
deux gouvernements décident d’établir les relations officielles en 1964 ? Quels sont les
changements de cette relation bilatérale durant la dernière quarantaine d’années ? Quelles sont les
raisons de ces changements ? Comment le contexte international et les politiques extérieures des
deux pays ont influencé cette relation ? Etc.
Les sources que l'on étudie sont des documents officiels publiés (du côté chinois ainsi que du
côté français), des notes d’interviews avec les personnes du milieu diplomatique chinois, des
mémoires des diplomates et des ouvrages académiques. J’ai choisi la période de 1964 à 2007
comme le fond général de cette recherche et j’ai divisé le texte en cinq parties principales dans
l’ordre chronologique.
Dans la conclusion est effectuée une synthèse afin d’illustrer comment les relations sino-
françaises se développent depuis 1964, sous les influences internes et externes: l’alternance du
gouvernement, réformes politiques et économiques, géopolitique régionale et le contexte
international.
Mots-clés : relations sino-françaises, histoire diplomatique, 1964-2007, relations
internationales.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION ............................................................................ 9
CHAPITRE I RELATIONS EXTERIEURES DE LA NOUVELLE
REPUBLIQUE CHINOISE DE 1949 A 1964 .............................. 17
I-1 LA NOUVELLE REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET SA POSITION
INTERNATIONALE DE 1949-1964 .................................................... 19
I-2 LA POLITIQUE EXTERIEURE DE LA RPC DE 1949 A 1964 ........... 29
CHAPITRE II DE L’OPPOSITION AU RAPPROCHEMENT :
RAPPORTS ENTRE LA CHINE POPULAIRE ET LA FRANCE AVANT
1964 .................................................................................................. 37
II-1 OPPOSITION ENTRE BEIJING ET PARIS DANS LES CONFLITS D’INDOCHINE,
DE COREE ET DE LA DECOLONISATION ............................................ 38
II-2 RAPPROCHEMENT DE LA RPC ET LA FRANCE .......................... 56
CHAPITRE III LA RECONNAISSANCE DE LA REPUBLIQUE
POPULAIRE DE CHINE PAR LA FRANCE............................. 88
III-1 LA SOUVERAINETE ET LE PROBLEME DE TAÏWAN ................... 90
III-2 UNE POLITIQUE SOUPLE A PROPOS DE TAÏWAN ....................... 98
III-3 LES REACTIONS INTERNATIONALES APRES L’ANNONCE CONJOINT DU
COMMUNIQUE FRANCO-CHINOIS .................................................. 111
CHAPITRE IV POINT DE DEPART DES RELATIONS SINO-
FRANÇAISES .............................................................................. 121
IV-1 LES RELATIONS SINO-FRANÇAISES 1964-1973 ..................... 123
IV-2 RENFORCEMENT DES RELATIONS POLITIQUES BILATERALES (1969-1974)
..................................................................................................... 150
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IV-3 LA POLITIQUE D’OUVERTURE CHINOISE ET LA DIPLOMATIE ECONOMIQUE
FRANÇAISE (1974-1981) .............................................................. 166
CHAPITRE V LES RELATIONS FRANCO-CHINOISES SOUS LA
PRESIDENCE DE FRANÇOIS MITTERAND (1981-1994)... 210
V-1 LES RELATIONS BILATERALES ENTRE 1981 ET 1989............... 212
V-2 DIVERGENCES ENTRE BEIJING (PEKIN) ET PARIS ................... 223
V-3 RECONCILIATION DES DEUX GOUVERNEMENTS (1993-1994). 239
CONCLUSION............................................................................. 291
ANNEXE ....................................................................................... 311
BIBLIOGRPHIE .......................................................................... 359
PARTIE FRANÇAISE................................................................. 360
PARTIE CHINOISE .................................................................... 373
PARTIE AMERICAINE .............................................................. 382
TABLE DES MATIERES............................................................ 384
9
INTRODUCTION
10
Le sujet de cette thèse couvre un champ d’étude extrêmement étendu. Comme
deux vieilles civilisations de cette planète, si la première communication entre la France
et l’Empire du milieu avait commencé il y a plus de sept siècles, quand le premier
Chinois arriva en France durant la Guerre de Cent ans1 en 1287, l’histoire des relations
diplomatiques entre ces deux pays peut remonter en 1848. A cette époque- là, Charles de
Montigny, le premier diplomate français qui ait exercé les fonctions de consul en Chine,
arriva à Shanghai en janvier 1848. Et en avril 1849, il obtint, du gouvernement de Qing,
qu’un terrain de 66 hectares serait cédé au gouvernement français comme concession
pour l’usage des commerçants de la France qui viendraient s’établir et fonder des
comptoirs en Chine. Ensuite, la France possédait successivement des concessions à
Tianjin, Hankou et Guangzhou (Canton) à la fin du XIXème siècle.
Malgré cette longue histoire des rapports sino-français, peu d’ouvrages
académiques sur les relations entre les deux pays sont publiés en Chine, surtout dans le
domaine de l’histoire diplomatique. En espérant combler cette lacune, je choisis cette
relation bilatérale comme sujet de ma recherche doctorale e t j’essaie d’élaborer une thèse
qui expliquera d’une manière systématique et synthétique cette relation dans le cadre de
l’histoire contemporaine.
Je me suis affronté à des problèmes tels que la délimitation du sujet. En effet, je
me suis demandé quelle époque à choisir pour ma recherche. Le choix est porté sur
l’étude des relations contemporaines entre la France et la Chine, en mettant en valeur les
dates importantes de l’histoire diplomatique des deux pays. Puisque la « Chine » sur
laquelle on travaille dans cette thèse indique la République populaire de Chine, j’ai
décidé naturellement de partir de l’année 1964, la date de l’établissement des relations
diplomatiques entre la France et la RPC. Comme le Professeur Maurice Vaïsse l’a
mentionné dans son ouvrage, c’est juste à partir de cette époque- là que « la Chine
s’enferme dans la dénonciation de la double hégémonie soviéto-américaine, et tente de
nouer des relations avec des pays qui refusent l’alignement, comme la France »2, et « les
rapports privilégiés avec Pékin sont devenus l’un des trois grands axes de la politique
1 La présence chinoise en France, conférence de Donatien Schramm, président de l’association Chinois en
France, 2009. 2 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, page. 111.
11
asiatique de la France »1. Et puis, je choisissais l’année 1995, soit la fin de la présidence
de François Mitterrand comme le point final de mon travail, mais durant les deux
mandats présidentiels de Jacques Chirac, les relations bilatérales franco-chinoises ont
connu leur apogée depuis 1964, il est donc vraiment difficile d’ignorer cette période.
C’est pourquoi j’ai finalement décidé d’ajouter une partie supplémentaire dans la
conclusion en synthétisant les 12 ans, soit de 1995 à 2007, bien qu’il y ait moins de
dossiers officiels publiés par rapport à cette époque.
Mon hésitation porte également sur le choix des domaines de la coopération
franco-chinoise, ne retenant que ce que j’estime intéressant pour une étude historique.
Problématiques :
Le commencement de la thèse a été de décrire le contexte général après la
Seconde Guerre mondiale avec deux superpuissances, les Etats-Unis et l’URSS qui
s’affrontent par des pays interposés, passant de la guerre froide à la coexistence pacifique.
D’autre part, l’émergence du Tiers monde, réuni au sein du mouvement « non alignés » a
été une donnée nouvelle au niveau de l’étude des relations internationales.
Il convient de demander pourquoi la France n’a pas pu reconnaitre la Chine
populaire, un grand pays e 650 millions d’habitants, dès sa fondation en 1949 ? Pourquoi
le général de Gaulle a-t-il attendu quelques années avant d’officialiser en 1964 les
rapports de la France avec le gouvernement de la Chine communiste ? Quelles étaient les
vraies raisons de cette reconnaissance tardive ? Quelles étaient des réactions de la
communauté internationale ?
Dès 1957, le général de Gaulle, influencé par un ouvrage d’Edgar Faure à son
retour en Chine : « Le Serpent et la Tortue », accorde un grand intérêt à la question
chinoise. Ce livre dont le titre était inspiré d’un poème de Mao Zedong, préconisait
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.461.
12
l’établissement de liens diplomatiques entre la France et la RPC. Déjà en 1954, au cours
de la conférence de Genève, Pierre Mendès France Premier ministre français rencontre
son homologue chinois Zhou Enlai et entame des négociations en vue de pacifier
l’Indochine. Néanmoins, il faut attendre la seconde conférence de Genève de 1962 pour
que soient signés les premiers accords avec la Chine et limiter la grave crise qui sévissait
dans la péninsule indochinoise.
Pendant cette période, Zhou Enlai rencontre Nehru en Inde, et ils proclament les
Cinq principes de la coexistence. De plus, cette conférence fait aussi prendre conscience
à Beijing (Pékin) que « les conflits internationaux sont possibles d’être résolus par une
manière diplomatique », car la guerre de Corée et la première guerre d’Indochine
accrurent la tension entre la RPC et les pays occidentaux.
La reconnaissance de la RPC par la France est considérée comme un véritable
séisme au sein du domaine diplomatique. Effectivement, aux yeux des Chinois, cet
événement dépasse le simple cadre des relations bilatérales. L’initiative du général de
Gaulle illustrait la volonté de la France de poursuivre une politique d’indépendance à
l’égard des blocs. Cette reconnaissance a renforcé la position de Beijing (Pékin) dans la
communauté internationale. La France devient ainsi le premier grand pays occidental qui
a établi des relations diplomatiques au niveau d’ambassade avec la RPC et à lui apporter
un soutien diplomatique à l’ONU. Le gouvernement chinois est toujours reconnaissant de
cette décision du général de Gaulle.
Il faut noter que la France occupe une place importante dans la vie de Zhou Enlai.
Homme politique, diplomate brillant, il a été influencé d’abord par la philosophie
française : « Le Contrat social » de Rousseau et « De l’esprit des lois » de Montesquieu.
Cette pensée philosophique du siècle des Lumières l’a conduit à contribuer aux activités
du patrimoine et au « mouvement de la nouvelle culture »1. Puis, au cours de ses séjours
en Europe de 1920 à 1924, c’est en France qu’il décide de faires ses études tout en
1 Mouvement de la nouvelle cu lture ( ) : le mouvement qui a eu lieu des années 1910 jusqu’à
des années 1920 en Chine, v isant à créer une nouvelle culture chinoise basée sur certains standards
occidentaux modernes, surtout la démocratie et la science. Il est souvent associé au Mouvement du 4-Mai
et représenté par les personnages comme : Chen Duxiu, Cai Yuanpei, Lu Xun, Li Dazhao, Zhou Zuoren et
Hu Shih.
13
travaillant aux usines Renault. Il envoyait régulièrement en Chine des articles sur la vie
occidentale. C’est en France qu’il a acquit une foi et une conviction communiste. Il crée
en mars 1921, le groupe communiste qui deviendra ensuite une cellule générale en
Europe du Parti communiste chinois.
Car plus nous avancions dans notre travail de recherche, plus de nouvelles
questions nous apparaissaient : Comment se développaient-elles ces relations bilatérales
après 1964 ? Etaient-elles influencées par la Grande Révolution culturelle qui arriverait
deux ans plus tard en 1966 ? Pourquoi durant la présidence de François Mitterrand
connaissaient-elles une crise importante ? alors que durant celle de Jacques Chirac les
relations franco-chinoises sont à leur apogée ?
Nous essayerons de les expliquer dans les chapitres correspondants.
Développement :
Pour cette thèse en histoire contemporaine, le plan chronologique s’est imposé de
toute évidence, car il s’agit de disserter sur l’évolution des re lations entre la RPC et la
France. Néanmoins, l’approche thématique n’a pas été négligée car nous avons tenu à
traiter certains aspects de ces relations séparément. Egalement, des sujets comme celui de
la coopération franco-chinoise, les relations entre la RPC et la France et le Tiers monde
ont été étudiées.
Nous livrons donc, dans notre premier chapitre « Relations extérieures de la
nouvelle République chinoise de 1949 à 1964 », une exploration des grands axes de la
politique chinoise : l’anti- impérialisme et l’anti-colonialisme, deux origines de la
politique étrangère de la RPC entre 1949 et 1955, en utilisant des sources et
documentations officielles.
Dans le chapitre II « De l’opposition au rapprochement : rapports entre la Chine
populaire et la France avant 1964», induit par les conflits franco-chinois par rapport aux
14
guerres d’Indochine, de Corée et au mouvement de décolonisation, nous analysons le
développement des relations bilatérales qui évolue graduellement de l’opposition à la
détente et aboutit à la reconnaissance de la RPC par la France que l’on traitera dans le
chapitre suivant.
Je tente aussi d’expliquer pourquoi la France dans un premier temps hésitait à
reconnaître la RPC. En réalité, Paris choisit d’ignorer l’existence de la RPC car celle-ci a
vu le jour en pleine guerre froide, dans une époque d’affrontement Ouest et Est, héritée
de la Seconde Guerre mondiale. De plus, la nature du régime communiste chinois et son
idéologie ont ralenti aussi la reconnaissance, voire favorisé l’opposition entre Paris et
Beijing (Pékin).
Dans le chapitre III, on étudie les problèmes que l’on rencontra durant les
négociations sino-françaises par rapport à la restauration des liens diplomatiques,
notamment celui de Taïwan, divergence majeure et sensible entre Beijing (Pékin) et Paris.
Plusieurs négociations ont été organisées entre Zhou Enlai et Edgar Faure, et se sont
achevé par un accord tacite et l’annonce du communiqué conjoint sino-français du 27
janvier 1964.
Dans le quatrième chapitre « Point de départ des relations sino-française », les
relations bilatérales de 1964 à 1981 seront analysées. En raison de l’étendue du sujet ,
nous n’avons développé que les éléments que nous avons jugés nécessaires à la
compréhension de l’évolution des relations entre la RPC et la France, par exemple,
l’influence de la Grande Révolution culturelle sur les relations bilatérales (1966-1976),
l’admission de la RPC à l’ONU (1971) et la politique d’ouverture économique chinoise
(depuis 1978).
Dans le chapitre V, comme on l’a constaté, entrée dans les années 80, avec
l’élection du Président François Mitterrand, la politique héritée du général de Gaulle est
modifiée. Et malgré les petits progrès dans les échanges commerciaux, les relations
franco-chinoises sont tombées à leurs plus bas niveau depuis 1964, à cause du
mouvement de Tian’anmen et des ventes d’armes françaises à Taïwan. Notamment
15
celles-ci, qui comportent une vente de 60 Mirages 2000-5, provoquent un incident
diplomatique majeur. Ce sont les deux sujets principaux que l’on analysera.
Dans la conclusion, on révise non seulement les parties précédentes, mais il a fait
la synthèse en même temps des relations franco-chinoises sous la présidence de Jacques
Chirac, puisque c’est une période (1995-2007) durant laquelle les communications et
coopérations entre la France et la Chine se sont développées très rapidement et très
largement.
Enfin, dans le texte annexe suivant, j’ai construit une chronologie commentée de
cette histoire des relations bilatérales, en appuyant sur les documentations officielles de
1964 à 2007.
Les difficultés ne manquent toujours pas, celle du langage (en tant qu’étranger
dont la langue maternelle est le chinois, la maîtrise de la langue française me cause un
vrai problème...), de la méthode et de la philosophie françaises qui s’opposent de temps
en temps à l’idéologie chinoise, de l’organisation des sources et de la construction de la
bibliographie à base de l’immense volume de dossiers archivistiques officiels. Et par
rapport à la grande quantité des archives officielles, les ouvrages académiques sur
l’histoire des relations entre la France et la RPC sont rares, particulièrement en chinois.
Bien que ce manque soit l’un des motifs qui me poussent à choisir ce sujet, il amène dans
le même temps une difficulté de références.
Les documentations officielles publiées par les ministères des Affaires étrangères
des deux gouvernements ainsi que des mémoires ou des ouvrages de leurs dirigeants
constituent une majeure partie de ma bibliographie.
Les ouvrages de Zhang Xichang1, ancien diplomate et célèbre historien chinois
sur les relations diplomatiques chinoises, m’ont offert de très précieux témoignages ainsi
1 Zhang Xichang , premier interprète de français du Président Mao Zedong et du Premier min istre
Zhou Enlai de 1954 à 1964, puis il travaillait à l'ambassade de Chine en France de 1964 à 1967.
16
que des références, parce qu’il est la fois historien-expert et participant en personne de
cette histoire sur laquelle nous étudions.
Et souvenons-nous qu’Alain Peyrefitte1 a joué un rôle important dans le
développement des relations franco-chinoises. Ses quatre ouvrages : Quand la Chine
s’éveillera..., L’Empire immobile, La Tragédie chinoise et La Chine s’est éveillée2, sont
le fruit d’un quart de siècle d’observations a ttentives et d’une aventure intellectuelle. Lors
de sa première publication La Chine s’éveillera, reprenant une citation de Napoléon
Bonaparte, rapport d’enquête sur l’état de la Chine pendant l’été 1971, la Chine se
trouvait milieu de la Grande Révolution culturelle. Deuxième ouvrage L’Empire
immobile, source plus sinisée, montre les mentalités et les comportements collectifs face
à l’occidentalisation. Troisième ouvrage La Tragédie chinoise analyse les causes, le
déroulement, la répression brutale et les conséquences du mouvement de Tian’anmen de
1989. La dernière publication La Chine s’est éveillée étudie et prolonge les perspectives
esquissées par le premier ouvrage. Ces ouvrages constituent aussi une partie importante
de ma bibliographie.
De plus, lors de mes rencontres en Chine, à Beijing (Pékin) et à Chengdu, grâce à
mon père qui travaille dans le domaine diplomatique, j’ai l’honneur de parler avec de
nombreuses personnalités du milieu diplomatique chinois qui ont partagé avec moi leurs
expériences et connaissances du sujet.
Quand à la rédaction de cette thèse, je demande votre indulgence pour mes erreurs
linguistiques, malgré tous mes efforts, je dois et je vais continuer de perfectionner mon
français.
1 Alain Peyrefitte, dip lomate français de carrière.
2 Alain Peyrefitte, Quand la Chine s'éveillera, Paris, Fayard, 1973 ; L'empire immobile ou le choc des
mondes, Paris, Fayard, 1989, La tragédie chinoise, Paris, Fayard, 1990 ; La Chine s’est éveillée, carnets de
route de l'ère Deng Xiaoping, Paris, Fayard, 1997.
17
CHAPITRE I
RELATIONS EXTERIEURES DE LA NOUVELLE REPUBLIQUE
CHINOISE DE 1949 A 1964
18
L’établissement des relations diplomatiques, le 27 janvier 1964, entre la
République populaire de Chine (RPC) et la République française a bouleversé la
communauté internationale. Certains ont même comparé cet événement à une véritable
« explosion nucléaire » au sein du monde diplomatique.
Pourquoi cette affaire politique a-t-elle causé une réaction tellement importante à
ce moment-là ?
En fait, le problème de la reconnaissance de la RPC s’est posé au gouvernement
français dès la fondation du nouveau régime chinois le 1er octobre 1949, alors que le
gouvernement de Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek)1 de la République de Chine se réfugie
sur l’île de Taïwan. Le nouveau gouvernement du Parti communiste chinois, qui prend le
nom de République populaire de Chine, abolit le système législatif du gouvernement du
Guomindang (Parti nationaliste chinois)2 et met en place une législation socialiste.
En revanche, Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek), soutenu par les Etats-Unis est censé
représenter l’ensemble de la Chine, en occupant un siège permanent au Conseil de
sécurité à l’ONU, bien que la Chine continentale est sous le contrôle du PCC. Ce fait
« particulier » rend la question du statut de la RPC plus compliquée.
Ainsi, entre 1949 et 1962, la RPC et la France restent sur des postions
antagonistes sur plusieurs sujets de politique extérieure :
- La poursuite des relations diplomatiques françaises avec Taiwan.
- Le soutien de la Chine au Viêt-Nam pendant la première guerre
d’Indochine.
- L’opposition entre la Chine et la France lors de la guerre de Corée, où la
France est présentée au sein des forces de l’ONU alors que la Chine est au côté de
la Corée du Nord.
1 Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) , Président de la République nationaliste de Chine (Taïwan) de
1948 à 1975. 2 Guomindang , le Part i nationaliste chinois, parti au pouvoir en Chine avant 1949.
19
- Le soutien de la Chine au gouvernement Nasser de l’Egypte au cours de la
crise du canal de Suez.
- Enfin, l’aide chinoise apportée à l’Algérie durant sa lutte pour
l’indépendance amène la France à considérer que la Chine s’immisce dans ses
affaires intérieures.
Ces principaux problèmes rappelés ci-dessus expliquent en partie la difficulté de
l’établissement des relations diplomatiques entre la RPC et la France. Pendant longtemps
les tentatives de rapprochements étaient bloquées par ces épineux dossiers.
Comment la RPC agit-elle face à cette situation difficile après sa fondation ?
Pourquoi la France a décidé de reconnaître la nouvelle Chine, en devenant ainsi le
premier grand pays occidental qui a établi des relations diplomatiques au niveau
d’ambassade avec la RPC ?1 Dans ce chapitre, on analysera l’histoire avant la
reconnaissance de la RPC par la France.
I-1 La nouvelle République Populaire de Chine
et sa position internationale de 1949-1964
Depuis sa fondation du 1er octobre 1949, la jeune République chinoise (RPC)
rencontre plusieurs problèmes :
- Les frontières chinoises ne sont pas définies.
- Taiwan, Matsu restent en dehors de la RPC.
1 La Suède est le premier pays occidental qui a établi des relations diplomatiques au niveau d’ambassade
avec la RPC le 9 mai 1950 ; La Grande-Bretagne est le premier grand pays occidental qui a établi des
relations diplomatiques au niveau de chargé d’affaires ad intérim avec la RPC le 17 juin 1954.
20
- Les colonies occidentales en Chine : Hongkong (occupée par le Royaume-Uni),
Macao (occupée par le Portugal) et la Mandchourie (occupée par l’Union
soviétique.
- D’ailleurs, à l’intérieur du pays, les trois régions autonomes : Xinjiang, Tibet,
Mongolie intérieure sont mal contrôlées.
Par conséquent, l’indépendance et la souveraineté de l’Etat sont devenues la
préoccupation majeure des autorités chinoises dans un premier temps.
Les traités d’alliance sino-soviétique du 14 février 1950 solidarisent Beijing
(Pékin) et Moscou ainsi qu’avec l’ensemble des pays du camp socialiste. Quant à
Washington, elle considère dès cette période, que la Chine est un enjeu entre Moscou et
Washington, et craint que Beijing (Pékin) ne devienne un outil d’expansion soviétique en
Asie du Sud-est. Les événements qui ont suivi semblent donner raison à cette hypothèse
et la confrontation se traduit rapidement dans les faits à l’occasion de la guerre de Corée
et de la première guerre d’Indochine.
En revanche, la conférence de Genève en 1954 était l’opportunité pour les
dirigeants chinois de prendre conscience que les conflits internationaux pourront être
résolus par la voie diplomatique et non exclusivement par la guerre. Ainsi la RPC
participe à la deuxième conférence de Genève en 1962 qui a succédé la première
conférence de Bandung de 1955.
Mais en pleine guerre froide, la tension entre Beijing(Pékin) et Washington
demeure extrême en raison de la signature du pacte de défense de l’Asie du Sud-est le 8
septembre 1954 (OTASE).
21
A) La reconnaissance de la RPC : Question délicate pour la communauté
internationale
Dès la création de la RPC, le problème de sa reconnaissance divise la
communauté internationale. Certains pays soutiennent la RPC alors que d’autres
choisissent le régime de Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) de l’île de Taiwan.
Mao Zedong1, président du PCC qui fonde la RPC le 1er octobre 1949, après avoir
battu et chassé du continent le Guomindang, est devenu le premier président de la
nouvelle République chinoise. L’ancien régime est renversé et celui qui remplace sa
place établit une « dictature démocratique populaire dirigée par la classe ouvrière, basée
sur l’alliance des ouvriers et des paysans »2.
Dès alors, la RPC se met à reconstruire une diplomatie en cohérence avec ses
convictions politiques et idéologiques ainsi que ses intérêts économiques. Le
« Programme commun »3 adopté par la Conférence consultative politique du peuple
chinois à Beijing (Pékin) le 30 septembre 1949. Dans un message envoyé aux
gouvernements étrangers, Zhou Enlai, ministre des affaires étrangères de la RPC, expose
les changements récents de la Chine et affirme que « Le nouveau gouvernement devra
examiner tous les traités et accords conclus entre le gouvernement du Guomindang et les
gouvernements étrangers ».
C’est ainsi que Beijing (Pékin) s’engage dans un réexamen complet de l’ensemble
des traités et des accords conclus par l’ancien régime.
1Mao Zedong (Mao Tsé-toung) , dirigeant suprême de la RPC de 1949 à 1976.
2 Le Programme commun de la Conférence politique consultative du peuple chinois (
zhongguo renmin zhengzhi xieshang huiyi gongtong gangling), Article 1. 3 Le Programme commun de la Conférence politique consultative du peuple chinois (
zhongguo renmin zhengzhi xieshang huiyi gongtong gangling), constitution provisoire de la
République populaire de Chine et orig ine de la Constitution chinoise votée à l'unanimité le 20 septembre
1954 par l'Assemblée ch inoise des représentants du peuple à Pékin.
22
Et quant à l’établissement des relations avec d’autres pays, la nouvelle
République est reconnue à peine trois jours après sa naissance par l’URSS, suivie par les
pays du pacte de Varsovie, et certains pays nouvellement indépendants. Mais elle reste
ignorée par la plupart des pays occidentaux dont la France, qui préfèrent la « République
nationaliste chinoise » de Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek).
Si l’on cherche les raisons de cet « ostracisme » de la RPC au sein du monde
occidental, elles sont multiples et vont de la simple ignorance des fondements du nouveau
régime difficilement compris par de nombreuses chancelleries, à l’opposition farouche à
un nouveau venu dans le bloc socialiste, Entre ces deux attitudes naviguent plusieurs pays
qui, comme la France, « ont eu peur d’entrer en conflit avec Washington ».1
Si la question chinoise était un problème délicat pour les Occidentaux après
l’échec de la politique américaine en Chine en 1949, « l’arrivée des troupes communistes
à la frontière sino-vietnamienne en décembre 1949, avait radicalement transformé la
question d’Indochine »2, tout en faisant évoluer la position française dans un sens
hostile3. C’est ainsi que la France n’a pas voté, le 13 janvier 1950, l’admission de la RPC
à l’ONU.
En effet, suite à la proposition de l’URSS au conseil de sécurité de l’ONU en
faveur de l’admission de la RPC, le résultat du vote se décompte est comme suit : 3 voix
Pour (soit l’URSS, la Yougoslave et l’Inde), 6 voix Contre (soit les Etats-Unis, la France,
l’Egypte, l’Equateur, Cuba, la Chine nationaliste du Guomindang) et deux absentions (le
Royaume-Uni et la Norvège). L’URSS se retire le même jour du Conseil de sécurité en
guise de protestation.
Lorsque la Chine a reconnu la République démocratique du Viêt-Nam le 15
janvier 1950, la France n’hésite plus à poursuivre les relations diplomatiques avec
Taiwan reconnu par le Quai d’Orsay comme le seul représentant officiel de la Chine à
1 Alain Peyrefitte, C’était De Gaulle, Fayard, Paris, 1997, page.485.
2 François Joyaux, La nouvelle d’Extrême-Orient I, Payot, Paris, 1985, page.242.
3 La déclaration et la note verbale du ministre des affaires étrangères Zhou Enlai en janvier 1950, Le
Journal mensuel de Nouvelle Chine ( Xinhua yuebao), I, n° 3, page.597 et n° 4, page.848.
23
l’ONU. Ainsi l’ensemble des gouvernements occidentaux adopte une position commune
qui consiste à refuser la reconnaissance de la RPC.
Puisque la RPC est née en pleine guerre froide, dans un contexte d’affrontement
Est et Ouest, hérité de la Seconde Guerre mondiale, qui met face à face deux grandes
puissances, leurs alliés et des pays satellites, et à cause du PCC qui prend le pouvoir en
Chine, la nouvelle République chinoise choisit dès sa naissance d’intégrer le camp
socialiste, se solidarisant avec l’URSS, comme le souligne le Programme commun1. Cette
position s’expliquait par nature du régime communiste et par son idéologie. Cette
adhésion s’illustre par la signature de plusieurs traités de coopérations et d’assistance
sino-soviétiques et surtout le traité d’amitié, d’alliance et d’assistance du 14 février 1950,
pour une durée de trente ans qui « garantit la protection de la RPC par l’URSS en cas
d’agression ».2
Ces traités et accords sino-soviétiques ont deux fonctions principales :
- Prémunir la RPC contre le danger d’une invasion japonaise : « Les parties
contractantes consentent à entreprendre toutes les mesures indispensables et
dispositions propres à prévenir la répétition de l’agression et de la violation de la
paix de la part du Japon ou de tout autre Etat qui, directement ou indirectement, se
joindrait au Japon dans des actes d’agression »3. Car Beijing (Pékin) craignait que
les Etats-Unis se servent du Japon pour envahir la Chine.
- Restituer à l’URSS Port Arthur, le port de Dalian et le chemin de fer de
Mandchourie. En contrepartie, la RPC obtiendra un prêt de 300 millions de
dollars au taux de 1%, valable cinq ans4.
1 Le Programme commun, art icle 11, le 30 septembre 1949.
2 Le Quotidien du peuple ( Renmin ribao), le 13 avril 1950, Œuvres choisies de la diplomatie de
Mao Zedong ( Mao Zedong waijiao wenxuan), Edit ions de Presse centrale des
documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing, 1994, page.132. 3 Le Quotidien du peuple ( Renmin ribao), février 1950 ; cite : Notes et Etudes Documentaires,
Paris, n° 1306, le 4 avril 1950. 4 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong( Mao Zedong waijiao wenxuan) ,
Ed itions de Presse centrale des documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing,
1994, page.122.
24
Ces traités renforcent non seulement les relations sino-soviétiques, mais aussi
celles avec l’ensemble des pays du camp socialiste, confirmant ainsi les prévisions de
Washington qui, dès cette époque, a trouvé que la Chine serait un enjeu majeur entre
Moscou et Washington et craignait que Beijing (Pékin) ne devienne un pont servant à
l’expansion soviétique au Sud-est asiatique1. Les faits qui ont suivi semblent donner
raison à cette hypothèse des Américains et la confrontation s’est traduite rapidement dans
la guerre de Corée.
Dans l’année qui suit la fondation de la RPC, alors que la première guerre
d’Indochine qui sévit au Sud, la guerre de Corée éclate le 25 juin 1950 2. Le
déclenchement de celle-ci a conduit les Américains, ainsi que leurs alliés occidentaux, à
durcir leur position à l’égard de la RPC.
Le Président américain Truman devance la résolution de l’ONU et décide
d’intervenir dans le conflit en envoyant la 7ème flotte américaine en mer de Chine. Beijing
(Pékin) considère cette instruction particulièrement dans le détroit de Taiwan comme une
agression caractérisée et une violation de ses eaux territoriales3. Ce conflit se propage
ainsi jusqu’à ses portes et la RPC craignant pour sa propre sécurité envoie les premiers «
Volontaires »4 chinois le 19 octobr! 1950 franchir le fleuve Yalu5.
Le Président Truman considère que l’offensive chinoise en Corée du Nord s’est
faite à l’instigation de Moscou dans le cadre d’une stratégie communiste internationale
visant à menacer les intérêts américain dans cette région.
Aussi pour faire face à la menace chinoise, les Etats-Unis essaient de l’isoler en
Asie et d’y étendre l’influence américaine en signant plusieurs traités et accords
d’assistance militaire avec certains pays voisins de la RPC :
1 Foreign Relations of the United States of 1950 (Les documentaires des Affaires étrangères des Etats-
Unis de 1950), vol.1, page.243. 2 La guerre de Corée se déroule du 25 juin 1950 au 27 juillet 1953.
3 La déclarat ion de Zhou Enlai, Premier min istre de la RPC, le 28 ju in 1950.
4 Armée des volontaires du peuple chinois ( zhongguo renmin zh iyuanjun), s'agissant de
la IVème
armée populaire, commandée par le général Peng Dehuai. 5 Le fleuve Yalu est la frontière entre la RPC et la Corée du Nord.
25
- L’accord d’assistance militaire américo-thaïlandais le 17 octobre 1950.
- Le traité de défense mutuelle américano-philippin le 30 août 1951.
- Le traité de sécurité américano-japonais le 8 septembre 1951.
Tout en désignant la RPC comme « agresseur »1, l’ONU envoie des troupes (dont
un contingent français), avec pour mission de s’interposer entre les forces en présence.
C’est de cette façon que la RPC s’est trouvée entraînée dans un conflit qui l’oppose
indirectement aux forces françaises de l’ONU. A cause de ce conflit, toute amorce de
dialogue entre Beijing (Pékin) et Paris était contrariée.
Dans ce contexte de tension dans les relations internationales, le mouvement de
décolonisation s’est accéléré et de nombreux pays colonisés ont entamé la lutte pour leur
indépendance. C’est ainsi qu’en Asie, l’armée française s’enlise en Indochine. La RPC,
jugeant indésirable la présence de la France aux abords de ses frontières qu’elle prétend
menacées, soutient le Viêt-Nam du Nord. L’intervention américaine aggrave la situation
et donne une autre dimension à ce conflit et le fait entrer dans la logique du bloc Est-
Ouest. Ce qui rend les relations franco-chinoises encore plus difficiles.
Alors que la guerre de Corée continue, le gouvernement américain soutient son
allié français dans son engagement indochinois et lui octroie à cet effet, le 31 janvier
1951, une aide de 3,6 milliards de dollars. Huit mois plus tard, le 23 septembre 1951, ces
deux pays publient un communiqué commun relatif à l’accroissement de l’aide
américaine. Cette tension extrême interdit toute entente éventuelle entre Beijing (Pékin)
et Paris.
Plus généralement, son statut d’acteur dans l’affrontement entre l’Est et l’Ouest
fait que la RPC se heurte aux intérêts occidentaux ce qui rend impossible tout lien
diplomatique avec les pays du bloc occidental. Et la reconnaissance de la nouvelle
République chinoise est par conséquent mise de côté par ces pays.
1 L’ONU déclare la RPC agresseur en Corée le 1
er février 1951 en absence de l’URSS.
26
B) Dans une atmosphère tendue avec Moscou et Washington, Beijing se rapproche
de l’Europe occidentale
A partir de 1954, un signe de détente est apparu entre Beijing (Pékin) et Paris, lors
de la conférence de Genève sur la guerre d’Indochine. Zhou Enlai et Pierre Mendès
France se sont rencontrés et ont abouti à un règlement pacifique du conflit vietnamien
après des négociations. Les deux parties sont en faveur d’un retour de la paix en
Indochine1, et un premier pas a été franchi dans les relations sino-françaises. Après cette
rencontre, cette relation bilatérale connait un développement important dans un contexte
de détente internationale.
Pourtant, cette détente ne peut pas se concrétiser immédiatement, parce que les
autorités chinoises sont encore sensibles aux pays occidentaux, à cause d’un siècle
d’occupation occidentale en Chine. Et du côté français, « s’ils avaient eu le souhait de
reconnaître Pékin, les gouvernements de la IVème République auraient subi les pressions
des Etats-Unis».2 Le gouvernement de Pierre Mendès France ne dure que huit mois. De
plus, « à cette réciproque reconnaissance s’opposent l’existence de rapports confiants
entre la France et la République de Chine (Formose), le rôle de la Chine populaire dans
le bloc de l’Est et le fort engagement chinois en faveur de l’indépendance des colonies
françaises »3.
D’ailleurs, la conférence de Bandung en 1955 ouvre la voie aux relations entre
l’Asie et l’Afrique. De son côté, la RPC participe activement à des réunions
internationales et soutient les actions de décolonisation visant à limiter l’influence des
puissances « impérialistes » tant en Asie ainsi qu’en Afrique.
Dans ce contexte, la Chine, ex-colonie, et la France, puissance coloniale, ne
peuvent que s’opposer sur la question de la décolonisation, comme ce sera le cas à
1 Discours de Zhou Enlai à propos de l'Indochine à la conférence de Genève le 9 juin 1954, Le Journal
mensuel de Nouvelle Chine ( Xinhua yuebao), n° 7, 1954, page.87. 2 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.464.
3 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.465.
27
plusieurs reprises : la première guerre d’Indochine, la crise du canal de Suez en 1956 et la
guerre d’Algérie.
Si les relations sino-françaises avancent petit à petit, la tension entre Beijing
(Pékin) et Washington ne s’est pas atténuée en raison de l’intense activité diplomatique
américaine dans la région asiatique. Les signatures des traités d’assistance militaire entre
les Etats-Unis et certains pays asiatiques ci-dessous exaspèrent l’hostilité entre les
Chinois communistes et les Américains :
- le traité de Manille le 8 septembre 1954 : le pacte de défense de l’Asie du Sud-est
(OTASE) ;
- l’accord économique et militaire américano sud-coréen le 17 novembre 1954 ;
- le traité d’assistance militaire entre Taiwan et les Etats-Unis le 2 décembre 19541 ;
- l’accord franco-américain sur l’assistance militaire au Viêt-Nam du Sud le 13
décembre 1954.
En effet, c’est surtout depuis la signature du pacte de défense de l’Asie du Sud-est
le 8 septembre 1954 que la RPC se sent particulièrement menacée, et qu’une ombre plane
sur le rétablissement de la paix en Indochine. Car la RPC n’a toujours pas « libéré » les
îles côtières et Taiwan dont le régime pro-occidental du Guomindang est hostile à la
Chine communiste. Tandis que Tchang Kaï-chek envisage de se lancer à la reconquête du
Continent chinois.
Tout cela explique pourquoi la politique extérieure de la RPC s’oriente dans une
diplomatie farouchement « anti- impérialisme américain » que l’on analysera dans la
prochaine partie.
En plus de la tension avec les Américains, les autorités chinoises commencent à
affirmer des divergences avec leurs « camarades soviétiques » sur la stratégie à suivre
face à l’Occident, et sur la théorie des mouvements communistes internationaux. La RPC
1 Jusqu’en janvier 1980, ce traité est annulé selon le communiqué commun sino -américain le 16 décembre
1978.
28
s’oppose d’abord à la « déstalinisation » et à la nouvelle définition de la « coexistence
pacifique » de Nikita Khrouchtchev, esquissée lors du XXème congrès du Parti
communiste de l’Union soviétique (PCUS) de février 1956.
Les premières controverses entre le Parti communiste chinois (PCC) et le PCUS
se manifestent en 1957, indirectement, lors de la conférence des soixante-quatre partis
communistes internationaux à Moscou. Les désaccords portent sur les trois innovations
idéologiques introduites par Nikita Khrouchtchev : la coexistence pacifique, le passage
pacifique au socialisme et la condamnation du culte de Staline. Ces divergences sont
rendues publiques après le voyage de Khrouchtchev à Beijing (Pékin) en septembre 1959.
Les relations sino-soviétiques sont par la suite considérablement détériorées1.
En face des « hégémonies soviétiques et américaines », Mao Zedong modifie la
théorie d’ « une zone intermédiaire » : « Il y a deux zones intermédiaires »2, susceptible
d’aider au développement des relations diplomatiques avec l’Europe occidentale. La
rupture sino-soviétique accélère la marche de la reconnaissance de Beijing (Pékin) par
Paris, comme le constate le général de Gaulle le 21 septembre 1963 : « Il est vrai que la
situation s’est bien modifiée aujourd’hui, en raison des divergences entre la Russie et la
Chine. C’est un fait nouveau qui change les données du problème »3.
Un autre pas décisif dans ce rapprochement est réalisé, le 5 août 1963, avec le
double refus de Beijing (Pékin) et de Paris, de signer le traité de Moscou, qui avait été
ratifié le 25 juillet 1963 par trois pays (les Etats-Unis, le Royale Uni et l’URSS). Ce traité,
relatif à l’interdiction partielle des essais nucléaires dans les mers et les airs, abouti à la
rupture finale des relations diplomatiques entre Beijing (Pékin) et Moscou4. Cette
démarche de Moscou met fin aux relations sino-soviétiques et permet la RPC de se
1 Han Nian long , La diplomatie contemporaine de la Chine( Dangdai zhongguo
waijiao), Ed itions des Sciences sociales ( zhongguo kexue chubanshe), Beijing, 1987. 2 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong( Mao Zedong waijiao wenxuan) ,
Ed itions de Presse centrale des documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing,
1994, page.506 et 508. 3 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, n° 1, 1995, page.28.
4 « La déclaration du gouvernement de la République populaire de Chine », Le Quotidien du peuple (
Renmin ribao) du 31 juillet 1963.
29
démarquer définitivement du camp soviétique ? Beijing (Pékin) se retrouve donc en face
des deux adversaires de taille / Washington et Moscou.
La politique extérieure de la RPC « anti- impérialiste et anti-colonisatrice »,
s’oriente vers l’anti-hégémonisme américain et soviétique, et vers l’établissement de liens
avec les pays d’Europe occidentale.
I-2 La politique extérieure de la RPC de 1949 à 1964
Dans les parties précédentes, on a analysé le contexte international et la position
de la RPC au sein de la communauté internationale après sa fondation. Ensuite, on
étudiera la politique extérieure de la Chine communiste de cette période- là, qui fait face à
une situation difficile.
En raison de la nature communiste du PCC, la diplomatie de Beijing (Pékin) est
inséparable de la pensée marxiste et de l’idéologie socialiste. Selon l’avis des dirigeants
chinois, la RPC vit une période de transition du capitalisme vers le socialisme, telle
qu’elle est décrite dans la théorie née de l’expérience de la « Révolution d’octobre », en
vertu de laquelle il existe dans le monde deux grands systèmes : le capitalisme et le
socialisme. Or dans le concert des nations, trois forces coexistent : le bloc des pays
socialistes ayant à sa tête l’URSS, le bloc des pays capitalistes ayant à sa tête les Etats-
Unis et la troisième : le reste du monde, c’est-à-dire les pays colonisés et les nouveaux
pays indépendants.
Avec cette pensée, Mao Zedong théorise les relations internationales et élabore la
doctrine de la « zone intermédiaire » en 1946 à laquelle il reconnaît un rôle de premier
plan dans l’élaboration de sa politique extérieure.
30
Fondée sur le succès de la nouvelle révolution démocratique chinoise contre
« l’impérialisme », « le féodalisme » et « le capitalisme bureaucratique »1, cette doctrine
dont s’inspire la diplomatie chinoise a pour but essentiel de favoriser l’indépendance des
nations opprimées, leur apportant assistance aux niveaux politique, économique et
militaire. Cette doctrine joue un rôle principal dans la diplomatie chinoise depuis 1949.
A) La politique extérieure chinoise de 1949 à 1955
La période allant de 1949 à 1955 constitue la première phase dans l’histoire des
relations extérieures de la RPC dont le principal objectif diplomatique est de renverser les
« trois montagnes de l’impérialisme »2, de conquérir la souveraineté et l’indépendance de
l’Etat, afin d’ouvrir une nouvelle diplomatie da la Chine dans le monde.
La politique extérieure chinoise se caractérise par une position « anti-
impérialiste » et « anti-coloniale ». Elle vise à rétablir des relations d’Eta ts souverains et
d’assurer à la Chine sa propre sécurité. Les grands traits de cette politique sont
mentionnés dans le « Programme commun » et aussi dans les discours des dirigeants
chinois.
Les deux principes de cette politique sont :
- S’allier à l’URSS et se joindre au camp socialiste.
En face de la situation internationale après la deuxième guerre mondiale, Mao
Zedong s’exprime dans son article « De la dictature démocratique populaire » que
« si le peuple chinois souhaite continuer cers la victoire, il n’y aura qu’un seul choix,
1 Mao Zedong , Le discours à la conférence des fonctionnaires de la région Jinsui(
Zai jinsuigqnbu huiyi shqngde jingua), Œuvres choisies( Mao Zedong xuanji) , tome
4, Ed itions de Presse du Peuple( Renmin chubanshe), 1991, page.1313. 2 « Trois montagnes de l’impérialis me » : « l’impérialis me », « le féodalisme » et « le cap italisme
bureaucratique ». Mao Zedong , Le discours à la conférence des fonctionnaires de la région
Jinsui( Zai jinsuigqnbu huiyi shqngde jianghua), Œuvres choisies(
Mao Zedong xuanji) , tome 4, Edit ions de Presse du Peuple( Renmin chubanshe), 1991,
page.1313.
31
soit du côté impérialiste, soit du côté communiste. »1 Sans aucun doute, le
gouvernement chinois a choisi l’URSS comme allié qui porte la même idéologie et
effectue le même régime que la RPC. Cette décision est ensuite ajoutée au
« Programme commun » de 1949 : « La RPC sollicitera tous les pays et leurs peuples
qui aiment la paix et la liberté, en s’unissant à l’URSS d’abord, aux pays
indépendants et aux nations opprimées, contre les agressions des impérialistes. »2
Puis, Beijing (Pékin) se solidarise avec le camp socialiste et établit
d’abord des relations diplomatiques avec dix pays du bloc communiste en 1949,
hormis la Yougoslavie3. Parmi eux, les pays qui avaient des relations avec Taïwan,
se sont empressés de les rompre.
De plus, la RPC lie également les relations diplomatiques avec les pays
voisins et d’autres pays indépendants d’Asie comme : l’Inde, la Birmanie, le
Pakistan, l’Indonésie ainsi que l’Afghanistan. Ces pays ont progressivement pris
des distances avec le gouvernement du Guomindang, avant de proclamer une
rupture totale des relations diplomatiques.4
- Faire table rase de la diplomatie du gouvernement antérieur : « le nouveau
gouvernement devra examiner tous les traités et accords passés entre le
gouvernement du Guomindang et les gouvernements étrangers. »5
En considérant que les relations diplomatiques entre l’ancien régime
chinois et les pays occidentaux étaient inégalitaires, le nouveau gouvernement
commence à abolir les privilèges des Occidentaux définis soit par le « Protocole
1 Documentations des relations extérieures de la RPC , Min istère des Affaires étrangères de la RPC, Beijing,
n° 1, page.87. 2 Le Programme commun de la Conférence politique consultative du peuple chinois (
zhongguo renmin zhengzhi xieshang huiyi gongtong gangling), Article 11. 3 La RPC n’a pas établi une relat ion diplomat ique avec la Yougoslavie avant le 2 janvier 1955, à cause de
la divergence entre le PCUS et le Part i communiste yougoslave (PCY). 4 Documentations des relations extérieures de la RPC, Min istère des Affaires étrangères de la RPC, Beijing,
n° 1, page.17. 5 Le Programme commun de la Conférence politique consultative du peuple chinois (
zhongguo renmin zhengzhi xieshang huiyi gongtong gangling), Article 55.
32
de Beijing (Pékin) » de 1901, soit confirmés par les traités avec le gouvernement
du Guomindang depuis 1943. Dans ce contexte, les autorités réquisitionnent le 6
janvier 1950 la caserne française à Beijing (Pékin) et procèdent à son occupation
le 14 janvier.
Pour sa part, la France considère que le traité du 28 février 1946 accorde
au gouvernement de la République française le dro it de continuer d’utiliser à des
fins officielles les parcelles de terrain qui lui sont allouées dans le quartier
diplomatique à Beijing (Pékin). C’est pourquoi elle se refuse de signer le procès-
verbal demandé par les autorités chinoises. Ce désaccord conduit à une situation
tendue entre Beijing (Pékin) et Paris au début, jouant également un rôle de
premier plan dans la position française de ne pas reconnaître dans un premier
temps le nouveau régime chinois.
B) La politique extérieure de la RPC de 1955 à 1964
La deuxième phase des relations extérieures de la RPC débute de 1955 à la fin de
l’alliance sino-soviétique.
Après les conférences de Genève en 1954, la politique extérieure chinoise
s’appuie sur la base des « Cinq principes de coexistence pacifique »1, proclamés par Zhou
Enlai, premier ministre et ministre des Affaires étrangères chinois, et Jawaharla Nehru,
Premier ministre et ministre des Affaires étrangères indien, le 28 avril 1954 lors de la
conférence à la Nouvelle Delhi. Dans le préambule de l’ « Accord sur le commerce et les
relations entre le Tibet chinois et l'Inde » (Accord de Panchsheel) qui a été signé le 29
avril 1954, sont expliqués ces cinq principes :
- respect mutuel de la souveraineté et de l'intégrité territoriale,
- non-agression mutuelle,
- non- ingérence mutuelle dans les affaires intérieures,
1 Cinq principes de coexistence pacifique : hexie gongchu zuxiangyuanze.
33
- égalité et avantages réciproques,
- coexistence pacifique.
Et pendant la conférence de Bandung en 1955, la RPC adhère au principe
fondateur du mouvement des pays non-alignés, conformément à son attachement au
principe universel des « droits des peuples à disposer d’eux-mêmes ». A l’occasion de
cette conférence, la Chine développe largement ses relations diplomatiques avec l’Asie et
l’Afrique. Comme Professeur Maurice Vaïsse a mentionné dans son ouvrage : « A vrai
dire, la diplomatie chinoise avait fait des progrès décisifs en Asie du Sud-est, en Afrique
du Nord et au Proche-Orient, à la suite de la conférence de Genève (1956) et celle de
Bandoeng (1955). » 1
Lors de l’ouverture de la seconde session de la 1ère Assemblée nationale chinoise,
le 30 juillet 1955, Zhou Enlai propose une fois de plus que les pays d’Asie et du
Pacifique, y compris les Etats-Unis d’Amérique, signent un pacte de « coexistence
pacifique » pour réduire l’extrême tension créée par les traités d’assistance militaire dans
ces zones.2
Malgré les dialogues des ambassades sino-américaines qui débutent le 1er août
1955, les deux pays ne s’accordent jamais sauf la déclaration commune le 10 septembre
1955 qui permet aux citoyens ressortissants de rentrer chez eux.3
A partir de septembre 1963, Mao Zedong modifie sa théorie des « deux zones
intermédiaires » : « La première regroupe les pays indépendants et les pays en lutte pour
l’indépendance en Asie, en Afrique et en Amérique latine : ils constituent la première
zone intermédiaire. La seconde s’étend à l’ensemble de l’Europe occidentale, de
l’Océanie au Canada et aux pays capitalistes qui forment la seconde zone
1 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, pages110-111.
2 Discours de Zhou Enlai le 30 juillet 1955 , Les Documentations diplomatiques de la RPC, Ministère des
Affaires étrangères de la RPC, Beijing, n° 3, page.331. 3 Le Quotidien du peuple ( Renmin ribao) du 10 septembre 1955.
34
intermédiaire. »1 Ce concept qui écarte les Etats-Unis et l’URSS de la seconde zone
intermédiaire manifeste l’envie de Mao de développer des relations l’Europe occidentale.
Lorsque Beijing (Pékin) cherche à se rapprocher vers l’Europe, c’est Paris qui
malgré les discordes précédentes, semble le partenaire privilégié. En effet, les dirigeants
chinois admirent la politique de décolonisation du général de Gaulle après son retour au
pouvoir en 1958. Mao Zedong considère que « le général de Gaulle a le courage de
s’affranchir des Etats-Unis, il ne les suit pas toujours. »2
Du côté français, le général de Gaulle souhaite lui aussi se détacher de l’influence
des Etats-Unis par trois idées :
- La défense et l’indépendance nationale française à l’égard des deux blocs.
- Le renforcement des liens avec les Européens, et notamment la création de la
C.E.E.
- Le rapprochement de la Chine populaire et eu Tiers monde.
C’est dans ce contexte que la RPC et la France avancent à leur établissement des
relations diplomatiques.
Entre 1949 et 1964, la RPC établit des relations diplomatiques avec 42 pays. Le
Royaume-Uni et les Pays-Bas ont en Chine des bureaux pour les chargés d’affaires par
intérim sans statut diplomatique.
1 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong( Mao Zedong waijiao wenxuan),
Ed itions de Presse centrale des documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing,
1994, pages.506 et 508. 2 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong( Mao Zedong waijiao wenxuan) ,
Ed itions de Presse centrale des documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing,
1994, page.432.
35
Les pays qui construisent les relations diplomatiques avec la RPC d’octobre 1949 à
janvier 19641 :
Bloc communiste :
Union des Rép. Socialistes soviétiques le 3 octobre 1949
République populaire de Bulgarie le 5 octobre 1949
République socialiste de Roumanie le 5 octobre 1949
République populaire de Hongrie le 6 octobre 1949
Rép. Populaire démocratique de Corée le 6 octobre 1949
Rép. Socialiste de Tchécoslovaquie le 6 octobre 1949
République populaire de Pologne le 7 octobre 1949
République populaire de Mongolie le 16 octobre 1949
République démocratique Allemande le 27 octobre 1949
Rép. Populaire socialiste d’Albanie le 23 novembre 1949
Rép. Fédérale de Yougoslavie le 2 janvier 1955
République de Cuba le 28 septembre 1960
Autres Etats indépendants :
République indienne le 1er 1950
Royaume de Suède le 9 mai 1950
Royaume du Danemark le 11 mai 1950
Confédération helvétique le 14 septembre 1950
République de Finlande le 28 octobre 1950
République islamique du ¨Pakistan le 21 mai 1951
Royaume de Norvège le 5 octobre 1954
1 Politique de la Chine( Zhongguo zhengzhi) , Editions de presse des Langues étrangères(
Waiwen chubanshe), Beijing, 1986, page.121.
36
Etas devenus indépendants :
République socialiste du Viêt-Nam le 18 janvier 1950
République socialiste de l’Union de Birmanie le 8 juin 1950
Rép. Démocratique d’Afghanistan le 20 janvier 1955
Royaume du Népal le 1er janvier 1955
République arabe d’Egypte le 30 mai 1956
République arabe syrienne le 1er août 1956
République arabe du Yémen le 24 septembre 1956
Rép. Soc. Démocratique du Sri Lanka le 7 février 1957
Kampuchéa démocratique le 19 juillet 1958
République d’Irak le 20 août 1958
Royaume du Maroc le 1er novembre 1958
Rép. Algérienne démocratique et populaire le 20 décembre 1958
République démocratique du Soudan le 4 février 1959
République de Guinée le 4 octobre 1959
République du Ghana le 5 juillet 1960
République du Mali le 25 octobre 1960
République démocratique somalienne le 14 décembre 1960
République du Zaïre le 20 février 1960
République démocratique populaire du Laos le 25 avril 1961
République de l’Ouganda le 18 octobre 1962
République du Kenya le 14 décembre 1963
République du Burundi le 21 décembre 1963
République tunisienne le 10 janvier 1964
37
CHAPITRE II
DE L’OPPOSITION AU RAPPROCHEMENT : RAPPORTS ENTRE
LA CHINE POPULAIRE ET LA FRANCE AVANT 1964
38
De 1949 à 1954, les tensions aux frontières chinoises créent une situation
conflictuelle entre la nouvelle République chinoise et la France. Lors du conflit de la
péninsule indochinoise, la Chine soutient le Viêt-Nam du Nord de Hô Chi Minh1, contre
la présence coloniale de la France. En outre pendant la guerre de Corée, la France fournit
plus de mille soldats aux casques bleus de l’ONU. Sur ces questions, on assiste à un
affrontement politique et idéologique entre la RPC et la France. Et la conférence de
Genève de 1954 a été une occasion de rapprochement entres ces deux gouvernements sur
ces questions- là.
II-1 Opposition entre Beijing (Pékin) et Paris dans les conflits
d’Indochine, de Corée et de la décolonisation
A) La première guerre d’Indochine (1946-1954)
La reconnaissance de la République démocratique du Viêt-Nam par la Chine
populaire incite le gouvernement français à ne pas reconnaitre celle-ci. Du côté chinois,
les relations entre la France et Taïwan qui justifient l’hostilité de Beijing (Pékin) à
l’encontre de Paris au cours de la guerre d’Indochine.
Origines de la première guerre d’Indochine :
La conférence de Potsdam, à la fin de juillet 1945, a convenu qu’après la
capitulation du Japon, les Britanniques et les Chinois désarmeraient les forces japonaises
en Indochine et y assureraient l’ordre. La Chine s’était confié cette tâche au Nord du
16ème parallèle.
Le 28 février 1946, la Chine et la France signent deux traités pour régler le
problème de l’abolition des privilèges dont disposait la France en Chine ainsi que
l’évacuation des troupes chinoises stationnées en Indochine.
1 Hô Chi Minh, fondateur de la République démocrat ique du Viêt-Nam.
39
Dans le premier traité : la France renonce à tout privilège d’extraterritorialité en
Chine, ainsi qu’aux droits de toutes sortes qu’elle avait pu obtenir en Chine depuis la fin
du XIXème siècle, particulièrement ceux qui concerne l’accès privilège de ses bâtiments
aux ports et aux voies d’eau chinoise, le contrôle des services postaux en Chine, du
maintien des tribunaux français, etc.
Le deuxième traité concerne les liens entre la Chine et l’Indochine. Il prévoit que
la relève des troupes chinoises par les troupes françaises devra être achevée avant le 31
mars 1946. Cette concession constitue un revirement sensible du gouvernement chinois
par rapport à ses positions antérieures.
Ce traité portait exclusivement sur les relations franco-chinoises en Indochine.
« Les droits exceptionnels des nationaux résidant en Chine (établissement, propriétés,
commerce, impôts, justice, école, etc.) étaient confirmés. Au port de Haiphong, une zone
spéciale était réservée à la Chine ; celle-ci en assurait elle-même le contrôle douanier. Les
marchandises importées, destinées à être expédiées vers la Chine par le chemin de fer du
Yunnan, était exemptées de tout droit de transit. En fait, cela revenait à instaurer en
Indochine au profit de la Chine une situation comparable à celle à laquelle renonçait la
France en Chine »1.
L’accord franco-chinois du 28 février 1946 permettait à la France de réoccuper le
nord du Viêt-Nam. Puis, le 13 mars 1946, la Chine et la France signaient l’accord sur la
relève des troupes chinoise d’Indochine par les troupes françaises. L’armée chinoise
devait évacuer la zone d’occupation avant juin 1946.
En 1949, l’arrivée du PCC au pouvoir en Chine continentale apporte un élément
nouveau dans les relations franco-chinoises. La France met fin aux hésitations et décide
de ne pas reconnaître la RPC à cause du soutien du PCC à Hô Chi Minh.
1 François Joyaux, La nouvelle question d’Extrême-Orient 1, Paris, Payot, 1985, page.126.
40
D’une part, cars un des premiers actes du nouveau gouvernement chinois fut de
déclarer son soutien au Viêt-Minh1 et à tous les mouvements de libération nationale. Le
ministre des Affaires étrangères chinois Zhou Enlai déclare le 15 janvier 19502 que les
troupes de Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) s’enfuient au Viêt-Nam et adresse une note de
protestation au gouvernement français pour condamner l’armée française sur sa façon de
se comporter avec les Chinois habitant au Viêt-Nam le 18 janvier 1950. Le même jour, la
RPC reconnaît la République démocratique du Viêt-Nam et le lendemain 19, le Quotidien
du peuple annonce sous le titre « Fêter l’établissement des relations diplomatiques entre
la République populaire de Chine et le Viêt-Nam »3 que cette reconnaissance est un
nouveau succès dans la lutte anti-colonialiste.
De plus, Hô Chin Minh se rend secrètement, plusieurs fois en Chine et en URSS
de janvier à mars 1950 pour demander l’aide de Joseph Staline 4. Celui-ci lui dit que la
Chine et le Viêt-Nam sont voisins, et qu’il est préférable que la Chine l’aide. C’est la
raison pour laquelle il n’y a aucune aide du côté soviétique. Hô Chi Minh demande alors
une aide de Beijing (Pékin).
Quant à ce sujet, Gilles Férier explique : « L’intervention de l’Union soviétique
vis-à-vis de l’Indochine fut plus discrète que celle de son voisin chinois. » Il ajoute : « Le
rôle des Soviétiques fut surtout idéologique, soutenant les mouvements anti-colonialiste
et notamment de nombreux cadres du Viêt-Nam. Il est nécessaire de signaler que, dans
les années cinquante, l’Union soviétique avait des questions européennes à traiter (la
Hongrie en 1949, la Tchécoslovaquie en 1948, le Blocus de Berlin ou le différend avec
Tito), ce qui l’empêchait de concentrer ses forces en Extrême-Orient. »5
Hô Chi Minh obtint une grande aide de la part chinoise (un soutien diplomatique
et militaire ainsi qu’une coopération frontalière) après son voyage en Chine. Beijing
(Pékin) commence alors à utiliser son influence dans les mouvements communistes
1 Viêt-Minh (Ligue pour l’indépendance du Viêt -Nam) est créée en 1941 par le Parti communiste
vietnamien. 2Journal mensuel de Chine nouvelle ( Xinhua yuebao), n°4, 1950, page.848.
3 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 19 janvier 1950.
4 Huang Zheng , Hô Chi Minh et la Chine ( Huzhiming yu zhongguo), Beijing, Editions
de l'Armée populaire de libération, 1987, page.124. 5 Gilles Férier, Les trois guerres d’Indochine, Presses Universitaires de Lyon, 1993, page.20.
41
internationaux pour protéger ce nouveau régime communiste. Le PCC considère le Viêt-
Nam du Nord comme un pays frère de la Chine et son soutien contre la présence
coloniale française comme une contribution à sa propre défense. Les dirigeants chinois
fournissent une aide au niveau politique et logistique, conformément aux principes qui
régissent les initiatives communistes internationales1. Les relations entre Beijing (Pékin)
et Paris, de délicates, sont devenues hostiles : l’un du camp communiste et l’autre du
camp capitaliste.
D’autre part, le déclenchement de la guerre de Corée, le 25 juin 1950, met fin aux
hésitations antérieures des Etats-Unis. Désormais pour ce pays, la lutte contre l’expansion
communiste l’emporte sur les principes anti-colonialistes. Le 27 juin 1950, le Président
Truman annonce sa décision d’intervenir en Corée et de neutraliser le détroit de Taïwan,
ainsi que d’accroître en les livraisons militaires aux forces françaises en Indochine.
L’influence américaine sur la politique française en Indochine apparaît clairement dans la
déclaration ci-dessous du Président Truman :
« Dans ces circonstances, l’occupation de Formose par les forces communistes
serait menace directe à la sécurité de la région du Pacifique et aux forces des Etats-Unis
qui accomplissent leur œuvre nécessaire et légale dans cette région. »
« En conséquence, j’ai donné l’ordre à la 7ème flotte américaine du Pacifique
d’empêcher toute attaque contre Formose, en corollaire de cette action, je demande au
gouvernement chinois à Formose de cesser toute opération aérienne et navale contre le
continent chinois. Toute décision quant au statut futur de Formose devra attendre la
restauration de la sécurité dans le Pacifique, un traité de paix avec le Japon ou une
décision des Nations Unies. »
« J’ai aussi donné l’ordre que les forces américaines aux Philippines soient
renforcées et que l’assistance militaire aux Philippines soit accélérée. »
1 Le Communiqué sino-soviétique de 1954, Journal mensuel de Chine nouvelle ( Xinhua yuebao),
n°8, 1954, page.75
42
« J’ai également donné l’ordre que la fourniture d’aide militaire aux forces
françaises et aux Etats associés en Indochine soit accélérée et qu’une mission militaire
soit envoyée dans cette région afin de travailler étroitement avec ces forces. »1
L’aide militaire américaine à la guerre d’Indochine aggrave la tension sino-
française. Beijing (Pékin) considère que les Américains cherchent à créer une menace
contre la RPC par la Corée, l’Indochine et Taïwan. Le lendemain de la déclaration de
Truman, Mao Zedong lance un appel « Unissons-nous, notre peuple et les peuples du
monde entier, contre toutes les provocations de l’impérialisme américain ».2
En juin 1950, les troupes chinoises du général Chen Geng3 entrent au Viêt-Nam à
la demande de Hô Chi Minh et le mois suivant, le général Wei Guoqin y conduit une
délégation de conseillers militaires chinois. Les forces du général Chen Geng
commencent par détruire une base militaire française située dans la zone frontalière sino-
vietnamienne et aménage un axe logistique entre la Chine et le Viêt-Nam du Nord,
facilitant ainsi l’acheminement de l’armement vers le Viêt-Nam du Nord. D’après les
autorités chinoises, le soutien au Viêt-Nam est un devoir internationaliste contre la
présence coloniale française4.
A partir du mois d’octobre 1950, les Etats-Unis décident d’augmenter leur aide
militaire en faveur de la France. Les deux pays publient le 23 septembre 1951, un
communiqué annonçant un accroissement de l’aide américaine à la France pour les
opérations en Indochine. Entre 1950 et 1954, les Américains payent 80% des frais de
guerre, la France seulement 20%.
La participation des Américains à cette guerre indochinoise est considérée par
Beijing (Pékin) comme une extension du conflit qui se généralise et oppose désormais
communisme et capitalisme. Beijing (Pékin) et Paris ont choisi des camps opposés et
trouvent aucune possibilité d’établir leurs relations diplomatiques
1 François Joyaux, La nouvelle question d’Extrême-Orient 1, Paris, Payot, 1985, page.351.
2 Le Quotidien du people ( Renlin ribao), le 29 juin 1950. La RPC regroupe déjà 200,000 soldats
à côté de la frontière coréenne en septembre 1950. 3 Chen Geng , représentant du PCC au Viêt-Nam du Nord en septembre 1950.
4 Xie Yixian , Qu Xing , Xiong Zhiyong , Histoire contemporaine de la diplomatie
chinoise 1949-2001 ( 1949-2001 Zhongguo dangdai waijiaoshi 1949-2001), Beijing,
Ed itions de Jeunesse de Chine ( Zhongguo Qingnian chubanshe), 1997, page.30.
43
B) La guerre de Corée (1950-1953)
La guerre de Corée n’est pas un confit direct entre Beijing (Pékin) et Paris, mais
cela « renforce l’antagonisme franco-chinois, puisqu’un contingent français participe aux
forces des Nations unies pour lutter contre la Corée du Nord, soutenue par la Chine ».1
L’intervention des Etats-Unis, à la fois dans les guerres d’Indochine et de Corée, change
radicalement le projet de développement de la Chine nouvelle dont la priorité devient la
participation aux guerres afin d’assurer sa sécurité. Les Etats-Unis, avec leurs alliés,
bénéficient de l’appui de l’ONU, sanctionnent d’abord la RPC :
- L’ONU confie aux Etats-Unis le commandement de ses troupes en Corée le 7
juillet 1950. La France fournit plus de mille soldats aux casques bleus.
- L’ONU déclare la République populaire chinoise, agresseur, le 1er février 19512.
- L’ONU décide, avec 44 autres pays, y compris la France, un embargo stratégique
à l’égard de la RPC et de la Corée du Nord le 18 mai 19513.
Toutes ces mesures amènent Beijing (Pékin) et Paris à se trouver dans les deux
camps antagonistes. Voilà pourquoi il est nécessaire de rappeler ici cette guerre coréenne.
Deux opinions s’affrontent par rapport à la participation de la RPC à la guerre de
Corée :
La première, gardée généralement par les autorités et les chercheurs chinois,
prétend que c’est pour défendre sa propre sécurité que la RPC envoie, dès le 19 octobre
1950, quatre mois après le début de conflit, 260,000 soldats volontaires en Corée. Les
Etats-Unis auraient tenté de déstabiliser le pays en l’encerclant au Nord par la Corée, à
l’Est par Taïwan et au Sud par l’Indochine, entraînant une tension entre ces pays et la
Chine.
L’envoi de la 7ème flotte américaine en mer de Chine coïncide avec le moment où
les Chinois s’apprêtent à reprendre Taïwan par la force ; ce qui suscite la colère des
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.464.
2 Le 1 février 1951, l’ONU déclare la Chine populaire d’agression sur proposition américaine le 12 janvier
1951, en rejetant la proposition en douze pays et la proposition soviétique. L’Inde, la Birmanie, l’Egypte,
l’Indonésie, la Suède, ainsi que les pays socialistes s’opposent à la proposition américaine. 3 Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la RPC condamne la décision de l’ONU le
lendemain le 19 mai 1951.
44
dirigeants chinois. Le 23 septembre 1951, un communiqué franco-américain, publié à
Washington, annonce l’accroissement de l’aide américaine à la France pour les
opérations militaires en Indochine.
Mais certains chercheurs d’autres pays maintiennent une opinion différente. Ils
considèrent que l’URSS désirant contrôler l’Asie du Sud-est oblige la RPC à soutenir
Kim Il-sung1 dans conquête du Sud. La Chine ne peut refuser de s’engager en vertu du
traité d’amitié, d’alliance et d’assistance mutuelle sino-soviétique du 14 février 1950, ce
qui rend les Américains inquiets. Cette guerre modifiera pour longtemps les relations
sino-américaines. Les deux pays s’opposent à tous niveaux : idéologique, politique,
économique et stratégique. Leur affrontement continue jusqu’au voyage du Président
américain Nixon à Beijing (Pékin) en 1972.
Le 7 octobre, les forces de l’ONU franchissent le 38ème parallèle en direction de
Pyongyang. Le 11, Zhou Enlai, en tant que Premier ministre et ministre des Affaires
étrangères de la RPC, déclare publiquement : « Les événements de Corée menacent la
sécurité de la Chine ». Le 18 octobre, Pyongyang est occupé, le 26 les troupes avancées
atteignent le fleuve Yalu, celui qui détermine une portion de la frontière sino-coréenne.2
Le 19 octobre les premiers « volontaires du peuple » chinois sont envoyés en
Corée du Nord sous le commandement du général Peng Dehuai3 pour s’engager à ce
conflit pour assurer la sécurité de la nouvelle République chinoise. Ils affrontent les
forces de l’ONU, puis décrochent, dans l’espoir que ceux-ci arrêtent leur agression envers
la Corée du Noud. La Chine constate que le général Douglas MacArthur n’a pas bien
compris ce message puisqu’il continue d’avancer, décide l’offensive et réussi à repousser
les forces onusiennes à l’extrême sud-est de la Corée. MacArthur réclame le renfort des
1Kim Il-sung fut le fondateur et le premier d irigeant de la Corée du Nord de 1948 jusqu'à sa mort en 1994.
2 En référence des ouvrages suivant : Œuvres choisies de Mao Zedong, tome V ( Mao
Zedong xuanji diwujuan), Beijing, Edit ions du Peuple ( Renmin chubanshe), 1977 ; Matthew
Bunker Ridgway, Les Mémoires de la guerre de Corée (The Korean War Chaoxian
zhanzheng huiyilu), Beijing, Edit ions de Science militaire ( Junshi kexue chubanshe),
1987 ; Li Weike , Le caractère et l'évolution de la guerre de Corée (
Chaoxian zhanzheng de xingahi jiqi bianhua), Revue Enseignement de l'histoire ( Lishijiaoxue),
Tianjin, Ed itions de l'Université de Nankai ( Nankai daxue chubanshe), 1997. 3 Peng Dehuai est commandant en chef de l'armée des volontaires du peuple chinois de la guerre de
Corée.
45
forces aériennes supplémentaires pour porter directement les conflits en territoire chinois.
Si Truman ne lui donne pas une suite favorable, il déclare publiquement que les Etats-
Unis peuvent recourir à l’utilisation de la force nucléaire. Le Royaume-Uni intervient
alors pour résoudre le conflit par la négociation. En mars 1951, les deux belligérants
s’épient de part et d’autre du 38ème parallèle.
L’ONU décide le 18 mai 1951 un embargo stratégique à l’égard de la RPC et de
la Corée du Nord, Paris vote cette résolution. Plus tard, le pourrissement progressif du
conflit et les contradictions idéologiques, transforment le conflit en guerre sino-
américaine.
Cette guerre se prolonge jusqu’au cessez- le- feu du 27 novembre 1952.
L’armistice est signé le 27 juillet 1953 à Panmunjom, par l’amiral Harrison et le général
Nam. Les négociations portent sur quatre points essentiels : la ligne de démarcation
militaire, le contrôle de l’armistice, les garanties militaires et les prisonniers. L’accord se
fait sur le 38ème parallèle, les troupes américaines reculent d’avant guerre. Ce traité
d’armistice signifie pour Beijing (Pékin) l’échec des Américains dans leur lutte contre le
communisme en Asie du Nord-est1.
Pendant cette guerre, les deux côtés ont payé un lourd tribut, avec 2, 415,600 tués,
disparus et blessés. Les Etats-Unis ont pour leur part dépensé plus de 20 milliards de
dollars.
Détails des victimes de la guerre de Corée2 :
Pays Morts Blessés
Corée du Sud : militaire 147,038 209,975
Corée du Sud : civil 373,599 229,625
Etats-Unis d’Amérique 33,629 103,284
Autre alliés de l’ONU 3,143 11,833
Corée du Nord* 300,000 220,000
Chine Populaire* 200,000 700,000
1 Documentations internationales du ministère des Affaires étrangères de la RPC, n°6, Beijing, 1951.
2 Sources : François Joyaux, La nouvelle question d’Extrême-Orient, I, Paris, Payot, 1985, page.166.
* : estimations.
46
Le contingent français a eu 288 morts et un millier de blessés.
Selon l’analyse des historiens chinois1, la guerre de Corée était une guerre civile
coréenne. La RPC ne voulait pas s’engager dans cette affaire, car elle a besoin d’un
redressement économique après la longue guerre à l’intérieure de la Chine. Par
conséquent, la tâche de l’armée chinoise était détournée vers d’autres priorités :
l’édification socialiste, la réunification2 et la souveraineté nationale.
Le rapport de Mao Zedong du 6 juin 1950, lors de la troisième session du VIIème
Congrès du PCC, indique clairement sur ce point : « La tâche centrale du PCC s’orientera
vers l’amélioration essentielle du secteur financier durant trois ans. »3
Les cinq tâches de l’armée chinoise confirment cette politique : avancer ver
Taïwan et le Tibet de réunifier toute la Chine ; stabiliser les ordres locaux ; participer au
travail civil ; renforcer l’éducation nationale ; réformer l’armée (dont 1,4 millions de
militaires sont mutés aux travaux civils).4
Mais lorsque les troupes américaines franchissent le 38ème parallèle et atteignent
la frontière chinoise, Beijing (Pékin) pense que cette guerre menace directement la RPC
et se décide d’y participer. « La résistance contre les Etats-Unis, l’aide à la Corée et la
défense de la patrie » expliquent les buts de l’intervention chinoise.
C) Premier pas franchi entre Paris et Beijing (Pékin) à la conférence de Genève
La conférence de Genève offre l’occasion d’une rencontre dans un climat propice
entre le Premier ministre chinois Zhou Enlai et le Président du Conseil français Pierre
1 Li Weike , Le caractère et l'évolution de la guerre de Corée (
Chaoxian zhanzheng de xingahi jiqi bianhua), Revue Enseignement de l'histoire ( Lishijiaoxue),
Tianjin, Ed itions de l'Université de Nankai ( Nankai daxue chubanshe), 1997. 2 A l’époque, certaines côtes du sud-est, la région de Taïwan et le Tibet sont encore hors du régime
communiste chinois. 3 Le rapport de Mao Zedong le 6 juin 1950, Œuvres choisies de Mao Zedong, tome V (
Mao Zedong xuanji diwujuan), Beijing, Editions du Peuple ( Renmin chubanshe), 1977,
page.18. 4 Nie Rongzhen , Le rapport de la deuxième session du 1
er Congrès de la Conférence consultative
politique du people chinois, Beijing, le 3 ju illet 1950.
47
Mendès France pour promouvoir des relations bilatérales entre la Chine populaire et la
France.
La conférence s’ouvre le 26 avril 1954 sur la Corée d’abord, elle finit par l’échec
des négociations le 15 juin.
A partir du 8 mai, sont représentés à la conférence sur l’Indochine : les Etats-Unis
d’Amérique, le Royaume-Uni, la France, l’URSS, la RPC, le Cambodge, le Laos, le Viêt-
Nam du Nord et le Viêt-Nam du Sud. C’est la première fois qu’une délégation de la RPC,
dirigée par le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Zhou Enlai, participe à
une réunion internationale au cours de laquelle il rencontre Pierre Mendès France. Ils
projettent ensemble de mettre fin au risque d’internationalisation et de confrontation entre
Beijing (Pékin) et Washington, malgré le désaccord des Etats-Unis.
Sur le problème de l’Indochine, deux sujets essentiels sont traités :
- Le cessez- le-feu
Les négociations avancent lentement au début. Après la chute du camp retranché de
Diên Biên Phu le 7 mai 1954 et l’arrivée au pouvoir le 17 juin de Pierre Mendès
France, les négociations progressent. Lorsque Zhou Enlai prend la parole, il déclare
sa volonté d’œuvrer en faveur de la paix en Indochine par la voie diplomatique 1. Il
adopte une position souple, parfois très proche de celle de la Grande-Bretagne ou de
la France2. Cette position trouve un écho favorable chez Pierre Mendès France qui
1 Selon le témoignage de Zhang Xichang (il travaillait au Bureau des affaires françaises du
ministère des Affaires étrangères de Chine depuis 1952, interprète du français de Mao Zedong et de Zhou
Enlai), Zhou Enlai demande simplement la paix d'Indochine. Voir l'ouvrage de Zhang : Troisième essor
pour établir les relations diplomatiques de la RPC( gongheguo disanci jianjiao
gaochao), Beijing, Ed itions de Presses Connaissances universelles ( shijie zhishi
chubanshe) , 1998. 2 François Joyaux, La politique extérieure de la Chine populaire, Paris, Presses Universitaires, 1983,
page.23.
48
déclare « qu’il démissionnerait si l’armistice n’était pas conclu avant le 20 juillet
1954 ».1
- La délimitation entre le Sud et le Nord :
Une divergence franco-vietnamienne se produit concernant la délimitation de la
frontière entre le Nord et le Sud. Zhou Enlai conduit les négociations sur une ligne
proche de celle de Pierre Mendès France. Le Viêt-Nam préconise de reculer jusqu’au
16ème parallèle, mais Pierre Mendès France préfère le 18ème parallèle sur la base des
données historiques et géographiques.
A ce propos, Pierre Mendès France s’entretient le 23 juin avec Zhou Enlai à
l’ambassade de France à Berne. C’est la première fois que les dirigeants des deux pays se
rencontrent bilatéralement. Zhou Enlai, un habile négociateur, consulte ensuite Hô Chi
Minh à Liuzhou2 du 3 au 7 juillet et les dirigeants soviétiques à Moscou, avant de
rencontrer à nouveau Pierre Mendès France les 13 et 17 juillet pour discuter du problème
de la nouvelle frontière.
Le 20 juillet, la France et le Viêt-Nam sont d’accord pour que le 17ème parallèle
délimite la frontière entre les deux zones ; la France obtient des armistices séparés pour le
Cambodge et le Laos. Les accords qui seront conclus à Genève le 21 juillet 1954,
terminent un conflit qui durait depuis huit ans et mettent un terme à la décolonisation de
l’Indochine.
Les intérêts chinois à l’arrêt de la guerre d’Indochine :
- La paix en péninsule indochinoise permet de réduire le budget de la guerre du
gouvernement chinois. La réalisation de son premier plan quinquennat a pris du
retard à cause de la participation à la guerre de Corée. Si les Américains
poursuivent la guerre d’Indochine comme la guerre de Corée, la RPC se trouvera
dans une situation économique difficile3.
1 Pierre France Mendès, nommé Président du Conseil le 18 ju in 1954, s’engage à mettre fin de la guerre
d’Indochine qui est une lourde charge pour la France à l’époque. 2 Liuzhou , ville chinoise de la Province du Guangxi qui est une province chinoise limitrophe
avec le Viêt-Nam. 3 Documentations du ministère des Affaires étrangères de la RPC , n°2, page.154.
49
- Les dirigeants chinois espèrent la détente en Asie et souhaitent ainsi réduire
l’influence des Américains en Asie du Sud-est. « L’anti- impérialisme américain »
monopolise la diplomatie de Beijing (Pékin).
Les trois points positifs pour la nouvelle République chinoise par rapport à cette
série de négociation de la paix en Indochine :
- La rencontre entre Zhou Enlai et Pierre Mendès France à Genève en 1954 permet
un échange de point de vue entre les deux gouvernements dans un climat amical.
- La conférence de Genève de 1954 fait prendre conscience aux dirigeants chinois
que « les conflits internationaux pourront être résolus par la voie diplomatique »1
et offre une expérience précieuse pour la diplomatie de la nouvelle République.
- La politique extérieure chinoise sur la coexistence pacifique est élaborée grâce à
la réalisation de la paix en Indochine.
De plus, pendant la conférence de Genève en 1954, Zhou Enlai fait le 28 juin,
avec Néhru, Premier ministre indien une déclaration conjointe dans laquelle les Cinq
principes de la coexistence pacifique sont exposés officiellement2. Ces cinq principes
sont soutenus rapidement par le Cambodge, le Laos, le Viêt-Nam, le Népal et d’autres 16
pays asiatiques à la conférence de New Delhi en avril 19553.
Pour la RPC, le rétablissement de la paix en Indochine marque non seulement
l’échec américain dans sa politique asiatique suite à la guerre de Corée, mais aussi une
victoire du communisme de Hô Chi Minh en Asie du Sud-est. La paix dans cette région
favorise la détente internationale. Le rôle de Pierre Mendès France qui interrompait ce
conflit dès son accession au pouvoir est admiré par les dirigeants chinois.
Quant à Zhou Enlai, il a réussi à imposer la position chinoise à la fin de la
conférence, « il fut décisif pour faire accepter au Viêt-Nam la coupure du Viêt-Nam à la
hauteur du 17ème parallèle et l’organisation des élections générales dans un délai de deux
1 Le discours de Zhou Enlai, Documentations du ministère des Affaires étrangères de la RPC , n°3,
page.137. 2 Les Cinq principes sont d’abord mentionnés dans l’Accord sur le commerce et les relations entre le Tibet
chinois et l'Inde qui a été signé le 29 avril 1954 3 Journal mensuel de Chine nouvelle ( Xinhua yuebao), Beijing, n°5, 1954, pp.23,24 et 25.
50
ans. Cette modération devait même se traduire par diverses pressions de la Chine sur le
Viêt-Minh que le gouvernement de Hanoï reprochera ouverture à celui de Beijing (Pékin)
en 1979 »1.
L’évolution positive des relations sino- françaises est ainsi relatée dans les
Mémoires du général Jacques Guillermaz : « La conférence de Genève de 1954 a fait
l’objet de plusieurs études, ...en faisant une p lace particulière de la délégation chinoise
avec laquelle j’avais par destination de fréquents contacts ». « La participation chinoise à
la conférence de Genève en 1954 pour le règlement du premier conflit d’Indochine donne
un tour plus pacifique et plus affirmé à la politique étrangère chinoise ; la conférence
afro-asiatique de Bandung marque un incontestable tournant dans l’histoire du monde ;
l’influence de la Chine sur la conférence elle-même allait s’en rouvert renforcées. »
« L’entretien du 23 juin entre Pierre Mendès France et Zhou Enlai, n’apporte pas
d’éléments très nouveaux dans la négociation et ne touche aucun problème de fond. Mais
un bon climat était crée deux hommes Etat curieux l’un de l’autre et également désireux
d’aboutir dans des délais rapides », « il était clair que les Chinois s’étaient servis avec
empressement de mon intervention pour faire pression sur la délégation du Viêt-Nam,
jouant ainsi notre jeu et le leur »2.
Etienne Manac’h analyse la position de la RPC à la conférence de Genève ainsi
que la possibilité de liens officiels franco-chinois, en ces termes : « Ni la bonne volonté,
ni la volonté personnelle d’un Pierre Mendès France, ne semblent pouvoir être mises en
doute, et il y eut un moment, en 1954, où des espoirs pouvaient naître. La jeune
République Populaire de Chine, elle n’a que cinq ans à peine, participe en effet pour la
première fois à une importante conférence internationale, celle de Genève. Rencontre
spectaculaire entre la Chine et l’Occident. Hélas ! Cette conférence ne parvient pas à
ouvrir la route à une meilleure compréhension entre les régions du monde, elle parvient
seulement à mettre fin, et encore n’est-ce que provisoirement, au drame de la guerre
1 François Joyaux, La politique extérieure de la Chine populaire, Paris, Presses Universitaires, 1983,
page.23. 2 Guillermaz Jacques, Une vie pour la Chine, Mémoires 1937-1989, Paris, Robert Laffont, 1994, pp.246,
252 et 253.
51
d’Indochine. ...En revanche, les mêmes Zhou Enlai et Mendès France auront de cordiales
conversations. Pourtant, l’heure n’est pas encore venue d’une discussion de fond sur les
rapports entre les deux pays. C’est le passé qu’on tente difficilement de régler, non
l’avenir. »1
Cette première rencontre ouvre une voie amicale, mais juste de courte durée.
D) Le retour des tensions entre Paris et Beijing (Pékin) après la conférence de
Bandung de 1955
La conférence de Bandung ouvre une voie à la diplomatie de la RPC en Asie et
surtout en Afrique. Elle a cependant crée à nouveau un point de discorde entre Paris et
Beijing (Pékin) autour du sujet de la décolonisation. La Chine qui avait été victime d’une
série de guerres et d’agression impérialistes entre 1840 et 1949 est toujours sensible face
aux sujets de colonisations, en gardant une mémoire traumatique.
Lorsque Zhou Enlai participe à la conférence de Bandung, du 18 au 24 avril 1955,
sur l’invitation du Premier indien Nehru, la RPC n’entretient des relations diplomatiques
qu’avec sept pays parmi les 24 participants. Ils sont : Viêt-Nam du Nord, Inde, Pakistan,
Indonésie, Birmanie, Népal et Ceylan. Les sujets principalement abordés sont : neutralité,
coexistence pacifique, sécurité collective.
Cette conférence donne à Zhou Enlai une opportunité de réaffirmer sa politique
extérieure basée sur cinq principes de la coexistence pacifique qui permettent d’étayer de
base des relations réciproques entre les pays à systèmes sociaux différents 2. Zhou Enlai
réussit à convaincre ces pays du bien fondé de la politique de coexistence pac ifique, bien
que certains pays, alliés des Etats-Unis, redoutent les expansions communistes en Asie, à
la suite de la participation chinoise dans les guerres de Corée et d’Indochine, ainsi que de
la tension dans le détroit de Taïwan.
1 Historiens & Géographes, Paris, Buisson, n°309, avril, 1986, page.1073.
2 La politique de Chine ( zhengzhi), Beijing, Edit ions des Langues étrangères ( Waiwen
chubanshe), 1986, page.118.
52
La conférence de Bandung signifie également un tournant dans la diplomatie
chinoise : la RPC prendra contact avec les pays asiatiques et africains avec qui elle n’a
pas de relations diplomatiques. A partir de 1955, la RPC renforce, dans un premier temps,
ses relations avec les pays voisins, à l’occasion des visites de Zhou Enlai au Pakistan, au
Viêt-Nam, au Laos, au Cambodge, en Birmanie, en Inde, au Népal, en Afghanistan, en
Mongolie et au Sri Lanka. Ensuite, à partir de 1963, Zhou Enlai visite dix pays africains,
dont cinq anciennes colonies françaises : la République arabe unie (Egypte), le Ghana, le
Soudan, l’Ethiopie, la Somalie, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, la Guinée et le Mali.
Puisque la RPC soutient quasiment tous les mouvements qui luttent pour
l’indépendance de leurs pays, Beijing (Pékin) et Paris se trouvent une fois de plus en
opposant comme c’était le cas : lors de la crise du canal de Suez en 1956, et notamment
lors de la guerre d’Algérie de 1958 à 1962.
L’opposition entre Beijing (Pékin) et Paris par rapport à la crise de Suez :
Bien qu’ils aient réussi à résoudre ensemble le problème de la guerre d’Indochine
lors de la conférence de Genève deux ans avant, Beijing (Pékin) et Paris n’ont pas pu
éviter la confrontation sur la question de l’attitude des mouvements vis-à-vis de
décolonisation en Afrique.
La conférence de Bandung a donné une première occasion de dialogue entre le
Premier ministre chinois Zhou Enlai et le Président égyptien Nasser. Les sujets évoqués,
lors de cette rencontre, sont la question de Taïwan et le problème entre les pays arabes et
Israël. La RPC et l’Egypte décident de commencer par développer des échanges
commerciaux avant d’établir des relations diplomatiques, ce qui amène l’Egypte à rompre
avec Taïwan dans l’avenir. Un an plus tard, le 30 mai 1956, le Caire et Beijing (Pékin) se
sont échangés d’ambassadeur et la RPC est présente au Caire, la plus grande ville
africaine.
Beijing (Pékin) soutient fermement Nasser dans la crise de Suez qui l’oppose à la
France et au Royaume-Uni. Dans son discours du 26 juillet 1956, Nasser a affirmé sa
volonté de nationaliser le Canal de Suez, Beijing (Pékin) considère que cette
revendication est légitime. La position occidentale à Suez lui rappelle le problème des
53
concessions étrangères en Chine. Beijing (Pékin) condamne la France et le Royaume-Uni,
les désigne comme « agresseurs » dans le conflit qui les oppose à l’Egypte à propos du
canal.
Et selon François Joyaux, en échange de la suspension des relations diplomatiques
de l’Egypte avec Formose et de l’établissement de relations diplomatiques entre l’Egypte
et la nouvelle République populaire chinoise, celle-ci s’engage à soutenir l’Egypte contre
les puissances européennes1.
Après le retrait franco-anglais d’Egypte, les Etats-Unis occupent leur place. Le
Président américain Eisenhower2 déclare le 5 janvier 1957 offrir une aide économique et
militaire aux Etats du Proche-Orient qui en feront la demande. La RPC continue à
combattre la présence du « néo-colonialisme » américain au Proche-Orient. Comme
l’affirme Zhou Enlai dans son rapport politique, « doctrine Eisenhower », sous un
prétexte « anti-communiste et anti-soviétique », n’est qu’une expansion et une agression
du gouvernement américain qui vise à empêcher l’émancipation des mouvements de
l’indépendance, et de remplacer les intérêts coloniaux franco-anglais par ceux des Etats-
Unis3.
La RPC appuie alors les propositions soviétiques sur la paix et la sécurité au
Moyen-Orient et au Proche-Orient 4 , en s’opposant à la « doctrine Eisenhower ».
L’hostilité sino-américaine se poursuit alors en Syrie en 1957 et au Liban en 1958.
La guerre d’Algérie (1958-1962) :
Au fur et à mesure de la progression de la décolonisation, la politique chinoise
s’engage dans la guerre d’indépendance algérienne. La RPC avait apporté déjà son
soutien à l’indépendance d’Algérie pendant la conférence de Bandung en 1955.
1 François Joyaux, La politique extérieure de la Chine populaire, Paris, Presses Universitaires, 1983, page.38. 2 Dwight Eisenhower est le 34ème président des États-Unis, durant deux mandats de 1953 à 1961. Au cours de la Seconde Guerre mondiale , il est général cinq étoiles de l'armée américaine et commandant en chef des forces alliées en Europe. 3 Le rapport d’un voyage en 11 pays en Asie et en Europe de Zhou Enlai le 5 mars 1957 et la déclaration du gouvernement chinois le 17 février 1957. 4 Documentations de la politique extérieure de la RPC , 1957, n°4, page.299.
54
Le soutien chinois se manifeste d’abord dans les différents discours : « Le peuple
chinois sera au côté du peuple algérien contre la présence française »1, souligne Zhou
Enlai le 28 juin 1956. Deux ans plus tard, à l’occasion de la réception de la délégation du
Front pour la Libération Nationale d’Algérie, en avril 1958, une fois de plus, Zhou Enlai
s’exprime : « Le peuple chinois apportera son soutien matériel à l’Algérie pour son
indépendance ».
Lorsque le gouvernement provisoire algérien est créé le 19 septembre 1958, la
RPC le reconnaît deux jours après, leurs relations diplomatiques s’établissent le 20
décembre, alors que l’Algérie est toujours territoire français.
Il est clair que, pour la France, la reconnaissance de l’Algérie est un acte
d’hostilité et de provocation. Quant à la RPC, elle dénonce le fait que la France poursuit
des relations officielles avec Taïwan2. L’URSS ne réagit pas en raison du début de la
détente franco-soviétique. Le soutien politique de la Chine populaire se transforme en
une fourniture de matériel militaire en décembre 1958, l’aide transitant par un pays tiers.
En 1959, le Quai d’Orsay informait l’ambassadeur chinois en Suisse que la
France était prête à rompre avec Taïwan en échange de l’arrêt du soutien chinois en
Algérie. Malgré cela, la RPC continue à fournir son aide au moment de libération
nationale algérienne.
« Un jour, si la France souhaite connaître la RPC, Beijing (Pékin) lui
demanderait deux conditions : la rupture avec Taïwan et le soutien chinois en Algérie »,
cette idée fut énoncée par le Président Mao Zedong lors de ses entrevues avec le Premier
ministre du gouvernement provisoire algérien à l’occasion du voyage de celui-ci en
Chine3. La sympathie des dirigeants chinois pour l’Algérie brouille les rapports entre
Pairs et Beijing (Pékin).
1 La déclarat ion de Zhou Enlai au Congrès de l’Assemblée nationale chinoise le 28 ju in 1956. 2 La conversation de Mao Zedong avec la délégation du gouvernement provisoire algérien le 17 mai 1960, voir : Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong ( maozedong waijiao wenxuan), Beijing, Édit ions documentaires du Comité central ( zhongyan wenxian chubanshe), 1994. 3 Le discours de Mao Zedong avec le Premier ministre du gouvernement provisoire algérien en septembre 1959.
55
La détente entre la RPC et la France revient après la signature des accords
d’Evian en 19621. Durant cette période, le général de Gaulle abandonne les colonies
françaises en Afrique et affranchit l’Algérie.
La volonté du général de Gaulle d’établir les relations officielles avec la RPC,
dépend de la situation internationale et, fait partie de sa stratégie globale. Il favorise
partout la décolonisation et reconnaît l’importance de la RPC dans le monde, malgré
l’influence des Etats-Unis sur la politique française à cette époque-là. Le général est très
attentif à l’éveil de la Chine populaire, il voit surtout dans la Chine « une réalité
géostratégique et une puissance future »2. En visionnaire qu’il est, de Gaulle entend en
effet établir des « relations régulières » avec la « Chine de toujours ». Il considère qu’
« avant d’être communiste, la Chine est la Chine », c’est-à-dire l’héritière d’une
civilisation quatre ou cinq fois millénaire, peuplée de plusieurs centaines de millions
d’habitants, installés sur un immense territoire et disposant d’un potentiel de
développement considérable. « Pour le chef de l’Etat français, il s’agit d’être réaliste, de
se montrer pragmatique ».3 Même avant de retourner au pouvoir en 1958, le général de
Gaulle s’est montré favorable à l’établissement de relations avec la Chine populaire.
Dans une longue lettre manuscrite, il remercie l’ancien président du Conseil, Edga r Faure,
de lui avoir envoyé son livre, Le Serpent et la Tortue (paru en 1957). Le général se dit
intéressé par cette lecture et par l’idée d’une reprise des relations diplomatiques avec la
Chine. Après un voyage privé en Chine en 1957, où il a rencontré Mao Zedong et Zhou
Enlai, Edgar Faure préconise en effet une reprise des relations diplomatiques avec la
Chine. « Je pensais qu’il était absolument grotesque que la plupart des grands pays
ignorent purement et simplement ce continent », déclare-t- il alors.4
De plus, comme la Chine, De Gaulle ne voit d’un bon œil les visées
hégémoniques des Etats-Unis. Il déploie tous ses efforts en vue d’assurer une
indépendance à la politique extérieure de son pays. La France ménage ses intérêts
1 Les accords d’Evian sont signés entre la France et le gouvernement provisoire de la République
algérienne le 18 mars 1962, qui aboutissement à un cessez-le-feu en Algérie. 2 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.466.
3 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.489.
4 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.490.
56
économiques et désire revenir dans la région d’Extrême-Orient en étant assuré d’un
soutien et d’une bienveillance chinoise1.
II-2 Rapprochement de la RPC et la France
A) Stratégie diplomatique du général de Gaulle
La reconnaissance de la RPC est un élément de la stratégie du général de Gaulle
qui cherche une indépendance vis-à-vis des blocs, pour but de faciliter le retour de la
France en Indochine. Par sa situation, la République chinoise est susceptible de diminuer
l’influence des Américains en Asie et « de nouveau considérée comme un interlocuteur
possible »2.
Si la France entretient des relations diplomatiques avec Beijing (Pékin), elle
pourra être plus présente dans la région d’Extrême-Orient, en profitant des relations
triangulaires « Beijing (Pékin), Washington, Moscou », pour réduire l’influence des deux
superpuissances dans les affaires internationales. C’est ce qui a incité le général de Gaulle
à préconiser la reconnaissance de la RPC. On expliquera la stratégie diplomatique du
général de Gaulle en trois points.
1. Motivation de la reconnaissance de la RPC du général de Gaulle
L’instauration de la paix au Viêt-Nam est un souhait commun entre Beijing
(Pékin) et Paris. Par conséquent, l’intervention américaine au Viêt-Nam en 1963 soulève
non seulement l’indignation de Beijing (Pékin), mais aussi l’attention et l’émotion de
Paris.
Depuis 1950, la RPC et le Viêt-Nam du Nord entretiennent des liens d’amitié
tissés comme fraternelle lors de la guerre anti-coloniale française. Du côté français dont
le Viêt-Nam a été une colonie durant un siècle, le général de Gaulle y est attaché. Ainsi,
1 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions Connaissances universelles (
shijie zhishi chubanshe) , 1998, page.15. 2 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.465.
57
Beijing (Pékin) et Paris souhaitent tous rétablir la paix en Indochine, mais chacun selon
les intentions précises. La RPC aide le Viêt-Nam pour but de combattre la néo-
colonisation américaine, alors que la France désire « tourner la page coloniale, celle de
nos concessions en Chine, celle de l’Indochine française »1, comme découvre Alain
Peyrefitte dans son dialogue avec le général de Gaulle.
Ainsi, l’aggravation de la crise vietnamienne permettra à la France, une fois de
plus, de pouvoir dialoguer avec Beijing (Pékin). La RPC pourra agir sur les deux fronts :
elle pourra à la fois convaincre les dirigeants vietnamiens de prendre des positions plus
conciliantes et combattre les Américains, comme e lle l’avait fait dans la guerre de Corée.
Cette hostilité de la Chine envers les Etats-Unis réduit l’influence des Américains en
Indochine et y favorise le retour français.
Beijing (Pékin) consacre toutes ses forces à aider le Viêt-Nam du Nord contre
l’agression de l’« impérialisme américaine ». Il accuse d’abord les Américains d’être
néo-colonialistes au Viêt-Nam, en remplaçant les Français depuis leur retrait à la fin de
l’année 1955. Le Quotidien du peuple souligne que, depuis les accords de Genève, de
1954 à 1959, il y a du côté sud-vietnamien 5,000 tués, 10,000 blessées et 18,000 hommes
emprisonnés par les troupes Ngô Dinh Diên appuyées par les Américains 2.
Dans un premier temps, Beijing (Pékin) soutient le gouvernement d’Hô Chi Minh
par la voie diplomatique, comme le souligne un important éditorial le Quotidien du
peuple du 17 juillet 1959. Plus tard, le ministre chinois des Affaires étrangères affirme
que la Chine soutient le gouvernement d’Hô Chi Minh, depuis le débarquement des
forces américaines au Viêt-Nam du Sud en mai 19613.
Lorsque le commandement militaire américain s’installe à Saïgon, avec 3,000
conseillers le 8 février 1962, Beijing (Pékin) considère que cela constitue « une agression
militaire contre Viêt-Nam », que les Américains interviennent dans les affaires intérieures
1 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle II, Paris, Fayard, 1997, page.493.
2 Le Quotidien du people ( Renlin ribao), le 20 juillet 1959.
3 Le Quotidien du people ( Renlin ribao), le 22 mai 1961.
58
du Viêt-Nam »1. C’est pourquoi suite de la demande de Ho Chi Minh au cours de sa
visite en Chine en été 1962, Beijing (Pékin) commence à apporter au Viêt-Nam du Nord
une aide militaire sans condition.
Enfin, le 29 août 1963, Mao Zedong déclare lutter contre les Etats-Unis et les
troupes de Ngô Dinh Diên sud-vietnamien, et lance un appel pour soutenir l’appel d’Hô
Chi Minh contre l’agression américaine et des troupes de Ngô.
La crise du Viêt-Nam provoque également une tension franco-américaine : le
général de Gaulle modifie sa politique à l’égard des Etats-Unis. Déjà, le Président John
Kennedy a demandé le soutien du général de Gaulle à l’occasion de son voyage en
France en mai 1961, mais il n’a pas eu de réponse de la pa rt française.
Pour la première fois, le général de Gaulle s’exprime clairement après le
déclenchement de la crise vietnamienne. Il déclare à cet effet à l’issue du Conseil des
ministres du 29 août 1963 :
« Les graves événements qui se déroulent au Viêt-Nam sont suivis à Paris avec
attention et avec émotion. L’œuvre que la France a naguère accompli en Cochinchine, en
Annam et au Tonkin, les attaches qu’elle a gardées dans l’ensemble du pays, l’intérêt
qu’elle porte à son développement, l’amène à comprendre particulièrement bien et à
partager sincèrement les épreuves du peuple vietnamien. D’autre part, la connaissance
qu’elle a de la valeur de ce peuple, lui fait discerner quel rôle il serait capable de jouer
dans la situation actuelle de l’Asie, pour son propre progrès et au bénéfice de la
compréhension internationale, dès lors qu’il pourrait déployer son activité dans
l’indépendance, la concorde avec ses voisins. Aujourd’hui plus que jamais, c’est ce que
la France souhaite au Viêt-Nam tout entier. Il appartient naturellement à son peuple, et à
lui seul, de choisir les moyens d’y parvenir, mais tout effort national qui serait entrepris
au Viêt-Nam à cette fin trouverait la France prête, dans la mesure de ses propres
possibilités, à organiser avec ce pays une cordiale coopération »2. Beijing (Pékin)
constate ainsi que la France condamne, avec retenue certes, l’intervention des Américains.
1 En référence à l'ouvrage : Les Relations extérieures de la France après la seconde guerre mondiale (
zhanhou faguo waijiaoshi), Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Beijing,
Ed itions Connaissances universelles ( shijie zhishi chubanshe), 1993. 2Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle II, Paris, Fayard, 1997, pp.475-476.
59
Alain Peyrefitte rapporte cette formule d’une conversation qu’il a eue avec le
général de Gaulle : « Si je comprends bien, l’avantage pour nous c’est de nous donner
l’initiative, de changer l’équilibre mondial et de contrarier les Américains ? ». Et de
Gaulle répond : « Naturellement ! Mais ça peut aider les Américains et pas seulement les
contrarier. Nous pourrions obtenir des arrangements pour le Sud-est asiatique ». Le
général me déclare, après le Conseil « Le rétablissement des relations avec la Chine, ça
veut dire que nous allons tourner la page coloniale, celle de nos concessions en Chine,
celle de l’Indochine française. Cela veut dire que la France revient en tant qu’amie,
respectueuse de l’indépendance des Nations »1.
Ce dialogue entre le général de Gaulle et Alain Peyrefitte a été repris en 1998,
dans l’ouverture de Zhang Xichang et ses collaborateurs : « Troisième essor des
établissements des relations diplomatiques de la République populaire de Chine »2. C’est
la première fois que l’on les reproduisait en chinois.
Le président de la République confie encore à Alain Peyrefitte le 13 mars 1963 : « Il
y a quelque chose d’anormal dans le fait que nous n’avons pas de relations avec le pays
le plus peuplé du monde, sous prétexte que son régime ne plaît pas aux Américains et que
ça les dérangerait si nous y faisions notre entrée. » Pour de Gaulle, la France se doit
donc de reconnaître « le monde tel qu’il est », et tant pis si le régime politique de la
République populaire véhicule une idéologie politique critiquable en de nombreux
aspects. Il ne s’agit pas de reconnaître son régime ni le communisme, mais un Etat qui
gouverne depuis quatorze ans.3
Durant cette période, le général de Gaulle n’a cessé d’affirmer son désir d’une
neutralisation du Sud-est asiatique tout entier, c’est-à-dire les deux Viêt-Nam, le
Cambodge et le Laos. Pour cela, évidemment, il faut être en mesure de négocier avec la
RPC.
1 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle II, Paris, Fayard, 1997, page.493.
2 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions Connaissances universelles (
shijie zhishi chubanshe) , 1998 3 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.489.
60
Dans ce contexte, le 21 octobre 1963, Edgar Faure, envoyé spécial du général de
Gaulle, fait un voyage en Chine chargé d’une mission secrète : l’établissement des
relations diplomatiques avec Beijing (Pékin). D’après le témoignage de Zhang Xichang,
les dirigeants chinois n’étaient pas informés des motifs de cette mission, lorsqu’Edgar
Faure est arrivé à Shenzhen. Après avoir expliqué qu’il était porteur d’une lettre du
général de Gaulle, le chargeant personnellement d’initier ce rapprochement, faute de ne
pourvoir s’adresser directement aux autorités chinoises, Edgar Faure a été reçu
particulièrement par le maire de Guangzhou (Canton)1. C’est le deuxième voyage
d’Edgar Faure en Chine après le premier de 1957.
Si le général de Gaulle avait choisi Edgard Faure, c’est parce que non seulement
celui-ci préconisait la reconnaissance de la RPC depuis son premier voyage, mais surtout
qu’il possédait des capacités appropriées : député du Jura en 1946, il était secrétaire
d’Etat puis ministre dans de nombreux Gouvernements de la IVème République, exerçant
ses compétences dans des domaines aussi variés que les Finances, les Affaires
économiques, la Justice et les Affaires étrangères. Couronnement de cette carrière, Edgar
Faure était Président du Conseil en 1952 et 1955, il connaissait les affaires de l’Indochine,
avant et après Dien Bien Phu, avant et après Genève, et ne pouvait manquer de percevoir
le rôle de la Chine dans les affaires internationales, particulièrement en Asie. Et puis
Edgar Faure est un original de grand talent. Diplômé de l’Ecole des Langues Orientales,
il y a appris le russe et le chinois. Son épouse Lucie Faure est également la nièce de
Julien Cain, membre de l’Institut, qui fit le voyage en Chine en 1956 (en tant que membre
d’une délégation et directeur de la Bibliothèque Nationale de France). Il y fut même reçu
par Zhou Enlai. C’est dire que Lucie Faure avait les moyens de suivre ce qui se passait
dans l’Empire du Milieu.2
Après son premier voyage en Chine, Edgar Faure a publié un livre « Le Serpent et
la Tortue »3. Cet ouvrage provoque non seulement un débat sur la politique française et
1 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions Connaissances universelles (
shijie zhishi chubanshe) , 1998, page.34. 2 KROUCK Bernard, De Gaulle et la Chine, Editions les Indes Savantes, 2012, page.178.
3 Edgard Faure, Le Serpent et la Tortue. Les problèmes de la Chine Populaire , Paris, Julliard, 1957.
61
occidentale à l’égard de la Chine populaire, incite d’autres hommes politiques à faire le
voyage en Chine, mais aussi impressionne favorablement les dirigeants chinois : « Il faut
résoudre de toute urgence le problème-clef de Formose ». Edgar Faure croit à une
solution raisonnable afin d’« ouvrir la négociation ». Il pense que la Chine populaire est
la seule Chine et qu’il faut la reconnaître et l’admettre à l’ONU. Il veut assurer l’aide
occidentale à la Chine : « Il faut développer des relations de tous ordres, économiques et
culturelles, avec la Chine.» Toujours visionnaire, Edgar Faure fait cette analyse qu’on
croirait tirée d’un discours de Deng Xiaoping vingt ans plus tard : « Il faut aider la Chine
dans l’immense effort que tente ce peuple pour sortir de l’ornière d’un retard de
plusieurs siècles. Il faut l’aider à accomplir cette modernisation, car seule cette
modernisation peut la rapprocher de nous, économiquement et politiquement. » En
rappelant la construction d’un pont sur le fleuve Yang-Tsé entre deux promontoires
appelés le Serpent et la Tortue, Edgar Faure conclut son propos : « Entre l’Est et l’Ouest,
comme entre le Serpent et la Tortue, jetterons nous un pont ? Afin qu’un jour, les
hommes ne se souviennent plus qu’il y avait là, autrefois, un abîme infranchissable ? »1
Sa présence à Beijing (Pékin) sera argument favorable à la réussite des
négociations avec les autorités chinoises.
D’après Martin Garret, la décision du général de Gaulle de reconnaître la Chine
populaire peut être expliquée par quatre raisons possibles2 :
-Le Général veut montrer que la France est capable de jouer un rôle éminent sur la
scène internationale et de négocier avec touts les pays sans considérer leurs régimes ;
-La tentative du général de Gaulle est de renforcer la position de la France vis-à-vis
des superpuissances à travers le « pivot chinois »;
-Le général de Gaulle s’intéresse seulement à s’opposer aux Etats-Unis. Par la
normalisation des relations diplomatique avec la Chine populaire, il donne un signe à
Moscou que la France compte et qu’il a envie d'améliorer les relations avec l’URSS:
-La finale explication est que la motivation du général de Gaulle est beaucoup plus
complexe : il croit que le conflit aigu entre Moscou et Washington peut garantir
1 KROUCK Bernard, De Gaulle et la Chine, Editions les Indes Savantes, 2012, page.213.
2 Garret Martin, Playing the China Card ? Revisiting France’s Recognition of Communist China, 1963–
1964, Journal of Cold War Studies Vol. 10, No.1, Hiver 2008, pages.52-53.
62
l’indépendance de la politique extérieure chinoise et que l’influence de la Chine en Asie
du Sud-est permettra à la France de jouer un rôle de médiateur en Indochine si les
relations sino-françaises sont améliorées.
Et pourquoi de Gaulle attendait- il jusqu’à l’été de 1963 pour prendre cette décision ?
Martin Garret explique : « Les développements régionaux en Asie du Sud-est,
particulièrement la possibilité d'aboutir à une solution politique au Viêt-Nam et de
permettre à la France de jouer de nouveau un rôle dans cette région, ont convaincu le
président français d'agir, et d’agir vite. »
2. Le retrait des forces françaises de l’OTAN
A partir des années soixante, la situation mondiale est caractérisée par des
désaccords Est-Ouest : divergences à l’intérieur des pays occidentaux et des pays
communistes, surtout entre Beijing (Pékin) et Moscou du camp communiste, et entre
Paris et Washington du camp occidental.
Le retrait français de l’OTAN (Organisation du Traité Atlantique Nord) est un
signe de l’indépendance diplomatique française à l’égard des Etats-Unis. Cette attitude
aura une incidence favorable dans le rapprochement entre Beijing (Pékin) et Paris. Les
dirigeants chinois réjouissent que le général de Gaulle ait adopté une politique extérieure
d’indépendance à l’égard de Washington.
Dans le droit fil des accords de Yalta, un état occidental ne pouvait décider seul
de reconnaître la RPC, et se devait de s’aligner sur la position de Washington. Cependant,
le général de Gaulle a le courage de s’affranchir de cette subordination, marquant ainsi un
premier pas dans la politique atlantique de la France. La France souhaitant se libérer de la
tutelle américaine, quittera l’OTAN, comme indique le général de Gaulle : « ...Il s’agit de
l’organisation imposée à Etat atlantique et qui n’est que la subordination militaire et
politique de l’Europe Occidentale aux Etats-Unis d’Amérique »1.
Dans un premier temps, la France prend ses distances avec l’OTAN à partir de
mars 1959, en annonçant son retrait du commandement de l’OTAN de la flotte de la
Méditerranée. Les Etats-Unis retirent 200 avions de combat de la France en juin 1959 et
les installent en Angleterre et en Allemagne de l’Ouest. Notamment, lorsque la France
1 Charles de Gaulle, Mémoires d’espoir I, Paris, Plon, page.177.
63
déclare le 21 juin 1963 retirer du commandement de l’OTAN la flotte française de
l’Atlantique Nord, cette décision provoque une vive réaction au sein des membres de
l’OTAN et embarrasse Washington. Cette défection intervient en plein affrontement entre
l’OTAN et le CAEM1 (Conseil d’assistance économique mutuelle). La France retire
progressivement ses forces militaires. Le retrait ne signifie pas toutefois un éloignement
de Washington, il donne un signal du début de tensions croissantes dans les relations
politiques, économiques et militaires entre la France et les Etats-Unis.
Les autorités chinoises considèrent du reste que si la France souhaite seulement ne
plus être sous le commandement de Washington et qu’elle n’est malgré tout pas hostile
aux Américains.
En revanche, pour la France, ce retrait de l’OTAN signifie de quitter non
seulement les rapports militaires et politiques de dépendance vis-à-vis des Etats-Unis,
mais aussi de sortir de la logique des blocs politiques pour se remettre dans une situation
d’indépendance dans les rapports Est-Ouest2.
En effet, le général de Gaulle a agi de façon pragmatique, suivant l’évolution du
monde. Il a attendu que la France possède l’arme nucléaire pour se retirer de l’OTAN en
1966 (la France avait commencé ses essais nucléaires en 1954). Comme le souligne le
général de Gaulle :
« Il est bien clair, en effet, qu’en raison de l’évolution intérieure et extérieure des
pays de l’Est, le monde occidental n’est plus aujourd’hui menacé comme il l’était à
l’époque où le protectorat américain fut organisé en Europe sous le couvert de l’OTAN.
Mais, en même temps que s’estompent les alarmes, se réduisait aussi la garantie de
sécurité, autant vaut dire absolu, que donnait à l’ancien Continent la possession par la
seule Amérique de l’armement atomique et la certitude qu’elle l’emploierait sans
restriction dans le cas d’une agression »3.
1 CAEM : Conseil d’assistance économique mutuelle, était une organisation d’entraide économique entre
différents pays du bloc communiste, créée par Staline en 1949 et d issous après la chute de l’URSS en 1991. 2En référence à l'ouvrage : Les Relations extérieures de la France après la seconde guerre mondiale (
zhanhou faguo waijiaoshi), Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Beijing, Edit ions
Connaissances universelles ( shijie zh ishi chubanshe), 1993. 3 Charles de Gaulle, Discours et messages, tome V, Paris, Plon, 1970, page.18.
64
Pourquoi le général de Gaulle souhaite-t- il une politique indépendante de
Washington ?
L’histoire évolue après la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’hégémonie
européenne des siècles précédents disparait au profit des deux nouvelles grandes
puissances : Américains et Soviétiques. L’Europe de l’Ouest dépend pour sa sécurité de
la couverture atomique américaine. En outre, l’alliance entre l’Europe et les Etats-Unis se
renforce avec le « plan Marshall »1 pour reconstruire le vieux continent sur la base de
l’aide économique et de la protection militaire américaine. Seize pays d’Europe ont reçu
12,4 milliards de dollars. Cette dépendance politique, économique et stratégique explique
qu’aucun pays ne peut agir sans le consentement des Etats-Unis. Quant à la France, elle a
besoin de l’aide financière américaine pour entreprendre sa reconstruction, c’est la raison
pour laquelle elle dépendra politiquement des Etats-Unis.
Malgré la fin du plan Marshall, la France n’a pas pu échapper à la dépendance
politique américaine et à sa finance. Elle ne pouvait pas faire face seule aux dépenses
occasionnées par la guerre d’Indochine. En effet, les Etats-Unis apportaient 3,6 milliards
de dollars à la France pour financer les dépenses militaires entre 1950 et 1954. Les
Français faisaient la guerre et les Américains la payaient.
A partir de 1958, l’économie française s’améliore au contexte économique
général grâce à la politique intérieure et extérieure du général de Gaulle. L’objectif
central de sa politique extérieure était : « Défendre la souveraineté de l’Etat et résister
aux Etats-Unis ». Dans cette nouvelle situation, l’équilibre des influences –son principe
diplomatique essentiel- ne se réalisait qu’avec l’indépendance.
Comment la France s’y est-elle prise ? En prenant l’initiative de reconnaître la
Chine comme une puissance du monde, et en se positionnant comme l’intermédiaire
politique entre les Etats-Unis, l’URSS et la Chine.
Selon les chercheurs chinois, le souhait du général de Gaulle d’engager un
dialogue direct entre la France et la RPC par son désir d’arrêter la guerre d’Indochine et
1 Plan Marshall, soit le Programme de rétablissement européen , est lancé par le Secrétaire d’Etat des Etats -
Unis, le général Georges Marshall le 5 juin 1947 lors d’un discours à l’Université Harvard.
65
peut-être même pour entraver l’action des Etats-Unis en Indochine. La France entend
retourner pacifiquement en Indochine, confortant ainsi sa politique asiatique grâce à la
compréhension de la Chine1.
Dans ces conditions, la France proposa que le Viêt-Nam et la zone indonésienne
deviennent neutres. Le général de Gaulle avait suggéré, pour résoudre ce problème, que
les Etats-Unis, le Royaume –Uni, la France et la Chine se concertent ensemble sur la
réalisation de la paix en Indochine.
3. La reconnaissance de la RPC et le rapprochement de l’URSS
Il y a paradoxalement un rapport entre la reconnaissance de la RPC par la France
et le rapprochement franco-soviétique.
Profitant de la rupture des relations sino-soviétiques et du commencement des
relations triangulaires entre Washington, Moscou et Beijing (Pékin), Paris étend
largement ses activités diplomatiques avec Moscou et Beijing (Pékin). Ces
rapprochements constituent une partie de la stratégie diplomatique du général de Gaulle.
Avec l’appui politique chinois, le général de Gaulle espère que la France regagnera la
place qui lui est due, celle d’un grand pays capable de dialoguer avec les superpuissances
et de défendre ses intérêts nationaux en Europe.
Paris peut, à l’aide de ses relations privilégiées avec Beijing (Pékin), peser sur
Moscou, et étendre ainsi son influence diplomatique aux trois grands pays. Une fois que
la France aura établi ses relations diplomatiques avec Beijing (Pékin), elle deviendra le
premier pays de l’Europe de l’Ouest disposé d’une représentation diplomatique au niveau
d’ambassadeurs avec la RPC2. Elle sera aussi le seul pays occidental à établir des
ambassades tant à Moscou qu’a Beijing (Pékin), ce qui est une marque d’indépendance
vis-à-vis les Etats-Unis. Cette attitude explique qu’ « elle pourra ainsi dialoguer
1 Liu Ziqing , Analyse de la politique du général de Gaulle envers les Etats-Unis (
Pingdaigaolede duimeizhengce), dans la revue Recherches de l'Europe de l'Ouest (
xiouyanjiu), Centre des recherches sur l'Europe de l'Ouest de l'Académie des Sciences sociales de Chine,
n°5, 1990. 2 Bien que le Royaume-Uni et le Royaume des Pays-Bas reconnaissent la RPC dès 1950, leurs relations
diplomatiques s’établissent le 13 mars et le 18 mai 1972.
66
directement avec les trois grands pays du monde : les Etats-Unis, l’URSS et la RPC »1.
Cela peut accroître l’influence diplomatique française sur l’échiquier international.
Alain Peyrefitte demandait au général de Gaulle le 6 novembre 1963 : « Si nous
reconnaissons la Chine communiste, est-ce que nous allons recevoir quelque chose en
échange ? ». De Gaulle répondit : « Bien sûr, pourquoi faire des cadeaux si on n’en
reçoit pas ? ...Il faut toujours un allié de revers. Cela a toujours été politique de la
France (...) et aujourd’hui, je fais alliance avec la Chine pour nous renforcer face à la
Russie »2.
Les mouvements de lutte pour l’indépendance se multiplient et deviennent de plus
en plus forts en Asie et en Amérique latine après la conférence de Bandung de 1955. La
RPC participe activement aux mouvements « anti-néo-colonialistes américains ». Elle
dénonce les actions des Etats-Unis aussi bien en Indochine après le retrait français en
1955, qu’en Moyen-Orient après le retrait franco-anglais de l’Egypte en 1956, et lors de
la menace militaire américaine envers la Syrie en 1957, ainsi que l’intervention
américaine au Liban et en Jordanie en juillet 1958.
Un mois après le 27 août 1958, le Président Eisenhower déclare de nouveau que
les Etats-Unis n’abandonnent pas leurs efforts pour défendre Taïwan : ils envoient trois
mille hommes pour renforcer la défense dans la mer de Taïwan après les bombardements
des îles de Quemoy et de Manzu le 23 août 1958. Le gouvernement de la RPC déclare le
4 septembre 1958 : « La distance des eaux territoriales est de 12 milles marins. Tous les
avions et bateaux militaires étrangers ne peuvent pas entrer dans les eaux ou les airs
territoriaux chinois sans la permission du gouvernement chinois ». Deux jours plus tard,
le Premier ministre Zhou Enlai souligne que si les Etats-Unis continuent à intervenir dans
les affaires chinoises, ils devront prendre leurs responsabilités. En effet, le gouvernement
chinois espère reprendre les dialogues sino-américains de Varsovie interrompus depuis
1955 afin d’éviter d’aggraver la situation de la mer de Taïwan.
1 En référence de l'ouvrage : Les Relations extérieures de la France après la seconde guerre mondiale (
zhanhou faguo waijiaoshi), Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Beijing,
Ed itions Connaissances universelles ( shijie zhishi chubanshe), 1993. 2 Cahiers de la Fondation de Charles de Gaulle, Paris, n°1, 1995, page.28.
67
Du côté soviétique, le Premier secrétaire du PCUS Khrouchtchev craignant que le
bombardement chinois du 23 août 1958 puisse contrarier la détente, et même provoquer
un conflit entre Moscou et Washington, envoie en secret son ministre des Affaires
étrangères Gromyko à Beijing (Pékin) le 5 septembre. Ce bombardement n’étant qu’une
manifestation du mécontentement chinois contre l’occupation des îles par le Guomindang
et contre l’intention de Washington de créer « deux Chine »1, comme l’explique Zhou
Enlai. Khrouchtchev adresse immédiatement deux lettres ouvertes à Eisenhower les 7 et
19 septembre dans lesquelles il affirme son soutien à Beijing (Pékin) et son désir de voir
les Etats-Unis quitter la mer de Taïwan et arrêter son ingérence dans les affaires chinoises.
Il rappelle à cette occasion que les deux pays sont liés par le traité d’amitié de 1954.
Depuis la défection chinoise du camp soviétique en juillet 1960, le camp
communiste est fragilisé. Les divergences se multiplient et pourrissent jusqu’aux
relations gouvernementales. Beijing (Pékin) accuse Moscou de mener une action
révisionniste, et pense que Moscou s’allie avec Washington pour étouffer la Chine.
Moscou, pour sa part, accuse Mao Zedong de s’élo igner du marxisme-léninisme. Beijing
(Pékin) devient alors la deuxième capitale communiste, la rupture sino-soviétique est
consommée.
Après la séparation de la Chine du camp communiste, Richard Nixon modifie
alors sa politique extérieure et a l’intention de réexaminer de nouveau ses relations avec
la Chine populaire, qui ne lui semblent ni normale ni raisonnables. Hao Yufan, professeur
de la science politique de l’Université Colgate et spécialiste des relations sino-
américaines approuve cette analyse2.
Quant aux pays capitalistes, les contradictions franco-américaines paraissent de
plus en plus importantes.
Evidemment, face à une situation complexe, les relations triangulaires entre
Washington, Moscou et Beijing (Pékin) se nouent. Le général de Gaulle, profitant de la
1 Œuvres choisies diplomatiques de Zhou Enlai ( Zhouenlai waijiao wenxuan), Beijing,
Ed itions du Centre des documentations chinois, 1990, page.265. 2 Hao Yufan , La politique chinoise des Etats-Unis 1949-1998 ( 1949-1998
Meiguo duihua zhengce neimu), Beijing, Ed itions Taihai ( Taihai chubanshe), 1998.
68
rupture des relations sino-soviétiques et du début des relations triangulaires, intensifie ses
activités diplomatiques avec Moscou et Beijing (Pékin), dans le sens de la détente, de
l’entente et de la coopération.
Les occasions pour Paris de renforcer le lien avec Moscou se multiplient, surtout
de la visite de Khrouchtchev à Paris du 23 mars au 3 avril 1960. Cette rencontre marque
le départ de nouvelles relations franco-soviétique depuis le retour au pouvoir du général
de Gaulle. Cette entente se fait malgré leurs divergences sur l’Allemagne. Au cours de
cette visite du dirigeant russe, le général de Gaulle déclare :
« Mais il semble qu’on en soit au point où, de part et d’autre, on veuille chercher
les moyens d’empêcher que les rivalités ne mènent à la destruction, d’établir des
rapports pratiques qui ne soient pas méfiants, ni malveillants et, même, peut-être, de
mettre en œuvre un début de coopération pour porter une aide commune à tant de
peuples qui eux aussi, aspirent à un développement moderne ».1
Ce discours signifie que le général de Gaulle modifie la politique française envers
l’URSS, et que les deux pays renforcent leurs relations.
De même, la visite du général de Gaulle à Moscou en 1966 entre dans le cadre du
triptyque « détente, entente et coopération ». Elle se solde par « la création d’une
Commission mixte permanente chargée de recherche les moyens de développer les
échanges commerciaux entre la France et l’URSS, la coopération industrielle franco-
soviétique dans le domaine de la télévision en couleur. Un accord de coopération
scientifique et culturelle est signé. Au niveau politique, la déclaration mentionne l’accord
des deux gouvernements sur la nécessité de considérer les problèmes de l’Europe dans un
cadre européen, et de passer de la détente à l’entente »2.
Ces rapports particuliers entre Paris et Moscou jouent un rôle important sur la
scène internationale.
1 Charles de Gaulle, Discours et messages, tome III, Paris, Plon, 1970, page.174.
2 Charles de Gaulle, Discours et messages, tome V, Paris, Plon, 1970, page.56.
69
Cette entente va permettre aux deux pays de consolider leur position sur l’échelle
internationale et de disposer davantage d’atouts pour faire face aux ambitions
hégémoniques des Etats-Unis.
La politique orientale du général de Gaulle va lui permettre de se maintenir dans
la région et d’exercer une certaine influence sur la politique des Etats-Unis.
B) Double refus des hégémonies par Paris et Beijing (Pékin)
A partir de la fin des années cinquante, avec l’apparition de ces données nouvelles,
le partage du monde entre deux camps, respectivement menés par Washington et par
Moscou, correspond de moins en moins à la situation rée lle. L’indépendance et le respect
de la souveraineté nationale deviennent la base de la politique extérieure tant pour Paris
que pour Beijing (Pékin). Les opinions qu’ont le général de Gaulle et le Président Mao
Zedong, sur certains thèmes internationaux, convergent de plus en plus, et en premier lieu
sur la situation en Indochine. Ensuite Paris et Beijing (Pékin) ont la même analyse du
traité de Moscou de 1963 et de la menace que représentent le duo nucléaire américain-
soviétique. Les deux pays s’engagent dans le même sens, sans consultation préalable.
Ce qui a rapproché la France et la RPC, c’est le rejet de l’hégémonie des
superpuissances soviétique et américaine. Si la France a cherché à se démarquer par
rapport aux deux blocs, la Chine a du s’affronter aux Etats-Unis depuis la guerre de
Corée, et puis s’éloigne de l’URSS, pour les raisons politique et idéologique. Le général
de Gaulle « pressent l’importance du schisme sino-soviétique, ferme d’une configuration
moins figée d'un monde bipolaire. Le refus de Pékin de signer le traité de Moscou de
1963 sur l’interdiction des essais nucléaires dans l’atmosphère, qui rapproche
objectivement la Chine et la France, en est une confirmation ».1
Le rapprochement entre Paris et Beijing (Pékin) crée-t- il ainsi une sorte de
troisième force dans le monde ? Deux affaires importantes le révèlent et l’expliquent :
- Le double refus du traité de Moscou de 1963
- Les divergences entre Beijing (Pékin) et Moscou
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, pages.465-466.
70
1. Le double refus du traité de Moscou de 1963
Le Traité d’interdiction partielle des essais nucléaires (Traité de Moscou) signé
par trois pays, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’URSS, le 5 août 1963 à Moscou,
provoque à la fois la rupture complète des relations entre Moscou et Beijing (Pékin) et le
mécontentement de Paris.
Beijing (Pékin) considère à juste titre que cet accord n’a pour seul but que de
priver certains pays, comme la Chine et la France, de l’accès à l’arme nucléaire. En fait,
cet accord n’interdit que les essais nucléaires, mais ne prévoit pas de désarmement. En
d’autres termes, les deux superpuissances tentent à cette occasion de figer leur monopole
nucléaire, qui plus est Moscou change sa position sur la question du désarmement depuis
1962, et affirme sa volonté d’une détente avec Washington, alors qu’elle rompt les
relations avec Beijing (Pékin).
En juillet 1963, deux conférences se tiennent à Moscou. Elles ont abouti à deux
résultats opposés.
D’une part, il y a la conférence sino-soviétique du 6 au 20 juillet 1963, avec pour
but de réduire les divergences entre le PCUS et le PCC. Cette conférence débouche sur la
rupture entre Beijing (Pékin) et Moscou. En effet, en plein déroulement de la conférence
sino-soviétique, le PCUS publie le 14 juillet « Une lettre adressée aux établissements et
aux membres du PCUS » pour répondre à une lettre du PCC « Vingt-cinq points ».1
Aussitôt le Quotidien du peuple et la presse chinoise reproduisent cette lettre car Beijing
(Pékin) considère que le PCUS critique le PCC d’une manière violente, et lance une
attaque afin d’interrompre les relations entre les deux Etats2. La conférence finit par la
rupture du dialogue.
De l’autre part, la conférence américano-anglo-soviétique sur les armements
atomiques aboutit le 25 juillet à un accord visant à mettre fin aux expériences nucléaires
atmosphériques. Beijing (Pékin) qui considère que cette alliance permettra aux deux
superpuissances de dominer le monde, fait immédiatement une déclaration où il souligne
1 La lettre du PCC adressée au PCUS le 14 ju in 1963, intitulée « Propositions concernant la ligne générale
du mouvement communiste international ». 2 Le Quotidien du people ( Renlin ribao), le 20 juillet 1963.
71
qu’il faut interdire et détruire totalement les armements nucléaires et ouvrir une nouvelle
conférence des chefs d’Etat1.
Du côté français, l’arme nucléaire joue un rôle indispensable pour de Gaulle en
quête de la grandeur. Le traité de Moscou est ainsi considéré comme une attaque contre
l’ambition d’«être une grande puissance » de la France. Comme Couve de Murville
souligne lors du Conseil des ministres le 21 août 1963 : « La France poursuit une
politique indépendante dont le noyau est la construction d'un arsenal nucléaire
indépendant. »2
Le général de Gaulle, dans une conférence de presse en 1963, affirme : « Nous
répétons, également, qu’un simple accord sur les essais entre Soviétiques et Anglo-
saxons, déjà investis d’une puissance incommensurable, qui ne cessent de la renforcer et
qui par-là confirment de jour en jour leurs hégémonies respectives, ne détournera pas la
France de se doter, elle aussi, des moyens de la même sorte, faute de quoi, puisque
d’autres en ont, sa propre sécurité et sa propre indépendance ne lui appartiendraient
jamais plus »3.
Constatant les concordances de vue, le général de Gaulle souligne que la Chine se
manifeste comme une puissance souveraine et indépendante, et adopte la même position
que lui. Ainsi, face à l’hégémonisme mondial de Washington et de Moscou, Paris et
Beijing (Pékin) désirent développer leurs propres forces nucléaires.
Comme Etienne Manac’h le constate dans une conférence faite au Palais du
Luxembourg le 25 janvier 1984 : « En dépit des objurgations ni la France ni la Chine ne
signeront ce traité, elles seront presque seules à s’abstenir ». Evidemment, les deux pays
n’acceptent pas la domination nucléaire du couple soviéto-américain. Ils souhaitent être
indépendant à l’égard des deux blocs. Il continue, en ajoutant que, « la Chine et la
France se retrouvent d’accord pour réaffirmer leur attachement à la souveraineté de leur
propre défense nationale, que celle-ci est avant tout l’affaire de chaque peuple et que la
1 La déclarat ion du gouvernement chinois le 31 juillet 1963.
2 Garret Martin, Playing the China Card ? Revisiting France’s Recognition of Communist China, 1963–
1964, Journal of Cold War Studies Vol. 10, No.1, Hiver 2008, pages.63-64. 3 Charles de Gaulle, Discours et messages, IV, Paris, Plon, 1970, page.127.
72
sécurité ne saurait être garantie, de manière absolue, par une tierce puissance ou un
groupe de puissances. »1
L’historien chinois Chen Lemin insiste sur le caractère nationaliste de cette
volonté, il affirme : « De la part du général de Gaulle, il est primordial pour la France
d’avoir sa place parmi les puissances atomiques indépendantes »2. Dans son
article : « Gaullisme et nationalisme », Chen Lemin lie le nom du général de Gaulle avec
celui de la nation française.
L’ouvrage du professeur Zhou Rongyao : « De Gaulle et les relations
internationales »3, indique que la vision du général de Gaulle sur les relations
internationales est essentielle et influence particulièrement les opinions mondiales.
Le professeur Liu Ziqing dans son article : « De la politique du général de Gaulle
envers les Etats-Unis » analyse les conséquences de la méfiance exprimée par la politique
française à l’égard des Etats-Unis, et considère que de Gaulle défend la souveraineté et
l’indépendance de la France et qu’il élève la position de la France dans les affaires
internationales.4
Les autorités chinoises expriment aussi leur admiration pour le général de Gaulle
et ses politiques. Selon le consul général français à Hong Kong, André Saint-Mleux, le
premier ministre chinois Zhou Enlai a loué le général de Gaulle qui s’oppose aux Etats-
Unis, au cours d’une rencontre avec le ministre belge Louis Scheyven et a rema rqué les
similarités entre les points de vue français et chinois.
1 Historiens & Géographes, Paris, Buisson, n°309, page.1075.
2 Chen Lemin (ancien d irecteur du Centre de recherches de l'Europe de l'Ouest de l'Académie des
Sciences sociales de Chine) , Gaullisme et nationalisme ( Daigaolezhuyi yu
minzuzhuyi), dans la revue Recherches de l'Europe de l'Ouest ( Xiou yanjiu), Beijing, Centre de
recherches de l'Europe de l'Ouest de l'Académie des Sciences sociales de Chine, n°5, 1990. 3 Zhou Rongyao (vice-d irecteur du Centre de recherches de l'Europe de l'Ouest de l'Académie des
Sciences sociales de Chine), De Gaulle et les relations internationale ( Daigaole yu
guojiguanxi),dans la revue Recherches de l'Europe de l'Ouest ( Xiou yanjiu), Beijing, Centre de
recherches de l'Europe de l'Ouest de l'Académie des Sciences sociales de Chine, n°5, 1990. 4 Liu Ziqing , Analyse de la politique du général de Gaulle envers les Etats-Unis (
Pingdaigaolede duimeizhengce), dans la revue Recherches de l'Europe de l'Ouest (
xiouyanjiu), Centre des recherches sur l'Europe de l'Ouest de l'Académie des Sciences sociales de Chine,
n°5, 1990.
73
Le traité de Moscou qui crée un fossé entre les pays nucléaires et les pays quasi-
nucléaire favorise le rapprochement entre Paris et Beijing (Pékin) par leur refus du traité
et leur opposition commune contre la « double hégémonie » des superpuissances. Robert
Morel-Francoz, ambassadeur français à Rangoun, confirme ce point dans une lettre à de
Gaulle le 5 août 1963: les Chinois souhaitent la bienvenue d’une initiative immédiate de
la reconnaissance.1
2. Les divergences entre Beijing (Pékin) et Moscou
Le problème essentiel de la rupture sino-soviétique concerne aussi l’indépendance
nationale. Ces contradictions ont été soulevées après la mort de Joseph Staline en 1956 et
l’affrontement idéologique entre ces deux pays frères devient public en 1960.
Cette différence de pensée croissante, entraîne une séparation inévitable.
Chronologie des divergences entre Beijing (Pékin) et Moscou :
1956 : Beijing (Pékin) s’oppose à la déstalinisation opérée par Khrouchtchev au
XXème Congrès du PCUS en février de cette année. D’après le PCC, Staline a plus de
mérite que de faute. Le Quotidien du peuple publie alors deux articles : « Les expériences
historiques sur la dictature de la classe prolétarienne » et « Les expériences historiques
sur la dictature de la classe prolétarienne encore une fois ».2
1957 : Beijing (Pékin) s’oppose à la définition soviétique de « coexistence
pacifique » dans la conférence des 64 partis communistes à Moscou en novembre. Mao
Zedong adresse au PCUS un avis différent : « Les propositions sur la question de la
transition pacifique »3 (du capitalisme au socialisme).
1 Garret Martin, Playing the China Card ? Revisiting France’s Recognition of Communist China, 1963–
1964, Journal of Cold War Studies Vol. 10, No.1, Hiver 2008, pages.63-64. 2Les expériences historiques sur la dictature de la classe prolétarienne ( !
"#$%&#!'#()$%*+,*+-)#$%$),%"!.,!/+0)+*+%"&$% ), Les expériences historiques sur la dictature de la
classe prolétarienne encore une fois ( zailun "#$%&#!
'#()$%*+,*+-)#$%$),%"!.,!/+0)+*+%"&$%), Le Quotidien du people ( Renlin ribao), le 4 avril
et le 29 décembre 1956. 3 Comité central du PCC, Le débat concernant la ligne générale des mouvements communistes
internationaux ( Guanyu guoji gongchanzhuyi zongluxian de
lunzhan), Beijing, Ed itions du people ( Renmin chuabanshe), 1965, page.96.
74
1958 : un projet de commandement naval mixte en Extrême-Orient qui débutait
en 1958 et mettait la marine chinoise sous la tutelle soviétique. Ce projet est refusé par
Mao Zedong en 1959 qui le trouve comme une intervention de la politique de sécurité et
de souveraineté d’Etat.1
1959 : Moscou décide de suspendre l’aide accordée à la RPC le 15 octobre 1957,
dans les domaines relatifs aux technologies modernes de défense nationale, en refusant la
fourniture de dossiers techniques.
1959 : Le Quotidien du peuple publie, le 9 décembre, un éditorial intitulé : « La
vérité sur le problème frontalier sino-indien » pour répondre à la déclaration soviétique
sur le conflit sino-indien du 9 septembre 1959.
C’est un cadeau de la part de Khrouchtchev à Eisenhower pour son voyage aux
Etats-Unis et confirmer sa volonté de rapprocher sa position de celles des Etats-Unis.
1960 : Moscou s’oppose au PCC durant le Congrès des Partis communistes en
juin. Le 12 juillet, Moscou résilie tous les contrats économiques et retire de la Chine ses
1,390 experts techniques. Tout cela cause tort à l’économie chinoise avec le « Grand
bond en avant » de 1958.
1960 : Avant le voyage de Khrouchtchev aux Etats-Unis, Moscou qui s’est
opposé à Beijing (Pékin), livre du matériel militaire dont des Migs-21 en Inde, au
moment où éclatent les conflits sino- indiens.
Depuis cette date, les affrontements se multiplient aux frontières sino-soviétiques.
Beijing (Pékin) et Moscou s’accusent réciproquement de malveillance.
Dès lors, sur les journaux officiels chinois, le gouvernement chinois soupçonne
les dirigeants soviétiques de ne plus être marxistes, de pratiquer une politique
révisionniste dans le camp communiste et vouloir imposer leur hégémonie dans les
affaires internationales.
1 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong ( Mao Zedong waijiao wenxuan) ,
Ed itions de Presse centrale des documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing,
1994, pp.328-330.
75
1964 : Pour la première fois en avril, le Pravda1 accuse le PCC d’avoir trahi le
camp communiste. La rupture sino-soviétique change les rapports de force entre les
grandes puissances mondiales. Elle change aussi les motifs d’affrontement entre les
Etats-Unis et l’URSS, basés essentiellement sur les principes du capitalisme et du
communisme.
Du 6 septembre 1963 au 14 juillet 1964 : En guise de riposte, le Quotidien du
peuple et le Drapeau Rouge2, deux publications officielles chinoises, publient
successivement neuf articles importants intitulés :
- « Les conséquences et les évolutions sur les divergences entre le PCUS et le
nôtre »
- « Sur la question de Staline »
- « La Yougoslavie est-elle un pays socialiste ? »
- « Défenseur du néo-colonialisme »
- « Deux voies concernant la guerre et de la paix »
- « Les deux politiques différentes sur la question de la coexistence pacifique »
- « Les dirigeants du PCUS sont les grands scissionnistes actuels »
- « La révolution prolétarienne et le révisionnisme de Khrouchtchev »
- « A propos du faux communisme et d’une leçon historique mondiale »
Beijing (Pékin) riposte fortement à Moscou dan ces neuf articles. Les divergences
sino-soviétiques sont exacerbées au sein des Partis communistes et prennent une ampleur
particulière. La rupture sino-soviétique est inévitable. Dès alors, Beijing (Pékin) fera face
à deux adversaires : Washington et Moscou. La RPC réoriente ainsi sa stratégie
diplomatique vers l’ « anti- impérialisme américain » et l’«anti-révisionnisme
soviétique ».
1 Le Pravda, qui signifie Vérité en français, est un journal soviétique écrit en russe. À l'époque de l'Union soviétique, il s'agissait d'une publication officielle du PCUS. 2 Le Drapeau Rouge ( Hongqi) est un magazine officiel du PCC qui était publié de 1958 à 1988.
76
3. Conclusion
Etienne Manac’h indique que la Chine et la France se trouvent d’accord pour
réaffirmer leur attachement à leur souveraineté nationale. Ils considèrent que leur propre
défense nationale est avant tout l’affaire de chaque peuple et que la sécurité ne saurait
être garantie, de manière absolue, par une puissance ou un groupe de puissances.1
Cette approche donne à la RPC la possibilité d’établir et de développer des
relations opportunes avec les pays occidentaux, après sa désolidarisation avec le camp
communiste.
La RPC brave les deux superpuissances, américaine et soviétique, et montre ainsi
son aspiration à l’indépendance. Le général de Gaulle décide de nouer les relations
diplomatiques avec la Chine populaire en 1963, malgré leurs différences aux niveaux de
système social et d’idéologie fondamentale, et malgré l’amitié de la France pour Jiang
Jieshi (Tchang Kaï-chek).
La Chine manifeste sa volonté de défendre l’indépendance d’Etat contre le
monopole des superpuissances dans les affaires internationales, « la question dépasse
évidemment le plan bilatéral pour constituer un élément important de la politique
d’ensemble du général de Gaulle, en particulier ses rapports avec les Etats-Unis, politique
dont on sait l’ambigüité et l’arrière-plan historique et affectif »2.
C) Beijing (Pékin), vers les liens avec Paris
A partir de 1963, le Président Mao Zedong développe le concept stratégique dit
des « deux zones intermédiaires »3 : hormis les Etats-Unis et l’URSS, le reste du monde
forme deux zones intermédiaires. Selon cette théorie, le monde divisant en « un camp
socialiste » et « un camp impérialiste (l’URSS et les Etats-Unis) ». La Chine pouvait
alors se lier avec l’Europe occidentale afin de poser les jalons d’une nouvelle stratégie, en
sortant de son isolement diplomatique.
1 Historiens & Géographes, Paris, Buisson, n°309, page.1075.
2 Guillermaz Jacques, Une vie pour la Chine, Mémoires 1937-1989, Paris, Robert Laffont, 1994, page.296.
3 Mao Zedong indique deux fo is ce concept en septembre 1963 et janvier 1964. Œuvres choisies de la
diplomatie de Mao Zedong ( Mao Zedong waijiao wenxuan) , Ed itions de Presse centrale
des documentations ( Zhongyangwenxian chubanshe), Beijing, 1994, pp.506-508.
77
Dans son analyse des relations internationales, Mao Zedong constate que : « La
menace actuelle ne provient ni du Royaume-Uni, ni de la France, nous voulons au
contraire qu’elles soient puissantes ». Par conséquent, accentuer ses efforts diplomatiques
vis-à-vis des Occidentaux, renforcer des liens existants avec certains pays occidentaux et
chercher à établir des relations diplomatiques avec le Royaume-Uni et la France
constituent une nouvelle stratégie diplomatique de la RPC. On voit surtout « dans la
France une puissance occidentale à la politique indépendante » et on « cultive cette
possible ouverture ainsi que les contacts en Afrique francophone »1.
Le général de Gaulle cherche à assurer l’indépendance de la France vis-à-vis de
l’OTAN en matière de défense. Il prône une politique extérieure qui se démarque du bloc
occidental. Cette recherche d’affirmation de la souveraineté nationale, a séduit la Chine
qui s’est empressée de lier des relations officielles privilégiées avec la France. On peut
expliquer cette initiative en trois points :
- La volonté de reconnaître la RPC par la France ;
- L’échec de la reconnaissance de la RPC avant 1954 ;
- Une conjoncture favorable aux niveaux politique, économique et stratégique.
1. La volonté de reconnaître la RPC par le gouvernement français
Deux hommes politiques français jouent un rôle historique très important dans le
développement des relations officielles entre Paris et Beijing (Pékin). Ils sont Pierre
Mendès France et Edgar Faure.
Les tentatives d’établissement des relations diplomatiques entre la France et la
RPC ont commencé pendant la conférence de Genève en juillet 1954, lorsque Pierre
Mendès France rencontre le Premier ministre chinois Zhou Enlai. Les deux hommes
expriment leur désir réciproque de normaliser les relations diplomatiques. Zhou Enlai est
très favorable au rapprochement de Beijing (Pékin) et Paris.
Bien qu’elle n’aboutisse pas à un traité bilatéral officiel, cette rencontre permet à
la France de reconnaître l’existence de la RPC au moment de régler le problème colonial
français en Indochine, comme on l’a analysé dans les parties précédentes.
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.466.
78
Cette ouverture correspond bien à la politique de coexistence pacifique suivie par
la RPC. Dans un certain sens, cela symbolise le point de départ des relations sino-
françaises.
Depuis 1954, le gouvernement français commence à avoir un envie de reconnaître
la nouvelle République chinoise C’est ainsi qu’après son voyage en Chine, le sénateur
français Léo Hamon demande au gouvernement de Pierre Mendès France dans les débats
parlementaires du 27 juillet 1955 : « Comment le gouvernement français entend-t-il
contribuer à rendre les relations diplomatiques avec cette partie du monde plus
conformes aux réalités et ceci dans l’intérêt même de la paix ? » Le ministre des Affaires
étrangères répond : « Le gouvernement étudie depuis des années la question, et il est
désormais convaincu qu’il est difficile de régler les problèmes d’Extrême-Orient sans la
participation de la Chine ».
C’est clair, Edgar Faure avait l’intention d’établir des rapports diplomatiques avec
la RPC depuis 1954, mais pourquoi ne l’a-t-il pas fait, peut-être parce qu’il a quitté son
pouvoir quelques mois plus tard : « Je n’ai pas le temps d’aller plus loin, parce que mon
gouvernement n’existe que depuis quelques mois », dit plus tard Edgar Faure, lorsqu’il
rencontre Zhou Enlai à Paris le 17 octobre 1980.1
En fait, Paris souhaiterait avoir une période transitoire pour son arrangement,
pourtant, Beijing (Pékin) pense que celle-ci reviendrait à reconnaître qu’il existe « deux
Chine », étant donné que la France continuera à entretenir les relations diplomatiques
avec Taïwan et à coopérer avec les Etats-Unis à l’ONU sur la question chinoise. C’est
pourquoi toutes les propositions françaises, au sujet des relations de transition, ont été
rejetées par Beijing (Pékin).
Lorsque Zhou Enlai rencontre, le 1er novembre 1955 la délégation parlementaire
française à Beijing (Pékin), il annonce : « Le gouvernement chinois espère que la France
1 Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Les Relations extérieures de la France après la seconde
guerre mondiale ( zhanhou faguo waijiaoshi), Beijing, Ed itions Connaissances
universelles ( shijie zh ishi chubanshe), 1993, page.220.
79
prend l’exemple sur les pays du Nord européen. Si le gouvernement français a
actuellement des ennuis à propos de la reconnaissance de la RPC, nous pouvons d’abord
commencer par des relations officieuses. Quand la France décide de rompre avec Taïwan,
nous pourrons établir nos relations officielles. »1 Il est clair que Zhou Enlai souhaitait que
Paris rompe d’abord avec Taïwan avant qu’un accord officiel soit signé.
Lors de son voyage en Chine en juin 1957, Edgar Faure, ex-président du Conseil,
est reçu par le Président Mao Zedong et le Premier ministre Zhou Enlai. Dans ses
mémoires, il explique que lors de ses entretiens, certains sujets demeuraient délicats du
point de vue française (Algérie) ou chinoise (Formose)2. Toutefois, les deux parties ont
évoqué la question de l’Algérie et de Taïwan, problèmes majeurs qui font obstacle à
l’établissement des relations entre Beijing (Pékin) et Paris.
Pour faire comprendre à Edgar Faure l’importance des relations sino-françaises,
Mao Zedong cite un proverbe chinois durant son entretien avec le couple Faure le 30 mai :
« Quand une bécasse et une huître sont aux prises, c’est le pêcheur qui en tire
profit. »
Le fond de la pensée d’Edgar Faure s’exprime dans son ouvrage publié en 1957
après le voyage en Chine, et dont le titre est inspiré d’un poème de Mao Zedong : « Peu
après mon ouvrage en Chine, je fis hommage au général de Gaulle d’un exemplaire de
mon ouvrage ‘Le Serpent et la Tortue’, que René Julliard m’avait poussé à publier et où
je préconisais le rétablissement d’un lien diplomatique entre la France et la Chine
populaire ».3 Dans cet ouvrage Edgard Faure exprime son espoir de voir se construire un
pont, entre le Serpent et la Tortue4. Concrètement que les relations franco-chinoises
fassent l’objet d’une nouvelle politique extérieure française.
1 Œuvres choisies diplomatiques de Zhou Enlai ( Zhouenlai waijiao wenxuan), Beijing,
Ed itions du Centre des documentations chinois, 1990, page.157. 2 Edgar Faure, Mémoires, tome II, Paris, Plon, 1984, page.665.
3 Edgar Faure, Mémoires, tome I, Paris, Plon, 1984, page.674.
4 Le Serpent et la Tortue sont les noms de deux montagnes qui se trouvent à la ville de Wuhan, séparées par
le fleuve Yang-Tsé.
80
En 1958, le général de Gaulle est élu pour un deuxième mandat présidentiel. Zhou
Enlai et Pierre Mendès France se retrouvent à nouveau dans une seconde rencontre,
quatre ans après leur première entrevue.
En 1960, la France entre dans le cercle des puissances nucléaires. Le général de
Gaulle évoque à nouveau la question de la reconnaissance de la RPC avec Edgar Faure.
Mais elle n’était pas encore réalisable à cause de la guerre d’Algérie.1
Malgré tout, on peut voir les efforts manifestés des deux côtés :
- Les visites françaises en Chine deviennent dès 1955 de plus en plus fréquentes.
- Les échanges économiques se développent depuis 1962.
- Echange des missions d’études françaises et notamment, une délégation dirigée
par Guillaume Georges-Picot, président de la section Extrême-Orient du CNPF,
qui est reçue par le vice-ministre des Affaires étrangères chinois Chen Yi à
Beijing (Pékin).
Cependant, il convient de noter qu’avant 1963, aucun gouvernement français ni
aucun homme politique français n’a pris de contact officiel ou officieux avec la RPC. 2
2. L’échec de la reconnaissance de la RPC par la France avant 1964
Malgré cette recherche de rapprochement et l’existence des relations politique et
économique, la France n’a pas reconnu la RPC. Pourquoi ne l’a-t-elle pas fait avant 1964 ?
Plusieurs opportunités furent perdues, notamment lors de la naissance de la RPC en 1949
et celle de la conférence de Genève en 1954. Deux motifs principaux peuvent expliquer
ce retard :
- L’hostilité sino-américaine a influencé la politique française envers la RPC :
En raison de l’opposition entre les Etats-Unis et la RPC dans la guerre de Corée, les
pays occidentaux ne souhaitent pas contrarier les Américains, en reconnaissant la
RPC. La France, comme les autres alliés occidentaux de Washington, ainsi que la
majorité des pays indépendant, poursuivent leurs relations diplomatiques avec Jiang
1 Edgar Faure, La reconnaissance de la Chine, dans la revue L’espoir, Paris, n°1, 1972.
2 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, n°1, 1995n page.36.
81
Jieshi (Tchang Kaï-chek), et continuent à s’opposer à l’admission de la RPC à l’ONU.
Comme le marque Alain Peyrefitte : « Les gouvernements successifs ont eu peur
d’entrer en conflit avec Washington. En outre, les Chinois, en symbiose avec l’URSS,
n’ont pas d’autonomie pour leur politique étrangère »1.
- L’affrontement de deux politiques extérieures antagonistes entre Paris et Beijing
(Pékin) : la politique de la défense coloniale française et celle de l’«anti-
colonisation ».
L’affrontement entre les deux pays est inévitable, car la France entend
conserver ses colonies, et la Chine, quant à elle, ayant subi différentes occupations
par les pays occidentaux et le Japon pendant plus d’un siècle de 1840 à 1949, prend
position en faveur de la décolonisation. De ce fait, « l’anti- impérialisme et l’anti-
colonisation » sont la base de la politique extérieure chinoise entre 1949 et 1955. 2
Effectivement, les Chinois sont très sensibles au problème de la
décolonisation. Dès sa fondation, la RPC aide activement les mouvements de
libération : la guerre d’Indochine contre la présence coloniale française ; la guerre de
Corée contre « l’impérialisme américain » ; le soutien à Nasser pendant la crise de
Suez en 1956 contre les forces franco-anglaises ; ainsi que l’aide chinoise en Algérie
durant la guerre algérienne.
La plupart des chercheurs chinois et français trouvent que les divergences à
propos de la guerre d’indépendance algérienne, entre Paris et Beijing (Pékin)
constituent l’obstacle principal à la restauration des relations diplomatiques entre les
deux pays. La position chinoise favorable à l’autodétermination du peuple algérien
assombrit les rapports franco-chinois.
En effet, le problème de l’Algérie devient rapidement un obstacle majeur qui
empêche l’établissement des liens diplomatiques entre la France et la RPC du début
de la Vème République jusqu’à 1962. Ce constat est mentionné dans les Mémoires de
1 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle II, Paris, Fayard, 1997, page.485.
2 Le principe de la polit ique extérieure de cette époque est mentionnée dans le Programme commun en
1949 et l'art icle de Zhou Enlai « Notre politique et notre tâche diplomatique » issu de Œuvres choisies de
Zhou Enlai, tome 2 ( Zhouenlaixuanji xiajuan), Beijing, Edit ions du peuple (
Renmin chubanshe), 1984, page.87.
82
Mme. Zhu Lin1, femme du premier ambassadeur de la RPC en France. Il faudra
attendre la signature de l’Accord d’Evian du 18 mars 1962, qui met fin à la guerre
d’Algérie, pour que s’ouvrent de nouvelles perspectives quant à la restauration des
relations diplomatiques entre la France et la Chine populaire.
D’après l’analyse de Zhang Xichang, le général de Gaulle avait consulté
Edgar Faure sur ce problème dès 1960, lui affirmant qu’à cause de problème algérien,
le moment n’était pas encore venu de soulever la question d’établir des relations
diplomatiques avec la Chine. Selon son point de vue : « pour la France, les intérêts
coloniaux sont prioritaires à la connaissance de la RPC ».2
En outre, à l’occasion de son voyage en Chine en 1961, François Mitterrand,
en tant que sénateur socialiste à ce moment- là, rencontre le Président Mao Zedong et
le ministre des Affaires étrangères chinois Chen Yi3. L’une des questions abordées,
lors de cet entretien, est le problème de la restauration des relations diplomatiques
entre les deux pays. François Mitterrand préconise qu’il faudra attendre la résolution
du problème en Algérie. « Et pour l’établissement des relations diplomatiques entre
nous, nous pourrons attendre jusqu’à la résolution du problème algérien. » Quant à
Chen Yi, il lui confirme que la Chine continuera à soutenir l’Algérie dans sa lutte
pour l’indépendance de ce pays.
Les historiens chinois pensent à juste titre que le soutien de la RPC à l’Algérie
a été un élément déterminant. L’exemple algérien a incité d’autres colonies en Asie et
en Afrique noire à lutter pour leur indépendance. 4
1 Zhu Lin (femme de Huang Zhen), Les Mémoires de la femme de l'ambassadeur chinois, en Hongrie,
Indonésie, France et les Etats-Unis ( Dashi furen huiyilu), Beijing Editions
Connaissances universelles ( Shijie zh ishi chubanshe), 1993, page.107. 2 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions de Presses Connaissances universelles
( shijie zh ishi chubanshe) , 1998. 3 Chen Yi était min istre des Affaires étrangères de la RPC de 1958 à 1972.
4 Xie Yixian , Histoire de la diplomatie contemporaine de la Chine ( zhongguo
dandai waijiaoshi), Beijing, Ed itions de la jeunesse de Chine( zhongguo qingnian
chubanshe), 1997, page.222.
83
Edmond Jouve conclut ses recherches à propos de la reconnaissance de la
RPC par la France, en se référant à une note du Quai d’Orsay qui précise 1 :
- La reconnaissance de la RPC par le gouvernement français fut examinée dès 1949
et le projet n’a pas eu de suite du fait de la guerre d’Indochine et de la
reconnaissance du Viêt-Nam du Nord qui était alors notre adversaire, par la RPC.
- Après l’accord de Genève en 1954, la question se pose à nouveau. L’issue fut
retardée du fait de la guerre d’Algérie et de l’attitude hostile de Beijing (Pékin) au
cours de ces années. Cet obstacle étant tombé en 1962, rien ne s’opposait plus à la
reconnaissance de la République populaire de Chine par la France.
3. Le climat positif dans les secteurs politique, économique et militaire.
La reconnaissance de la RPC par la France est un acte par lequel le général de
Gaulle entend exprimer l’indépendance de son pays vis-à-vis des blocs et de Washington
en particulier.
Théoriquement, la France, allié des Etats-Unis, aurait dû informer ce pays d’une
telle décision nécessitant l’accord du camp occidental. Pourtant, non seulement le général
de Gaulle ne les a pas consulté, mais il les a ignorés. Cela signifie un défi vis-à-vis des
Américains. Le principe fondamental de la politique étrangère du général de Gaulle était
d’assurer l’indépendance nationale de la France et d’obtenir par ce coup d’éclat une place
de tout premier ordre sur la scène internationale. In espérait que le monde serait
multipolaire, pas uniquement sous le contrôle des deux superpuissances. Dans cette
perspective, la reconnaissance de la RPC faisait partie des objectifs de politique
extérieure du général de Gaulle.
Le climat s’améliora après le retour au pouvoir du général de Gaulle en 1958. On
assista ainsi à un tournant important dans l’histoire diplomatique de la France. Ce climat
se manifesta probablement dans trois secteurs : la politique, l’économie et la défense.
Certains chercheurs chinois considèrent que la France jouit alors d’une remarquable
situation économique pour appliquer sa politique étrangère.
La politique étrangère du général de Gaulle ne rompt pas avec celle qu’il
poursuivait déjà pendant la Seconde Guerre mondiale et son premier mandat. On peut
1 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, n°1, 1995, page.12.
84
retrouver les événements de l’époque rapportés dans ses « Mémoires de guerre » où il
analysait soigneusement l’évolution du monde après la guerre, afin de définir la politique
extérieure de la France. Cette nouvelle politique est plus efficace, il l’élabore sur trois
niveaux :
1. Sur le plan politique, le général de Gaulle construit déjà le projet de constitution
de la cinquième République. En vertu de l’article 16 de la constitution de 1958, il
prend les pleins pouvoirs le 23 avril 1961, établit un nouveau système politique, et
met fin au désordre de la quatrième République, assurant ainsi une exécution
efficace de sa politique.
2. Sur le plan économique, la crise est manifeste depuis le début des guerres
coloniales en 1945. Le déficit financier atteint 1200 milliards de francs en 1958.
Après le retour au pouvoir du général de Gaulle, une réforme financière renforce
le franc, en transformant le système monétaire : cent anciens francs deviennent un
nouveau franc, cette réforme obtient de bons résultats dès 1962. Non seulement
on assiste à une reconnaissance et à une indépendance vis-à-vis des Etats-Unis,
mais encore sous l’égide de la loi du développement du capitalisme, l’économie
française va connaître une croissance supérieure à celle des Etats-Unis depuis
1958. Selon un chiffre publié par le Centre des hautes études françaises de
l’Université de Wuhan, de 1953 à 1961, la croissance de la production industrielle
française augmente de 75%, contre 20% aux Etats-Unis. En 1958, à son arrivée au
pouvoir, la France est accablée d’une dette de 30,9 milliards de dollars, avec une
réserve de devises d’or de 6,5 milliards de dollars. A la fin de l’année 1963, les
réserves en or ont atteint 7 milliards de dollars en France et parallèlement1, l’Etat
a remboursé sa dette extérieure avec plusieurs mois d’avance. Les Etats-Unis,
pour leur part, connaissent une crise dans la balance des paiements internationaux
depuis 1958. Entre 1959 et 1962, les progrès annuels français sont, pour
l’industrie : 5,4% quand l’agriculture dépasse 5%. Tout cela donnera au général
1 Le chiffre cité par Etudes françaises, Wuhan, Centre des hautes études françaises de l’Université de
Wuhan, n°3, 1984, page.100.
85
de Gaulle des moyens financiers nécessaires pour appliquer sa politique extérieure
indépendante.
3. Sur le plan de la défense, le général de Gaulle insiste sur une défense autonome de
la France, sinon, son indépendance n’est qu’une illusion. La France choisit alors
la voie du développement indépendant, en accumulant de nombreux succès. Le 13
février 1960, elle fait exploser sa première bombe atomique. La possession des
armes nucléaires est prioritaire dans le projet du général de Gaulle 1. En décembre
1960, la France élabore le premier plan quinquennal d’équipement nucléaire.
Selon Beijing (Pékin), la fin de la guerre d’Algérie accélère le processus
d’indépendance français dans le domaine de l’arme nucléaire. Et en fin d’année
1963, la France fonde la première génération de force nucléaire avec la bombe
atomique et le Mirage-IV, brisant ainsi le duopole nucléaire américo-soviétique.
Paris, comme Beijing (Pékin), refuse le Traité de Moscou du 27 juillet 1963
sur l’arrêt partiel des essais nucléaires. Ce traité a en effet pour but de limiter le
développement des armes nucléaires qui n’en disposent pas, et risque de restreindre
les capacités nucléaires de la France qui commence seulement ses essais et de la
Chine qui est sur le point de posséder la bombe atomique.
D’après le général de Gaulle, l’arme nucléaire est le moyen d’atteindre le but
de sa politique étrangère et demeure le symbole de la souveraineté nationale. De fait,
le projet nucléaire français vise surtout Washington. Le renforcement de la défense
française renforce sa position dans le domaine des relations internationales, le climat
est donc favorable à la reconnaissance de la RPC par la France. Celle-ci pourra agir
indépendamment sans l’accord de Washington.
A cette période- là, le général de Gaulle écrit : « ...la situation de la France a
profondément changé. Ses institutions nouvelles la mettent en mesure de vouloir et
d’agir. Son développement intérieur lui procure la prospérité et la fait accéder aux
moyens de la puissance. Elle a rétabli sa monnaie, ses finances, l’équilibre de ses
1 Voir le discours du général de Gaulle du 9 octobre 1960, publié par Le Monde du 11 octobre 1960.
86
échanges. Si bien, qu’elle se voit, au contraire, sollicitée de beaucoup de côtés. Aussi,
loin d’emprunter à d’autres notamment aux Américains, elle leur rembourse ses dettes
et, même, leur assurer à l’occasion quelques facilités. Elle a transformé en
coopération entre Etats le régime de colonisation qu’elle appliquait naguère à ses
territoires d’Afrique, et, pour la première fois depuis un quart de siècle, elle vit dans
une paix complète. Elle modernise son armée, l’équipe elle-même en matériel et
entreprend de se doter d’une force atomique propre... »1. Le général de Gaulle est un
visionnaire, la France devient un pays indépendant et de plus en plus fort.
Du côté chinois, Mao Zedong admire la volonté d’indépendance nationale et
de souveraineté d’Etat du général de Gaulle, remarquant qu’il est non seulement un
« combattant du fascisme, mais aussi un héros de la souveraineté française »2.
Certainement, la situation au Viêt-Nam accélérera l’envie du général de
Gaulle de lier des relations diplomatiques franco-chinoises. En effet, l’extension du
conflit militaire au Viêt-Nam l’amène à s’appuyer sur l’influence chinoise en Asie
pour empêcher l’action des Etats-Unis au Viêt-Nam, pour que la France puisse
retourner en Indochine. Il avait ainsi proposé que cinq pays : la France, la Chine
populaire, le Royaume-Unis, l’URSS et les Etats-Unis, participent à la négociation
sur le problème de la paix de l’Asie du Sud-est afin d’aboutir des tangibles résultats.
Ses discours en témoignent : « Notre initiative est un événement très
important sur le plan mondial. Elle manifeste les changements profonds intervenus :
la participation de la Chine à la vie politique mondiale, avec la Russie, l’élimination
des deux blocs idéologiques qui paraissaient s’être partagé le monde. Mais
l’événement le plus important, c’est le retour éclatant de la France, d’une grande
importance dans le Sud-est asiatique ».3 Le général de Gaulle critique modérément
1 Charles de Gaulle, Discours et messages IV , Paris, Plon, pp.121-122.
2 Le message du Président Mao Zedong à Mme . De Gaulle pour les condoléances du décès du général de
Gaulle le 31 novembre 1970. 3 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle II, Paris, Fayard, 1997, page.491.
87
l’agression américaine le 29 août 1963. La restauration des relations avec la Chine
populaire progresse.
88
CHAPITRE III
LA RECONNAISSANCE DE LA REPUBLIQUE POPULAIRE DE
CHINE PAR LA FRANCE
89
De nouvelles tendances se font jour qui permettent d’envisager sérieusement la
reconnaissance de la RPC par la France. Face à cette réalité, la question de Taïwan
resurgit ; constituant un des thèmes majeurs des négociations entre Beijing (Pékin) et
Paris.
En effet, en se réfugiant à Taïwan, Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) se pose en
représentant de l’ancien système législatif dominé jusqu’alors par le Guomingdang et
désormais aboli, alors que la Chine continentale est désormais communiste, et a proclamé
Mao Zedong comme président. Or au plan international, Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek)
bien que minoritaire est censé représenter l’ensemble de la Chine et occupe un siège
permanent au Conseil de Sécurité à l’ONU. Taïwan est donc une question délicate pour
Paris et Beijing (Pékin) qui amène plusieurs problèmes concrets1 :
1. la thèse de deux Chine, Beijing (Pékin) et Taipei revendiquent l’un et l’autre la
souveraineté sur le territoire de la Chine continentale ;
2. la question du statut de Taïwan : Beijing (Pékin) revendique l’île comme
appartenant à l’ensemble national chinois ;
3. le siège de membre permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, détenu par
Taïwan ;
4. enfin l’existence et le devenir des représentations de Taipei à Paris et de Paris à
Taipei et la propriété des immeubles.
En conséquence, Beijing (Pékin) s’attache au principe d’une seule Chine :
« Taïwan fait partie de la Chine ». Pour sa part, Paris préfère avoir un consulat des
affaires commerciales à Taïwan, mais Beijing (Pékin) rejette toute possibilité d’envisager
« deux Chine » au cours des négociations. Il semble alors difficile de sortir de l’impasse.
Pourtant, la réussite des négociations, entre Zhou Enlai et Edgar Faure, est basée
sur un accord en trois points proposés par la partie chinoise. Il stipule que Paris n’est pas
tenu de déclarer sa rupture avec Taïwan, tout en assurant Beijing (Pékin) de ne pas
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.466.
90
soutenir la thèse des « deux Chine ». Les Chinois considèrent que « cette initiative de
Zhou Enlai est la combinaison du principe et de la stratégie diplomatique »1. Dans
l’histoire diplomatique de la RPC, seule la France a bénéficié d’une telle concession.
Si certains chercheurs français, comme Christine Chaine, tentent de l’expliquer
par le « droit international »2 ou « devant l’opinion »3, les Chinois l’analysent plutôt à
travers de cet accord tacite. Ce chapitre comporte trois parties :
- La souveraineté de la RPC et le problème de Taïwan.
- Une politique souple à propos de Taïwan.
- Les réactions face au communiqué conjoint 1964.
III-1 La souveraineté et le problème de Taïwan
Beijing (Pékin) comme Taïwan, malgré leurs hostilités considèrent Taïwan
comme le symbole de la dignité de la nation chinoise. La déclaration du Caire de 1943
confirme cette opinion « Taïwan fait partie de la Chine, de sa géographie, de son
histoire... ». Par conséquent, la politique extérieure de la Chine est liée à cette question,
au nom de la nécessaire existence d’une seule Chine, dont il s’agit de défendre
fermement la souveraineté.
Pour Beijing (Pékin), Taïwan est une province chinoise occupée par des Chinois
du Guomindang et devrait en être libérée. Ce conflit est la poursuite de la guerre civile
chinoise causée par l’intervention d’une puissance étrangère : les Etats-Unis d’Amérique.
Pour sa part, Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) considère également que Taïwan est une
1 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvelle
pendant 50 ans Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Edit ions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1041. 2 Christine Chaine, La reconnaissance des gouvernements chinois par la France : Contribution à l’étude
du principe d’effectivité en droit international public, Presses Universitaires d’Aix Marseille, 1996. 3 Michel Bouissou, La reconnaissance de la RPC devant l’opinion , Presses Universitaires de Paris VI, 1967.
91
partie de la Chine, et qu’il s’y est réfugié avant de retourner en Chine continentale à
l’avenir.
Pour leur part, les Etats-Unis, en raison de l’importance stratégique de Taïwan,
mettent fin, dès le début de la guerre de Corée, et choisissent de protéger cette île. Dès
lors, ils affirment que « le sort de Taïwan n’est pas décidé ».
Cette «doctrine » influence ainsi l’attitude française et si Paris ne fait dans un
premier temps aucune allusion à Taïwan, il souhaite ensuite pour des raisons
économiques, conserver un consulat de rang inférieur sur l’île. Ce sera l’objet de longues
négociations. Le texte suivant l’analyse en trois points.
A) Les divergences entre Beijing et Paris à propos de Taïwan
Deux divergences à ce propos éclatent dès le début des négociations à Beijing
(Pékin), la position française paraissant peu claire au sujet de Taïwan.
Première divergence :
Edgar Faure1 propose trois formules au nom du général de Gaulle qui ne font
aucune allusion aux relations entre Paris et Taïwan. Il s’agit :
1. D’une reconnaissance sans condition. A savoir que le gouvernement français
reconnait le gouvernement de la RPC sans contrepartie, et le gouvernement
chinois donne son consentement.
2. D’une reconnaissance avec conditions. Où le gouvernement français propose de
reconnaître la RPC, si les conditions sont acceptables.
1 Edgar Faure fait une visite avec une mission du général de Gaulle en Chine le 21 octobre 1963 à
l’invitation du Comité d iplomatique du peuple de Chine. Avant son départ pour la Chine, il a passé à
l'ambassade de Chine en Suisse pour expliquer à l'ambassadeur chinois Li Qingquan ( ) qu'il a une
mission du général de Gaulle et lui présente sa lettre.
92
3. D’une reconnaissance différée. Le gouvernement français reconnait
momentanément la Chine hors du domaine politique, et des relations particulières
sont entretenues entre les deux pays1
Puisque pendant les négociations, la question de Taïwan a été occultée par Edgar
Faure, qui tout en réitérant la volonté du général de Gaulle de reconnaître une seule Chine,
semble espérer que le préalable de la rupture avec l’île taïwanaise ne sera pas mis sur le
tapis. Il espère que le côté chinois s’abstiendra de demander à la France de rompre au
préalable avec Taïwan. Zhou Enlai qui n’est pas dupe, en manifeste une certaine
inquiétude.
Celui-ci, répondant à la proposition d’Edgar Faure, transige, et propose que dans
l’éventualité où le gouvernement français ne soit pas encore prêt à la rupture avec Ta ïwan,
il pourrait entretenir des relations officieuses, comme l’existence de représentants
commerciaux. Cela évitera la création de fait de « deux Chine ». Son avis s’exprime par
ses trois formules suivantes2 :
1. Etablissement des relations diplomatiques entre la France et la Chine, semblables
à celles entretenues entre la Chine et la Suisse ou les autres pays occidentaux du
Nord de l’Europe, c’est-à-dire, la rupture des relations avec Taïwan d’abord et la
reconnaissance de Beijing (Pékin) par Paris ensuite.
2. Etablissement des relations officieuses, semblables aux relations de la Chine avec
l’Angleterre ou le Pays-Bas, conduisant à des relations instables, ce serait
désagréable pour les deux parties.
3. Formule intermédiaire : les deux pays peuvent tout d’abord organiser un réseau
commercial pour développer leurs relations jusqu’à l’aboutissement des
négociations diplomatiques.
1 En référence aux Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, n°1, 1995, page.37 et à l'ouvrage :
Les Relations extérieures de la France après la deuxième guerre mondiale ( zhanhou
faguo waijiaoshi), Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Beijing, Ed itions Connaissances
universelles ( shijie zh ishi chubanshe), 1993, page.223. 2 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions de Presses Connaissances universelles
( shijie zh ishi chubanshe) , 1998, page.41.
93
Beijing (Pékin) montre qu’il préfère la première parmi ces trois formules : la
rupture avec Taïwan d’abord, l’établissement des relations diplomatiques ensuite.
Face aux trois formules de Zhou Enlai, Edgar Faure répète le vœu de la France
d’établir les relations diplomatiques avec la Chine sans conditions et sans que le
gouvernement chinois s’abstienne de demander à la France de rompre au préalable avec
Taïwan.
Deuxième divergence :
Edgar Faure interroge Zhou Enlai : Y a-t- il une possibilité de conserver un consul
de rang inférieur à Taïwan pour s’occuper des intérêts français après la normalisation
avec la Chine populaire ?
Zhou Enlai perçoit que l’idée d’Edgar Faure tend à la doctrine d’une Chine et
d’un Taïwan. Il rejette cette possibilité, en raison du fait que la Chine ne veut pas imiter
le modèle sino-anglais1 pour les raisons suivantes :
- Le gouvernement anglais s’abstient le 13 janvier 1950, au vote de la proposition
soviétique sur l’admission de la RPC au conseil de sécurité de l’ONU, après la
reconnaissance du 6 janvier 1950.
- Le gouvernement anglais s’aligne sur la doctrine américaine selon laquelle « le
sort de Taïwan n’est pas décidé », après un mois d’engagement de la 7ème flotte
américain en mer de Chine le 27 juin 1950.
- Londres conserve ainsi un consul à la fois à Beijing (Pékin) et Taïwan, qui
soutient les deux côtés.
- Au seizième Congrès de l’Assemblée générale de l’ONU en 1961, l’Angleterre
vote pour la proposition de l’URSS sur l’admission de la RPC, en votant aussi
pour la proposition des Etats-Unis : la question chinoise comme « les votes
1 L’Angleterre reconnait la RPC en 1950, interrompu également avec Taïwan , et conserve toujours un
consulat à Taïwan jusqu’en 1972.
94
valables, sur les questions importantes, doivent dépasser la majorité »,
l’admission de la RPC n’est pas possible.
Tout cela nuit à des relations normales.
Le côté chinois considère que si la France reconnaît une seule Chine, étant partie
intégrale de la Chine, elle ne pourra pas conserver un consul de rang inférieur sur l’île.
Sinon, cela conduira aux relations instables telles que celles avec l’Angleterre. Cette
situation n’est pas envisageable ni pour Beijing (Pékin) ni pour Paris.
Une question se pose : le général de Gaulle entretient- il les relations amicales
avec Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) depuis la Seconde Guerre mondiale ? Ce serait la
raison pour laquelle il ne voudrait pas rompre leurs relations. En outre la reconnaissance
de Beijing (Pékin) parait une action commune aux Occidentaux. En effet, comment
rompre avec Taïwan, ce sera une question délicate pour le général de Gaulle.
Edgar Faure n’étant pas en mesure de faire des propositions acceptables par
Beijing (Pékin), les négociations sont suspendues momentanément, il part pour visiter la
Mongolie extérieure chinoise et Datong.
B) L’inquiétude chinoise quant à la souveraineté
Pourquoi l’attitude d’Edgar Faure suscite-t-elle l’inquiétude de Zhou Enlai ? Dans
l’hypothèse, où la France ne prendrait pas l’initiative de la rupture avec Taïwan avant
l’établissement des relations avec Beijing (Pékin), et si Taïwan ne rompt pas non plus les
siennes avec la France, on risque de se diriger vers la création de « deux Chine » pour ces
raisons suivantes :
- Taïwan occupe un siège à l’ONU.
- Les Etats-Unis soutiennent la doctrine de « deux Chine ». Ils suggèrent à Taïwan
de ne pas prendre l’initiative de la rupture avec les autres pays. Si Taïwan agit
ainsi, la Chine continentale se trouve dans une position passive au plan
international.
95
- Edgar Faure ne s’est pas exprimé sur les raisons qui le poussent à garder un
consul à Taïwan.
Le plus important que Taïwan, occupant encore un siège à l’ONU, protégé par les
Américains qui tentent l’existence de « deux Chine », le problème de Taïwan pourrait- il
obliger à la division de l’Etat ? En conséquence, le gouvernement chinois reste très ferme
ainsi que prudent sur ce problème, et ne cède pas. Beijing (Pékin) n’accepte pas d’autres
solutions que la rupture avec les autorités taïwanaises et maintient la déclaration de 1949 :
« Le présent gouvernement est l’unique gouvernement légal, il représente le peuple de la
République populaire de Chine ».1
Conformément à ce principe, tous les pays qui voudront établir des relations
diplomatiques avec la Chine populaire devront abandonner leurs liens diplomatiques avec
le gouvernement de Taïwan.
Les divergences se produisent à cause des réserves exprimées entre eux vis-à-vis
de Taïwan, la France désirant reconnaître une seule Chine, mais sans déclaration. Pour la
Chine populaire, la question de Taïwan est essentielle. La négociation est donc suspendue,
tant que cette question n’est pas levée.
C) Edgar Faure n’engage pas la rupture avec Taïwan
Pourquoi Edgar Faure, qui prend l’initiative de la reconnaissance de la RPC, ne
veut-il pas s’engager dans la rupture avec Ta ïwan ?
Zhou Enlai propose deux hypothèses2 pour expliquer l’attitude française :
- La France pense que le sort de Taïwan n’est pas encore décidé.
1 La politique de Chine ( Zhengzhi), Beijing, Ed itions de Presses des langues étrangères(
waiwen chubanshe), 1986, page.119. 2 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions de Presses Connaissances universelles
( shijie zh ishi chubanshe) , 1998, page.41.
96
- Paris a besoin de temps pour régler définitivement ses affaires avec Taïwan.
- En outre, le Quai d’Orsay espère que la reconnaissance de la RPC par la France
ne menacera ni les intérêts occidentaux, ni l’amitié entre les Etats-Unis et Taïwan1.
La position française relative à Taïwan n’est pas encore prise, et loin d’être
résolue.
Dans les Lettre, Notes, et Carnets du général de Gaulle, en date du 26 septembre
1963, on peut lire : « Nous considérons le maintien de ces relations (avec Formose)
comme convenable, même s’il devenait nécessaire d’en atténuer quelques peu la
manifestation officielle »2.
Alain Peyrefitte dans « C’était de Gaulle II », rapporte la réponse faite par
Maurice Couve de Murville, à la question de Sainteny : « La contrepartie, c’est la rupture
avec Formose. Faut- il prendre ce risque ? » Lors du Conseil des ministres le 8 janvier
1964 : « Formose, c’est le vrai problème. Il n’est pas concevable que nous prenions
l’initiative d’une rupture avec Formose. Il est probable que Taipei3 décidera de rompre,
mais ce n’est pas tout à fait certain. Pour les Américains, l’affaire est sentimentale.
Tchang Kaï-chek est l’allié et le vassal des Etats-Unis. En outre, c’est une position
stratégique. Pour les Etats-Unis plus que nous, le problème est de ne pas rompre avec
Formose »4.
Dans les Notes et Etudes documentaires françaises, on peut lire : « M. Edgar
Faure laisse entendre que la France s’en tiendra à une simple concordance entre le droit et
le fait, c’est-à-dire qu’on laissera le soin à Taipei de rompre les relations diplomatiques
s’il le désire, qu’elle ne prendra pas parti sur la revendication de la Chine populaire quant
1 Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Les Relations extérieures de la France après la deuxième
guerre mondiale » ( zhanhou faguo waijiaoshi), Beijing, Edit ions Connaissances
universelles ( shijie zh ishi chubanshe) ; 1993, page.231. 2 Charles de Gaulle, Les Lettres, Notes, et Carnets, 26 septembre 1963.
3 Taipei : capitale de la région de Taïwan
4 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, tome II, Paris, Fayard, 1997, page.486.
97
à la souveraineté sur l’île et qu’enfin elle ne reprendra pas à son compte la théorie des
‘deux Chine’, la souveraineté étant indivisible »1.
Dans sa communication au colloque sur le 30ème anniversaire de l’établissement
des relations franco-chinoise en 1994, Michel Bouissou2 note : « M. Edgar Faure révélait
presque tout et annonçant quasiment tout ce qui allait se passer dans le Figaro du 9
janvier 1964. » Il y a deux débats parlementaires à l’époque, l’un sur la Constitution,
l’autre sur la politique étrangère.
Jacques Duhamel, porte-parole de l’opposition, intervient dans le débat sur la
politique étrangère : « Serait-ce indélicat de la part de la France de reconnaître la Chine
populaire ? L’Amérique est en deuil, l’Union soviétique particulièrement susceptible à
toute immixtion dans sa zone réservée. Si on accorde Formose à la Chine, il faut
raccrocher l’Allemagne de l’Est à l’Allemagne de l’Ouest ; Prudence ! » Michel
Bouisson continue : « Une interview du Figaro parait le 9 janvier, au tout début de
l’intersession parlementaire. L’affaire est ensuite rondement menée jusqu’à la conférence
de presse du 31 janvier, dont les deux thèmes majeurs seront la nouvelle « lecture de la
Constitution et la reconnaissance de la Chine, symbole de la nouvelle diplomatie
française »3.
« Paris refusait de se prononcer sur l’unité de la Chine, pour dire les choses
clairement et crûment. D’ailleurs, il est dit textuellement dans les textes de mission
d’Edgar Faure, qu’il ne peut pas faire sienne la thèse de l’appartenance de cette île à
l’ensemble national chinois : on ne peut pas être plus net, même si on admet que sur une
assiette territoriale donnée, il ne peut y avoir qu’une seule souveraineté »4, comme l’écrit
François Joyaux dans sa communication pour le 30ème anniversaire de l’établissement des
relations diplomatiques sino-françaises.
1 Notes et Etudes documentaires françaises, le 3 septembre 1973, n°4014 et 4015, page.28.
2 Michel Bouisson, professeur émérite des Universités, fait une recherché portent sur La reconnaissance de
la République populaire de Chine devant l’opinion en 1965, et publiée en 1967 par les Presses
universitaires de France. 3 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Pris, Plon, n°1, 1995, page.59.
4 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Pris, Plon, n°1, 1995, page.49.
98
Les gouvernements français et chinois diffèrent sur la façon de résoudre la
question de Taïwan. La France n’a pas l’intention d’engager la rupture avec Taïwan, elle
laissera ce soin aux autorités taïwanaises si elles le désirent. Mais Beijing (Pékin) espère
que Paris annulera ses relations officielles avec Taïwan confirmant ainsi la connaissance
de la RPC.
III-2 Une politique souple à propos de Taïwan
Dans cette partie, j’apporte des éléments importants qui ne sont pas signalés dans
les sources françaises, tel que l’accord tacite en trois points, du 2 novembre 1963, signé
par Zhou Enlai et Edgar Faure, pendant les négociations pour l’établissement des
relations diplomatiques. Il est clair que cet accord a pour but d’éviter une déclaration
publique de la France sur la question de Taïwan. Grâce à cet Accord tacite, Beijing
(Pékin) n’exige plus la déclaration de la rupture française avec le gouvernement taïwanais.
Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la RPC fait ainsi une déclaration
le lendemain pour confirmer le principe d’une seule Chine.
A) L’accord tacite entre Zhou Enlai et Edgar Faure
Pour faire preuve de souplesse quant aux modalités de la normalisation, et tout en
persistant dans son opposition au concept des « deux Chine », le 31 octobre 1963, Zhou
Enlai propose une nouvelle formule afin de sortir de la tension des négociations à cause
de la divergence sur Taïwan.
« La nouvelle formule consista à annoncer d’abord l’établissement de relations
diplomatiques entre la Chine et la France pour conduire ensuite, sous l’effet du droit
international, à une rupture entre la France et Taïwan, à condition que les deux parties
parviennent à un accord tacite aux termes duquel la France reconnaissait le gouvernement
de la RPC comme seul gouvernement légal représentant tout le peuple chinois et tienne
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les engagements correspondants »1, l’écrit Zhang Xichang (interprète du français de Mao
Zedong et de Zhou Enlai), comme le témoin2. Pour Edgar Faure, cette formule est
positive, car elle laisse la France régler, elle-même, son problème avec Taïwan, elle est
aussi conforme à la loi internationale.
Cependant, bien que cette nouvelle formule soit beaucoup plus soup le, il existe
toujours un désaccord sur Taïwan. Dans celle-ci un détail de procédure revêt une
importance considérable :
Si Taïwan ne retirait pas ses représentants diplomatiques de la France après les
échanges des ambassadeurs entre Beijing (Pékin) et Paris, et que Paris les considère
encore comme des représentants diplomatiques, Beijing (Pékin) serait à son grand regret
contraint de rompre la procédure, en rapatriant ses diplomates.
Edgar Faure, hésitant sur ce point, explique que si Beijing (Pékin) et Paris
échangent leurs ambassadeurs, et que si quelques jours plus tard, celui-ci repart, du fait
que Taïwan ne retire pas son ambassadeur de Paris, ce devrait ridiculiser la politique du
général de Gaulle. Donc où est l’issue ?
Les négociations continuent à Shanghai. Zhou Enlai adopte une politique plus
souple, c’est-à-dire : déclaration de l’établissement d’abord, rupture ensuite. A condition
que la France réitère sa position de ne pas soutenir des activités visant à créer « deux
Chine », la Chine n’exigera plus de la France une déclaration formelle à ce sujet et se
contentera de faire une déclaration unilatérale que la partie française approuvera par son
silence.
1 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Pris, Plon, numéro.1, 1995, page.39.
2 Zhang Xichang , travaillait au Bureau des affaires françaises du min istère des Affaires étrangères
de Chine depuis 1952, interprète du français de Mao Zedong et de Zhou Enlai. Il participa aux toutes les
négociations par rapport de la reconnaissance de la RPC par la France depuis 1963. Attaché politique de
l'ambassade chinoise à Paris de 1964-1967 et de 1981-1988. En référence au dossier : Les relations
diplomatiques de la Chine nouvellle pendant 50 ans Tome II ( xinzhonguo waijiao
wushinian), Wang Taiping , Zhang Guangyou , Beijing, Edit ions de Presse de Pékin, 1999.
100
Cette politique s’explique par une nouvelle proposition qui consiste en trois points
principaux, extraite du discours de Zhou Enlai, et que Zhang Xichang dicte et traduit en
français et qu’il donne à Edgar Faure. Les deux côtés s’accordent définitivement sur
l’arrangement tacite ci-dessous1 :
1. Le gouvernement français ne reconnait que le gouvernement chinois comme le
seul gouvernement légitime de la République populaire de Chine : il ne reconnait
plus le gouvernement de la République nationaliste de Chine à Taïwan.
2. Le gouvernement français soutient le droit légal de la République populaire de
Chine à siéger à l’ONU, et il ne soutient plus les représentants de la République
nationaliste de Chine à l’ONU.
3. Dès l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine populaire et la
France, Taïwan rappellera ses représentants hors de France. Le gouvernement
français en fera autant à Taïwan.
Ce plan est, pour Edgar Foure, raisonnable et plus acceptable pour mettre fin au
problème des relations entre Paris et Taïwan. Zhou Enlai et lui tombent finalement
d’accord sur la base de ces trois conditions tacites.
Après plusieurs concertations, Zhou Enlai et Edgar Faure signent le 2 novembre
1963, un accord provisoire qui ne sera validé qu’après l’accord du général de Gaulle.
Celui-ci accepte le rapport d’Edgar Faure et l’accord provisoire du 22 novembre 1963
pour la normalisation avec la RPC.
L’accord provisoire2 :
Edgar Faure, au nom du Président de la République française, Charles de Gaulle,
exprime la volonté de normaliser les relations diplomatiques avec la Chine, le
gouvernement chinois souhaite cordialement aller dans le même sens.
1 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvellle
pendant 50 ans Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Edit ions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1038. 2 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvellle
pendant 50 ans Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Edit ions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1039.
101
Le gouvernement chinois, par une volonté réciproque, propose le plan d’établir
directement les relations franco-chinoises. Ce plan comprend trois articles.
Le gouvernement chinois propose le plan suivant, que le Premier ministre Zhou
Enlai et Edgar Faure ; sur la base de ne pas soutenir la création de « deux Chine »,
approuvent de manière identique :
1. Le gouvernement français reconnaît le gouvernement chinois comme seul
gouvernement légitime ; cela veut dire que « le gouvernement nationaliste de
Chine » n’existe plus pour la France.
2. La France reconnaît le droit de siéger à l’ONU à la RPC et non plus à la
République nationaliste de Chine.
3. Après l’établissement des relations diplomatiques entre la RPC et la France, le
gouvernement de la République nationaliste de Chine devra retirer son ambassade
de la France et réciproquement.
Le règlement de l’accord sur Taïwan est rendu public par une déclaration d’un
porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinoise le lendemain du Communiqué
conjoint1, qui la commente ainsi :
« La coutume internationale, la reconnaissance d’un nouveau gouvernement d’un
pays, impliquent de cesser la reconnaissance du groupe dirigeant renversé par le peuple
d’un tel pays »2.
Cette déclaration a été faite selon un accord convenu préalablement entre les deux
parties. Edmond Jouve écrit à ce sujet : « La publication de ce document – c’est une
originalité – est suivie à Beijing (Pékin) d’une déclaration spécifique du porte-parole du
ministère des Affaires étrangères »3.
Les Chinois considèrent que « c’est la combinaison du principe avec la stratégie »
qui a permis aux deux pays de réussir à établir leurs relations diplomatiques sans que la
1 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Pairs, numéro.1, 1995, page.69. Notes et Etudes
documentaires françaises, Paris, 1973, numéro.4014-4015, page.53. 2 Le Quotidien du people ( renmin ribao)du 28 janvier 1964 et Le Monde du 29 janvier 1964.
3 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Pairs, numéro.1, 1995, page.17.
102
France ait eu à se prononcer sur la rupture avec Taïwan. Le Monde note après l’annonce
du communiqué : « C’est M. Edgar Faure selon toute apparence, qui a trouvé la sortie et
qui a su persuader les Chinois de passer par- là »1.
Hormis cet accord tacite, on a marqué le point modifié par Edgar Faure : il a
supprimé dans le 1er point « ... ne reconnaît plus soit disant ‘le gouvernement nationaliste
de Chine’ à Taïwan », cette phrase est remplacée par « Cela veut dire que cette
qualification n’appartient plus au gouvernement nationaliste chinois à Taïwan ». Cette
motivation est claire : si la France ne le reconnaît plus, la France devrait prévenir le
gouvernement nationaliste chinois d’après Edgar Faure. Sinon, cette qualification
n’appartient plus au gouvernement nationaliste de Chine à Taïwan.
A ce sujet, Zhang Xichang le souligne dans le colloque du 30ème anniversaire de
l’établissement, en rapportant une conversation privée avec le professeur Vaïsse qui lui
confie : « il existe ces trois sujets tacites dans les archives françaises », mais on évite de
parler de ce sujet en public. Pourquoi ? Zhang Xichang répond à cette question : car les
Français ne veulent pas rabattre leur orgueil2.
B) La rupture française avec Taïwan
Bien qu’il y ait un accord tacite, Beijing (Pékin) est toujours soucieux des
relations entre Paris et Taïwan en raison de la non-déclaration de la rupture française avec
Taïwan. En fait, le général de Gaulle tient sa promesse, et entreprend de rompre avec
Taïwan sans écouter ni Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) ni les Américains.
Trois choses le confirment :
1 Le Monde du 25 janvier 1964, page.1.
2 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC (
gongheguo disanci jianjiao gaochao), Beijing, Ed itions Connaissances universelles (
shijie zhishi chubanshe) , 1998, page.44-45 et 51.
103
1) Le 24 décembre 1963, lorsque Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek)
reçoit cette information, il écrit une lettre au général de Gaulle dans laquelle il
expire son inquiétude sur la reconnaissance de la Chine populaire. Pour sa part, le
général de Gaulle considère la rupture avec Taïwan, comme irrévocable et
dépêche le général Pechkoff1 du 19 et 20 janvier 1964 à Taïwan.
Cet envoyé spécial, chargé d’une lettre du général de Gaulle, apporte le
dernier salut à Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek). Dans laquelle le souligne le
général de Gaulle :
« La situation qui s’est créée et confirmée en Chine continentale n’a pas
répondu aux prévisions que l’on avait pu envisager dans le passé. La France ne
saurait ignorer plus longtemps un fait qui s’est établi. D’autres puissances
appartenant à l’Ouest l’ont, d’ailleurs, précédée dans cette voie depuis des années.
Au surplus, l’évolution qui s’est récemment manifestée au sein du monde
communiste la conduit maintenant à prendre une décision, dont nous pensons
qu’elle sera, en définitive, conforme à son intérêt véritable et à celui de ses
amis... ...Depuis dix ans déjà, la force des choses nous a conduits à entrer en
relation avec les dirigeants de Beijing (Pékin) »2.
A travers cette lettre, on peut trouver le réalisme du général de Gaulle :
« La France ne saurait ignorer plus longtemps un fait qui s’est établi ». Pour de
Gaulle, « Tchang Kaï-chek appartient au passé ; artificiellement prolongé, grâce à
la protection américaine, à présent sans avenir. Mao Zedong, c’est une force
formidable, fascinante, un étrange mélange d’orgueil extrême et d’extrême
simplicité, un homme qui, de son pays endormi dans un sommeil séculaire, est en
passe de faire l’une des grandes puissances mondiales »3, comme l’écrit André
Fontaine.
2) Ce voyage est un préambule à la rupture avec Taïwan. Malgré
Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) essaie de le convaincre que « son retour sur le
1 Le général Pechkoff, ancien ambassadeur de France à Chongqing.
2 Charles de Gaulle, Les lettres, Notes et Carnets, janvier 1964 – ju in 1966, Paris, Plon, 1986, page.22.
3 André Fontaine, Histoire de la « détente », Un seul lit pour deux rêves, 1962-1981, Fayard, 1984.
104
continent est possible ». Il ne peut plus changer la décision du général de Gaulle.
Le général Guillermaz écrit dans ses Mémoires :
« Au cours de ce premier entretien de plusieurs heures, le maréchal
souhaite que le général de Gaulle ne se laisse pas tromper par la cause du
continent et l’adjure d’avoir confiance dans la victoire la sienne et celle du monde
libre sur le communisme. ...Notre retour sur le continent est possible ; le général
de Gaulle était à Londres dans la même situation ».
« A ces longs développements, qui ne sont pas sans intérêts pour les
biographes de Tchang Kaï-chek, dont ils éclairent la personnalité et les vues du
moment, le général Pechkoff ne répondra que des expressions de courtoisie, vides
de tout contenu politique. Il ne lui appartenait pas en effet d’entrer en discussion
pour justifier une décision qu’il savait irrévocable. Il était venu apporter au
maréchal Tchang Kaï-chek le dernier salut d’un autre soldat dont l’intérêt d’Etat
allait le séparer »1.
3) Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) lui demande de retarder la
reconnaissance de la Chine populaire. L’ambassadeur des Etats-Unis à Paris
transmet aussi l’avis de Washington : il espère retarder la décision française
jusqu’en 1965, si la France souhaite toujours reconnaître la Chine communiste
parce que l’année 1964 est une année d’élections présidentielles et la décision
française serait sensible en période d’élection. Cependant le général de Gaulle
continue son plan de la normalisation des relations diplomatiques avec la RPC,
sans considérer ni l’avis du côté taïwanais ni celui du côté américain.
L’initiative prise par le Président Mao Zedong et le général de Gaulle a été
analysée par les témoins et les historiens quelques années plus tard, à l’occasion du 20ème
anniversaire de cet événement. Etienne Manac'h souligne dans la conférence du Palais du
Luxembourg en 1984 : « Le voyage en lui-même, et l’objet qui le motive, sont en effet
une éclatante manifestation de l’indépendance de la politique française. La Chine n’a tout
de suite évalué l’importance. Chacun connaît l’habitude dialectique d’Edgar Faure, et
1 Jacques Guillermaz, Les Mémoires : une vie pour la Chine, Paris, Robert Laffont, 1994, page.292 et
page.295.
105
certains d’entre nous ont pu voir à l’épreuve la lucidité intellectuelle de Zhou Enlai. En
fait, l’accord de principe sera établi assez rapidement »1.
C) L’annonce du communiqué conjoint du 27 janvier 1964
« A l’issue de son voyage en Chine, Edgar Faure est reçu le 22 novembre 1963 par le
général de Gaulle, qui lui confirme qu'il compte donner une suite positive au mois de
janvier suivant. »2
Le 8 janvier 1964, lors d’un conseil des ministres, le général de Gaulle demande aux
membres du gouvernement, surpris de l’initiative, leur sentiment sur la reconnaissance
par la France de la Chine populaire. « La Chine est une énorme chose, explique le
Général, elle est là, elle existe. Vivre comme si elle n’existait pas, c’est irréaliste… Le
fait chinois est là. C’est un pays énorme. Son avenir est à la dimension de ses moyens. Le
temps qu’il mettra à les développer, nous ne connaissons pas. Ce qui est sûr, c’est qu’un
jour ou l’autre, peut-être plus proche qu’on ne croit, la Chine sera une grande réalité
politique, économique et même militaire. C’est un fait et la France doit en tenir
compte… »
Quelques jours plus tard, de Gaulle confie à Alain Peyrefitte : « Nous allons tourner
la page coloniale, celle des concessions en Chine, comme celle de l’Indochine française.
Cela veut dire que la France revient en tant qu’amie, et que nous pourrons aider la
Chine dans la mesure de nos moyens… Il n’est pas exclu qu’elle redevienne au siècle
prochain ce qu’elle fut pendant tant de siècles, la plus grande puissance de l’univers ».3
En raison de l’absence des relations diplomatiques, les contacts officiels entre les
deux pays sont établis à l’ambassade de la RPC à Berne par Jacques de Beaumarchais,
directeur d’Europe au Quai d’Orsay et par Li Qingquan, ambassadeur de Chine en Suisse
à la suite des négociations menées par Edgar Faure. Après le 12 décembre 1963, plusieurs
1 Historiens & Géographes, Paris, Buisson, n°309, page.1075.
2 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.466.
3 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.488.
106
discussions ont lieu en Suisse, les 2, 9 et 18 janvier 1964. C’est le 23 janvier 1964 que les
deux côtés mettent un point final.
Le communiqué conjoint sera annoncé le 27 janvier 1964 dans les deux capitales.
Des deux côtés on a convenu que le communiqué conjoint serait, suivant un procédé
inhabituel dans l’histoire diplomatique, rédigé de façon pure et simple, sans question ni
condition, dans le cadre des règles du droit international publié :
« Le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la
République populaire de la Chine ont décidé d’un commun accord d’établir des relations
diplomatiques. Ils ont convenu à cet effet de désigner des ambassadeurs dans un délai de
trois mois »1.
Pourquoi le 27 janvier ? Martin Garret l’explique en trois points2 :
-Premièrement, de Gaulle a largement le temps pour préparer sa conférence de
presse semi-annuelle prévue le 31 janvier 1964 qui est une occasion parfaite pour justifier
la reconnaissance de la RPC par la France devant les presses françaises et internationales;
-Deuxièmement, cette date est également déterminée à l’égard de la politique
intérieure américaine : de Gaulle envisage d’accomplir la normalisation des relations
avec la Chine avant l’élection présidentielle américaine qui aura lieu en novembre 1964 ;
-Finalement, cette date est aussi signifiante par rapport à la stratégie de l'année à
venir du général de Gaulle. Il explique à Alain Peyrefitte le 22 janvier 1964 : établir des
relations avec la Chine populaire signifie que la France a tourné la page de colonies, de
concessions en Chine et que la France retourne en tant qu’amie qui respecte
l’indépendance nationale. Reconnaître la RPC manifeste la capacité de la France d'agir
indépendamment dans le tiers monde. Dans la conférence de presse du 31 janvier, de
Gaulle annonce aussi la politique de l’aide française vers ses anciennes colonies et son
projet de visite au Mexique et en Amérique latine dans l'année à venir.
1 Le Quotidien du people ( renmin ribao)du 28 janvier 1964 et Le Monde du 27 janvier 1964.
2 Garret Martin, Playing the China Card ? Revisiting France’s Recognition of Communist China, 1963–
1964, Journal of Cold War Studies Vol. 10, No.1, Hiver 2008, pages.73-74.
107
Copie scannée de l’original du Communiqué
108
Les devoirs ne se présentent pas directement dans le communiqué conjoint, mais
s’expriment par une déclaration du 28 janvier 1964 d’un porte-parole du gouvernement
chinois, le gouvernement français reconnaissant tacitement par son silence. Cette
déclaration annonce :
« C’est en qualité d’unique gouvernement légal représentant tout le peuple chinois
que le gouvernement de la République populaire de Chine a mené ses négociations avec
la France. Selon la pratique internationale, la reconnaissance d’un nouveau gouvernement
d’un pays implique de cesser la reconnaissance du groupe dirigeant renversé par le
peuple d’un tel pays. En conséquence les représentants de l‘ancien groupe dirigeant ne
peuvent plus être considérés comme les représentants dudit pays et être présents côte à
côte avec les représentants du nouveau gouvernement dans un même pays ou dans une
organisation internationale. C’est dans cet esprit que le gouvernement de la République
populaire de Chine est parvenu à un accord avec le gouvernement de la République
française sur l’établissement de relations diplomatiques et l’échange d’ambassadeurs
entre la Chine et la France. Le gouvernement chinois estime nécessaire de réaffirmer que
Formose fait partie du territoire chinois et que toute tentative de séparer Formose de la
Chine ou de créer ‘deux Chine’ est absolument inacceptable pour le gouvernement et le
peuple chinois »1.
Cette déclaration explique et prouve la position de principe dans l’esprit de
l’accord tacite, sur laquelle la partie française observait un silence approbateur.
Dans sa conférence de presse du 31 janvier 1964, de Gaulle évoque « la Chine, un
grand peuple, le plus nombreux de la terre » et justifie « la reconnaissance »de Beijing
(Pékin) par « l’évidence et la raison », et insiste sur le fait qu’ « aucune réalité politique
ne saurait être considérée, en Asie, ni guerre, ni paix », sans que la Chine « y soit
impliquée ».2
1 Le Quotidien du people ( renmin ribao)du 28 janvier 1964 et Le Monde du 29 janvier 1964,
Notes et Etudes documentaires françaises, 1973, numéro.4014-4015, page.53 et Cahiers de la Fondation
Charles de Gaulle, Paris, n°1,1995, page.69. 2 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.467.
109
Les dirigeants chinois suivent de près l’évolution des relations entre Paris et
Taïwan. Après le Communiqué conjoint le 27 janvier 1964, Taïwan proteste, sans retirer
ses représentants diplomatiques tout de suite. Mao Zedong est plutôt inquiet sur le thème
« les deux Chine », cela s’explique dans son discours lorsqu’il rencontre la délégation de
la mission parlementaire française le 30 janvier 1964 :
« Mais on nous demande ‘deux Chine’ ou un territoire autonome et, cela, nous ne
pouvons pas ‘l’accepter. La France ne doit tomber dans le piège des Etats-Unis. Elle doit
nous envoyer un ambassadeur. Elle ne doit pas se contenter d’un chargé d’affaires. Si ce
n’est pas clair, il n’est pas possible d’accepter un ambassadeur et d’en envoyer. Je l’ai
dit clairement à M. Edgar Faure. Notre ministre des affaires étrangères a fait une
déclaration à ce sujet et cela a été discuté en Suisse... »1.
Le général de Gaulle analyse avec son réalisme habituel, la place de la RPC :
« J’ai parlé du poids de l’évidence de la raison. Il n’y a effectivement, en Asie, aucune
réalité politique concernant notamment, le Cambodge, le Laos, le Viêt-Nam ou bien
l’Inde, le Pakistan, l’Afghanistan, la Birmanie, la Corée ou bien la Russie soviétique ou
encore le Japon, etc., qui n’intéresse ou ne touche la Chine. Il n’y a, en particulier, ni
guerre, ni paix imaginables sur ce continent sans qu’elle y soit impliquée »2.
Et quelle est la réaction du côté taïwanais ?
Le 1er février 1964, dès que le Quai d’Orsay annonce aux représentants de Taïwan
qu’un groupe de diplomates chinois étant arrivé à Paris, les représentants de la
République nationaliste de Chine ne sont plus reconnus, Taïwan annonce sa rupture avec
la France par un communiqué virulent :
« Ce acte du gouvernement français porte un préjudice irrémédiable aux relations
entre la République de Chine et la France. Le gouvernement de la République de Chine
1 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong ( maozedong waijiao wenxuan), Beijing, Édit ions documentaires du Comité central ( zhongyan wenxian chubanshe), 1994, page.522 ; Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, 1995, n°1, page.161. 2 Charles de Gaulle, Discours et messages IV , Paris, Plon, 1970, page.180.
110
considère que de tels actes ne sont plus tolérables et a, par conséquence, décidé de
rompre les relations diplomatiques avec la France à partir du 10 février 1964 »1. La
rupture était consommée.
La rupture entre Paris et Taïwan se déroule comme le général de Gaulle l’avait
prévu : « Il n’est pas concevable que nous prenions l’initiative d’une rupture avec
Formose. Il est possible que Taipei décide de rompre. »2.
Le problème que tentaient de régler depuis des années les diplomates et les
hommes d’Etat, en le tournant et le retournant dans tous les sens, était désormais résolu.
Cet événement marque une date fondamentale dans l’histoire des relations internationales.
Après l’annonce du Communiqué conjoint, un chargé d’affaires, Claude Chayet, qui
a grandi dans la capitale chinoise, est immédiatement désigné pour préparer l’ouverture
de l’ambassade de Beijing (Pékin).3 Les représentants français et chinois arrivent à Paris
et à Beijing (Pékin) le 23 février 1964. Conformément au communiqué conjoint
« désigner des ambassadeurs dans un délai de trois mois », Lucien Paye, vieil ami de
Georges Pompidou, ancien ministre de l’Education nationale, alors ambassadeur de
France au Sénégal, est nommé ambassadeur de France à Beijing (Pékin) le 27 mai alors
que Huang Zhen4, ambassadeur de Chine à Paris le 2 juin.
Désormais, la France et la Chine populaire ouvrent une nouvelle page de leurs
relations, la France est devenue le premier des grands pays occidentaux à établir des
rapports réguliers avec la nouvelle République chinoise en vue de favoriser leur
compréhension mutuelle, le développement de leurs échanges dans tous les domaines, et
le dialogue sur les grandes affaires internationales.
1 Notes et Etudes documentaires françaises, 1973, n°4014-4015, page.54.
2 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, Paris, Fayard, 1997, page.486.
3 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.493.
4Huang Zhen , ambassadeur chinois en France de 1964 à 1973.
111
III-3 Les réactions internationales après l’annonce
conjoint du communiqué franco-chinois
La reconnaissance de la République populaire de Chine par la France suscite de
nombreuses réactions au niveau international. En principe, deux opinions s’opposent
juste après l’annonce du communiqué franco-chinois. L’une montre de la volonté de
détente internationale alors que l’autre témoigne de l’intensité de la tension sino-
américaine qui reste dans cette période de guerre froide.
Plus favorables sont les réactions des Chinois et des Français eux-mêmes ainsi
que des pays du camp socialiste, comme Moscou. Les jugements négatifs sur l’initiative
française proviennent principalement des Etats-Unis, de Taïwan, bien entendu, du Japon,
de Saigon et de certains pays de l’Alliance Atlantique.
Pourquoi cette décision bilatérale entre la France et la Chine suscite-t-elle la
colère des Etats-Unis ? Parce que « c’est une gifle aux Américains qui voient en Mao le
grand méchant loup en personne, et, pour un peu, le principal responsable de la guerre du
Viêt-Nam. C’est aussi pour le général de Gaulle un moyen de plus de faire comprendre
aux Soviétiques que la France agit sans prendre l’avis de personne, et notamment des
Etats-Unis. C’est enfin une tentative pour se prémunir contre ce péril jaune qui
l’obsède »1.
A) Les opinions favorables
Les opinions les plus favorables viennent des médias chinois et français. Sous le
titre « Saluer l’établissement des relations officiellement entre la France et la Chine »2,
le Quotidien du peuple proclame que les complots de l’impérialisme américa in pour
1 André Fontaine, Histoire de la « détente », Un seul lit pour deux rêves, 1962-1981, Fayard, 1984.page.74.
2 Le Quotidien du people ( renmin ribao)du 28 janvier 1964.
112
isoler la nouvelle Chine sont voués à l’échec. Cette pensée explique l’esprit des Chinois à
ce moment-là et pour cette affaire.
En première page du Monde du 28 janvier 1964, on peut lire : « La Chine
populaire est un fait, un très grand fait... n’est-il pas étrange qu’un si important pays
souverain n’ait pas encore été reconnu ? Si fait n’est-il pas opportun de le reconnaître à
présent ? ».
Ces opinions se manifestent dans deux sondages en France à cette période- là. Un
sondage d’opinion révèle que 39% des Français contre 26% étaient favorables à une
reconnaissance de la Chine populaire en décembre 1963 1. Michel Bouisson révèle dans sa
communication l’existence d’un autre sondage : « la campagne médiatique autour de la
reconnaissance de la RPC peut se décrypter comme une ‘simulation’ de campagne
référendaire, les résultats (recueillis par sondage en février 1964) s’énonçant ainsi : Oui,
54%, Non, 14% ; Abstentions, 32%. Ce qui, dans les urnes, aurait donné ce résultat
‘introuvable’ de 81%de ‘Oui’ sur 68% de votants »2.
D’autre part, les Amitiés franco-chinoises expriment leur satisfaction, en adoptant
la résolution suivante : « Depuis plus de dix ans, des Français de toutes appartenances
politiques, de tous milieux sociaux des amitiés franco-chinoises, se sont efforcés de faire
connaître la Chine aux Français et la France aux Chinois. Depuis plus de dix ans
l’Association a œuvré pour la reconnaissance par la République française de la
République populaire de Chine. Aussi accueillit-elle avec joie la décision du
gouvernement français de nouer des relations diplomatiques, économiques et culturelles
avec Beijing (Pékin). Elle pourra, dans des conditions meilleures, contribuer à développer
des liens d’amitié entre les deux peuples, dans celui de la détente internationale »3.
De plus : une réaction s’exprime à travers la presse du monde entier après
l’annonce du communiqué franco-chinois.
1 Le Monde du 28 janvier 1964.
2 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris n°1,1995, page.62.
3 Le Monde, le 25 janvier 1964, page.2.
113
La réaction de Moscou : il paraît favorable, malgré la rupture sino-soviétique. Le
ministre soviétique des Affaires étrangères répondant à la question d’un journaliste
occidental, une heure après l’annonce officielle de l’établissement :
« Le gouvernement soviétique considère l’établissement comme un pas en
direction de la paix dans le monde. La politique de l’Union soviét ique a toujours tenu au
maintien de l’entente entre les nations, y compris entre Etats appartenant à des systèmes
sociaux différents. ...Nous estimons que l’acte effectué par le gouvernement français sert
ce but »1.
Le gouvernement soviétique n’a rien commenté sur la Chine à la suite de
l’annonce. Pourtant, « l’absence d’une réaction officielle directe ne signifiait pas que les
dirigeants soviétiques négligent l’importance de cet événement ». Selon Tatiana
Soulitskaïa2, « la normalisation des relations entre les deux pays, a été analysée en 1964,
en fonction de ses conséquences éventuelles sur les relations sino-soviétiques, et sur le
développement des relations entre l’URSS et la France qui constituaient une part
importante de la politique extérieure soviétique de l’époque ». D’après Moscou : « La
normalisation des relations diplomatiques entre les deux pays a mis un terme à la
politique chinoise de l’auto isolement du monde occidental et par conséquent, a diminué
la possibilité de l’influence soviétique en manière politique et économique sur les
autorités chinoise, elle a donné à Beijing (Pékin) « une opportunité supplémentaire pour
activer sa politique en Afrique francophone »3.
Dans une étude de Tatiana Soulitskaïa, elle souligne ainsi : « Il y a vingt ans,
quand j’a commencé à étudier le problème des relations entre la Chine et la France, j’ai
profondément été impressionné par le courage du général de Gaulle qui a eu de la volonté
et du courage politique, pour réaliser une percée diplomatique tellement spectaculaire au
point de la guerre froide. Il a pu repousser les raisons idéologiques, c’est-à-dire
1 Le Monde, le 28 janvier 1964.
2 Tatiana Soulitskaïa, ancienne chercheur à l’Institut d’études extrême -orientales de Moscou.
3 En référence aux Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris n°1,1995, page.107-109.
114
superficielles, et a commencé à construire un édifice des relations internationales plus
normales et plus raisonnables »1.
A Hambourg, on écrit : « La décision du général de Gaulle crée une nouvelle
réalité que nul ne peut encore apprécier, mais qui nous oblige tous à reconvertir nos idées
et à révise nos anciennes perspectives ».2
Le Peuple de Bruxelles publie en gros titre la Belgique ne devrait pas rester à la
traîne : « Affirmons à nous tour que, s’il important en politique étrangère de n’être le
suiveur de personne, pas plus de la France que des Etats-Unis et s’il convient de tenir
compte des contingences du moment, on doit constater que notre parti, qui est au
gouvernement, se doit de transformer rapidement ses intentions en actes positifs ».3
B) Les opinions critiques
Taïwan, sans aucun doute, désapprouve vigoureusement par voie de presse la
position française et annonce la rupture des relations diplomatiques avec le gouvernement
français à partir du 10 janvier 1964. Pourtant le 27 janvier, Formose revient en partie sur
sa décision : « Nous nous en tiendrons fermement..., à notre politique essentielle qui est
de ne pas admettre la reconnaissance de deux Chines en dépit des conséquences sérieuses
que cela peut avoir »
« Etant donné que le mémorandum ne nous demande pas de quitter Paris, nous
pensons que la France veut nous laisser choisir, nous lui en laissons la responsabilité. »4
1 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, n°1,1995, page.107.
2 YANG Yuanhua , L'histoire des relations sino-françaises ( Zhongfa guanxishi),
Shanghai, Edit ions du peuple de Shanghai ( Shanghai renmin chubanshe), 2006, page.255. 3 YANG Yuanhua , L'histoire des relations sino-françaises ( Zhongfa guanxishi),
Shanghai, Edit ions du peuple de Shanghai ( Shanghai renmin chubanshe), 2006, page.255. 4Luc Rosenzweig, Hugues Tertrais, La guerre froide (1944-1994), Paris, Editions Le Monde, 1994,
page.78.
115
Malgré les explications données par de Gaulle à Dean Rusk : si, depuis dix-sept
ans, « nous avions laissé les Soviétiques cuire dans leur jus avec les satellites, le danger
serait bien plus sérieux. Si l’Occident était en rapport direct avec la Chine, cela serait
différent, et aurait peut-être quelque effet sur Pékin »1, à Washington, de fortes
oppositions à la reconnaissance de la RPC se font jour, probablement pour les motifs
suivant :
1) La France gêne les intérêts des pays libres, qui contestent la décision
unilatérale française. Parce que, même après la rupture sino-soviétique, Beijing (Pékin) se
trouve mêlé à l’affrontement des deux superpuissances : Moscou et Washington. La
reconnaissance de Beijing (Pékin) parvient alors à ouvrir une voie nouvelle pour la RPC
vers l’Europe occidentale et la sort de son isolement diplomatique. Ce serait la stratégie
diplomatique de Mao Zedong après la rupture des relations avec Moscou.
2) La politique du général de Gaulle envers la RPC dérange la politique
américaine en Asie du Sud-est, la situation au Viêt-Nam étant devenue un sujet essentiel
de préoccupation de Washington depuis 1963.
Puis, la mauvaise humeur des Américains se manifeste par la déclaration du
porte-parole du département d’Etat, M. Philippe qui déclare les 9 et 17 janvier 1964 : « Si
la France reconnaît la Chine populaire, ce ne sera pas favorable aux Etats-Unis et aux
pays libres » ; le 26 janvier 1964, une fois encore, il fait savoir que « les Etats-Unis
désapprouvent la décision de la France ».
Les Etats-Unis, dès que les gouvernements français et chinois annoncent par un
communiqué conjoint l’établissement des relations diplomatiques entre les deux pays peu
après 6 heures du matin le 27 janvier 1964(heure de Washington), les Etats-Unis
déclarent :
« Les Etats-Unis regrettent la décision de la France. Nous avons à plusieurs
reprises, exprimé au gouvernement français nos propres raisons pour lesquelles nous
considérons cette décision comme une mesure malencontreuse particulièrement à un
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.467.
116
moment où la Chine communiste encourage activement l’agression et la subversion dans
le Sud-est de l’Asie et ailleurs »1. Dès lors, Washington tend à refroidir en profondeur les
relations franco-américaines.
Une recherche de Charles Cogan2 apporte les précisions suivantes : « Les
appréciations contrastées, à Washington et à Paris, suscitées par les actions du Général de
Gaulle portaient sur deux axes : la politique de neutralité au Sud Viêt-Nam et la nature et
les visées du régime communiste en Chine »3. De son opinion, les prises de position du
Général de Gaulle envers la Chine et le Viêt-Nam sont devenues un sujet de
préoccupation de Washington à la fin de l’été 1963.
Un mémorandum du Bureau des estimations nationales (Office of National
Estimates) de la CIA, le 23 octobre, note que l’ex-président du Conseil Edgar Faure vient
d’arriver à Beijing (Pékin) pour une visite privée, organisée cependant à la demande du
général de Gaulle. « Toutes choses considérées, indiquait le mémorandum, nous croyons
que de Gaulle a l’intention de mener une politique chinoise plus active. ...Finalement, et
c’est ce qui est le plus important, la politique française envers la Chine est aussi
influencée par ses visées concernant l’Indochine »4. Les Etats-Unis montrent donc leur
mécontentement face à la reconnaissance de la Chine par la France.
Saigon protégé par les Américains, ainsi que le Japon agissent comme les Etats-
Unis :
Saigon, capitale du Viêt-Nam du Sud, met immédiatement en place un embargo
de rétorsion contre la France. Son ministre de l’économie déclare suite à l’annonce du
communiqué franco-chinois que « sauf cas exceptionnel, il ne serait plus délivré de
licences pour l’importation des produits français »5.
1 Le Monde, le 28 janvier 1964, page.4.
2 Charles Cogan, professeur de l’Université de Harvard, prend contact avec les anciens hauts fonctionnaires
américains qui étaient aux commandes à l’époque tel que George Hundy, George Ball, Dean Busk et Pau l
Nitze au sujet de la reconnaissance de la Chine, ensuite il enquêtait auprès d’universitaires. 3 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, n°1, 1995, page.77.
4 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, n°1, 1995, page.84.
5 Le Monde, le 28 janvier 1964, page.1.
117
A Tokyo, le Premier ministre japonais Hayato Ikeda déclare au cours d’une
séance commune des deux Chambres, que le Japon ne peut suivre l’exemple de la France,
en considérant les relations qu’il entretient avec Formose. En réponse aux questions de
l’opposition, il affirme que ce serait ‘grave erreur’ pour son gouvernement de suivre
l’exemple français1.
C) Les conséquences historiques
Cet événement constitue une étape décisive dans la stratégie mondiale du général de
Gaulle. Celui-ci observe, d’une vision large et indépendante, les affaires mondiales, ce
qui lui permet de fixer de manière autonome la politique extérieure de la France. Une
vision réaliste dans la conférence du 31 janvier 1964, le général de Gaulle déclare que
« Depuis quinze ans, la Chine presque toute entière est rassemblée sous un gouvernement
qui lui applique sa loi. Qu’au-dehors, elle se manifeste comme une puissance souveraine
et indépendante et que la France se trouve disposée à nouer avec Beijing (Pékin) des
relations régulières »2. Paris reconnaissant la Chine telle qu’elle est, le développement
des relations avec la Chine populaire devient une priorité française.
Martin Garret constate que : « Le rapprochement avec la Chine communiste
renforcerait l’indépendance de la France vis-à-vis des superpuissances et promouvrait son
prestige comme une puissance globale. » De Gaulle croyait que « la reconnaissance
diplomatique de la RPC favoriserait le changement de l’équilibre international et
rappellerait à tous les pays l’influence française dans les affaires internationales. »3
Pour la Chine populaire, le geste de la France met fin à son isolement diplomatique.
S’il constitue une manifestation d’indépendance de la part de la France vis-à-vis de
1 Le Monde, les 26, 27 janvier 1964.
2 Charles de Gaulle, Discours et messages IV , Paris, Plon, 1970, page.180.
3 Garret Martin, Playing the China Card ? Revisiting France’s Recognition of Communist China, 1963–
1964, Journal of Cold War Studies Vol. 10, No.1, Hiver 2008, page.61.
118
l’Amérique, ce rapprochement marque aussi une volonté de la part de la Chine de se
souscrire à l’influence soviétique.
Le général de Gaulle s’exprime sans ambages sur la satisfaction des Chinois : « La
Chine meurt d’envie d’être reconnue par nous. Elle ne le cache pas. Elle voit le monde
comme il est. Les Soviets sont devenus ses adversaires et les Etats-Unis le sont restés…
La Chine ne voit aucun autre interlocuteur que la France. » Les Chinois en tout cas
gardent un souvenir ému et reconnaissant de cet épisode diplomatique, qui a changé la
face des relations entre l’Est et l’Ouest. Un ancien ambassadeur de Chine en France, Cai
Fangbo, écrit qu’en 1964, « l’établissement officiel des relations diplomatiques a ouvert
une nouvelle page dans les rapports d’amitié sino- français. Ainsi la France est devenue le
premier grand pays occidental à avoir établi des relations diplomatiques avec la Chine ».1
L’événement de 1964 qu’est la reconnaissance de la RPC par la France contribue à
apporter la détente entre Beijing (Pékin) et Washington, et a modifié la politique
américaine en Asie. Edgar Faure explique combien le Général a été un « précurseur » :
« Il a fallu attendre huit ans pour que le président des Etats-Unis (Richard Nixon) fasse
le même raisonnement que lui. Mais je crois que, bien que le délai a été assez long, notre
initiative de 1964 a été un début, un précédent déterminant ».2 Le Président américain
Ricard Nixon reconnaît quand il rencontre le général de Gaulle que celui-ci a joué un rôle
très important sur le rapprochement sino-américain3.
Dès 1969, du fait de la décision de Washington de se désengager d’Indochine, la
position chinoise allait très vite et tout naturellement retrouver un rôle de première
importance. Le Canada et l’Italie, deux membres du Pacte Atlantique annoncent quant à
eux, l’établissement des relations diplomatiques avec la Chine populaire le 13 octobre et
le 6 novembre 1970.
En été 1971, Henry Kissinger, envoyé spécial du Président Richard Nixon, vient
en Chine (suivant très probablement l’exemple couronné de succès d’Edgar Faure) ; en
1 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.492.
2 BRIZAY Bernard, La France en Chine : Du XVII
ème siècle à nos jours, Edit ions Perrin, 2013, page.493.
3 En référence au Colloque pour le centenaire du général de Gaulle I, Paris, Plon, 1991.
119
automne, la Chine entre aux Nations Unies et reprend son siège de membre permanent du
Conseil de sécurité. Le Président américain Richard Nixon se rend en février 1972 à
Beijing (Pékin) ; et dans la même année le 31 septembre, le Japon reconnaît la Chine
populaire.
En 1978, la Chine et les Etats-Unis annoncent par un communiqué commun, le 16
décembre de leurs relations à partir du 1er janvier 1979. « Les Etats-Unis reconnaissent le
gouvernement légal de la Chine. ...Le gouvernement des Etats-Unis reconnaît la position
de la Chine, à savoir qu’il n’y a qu’une Chine et que Taïwan fait partie intégrante de la
Chine »1, déclare ce communiqué.
Cela prouve combien les rapports internationaux ont changé. On est en train de
sortir de la tension et on se dirige vers un nouvel équilibre mondial. La situation
internationale contrôlée par les deux superpuissances est terminée. La RPC, comme force
d’équilibre du monde, a un rôle de plus en plus important. C’est tout l’équilibre de
l’Extrême-Orient qui est transformé.
Maurice Couve de Murville précise au Conseil des ministres le 22 janvier 1964 :
« Notre initiative est un événement très important sur le plan mondial. Elle manifeste les
changements profonds intervenus, la réapparition de la Chine, sa rupture avec la Russie,
l’élimination des deux blocs idéologiques qui paraissaient s’être partagé le monde. Mais
l’événement le plus important, c’est le retour éclatant de la France, d’une grande
importance dans le Sud-est asiatique. »2
Dans son ouvrage, Etienne Manac’h écrit : « Comme un signal impératif de la
raison, commande l’avenir, en s’opposant même aux plus grandes puissances, et un plus
juste équilibre est établi dans le monde. »3
François Joyaux remarque : « Dès 1969, la situation était profondément
transformée en Asie orientale du fait des doctrines Nixon et Brejnev et, du point de vue
1 Reportage de l'Agence Chine nouvelle ( xinhuashe)du 16 décembre 1978.
2 Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, II, Paris, Fayard, page.491.
3 Historiens & Géographes, Paris, 1984, n°309.
120
plus spécifiquement chinois, du fait des menaces soviétiques que la RPC sentait peser sur
elle. » « Ce contexte nouveau avait finalement amené le gouvernement de Beijing (Pékin)
comme celui de Washington à reconsidérer leurs rapports mutuels. »1
Le 27 janvier 1964 est alors devenu une date historique aux conséquences
profondes.
Conclusion : L’événement de 1964 engendre un affaiblissement des deux blocs ;
il entraine la détente entre les Etats-Unis et la Chine, le changement de la politique
américaine sur l’Asie ; les rapports entre la RPC et le monde occidental se transforment
en profondeur.
La Chine, un grand pays asiatique avec une population de 650 millions
d’habitants est une force d’équilibre du monde qui entre dans les affaires diplomatiques
occidentales pour sortir de son isolement international2. Pour la France, c’est un tournant
dans sa politique dans l’Asie du Sud-est : elle peut s’appuyer sur la Chine pour infléchir
la politique extérieure américaine sur cette région.
Bien qu’ils effectuent deux systèmes politiques différents, Mao Zedong et le
général de Gaulle sont dotés d’une clairvoyance assez forte pour percevoir les intérêts
communs entre les deux pays et le désir de défendre l’équilibre mondial.
Comme Couve de Murville explique : l’établissement des relations diplomatiques
avec la Chine est probablement une action qui définit le mieux la philosophie de politique
extérieure du général de Gaulle pendant son époque au pouvoir. Cette philosophie met les
nations et les Etats au-dessus de l’idéologie et donne la préférence aux réalités politiques
plutôt que les actions créées par la division bipolaire du monde.3
1 François Joyaux, La nouvelle question d’Extrême-Orient 2, Paris, Payot, 1988, page.199.
2 La Chine se trouve non seulement sous les pressions des Etats -Unis, mais aussi dans la division du bloc
communiste à l’époque. 3 Garret Martin, Playing the China Card ? Revisiting France’s Recognition of Communist China, 1963–
1964, Journal of Cold War Studies Vol. 10, No.1, hiver 2008, page.80.
121
CHAPITRE IV
POINT DE DEPART DES RELATIONS SINO-FRANÇAISES
122
Depuis la séparation entre Beijing (Pékin) et Moscou, et la détente avec
Washington, la théorie des deux « zones intermédiaires » de Mao Zedong a succédé à
celle d’ « une zone intermédiaire unique ». Ce concept va devenir la base de la politique
extérieure chinoise.
Selon cette théorie qui met la Chine entre les Etats-Unis et l’URSS, il importe
pour éviter un isolement diplomatique de Beijing (Pékin) de développer des relations
avec l’Europe occidentale, afin de l’intégrer au sein de la seconde zone intermédiaire.
Théorie des zones intermédiaires1
1963
Une zone
intermédiaire
Etats-Unis
Zone intermédiaire
URSS
1964
Deux zones
intermédiaires
Etats-Unis
Zones intermédiaires
Première
Europe
occidentale,
Amérique du Nord,
Océanie, Japon
Seconde
Asie,
Afrique,
Amérique du Sud
URSS
Hormis les Etats-Unis et l’URSS, le reste du monde est partagé en deux zones
intermédiaires constituées par les pays développés d’une part, par les pays sous-
développés d’autre part. Les pays d’Europe occidentale, d’Amérique du Nord et
d’Océanie ainsi que le Japon font partie de la première zone ; les pays d’Asie, d’Afrique
et d’Amérique du Sud forment la seconde.2
1 En référence à La tentation impériale: Politique extérieure de la Chine depuis 1949 de François Joyaux, Imprimerie nationale , 1994, page.356. 2 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong ( maozedong waijiao wenxuan), Beijing, Édit ions documentaires du Comité central ( zhongyan wenxian chubanshe), 1994, pages.506 et 508.
123
Face à cette situation nouvelle, Mao Zedong bâtit sa pensée stratégique des « trois
mondes » afin de renforcer la solidarité avec le Tiers-monde, de lier le deuxième monde
et de s’opposer à l’hégémonie des superpuissances : Etats-Unis et URSS forment le
« premier monde », celui des impérialismes ; l’Europe, le Canada et le Japon constituent
un monde intermédiaire, susceptible de s’opposer aux deux hégémonies ; enfin le
« troisième monde » comprend les pays en voie de développement, dont la Chine se
prétend le leader1. Il réoriente la politique extérieure de la Chine, en constituant le Front
uni international pour se rapprocher des Etats-Unis et se protéger de l’URSS.
Cette nouvelle politique extérieure, surtout orientée contre l’URSS a pour nom :
« Le Front uni international ». Il s’agit de former « une ligne » composée de divers pays
du Nord (Etats-Unis, Japon, Chine, pays du Moyen-Orient et Europe) et du Sud
(Australie et Nouvelle-Zélande). Ces pays représentent « une grande partie » du monde.
Depuis la détente entre Beijing (Pékin) et Washington, la conception des « Trois
mondes » de Mao Zedong est mûre. Le 22 février 1974, il explique pour la première fois
en public son concept2. Et le 10 avril 1974, Deng Xiaoping présente cette théorie
stratégique à l’ONU. Elle est désorma is la nouvelle politique extérieure du gouvernement
chinois, et conduit ses dirigeants jusqu’à la disparition de l’URSS.
Les relations sino-françaises se développent amicalement.
IV-1 Les relations sino-françaises 1964-1973
Une nouvelle page des relations bilatérales entre la France et la RPC s’ouvre en
1964. Au début, il s’agit principalement de développer dans les domaines de la culture et
de l’enseignement. Toutefois les échanges commerciaux entre ces deux pays dépassent
1 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, pages149-150. 2 Œuvres choisies de la diplomatie de Mao Zedong ( maozedong waijiao wenxuan), Beijing, Édit ions documentaires du Comité central ( zhongyan wenxian chubanshe), 1994, page.600.
124
un milliard de dollars en 1964, la France devenant alors le deuxième partenaire occidental
de la Chine, juste derrière l’Angleterre.
L’année suivante, le chiffre des échanges commerciaux atteint un milliard cents
millions de dollars. Ainsi les relations franco-chinoises s’avèrent tout à fait remarquables
et les contacts sont nombreux, même s’ils sont superficiels1 au début.
Entre 1964 et 1965, la France organise deux Expositions à Beijing (Pékin). La
première exposition technique française porte sur les productions des industries
électroniques. La deuxième, en novembre 1965, réunit sur 25,000 m2, 250 sociétés
françaises de biens d’équipements et de gros matériel. Par rapport au domaine
d’enseignement, 30 professeurs de français travaillent en Chine et une centaine
d’étudiants chinois sont envoyés en France par le gouvernement chinois. Une école
(appelée aujourd’hui Lycée français international de Pékin) destinée à scolariser les
enfants des diplomates est alors créée à Beijing (Pékin) sous couvert de l'Ambassade de
France. Depuis les enfants des pays francophones et de la communauté d'affaires s'y
inscrivent.
Le 1er juin 1966, les deux gouvernements signent le premier accord relatif aux
communications aériennes entre les territoires français et chinois. En septembre de la
même année, cet accord est modifié sur proposition du gouvernement français.
Cet accord est à l’époque extrême important pour Beijing (Pékin). En effet, le
conflit sino-soviétique a entrainé la suspension du trafic aérien via l’URSS, la ligne
ouverte avec Paris devient la seule route aérienne vers l’Europe, l’Afrique, l’Amérique du
nord et latine : « Route française : De France via Tirana ou Athènes, Le Caire, Téhéran,
Karachi Phnom-Penh, Shanghai et vice versa. »2
1 Maurice Vaïsse, dans les Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, 1995, n°1, page.145.
2 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvelle
pendant 50 ans Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Edit ions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1044. Journal officiel de la République française (J.O.R) du 26 juin 1966.
125
Après la rupture sino-soviétique, la double menace de l’impérialisme et du
révisionnisme est devenu la préoccupation majeure des dirigeants chinois. La Révolution
culturelle chinoise à partir de 1966 en est probablement la conséquence, et a influencé la
politique extérieure.
A) La diplomatie chinoise influencée par le gauchisme chinois
Dès l’éclosion de la « Grande Révolution culturelle chinoise »1, la diplomatie
chinoise est aussi gravement influencée par le gauchisme comme tous les autres
domaines de l’Etat, à tel point que le pays se querelle avec une trentaine de pays sur la
quarantaine avec lesquels il entretenait jusqu’alors des relations diplomatiques. La
plupart des ambassadeurs chinois rentrant à Beijing (Pékin) pour participer à la
Révolution culturelle, la progression des relations diplomatiques chinoises est
interrompue non seulement avec ces pays, mais aussi avec la France.
Dans une première étape de la Révolution culturelle, et au fur et à mesure des
mouvements de décolonisation, Beijing (Pékin) a insisté sur le principe selon lequel « la
diplomatie sert à la révolution mondiale », allant jusqu’a avancer que « la Chine est un
centre révolutionnaire du monde ». Les slogans « A bas l’impérialisme », « A bas
l’évolutionnisme » et « A bas tous les réactionnaires » ont alors été repris par les
dirigeants chinois en public. Une telle démarche a isolé la diplomatie chinoise qui perdant
ses repères classiques s’est trouvée désorientée.
Bien que Mao Zedong critique cette conception, la Chine entra progressivement
en affrontement diplomatique avec une trentaine de pays dès 19652. C’est le cas de
1 La grande révolution culturelle pro létarienne ( wuchan jieji wenhua dageming),
plus couramment la grande révolution culturelle, lancée par Mao Zedong le 18 avril 1966, représente l'un
des événements marquants de l'histoire chinoise contemporaine, dont le retentissement international est
considérable. 2 Xie Yixian , Histoire de la dip lomatie contemporaine de la Chine ( zhongguo
dandai waijiaoshi), Beijing, Ed itions de la jeunesse de Chine( zhongguo qingnian
chubanshe), 1997, pages 266 et 267.
126
l’Indonésie, du Kenya, de la Tunisie, de la République Centrafrique, du Népal, de la
Birmanie, de l’Inde, de l’Angleterre, etc.
Dans ce contexte, Beijing (Pékin) et Paris n’ont pas pu éviter les conflits
diplomatiques. Quatre points suivants expliquent le gel des relations sino-françaises
durant cette période- là :
L’absence de l’ambassadeur chinois en France : Huang Zhen, ambassadeur
chinois en France rentre en Chine pour participer à la Révolution culturelle selon la
décision du Comité centrale du PCC pendant la période de 1967-1969. A cette date, le
consulat prend provisoirement le relais.
Les étudiants chinois en France s’affrontent avec la police française, lorsqu’ils
manifestent devant l’ambassade de l’URSS à Paris le 27 janvier 1967 pour protester
contre la violence soviétique à l’égard des étudiants chinois sur la Place rouge à Moscou.
Par mesure de rétorsion, les habitants de Beijing (Pékin) manifestent devant l’ambassade
française durant cinq jours. Les relations sino-françaises deviennent tendues
temporairement.
Les événements de mai 1968 en France entravent également cette progression. Un
des motifs est l’influence du gauchisme mao ïste, qui accuse le gouvernement français de
réprimer les masses populaires. Le 21 mai 1968, une grande manifestation a lieu à
Beijing (Pékin) pour soutenir les manifestations de Paris. L’Agence Chine nouvelle a des
propos d’une telle violence dans ses reportages qu’elle provoque la colère du Quai
d’Orsay.
La Chine est mécontente de l’entente entre Paris et Moscou1. En fait, l’URSS est
devenue son premier adversaire à cause du conflit de plus en plus grave entre Beijing
(Pékin) et Moscou. Or, la visite du général de Gaulle à Moscou en 1966, qui entre
entièrement dans le cadre du triptyque de « détente, entente et coopération » pour paraît
1 Après la visite de Nikita Khrouchtchev à Paris et la v isite du général de Gaulle à Moscou, les relations se
rapprochent.
127
une atteinte aux relations avec Beijing (Pékin). Cette visite se solde par la création d’une
Commission mixte permanente chargée de recherche les moyens de développer les
échanges commerciaux entre la France et l’URSS, la coopération industrielle franco-
soviétique dans le domaine de la télévision en couleur ; un accord de coopération
scientifique et culturelle est signé. Dans le domaine politique, la déclaration mentionne
l’accord des deux gouvernements sur la nécessité de considérer les problèmes de
l’Europe dans un cadre européen, et de passer de la détende à l’entente 1. « Le
rapprochement franco-soviétique donne le signal de critique de plus en plus virulentes de
la part des Chinois », comme le remarque Maurice Vaïsse2.
Le général de Gaulle poursuit sa politique européenne : « détente, entente et
coopération ». La France se rapproche d’abord de l’URSS, et les deux pays s’efforcent de
concerter leurs efforts dans l’intérêt de la paix, c’est le sens de la visite du général de
Gaulle du 20 juin au 1er juillet 1966. Plus tard, la France mène la même politique pour le
rapprochement avec les pays de l’Est : voyage du général de Gaulle en Pologne du 6 au
12 septembre 1967, en Roumanie du 14 au 18 mai 1968.
Malgré le tiédissement des rapports sino- français, Beijing (Pékin) et Paris n’ont
pas l’intention d’aggraver cette situation. Zhang Xichang le prouve, assurant que le
gouvernement français fait une enquête, en 1967, sur la Révolution culturelle chinoise3,
d’où on tire une triple conclusion :
- La presse étrangère ne relatant pas la réalité sur la Révolution culturelle chinoise,
il est impossible de porter un jugement sur celle-ci.
- L’armée populaire de Chine est capable de calmer la situation actuelle dans toute
la Chine.
- Les officiels français ne doivent pas faire de déclaration défavorable à la Chine.
1 Charles de Gaulle, Discours et messages V, Paris, Plon, 1970, page.56.
2 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, 1995, n°1, page.145.
3 Zhang Xichang , Troisième essor pour établir les relations diplomatiques de la RPC(
gongheguo disanci jianjiao gaochao) , Beijing, Ed itions de Presses Connaissances universelles
( shijie zh ishi chubanshe) , 1998, page.86.
128
En vertu de cette conclusion, les relations demeurent entre les deux
gouvernements et ne tiennent pas compte du contexte. Le général de Gaulle exprime ainsi
son désir de maintenir la politique de collaboration entre la France et la Chine.
B) La tension sino-soviétique, la détente entre Beijing (Pékin) – Washington et Paris
– Moscou
Pourquoi le rapprochement franco-soviétique suscite-t-il le mécontentement
chinois dans ces années de la Révolution culturelle ? Cette question est inséparable de
l’affrontement sino-soviétique. On peut l’analyser en deux éléments essentiels :
- L’extrême tension aux frontières sino-soviétique1.
- Les conflits sino-mongols.
Tout cela constitue une menace au Nord et à l’Ouest de la Chine ; qui devient un
sujet majeur de la préoccupation pour les autorités chinoises.
1) L’extrême tension aux frontières sino-soviétique :
A la suite du premier conflit frontalier sino-soviétique de 1960 dans la région du
Xinjiang, Beijing (Pékin) proposa par deux fois (23 août et 21 septembre 1960)
l’ouverture de négociations frontalières avec l’URSS. Le regain de tension fait le 13 août
1963, l’objet d’une proposition en six points de la part de Beijing (Pékin), et les
négociations débutèrent en février 1964, pour finir sans résultat en août de la même année.
Désormais la Chine se défie de l’URSS, ainsi refuse-t-elle simultanément les
plans d’actions proposées par Moscou pour venir en aide au Viêt-Nam entre 1964 et 1965.
Beijing (Pékin) va même jusqu’à considérer que « la ligne générale de coexistence
pacifique du PCUS est la collaboration russo-américaine pour la domination du Monde. »
1 La Chine et l’URSS partagent plus de 7300 kilomètres de frontières, le premier conflit éclate en 1960 à
côté du Xinjiang.
129
En 1966, la rupture entre le PCC et le PCUS est rendue publique, lo rs du refus du
PCC de participer au 23ème Congrès du PCUS. Après l’invasion de la Tchécoslovaquie
par certains pays membres du Pacte de Varsovie : les armées d’URSS, de Pologne,
d’Hongrie et de RDA en août 1968, l’URSS, affirme que Beijing (Pékin) « devient
hégémonique ».
A partir de 1969, la tension sino-soviétique est de plus en plus tangible et les
conflits frontaliers se multiplient : les 2 et 15 mars 1969, les premiers incidents éclatent
sur l’île Zhen Bao (Daman Ski) dans le fleuve Oussouri. En 1969, l’URSS concentre ses
troupes sur les frontières sino-soviétiques (au nord de la Chine) : 21 divisions (soit
400,000 hommes militaires), 4,000 avions, 12 batteries de missiles à moyenne portée
braquées sur la frontière chinoise. Du côté chinois, 1 million d’hommes mal équipés (50
divisions) et 600 avions très vieux sont déployés. Le déséquilibre des forces inquiètent les
autorités chinoises, et du mois de mars au mois d’août 1969, 284 incidents sino-
soviétiques se produisent.
En avril 1971, la nouvelle politique extérieure chinoise a comme axes le refus de
l’hégémonie soviétique et le rapprochement avec les Etats-Unis. Devant le congrès du
parti communiste chinois, le 24 août 1973, Zhou Enlai met au défi Moscou de prouver sa
volonté de détente : « Retirez vos troupes de Tchécoslovaquie, de la République
populaire de Mongolie ou des quatre îles japonaises des Kouriles septentrionales ! »1
2) La tension aux frontières sino-mongoles2 :
La Mongolie prend part elle aussi à la querelle sino-soviétique. Du 15 octobre
1964 au 1er mars 1969, 4,189 accrochages sont contestés aux frontières sino-mongoles,
D’après la Chine, il s’agit d’un accroissement de 50% par rapport à la période 1960-1964.
La cause semble que la signature d’un traité d’amitié de coopération et d’assurance
mutuelle soviéto-mongol le 15 janvier 1966.
1 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, page. 111.
2 La Chine et la Mongolie partagent 4320 kilomètres de frontières, fixées par le traité sino -mongol du 26
décembre 1962.
130
Les dirigeants chinois considèrent ainsi que la menace venant de Moscou est plus
grave que celle de Washington : l’URSS pourrait très vite devenir l’adversaire principal
de la Chine.
Le rapport du IXème Congrès du PCC, souligne qu’on ne doit pas négliger la
menace des guerres d’agression potentielles de « l’impérialisme soviétique » ou du
« révisionnisme soviétique »1, en s’opposant aux deux superpuissances à la fois. Lin
Biao2 est alors nommé adjoint principal et successeur de Mao Zedong en avril 1969.
Après le IXème Congrès, Mao Zedong rappelle quatre de ses maréchaux : Chen Yi,
Ye Jianying, Xu Xiangqian et Nie Rongzhen, pour faire le point sur la stratégie
internationale, et conclue : « les contradictions sino-soviétiques seront plus importantes
que les sino-américaines, les contradictions américano-soviétiques sont plus graves que
les américano-chinoises. »3 Cela deviendra la base de la réorientation de la politique
extérieure chinoise.
C) Bilan des relations sino-françaises pendant la Révolution culturelle chinoise
Deux visions s’opposent lors du colloque consacré au 30ème anniversaire de
l’établissement des relations diplomatiques sino-françaises :
- La vision d’«une période d’or ».
- La vision des « dix ans noirs ».
D’après Jean Luc Domenach4, la période de 1968-1973 constitue « la période
d’or », marquée par l’excellent ambassadeur Etienne Manac’h et deux missions
1 En référence du Rapport politique du PCC en avril 1969.
2 Lin Biao , min istre de la Défense de la RPC. Il meurt le 13 septembre 1971 dans un accident d’avion
en territoire mongol en fuyant Beijing (Pékin), accusé de complot contre Mao Zedong. 3Xiong Xianghui , Prélude de la détente des relations sino-américaines (
dakai zhongmei guanxi de qianzou), Revue Liao Wang ( ), n°35, 1992. 4 Jean Luc Domenach, directeur du Centre d’études et de recherches internationales de CERI-CNRS de
1985 à 1994.
131
ministérielles efficaces (mission Bettencourt en 1970 et mission de Peyrefitte en 1971).
Au niveau économique, la France était le troisième partenaire commercial de la Chine
alors que dans les années quatre-vingts elle régressera entre le 9ème et le 12ème rang.
Les Notes et Etudes françaises indiquent : « l’année 1969 constitue dans
l’évolution des relations franco-chinoises un nouveau départ. ...C’est en France l’amorce
d’une nouvelle étape politique avec la présidence de la République de M. Pompidou.»1
Une autre opinion est toutefois défendue par Claude Chayet et le général Eyraud :
« la Révolution culturelle qui couvre la période 1966-1976, correspond à ‘dix années
noires’ », « une période de troubles, parfois violente et d’anarchie », « la Chine était
vraiment trop désorganisée pour avoir une politique extérieure.»2
Dans son allocution de clôture, Alain Peyrefitte explique cette cause désorganisée :
« Cet échec de la politique franco-chinoise est évident pendant la politique violente de la
Révolution culturelle, entre 1966-1969 ».
On peut aussi voir dans l’ouvrage de Professeur Maurice Vaïsse : « A partir de
l’été 1966, la Révolution culturelle distend les liens établis en 1964. Plus de
conversations, plus d’échanges culturels. Etudiants et enseignants sont rapatriés. Les
échanges commerciaux sont très limités : 100 millions de dollars par an avec des crédits à
cinq ans à 6% ou 6,5% d’intérêt, ce qui n’est guère avantageux. 3 »
En effet, les troubles suscités par la Révolution culturelle isolent de nouveau la
Chine du reste du monde et la France ne peut maintenir qu’un personnel diplomatique
réduit à Pékin. Mais dans le contexte français des années 1960, « le modèle soviétique ne
fait plus rêver et l'agitation sociale est grande, la jeunesse contestataire projette sur la
Chine maoïste son idéal d’une société égalitaire établie par le moyen d’une ‘révolution
permanente’ ».4 Au début des années 1970, la revue littéraire Tel Quel est devenue
l’organe des idéologues du mouvement maoïste français. En 1974, un groupe de
« telquellistes », parmi lesquels Philippe Sollers, Julia Kristeva et Roland Barthes, visite
1 Notes et Etudes documentaires françaises, 1973, n°.4014-4015, page.38.
2 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, n°.1, Paris, 1995. Claude Chayet, ambassadeur de France en
Chine entre 1964-1966 et 1979-1982 ; le général Henri Eyraud, attaché militaire en Chine entre 1968-1972. 3 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.469.
4 Détrie Muriel, France-Chine : Quand deux mondes se rencontrent, Editions Gallimard, 2004, page.82.
132
la Chine et croit y reconnaître l’incarnation de son projet politique et esthétique avant-
gardiste. 1
En 1994, un colloque consacré aux relations diplomatiques de la Chine a lieu à
Beijing (Pékin), organisé par l’Institut diplomatique de Chine2. Liu Shan, directeur de
l’Institut et Zhou Xinxin, chef du bureau des politiques des Affaires étrangères, ont
analysé les relations extérieures de la Chine depuis 1949 dans leur allocution de clôture 3.
Elle peut nous aider à mieux comprendre l’application de la politique extérieure chinoise,
y compris les relations sino-françaises pendant les périodes différentes.
Zhou divise la politique étrangère ainsi que les recherches et l’enseignement en
cinq périodes depuis 1949, au regard de l’évolution de la situation mondiale :4
Première période, depuis 1949 à la fin des années cinquante : la politique
principale, est de renverser « les trois montagnes de l’impérialisme », de conquérir la
souveraineté et l’indépendance afin d’ouvrir une nouvelle diplomatie de la jeune
République chinoise dans le monde.
Deuxième période, à partir de la fin des années cinquante au début des années
soixante-dix : la Chine s’oppose aux deux superpuissances en même temps,
principalement aux Etats-Unis, dans une situation mondiale où s’exerce le contrôle des
deux Blocs (la doctrine de Khrouchtchev).
Troisième période, du début des années soixante-dix aux années quatre-vingts :
dans le contexte des divergences entre les Etats-Unis et l’URSS, la Chine s’oppose
encore aux deux superpuissances, mais le principal adversaire est alors l’URSS.
1 Détrie Muriel, France-Chine : Quand deux mondes se rencontrent, Editions Gallimard, 2004, page.83.
2Institut diplomatique de Chine ( waijiao xueyuan), se trouve à Beijing (Pékin), est une école
supérieure fondée sur l'idée de Zhou Enlai en 1955 dont le directeur était Liu Shan de 1992 à 1998.
On forme des futurs diplomates chinois. 3 Cahiers de l'Institut diplomatique de Chine ( waijiao xueyuan xuebao), Beijing, 1994, n°.7-
8. 4 Cahiers de l'Institut diplomatique de Chine ( waijiao xueyuan xuebao), Beijing, 1994, n°.7-
8.
133
Quatrième période, pendant les années quatre-vingt : la Chine garde le principe de
l’indépendance et de la coexistence pacifique sur le plan diplomatique, ne s’alliant pas
aux grandes puissances, et ne nouant aucune alliance stratégique ou militaire. Elle traite
des affaires internationales en fonction des intérêts du peuple chinois et des peuples du
monde, quelle que soit l’idéologie des pays.
Cinquième période commence par l’effondrement de l’URSS et jusqu’à 1994 : la
position chinoise a beaucoup évolué sur le plan des affaires internationales. Son principe
diplomatique, comme sa politique géographique, a pour but de développer les rapports de
bon voisinage et d’équilibrer ses relations diplomatiques.
Selon cette théorie, la première tâche extérieure chinoise est l’opposition aux
Etats-Unis et à l’URSS, ses deux principaux adversaires, afin d’assurer la sécurité du
pays, en sortant de l’isolement diplomatique. Tandis que les relations bilatérales sino-
françaises sont ralenties à l’époque, en raison de la Révolution culturelle en Chine,
l’affrontement entre le PCC et le PCUS transforme donc la politique de Beijing (Pékin)
envers l’Occident.
Malgré la Révolution culturelle, « cela n’empêche pas un certain nombre
d’événements importants ».1 La politique extérieure chinoise à l’égard de l’Europe
occidentale s’est modifiée profondément. Ce furent précisément ces derniers qui
amenèrent le gouvernement de Beijing (Pékin) à réorienter sa politique extérieure à partir
de la période de 1969-1971.
Les historiens chinois considèrent que le Président George Pompidou hésite à
appliquer la politique extérieure du général de Gaulle en Asie pendant ses premières
années à l’Elysée, et qu’il n’était pas très proche de la Chine.
En outre, au début des années soixante-dix, lorsque Moscou est devenu le premier
adversaire de Beijing (Pékin), Paris et Moscou vivent une période de détente qui a
1 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, n°1, Paris, 1995.page.141.
134
commencé en 1966. C’est aussi une des raisons pour lesquelles le Président Pomp idou
hésite à prolonger la politique du général de Gaulle envers la Chine.
La détente entre Beijing (Pékin) et Washington :
Les rapports triangulaires « Beijing Washington Moscou » ont évolué. Les Etats-
Unis, par contre, à cause de l’échec de la guerre au Viêt-Nam, voient leur suprématie
contestée et sont contraints de réviser leur stratégie mondiale. Le Tiers monde est présent
sur la scène politique internationale. En conséquence, Beijing (Pékin) cherche à améliorer
les relations sino-américaines pour diminuer la menace soviétique. Entre Beijing (Pékin)
et Washington, la situation s’améliore1.
La détente entre Beijing (Pékin) et Washington s’amorce donc dès 1969, des
négociations bilatérales sino-américaines à Varsovie reprennent le 20 janvier 1970
(entamée en 1955). Beijing (Pékin) reçoit une équipe américaine de ping-pong (les 10 et
17 avril 1971) : c’est ce que l’on appelle « la diplomatie du ping-pong ». La petite balle
de tennis de table fait tourner la grande Terre.
Henry Kissinger visite en secret Beijing (Pékin) (les 9 et 13 juillet 1971) pour
préparer la venue du Président américain Richard Nixon qui voyage en Chine (les 21 et
28 février 1972) et reçu par le Président Mao. Le 1er communiqué sino-américain est
publié le 28 février 1972 à Shanghai, dans lequel la partie américaine déclare :
« The U.S. side declared: The United States acknowledges that all Chinese on either side
of the Taiwan Strait maintain there is but one China and that Taiwan is a part of China.
The United States Government does not challenge that position. It reaffirms its interest in
a peaceful settlement of the Taiwan question by the Chinese themselves. With this
prospect in mind, it affirms the ultimate objective of the withdrawal of all U.S. forces and
1 En référence à l'ouvrage : Les dessous de la politique des Etats-Unis envers la Chine 1949-1998 (
meiguo duihua zhengce neimu), Hao Yufan , Beijing, Edit ions Taihai (
taihai chubanshe), 1998.
135
military installations from Taiwan. In the meantime, it will progressively reduce its
forces and military installations on Taiwan as the tension in the area diminishes. »1.
Traduction en français :
« La partie américaine déclare ceci: Les Etats-Unis réalisent que les Chinois des deux
côtés du détroit de Taïwan soutiennent tous qu'il n'y a qu'une Chine et que Taïwan fait
partie de la Chine. Le gouvernement américain n'élève pas de contestations à propos de
cette position. Il réaffirme l'intérêt qu'il porte au règlement pacifique de la question de
Taïwan par les Chinois eux-mêmes. Ayant cette perspective en vue, il affirme l'objectif
final qui est de retirer toutes les forces et installations militaires américaines de Taïwan.
En attendant, il réduira progressivement ses forces et ses installations militaires à Taïwan
au fur et à mesure de la diminution de la tension dans cette région.»
La question de Taïwan étant une clé pour les relations sino-américaine, ce
communiqué de Shanghai ouvre désormais la porte à la reconnaissance dip lomatique par
les Etats-Unis. Aussi, les rapports entre Beijing (Pékin) et le monde occidental se
transforment- ils en profondeur dès le début des années soixante-dix.
La Chine élargit ses relations diplomatiques à soixante-dix nouveaux pays durant
les années soixante-dix : avec le Canada le 13 octobre 1970, la République italienne le 6
novembre 1970, le Royaume de Belgique le 25 octobre 1971, le Royaume-Uni de
Grande-Bretagne le 13 mars 1972, le Royaume des Pays-Bas le 18 mai 1972, la
République fédérale d’Allemagne le 11 octobre 1972, l’Espagne le 9 mars 1973,
Commonwealth d’Australie le 21 décembre 1972 et le Japon le 29 septembre 1972 etc.
Jusqu’à ce que, le 1er janvier 1979, la Chine et les Etats-Unis d’Amérique nouent des
relations diplomatiques.
1 Site de l’A mbassade de la République populaire de Chine aux Etats-Unis : http://www.ch ina-
embassy.org/eng/zmgx/doc/ctc/t36255.htm
136
D) Le premier accord relatif aux communications aériennes franco-chinoises du 1er
juin 1966.
Décret n°66-435 du 18 juin 1966 portant publication de l’accord relatif aux
communications entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
de la République populaire de Chine, signé le 1er juin 1966.1
1 Site du Ministère des Affaires étrangères de France : http://basedoc.diplomat ie.gouv.fr/exl-
php/cadcgp.php?
137
138
L’accord relatif aux communications aériennes franco-chinoises du 1er juin1.
1 Journal officielle de la République française, le 26 juin 1966, pages.5324-5327.
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E) Tous les traités bilatéraux sino-français signés pendant la Révolution culturelle
(1966-1976)1
Titre : Accord relatif aux communications aériennes entre le gouvernement de la
République française et le gouvernement de la République populaire de Chine
Date de signature : 01/06/1966
Validité : En vigueur
Titre : Accord par échange de notes entre le gouvernement de la République française et
le gouvernement de la République populaire de Chine modifiant l'article 12 de l'accord du
Date de signature : 15/09/1966
Validité : En vigueur
Titre : Mémorandum relatif à certains échanges commerciaux entre la France et la Chine
Date de signature : 24/03/1969
Validité : En vigueur
Titre : Accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de
la République populaire de Chine sur l'"exposition des découvertes archéologiques de la
République populaire de Chine"
Date de signature : 23/03/1973
Validité : En vigueur
Titre : Accord par échange de notes amendant l'accord du 1er juin 1966 entre la France
et la Chine relatif aux communications aériennes
Date de signature : 27/07/1973
Validité : En vigueur
1 Site du Ministère des Affaires étrangères de France : http://basedoc.diplomat ie.gouv.fr/exl-
php/cadcgp.php?
149
Titre : Accord par échange de notes amendant l'accord du 1er juin 1966 entre la France
et la Chine relatif aux communications aériennes, modifié par échanges de notes des 15 et
22 septembre 1966 et des 27 juillet et 7 septembre 1973
Date de signature : 03/09/1974
Validité : En vigueur
Titre : Accord par échange de lettres entre la France et la Chine concernant le dépôt de
marques de fabrique et de commerce
Date de signature : 15/07/1975
Validité : En vigueur
Titre : Accord de navigation maritime entre la France et la Chine (ensemble un échange
de lettres)
Date de signature : 28/09/1975
Validité : Fin de vigueur
150
IV-2 Renforcement des relations politiques bilatérales (1969-1974)
La situation mondiale change, un monde multipolaire s’amorce dès 1969. Les
relations diplomatiques franco-chinoises prennent même de l’ampleur dans le nouveau
contexte international.
En France, la perte de confiance dans la politique du général de Gaulle se
confirme par les événements de mai 1968. Cependant, son successeur Georges Pompidou,
conserve les principes fondamentaux de la politique extérieure gaullienne : défendre la
souveraineté française face aux Etats-Unis au sein du camp occidental, et modifier la
politique extérieure dans un nouveau contexte. Que ce soit le général de Gaulle ou le
Président Pompidou, malgré leurs styles différents, la politique gaullienne se prolonge.
Etienne Manac’h, expert des relations avec l’Extrême-Orient, et nommé
ambassadeur de France, arrive le 20 mai 1969 à Beijing (Pékin). Huang Zhen1,
ambassadeur chinois, reprend son poste à Paris le lendemain après une interruption de
deux ans due à la Révolution culturelle.
Ce renforcement politique conduit la Chine et la France à entrer dans une
nouvelle phase de leur rapprochement qui de politique s’oriente vers l’économie.
A) Le renforcement des politiques bilatérales
Les relations sino-françaises reprennent2 :
1) Réorientation de la politique extérieure de la Chine
1 Huang Zhen, ambassadeur de Chine à Paris, était retourné en Chine en juillet 1967, sous l’ordre du PCC,
pour assister à la Révolution culturelle, comme l’on a mentionné dans la partie précédente. 2 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvelle
pendant 50 ans, Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Ed itions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1050.
151
A partir des premiers incidents sino-soviétiques en 1969, la situation à la frontière est
de plus en plus tendue. Afin de sortir de cette crise sécuritaire, Mao Zedong réoriente
la politique extérieure chinoise pour se protéger du « révisionnisme soviétique ».
2) Réinstallation des ambassadeurs dans leurs locaux après l’apogée de la
Révolution culturelle en 1969 : un nouvel ambassadeur français, Etienne Manac’h
arrive à Beijing (Pékin) et Huang Zhen regagne son poste à Paris.
Le rapprochement avec l’Europe Occidentale, surtout avec la France est devenu la
priorité. Car la France, grand pays politique, se développe rapidement et est en
passe de devenir une grande puissance économique.
Pour renforcer les relations diplomatiques, Mao Zedong reçoit les diplomates sur
les fortifications de la place Tiananmen à l’occasion de la Fête nationale chinoise
du 1er octobre 1969, et envoie seize nouveaux ambassadeurs en Occident.
3) En raison de l’amorce de détente depuis 1969 entre Beijing (Pékin) et Washington,
ainsi que du développement des relations diplomatiques entre la RPC et les pays
occidentaux, « ces conséquences ont des répercussions sur les relations franco-
chinoises »1. Car le nouveau Président Georges Pompidou hésite à suivre la même
politique chinoise au début, lorsque le nouveau ambassadeur Etienne Manac’h
souhaite, conformément à la volonté du général de Gaulle, développer des
rapports économiques et culturels entre les deux pays. Cela s’explique dans le
dialogue du 20 novembre 1969 entre Georges Pompidou et Etienne Manac’h.
Mais la détente sino-américaine pousse celui- là à continuer la politique envers la
Chine. Georges Pompidou considère la RPC comme partenaire essentiel pour un
nouvel équilibre du monde, et commence à s’intéresser à la Chine : « un pays
extrême loin » de la France.
1 En référence à l'ouvrage : Les relations extérieures de la France après la deuxième guerre mondiale (
zhanhou faguo waijiaoshi) , Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Beijing,
Ed itions Connaissances universelles ( shijie zhishi chubanshe), 1993.
152
Les renforcements des relations bilatérales se manifestent d’abord par la
multiplication des rencontres d’hommes politiques entre les deux pays au début des
années soixante-dix. Ces rencontres entre les membres des deux gouvernements fortifient
leur connaissance et leur solidarité et permettent de développer les relations politiques,
économiques et culturelles.
Il y a deux événements exceptionnels durant cette période :
Premièrement, le Premier ministre chinois Zhou Enlai assiste le 14 juillet 1970,
pour la première fois depuis 1964, à une réception donnée par l’Ambassadeur de France à
l’occasion de la fête nationale française.
En métropole le Président Georges Pompidou reçoit à l’Elysée Bai Xiangguo1,
ministre chinois du Commerce extérieur, en octobre 1971.
Deuxièmement, deux missions importantes de la France en Chine sont
accomplies :
D’abord, la visite du ministre français des Affaires culturelles (chargé du plan et
de l’Aménagement du territoire) André Bettencourt en Chine du 7 au 21 juillet 1970.
C’est la première visite officielle d’un membre du gouvernement frança is depuis
l’établissement des relations officielles en 1964. Il s’entretient avec les dirigeants chinois,
surtout le Président Mao Zedong et à plusieurs reprise avec le Premier ministre Zhou
Enlai. Ils échangent leurs avis sur les principaux problèmes internationaux et sur les
échanges économiques pour réaliser de nouveaux progrès entre la France et la Chine. Les
deux parties espèrent que ces contacts contribueront à atténuer les oppositions qui
divisent la communauté internationale et retardent le rétablissement de la paix. D’après
les commentaires français sur cette visite : « Il est bon de signaler qu’il s’agissait de la
première visite officielle en Chine d’un membre du gouvernement français depuis
1964 »2.
1 Bai Xiangguo , min istre du Commerce extérieur de la RPC de 1970 à 1973.
2 La politique étrangère de la France, Paris, le 29 ju illet 1970, page.249.
153
Ensuite, une autre importante délégation parlementaire française séjourne en
Chine du 13 au 31 juillet 1971, conduite par Alain Peyrefitte, président de la Commission
des Affaires culturelles, familiales et sociales de l’Assemblée nationale française. Celui-
ci est reçu également par le Premier ministre Zhou Enlai et le vice-président de
l’Assemblée chinoise Guo Moro. A cette occasion, il visite différentes installations
industrielles et culturelles à Shanghai, Hangzhou, Nanjing (Nankin) et Guangzhou
(Canton) afin de connaître la Chine populaire. Après sa mission d’étude en Chine, Alain
Peyrefitte publie un ouvrage aux répercussions importantes « Quand la Chine
s’éveillera... »1. En conséquence que la Chine se trouve dans la Révolution culturelle,
ainsi ce titre inspiré de Napoléon 1er, présente la Chine en mouvement aux Français.
Après 20 ans, en 1996, son dernier ouvrage « La Chine s’est éveillée »2 est publié,
présentant une fois de plus la Chine aux Français. Ces deux ouvrages publiés dans les
époques tout à fait différentes font preuve d’ « une vision lointaine d’Alain Peyrefitte qui
apporte une grande contribution à la Chine »3.
Le ministre français des Affaires étrangères Maurice Schumann rencontre en
juillet 1972 le Président Mao Zedong en Chine. Lorsqu’il lui exprime la volonté de
rencontrer entre Pompidou et Mao, Mao répond tout de suite que si Pompidou arrive en
Chine, il sera accueilli plus chaleureusement que Nixon4. C’est dire l’importance de la
France aux yeux des dirigeants chinois.
Du côté chinois, Bai Xiangguo, ministre du Commerce extérieur fait une visite
d’informations du 29 septembre au 11 octobre 1971. C’est la première fois qu’une
délégation du gouvernement fait un voyage officiel en France. Elle est
1 Alain Peyrefitte, Quand la Chine s’éveillera…, Paris, Fayard, 1973.
2 Alain Peyrefitte, La Chine s’est éveillée, Paris, Fayard, 1996.
3 Zhou Jue , Souvenir de M. Alain Peyrefitte( shenqie
huainian faguoyouren alan peileifeite xiansheng), Le Quotidien du peuple( renmin ribao), le 19
juillet 2000. Zhou Jue était ambassadeur de la RPC en France de 1986 à 1990. 4 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvellle
pendant 50 ans, Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Ed itions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1052.
154
exceptionnellement reçue par le Président de la République Georges Pompidou le 1er
octobre, jour la fête nationale chinoise à l’occasion d’un déjeuner offert à l’Elysée.
Les sujets évoqués : les propositions de consultation politiques et les
développements des échanges culturels et commerciaux. Les entretiens avec Valéry
Giscard d’Estaing, alors ministre de l’Economie et des Finances, ont porté sur la
recherche des moyens nécessaires au développement des échanges et la décision de
multiplier des missions techniques bilatérales. Pendant ce temps, Bai Xiangguo, à cette
occasion, s’entretient avec des responsables du Commerce extérieur. Accompagné de
MM. Bailly, secrétaire d’Etat au Commerce et Chamant, ministre des Transports, il
visite les usines de ‘l’Aérospatiale’, un laboratoire d’optique électrique du CNRS à
Toulouse, et le complexe portuaire et pétrolier de Marseille. La délégation est reçue par la
direction des usines Berliet, à Lyon et par l’Institut français du pétrole et par la direction
du complexe pétrochimique ELF-ERAP de Feyzin.
En juin 1973, le ministre chinois des Affaires étrangères Ji Pengfei1 visite la
France dans le but de développer les relations franco-chinoises dans les domaines
industrielles et scientifiques. Il rencontre son homologue Michel Jobert2, et lui déclare
que la Chine est favorable à l’unification de l’Europe de l’Ouest : « Nous soutenons les
efforts des pays ouest-européens visant à s’unir sur la base de l’égalité et des avantages
réciproques pour se rendre puissants »3. Ainsi que « l’intérêt et même le soutien que
Beijing entend accrocher à la construction européenne »4.
Un certains nombre d’hommes politiques français font également des voyages en
Chine à titre privé pendant cette période : Maurice Couve de Murville5, ancien Premier
ministre rencontre le Président Mao Zedong en octobre 1970 ; Pierre Mendès France6,
1Ji Pengfei , ministre des Affaires étrangères de la RPC de 1971 à 1974.
2 Michel Jobert, ministre des Affaires étrangères de la France de 1973 à 1974.
3 Le Monde, le 15 juin 1973.
4 Notes et Etudes documentaires françaises, 1973, n°.4014-4015, page.39.
5 Maurice Couve de Murville, Premier min istre français de 1968 à 1969.
6 Pierre Mendès France, min istre des Affaires étrangères de la France de 1954 à 1955.
155
ancien ministre des Affaires étrangères et président du conseil, rencontre Li Xiannian1,
Président de la République, et Zhou Enlai, Premier ministre, entre décembre 1971 et
janvier 1972 ; Jacques Chaban-Delmas2 ancien Premier ministre, rencontre un certain
nombre de hautes personnalités chinoises à l’exception de Mao Zedong en juin 1973. Il
s’entretient avec Qiao Guanhua3, vice-ministre des Affaires étrangères et Zhou Enlai,
Premier ministre, sur les relations entre l’Europe et les Etats-Unis, l’unification
européenne, la situation Extrême-Orient et les relations de la Chine avec l’URSS et le
Japon. Toutes ces visites renforcent les amitiés franco-chinoises. Mais les entretiens
officiels n’ont qu’une importance limitée.
Les visites amorcées par les politiciens de premier plan se poursuivent par celles
des présidents de la République et les premiers ministres.
Le premier chef d’Etat français à se rendre en Chine est le Président de la
République Georges Pompidou en septembre 1973. Sa présence en Chine constitue un
événement politique d’une grande importance, elle ouvre « une nouvelle ère dans la
coopération économique franco-chinoise ». Les plus hautes autorités des deux pays
dialogueront directement entre elles. La France profite du fait d’être le premier pays
occidental à entretenir des relations diplomatiques officielles avec la Chine populaire. Les
deux gouvernements développent leur économie grâce à leurs bonnes relations politiques.
Le Président Georges Pompidou est également le premier chef d’Etat de la CEE qui visite
la Chine. A l’issue de son voyage en Chine, la plupart des responsables politiques ouest-
européens se rendent en Chine. En construisant des « zones intermédiaires », la Chine
noue aussi des relations avec les Etats d’Europe occidentales et la Communauté
européenne. Le discours de bienvenue de Zhou Enlai lors du voyage du président
Pompidou en septembre 1973 est clair : « Nous appuyons les peuples européens qui
s’unissent pour préserver leur souveraineté et leur indépendance nationale. »4
1 Li Xiannian , Président de la RPC de 1983 à 1988.
2 Jacques Chaban-Delmas, Premier min istre français de 1969 à 1972.
3 Qiao Guanhua , vice-min istre des Affaires étrangères de la RPC de 1964 à 1974.
4 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, page.112
156
B) L’objectif prioritaire de la politique extérieure de la France : le développement
économique
Les objectifs principaux de la Chine sont d’abord de développer l’économie
intérieure et de faire avancer le progrès social.1 La politique extérieure devient donc un
moyen d’atteindre ce but.
Les Occidentaux subissent une grave crise économique et financière - dévaluation
du franc de 12,8%, le 8 août 1969 – à l’époque de sa prise de fonction de Président de la
République, Georges Pompidou profite de ses bonnes relations politiques avec la Chine
pour développer des échanges. Par conséquent, le développement économique bilatéral
devient l’objectif prioritaire dans sa politique extérieure, le fait est prouvé par visite en
Chine en 1973.
Lors de la visite du Président Georges Pompidou à Beijing (Pékin) du 13 au 17
septembre 1973, la Chine signe un contrat d’exportation pour des équipements chimiques
français complets, soit 2 milliards de francs. Pourquoi la Chine signe-t-elle ce contrat le
plus grand depuis 1964 ? Parce que les autorités chinoises prennent en considération des
relations amicales entre les deux pays. En plus, « Chaque fois que la France sera en
concurrence avec un autre pays à des conditions égales de prix et de qualité, elle aura
notre préférence pour les contrats. »2 dit Zhou Enlai à Alain Peyrefitte en 1971.
A cette occasion, les deux gouvernements sont animés d’un désir commun de
renforcer l’amitié entre les deux peuples et de développer les relations entre les deux pays.
Sur le plan économique, les deux gouvernements décident de signer un accord maritime
et de renforcer leur coopération dans le domaine des transports aériens. Ils se déclarent
également favorables à l’ouverture de nouvelles perspectives de développement dans de
multiples domaines allant de la culture, l’enseignement des langues, la science, à la santé
publique et au sport.
1 En 1971, la Chine lance le quatrième plan quinquennal 1971-1975. En 1972-1973, elle s'efforce d'éliminer
les conséquences néfaste causées par ce qui est appelé les « erreurs de gauche » ( zuoqing cuowu)
et plusieurs mesures importantes sont prises. 2 Alain Peyrefitte, La Chine s’est éveillée, Paris, Fayard, 1996, page. 241.
157
Le Président Georges Pompidou souligne à cette occasion : « pour actives qu’elles
soient déjà, nos relations commerciales sont encore loin d’atteindre un niveau satisfaisant.
Il appartient aux gouvernements et aux administrations responsables de les stimuler, je
me réjouis à cet égard qu’une exposition industrielle française vienne l’an prochain
apporter aux acheteurs chinois de nombreux exemples de nos dernières techniques. Il faut
aussi que nous développions les liaisons aériennes entre nos capitales et les liaisons
maritimes entre nos ports afin de faire face au trafic croissant des hommes et des
marchandises »1.
Le Premier ministre Zhou Enlai apprécie hautement dans son allocution cette
visite et il considère que les révolutions chinoises puisent beaucoup d’enseignements
dans les expériences et les leçons qui se dégagent de l’histoire de France ; le général de
Gaulle est un combattant inflexible contre l’agression fasciste et pour la sauvegarde de
l’indépendance nationale de la France. Le Président Georges Pompidou, dit- il, est
aujourd’hui, devenu un autre illustre homme politique de France2.
Cette visite est comme un nouveau départ dans les relations diplomatiques
bilatérales après la Grande Révolution culturelle chinoise3.
Etienne Manac’h a ainsi noté dans un rapport sur la visite en Chine du Président
français du 24 septembre 1973 : « Pour la première fois depuis toujours, c’est dans une
ambassade qu’un chef d’Etat étranger a pu donner un dîner aux dirigeants de ce pays.
Pour la première fois la poursuite de la visite en province n’a pas donné lieu à la moindre
éclipse de l’intérêt. Notre président est resté auprès du Président Mao Zedong deux fois
plus longuement que le Président Nixon ou M. Tanaka. M. Zhou Enlai ne l’a pas quitté
pendant sept jours et a eu avec lui, ce qui est exceptionnel dans ce pays, des entretiens en
tête-à-tête. »... « Est- il besoin de faire mention de la chaleur exceptionnelle de la
1 La politique étrangère de la France, le 14 septembre 1973, page.94.
2 Allocution du Premier ministre Zhou Enlai du 11 septembre 1973, Le Quotidien du peuple (
renmin ribao), le 12 septembre 1973, page.2. 3 Etienne Manac’h, Mémoires d’extrême Asie 2, Paris, Fayard, 1980, pages.588-608.
158
rencontre et des multiples attentions prodiguées à M. Pompidou ? »1 Il est vrai que la
visite exercera une influence politique et portera des fruits économiques. Les
coopérations économiques progressent les années suivantes.
Tableau de l’évolution des échanges commerciaux franco-chinois entre 1965 et 19752 :
Unité : millions de francs
Dès le milieu des années soixante-dix, la diplomatie chinoise se tourne vers de
nouveaux objectifs : « Priorité au développement économique, recherche d’un
environnement régional pacifique, volonté d’apparaître à la fois modérée et
indépendante ». La Chine commence l’ouverture économique à l’étranger, mais,
« cependant forces est de constater que nous n’avons pas tiré partie de cette conjonction
de facteurs. Notre part de marché a reculé, notre déficit commercial s’est creusé, notre
1 Etienne Manac’h, Mémoires d’extrême Asie 2, Paris, Fayard, 1980, page.603.
2 Journal officiel de la République française, Paris, 1995, n°.7, page. 159.
Année Exportation
France-Chine
Importation
Chine-France
Volume total
Des échanges
Balance
commerciale
1965 297 216 513 +81
1966 455 266 721 +182
1967 460 236 698 +222
1968 430 263 696 +170
1969 233 395 628 -162
1970 448 388 836 +60
1971 618 393 1011 +225
1972 301 529 830 -220
1973 398 653 1051 -255
1974 772 886 1658 -114
1975 1610 742 2352 +868
159
présence économique et culturelle apparaît insuffisante »1, constatent les spécialistes
français.
En fait, le développement chinois correspond à la demande de l’économie
française, un vaste marché » demandeur de technologie et de produits dans les secteurs
qui sont les points forts de la France.
C) Faire admettre la RPC à l’ONU
Au sujet de l’admission de la RPC à l’ONU, la France soutient régulièrement le
principe de son admission depuis 1964, en restant fidèle à la politique définie par le
général de Gaulle pour accomplir son devoir moral envers la RPC ; « Sans contester que
l’établissement de rapports diplomatiques entre Beijing (Pékin) et Paris doivent
comporter par lui-même un élément essentiel et nouveau, le gouvernement définira, le
moment venu, sa position, compte tenu des circonstance et des changements
intervenus »2, comme le souligne le général de Gaulle.
Le débat au sein de l’ONU commence en 1950. A cause de l’opposition
américaine, l’admission de la RPC est bloquée entre 1950 et 1960. Le gouvernement du
Guomindang de Taïwan, sous le soutien des Etats-Unis, représente l’ensemble de la
Chine et occupe un siège permanent au conseil de sécurité à l’ONU de 1946 à 1971.
Selon le nouveau principe du seizième Congrès de l’ONU en 1961, les votes
valables, sur les questions importantes, y compris la question chinoise, doivent se faire à
la majorité, L’admission de la RPC à l’ONU est donc impossible parce que le vote de
1961 se décompose en 36 Pour, 48 Contre et 20 abstentions.
1 Avis et rapports du conseil économique et social , Journal officiel de la République française, Paris, 1995,
n°.7, page.55. 2 Charles de Gaulle, Lettres, Notes et Carnets, janvier 1964, page.29.
160
Avec l’application de ce nouveau principe, la RPC attendra encore dix ans . En
1965, quoique le vote sur la question chinoise à l’ONU se présente ainsi : 47 voix Pour,
47 voix Contre et 20 abstentions, la RPC est toujours hors de l’ONU.
Jusqu’en 1970, le vote sur la même question chinoise est : 51 voix Pour, 49 voix
Contre et 25 abstentions. Plus tard les Etats-Unis proposent une nouvelle thèse « d’un
double représentation de la Chine » à l’assemblée générale par les deux gouvernements
de Beijing (Pékin) et de Taipei et la République populaire de Chine siégeant seule au
Conseil de sécurité.
Le 2 août 1971, William Rogers, secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, déclare
que les Etats-Unis demandent à la prochaine session de l’Assemblée générale, à la fois
l’admission de la République populaire de Chine et le maintien de Taïwan à l’ONU.
Cette demande était condamnée par Beijing (Pékin) comme par Taipei ; le
ministère des Affaires étrangères de Beijing (Pékin) la rejette officiellement le 20 août, en
s’opposant à la thèse d’une représentation de la Chine à l’Assemblée générale des
Nations unies.
Depuis de l’établissement des relations diplomatiques sino- françaises en 1964,
Paris s’efforce de convaincre l’Assemblée générale de l’ONU d’assurer la prépondérance
des représentants de la RPC et s’oppose ainsi aux efforts déployés par les Etats-Unis pour
faire accepter, à titre de compromis, l’idée de la double représentation Beijing (Pékin)
Taipei1. La position française est très différente de celle de l’Angleterre, même si elle
reconnaît le gouvernement de Beijing (Pékin) avant la France. Cela donne une confiance
à la Chine populaire.
Ainsi, il est nécessaire de se souvenir de ce soutien précieux et solide apporté
dans les relations sino-françaises.
Les efforts français dans des différentes déclarations (1964-1971) :
1 Charles de Gaulle, Discours et messages IV , Paris, Plon, 1970, page.337.
161
1) Pour la première fois, en mars 1964, la France vote contre la
participation de Taïwan à l’organisation mondiale sanitaire de l’ONU,
en déclarant clairement que la place de la Chine à l’ONU revient de
droit à la RPC. Désormais la France est favorable à l’admission de la
RPC à l’ONU.
2) Le 4 février 1965, le général de Gaulle se prononce sans ambages sur
l’admission de la Chine populaire à l’ONU : « Je dirai franchement,
qu’à mon sens, c’est en revenant à la prudence et à la clarté, que
l’Organisation des Nations Unies peut retrouver son équilibre. Au point
où en sont les choses, il faudrait, évidemment, que Washington,
Moscou, Londres, Beijing (Pékin) et Paris s’entendent pour revenir au
point de départ, tout comme ils s'entendirent naguère pour fonder les
Nations Unies. La France pour sa part, est prête à contribuer à un tel
accord des Cinq et il lui semble que Genève serait le lieu tout indiqué
pour cette négociation, comme d’ailleurs pour telle ou telle autre
auxquelles vous penser »1.
3) La France soutient régulièrement ce principe, et les faits confirmant la
politique française au travers des propos du ministre des Affaires
étrangères Maurice Schumann sur la question de la Chine. Pendant le
débat général de l’ONU sur cette question en septembre 1970, il tient ce
discours : « Notre secrétaire général auquel je veux à ce propos, rendre
un juste hommage, n’a jamais été plus digne de sa haute charge que le
jour récent où il nous a dit en substance, allons-nous, sous prétexte que
le débat sur la question chinois dure depuis vingt ans, nous comporter
comme s’il pouvait durer vingt ans encore ? »2
1 Wang Taiping , Zhang Guangyou , Les relations diplomatiques de la Chine nouvelle
pendant 50 ans, Tome II ( xinzhonguo waijiao wushinian), Beijing, Ed itions de Presse
de Pékin, 1999, page. 1407. 2 La politique étrangère de la France du 18 septembre 1970, page.65.
162
4) Le 17 novembre 1970, deux mois après, Maurice Schumann réaffirme
avec force au cours du débat général à l’ONU : « La première faiblesse
de notre Organisation était le vide que lassant parmi nous l’absence
d’une grande partie de l’humanité »1.
5) En septembre 1971, à l’occasion de session de l’ONU, le représentant
de la France déclare : « La République populaire de la Chine est de
toute évidence la seule habilitée à exercer les responsabilités qui lui
reviennent, tant à l’Assemblée qu’au Conseil de sécurité », « Il n’est
qu’un seul projet de résolution, celui des 23 pays qui proposent : le
rétablissement des droits légitimes de la Chine populaire dans tous ses
droits et la reconnaissance des représentants de son gouvernement
comme les seuls représentants légitimes de la Chine à l’ONU, ainsi que
l’expulsion immédiate de Tchang Kaï-chek qui tienne des droits de la
réalité de la République populaire de Chine ».
6) Lors du toast du Président Georges Pompidou le 1er octobre 1971,
adressé en l ‘honneur de la délégation gouvernementale de la Chine,
celui-ci exprime son soutien à la cause de la Chine à l’ONU. Il
déclare : « Notre attitude quant à la représentation de la Chine aux
Nations Unies a été et reste sans ambigüité »2.
Ce que les Chinois analysent ainsi : grâce aux énormes et constant efforts
déployés par les pays amis, la vingtième session de l’Assemblée générale des Nations
Unies adopte le 25 octobre 1971, par 76 voix Pour, 32 contre et 17 abstentions3, la
motion des vingt-trois pays4 demandant le rétablissement des droits légitimes de la RPC
au sein de cette institution ainsi que l’expulsion des autorités représentants de Taïwan,
dès lors la Chine recouvrait son statut de membre permanent du Conseil de Sécurité de
1 La politique étrangère de la France du 17 novembre 1970, page.189.
2 La politique étrangère de la France du 1
er octobre 1971.
3 Comité d'édit ion de l'Aperçu général de la Chine, La politique ( zhengzhi), Beijing, Edit ions des
Langues étrangères ( waiwen chubanshe), 1986, page.136. 4 Il y avait 18 pays qui le demandent au début.
163
l’ONU. Cet événement a une portée mondiale : « l’un des porte-parole du Tiers-Monde
accède au premier plan de la scène internationale ».1
Le 15 novembre 1971, à l’occasion de la première participation des représentants
de la Chine populaire et pour accueillir ceux-ci, cinquante-sept représentants à l’ONU
prononcent un discours de bienvenue parmi lesquels le représentant français déclare :
« Voici donc que l’injustice et l’absurde ont pris fin et que la Chine est là, parmi
nous, au siège qui lui appartenait. Nous saluons, comme il se doit, ce très grand pays et ce
très grand peuple. Nous le saluons dans sa civilisation, dans son histoire, dans son
courage, sa dignité et dans l’immense effort qu’il accomplit ».... « Cette présence de la
République populaire de Chine ne comble pas seulement un très grand vide. Elle ouvre la
voie à un nouvel élan de notre Organisation. Elle doit être bénéfique pour les Nations
Unies, comme pour la Chine elle-même »2.
« Après vingt années d’isolement, dû à la fois à l'ostracisme des puissances
occidentales et à la révolution permanente interne, la Chine entre dans le concert
mondial ».3 Cette responsabilité élève la Chine populaire au rang des nations responsable,
et ses rapports avec la France en sont renforcés. Ces changements importants rétablissent
la Chine populaire dans la diplomatie mondiale, et particulièrement dans son rôle de
médiateur du problème indochinois.
1 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, page. 111.
2 La politique étrangère de la France du 15 novembre 1970, page.214.
3 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, pages110-111.
164
Tableau des votes sur la question chinoise à l’ONU entre 1951-19711 :
Année Pour Contre Abstention
1951 11 37 4
1952 7 42 11
1953 10 44 2
1954 11 43 6
1955 12 42 6
1956 24 47 8
1957 27 47 9
1958 28 44 9
1959 29 44 9
1960 34 42 22
1961 36 48 20
1962 42 56 12
1963 41 57 12
1965 47 47 20
1966 46 57 17
1967 45 58 17
1968 44 58 17
1969 48 56 21
1970 51 49 21
1971 76 35 17
1 François Joyaux, La nouvelle question d’Extrême-Orient 2, Paris, Payot, 1988, page.200.
165
Dans les affaires internationales, les deux pays contribuent à la cause de la paix et
à l’amélioration des rapports internationaux.
Bien que la France et la Chine aient des systèmes politiques différents, ils
constatent néanmoins un large accord de vues entre eux sur de nombreux problèmes
internationaux. Sur les questions asiatiques, les deux pays ont des points de vue proches,
et restent fidèles à toutes les affirmations du discours de Phnom-Penh, sur le retrait des
troupes américaines.
En Indochine, les deux pays sont particulièrement satisfaisants de ces
convergences. Un accord sur la cessation de la guerre et le rétablissement de la paix au
Viêt-Nam conclu à Paris le 27 janvier 1973, un accord sur le rétablissement de la paix et
la réalisation de la concorde nationale au Laos du 21 février 1973 et un accord du
protocole de cet accord signé le 14 septembre 1973.
166
IV-3 La politique d’ouverture chinoise et
la diplomatie économique française (1974-1981)
L’admission de la RPC à l’ONU, favorise la détente sino-américaine. Le
gouvernement chinois voit s’éloigner l’ombre d’une guerre mondiale. Sécurité assurée, la
politique extérieure chinoise se tourne vers le développement économique.
La politique extérieure de Giscard d’Estaing est en rapport étroit avec la Crise
économique mondiale au milieu des années soixante-dix. Celle-ci, entre 1974 et 1975,
marque la fin des « trente glorieuses » pour la France et d’une époque faste pour le
monde occidental. Cette crise économique mondiale sévit d’abord en Angleterre en
novembre 1973, puis aux Etats-Unis, au Japon, au Canada, en Allemagne de l’Ouest et en
France. Comment sortir de la crise ? La réponse à cette question constitue un véritable
défi pour les pays industriels occidentaux. La politique extérieure française est liée
étroitement à la situation économique intérieure.
Est-ce que le vaste marché chinois intéresse la France ? Nous pouvons noter que
« la politique d’ouverture » de la Chine continentale correspond à la « diplomatie
économique » de Giscard d’Estaing. Les deux pays ont des intérêts convergents les
incitant à entrevoir une coopération active qui devrait être bénéfique à leurs économies.
Si le général de Gaulle traite les Affaires étrangères en fonction de sa stratégie politique
et de son souhait de voir la France jouer un rôle de premier plan sur la scène
internationale, le Président Giscard d’Estaing, lui, considère ses relations diplomatiques
d’un point de vue principalement économique.
A) Le contexte international du début des années 70
Les puissances économiques de l’Europe de l’Ouest sont favorables au
développement des relations franco-chinoises, car la Chine a besoin d’un appui financier
pour son développement économique. Puisque son économie était fermée pendant
longtemps et il y a donc un manque de moyen et absence de techno logies de pointe. En
effet, la Chine, pendant les années soixante, n’entretient presque aucune coopération
167
économique avec les grands pays à cause du blocus américain depuis la Guerre de Corée
de 19501, de la suppression de l’aide économique soviétique en 1960, ainsi que de
l’influence de la doctrine politique intérieure de la Chine elle-même : le mouvement de
« Grand Bond en avant »2 entre 1958 et 1960 a connu un échec absolu ; Puis, la
Révolution culturelle a mis l’économie chinoise dans un état de stagnation pendant une
dizaine d’années.
L’Europe de l’Ouest et le Japon, après la deuxième guerre mondiale, s’efforcent
de développer leur économie. Quant à la croissance économique soviétique, elle ralentit à
partir de la fin des années soixante.
Les Etats-Unis, le Japon et l’Europe de l’Ouest forment ainsi l’économie
triangulaire.
Les relations économiques au niveau internationales sont plus limpides : Les
Etats-Unis, l’URSS, le Japon, l’Europe de l’Ouest et la Chine constituent cinq pôles du
monde.
Les deux superpuissances américaines et soviétiques disposent chacune d’une
force militaire importante. Beijing (Pékin), Washington et Moscou forment la « politique
triangulaire ».
Par rapport aux deux superpuissances : les différences entre les Américains et les
Russes se réduisent : le revenu national soviétique est seulement 1/3 de celui des Etats-
Unis durant les années 50, mais 2/3 au début des années 70. Et en ce qui concerne leurs
forces nucléaires, qui étaient dans un rapport de 5 (Etats-Unis) à 1 (URSS) au début des
années 60, elles sont équivalentes dans les dix années suivantes3.
A partir de 1971, les Etats-Unis, à cause des dépenses de guerre (principalement
la guerre au Viêt-Nam), entrent dans une période de déficit. Leur premier bilan négatif,
en 1971, est de -22,6 milliards de dollars ; Ce chiffre s’accroît d’année en année. Cette
situation s’est davantage dégradé à cause du déclenchement de la quatrième guerre du
1 L’ONU décide le b locus de la Chine pour le commerce des matières stratégiques le 18 mai 1951.
2 « Le Grand Bond en avant ( dayuejin) », est le nom donné à une politique économique lancée
par Mao Zedong et mise en œuvre de 1958 au début 1960. Mais irréaliste, ce programme se révèle être un
fiasco, la Chine échappant de peu à l’effondrement complet de son économie. 3 Gerards Segal, The Simon & Schuster Guide to the World Today, Simon & Schuster, 1987, page. 82.
168
Moyen-Orient en octobre 1973 qui a entraîné une crise du pétrole : les dépenses pour
l’achat de pétrole pour les Américains en 1974 augmentent de 87% par rapport à l’année
précédente.
Et entre Beijing (Pékin) et Moscou : Après le déblocage des relations sino-
américaines, l’URSS devient la première menace de la Chine. La tension aux frontières
des deux pays est croissante depuis les premiers incidents sino-soviétiques sur le fleuve
Oussouri en 1969. Face à cet ennemi puissant, la « théorie des trois mondes » de Mao
Zedong est rendue publique1. La Chine se considère comme un pays du Tiers monde.
Toute l’Asie, à l’exception du Japon, fait partie du Tiers monde ainsi que l’ensemble des
pays d’Afrique et d’Amérique latine. Une nouvelle stratégie diplomatique chinoise est
basée sur cette théorie, et suivie par la Chine jusqu’à la disparition de l’URSS.
Des négociations, au niveau des vice-ministres des Affaires étrangères chinois et
soviétiques, débutent en octobre 1979 au sujet du problème du tracé frontalier et de la
non-agression entre les deux Etats. Il y a eu quinze « rounds » dans les négociations
d’octobre 1969 à juin 1978 à Beijing (Pékin) et à Moscou. Ils n’aboutissent à aucun
résultat. Le 3 avril 1979, l’Assemblée nationale chinoise décide que la Chine ne prolonge
plus le traité d’alliance, d’amitié et d’assistance mutuelle sino-soviétique du 14 février
1950 à son expiration, le 11 avril 1980. Certes, entre le 17 octobre et le 30 novembre
1979, la Chine et l’URSS rouvrent des négociations au niveau d’Etat à Moscou, mais
sans résultat.
Dans cette situation, la Chine continue le rapprochement avec l’Ouest : elle
conclut en août 1978 un traité de paix et d’amitié avec le Japon, comportant une clause
« antihégémonique », qui vise en fait l’URSS.2
Le 16 décembre 1978, la Chine établit des relations diplomatiques avec les Etats-
Unis qui reconnaissent la République populaire comme l’unique gouvernement légal de
1 Wang Jin , Encyclopédie de Mao Zedong ( Mao Zedong dacidian), Guangxi, Ed itions
du people de Guangxi ( Guangxi renmin chubanshe) et Editions de Lijiang (
Lijiang chubanshe), 1992, page.726. 2 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, page.150.
169
la Chine. Le voyage de Deng Xiaoping aux Etats-Unis en février 1979 et la crise afghane
confirment le rapprochement spectaculaire entre Pékin et Washington.1
La politique d’ouverture de la Chine :
Depuis le IXème Congrès du PCC en 1969, la Chine essaye d’appliquer « une
politique de réforme et d’ouverture économique ». A partir des années soixante-dix, elle
modifie sa politique extérieure et intérieure, accélérant le pays vers « le développement
économique intérieur ».
La IVème assemblée nationale, convoquée en janvier 1975, adopte une nouvelle
Constitution et approuve le programme des « quatre modernisations »2 présenté par Zhou
Enlai au cours de cette réunion, il s’agit de :
- Jeter une solide base pour l’agriculture, porter à 85% le taux de mécanisation des
principales activités agricoles, assurer par tête une surface de terre à rendement
élevé et stable, faire accéder l’agriculture, la sylviculture et l’élevage à un niveau
plus élevé ;
- Edifier une industrie légère fournissant un riche éventail de produits avec un
rapport raisonnable entre qualité et prix ;
- Edifier une industrie lourde classique développée sur des bases de technologiques
nouvelles, et construire de nouvelles branches (telles que pétrochimie,
électrique...) ;
- Etablir un réseau de transport et de communication adapté aux besoins du
développement industriel et agricole.
Mais après la mort de Zhou Enlai le 8 janvier 1976 et celle de Mao Zedong le 9
septembre 1976, la question est de leur trouver des successeurs. Au cours des deux
années suivantes, la bataille au sommet fait rage pour établir la nouvelle direction du
PCC et définir l’orientation du pays : elle se termine par la chute de « la Bande des
1 Maurice Vaïsse : Les relations internationales depuis 1945 , Armand Colin, Paris, 2004, page.150.
2 Le programme des quatre modernisations de la Chine, Le Quotidien du people ( Renmin ribao),
le 21 janvier 1975, page.1.
170
quatre »1 et la réhabilitation de Deng Xiaoping. Au XIème Congrès du PCC en août 1977,
Hua Guofeng garde sa première place alors que Deng Xiaoping occupe à nouveau
officiellement la troisième place2.
Grâce à l'appui des autres chefs du parti qui ont déjà récupéré leurs positions
officielles, Deng Xiaoping prend le pouvoir suprême lors de la troisième session plénière
du XIème Congrès du PCC en décembre 1978, et il donne la priorité à la « construction
économique moderne socialiste » et au développement actif des collaborations
économiques et des échanges techniques avec les étrangers, en ouvrant les marchés
intérieur et extérieur de la Chine. L’idéologie n’est plus au premier plan de Deng et laisse
sa place à l’économie.
Quant aux relations avec l’Europe, la Chine établit ses relations diplomatiques
avec la CEE en mai 1975. Elle est le premier pays socialiste à prendre une telle initiative.
Le 3 avril 1978, la Chine a obtenu, de Bruxelles, la clause de la nation la plus favorisée.
Dans le même mois, a été prise la décision de créer quatre zones économiques
spéciales (ZES) – Shenzhen près de Guangzhou (Canton), Zhuhai à proximité de Macao,
Xiamen, dans la province du Fujian, face à Taïwan – afin d’attirer les investissements
étrangers.
Du côté français, le Président Giscard d’Estaing maintient dans sa politique
extérieure les grandes orientations de la diplomatie gaullienne par un style différent, par
rapport à « l’indépendance nationale »3. Il maintient la « diplomatie multipolaire » et
1Bande des quatre ( sirenbang) est le nom d'un groupe de dirigeants chinois, soit : Jiang Qing
(la femme de Mao), Zhang Chunqiao , Yao Wenyuan et Wang Hongzen , qui furent
arrêtés et démis de leurs fonctions en 1976, peu de temps après la mort de Mao Zedong. On les accusait
d'être les instigateurs de la Révolution culturelle , qui fit de nombreuses victimes et plongea la Chine dans le
chaos de 1966 à 1969. La défaite politique de ce groupe et sa mise à l'écart brutale du pouvoir marqua la fin
définit ive de la Révolution culturelle . 2Hua Guofeng a été élu Président du PCC lors du XI
ème Congrès et Deng Xiaoping , vice-
président du PCC. Cependant, Hua perd progressivement son pouvoir après la troisième session plénière du
XIème
Congrès. 3 En référence aux Articles sur l'histoire française ( Faguoshi lunwenji), rédigés par le
Centre de recherches de l'h istoire française de Chine ( Zhongguo faguoshi yanjiuhui),
Beijing, Edit ions Sanlian ( Sanlian shudian), 1984.
171
s’efforce de construire l’Union européenne, de développer la détente avec l’URSS, la
coopération avec l’Allemagne et les liaisons avec le Tiers monde1.
Pour lui, un monde multipolaire succédera aux deux superpuissances américaine
et soviétique. Concernant la politique triangulaire Beijing (Pékin) Washington Moscou,
Giscard d’Estaing est extrêmement prudent à propos de la vente des armes françaises aux
Chinois. Il développe à la fois les relations avec la Chine, en gardant les relations
particulières avec Moscou, sans toucher au principe de la détente avec Moscou. Les
dirigeants chinois sont favorables à cette prudence.
Les relations diplomatiques franco-chinoises se développent dans une telle
situation.
B) Le renforcement des dialogues politiques sino-français
Beijing (Pékin) et Paris renforcent d’abord leurs relations politiques pendant des années
soixante-dix.
1) Instauration du système de consultations politiques :
Lors du voyage de Deng Xiaoping en France en 1975, les deux gouvernements sino-
français conviennent :
- D’instaurer un système de consultations politiques en fonction de la conjoncture
internationale, au niveau des ministres des Affaires étrangères.
- D’instituer une commission mixte en vue d’amplifier les échanges économiques
et commerciaux entre les deux Etats.
Le système des consultations politiques périodiques consolide les relations
franco-chinoises, en développant leur économie.
L’importance du voyage officiel de Deng Xiaoping s’exprime dans le discours
protocolaire du Président Giscard d’Estaing :
« C’est la première fois que la France a l’insigne honneur de recevoir un
dirigeant chinois de votre rang ; et c’est en France que vous avez choisi d’effectuer
votre premier déplacement officiel à l’étranger. C’est donner d’emblée à votre visite
1 Giscard d’Estaing Valéry, Le pouvoir et la vie, Paris, Compagni, 1988 et 1991.
172
toute sa signification. Elle souligne l’exceptionnelle qualité des rapports franco-
chinois. ...Cette visite et celle des hautes personnalités qui nous entourent, marquent à
cet égard une nouvelle étape et va nous permettre de nouveau chemins à l’amitié
franco-chinoise »1. Ce discours indique aussi l’importance des relations sino-
françaises et des perspectives qu’elle ouvre. On espère consolider les liens amicaux
entre ces deux pays comme « le ciel et la mer ».
Les deux hommes politiques s’entretiennent de l’importance de l’Europe dans
l’échelle mondiale face à l’URSS et aux Etats-Unis et de l’entente entre l’Europe et la
Chine. Les discussions portent sur les matières premières et l’énergie (appui chinois à
la position française) et sur l’aide au développement. Deng Xiaoping affirme que la
Chine soutient résolument l’unification de l’Europe occidentale qui est indispensable
pour l’équilibre du nouvel ordre international. Se déclare à cet effet : « Le peuple
français et les autres peuples européens peuvent être assurés que dans leur lutte pour
la sauvegarde de l’indépendance et du renforcement de leur union, ils bénéficieront
toujours du soutien chinois »2. A cette occasion Giscard d’Estaing accepte l’invitation
de se rendre en Chine.
2) Les rencontres au niveau des ministres des Affaires étrangères :
Dès l’institution du système des consultations politiques périodiques, les ministres
des Affaires étrangères des deux pays se rendent réciproquement visite.
Jean Sauvagnargues3 est reçu du 19 au 25 novembre 1975 en Chine, par le
Premier ministre Li Xiannian, et le vice-premier ministre Deng Xiaoping. Il s’entretient
surtout avec son homologue, Qiao Guanhua4, sur la coopération bilatérale afin de
multiplier les échanges ; sur la situation en Asie, au Proche-Orient, en Angola, sur le
dialogue Nord-Sud, sur la détente Est-Ouest et sur la question de la Corée.
La conférence de presse de Jean Sauvagnargues a lieu le 20 novembre 1975. Ce
voyage prépare la visite du Président de la République Giscard d’Estaing l’année suivante.
1 La politique étrangère de la France, Paris, le 1
er septembre 1975, pp.160-161.
2 L’a llocution de Deng Xiaoping, La politique étrangère de la France du 16 mai 1975, page.163.
3 Jean Sauvagnargues était ministre des Affaires étrangères français de 1974 à 1976.
4Qiao Guanhua , dip lomate chinois, était ministre des Affaires étrangères de la RPC de 1974 à1976.
173
De retour à Paris, il affirme sur FR31 que la Chine approuve la politique d’indépendance
de la France. Le voyage est ainsi commenté par le Président Giscard d’Estaing : « Nous
avons été très sensibles à la qualité de l’accueil que les dirigeants de la République
populaire de Chine ont réservé à M.Sauvagnargues et de la convergence des analyses et
des points de vue que ces entretiens ont souligné »2.
Ses homologues chinois se déplacent en France. Qiao Guanhua s’y rend en
octobre 1976. Huang Hua3 du 7 au 9 octobre 1977 rencontre son homologue français afin
d’approfondir les échanges de vues sur l’activité internationale et les questions bilatérales
entamés au cours de son séjour à New York. Pour les relations sino-françaises, les deux
ministres s’attachent à développer et à approfondir l’amitié sino- française. La politique
étrangère de la France souligne : « le développement doit naturellement aller de pair avec
l’élargissement du dialogue »4.
3) Le Premier ministre français Raymond Barre du 19 au 24 janvier 1978, qui est
reçu par son homologue Hua Guofeng, et rencontre Deng Xiaoping, Huang Hua.
Des discussions approfondies qui sont consacrées à l’examen de la situation
internationale ont permis de constater une large similitude dans l’analyse des
grands problèmes, et de tomber d’accord sur la nécessité d’éviter une
bipolarisation du monde. Sur les relations bilatérales, « une coopération
approfondie et diversifiée s’impose ». Les deux gouvernements signent un accord
scientifique et technique le 21 janvier 1978, « il s’agit là d’un objectif à long
terme »5.
Quatre mois après le voyage de Raymond Barre et la signature de cet accord-
là, le vice-premier ministre chinois Gu Mu6, chargé de la Commission au Plan d’Etat,
1 France 3 (FR3) est une chaîne de télévision généraliste française de service public.
2 La politique étrangère de la France du 26 novembre 1975.
3 Huang Hua , succédant à Qiao Guanhua, était min istre des Affaires étrangères de RPC de 1976 à
1982. 4 La politique étrangère de la France du 8 octobre 1977, page.18.
5 La politique étrangère de la France du 1
er trimestre 1978, page.86.
6 Gu Mu , vice-premier ministre de la RPC de 1975 à 1980.
174
effectue une visite en Europe de l’Ouest (France, Suisse, Belgique, Danemark et
Allemagne) du 2 mai au 6 juin 1978 dont le but est de s’informer plus sur la
technologie de pointe. Il séjourne à Paris du 2 au 17 mai 1978. Ce voyage a pour but
de développer les relations économiques franco-chinoises qui ne reflétaient pas
encore l’importance respective des deux pays dans l’économie mondiale.
Ensuite, du 14 au 21 octobre 1978, un autre vice-premier ministre chinois
Fang Yi1, se rend en France. Les deux gouvernements signent deux accords de
coopération scientifique et technique : le premier de ces documents est un protocole
sur des projets complémentaires d’échanges scientifiques et techniques ; le second
document est un accord particulier entre le Centre national de la recherche
scientifique (CNRS) et l’Académie chinoise des Sciences, signé le 21 janvier 1978 à
Beijing (Pékin).
Du côté français, deux délégations sont envoyées en Chine, l’une menée par le
ministre de Culture et de l’Environnement Michel d’Ornano2, l’autre par le Secrétaire
d’Etat à l’Agriculture Jacques Fauchier3 du 29 octobre au 4 novembre 1978. Quant au
voyage de Jean-François Deniau4, ministre français du Commerce extérieur, il aboutit
aboutit à la signature de « l’accord sino- français à long terme sur le développement
des relations économiques et la coopération5 ». Cet accord prévoit, notamment, un
volume d’échanges de 60 milliards de francs en sept ans.
1 Fang Yi , vice-premier min istre de la RPC de 1978 à 1983.
2 Michel d ’Ornano était min istre de Culture et de l’Environnement de la France de 1977 à 1981.
3 Jacques Fauchier était Secrétaire d’État auprès du ministre de l'Agricu lture de la France de 1978 à 1981.
4 Jean-François Deniau était ministre du Commerce extérieur de la France de 1978 à 1980.
5 Accord à long terme sur le développement des relations économiques et de la coopération entre le
gouvernement de la République française et le gouvernement de la République populaire de Chine.
175
Jean-François Deniau et Huang Hua signent l’Accord à long terme sur le développement des relations
économiques et de la coopération entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République populaire de Chine, le 21 janvier 1978 à Beijing (Pékin)1.
4) Hua Guofeng en France en octobre 1979 :
C’est la première visite officielle d’un Premier ministre chinois depuis 1964,
se rend en France et en Europe. Cette visite entraîne la signature d’un projet de
développement des relations des deux pays et d'échanges culturels pour l’année 1980-
1981 ainsi qu’un projet d’ouverture de postes consulaires2.
Giscard d’Estaing considère que « la présence en France du Président du Parti
communiste chinois et Premier ministre successeur, dans ces très hautes fonctions,
d’hommes qui ont profondément marqué leur pays et notre temps, le Président Mao
Zedong et le Premier ministre Zhou Enlai, est pour la France, un motif de satisfaction
et un gage d’espoir ». Malgré « ... les systèmes politiques et sociaux différents qu’ils
ont choisis, leur éloignement géographique, nos deux pays se comprennent. Ils
dialoguent et ils coopèrent »3.
Le Président français et le Premier ministre chinois sont satisfaits du
développement économique rapide de leurs pays. Giscard d’Estaing conclut au sujet
des relations bilatérales : « Les échanges commerciaux se sont améliorés depuis deux
1 Site du Ministère de Sciences et de Technologies de la RPC :
http://kaifangzhansb.mofcom.gov.cn/huigu/exhibit ion/show_2.jsp?place=&fenqu=&zbt=%E7%A7%91%E
6%8A%80%E9%83%A8%E2%80%94%E2%80%94%E5%9B%BD%E9%99%85%E7%A7%91%E6%8A
%80%E5%90%88%E4%BD%9C%E7%9A%84%E5%85%89%E8%BE%89%E5%8E%86%E7%A8%8B 2 Les deux Etats décident d’établir l’un à l’autre des consulats généraux à Marseille et à Shanghai, et sa
signature faite le 17 octobre 1980. 3 L’allocution du Président G. d’Estaing, La politique étrangère de la France le 15 octobre 1979, page.46.
176
ans. La coopération, dans le domaine culturel et artistique, se développe rapidement,
elle porte sur les domaines scientifiques et techniques, les plus divers : les
télécommunications, la médecine »1. Il ajoute « Nous sommes prêts à contribuer à la
réussite de votre vaste programme de modernisation »2.
5) Mme. Deng Yingchao en France du 9 au 16 juin 1980 :
Une autre visite très importante est celle de la vice-présidente de l’Assemblée
nationale chinoise, Mme. Deng Yingchao3. C’est la première délégation de
l’Assemblée populaire qui se rend en France. Sa présence dans l’hexagone réalise les
vœux de l’ancien Premier ministre Zhou Enlai qui joue un rôle crucial pour nouer et
développer des relations sino-françaises. Le ministre des Affaires étrangères Jean
François-Poncet4 souligne à cet égard : elle « témoigne aussi de la continuité
exemplaire de notre dialogue entamé par le général de Gaulle, développé par le
Président Pompidou. »5
6) Valéry Giscard d’Estaing en Chine du 15 au 22 octobre 1980 :
Le Président Giscard D’Estaing reçoit un accueil chaleureux en Chine et
rencontre les principaux dirigeants chinois. Les deux Etats conviennent d’instaurer le
« système de consultations périodiques au niveau ministériel des Affaires étrangères
pour échanger les points de vue » et l’ « accord sur l’établissement des postes
consulaires généraux à Shanghai et à Marseille le 17 octobre 1980 » a pour but de
poursuivre le développement des relations amicales à cette occasion. Un accord de
principe sur la livraison par la France des « équipements complets de la centrale
nucléaire Daya-Bay et le renforcement de la coopération technique en ce domaine est
également conclu ». La France prend note que la Chine s’engagera sur la voie qui en
fera bientôt une grande puissance moderne et qu’elle exercera inéluctablement une
influence considérable dans le monde dans les années à venir.
1 La politique étrangère de la France du 15 octobre 1979, pp.46-48.
2 La politique étrangère de la France du 15 octobre 1979, page.48.
3 Deng Yingchao , femme de l'ancien Premier ministre Zhou Enlai, était vice-présidente de
l'Assemblée nationale chino ise de 1976 à 1978. 4 Jean François-Poncet était ministre des Affaires étrangères de la France de 1978 à 1981.
5 La politique étrangère de la France du 16 ju in 1980, pp.181-182.
177
C) Les succès dans les coopérations économiques sino-françaises
Les relations économiques sino-françaises font apparaître que la politique
extérieure chinoise est orientée vers des intérêts nationaux à partir des années
soixante-dix.
La stratégie économique de la diplomatie de Giscard d’Estaing entraine de
bonnes relations, en permettant de grands succès dans les coopérations mutuelles. Les
entretiens entre les hautes personnalités, améliorent la compréhension et valorisent le
développement des relations diplomatiques et économiques. Cette coopération
s’étend rapidement aux domaines scientifiques et techniques, à l’agriculture, à
l’espace, à l’informatique, aux télécommunications et à la médecine.
L’institution de la Commission mixte franco-chinoise accélère le bon
développement économique entre les deux pays. Le développement de l’économie
chinoise correspond au besoin de l’économie française ; celle- là crée un vaste marché
de technologie et de produits dans les secteurs qui représentent les points forts de la
France.
C’est grâce à leurs bonnes relations politiques que le nombre des accords
économiques conclus augmentent rapidement par rapport aux années précédentes.
Une série d’accords économiques furent signés entre 1975 et 19811.
L’échange de lettres du 15 juillet 1975 :
Un échange de lettres concerne le dépôt de marque de fabrique et de
commerce en République populaire de Chine et dans la République française sur le
fondement de la réciprocité. Le gouvernement chinois est disposé à accorder aux
personnes physiques et morales de la République française le droit de présenter, en
conformité des lois en vigueur en République de Chine, des demandes de dépôts de
marque de fabrique et de commerce et de bénéficier d’un droit exclusif sur les dites
marques en Chine, à la condition que le gouvernement français réserve, en France, le
1 En référence au Journal official de la République française du 21 octobre 1975, page.10882, du 24 août
1977, page.4330, du 6 juillet 1979, page.1631, du 6 janvier 1981, page.174, du 2 février 1982, page.439 et
du 12 septembre 1981, page.2448.
178
même traitement aux sociétés et entreprises de la République populaire de Chine. Les
propositions contenues dans la lettre du gouvernement français et sa réponse
constituent un accord entre les deux gouvernements qui entrera en vigueur soixante
jours après le 15 juillet 1975.
L’accord de navigation maritime du 28 septembre 1975 :
Cet accord a pour but de développer et de renforcer la coopération dans le
domaine des transports maritimes. L’accord comporte 14 articles. Les deux parties
contractantes conviennent que les navires marchands exploités par les entreprises
peuvent effectuer dans des ports commerciaux ouverts au trafic international, des
transports de marchandises et de passagers entre leurs deux pays ou entre ces pays et
des pays tiers.
L’accord scientifique et technique du 21 janviers 1978 :
L’accord scientifique et technique entre les deux pays portant sur les
différents secteurs des échanges scientifiques et techniques1 est signé pendant la visite
en Chine de Raymond Barre, Premier ministre français. Les deux parties
contractantes définissent d’un commun accord les différents secteurs de leurs
échanges scientifiques en tenant compte de l’expérience acquise par leurs savants et
techniciens, des possibilités offertes dans chaque domaine et de leurs priorités
respectives en matière de recherches et de développement. L’accord comprend quatre
articles.
Pour Beijing (Pékin), c’est un premier accord scientifique et technique entre la
Chine et l’Europe Occidentale ; il s’agit d’un objectif à long terme. Cet accord
souligne que la coopération franco-chinoise s’engage déjà dans les domaines
scientifique et technique afin de réaliser les quatre modernisations. La Chine, engagée
dans un puissant effort de modernisation, est aidée par la France et la coopération
économique se trouve ainsi approfondie. C’est le fruit de la volonté commune des
deux pays.
1 Journal official de la République française du 6 ju illet 1979, page.1631.
179
Cependant les Français considèreront 18 ans plus tard que si : « la France a
largement développé ses échanges avec la Chine, cette progression s’est faite au
bénéfice de la partie chinoise et s’est accompagnée d’un déficit croissant »1.
L’accord du 23 janvier 1978 :
C’est un accord sur l’exonération réciproque des impôts et taxes dus par les
entreprises de navigation aérienne est signé le 23 janvier 1979. Les idées principales
sont les suivantes : les entreprises françaises et chinoises de transport aérien désignées
par les gouvernements français et chinois sont exonérées en Chine et en France. Les
personnes physiques ayant la nationalité de l’une des Parties contractantes et se
trouvant sur le territoire de l’autre Partie contractante en vue d’y exercer une activité
pour le compte des entreprises de la première Partie contractante mentionnées à
l’article 1er sont exonérées d’impôt par l’autre Partie contractante sur le revenu
qu’elles retirent de cette activité. L’accord comprend trois articles.
L’accord sur l’établissement des postes consulaires du 17 octobre 1980 :
Pour poursuivre le développement des relations amicales, les deux
gouvernements ont signé un accord sur l’établissement des postes consulaires le 17
octobre 1980 à Beijing (Pékin). Les deux pays consentent à l’ouverture d’un Consulat
général de Chine à Marseille et d’un Consulat général de France à Shanghai à partir
du 17 octobre 1980.
L’échange de lettres du 24 avril 1981 :
Un échange de lettres relatif au statut des sociétés chinoises de commerce
extérieur en France et des sociétés françaises en Chine afin d’améliorer leurs liens
économiques. Les deux gouvernements sont disposé à accorder aux représentations
susdites les facilités nécessaires à l’institution de leur bureau à Paris et à Beijing
(Pékin) et à l’exercice de leurs activités dans le cadre des législations françaises et
chinoises.
1 Journal official de la République française du 17 octobre 1995, n°.7, page.56.
180
Ces accords et ces échanges de lettres ci-dessus signifient que les relations
économiques bilatérales entre la France et la Chine entrent dans une nouvelle ère.
Une telle rapidité du développement économique n’était pas manifestée pendant la
présence du général de Gaulle et de celle du Président Georges Pompidou.
Dans le nouveau, Deng Xiaoping a succédé à Mao Zedong et a développé la
pensée diplomatique chinoise pour accélérer l’édification des « quatre modernisation
de la Chine »1.
Du point de vue français, la diplomatie chinoise n’a plus les ambitions de
l’époque de la guerre révolutionnaire ou des Trois Mondes. Elle est tournée vers les
objectifs fixé dès le milieu des années soixante-dix : priorité au développement
économique, recherche d’un environnement régional pacifique, volonté d’apparaître
d’une manière modérée et indépendante dans la communauté internationale. Elle
considère à présent que le poids d’un Etat est évalué à l’aune de sa puissance
économique et de sa capacité industrielle et technologique2.
1 Discours du ministre des Affaires étrangères Qian Qichen dans le colloque sur la pensée
diplomatique de Mao Zedong en octobre 1993, Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 8
novembre 1993. 2 Journal official de la République française du 17 octobre 1995, n°.7, page.55.
181
Le tableau ci-dessous résume l’évolution des échanges commerciaux franco-
chinois entre 1974-19811 :
Unité : millions de franc
Le volume des échanges économiques a augmenté très rapidement des années
60 aux années 802 :
Années 60 : 101 millions de dollars ;
Années 70 : 307 millions de dollars ;
Années 80 : 1,4 milliards de dollars ;
Années 90 : 2 milliards de dollars.
En plus de la bonne entente dans le domaine économique, la Chine et la
France partagent en même temps une vision identique des problèmes internationaux :
La Chine soutient fortement l’unification de l’Europe, le mouvement qui
pousse les peuples à s’unir pour créer ensemble les conditions de leur liberté et de
leur avenir et qui répond aux exigences de l’équilibre du monde et de la paix.
Deng Xiaoping a exprimé lors de sa visite en France le 13 mai 1975 : « Que
les nations ouest-européennes marquent sans cesse des progrès dans la voie de
1 Journal official de la République française du 17 octobre 1995, n°.7, page.159.
2 Cai Fangbo (ambassadeur de Chine en France de 1990 à 1998), « Revue et expectative des
coopérations économiques et commerciaux sino-françaises » ( Zhongfa
jingmaohezuo de huigu yu zhanwang), Commerces internationaux ( Guoji maoyi), n°.6, 1994.
Année Exportation
France-Chine
Importation
Chine-France
Volume
échangés
Balance
1974 772 886 1658 -114
1975 1610 742 2352 +868
1976 1603 928 2352 +765
1977 468 953 1421 -485
1978 831 1015 1846 -124
1979 1442 1387 2829 +55
1980 1284 1976 3260 -692
1981 1486 2752 4238 -1266
182
l’union afin de sauvegarder leur indépendance et d’assurer leur sécurité, cela
contribue, à notre avis, à l’évolution de la situation internationale dans un sens
favorable. Quiconque ne nourrit pas l’intention inavouable à l’égard de l’Europe
occidentale n’a pas à craindre son union. Nous nous réjouissons de constater le
gouvernement français, sous la direction du Président Giscard D’Estaing, poursuit
ses efforts pour promouvoir l’union de l’Europe occidentale. Le peuple français et les
autres peuples européens peuvent être assurés que dans leur cause de la sauvegarde
de l’indépendance et du renforcement de leur union, ils bénéficieront du soutien du
peuple chinois »1.
Selon le Président Giscard d’Estaing : « Nos situations géographiques, nos
traditions intellectuelles, nos philosophies de la société ne sont pas interchangeables.
Ce que la Chine et la France ont en commun est assez fondamental cependant pour
qu’en maintes occasions elles partagent les même réflexions, recherchent la solution
des mêmes problèmes et aboutissent, fût-ce par des chemins différent, à des
conclusions identiques »2.
1 L’a llocution de Deng Xiaoping, La politique étrangère de la France du 16 mai 1975, page.163.
2 La politique étrangère de la France du 13 mai 1975, page.161.
183
Source : Rapport du développement des ZES chinois 2010 , Zhong Jian , Edit ions de Presse des
documents des sciences sociales ( ), 2010.
184
D) Les échanges de lettres et les accords signés entre 1975 et 19811 :
Titre : Accord par échange de lettres entre la France et la Chine concernant le
dépôt de marques de fabrique et de commerce
Date et lieu de signature : 15/07/1975 à Pékin.
En vigueur.
1 Sources du Ministère des Affaires étrangères de la France.
185
186
187
Titre : Accord de navigation maritime entre la France et la Chine (ensemble
un échange de lettres)
Date et lieu de signature : 28/09/1975 à Pékin.
Fin de vigueur
188
189
190
191
192
193
194
Titre : Accord scientifique et technique entre le gouvernement de la
République française et le gouvernement de la République populaire de Chine
Date et lieu de signature : 21/01/1978 à Pékin.
En vigueur
195
196
197
Titre : Accord entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République populaire de Chine relatif à l'exonération réciproque
des impôts et taxes dus par les entreprises de navigation aérienne
Date et lieu de signature : 23/01/1979 à Paris.
En vigueur
198
199
200
Titre : Accord entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République populaire de Chine sur l'établissement de postes
consulaires
Date et lieu de signature : 17/10/1980 à Pékin.
En vigueur
201
202
203
204
205
206
Titre : Accord par échange de lettres entre la France et la Chine relatif au
statut des sociétés chinoises de commerce extérieur en France et des sociétés
françaises en Chine
Date et lieu de signature : 24/04/1981 à Paris.
Fin de vigueur
207
208
209
210
CHAPITRE V
LES RELATIONS FRANCO-CHINOISES SOUS LA PRESIDENCE
DE FRANÇOIS MITTERAND (1981-1994)
211
Le président François Mitterrand, qui a jugé très tôt que la France devait
reconnaître la République populaire de Chine est considéré comme ami de la Chine par
les autorités chinoises. Il a effectué trois voyages en Chine. La première fois, en 1961, il
était invité à titre personnel par l’Institut des Affaires étrangères chinoise. La deuxième
fois, du 9 au 14 février 1981, il représente le groupe politique qu’il dirige à l’époque, le
Parti Socialiste français, à l’invitation de Hu Yaobang1, secrétaire général du PCC. La
troisième fois en 1983, il vient en tant que Président de la République (après être élu en
mai 1981). Comme il le dit lui-même : « Si la première fois je ne représentais que moi-
même, si la deuxième fois je représente mon Parti, cette fois-ci je représente mon pays,
mais si j’ai changé d’état, je n’ai pas changé de sentiment, je suis venu chaque fois en
ami de la Chine »2.
Par contre, par rapport à son émotion personnelle, la France et la Chine ont
traversé une période difficile, pourquoi ? Et les relations officielles entre ces deux pays
les plus tièdes coïncident-elles avec cette époque ?
Tout d’abord, un des problèmes internationaux abordé, est celui du Cambodge.
Ensuite, à partir de 1989, Paris évolua quant à sa politique chinoise à la suite des
manifestations de Tian’anmen. Enfin, le gouvernement français donna à deux reprises
son autorisation de vendre des armes françaises à Taïwan. D’après le gouvernement
chinois, ceci touche le principe de la souveraineté chinoise.
Ce refroidissement entre Beijing (Pékin) et Paris à l’époque coïncide sans doute
avec un changement du contexte international, probablement, relatif à l’évolution des
pays communistes : la chute du mur de Berlin, l’effondrement de l’URSS, le problème
intérieur de la Chine à la suite de sa politique d’ouverture dix ans auparavant, ainsi que
l’intervention américaine dans les affaires chinoises. Les relations diplomatiques sino-
françaises se déroulent avec le premier président socialiste de la Vème République
française. Dans ce chapitre, on les analyse en trois points.
1 Hu Yaobang , secrétaire général du PCC de 1980 à 1982.
2 La politique étrangère de la France du 3 mai 1983, page.6.
212
V-1 Les relations bilatérales entre 1981 et 1989
A partir des années 80, les nouvelles orientations diplomatiques chinoises ont
pour but d’accélérer l’édification d’un pays socialiste moderne, de réaliser l’unification
de la patrie et de lutter contre l’hégémonisme. Ainsi, elle traite des affaires
internationales en fonctions des intérêts na tionaux, quelle que soit l’idéologie de ses
partenaires.
Accélérer l’édification des quatre modernisations socialistes : Pour garantir et
protéger les investissements, les autorités chinoises considèrent la politique d’ouverture
comme « une politique d’Etat » et une action à long terme. La Constitution chinoise en
1982 affirme que « le gouvernement chinois permet aux investisseurs étrangers, soit des
entreprises, des organisations économiques et individuelles, d’investir et de collaborer
avec les entreprises chinoises en Chine conformément aux règles convenues. ...Leurs
droits légaux et leurs intérêts seront protégés par le gouvernement chinois. »1.
Cette politique constitue une partie importante de la diplomatie chinoise. Elle
figure dans le rapport du gouvernement chinois sur le 7ème plan quinquennal du 25 mars
19862.
L’unification de la patrie : la Chine maintient le principe « un Etat avec deux
systèmes » pour récupérer Hong Kong colonisé par les Anglais depuis 1898. Le traité
sino-britannique sur Hong Kong du 19 décembre 1984 prévoit que l’Angleterre restitue
Hong Kong à la Chine le 1er juillet 1997. D’autre tractations sont entamées avec des pays
occidentaux pour récupérer Macao qui est colonisé par le Portugal, restitué le 13 avril
1987 et rendu à la Chine le 20 décembre 1999. Ce principe est valable aussi pour
l’unification de Taïwan.
La politique extérieure chinoise est relative à cette politique intérieure.
1 La Constitution de la RPC en 1982, article 18.
2« Le rapport sur le 7
ème plan quinquennal », sur le Rapport du gouvernement chinois du 25 mars 1986.
213
A) Les relations distantes entre Beijing (Pékin) et Paris (1981-1983)
Pourquoi les rapports diplomatiques entre les deux pays se distendent- ils de 1981
à 1983 ? On peut l’expliquer par quatre motifs essentiels :
1. Le Président François Mitterrand au début, ne s’aperçoit pas de
l’importance des liens avec la Chine, bien qu’elle soit grande aux
niveaux géographique et démographique.
2. La politique extérieure du nouveau Président français est résolument
tournée vers « le Tiers monde » ; sa priorité en Asie est le Japon (du
« Deuxième monde ») et l’Inde, pas la Chine.
3. Les divergences idéologiques entre la France et la Chine ont des
conséquences sur leurs relations diplomatiques. Ce dont témoigne
l’incident qui éclate lorsqu’une Chinoise, Li Shuang, et un diplomate
français entretiennent des relations.
4. Une divergence porte sur le problème du Cambodge. La Chine
considère que c’est le Viêt-Nam qui envahit le Cambodge alors que du
côté français, on pense qu’il s’agit d’une confrontation sino-soviétique
au Cambodge.
Et parmi ces quatre points, c’est essentiellement le problème du Cambodge qui
ralentit le bon développement des relations entre la France et la Chine.
Le problème du Cambodge et les relations sino-soviétiques :
En fait, la position chinoise à propos du Cambodge est inséparable des relations
entre Beijing (Pékin) et Moscou. A partir des années quatre vingt, Moscou est déjà le
principal adversaire de Beijing (Pékin). La divergence sur le Cambodge constitue l’un
des « trois obstacles » qui nuisent à la normalisation des relations sino-soviétiques, qui
datent des années soixante :
1. Durant les années soixante, l’installation des troupes soviétiques
sur les frontières sino-mongoles.
214
2. Durant les années soixante-dix, le soutien soviétique au Viêt-Nam
en conflit contre la Chine1, ainsi que son soutien à l’intervention du
Cambodge par les Vietnamiens2.
3. L’invasion des troupes soviétiques en Afghanistan le 27 décembre
19793.
Ces trois actions soviétiques menacent sérieusement la sécurité chinoise
(du Nord, du Sud et de l’Ouest de la Chine, en devenant trois barrages à la
normalisation entre Beijing (Pékin) et Moscou.
La divergence sino-française sur le problème du Cambodge :
Pourtant, dans une telle situation délicate, une divergence entre Beijing
(Pékin) et Paris s’amorce :
- A la suite au retrait des Américains du Viêt-Nam, la France signe
en 1981 un protocole gouvernemental sur un prêt de 2 milliards de francs en
faveur du Viêt-Nam. Elle tente d’influencer les Vietnamiens
- A propos de la divergence sur la guerre du Cambodge, Claude
Cheysson4, ministre français des Relations extérieures, irrite la Chine par ses
propos tenus à Bangkok et à Hanoï les 23 et 24 mars 1983. Le Quotidien du
peuple chinois critique le 30 mars 1983 de manière détournée ces discours
sous le titre « Une thèse surprenante »5. Dès lors, les relations bilatérales sont
devenues tendues, le développement des relations sino-françaises est ainsi
ralenti.
Le problème entre Beijing (Pékin) et Hanoï :
1 La guerre sino-vietnamienne du 17 février au 16 mars 1979.
2 Le 25 décembre 1978, 10,000 soldats vietnamiens entrent au Cambodge et occupent la capitale. D’après
Beijing (Pékin), cette invasion était soutenue par l’URSS, suivi d ’un traité d’amit ié et de coopération
soviéto-vietnamienne le 3 novembre 1978. 3 Le gouvernement chinois accuse l’URSS, en référence au Quotidien du people, les 30 et 31 décembre 979
et la déclaration chinoise à l’ONU le 5 janvier 1980. 4 Claude Cheysson, ministre des Relations extérieures (min istre des Affaires étrangères) de la France de
1981 à 1984. 5 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 30 mars 1983.
215
Pendant la guerre d’Indochine, la paix régnait tout au long des frontières sino-
vietnamiennes. Après le retrait des Américains du Viêt-Nam du Sud en 1973, le problème
frontalier se commence à apparaître : il y a 121 conflits concernés en 1974, 439 en 1975,
jusqu’à 986 en 1976. Ces provocations étaient relatives aux relations sino-soviétiques.
De ce fait, à partir de 1978, l’URSS commence les démonstrations de force vis-à-
vis de la Chine. Hanoï s’éloigne aussi de la Chine après la réunification du Viêt-Nam, et
se rapproche de Moscou, parce que seul Moscou est susceptible lui donner l’aide
financière nécessaire à la poursuite de la guerre. Hanoï commence à défier Beijing (Pékin)
pour plaire à Moscou.
Les Vietnamiens se montrent d’abord hostiles à l’égard de la Chine : une centaine
de milliers de Vietnamiens d’origine chinoise voient leurs biens saisis et sont expulsés du
Viêt-Nam1. Les divergences sur l’île Paracel sont de plus en plus visibles2 ; les conflits
aux frontières s’intensifient. Le 16 juin 1978, la Chine exige la fermeture des trois
consulats vietnamiens de Guangzhou (Canton), Nanning et Kunming 3. Elle met
totalement fin le 3 juillet à son aide économique et technique au Viêt-Nam4.
Le Viêt-Nam est entré dans le CAEM le 29 juin 1978. Cette adhésion entraîne que
le développement économique de Hanoï est soutenu par les pays du CAEM, mais le point
crucial était, bien évidemment, que cette décision arrimait plus étroitement que jamais le
Viêt-Nam, pays asiatique, à l’URSS et entamais d’autant le prestige régional de la Chine,
tout en complétant son encerclement. Pour Moscou, le gain était tout à la fois
économique, politique et stratégique.
La Chine et le Japon signent alors le traité de pais et d’amitié le 12 août 1978.
D’après Deng Xiaoping, l’anti-hégémonisme constitue le noyau du traité de paix et
d’amitié sino-japonais. Le 3 novembre 1978, l’URSS et le Viêt-Nam signent à Moscou
1 La déclaration du ministère des Affaires étrangères de la Chine à propos des Vietnamiens d’origine
chinoise le 9 ju in 1978. 2 La déclaration du ministère des Affaires étrangères de la Chine à propos des Vietnamiens d’origine
chinoise le 9 ju in 1978. 3 L’annonce du gouvernement chinois à propos de la fermeture trios consulats généraux vietnamiens en
Chine du 16 ju in 1978. 4 La déclaration du gouvernement chinois au gouvernement vietnamien du 3 juillet 1978.
216
un traité d’amitié et de coopération. Dès lors, le Viêt-Nam s’appuie totalement sur
Moscou.
Beijing (Pékin) considère que ce traité apporte la preuve de l’alliance militaire
soviéto-vietnamienne1. A la suite de ce traité, le Viêt-Nam envahit le Cambodge, « Il
lance ses troupes contre le Kampuchéa démocratique soutenu par Beijing (Pékin),
renverse le régime de Pol Pot et patronne l’établissement d’une République populaire du
Kampuchéa »2.
Le 17 février 1979, la Chine déclare : « Nous n’attaquons pas à moins d’être
attaqués. Si on nous attaque, nous répondrons à toute agression. »3 Les troupes chinoises
entrent au Viêt-Nam le même jour pour donner une leçon. Elles retirent ses troupes le 5
mars 1979.
A l’époque de Brejnev :
La « doctrine Brejnev », d’après les dirigeants chinois, use du Pacte de Varsovie
et du Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM), pour organiser des alliances
anti-chinoises et aussi pour étendre leur influence dans le Tiers monde. La détente de
Brejnev accompagne l’agression, surtout dans le Tiers monde. La preuve : les signatures
des traités à caractère militaire avec 12 Etats, y compris l’Inde, l’Angola et Cuba ; et
l’existence d’une quarantaine de bases militaires soviétiques dans le monde.
A l’époque de Mikhaïl Gorbatchev :
Après la mort de Brejnev, les relations entre Beijing (Pékin) et Moscou
s’améliorent de façon superficielle, ne règlent pas le problème essentiel. Deng Xiaoping
trouve que l’invasion vietnamienne au Cambodge constitue le principal obstacle entre
Beijing (Pékin) et Moscou. Il déclare aux journalistes de la télévision américaine le 2
septembre 1986 : « Si l’URSS n’aide pas le Viêt-Nam, il arrêtera la guerre avec le
1 Zhou Jianqing , Zhang Xichang , Les Relations extérieures de la France après la deuxième
guerre mondiale » ( zhanhou faguo waijiaoshi), Beijing, Edit ions Connaissances
universelles ( shijie zh ishi chubanshe) ; 1993, page.532. 2 Marie-Claire Bergère, La République populaire de Chine de 1949 à nos jours, Paris, Armand Colin, 1989,
page.243. 3 La déclaration de l’Agence Chine nouvelle du 17 février 1979.
217
Cambodge. Si le Viêt-Nam retire ses troupes du Cambodge, le problème se résoudra par
lui-même. ». Et Deng Xiaoping ajoute : « Si on peut lever cet obstacle, je veux bien
rencontrer exceptionnellement Mikhaïl Gorbatchev n’importe où en URSS. Je suis sûr
que notre rencontre sera favorable à la normalisation sino-soviétique »1. Pourtant,
Gorbatchev ne réagit pas à cette question.
Trois problèmes résolus : Après 12 sessions de négociations sino-soviétiques
entre 1982 et 1989, la nouvelle politique extérieure de Mikhaïl Gorbatchev aboutit à la
normalisation de leurs relations, en résolvant trois difficultés : le retrait des troupes
soviétiques de la Mongolie2, de l’Afghanistan et du Viêt-Nam.
Les chercheurs français constatent que : « L’alliance soviéto-vietnamienne sortait
ainsi considérablement renforcées de la crise sino-vietnamienne... », « Le traité soviéto-
vietnamien du 3 novembre 1978 scellait l’échec quasi total de la politique chinoise en
Indochine depuis un quart de siècle... ». « De toute évidence, le traité soviéto-vietnamien
du 3 novembre 1978 permettait au Viêt-Nam d’envisager une intervention du même type
contre ce Kampuchéa démocratique qui faisait obstruction à l’Indochine socialiste tant
souhaitée à Hanoï. »3
Jean-Luc Domenach et Philippe Richer constatent dans L’évolution des rapports
franco-chinois de 1964 à 1988 que :
Concernant l’époque de Gaulle « Il n’a pas suffi de la reconnaissance du régime
communiste par le général de Gaulle ni, quelques mois plus tard, d’une convergence de
points de vue sur le conflit vietnamien pour que la voie s’ouvrit à une large coopération.
La révolution culturelle n’épargne pas les Français, avant que Beijing (Pékin) et Paris se
retrouvent pour condamner en 1968 l’invasion de la Tchécoslovaquie. »
1 Œuvres choisies de Deng Xiaoping III ( Deng Xiaoping wenxuan disanjuan), Beijing,
Ed itions du people ( Renmin chubanshe), 1993, pp.167-169. 2 L’URSS déclare qu’il est prêt du retrait de ses troupes de l’Afghanistan en avril 1988 à Genève, ensuite
Gorbatchev déclare, le 7 décembre 1988 à l’ONU, son retrait de la Mongolie et la déclaration du retrait
vietnamien du Cambodge le 6 janvier 1989. 3 François Joyaux, La nouvelle question d’Extrême-Orient 2, Paris, 1988, pp.381-383.
218
Ils ajoutent : « Tout en approuvant certaines initiatives françaises en Afrique
(Zaïre), au Moyen-Orient et en Amérique latine (au début du septennat de François
Mitterrand), Beijing (Pékin) s’irrite franchement des réserves françaises lors de se
concilier l’Union soviétique, que semblent traduire certaines démarches françaises après
l’invasion de l’Afghanistan, et s’interroge enfin sur la sollicitude portée par Paris à la
question polonaise. Et, pour tout aggraver, la France paraît accorder progressivement en
Asie une priorité à ses rapports avec l’Inde et le Japon ! Le malaise éclate avec la reprise
de l’aide économique française au Viêt-Nam (avril 1982). Pour Beijing (Pékin), une telle
décision fait le jeu de ses adversaires vietnamien et soviétique. »1
B) Un renouveau à la suite du voyage du Président Mitterrand en Chine en 1983
Les relations franco-chinoises s’améliorent à la suite de la visite du Président
François Mitterrand en Chine en 1983. L’amitié retrouvée accélère les relations
bilatérales et débloque la situation du problème au Cambodge.
Pour aplanir le désaccord à propos du Cambodge, le Président François
Mitterrand condamne l’agression du Viêt-Nam au Cambodge, en soulignant : « Il faut
que ce soit clair, nous ne changeons pas de langage avec les circonstances. La France a
condamné l’agression dont a été victime le Cambodge et condamne l’occupation de ce
pays. Elle ne reconnaîtra ni aujourd’hui, ni demain, le pouvoir installé à Phnom Penh. »2
Cela explique que la divergence à propos du problème du Cambodge ne porte que sur des
points de détail mais pas sur l’essentiel entre Paris et Beijing (Pékin).
Cette rencontre est le point de départ d’une nouvelle collaboration entre les deux
pays. La France considère la Chine comme une force d’équilibre dans le monde et d’autre
part, elle désire développer ses relations économiques. Le Président Mitterrand affirme :
« La Chine occupe une place parmi les toutes premières au sein de la communauté
1 Jean-Luc Domenach, Ph ilippe Richer, La Chine, II, Paris, Edit ions du Seuil, 1995, pp.504 -505.
2 La politique étrangère de la France du 3 mai 1983, page.7.
219
internationale, elle s’est engagée dans une immense entreprise de modernisation et de
développement, elle poursuit une réforme économique très courageuse qui lui permettra
de mieux mobiliser les ressources extrêmes de travail, de courage et d’intelligence de son
peuple. »1 Les relations entre la Chine et la France se sont resserrées.
Ces bonnes relations sont marquées d’abord par les rencontres des dirigeants et
les signatures d’accord économiques. La visite du Premier ministre chinois Zhao Ziyang
en France en juin 1984 donne une nouvelle impulsion à la coopération dans les domaines
de l’énergie, des télécommunications, de l’informatique, des transports, du sport, etc.
Deux accords sont signés : accords sur l’encouragement et sur la protection réciproques
des investissements. Ces deux accords accélèrent et protègent le développement des
relations économiques entre les deux pays.
Deux ans après, un événement spectaculaire illustre cette accélération : pour la
première fois dans l’histoire des relations franco-chinoises, le secrétaire général du PCC
Hu Yaobang se rend visite en France du 16 au 19 juin 1986. Il est reçu particulièrement
par le Président François Mitterrand, le Premier ministre Jacques Chirac, ainsi que par le
Président de l’Assemblée nationale Jacques Chaban-Delmas, pour un large échange de
vues sur la situation internationale et sur la coopération économique bilatérale.
L’année suivante, le Président de la République chinoise Li Xiannian fait un
voyage officiel en France du 9 au 13 novembre 1987. C’est aussi la première fois qu’un
chef d’Etat chinois séjourne en France depuis l’établissement des relations diplomatiques
en 1964. Bien entendu, il rencontre le Président François Mitterrand. Les deux Présidents
s’accordent sur la nécessité de renforcer les relations économiques et commerciales, entre
les deux pays. Un important protocole est signé, il s’agit du « protocole financier franco-
chinois pour 1987 », qui se monte à 747 millions de francs, dont 6,4 millions qui
devraient être en grande partie affectés aux constructions d’une centrale thermique et du
métro de Shanghai.
1 La politique étrangère de la France du 3 mai 1983, page.7.
220
Deux mois après, Pierre Méhaignerie, ministre de l’Equipement, du Logement, de
l’Aménagement du territoire et des Transports, se rend en Chine accompagné d’une
importante délégation d’industriels français, à l’invitation du ministre de l’Urbanisme
chinois pour le projet de la construction du métro. Si la politique d’ouverture chinoise
s’engage profondément vers les quatre modernisations, le ministre français souhaite que
« les relations économiques soient un peu plus à la hauteur des relations politiques »1.
C) Le développement économique bilatéral (1983-1989)
Les deux pays accordent un grand intérêt à l’économie, ce qui se traduit par les
accords signés successivement entre les deux gouvernements :
1) L’accord du 27 septembre 1983 :
Le premier est l’accord de coopération dans le domaine ferroviaire signé
le 27 septembre 1983. Cet accord se réfère à l’accord intergouvernemental
scientifique et technique du 21 janvier 1978 et à l’accord intergouvernemental à
long terme sur le développement des relations économiques et sur la coopération
du 4 décembre 1978. Cet accord entre en vigueur le jour de signature pour une
période de cinq ans et pourra être modifié ou renouvelé d’un commun accord.
2) Les seconds accords du 30 mai 1984 :
L’année suivante, le 30 mai 1984, les deux pays signent « un accord vue
d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière
d’impôts sur le revenu ». Sont convenus en 29 dispositions et son rectificatif au
Journal officiel de la République française du 28 février 1985, ajoutant les articles
26. Diplomates et 27. Champ d’application territorial.
3) Le même jour, le 30 mai 1984, est signé « un accord sur
l’encouragement et la protection réciproque désinvestissements » pour développer
la coopération économique entre les deux pays et à cette fin créer des conditions
1 Le Monde, le 8 mars 1988.
221
favorables. Sont convenus en 12 articles et une annexe. Les deux accords
encourageront et protègeront les investissements des Chinois en France et des
Français en Chine, accélérant les échanges économiques entre les deux pays.
4) L’accord du 16 avril 1985 :
Le 16 avril 1985, « un accord à long terme sur le développement des
relations économiques et la coopération entre la France et la Chine » est signé, en
vue de renforcer les liens traditionnel d’amitié unissant leurs peuples et de
l’avantage réciproque dans leurs relations économiques ; compte tenu des
possibilités que recèle une coopération économique à long terme entre les deux
pays. Cette coopération est très étendue, elle concerne surtout la production
d’électricité de diverses origines. Cet accord comprend des dispositions en 12
articles.
5) Les accords du 4 mai 1985 :
Premièrement, un « accord de coopération pour les voies navigables » et
un « accord de coopération dans le domaine des routes » sont signés. Ces deux
accords font référence à l’accord intergouvernemental scientifique et technique du
21 janvier 1978 et à celui à long terme sur le développement des relations
économiques et de la coopération du 16 avril 1985. La coopération bilatérale
pourra s’étendre dans les domaines suivants : l’aménagement de la voie navigable
et les ouvrages du franchissement de seuils fluviaux ; la construction de ports
fluviaux ainsi que la navigation ; les télécommunications et les systèmes d’aide à
la navigation ; l’étude, la conception et la construction des bateaux de navigation
intérieure, la gestion et l’entretien de la flotte ; l’organisation du contrôle de la
sécurité de la navigation fluviale.
Deuxièmement, un accord de coopération dans le domaine des routes est
signé. Il se réfère également à l’accord intergouvernemental scientifique et
technique du 21 janvier 1978 et à celui à long terme sur le développement des
relations économiques et de la coopération du 16 avril 1985.
222
Troisièmement, un « accord sur l’entraide judiciaire en matière civile et
commerciale » est signé dans le but de promouvoir, sur le fondement du respect
mutuel de la souveraineté nationale ainsi que de l’égalité et des intérêts
réciproques, une coopération dans le domaine judiciaire entre les deux pays. Sont
convenus six chapitres et 31 articles par rapport : aux dispositions générales, à la
transmission et remise des actes judiciaires et extrajudiciaires, à des commissions
rogatoires, à la reconnaissance et l’exécution des décisions judicaires et des
sentences arbitrales : aux dispositions diverses ; et aux dispositions finales.
6) Les accords et la coopération signés montrent que les
collaborations économiques entre les deux pays portent sur tous les secteurs et
que « les échanges économiques sont doublé depuis cinq ans » grâce à leurs
bonnes relations politiques.
Les échanges commerciaux entre la France et la Chine de 1984 à 19891 :
Unité : millions de francs
Année Exportation
France-Chine
Importation
Chine-France
Volume
Des échanges
Balance
commerciale
1984 2692 3849 6541 -1157
1985 6984 4453 11437 +2531
1986 4597 4890 9487 -293
1987 4597 4890 9487 -293
1988 5500 8500 14000 -3000
1989 9887 11017 20904 -1130
1 Journal officiel de la République française du 17 octobre 1995, n°7, page.159.
223
V-2 Divergences entre Beijing (Pékin) et Paris
Les divergences sont nées de deux incidents marquant les relations diplomatiques
franco-chinoise : les manifestations de la place Tian’anmen en 1989 et les ventes d’armes
françaises à Taïwan entre 1991 et 1992. Ces deux affaires sont considérées par les
autorités chinoises comme une ingérence dans les affaires intérieures pour la première, et
une atteinte à leur souveraineté d’Etat pour la deuxième.
Une partie de l’opinion internationale n’est pas favorable au gouvernement
chinois, en particulier les Etats-Unis, Le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Japon, l’Italie et
le Canada, qui trouvent que ces événements constituent une atteinte aux droits de
l’homme. Les Etats-Unis « sanctionnent » la Chine en premier : c’est ensuite au tour des
pays de la CEE, puis du Japon. Il s’agit dans un premier temps de déclarations hostiles,
puis la prise de sanctions économiques. Les relations sino-françaises, comme celles entre
la RPC et les autres pays occidentaux, entrent dans une époque froide.
A) Premier refroidissement : affaire de Tian’anmen de 1989
En décembre 1978, la troisième session plénière du Comité central issu du XIème
Congrès du PCC marque un tournant important pour Deng Xiaoping, ainsi pour la Chine.
Deng Xiaoping réoriente rapidement l’axe politique du PCC vers les « Quatre
Modernisations socialistes »1. C’est un grand changement de la situation dans l’histoire
du PCC depuis la fondation de la République populaire de Chine. Un nouveau mot
d’ordre est lancé à la suite de la lutte de classes : « les quatre modernisations ».
En septembre 1982, le XIIème Congrès du PCC définit l’objectif stratégique et les
mesures nécessaires. Il s’agit de quadrupler la va leur de la production annuelle de
l’industrie et de l’agriculture d’ici à la fin du vingtième siècle. La politique d’ouverture
1 « Quatre modernisations socialistes ( Sige xiandaihua) » sont l'objectif des réformes de Deng
Xiaoping, couvrant quatre domaines principaux : agriculture ; industrie ; science et technologie ; défense
nationale. Œuvres choisies de Deng Xiaoping III ( Deng Xiaoping wenxuan disanjuan),
Beijing, Edit ions du people ( Renmin chubanshe), 1993, page.386.
224
connaît un grand succès, mais dans le même temps quelques déceptions, comme la
corruption des fonctionnaires.
La tragédie de 1989 provoque le premier refroidissement dans les relations sino-
françaises.
Au printemps 1989, la Chine éprouve des difficultés dans la pratique de la
politique d’ouverture :
1) Des manifestations étudiantes se déroulent sur la place Tian’anmen, elles sont
défavorables au gouvernement et posent la question : où ira la Chine après son
ouverture ?
2) A cause du soutien apporté aux étudiants par les Hongkongais et les étrangers, la
situation devient extrêmement tendue pour le gouvernement chinois. Ces
manifestations sont ressenties comme une menace pour la stabilité du pouvoir et
le projet des quatre modernisations du gouvernement.
Quant à Deng Xiaoping, il affirme que les événements appartiennent aux
affaires intérieures chinoises et décide de les réprimer.
Suite à la répression de l’armée chinoise, la communauté internationale est
choquée. Les condamnations fusent de Paris et des autres pays occidentaux :
Tout d’abord, le gouvernement français gèle les relations gouvernementales à
tous les niveaux comme l’affirme le Premier ministre Michel Rocard dans la
déclaration du 6 juin 1989 :
« Il est clair que nous entendons geler dès maintenant les relations à tous les
niveaux avec la République populaire de Chine »1.
L’Hôtel Matignon fait savoir dans la soirée du même jour que le gel ne touche
que les relations politiques et diplomatiques :
« Il n’y a plus aucun contact entre le Président de la République, le Premier
ministre et les membres du gouvernement avec les dirigeants chinois. Si les membres
de la CEE adoptent une position commune, la France pourrait l’adopter. »
1 Le Monde, le 8 ju in 1989, page.3.
225
Le lendemain, le 7 juin, le ministre des Relations extérieures Roland Dumas
précise que la décision française est de geler ses relations avec Beijing (Pékin) à
« tous les niveaux » et « d’abord à tout ce qui concerne la coopération militaire ».
Le même jour, les Douze1 font une déclaration commune :
« Les Douze condamne fermement la violence répression exercée contre des
manifestants pacifiques, qui a causé des pertes importantes en vies humaine »2. Ils
appellent les dirigeants chinois à rechercher une solution pacifique. La CEE a déjà
pris certaines mesures, y compris la suspension des contrats de haut niveau
technologique et continueront à suivre l’évolution en Chine.
Le 21 juin 1989, le Président Mitterrand fait une déclaration au nom du peuple
français, sur la situation en Chine. Il condamne l’exécution des manifestants par le
gouvernement chinois à qui il demande d’être compréhensif envers les étudiants.
Le 6 juillet 1989, l’ambassadeur de France auprès de l’ONU réaffirme la
position française : « la consternation dans laquelle nous a plongé la répression
brutale qui s’exerce en Chine ».3
Les sanctions économiques suivent la déclaration du Premier ministre français.
Le ministre de l’Economie et des Finances annonce le « gel d’un prêt public de 830
millions francs à la Chine le 16 juillet 1989 ».4 Il précise que l’octroi de ce prêt ne
relève que la mise en œuvre technique d’un accord compris dans le traditionnel
protocole de printemps, signé fin mai, donc avant les événements.
En fait, la France ne gèle que les nouveaux projets. Les crédits pour les
opérations en cours ne sont pas concernés.
1 Les douze pays de la Communauté Economique Européenne (CEE).
2 La politique étrangère de la France du 7 juin 1989.
3 Le Monde, le 7 ju illet 1989, page.7.
4 Le Monde le 18 juillet 1989, page.28.
226
Dès que le gel est déclaré, les rapports diplomatiques sino-français deviennent
exécrables et atteignent leur point le plus bas depuis l’établissement des relations en
1964.
Le gouvernement chinois considère que ces événements concernent seulement
ses affaires intérieures, et les déclarations de la France et des Douze manifestent un
acte d’ingérence flagrante dans les affa ires intérieures chinoises. Le ministre des
Affaires étrangères chinois Qian Qichen exprime son regret à son homologue français
Roland Dumas à l’occasion d’une conférence internationale sur le Cambodge le 30
juillet 1989 à Paris. Il tentera de rompre le blocus diplomatique, espérant que les
relations amicales créées par le Président Mao Zedong et le général de Gaulle ne
seront jamais gâchées1. Cependant, Roland Dumas lui exprime que ce refroidissement
n’a d’autre cause que les récentes actions de Beijing (Pékin).
L’interprétation du gouvernement chinois à l’égard des affaires de
Tian’anmen :
« C’est une minorité qui profite des manifestations des étudiants à Beijing
(Pékin) et dans d’autres villes sous prétexte d’honorer la mémoire de Hu Yaobang.
Prendre des mesures répressives contre les activités de la place Tian’anmen est donc
totalement logique. 2» La quatrième session du 13ème Congrès du PCC du 23 au 24
juin 1989 affirme ainsi que les événements de Tian’anmen en juillet 1989 sont des
activités contre-révolutionnaires déclenchées pour renverser le pouvoir du PCC.
Il y a quatre raisons qui définissent des activités réactionnaires selon l’idée de
Deng Xiaoping :
1. Les manifestations aggravent et menacent la stabilité de la Chine, en
raison du soutien apporté aux étudiants par des étrangers, surtout par les
Etats-Unis, après la politique d’ouverture chinoise3. Deng Xiaoping
1 Le Monde, le 1
er août 1989, page.3.
2 Œuvres choisies de Deng Xiaoping III ( Deng Xiaoping wenxuan disanjuan), Beijing,
Ed itions du people ( Renmin chubanshe), 1993, la note n°120, page.413. 3 Œuvres choisies de Deng Xiaoping III ( Deng Xiaoping wenxuan disanjuan), Beijing,
Ed itions du people ( Renmin chubanshe), 1993, la note n°120, page.348.
227
considère que la souveraineté et la sécurité d’Etat sont prioritaires et
qu’elles assurent la concrétisation des quatre modernisations chinoises.
2. Une minorité a l’intention de renverser le régime politique actuel, la
« construction du socialisme en système capitaliste. Le mot d’ordre qu’elle
a lancé est « A bas le socialisme ! ».
3. L’évolution de l’URSS et des pays de l’Est influence la Chine. Celle-ci
va-t-elle se diriger depuis l’ouverture économique vers le capitalisme total
ou vers le socialisme aux caractéristiques chinoises ?
4. Lorsque Deng Xiaoping reçoit les cadres des armées chinoises le 9 juin
1989, il les interpelle : « Pour qui coule le sang ? Pourquoi nos soldats
sont-ils blessés ou morts ? C’est parce que notre armée ne prend pas les
mesures nécessaires pour l’empêcher, qu’une minorité prenne les armes de
nos soldats pour les tuer. Nos soldats n’ont pas tiré, nous avons gagné la
confiance du peuple. C’est notre armée populaire qui défend la stabilité de
notre pays »1.
Et d’autre part, la France et le « Groupe des Sept »2 prennent les mesures de
rétorsion contre le gouvernement chinois3, la Chine ne supporte pas ces condamnations et
proteste le 17 juillet 1989, considérant ceci comme une ingérence dans les affaires
internes chinoises qui touche la stabilité du pouvoir de l’Etat. Dans la conception des
autorités chinoise, la sécurité d’Etat est prioritaire lorsque le pays est en danger.
Le soutien apporté aux dissidents des événements de la place Tian’anmen, le
maintien de la presse en évoquant le problème des droits de l’homme, les dispositions
prises en faveur des étudiants chinois réfugiés et l’accueil du congrès fondateur de la
Fédération démocratique chinoise en France. Toute cette série d’actions du côté français
1 Œuvres choisies de Deng Xiaoping III ( Deng Xiaoping wenxuan disanjuan), Beijing, Ed itions du people ( Renmin chubanshe), 1993, la note n°120, page.303. 2 Le Groupe des Sept (G7) était un groupe de discussion et de partenariat économique de sept pays parmi les plus puissants économiquement du monde : États-Unis, Japon, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie et Canada. Il est devenu G8 en 1994 après la part icipation de la Russie. 3 Le Sommet du G7 le 15 ju illet 1989 fait une déclarat ion commune pour accuser le gouvernement chinois dans l’affaire de Tian’anmen.
228
suscite la colère de Beijing (Pékin) et provoque le début du refroidissement dans les
relations entre la Chine et la France.
Le gouvernement chinois manifeste continuellement son mécontentement auprès
du gouvernement et de la presse français. Des protestations chinoises :
- Le 7 juillet 1989, Beijing (Pékin) proteste contre l’intervention sur Antenne 2 1
et la diffusion dans la presse française d’une déclaration de deux « criminels »
Yan Jiaqi et Wuer Kaixi qui font l’objet d’un avis de recherche de la police
chinoise ;
- Le 31 juillet 1989, elle s’insurge contre des déclarations du G7 lors du
sommet de Paris à propos des événements de la place Tian’anmen ;
- Le 19 septembre 1989, le gouvernement chinois dénonce l’intervention
policière française sur les passagers chinois à la douane de l’aéroport
international de Paris ;
- Les 22 et 25 septembre 1989, Beijing (Pékin) déplore la tenue dans la capitale
française du Congrès constitutif de la Fédération démocratique chinoise (FDC)
et le soutien du gouvernement français aux activités hostiles au gouvernement
chinois qui signifient pour le celui-ci un acte d’ingérence dans les affaires
intérieures chinoises 2;
- Le 31 octobre 1989, Beijing (Pékin) proteste contre l’opération « Faxez la
liberté », qui demande à la France de mettre un terme aux activités sur son
territoire de la FDC au travers de cette opération, lancée le 26 octobre par la
FDC en collaboration avec l’hebdomadaire Actuel ;
- Le 11 avril 1990 le gouvernement chinois voit d’un mauvais œil l’accueil
d’une dissidente chinoise Chai Ling et contre le futur lancement d’un bateau
radio, etc.
Deng Xiaoping exprime sa colère au Président du Parti révolutionnaire Tanzanien
le 23 novembre 1989 : « Qui leur donne le droit de réprimer la Chine ? » Il ajoute : « La
1 Antenne 2 (France 2) est une chaine de télévision généraliste de service public.
2 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 26 septembre 1989, page.1.
229
souveraineté et la sécurité d’Etat sont prioritaires »1. Ces circonstances rappellent à Deng
Xiaoping l’époque impérialiste du début du XXème siècle, quand les occidentaux
s’allièrent pour soumettre la Chine.
A partir de janvier 1990, la détente sino- française s’amorce, les deux pays signent
un protocole de prêt d’un milliard trois cents millions de francs pour acquérir la
technologie et les équipements français. Mais cette embellie n’est pas durable.
Plus tard, le 23 janvier 1991, les protestations chinoises portent sur la visite à
Taïwan du ministre français de l’Industrie Roger Fauroux du 5 au 10 janvier 19912.
Une protestation chinoise est remise à l’ambassade de France en Chine, suite à la
visite du ministre français. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères
condamne de façon mesurée cette visite. L’Agence Chine nouvelle annonce « une
protestation officielle de Beijing (Pékin) du 23 janvier contre le caractère ‘absolument
inacceptable’ de la visite à Taïwan du ministre français Roger Fauroux au début de cette
année. »3 Le gouvernement chinois quant à lui, condamne une « erreur » de la part du
gouvernement français, qui va à l’encontre des principes de l’amitié franco-chinoise de
1964 et des engagements de la France à ne reconnaître qu’une seule Chine.
En guise de réconciliation, le ministre français Jean-Marie Rausch se rend à
Beijing (Pékin), à l’invitation du ministère du Commerce économique chinois, avec un
groupe commercial du 28 janvier au 1er février 1991. Cette visite scelle la reprise pleine
et entière de la coopération économique sino-française, vingt mois après le
refroidissement des relations bilatérales à cause de l’affaire de Tian’anmen de 1989. Les
deux ministres Jean-Marie Rausch4 et Li Lanqing5 discutent à Beijing (Pékin) de
collaboration dans les différents domaines.
1 Œuvres choisies de Deng Xiaoping III ( Deng Xiaoping wenxuan disanjuan), Beijing,
Ed itions du people ( Renmin chubanshe), 1993, la note n°120, pp.344-348. 2 Rogers Fauroux, minister de l’Industrie, du commerce extérieur et de l’aménagement du territo ire de la
France de 1988 à 1991. Sa visite à Taïwan du 5 au 10 janvier 1991 est la p remière v isite officielle française
à Taïwan depuis 1964. 3 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 24 janvier 1991, page.1.
4 Jean-Marie Rausch était ministre du Commerce extérieur de la France de 1988 à 1991.
5 Li Lanqing était min istre du Commerce extérieur de la RPC de 1990 à 1993.
230
Le 29 avril 1991, les deux ministres chinois et français des Affaires étrangères
signent un accord consulaire sur forme d’échange de lettre. Le gouvernement français
établit un consulat général à Guangzhou (Canton), dont la circonscription consulaire
comprendra les provinces du Guangdong, de Hainan et de Fujian. Quant à la Chine, elle
établit un nouveau consulat général dont le siège et circonscription consulaire seront
déterminés par voie diplomatique.
Et puis, un protocole financier franco-chinois de l’année 1991 est signé le 24 juin
à Beijing (Pékin). Selon cet accord, le gouvernement français fournira le crédit mixte
d’un montant de 2,141 milliards francs pour cinq projets.
Bien que les relations franco-chinoises entrent dans une nouvelle époque après le
refroidissement causé par l’affaire de Tian’anmen, les ventes d’armes françaises à
Taïwan provoquent encore une fois de plus la colère chinoises.
B) Deuxième refroidissement : les ventes d’armes françaises à Taïwan
Les relations franco-chinoises se refroidissent une fois de plus à la suite de deux
contrats de vente d’armes françaises à Taïwan :
Le premier contrat concerne la vente de 6 frégates à Taïwan en 1990, pour une
valeur de 2 milliards de dollars. L’annonce de la vente est faite le 9 janvier 1990, son
abandon date de janvier 1991, la reprise de ce contrat en août 1991 avec la Société
Thomson.
La deuxième porte sur la vente de 60 Mirages 2000-5 à Taïwan en 1992, pour une
valeur de 3,8 milliards de dollars. Il est signé le 18 novembre 1992 avec Dassault.
Ces deux ventes sont définies par les autorités chinoises comme une trahison peu
de temps après la réconciliation des événements de Tan’anmen. Beijing (Pékin) est très
attentif à tout ce qui touche à sa sécurité. Surtout ces ventes à l’île taïwanaise signifient
pour Beijing (Pékin) une intervention directe de sa politique intérieure, notamment la
signature du deuxième contrat par rapport à la vente des Mirages 2000-5.
231
Premier contrat, la vente de 6 frégates à Taïwan :
Selon le Quotidien du peuple, la Chine s’entretient avec la France de la vente de
frégates à Taïwan depuis 1989. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères
chinois déclare alors que si la France obéit aux principes de l’établissement des relations
diplomatiques entre les deux pays, elle devra abandonner ce projet, cela permettra
d’améliorer et de développer les relations franco-chinoises1. Mais, Paris et Taïwan
reprennent les négociations sur la vente d’armes françaises en signant le contrat en août
1991.
Du côté français, il ne s’agit que d’une affaire purement commerciale. C’est ce
que déclare Roland Dumas, ministre des Relations extérieures français, à travers le
communiqué du 27 septembre 1991 sur la vente de frégates sans armements : « C’est une
affaire purement commerciale qui n’implique aucune relation officielle avec les autorités
de Taïwan »2.
Pour tenir compte des préoccupations de la Chine quant à sa sécurité et l’intégrité
du territoire, Paris réaffirme son attachement aux termes de la déclaration conjointe
franco-chinoise du 27 janvier 1964 : « Le Gouvernement de la République populaire de
Chine est le seul gouvernement légal de la Chine ».
Malgré la déclaration française, dès le lendemain, le 28 septembre, l’ambassadeur
de Chine en France proteste contre la vente de frégates par le gouvernement français.
Beijing (Pékin) demande à celui-ci de respecter les principes noués, les relations
diplomatiques, les règlements internationaux, ainsi que la promesse de ne vendre aucune
arme à Taïwan, Les relations entre Paris et Taïwan doivent rester dans le cadre des
échanges commerciaux, non militaire3.
Pourtant, cette vente française n’est qu’un début. Un an plus tard, le deuxième
contrat de la vente de 60 Mirages 2000-5 au nez des Chinois. Tout cela suscite un regain
de colère de Beijing (Pékin) pour les raisons suivantes :
1 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 24 janvier 1990, page.1.
2 La politique étrangère de la France du 27 septembre 1991, page.74.
3 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 29 septembre 1991.
232
Le gouvernement français ne tient pas sa promesse de s’abstenir de vendre des
armes à Taïwan. Un deuxième contrat de la vente de 60 Mirages 2000-5 est signé le 18
novembre 1992, comme la première fois, sans écouter la protestation chinoise.
Le montant du deuxième contrat est plus important que le premier : une valeur de
3,8 milliards de dollars ; le premier contrat d’une valeur de 2 milliards de dollars.
Pour Beijing (Pékin), c’est une incursion grave dans ses affaires intérieures et une
atteinte à la souveraineté de l’Etat, car ces chasseurs français qui renforcent d’une
manière considérable les forces aériennes taïwanaises entravent la marche du « projet de
l’unification de la Chine ». Ce différend provoque une vive réaction du gouvernement
chinois à l’encontre du gouvernement français.
Le gouvernement chinois convoque le 26 novembre 1992 l’ambassadeur français
en Chine, Charles Malo1, pour protester contre la signature de ces contrats et exige son
annulation. Le gouvernement français sera entièrement tenu pour responsable des
mauvais rapports sino-français2.
Le lendemain, le porte-parole du ministère des Finances chinois déclare que ce
geste interrompt le développement des projets en discussions. Il espère que la France
annulera le plus vite possible le contrat avec Taïwan, en mettant en avant les intérêts
communs et à long terme de ses relations avec la Chine3.
Les deux Comités des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale et de la
Conférence consultative politique chinoise publient le 29 novembre les communiqués
pour protester contre l’autorisation de vente de Mirages à Taïwan. Ces communiqués
réaffirment que celle-ci touche gravement la politique intérieure chinoise et compromet
son projet d’unification avec l’île taïwanaise, en menaçant la sécurité de la Chine
continentale. Ils regrettent la décision du gouvernement français qui abandonne l’esprit
des relations diplomatiques qui étaient les siens depuis 1964, en demandant aussi au
gouvernement français d’annuler ce contrat4.
1 Charles Malo était ambassadeur de France en Chine de 1982 à 1986 et de 1989 à 1990.
2 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 27 novembre 1992, page.1.
3 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 27 novembre 1992, page.1.
4 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 27 novembre 1992, page.4.
233
Malgré les protestations du côté chinois, ce contrat n’a pas été annulé. Beijing
(Pékin) trouve que la France ne respecte pas non plus sa promesse de l’année 1994 de
« ne pas autoriser la vente à Taïwan des frégates, selon les principes de l’établissement
des relations diplomatiques entre les deux pays ».
Le Monde écrit le 9 janvier 1993 que le porte-parole du ministère des Affaires
étrangères a semblé durcir le ton, déclarant que le geste de la France avait gravement
érodé la base des rapports d’amitié entre les deux pays et qu’elle ne était entièrement
responsable.
Le Quotidien du peuple fait état des regrets du président de la Commission mixte
France-Chine, David Levitte à propos de la vente des Mirages à Taïwan : « Il a écrit au
secrétaire du président de la Commission mixte France-Chine pour faire savoir que le
geste français allait interrompre les échanges entre les deux pays ». Il souligne aussi que
« de nombreuses entreprises françaises, sans relations avec ce contrat militaire, ont fait
des efforts pour l’empêcher, en espérant garder et développer de bonnes collaborations
avec la Chine »1.
Le Cahier de l’Institut diplomatique de Chine critique le gouvernement
« Mitterrand » qui ne tient compte que des intérêts immédiats, mettant à mal aux relations
sino-françaises nouées depuis longtemps, et dédaignant en outre la Chine populaire 2.
Le ministre français des Relations extérieures Roland Dumas reconnaît le 19
janvier 1990 au Grand Jury RTL – Le Monde3 que la fourniture d’avions de chasse à
Taipei puisse ne pas être « une décision de caractère strictement commercial »,
puisqu’elle « va nécessairement affecte l’équilibre des forces dans le détroit de Taïwan ».
Cependant, d’après lui, « cette décision ne devrait pas compromettre les bonnes relations
avec la Chine de Beijing (Pékin). La France n’a qu’une seule politique à l’égard de la
Chine, et de la seule Chine, celle de Beijing (Pékin) ». Il a toutefois rappelé que la France
1 David Lev itte parle devant les journalistes chinois, vu le Quotidien du people du 13 janvier 1993, page.6.
2 Cahiers de l'Institut diplomatique de Chine( Waijiaoxueyuan xuebao), Beijing, 1994, n°7-8.
3 Le Grand Jury RTL-Le Monde est une émission audiovisuelle consacrée à la politique française créée
en octobre 1980 par une coopération entre la station de radio RTL et le journal Le Monde.
234
« n’admettait pas d’être » différenciée « par rapport à d’autres pays qui fournissent de
l’armement à Taïwan, je pense aux Etats-Unis », que Beijing (Pékin) ménage1.
C) La souveraineté nationale et la vente d’armes à Taïwan
Pourquoi les ventes d’armes françaises à Taïwan touchent-elles la politique
intérieure chinoise ? Il y a quatre raisons invoquées par le gouvernement chinois :
La France est un Etat souverain, elle peut vendre ses armes à un autre Etat
souverain selon les règlements internationaux. Mais Taïwan est une partie intégrante de
la Chine et non un Etat souverain. En outre, les relations diplomatiques franco-chinoises
sont établies sur le principe d’une seule Chine, c’est la raison pour laquelle la France ne
peut pas vendre des armes à Taïwan.
Si ce geste ne menace pas directement les forces militaires chinoises, il entrave
toutefois l’unification avec l’île taïwanaise. Fournir à Taïwan des armes, cela donne un
signe favorable à « son indépendance » et « sa diplomatie souple». Ces deux points
entravent l’unification de la Chine.
Pourquoi les Etats-Unis n’ont- ils pas subi de telles représailles alors qu’ils
vendent eux aussi des armes à Taïwan ? Pourquoi cette différence dans le traitement ? La
réponse chinoise est : il y a trois communiqués conjoints sino-américains parmi lesquels
celui du « 17 août 1982 » marque : « les Etats-Unis promettant la vente des armes à
Taïwan, en quantité limitée et sa qualité ne peut pas dépasser le niveau précédent jusqu’à
l’arrêt total ». Devant le fait que les Etats-Unis ont décidé de vendre 150 F-16 à Taïwan,
Beijing (Pékin) proteste aussi et continue à parlementer avec Washington2. Pourtant, le
Président Jiang Zemin a répondu aux questions du journaliste du Figaro le 10 septembre
1994 pendant sa visite en France. Cette clause n’existe pas dans les relations franco-
chinoises, la France n’a donc aucune raison de vendre ses armes à Taïwan.
1 Le Monde, le 12 janvier 1993, page.3.
2 Le Quotidien du people ( Renmin ribao haiwaiban), Ed ition d'autres mers, le 12
septembre 1992, page. 3.
235
L’action du côté français remet en cause l’amitié franco-chinoise et rend la
situation très tendue ; la Chine déclare que la France doit prendre ses responsabilités.
A cause des ventes d’armes françaises à Taïwan, le vice-ministre des Affaires
étrangères chinois Jiang Enzhu1 convoque l’ambassadeur français Charles Malo le 23
décembre 1992, pour lui annoncer la fermeture du consulat général de France à
Guangzhou (Canton) d’ici un mois.
Jiang Enzhu donne les raison de la fermeture du Consulat français: « le
gouvernement français a permis la vente des Mirages 2000-5 à Taïwan sans prendre en
compte les protestations chinoises. Cela constitue une menace sur la souveraineté et une
intervention dans les affaires de la Chine. La France nuit à l’unification chinoise,
détériore ainsi les relations bilatérales. Dans ces conditions, la partie chinoise fait fermer
le Consulat général de France à Guangzhou (Canton). » Car « la partie chinoise
considère qu’il ne convient pas que la France continue de maintenir le Consul général à
Guangzhou dans ce cas- là.»2
L’établissement du consulat général à Guangzhou (Canton) est né de l’accord
signé à Beijing (Pékin) le 29 avril 1991 par les deux ministres des Affaires étrangères,
Roland Dumas et Qian Qichen3. La Chine possède un seul consulat général en France à
Marseille, et la France possède deux consulats généraux en Chine : l’un à Shanghai et
l’autre à Guangzhou (Canton).
Le consulat général français à Guangzhou est fermé le 22 janvier 1993, le Monde
confirme que le consul général Paul Jean Ortiz quitte le jour même Guangzhou après une
mission de quatorze mois4.
Le 23 mars 1993, Qian Qichen, ministre des Affaires étrangères chinois, déclare
au cours d’une conférence de presse à Beijing (Pékin) à propos de l’autorisation du
gouvernement français de vente des armements à Taïwan : « La Chine espère qu’un
gouvernement de droite rectifiera les décisions erronées du cabinet Bérégovoy », faisant
1 Jiang Enzhu , v ice-ministre des Affaires étrangères de la RPC de 1991 à 1995.
2 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 24 décembre 1992, page. 1.
3 Cet accord est publié dans le Journal official de la République française du 9 octobre 1991, page.13196.
4 Le Monde, le 22 janvier 1993, page.1.
236
implicitement référence à la vente d’avions de combat français à Taïwan, et il souhaite
que « ce gouvernement travaille pour le renforcement des relations sino-françaises »1.
De plus, les coopérations économiques avec la France seront arrêtées, c’est le cas
du projet de l’Airbus, de l’achat du blé de France, des métros de Shanghai et de
Guangzhou (Canton), de la deuxième tranche de la centrale nucléaire Daya Bay, etc...
Soit une valeur équivalente de 60 Mirages 2000-5 (3,8 milliards de dollars)2. D’après
Beijing (Pékin), ce sont des mesures nécessaires, mais pour Paris, il s’agit des représailles.
La France, deuxième partenaire européen de la Chine est devenu quatrième à cause de ce
conflit.
En février 1998, la France découvrira que l’ancien ministre des Relations
extérieures Roland Dumas est impliqué dans une affaire de pots de vin ainsi que des
officiers Taïwanais de haut rang et un membre du bureau du parti communiste chinois.
Ce scandale politico-financier donne à réfléchir.
Pourquoi le gouvernement français continue à autoriser la vente d’armes à Taïwan
malgré les protestations du gouvernement chinois ? Les points suivants tenteront
d’expliquer les conséquences de ces actes :
La vente d’armes de la Société Marcel Dassault est au point mort car aucun
Mirage 2000 n’est vendu ces dernières années.
Le gouvernement français apprécie mal la position de la RPC, à cause de la
disparition de l’URSS et la défaite du communisme de l’Europe de l’Est. Il n’est pas
conscient de l’importance des relations franco-chinoises dans le nouvel ordre
international. En revanche, le général de Gaulle a reconnu en 1964 la RPC avec une
vision prévoyante, même dans l’extrême tension entre Beijing (Pékin) et les deux
superpuissances. D’après lui, les relations franco-chinoises sont importantes non
seulement dans les affaires asiatiques, mais aussi dans les affaires mondiales. Mais cette
idée n’est pas suivie par ses successeurs.
1 Le Monde, le 26 mars 1993, page.26.
2 Cahiers de l'Institut diplomatique de Chine( Waijiaoxueyuan xuebao), Beijing, 1994, n° 7-
8.
237
Le gouvernement français, profitant de l’évolution des pays communistes en
Europe, développe les relations avec Taïwan par la vente d’armes, permettant
d’influencer Beijing (Pékin) dans un certain sens. C’est aussi la tendance des pays
occidentaux face à Beijing (Pékin). Après l’affaire de Tian’anmen en 1989, la question
des « droits de l’Homme » en Chine est soulevée pour la première fois à l’ONU. Dès lors,
cette question sera répétée pendant six ans, dont trois fois par la France. Ensuite cette
question sera reprise par le Tibet.
Une autre divergence surgit à propos du dalaï- lama :
Le gouvernement chinois considère que le problème du dalaï- lama est également
un problème de politique intérieure chinoise. Pour Beijing (Pékin), le Tibet est une région
autonome de la RPC depuis 1951, et le dalaï- lama n’est que chef religieux du Tibet, non
son gouverneur1. Mais selon la Chine, il s’est engagé dans des activités visant à diviser le
pays et à saboter l’unité nationale de la Chine depuis son refuge à l’étranger. Le dalaï-
lama porte ainsi la question du Tibet au niveau international.
Des hautes personnalités françaises sont allées jusqu’à recevoir le dalaï- lama en
France à plusieurs reprises : Mme Danielle Mitterrand en avril 1991 ; Roland Dumas,
ministre des Relations extérieures et le Président François Mitterrand le 16 novembre
1993. Ces actes touchent « les affaires intérieures chinoises », sous les yeux des
dirigeants chinois, et constituent une ingérence. Le gouvernement chinois proteste donc
chaque fois contre la réception du dalaï- lama en France par les hautes personnalités
françaises.
Le ministre des Affaires étrangères chinois exprime ses regrets par voie
diplomatique et dans la presse : « Le Tibet est une partie de la Chine et que l’on ne
s’ingère pas dans les affaires chinoises. »2 Le lendemain, Zhou Jue, ambassadeur de
Chine en France, tient une conférence de presse à Paris, pour s’élever contre la demande
du dalaï- lama relative à une mission d’enquête internationale au Tibet, et regrette
l’attitude française.
1 Le développement de la cu lture tibétaine, Office d’informat ion du Conseil des Affaires d’Etat de la ROC,
Beijing, Edit ions Etoiles, 2000, page.34. 2 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 26 avril 1989.
238
Lors de la visite du dalaï- lama à Paris, l’ambassadeur chinois intervient
fermement plusieurs fois auprès de la France pour marquer le désaccord de son
gouvernement. La rencontre avec Mme. Danielle Mitterrand et la demande d’une mission
d’enquête internationale au Tibet irritent profondément le gouvernement chinois : « Nous
espérons que dorénavant la France fera preuve de plus de prudence dans ce qu’elle fait et
que ses gestes et les actes inamicaux ne se renouvelleront plus. »1
En 1993, le changement de gouvernement français donne une occasion de
réorienter la politique française vers la Chine. Jacques Chirac, gaulliste, maire de Paris et
ex-Premier ministre, et Giscard d’Estaing ex-Président de la République, manifestent une
forte volonté de réconcilier Paris et Beijing (Pékin), le Président François Mitterrand
reste sur ses positions.
1 Le discours de l’ambassadeur chinois à la conférence de presse le 25 avril 1989.
239
V-3 Réconciliation des deux gouvernements (1993-1994)
L’entente nouvelle est obtenue grâce aux efforts du nouveau gouvernement
français, celui d’Edouard Balladur1.
Après la nomination d’un nouvel ambassadeur, François Plaisant, et les missions
de Jacques Friedmann, Alain Peyrefitte et Claude Chayet pour une normalisation des
relations franco-chinoises par un échange de lettres en janvier 1994, à l’occasion du 30e
anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques, en avril 1994, quand le
Premier ministre Edouard Balladur se rend en visite officielle en Chine, tout cela permet
la reprise des relations économiques et politiques, avec la visite en France de Jiang Zemin
en septembre et celle de Li Peng en avril 1996.2
Deux problèmes essentiels entre Beijing (Pékin) et Paris seront examinés :
-La vente d’armes françaises à Taïwan :
Edouard Balladur tient compte du délicat problème de Taïwan cher à l’Etat
chinois. Les deux gouvernements publient un communiqué commun le 12 janvier 1994. Il
confirme que le gouvernement français reconnaît le gouvernement chinois comme
l’unique gouvernement légal de la Chine et, Taïwan comme une parte intégrale du
territoire chinois.
-Le regard français des droits de l’homme en Chine :
Edouard Balladur considère que bien que la France soit la patrie des droits de
l’homme, elle doit tenir compte des traditions et du rythme d’évolution vers la démocratie
propre à chacun.
Dans ce contexte, les deux pays tournent la page et reprennent les coopérations
économiques. C’est aussi au cours de l’année 1994 qu’est lancée « l’Initiative française
pour l’Asie » par le ministre du Commerce extérieur, Gérard Longuet. Avec l’ouverture
de plusieurs postes d’expansion économique (Fidji, Cambodge, Taïwan), la présence de
1 Edouard Balladur était Premier ministre de la France de 1993 à 1995.
2 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.479.
240
la France dans l’Asie-Pacifique s’améliore donc au début des années 1990, et la balance
commerciale de la France avec ces pays est de plus en plus équilibrée. 1
A) Deux missions de Jacques Friedmann2 en Chine
La réconciliation entre les gouvernements français et chinois avait commencé en
mai 1993 avec le voyage de Valéry Giscard d’Estaing, président de la commission des
Affaires étrangères de l’Assemblée nationale et ex-Président de la République qui avait
réchauffé les relations avec la Chine. Il y eut ensuite deux missions gouvernementales
françaises en Chine en juillet 1993 et en décembre 1994.
La mission de Jacques Friedmann du 9 au 14 juillet 1993 :
Une délégation gouvernementale, conduite par Jacques Friedmann, conseiller du
Premier ministre et ancien patron d’Air France, Jean-David Levitte3, directeur du
département d’Asie au Quai d’Orsay et un responsable du ministère de la Défense, arrive
le 9 juillet à Beijing (Pékin) pour but de renouer des relations bilatérales détériorées à la
suite de la vente d’armements français à Taïwan. Jacques Friedmann rencontre le 10
juillet le vice-Premier ministre Zhu Rongji4, auquel il remet une lettre du Premier
ministre français Edouard Balladur adressée à son homologue chinois Li Peng. Il justifie
les ventes d’armements à Taïwan, examine ce qu’il est possible de faire afin d’améliorer
relations bilatérales et promet que « Paris respectera la doctrine établie par le général de
Gaulle dans les rapports avec la Chine ».
Du côté chinois, Zhu Rongji souligne l’espoir que le présent gouvernement
français adopte des mesures concrètes en vue de ramener les relations dans le droit
chemin des principes ayant présidé à l’établissement des relations diplomatiques entre
Paris et Beijing (Pékin) en 1964.
1 Maurice Vaïsse : LA PUISSANCE OU L’INFLUENCE, Fayard, 2009, page.479.
2 Jacques Friedmann était conseiller d’économie et des finances du Premier ministre français de 1993 à
1995. 3 Jean-David Lev itte était directeur du département d’Asie au Quai d’Orsay de 1991 à 1994.
4 Zhu Rongji était vice-min istre chargé de l'économie de la RPC de 1991 à 1997.
241
Et la deuxième mission en Chine de Jacques Friedmann du 23 au 28 décembre
1993 a deux résultats :
Les deux gouvernements conviennent qu’ils doivent restaurer leurs relations
d’amitié et de coopération traditionnelle sur la base des principes qui ont présidé à
l’établissement des relations initiales. Cette visite aboutit au Communiqué conjoint du 12
janvier 1994.
Dans ce communiqué, la France, pour la première fois, déclare par écrit « Taïwan
comme une partie intégrale du territoire chinois », bien qu’elle reconnaisse la RPC
comme seul représentant du peuple chinois depuis 1964 :
« La France confirme que le gouvernement français reconnaît le gouvernement de
Chine comme l’unique gouvernement légal de la Chine et Taïwan comme une partie
intégrale du territoire chinois. La Chine réaffirme que la vente de quoi que ce soit à
Taïwan porte atteinte à la souveraineté, à la sécurité et à la réunification de la Chine, et
que le gouvernement chinois s’y oppose fermement. Pour tenir compte de ces
préoccupations, le gouvernement français s’engage à ne pas autoriser à l’avenir les
entreprises françaises à participer à l’armement de Taïwan. »1
François Joyaux remarque dans sa communication sur le 30ème anniversaire de
l’établissement des relations diplomatiques à Paris : « En définitive, c’est seulement le
communiqué du 12 janvier 1994, signé par le gouvernement français et la Chine
populaire qui réglé les choses en reconnaissant effectivement la légalité et la légitimité de
la République populaire de Chine, l’unité de la Chine. La seule chose d’un simple point
de vue historique et juridique qui soit assez difficile à admettre dans ce communiqué, est
la phrase suivante : ‘sur la base des principes qui ont présidé à l’établissement des
relations diplomatiques en 1964, on a décidé...’ Non, les principes de 1964 étaient très
loin d’aller jusqu’à cette position, qui est celle de janvier 1994, et non celle de 1964 ».2
Un autre point ce communiqué a son importance. Il est convenu que le Premier
ministre Edouard Balladur effectuera une visite officielle en Chine dans un avenir proche
afin de marquer le renouveau des relations sino-françaises. Pour la Chine, cette démarche
1 La politique étrangère de la France du 12 janvier 1994, page.49. Le Quotidien du people (
Renmin ribao), le 13 avril 1994, page.1. 2 Cahiers de la Fondation Charles de Gaulle, Paris, n°1, 1995, page.54.
242
française signifie à l’époque que le gel des relations françaises avec Beijing (Pékin) est
terminé1. La France fait un premier pas, l’Europe suivra.
Les deux gouvernements entendent renforcer les consultations politiques, tenir
des rencontres régulières et développer la coopération économique et commerciale entre
les deux pays. La Chine assure que les entreprises françaises seront les bienvenues sur le
marché chinois.
Les deux pays tournent une nouvelle page.
Pour sceller la réconciliation bilatérale, pour faire le bilan des relations détériorées
à la suite de l’affaire de Tian’anmen en 1989 et de la vente de Mirages en 1992, le
ministre chinois Qian Qichen s’entretient du 22 au 24 janvier 1994 à Paris avec le
Président François Mitterrand, le Premier ministre Edouard Balladur et son homologue
Alain Juppé. Les deux gouvernements retrouvent leur objectif économique commun qui
sera bénéfique :
Qian Qichen assure que les entreprises françaises doivent occuper leur place en
Chine.
Edouard Balladur déclare : « Dans les mois qui viennent, nous aurons l’occasion
de constater que la France et la Chine se sont engagées dans la voie d’une coopération
notamment économique, plus étroite, et nous sommes convenus qu’il y avait le plus
grand intérêt que, sur le plan politique, nous nous tenions étroitement informés de nos
points de vue respectifs »2.
Cette rencontre marque un nouveau départ et la réconciliation franco-chinoise est
un des objectifs prioritaires du gouvernement français. Elle aura été « la cerise sur le
gâteau » de la normalisation entre les deux pays.
B) Après la pluie, vient le beau temps
Le ministère chinois des Affaires étrangères donne le 27 janvier à Beijing (Pékin)
un banquet en l’honneur d’Alain Peyrefitte, envoyé spécial du Premier ministre français,
1 Après l’affaire de la place Tian’anmen, le min istre français des Relat ions extérieures Roland Dumas
déclare le 7 juin 1989 la décision française du gel de ses relations avec Beijing (Pékin) à tous les niveaux. 2 Le Monde, le 25 avril 1994, page.5.
243
pour célébrer leur 30ème année de relations diplomatiques franco-chinoises. Les deux pays
fêtent d’abord leurs retrouvailles dans une atmosphère amicale. L’ambassadeur de France
en Chine, François Plaisant, et l’amiral Philippe de Gaulle y participent. Ce dernier
déclare que la décision de son père, concernant l’établissement de relations diplomatiques
avec la Chine, est le symbole de la politique diplomatique indépendante appliquée par la
France, pays souverain. Philipe de Gaulle exprime : « Cette conviction de l’indépendance
nationale est un de nos points communs parmi les plus importants. Aujourd’hui nous
devons protéger et développer les relations d’amitié que nous avons tissées en 1964. »
Concernant les relations bilatérales, la Chine espère que les entreprises françaises
investiront des capitaux en Chine, et que la coopération économique s’amplifiera. Qian
Qichen le souligne : « nous avons non seulement des intérêts aujourd’hui, mais encore
dans le 21ème siècle ». Alain Peyrefitte souhaite aussi que les amitiés franco-chinoises soit
éternelle. Après les brouilles, « la France et la Chine sont amies et vieilles amies »1. Ce
voyage est aussi la préparation du voyage prochain du Premier ministre Edouard Balladur
en Chine.
En avril 1994, à l’occasion du voyage en Chine du Premier ministre Edouard
Balladur, les deux gouvernements s’accordent sur les résolutions suivantes :
- Rétablir le dialogue des ministres des Affaires étrangères.
- Développer l’économie dans tous les domaines.
Elles sont rompues fin 1991 du fait de la vente d’armes françaises à Taïwan.
Sur la question des droits de l’homme, Balladur donne son opinion devant les
journalistes : « la France n’a pas l’intention d’intervenir dans les affaires intérieures des
autres pays. La France, patrie des droits de l’homme, attache à ce point une grande
importance dans ses relations avec les autres pays. Cependant, elle tient compte des
traditions, de chacun et de son stade dans l’évolution du monde2. »
Sur ce point, Edouard Balladur choisit un ton modéré et acceptable pour Beijing
(Pékin). Et pas comme le gouvernement précédent, agressif face à cette question.
1 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 8 avril 1994, page.1.
2 Le Monde, le 11 avril 1994, page.1.
244
La Chine considère que cette visite est un événement majeur dans les relations
franco-chinoises, car elle contribue à l’amélioration des rapports, notamment dans le
domaine de l’économie.
Le Président chinois Jiang Zemin1 indique : « Si nous entretenons de bonnes
relations diplomatiques, nous devrions améliorer notre collaboration économique ». Le
Monde l’a commenté en ces termes : « C’est le couronnement d’une réconciliation voulue
de part et d’autre, en dépit des divergences qui demeurent. 2»
A cette occasion Edouard Balladur a remis au Président Jiang Zemin une
invitation du Président François Mitterrand, lui demandant d’effectuer une visite d’Etat
en France.
Le développement économique fait de grands pas en avant durant cette période.
A la suite de l’entretien à Paris entre le ministre français de l’Industrie Gérard
Longuet3 et le ministre chinois de l’énergie électrique Shi Dazhen4 le 14 avril 1994,
Gérard Longuet s’est rendu en Chine avec une délégation de 120 chefs d’entreprises pour
la réouverture du marché chinois aux entreprises françaises du 2 au 9 juillet 1994.
Une série de contrats et de projets de contrats a été signé entre les deux pays.
Ceux-ci portent sur un centrale électrique de Lonhuang par GEC-Alstom5, sur la
construction de cinq usines de traitement des eaux par Degrémont6, en passant par la
livraison de matériel téléphonique par la SAT ou l’importation de sérum par la PMI
France-Comité Sérum et d’autres protocoles d’intention comme la construction d’un
métro à Qingdao. Tout cela représente 5 milliards de francs sur plusieurs années7.
A l’invitation du Président Mitterrand, le Président chinois Jiang Zemin effectue
une visite d’Etat en France du 8 au 12 septembre. Il s’entretient avec son homologue au
1 Jiang Zemin était Président de la RPC de 1993 à 2003.
2 Le Monde, le 9 avril 1994, page.1.
3 Gérard Longuet était min istre de l’Industrie de la France de 1993 à 1994.
4 Shi Dazhen était ministre de l'énergie électrique de la RPC de 1993 à 1998.
5 GEC-Alstom est une société basée en France, spécialisée dans les secteurs des transports, principalement
ferroviaires et de la production d'énergie. 6 Degrémont est une entreprise française spécialisée dans les installations de production d’eau potable et
dans le traitement des eaux usées et des boues. 7 Le Monde, le 6 ju illet 1994, page.18.
245
Palais de L’Elysée dans l’espoir de renforcer la coopération. Les deux chefs d’Etat sont
favorables à un développement des relations bilatérales et des questions internationales.
En outre, tous deux remarquent que les deux pays se sont réconciliés après la brouille de
la vente d’armes françaises à Taïwan.
La visite s’est soldée par la signature d’accords, pour un montant total de 15,8
milliards de francs, dont 2,5 milliards signés le mercredi 7 septembre répartis en 800
millions de francs de contrats fermes et 1,7 millions de lettres d’intentions et
mémorandums. Ces 13,3 milliards de francs se décomposent en 900 millions de francs de
contrats fermes, le reste, soit 12,4 promesses d’investissements français en Chine1.
1 Le Quotidien du people ( Renmin ribao), le 12 septembre, 1994, page.6. Le Monde, le 13
septembre 1994.
246
C) Les lettres de notes et les accords entre 1983 et 1992
Titre : Protocole de coopération dans le domaine de la radio et de la télévision entre le
Ministère des Relation extérieures de la République française et le Ministère de la Radio
et de la Télévision de la République populaire de Chine (ensemble deux annexes).
Date et lieu de signature : 05/05/1983 à Beijing.
En vigueur
247
248
249
250
251
252
253
254
255
Titre : Accord de coopération dans le domaine ferroviaire entre le Ministre des
Transports de la République française et le Ministre des Chemins de Fer de la République
populaire de Chine
Date et lieu de signature : 27/09/1983 à Paris.
En vigueur
256
257
258
259
Titre : Accord par échange de notes entre le gouvernement de la République française et
le gouvernement de la République populaire de Chine portant confirmation de l'accord de
coopération dans le domaine ferroviaire signé le 27 septembre 1983
Date et lieu de signature : 0/09/1983 à Paris.
En vigueur
260
261
262
263
Titre : Accord en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en
matière d'impôts sur le revenu entre le gouvernement de la République française et le
gouvernement de la République populaire de Chine
Date et lieu de signature : 30/05/1984 à Paris.
En vigueur
264
265
266
267
268
269
270
271
272
273
274
275
276
277
278
Titre : Accord à long terme sur le développement des relations économiques et de la
coopération entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la
République populaire de Chine.
Date et lieu de signature : 16/04/1985 à Beijing.
En vigueur
279
280
281
282
Titre : Accord de coopération dans le domaine des voies navigables entre le ministère de
l'Urbanisme, du Logement et des Transports de la République française et le ministère
des Communications de la république populaire de Chine
Date et lieu de signature : 04/05/1985 à Pékin.
En vigueur
283
284
285
Titre : Accord de coopération dans le domaine des routes entre le Ministère de
l'Urbanisme, du Logement et des Transports de la République française et le Ministère
des Communications de la République populaire de Chine
Date et lieu de signature : 04/05/1985 à Pékin.
Fin de vigueur
286
287
288
Titre : Accord sous forme d'échange de lettres entre le gouvernement de la République
française et le gouvernement de la République populaire de Chine relatif à l'ouverture par
chacun des deux États d'un nouveau consulat général sur le territoire de l'autre État
Date et lieu de signature : 29/04/1991 à Pékin.
En vigueur
289
290
291
CONCLUSION
292
La reconnaissance de la RPC par la France le 27 janvier 1964 est le point
départ des relations diplomatiques sino-françaises contemporaines. Si la décision du
général de Gaulle et du président Mao a dépassé le cadre de relations bilatérales, elle a
eu des répercussions historiques sur le long terme et sur l’ensemble des relations
internationales de l’époque, aussi bien dans le bloc occidental que dans celui des pays
communistes.
Cette initiative ouvre à la France la possibilité d’une politique chinoise et, à la
RPC, une ouverture diplomatique vers les pays occidentaux. La conséquence directe
de cette initiative est que le président américain Richard Nixon a dû modifier sa
politique étrangère envers Beijing (Pékin).
Ce qui est plus important, c’est que de Gaulle et Mao Zedong ont semé pour
l’avenir, pour des récoltes futures, engrangées par leurs successeurs.
Durant plus de quarante ans, la Chine et la France ont remporté de grands
succès dans la collaboration bilatérale. Les échanges commerciaux ont dépassé le
milliard de dollars (1964-1965) suite à l’établissement de leurs relations
diplomatiques, plaçant la France au rang de deuxième partenaire occidental de la
Chine, derrière l’Angleterre ; La visite du président Georges Pompidou en Chine en
1973 enclencha une nouvelle ère dans la coopération économique bilatérale après
l’impact de la Révolution culturelle.
Depuis la fin des années 70, la diplomatie chinoise a changé d’orientation sous
l’influence de la réforme économique de Deng Xiaoping. Elle n’a plus d’ambition
d’exporter la révolution, et s’est principalement tournée vers le développement
économique pour réaliser les « quatre modernisations ». Dans ce contexte, une série
d’accords sino- français a été signée, en particulier l’accord scientifique et technique
du 21 janvier 1978 portant sur les différents secteurs d’échanges scientifiques et
techniques. Cet accord était le premier visant à effectuer des transferts de technologies
à long terme vers la Chine.
Cette collaboration a été particulièrement fructueuse grâce à la mise en place
d’un système de consultation politique périodique au niveau diplomatique et d’une
293
commission mixte en vue d’amplifier les échanges économiques et commerciaux de
1975. Ce système, favorable aux échanges d’idées, dépasse le cadre idéologique des
deux régimes politiques différents.
La politique extérieure française, héritée du gaullisme resta inchangée jusqu’à
l’arrivée de François Mitterrand à l’Elysée en 1981.
Bien que les relations sino-françaises aient traversé une crise de près de cinq
ans à la suite du mouvement de Tian’anmen (1989-1993), la signature d’un
communiqué conjoint le 12 janvier 1994 a permis de rétablir la confiance entre
Beijing (Pékin) et Paris.
Certains problèmes qui entravaient une meilleure coopération entre les deux
pays ont été résolus :
- Premièrement, la visite du Président François Mitterrand à Beijing
(Pékin) en 1983 a réduit l’ancien désaccord portant sur le problème du
Cambodge.
- Puis, la signature du 16 mai 1997, de la déclaration conjointe
relative à un partenariat global, ouvre un nouveau chapitre aux relations
bilatérales.
- Troisièmement, après l’affrontement violent entre la RPC et la
France, causé par les ventes d’armes françaises à Taïwan, le communiqué
sino-français de 1994 confirme le gouvernement chinois comme unique
gouvernement légal de la Chine et Taïwan comme partie intégrale du territoire
chinois. C’était la première fois que la France l’a affirmé explicitement d’une
manière écrite depuis 1964.
Ainsi, on passe d’une phase de conflits politique et idéologique à une phase de
compréhension. Evidemment, les intérêts économiques des deux pays ont poussé à
cette réflexion.
294
1995-2007 : Une période durant laquelle les coopérations sino-françaises se
multiplient en plein essor et tous azimuts
Si la quantité et la qualité des sources et des documents publiés nous ne
permettent pas de travailler sur les relations bilatérales durant cette période dans un
chapitre particulier, j’essaierai encore de faire une synthèse ou un bilan de ces douze
années à la fin de la conclusion, car c’est bien sous la présidence de Jacques Chirac
que les relations franco-chinoises connaissent leur apogée depuis 1964, une véritable
« lune de miel » entre la France et la Chine.
Pourquoi les relations entre les deux pays, après trente ans d’évolution pendant
lesquelles on voit des coopérations ainsi que les conflits, ont-elles pris une avance
considérable ? Quelles sont les politiques extérieures des deux gouvernements de
cette époque ? Est-ce que c’est elles qui favorisent les relations bilatérales ? Suivant
ces questions, on essaiera de trouver la clé qui serait importante pour un bon maintien
des liens entre la France et la Chine à l’avenir.
Si on réexamine cette histoire des relations franco-chinoises sous la présidence
de Jaques Chirac, on sera inévitablement étonné par la fréquence et la quantité des
visites officielles entre les deux pays de cette période. Selon les sources du ministère
des Affaires étrangères de la France, le nombre des visites officielles e ffectuées par
les officiers supérieurs (du côté français ainsi que du côté chinois), c’est-à-dire au
moins du niveau ministériel (y compris celui de vice-ministre), est 222, y compris 4
visites d’Etat, 2 visites présidentielles supplémentaires et 6 visites des Premier
ministres. Les coopérations et communications sino-françaises s’étendent dans
presque tous les domaines possibles : économie, diplomatie, énergie, justice, transport,
environnement, santé, enseignement supérieur, tourisme, culture, etc.
Nous revoyons ces douze ans par une simple chronologie des visites et
communications entre les dirigeants des deux pays :
295
Premier mandat de Jacques Chirac (1995-2002) :
Le 7 mai 1995 : Jacques Chirac est élu président de la République française.
Le 4 juin 1996 : Visite officielle en France du Premier ministre chinois Li Peng, à l’invitation du Premier ministre
français Alain Juppé. Durant cette visite, Li Peng lance pour la première fois une possibilité de construire « une
relation amicale et coopérative à long terme » entre les deux pays. Les deux gouvernements ont signé 13 projets
de coopérations, soit un montant de 2,4 milliards de dollars. 1
Du 25 au 31 mars 1997 : Visite en France du président de l’Assemblée nationale populaire chinoise Qiao Shi qui
rencontre le président Chirac et les dirigeants du Parlement français. Cette visite renforce une communication entre
l’Assemblée nationale chinoise et le Parlement français.
Du 15 au 18 mai 1997 : Première visite d’Etat en Chine du président Chirac. « C’est la première visite en Chine du
Président français depuis 14 ans, qui signifie non seulement pour les deux Etats, mais aussi pour la communauté
internationale une affaire importante. »2 Le 16 mai, les deux chefs d’Etat signent la « Déclaration conjointe
franco-chinoise pour un partenariat global » qui indique : « A l'aube du XXIème siècle, le moment est venu pour
la France et la Chine de prolonger cette démarche par un partenariat global à long terme visant à faire entrer les
relations sino-françaises dans une nouvelle phase de développement. »3 De plus, deux autres accords sur la
protection de l’environnement et sur les utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire sont signés. Les deux
gouvernements promettent aussi de se coopérer dans les domaines de l’agriculture et de l’utilisation pacifique de
l’espace extra-atmosphérique.
Du 6 au 7 1998 : Visite en France du nouveau Premier ministre chinois Zhu Rongji. Il rencontre le Président de la
République, le Premier ministre français et le président de l’Assemblée nationale. Les deux pays déclarent qu’ils
sont contents des coopérations suite à l’établissement de leur relation du partenariat global. Le président Chirac
1 Le Quotidien du peule ( Renmin ribao), le 15 avril, 1996.
2 Le Quotidien du peule ( Renmin ribao), le 16 mai, 1997.
3 La Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global, le 16 mai 1997 à Beijing
(Pékin).
296
souligne le soutien français par rapport à l’accession chinoise à l’OMC et admire le courage du gouvernement
chinois manifesté pendant la crise économique asiatique.
Du 24 au 26 septembre 1998 : Visite en Chine du Premier ministre français Lionel Jospin.
Les deux gouvernements signent un accord par rapport à la propriété intellectuelle. Le ministère de sciences et de
technologies chinois signe un accord de coopération avec Electricité De France (EDF). Et d’autres 14 accords sont
signés qui représentent un montant de 345 millions de dollars. 1
Du 13 au 18 septembre 1999 : Visite en Chine du président du Sénat français Christian Poncelet. Il présente la
volonté d’approfondir la communication entre les parlements des deux Etats.
Du 26 au 31 octobre 1999 : Visite d’Etat en France du président chinois Jiang Zemin. Il rencontre le président
Chirac et ils souhaitent tous les deux un développement approfondi de la relation du partenariat global entre les
deux pays. L’établissement d’une ligne téléphonique entre les deux chefs d’Etat est aussi fixé, ainsi que celui d’un
système de rencontres régulières des chefs d’Etat.
Du 21 au 23 janvier 2000 : Visite informelle en Chine du président Chirac à l’occasion du sommet sino-européen
organisé à Beijing (Pékin). Les deux chefs d’Etat se rencontrent et conviennent d’organiser les « Années croisées
culturelles Chine-France » afin de renforcer les communications culturelles et économiques entre les deux peuples.
Les deux ministres des Affaires étrangères signent un accord sur l’inauguration de la ligne téléphonique entre les
deux chefs d’Etat.
Du 1er au 5 novembre 2001 : Visite en France du vice-président chinois Hu Jintao. Lors de la rencontre avec le
président Chirac, ils échangent leurs points de vue sur la situation internationale, les actions anti-terroristes et les
questions en Afghanistan et en Moyen-Orient. Ils s’accordent pour renforcer les négociations et coopérations
bilatérales au niveau international, et pour intensifier les échanges dans les domaines de l’économie, de la
technologie, de la culture et de l’éducation.
1 Le Quotidien du peule ( Renmin ribao), le 27 septembre, 1999.
297
Deuxième mandat de Jacques Chirac (2002-2007)
Le 7 mai 2002 : Jacques Chirac est réélu président de la République française. Son homologue chinois Jiang
Zemin lui envoie une lettre de félicitation, tout en souhaitant développer les relations d’amitié entre la Chine et la
France.
Du 26 au 28 septembre 2002 : Deuxième visite en France du Premier ministre chinois Zhu Rongji. On discute sur
les questions internationales et régionales d’intérêts communs. Les deux Premier ministres signent l’ « Accord de
coopération culturelle entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République
populaire de Chine ».
Le 29 novembre 2002 : Inauguration du Centre culturel de Chine à Paris. C’est le premier centre culturel chinois
établi dans un pays occidental.
Du 25 au 26 avril 2003 : Visite en Chine du Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin, pendant toute crise de
la contagion de la pneumonie atypique. Lors de la rencontre avec son homologue chinois Wen Jiaobao, le Premier
ministre chinois apprécie cette visite du Premier ministre Raffarin en exprimant : « Cette visite du Premier ministre
Raffarin au cours de la lutte du peuple chinois contre la pneumonie atypique marque une signification importante.
Elle souligne clairement une grande importance attachée aux relations franco-chinoises par la France, et représente
l’amitié du peuple français pour le peuple chinois. »1 Les deux parties signent trois accords y compris un contrat
de l’achat de 30 Airbus par les compagnies aériennes chinoises.
Du 1er au 2 juin 2003 : Visite en France du nouveau président chinois Hu Jintao à l’occasion du sommet entre G8
et 7 pays en développement organisé à Evian. Il rencontre le président Chirac séparément. Les deux chefs d’Etat
échangent leurs points de vue sur les crises en Irak et en Corée, la confrontation israélo-palestinienne.
Le 6 octobre 2003 : Inauguration de l’année de Chine en France. Les deux chefs d’Etat expriment leurs
félicitations par cet événement.
1 Le Quotidien du peule ( Renmin ribao), le 26 avril 2003.
298
Du 26 au 29 janvier 2004 : Visite d’Etat en France du président Hu Jintao à l’invitation du président Chirac. Les
deux chefs d’Etat signent le 27 janvier, une nouvelle «Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat
global », élevant leur « partenariat global » établi en 1997 au rang de « partenariat global stratégique ». Ils
s’accordent pour renforcer le multilatéralisme, accélérer la résolution des problèmes globaux et approfondir les
relations bilatérales. Le président Chirac affirme la politique d’une seule Chine et son opposition à l'"indépendance
de Taïwan" sous quelque forme que ce soit, ainsi que le soutien français à la réunification pacifique de la Chine.
Du 8 au 12 octobre 2004 : Deuxième visite d’Etat en Chine du président Chirac, à l’invitation du président Hu
Jintao. Les deux chefs d’Etat se discutent sur de nombreux sujets. Ils soulignent que « l’organisation des ‘Années
croisées culturelles Chine-France’ est une innovation importante dans l’histoire des communications culturelles
bilatérales, et influencera le développement des relations bilatérales à long terme. » Les deux pays conviennent de
promouvoir leur partenariat à un niveau plus haut. 1
Le 9 octobre 2004 : Inauguration de l’année de France en Chine. Le président Hu Jintao et le président Chirac
expriment leurs félicitations. Pendant cet événement, plus de 200 activités au sujet de culture française sont
organisées dans plusieurs villes chinoises.
Du 21 au 23 avril 2005 : Visite en Chine du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Les deux gouvernements
signent une vingtaine d’accords couvrant les domaines agricole, aéronautique et énergétique.
Du 16 au 18 septembre 2005 : Visite en Chine de la délégation du Sénat français, dirigé par le président Christian
Poncelet. Cette affaire renforce d’avantage la communication et la coopération entre la
Conférence consultative politique chinoise et le Sénat français.
Du 4 au 7 décembre 2005 : Visite en France du Premier ministre Wen Jiaobao. Les deux gouvernements signent
15 accords coopératifs, concernant la finance, l’assurance sociale, la coopérat ion des petites et moyennes
entreprises, le transport, la recherche scientifique, la télécommunication, l’agriculture et l’aéronautique.
1 Le Quotidien du peule ( Renmin ribao), le 10 octobre 2004.
299
Du 20 au 24 avril 2006 : Visite en France du vice-premier ministre Hui Liangyu
Du 7 au 11 juin 2006 : Visite en France du vice-président de l’Assemblée nationale chinoise Wang Zhaoguo.
Du 17 au 21 juillet 2006 : Visite en France du ministre de sécurité publique Zhou Yongkang.
Du 25 au 28 octobre 2006 : Dernière visite d’Etat en Chine du président Chirac. Les deux chefs d’Etat expriment :
« leur souhait d’approfondir continuellement les coopérations dans divers domaines et de promouvoir leur
partenariat stratégique global».1 Ils signent une « Déclaration conjointe franco-chinoise » en se promettant de
mettre en place une série d’actions communes couvrant la politique, les relations sino-européennes, la justice, la
sécurité, l’économie et la science humaine. De plus, 14 accords sur l’exploitation de l’énergie nucléaire, l’achat
des Airbus et la coopération spatiale sont signés par les deux gouvernements.
De la chronologie ci-dessus, on peut trouver deux points généraux qui
caractérisent les relations entre la Chine et la France de cette période :
1. Visites mutuelles très fréquentes des dirigeants de hauts niveaux.
Cette fréquentation signifie non seulement l’intensification des échanges de
points de vue entre eux, mais surtout le renforcement d’une confiance mutuelle
politique.
Dans la « Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global »
signée en 1997, on marque : « les deux parties soulignent l'importance particulière qui
s'attache aux contacts étroits et réguliers entre leurs plus hautes autorités, car ceux-ci
approfondissent la confiance et la connaissance mutuelles, et favorisent l'élan soutenu
des relations bilatérales. Elles sont convenues d'organiser chaque année au moins une
rencontre bilatérale de haut niveau, et au moins deux rencontres par an entre les
ministres des Affaires étrangères. »2
1 Le Quotidien du peule ( Renmin ribao), le 27 octobre 2006.
2 La Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global, le 16 mai 1997 à Beijing
(Pékin).
300
Cette convergence favorise la compréhension entre la France et la Chine sur
divers questions sensibles, comme celle des droits de l’homme en Chine :
« Les deux parties soulignent que les efforts tendant à promouvoir et à
protéger les Droits de l'Homme doivent s'exercer dans le respect des buts et des
principes de la Charte des Nations unies, ainsi que de l'universalité des Droits de
l'Homme, tout en tenant pleinement compte des particularités de chacun. », la France
et la Chine souhaitent que « le dialogue entre la Chine et l'Union européenne sur les
Droits de l'Homme se développe de manière constructive sur la base de l'égalité et du
respect mutuel, et permette le développement des échanges et de la coopération pour
le renforcement de l'Etat de droit. C'est en approfondissant la compréhension mutuelle
et la confiance réciproque que se réduiront les divergences. »1
Et celle de Taïwan :
« Le Gouvernement français confirme sa position constante sur l’unicité de la
Chine. Il s’oppose à quelque initiative unilatérale que ce soit, y compris un
référendum qui viserait à modifier le statu quo, accroîtrait les tensions dans le détroit
et conduirait à l’indépendance de Taiwan. Il considère que les relations entre les deux
rives du détroit doivent reposer sur un dialogue constructif afin de trouver un
règlement pacifique à la question de Taiwan et d’assurer la stabilité et la prospérité
dans la région. »2
2. Elargissement des domaines de coopérations franco-chinoises.
Grâce à l’établissement de leur relation de partenariat global en 1997, la
France et la Chine déploient graduellement leurs collaborations sur la scène
internationale :
- Renforcement de la multipolarité
- Réforme de l’ONU
1 La Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global, le 16 mai 1997 à Beijing
(Pékin).
2 La Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global stratégique, le 27 janvier 2004
à Paris.
301
- Promotion du désarmement nucléaire
- Protection de l’environnement
- Lutte contre la drogue, la criminalité et le terrorisme
- Respect de la diversité culturelle.
Au niveau bilatéral, l’approfondissement des échanges commerciaux entre les
deux pays entraîne également un grand développement des communications et
coopérations en matière de culture, d’éducation et de technologie.
En tant que grande civilisation mondiale toutes les deux, la Chine et la France
s’attirent l’une l’autre depuis très longtemps au niveau culturel. Comme ce que Gu
Hongming a noté en 1914 : « The French, - well the French are the people, it seems to
me, who can understand and has understood the real Chinaman and the Chinese
civilization best. »1
(Je crois que ce sont les Français qui ont le mieux compris les Chinois, qui
sont le plus aptes à apprécier la civilisation chinoise.)
Les échanges culturels franco-chinois ont fait un grand pas en avant sous la
présidence de Jacques Chirac, et ont connu leur apogée lors des « Années croisées
culturelles Chine-France » entre 2003 et 2004. Et à partir de 2006, l’ambassade de
France en Chine et le Centre culturel de France à Beijing (Pékin) organisent chaque
année le « Festival Croisement » en Chine.
En ce qui concerne l’éducation, le ministre français de l'Enseignement
supérieur et de la Recherche et le ministre chinois de l'Education ont signé le 26
novembre 2003 un « Arrangement administratif sur les modalités de reconnaissance
1 Gu Hongming ( Ku Hung-ming ), L'esprit du peuple chinois (The spirit of the chinese
people), Le Quotidien de Pékin (The Peking Daily News), 1915 ; Haikou, Edit ions de Hainan (
Hainan chubanshe), 1996, page.5.
302
réciproque des études et des diplômes en vue d'une poursuite d'études supérieures
dans les deux Etats », qui serait prolongé en 2007.
Pour favoriser les études linguistiques, l’Alliance française a constitué depuis
l’inauguration de sa première école à Guangzhou (Canton) en 1989, 13 établissements
d’enseignement du français en Chine continentale (deux autres à Hong Kong et à
Macao). Et 14 Instituts Confucius sont créés en France à partir de 2005 (après
l’établissement de celui à Montpellier le 19 septembre 2013, aujourd’hui il y en a 15
en totalité).
Puisque la France se maintient avancée dans les secteurs des transports, de
l’aéronautique, de l’énergie et de la biotechnologie, elle est toujours l’un des
principaux pays d’origine de l’importation de technologie chinoise. Jusqu’en 2004, les
deux parties ont signé 2,313 accords relatifs à l’exportation et à l’importation de
technologie couvrant l’énergie nucléaire, l’intelligence artificielle, l’énergie p ropre,
l’aéronautique et le transport ferroviaire, qui représentent un montant total de 12,2
milliards de dollars.1
Même dans le domaine militaire, les collaborations franco-chinoises, qui
étaient très rares auparavant, deviennent de plus en plus fréquentes pendant les deux
mandats présidentiels de Jacques Chirac. Ici on peut voir les visites mutuelles entre
l’Armée Populaire de Libération (APL) et l’Armée française :
Du côté chinois :
1995 : visite en France du ministre de la défense chinois Chi Haotian ;
1996 : visite en France du vice-président de la Commission militaire centrale de la RPC Liu Huaqing ;
1997 : visite en France du chef d’état-major chinois Fu Quanyou ;
1999 : visite en France du commandant en chef de l’armée de l’air chinoise Liu Shunyao ;
2001 : visite en France du commandant en chef de la marine chinoise Shi Yunsheng ;
2002 : visite en France du chef du département d’équipement de l’APL Cao Gangchuan ;
1 Source du ministère des Affaires étrangères chinois :
http://www.fmprc.gov.cn/chn/wjb/zzjg/gjlb/1842/defaut/htm.
303
2004 : visites en du nouveau ministre de la défense chinois Cao Gangchuan et du nouveau chef d’état-major
chinois Liang Guanglie ;
2006 : visite en France du président de la Commission militaire centrale de la RPC Guo Boxiong.
Du côté français:
1995 : visite en Chine du chef d’état-major français Jacques Lanxade ;
1997 : visites en Chine du ministre de la Défense français Carles Millon et du chef d’état-major
français Jean-Philippe Douin ;
1999 : visite en Chine du chef d’état-major de l’armée de l’air française Jean Rannou.
2000 : visites en Chine du chef d’état-major français Jean-Pierre Kelche et du chef d’état-major de
la marine française Jean-Luc Delaunay ;
2002 : visites en Chine du chef d’état-major de l’armée de l’air française Jean-Pierre Job et du
chef d’état-major de la marine française Jean-Louis Battet ;
2003 : visites en Chine du ministre de la Défense français Michèle Alliot-Marie et du chef
d’état-major français Henri Bentégeat ;
2004 : visite en Chine du chef d’état-major de l’armée de l’air française Richard Wolsztynski ;
2007 : deuxième visite en Chine du ministre de la Défense français Michèle Alliot-Marie.
Le 16 mars 2004 : Première manœuvre militaire conjointe sino-française organisée en mer jaune,
visant à affronter ensemble des défis de sécurité non-traditionnelle.
Finalement, il faut également noter qu’entre 1995 et 2007, trois nouveaux
consulats généraux de France sont établis en Chine, soit :
- Le Consulat général de France à Wuhan le 10 octobre 1998 ;
- Le Consulat général de France à Chengdu le 18 juillet 2005 ;
- Le Consulat général de France à Shenyang le 22 août 2007.
Alors qu’un nouveau consulat général de Chine et établi en France :
- Le Consulat général de Chine à Strasbourg le 21 mars 1997.
304
Si on cherche des raisons essentielles qui amènent cette période de « lune de
miel » à la France et la RPC, trois éléments principaux émergent :
A) La multipolarité et le multilatéralisme : une stratégie commune
Pendant cette époque d’après-guerre froide, si les Américains, en tant que
seule superpuissance, poursuivent un monde unilatéral dominé par Washington, la
RPC et la France, comme puissance émergente et puissance moyenne, cherchent à
établir un monde multipolaire.
En novembre 2001, lors de son discours à l’IFRI1, Hu Jintao, vice-président de
la RPC à l’époque, exprime que « la multipolarisation est la base de la paix mondiale
durable. Elle favorise la mise en place du nouvel ordre politique et économique juste et
raisonnable, la réalisation de la paix et de la tranquillité mondiales, est propice à la
formation d’un cadre politique international relativement stable, stimule les échanges et la
coopération de divers pays basés sur le respect mutuel de l’indépendance et de la
souveraineté ainsi que sur l’égalité et les avantages réciproques. »2 Le gouvernement
chinois envisage de « promouvoir la multipolarisation du monde avec toute la
communauté internationale, ainsi que la coexistence pacifique de diverses puissances,
afin de garantir la stabilité du monde. »3
Cette attitude chinoise coïncide bien avec celle de la France du président
Chirac, qui envisage d’organiser un monde multipolaire dont l’Union européenne
constitue un « pôle ».
Ils s’accordent à reconnaître que « le monde d'aujourd'hui connaît une
mutation profonde et évolue vers une multipolarité qui se substitue à la structure
bipolaire héritée du passé. », et décident de « s'engager dans une coopération
1 IFRI : Institut Français des Relations Internationales.
2 Hu Jintao , d iscours à l'IFRI : « La Chine et le monde au XXI
ème siècle », le 5 novembre 2001.
3 Jiang Zemin , Rapport du XVI
ème Congrès du PCC, le 17 novembre 2002 . Source de l’Agence
de Chine nouvelle : http://news.xinhuanet.com/ziliao/2002-11/17/content_693542.htm
305
renforcée, de favoriser la marche vers la multipolarité, de soutenir les efforts de
création de richesse et de bien-être, dans le respect de la pluralité et de l'indépendance,
de contribuer à l'instauration d'un nouvel ordre international politique et économique
qui soit juste et rationnel et de s'opposer à toute tentative de domination dans les
affaires internationales, de telle sorte qu'advienne un monde plus prospère, plus stable,
plus sûr et plus équilibré. »1
S’opposant contre l’unilatéralisme américain au plan international, surtout
après la guerre irakienne en 2003, la France et la Chine rappellent plusieurs
fois « leur attachement au multilatéralisme comme le moyen adapté de prévention et
de règlement efficaces des crises, en réponse aux menaces et défis d’ordre mondial et
régional. »2
Le 26 octobre 2006, dans son discours à l’Université de Pékin, le président
Chirac indique : « Face au comportement de la Corée du Nord ou de l’Iran, le
multilatéralisme doit être efficace. Ne rien faire nous, priverait de toute influence, de
toute crédibilité et de toute légitimité. Ne rien faire, ce serait nous résigner face aux
menaces à la paix et à la sécurité internationale. Ce serait encourager la tentation de
l’unilatéralisme dont chacun a pu mesurer les conséquences fâcheuses et les
impasses. »3
B) Le maintien de l’autorité de l’ONU et le renforcement de son rôle
Comme membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU toutes les deux,
la France et la Chine sont attachées au rôle primordial des Nations unies en matière de
préservation de la sécurité et de la paix internationale. Face aux nouveaux défis
mondiaux et régionaux de l’époque d’après-guerre froide, les deux pays préconisent
de trouver des solutions dans le cadre de l’ONU, par un moyen multilatéral.
1 La Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global, le 16 mai 1997 à Beijing
(Pékin).
2 La Déclaration conjointe franco-chinoise pour un partenariat global stratégique, le 27 janvier 2004
à Paris.
3 Jacques Chirac, Discours à l’Université de Pékin, le 26 octobre 2006.
306
Dans la même conférence de l’IFRI en 2001, Hu Jintao exprime que « dans
l’histoire humaine, on n’a jamais vu aucun établissement posséder une si large
représentation, ni aucune organisation exercer une influence aussi profonde et durable sur
le monde. Au nouveau siècle, l’autorité et la fonction de l’ONU doivent être sauvegardées
et consolidées. »1
Comme la France, la Chine soutient aussi la réforme de l’ONU. Elles sont
favorables à une réforme nécessaire et rationnelle du Conseil de sécurité, de nature à
mieux l’adapter à l’évolution du monde et à renforcer sa capacité à répondre
efficacement aux multiples menaces et défis actuels pour la paix et la sécurité
internationales.
S’appuyant sur ces points de vue communs, elles convergent lors de diverses
questions internationales, telle que la prolifération des armes de destruction massive et
le terrorisme.
En 2003, face à la détermination belliqueuse de Washington, Paris et Beijing
(Pékin) insistent tout les deux sur une solution politique et diplomatique pour la crise
irakienne et sont soutenus par Berlin et Moscou. Dans ses Mémoires, le président
Chirac justifie son « globalisme » par la nécessité de restaurer l’unité de la
communauté internationale après les tensions sur l’Irak en 2003. 2
En ce qui concerne le problème climatique global, la France et la Chine
rappellent leur adhésion à la Convention Cadre des Nations Unies sur les
Changements Climatiques (C.C.N.U.C.C.) et leur ratification du Protocole de Kyoto.
!
!
!
1 Hu Jintao , d iscours à l'IFRI : « La Chine et le monde au XXI
ème siècle », le 5 novembre 2001.
2 Jacques Chirac, Mémoires, Le temps présidentiel, tome 2, Nil, 2011, page.435.
307
C) Respect de la diversité culturelle
La diversité culturelle constitue un autre point commun important entre Paris
et Beijing (Pékin). En janvier 2004, la France et la Chine expriment, dans la
déclaration conjointe, leur attachement à la diversité culturelle du monde, tout en
soutenant l’élaboration d’une convention internationale sur la diversité culturelle sous
l’égide de l’UNESCO.
Avec leurs efforts, cette convention est adaptée par la Conférence générale de
l’UNESCO en octobre 2005 et entre en vigueur en 2007. Mais selon les télégrammes
publiés par le site Wikileaks, les Américains considèrent la Convention sur la
diversité culturelle de l’UNESCO comme une machine de guerre anti-américaine et
anti- libérale.1
Enfin, la volonté du président Chirac de maintenir l’influence française
(comme pilier de l’UE) sur la scène internationale coïncide bien avec l’ambition de
Beijing (Pékin) de prendre une nouvelle place mondiale qui corresponde à son
économie. Et les moyens qu’ils choisissent convergent vers la même : organiser un
monde multipolaire dont l’Europe et la RPC constituent deux « pôles ».
1 Pierre Grosser, « Le multilatéralisme et les questions globales », La politique étrangère de Jacques
Chirac, Paris, Ed itions Riveneuve, 2013, page.216.
308
Représentations diplomatiques et consulaires de la France en Chine 1
1 Source de l’ambassade de France en Chine :
http://www.consulfrance-pekin.org/Circonscriptions-consulaires.html
309
Représentations diplomatiques et consulaires de la RPC en France
métropolitaine
310
Finalement
A la fin de cette thèse (et de mes études en France), je me pose même
beaucoup plus de questions qu’au début : sur les relations sino-françaises, les
problématiques, mais aussi sur la diplomatie chinoise, la société chinoise et le futur du
pays. Heureusement, ces questions-là, complexe et quelquefois inquiétantes, ne
m’arrêtent pas, en revanche, elles me poussent de continuer ma recherche à l’avenir.
J’espère que cette thèse qui met le point final de ma vie étudiante en France,
signifie en même temps un point de départ de ma carrière professionnelle dans le
domaine diplomatique en Chine.
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ANNEXE
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CHRONOLOGIE DES RELATIONS DIPLOMATIQUES
FRANCO-CHINOISES
(1964-2007)
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1964
27 janvier : Annonce d’un Communiqué conjoint franco-chinois à Paris et à Beijing
(Pékin) à onze heures de Greenwich.
28 janvier : Déclaration du porte-parole du ministre chinois des Affaires étrangères :
« C’est en tant que seul gouvernement légal représentant tout le peuple chinois que le
gouvernement de la République populaire de Chine a entrepris des négociations et est
parvenu à un accord avec le gouvernement français sur l’établissement de relations
diplomatiques entre les deux pays ».
30 janvier : Le Président du Parti communiste chinois Mao Zedong reço it une
délégation parlementaire française à Beijing (Pékin).
23 février : Les représentants des gouvernements chinois et français, conduits par
M M. Song Zhiguang et Claude Chayet, arrivent à Paris et à Beijing (Pékin).
27 mai : Lucien Paye, ambassadeur de la République française, arrive à Beijing
(Pékin).
31 mai : L’ambassadeur français Lucien Paye présente ses lettres de créance auprès du
Président de la République populaire de Chine Liu Shaoqi à Beijing (Pékin).
2 juin : Huang Zhen, ambassadeur de la République populaire de Chine en France
arrive à Paris.
6 juin : L’ambassadeur Huang Zhen présente ses lettres de créance au Président de la
République française Charles de Gaulle à Paris.
19 juin : Le Président de la République française Charles de Gaulle reçoit
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l’ambassadeur chinois Huang Zhen au sujet du problème d’Indochine.
Septembre : La première Exposition technique et électronique française ouverte à
Beijing (Pékin).
Octobre : Echanges de lettres entre le Premier ministre chinois Zhou Enlai et le
général de Gaulle sur le problème nucléaire.
1965
20 juillet – 5 août : Voyage en Chine de M. André Malraux, ministre d’Etat, chargé
des Affaires culturelles. Il entre en conversation avec Chen Yi, ministre des Affaires
étrangères, Zhou Enlai, Premier ministre et Liu Shaoqi, Président de la République
chinoise. Les dialogues abordent l’avenir du développement, les deux civilisations, le
projet d’Exposition d’art chinois à Paris ainsi que la question d’Indochine.
Novembre : La grande Exposition française a lieu à Beijing (Pékin), avec 250 sociétés
françaises de biens d’équipements et de gros matériel. Le premier ministre chinois
Zhou Enlai fait une visite personnelle et engage la conversation avec les Français.
1966
Premier juin : Signature d’un accord relatif aux communications aériennes
sino-françaises à Paris.
15 et 22 septembre : Accord par échange de notes modifiant l’article 12 de l’accord du
1er juin 1966 relatif aux communications aériennes.
1967
Juillet : M. Huang Zhen, ambassadeur chinois en France retourne à Beijing (Pékin)
pour participer à la Révolution culturelle selon la décision du Parti communiste
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chinois.
1968
Mai : Grandes manifestations à Beijing (Pékin) pour soutenir la lutte des étudiants et
des travailleurs français.
1969
26 février : La publication du Journal officiel français nommant Etienne Manac’h,
ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République française en Chine.
14 mars : Lucien Paye, ambassadeur français en Chine quitte Beijing (Pékin) à la fin
de sa mission.
20-21 mai : Le nouvel ambassadeur de France Etienne Manac’h arrive le 20 mai à
Beijing (Pékin) et M. Huang Zhen, ambassadeur de Chine rengage son poste à Paris le
21.
22 mai : Etienne Manac’h présente ses lettres de créance au Président de la
République par intérim Dong Biwu à Beijing (Pékin).
13 septembre : Déclaration de l’Agence Chine nouvelle sur la dévaluation française
« causée par le faible taux de croissance de l’industrie française » et par la « tempête
révolutionnaire » de mai 1968, qui va entraîner la diminution du pouvoir d’achat des
salariés.
25 septembre : Etienne Manac’h, ambassadeur français, est reçu par Ahou Enlai,
Premier ministre chinois à Beijing (Pékin).
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1970
1er mai : Entretien entre MM. Maurice Schumann, ministre français des Affaires
étrangères et Huang Zhen, ambassadeur chinois en France. François-Xavier Ortoli,
ministre du Développement industriel et scientifique, adresse au gouvernement
chinois un message de félicitation pour le lancement du satellite chinois du 24 avril
1970.
7-21 juillet : Le ministre français du Plan et de l’Aménagement du territoire, André
Bettencourt, visite la Chine à l’invitation du gouvernement chinois. C’est la première
visite officielle à Beijing (Pékin) d’un membre du Gouvernement français depuis
l’établissement des relations diplomatiques en 1964. Bettencourt invite, au nom de
son gouvernement, Zhou Enlai, à visiter la France.
15 juillet : Le Premier ministre chinois Zhou Enlai assiste à une réception de
l’Ambassade de France à l’occasion de la Fête nationale française à Beijing (Pékin).
C’est un événement exceptionnel depuis l’établissement des relations diplomatiques
entre les deux pays en 1964.
5-30 octobre : Visite en Chine de M. Maurice Couve de urville, ancien Premier
ministre français. Il s’entretient avec le Président Mao Zedong et le Premier ministre
Zhou Enlai le 14 et le 15 pendant son séjour.
9 novembre : Mort du Général de Gaulle.
11 novembre : Message de condoléance du Président du Parti communiste chinois
Mao Zedong à Mme. De Gaulle pour le décès du général, et message du Président de
la Répubilque Dong Biwu et du Premier ministre Zhou Enlai au Président Georges
Pompidou. Le drapeau chinois est mis en berne. Dong Biwu, Zhou Enlai, Hua
Yongsheng visitent l’Ambassade de France à Beijing (Pékin) pour présenter leurs
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condoléances.
1971
13-31 juillet : Une mission importante d’une délégation parlementaire française en
Chine conduite par Alain Peyrefitte, Président de la Commission des Affaires
culturelles familiales et sociales de l’Assemblée nationale française. Cette délégation
est reçue par Zhou Enlai, Premier ministre chinois et Guo Moro, vice-président de
l’Assemblée nationale chinoise.
29 septembre – 11 octobre : Visite de M. Bai Xiangguo, ministre chinois du
Commerce extérieur en France. C’est une première délégation gouvernementale
chinoise qui visite la France depuis 1964. Cette visite est relative aux sujets culturels
et techniques. La délégation est reçue par M. André Bettencourt, ministre français du
Plan et de l’Aménagement du Territoire le 30 septembre à Versailles. Et
exceptionnellement reçue par le Président de la République Georges Pompidou le 1er
octobre de la fête nationale chinoise. On s’entretient avec M. Valéry Giscard
d’Estaing, ministre de l’Economie et des Finances afin de rechercher des moyens
nécessaires au développement des échanges et de décider de multiplier les missions
techniques bilatérales.
15 novembre : Allocution de bienvenue à la Chine populaire prononcée par le
représentant de la France à l’ONU.
19-31 novembre : Voyage en Chine de M. Froment-Meurice, directeur de la section
Asie du ministère des Affaires étrangères françaises.
23 décembre – 4 janvier 1972 : Pierre Mendès France, ancien ministre des Affaires
étrangères français visite la Chine, et s’entretient avec les dirigeants chinois,
notamment Li Xiannian le 24 et 30 décembre, Zhou Enlai, le 25 et le prince
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cambodgien Sihanouk le 27.
1972
18-31 janvier : Visite en Chine d’une délégation de la Commission des Affaires
étrangères de l’Assemblée nationale française conduite par son président M. de
Brogile. Il rencontre M. Guo Moro, vice-président de l’Assemblée nationale populaire,
Qian Guanhua, vice-ministre des Affaires étrangères et Bai Xiangguo, ministre du
Commerce extérieur. La délégation est reçue par le Premier ministre Zhou Enlai.
24-31 mai : Visite en France d’une délégation technique et administrative de la
République populaire de Chine.
Juillet : Visite en Chine du ministre français des Affaires étrangères, M. Maurice
Schumann. Il est reçu par le Président Mao Zedong, qui apprécie hautement le
développement de la Communauté européenne.
1973
15 janvier : Ouverture de l’Exposition scientifique et technique française à Shanghai,
présentant un aperçu des secteurs de pointe de la recherche en France.
31 janvier : Paris et Beijing (Pékin) annoncent que Georges Pompidou, Président de la
République française se rendra en visite officielle en Chine le 11 septembre 1973.
25 février : Entretien entre M. Maurice Schumann, ministre français des Affaires
étrangères, et Ji Pengfei, son homologue chinois, à la veille de l’ouverture de la
conférence internationale sur le Viêt-Nam pour régler les question de procédure à
Paris.
24 avril : Arrivée à Beijing (Pékin) d'une délégation française de spécialités de la
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recherche médicale à l’invitation de l’Association des sciences médicales chinoises.
7 mai : Entretien entre Hubert Germain, ministre des Postes et Télécommunications et
Tien Chih Tung, chargé d’affaires de la République populaire de Chine à Paris.
1er -15 juin : Visite en Chine de Chaban-Delmas, ancien Premier ministre de la France.
Il s'entretient avec Zhou Enlai sur les échanges des relations internationales :
l’unification européenne, l’Extrême-Orient, le Japon, relations euro-américaines et
relations sino-soviétiques.
6 juin : Présentation à Paris des lettres de créance du nouvel ambassadeur chinois en
France, Zeng Tao.
10-13 juin : Visite en France du ministre chinois des Affaires étrangères, Ji Pengfei,
dans le but de développer les relations économiques sino-françaises. Il a des entretiens
successifs avec Jean Charbonnel, ministre du Développement industriel et scientifique
et avec Michel Jobert sur les relations bilatérales dans les domaines industriels et
scientifiques ; avec Pierre Messmer, Premier ministre, sur les différents aspects de la
détente en Europe et les rapports sino-soviétiques. Il est reçu par le Président Georges
Pompidou ainsi que Giscard d’Estaing, ministre de l’Economie et des Finances.
11-17 septembre : Visite d’Etat en Chine du Président de la République, Dong Biwu.
Comme c’est le premier chef d’Etat occidental qui visite la Chine populaire, c’est un
événement d’importance majeure dans les relations sino- françaises. Georges
Pompidou et Mao Zedong s’entretiennent à cette occasion. Les deux pays décident de
conclure « un accord maritime » et de renforcer leur coopération dans le domaine des
transports aériens. Le Président Pompidou donne une conférence de presse, il offre un
dîner en l’honneur de M. Zhou Enlai, et les deux pays annoncent du Communiqué
commun le 14 septembre 1973.
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21-30 novembre : Une délégation d’experts chinois, conduite par Yu Man,
vice-ministre des Communications, visite les Chantiers de construction navale de
Nantes et de Saint-Nazaire, et le complexe industriel de Fos sur mer à Marseille.
1974
22 mai-6 juin : Exposition française « Industries-Sciences-Techniques » de Beijing
(Pékin) est inaugurée par M. Sudreau, Président du Comité permanent des foires et
des manifestations françaises à l’étranger.
4-8 juin : Voyage à Beijing (Pékin) de M. André Bettencourt, Président du groupe
d’amitié franco-chinoise de l’Assemblée nationale avec une délégation parlementaire.
Durant son séjour à Beijing (Pékin), il est reçu par M. Deng Xiaoping, vice-Premier
ministre chinois, et il visite l’Exposition française de Beijing (Pékin).
1er octobre : Valéry Giscard d’Estaing, Président de la République française, assiste à
la réception offerte par l’ambassade de Chine à Paris à l'occasion du 25ème
anniversaire de la République populaire de Chine.
11 octobre : M. Qiao Guanhua, vice-ministre chinois des Affaires étrangères, chef de
la délégation chinoise à l’Assemblée générale des Nations Unies, reçu par M. Jean
Sauvagnargues, ministre français des Affaires étrangères.
29 octobre : Inauguration de la liaison Paris-Beijing (Pékin) par la Compagnie
chinoise de l’aviation civile (CAAC).
7-14 novembre : Visite en Chine de M. Robert Galley, ministre français de la Défense,
à l’occasion de l’inauguration de la liaison aérienne Paris-Karachi-Beijing (Pékin). Il
est reçu par M. Deng Xiaoping, vice-Premier ministre chinois, qui appuie la
proposition de conférence sur l’énergie de M. Giscard d’Estaing.
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1975
30 janvier : M. Etienne Manac’h, ambassadeur de France en Chine, est reçu à Beijing
(Pékin) par le vice-Premier ministre chinois Deng Xiaoping.
12-17 mai : Visite en France du vice-Premier ministre chinois Deng Xiaoping,
accompagné de Qiao Guanhua, ministre des Affaires étrangères. C’est la première fois
qu’un dirigeant chinois fait une visite d’Etat en Occident, c’est donner d’emblée à
cette visite toute sa signification. Le Président Giscard d’Esta ing accepte l’invitation à
se rendre en Chine le 16.
24 juin-4 juillet : Visite en Chine de M. Achille-Fould, secrétaire d’Etat aux Postes,
Télégraphes et Téléphones (PTT). Entretien ave son homologue chinois, M. Zhong
Fuxiang, et avec Qiao Guanhua, ministre des Affaires étrangères, Hua Guofeng,
vice-Premier ministre et ministre chinois de la sécurité publique.
7-22 septembre : Visite en Chine d’une délégation de scientifiques français dirigée par
M. Bernard Grégory, directeur général du Centre National de la Recherche
Scientifique (CNRS).
27 septembre : Entretien des ministres des Affaires étrangères français et chinois, MM.
Jean Sauvagnargues et Qiao Guanhua sur les perspectives de la réunion préparatoire à
la conférence sur l’énergie aux Etats-Unis à l’occasion de la session de l’ONU.
7 novembre : Entretien à Paris de M. Soisson, secrétaire d’Etat aux Universités, avec
une délégation universitaire chinoise.
19-25 novembre : Visite en Chine de M. Jean Sauvagnargues, ministre français des
Affaires nationale par le Premier ministre Li Xiannian, en présence de Qiao Guanhua
le 21. Il s’entretient avec Deng Xiaoping le 24, et surtout avec son homologue, Qiao
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Guanhua, sur la coopération bilatérale. Ce voyage sert à préparer la visite du Président
de l’année prochaine.
19-29 novembre : Visite en France du ministre chinois de la Santé, Mme. Liu
Xiangping, reçue par M. Jacques Chirac, maire de Paris le 17.
20 novembre : M. Jacques Chirac reçoit un groupe de journalistes chinois à Paris. Il
souligne : « La convergence des intérêts économiques et politiques de la Chine et de
la France dans la mesure où les deux pays rejettent la domination des
superpuissances».
1976
17-22 mars : Voyage en Chine de M. François Missoffe, ancien ministre, envoyé
spécial du gouvernement français qui a des entretiens avec L Qiang, ministre du
Commerce extérieur et Qiao Guanhua, ministre des Affaires étrangères chinoises.
6-13 mai : Mme. Simone Veil, ministre de la Santé, effectue une visite en Chine. Elle
est reçue par le Premier ministre chinois Hua Guofeng du 6 au 8 à Beijing (Pékin) et
rencontre son homologue chinois, Mme. Liu Xiangping.
5-14 juin : Visite officielle en Chine du général Méry, chef d’Etat major des Armées
françaises.
9 et 13 septembre : Annonce de la mort du Président chinois Mao Zedong le 9, et
message de condoléance de M. Louis de Guiringaud, ministre des Affaires étrangères
français à son homologue chinois et du Président Giscard d’Estaing à Mme. Mao le
13.
Octobre : Voyage en France du ministre chinois des Affaires étrangères Qiao
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Guanhua.
4-11 novembre : Voyage en Chine d’une mission de chefs d’entreprises français
conduites par M. François Ceyrac, président du Conseil national du patronat français
(CNPF).
15-17 décembre : Première réunion de la Commission mixte franco-chinoise à Beijing
(Pékin).
1977
7-9 octobre : Le ministre chinois des Affaires étrangères Huang Hua fait une visite
afin de reprendre et approfondir les échanges de vues sur l’actualité internationale et
les questions bilatérales entamés au cours de leur séjour à New-York. Il est reçu par le
Président de la République Giscard d’Estaing le 7, par son homologue français Louis
de Guiringaud le 8.
5-12 décembre : Li Qiang, ministre chinois du Commerce extérieur voyage en France,
dresse le bilan des échange bilatéraux, analyse les moyens de porter remède à leur
déséquilibre afin de relancer la coopération économique franco-chinoise.
1978
19-24 janvier : Visite en Chine de Raymond Barre, Premier ministre français. Les
deux gouvernements signent un Accord scientifique et technique le 21 janvier, portant
sur les différents secteurs de leurs échanges scientifiques et techniques. C’est le
premier accord scientifique et technique que la Chien signe avec l'Europe occidental,
il s’agit d’un objectif à long terme. Raymond Barre est reçu par le Premier ministre
chinois et Président du PCC Hua Guofeng. Il s’entretient également avec Deng
Xiaoping.
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2-12 mai : Voyage en France du vice-Premier ministre chinois Gu Mu, dans le but de
s’informer tout particulièrement sur les techniques de pointe.
28 septembre : Entretien à New-York des ministres des Affaires étrangères français et
chinois, Louis de Guiringaud et Huang Hua.
14-21 octobre : Visite en France de Fang Yi, vice-Premier ministre chinois chargé de
la Commission d’Etat pour le développement des échanges dans les domaines
scientifiques et techniques. Les deux gouvernements signent deux accords de
coopération scientifique et technique franco-chinois : le premier est un protocole sur
des projets complémentaires d’échanges scientifiques et techniques ; le second
document est un accord particulier entre le CNRS et l’Académie chinoise des
Sciences.
29 octobre-4 novembre : Voyage en Chine de deux délégations françaises conduites,
l’une par le ministre de Culture et d’Environnement Michel d’Ornano, l’autre par le
secrétaire d’Etat à l’Agriculture, M. Jacques Fauchier.
25 novembre-5 décembre : Visite en Chine de M. Jean-François Deniau, ministre
français du Commerce extérieur pour la signature d’un accord franco-chinois « à long
terme sur le développement des relations économiques et la coopération ». Cet accord
prévoit, notamment, un volume d’échanges de 60 milliards de francs en sept ans.
1979
15-22 juillet : Visite en Chine de M. André Giraud, ministre français de l’Industrie.
15-22 octobre : Voyage en France de M. Hua Guofeng, c’est le premier voyage
officiel d’un Premier ministre chinois en Occident depuis 1964. Les deux pays signent
« un projet de développement des relations sino-françaises et d’échanges culturels »,
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ainsi qu’un accord d’établissement de postes consulaires. A cette occasion, M. Hua
Guofeng participe à l’inauguration du Monument dédié au Premier ministre Zhou
Enlai apposé sur l’Hôtel qu’il avait habité entre 1922 et 1924 à Paris.
1980
21 juin : Visite en France de Huang Hua, ministre des Affaires étrangères chinoise,
qui rencontre son homologue français M. Jean-François Poncet.
9-1- juin : Visite de la vice-présidente de l’Assemblée nationale chinoise, Mme. Deng
Yingchao, femme de l’ancien Premier ministre Zhou Enlai en France. C’est la
première délégation de l’Assemblée nationale chinoise que se rend en France. Elle
répond aux visites de parlementaires français en Chine.
15-22 octobre : Visite en Chine du Président de la République française Valért Giscard
d'Estaing. Les deux gouvernements conviennent d’instaurer « un système de
consultations périodiques au niveau ministériel des Affaires étrangères pour échanger
les points de vue ». L’accord sur l’établissement des postes consulaires est signé le 17
octobre (le Consulat général de France à Shanghai et le Consulat général de Chine à
Marseille seront ouverts à partir de cette date ). Un accord de principe sur la livraison
par la France des équipements complets de la centrale nucléaire Daya-Bay et le
renforcement de la coopération technique en ce domaine est conclu.
1981
9-14 janvier : Voyage en Chine de François Mitterrand, candidat à la présidence de la
République et Lionel Jospin, secrétaire général du Parti social français. Ils conduisent
une délégation du Parti Socialiste, à l’invitation de Hu Yaobang, secrétaire général du
PCC. Ils rencontrent également Li Xiannian et Deng Xiaoping, vice-président du PCC.
Les deux Partis souhaitent garder leurs bonnes relations.
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7-11 juillet : Visite en France du général Yang Deshi, chef d’Etat major des forces
armées chinoises.
6-10 novembre : Visite de M. Michel Jobert, ministre français du Commerce extérieur
en Chine.
1982
30 juillet-5 août : Visite en Chine de M. Claude Cheysson, ministre français des
Relations extérieures. C’est la première rencontre politique de haut niveau des deux
pays depuis le changement de majorité l’année dernière. Les questions sont abordées
sur les principaux problèmes du monde et les relations bilatérales dans ce contact
politique.
25 août-7 septembre : Visite en Chine du président de l’Assemblée nationale française,
M. Louis Mermaz, qui signifie la première visite officielle d’un président de
l’Assemblée nationale française.
14-16 octobre : Visite en Chine du secrétaire général du Parti communiste français
(PCF), M. Georges Marchais. Rétablissement des rapports entre le PCF et le PCC.
1983
15 mars : Visite en France de Mme. Chen Muhua, conseiller d’Etat et ministre du
Commerce extérieur.
3-5 mai : Visite officielle en Chine du Président François Mitterrand ; signature d'un
mémorandum sur la coopération bilatérale dans la centrale nucléaire et d'un protocole
sur la coopération dans le secteur de la Radio-Télévision. A Shanghai, le Président
français remit la Légion d'honneur à l'écrivain chinois Ba Jin.
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8-16 juillet : Voyage en Chine de M. Michel Rocard, ministre français de
l’Agriculture.
21-28 septembre : Chen Puru, ministre chinois du Transport des chemins de fer,
effectue une visite en France. Les ministres chinois et français des Transports MM.
Chen Puru et Charles Fiterman signent l’accord dans le domaine ferroviaire le 27
septembre, comme référence à l’accord intergouvernemental scientifique et technique
du 21 janvier 1978 et l’accord intergouvernemental à long terme sur le développement
des relations économiques et sur la coopération du 4 décembre 1978.
1984
26 janvier : La Chine et la France publient une déclaration commune à l’occasion de
20ème anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques franco-chinoises.
Vingt ans après la reprise des relations officielles, ces relations sont confiantes.
5-6 avril : Visite en France du ministre chinois des Affaires étrangères Wu Xueqian.
Cette visite se décompose en deux parties : la première traite des relations bilatérales
franco-chinoises, y sont ainsi confirmés la qualité et l’intensité des relations entre les
deux pays, déjà démontrées par les nombreuses visites ministérielles réciproques au
cours des derniers mois, et qui le seront de nouveau à l’occasion de la prochaine
venue à Paris du Premier ministre chinois Zhao Ziyang. La deuxième est consacrée à
la Communauté économique européenne.
30 mai-3 juin : Visite en France du Premier ministre chinois, Zhao Ziyang, et reçu par
le Président François Mitterrand et le Premier ministre Pierre Mauroy. Les deux
gouvernements signent un accord en vue d’éviter les doubles impositions et de
prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu, et un accord sur
l’encouragement et la protectin réciproques des investissements le 30 mai. Ces deux
accords accélèrent et protègent le développement économique entre les deux pays.
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Des accords de coopération dans le domaine nucléaire signé en 1983 et dans celui des
transports et des télécommunications sont conclus à cette occasion.
1985
19-16 avril : Visite à Beijing (Pékin) de Mme. Edith Cresson, ministre français du
Redéploiement industriel et du Commerce extérieur pour la signature d’un accord à
long terme sur le développement des relations économiques et de la coopération entre
la France et la Chine. Cet accord de coopération économique signé le 16 avril à
Beijing (Pékin) avec le ministre des Relations économiques et commerciales
étrangères Zheng Tuobin, se fera dans les domaines de l’énergie (en particulier la
production d’électricité de toutes origines, le pétrole et le charbon), ainsi que
l’information, le transport ferroviaire, automobile et aéronautique.
3-12 mai : Visite en Chine de Paul Quilès, ministre de l’Urbanisme, des Transports et
du Logement. Deux accords sont signés avec le ministre chinois des Communications
Qian Yongchang le 4 mai à Beijing (Pékin) : coopération dans le domaine des routes
et coopération dans les voies navigables, ils se réfèrent à l’accord
intergouvernemental scientifique et technique du 21 janvier 1978 et à l’accord
intergouvernemental à long terme sur le développement des relations économiques et
de la coopération du 16 avril 1985.
29 août-3 septembre : Visite en Chine du ministre français des Relations extérieures
Roland Dumas à l’invitation de son homologue chinois, Wu Xueqian et reçu par Deng
Xiaoping. Il s’entretient avec le Premier ministre sur les problèmes plus généraux tels
que l’évolution de la Chine et les perspectives économiques au cours du second
semestre 1985 et l’année 1986 ; avec le ministre du Commerce extérieur Zheng
Tuobin au sujet des relations bilatérales et les échanges commerciaux, en compagnie
de l’ensemble de la délégation et des représentants des secteurs de pointe de
l’économie française. Il donne une conférence de presse le 30.
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11-13 décembre : Visite en France du vice-Premier ministre chinois Li Peng.
1986
16-19 juin : Visite en France du secrétaire général du PCC, Hu Yaobang. Pour la
première fois dans l’histoire des relations franco-chinoises, le secrétaire général du
PCC effectue un voyage en France, illustrant l’excellence des rapports franco-chinois.
M. Hu est reçu par François Mitterrand, Président de la République, et Jacques Chirac,
Premier ministre français. La conférence de presse conjoint du Président Mitterrand et
de Hu Yaobang a lieu à Paris le 19. Hu Yaobang a transmis à Jacques Chirac une
invitation que ce dernier devrait honorer dans le courant de l’année.
20-23 décembre : Visite en Chine du ministre français du Commerce extérieur, Michel
Noir.
1987
10-13 janvier : Visite en Chine de Didier Guiringaud, secrétaire d’Etat français aux
affaires étrangères.
10-14 mars : Visite en Chine de René Monory, ministre français de l’Education
nationale.
3-5 mai : Voyage à Beijing (Pékin) de Jean-Bernard Raimond, ministre français des
Affaires étrangères pour la relance des échanges entre la France et la Chine. C’est la
première visite politique d’un ministre français en Chine depuis la constitution du
nouveau gouvernement français en mars 1986. Les deux ministres des Affaires
étrangères signent « un accord d’entraide judiciaire en matière civile et commerciale »
le 4 mai. Il est reçu par Zhao Ziyang, Premier ministre , et Deng Xiaoping, président
de la Commission consultative du PCC.
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8-14 juillet : Visite en Chine de Michel Noir, ministre délégué chargé du commerce
extérieur.
28-31 juillet : Visite en Chine de Didier Guiringaud, secrétaire d’Etat aux Affaires
étrangères.
20-22 août : Visite en Chine du secrétaire d’Etat à la Défense Jacques Boyon pour la
discussion d’un projet de texte portant sur la coopération entre les deux pays en
matière d’armement et de défense. Le premier accord doit permettre le développement
des échanges entre responsables militaires ainsi qu’une coopération dans le domaine
de l’armement ; un second accord, plus technique, consacré au secteur de l’armement,
doit être rapidement conclu.
9-13 novembre : Visite en France de Li Xiannian, Président de la République
populaire de Chine. Pour la première fois dans l’histoire, la France reçoit sur son sol
le chef d’Etat chinois. Ce voyage fait suite à l’invitation du Président François
Mitterrand qui lui-même s’était rendu en visite en Chine du 3 au 7 mai 1983. Li
Xiannian assiste, en compagnie de Jacques Chirac, Premier ministre, et Edouard
Balladur, ministre de l’Economie, des Finances et de la Privatisation, à la signature du
protocole financier franco-chinois pour 1987, qui se monte à 747 millions de francs.
1988
23-30 janvier : Voyage en Chine de Pierre Méhaignerie, ministre de l’Equipement, du
Logement, de l’Aménagement du territoire et des Transports, accompagné d’une
importante délégation d’industriels français, à l’invitation du ministre chinois de
l’Urbanisme et de la Construction, Ye Rutang. Ses rencontres avec les autorités
municipales de ces deux villes, Shanghai et Canton, portent notamment sur des projets
de construction de métros.
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3 mars : Un nouveau protocole financier signé à Beijing (Pékin), 1,3 milliard de
francs de crédits à long terme et à faible taux d’intérêts par Jean-Pascal Breaufret,
sous-directeur du Trésor au ministère des Finances français, et Liu Zhicheng,
vice-ministre du Commerce extérieur de Chine. Il porte à 5,34 milliards de francs le
montant des crédits d’aide au développement accordés par la France à la Chine depuis
la signature, en 1985, d’un accord-cadre, en référence à l’accord à long terme sur le
développement des relations économiques et de la coopération. Les projets concernés
sont : une centrale thermique construite au Sichuan par Alsthom, une usine chimique
de Technip, des usines de transformation des déchets de brasserie en aliments pour
bétail, une conservatrice de fruits et légumes et des équipements de traitements des
eaux à Nanjing (Nankin).
15-16 mars : Entretien des ministres des Affaires étrangères chinois et français, Wu
Xueqian et Jean-Bernard Raimond, au cours d’un dîner offert en l’honneur du premier
pendant son bref séjour à Paris.
21 septembre : Michel Pelege, directeur d’un groupe immobilier français, annonce, le
21 septembre, à Beijing (Pékin) la signature d’un accord avec les autorités chinoises
pour la construction du centre français international de Beijing (Pékin). Ce contrat des
crédits d’un montant de 630 millions de francs environ. Ce vaste ensemble immobilier,
conçu par l’architecte Michel Herbert, situé en plein cœur de la ville, comportera
80,000 mètres carrés de bureaux, de commerces, d’appartements de haut standing
pour les banques et organismes financiers internationaux.
24-26 octobre : Visite en France du ministre chinois du Commerce extérieur M.
Zheng Tuobin, signature de plusieurs contrats avec des firmes français et octroi par
Paris d’une nouvelle tranche de crédit de 682 millions de francs. Ces nouveaux crédits
serviront à financer des projets moyens d’équipements dans les secteurs prioritaires
pour les Chinois que sont les industries de base, l’énergie, la chimie, les transports, les
télécommunications, ainsi que l’agroalimentaire et le traitement des eaux urbaines.
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10 octobre : Accord sino- français sur la transmission d’émissions radiophoniques.
1989
12-14 janvier : Visite à Paris du ministre chinois des Affaires étrangères Qian Qichen
à l’invitation de son homologue français M. Roland Dumas, et la signature d’un
accord créant un second consulat général français à Guangzhou (Canton) par les deux
ministres. Le lieu où sera installée la mission chinoise n’a pas été déterminé. Les
entretiens de Qian Qichen portent aussi sur la question du Cambodge : « si Paris et
Beijing (Pékin) s’accordent pour soutenir le prince Sihanouk, ils diffèrent sur le rôle à
accorder aux Khmers rouge. »
26 janvier : François Mitterrand et Yang Shangkun, Présidents des deux pays, Roland
Dumas et Qian Qichen, ministres des Affaires étrangères se sont envoyés
mutuellement les messages à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de
l’établissement des relations officielles franco-chinoises.
28 janvier : Charles Malo est nommé ambassadeur de France en Chine.
24 avril : Le ministre chinois des Affaires étrangères exprime ses regrets, par voie
diplomatique et de presse à propos de la visite du Dalaï- lama à Paris et de la rencontre
de celui-ci avec Mme. Danielle Mitterrand, cette visite irrite profondément Beijing
(Pékin).
25 avril : Zhou Jue, ambassadeur de Chine en France, tient une conférence de presse à
Paris pour s’élever la demande du Dalaï- lama d’une mission d’enquête internationale
au Tibet. Il regrette que des personnalités françaises de haut rang soient allées jusqu’à
recevoir le Dalaï- lama et aient fait des remarques qui constituent une ingérence dans
les affaires intérieures chinoises.
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25-27 avril : Visite en Chine de Mme. Edwige Avice, ministre délégué français aux
Affaires étrangères.
6 juin : Michel Rocard, Premier ministre français, annonce le gel des relations avec la
Chine au cours du débat de censure à l’Assemblée nationale : « Il est clair que nous
entendons geler dès maintenant les relations à tous les niveaux avec la République
populaire de Chine », en conséquence des événements de la Place Tiananmen en
Chine. L’Hôtel Matignon fait savoir dans la soirée du même jour que le gel ne touche
que les relations politiques et diplomatiques, « il n’y aura plus aucun contact entre le
Président de la République, le Premier ministre et les membres du gouvernement avec
les dirigeants chinois. Si les membres de la CEE préfèrent une position commune, la
France pourrait l’adopter».
7 juin : Annonce de Roland Dumas, ministre français des Affaires étrangères, sur le
gel des relations avec Beijing (Pékin) devant l’Assemblée nationale.
7 juin à Bruxelles-Madrid : Déclaration des Douze sur la Chine. Les douze pays
membre de la CEE condamnent fermement la violente répression exercée contre des
manifestants et les pertes en vie humaines.
21 juin : Déclaration du Président de la République française François Mitterrand sur
la situation chinoise.
23 juin : Communiqué du ministère français des Affaires étrangères sur la situation
des étudiants chinois en France, et démenti selon laquelle la France aurait refusé
l’asile politique à des étudiants chinois.
26-27 juin : Déclaration du conseil européen sur la Chine (à Madrid).
6 juillet : Condamnation française de la Chine devant les Nations Unies.
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7 juillet : Protestation de Beijing (Pékin) contre la diffusion en France de l’interview
d’opposants chinois.
7 juillet : L’ambassadeur de France à Beijing (Pékin), Charles Malo, est convoqué au
ministère chinois des Affaires étrangères à la suite de l’interview sur Antenne 2 et de
la diffusion dans la presse française d’une déclaration en fuite de l’opposition Yan
jiaqi et Wuer Kaixi, « criminels » faisant l’objet d’un avis de recherche de la police de
Beijing (Pékin).
14-16 juillet : Déclaration du Sommet de l’Arche sur la Chine.
16 juillet : Annonce du ministère français de l’Economie et des Finances du gel d’un
prêt public de 830 millions de francs.
30 juillet : Rencontre des deux ministres des Affaires étrangères français et chinois à
Paris en marge de la conférence de Paris sur le Cambodge imbroglio franco-chinois.
31 juillet : Protestation du gouvernement chinois sur les déclarations des « Sept ». Le
ministère chinois des Affaires étrangères convoque l’ambassadeur de France à Beijing
(Pékin), Charles Malo, pour lui faire-part d’une protestation officielle de la Chine
contre des déclarations des « Sept » lors du sommet de Paris à propos des événements
de Beijing (Pékin) du mois de juin.
19 septembre : Le ministère chinois des Affaires étrangères convoque, l’ambassadeur
français à Beijing (Pékin), Charles Malo pour protester fermement contre
l’intervention policière dans l’Aéroport de Paris : « Le gouvernement chinois
demande au gouvernement français d’empêcher immédiatement tout interrogatoire
des passagers chinois, en conséquence des événements de Tiananmen, par la police
des frontières de l’Aéroport de Paris. »
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22 septembre : Zhou Jue, ambassadeur de Chine en France, proteste au gouvernement
français contre la tenue dans la Capitale française du Congrès constitutif de la
Fédération démocratique chinoise (FDC).
25 septembre : Le ministère chinois des Affaires étrangères convoque l’ambassadeur
de France en Chine, Charles Malo, à propos du soutien du gouvernement français aux
activités hostile au gouvernement chinois.
26 septembre : Le Quotidien du peuple chinois proteste contre le gouvernement
français. Le gouvernement chinois demande au gouvernement français de cesser
immédiatement ses ingérence dans les affaires intérieures chinoises et d’empêcher
séance tenante toutes autres activités du Front Démocratique Chinois (FDC) à partir
du territoire français.
19 octobre ; Le ministre français des Affaires étrangères, Roland Dumas, rappelle aux
exilés chinois leur obligations de réserve. Il a indiqué que « la France ne peut
admettre sur son territoire des activités politiques contre un gouvernement avec lequel
elle entretient des relations diplomatiques », « cela a également été confirmé » au
ministre chinois des Affaires étrangères, Qian Qichen, qu’il rencontre le 29 septembre
en marge de l’Assemblée générale de l’ONU à New-York.
31 octobre : Selon Le Monde, le gouvernement chinois proteste, pour la quinzième
fois, « demandant à la France de mettre au terme aux activités sur son territoire du
FDC, en particulier l’opération « Faxez la liberté », lancée le 26 octobre par la FDC
en collaboration avec l’hebdomadaire Actuel.
18-22 décembre : Visite en Chine du secrétaire national adjoint du Parti socialiste
français, Gérard le Gall. Il rencontre Qiao Shi, membre du Bureau politique du PCC,
mercredi 20 en abordant le thème des relations entre les deux Partis. Il souhaite que
les efforts des deux pays mènent ç une amélioration des relations diplomatiques.
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1990
11 janvier : Déclaration du ministère des Affaires étrangères chinois à propos de la
vente des frégates à Taïwan. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires
étrangères a déclaré par rapport à la décision française de ne pas autoriser la vente des
frégates à Taïwan, obéir aux principes de l’établissement des relations diplomatiques
entre les deux pays. Cela sera favorable et permettra d’améliorer et de développer les
relations bilatérales.
27 février : Charles Malo, ambassadeur de France à Beijing (Pékin), est convoqué. Le
motif des accusations dans le domaine des droits de l’homme, ainsi que l’expulsion
d’une journaliste française, Danielle Loustallot et son interprète Fabienne Goldberg.
Selon la presse officielle chinoise, ils ont « violé les règlements, régissant le travail
des journalistes en Chine ».
3 mars : Confirmation de la reprise des échanges français avec la Chine. Le Premier
ministre français, Michel Rocard, confirme au quotidien japonais Nihon Keizai, la
reprise des échanges avec Beijing (Pékin) : « les sanctions économiques face à un
pays qui a de tels moyens d’autarcie ne semblent pas très efficaces, de sorte que nous
reprendrons progressivement un commerce que nous n’avions pas vraiment
interrompu ».
11 avril : Protestation de l’ambassadeur de Chine à Paris contre l’accueil d’une
dissidente chinoise, Chai Ling et contre le futur lancement d’un bateau radio.
25 avril : Report de la visite à Beijing (Pékin) de l’envoyé spécial du Premier ministre
français, Jean de Lipkowski.
5-6 septembre : Visite en France du vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Tian
Cengpei, à l'invitation du Ministère français des Affaires étrangères.
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27 septembre : Rencontre des deux ministres des Affaires étrangères, Qian Qichen et
Roland Dumas, au cours d’une réunion de l’ONU à Paris. Roland Dumas déclare à
cette occasion que « la France veut garder et développer ses relations avec la Chine ».
19 décembre : Signature d’un contrat pour la création d’une société mixte
franco-chinoise. Le Président du groupe PSA et d’automobiles Citroën, Jacques
Calvet, et Chen Qingtai, Président de la société chinoise SAW signent un contrat pour
la création d’une société mixte, après trois ans de négociation. Le projet de Citroën
porte sur la construction annuelle de 150,000 voitures de type ZX, la dernière-née du
constructeur français dans deux usines installées à Wuhan et à Xiangfan. La
production devrait démarrer en 1995. L’investissement de Citroën, estimé à 4 millions
de francs, est le plus gros contrat des entreprises françaises depuis 1964.
1991
10 janvier : Protestation mesurée de Beijing (Pékin) à la suite de la visite du ministre
français de l’Industrie, Roger Fauroux, à Taïwan. Le porte-parole du ministère chinois
des Affaires étrangères condamne la visite de façon mesurée. Il s’agit d’une « erreur
inacceptable qui va à l’encontre des principes ayant présidé à l’établissement des
relations diplomatiques franco-chinoises » en 1964 et « des engagements de la France
à ne pas reconnaître qu’une seule Chine ».
14-19 janvier : Visite du vice-Premier ministre chargé de la Planification de l’Etat,
Zou Jiahua, à l’invitation du ministre français du Commerce extérieur Jean-Marie
Rausch. Il est le premier membre du gouvernement chinois reçu officiellement par la
France depuis le refroidissement en 1989. Les entretiens portent sur l’ensemble de la
coopération économique franco-chinoise, après la reprise des protocoles financiers
permettant aux industries françaises d’exporter en Chine.
28 janvier-1er février : Le ministre français du Commerce extérieur Jean-Marie
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Rausch, à l’invitation du ministère chinois du Commerce extérieur, se rend en visite
officielle en Chine avec un groupe commercial. Cette visite scelle, à la satisfaction de
Beijing (Pékin), la reprise pleine et entière de la coopération franco-chinoise, vingt
mois après le refroidissement des relations franco-chinoise. Les deux ministres du
Commerce extérieur discutent pour les collaborations dans les différents domaines.
2-8 février : La délégation, accompagnée du président du Comité de Stimulation
commerciale internationale de Chine, Zhen Hongye, à l’invitation du Comité des
Stimulations économiques française, effectuent une visite en France. Les deux
comités ont signé le 6 février un accord portant sur la collaboration économique entre
les deux pays. Ils organisent ensemble à Paris le 6 février une conférence au sujet de
l’avenir de l’économie chinoise, faisant savoir ses succès après l’ouverture de la
politique de la Chine. Le Président du Comité de France rend compte de ce
développement et il souligne son optimisme à porpos du développement économique
chinois.
4-10 mars : Visite du secrétaire général du Rassemblement pour la République
française (RPR), Alain Juppé en Chine à l'invitation du PCC et reçu par le Président
de la République de Chine Jiang Zemin.
5 mars : Le ministre chinois de l’Industrie de la Mécanique et de l’Electricité, He
Guanyan, à l’invitation du directeur général de la Compagnie Citroën, participe à la
cérémonie du lancement de la première Citroën ZX en France.
20-22 mars : Visite en Chine de Thierry de Guiringaud, secrétaire d’Etat français
chargé des relations culturelles internationales à l'invitation du ministère chinois des
Affaires étrangères. Il s’entretient notamment avec Wu Wueqian, vice-Premier
ministre chinois, et Qian Qichen, ministre chinois des Affaires étrangères. Thierry
Guiringaud annonce le jeudi 21 que le chef de la diplomatie française M. Roland
Dumas se rendra à son tour en Chine dans les mois qui viennent. La visite de Roland
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Dumas consacrera la normalisation des relations franco-chinoise dans tous les
domaines.
13-18 avril : Voyage en France de Zhu Rongji, vice-Premier ministre chinois et maire
de Shanghai, accompagné d’une délégation de la municipalité de Shanghai, à
l’invitation du ministre français du Travail Jean-Pierre Soisson. Il est reçu par Michel
Rocard, Premier ministre français, Roland Dumas, ministre français des Affaires
étrangères, Jean-Pierre Soisson, Jean-Marie Rausch, ministre français du Commerce
extérieur et Maurice Faure, ministre de l’Industrie.
29 avril-1er mai : Visite en Chine du ministre français des Affaires étrangères, Roland
Dumas, à l'invitation de son homologue chinois. On signe un accord consulaire sur
forme d’échange de lettre du 29 avril. Le gouvernement français établit un consulat
général à Guangzhou (Canton), dont la circonscription consulaire comprendra les
provinces du Guangdong, de Hainan et du Fujian; le gouvernement chinois établit un
nouveau consulat général dont le siège et la circonscription consulaire seront
déterminés par voie diplomatique.
28 mai-4 juin : Voyage en France du vice-ministre chinois de l’Industrie du textile,
Wang Cenjing, accompagné d’une délégation de l'industrie du textile, à l’invitation du
Comité des fabricants de machines textiles français.
17-24 juin : Visite en France du ministre chinois des ressources humaines, Zhao
Dongwan, à l’invitation du ministre français du Travail Jean-Pierre Soisson.
24 juin : La banque BNP signe un accord d’une aide de 2 milliards de francs à la
Chine pour la période 1991-1995.
25 juin : Signature du protocole financier franco-chinois de l’année à Beijing (Pékin).
D’après cet accord, le gouvernement français fournira le crédit mixte d’un montant de
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2,141 milliards francs pour cinq projets.
28 juin : La Compagnie Air France a ouvert la nouvelle ligne d’avion de Paris à
Beijing (Pékin) en passant par Ribéria.
20-25 juillet : Visite du président du Comité financier du Sénat français, Christian
Poncelet en Chine à l’invitation du Comité national de la Conférence consultative
politique du Peuple chinois.
7-17 septembre : Visite du président du Comité des Chambres de l’Assemblée
nationale française, Paul Girond, accompagné d’un groupe en Chine.
23 septembre : Les deux ministres des Affaires étrangères, MM. Qian Qichen et
Roland Dumas, se rencontrent à l’occasion de la participation à la session de l’ONU.
27 septembre : Communiqué du ministère des Affaires étrangères françaises sur la
vente de frégates sans armement à Taïwan. Le gouvernement français décide
d’autoriser les industriels français à entreprendre des négociations avec Taïwan sur la
vente de frégates sans armement. Il publie un communiqué, en déclarant que c’est une
affaire purement commerciale qui n’implique aucune relation officielle avec les
autorités de Taïwan. Pour tenir compte des préoccupations de la Chine concernant sa
sécurité et l’intégrité du territoire, la France réaffirme les termes de la déclaration
conjointe franco-chinoise de janvier 1964 que « le gouvernement de la République
populaire de Chine est le seule gouvernement légal de la Chine ».
22 octobre : Rencontre des deux ministres des Affaires étrangères chinois et français,
Qian Qichen et Roland Dumas à l’occasion de la session internationale sur le
problème du Cambodge à Paris. Ils abordent la situation internationale et les relations
franco-chinoises.
30 octobre-8 novembre : Visite en France du vice-ministre chinois de l’Industrie
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chimique Lin Yincai, accompagné d’une délégation du domaine chimique.
1er-7 novembre : Voyage en Chine de Jacques Chirac, maire de Paris, à l’invitation du
Comité diplomatique du peuple chinois. Il est reçu par le Président de la République
chinoise Jiang Zemin.
18-24 novembre : Visite en Chine du secrétaire d’Etat français aux Affaires étrangères
Alain Vivien, à l’invitation du vice-ministre chinois des Affaires étrangères Tian
Zengbei. Il évoque la question des droits de l’homme et conteste la conception
chinoise des droits de l’homme « selon lequel ces droits seraient liés au degré de
développement de chaque pays et aux spécifiés nationales ». Il a qualifié
d’ « insuffisant » le Livre blanc présent récemment par Beijing (Pékin).
9-15 décembre : Voyage de Li Shuzhen, vice-ministre chinois des Relations
extérieures du Comité central du PCC en France et entretiens avec des responsables
français des Partis communiste et socialiste à Paris.
9-15 décembre : Voyage en France du ministre chinois du Chemin de fer et des voies
ferrées, Li Senmao. Signature d’un accord auxiliaire de collaboration dans le domaine
ferroviaire.
11-17 décembre : Visite en France de la délégation de la Région autonome mongole
intérieure de Chine et signature du protocole de la collaboration technique avec la
Société française Astraux.
17-20 décembre : Dominique Strauss-Kahn, ministre de l’Industrie française,
participe à la 9ème réunion de la Société mixte France-Chine à Beijing (Pékin), à
l’invitation du ministre chionis du Commerce extérieur Li Lanqing. Il est aussi reçu
par le Premier ministre chinois Li Peng.
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1992
31 janvier : Rencontre du Président de la République française François Mitterrand et
du Premier ministre chinois Li Peng à l’occasion du banquet au Sommet du Conseil
de sécurité de l’ONU.
11 avril : Citroën conclu les derniers accords qui lui permettent de produire et de
commercialiser en Chine à travers une société mixte.
31 juillet-1er août : Visite à Beijing (Pékin) du ministre de l’Industrie et du Commerce
extérieur Dominique Strauss-Kahn.
2 septembre : Protestation de la France contre l’arrestation d’un dissident et
l’expulsion de deux journalistes français des autorités chinoises. Le Quai d’Orsay
regrette la mesure prise contre les journalistes français.
11-18 septembre : Visite en France du vice-ministre chinois du Commerce extérieur
Gu Yongjiang.
26 novembre : Tian Zengbei, vice-ministre chinois des Affaires étrangères convoque
Charles Malo, ambassadeur français à Beijing (Pékin), pour protester contre la
signature du contrat de vente des Mirages 2000-5 à Taïwan. Il demande au
gouvernement français d’annuler ce contrat, la vente des Mirages 2000-5 étant
considérée comme une intervention grave dans les affaires intérieures chinoises et
dans la souveraineté de l’Etat. Elle s’oppose à la cause de l’unification de la Chine.
27 novembre : Déclaration du porte-parole du ministre des Finances et des échanges
chinois à propos de la signature du contrat de la vente des Mirages français à Taïwan.
Il indique que la vente des Mirages à Taïwan est intervenue dans les relations des
échanges entre la Chine et la France ; et qu'elle interrompt le développement des
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projets en discussions. Il espère que la France annulera le plus rapidement possible le
contrat avec Taïwan, en mettant en avant les intérêts communs et à long terme avec la
Chine.
29 novembre : Communiqués des deux Comités des Affaires étrangères de
l’Assemblée nationale du peuple et de la Conférence consultative politique chionis
contre l’autorisation de vente de Mirages à Taïwan. Ils soulignent que la livraison des
Mirages 2000 à Taïwan nuit gravement à la politique intérieure de la Chine et à la
réunification avec Taïwan, en menaçant la sécurité de la Chine continentale.
23 décembre : Jiang Enzhu, vice-ministre des Affaires étrangères chinois, évoque
l’ambassadeur français Charles Malo, pour lui signifier la fermeture du consulat
général à Guangzhou (Canton) d’ici un mois, en déclarant : « la partie chinoise
considère que la France possède le Consulat général seul à Guangzhou dans ce cas-là,
il ne convient pas de continuer cette situation. »
1993
7 janvier : Le Quai d’Orsay confirme les déclarations diplomatiques chinoises selon
lesquelles la France aurait récemment informé Beijing (Pékin) de l’autorisation
donnée à l’exportation de soixante Mirage 2000-5 à Taïwan. Beijing (Pékin) considère
cette vente comme un acte grave d’ingérence dans les affaires intérieures chinoise. Le
même jour, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois semble durcir
le ton, déclarant que le geste de la France détériore gravement les rapports d’amitié
entre les deux pays.
10 janvier : Le ministre français des Affaires étrangères Roland Dumas, déclare au
Grand Jury RTL-Le Monde que « la fourniture d’avions de chasse à Taipei devrait être
considérée comme une décision à caractère commercial, puisqu’elle ne va pas
nécessairement affecter l’équilibre des forces dans le détroit de Taïwan », « cette
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décision ne devrait pas compromettre les bonnes relations entre la Chine. La France
n’a qu’une seule politique à l’égard de la Chine, et de la seule Chine, celle de Beijing
(Pékin) ».
22 janvier : Fermeture par le gouvernement chinois du Consulat général français de
Guangzhou (Canton) conformément à sa décision du 23 décembre 1992.
23 mars : Qian Qichen, ministre chinois des Affaires étrangères, déclare au cours
d’une conférence de presse à Beijing (Pékin) : La Chine espère qu'un gouvernement
de droite en France rectifiera les décisions erronées du cabinet Bérégovoy, faisant
implicitement référence à la vente d’avions de combat français à Taïwan. Il souhaite
que ce gouvernement travaille pour le renforcement des relations sino-françaises.
12-16 mai : Voyage en Chine de Valéry Giscard d’Estaing, Président de la
Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française pour
réchauffer des relations avec la Chine. Il rencontre les plus hauts dirigeants chinois
tels que Jiang Zemin, Président chinois, Zhu Rongji, vice-Premier ministre. Il estime
que le gouvernement français devait se donner les moyens politiques de rétablir avec
la Chine populaire, un climat de confiance permettant d’imprimer une nouvelle
impulsion aux relations très dégradées.
2 juin : Déclaration des Douze sur le Tibet en vue de soutenir la protestation des
minorités.
9-14 juillet : La délégation conduite par trois émissaires, Jacques Fridemann,
conseiller du Premier ministre et ancien patron d’Air France, Jean-David Levitte,
directeur du département d’Asie au Quai d’Orsay et un responsable du ministère de la
Défense, est arrivé le 9 juillet à Beijing (Pékin) pour expliquer les ventes d’amrements
à Taïwan et examiner ce qu’il est possible de faire afin d’améliorer les relations
bilatérales. Jacuqes Fridmann rencontre le samedi 10, Zhu Rongji, vice-Premier
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ministre chinois, auquel il remet une lettre du Premier ministre français Edouard
Balladur au Premier ministre chinois Li Peng. Zhu souligne l’espoir que le présent
gouvernement français adopte des mesures concrètes en vue de ramener les relations
dans le droit chemin sur la base des principes ayant présidé à l’établissement des
relations diplomatiques sino-françaises en 1964.
16 novembre : Entretien à Paris entre le Président français François Mitterrand et le
Dalaï- lama.
25 novembre : Protestation de la Chine contre l’entretien privée accordée le 16
novembre par le Président Mitterrand au Dalaï- lama, s’agissant d’une ingérence. La
Chine considère que le Dalaï- lama s’engager depuis longtemps dans des activités
visant à diviser la patrie et à saboter l’unité nationale.
23-28 décembre : Visite en Chine de Jacques Friedmann, envoyé spécial du Premier
ministre français Edouard Balladur pour la normalisation des relations d’amitié et de
coopération. La Chine réaffirme sa position de principe concernant le problème de
Taïwan, c'est-à-dire que « le gouvernement français reconnaît le gouvernement de la
République populaire de Chine comme l’unique gouvernement légal de la Chine et
Taïwan comme une partie intégrante du territoire chinois ».
1994
12 janvier : Communiqué conjoint de Paris et de Beijing (Pékin) à propos de la
normalisation des relations entre les deux pays. Les deux gouvernements arrivent aux
conclusions suivantes : « La partie française confirme qu’elle reconnaît le
gouvernement de la République populaire de Chine comme l’unique gouvernement
légal de la Chine, et Taïwan comme une partie intégrante du territoire chinois. La
partie chinoise réaffirme de son côté que la vente d’armes de quelque type que ce soit
à Taïwan porte atteinte à sa souveraineté, à la sécurité et à la réunification de la Chine.
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Le gouvernement chinois s’y oppose fermement. Pour tenir compte de ces
préoccupations, le gouvernement français s’engage à ne pas autoriser à l’avenir les
entreprises françaises à participer à l’armement de Taïwan. Edouard Balladur
effectuera une visite officielle en Chine dans un avenir proche pour un nouveau départ
des relations franco-chinoises.
22-24 janvier : Qian Qichen s’entretient à Paris avec le Président François Mitterrand,
le Premier ministre Edouard Balladur et le ministre des Affaires Alain Juppé pour
scelle la réconciliation bilatérale et, faire le bilan des relations détériorées. Le
Président Mitterrand souhaite donner un tour nouveau aux relations bilatérales. Il
souhaite également que les deux pays s’engagent dans la voie d’une coopération
notamment économique, plus étroite.
27 janvier : Célébration du trentième anniversaire de l’établissement des relations
diplomatiques entre les deux pays. Le ministère chinois des Affaires étrangères a
donné à Beijing (Pékin) un banquet en l’honneur d’Alain Peyrefitte, envoyé spécial
du Premier ministre français. Le chef de la diplomatie chinoise Qian Qichen confirme
au banquet que le Président Mao Zedong et le général de Gaulle ont eu la
clairvoyance politique d’établir des relations diplomatiques il y a trente ans : « C’est
parce que nous avons des points communs dans certaines affaires internationales.
Nous avons non seulement des intérêts aujourd’hui, mais encore dans le 21ème siècle.
Nous gardons de bonnes relations amicales, et ce sera favorable à la paix et à la
stabilité dans le monde ». De son côté Alain Peyrefitte souhaite des amitiés
franco-chinoises « éternelles ». Et le fils du général de Gaulle, Philippe de Gaulle,
général d’armée de la marine déclare que la décision de son père est le symbole d’une
politique diplomatique indépendante appliquée par la France, pays souverain. Cette
indépendance nationale est un de nos points communs parmi les plus importants.
Aujourd’hui nous devons protéger et développer les relations d’amitié que nous avons
tissées depuis 1964. »
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7-10 avril : Le Premier ministre français Edouard Balladur fait un voyage en Chine
afin de rétablir le dialogue interrompu depuis 1991. Il est reçu par le Président chinois
Jiang Zemin, son homologue chinois Li Peng et le ministre des Affaires étrangères
Qian Qichen. Li Peng souligne que « nous admirons les efforts fait par le Premier
ministre Edouard Balladur ». D’ici sept ans, la Chine importe pour une valeur de mille
milliards de Dollars. Cela donnera l’occasion à chacun des pays de développer des
relations économiques, notamment dans les domaines des communications, de
l’industrie, de l’énergie et des télécommunications où les entreprises françaises sont
prioritaires. A propos de la question des droits de l’homme, Edouard Balladur indique
que « la France n’a pas l’intention d’intervenir dans les affaires intérieures des autres
pays. Cependant, il est possible de discuter des droits de l’homme sur une base
d’égalité ». Le Premier ministre français souligne devant les
journalistes : « L’importance que la France, patrie des droits de l’homme, attache au
respect des droits de l’homme dans ses relations avec les différents pays au monde.
Mais, il faut pour cela tenir compte des traditions de chacun et du rythme de
m’évolution propre à chacun ». Le Président chinois Jiang Zemin déclare que « nous
avons des points communs dans les affaires internationales et non des conflits
d’intérêts et que si nous entretenons de bonnes relations diplomatiques, nous devrions
améliorer notre collaboration économique ». A cette occasion, Edouard Balladur
remet au Président chinois une invitation du Président Mitterrand proposant une visite
d’Etat en France.
14 avril : Entretien à Paris entre Gérard Longuet, ministre français de l’Industrie des
Postes et Télécommunications et du Commerce extérieur et Shi Dazhen, ministre
chinois de l’énergie électrique.
2-9 juillet : Gérard Longuet se rend en Chine avec une délégation de 120 chefs
d’entreprises français avec pour enjeu la réouverture du marché chinois aux
entreprises françaises. Ils sont reçus par le Président Jiang Zemin. Le 4 juillet une
série de contrats et de projets sur plusieurs années est signée entre les deux pays pour
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un montant global de 6,8 milliards de francs.
8-12 septembre : Le Président Jiang Zemin effectue une visite d’Etat en France à
l’invitation du Président Mitterrand afin d’entretenir la réconciliation des deux pays.
Le lendemain, le Président Mitterrand accueille son homologue chinois à l’Aéroport
d’Orly où il déclare souhaiter que nos deux pays retrouvent un climat de sérénité et de
travail. Le Président Jiang Zemin déclare : « Les rapports entre les deux pays se sont
rétablis et rengagés dans la bonne voie d’un développement favorable après avoir
traversé une période de vicissitude », « profondément conscient de l’importance qu’il
y a une préserve les bonnes relations de coopération et de la nécessité de renforcer la
coopération et les échanges ». La visite du Président chinois s’est soldée par la
signature d’accords pour une montant total de 15,8 milliards de francs, dont 2,5
milliards signé mercredi 7 septembre répartis en 800 millions de contrats fermes et 1,7
millions de lettres d’intention et mémorandum. Ces 13,3 milliards de francs se
décomposent en 900 millions de contrats fermes, le reste, soit 12,4 milliards de francs
n’étant que des lettres d’intentions et des promesses d’investissements français en
Chine.
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INDEX DES NOMS DE PERSONNES
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Achille-Fould Aymar : 321
Alliot-Marie Michèle : 303
Avice Edwige : 333
Ba Jin : 326
Bai Xiangguo : 153, 154, 317, 318
Bailly Jean : 154
Balladur Edouard : 239, 240, 241, 242, 243, 244, 330, 345, 346, 347
Barre Raymond : 173, 178, 323
Barthes Roland : 131
Battet Jean-Louis : 303
Beaufret Jean-Pascal : 331
Beaumarchais Jacques de : 105
Bentégeat Henri : 303
Bérégovoy Pierre : 235, 344
Bettencourt André : 152, 316, 317, 320
Bonaparte Napoléon : 15
Bouissou Michel : 97
Boyon Jacques : 330
Brejnev Léonid : 216
Cain Julien : 60
Calvet Jacques : 337
Cao Gangchuan : 302, 303
Ceyrac François : 323
Chaban-Delmas Jacques : 155, 219, 319
Chai Ling : 336
Chaine Christine : 90
Chamant Jean : 154
Charbonnel Jean : 319
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Chayet Claude : 110, 131, 239, 313
Chen Geng : 43
Chen Lemin : 72
Chen Muhua : 326
Chen Puru : 327
Chen Qingtai : 337
Chen Yi : 80, 82, 130, 314
Cheysson Claude : 214, 326
Chi Haotian : 302
Chirac Jacques : 13,15, 219, 237, 294, 295, 296, 302, 305, 306, 307, 322, 329, 330,
341
Cogan Charles : 116
Couve de Murville Maurice : 96, 119, 120, 154, 316
Cresson Edith : 328
Delaunay Jean-Luc : 303
Deng Xiaoping : 61, 123, 169, 170, 171, 172, 173, 180, 181, 215, 217, 223, 224, 226,
227, 228, 292, 320, 321, 323, 325, 328, 329
Deng Yingchao : 176, 325
Deniau Jean-François : 174, 175, 324
Domenach Jean Luc : 130, 217
Dong Biwu : 315, 316
Douin Jean-Philippe : 303
Duhamel Jacques : 97
Dumas Roland : 225, 226, 231, 233, 235, 237, 328, 332, 333, 335, 337, 338, 339, 340,
343
Eisenhower Dwight David : 53, 66, 67, 74
Eyraud Henri : 131
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$
Fang Yi : 174, 324
Fauchier Jacques : 174, 324
Faure Edgar : 11, 14, 55, 61, 77, 78, 79, 80, 82, 89, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98, 99,
100, 101, 102, 104, 105, 109, 116, 118
Faure Lucie : 60
Faure Maurice : 339
Fauroux Roger : 228, 337
Férier Gilles : 40
Fiterman Charles : 327
François-Poncet Jean : 176
Friedmann Jacques : 239, 240, 241, 344, 345
Froment-Meurice Henri : 317
Fu Quanyou : 302
Gall Gérard le : 225
Galley Robert : 320
Garret Martin : 61, 62, 106, 117
Gaulle Charles de : 11, 12, 14,28, 34, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67,
68, 69, 71, 72, 73, 76, 77, 79, 80, 82, 83, 84, 85, 86, 91, 92, 94, 96, 99, 100, 102, 103,
104, 105, 106, 108, 109. 110, 111, 114, 115, 116, 117, 118, 120, 127, 128, 133, 134,
150, 151, 159, 161, 166, 176, 180, 217, 236, 240, 292, 313, 314, 316, 325, 346
Gaulle Philippe de : 243, 346
Georges-Picot Guillaume : 80
Germain Hubert : 319
Giraud André : 324
Girond Paul : 340
Giscard d’Estaing Valéry : 154, 166, 170, 171, 172, 173, 175, 176, 177, 182, 237, 240,
317, 320, 321, 322, 344
Goldberg Fabienne : 336
Gorbatchev Mikhaïl : 216, 217
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#
Grégory Bernard : 321
Gu Hongming : 301
Gu Mu : 173, 324
Gu Yongjiang : 342
Guillermaz Jacques : 50, 104
Guiringaud Didier : 329, 330
Guiringaud Louis de : 322, 323, 324
Guiringaud Thierry de : 338
Guo Boxiong : 303
Guo Moro : 153, 317, 318
Hamon Léo : 78
Hao Yufan : 67
Harrison William Kelly : 45
He Guanyan : 338
Herbert Michel : 331
Hô Chi Minh : 38, 39, 40, 42, 48, 49, 57, 58
Hu Jintao : 296, 304, 306
Hu Yaobang : 211, 219, 325, 329
Hua Guofeng : 170, 173, 175, 321, 322, 323, 324, 325
Hua Yongsheng : 316
Huang Hua : 173, 175, 323, 324, 325
Huang Zhen : 110, 126, 150, 151, 313, 314, 315, 316
Ikeda Hayato : 117
Jean-Ortiz Paul : 235
Ji Pengfei : 154, 318, 319
Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek) : 18, 21, 22, 40, 76. 80, 89, 90, 94, 96,102, 103, 104,
162
!"#$
$
Jiang Enzhu : 235, 343
Jiang Zemin : 234, 239, 244, 296, 338, 341, 344, 347, 348
Job Jean-Pierre : 303
Jobert Michel : 154, 319, 326
Jospin Lionel : 296, 325
Jouve Edmond : 83, 101
Joyaux François : 53, 97, 119, 241
Juppé Alain : 242, 295, 338, 346
Kelche Jean-Pierre : 303
Kennedy John : 58
Khrouchtchev Nikita : 28, 67, 68, 73, 74, 75, 132
Kissinger Henry : 118, 134
Kristeva Julia : 131
Lanxade Jacques : 303
Levitte Jean-David : 233, 240, 344
Li Lanqing : 228, 341
Li Peng : 239, 240, 295, 329, 341, 342, 345, 347
Li Qiang : 322, 323
Li Qingquan : 105
Li Shuzhen : 341
Li Senmao : 341
Li Xiannian : 155, 172, 219, 317, 321, 325, 330
Liang Guanglie : 303
Lin Yincai : 341
Lipkowski Jean de : 336
Liu Huaqing : 302
Liu Shan : 132
Liu Shaoqi : 313, 314
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#
Liu Shunyao : 302
Liu Xiangping : 322
Liu Ziqing : 72
Liu Zhicheng : 331
Longuet Gérard : 239, 244
Loustallot Danielle : 336, 347
MacArthur Douglas : 44
Malo Charles : 232, 332, 334, 335, 336, 342, 343
Manac’h Etienne : 50, 71, 76, 104, 119, 150, 151, 315, 321
Mao Zedong (Mao Tse-tung) : 11, 21, 28, 29, 30, 33, 34, 42, 46, 54, 55, 58, 67, 69, 73,
74, 76, 77, 79, 82, 86, 89, 99, 103, 104, 111, 115, 120, 122, 123, 125, 130, 134, 151,
152, 153, 154, 155, 157, 169, 175, 180, 292, 313, 316, 318, 319, 322, 346
Malraux André : 314
Marchais Georges : 326
Marshall Georges : 64
Mauroy Pierre : 327
Méhaignerie Pierre : 220, 330
Mendès France Pierre : 12,26, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 77, 78, 80, 154, 317
Mermaz Louis : 326
Méry Guy : 322
Messmer Pierre : 319
Millon Carles : 303
Missoffe François : 322
Mitterrand Danielle : 237, 238, 332
Mitterrand François : 10, 13,14, 82, 211, 213, 218, 219, 225, 237, 238, 242, 244, 293,
325, 326, 327, 329, 330, 332, 333, 342, 345, 346, 348
Monory René : 329
Montigny Charles de : 10
Morel-Francoz Robert : 73
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$
Nam Il : 45
Nasser Gamal Abdel : 19, 52
Nehru Jawaharlal : 12, 32, 49, 51
Nie Rongzhen : 130
Nixon Richard : 67, 118, 119, 134, 153, 157, 292
Noir Michel : 329, 330
d’Ornano Michel : 174, 32
Ortoli François-Xavier : 316
Paye Lucien : 313, 315
Pechkoff Zinovi : 103
Pelege Michel : 331
Peng Dehuai : 44
Peyrefitte Alain : 15, 57, 59, 60, 66, 81, 96, 105, 106, 131, 153, 156, 239, 242, 243,
317, 346
Plaisant François : 239, 243
Pompidou George : 133, 134, 150, 151, 152, 153, 154, 155, 156, 157, 158, 162, 176,
180, 292, 317, 318, 319
Poncelet Christian : 296, 325, 340
Qian Yongchang : 328
Qian Qichen : 226, 235, 242, 243, 331, 335, 337, 338, 340, 344, 346, 347
Qiao Guanhua : 155, 172, 173, 318, 320, 321, 322
Qiao Shi : 295, 335
Quilès Paul : 328
Raimond Jean-Bernard : 329, 331
Rannou Jean : 303
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$
Rausch Jean-Marie : 228, 337, 339
Richer Philippe : 217
Rocard Michel : 224, 327, 333, 336, 339
Rogers William : 160
Saint-Mleux André : 72
Sauvagnargues Jean : 172, 173, 320, 321
Scheyven Louis : 72
Schumann Maurice : 153, 162, 316, 318
Shi Dazhen : 244, 347
Shi Yunsheng : 302
Soisson Jean-Pierre : 321, 339
Sollers Philippe : 131
Song Zhiguang : 313
Soulitskaïa Tatiana : 113
Staline Joseph : 28, 73
Strauss-Kahn Dominique : 341
Sudreau Pierre : 320
Tanaka Kakuei : 157
Tian Zengbei : 336, 341, 342
Truman Harry : 24, 41, 42
Vaïsse Maurice : 33, 102, 131
Veil Simone : 322
Vivien Alain : 341
Wang Cenjing : 339
Wei Guoqin : 42
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$
Wolsztynski Richard : 303
Wu Xueqian : 327, 328, 331, 338
Wuer Kaixi : 228, 334
Xu Xiangqian : 130
Yan Jiaqi : 228
Yang Deshi : 326
Yang Shangkun : 332
Ye Jianying : 130, 334
Ye Rutang : 330
Yu Man : 320
Zeng Tao : 319
Zhang Xichang : 15, 59, 60, 82, 99, 100, 127
Zhao Dongwan : 339
Zhao Ziyang : 219, 327, 329
Zhen Hongye : 338
Zheng Tuobin : 328, 331
Zhong Fuxiang : 321
Zhou Enlai : 12, 14, 21,26, 32, 40, 44, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 60, 66, 67,
72, 77, 78, 79, 80, 89, 90, 92, 93, 94, 95, 98, 99, 100, 101, 105, 129, 152, 153, 155,
156, 157, 169, 175, 176, 314, 315, 316, 318, 319, 325
Zhou Jue : 237, 332, 335
Zhou Rongyao : 72
Zhou Xinxin : 132
Zhu Lin : 82
Zhu Rongji : 240, 295, 339, 343, 344, 345
Zou Jiahua : 337
359
BIBLIOGRAPHIE
360
PARTIE FRANÇAISE
361
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Direction de l’information légale et administrative :
http://www.journal-officiel.gouv.fr/frameset.html
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République de France : du 29 juillet 1970, du 18 septembre 1970, du 15 novembre 1970,
du 17 novembre 1970, du 1er octobre 1971, du 14 septembre 1973, du 13 mai 1975, du 16
mai 1975, du 1er septembre 1975, du 15 octobre 1979, du 16 juin 1980, du 3 mai 1983, du
7 juin 1989, du 27 septembre 1991, du 12 janvier 1994.
Accords et Traités bilatéraux entre la France et la RPC entre 1964 et 2007, sources
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GAULLE Charles de, Discours et messages, tome I, Paris, Plon, 1970, 680 p.
Discours et messages, tome II, Paris, Plon, 1970, 662 p.
Discours et messages, tome III, Paris, Plon, 1970, 443 p.
Discours et messages, tome IV, Paris, Plon, 1970, 331 p.
Discours et messages, tome V, Paris, Plon, 1970, 431 p.
Mémoires de guerre, tome I, Paris, Plon, 1970, 680 p.
Mémoires de guerre, tome II, Paris, Plon, 1970, 712 p.
Mémoires de guerre, tome III, Paris, Plon, 1970, 653 p.
Mémoires d’espoir, tome I, Paris, Plon, 1970, 314 p.
Lettres, Notes et Carnets, janvier 1964-juin 1966, Paris, Plon, 1986, 366 p.
GUILLERMAZ Jacques, Mémoires 1937-1993 : une vie pour la Chine, Paris, Robert
Laffont, 1994,447 p.
MANAC’H Etienne, Mémoires d’Extrême-Asie, vol.1, Paris, Fayard, 1977, 593 p.
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$
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS .............................................................................................................................................2
REMARQUES PRELIMINAIRES ...................................................................................... 4
RES UME...................................................................................................................................................................5
SOMMAIRE ............................................................................................................................................................7
INTRODUCTION ..................................................................................................................................................9
PREMIER CHAPITRE RELATIONS EXTERIEURES DE LA NOUVELLE REPUBLIQUE
CHINOIS E DE 1949 A 1964 ..............................................................................................................................17
I-1 LA NOUVELLE REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE ET SA POSITION INTERNATIONALE DE 1949-1964
...............................................................................................................................................................................19
A) La reconnaissance de la RPC : Question délicate pour la communauté internationale .............21
B) Dans une atmosphère tendue avec Moscou et Washington, Beijing se rapproche vers l’Europe
occidentale ......................................................................................................................................................26
I-2 LA POLITIQUE EXTERIEURE DE LA RPC DE 1949 A 1964 .........................................................................29
A) La politique extérieure chinoise de 1949 à 1955 ................................................................................30
B) La politique extérieure de la RPC de 1955 à 1964 ............................................................................32
CHAPITRE II DE L’OPPOS ITION AU RAPPROCHEMENT : RAPPORTS ENTRE LA
CHINE POPULAIRE ET LA FRANCE AVANT 1964...............................................................................37
II-1 OPPOSITION ENTRE BEIJING ET PARIS DANS LES CONFLITS D’INDOCHINE, DE COREE ET DE LA
DECOLONISATION ................................................................................................................................................38
A) La première guerre d’Indochine (1946-1954).....................................................................................38
B) La guerre de Corée (1950-1953) ...........................................................................................................43
C) Premier pas franchi entre Paris et Beijing (Pékin) à la conférence de Genève............................46
D) Le retour des tensions entre Paris et Beijing (Pékin) après la conférence de Bandung de 1955
..........................................................................................................................................................................51
II-2 RAPPROCHEMENT DE LA RPC ET LA FRANCE .........................................................................................56
A) Stratégie diplomatique du général de Gaulle......................................................................................56
B) Double refus des hégémonies par Paris et Beijing (Pékin) ..............................................................69
C) Beijing (Pékin), vers les liens avec Paris.............................................................................................76
CHAPITRE III LA RECONNAISSANCE DE LA REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE
PAR LA FRANCE ................................................................................................................................................88
III-1 LA SOUVERAINETE ET LE PROBLEME DE TAÏWAN ..................................................................................90
A) Les divergences entre Beijing et Paris à propos de Taïwan..............................................................91
B) L’inquiétude chinoise quant à la souveraineté....................................................................................94
C) Edgar Faure n’engage pas la rupture avec Taïwan...........................................................................95
III-2 UNE POLITIQUE SOUPLE A PROPOS DE TAÏWAN ......................................................................................98
A) L’accord tacite entre Zhou Enlai et Edgar Faure...............................................................................98
B) La rupture française avec Taïwan ...................................................................................................... 102
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$
C) L’annonce du communiqué conjoint du 27 janvier 1964 ............................................................... 105
III-3 LES REACTIONS INTERNATIONALES APRES L’ANNONCE CONJOINT DU COMMUNIQUE
FRANCO-CHINOIS...............................................................................................................................................111
A) Les opinions favorables.........................................................................................................................111
B) Les opinions critiques........................................................................................................................... 114
C) Les conséquences historiques ............................................................................................................. 117
CHAPITRE IV POINT DE DEPART DES RELATIONS SINO-FRANÇAIS ES ........................... 121
IV-1 LES RELATIONS SINO-FRANÇAISES 1964-1973 ................................................................................... 123
A) La diplomatie chinoise influencée par le gauchisme chinois ........................................................ 125
B) La tension sino-soviétique, la détente en Beijing (Pékin) – Washington et Paris – Moscou ... 128
C) Bilan des relations sino-françaises pendant la Révolution culturelle chinoise.......................... 130
D) Le premier accord relatif aux communications aériennes franco-chinoises du 1er juin 1966.
....................................................................................................................................................................... 136
E) Tous les traités bilatéraux sino-français signés pendant la Révolution culturelle (1966-1976)
....................................................................................................................................................................... 148
IV-2 RENFORCEMENT DES RELATIONS POLITIQUES BILATERALES (1969-1974) ..................................... 150
A) Le renforcement des politiques bilatérales ....................................................................................... 150
B) L’objectif prioritaire de la politique extérieure de la France : le développement économique
....................................................................................................................................................................... 156
C) Faire admettre la RPC à l’ONU ......................................................................................................... 159
IV-3 LA POLITIQUE D’OUVERTURE CHINOISE ET LA DIPLOMATIE ECONOMIQUE FRANÇAISE (1974-1981)
............................................................................................................................................................................ 166
A) Le contexte international du début des années 70........................................................................... 166
B) Le renforcement des dialogues politiques sino-français ................................................................ 171
C) Les succès dans les coopérations économiques sino-françaises .................................................. 177
D) Les échanges de lettres et les accords signés entre 1975 et 1981 ................................................ 184
CHAPITRE V LES RELATIONS FRANCO-CHINOIS ES SOUS LA PRES IDENCE DE
FRANÇOIS MITTERAND (1981-1994) ..................................................................................................... 210
V-1 LES RELATIONS BILATERALES ENTRE 1981 ET 1989 ............................................................................ 212
A) Les relations distantes entre Beijing (Pékin) et Paris (1981-1983).............................................. 213
B) Un renouveau à la suite du voyage du Président Mitterrand en Chine en 1983........................ 218
C) Le développement économique bilatéral (1983-1989) ................................................................... 220
V-2 DIVERGENCES ENTRE BEIJING (PEKIN) ET PARIS ................................................................................. 223
A) Premier refroidissement : affaire de Tian’anmen de 1989............................................................. 223
B) Deuxième refroidissement : les ventes d’armes françaises à Taïwan .......................................... 230
C) La souveraineté nationale et la vente d’armes à Taïwan ............................................................... 234
V-3 RECONCILIATION DES DEUX GOUVERNEMENTS (1993-1994) ............................................................ 239
A) Deux missions de Jacques Friedmann en Chine.............................................................................. 240
B) Après la pluie, vient le beau temps..................................................................................................... 242
C) Les lettres de notes et les accords entre 1983 et 1992 .................................................................... 246
CONCLUS ION................................................................................................................................................... 291
ANNEXE ...............................................................................................................................................................311
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CHRONOLOGIE DES RELATIONS FRANCO-CHINOISES .............................................................. 312
INDEX DES NOMS DE PERSONNES ...................................................................................................... 349
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................ 359
PARTIE FRANÇAISE.................................................................................................................................... 360
PARTIE CHINOISE ....................................................................................................................................... 373
PARTIE AMERICAINE................................................................................................................................. 382
TABLE DES MATIERES ................................................................................................................................ 384
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