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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 1 CHAPITRE 07 LA CIRCULATION EXTRACORPORELLE Mise à jour: Septembre 2013 Précis d’Anesthésie Cardiaque PAC

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 1

CHAPITRE 07

LA CIRCULATION

EXTRACORPORELLE

Mise à jour: Septembre 2013

Précis d’Anesthésie Cardiaque

PAC •

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 2

Table des matières Introduction 2 Machines et circuits 4 Schéma général 4 Amorçage 7 Drainage veineux et réservoir 10 Oxygénateur 14 Echangeur thermique 16 Pompes 16 Circuit artériel et filtres 19 Aspirations 23 Circuit de cardioplégie 24 Drainage du VG 25 Hémofiltration 26 Mini-CEC 28 Anticoagulation en CEC 30 Agents antifibrinolytiques 36 Physiopathologie de la CEC 39 Aspects hématologiques 39 Syndome inflammatoire 43 Hémodynamique 51

Hypothermie 54 Embolies gazeuses 60 Bilan hydrique et métabolique 61 Fonction cérébrale 62

Fonction rénale 70 Fonction hépato-splanchnique 75 Fonction pulmonaire 76 Pharmacologie de la CEC 78 Pharmacocinétique 78

Agents spécifiques 81 Déroulement de la CEC 83 Démarrage de la CEC 83 Surveillance anesthésique 86 Réchauffement 88 Incidents et accidents 89 Place de l’ETO 91 Sevrage de la CEC 101 Purge des cavités gauches 101 Préparation à la mise en charge 102 Mise en charge 104 Période post-CEC 106 Arythmies et pace-maker 109 Administration de protamine 112 Insuffisance ventriculaire 113 Protection myocardique 127 Arrêt par cardioplégie 127 Techniques de cardioplégie 128 Incidents et accidents 132 Que faire en cas de problème ? 132 CEC en chirurgie non-cardiaque 135 Technique de la CEC de soutien 136 Assistance percutanée 139 CEC de réchauffement 142 Perfusion isolée de membres 144 Conclusions 148 Bibliographie 149 Auteurs 161

Ce Chapitre est dédié à la mémoire de Marcel Saudan, le premier perfusionniste lausannois. Introduction La circulation extra-corporelle (CEC) a déjà une longue histoire. L'idée d'une perfusion artificielle revient au physiologiste français Jean-Jacques Le Gallois qui avait perfusé la tête de lapins décapités pour prouver que la circulation du sang maintenait la fonction de l'organe. Le prototype de machine coeur-poumon avec contrôle de la température a été imaginé en 1884 par von Frey et Gruber, mais c'est Hooker, en 1915, qui a construit le précurseur des oxygénateurs à film: il s'agissait d'un disque de caoutchouc sur lequel le sang se répandait en un film oxygéné par contact direct avec un flux d'O2. Ces montages avaient peu de succès, car le sang coagulait très rapidement. En effet, il a fallu attendre la découverte de l'héparine en 1916 et celle de la protamine 20 ans plus tard pour que ce problème soit résolu [339]. Ce n'est qu'en 1937 que John Gibbon créa la première machine de CEC complète qui permette la survie d'animaux en laboratoire; l'oxygénateur était un écran à disques rotatifs. En 1953, cette machine permit de fermer avec succès une CIA chez un patient de 18 ans au cours d'une CEC de 45 minutes [126]. Pour Gibbon, c'était l'aboutissement de 23 ans de recherche et de conceptions de

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circuits extracorporels. Il devint ainsi le "père de la CEC" et le premier perfusionniste de l'histoire. Les premiers circuits de CEC étaient encombrants et dangereux; ils demandaient un amorçage de plusieurs litres de sang, et fonctionnaient avec un oxygénateur fait de grands disques plongeant partiellement dans le sang et tournant dans une chambre pleine d'oxygène. Le tout était lavé et réutilisé pour un autre patient. Seuls les tuyaux étaient à usage unique. C'était le cas de la première machine lausannoise, celle de Livio-Mettraux, datant de 1960 (voir Figure 7.2A, page 5). Le problème de l'oxygénateur restait lancinant, car les modèles à disques causaient d'innombrables ennuis et manquaient d'efficacité. Dès 1956, DeWall et Lillehei dessinèrent un système réalisable en plastic et consistant en une chambre où le sang était oxygéné par barbotage de bulles d'oxygène, surmontée d'une chambre de débullage remplie d'un agent anti-mousse et d'un réservoir hélicoïdal. De nouvelles entreprises se lancèrent dans la commercialisation de ces appareils: Bentley™, Travenol™, etc. Le premier appareil de ce type largement utilisé en Europe fut celui de Rygg et Kyvsgaard; c'était un sac de polyéthylène disposable contenant l'ensemble des éléments (voir Chapitre 1, Figure 1.2); il fut très répandu jusqu'à la fin des années soixante-dix parce qu'il était simple, efficace et bon marché. Mais l'oxygénateur à bulles restait une cause majeure d'embolie gazeuse; de plus, dès que la CEC dépassait une heure, le contact direct du sang avec l'air entraînait une dénaturation protéique et une activation du complément qui étaient la cause d'un syndrome inflammatoire systémique massif et très souvent d'un SDRA, que l'on appelait le pump lung. Comme les membranes de dialyse rénale étaient performantes, l'idée vint de les utiliser pour la diffusion de l'O2 sans que ce dernier soit en contact direct avec le sang. On utilisa des plaques d'éthyl-cellulose, de Teflon™ puis de silicone, arrangées en couches ou en tubules. Bien que les problèmes de contact air-sang soient résolus, les oxygénateurs à membranes ont mis du temps à s'imposer à cause de leur complexité et de leur prix. Actuellement, leurs perfectionnements et leur facilité d'utilisation en font les seuls systèmes utilisés dans les machines de CEC; ils consistent en un bloc comprenant l'oxygénateur, le réservoir veineux et l'échangeur thermique (voir Figure 7.6, page 14). A l'exception de la pompe, tous les éléments de la CEC sont maintenant à usage unique. Le circuit comprend également de nombreux systèmes de sécurité qui n'existaient pas sur les premiers modèles: moniteur de bulles, filtres artériels et veineux, monitorage de SaO2 et de SvO2, asservissement de la pompe au niveau du réservoir, etc. Les travaux actuels portent essentiellement sur l'amélioration de la biocompatibilité des surfaces de contact, sur la réduction de la réaction inflammatoire et sur la miniaturisation de tout le système.

Evolution de la technologie

La première CEC clinique date de 1953. A cette époque, l’oxygénateur était fait d’une série de disques rotatifs sur lesquels le sang était étalé en contact avec l’O2. Ce système a été remplacé par les oxygénateurs à bulles, et actuellement par les oxygénateurs à membrane. Tous les composants en contact avec le sang sont maintenant à usage unique (canules, tuyaux, réservoir, oxygénateur, échangeur thermique, filtres) et montés ensemble pour en faciliter la manutention.

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Machines et circuits de CEC Schéma général

Par rapport aux machines historiques, les systèmes actuels sont à la fois plus sûrs et plus sophistiqués, mais ils contiennent toujours les mêmes éléments:

Un réservoir veineux ; Un oxygénateur ; Un échangeur de chaleur ; Une pompe.

Leur but est triple: maintenir la perfusion systémique, assurer les échanges gazeux pour l'O2 et le CO2, et régler la température. Le sang est capté du côté veineux systémique et renvoyé dans l'aorte ou dans une grande artère une fois oxygéné; la circulation pulmonaire est court-circuitée. Tout le matériel en contact direct avec le sang est à usage unique (tuyaux, réservoir, oxygénateur, etc). Le débit théorique assuré est de 2.0 à 2.5 L/min/m2 (70 mL/kg/min) (routine: 2.4 L/min/m2). La pression artérielle est en général maintenue entre 60 et 90 mmHg (voir Hémodynamique, page 51). Le montage général du circuit de CEC est bien standardisé. La partie principale est constituée de 5 éléments qui se succèdent dans l'ordre suivant (Figure 7.1 et Figure 7.2) [167]. Figure 7.1 : Représentations schématiques d'un circuit de CEC. A : avec un oxygénateur à membrane ; celui-ci présentant une certaine résistance, il est placé après la pompe. B : avec un oxygénateur à bulles ; celui-ci présentant peu de résistance, il est placé entre le réservoir veineux et la pompe. 1: canule de drainage veineux. 2: réservoir veineux. 3: pompe principale. 4: oxygénateur. 5: échangeur de chaleur. 6: filtre et canule artérielle.

Une large canule veineuse conduisant à un réservoir veineux dans lequel le sang se draine par

gravité ;

2

1

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O2

A B

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O2

© Chassot 2012

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Une pompe principale, le plus souvent à galet; cette pompe est placée entre le réservoir veineux et l'oxygénateur à membrane ; à l’époque des oxygénateurs à bulle, elle était placée après ce dernier ;

Un oxygénateur, auquel est associé un évaporateur d'halogéné (le plus souvent isoflurane ou sevoflurane) et un débitmètre air-oxygène (blender) dont la FiO2 règle la PaO2, et le débit de gaz frais la PaCO2 ;

Un échangeur de chaleur; il est le plus souvent couplé à l'oxygénateur ; Un circuit artériel ramenant le sang oxygéné dans l'aorte ou dans une artère périphérique

(fémorale, sous-clavière droite). Figure 7.2 : Machines de CEC. A gauche: machine historique de Livio-Mettraux, Lausanne 1962. A droite: machine moderne. A: console centrale avec commandes des pompes (boutons bleus). B: réservoir veineux. B1: oxygénateur. B2 : échangeur thermique (couplé à l’oxygénateur et au réservoir dans la machine moderne). C: pompes. D: écrans de contrôle. E: Mélangeur de gaz et vaporisateur. F: bac fournissant de l'eau à température variable pour l'échangeur thermique. G: circuit de cardioplégie. A 50 ans d’écart, les pompes n’ont pas changé, mais l’oxygénateur s’est complètement transformé. Le circuit est complété de plusieurs éléments (Figure 7.3).

Un filtre artériel qui capte les particules dont la taille est supérieure à 40 microns et joue le rôle de piège à bulles ;

Deux circuits d'aspiration: aspiration "droite" pour le sang aspiré dans le champ opératoire, "gauche" pour le sang aspiré dans la circulation gauche; ils peuvent être complétés par une aspiration de cardiotomie ;

Un circuit de cardioplégie ; Un système de contrôle de la pression dans le circuit artériel qui asservit le débit de la pompe

maîtresse au-delà d'une limite fixée par le perfusionniste ; Un système de contrôle en ligne de la saturation en oxygène du sang veineux et du sang

artériel ; Un système de contrôle du niveau du liquide dans le réservoir veineux qui asservit le débit de

la pompe maîtresse en deçà d'une limite fixée par le perfusionniste ; Un système de contrôle de la présence de bulles dans le circuit ; Un système de mesure de la température veineuse et artérielle.

Deux matériaux différents sont utilisés pour les tuyaux: le polychlorure de vinyle (PVC) et les silicones. Le PVC, transparent, rejette peu de particules mais présente une tenue limitée à la traction et

B1

C

B

A

B2

B1-B2

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à l'étirement. Le silicone respecte mieux la déformabilité des globules rouges et diminue l'agrégation plaquettaire, mais libère facilement des particules. Comme les surfaces étrangères et le contact avec l'air sont les sources principales des altérations de la coagulation, de l'hémolyse et du syndrome inflammatoire systémique post-pompe (voir Syndrome inflammatoire systémique, page 43), la recherche autour des améliorations possibles des circuits de CEC est très active. On suit actuellement plusieurs pistes, parmi lesquelles [138]. Figure 7.3 : Représentation synthétique d'un circuit complet de CEC avec tous ses éléments. En rouge : circuit du sang. En vert : circuit de l’eau et de l’échangeur thermique. En jaune : circuit des gaz frais. Blender : mélangeur O2/air. X : court-ciruit clampé (adapté de Gravlee GP, ed. Cardiopulmonary bypass: Principles and practice, 2nd edition. Philadelphia : Lippincott, Williams & Wilkins, 2000, p 70).

Circuits préhéparinés: l'adhésion sélective de protéines plasmatiques sur la surface étrangère conduit à la création d'un film moléculaire qui empèche la progression de la cascale de coagulation. L'adhésivité plaquettaire est réduite, de même que l'activation du complément et l'adsorption des facteurs de coagulation. On peut diminuer l’ACT requis à 250-300 sec, mais le sang ne peut pas stagner dans le circuit, car le risque de voir se former des thrombi dans le réservoir ou l’oxygénateur est élevé. Il faut donc maintenir la circulation dans la CEC au moyen d’un court-circuit entre la canule artérielle et la canule veineuse.

Circuits rendus biocompatibles par imprégnation de polymères (poly-2-méthoxy-éthyl-acrylate, phosphorylcholine, siloxane) ou de molécules anti-inflammatoires (facteur H inhibant le complément C3a, phospholipides de la membrane plaquettaire). Ces substances freinent la cascade du complément et l'activation leucocytaire.

SaO2

Ligne de cardioplégie

Vaporisateur Blender

Echangeur thermique

Aspiration aortique

Réservoir de cardiotomie

Aspiration VG

Filtre

Ligne artérielle

Détecteur de bulles

FiO2

Moniteur

Filtre gaz

Débit mètre

O2 Air

Solution cardioplégique

s

Pompes aspirations

Pompe de cardioplégie

Pompe artérielle

Détecteur de bulles

Débitmètre (P centrifuge)

Réservoir veineux

SvO2

Clamp veineux

Détecteur de niveau

Oxygénateur

Filtre artériel + trappe à bulles

Aspiration de cardiotomie

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Ces améliorations tendent à diminuer l’activation du système coagulatoire et inflammatoire, à minorer les lésions plaquettaires et à réduire le taux de transfusion. Elles ont un impact sur les complications postopératoires dans les cas à haut risque, mais ont peu ou pas d'influence pour les interventions standards chez des patients à risque faible [222,254,335]. Vu l'augmentation de prix des circuits, ces modifications ne présentent pas forcément un rapport coût / bénéfice favorable à leur utilisation de routine. La cascade coagulatoire et le syndrome inflammatoire systémique sont déclenchés par les tissus cruentés (plaie opératoire), par les surfaces étrangères (circuits de CEC), et surtout par le contact avec l’air. Pour ces raisons, les améliorations technologiques actuelles visent deux points particuliers :

Suppression du contact avec l’air par l’abolition du résevoir veineux ouvert ; Réduction de la surface de contact en miniaturisant les circuits.

D’autre part, le remplissage du circuit avec le sang du malade (autologous prime) par voie antérograde (canule veineuse) ou rétrograde (canule artérielle) minimise l’hémodilution et réduit le besoin en transfusion (voir ci-après Amorçage). En CEC, l'hémodynamique est principalement maintenue par le débit de la pompe maîtresse dont le perfusionniste a la responsabilité et le contrôle. Après le stress de l'induction, cette période est un moment de moindre concentration pour l'anesthésiste, voir l’occasion de disparaître dans son bureau ou à la cafétéria du bloc opératoire ! Le temps de la CEC est pourtant une période d'étroite collaboration avec le chirurgien et le perfusionniste. Une communication permanente entre les trois est indispensable au bon déroulement de l'intervention.

Schéma général de la CEC

La machine de CEC comprend les éléments suivants, dans le sens de circulation du sang : - Canule veineuse - Aspirations - Réservoir veineux, (avec filtre), réservoir de cardiotomie - Pompe principale - Oxygénateur (avec mélangeur de gaz O2/air et évaporateur halogéné) - Echangeur thermique - Canule artérielle (avec filtre et piège à bulles) - Circuit de cardioplégie Surveillance : pression dans la canule artérielle, débit de pompe, débit de gaz, SvO2, SaO2, niveau du réservoir veineux, détecteur de bulles, températures artérielle et veineuse.

Liquide d’amorçage (Priming) Volume et composition Avant d'être connecté au patient, le système doit être rempli d'une solution physiologique. Ce volume d'amorçage (priming) est variable selon les modèles, mais il oscille entre 800 mL et 2.0 L (moyenne : 1'200 – 1'500 mL), soit environ un tiers du volume circulant du patient (volume circulant = 7% du poids corporel). Sa constitution est très variable selon les institutions. Il s’agit d'une solution hydro-électrolytique, souvent additionnée d'un colloïde et éventuellement de sang allologue selon l'hématocrite du patient [42,199,306].

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Cristalloïdes : ils diffusent dans tout le liquide extracellulaire et seuls 20% du volume reste

dans l’espace intravasculaire. Hydroxy-éthyl-amidons (HES) de 1ère et 2ème génération (polymère de glucose dérivé de

l’amylopectine, de poids moléculaire élevé avec haut degré de substitution) : excrétion lente, altération de la fonction plaquettaire et de la coagulation ; dose maximale limitée à 1.5 g/kg/j ; risque de dysfonction rénale en cas de dépassement de cette limite.

Hydroxy-éthyl-amidons (HES) de 3ème génération (poids moléculaire bas et faible degré de substitution) : pas d’accumulation plasmatique ni de dysfonction rénale, moins d’effet sur la coagulation lors de CEC ; dose maximale : 3 g/kg/jour.

Albumine : bon effet oncotique, absence de réactions allergiques, mais très onéreuse ; demi-vie de 20 jours. Pas d’effet sur la morbi-mortalité comparée aux autres solutions, sauf dans les cas de lésions cérébrales, où l’albumine aggrave le pronostic.

Même si le volume circulant est mieux préservé avec des colloïdes qu’avec des cristalloïdes, les fonctions pulmonaires ne paraissent pas modifiées par ce choix tant que la surcharge est évitée. La coagulation est certainement moins affectée par les cristalloïdes que par les colloïdes. L'utilisation de colloïde n'est pas recommandée en cas de troubles de l'hémostase (hémophilie, maladie de Wildebrand), chez les cirrhotiques et chez les patients dialysés. L’albumine est préférable dans ces circonstances, car elle ne modifie pas la coagulation [306]. Malheureusement, la littérature récente, particulièrement en soins intensifs [204a,222a], tend à démontrer que les HES augmentent significativement le taux d’insuffisance rénale (20-35%), le risque hémorragique (40-50%) et, en cas de sepsis, la mortalité (17%). De ce fait, l’European Medicines Agency (EMA) a jugé en 2013 que les risques liés aux HES outrepassent les bénéfices que l’on peut en attendre, et a recommandé de retirer ces substances du marché européen. Cette décision abrupte étend à la CEC une précaution probablement justifiée en soins intensifs, en dépit de l’absence de données confirmant ces craintes en salle d’opération [260a]. De son côté, la FDA (Federal Drug Agency, USA) a préconisé le retrait des HES en soins intensifs, mais non en chirurgie. En conséquence, les HES ne peuvent plus être recommandés dans la composition des solutions d’amorçage, qui tendent à ne contenir que des cristalloïdes, additionnés ou non de gélatines ou d’albumine. Les dextrans augmentent le risque de saignement, de réaction anaphylactique et d’insuffisance rénale. Les gélatines (dérivées du collagène bovin) n’ont pas d’effet sur la coagulation, mais ont une excrétion rénale rapide et un maintien du volume très limité dans le temps (< 2 heures) ; les réactions allergiques sont fréquentes. L’albumine est probablement la moins dangereuse, mais elle reste très onéreuse. Outre 5’000-10'000 unités d’héparine (voir Anticoagulation, page 30), plusieurs substances peuvent être ajoutées au liquide d’amorçage selon les protocoles.

Antifibrinolytique : il diminue les risques hémorragiques, particulièrement chez les patients sous antiplaquettaires. Depuis son retrait en 2007, la plupart des centres a choisi de remplacer l’aprotinine par l’acide tranexamique (Anvitoff®, Cyclokapron®). Bien que légèrement moins efficace, il ne déclenche pas de réactions allergiques ni de dysfonction rénale. La dose de CEC (10-30 mg/kg) est une répétition de la première dose donnée à l’ouverture du péricarde [360].

Mannitol : le bénéfice de ses effets oncotique, diurétique et néphroprotecteur n’a jamais été démontré ; il est même possible qu’il péjore la fonction rénale [69].

Stéroïdes : ils réduisent l’intensité du syndrome inflammatoire systémique déclenché par la CEC et par la chirurgie [8], mais leur plein effet n’étant atteint qu’après 45 minutes, il est préférable de les administrer à l’induction plutôt que dans la CEC.

On évite le glucose dans le priming car l’hyperglycémie aggrave les risques neurologiques. Comme exemple, la routine dans notre institution (CHUV, Lausanne) consiste en 800-1500 mL Plasmalyte® + 10'000 UI héparine. Le Plasmalyte® est une solution isotonique à pH neutre, sans Ca2+ (en mEq/L : Na+ 140, K+ 5.0, Mg2+ 3.0, Cl- 98, acétate 27, gluconate 23, 295 mosm/L, pH 7.4).

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 9

Hémodilution L'hématocrite (Ht) recherché pour la CEC est de 24-28%, selon la température prévue. Cette baisse de l’Ht est nécessaire pour diminuer la viscosité sanguine et améliorer la microcirculation en hypothermie. En effet, la viscosité augmente de 30% à 27°C, mais elle chute de 30% lorsque l'Ht diminue de 40% à 25% [148]. Ainsi, en hypothermie, la viscosité reste à peu près stable lorsque la valeur de l'Ht en pourcent est la même que celle de la température en degrés C [152]. L'hématocrite recherché en cours de CEC (HtCEC) se calcule de la manière suivante:

HtCEC = Ht • VC / (VC + vol CEC)

où: VC = volume circulant (7% du poids corporel du patient) vol CEC = volume d'amorçage

Ht = hématocrite actuel du patient L'hémodilution normovolémique est bien tolérée et compense les effets de l'hypothermie, mais elle diminue simultanément le transport d'O2 et affecte différemment les organes. Pour une Hb < 70 g/L, la réserve coronarienne diminue de 50% et la perfusion splanchnique est à la limite de l'ischémie clinique, mais le flux sanguin cérébral s’élève de 45% et le flux plasmatique rénal augmente dans la zone corticale [267,343]. L’hémodilution en CEC a des limites. Un Ht inférieur à 23%, par exemple, s'est avéré être un facteur prédictif indépendant de morbi-mortalité postopératoire [141]. L'Ht n’a pas d’influence sur le status neurologique postopératoire tant qu’il reste supérieur à 30% chez l'adulte normal [365], mais les troubles cognitifs deviennent plus importants lorsque l’Ht minimal est de 15-17% [96] et le risque d’AVC augmente de 10% pour chaque pourcent d’Ht en dessous de 25% [179]. Chez les enfants, la comparaison entre un Ht bas (21%) ou élevé (28%) démontre que le score neurologique et le développement psychomoteur sont meilleurs dans le deuxième cas [170]. D’autre part, la fonction rénale s’aggrave linéairement avec la baisse de l’hémoglobine lorsque l’hématocrite est inférieur à 30% [348]. La correction de l’anémie par une transfusion n’est pas curative car, à valeur similaire d'Ht, les patients transfusés présentent systématiquement une péjoration de leur fonction rénale par rapport à ceux qui ne sont pas transfusés; leur mortalité est plus élevée (3.8% versus 1.4%) et leur incidence d'insuffisance rénale plus importante (12% versus 3.4%) (voir Chapitre 28, Figure 28.9) [142]. L'anémie aggrave donc la situation, mais la transfusion, au lieu de la corriger, ajoute un facteur délétère supplémentaire. Une valeur de 25-28% est donc la limite inférieure de sécurité pour l’Ht en cours de CEC. Plusieurs moyens sont à disposition pour éviter de descendre en dessous de ce niveau.

Eviter l’anémie préopératoire en préparant les malades avec du fer et/ou de l’érythropoïétine ; Limiter le volume d’amorçage ; Limiter les perfusions de liquide clair ; Restriction de la longueur et du volume de la tuyauterie, mini-CEC ; Amorçage autologue.

L’amorçage autologue (autologous priming) consiste à remplacer le volume d’amorçage par le sang du malade dès le début de la CEC.

Amorçage rétrograde (retro-priming) : stockage avec la pompe artérielle d’environ 500 mL évacués dans une poche ou dans le réservoir veineux ;

Amorçage antérograde : siphonnage d’environ 500 mL par déclivité à partir de la canule veineuse (sens normal du circuit) ;

Dans les deux cas, le sang du malade remplace une partie de la solution d’amorçage qui est évacuée vers l’extérieur. La poche de stockage ne doit jamais être en dessous du niveau de l’oxygénateur, qui serait alors en dépression (risque d’aspiration d’air et d’embolie gazeuse).

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 10

Ces deux techniques réduisent à quelques centaines de millilitres la quantité totale de cristalloïdes restés dans la machine et perfusés au patient. Elles diminuent ainsi la chute de la pression oncotique et l’hémodilution des médicaments en début de CEC ; elles diminuent également le taux de transfusion et l’œdème intersticiel dans les poumons et le coeur [107].

Amorçage

Volume de remplissage de la machine de CEC : 1'000 – 1'500 mL. Constitué habituellement pour 2/3 de cristalloïde et 1/3 de colloïde (ou albumine). Substances ajoutées : héparine, antifibrinolytique, mannitol, stéroïde. Ce volume provoque une hémodilution (Ht 25-30%), nécessaire pour freiner l’augmentation de la viscosité du sang à basse température. En hypothermie, la viscosité reste stable lorsque la valeur de l'Ht en % est la même que celle de la température en degrés C°. Lorsque l’Ht est < 25%, le status neurologique et la fonction rénale postopératoires sont péjorés. Une valeur de 25-28% est la limite inférieure de sécurité pour l’Ht en CEC. Pour diminuer le volume d’amorçage, on peut réduire la taille du système de CEC, supprimer le réservoir veineux et/ou remplir partiellement la machine avec le sang du patient (priming autologue).

Drainage et réservoir veineux

Canules veineuses Le sang veineux est habituellement drainé depuis l'OD par une ou deux canules de grande taille (36F – 51F) connectées à un tuyau d'un demi-pouce (Figure 7.4). Le système à une seule canule est plus simple, plus rapide, et ne nécessite qu'une seule incision dans l'oreillette, habituellement au niveau de l'appendice auriculaire; la canule a des orifices situées dans l'OD et se prolonge par un tube moins large qui est introduit dans la veine cave inférieure (VCI). Ce système est très sensible aux manipulations du coeur et n'assure pas une étanchéité au drainage veineux; il permet un bypass partiel dans lequel une partie de la circulation pulmonaire persiste, mais il ne convient pas lorsqu'il faut ouvrir l'oreillette droite ou luxer le cœur [153]. Dans ce cas, on procède à une canulation séparée des deux veines caves depuis deux incisions faites dans l'oreillette; les canules sont rendues étanches en serrant un lacet autour de chaque veine cave; il ne reste que le débit du sinus coronaire à évacuer de l'OD. Lorsque le coeur est arrêté et que la cardioplégie a fini de couler, le débit du sinus coronaire est nul. On peut également utiliser des canules métalliques coudées à angle droit qui permettent de canuler directement les veines caves à distance de l’OD, comme on le fait lors de transplantation cardiaque. Le drainage du sang veineux dans le réservoir se fait par simple gravité. Cet effet de siphon dépend de plusieurs données.

La hauteur entre le patient et le réservoir, normalement 30-70 cm; on peut favoriser le retour veineux en montant la table d'opération ;

Le volume de l'OD; l'hypovolémie et la veinodilatation par la nitroglycérine ou le propofol diminuent le retour veineux à l'oreillette ;

Le positionnement des canules veineuses et les déplacements du coeur lors des manoeuvres chirurgicales; la double canulation assure un meilleur retour lorsque le coeur est basculé pour ouvrir l'oreillette gauche (chirurgie mitrale) ;

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 11

Le collapsus des parois de l'OD autour de la canule lorsque le débit vers le réservoir est plus élevé que celui du retour par les veines caves; cet incident est fréquent lorsqu'on utilise une pompe d'appoint sur le retour veineux ;

La présence d'air dans les canules peut aller jusqu'à l'obstruction par un air lock qui se forme dans la partie supérieure d'une boucle des tuyaux.

Figure 7.4 : Canulation veineuse. A : Canule simple; introduite par l'auricule droit, la canule va jusque dans la veine cave inférieure (VCI); elle présente des orifices dans l'OD et dans la VCI; les premiers drainent le sang de la veine cave supérieure et du sinus coronaire. B : Bicanulation; chaque veine cave est canulée séparément; un système de drainage récupère le sang du sinus coronaire dans l’OD. Le lacet permettant d’étanchéifier la connexion cave est représenté au niveau de la VCI. Les canules peuvent être introduites dans les veines caves depuis l’OD ou plus distalement par une incision sur le vaisseau. Outre le mauvais retour veineux, plusieurs complications peuvent survenir au niveau de la canulation veineuse.

Arythmies lors des manipulations de l’OD (fréquent passage en FA) ; Blocage de la canule de VCI par la membrane d’Eustache ; Obstruction de la VCI ou de veines sus-hépatique ; il s'ensuit une stase hépatique ; Obstruction de la VCS; surveiller attentivement le visage lors de bicanulation; si la canule

cave supérieure est obstructive, on observe rapidement un oedème de la face, un oedème conjonctival et palpébral, et une dyscoloration du visage. On peut l’objectiver en mesurant la pression dans le bras latéral de l'introducteur. Une élévation persistante de la pression dans la VCS peut conduire à un oedème cérébral et à une baisse dangereuse de la pression de perfusion cérébrale (PPC = PAM – Pvjug) ;

Passage de la canule dans l’OG à travers une foramen ovale perméable (FOP) ; Passage d'air par un cathéter central dont les entrées ne sont pas étanches ; Passage d'air par un foramen ovale perméable (FOP) inconnu en cas d'ouverture des cavités

gauches (opération sur la valve mitrale, par exemple) ; Persistance de retour veineux par une veine cave supérieure gauche, présente dans 2-10% des

cas congénitaux (voir Chapitre 15, Figure 15.7).

Lorsqu’on utilise une seule canule auriculaire, la PVC lue dans l’OD (extrémité distale du cathéter central ou voie OD de la Swan-Ganz) reflète le remplissage du malade ; son augmentation traduit aussi un frein au retour vers le réservoir de CEC. Lors de canulation bicave, l’OD est vide, sa pression est nulle. La seule pression mesurable est celle lue dans le bras latéral de l’introducteur qui reflète la

© Chassot 2012 VCI

OD

VCI

A VCS

OD

B

Membrane d’Eustache

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 12

pression veineuse jugulaire. Par contre, la pression proximale à la canule cave inférieure ne peut malheureusement pas être surveillée. Lorsqu'on canule une veine périphérique comme la veine fémorale, le débit est rarement suffisant pour assurer le retour veineux nécessaire au débit calculé du patient sur la base d'un index de 2,4 L/min/m2, même si la canule remonte jusque dans la veine iliaque. Cette canulation permet seulement une assistance circulatoire. Pour avoir un débit normal, il faut une deuxième canule dans l'oreillette, une canule longue qui remonte de la veine fémorale jusqu'à l'OD, et/ou l'interposition d'une pompe aspirante sur le circuit veineux. De nouvelles canules longues et grillagées (Smartcanula™) ne collabant pas et drainant les abouchements veineux sur toute leur longueur permettent un débit normal sans pompe. L'introduction de canules depuis la fémorale jusque dans l'OD est guidée par échocardiographie transoesophagienne (ETO); l'ETO visualise d'abord le guide qui doit monter en VCS et éviter la fosse ovale; ce guide passe facilement dans l'OG si le foramen ovale est perméable. La canule doit ensuite se positionner au milieu de l'OD, avec son extrémité dans l'abouchement de la VCS (voir Figure 7.32, page 92).

Réservoir veineux Le réservoir veineux est la chambre de compliance permettant de maintenir constant le débit artériel malgré les variations dans le retour veineux (Figure 7.5). De 1 à 3 litres de sang peuvent être transloqués dans le réservoir au démarrage de la CEC chez un patient en insuffisance cardiaque congestive, mais lors de manipulations du coeur, par exemple, le retour veineux peut diminuer drastiquement et obliger le perfusionniste à puiser dans ce réservoir pour maintenir le débit. Le niveau du réservoir doit rester au-delà d'un certain seuil en-dessous duquel le système n'a plus de réserve de précharge et risque de laisser passer de l'air jusque dans la partie artérielle du circuit. A un débit de 4 L/min, une réserve de 500 mL ne permet que 7.5 secondes de débit avant que le réservoir ne soit vide [152]. Le perfusionniste doit donc porter une attention constante au niveau de ce dernier. Le réservoir est d'ailleurs muni d'un système d'alarme qui informe immédiatement que le niveau minimal est atteint, et qui coupe la pompe avant qu'elle n'entraîne de l'air dans l'aorte. Certains réservoirs sont souples et collabent lorsqu’ils se vident, ce qui exclut l’embolisation d’air ; ils limitent le contact du sang avec l’air, mais leur utilisation est plus délicate. Le circuit veineux comprend un clamp ajustable pour modifier le débit de retour.

Figure 7.5 : Le réservoir veineux de CEC. A: circuit de drainage du sang veineux (bouchons bleus) en provenance du patient (oreillette droite, aspirations). B: filtre veineux. C: réservoir proprement dit partiel-lement rempli avec la solution d’amorçage. D: oxygénateur couplé à l'échangeur thermique. E: tuyaux pour la circulation de l'eau avec le bac de refroidissement / réchauf-fement. On voit que le sang est largement en contact avec l’air dans ce type de réservoir.

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Les aspirations du champ opératoire sont drainées dans un réservoir appelé réservoir de cardiotomie, qui a la particularité de pouvoir filtrer et démousser le sang afin d'éliminer le risque d'emboliser des particules aspirées ou des bulles d'air. Le réservoir de cardiotomie comporte une chambre de débullage contenant une éponge imprégnée d'une substance anti-mousse, une chambre de stockage, et un filtre de 30-40 microns. Dans la plupart des systèmes, le réservoir veineux et celui de cradiotomie ne font qu'un. L'inconvénient majeur du réservoir est d'offrir une vaste surface de contact entre l'air et le sang. Or cet interface est une des causes majeures de l'activation du complément, de l'aggrégation plaquettaire et du déclenchement du syndrome inflammatoire. Ces phénomènes sont nettement moins prononcés avec les réservoirs souples. Drainage veineux assisté Lorsqu’on réduit la taille du circuit et des canules pour limiter le volume d’amorçage et le contact des surfaces étrangères, le diamètre des canules veineuses devient restrictif et le siphonnage par gravité n’est plus suffisant pour assurer un drainage correct de l’OD. En effet, la loi de Poiseuille spécifie que le flux est égal à la pression divisée par la résistance, et que celle-ci est le produit de la viscosité du liquide (ρ), de la longueur du tube et de l’inverse du rayon à la puissance 4 : Q = P • r4 / ρ • L. Lorsque le diamètre du tuyau diminue, on doit ajouter un système de pompe sur le circuit veineux pour en améliorer le débit. Deux systèmes d’assistance sont utilisés.

Aspiration (vacuum-assisted venous drainage) : système de vide ajustable appliqué sur le réservoir veineux, y aspirant le sang depuis l’OD ; la coque du réservoir doit être rigide.

Pompe (kinetically assisted venous drainage) : pompe centrifuge ou à galet montée sur le circuit veineux ; son débit est adapté en permanence au volume du retour et à l’effet de succion.

Bien que très efficaces pour assurer un bon retour veineux, ces systèmes présentent plusieurs problèmes potentiels [28].

Pompe supplémentaire à surveiller pour le perfusioniste, qui doit également veiller à ce que la pression ne soit jamais positive dans le circuit veineux ni négative dans le circuit artériel ;

Aspiration d’air par les bourses autour de l’OD ou des veines caves ; la pompe va broyer ces bulles et les transformer en microbulles échappant aux filtres disposés sur les voies veineuse et artérielle, avec un risque d’embolies artérielles pour le patient ;

Stress de cisaillement supplémentaire sur les hématies conduisant à davantage d’hémolyse ; Blocage possible du retour par aspiration des parois vasculaires dans les orifices de la canule ; Mise en dépression de l’oxygénateur et flux rétrograde vers le réservoir au sein de la

machine ; une valve de type pop-off empêche une dépression excessive.

Drainage veineux

L’OD est drainée par gravité dans le réservoir veineux par une canule (OD - VCI) ou deux canules (VCS et VCI). La canulation bicave est pratiquée lors d’une ouverture de l’OD, lors de bascule du cœur ou lors de transplantation. Le retour veineux peut être amélioré par une assistance (aspiration sous vide contrôlé ou pompe sur le circuit), mais celle-ci comporte un risque d’embolie gazeuse, de blocage par aspiration des parois vasculaires dans les orifices de la canule et de renversement du flux dans la machine. Le réservoir veineux peut être doublé d’un réservoir de cardiotomie pour les aspirations en provenance du champ opératoire. Les réservoirs sont munis d’un filtre pour éliminer les particules. Ils sont la principale source de contact entre le sang et l’air (stimulation inflammatoire, activation plaquettaire, coagulopathie).

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Oxygénateur

Le terme d'oxygénateur est un peu restrictif, car l'appareil a trois fonctions: il transfert l'O2 de la source externe dans le sang, il élimine le CO2 en fonction du débit de gaz frais, et il permet d'introduire un gaz d'anesthésie par un vaporisateur. Il en existe deux types.

Oxygénateurs à membrane: une fine membrane semi-perméable microporeuse (pores de 0.3-

0.8 microns, épaisseur 80-150 microns) de grande surface totale (1.8-2.5 m2) sépare le sang des gaz. Faite de polypropylène (tubes), de silicone (plaques) ou de Teflon, elle est arrangée en tubules à l'intérieur d'une boîte (Figure 7.6). Dans les premiers systèmes, le mélange de gaz parcourait l’extérieur de ces microfibres et le sang circulait à l’intérieur. Dans les systèmes actuels, le sang est à l’extérieur et les gaz frais à l’intérieur des microfibres. Le sang n'est en contact avec le gaz que lorsque la CEC démarre, car les micropores sont rapidement recouverts d'une fine couche protéique qui sépare les deux éléments [92]; il y a donc beaucoup moins de traumatisme aux éléments figurés et aux protéines. Après 6 heures d'utilisation, le plasma s'infiltre dans les micropores et limite les échanges. Ces très fins tubules opposent davantage de résistance au flux sanguin, et les oxygénateurs à membrane doivent être installés après la pompe principale du circuit (voir Figure 7.1A, page 4).

Oxygénateurs à bulles: techniquement simples et bon marché, ils consistent à faire barboter de l'oxygène pur dans le sang et à le débuller ensuite. Plus petites et plus nombreuses sont les bulles, plus grande est la surface de contact gaz-sang; le débullage est effectué par une éponge de polyuréthane dont les fibres sont recouvertes d'anti-mousse à base de silicone; un filtre avec piège à bulles complète le système (voir Chapitre 1, Figure 1.2) . La capacité d'oxygénation est supérieure à celle d'élimination du CO2. Ce type d'oxygénateur offre peu de résistance au flux et peut être placé avant la pompe principale (voir Figure 7.1B, page 4). Les problèmes majeurs de ces oxygénateurs sont le risque embolique et le traumatisme imposé aux éléments figurés et aux protéines du sang, aboutissant à une hémolyse, une dysfonction plaquettaire, une perte de facteurs de coagulation et une réaction inflammatoire puissante. La durée limite de leur utilisation est 2 heures. Ils ne sont plus utilisés.

Le transfert d'O2, distribué par un mélangeur O2/air (blender) (Figure 7.7), est fonction de la FiO2, de la surface et du temps de contact entre le sang et le gaz. L'élimination de CO2 est fonction du débit de

A

B

C

D

E

F

Figure 7.6 : L'oxygénateur de CEC. Il est en général couplé au réservoir veineux et à l'échangeur thermique par le fabriquant. A: corps de l'oxygénateur contenant les microfibres pour les échanges gazeux. B: sang veineux en provenance du réservoir via la pompe. C: sang artériel sortant de l'oxygénateur. D: arrivée des gaz (avec filtre micropore). E: échangeur thermique. F: tuyaux pour la circulation de l'eau de refroidissement et réchauf-fement.

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gaz frais administré dans le système. Il faut veiller à ce que la pression du circuit sanguin reste supérieure à celle du circuit des gaz. Actuellement, les oxygénateurs à fibres creuses représentent la quasi-totalité du marché. La FiO2 de l'oxygénateur est réglée pour maintenir une PaO2 d'environ 150 mmHg, et le débit de gaz frais pour obtenir une PaCO2 de 35-40 mmHg (voir Equilibre acido-basique, page 58). Certains systèmes ont un asservissement automatique de débit de gaz frais (O2/air) à la PaO2 du patient. Les gaz le plus souvent utilisés dans le vaporisateur sont l'isoflurane et le sevoflurane. Ils permettent le maintien de l'anesthésie pendant la CEC (Fi 0.5-2.5%). L’effet vasodilatateur artériel de l’isoflurane à plus haute concentration (3-5%) en fait un agent efficace pour régler les poussées hypertensives couramment rencontrées lors du refroidissement. Sous forme liquide, les halogénés détruisent certains composants des plastiques utilisés dans les circuits de CEC; il faut donc les manipuler avec beaucoup de précaution et placer le vaporisateur loin du réservoir veineux et du filtre artériel, si possible en contre-bas.

Les oxygénateurs classiques ont une surface largement supérieure aux besoins standards, ce qui permet une hémodilution importante, mais qui expose le sang à un excès de membrane de 1-1.5 m2. Dans les mini-circuits de CEC (voir Mini-CEC, page 28), ce gaspillage est supprimé, mais la surface de contact air-sang réduite oblige à maintenir l’Hb à un niveau 10% supérieur.

Oxygénateur

Les oxygénaeurs actuels sont faits de membranes poreuses tubulaires au sein desquelles circule le sang, l’air étant à l’extérieur. Leur surface d’échange est de 1.8-2.5 m2. La FiO2 règle la PaO2, et le débit de gaz frais la PaCO2.

Figure 7.7 : Le mélangeur de gaz (blender) (A) et le vaporisateur d’halo-géné (B), en l’occurence de l'isoflurane. Le vaporisateur se trouve en-dehors et en contre-bas des circuits de la CEC, car les halogénés liquides sont corrosifs pour les plastiques.

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Echangeur thermique Dans les systèmes actuels, l'échangeur thermique est en général couplé à l'oxygénateur et/ou au réservoir veineux. Il consiste en un système d'échange à contre-courant entre le sang et un serpentin qui contient de l'eau, dont la température est gérée par un appareil extérieur à la machine de CEC (voir Figure 7.6 page 14, et Figure 7.16, page 28). Le gradient de température entre l'eau et le sang ne doit jamais dépasser 10°C, et la température de l'eau ne doit pas aller au-delà de 38° ni en dessous de 12°C. La différence de température entre le sang veineux et le sang artériel doit rester entre 1.5 et 2.5°C lors du refroidissement et du réchauffement. Le gradient entre la température rectale et la température oesophagienne doit rester inférieur à 10°C. Le risque d'embolies gazeuses devient prohibitif si l'on dépasse ces limites, parce que les gaz dissous dans le sang passent en phase gazeuse lorsque la température locale augmente [124]. Les souvenirs de la physique nous rappellent que la solubilité des gaz dans un liquide diminue lorsque la température monte ou que la pression baisse.

Echanges thermiques

Pendant le refroidissement et le réchauffement, les gradients de température ne doivent pas dépasser : - 2.5°C entre le sang veineux et le sang artériel - 10°C entre l’eau de l’échangeur et le sang du malade - 10°C entre la T° rectale et la T° oesophagienne

Pompes

La pompe principale est celle qui assure la propulsion du sang au débit physiologique (2.4 L/min/m2) et à la pression artérielle normale (PAM 60-90 mmHg). Sa plage de débit va de 100 mL/min à 8 L/min. Deux autres pompes servent aux aspirations; l'une est dite gauche (aspiration dans la racine de l'aorte ou le VG), l'autre droite (aspiration dans le champ opératoire). Une ou deux pompes supplémentaires sont utilisées pour perfuser les solutions de cardioplégie. Il existe deux modèles de pompes.

Pompe à galet: elle fonctionne sur le principe de l'occlusion plus ou moins complète d'un tube souple par des galets rotatifs; c'est la plus couramment utilisée (Figure 7.8). Le débit est fonction du diamètre du tube (en général ¼ pouce chez l'adulte), de la circonférence du support et du nombre de tours/minute de la pompe (50-150 rpm). Le volume systolique varie de 12 à 42 mL/tour. On règle les galets de manière à obtenir une subocclusion qui évite d'écraser les éléments figurés mais qui est suffisante pour propulser la masse sanguine contre une résistance de 300-400 mmHg. Les pompes à galet sont indépendantes de la postcharge: elles maintiennent leur débit quelle que soit la pression artérielle. Malheureusement, elles peuvent pomper de l'air si le réservoir veineux est vide, ou créer une cavitation en amont si le flux d'entrée est restreint. Il existe donc des systèmes de surveillance et d'asservissement pour les arrêter si la pression est trop haute (risque de rupture de la tuyauterie) ou si de l'air s'insinue dans le circuit (risque d'embolie artérielle). La cavitation est due à une dépression locale (en l’occurrence en amont du galet occlusif) qui baisse la solubilité des gaz dissous dans le sang.

Pompe centrifuge: elle propulse le sang par l'action d'une turbine rotative (située dans une chambre stérile où passe le sang), tournant à haute vitesse (1'000 - 3'000 rpm) et entraînée par un électro-aimant (situé dans la console de commande) (Figure 7.9). Il en existe différents modèles : BioMedicus™ (Medtronic, USA), CentriMag™ (Levitronix, Suisse), RotaFlow™

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(Jostra, Allemagne), Capiox™ (Terumo, USA). La différence de pression entre le centre et la périphérie créée par la force centrifuge à l'intérieur du cône accélère le sang qui est éjecté à l'extérieur [167]. Cette pompe traumatise peu les éléments figurés et réduit la stimulation plaquettaire, mais elle est sensible à la précharge et à la postcharge car elle n'est pas occlusive: une augmentation des résistances artérielles diminue son débit. Pour une pression de sortie de 200 mmHg, par exemple, la pompe débite 4 L/min à 200 tours/min ; si la pression augmente à 400 mmHg, la vitesse de rotation doit s’élever à 3'000 tours/min pour maintenir le même débit. Lorsqu'elle est arrêtée, le circuit artériel doit être clampé sans quoi le sang reflue. Par contre, si plus de 20-30 mL d'air s'introduisent dans le système, le vortex est désamorcé et la force centrifuge baisse; la pompe a tendance à s'arrêter [152]. C'est le système le plus sûr pour des assistances à moyen terme (quelques jours) ou pour aspirer le sang dans le circuit veineux, mais son taux d’utilisation pour les CEC standards ne dépasse pas 10-30% [376]. Le coût élevé de ce produit limite son usage.

Figure 7.8 : Pompe à galet. A: embase de la pompe; le fait qu'elle représente environ les deux tiers de la circonférence assure une occlusivité constante par les deux galets. B: moyeu central entraînant les deux galets dont l'occlusivité est réglée par la mollette qui se trouve au centre. C: 4 couples de guides maintiennent le circuit dans l'axe. D: couvercle. E: serre-joint du tuyau (à l'entrée et à la sortie de la pompe). Le galet écrase le tuyau, la rotation propulse le sang. Cette pompe est occlusive, ce qui la rend insensible à la postcharge mais crée davantage d’hémolyse et de cavitation à cause des variations de pression entre l’amont (baisse de pression) et l’aval (augmentation de pression) du galet lors de la compression du tube par le rotor. La propulsion du sang par une pompe abime les globules rouges et cause une certaine hémolyse. Celle-ci est proportionnelle aux forces de cisaillement endurées par les éléments figurés, au gradient de pression entre l’entrée et la sortie de la pompe et à la durée de la CEC. Elle est plus importante avec les pompes à galet qu’avec les pompes centrifuges. En effet, les premières sont relativement occlusives et créent un fort gradient de pression entre l’amont et l’aval des galets. La majorité des essais contrôlés et randomisés donne un avantage aux pompes centrifuges [254]. Pulsatilité Ces systèmes ne sont pas pulsatiles. Or la pulsatilité artérielle transmet davantage d'énergie cinétique au sang, ce qui améliore la microcirculation, le flux lymphatique et la perfusion tissulaire. Le risque de thrombose est diminué ; la réponse neuro-humorale au stress est freinée ; la vasoconstriction induite par la dépulsation est supprimée ; la perfusion cérébrale, coronarienne et rénale devrait être améliorée

A

B

D

E

C

Tuyau 1/4 pouce

P↑ P↓

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[6,160]. Cependant, ces avantages sont compensés par différents défauts: complexité technique, prix des pompes, jet de très haute vélocité pendant la systole, aggravation de l'hémolyse par un débit qui est > 10 L/min en systole, amortissement de la pulsatilité par l’étroitesse de la canule artérielle, forme de flux peu ressemblante au flux physiologique. Alors que les résultats expérimentaux démontrent une incontestable amélioration de la perfusion capillaire en mode pulsé, les données cliniques chez l’homme concernant la fonction rénale, myocardique et neurologique ne sont guère différentes de ce que l’on obtient en mode dépulsé. Une seule étude randomisée a montré un avantage sur la mortalité et le taux d’infarctus [250], mais aucune n’a relaté de différence sur l’incidence d’ictus et d’insuffisance rénale [6]. Les données actuelles sont trop contradictoires pour pouvoir émettre des recommandations pour ou contre l’utilisation des systèmes pulsatiles [6]. L'apport global de la pulsatilité étant peu signifiant par rapport à l'investissement représenté, ce système est rarement utilisé. D’ailleurs, la pulsatilité n’est pas nécessaire à la perfusion des organes, comme le démontre la comparaison d’assistances ventriculaires pulsatiles (HeartMate XVE™) ou à flux continu (HeartMate II™) : la survie à 2 ans est doublée avec le système dépulsé (24% et 58% respectivement) [332]. Ces résultats démontrent que la pulsatilité artérielle devient facultative lorsque le patient est anticoagulé. Figure 7.9 : Pompe centrifuge BioMedicus™. A: Vue générale de la console de commande contenant la tête rotative magnétique mue par un moteur électrique. B: Ecorché de la tête motrice disposable entraînée par la la tête rotative magnétique. Le sang est propulsé par la rotation des pales. Le sang rentre par le moyeu (précharge); il est propulsé par un orifice tangentiel, dont le débit est sensible à la postcharge. Le débit de la pompe augmente par augmentation de la vitesse de rotation, mais aussi en augmentant la précharge et en diminuant la postcharge.

Pompes Les pompes de CEC sont de deux types : - Pompe à galets, occlusive, insensible aux conditions de charge, mais provoquant de l’hémolyse ; risque de cavitation et de propulsion d’air - Pompe centrifuge, moins traumatisante et moins emboligène, mais sensible aux conditions de charge

La pulsatilité paraît facultative chez un malade anticoagulé ; elle présente davantage de risques mécanique et hémolytique qu’un flux continu. Les données actuelles sont insuffisantes pour émettre des recommandantion favorables ou défavorables aux pompes pulsatiles.

Tête motrice disposable

A B

Moteur magnét fixe Console

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 19

Circuit artériel et filtre Les canules Après le tuyau de 3/8 pouce qui la relie à la pompe, l'extrémité de la canule artérielle est l'endroit le plus étroit de tout le circuit (diamètre interne: 7-8 mm). C'est donc le lieu du gradient de pression le plus élevé. Normalement, ce gradient ne doit pas dépasser 100 mmHg à un débit de 2.5 L/min/m2; au-delà, le risque d'hémolyse et de dénaturation protéique est excessif. La canule artérielle est dotée d’un système de fixation à la paroi vasculaire et d’un robinet 3-voies pour purger l’air et, accessoirement, y mesurer la pression. Lorsque la canule aortique est en place et fixée, on laisse refluer le sang artériel pour éliminer les débris et les bulles d'air par le robinet de purge. Le contrôle de la pulsatilité du sang dans la canule assure que la position est correcte dans la lumière de l'aorte; si la canule est intrapariétale (dissection), le sang qui reflue n'est pas pulsatile. La canule artérielle est implantée le plus souvent dans l'aorte ascendante (Figure 7.10). Il en existe deux types.

Canule à embout rigide coudé à angle droit ; introduite perpendiculairement à la paroi aortique antérieure, elle débit dans l’axe au niveau de la racine aortique ;

Canule souple de type Bardic™ : introduite tangentiellement, elle débite plus distalement dans la crosse ; sa position peut être vérifiée à l’ETO.

La canulation de l’aorte ascendante présente plusieurs risques majeurs. A elle seulle, elle est responsable d'une grande partie de la morbidité liée à la CEC.

Art carotide gauche Tronc brachio-céphalique Art sous-clavière gauche Crosse de l’aorte Aorte ascendante Aorte descendante Diaphragme Artères iliaques

© Chassot 2012

C

B

A

D

Figure 7.10 : Sites de canulation artérielle. A : canule coudée à la racine de l’aorte. B : canule type Bardic™ dans l’aorte ascendante. C : canule dans l’artère sous-clavière droite. D : canule fémorale ; dans ce cas, le flux est rétrograde dans l’aorte.

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Embolies artérielles: l'athéromatose de l'aorte ascendante est présente chez 38% des patients

âgés de plus de 50 ans [90]; les principaux facteurs de risque sont l'âge avancé, l'anamnèse d'AVC, le diabète et la maladie vasculaire périphérique, particulièremet carotidienne [235]. Lors de la canulation, des fragments d'athérome peuvent emboliser en périphérie, particulièrement dans le cerveau; le risque est le plus grand lorsque les plaques sont ulcérées ou pendulaires. Le taux d'embolies cérébrales au Doppler transcrânien, qui est de 5-17%, présente deux pics très significatifs lors de la canulation et de la décanulation aortique (voir Figure 7.25, page 63) [341]. Cette embolisation est un des facteurs responsables des AVC postopératoires.

Effet de "sablage" (sandblasting): le jet de sang sort à haute vélocité de la canule et souffle au passage des débris athéromateux s'il est dirigé vers la paroi et non vers le centre du vaisseaux. Cet effet, très marqué avec les canules fines qui engendrent de hautes vélocités, est constant tout au long de la CEC.

Malposition de la canule: elle peut être dirigée vers ou dans le tronc brachiocéphalique, qui reçoit ainsi tout le débit de la pompe; suivant où elle est mesurée, la pression artérielle peut être élevée (radiale droite) ou basse (radiale gauche et fémorale); la coloration de la face est asymétrique, de même que le pouls carotidien.

Déchirures: la paroi aortique est fragile chez les personnes âgées, les diabétiques, les athéromateux; les risques de déchirure en étoile autour de la canule sont d'autant plus grands que la paroi est tendue par une hypertension. Il est donc habituel de baisser la pression artérielle lors de la canulation et de la décanulation de l'aorte en visant une PAM momentanée ≤ 50 mmHg.

Dissection: l'introduction de la canule artérielle à l'intérieur de la paroi aortique peut disséquer cette dernière au niveau de la média; c'est une complication dramatique qui survient dans 0.1 – 1‰ des cas [253]. Elle se diagnostique en début de CEC par une hypertension sur la ligne artérielle alors que la pression systémique est effondrée et que la paroi aortique devient violacée, boursoufflée et tendue. Les vaisseaux de la crosse aortique peuvent être obstrués par le faux passage.

L'ETO, qui est très performant pour évaluer l'aorte descendante, ne permet de visualiser que la partie proximale de l'aorte ascendante jusqu'à son croisement avec l'artère pulmonaire droite. Elle n'est pas un moyen sûr pour mettre en évidence les lésions athéromateuses sévères de l'aorte ascendante, parce que l'interposition de la bronche souche entre l'oesophage et l'aorte restreint la visibilité aux 4-5 premiers centimètres de l’ascendante et parce que la majeure partie des athéromes sont situés au-delà de cette limite [350]. Toutefois, l'ETO permet de poser l'indication à une échographie épiaortique en fonction du degré d'atteinte de l'aorte descendante [189]. Comme la palpation chirurgicale est peu fiable, seule l’échographie épiaortique pratiquée avant de canuler l’aorte permet de choisir le site de ponction le moins dangereux ou de modifier la canulation (voie fémorale ou sous-clavière droite), afin d’éviter un accident embolique si l’athéromatose est trop importante dans l’aorte ascendante [91,291]. En cas d’athéromatose dangereuse (athéromes de degré III à V) ou de lésions étendues et friables (aorte porcelaine) (voir Chapitre 27 Athéromatose aortique), il est recommandé d’éviter toute manipulation de l’aorte ascendante et de changer de stratégie chirurgicale [65,185,235].

Canulation artérielle sous-clavière droite ; Canulation artérielle fémorale ; Occlusion avec un ballon intravasculaire monté depuis la fémorale (système Heartport™) ; Pas de canulation de cardioplégie ni de clampage aortique: opération à coeur battant ou en

fibrillation ventriculaire si cela est concevable ; pose d’endoprothèse par voie transapicale en cas de RVA ;

Pour les pontages aorto-coronariens: greffes artérielles multiples à partir des artères mammaires ou de l’aorte descendante à cœur battant.

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Une canulation fémoro-iliaque est possible si l'on veut éviter l'aorte ascendante ou si l'on doit installer la CEC en anesthésie locale, parce que le malade est trop instable pour supporter l'induction sans cette sécurité. La canulation fémorale est également utilisée lors des réopérations où l'on craint de léser l'OD, le VD ou l'aorte avec la scie sternale. Malheureusement, le débit par la fémorale est souvent limité. Comme le flux dans l'aorte est rétrograde, il existe un double risque, que la surveillance ETO permet de diagnostiquer.

Embolie cérébrale en cas d'athéromatose étendue de l'aorte thoracique descendante ; Dissection rétrograde par infiltration du flux sous des plaques athéromateuses, qui sont

disposées comme les tuiles d’un toit dans le sens du flux sanguin normal. La canule fémorale est occlusive. Le membre inférieur concerné est donc ischémié pendant toute la durée de la CEC. Cette situation est tolérable pour 3-4 heures ; si la canulation se prolonge, il est prudent d’assurer la perfusion du membre par une canule pédiatrique montée en Y sur la ligne principale et insérée dans la partie distale de la fémorale. Une bonne alternative est l'artère sous-clavière droite. On peut cannuler ce vaisseau en le ponctionnant à ciel ouvert ou en y anastomosant une prothèse de 8 mm (GoreTex™) en position termino-latérale. La position de la canule dans l’arc aortique est contrôlée à l’ETO. Ce système est fréquemment utilisé pour la chirurgie de la crosse aortique, car il permet de maintenir une perfusion cérébrale continue (Figure 7.11). Le tronc brachio-céphalique, la carotide gauche et la sous-clavière gauche étant clampés à leur départ de la crosse, le flux perfuse la carotide droite, puis la carotide gauche par l'intermédiaire du cercle de Willis et des anastomoses entre carotides externes. La pression de perfusion (idéalement 60 mmHg) est mesurée dans l'artère radiale gauche, perfusée par l’intermédiaire des collatérales entre la vertébrale et la sous-clavière gauches. Le débit est de 10-20 mL/kg/min (1.0-1.5 L/min). La température de perfusion varie de 20° à 32°C selon les techniques. Si l’on opte pour une hypothermie modérée (28-32°C), la perfusion cérébrale doit être complétée par une perfusion sous-diaphragmatique continue au moyen d’une canule fémorale pour éviter l’ischémie des viscères abdominaux, des reins et de la moëlle.

CEC

Figure 7.11 : Perfusion cérébrale semi-sélective par la canule artérielle de CEC en sous-clavière droite. Le tronc brachio-céphalique, la carotide gauche et la sous-clavière gauche sont clampées à leur origine (en jaune). Le sang circule d'une carotide à l'autre par les anastomoses du polygone de Willis (flèche).

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Les filtres

Un filtre micropore (40 microns) couplé à un "piège à bulles" est installé sur le circuit artériel, comme dernière étape avant l'aorte du malade (Figure 7.12). Il a pour but d'éliminer les particules qui pourraient emboliser, et de supprimer tout risque d'embolie gazeuse artérielle. La trappe à bulle peut être ouverte à l'air ambiant pour éviter que le système ne se mette sous pression, ou purgée en continu (200 mL/min), le sang étant renvoyé dans le réservoir veineux. On monte également un filtre du côté veineux (20-40 microns), parce que les aspirations que l'on utilise dans le champ opératoire une fois le malade hépariné ramènent le sang dans le réservoir veineux. Ce sang contient des cellules, des débris et des procoagulants qu'il faut éliminer.

Figure 7.12 : Les filtres. A: filtre du réservoir veineux. B: circuit de retour du sang en provenance du patient. C: filtre artériel contenant la trappe à bulles; il dispose d'un orifice de vidange à sa partie supérieure. D: circuit artériel conduisant le sang vers le patient. E: circuit veineux ramenant le sang du patient. On note bien la différence de couleur entre D et E. F: saturomètre sur le circuit veineux. G: saturomètre sur le circuit artériel. Les sources d'embols gazeux sont multiples: oxygénateur, réservoir, siphon dans le circuit, aspiration par les pompes, cardiotomie, cavitation. Les variations de température du sang sont toujours une source potentielle de microembolie gazeuse, puisque les gaz dissous à froid passent en phase gazeuse lorsque la température monte [124]. La cavitation est un phénomène qui consiste en la création de microbulles lorsque la pression locale diminue, comme dans un vortex ou en amont d'une pompe occlusive. Bien que la preuve n'en soit pas formelle, l'accumulation de microembols dans les organes est probablement responsable d'une partie des lésions fonctionnelles postopératoires, particulièrement neurologiques. C'est la raison pour laquelle on utilise des filtres micropore sur le circuit artériel.

Les shunts

On doit prévoir des systèmes de shunt pour court-circuiter certains éléments en cas de défaillance. Un shunt est aussi nécessaire pour faire circuler le liquide d'amorçage avant que la machine soit connectée au malade.

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Shunt du filtre artériel: maintien la perfusion artérielle au cas où le filtre se boucherait, ce qui est rarissime ;

Shunt distal entre la canule artérielle et la canule veineuse: il sert à faire circuler le liquide d'amorçage. Il est obligatoire dans les circuits pré-héparinés qui fonctionnent avec des ACT de 250 secondes; on ne peut pas arrêter le sang dans ces circuits, car il risque de coaguler dans les filtres et dans l'oxygénateur.

Circuit artériel

La canule artérielle est insérée en général dans l’aorte ascendante, mais il existe plusieurs voies d’abord possibles : - Partie tubulaire proximale de l’aorte ascendante - Artère fémorale - Artère sous-clavière droite

La canule artérielle peut être à l’orgine de plusieurs complications : - Embolisation de plaques athéromateuses - Effet de sablage - Déchirures - Dissection L’ETO et l’échographie épiaortique permettent de localiser les plaques et de choisir la technique de canulation la plus sûre. La ligne artérielle est munie d’un filtre à particules et d’une trappe à bulle. Elle est surveillée par un moniteur de pression et de saturation (SaO2).

Aspiration Beaucoup de sang revient constamment dans le champ opératoire lors de cardiotomie et s'ajoute à l'hémorragie chirurgicale. Comme il s'agit de chirurgie "propre" et comme le malade est hépariné, tout ce sang est récupéré dans le réservoir de cardiotomie de la machine par des aspirations qui fonctionnent au moyen de pompes à galets comme la pompe principale; leur débit règle la force de l'aspiration. L'aspiration dite "gauche" décharge les cavités cardiaques gauches dans lesquelles la circulation bronchique déverse du sang en continu ; la canule est introduite dans la racine aortique, dans une veine pulmonaire, dans le ventricule gauche ou dans l'artère pulmonaire. L'aspiration dite "droite" aspire le sang du champ opératoire et des plèvres. Le sang ainsi récupéré contient de l'air, des activateurs de la coagulation et de l’inflammation, des lobules de graisse, des aggrégats cellulaires et diverses particules qu'il s'agit de filtrer. Les aspirations sont la source principale d'hémolyse, de dénaturation protéique, de microembolies, de perte de plaquettes, de troubles de la coagulation et d’activation du syndrome inflammatoire [56,335]. Pour chaque heure supplémentaire de CEC, la charge embolique due aux aspirations augmente de 90% [60]. Pour diminuer ces défauts, on draine souvent le sang dans un réservoir intermédiaire où il est momentanément stocké et traité par des filtres micropores et par des mousses anti-émulsion. Dans le champ opératoire, il est important que les canules aspirent le moins d'air possible, et que la dépression aspirative soit au minimum nécessaire à maintenir le site propre. Les aspirations de CEC sont utilisées dès que l'anticoagulation est établie (ACT > 400 sec) et jusqu'au début de l'administration de protamine. Le liquide aspiré dans le péricarde contient une très grande quantité de facteur tissulaire (tissue factor TF) ; celui-ci active directement les facteurs X et XI de la cascade de coagulation, conduisant à la

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production de thrombine [280]. Ainsi la réponse locale déclenchant la chaîne coagulatoire est distribuée dans tout l’organisme lorsque le sang aspiré est déversé dans le réservoir de cardiotomie. On peut "détoxifier" le sang aspiré dans un système de centrifugation comme le CellSaver™. L'avantage est de concentrer les érythrocytes et d'éliminer les microaggrégats, les débris, les facteurs activés (facteur tissulaire, cytokines, radicaux libres, etc) et les électrolytes (potassium) ; les perturbations du système coagulatoire sont nettement diminuées lorsqu’on ne recycle pas directement le sang aspiré sans le laver. Mais cette manoeuvre de lavage retarde la mise en recirculation du sang aspiré et élimine malheureusement les plaquettes, les protéines et les facteurs de coagulation [374].

Aspirations

Le champ opératoire étant propre et le patient anticoagulé, le sang perdu par hémorragie peut être filtré, lavé et récupéré. Malheureusement, ce sang contient beaucoup de déclencheurs inflammatoires et d’activateurs de la coagulation, et son lavage (CellSaver™) élimine les plaquettes et les facteurs de coagulation.

Circuit de cardioplégie Le coeur doit être arrêté pour permettre les anastomoses coronariennes ou l'ouverture des cavités cardiaques, et pour stopper sa consommation d'O2 lorsqu'on clampe l'aorte et que la perfusion coronaire cesse. A cet effet, on le refroidit par voie externe au moyen d'une solution de Hartmann à 4-6°C (dite "Shumway") et on le perfuse avec une solution cardioplégique (voir Chapitre 24, Protection myocardique). Cette solution est essentiellement un composé hydro-électrolytique ou sanguin froid contenant du potassium (20-30 mmoles/L). On compte 10 mL/kg ou 450 mL/m2 pour arrêter le coeur. Elle est distribuée par une pompe spéciale de la machine de CEC ou anciennement par une manchette à pression (Figure 7.13). Pour la faire circuler dans l'arbre coronaire, on dispose de plusieurs techniques.

Canule de cardioplégie dans la racine de l'aorte, en amont du clamp aortique; si la valve aortique est compétente, la cardioplégie remplit sous pression (70-150 mmHg) la racine de l'aorte et perfuse les troncs coronariens à raison de 200-400 mL/min environ. En cas d'insuffisance aortique (IA), même minime, la cardioplégie fuit sous pression dans le VG et le dilate (voir Figure 7.30 page 83, et Figure 7.38 page 97).

Canules de Spencer; lorsqu'on intervient sur la valve aortique ou sur la racine de l'aorte, on peut perfuser directement les troncs coronariens avec des canules spéciales introduites dans les ostia coronariens. Ce système présente un risque d'embolisation de matériel athéromateux, mais il élimine le risque de fuite ventriculaire en cas d’IA. Pression de perfusion: 70-150 mmHg.

Cardioplégie rétrograde; avec une canule spéciale munie d'un ballon souple pour en assurer l'étanchéité, on peut canuler le sinus coronaire par une incision à travers l'OD. L'indication est la présence de sténoses coronariennes sévères très proximales, de non-collatéralisation ou d'insuffisance aortique. Comme le sang du VD se draine directement dans la cavité ventriculaire et dans l'OD, la cardioplégie rétrograde ne protège pas la paroi libre ni la paroi basale du VD; elle est donc le plus souvent associée à la cardioplégie antérograde. La pression de perfusion est soigneusement surveillée, car elle ne doit pas dépasser 30-40 mmHg pour un débit de 100-300 mL/min puisqu'il s'agit d'un réseau veineux et non artériel [158].

Cardioplégie par les pontages: une fois l'anastomose distale réalisée, on peut perfuser les pontages veineux avec une solution cardioplégique pour protéger le myocarde revascularisé.

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Cardioplégie

La cardioplégie consiste en une solution froide riche en potassium permettant d’arrêter le cœur en diastole. Elle est administrée par la racine de l’aorte (en l’absence d’insuffisance aortique), par canulation des troncs coronaires, par voie rétrograde dans le sinus coronaire, ou par les pontages veineux.

Drainage du VG (venting) En cours de CEC, plusieurs sources concourent à remplir progressivement le VG avec du sang.

Permanence d'une faible circulation pulmonaire en cas de bypass partiel avec une seule canule veineuse dans l’OD ;

Retour veineux des artères bronchiques; ceci représente un débit de 140-180 mL/min ; Insuffisance aortique (IA) pendant l'administration de cardioplégie par la racine aortique;

même une IA minime peut avoir des conséquences catastrophiques ; Shunt gauche-droit congénital: canal artériel, shunt de Blalock, collatérales aorto-pulmonaires,

veine cave supérieure gauche, etc. Comme le ventricule n'éjecte plus, il se distend peu à peu. Cette distension peut mener à une dilatation aiguë dont les conséquences sont dramatiques: hypertension veineuse pulmonaire, ischémie sous-endocardique, dommages mécaniques cellulaires avec désengrenage des filaments contractiles. Pour parer à ces complications, on draine le VG avec une aspiration-machine (vent). Plusieurs sites sont

A

B

C

D

E

Figure 7.13 : Circuit de cardioplégie. A: pompe de cardioplégie. B: échangeur thermique de la cardioplégie. C: circuit de refroidissement. D: arrivée du sang artériel prélevé sur le circuit général. E: retour du sang vers la canule de cardioplégie.

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possibles selon l'origine du remplissage: l'artère pulmonaire, l'oreillette gauche, l'apex du VG, la racine aortique. Hémofiltration L'hémofiltration consiste à interposer dans le circuit de CEC un appareil constitué de fibres semi-perméables micropores contenues dans un cylindre (surface d’échange ≥ 1 m2). Ce système filtre l'eau, les électrolytes et les protéines les plus petites (poids moléculaire < 30-50 kDa) (Figure 7.14). Le système repose sur le principe de la convection: c'est la pression hydrostatique, et non une différence de concentration, qui provoque les échanges à travers la membrane. Les plaquettes, l'albumine et les facteurs de coagulation sont conservés, alors que les médiateurs inflammatoires hydrosolubles (TNF, IL-6, IL-8, IL-10) et le complément (C3a, C5a) sont éliminés avec l’hémofiltrat qui est rejeté [174,318]. L'héparine est partiellement filtrée. Différents montages sont possibles (Figure 7.15).

Ultrafiltration conventionnelle (UFC) ; le sang est capté sur la ligne artérielle, habituellement avec l’aide d’une pompe, traverse l’hémofiltre et retourne dans le réservoir veineux ; le débit est réglé de manière à ne pas amputer le débit artériel de CEC qui retourne au patient. Le système ne fonctione correctement que si le volume du réservoir veineux est suffisant. Même s’il réduit l’excédent liquidien total, son efficacité est limitée par la redilution au sein de la CEC du volume précédemment concentré.

Ultrafiltration continue (UF à balance zéro : UFBZ) ; si l’on maintient l’ultrafiltration en continu pour extraire un maximum de déclencheurs inflammatoires, il faut remplacer le large volume hydro-électrolytique qui est hémofiltré par un apport équivalent pour assurer un volume circulant adéquat. On monte une pompe à double canal sur la sortie de l’hémofiltrat ; elle assure simultanément l’éjection de l’hémofiltrat et l’apport de remplacement dans une proportion de 1/1. Ce système est utilisé essentiellement en pédiatrie [175].

Ultrafiltration modifiée (UFM) (MUF modified ultrafiltration) mise en route après la fin de la CEC. Le sang est capté sur la ligne artérielle (canule aortique), aspiré par la pompe du circuit de l’UF (15-30 mL/kg/min), hémofiltré et renvoyé dans la canule veineuse d’où il regagne l’OD, parce que la canule veineuse en direction du réservoir est clampée. Le circuit du sang est réduit à : aorte – pompe d’UF – appareil d’UF – canule veineuse – OD. Le reste de la CEC (réservoir, pompe maîtresse, oxygénateur, etc) est hors-circuit. L’UFM retarde la décanulation et l’administration de la protamine, et réclame beaucoup d’attention pour maintenir le remplissage de la CEC et la volémie du patient [257].

A

B C

Figure 7.14 : Système d'hémofiltration. On distingue les tubules microporeux de filtration à l'intérieur de l'appareil. A: entrée du sang sous la pression du circuit artériel. B: sortie du sang hémofiltré vers le circuit veineux. C: hémofiltrat rejeté.

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Figure 7.15 : Schéma des différents systèmes d'hémofiltration. A : hémofiltration conventionnelle en cours de CEC. Le sang est capté sur la ligne artérielle (avec ou sans pompe P), traverse l’hémofiltre (6) et retourne dans le réservoir veineux (2) ; H : hémofiltrat rejeté. B : hémofiltration modifiée post-CEC (MUF modified ultrafiltration). Le sang est capté sur la ligne artérielle (canule aortique), hémofiltré (7) et renvoyé dans la canule veineuse d’où il regagne l’OD. Deux clamps (traits jaunes) isolent ce circuit par rapport au réservoir veineux, à la pompe et à l’oxygénateur. La pompe P est facultative. 1 : canule veineuse. 2 : réservoir veineux. 3 : pompe principale. 4 : oxygénateur. 5 : échangeur thermique. 6 : hémofiltration conventionnelle en cours de CEC. 7 : hémofiltration modifiée artério-veineuse. H : hémofiltrat rejeté. P : pompe alimentant l’hémofiltrateur. L'intérêt de la procédure est d'éliminer l'excès de liquide hydro-électrolytique comme le ferait un diurétique, et de rétablir l'hématocrite du patient. Le système permet de soustraire du volume circulant jusqu'à 180 mL par minute (4-5 L H2O par heure) pour un débit de 500 mL/min. Certains perfusats utilisés pour compenser les pertes liquidiennes contiennent beaucoup de lactate (Lactosol®); il est normal que la lactatémie du patient soit élevée en fin de CEC sans que cela représente une acidose métabolique. L’hémofiltration corrige deux inconvénients majeurs de la CEC : l’excédent liquidien et le syndrome inflammatoire. Les indications préférentielles sont les situations où les capacités d'élimination hydrique des patients sont réduites, et les situations où l'accumulation d'eau et de Na+ est importante: longue CEC, bilan hydrique très positif en cours de CEC, insuffisance cardiaque congestive, insuffisance rénale, fonctions pulmonaires abaissées, malade en excès liquidien, jeunes enfants. Le délai pour l'extubation de ces derniers, leurs pertes sanguines et leur gradient alvéolé-capillaire sont très améliorés par l'hémofiltration [175]. Mais l’hémofiltration est de plus en plus vue comme un moyen de réduire la charge en déclencheurs inflammatoires, de diminuer le taux de transfusions et de freiner le développement des coagulopathies, de l’œdème interstitiel, de l’hypertension pulmonaire et de l’insuffisance multi-organique postopératoires [45,214,318].

3 O2

2

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4

A

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3

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B O2

© Chassot 2012

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H

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Hémofiltration

Sous ses différentes formes, l’hémofiltration réduit l’excédent liquidien propre à la CEC et évacue les déclencheurs inflammatoires hydrosolubles. Elle diminue l’œdème interstitiel postopératoire, les besoins transfusionnels, le syndrome inflammatoire systémique et l’insuffisance multi-organique. Par rapport aux systèmes de lavage sanguin (CellSaver™) qui les éliminent, elle conserve les plaquettes, l’héparine, les protéines plasmatiques et une bonne partie des facteurs de coagulation.

Mini - CEC Dans le but de mieux moduler l'hémodynamique et de réduire la réponse inflammatoire, on a récemment créer le concept de "Mini-CEC" ou MECC (Minimal Extra-Corporeal Circulation) qui vise à réduire le volume d'amorçage du circuit et à supprimer la surface de contact air-sang. A cet effet, la longueur des tuyaux est diminuée et le réservoir de cardiotomie est supprimé. La pompe est une pompe de type centrifuge qui est responsable à la fois du drainage veineux par aspiration et de la propulsion du sang dans l'artère. Le système est complété par un oxygénateur, un échangeur de chaleur et un filtre (Figure 7.16). L'absence de réservoir nécessite un système permettant l'aspiration du sang du champ opératoire dans un bac rigide sous vide régulé qui fait office de vase d'expansion et qui est placé en dérivation sur la ligne veineuse [67]. Ce sang peut être traité par CellSaver avant d’être rendu au malade. Plusieurs systèmes sont actuellement sur le marché: MECC™ de Jostra (amorçage 780 ml), ECC.O™ de Dideco (amorçage < 600 ml), IDEAL™ de Sorin Biomedica (amorçage 900 ml). On peut encore diminuer le volume d'amorçage en procédant à un remplissage partiel rétrograde une fois le patient canulé: 150-200 mL de sang sont aspirés par la canule aortique pendant l'installation de la CEC. Avec ce type de circuit, il est bon que les malades soient relativement hypervolémiques au moment de la connexion, puisque c’est le malade qui est le réservoir veineux de la CEC. Ceci ne présente aucun problème de bilan postopératoire parce que l’apport hydriqu est beaucoup plus faible

D

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B

E

Figure 7.16 : Mini-CEC (appareil ECC.O™ de Dideco). A: pompe centrifuge. B: échangeur thermique. C: oxygénateur. D: filtre artériel. E: moniteur de bulles et de saturation artérielle sur le circuit artériel. F: système externe de refroidissement et de réchauffement de l'eau pour l'échangeur thermique.

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qu'avec les circuits conventionnels. Lors du sevrage, le clampage veineux est progressif comme la réduction du débit de la pompe. Ces systèmes se prêtent particulièrement bien à l’assistance circulatoire à cœur battant, qui combine l’absence de cardioplégie au soutient hémodynamique par une machine cœur-poumon ; on élimine ainsi les risques de l’arrêt cardiaque et du clampage aortique tout en conservant les avantages d’une pompe pour la confection des anastomoses coronariennes délicates. Avec ces systèmes, l'adéquation est parfaite entre le sang drainé et le volume réinfusé par la pompe. Ainsi, en cas de faible retour veineux ou de prise accidentelle d'air, le système s'arrête. A l’inverse, une augmentation du retour veineux nécessite une accélération du débit de la pompe. La conduite de la CEC est donc plus délicate. La miniaturisation et la disparition de toute surface de contact air-sang diminuent nettement la réponse inflammatoire, les besoins transfusionnels et l'eau extra-pulmonaire [37,389]. L'hémodilution est réduite de moitié; les micro-embols graisseux sont fortement minorés [121]. Pour l’anesthésiste, ce type de circuit a plusieurs implications pratiques.

Maintien d’une précharge normale à élevée avant la CEC (perfusion de 500 mL cristalloïdes + 500 mL colloïde en pré-pompe) ;

Administration éventuelle de vasopresseur en début de CEC pour maintenir la pression de perfusion artérielle et le contenant vasculaire ;

Ajustement constant de la pression et du débit au moyen d’agents vasopresseurs ou vasodilatateurs pour maintenir la précharge de la CEC ;

Indications à la transfusion très restrictive. L’absence de réservoir et l’utilisation de matériaux biocompatibles pré-héparinés permet de se contenter d’un ACT situé entre 250 et 350 secondes, ce qui diminue le risque hémorragique. Toutefois, la miniaturisation de l’oxygénateur en réduit la surface d’échange, ce qui contraint à maintenir une Hb ≥ 10% plus élevée que dans les circuits conventionnels. Le sang des aspirations est déversé dans un réservoir de cardiotomie indépendant; il est retourné au patient après avoir été filtré et lavé (CellSaver™). Système Port-access™ (HeartPort) Ce système vise à pratiquer la chirurgie cardiaque de manière minimalement invasive en assurant toute la canulation de CEC par voie strictement percutanée. Il comprend plusieurs éléments (Figure 7.17) [281,367].

Canule artérielle de CEC dans l’artère fémorale; Canule veineuse de CEC dans la veine fémorale et remontée jusque dans l’OD; Cathéter introduit par voie artérielle fémorale et remonté jusque dans la racine de l’aorte; ce

cathéter est muni d’un ballon occlusif qui est gonflé dans l’aorte ascendante (équivalent du clampage aortique); son extrémité distale permet d’administrer la cardioplégie par voie antérograde et de mesurer la pression dans la racine de l’aorte;

Cathéter de drainage introduit par voie jugulaire interne droite jusque dans le tronc de l’AP; Cathéter de cardioplégie rétrograde (sinus coronaire) introduit par voie jugulaire interne

droite. Le positionnement des cathéters est réalisé sous contrôle ETO. La position du ballon de clampage aortique doit être surveillée en permanence, car celui-ci se déplace facilement : s’il avance, il va s’impacter dans la valve aortique et créer une insuffisance aiguë ; s’il recule, il va bloquer les vaisseaux de la crosse aortique et occlure la perfusion cérébrale. Un cathéter artériel radial droit permet de contrôler le flux dans le tronc brachio-céphalique.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 30

Après un enthousiasme initial, cette technique peine à trouver sa place, hormis en chirurgie robotique. Il est vrai qu’elle est compliquée et coûteuse, qu’elle rallonge la durée de l’opération et qu’elle comporte ses propres risques. Son seul intérêt est de permettre une réelle non-invasivité dans le cadre d’une chirurgie par thoracoscopie.

Mini-CEC

La miniaturisation des circuits et la suppression du réservoir de cardiotomie minimise le contact du sang avec des surfaces étrangères et supprime le contact avec l’air, ce qui freine la libération des déclencheurs inflammatoires. Le faible volume du système (600-900 mL) et l’amorçage autologue réduisent l’hémodilution. Mais l’absence de réservoir de compliance entre le malade et la CEC rend la prise en charge plus délicate.

Anticoagulation en CEC Le contact du sang avec l’air et avec les surfaces étrangères (tuyaux, membranes, etc) oblige à une anticoagulation profonde pour éviter tout risque de thrombose du circuit (voir Aspects hématologiques, page 39). Parmi les nombreux anticoagulants en usage clinique (Tableau 7.1 et Tableau 7.2), seule l’héparine non-fractionnée (HNF) est utilisée de routine en CEC. Elle fait partie intégrante de son fonctionnement. Pour davantage de détails sur la coagulation et l’hémostase en chirurgie cardiaque, le lecteur pourra se référer au Chapitre 8 (Coagulation & hémostase).

Ballon de clampage aortique Cathéter de drainage pulmonaire Aorte abdominale Cathéter dʼocclusion aortique

Guide du ballon Ligne de pression

Ligne de cardioplégie Canule veineuse fémorale

Canule artérielle fémorale

Canule veineuse

Figure 7.17 : Système de canulation Port-access™ (HeartPort, USA). Toutes les canules de CEC sont insérées par voie percutanée. La canule artérielle est en position fémorale. La canule veineuse est montée depuis la veine fémorale jusque dans l’OD. Le clampage aortique est réalisé par un ballon monté sur un cathéter et gonflé dans l’aorte ascendante ; ce cathéter sert également à administrer la cardioplégie. Le drainage du VG est assuré par un cathéter positionné dans le tronc de l’AP depuis la jugulaire interne droite. Le sinus coronaire est canulé par voie jugulaire interne droite.

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Tableau 7.1 : Pharmacologie des anticoagulants et antiplaquettaires

Substances Mécanisme Indication Monitorage Remarque Héparine non-fractionnée inhib ind thrombine/fXa thrombose, aPTT, ACT demi-vie allongée selon dose

(par antithrombine III) CEC, PCI antagoniste : protamine HBPM prophylact inhib ind fXa/thrombine prophyl TVP anti-Xa (labo) antagoniste partiel: protamine HBPM thérapeut inhib ind fXa/thrombine thrombose anti-Xa (labo) antagoniste partiel: protamine Fondaparinux (Arixtra®) inhib indirect fXa prophyl TVP anti-Xa (labo) pas d’antagoniste (FVIIa ?) (par antithrombine III) PCI (+ héparine) ↓ dose si fonct rénale ↓ Idrabiotaparinux inhib indirect fXa FA, emb pulm anti-Xa (labo) antagoniste: avidine Dabigatran (Pradaxa®) inhib direct thrombine FA, proph TVP TT (INR) pas d’antagoniste Temps d’écarine (hémodialyse?, FVIIa ?) Hirudine inhib dir thrombine thrombose aPTT/ACT pas d’antagoniste CEC, HITS ↓ dose si fonct rénale ↓ Lépirudine (Refludan®) inhib direct thrombine CEC, PCI, HIT aPTT/ACT pas d’antagoniste (irréversible) ↓ dose si fonct rénale ↓ Bivalirudine (Angiox®) inhib direct thrombine CEC, PCI, HIT aPTT/ACT pas d’antagoniste (réversible) ↓ dose si fonct rénale ↓ Désirudine (Iprivask®) inhib direct thrombine HITS aPTT/ACT pas d’antagoniste Danaparoïde (Orgaran®) inhib direct thrombine prophyl TVP, CEC anti-Xa (labo) pas d'antag. Demi-vie 22 h Argatroban (Argatroban Inj®) inhib direct thrombine CEC, HIT (aPTT/ACT) pas d’antagoniste Apixaban (Eliquis®) inhib direct fXa prophyl TVP anti-Xa (labo) pas d’antagoniste Rivaroxaban (Xarelto®) inhib direct fXa TVP, emb pulm anti-Xa (labo) pas d’antagoniste (FVIIa ?) Coumarines inhib fact vit K-dépendants TVP, FA, TP, INR INR thérapeutique: 2-3 (F II, VII, IX, X, prot C &S) proth valve (impératif) antagoniste : vit K Aspirine bloc récept COX1 SCA, IdM, AVC, revasc bloc irréversible Clopidogrel (Plavix®) bloc récept ADP stent, SCA, IdM bloc irréversible Prasugrel (Efient®) bloc récept ADP stent, SCA bloc irréversible Ticagrelor (Brilinta®, Brilique®) bloc récept ADP stent, SCA, IdM bloc réversible Tirofiban/eptifibatide bloc récept GP IIb/IIIa PCI bloc thrombocyte Abciximab (Rheo-Pro®) bloc récept GP IIb/IIIa PCI bloc thrombocyte

fXa : facteur X activé. aPTT : temps de thromboplastine partiel activé. ACT : temps de coagulation activé. Labo: seulement dans laboratoires spécialisés. PT : temps de prothrombine. INR : international normalised ratio. CEC : circulation extracorporelle. PCI : intervention coronarienne percutanée. HIT : syndrome thrombocytopénique induit par l’héparine. TVP : thrombose veineuse profonde. FA : fibrillation auriculaire. SCA : syndrome coronarien aigu. IdM : infarctus du myocarde. AVC : accident vasculaire cérébral. Ind: indirect. Dir: direct. (): tests modifiés, mais non utilisables comme contrôle de l'activité.

L’héparine L’héparine est un glycosaminoglycane (poids moléculaire 12’000-30'000) qui se lie à l’antithrombine III (AT III) et accélère la capacité de cette dernière à inhiber les facteurs IIa (thrombine), IXa et Xa. Sans héparine, la thrombine et le Xa sont inhibés par l’AT III avec une demi-vie d’environ 1 minute. En présence d’héparine, cette réaction est potentialisée 2’000 fois. L'AT III est également dotée de propriétés anti-inflammatoires indirectes en agissant sur la production de prostaglandines. La consommation importante d'AT III au cours de l'héparinisation peut donc activer les cellules de la lignée blanche et contribuer à la cascade inflammatoire post-CEC [286]. L’action de l’héparine sur l’AT III est double (Figure 7.18). La liaison avec le fragment de haute affinité de l’héparine induit un changement de configuration de l'AT III qui augmente sensiblement son affinité pour les facteurs de coagulation. Le fragment de faible affinité sert à rapprocher le facteur du site d’action de l’AT III [378]. Ces deux mécanismes différents expliquent les actions plus ou moins sélectives des différents dérivés de l’héparine. L’héparine non-fractionnée (HNF) a un rapport d’activité anti-Xa : anti-IIa de 1:1. Les héparines de bas poids moléculaire (HBPM, PM 2’000-10'000) ont un rapport anti-Xa : anti-IIa de 2-4:1 et le pentasaccharide fondaparinux inhibe sélectivement le facteur Xa.

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Tableau 7.2 : Pharmacocinétique des anticoagulants et antiplaquettaires

Substances Voie Demi-vie Elimination Délai préop Héparine non-fractionnée iv, scut 1-2 h hépatique 4-6 h HBPM prophylactique scut 4-5 h rénale 12 h HBPM thérapeutique scut 4-5 h rénale 24 h Fondaparinux (Arixtra®) scut 16 h rénale 48 h* Idrabiotaparinux scut 130 h rénale > 7 j Dabigatran (Pradaxa®) po 9-15 h rénale 36 h* Apixaban (Eliquis®) po 12 h foie (3/4), reins (1/4) 36 h* Rivaroxaban (Xarelto®) po 8-10 h foie (2/3), reins (1/3) 24 h* Acénocoumarol (Simtrom®) po 11 h hépatique 4 j Warfarine (Coumadine®) po 40 h hépatique 6 j Phénprocoumone (Marcoumar®) po 140 h hépatique 10 j Lépirudine iv, scut 1.5 h rénale 10 h Désirudine (Iprivask®) scut 2-3 h rénale 10 h Bivalirudine (Angiox®) iv 30 min plasmatique/rénale 4 h Danaparoïde (Orgaran®) iv, scut 7-25 h rénale 48 h Argatroban (Argatroban Inj®) iv 1 h hépatique 4 h Aspirine po 1.5 h rénale 5 j Clopidogrel (Plavix®) po 8 h hépatique 5 j Prasugrel (Efient®) po 8 h hépatique 7 j Ticagrelor (Brilinta®, Brilique®) po 10 h foie (2/3), reins (1/3) 5 j Tirofiban (Agrasta®) iv 2 h rénale 6 h Eptifibatide (Integrilin®) iv 2.5 h rénale 8 h Abciximab (Rheo-Pro®) iv 23 h rénale 72 h

Délai préop: délai d’attente recommandé entre la dernière prise ou l’arrêt de la perfusion et l’intervention chirurgicale; correspond en général à 3 demi-vies sériques. Recommandation en cas d’ALR rachidienne: 5 demi-vies. HBPM : héparine à bas poids moléculaire. *: délais au moins doublés en cas d’insuffisance rénale. Valeurs de laboratoire recommandées pour la chirurgie: INR < 1.5, TP > 75%, aPTT ≤ 35 sec, ACT < 120 sec, thrombocytes ≥ 70’000 /mcL.

Figure 7.18 : Mécanisme d’action de l’héparine non fractionnée. Après la liaison avec son fragment de haute affinité pour l’AT III (fragment jaune), l’héparine induit un changement de conformation au niveau du site d’action de l’AT III, qui augmente sensiblement son affinité pour le facteur IIa (F IIa). En plus, le fragment d’affinité basse de la chaîne d’héparine (en violet) sert à rapprocher le facteur IIa du site d’action de l’AT III. Une fois que l’AT III s’est fixée sur les facteurs IIa et Xa, un changement de conformation diminue l’affinité pour l’héparine, qui est libérée et peut se lier à une autre molécule d’AT III (flèche pointillée blanche).

+ AT III

AT III +

Complexe héparine - AT III

AT III IIa

Héparine

F IIa F Xa

AT III

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Pour que l’AT III désactive la thrombine, les deux mécanismes, changement de conformation et rapprochement, sont aussi importants l’un que l’autre. Pour désactiver le Xa, par contre, le rapprochement ne joue pas de rôle. Les HBPM peuvent, avec leur segment de haute affinité, induire le changement de configuration nécessaire, mais leur chaîne est trop courte pour bien affronter la thrombine, ce qui explique leur action plus faible contre celle-ci. Le fondaparinux correspond à la séquence du segment de haute affinité qui est la longueur de chaîne minimale requise pour induire le changement de conformation, sans n'avoir aucune capacité de rapprochement. Donc, incapable d’inhiber le IIa, il inhibe sélectivement le facteur Xa [150]. Une fois que l’AT III s’est fixée sur le facteur, un changement de conformation diminue l’affinité pour l’héparine, qui est libérée et peut se lier à une autre molécule d’AT III. L’HNF, les HBPM et le fondaparinux sont mal absorbés par voie orale et doivent être administrés par voie parentérale. Par voie intraveineuse, l’HNF a une action immédiate, alors que les dérivés ont un delai d’action de 20 à 60 minutes. L’effet anticoagulant de l’HNF est très variable à cause d’une forte liaison aux protéines et à l’endothélium [223]. Les HBPM et le fondaparinux sont beaucoup moins liés et montrent un profil d’action plus prévisible. A cause de la variation interindividuelle de son effet, l’HNF requiert un monitorage constant. Son activité anticoagulante est bien corrélée à l’aPTT et à l’ACT (activated clotting time). Les dérivés plus courts n’ont pas d’effet prévisible sur ce paramètre et sont donc plus difficiles à monitorer, mais leur surveillance n’est pas nécessaire parce que leur profil pharmacocinétique est plus stable. L’HNF est résorbée et métabolisée par l’endothélium et le système réticulo-endothélial. Les métabolites sont inactifs et sont éliminés par voie rénale. La demi-vie biologique est fonction de la dose administrée : 1 heure à la dose de 100 U/kg et 2.5 heures à la dose de 400 U/kg. L’hypothermie ralentit considérablement la clairance de l’héparine. L’HNF est l’inhibiteur de thrombine le plus utilisé en CEC à cause de sa facilité d’administration, de sa réversibilité par la protamine, et de la possibilité de mesurer son activité avec des tests de coagulation comme l’ACT. Toutefois, celui-ci a une importante variabilité et n’est pas spécifique pour l’héparine [307]. Mais une des limitations majeures de l’HNF est son incapacité à inhiber la thrombine liée à la fibrine dans un thrombus. En effet, la thrombine située dans les microthrombi formés sur les surfaces de la CEC est hors d'atteinte de l'héparine. Des inhibiteurs directs de la thrombine (lépirudine, bivalirudine, argatroban) ont été développés pour mieux inhiber la thrombine intégrée dans le thrombus, mais leur application en clinique de routine est limitée par leur courte demi-vie (30-60 minutes) et par leur absence d’antagoniste. Les HBPM et le fundaparinux, qui ne peuvent pas non plus être antagonisés, n’ont pas suffisamment d’activité anti-IIa pour être utiles en CEC. Héparine et CEC L’héparine est indispensable au le bon déroulement d’une CEC. C’est la raison pour laquelle elle est injectée par voie centrale après avoir contrôlé le reflux sanguin, ou adminsistrée directement dans l’OD par le chirurgien ; l’injection est suivie d'un rinçage pour être sûr que la totalité de la dose soit injectée. L'ACT de contrôle est mesurée 3-5 minutes plus tard. La dose de charge d’héparine pour obtenir une anticoagulation adéquate pour une CEC est de 300-400 U/kg. Ensuite, les doses supplémentaires doivent être titrées selon la réponse individuelle du patient à l’héparine. Plusieurs tests peuvent être effectués pour mesurer l’activité de l’héparine. Le test le plus utilisé et l’ACT: du sang est mis dans un récipient qui contient un activateur de la voie intrinsèque (célite, kaolin, verre ou une combinaison de ces produits), puis le tube est placé dans une machine qui chauffe le sang à 37°C et qui mesure le temps de coagulation. La valeur de l’ACT normal est situé entre 80 et 120 secondes. L’ACT minimal nécessaire pour éviter des problèmes thrombotique ou hémorragique pendant une CEC est toujours discutée, mais une valeur > 400 secondes est généralement acceptée comme référence pour les circuits standards (450-500 secondes), et une valeur de ≥ 250 secondes pour les assistances avec circuits pré-héparinés. Si l'ACT est < 400 secondes, on ne commence pas la CEC sans ajouter une dose supplémentaire d'héparine (5'000 – 10'000 UI) ; on procède à un nouveau contrôle après 3 minutes [168].

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Un allongement insuffisant de l’ACT après une dose habituelle d’HNF (< 450 secondes pour 450 U/kg) révèle une résistance du patient à l’héparine liée à un déficit en antithrombine. Ce manque d’AT III est souvent consécutif à un traitement préopératoire avec de l’héparine pendant plusieurs jours, mais il peut aussi être secondaire à l’hémodilution qui diminue le taux d’AT plasmatique de 30-50%. Le traitement consiste en administration d’AT III sous forme de concentré (800 – 1'000 U/kg) ou de plasma frais décongelé (2 poches) [381]. Alternatives à l’héparine Chez les malades qui présentent une thombocytopénie induite par l’héparine (TIH ou HITS heparin-induced thrompenia syndrome), il est possible de procéder à une CEC sous d’autres anticoagulants (voir Chapitre 8 TIH). Toutefois, ceux-ci n’ont pas d’antagoniste, et ne sont pas renversés par la protamine. Leur élimnination dépend de leur demi-vie sérique et de l’utilisation d’un circuit d’hémofiltration.

Lépirudine (Refludan®) : bolus 0.25 mg/kg + 0.2 mg/kg dans le liquide d’amorçage de la CEC + bolus 5 mg pour ACT > 350 sec (imprécis) ; perfusion 0.15 mg/kg/h. Demi-vie sérique de 10 min, demi-vie d’élimination 1-1.5 heure, mais inhibition irréversible de la thrombine. La meilleure surveillance est l’ECT (temps de coagulation par l’écarine du sang total citraté).

Danaparoïde sodique (Orgaran®) : bolus iv 1’500-2'000 U + 5’000-10'000 U dans le liquide d’amorçage de la CEC ; ajout de 1'500 U après 2 heures. Demi-vie de 7 heures pour l’activité anti-IIa et de 25 heures pour l’activité anti-Xa. Très difficile à gérer en CEC et très hémorragipare dans le postopératoire.

Argatroban (Argatroban Injection®) : bolus 0.1-0.2 mg/kg iv + 0.05 mg/kg dans le liquide d’amorçage de la CEC + perfusion 5-10 mcg/kg/min (immédiate et continue) pour ACT 350-400 sec ; bolus supplémentaires si nécessaire : 2 mg. Demi-vie : 1 heure.

Bivalirudine (Angiox®) : inhibiteur réversible direct de la thrombine ; bolus 1 mg/kg + 50 mg dans le liquide d’amorçage de la CEC + perfusion 2.5 mg/kg/h. On vise un ACT ≥ 2.5 x ACT de base. Demi-vie : 25 min ; le plus facile à manipuler pour la CEC, mais avec un risque de thrombose dans le réservoir ou dans l’oxygénateur si le débit de la machine est interrompu, car l’élimination de la bivalirudine par protéolyse plasmatique continue dans le sang immobilisé.

Protamine La protamine, extraite du sperme de saumon, est une molécule polycationique chargée positivement qui forme des complexes stables avec l'héparine, qui est chargée négativement. Un mg de protamine (100 UI) neutralise 1 mg d'héparine (100 UI). Habituellement, on administre une dose de protamine correspondant aux 80% de la dose d'héparine. Un ACT fait 5 minutes après la fin de la protamine doit être dans une limite de ± 10% par rapport à la valeur de départ. La protamine présente plusieurs effets secondaires immédiats, dont l’incidence varie de 1 à 13% des cas (moyenne 2.6%) [186,212].

Libération d'histamine, qui se caractérise par une vasodilatation importante avec baisse de précharge et de postcharge; elle est directement proportionnelle à la vitesse d'administration (réaction de type I). Il est très fréquemment nécessaire d'accélérer les perfusions et de donner un vasoconstricteur (néosynéphrine ou nor-adrénaline) pour contrecarrer cet effet.

Hypertension pulmonaire ; le complexe héparine-protamine déclenche la libération de thromboxane A2, qui est un vasoconstricteur pulmonaire ; la PAP s’élève de 25-50%.

Réaction antigène – anticorps (IgG et IgE) (réaction de type II); plus rare, celle-ci se rencontre chez les diabétiques traités par une insuline stabilisée avec de la protamine (protamine-Zn), chez les malades réopérés qui ont déjà reçu de la protamine, chez les patients allergiques aux poissons, et chez les hommes vasectomiés.

Réaction anaphylactoïde déclenchée par le complexe héparine-protamine en activant directement la voie classique du complément (C4a) sans l'intermédiaire d'une réaction

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antigène-anticorps (réaction de type III, qui survient dans 1.5% des cas). Le tableau clinique est celui d'une réaction anaphylactique majeure; la libération massive de thomboxane, déclenche une hypertension pulmonaire et une bronchoconstriction qui peuvent être foudroyantes.

Les patients allergiques peuvent être opérés avec des circuits héparinés et une héparinisation systémique réduite (100 UI/kg), ce qui permet d’éviter l’administration de protamine [246]. Il est recommandé d'attendre l'effet de la protamine et de procéder à un test (thromboélastogramme, ROTEM) avant d’administrer d’autres agents destinés à améliorer la coagulation sanguine comme du sang autologue hémoconcentré, des facteurs de coagulation isolés, du PFC ou des plaquettes. Le volume que le perfusioniste récupère dans les circuits après la CEC est un perfusat contenant de l'héparine ; son l'hématocrite est le même que celui de la CEC, donc inférieur à 30%. L'administration de protamine est débutée après la décanulation veineuse de l’OD. Habituellement, on injecte la première moitié de la dose lentement (maximum 50 mg/min) par une voie veineuse périphérique, puis on enlève la canule aortique et l'on donne la deuxième moitié. Ceci permet de diminuer l'hémorragie lors de la décanulation artérielle et d'éviter la formation de thrombus dans l'aorte. Si la canule artérielle est en position fémorale ou sous-clavière, on ne commence la protamine qu'après rétablissement complet de la circulation dans l'artère. Dès que l'administration de protamine a débuté, on arrête les aspirations de la machine de CEC pour passer aux aspirations perdues et au CellSaver™; en effet, des caillots peuvent se former dans le réservoir et l'oxygénateur, ce qui oblige à changer le circuit au cas où l'on doit repartir en pompe pour un problème aigu.

Anticoagulation en CEC

Le contact du sang avec des surfaces étrangères et avec l’air oblige à une anticoagulation complète au moyen d’héparine non-fractionnée (HNF). L’héparine est administrée avant la CEC par voie centrale à raison de 300-400 U/kg pour obtenir un ACT > 400 secondes. Si l'ACT est < 400 secondes, on ajoute une dose supplémentaire de 10'000 U et on procède à un nouveau contrôle. Une impossibilité d’allonger l’ACT malgré une dose adéquate d’HNF doit faire suspecter une insuffisance en antithrombine III, qu’il faut remplacer sous forme de concentré (800 – 1'000 U/kg) ou de plasma frais décongelé. Les malades qui présentent une thombocytopénie induite par l’héparine peuvent être anticoagulés par d’autres substances, malheureusement sans antagoniste et non réversibles par la protamine: - Lépirudine (Refludan®) - Danaparoïde sodique (Orgaran®) - Argatroban (Argatroban Injection®) - Bivalirudine (Angiox®) La protamine antagonise l’héparine non-fractionnée à raison d’un mg (100 UI) pour 1 mg d'héparine (100 UI). L’administration de protamine est débutée après la décanulation de l’OD; on donne la moitié de la dose prévue avant de décanuler l’aorte et la deuxième moitié après la décanulation de celle-ci. Dès que l'administration de protamine a débuté, on arrête les aspirations de CEC. La protamine présente plusieurs effets secondaires: - Vasodilatation systémique et hypotension artérielle - Vasoconstriction pulmonaire - Réaction antigène-anticorps - Réaction anaphylactoïde foudroyante (choc anaphylactique)

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Agents antifibrinolytiques La production de plasmine et l'activation excessive de la fibrinolyse sont caractéristiques de la CEC et du syndrome inflammatoire postopératoire. Trois substances antifibrinolytiques sont utilisées pour contrecarrer cet effet : l'aprotinine (Trasylol®), l’acide tranexamique (ATX, Anvitoff®, Exacyl®, Cyclokapron®) et l'acide ε-amino-caproïque (AEAC, Amicar®). L’ATX et l’AEAC se fixent sur la lysine du plasminogène et bloquent l'activation de la plasmine, donc la fibrinolyse. L’aprotinine est un inhibiteur non spécifique des protéases, qui bloque directement la plasmine. En clinique, ces substances diminuent globalement les pertes sanguines de 30% et les reprises chirurgicales pour hémorragie de 60% [59,190]. L’aprotinine L'aprotinine, qui est extraite du poumon de boeuf, a été isolée en 1930. C'est un inhibiteur des protéases sériques, de la kallikréine, de la protéine C et de la trypsine. A cet égard, elle a été utilisée dans le traitement des pancréatites aiguës pendant les années soixante. Elle a des effets anti-inflammatoires, mais freine aussi la synthèse de NO. En 1987, Royston a décrit une diminution importante des hémorragies après chirurgie cardiaque (286 ml versus 1509 ml) sous l'effet d'un traitement prophylactique à haute dose (6 millions UI) d'aprotinine [305]. On a par la suite trouvé des résultats similaires avec des doses de 2 millions UI seulement [41]. Il est certain que l’aprotinine diminue significativement les pertes sanguines, particulièrement dans les situations à haut risque hémorragique comme les réopérations et les patients sous antiplaquettaires [59,82,320]. L'aprotinine diminue également l'intensité de la réaction inflammatoire systémique et la production de C1, de TNF et de kallikréine [197]. Elle baisse environ de moitié (OR 0.5-0.65) l'incidence des séquelles neurologiques dans certaines études [82,247,320], mais pas dans toutes [59,221]. Cependant, l'aprotinine est responsable de réactions anaphylactiques dans 0.1-3% des patients. Le risque et l'intensité de la réaction sont augmentés en cas d'exposition dans les 6 à 12 mois qui précèdent, ce qui demande beaucoup de vigilance lors de reprise chirurgicale dans l’année qui suit une première opération en CEC [29]. L'aprotinine inhibe la vasodilatation des artérioles glomérulaires afférentes. Cette vasoconstriction préglomérulaire peut s’ajouter à la vasodilatation des artérioles efférentes postglomérulaires induite par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) : elle réduit encore davantage la perfusion glomérulaire et la fonction excrétrice rénale chez les patients sous IEC. Une étude clinique a démontré une association significative entre la combinaison d’aprotinine et d’IEC et l’insuffisance rénale après chirurgie cardiaque (incidence 3.5%) [187] ; l’incidence d’élévation de la créatinine > 200 µmol/L est de 11.8% dans la combinaison aprotinine + IEC au lieu de 5% chez les patients sans aprotinine (OR 2.9). Une augmentation du taux de dysfonction rénale sous aprotinine se retrouve dans plusieurs études [82,178,221], particulièrement en cas de dosage élevé [59]. Il y a quelques années, trois études, groupant respectivement 898, 4'374 et 3'876 patients et utilisant un score de propension pour comparer les groupes, sont venues jeter le trouble dans l'habitude extrêmement répandue d'administrer de l'aprotinine préventivement à la majorité des malades de chirurgie cardiaque. La première compare les effets de l'aprotinine (6 millions UI) à ceux de l'acide tranexamique (50-100 mg/kg) [178]. L'efficacité des deux substances en terme d'hémorragies et de transfusions est identique, mais les complications rénales sont plus fréquentes avec l'aprotinine (24% versus 17%, p = 0.01); cette association est renforcée chez les patients présentant une dysfonction rénale préopératoire. La deuxième étude a démontré que l'utilisation de l'aprotinine (dose ≥ 2 millions UI) est associée à un accroissement du risque d'insuffisance rénale, d'infarctus et d'ictus par rapport à l'acide tranexamique, à l'acide ε-amino-caproïque ou à un placebo [221]. L'aprotinine augmente le taux d'insuffisance rénale (5.5% versus 1.8%), d'ictus (4.5% versus 1.6%), d'évènements cardiaques (20.4% versus 13.2%), et de mortalité (2.8% versus 1.3%). Ces effets sont dose-dépendants. Aucune de ces complications n'est augmentée dans les autres groupes. La diminution de l'hémorragie n'est pas significative (753 ml versus 827 ml avec le placebo et 676 ml avec l'acide tranexamique). La troisième

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étude reprend les observations de la deuxième mais avec un suivi de 5 ans ; la mortalité des patients ayant reçu de l’aprotinine (20.8%) est significativement supérieure à celle du groupe contrôle (12.7%) (hazard ratio 1.48), alors que la mortalité des patients ayant reçu de l’acide tranexamique ou de l'acide ε-amino-caproïque est inchangée [220]. Ces deux dernières études ont été très critiquées à cause de leurs biais de sélection ; de plus, elles sont en contradictions avec les principales méta-analyses publiées à la même époque [27]. Dans les trois études, la dose d’aprotinine utilisée est de 2-4 millions d’unités. En février 2006, la FDA a recommandé de limiter l'utilisation de l'aprotinine aux situations dans lesquelles le bénéfice d'une réduction de l'hémorragie est essentiel au traitement médical et surpasse les risques potentiels de toxicité. Jusqu’en automne 2007, on pouvait résumer le débat par les points suivants [155].

Les antifibrinolytiques sont essentiellement indiqués dans les situations à risque hémorragiques élevés ;

Les antifibrinolytiques réduisent le taux d'hémorragie d'environ 30% ; L'aprotinine est l'agent le plus efficace, mais pas de manière marquée; elle présente un taux de

réaction allergique de 0.1-2% ; L'aprotinine semble réduire l'incidence de complications neurologiques ; L'aprotinine est suspecte d'augmenter la mortalité et le taux de complications cardiaques ; L’aprotinine augmente l'incidence de complications rénales chez les patients avec une

dysfonction rénale préopératoire et chez les patients sous IEC ; L'aprotinine est au moins cinq fois plus chère que les autres antifibrinolytiques.

Début novembre 2007, une grande étude canadienne (BART: Blood conservation using Antifibrinolytics: Randomized Trial in high-risk cardiac surgery) a démontré un accroissement de mortalité et de complications dans le groupe aprotinine par rapport aux groupes acide tranexamique et acide ε-amino-caproïque (risque relatif augmenté jusqu’à 40%) [114]. Même si elle diminue un peu plus les saignements que les deux autres substances, l’aprotinine augmente le risque de décès dans les hémorragies massives. En conséquence, la firme Bayer a retiré le Trasylol® du marché mondial le 6 novembre 2007. La rapidité de ce retrait a beaucoup surpris, d’autant plus que l’étude BART présente de sérieuses faiblesses méthodologiques et que le poids de l’évidence dans la littérature penche en faveur de l’aprotinine dans les pontages aorto-coronariens et chez les malades sous anti-thrombotiques [230a]. Bien que les autorités sanitaires européennes et canadiennes aient clairement indiqué que les bénéfices de l’aprotinine surpassent ses risques en chirurgie cardiaque [109a], son utilisation n’a pas repris. Toutefois, la substance pourrait revenir sur le marché, puisque la firme Nordic™ en a racheté la licence et que l’agence européenne des médicaments (European Medicines Agency, EMA) en a levé l’interdiction. Autres agents antifibrinolytiques Dès lors, la plupart des centres ont choisi de remplacer l’aprotinine par l’acide tranexamique (Anvitoff®, Cyclokapron®). Cet analogue de la lysine se lie au plasminogène de manière réversible et inhibe sa conversion en plasmine. Bien que légèrement moins efficace que l’aprotinine pour diminuer les pertes sanguines et les reprises chirurgicales pour hémorragie, l’acide tranexamique (AT) ne déclenche pas de réactions allergiques ni de dysfonction rénale postopératoire. En outre, il est moins onéreux. Les dosages décrits dans la littérature varient de 10 à 100 mg/kg. Il est important d’administrer une première dose avant la CEC (10-30 mg/kg), suivie d’une perfusion (2-10 mg/kg/h) ou d’une répétition de la première dose dans la CEC, et d’une dose après la CEC [70,360]. Une perfusion peut être mise en route dans le postopératoire si nécessaire. La dose maximale mentionnée est 150 mg/kg. L’augmentation des doses accroît le risque de convulsions postopératoires jusqu’à 7 fois [190,226]. Dans une étude portant sur 4'883 patients et utilisant un dosage modéré (24 mg/kg), le

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risque de convulsions est augmenté de 70% (OR 1.70) et la mortalité de 90% (OR 1.89) dans le groupe sous AT par rapport au groupe témoin ; ces différences sont plus marquées dans la chirurgie à cœur ouvert que dans la chirurgie coronarienne [189a]. L'incidence financière du choix de l'antifibrinolytique est considérable, parce que l'aprotinine est un médicament coûteux: SFr 220.- pour 1 million UI (US$ 200.00); la dose équivalente d'acide tranexamique revient à SFr 74.- (1 gm) (US$ 25.00) ; l’AEAC est le moins cher : US$ 5.00. A titre de comparaison, une poche de sang coûte SFr 220.- en Suisse (valeur février 2012). Or, dans les meilleurs des cas, les anifibrinolytiques ne permettent d'économiser en moyenne que 1.4 unité de sang.

Antifibrinolytiques

Les antifibrinolytiques se fixent sur la lysine du plasminogène et bloquent l'activation de la plasmine, donc la fibrinolyse. En clinique, ils diminuent globalement les pertes sanguines de 30%. Trois substances sont utilisées à cet effet. - L’aprotinine, retirée du marché depuis 2007 à cause d’un excès d’insuffisance rénale, de complications cardiaques et de mortalité - L’acide tranexamique ne déclenche pas de réactions allergiques ni de dysfonction rénale; dosage: 10-30 mg/kg avant et après la CEC; dose totale maximale: 150 mg/kg; les hautes doses acccroissent le risque de convulsions postopératoires - L’acide ε-aminocaproïque est légèrement moins efficace

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Physiopathologie de la CEC Bien qu'assurant la circulation et les échanges gazeux, la CEC n'est pas un système physiologique. Elle présente quatre caractéristiques qui sont à la base des réactions pathologiques.

Le sang est en contact direct avec l'air et avec des surfaces étrangères ; L'anticoagulation est profonde ; La température est modifiée ; Le flux artériel est dépulsé.

Aspects hématologiques Hémodilution Le mélange du sang avec le liquide d'amorçage (1.0 - 1.5 L de solution hydro-électrolytique) est responsable d'une hémodilution majeure qui abaisse soudainement l'hématocrite aux environs de 25% et qui diminue la pression colloïdo-osmotique de 40% [145]. C'est la cause principale de la chute de pression enregistrée au début de la CEC. La pression remonte ensuite parce que l'hypothermie provoque une stimulation des résistances artérielles périphériques (RAS) et parce que la viscosité augmente à mesure que la température du sang baisse. La chute de la pression osmotique aggrave la fuite liquidienne extracellulaire dans l'espace interstitiel des poumons, du coeur, du foie, des reins, des viscères abdominaux et des muscles. L'hémodilution est avantageuse sur plusieurs plans (voir Liquide d’amorçage, page 7).

Elle améliore la microcirculation en baissant la viscosité sanguine, ce qui est capital en hypothermie ; la viscosité reste stable lorsque l'Ht en pourcent a la même valeur que la température en degrés C° ;

Elle diminue le besoin en sang allologue et les complications associées à la transfusion ; Elle est bien tolérée puisque la consommation d'O2 tissulaire est diminuée à froid.

En CEC normothermique, un Ht de 18% suffit juste à remplir les besoins en oxygène d'un malade endormi et curarisé [206]. Lorsque l’Hb est < 70 g/L, le flux sanguin cérébral augmente de 45% et le flux plasmatique rénal s’élève dans la zone corticale, mais la réserve coronarienne diminue de 50% et la perfusion splanchnique est à la limite de l'ischémie [267,343]. L’hémodilution n’est bénéfique que dans certaines limites. Un Ht inférieur à 22%, par exemple, est un facteur prédictif indépendant de morbi-mortalité postopératoire [141]. L'Ht a un impact particulier sur la fonction cérébrale et sur la fonction rénale. Les troubles neurocognitifs deviennent plus importants lorsque l’Ht minimal est de 15-17% [96] ; seul un Ht > 28% assure un status neurologique postopératoire normal [365]. Chez les enfants, le score neurologique et le développement psychomoteur sont meilleurs lorsque l’Ht en CEC est élevé (28%) que lorsqu’il est bas (21%) [170]. D’autre part, la fonction rénale s’aggrave linéairement avec la baisse de l’hémoglobine lorsque l’hématocrite est < 30% [348]. Un Ht de 25-28% en cours de CEC est donc la limite inférieure de sécurité pour garantir la reprise fonctionnelle des organes. Hémolyse Le contact avec des surfaces étrangères de différentes natures provoque une série de traumatismes hématologiques plus ou moins sévères, et en général directement proportionnels à la durée de la CEC. De plus, les pompes provoquent des lésions mécaniques des éléments figurés, qui sont fonction de leur

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degré d'occlusivité et de leur vitesse de rotation. Enfin, les aspirations dans le champ opératoire sont responsables d’une partie des dégâts inflammatoires et érythrocytaires, qui sont d'autant plus graves que les aspirations sont puissantes et prolongées et que l'hémorragie est importante. L'hémolyse qui en résulte est bien visible dans les urines qui deviennent rouge bordeau. Dans ce cas, il est nécessaire de maintenir un débit urinaire satisfaisant et d'alcaliniser les urines avec du bicarbonate de Na+ (50-100 mmoles i.v.) pour freiner la cristallisation de l'Hb libre dans les tubules [140]. Une autre cause d'hémolyse est la présence d'agglutinines froides. C'est une maladie autoimmune caractérisée par la présence d'anticorps causant l'agglutination des érythrocytes en dessous d'un certain seuil de température. Agglutinines froides Les agglutinines froides sont des anticorps IgM dirigés contre des antigènes Anti-I présents sur la membranne des globules rouges. Elles causent une agglutination de ces derniers à basse température. Au réchaufffement, ces aggrégats provoquent des thrombi microvasculaires et sont hémolysés, ce qui dégage une grande quantité d'hémoglobine libre. Cette affection est une maladie idiopathique, ou la séquelle d'un processus infectieux ou lymphoprolifératif. Son incidence est inférieure à 1% des patients de chirurgie cardiaque. L'affection se manifeste par des thromboses périphériques et une hémolyse (voir Chapitre 21 Coagulopathies). Les agglutinines froides sont détectées au test de Coomb direct (présence de complément sur les GR du patient) et indirect (présence d’anticorps sériques). Elles existent chez tous les individus, mais ne réagissent normalement qu’à 0-4°C. Leur signification clinique tient à leur taux sérique et à la valeur de la température à laquelle elles sont activées. Les valeurs considérées comme sûres pour la CEC sont un titre inférieur à 1:32 à une température de 4°C, sans agglutination détectable à 28°C ou au-dessus. Les probabilités de complications peropératoires deviennent significatives pour des taux supérieurs à 1:512 à 4°C, ou inférieurs à cette valeur si la température d'activation est supérieure à 25°C [242]. En salle d'opération, on prend une série de précautions [51].

Réduction des taux circulants par plasmaphérèse préopératoire si nécessaire ; Chirurgie en normothermie (CEC > 34°C) ou à cœur battant ; Réchauffement de la salle d’opération et des perfusions ; Cardioplégie chaude (> 34°C) cristalloïde ou au sang ; Réchauffer les poches de sang en cas de transfusion ; En cas de crise avec hémolyse :

o Réchauffer à 37°C ; o Améliorer la perfusion périphérique avec un vasodilatateur (nitroprussiate) ; o Alcaliniser les urines (50-100 mmoles bicarbonate de Na+) ; o Méthylprednisolone (500 mg) : efficacité discutée.

Les crises se manifestent par une hémolyse et des occlusions vasculaires périphériques myocardiques, hépatiques et rénales. Activation de la coagulation La coagulation est un phénomène local, normalement déclenché par une lésion tissulaire qui rompt la barrière de l’endothélium (pour plus de détails, voir Chapitre 8 Coagulation & hémostase). Quatre processus physiologiques sont en jeu (Figure 7.19) [3,164].

Bouchon plaquettaire. La lésion endothéliale permet un contact entre les facteurs tissulaires (von Willebrand, GPIb/V/IX) et les plaquettes circulantes ; celles-ci passent du repos à la

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phase activée. Les plaquettes activées s’ammassent entre elles en se reliant par les attaches de leurs récepteurs GPIIb/IIIa avec le fibrinogène. Les plaquettes activées et la lésion de l’endothélium fournissent une surface de phospholipides chargés négativement qui est la plateforme sur laquelle se bâtit la cascade de la coagulation.

Figure 7.19 : Activation de la cascade coagulatoire lors d’une lésion tissulaire telle que la plaie opératoire. Quatre processus sont en jeu. 1 : bouchon plaquettaire (en bleu). Le facteur von Willebrand est mis au contact des plaquettes par la lésion endothéliale ; celles-ci passent du repos (Plaq) à la phase activée (Pl*). Les plaquettes activées s’ammassent entre elles en se reliant par les attaches de leurs récepteurs GPIIb/IIIa avec le fibrinogène (F). 2 : cascade de la coagulation (en jaune). L’exposition du facteur tissulaire dans la lésion active le Facteur VII circulant en FVIIa, ce qui met en marche la chaîne de la coagulation pour aboutir à la transformation de la prothrombine en thrombine ; celle-ci potentialise la coagulation par rétroaction dans une boucle amplifi-catrice (stimulation des facteurs Va et VIIIa qui à leur tour stimulent les facteurs XIa et Xa). La thrombine transforme le fibrinogène circulant en fibrine ; celle-ci va stabiliser le bouchon plaquettaire (filaments jaunes) et le transformer en thrombus solide grâce à l’action du facteur XIII activé (F XIIIa) qui crée des ponts entre les molécules de fibrine. 3 : les cellules endothéliales normales agissent comme régulateurs (en rouge) pour empêcher la propagation de la coagulation au-delà de la zone lésée. Elles libèrent une série de facteurs inhibiteurs (antithrombine AT, protéine C active PCA, inhibiteur de la voie du facteur tissulaire IFT, NO) qui interrompent la voie de la coagulation. 4 : fibrinolyse (en vert). L’endothélium libère également l’activateur tissulaire du plasminogène (tPA) qui se lie à la fibrine et transforme le plasminogène en plasmine ; cette dernière va lyser la fibrine [335].

Cascade de la coagulation. L’exposition du facteur tissulaire (FT) dans la lésion endothéliale active le Facteur VII circulant en F VIIa, ce qui met en marche la chaîne de la coagulation (voie extrinsèque) pour aboutir à la transformation de la prothrombine (F II) en thrombine (F IIa) ; celle-ci potentialise l’activation des plaquettes et de la coagulation par rétroaction dans une boucle amplificatrice (stimulation des facteurs Va et VIIIa qui à leur tour stimulent les facteurs XIa et Xa). La thrombine transforme le fibrinogène circulant en fibrine ; celle-ci va

F

F

F F

F

Pl*

Pl*

Pl*

Pl*

Pl*

Activation

Endothelium

Collagène

Pl* 1

2

4

Facteur tissulaire

Plasminogène

Fibrine

Lésion Lésion

Lésion

Plaquettes

Coagulation

Endothélium

Fibrinolyse

3

Plasmine

FIXa, FXa FVa, FVIIIa

tPA

FVIIa

Thrombine

Plaq von Willebrand

© Chassot 2012

AT, IFT PCA, NO

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stabiliser le bouchon plaquettaire et le transformer en thrombus solide grâce à l’action du facteur XIII activé (F XIIIa) qui crée des ponts entre les molécules de fibrine.

Les cellules endothéliales normales agissent comme régulateurs pour empècher la propagation des thrombi au-delà de la zone lésée. Elles libèrent une série de facteurs inhibiteurs des plaquettes et de la cascade coagulatoire (antithrombine, NO, inhibiteur de la voie du facteur tissulaire) qui interrompent la voie de la coagulation et la contiennent au site de la lésion.

Fibrinolyse. L’endothélium libère également l’activateur tissulaire du plasminogène qui se lie à la fibrine et transforme le plasminogène en plasmine ; cette dernière va lyser la fibrine et la rompre en fragments sans activité coagulatoire (D-dimères).

Indépendamment de toute lésion tissulaire, la CEC déclenche directement la formation de thrombine et de fibrine. Cinq minutes après son début, le taux de thrombine et de fibrine soluble est déjà augmenté de 20 fois, alors que ces substances ne se rencontrent normalement qu’au niveau de la plaie et non dans la circulation systémique [72]. Là aussi quatre phénomènes interviennent [335].

Le système de contact. Au contact de surfaces étrangères chargées négativement comme le verre ou les plastiques, le Facteur XII (Hageman) se clive en F XIIa (activé) qui transforme la prékallikréine en kallikréine, les kininogènes en bradykinine et le facteur XI en F XIa ; ce dernier processus aboutit à la formation de thrombine par la voie intrinsèque de la coagulation. Le F XIIa active également la voie du complément et favorise la transformation de plasminogène en plasmine, provoquant la fibrinolyse.

Les plaquettes sont stimulées par le contact avec les surfaces étrangères et par l’excès de thrombine en circulation ; elle adhèrent aux surfaces, y forment des amas et sécrètent de la thromboxane A2 vasoconstrictrice. Leur nombre diminue de 30-50% au cours d’une CEC [307]. Leur fonction est réduite en hypothermie, mais de manière réversible au réchauffement.

La fibrinolyse. Le taux de plasmine circulante augmente 10-20 fois pendant la CEC ; la vitesse de formation et la vitesse de dégradation de la fibrine sont équivalentes, ce qui revient à une consommation accrue de fibrinogène sans formation de caillots [73].

La réaction inflammatoire. Les leucocytes sont activés par les surfaces étrangères ; ils vont alors sécréter du facteur tissulaire (FT) qui contribue au développement de la cascade coagulatoire et à la production de thrombine. Les surfaces étrangères stimulent aussi la voie alternative du complément (la voie classique est déjà activée par le F XIIa) ; les facteurs C3a et C5a se lient aux leucocytes circulants et contribuent à leur activation.

Les leucocytes activés s'infiltrent entre les cellules endothéliales et produisent des radicaux libres, des superoxydes et des enzymes lysosomiques; c'est la cause de lésions endothéliales, d'augmentation de perméabilité capillaire, d'accumulation liquidienne extracellulaire et de syndrome inflammatoire systémique (voir Syndrome inflammatoire, page 43). Les lésions imparties aux plaquettes et aux facteurs de coagulation (dénaturation protéique) sont directement liées à la durée de CEC, à la profondeur de l'hypothermie (≤ 25°), aux aspirations, et au contact avec l'air (réservoir veineux, aspirations). On peut réduire l’activation de la coagulation par différents moyens, mais, hormis l’anticoagulation, leur efficacité est très variable.

Anticoagulation complète par l’héparine non-fractionnée (HNF) ; l’activité de la thrombine est bloquée lorsque l’ACT est > 480 secondes, mais il faut que le taux d’anti-thrombine soit adéquat (voir Anticoagulation, page 30). L’héparine elle-même stimule les plaquettes.

Supplémentation en anti-thrombine (AT III), car son taux baisse de 30% en CEC à cause de l’hémodilution et de la consommation par l’héparine. Administration sous forme de concentré d’AT III (800 – 1'000 U/kg) ou de plasma frais décongelé (2 poches) [381].

Antifibrinolytiques ; l’acide tranexamique et l’acide amino-caproïque se fixent sur la lysine du plasminogène et bloquent l'activation de la plasmine, donc la fibrinolyse. L’aprotinine est un inhibiteur non spécifique des protéases, qui bloque directement la plasmine (voir Anti-fibrinolytiques, page 36).

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Thromboplégie ; la CEC active les plaquettes qui relâchent leurs granules (ADP, thrombexane), forment des agrégats et adhèrent aux surfaces ; 30-50% d’entre elles ne sont plus fonctionnelles en postopératoire [307]. Leur blocage momentané par un agent antagoniste du récepteur P2Y12 comme le cangrelor en perfusion (demi-vie : 9 minutes) les protège de la stimulation et préserve leur fonctionnalité pour le postopératoire [191]. Cette thérapeutique prometteuse est encore en phase d’essai.

Restriction des aspirations ; le sang récupéré contient de l'air ainsi que des activateurs de la coagulation (TF, thrombine, plasmine) et de l’inflammation (interleukines, TNF, C3a, C5a). Les aspirations sont la source principale d'hémolyse, de thrombopénie, de coagulopathie et de stimulation du syndrome inflammatoire [335]. Les perturbations du système coagulatoire sont nettement diminuées lorsqu’on ne recycle pas le sang aspiré ou lorsqu’on le filtre dans un système CellSaver, mais ces manoeuvres éliminent malheureusement les plaquettes, les protéines et les facteurs de coagulation [374].

Restriction de la taille des circuits ; la miniaturisation des circuits et la suppression du réservoir de cardiotomie minimisent le contact du sang avec des surfaces étrangères et suppriment le contact avec l’air, ce qui freine la libération des activateurs de la coagulation et des déclencheurs inflammatoires.

Biocompatibilité des circuits ; les circuits préhéparinés et les circuits imprégnés de polymères particuliers freinent la cascade du complément et l'activation leucocytaire. L’effet clinique est toutefois peu important [222].

Opération à cœur battant sans CEC ; l’absence de CEC n’élimine pas l’activation coagulo-inflammatoire, mais la réduit ; la dysfonction plaquettaire est moindre [361].

Aspects hématologiques Le volume d’amorçage de la CEC provoque une hémodilution (Ht 25-28%), nécessaire pour freiner l’augmentation de la viscosité du sang à basse température. En hypothermie, la viscosité reste stable lorsque la valeur de l'Ht en % est la même que celle de la température en degrés C°. Lorsque l’Ht est < 25%, le status neurologique et la fonction rénale postopératoires sont péjorés. La CEC provoque une hémolyse, en général infra-clinique. En hypothermie, celle-ci peut devenir massive en présence d’hémagglutinines froides (mises en évidence par un test de Coombs). La CEC déclenche rapidement la formation de thrombine et de fibrine, indépendamment de toute plaie tissulaire. Quatre systèmes sont activés par le contact avec des surfaces étrangères: - Le F XII activé déclenche la voie intrinsèque - Les plaquettes sont stimulées - La fibrinolyse détruit la fibrine formée mais consomme du fibrinogène - L’activation des leucocytes et du complément déclenche une réponse inflammatoire systémique massive

Syndrome inflammatoire systémique (SIRS) L’inflammation est une réaction de défense de l’organisme contre un envahisseur. C’est un système complexe et redondant, qui comprend de nombreux circuits de rétroaction amplificateurs, mais aussi des circuits inhibiteurs qui en limitent la portée. Dans une plaie, la barrière cutanée ou muqueuse est brisée. Le corps doit à la fois s’y protéger des toxines et y empêcher la perte de sang. C’est la raison pour laquelle la réaction inflammatoire est intimement liée à la coagulation. Normalement, le sang n’est en contact qu’avec l’endothélium vasculaire, avec lequel il entretient un équilibre constant. Lorsqu’il rencontre une surface non-endothélialisée comme une lésion ou un corps étranger, il

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déclenche toute une cascade de phénomènes protecteurs. Le processus inflammatoire est conçu pour rester localisé, mais il arrive que la réponse soit exagérée ou que l’agression soit systémique, comme c’est le cas lorsque le sang rentre en contact avec des surfaces étrangères dans une CEC. La réaction de défense de l’organisme se transforme alors en un syndrome inflammatoire systémique (Systemic Inflammatory Reaction Syndrome ou SIRS). En chirurgie cardiaque, le SIRS est déclenché par une série de phénomènes : le contact avec les surfaces du circuit de CEC, le contact avec l’air dans les aspirations de cardiotomie, l'hypothermie, l'héparinisation et les complexes héparine-protamine, l'ischémie et la reperfusion, ou encore les toxines libérées dans le tube digestif. Environ 20% des patients à bas risque développent des complications liées au SIRS [137]: coagulopathie, accumulation liquidienne interstitielle (oedème cérébral, péjoration des échanges gazeux), dysfonction multiorganique (troubles neurologiques, insuffisance cardiaque, rénale et hépatique). La réaction inflammatoire comprend deux phases distinctes liées à des déclencheurs différents [336,375].

Phase précoce ; elle est mise en route par le contact du sang avec une surface non-endothélialisée comme la CEC (voie de contact), et comprend deux composantes intimement imbriquées :

o La voie humorale, qui comprend 3 éléments, la coagulation, le complément et les cytokines ;

o La voie cellulaire, constituée par les globules blancs et l’endothélium. Phase tardive : elle est liée aux lésions d’ischémie et de reperfusion, et à la libération

d’endotoxines, essentiellement par le tube digestif. Voie humorale Le complément est le plus ancien moyen de défense de l’organisme, puisqu’on le retrouve déjà chez les oursins. Il consiste en un ensemble de 35 molécules qui assistent la réaction antigène-anticorps ou la défense anti-bactérienne, et qui convergent vers des protéines particulièrement redoutables puisqu’elles sont capables de perforer les membranes cellulaires (MAC : membrane attack complex) (Figure 7.20) [338]. Très imbriquée avec la cascade de la coagulation, la chaîne du complément comprend 3 voies distinctes (classique, alternative et de la lectine) qui convergent vers le clivage du facteur C3 en C3a (anaphylatoxine I, libération d’histamine) et C3b, lequel clive à sont tour le facteur C5 en C5a (anaphylatoxine II, activateur leucocytaire) et C5b qui est le premier composant du complexe MAC. Le système kinine-kallikréine comprend un groupe de protéines sériques impliquées dans la régulation du tonus et de la perméabilité vasculaires. Elles circulent sous forme de kininogènes inactives, qui sont activées par les kallikréines libérées dans les tissus lésés. Cette réaction donne naissance à la bradykinine qui est vasodilatatrice (sécrétion de NO et de prostacycline). Il existe une kallikréine plasmatique qui circule sous forme de prékallikréine inactive et qui est activée par le Facteur XIIa de la coagulation (facteur Hageman ou facteur de contact). Comme la bradykinine formée est elle-même un activateur du Facteur XII, il se forme ici un système auto-amplificateur du lien avec la cascade de la coagulation. Les cytokines sont des polypeptides qui assurent la communication entre cellules et déclenchent des activités spécifiques selon leurs cibles [336].

TNF-alpha (Tumor necrosis factor) ; sécrété par les monocytes, les mastocytes et les lymphocytes-T en réponse aux endotoxines bactériennes, il active la chaîne inflammatoire. A haute concentration, il provoque une symptomatologie de choc septique avec des effets cardiodépresseur, vasodilatateur, thrombogène et perméabilisant capillaire.

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Interleukines pro-inflammatoires (IL-1, IL-6, IL-8) ; sécrétées par les leucocytes, elles activent la production de protéine C-réactive, de fibrinogène et de catécholamines ; elle provoquent une hyperglycémie, une leucocytose et de la fièvre.

Interleukines anti-inflammatoires (IL-10) ; elles assurent un feed-back négatif qui empêche l’emballement de ces réactions en chaîne.

Figure 7.20 : Schéma simplifié de l’activation du complément. La chaîne du complément comprend 3 voies qui sont initiées par des déclencheurs distincts : la voie classique (réaction antigène-anticorps Ag-Ac), la voie alternative (activation directe par contact) et la voie de la lectine (site des membranes bactériennes). Par différentes étapes intermédiaires, elles convergent vers le clivage du facteur C3 en C3a (anaphylatoxine I, libération d’histamine) et C3b, lequel clive à sont tour le facteur C5 en C5a (anaphylatoxine II, activateur leucocytaire) et C5b qui est le premier composant du complexe MAC (MAC : membrane attack complex), complexe protéique qui attaque les membranes cellulaires et qui est le résultat ultime des voies du complément. Les nombreuses étapes intermédiaires ne sont pas représentées ici. La cascade de la coagulation (voir Figure 7.19, page 41) est intimement connectée à la réaction inflammatoire. La thrombine, par exemple, en potentialise plusieurs effets : activation des polymorphonucléaires et des plaquettes, sécrétion l’IL-6 et d’IL-8, activation de C3. De leur côté, les plaquettes stimulent l’adhésion des leucocytes à la paroi vasculaire. Voie cellulaire Les neutrophiles polymorphonucléaires chargés de phagocyter les pathogènes contiennent des granules pouvant libérer des enzymes protéolytiques, des radicaux oxygénés et des médiateurs inflammatoires. Lorsque survient une lésion vasculaire, ils roulent d’abord à la surface de l’endothélium par l’accrochage de molécules appelées sélectines, puis ils adhèrent à l’endothélium lésé

Histamine

Activation leucocytes

C3

Voie alternative

Voie classique

Voie de la lectine

C3a

C5a C5

Ag-AC Bactér Contact

C3b +

Anaphyla- toxine I

MAC

Anaphyla- toxine II

C5b

+

C6,C7,C8,C9

© Chassot 2012

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par l’ancrage de molécules appelées intégrines (molécules d’adhésion). En troisième lieu, ils migrent dans l’espace interstitiel par chimiotactisme pour y libérer leurs substances bactéricides [325]. Les basophiles, activés par la voie du complément, sécrètent essentiellement de l’histamine, qui augmente la perméabilité capillaire et facilite le passage des éléments figurés ; elle provoque aussi une vasodilatation et une bronchoconstriction. Les mastocytes ressemblent aux basophiles mais sont cantonnés dans l’espace périvasculaire des organes et ne circulent pas ; lorsqu’ils sont stimulés par le complément ou la thrombine, ils sécrètent différents médiateurs inflammatoires dont de nombreuses interleukines. Les monocytes, enfin, sont des macrophages qui libèrent une série de facteurs inflammatoires (interleukines, TNF-alpha) et phagocytent les éléments étrangers [336]. Les cellules endothéliales sont les régulatrices naturelles de la coagulation et de l’inflammation. Elles répondent à la présence de thrombine, de facteur C5a, de cytokines et d’interleukines par la sécrétion de sélectines et d’intégrines qui immobilisant les macrophages. Elles gèrent le tonus vasculaires par la libération de substances vasodilatatrices comme le NO, l’histamine et la bradykinine ou de substances vasoconstrictrices comme l’endothéline-1 ou la noradrénaline ; par ailleurs, le NO inhibe la fonction plaquettaire. Phase tardive La phase tardive comprend deux composantes.

Les lésions d’ischémie et de reperfusion. Après avoir été privée d’O2 pendant l’ischémie, la cellule en reçoit en masse au moment de la reperfusion, ce qui déclenche une cascade d'évènements pathologiques plus graves que ne l’étaient les dégâts de l’ischémie, notamment par la formation massive de peroxydes (radicaux libres, ROS reactive oxygen species) qui contiennent un nombre impair d'électrons sur leur orbite externe: peroxide (O2

•-), H2O2, hydroxyl (•OH) (voir Chapitre 24 Mécanismes de l’ischémie et de la reperfusion). Les peroxydes libérés lors d'activation leucocytaire ou lors de reperfusion après ischémie déclenchent une réaction inflammatoire majeure. Normalement réduits par des antioxydants naturels (superoxide dismutase, catalase, glutathion, vitamine E), ils débordent dans le liquide extracellulaire lorsqu'ils sont produits en masse et attaquent les phospholipides des membranes, le DNA et les protéines [108,120].

Les endotoxines stimulent massivement la production de complément, de TNF-alpha et d’interleukines. La libération d'endotoxines par les bactéries Gram-négatives qui hantent le tube digestif est liée à la baisse de débit splanchnique en CEC et en hypothermie; le flux dans la muqueuse gastrique, par exemple, est diminué jusqu'à 60% par le bas débit et par la vasoconstriction [270].

Cas particulier : la CEC La CEC est le cas le plus emblématique de la stimulation par la voie de contact (Figure 7.21). En présence de surfaces chargées négativement comme le verre, les métaux ou les plastiques, le Facteur XII se clive en F XIIa (activé). Celui-ci transforme la prékallikréine en kallikréine, les kininogènes en bradykinine et le facteur XI en F XIa ; ce dernier processus aboutit à la formation de thrombine par la voie intrinsèque de la coagulation. Le F XIIa favorise aussi la transformation de plasminogène en plasmine, provoquant la fibrinolyse. Le contact active directement le complément par la voie alternative, et indirectement par le F XIIa (voie classique). D’autres phénomènes de la CEC concourent au déclenchement du complément, comme le relargage d’endotoxines et la formation de complexes héparine-protamine. La voie cellulaire est également stimulée par le contact, soit par l’intermédiaire du facteur XIIa et de la kallikréine, soit directement par l’activation des neutrophiles. Mais le circuit extracoroprel ne possède pas d’endothélium pour limiter ces différentes réactions, qui peuvent donc prendre une ampleur excessive et se distribuer dans tout l’organisme.

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La durée de CEC, la profondeur de l'hypothermie et le degré d'hémodilution ont tous été évoqués comme facteurs aggravants, mais ils ne paraissent avoir qu'un rôle secondaire dans la genèse du SIRS [149]. Les lésions mécaniques de la pompe, de l'oxygénateur et des filtres, le contact du sang avec les surfaces étrangères (circuits) et avec l'air (aspirations, réservoir veineux), sont les éléments déclencheurs principaux. Plus de 50% des neutrophiles sont séquestrés dans les poumons durant le réchauffement; leur dégranulation contribue aux dommages cellulaires pulmonaires. Le SIRS se déclenche dans les premières minutes de la CEC et s’éteint vers le 4ème – 5ème jour postopératoire ; il est suivi d’une période de relative immunodépression [294]. Le pic des marqueurs inflammatoires survient vers la 5ème heure après la CEC [108]. Au cours d’une CEC, la stimulation inflammatoire conduit donc à un état instable caractérisé par une série de phénomènes (Figure 7.22).

Elévation de tous les marqueurs inflammatoires (TNF-alpha, interleukines, cytokines, protéine C-réactive) ;

Activation du complément et des leucocytes ; Production de thrombine et stimulation de la cascade de la coagulation ; Production de plasmine et stimulation de la fibrinolyse (élévation des D-dimères) ; Activation et consommation des plaquettes ; Relargage d’endotoxines et de TNF-alpha ; Relargage de radicaux libres et d’oxydants ; Libération de bradykinine, d’histamine et d’anaphylatoxines : augmentation de la perméabilité

capillaire, vasodilatation systémique, vasoconstriction pulmonaire ; Altérations de la fonction cardiaque, pulmonaire, rénale et cérébrale ; l’incidence de

fibrillation auriculaire est proportionnelle à l’élévation des marqueurs inflammatoires [119].

XIIa Complément Voie alternative Voie intrinsèque

de la coagulation

Complément Voie classique

Eléments inactivés

CEC

XII

MAC

Thrombine Kallikréine

Activation neutrophile

s

Fibrinolyse

Bradykinine Plasmine

Prékallikréine

© Chassot 2012

Stimulation par la voie de contact

Figure 7.21 : Activation par la voie de contact. Dans un vaisseau bordé d’endothélium intact, les facteurs circulent sous forme inactive. Mais en présence de surfaces chargées négativement (verre, métaux ou plastiques), le Facteur XII se clive en F XIIa (activé). Celui-ci transforme la prékallikréine en kallikréine, les kininogènes en bradykinine et le facteur XI en F XIa ; ce dernier processus forme la thrombine par la voie intrinsèque de la coagulation. Le F XIIa favorise aussi la transformation de plasminogène en plasmine, provoquant la fibrinolyse. Le contact active directement le complément par la voie alternative, et indirec-tement par le F XIIa (voie classique). MAC (membrane attack complex) : complexe protéique qui attaque les membranes cellulaires, résultat ultime des voies du complément.

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La question de déterminer la part de la CEC par rapport à celle de la chirurgie cardiaque elle-même dans la genèse du SIRS peut être approchée par l'observation de la chirurgie à coeur battant. Cette dernière est associée à une réduction, mais pas à une disparition, des taux postopératoires de marqueurs de la réaction inflammatoire comme le C3a, le C5a, le TNF-alpha ou l'interleukine-6 et -8 [88,102,129]. Toutefois, la signification de ces variations est incertaine, puisque l'IL-8 et le C3a sont liés au traumatisme tissulaire direct et que l'IL-10 a des propriétés anti-inflammatoires [234]. Les effets de la CEC dépendent largement de l'équilibre entre la libération des médiateurs pro-inflammatoires et celle des médiateurs anti-inflammatoires [197]. Certaines populations affichent une réaction pro-inflammatoire dominante, telles les personnes âgées ou celles qui souffrent de dysfonction ventriculaire gauche [324]. Elles pourraient bénéficier particulièrement de la chirurgie à coeur battant. Dans les groupes à risque faible, les taux de complications liés au SIRS sont identiques entre les opérations avec ou sans CEC [260,283]. Le circuit de CEC est donc un facteur déclenchant majeur, mais il n'est pas le seul responsable de la réaction inflammatoire [361]. Améliorations techniques A part les interventions à cœur battant, il existe divers moyens techniques de réduire le syndrome inflammatoire déclenché par la CEC et la chirurgie, mais aucun ne permet de le supprimer. La portée clinique de ces améliorations reste en général modeste [218,376].

Figure 7.22 : Représentation schématique des mécanismes mis en jeu dans la genèse du syndrome inflammatoire systémique (d'après références 149,335).

Lésions polyorganique

s

Consommation Hypocoagulation

Thrombose Ischémie

Hyper-fibrinolyse

Activation plaquettes

Endotoxines Complément

Cytokines Kallikréine

Facteur XIIa

Bas débit Dépulsation

Ischémie Reperfusion

Contact avec des surfaces étrangères

Activation et adhésion leucocytes-endothélium

Migration leucocytes Libération protéases + radicaux libres (ROS)

© Chassot 2013

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Restriction des aspirations ; le sang récupéré contient de l'air, des débris celulaires et des activateurs de la coagulation (TNF, thrombine, plasmine) ou de l’inflammation (interleukines, C3a, C5a). Les aspirations sont la source principale d’embolie, d'hémolyse, de thrombopénie, de coagulopathie et de stimulation du SIRS [335]. Les perturbations du système coagulatoire sont nettement diminuées lorsqu’on ne recycle pas le sang aspiré ou lorsqu’on le filtre dans un système CellSaver, mais ces manoeuvres éliminent malheureusement les plaquettes, les protéines et les facteurs de coagulation [374].

Restriction de la taille des circuits ; la miniaturisation des circuits et la suppression du réservoir de cardiotomie minimisent le contact du sang avec des surfaces étrangères et suppriment le contact avec l’air, ce qui freine la libération des activateurs de la coagulation et des déclencheurs inflammatoires [37,389].

Biocompatibilité des circuits ; les circuits préhéparinés et les circuits imprégnés de polymères comme le poly-2-méthoxy-éthyl-acrylate freinent la cascade du complément et l'activation leucocytaire, réduisent l'adhésivité plaquettaire et l'adsorption des facteurs de coagulation [139]. Même s’ils atténuent les complications pulmonaires, rénales et neurologiques, leur impact clinique est peu important [222,345].

Hémofiltration ; elle réduit l’excédent liquidien propre à la CEC et évacue les déclencheurs inflammatoires hydrosolubles. Elle réduit l’œdème interstitiel postopératoire, les besoins transfusionnels, le syndrome inflammatoire systémique et l’insuffisance multi-organique [45,77,214,318].

Filtres leucocytaires ; la réduction du taux de leucocytes est bénéfique surtout pour les échanges gazeux, puisque les poumons sont le principal lieu de séquestration leucocytaire pendant la CEC. Malheureusement, ces filtres ne préviennent pas l’insuffisance respiratoire postopératoire [18].

Normothermie ; le maintien de la température ≥ 34°C évite les altérations de la coagulation et la flambée inflammatoire déclenchées par le réchauffement, mais la température idéale pour la CEC n’a pas encore pu être définie [266,323].

Ces améliorations ont probablement un impact sur les complications postopératoires dans les cas à haut risque ou les interventions complexes, mais ont peu d'influence pour les interventions standards chez des patients à risque faible. Vu l'augmentation de prix qu’elles impliquent, ces nouvelles technologies ne présentent pas pour l'instant un rapport coût / bénéfice favorable à leur utilisation de routine. Pharmacothérapie Les antifibrinolytiques se fixent sur la lysine du plasminogène et bloquent l'activation de la plasmine, donc la fibrinolyse. En clinique, ils diminuent globalement les pertes sanguines de 30%. Trois substances sont utilisées à cet effet (voir Antifibrinolytiques, page 36).

L’aprotinine est un inhibiteur non spécifique de nombreuses protéases qui bloque directement la plasmine; elle inhibe la production de complément, de TNF et de kallikréine [197]. Elle a été retirée du marché en novembre 2007 à cause d’un excès d’insuffisance rénale, de complications cardiaques et de mortalité, bien qu’elle ait été plus efficace que les deux autres substances pour diminuer le risque hémorragique et le taux de transfusion [114,221].

L’acide tranexamique ne déclenche pas de réactions allergiques ni de dysfonction rénale, mais les hautes doses acccroissent le risque de convulsions postopératoires [190,226]. Bien qu’il diminue efficacement le risque hémorragique, il a peu d’effet anti-inflammatoire.

L’acide ε-aminocaproïque est légèrement moins efficace [190]. Les corticostéroïdes maintiennent l’intégrité des membranes cellulaires, particulièrement dans le cœur et les poumons, freinent l’adhésion leucocytaire, inhibent la voie cellulaire et réduisent la production de complément et de cytokines [184,376]. Bien qu’ils diminuent les marqueurs inflammatoires, ils ne

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préviennent les dysfonctions multiorganiques que chez les malades en hypocorticisme. Cinq méta-analyses ont synthétisé les résultats cliniques acquis jusqu’ici [8,68,380].

La réduction de l’incidence de FA est significative ; Le temps de séjour aux soins intensifs et le temps de séjour hospitalier sont diminués ; La réduction du taux d’hémorragie est marginale ; La durée de ventilation mécanique est peu modifiée ; certaines études ont montré une

atténuation des complications respiratoires, mais d’autres publications montrent une aggravation des échanges gazeux postopératoires et un retard à l'extubation ;

Le taux d’infection de plaie est identique, et le taux d’infections générales peu modifié ; Le taux d’épisodes hyperglycémiques est augmenté 1.5 fois dans une méta-analyse et celui

d’hémorragies digestives est doublé dans une autre ; La mortalité n’est pas modifiée.

Réaction inflammatoire systémique

La réaction inflammatoire est un système rapide, complexe et redondant qui sert à la protection de l’organisme contre des agresseurs. Elle comprend une voie humorale (complément, cytokines, kinines), une voie cellulaire (leucocytes, endothélium) et une phase tardive (lésion d’ischémie-reperfusion, relargage d’endotoxines). Elle est très imbriquée avec la cascade de la coagulation. Le contact direct du sang avec le circuit de CEC et avec l’air induit une réaction inflammatoire systémique (SIRS) massive déclenchée par l’activation du Facteur XII (Hageman), du complément et des leucocytes. Elle est caractérisée par : - Elévation de tous les marqueurs inflammatoires - Activation du complément et des leucocytes - Production de thrombine et stimulation de la cascade de la coagulation - Production de plasmine et stimulation de la fibrinolyse - Activation et consommation des plaquettes - Relargage d’endotoxines, de TNF-alpha et d’interleukines - Relargage de radicaux libres et d’oxydants - Libération de bradykinine, d’histamine et d’anaphylatoxines - Augmentation de perméabilité capillaire, baisse des RAS, augmentation des RAP - Altérations de la fonction cardiaque, pulmonaire, rénale et cérébrale

Les possibilités thérapeutiques sont nombreuses, mais elles n’ont d’impact clinique que dans les cas à haut risque : - Restriction du contact avec les surfaces étrangères (minicircuits, matériaux biocompatibles) - Restriction du contact avec l’air (limitation des aspirations, absence de réservoir veineux) - Hémofiltration - Antifibrinolytiques - Corticostéroïdes - Antioxydants, inhibiteurs du complément - Opération sans CEC Bien que les protocoles des différentes études soient très variables, on peut en conclure que l’administration prophylactique de stéroïdes pourrait diminuer la morbidité postopératoire, pour autant qu’elle ne soit pas elle-même la cause d’un accroissement des infections et des hémorragies [8]. La question de savoir si une prophylaxie de routine avec des stéroïdes est à recommander devrait être résolue par deux essais contrôlés et randomisés actuellement en cours : l’étude canadienne SIRS (R.

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Whitlock) et l’étude hollandaise DECS (D. van Dijk). Les dosages utilisés dans ces deux essais sont 500 mg de méthylprednisolone et 1 mg/kg de dexaméthasone respectivement, administrés à l’induction de l’anesthésie. Toute une panoplie de substances pharmacologiques est potentiellement utile pour atténuer le syndrome inflammatoire, sans qu’on puisse démontrer pour autant que son impact clinique soit significatif.

Inhibition du complément : le pexelizumab et le TP10, qui inhibent la chaîne du complément au niveau de C5a, atténuent la morbi-mortalité après chirurgie cardiaque dans des groupes sélectionnés de patients, sans pour l’instant faire preuve d’effets cliniques significatifs [338].

Antioxydants : la N-acétylcystéine pourrait améliorer les fonctions pulmonaires postopératoires [122] ; l'acide ascorbique, l'alpha-tocoférol et l'allopurinol détoxifient les radicaux libres, mais les études cliniques n’ont pas décelé de bénéfice important [127].

Pentoxifyline (analogue de la théophylline) : elle freine les médiateurs et la cascade du complément, et semble améliorer la ventilation postopératoire [43].

Divers agents ont un certain effet anti-inflammatoire : milrinone, nitroprussiate, morphine, héparine, IEC [376].

Hémodynamique Après 50 ans d'utilisation de la CEC, il est curieux de constater qu'il n'y a toujours pas de consensus clair ni de données évidentes (evidence-based) au sujet des valeurs de pression, de débit et d'hématocrite qui sont les plus souhaitables en pompe. Le plus souvent, ces éléments sont réglés en fonction des habitudes locales ou du principe de précaution. La pression artérielle moyenne (PAM) et l'équation du transport d'O2 (DO2) résument les différentes composantes hémodynamiques qui assurent la perfusion tissulaire: DO2 = D(P) • (Hb • SaO2 • 1.36) + 0.003 PaO2 Où: D(P): débit de la pompe de CEC Hb: concentration en hémoglobine (ou hématocrite) SaO2: saturation artérielle à la sortie de l'oxygénateur PaO2: pression partielle de l'O2 à la sortie de l'oxygénateur Pression artérielle Maintenir une pression moyenne relativement basse ou relativement haute présente des avantages et des inconvénients dans chacun des deux cas.

Pression élevée (PAM 80-100 mmHg) : o Meilleure perfusion tissulaire (cerveau, rein, tube digestif) ; o Meilleure adéquation aux besoins des malades hypertendus, âgés ou diabétiques ; o Assurance d’un flux satisfaisant lorsque l’autorégulation d’un organe est perturbée ; o Amélioration du flux collatéral pour les zones tissulaires à risque d'ischémie ; o Possibilité de débits de pompe plus élevés.

Pression basse (PAM 50-60 mmHg) : o Moins de traumatisme pour les éléments figurés ; o Moins d'hémorragie et de retour sanguin par les artères bronchiques ; o Moins de volume aspiré et lésé dans les aspirations de cardiotomie ; o Moins de charge embolique cérébrale ; o Meilleure protection myocardique (réduction du flux coronarien collatéral).

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Le critère primordial est le maintien d’une perfusion cérébrale adéquate. La pression de perfusion cérébrale (PPC) est la différence entre la PAM et la pression veineuse jugulaire (ou la PVC). Cela signifie que la PPC baisse non seulement si la PAM diminue, mais aussi si la PVC s'élève; ceci peut survenir lors de bascule du coeur pour avoir accès à sa face postérieure, de mauvais retour veineux, d'obstruction de canule, ou de position de Trendelenburg. Le flux sanguin cérébral reste stable et indépendant de la PAM sur une plage d’autorégulation, en-dehors de laquelle il devient linéairement dépendant de la pression artérielle. Habituellement, la PAM considérée comme limite inférieure est 50 mmHg parce qu'elle correspond à la limite physiologique de l'autorégulation cérébrale. Mais il s'est avéré que cette limite est très variable entre les individus et entre les pathologies, et que sa valeur est plutôt voisine de 65-75 mmHg [173]. L’autorégulation est gravement perturbée chez 20% des patients qui subissent une CEC [269], mais elle l’est aussi après un ictus ou chez les diabétiques et les hypertendus [172,200]. D'autre part, l'autorégulation cérébrale est conservée jusqu'à 25-28°C en régulation alpha-stat sur une plage de pression de 30 à 100 mmHg, mais elle est abolie en mode pH-stat ou en dessous de 25°C [251,342]. De ce fait, les résultats neurologiques tendent à être meilleurs en mode alpha-stat lorsque l’hypothermie est modérée [277]. Une PAM de > 75 mmHg réduit le risque d'hypoperfusion cérébrale dans les populations âgées, artérioscléreuses, polyvasculaires ou hypertensives, et améliore le flux collatéral lors d'AVC sur embolie [254]. Une étude clinique randomisée a clairement démontré que les résultats neurologiques sont meilleurs lorsque la PAM est de 80-100 mmHg plutôt que 50-60 mmHg (taux de complications neurologiques 4.8% versus 12.9%) [128]. Il en est de même pour la fonction rénale, qui est mieux conservée si la PAM est ≥ 80 mmHg. La pression artérielle souhaitable est également fonction de la température. Elle est de 60-80 mmHg au-dessus de 29°C et de 50 mmHg à 28°C; 40-50 mmHg est acceptable en dessous de 28°C [128]. En conclusion, on ne peut pas formuler une récommandation générale valable dans toutes les circonstances, car la PAM doit être adaptée en fonction du cas, de la température, de la profondeur de l’anesthésie et des contraintes chirurgicales. Il est préférable qu’elle soit élevée (80-90 mmHg) dans une série de situations : personnes âgées ou polyvasculaires, hypertension, athéromatose aortique, diabète, maladies neurologiques ou rénales. Dans les cas sans risque particulier, elle peut être maintenue à environ 60 mmHg. Débit de pompe Il n’existe pas non plus de valeur magique pour le débit de pompe, mais il est réglé habituellement à 2.4 L/min/m2 (70 ml/kg) en normothermie (> 35°C) pour un Ht de 30-40%. Bien que cette valeur soit dans la fourchette basse de l’index cardiaque normal, le but est d'assurer les besoins métaboliques des tissus et la pression de perfusion dans les organes. Les premiers sont diminués par l'anesthésie et l'hypothermie, ce qui permet de baisser le débit sans compromettre l'équilibre tissulaire. Ainsi, le débit recommandé est de 1.8 L/min/m2 à 28° et de 1.0 L/min/m2 à 20°. Le flux sanguin est maintenu constant dans le cerveau par autorégulation entre 1.0 et 2.5 L/min/m2, alors qu’il baisse dès 2.0 L/min/m2 dans le foie et les viscères [254]. En-dehors des plages d’autorégulation, le flux devient strictement pression-dépendant. En utilisant la formule du calcul de la résistance, on peut facilement évaluer l'état des résistances artérielles systémiques:

RAS = (PAM – PVC) • 80 / DC En l’occurrence, la PVC est considérée comme nulle puisque l’OD est en décharge et puisque le réservoir veineux est à la pression atmosphérique. Le débit cardiaque (DC) est remplacé par le débit de la pompe (valeur donnée par la machine).

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 53

Donc: RAS = PAM • 80 / D pompe La pression et le débit sont en équilibre par l'intermédiaire des résistances artérielles périphériques. Ils ne doivent pas être réglés au détriment l'un de l'autre. Ainsi, il n'est pas logique que le perfusioniste baisse le débit de la pompe en dessous de la limite physiologique parce que la pression est trop haute, ou que l'anesthésiste administre un vasoconstricteur pour remonter la pression alors que le débit est trop bas. Dans la phase de réchauffement, il est important de maintenir un haut débit et un certain degré de vasodilatation pour favoriser les échanges thermiques tissulaires. Lors d'insuffisance aortique (IA) ou de shunt gauche-droit, la pression ne doit être maintenue que par le débit tant que l'aorte ou le shunt ne sont pas clampés ; l’administration de vasopresseur ne ferait qu’aggraver l’IA ou augmenter le shunt. Le jeu des résistances artérielles, du débit de pompe et de la pression de perfusion réclame donc une collaboration et une communication permanentes au sein de l'équipe en charge du malade. Transport d’O2 La consommation d'oxygène (VO2), qui est normalement de 150 mL/min/m2, baisse à 120-140 mL/min/m2 sous anesthésie normotherme et à 45 mL/min/m2 à 27° [116]. En CEC, la curarisation permet de la diminuer encore de 20-30% [166]. Ainsi, le débit recommandé à 28°C est de 1.8 L/min/m2, et à 20°C de 1.0 L/min/m2. La preuve de l'adéquation du débit est fournie par une SvO2 ≥ 70%. Le transport d’O2 (DO2 = D(P) • (Hb • SaO2 • 1.36) + 0.003 PaO2) peut être amélioré en augmentant le débit de pompe (DP), la FiO2, ou l’Ht (transfusion, hémoconcentration par ultra-filtration). Le DO2 critique est la valeur en dessous de laquelle la consommation d’O2 (VO2) devient dépendante du débit cardiaque (voir Chapitre 5, Figure 5.100). Chez l’homme endormi, elle est de 330 mL/min/m2 et en CEC, si elle existe, de 280-300 mL/min/m2 [274]. DO2 et VO2 restent normaux sur une plage d’Ht allant de 39% à 25% [206]. Un DO2 < 270 mL/min/m2 en CEC est le meilleur prédicteur d’insuffisance rénale postopératoire [288]. Mais il existe une hiérarchie des organes dans la dépendance au débit. Ainsi, le DO2 reste satisfaisant dans le cerveau et les reins lorsque le débit baisse jusqu’à 1.4 L/min/m2, alors qu’il est déjà insuffisant dans les viscères et les muscles lorsque le débit passe en dessous de 1.7-2.0 L/min/m2 (Figure 7.23) [47]. Les viscères sont donc à haut risque d’ischémie parce qu’ils ne bénéficient pas d’un système d’autorégulation. Le problème de l’hématocrite est discuté dans la section consacrée à l’hémodilution (voir page 8).

DP (L/min/m2)

ΔDO2 (%)

Reins

1.3 1.5 1.7 1.9 2.1 2.3

50

75

100

Cerveau

Viscères Muscles

Figure 7.23 : Modifications de l’apport d’O2 (DO2) à différents organes en fonction du débit de pompe (DP). Le DO2 est bien maintenu dans le cerveau (jaune), et relativement bien dans les reins (rouge), jusqu’à un débit de 1.4 L/min/m2, mais il diminue dès que le débit est inférieur à 2.0 L/min/m2 dans les viscères et les muscles (bleu) [47]. Ces derniers souffrent donc d’ischémie alors que le cerveau fonctionne encore normalement.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 54

Hémodynamique et CEC

La PAM doit être adaptée en fonction du cas, de la température, de la profondeur de l’anesthésie et des contraintes chirurgicales. Elle doit être élevée (80-90 mmHg) dans une série de situations : personnes âgées ou polyvasculaires, hypertension, athéromatose aortique, diabète, maladies neurologiques ou rénales. La valeur moyenne oscille entre 50-60 mmHg (patients à risque faible) et 80-90 mmHg (patients à haut risque). Le débit de pompe est réglé habituellement à 2.4 L/min/m2 (70 ml/kg) en normothermie (> 35°C) pour un Ht de 30-40%. En hypothermie, il peut être abaissé à 1.8 L/min/m2 à 28°C et à 1.0 L/min/m2 à 20°C, mais doit être augmenté pour compenser l’Ht si celui-ci est trop bas. Le débit est adéquat lorsque la SvO2 est ≥ 70%. En CEC, le DO2 devient dépendant du débit de pompe en dessous de 300 mL/min/m2. Le DO2 reste satisfaisant dans le cerveau et les reins lorsque le débit baisse jusqu’à 1.4 L/min/m2, alors qu’il est déjà insuffisant en dessous de 1.7-2.0 L/min/m2 dans les viscères et les muscles, qui ne bénéficient pas d’un système d’autorégulation.

Hypothermie Pour diminuer la consommation d'oxygène des tissus, un certain degré de refroidissement est traditionnel en CEC: hypothermie légère (32-35°C), modérée (28-31°C) ou profonde (< 25°C). Mais ce concept est battu en brêche depuis une vingtaine d’années au profit d’un maintien de la température dans la zone normothermique (35-37°C). En effet, les progrès réalisés dans la technologie de CEC permettent maintenant d’assurer un débit élevé sans complications significatives, alors qu’il était auparavant impératif de l’abaisser pour minorer les lésions hématologiques et tissulaires. Intérêt de l’hypothermie L'hypothermie a des répercussions sur de nombreux systèmes (Tableau 7.3). Le métabolisme cellulaire diminue exponentiellement avec la température: il baisse de 7% par degré centigrade. Un refroidissement de 10° diminue donc les besoins de 50%. Les avantages de l'hypothermie sont nombreux.

Réduction du débit de la pompe (moins d’hémorragie dans le champ opératoire, moins d’hémolyse) ; 1.5 L/min/m2 suffit à couvrir les besoins de l'organisme à 25°C ;

Amélioration de la protection myocardique ; Amélioration de la protection cérébrale ; Réduction des traumatismes aux éléments figurés et aux protéines ; Réduction de la réaction inflammatoire ; Réduction des besoins en sang allologue.

Mais l’hypothermie a aussi des inconvénients [152].

Augmentation de la viscosité sanguine, compensée par une diminution de l'hématocrite ; en hypothermie, la viscosité reste à peu près stable lorsque l'Ht en % a la même valeur que la température en °C.

Augmentation des résistances artérielles systémiques et vasoconstriction périphérique ; Sécrétion de catécholamines, résistance à l’insuline ; Altérations fonctionnelles des protéases de la cascade de la coagulation ;

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Inhibition réversible de l’adhésion plaquettaire (mais préservation de l’agrégation) ; Déplacement vers la gauche de la courbe de dissociation de l’Hb (diminution de la

disponibilité de l’O2 pour les tissus) ; Prolongation de l’effet des substances administrées (clairances diminuées, solubilité des gaz

augmentée) ; Non-uniformité de la température ; les organes à haute perfusion (cerveau, reins, cœur)

modifient leur température plus rapidement que le reste du corps ; Nécessité de réchauffer le patient et risque d’hyperthermie au réchauffement, particulièrement

au niveau du cerveau.

Tableau 7.3 : Effets physiologiques de l'hypothermie

Physiques Augmentation de la solubilité des gaz dans les liquides Diminution de la constante de dissociation chimique (pKa) Alcalose: élévation du pH de l'eau Correction d’acidose en hypothermie : protéines (fonction histidine)

Anesthésiques Accentuation de l’action des halogénés, baisse de la MAC Abaissement de la clairance des substances

Cardiaques Diminution de la consommation d'oxygène Maintien des stocks d'ATP Diminution des flux de Ca2+

Diminution de la compliance et de la contractilité Bradycardie, fibrillation ventriculaire < 28°C

Circulatoires Vasoconstriction périphérique entre 25° et 36°C Vasoplégie périphérique < 25°C Augmentation des RAP Augmentation de la viscosité sanguine (Ht idéal en % = T en °C) Abaissement du débit de CEC (moins d’hémorragie, moins d’hémolyse)

Cérébraux Diminution de la consommation d'oxygène (CMRO2) Augmentation relative du flux sanguin cérébral Perte de conscience < 30-32°C Perte de l'autorégulation < 25-28°C EEG isoélectrique < 20°C

Respiratoires Augmentation de l'espace-mort Baisse de la compliance Capillary leak syndrome Déplacement à gauche de la courbe de dissociation de l'hémoglobine

Endocriniens Hyperglycémie Résistance à l'insuline Diminution d'utilisation du glucose Augmentation des catécholamines et des hormones de stress

Coagulatoires Adhésion plaquettaire freinée < 33° (réversible au réchauffement) Séquestration plaquettaire (foie) < 25° Diminution du fibrinogène et du plasminogène

Le coefficient d'abaissement du métabolisme par tranche de 10° C (Q10) est variable selon les températures, les espèces, les organes et les âges. Chez l'homme, sa valeur globale est 2, c’est-à-dire que le métabolisme diminue de moitié pour chaque baisse de 10°C. La baisse du métabolisme cellulaire à froid permet de prolonger le temps d'ischémie d'une durée variable selon les organes. Comme le cerveau est la structure la plus sensible, le temps d'ischémie admissible est fonction de sa

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tolérance propre. A 18°C, la consommation d'O2 du cerveau (CMRO2) est de 40% par rapport à sa valeur en normothermie [240]. Alors que les agents anesthésiques ne modifient que l'activité électrique, l'hypothermie permet une diminution du métabolisme cellulaire des neurones (40% de la CMRO2) aussi bien que de leur activité synaptique (60% de la CMRO2) [240,310]. Pour le cerveau, la baisse du Q10 entre 37° et 27° est due à la réduction de l'activité métabolique, mais la baisse plus rapide de la CMRO2 entre 27° et 18°C (Q10 augmenté) est attribuée à la suppression de l'activité électrique [241]. L’EEG est isoélectrique en dessous de 20°C. La limite inférieure de température tolérée par le cerveau est probablement 12°C, à la condition que l'hypothermie soit uniforme [182]. En dessous de cette valeur, l'inhibition des pompes ioniques membranaires permet aux ions de diffuser selon leurs gradients électrochimiques, ce qui induit un oedème intracellulaire progressif [289]. Le couplage entre le flux sanguin (FSC) et le métabolisme (rapport normal FSC/CMRO2: 15/1) se modifie à froid: à basse température, le FSC devient luxuriant (rapport 30/1). L'autorégulation du flux sanguin cérébral est partiellement conservée en hypothermie modérée (25-30°C) pour des régimes de pression artérielle moyenne de 50-80 mmHg et en normocapnie, mais elle est perdue en hypothermie profonde (< 25°C). C’est pendant la phase de réchauffement que l’autorégulation est la plus perturbée ; le taux d’AVC postopératoire semble directement lié à cette altération (odds ratio 6.57) [172]. Toutefois, il faut garder à l'esprit que ces températures peuvent être inhomogènes; il peut exister des gradients intracérébraux, par exemple entre le cortex et le bulbe. D'autre part, le lieu de mesure est important; les endroits les plus fiables sont le bulbe jugulaire (cathéter jugulaire rétrograde), le tympan (sonde mousse) ou les cellules ethmoïdales (sonde introduite par le nez jusqu'à buter contre le rhinopharynx). Refroidissement et réchauffement Le refroidissement systémique par la CEC est efficace mais pas uniforme. Les organes à perfusion préférentielle (coeur, cerveau, foie, reins) se refroidissent et se réchauffent rapidement, mais les organes dont le rapport flux sanguin / masse tissulaire est bas (graisse, peau, muscle) modifient plus lentement leur température. Il s'établit donc des gradients thermiques, que l'on peut apprécier en mesurant deux températures différentes.

Température oesophagienne, qui représente les organes à haute perfusion, mais qui est influencée par le liquide de refroidissement de surface du cœur ;

Température rectale ou vésicale, qui représente les organes à rapport flux sanguin / masse tissulaire intermédiaire ;

Pour monitorer le cerveau, on place la sonde contre les cellules ethmoïdales ou contre le tympan.

Au refroidissement comme au réchauffement, on évite des gradients thermiques supérieurs à 10° entre les températures oesophagienne et rectale, car ceci est le reflet d'une inhomogénéité trop importante. De plus, les gaz dissous passent en phase gazeuse lorsque la température s'élève brusquement, ce qui est le cas lorsque du sang chaud traverse des tissus encore froids, ou l'inverse. Des micro-embolisations gazeuses se forment alors, qui peuvent aboutir à des occlusions capillaires et des zones d'ischémie focale. Au réchauffement, le cerveau devient transitoirement hypertherme (38-39°) [39]. En effet, le cerveau est l’un des organes les mieux perfusés ; de ce fait, sa température se modifie plus rapidement que celle de l’organisme lors du réchauffement. Ce rebond thermique est d'autant plus prononcé que le réchauffement est plus rapide. Il aggrave profondément la susceptibilité des neurones à l'ischémie et agrandit l'étendue des lésions focales [171,251]. Il diminue l'efficacité de l'autorégulation et rend le flux sanguin cérébral davantage pression-dépendant. Les séquelles neurologiques sont d'ailleurs proportionnelles à la rapidité du réchauffement [132] et à la chute de la saturation veineuse jugulaire pendant ce dernier [86]. L’hyperthermie est responsable de 50-75% des altérations neuro-

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psychologiques de type II, dont l’importance est directement liée à la vitesse de réchauffement [132,136,156]. Celle-ci ne devrait donc pas dépasser 1°C par 5 minutes, ni le gradient de température artère – oesophage la valeur de 2-3°C [46,171] ; mais la réalisation de ce réchauffement progressif présente l’inconvénient de prolonger la durée de CEC. En CEC, le gradient thermique maximal acceptable est de 10°C entre la T° du sang et celle de l'eau de l'échangeur thermique (comme entre la T° rectale et la T° oesophagienne ou cérébrale) [134]. Pour éviter l’hyperthermie cérébrale, la technique la plus appropriée consiste à miser sur quatre points [134,323] :

Eviter l’hypothermie pendant la CEC (T° min > 33°C) ; Réchauffer lentement (1°C/5 min) ; Maintenir la T° du sang à 37°C pendant le réchauffement (mesurée sur la canule artérielle) ; Sortir de pompe à 34-36° (température centrale).

Le dernier point est très discutable, car la température du patient légèrement hypotherme va baisser dans les premières heures postopératoires (afterdrop), puisque la masse musculaire insuffisamment réchauffée représente un réservoir froid que le malade devra réchauffer en augmentant son débit cardiaque et en frissonnant, conditions liées à un risque élevé d’ischémie myocardique et à un délai d’extubation prolongé [85]. Ces risques l’emportent sur les bénéfices potentiels. Le meilleur compromis est donc de réchauffer le malade jusqu’à 36° ou 36.5°. Surveiller la température cérébrale est une gageure, car aucune sonde ne permet de mesurer la température du cerveau lui-même, qui, de plus, n’est pas homogène. Les trois points de mesure les plus proches sont le sang veineux jugulaire (cathétérisation rétrograde du bulbe jugulaire), le tympan (sonde mousse spéciale) et les cellules éthmoïdales (sonde naso-phyryngée standard appuyée contre la paroi postéro-supérieure du pharynx). Les autres sites (œsophage, rectum, vessie, artère pulmonaire) peuvent avoir des gradients jusqu’à 5°C par rapport à la température du bulbe jugulaire, et afficher un retard significatif dans les variations thermiques [134,264]. Contrôle de la température : normothermie versus hypothermie Le débat reste vif entre les deux attitudes, CEC "chaude" versus CEC "froide", parce que les deux techniques ont chacune un impact particulier sur les différents systèmes de l’organisme [276,300]. En effet, les bénéfices de l’hypothermie sont incontestables lors d’opération complexe avec de longs clampages aortiques, et lors d’arrêt circulatoire comme dans la chirurgie de la crosse. Ils sont beaucoup moins évidents lors d’interventions simples et de patients à bas risque. Ils sont aussi très différents selon les organes.

Neuroprotection ; l’hypothermie, même de quelques degrés, améliore l’oxygénation cérébrale (mesurée par la SvO2 jugulaire ou la saturation cérébrale ScO2) et diminue les séquelles neurologiques [20,323] ; elle est essentielle en cas d’arrêt circulaitoire [347].

Cardioprotection ; la cardioplégie froide réfrène le métabolisme myocardique et offre 30-50 minutes de protection que l’on peut prolonger par des perfusions itératives.

Reins et viscères ; ils ne paraissent pas bénéficier de l’hypothermie [349]. Coagulation ; l'hypothermie altère les activités des protéines de la chaîne de la coagulation

ansi que l'adhésivité des plaquettes, mais ces modifications sont réversibles au réchauffement [383].

La normothermie ou l’hypothermie légère (> 33°C) assurent des résultats plutôt meilleurs que l’hypothermie modérée (28°) dans les cas de routine.

Une cardioplégie chaude offre une excellente protection à la condition d’être continue ou de ne subir que de brêves interruptions (< 12 minutes). La récupération fonctionnelle du

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myocarde après CEC est meilleure et plus rapide qu’en hypothermie, le taux de défibrillation spontanée est plus élevé, et l’incidence de fibrillation auriculaire ou d’assistance ventriculaire est diminuée de moitié [4,111].

L’impact sur le risque neurologique n’est pas clairement démontré, mais il n’y a probablement pas de différence pour autant que la pression de perfusion soit correctement maintenue [276] ; le risque d’AVC et les dysfonction cognitives ne semblent pas différents, probablement parce que le premier est essentiellement de nature embolique et parce que les deuxièmes sont liées à une pathologie cérébrale sous-jacente [290].

Le risque d’une hyperthermie au réchauffement n’existe pas [156]. Les altérations de la coagulation sont moindres et le risque hémorragique est plus faible [387].

Equilibre acido-basique A froid, la solubilité des gaz dans les liquides augmente. Ainsi, la valeur de la PCO2 mesurée dans un échantillon de sang normal (PCO2 40 mmHg) refroidi à 27°C n'est que de 23 mmHg, quand bien même aucun échange n'a eu lieu avec l'extérieur, parce que la fraction soluble du gaz [HCO3] a augmenté. A 20°C, le pH apparent normal est de 7.7 et la PCO2 de 18 mmHg. En clinique, la régulation acido-basique peut se faire selon deux techniques (Figure 7.24) [353]. Figure 7.24 : Régulation de l’équlibre acido-basique en hypothermie. Dans le mode α-stat, le contenu total en CO2 est maintenu constant, mais la lecture se fait dans un appareil dont l'échantillon est ramené à 37°, comme si le patient était normothermique. Comme la solubilité du gaz est augmentée à froid, la pression partielle est en réalité plus basse; le sang devient artificiellement alcalin et hypocapnique, mais le rapport [H+]/[OH-] reste constant. Dans le mode pH-stat, le pH du sang est maintenu à 7.4 quelle que soit la température en ajoutant du CO2 au gaz ventilé; le contenu en CO2 augmente (hypercarbie apparente) et le pH baisse. Si le pH est maintenu à 7.4 à 17°, l'échantillon lu à 37° donne une valeur de 7.08 (PCO2 corrrespondante: 110 mmHg).

Selon le mode alpha-stat, le plus souvent utilisé, le contenu total en CO2 est maintenu constant, mais la lecture se fait dans un appareil dont l'échantillon est ramené à 37°, comme si le patient était normothermique. Comme la solubilité du gaz est augmentée à froid, la pression partielle est en réalité plus basse; le sang devient artificiellement alcalin et hypocapnique, mais le rapport [H+]/[OH-] reste constant. Dans cette situation, l'autorégulation cérébrale est intacte, l'acidose extracellulaire est diminuée, le pHi est maintenu stable, et les fonctions enzymatiques intracellulaires sont conservées dans leur intégralité [377]. La plupart des animaux à sang froid (poïkilothermes) hibernent selon ce processus, parce que la glycolyse, qui produit peu de CO2, suffit à subvenir à leurs faibles besoins métaboliques [353].

Lecture 37°

Lecture 37°

Régulation α-stat Régulation pH-stat

37° 20° 37° 20°

pH 7.4 PCO2 40

pH 7.7 PCO2 18

pH 7.4 PCO2 40

pH 7.4 PCO2 40

pH 7.4 PCO2 40

pH 7.1 PCO2 110

+ CO2

© Chassot 2012

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 59

Dans le mode pH-stat, on maintient le pH du sang à 7.4 quelle que soit la température en ajoutant du CO2 au gaz ventilé; le contenu en CO2 augmente (hypercarbie apparente) et le pH baisse. Si le pH est maintenu à 7.4 à 17°, l'échantillon lu à 37° donne une valeur de 7.08 (PCO2 corrrespondante: 110 mmHg). Cette technique provoque une vasodilatation cérébrale hypercarbique qui induit une perfusion luxuriante et qui rend le flux pression-dépendant [249]; l'autorégulation est perdue, et les risques d'oedème cérébral ou d'embolisation sont augmentés. En position de Trendelenburg, la pression intracrânienne peut augmenter dangereusement lorsque la pression veineuse est élevée et que le lit artériel est maximalement vasodilaté.

La technique alpha-stat, plus simple dans la pratique, est habituellement utilisée de routine pour les CEC en hypothermie modérée (25 – 30°C), car les résultats neurologiques à 6 semaines et 2 mois sont sensiblement meilleurs dans ces conditions [251,277,323]. Outre le déplacement de la courbe de dissociation de l'Hb vers la droite, la stratégie pH-stat offre l'intérêt de doubler le flux sanguin cérébral (FSC). Comme l'homogénéité du refroidissement et du réchauffement en est améliorée, la technique pH-stat est probablement indiquée pendant le refroidissement et le réchauffement des malades amenés à une basse température (< 25°), car elle favorise la rapidité et l'uniformité des variations thermiques du cerveau, notamment lors des arrêts circulatoires complets [14,169]. Dans les situations où l’autorégulation est perturbée comme le diabète, l’hypertension artérielle et l’anamnèse d’AVC, la technique pH-stat est probablement préférable car elle maintient mieux l’oxygénation cérébrale [159]. A noter que l'autorégulation est de toute manière inefficace en dessous de 25°C. Pour des CEC de moins de 90 minutes et des températures de plus de 30°C, les deux techniques ne présentent pas de différences significatives. Les protéines se comportent comme des acides faibles au pH habituel du sang et sont un système tampon majeur de l'équilibre acido-basique. Contrairement au système du bicarbonate, elles maintiennent intact leur pouvoir tampon à basse température car le degré de dissociation du groupement imidazole de l'histidine ne se modifie pas par rapport à celui de l’eau en fonction de la température. En hypothermie, il faut donc corriger l'acidose par l'adjonction de protéines, parce que le pouvoir tampon du bicarbonate devient inefficace en-dessous de 28°C [353].

CEC en hypothermie (I)

Toute diminution de température abaisse la demande métabolique de 7% par degré C. Avantages principaux de l’hypothermie (légère : 32-35°, modérée : 28-31°, profonde : < 27°) : - Réduction du débit de pompe (1.8 L/min/m2 à 28°) - Amélioration de la protection cérébrale - Amélioration de la protection myocardique dans les opérations longues ou complexes Inconvénients de l’hypothermie : - Augmentation de la viscosité sanguine (compensée par hémodilution : Ht en % = T en °C) - Augmentation des RAS - Déplacement à gauche de la courbe de dissociation de l’Hb - Troubles de la coagulation - Nécessité de réchauffer le patient Hormis les arrêts circulatoires où elle est cruciale (T° de 18-20°C), l’hypothermie est surtout profitable au cerveau et au cœur, mais ce dernier est également bien protégé par une cardioplégie chaude ± continue. A l’exception des cas longs, complexes ou en arrêt circulatoire qui bénéficient clairement d’une hypothermie modérée ou profonde, la CEC en normothermie ou en hypothermie légère (T > 32°) offre des résultats équivalents pour les cas de routine. Un refroidissement cérébral de 2-4° confère déjà une protection pour les neurones. La cardioplégie normotherme améliore la reprise de la fonction myocardique postopératoire et diminue le risque d’arythmies.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 60

CEC en hypothermie (II) Il est capital d’éviter toute hyperthermie cérébrale lors du réchauffement. Celui-ci doit être lent et homogène : - Vitesse de réchauffement : 1°C/5 min - T° maximale du sang dans la ligne artérielle : 37° - Gradient max entre la ligne artérielle et l’oesophage : 3° - Gradient max entre T° du sang et T° de l’eau (échangeur thermique) : 10° - Réchauffement jusqu’à 36° - 36.5° (T° centrale) Mesure de la température cérébrale : sang veineux jugulaire (canulation rétrograde), sonde tympanique, sonde nasale contre les cellules éthmoïdales. Les autres sites peuvent avoir un écart jusqu’à 5° avec la température du cerveau. La régulation de l’équilibre acido-basique en hypothermie peut se faire selon deux modes, qui ont chacun leurs indications préférentielles :

- α-stat (contenu en CO2 constant): cas à bas risque, CEC < 90 minutes, hypothermie légère - pH-stat (pH constant): refroidissement et réchauffement, situations à haut risque d’altération de l’autorégulation cérébrale (HTA, diabète, anamnèse d’AVC)

Embolies gazeuses Des bulles formées en cours de CEC peuvent emboliser dans l'organisme et être responsables d'ischémie myocardique, de troubles neurologiques ou de dysfonctions organiques. Selon leur taille et leur origine, on en distuingue deux types [40,156].

Miliaire de microbulles, minuscules et peu contrastées ; dues à la cavitation ou aux variations thermiques, elles sont sans incidence sur le status neurologique postopératoire.

Petites navettes brillantes qui dansent dans les chambres cardiaques et s’accumulent en larges nappes dans les endroits en surplomb ; elles proviennent de l’aspiration d’air dans le circuit ou de l’ouverture des cavités cardiaques ; leur embolisation dans les coronaires ou le cerveau modifie le fonctionnement de l’organe.

Leur identification et leur localisation à l'ETO permettent une vidange plus adéquate, et, de ce fait, peuvent améliorer le pronostic neurologique des patients. Plusieurs phénomènes concourent à la création de ces bulles [92].

La solubilité des gaz dans un liquide augmente lorsque la température baisse ou lorsque la pression s'élève. Des microbulles peuvent donc se former dès que le sang se réchauffe localement, ou dès que la pression baisse par cavitation (aspiration contre resistance par la pompe ou vortex dans des tourbillons). Ces bulles embolisent facilement, car les détecteurs de bulles placés sur le circuit artériel ne perçoivent pas des éléments de moins de 0.5 mL.

Lors d'ouverture des cavités gauches (chirurgie de la valve mitrale, par exemple), l'air doit être purgé avant de refermer les chambres cardiaques; cette purge n'est jamais complète, et des poches d'air s'accumulent dans les endroits en surplomb (voir Figure 7.42, page 99). Cet air va emboliser sous forme de petites bulles. Si le patient a des mouvements respiratoires alors que l'OG ou le VG sont ouverts, l'air est entraîné dans les veines pulmonaires, où il est inaccessible. Baigner le champ opératoire de gaz carbonique en diffusant 1-2 L/min de CO2 par une petite buse permet de remplacer l’air par un gaz mieux soluble dans le sang, donc moins emboligène.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 61

Si le drainage veineux est assisté par une pompe, celle-ci peut faire collaber le circuit et entraîner de l'air lorsque le flux est rétabli.

L'air peut provenir de la canule de cardioplégie si celle-ci n'est pas fermée adéquatement. Deux situations peuvent entraîner une embolisation massive et un effondrement

hémodynamique : o Une inversion des circuits artériel et veineux au début de CEC vide soudainement

l'aorte de son sang; elle se remplit d'air lorsque le système est stoppé ; o L'entraînement d'air est possible si le réservoir veineux se vide brusquement et que la

pompe à galet aspire de l'air; ceci est en principe prévenu par l'asservissement de cette dernière au contrôle du niveau de sang dans le réservoir.

Le passage d'air est étroitement surveillé sur la ligne artérielle. Le filtre comporte une trappe à bulle sous forme d'une purge continue (100-200 mL/min) qui aspire le sang au sommet du filtre et le renvoie dans le réservoir veineux (voir Figure 7.10, page 19). La présence d'air dans la canule artérielle est un évènement catastrophique qui commande des mesures immédiates: arrêt de la pompe, position de Trendelenburg forcée pour diminuer les risque de progression de l'air dans les carotides, débullage de l'aorte, perfusion cérébrale rétrograde (1-2 L/min) hypothermique (20-24°) par la veine cave supérieure pour perfuser le cerveau a retro et vidanger l'air qui s'est infiltré du côté artériel, reprise de la CEC après vidange complète de l'air, protection cérébrale par du mannitol et de la méthylprednisolone (voir Que faire en cas de problème aigu ? page 132).

Embolies gazeuses

Les embolies gazeuses artérielles ont de nombreuses origines en CEC : - Ouverture des cavités gauches (prévention : CO2 dans le champ opératoire) - Solubilité des gaz diminuée : réchauffement, baisse de pression (cavitation) - Aspiration d’air par le circuit veineux, le réservoir ou la ligne de cardioplégie

Bilan hydrique et métabolique Outre le volume d'amorçage, la CEC nécessite l'administration d'environ 500 mL supplémentaire par heure. Si l'on n'utilise pas d'hémofiltration, le résultat est un bilan hydrique très positif en fin d'intervention. En effet, on assiste à une accumulation de liquide intersticiel due à plusieurs phénomènes: la pression oncotique est diminuée, la perméabilité des membranes est augmentée (syndrome inflammatoire, ischémie), le drainage veineux peut être mauvais, le drainage lymphatique est absent lorsque le flux est dépulsé. Cela se traduit notamment par une altération des échanges gazeux pulmonaires. Si la ventilation avec PEEP ne suffit pas à les rétablir, l'administratrion de furosemide est nécessaire. Sont aussi habituels après CEC: une hyperkaliémie due à la cardioplégie, une hyperlactatémie, une hypocalcémie et une hypomagnésémie. La CEC provoque une violente réaction de stress. Après les grandes brûlures, c'est la situation qui est ressentie comme la plus stimulante par l'organisme: augmentation des catécholamines endogènes (4 à 15 fois la norme), du cortisol, de l'ACTH, de l'ADH, du glucagon et de l'hormone de croissance. La cause en est l'hypothermie, la dépulsation du flux, et les réflexes sympathiques déclenchés par l'exclusion du coeur de la circulation. Les catécholamines sont normalement métabolisées dans les poumons. En CEC, ces derniers sont exclus de la circulation, ce qui contribue à l'élévation des taux sériques de ces dernières. La stimulation du système rénine-angiotensine conduit à une augmentation des résistances artérielles systémiques et à une rétention d'eau et de sodium. Elle induit également une diminution des réactions de défense immunologiques, aussi bien de la lignée humorale que cellulaire [92].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 62

L'hyperglycémie est courante en CEC. Elle est due à plusieurs facteurs.

Hypersécrétion de cortisol et de glucagon ; Baisse de la sécrétion d'insuline avec l'hypothermie ; Résistance à l'insuline due à l'hypothermie ; Augmentation de la gylcogénolyse.

Le maintien de la glycémie dans des limites stables (6-10 mmol/L) diminue la mortalié, le taux de FA postopératoire et la durée de ventilation en soins intensifs, aussi bien chez les diabétiques que chez les non-diabétiques (voir Chapitre 21 Contrôle de la glycémie) [143,323]. Le risque de l'hyperglycémie est principalement une aggravation des séquelles neurologiques. Le manque d’insuline entraîne non seulement une hyperglycémie, mais encore une protéolyse, une lipolyse et une acétonémie caractérisées par une acidose (pH < 7.3), des bicarbonates < 15 mmol/L et un trou anionique > 10 [278]. Les perfusions d'insuline nécessaires au maintien de la normoglycémie doivent cependant être arrêtées pendant la phase hypothermique de la CEC à cause de la résistance à l’insuline et du risque d’hypoglycémie au moment du réchauffement. Le turn-over des récepteurs β myocardiques, qui est de 8-12 heures, est freiné en CEC. De ce fait, les malades sont relativement dépourvus de récepteurs β lors du sevrage, ce qui altère l'efficacité de la dopamine et la dobutamine [334]. Cette modification prend son importance chez les patients en insuffisance ventriculaire chronique, qui ont déjà une diminution du taux de récepteurs β par rapport aux récepteurs α.

Bilan hydrique et métabolique En fin de CEC, le patient est couramment dans une situation non-physiologique : - Bilan hydrique très positif - Rétention de Na+ et d’eau - Hyperkaliémie (cardioplégie), hypocalcémie, hypomagnésémie - Augmentation des hormones de stress et activation du système rénine-angiotensine - Augmentation des catécholamines (adrénaline, nor-adrénaline) - Hyperglycémie (résistance à l’insuline en hypothermie) - Baisse de concentration des récepteurs β intramyocardiques Maintien strict de la glycémie entre 6 et 10 mmol/L chez les diabétiques avec une perfusion continue d’insuline ; chez les non-diabétiques, démarrer l’insuline si la glycémie est > 10 mmol/L

Fonction cérébrale Séquelles neurologiques post-CEC La chirurgie cardiaque est malheureusement grevée d’un risque neurologique majeur, longtemps attribué à la seule CEC. Les troubles neurologiques postopératoires sont habituellement classés en deux catégories :

Le type I comprend les lésions focales (AVC, AIT) et l’encéphalopathie anoxique (coma) ; Le type II consiste en séquelles neuropsychologiques diffuses (détérioration des fonctions

intellectuelles, troubles de la mémoire et de l’attention, retards dans l’activité psychomotrice, délire, convulsions) sans signe de focalisation.

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Leur prévalence varie beaucoup en fonction de la manière dont on les identifie : status clinique, IRM, tests neuro-psychologiques, présence ou non de groupe contrôle dans les études d’incidence (voir Chapitre 23 Complications neurologiques et Facteurs de risque). L'incidence des lésions neurologiques de type I est de 1-5% (moyenne 2%), allant de 1.6% lors de pontage aorto-coronariens simple, à 3-6% lors de remplacement valvulaire aortique et jusqu'à 17% en cas de chirurgie coronarienne et carotidienne combinée [298,327]. Leur mortalité est de 21%. Les dysfonctions neuro-psychologiques sont beaucoup plus fréquentes (28-60%), mais elles sont réversibles dans la majeure partie des cas [251]. La grande variabilité dans l'incidence des séquelles de type II vient de la disparité des tests utilisés. Les facteurs de risque majeurs pour les complications neurologiques de type I sont sont les facteurs associés au patient : athéromatose de l'aorte ascendante, anamnèse d'AVC, sténose carotidienne, vasculopathie périphérique, diabète, hypertension artérielle et âge avancé (> 75 ans) [248,252]. L'incidence des séquelles neurologiques passe de 0.9% en dessous de 65 ans à 9% au-dessus de 75 ans [358]. Les lésions de type I sont liées à des micro- et macro-embolisations cérébrales, qui sont directement proportionnelles aux manipulations de l'aorte et aux aspirations de cardiotomie (Figure 7.25) [90,91,156].

La moitié des embols détectés au Doppler transcrânien a lieu pendant les manoeuvres instrumentales sur l'aorte [341].

Plus la CEC dure, plus les embols sont nombreux; ceci est probablement lié à l'effet de "sablage" du jet de la canule aortique contre la paroi athéromateuse de l'aorte ascendante [60].

Le status neurologique est influencé par l’importance du sang aspiré par la cardiotomie et retransfusé au malade sans lavage préalable.

Canulation

5% 10% 15% 50%

En pompe Canule cardioplégie Clampage Pendant clampage Déclampage Clampage latéral Pendant clamp latér Déclampage latéral Ablation cardioplég En charge Décanulation Pendant CEC

Figure 7.25 : Fréquence des embolies cérébrales diagnostiquées par Doppler transcrânien au cours de la CEC. On voit que la moitié survient lors des diverses manipulations de l'aorte. L'autre moitié est distribuée au hasard pendant toute la durée de la pompe, sans être associée à aucun évènement chirur-gical [341].

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Cependant, on n’a jamais démontré une relation claire entre l'importance de ces embols au Doppler transcrânien et la détérioration du status neurologique. Ils sont jusqu’à 6 fois moins nombreux lors de chirurgie à cœur battant, sans que cela ne modifie significativement les troubles neurologiques postopératoires [2,24,210,215]. Les lésions de type II sont secondaires à plusieurs phénomènes : hypoperfusion cérébrale globale, anémie, micro-embolisation, œdème cérébral, hyperthermie et réaction inflammatoire [135]. Les dysfonctions cognitives sont davantage déterminées par la composition des microembolies que par leur nombre, à cause des variations dans l’intensité de la réaction inflammatoire induite localement selon la nature de l’embolie (air, lipide, microparticule, etc) [156]. D’autre part, ces altérations cognitives relèvent d’un lent déclin psychique lié à l’âge et à la maladie cérébrovasculaire ; elles sont essentiellement liées à la pathologie préexistante, souvent infraclinique [154]. On a souvent désigné la CEC comme la principale responsable des séquelles neurologiques, parce que les manipulations qui lui sont associées sont responsables d’une partie des embolisations cérébrales et des dysfonctions cognitives. Cependant, l'expérience des coeurs battant (OPCAB : off-pump coronary artery bypass) a montré que l'absence de CEC ne réduit pas ces complications à zéro. On s'attend à ce que l'absence de clampage aortique et de jet par la canule de CEC diminue l'incidence des embols de matériel athéromateux: le nombre total d'évènements emboliques est effectivement abaissé au Doppler transcrânien [49,215]. Mais il n'y a pas de différence significative sur le taux d'AVC dans les méta-analyses comparant la chirurgie cardiaque avec et sans CEC [75,284]. Une diminution des AVC cliniques n'a été retrouvée que dans des études non randomisées, chez des octogénaires, ou chez des patients avec une aorte athéromateuse [98,324,388]. L'incidence des lésions de type I au cours de la chirurgie coronarienne à coeur battant reste d'environ 2% [81]. Dans les cas d'athéromatose étendue de l'aorte ascendante, l'OPCAB évite le clampage de l'aorte et diminue probablement les risques d'AVC emboliques, mais seule l'absence totale de manipulation de l'aorte, en procédant à des greffons entièrement artériels, peut vraiment diminuer l'incidence d'ictus [65]. Les troubles neuropsychologiques cognitifs de type II ne sont pas non plus liés à la CEC, puisque son absence ne les réduit pas : l'incidence des lésions de type II est inchangée lors de pontages à cœur battant [224,363]. Elle n’est atténuée après OPCAB que chez les malades à risque neurologique élevé, mais non chez les patients sans facteurs de risque particulier [363,364]. Gestion de la CEC Le status neurologique postopératoire est dépendant de la pression de perfusion en pompe en-dehors d’une certaine zone moyenne (50-80 mmHg) au sein de laquelle le niveau de la PAM ne fait pas de différence. Par exemple, une étude clinique randomisée a clairement démontré que les résultats sont meilleurs lorsque la PAM est de 80-100 mmHg plutôt que 50-60 mmHg [128]. A pression moyenne basse et en pH-stat, le taux d'embolies cérébrales a tendance à augmenter parce qu'une plus grande proportion du flux sanguin est dirigé vers le cerveau [344]. Toutefois, le maintien de l'autorégulation cérébrale jusqu'à 40 mmHg de pression moyenne en hypothermie modérée (28°) et normocapnie fait que les caractéristiques de pression et de flux pendant la CEC ont relativement peu d'influence sur le devenir des patients lorsqu'il s'agit de malades sans risques neurologiques particuliers [17]. Certaines circonstances suppriment l'autorégulation et rendent le flux cérébral totalement pression-dépendant: ce sont l'hypothermie profonde (< 25°C), les heures qui suivent un arrêt circulatoire total hypothermique, le diabète, et la présence d'un ancien AVC [327]. Chez les personnes âgées, la rigidité de l’arbre vasculaire augmente la pression différentielle (pression pulsée = PAs – PAd), accroît le stress vasculaire cérébral et réduit la plage d’autorégulation (voir Chapitre 5 Couplage ventriculo-artériel). La valeur de la pression pulsée est un prédicteur indépendant d’AVC après chirurgie cardiaque [31]. Bien que le débit soit en général prioritaire par rapport à la pression, il semble qu'une pression élevée (> 60 mmHg) associée à un débit faible (< 1.2 L/m2) soit moins délétère du point de vue neurologique

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qu'une basse pression (< 30 mmHg) accompagnée d'un haut débit (> 2 L/m2) [84]. Idéalement, la PAM devrait être située entre 50 et 90 mmHg, de manière proportionnelle à l’âge du patient (PAM = âge). La manière de gérer la CEC a une influence modeste sur les résultats neurologiques. La régulation de l'équilibre acido-basique selon mode alpha-stat, qui préserve l'autorégulation cérébrale (donc une certaine vasoconstriction) et maintient l'apport d'oxygène à basse pression de perfusion (PAM de 45 mmHg), offre de meilleurs résultats que le système pH-stat, qui maintient une vasodilatation par hypercarbie relative et favorise les embolisations [277,342]. Les lésions de type II sont moins fréquentes en mode alpha-stat (incidence de 27%) qu'en mode pH-stat (incidence de 44%) [251]. Le flux sanguin cérébral est diminué de moitié en alpha-stat à 28°, et les défaillances neurologiques sont également réduites de moitié lorsque la durée de la CEC excède 90 minutes [341]. Le mode pH-stat n'a probablement un sens que lors du refroidissement et du réchauffement des cas opérés en hypothermie profonde (< 20°) et arrêt circulatoire complet, parce que la vasodilatation cérébrale assure alors une meilleure homogénéité de la température dans le cerveau [14,169]. L'hypothermie offre une certaine protection puisqu'elle diminue le métabolisme cérébral et les effets de la réaction inflammatoire systémique (voir Chapitre 24 Effets cérébraux de l’hypothermie) [375]. On a pu démontrer une baisse du taux d'AVC en hypothermie (1.5% à < 28°C) par rapport à la normothermie (4.5% à > 35°C), mais la limite de la protection possible offerte par l'hypothermie tient à la prédominance des évènements emboliques dans la genèse des séquelles neurologiques. De plus, l'influence de la température sur les lésions de type II reste très controversée. Le problème majeur survient au réchauffement, parce que le cerveau devient transitoirement hypertherme (38-39°) [39]. Cet effet rebond est d'autant plus prononcé que le réchauffement est plus rapide; il aggrave profondément la susceptibilité des neurones à l'ischémie et agrandit l'étendue des lésions focales [171,251]. Les séquelles neurologiques sont d'ailleurs proportionnelles à la chute de la saturation veineuse jugulaire pendant le réchauffement [86]. Les altérations neuropsychologiques de type II diminuent lorsque le réchauffement est plus lent [132]. La vitesse de réchauffement ne devrait donc pas dépasser 1°C par 5 minutes, ni le gradient de température artère – oesophage la valeur de 2-3°C [46]. La température du sang ne doit pas être supérieure à 37°C [323]. En clinique, la température cérébrale est mesurée par la température tympanique ou par la température rhino-pharyngée en appuyant la sonde contre les cellules ethmoïdales.

Séquelles neurologiques

Il existe deux types de lésions neurologiques postopératoires : - Type I : accident vasculaire cérébral avec séquelles neurologiques - Type II : troubles cognitifs, réversibles en quelques semaines ou mois Incidence d’ictus: de 1.6% après pontage aorto-coronarien simple, à 5% après RVA et jusqu’à 17% en cas de chirurgie carotidienne combinée. Incidence de troubles cognitifs réversibles : 20-50%. Les deux mécanismes principaux sont l’embolisation et l’hypoperfusion. L’embolisation est à l’origine de 80% des lésions de type I chez l’adulte, alors que l’hypoperfusion est plus fréquemment en cause chez l’enfant. La PAM nécessaire à limiter les séquelles neurologiques chez les patients à risque est 70-80 mmHg. Leurs dégâts sont aggravés par la réaction inflammatoire systémique et par les lésions d’ischémie/reperfusion. Les troubles neurologiques sont d’origine multifactorielle, mais le poids de l’évidence tend à montrer que les facteurs de risque liés au patient (athéromatose, anamnèse d’AVC, troubles cognitifs préopératoires) sont plus importants que ceux liés à l’intervention (opération en CEC ou à cœur battant, embolies, clampage aortique, etc). Les troubles cognitifs après chirurgie cardiaque sont davantage liés au déclin de l’âge et à la maladie cérébro-vasculaire qu’à des événement peropératoires.

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L'hématocrite est sans relation avec le status neurologique postopératoire, pour autant que l'Hb reste supérieure à 50 g/L chez l'adulte [365]. Chez les personnes âgées, les troubles cognitifs après pontages aorto-coronariens sont plus importants lorsque l’Ht minimal est 15-17% que lorsqu’il est > 25% [96]. Chez les enfants, la comparaison entre un Ht bas (21%) ou élevé (28%) en CEC démontre que le score neurologique et développemental mental sont nettement supérieurs dans le deuxième cas [170]. Par son effet inhibiteur sur l'activation leucocytaire et sur la libération de kallikréine, l'aprotinine diminue l'incidence des séquelles neurologiques [247] ; de ce point de vue, son retrait du marché est une perte. Face à l'importance du problème, on cherche à mettre en oeuvre tous les moyens possibles qui puissent diminuer la fréquence et l'importance des séquelles neurologiques. Mais la situation est ambivalente. En effet, si l'hypoperfusion est la cause principale des troubles neurologiques, il faut maintenir un haut débit et une haute pression en CEC, alors que si l'embolie est le facteur primordial, il faut au contraire diminuer le flux sanguin au cerveau [341]. Protection cérébrale Le but de la protection cérébrale est de réduire les sources de lésions comme l’embolie et l’hypoperfusion, et d’augmenter la tolérance aux agressions comme l’ischémie et l’inflammation. Il n’existe malheureusement pas de recette magique à cet effet. Hormis la baisse du métabolisme par l’hypothermie et le maintien d’une perfusion équilibrée, on ne dispose d’aucun moyen clairement efficace pour améliorer le pronostic neurologique. Par contre, il existe toute une série de mesures qui tendent à diminuer les facteurs de risque et à augmenter la marge de sécurité. La protection cérébrale porte donc sur plusieurs domaines (pour davantage de déails, voir Chapitre 24 Protection cérébrale en chirurgie cardiaque et Protection en cas d’arrêt circulatoire).

Diminution du taux d'embolies liées à la CEC de diférentes manières [2,323] : o Eviter le clampage de l'aorte ascendante lorsqu'elle est athéromateuse, modification du

site de canulation, pontages tout-artériels ; o Utilisation très restrictive des aspirations de cardiotomie ; o Lavage et filtrage du sang aspiré avant sa retransfusion ; o Utilisation de panier-filtre de récupération dans l'aorte ascendante [312] ; o Diminution du risque d’embolie gazeuse par l’insufflation continue de CO2 dans le

péricarde pour y remplacer l’air ambiant par un gaz mieux soluble dans le sang ; o Débullage soigneux avant la mise en charge.

Echographie épiaortique ; dans les groupes à risque comme les patients souffrant de vasculopathie artériosclérotique ou les malades âgés, l'échographie épiaortique permet d'identifier les lésions dangereuses de l'aorte ascendante et de modifier la technique chirurgicale en conséquence (évitement des plaques les plus emboligènes, canulation sous-clavière ou fémorale) et de diminuer l'incidence des accidents emboliques [252].

Maintien de la pression de perfusion cérébrale ; PAM 60-80 mmHg [254]. En réalité, seuls 20% des AVC (lésions de type I) sont liés à une diminution de la pression de perfusion chez l’adulte, le reste correspondant à des lésions emboliques [309]. Chez les enfants, par contre, les accidents emboliques sont plus rares, et la majeure partie des séquelles neurologiques est liée à l'ischémie cérébrale, notamment à cause de la fréquence des périodes d'arrêt circulatoire [213]. La PAM a davantage d’impact sur les troubles neurocognitifs (lésions de type II).

Maintien d’une perfusion cérébrale minimale (bas débit antérograde continu) pendant une période d'arrêt circulatoire [347].

Pression veineuse basse, particulièrement lors de canulation isolée de la veine cave supérieure (mesure par le bras latéral de l'introducteur ou par la lumière proximale du cathéter de PVC).

Diminution de la durée de CEC et, le cas échéant, de la période en arrêt circulatoire total. Hypothermie modérée (28-32°) ; réchauffement homogène et lent (T° max du sang : 37°C). Hémodilution modérée : maintien de l’Ht ≥ 25%. Maintien de la normoglycémie (glycémie < 10 mmol/L), régulation de l'équilibre acido-

basique en mode alpha-stat, éviter l'hypercalcémie [323].

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Amélioration de la biocompatibilité des circuits ; oxygénateurs à membrane, circuits héparinés, mini-circuits sans interface air-sang [323].

Moyens pharmacologiques pour diminuer la réaction inflammatoire systémique et l'oedème cérébral qu'elle engendre ; corticostéroïdes, aprotinine, anti-complément (pexelizumab).

Lors d’arrêt circulatoire en CEC, plusieurs mesures permettent de limiter les dégats cérébraux (voir Chapitre 18 Protection cérébrale) [347].

Hypothermie cérébrale : elle permet d’étendre la durée d’un arrêt circulatoire de 4 minutes (37°C) à 12 minutes (28°C) et 35 minutes (18°C) sans risquer de séquelles neurologiques majeures [182,229] ; le refroidissement doit être homogène et lent (1°/5 min) ;

Perfusion cérébrale sélective continue (10-15 mL/kg/min) ; Hypothermie modérée (28-30°C) accompagnée de perfusions cérébrale et viscérale continues

par canulations sous-clavière droite et fémorale ; Position de Trendelenburg ; Normoglycémie (diminution des séquelles) ; Mannitol (diminution de l’œdème cérébral) ; Anesthésie profonde (curarisation), halogénés (préconditionnement) ; Réchauffement homogène et lent (1°/5 min) sinon risque d’hyperthermie cérébrale ; Non-prouvés : magnésium, thiopental, nimodipine, stéroïdes.

En résumé, les séquelles neurologiques sont liées en premier lieu à la charge embolique, alors que l'hypotension joue un rôle plus modeste chez l'adulte (un quart des cas). La CEC y contribue certainement, mais elle n'en est qu'un facteur causal parmi de nombreux autres, comme le prouve la comparaison avec les opérations réalisées à coeur battant. La manipulation d'une aorte ascendante athéromateuse est probablement le geste le plus dangereux. Si les résultats des études de suivi sont peu discriminants, c'est entre autre parce que les déficits neurologiques préopératoires sont mal investigués et que les courbes d'attrition de la fonction cérébrale des populations de contrôle n'existe souvent pas.

Protection cérébrale en CEC (I)

Quelques moyens permettent de limiter les risques de séquelles neurologiques après chirurgie cardiaque : - Diminuer le risque de macroembolies (athéromes) et de microembolies (débris, air, lipides) - Limiter les clampages aortiques ou les éviter (cœur battant, pontages tout artériels) - Limiter la durée de CEC et la durée du clampage aortique - Assurer la perfusion cérébrale (PAM > 70 mmHg) et le transport d’O2 (Ht > 25%) - Contrôler la température (hypothermie modérée et réchauffement lent) - Maintenir la normoglycémie et un contrôle acido-basique de type alpha-stat - Utiliser de nouvelles technologies de CEC (mini-CEC, matériaux biocompatibles) - Visualiser l’aorte ascendante (échographie épiaortique) et surveiller l’oxygénation cérébrale (ScO2)

- Administrer une neuroprotection pharmacologique (efficacité très relative)

Les facteurs de risque liés au patient (athéromatose, anamnèse d’AVC, troubles cognitifs pré-opératoires) sont plus importants que ceux liés à l’intervention (opération en CEC ou à cœur battant). A l’exception des manœuvres responsables d’embolies athéromateuses comme les manipulations de l’aorte ascendante, les mesures étudiées jusqu’ici (circuits de CEC, débit de pompe, régulation du pH et de la glycémie, hypothermie, protection pharmacologique, etc) n’ont pas fourni d’évidence incontestable de leur efficacité sur la prévention des troubles neurologiques. Seule une prise en charge multimodale peut garantir le "meilleur résultat possible" dans l’état actuel de nos connaissances.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 68

Protection cérébrale en CEC (II) Lors d’un arrêt circulatoire complet, les seuls moyens éprouvés pour diminuer les séquelles neurologiques sont au nombre de trois: - Maintenir un débit sanguin cérébral minimal - Limiter la durée de l’arrêt - Refroidir le cerveau à 18-20°C Surveillance cérébrale La question majeure est évidemment celle du diagnostic: comment évaluer le moment où le cerveau est en danger au cours d'une CEC ? Plusieurs techniques sont envisageables [112].

L'EEG ne reflète que l'activité corticale globale; des altérations à l'EEG sont visibles lorsque le flux sanguin cérébral a diminué de moitié; l'EEG est isoélectrique pour un flux sanguin de 15-20 mL/100g/min (valeur normale: 50 mL/100g/min). Une ischémie focale peut échapper à cette surveillance. Le système à 16 ou 20 canaux, encombrant et difficile à interpréter, est en général remplacé par un moniteur de fonction cérébral de type CSA (Compressed Spectral Array), qui affiche une analyse spectrale des ondes et ne nécessite que quatre électrodes (voir Chapitre 19 Figure 19.14). L’EEG est surtout utile pour déterminer le niveau de refroidissement cérébral avant un arrêt circulatoire ; l’interruption de la perfusion doit survenir 5-10 minutes après l’obtention du silence électrique [156].

Les potentiels évoqués auditifs (PEA); la réponse auditive du tronc cérébral reflète l'activité neuronale entre le noyau cochléaire et le colliculus inférieur; elle n'est pas modifiée par les agents d'anesthésie, mais varie directement avec la température; elle est un excellent moyen de surveiller le degré d'inhibition neuronale par l'hypothermie, mais le système est complexe et demande la présence d'un technicien spécialisé [299].

L'index bispectral (BIS™) analyse 4 variables d'un tracé EEG bipolaire (amplitude, fréquence, composition et cohérence de phase); un algorithme le transforme en un nombre compris entre 0 (sommeil profond) et 100 (éveil). Ce nombre décrit la profondeur de l'anesthésie, mais non le fonctionnement neuronal [285]. La réponse dépend du type d'anesthésie; avec le propofol ou les halogénés, la valeur du BIS prédit adéquatement la réponse au stimulus chirurgical, mais les opiacés ne montrent aucune relation dose-effet [319]. L'hypothermie (28-30°C) est responsable d'une chute de la valeur du BIS, même lorsque la concentration d'halogéné reste stable [157]. Une valeur > 80 est fréquente pendant le réchauffement [11]. Quelques rapports ont indiqué un effondrement du BIS (valeur 10-15) lors d'épisodes de souffrance cérébrale ou d’états hémodynamiques instables [110,379]. Toutefois, les protocoles basés sur le BIS ne se sont pas révélés supérieurs à ceux basés sur la concentration expiratoire d’halogéné pour prévenir l’éveil peropératoire; le BIS ne permet ni de modifier la concentration de gaz halogéné ni de diminuer l’incidence de réveil en cours d’intervention [19]. Son efficacité est donc incertaine [357].

Le Doppler transcrânien (DTC) permet de mesurer le flux sanguin dans une grande artère, en général la cérébrale moyenne et permet d'y calculer le flux, mais l’appareillage est encombrant, instable, et non fiable chez environ 25% des malades [112]. Un Doppler ne mesure que la vélocité des hématies, non leur nombre; ainsi l'hémodilution, qui accélère le flux, peut faire croire à une augmentation de l'apport d'oxygène, alors qu'elle a diminué. Son utilisation comme monitorage suppose que la vélocité du flux reflète effectivement le débit sanguin total, que le diamètre du vaisseau ne se modifie pas, et que le capteur reste absolument stable. Les variations de l'Hb, de la viscosité, de la température, de la PaCO2, et les agents d'anesthésie interfèrent considérablement avec la mesure [103]. Les embols sont

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 69

aisément détectés par la technique, notamment lors du clampage aortique; ils apparaissent sous forme de HITS (High-intensity transient signals) dont la morphologie donne une clef sur l'origine (bulle, athérome, etc) [295].

La saturation veineuse jugulaire (SjO2) est fonction de l'extraction cérébrale en O2 et de l'activité métabolique globale et non unilatérale. Sa valeur normale est 60-75%. La valeur critique se situe autour de 50% [341]. Une valeur < 40% est associée à une souffrance cérébrale ischémique et à des séquelles neurologiques [322]. Elle augmente en cas d'hyperémie, d'hypercapnie ou de fistule artério-veineuse. Elle diminue pour des raisons systémiques (désaturation artérielle, hypocpanie, anémie aiguë, hypotension) ou cérébrale (hypertension intracrânienne, hyperthermie, vasospasme). Elle peut être utile pour confirmer la baisse de la demande métabolique avant un arrêt circulatoire.

La spectroscopie infrarouge (NIRS : near-infrared spectroscopy) permet la mesure locale de la saturation de l'hémoglobine cérébrale en oxygène (ScO2) par deux capteurs placés sur l'angle fronto-temporal, de chaque côté du crâne (voir Chapitre 19 Figure 19.6). La longueur d'onde laser émise (770 – 910 nm) pénètre la boîte crânienne et se trouve dispersée par la substance cérébrale où une partie spécifique du spectre est absorbée par l'hémoglobine oxygénée (HbO2) et une autre par l'hémoglobine réduite. Les valeurs affichées sont très voisines de la saturation veineuse cérébrale (SjO2) parce que les trois quarts du sang cérébral sont dans le réseau veineux et parce que l'appareil utilise les composantes non-pulsatile du spectre; la valeur normale oscille entre 60 et 75% [261]. Une ischémie survenant dans une autre région que la zone frontale échappe cependant à la surveillance; par contre, la technique permet de différencier l'état des deux hémisphères. La ScO2 s'élève en hyperoxie et en hypothermie (baisse du métabolisme), mais aussi en état de mort cérébrale [352]. En clinique, une chute de 20% par rapport à la valeur de base est considérée comme significative. Lors d'un arrêt circulatoire hypothermique, le nadir est atteint en 15-20 minutes. Une baisse à une valeur de 30% signe une ischémie cérébrale; si elle dure plus de 10 minutes, elle est associée à des dysfonctions cognitives [386]. Le seuil d'irréversibilité n'est pas connu pour l'instant [315]. A cause de la vasoconstriction hypothermique, les valeurs de ScO2 sont plus basses en régulation alpha-stat que pH-stat [245]. L'évidence clinique suggère une corrélation entre la baisse de la ScO2 et les séquelles neurologiques [11].

Une méthode possible de se prémunir contre les séquelles neuropsychologiques est de surveiller la saturation cérébrale en O2 (ScO2) en continu. En effet, une désaturation cérébrale peropératoire (baisse > 20%) est souvent associée aux dysfonctions neuropsychologiques postopératoires, et le maintien d’une ScO2 maximale semble diminuer le risque d’accidents neurologiques après CEC [331,386]. Dès que la ScO2 s’abaisse, il convient d’améliorer l’apport d’O2 au cerveau [100].

Repositionnement des canules ou du cœur dans le champ opératoire ; Normocapnie si la PaCO2 était abaissée ; Augmentation de la PAM ; Augmentation de la FiO2 et de l’Ht (transfusion) ; Baisse du métabolisme cérébral : hypothermie, agents d’anesthésie, curarisation.

Les patients qui ne répondent pas à ces mesures par une augmentation de leur ScO2 ont une morbi-mortalité supérieure à celle des répondeurs [151]. Ceci démontre que la ScO2 surveille non seulement l’oxygénation cérébrale, mais encore le transport d’O2 vers tous les organes. En effet, le cerveau est le seul organe dont l’accès est aisé pour un capteur de saturation. Comme le cerveau dispose d’une autorégulation pour maintenir son apport d’O2, une baisse de sa saturation artério-veineuse indique une diminution plus importante du transport d’O2 dans le reste de l’organisme. Il n’est donc pas surprenant que la ScO2 soit corrélée à la dysfonction hémodynamique postopératoire [273].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 70

Surveillance neurologique

L’EEG, le Doppler transcrânien et la saturométrie cérébrale (ScO2) sont les techniques de monitorage les plus fiables. Le BIS n’est pas une technique de surveillance neurologique. La ScO2 a le meilleur rapport efficacité/complexité :

- Valeur normale : 60 – 75% - Seuil de risque neurologique : baisse de 20% par rapport à la valeur de base, ou valeur ≤ 40% - Une chute rapide et une durée de > 10 minutes à < 50% sont corrélées au status neurologique - Une baisse de la ScO2 doit commander des mesures immédiates pour améliorer l’apport d’O2 au cerveau

Fonction rénale Les reins reçoivent 20% du débit cardiaque, mais ne consomment que 10% de l'oxygène transporté. Les glomérules filtrent passivement le plasma; ils reçoivent la majorité du flux plasmatique rénal (FPR), mais consomment très peu d'O2 par rapport à la medulla. La médullaire, au contraire, a un débit sanguin 5-10 fois plus faible, mais elle consomme beaucoup d'O2 car elle opère tout le travail de concentration active de l'urine; elle est donc beaucoup plus sensible à l'ischémie et à l'hypovolémie [53]. La filtration glomérulaire (GFR) est directement proportionnelle à la pression hydrostatique intravasculaire et inversement proportionnelle à la pression oncotique (normalement 25 mmHg). La GFR diminue avec l'âge; de 125 ml/min chez le jeune adulte, elle passe à 80 ml/min à 60 ans et à 60 ml/min à 80 ans [355]. Si la pression artérielle baisse, l’autorégulation rénale maintient le FPR et la filtration glomérulaire par vasodilatation des artérioles préglomérulaires (mécanisme myogène) et par vasoconstriction des artérioles postglomérulaires (angiotensine II). Lorsque la perfusion rénale diminue de plus de 50% pendant 1 heure, la GFR baisse proportionnellement beaucoup plus que le FPR; le FPR est alors réparti préférentiellement vers la zone corticale profonde et vers la médullaire. La baisse du débit cardiaque et de la pression de perfusion entraînent une stimulation sympathique, une sécrétion de vasopressine et d'ADH, et l'activation du système rénine-angiotensine; tous ces phénomènes concourent à retenir de l'eau et du sodium par le rein [16]. L'hémodilution de la CEC augmente le flux plasmatique rénal et baisse les résistances vasculaires intraparenchymateuses, mais l'hypothermie et la non-pulsatilité induisent une vasoconstriction préférentiellement corticale. Normalement, les fonctions rénales ne sont pas significativement modifiées, ni par l'anesthésie, ni par l'opération, ni par la CEC: les tests habituels (taux ou clearance de la créatinine, par exemple) restent inchangés dans la grande majorité des cas. Des altérations subtiles et réversibles sont cependant décelables par des mesures plus fines: par exemple, la variation de la clearance à la créatinine lors d'une surcharge protéique, qui mesure la réserve fonctionnelle rénale, diminue de manière réversible pendant plusieurs semaines après CEC [228]. Cette dysfonction minime peut venir amplifier les retombées d'une altération fonctionnelle préexistante mais infraclinique (artériopathie, âge, etc) ou être potentialisée par des évènements peropératoires: hypotension, médicaments néphrotoxiques, etc. Les études comparant la manière de règler le pH, l'hypothermie versus la normothermie, le flux pulsatile versus le flux non-pulsatile, n'ont pas pu, jusqu'ici, mettre en évidence un avantage significatif d'une technique de CEC sur une autre dans la préservation de la fonction rénale [321]. Cependant, la pression de perfusion est certainement un facteur-clef; on a démontré que, dans un tiers des cas, la variation de la créatinine postopératoire était dépendante de la PAM pendant la CEC [362]. Mais ceci n'est vrai que pour autant que le débit de la pompe et le volume circulant soient normaux.

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Insuffisance rénale postopératoire L'incidence de défaillance rénale après chirurgie cardiaque en CEC est globalement de 0.9-4% [83]. Elle est fonction du type d'opération: 7.7% après chirurgie du VG, 3.9% après chirurgie valvulaire, et 0.5% après PAC. Lorsque la dialyse est nécessaire, la mortalité est élevée: 30% chez les adultes et 45% chez les enfants [83]. La dysfonction postopératoire transitoire (créatinine 150-250 mcmol/L, augmentation de 20-25%) est plus fréquente: elle survient chez 11% des patients et se résout en quelques jours ou semaines [76,329]. Une diminution de 25-50% de la filtration glomérulaire est présente chez 24% des patients après chirurgie cardiaque. L'origine de l'insuffisance rénale qui peut survenir après CEC est multifactorielle. Parmi les éléments en cause, on peut citer par ordre probable d'importance [83,349].

Etat clinique préopératoire :

o Néphropathie préopératoire (créatinine ≥ 200 mcmol/L); maladie primaire, ou secondaire au diabète, à l’hypertension artérielle ou à une polyvasculopathie ; ; c’est le facteur prédictif le plus fiable ;

o Dysfonction ventriculaire gauche (FE < 0.35), contrepulsion intra-aortique ; o Age du patient (> 65 ans) ; la filtration glomérulaire passe normalement de 125

mL/min chez le jeune à 80 mL/min à 60 ans et < 60 mL/min à 80 ans ; o Comorbidités : diabète, artériopathie, BPCO.

Baisse du flux plasmatique rénal entraînant une hypoxie tissulaire : o Hypovolémie et hypotension systémique (PAM < 30% de la norme pendant plus de

10 minutes) ; o Bas débit en CEC (< 1.8 L/min/m2) et en postopératoire (IC < 2 L/min/m2) ; o Utilisation de vasoconstricteurs artériels ; o Etat septique ; o La sepsis est en cause dans 48% des cas de NPA et l’hémodynamique dans 32%.

Effets de la chirurgie : o Opération complexe, reprise ; o Clampage aortique versus opération à cœur battant ou endoprothèse ; o Clampage de l’aorte descendante ; o Embolisation d’athéromes ou de particules ; o Opération en urgence.

Effets de la CEC : o Durée de la CEC, profondeur de l’hypothermie ; o Réponse inflammatoire systémique (radicaux libres, cytokines, etc) et endotoxines ; o Anémie (hémodilution à Ht ≤ 24%), hémolyse (hémoglobinurie) ; o Transfusions érythrocytaires ; o Hémolyse et rhabdomyolyse ;

Utilisation de substances néphrotoxiques : o Anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) ; o Inhibiteurs de l’enzyme de conversion et du récepteur de l’anti-angiotensine ; o Produits de contraste radiologique (coronarographie, angio-CT) ; o Antibiotiques aminoglycosides ; o Inhibiteurs de la calcineurine (tacrolimus, ciclosporine) ; o Colloïdes dérivés d’amidon (HES) ; o Aprotinine.

L’insuffisance rénale postopératoire est subdivisée en quatre degrés de gravité [83,232].

Stade I : augmentation du taux de créatinine de 25 µmol/L ou de 50%, débit urinaire < 0.5 mL/kg/h pendant au moins 6 heures ;

Stade II : augmentation du taux de créatinine de 2 fois la valeur de départ, débit urinaire < 0.5 mL/kg/h pendant > 12 heures ;

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Stade III : augmentation du taux de créatinine à > 350 mcmol/L ou > 3 fois la valeur de départ, débit urinaire < 0.3 mL/kg/h pendant > 24 heures ou anurie pendant > 12 heures ;

Stade IV : anurie de longue durée (> 4 semaines). La créatinine et le débit urinaire sont des marqueurs peu sensibles et modestement spécifiques de l’insuffisance rénale. On identifie progressivement de nouveaux biomarqueurs plus performants, tels la cystatine C, l’interleukine 18, le NGAL (neutrophil gelatinase-associated lipocalin) ou la KIM-I (kidney injury molecule) (voir Chapitre 23 Complications rénales).

Insuffisance rénale post-CEC

Facteurs étiologiques : - Néphropathie préopératoire (créatininémie > 200 mcmol/L), facteur le plus important - Hypovolémie et hypotension (PAM < 70% de sa valeur habituelle pendant > 20 minutes) - Bas débit de CEC (< 1.8 L/min/m2) - Longue CEC hypothermique - Age > 65 ans - Substances néphrotoxiques - SIRS, hémolyse, rhabdomyolyse

Protection rénale Une optimisation de l’hémodynamique en per- et en post-opératoire (PAM > 75 mmHg, DC > 2.5 L/min/m2, VS > 35 mL/m2, DO2 > 600 mL/min/m2, SvO2 > 70%) avec des perfusats et des inotropes diminue significativement l’incidence de néphropathie (OR 0.64) et la mortalité (OR 0.66) [54]. Le remplacement liquidien selon une administration strictement dirigée par le monitorage hémodynamique (volume systolique, débit cardiaque, SvO2) garantit une meilleure adéquation entre les perfusions et les besoins, à la fois en volume et en synchronisation dans le temps (voir Chapitre 4 Besoins liquidiens) ; il diminue significativement l’incidence de néphropathie aiguë postopératoire, particulièrement chez les patients à haut risque [54]. L’anémie, les transfusions et les reprises pour hémostase sont 3 facteurs prédictifs d’insuffisance rénale parmi les plus importants (OR 1.8-2.9), mais sont aussi parmi ceux qui s’avèrent les plus maîtrisables [180]. La fonction rénale et le taux d'insuffisance rénale postopératoires s'aggravent linéairement lorsque l'Ht s’abaisse en dessous de 30% ; cette péjoration est maximale lorsque l’Ht le plus bas est inférieur à 24% [204]. L’incidence de NPA est de 4.1% chez les patients anémiques et de 1.6% chez les patients eucythémiques [181]. La mortalité s'accroît de manière directement liée à l'importance de la lésion rénale. Mais, à valeur similaire d'Ht, les patients transfusés présentent systématiquement une péjoration de leur fonction rénale par rapport à ceux qui ne sont pas transfusés; leur mortalité est plus élevée (3.8% versus 1.4%) et leur incidence d'insuffisance rénale plus importante (12% versus 3.4%) (Figure 7.26, page 74) [142]. On est donc placé devant un dilemme troublant: l'anémie aggrave la situation, mais la transfusion, au lieu de la corriger, ajoute un facteur délétère supplémentaire. Certaines substances entretiennent chez les anesthésistes une croyance dans leurs capacités "protectrices" sur la fonction rénale. Cependant, rares sont celles qui semblent avoir un effet bénéfique sur la fonction rénale postopératoire (voir Chapitre 24 Protection rénale).

Le mannitol est filtré complètement dans les glomérules, et n'est pas résorbé dans les tubules: il augmente le volume plasmatique et la diurèse par augmentation de l'excrétion d'eau et

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diminution de la réabsorption de sodium; de plus, il a une activité anti-oxydante et s'oppose aux effets des groupes hydroxyles ("radicaux libres") libérés lors de la revascularisation. Les preuves de son efficacité comme agent protecteur contre les effets de l'ischémie rénale sont très pauvres; aucune étude clinique n'a mis en évidence une amélioration quelconque du pronostic de l'insuffisance rénale postopératoire [314]. A raison de 0.5 g/kg dans le liquide d'amorçage de la CEC, il augmente la volémie, la pression capillaire glomérulaire, la pression tubulaire proximale et la diurèse, mais aucun effet bénéfique sur la fonction rénale périopératoire n'a pu être démontré [165]. Il n’est probablement efficace qu’en cas d’hémolyse ou de rhabdomyolyse.

Le furosémide augmente le FPR et baisse les résistances vasculaires rénales en plus de son effet diurétique. Son utilisation prophylactique diminue clairement l'incidence de l'anurie, mais ne modifie pas le pronostic de l'insuffisance rénale [57.201]. En peropératoire, il n'a sa place que pour diminuer l'excès de liquide interstitiel après la CEC (10-20 mg) lorsque le bilan est trop positif comme le prouve la présence d'une hypoxémie ne réagissant pas à la ventilation à 100% O2 avec PEEP. Il est également utile pour contrôler la reprise de la fonction rénale après une reconstruction réno-vasculaire ou une ischémie et reperfusion. Les hautes doses contribuent à l'élimination de l'hémoglobine libre ou de la myoglobine.

La dopamine à raison de 1-3 mcg/kg/min augmente le FPR, la filtration glomérulaire et la diurèse, mais ne s'est avérée d'aucune incidence sur la fonction rénale postopératoire ni sur le devenir des patients en état critique [30]. Bien qu'elle ait un effet favorable sur la diurèse, aucune étude clinique concluante n'a démontré un quelconque bénéfice à l'utilisation prophylactique de la dopamine dans le cadre de l'insuffisance rénale postopératoire, que la fonction préopératoire soit normale ou altérée [225,265]. Elle n'augmente pas le flux plasmatique rénal cortical en CEC, et ne compense pas la diminution de la perfusion corticale secondaire à la chute de la pression de perfusion en dessous de 70 mmHg [216]. Comme le taux d'arythmies postopératoires est plus élevé en présence de dopamine, la valeur de cette prophylaxie reste à justifier [78]. De plus, elle pourrait être responsable d'une dysfonction tubulaire proximale post-CEC [69].

Le fenoldopam est un analogue de la dopamine qui stimule sélectivement les récepteurs DA1 et qui induit une augmentation dose-dépendante du FPR et de la diurèse (0.03-0.3 mcg/kg/min) [55]. Il a l'avantage d’augmenter le FPR dans le cortex et dans la médullaire. Il ne cause pas de tachycardie ni d'arythmies, mais il présente un effet hypotenseur marqué car c'est un vasodilatateur artériolaire puissant. L’activité néphro-protectrice d’une perfusion continue (0.1 mcg/kg/min) a été démontrée dans des études récentes, mais n'est pas confirmée par tous les travaux [287,359].

Les statines : les données sont contradictoires, mais certaines études tendent à montrer une incidence de néphropathie plus basse chez les patients sous statines avant et après la chirurgie ; il en est de même pour l’aspirine. Ces substances diminuent la mortalité postopératoire [205].

Le préconditionnement par les halogénés: le sevoflurane en CEC diminue les marqueurs de la dysfonction rénale postopératoire comme la cystatine C [176].

Les anti-oxydants comme la N-acétylcystéine (Salmucol®) ou l’allopurinol (Xyloric®) diminuent les marqueurs inflammatoires et bloquent l’effet toxique des radicaux libres, mais leur utilisation clinique s’avère décevante et n’apporte pas de bénéfice en terme de mortalité ni de morbidité en chirurgie aortique ou en chirurgie cardiaque avec CEC [308].

Deux substances présentant des effets anti-inflammatoires et anti-apoptose, la minocycline (tétracycline) et l’EPO, semblent diminuer significativement la proportion de patients développant une néphropathie aiguë après chirurgie cardiaque [123].

L’administration de bicarbonate pour alcaliniser les urines semble pouvoir atténuer la néphropathie postopératoire, notamment par la solubilisation de l’Hb libre liée à l’hémolyse de la CEC.

Un des aspects importants de la protection rénale est d'éviter l'utilisation de substances néphrotoxiques dans la période périopératoire: produit de contraste radiologique, antibiotiques aminoglycosides, inhibiteurs de l'enzyme de conversion et aprotinine [178,221]. Ces dernières inhibent la

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vasoconstriction artériolaire efférente du glomérule, et induisent un effondrement de la filtration glomérulaire en cas d'hypotension. D'autre part, le flux plasmatique rénal et sa répartition cortico-médullaire sont mieux conservés en l'absence de vasoconstriction systémique.

Protection rénale

Facteurs primordiaux : - Normovolémie - Normotension (PAM 80 mmHg, minimum 70 mmHg en CEC) - DC ≥ 2.4 L/min/m2 en normothermie, 1.8 L/min/m2 en hypothermie (CEC) - DO2 normal : Ht > 25% sans transfusions - Absence d’agents néphrotoxiques

Protection pharmacologique possible : fenoldopam, bicarbonate, statines Sans effet protecteur (bien que ↑ débit urinaire) : dopamine, mannitol, diurétiques de l’anse La meilleure protection est le maintien dans la normalité de la PAM (≥ 75 mmHg), de la volémie et de l’Hb, tout en évitant l’excès de vasoconstricteurs alpha et de transfusions. Alors que la prophylaxie pharmacologique a un impact aussi variable que contesté, cinq éléments qui ont une part prépondérante dans la genèse de la néphropathie postopératoire sont faciles à corriger lorsqu’ils sont présents :

La durée de l'ischémie (temps de clampage) ; L’anémie ; L'hypovolémie ; L’hypotension artérielle ; Le bas débit cardiaque.

Tous les patients Pas de transfusion

Nadir de Ht (%)

% Δ Créat

16 18 20 22 24 26 28 30

15

20

25

30

35

Figure 7.26 : Variation de la créatinine postopératoire en fonction de l'Ht le plus bas. La fonction rénale et le taux d'insuffisance rénale postopératoires s'aggravent linéairement lorsque l'Ht le plus bas est inférieur à 24%. Mais, à valeur similaire d'Ht, les patients transfusés présentent systématiquement une péjoration de leur fonction rénale par rapport à ceux qui ne sont pas transfusés [142].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 75

Les deux premières sont du ressort de l'opérateur et du perfusionniste, mais les trois autres sont entre les mains de l'anesthésiste et de l’intensiviste. Le maintien d'un volume circulant normal, d'une pression de perfusion adéquate et d’un débit cardiaque satisfaisant est donc la clef de la prévention rénale. Fonction hépato-splanchnique La circulation hépato-splanchnique reçoit 30% du débit cardiaque et consomme 30% de l'oxygène transporté. En cas d'insuffisance hémodynamique, ce territoire est soumis à une forte vasoconstriction, destinée à dériver le volume circulant vers le coeur et le cerveau [303]. L'autorégulation, gérée par les sécrétions d'endothéline vasoconstrictrice et de NO vasodilatateur, ne fonctionne que pendant la digestion; elle est inexistante à jeûn ou en CEC. La vascularisation porte est pression-dépendante, et l’artère hépatique ne représente que 20% du débit sanguin hépatique. Le débit de la veine porte et de l'artère hépatique sont corrélés, si bien qu'une stase veineuse, par exemple due à une malposition de la canule veineuse de CEC, entraîne une baisse du débit porte mais une augmentation compensatrice du débit de l'artère hépatique [272]. Toute altération significative de la pression de perfusion ou du débit de pompe peut déboucher sur des épisodes d'ischémie hépatique. D'autre part, les altérations des fonctions hépatiques sont proportionelles aux valeurs circulantes des fractions C3a et C4a du complément, donc à l'intensité de la réaction inflammatoire systémique [262]. Une baisse momentanée du métabolisme du lactate est courante après CEC, à cause de la discrète dysfonction hépatique post-pompe. Différents facteurs prédisent une perturbation hépatique postopératoire.

Lésions hépatiques préexistantes ; les patients en catégorie Child A ont une morbidité de 40% sans augmentation de mortalité, mais ceux qui sont aux stades Child B et Child C ont une mortalité de 50% et de 100% respectivement [147] ;

Bas débit peropératoire (utilisation de catécholamines à effet alpha) ; Mauvais retour veineux sus-hépatique par la canule veineuse de CEC ; CEC de longue durée [194].

L'adéquation de la perfusion splanchnique aux besoins du tube digestif est en général réalisée en hypothermie, mais pas forcément pendant le réchauffement. C'est en effet en normothermie que la baisse du pHi est la plus marquée [87]. La longueur de la CEC, l'éventuelle hypotension, l'acidose locale, la dépulsation du flux et le syndrome inflammatoire systémique concourrent à augmenter la perméabilité de la muqueuse digestive [330]. Bien que l'incidence des complications digestives soit faible après CEC (0.6-3% des cas), une hyperbilirubinémie conjuguée se manifeste chez 20-35% des malades opérés. L'hyperperméabilité digestive conduit à une translocation endotoxinique chez 10-55% des patients [15,293]. Cette dernière contribue aux défaillances multiviscérales et aux sepsis sévères postopératoires. De plus, des épisodes d'acidose digestive (pHi bas) surviennent entre la troisième et la cinquième heure après CEC chez plus de 50% des malades [258]. Il n’y a malheureusement pas de prophylaxie réelle de l’insuffisance hépato-splanchnique post-CEC. Seule une série de mesures tend à diminuer l’incidence de cette complication.

Diminuer la durée de CEC (< 70 minutes). Maintenir le débit sanguin normal (2.4 L/min/m2) et la PAM > 60 mmHg. Maintenir la température en hypothermie modérée (32°C). Eviter l’hémodilution (Ht > 28%) à cause de l’hypoalbuminémie déjà présente chez les

malades ; Eviter les halogénés à forte métabolisation (halothane 20-40%, sevoflurane 4%, enflurane

3%) ; les plus faiblement métabolisés sont l’isoflurane (0.2%) et le desflurane (0.02%). Un effet de préconditionnement est très hypothétique.

Perfusion de dobutamine ou de milrinone à faible dose.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 76

Maintenir les RAS normales et éviter les vasoconstricteurs alpha ; l’adrénaline et la vasopressine diminuent le flux splanchnique. L’hémodynamique hépatique est le mieux maintenue par la dobutamine.

Les inhibiteurs des phosphodiestérases 3 (milrinone) et le levosimendan augmentent le flux splanchnique, mais l’effet protecteur d’une perfusion continue de dopamine ou de dopexamine reste improuvé.

Fonction hépatique

A part éviter toute substance hépatotoxique, la seule protection est le maintien d’une hémo-dynamique normale sans utilisation de vasoconstricteur alpha.

Fonction pulmonaire et ventilation Il est courant de constater une péjoration des échanges gazeux dès la fin de la CEC; ceux-ci sont perturbés pour une durée de quelques heures à quelques jours. Plusieurs phénomènes entrent en jeu [333].

Pression hydrostatique capillaire pulmonaire élevée: la défaillance ventriculaire gauche passagère et la baisse de compliance cardiaque augmentent les pressions de remplissage. Cette insuffisance ventriculaire gauche postopératoire reste l'élément majeur de la dysfonction pulmonaire; elle est le déterminant principal de la morbidité et de la mortalité postopératoires.

Libération de médiateurs inflammatoires: à l'activation de la cascade du complément (C3a et C5a) par les surfaces étrangères s'ajoute la mise en circulation d'activateurs leucocytaires, d'interleukines, de TNF, d'histamine, de kinines (kallikréine, bradykinine) et la réaction à la protamine; ces phénomènes entraînent une vasodilatation systémique, une vasoconstriction pulmonaire (HTAP), un bronchospasme et une réaction inflammatoire systémique (SIRS).

Oedème pulmonaire non-cardiogénique ("poumon de CEC" ou pump-lung): suite à l'augmentation de la perméabilité capillaire, au syndrome inflammatoire systémique, à l'accumulation liquidienne et à la stase capillaire, un SDRA survient dans 1.3 - 1.7% des CEC [236]. Lorsqu'il est associé à une insuffisance hémodynamique, ce facteur est grevé d'une mortalité de 50%.

Accumulation liquidienne interstitielle: la CEC et les perfusions apportent un excédent de cristalloïdes qui se solde par une prise de poids de 3 à 5 kg; cependant, l'effet de cette accumulation est faible en l'absence de dysfonction gauche et de stase veineuse pulmonaire.

Diminution des volumes pulmonaires: l'altération est la plus frappante pendant les premières 24 heures, mais elle reste mesurable jusqu'à 2-3 semaines [34]; les raisons majeures en sont des atelectasies, une diminution de 15-50% de la CRF, et une diminution de 50% du VEMS.

Diminution de la compliance pulmonaire et augmentation des résistances aériennes: associés à la tachypnée, ces éléments augmentent le coût de la ventilation; jusqu'à 20% de la consommation d'O2 globale sont dévolus à cet effet.

Lésion du nerf phrénique: le traumatisme direct ou le froid de la cardioplégie endommagent le nerf phrénique gauche et sont responsables d'une hémiparésie diaphragmatique gauche dans 15% des cas [113].

La sternotomie, la douleur (drains) et la faiblesse musculaire postopératoire détériorent la performance respiratoire mécanique de la cage thoracique.

Ces altérations, dont la traduction clinique est faible chez les individus normaux, prennent toute leur importance chez les patients qui souffrent de pathologies pulmonaires préexistantes: BPCO, syndrome

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 77

restrictif, asthme, etc (voir Chapitre 21 Pneumopathies). Elles suffisent alors à précipiter une insuffisance ventilatoire grave nécessitant une thérapie respiratoire prolongée en soins intensifs. La ventilation mécanique à volume courant réduit (6-8 mL/kg) avec PEEP (10 cm H2O) améliore la reprise fonctionnelle postopératoire par rapport à un volume courant élevé (10-12 mL/kg) [333]. En chirurgie cardiaque, la défaillance ventriculaire droite est souvent la complication majeure des patients souffrant de pathologie pulmonaire chronique. La question de la relation entre le mode de ventilation pendant la CEC et les fonctions pulmonaires postopératoires reste encore en débat. Aucune étude n'a pu démontrer que la ventilation mécanique en cours de CEC était en quoi que ce soit supérieure à la simple inflation passive par bas débit continu d'O2. Au contraire, elle tendrait plutôt à aggraver la mécanique pulmonaire et les échanges gazeux pendant plusieurs heures [346]. Il est possible qu'une CPAP de 5 cm H2O ajoutée à l'insufflation passive d'O2 (FiO2 1.0) ou d'air (FiO2 0.5) soit bénéfique, mais elle n'est qu'un facteur mineur, lui-même controversé, dans l'évolution des échanges gazeux postopératoires [44]. L’incidence des atélectasies postopératoires ne semble pas non plus en rapport avec le mode ventilatoire pendant la CEC (ventilation mécanique continue, CPAP en apnée, ou absence de ventilation), pour autant que les poumons soient correctement ré-expandus à la reprise de la ventilation par une manœuvre de capacité vitale [217,372]. Quel que soit l'attitude choisie, il est important de reventiler les poumons assez tôt avant la fin de la CEC, de manière à avoir résolu les problèmes liés à la baisse de la compliance, aux atélectasies et à la diminution des échanges gazeux avant la mise en charge. Une ou deux manoeuvres de capacité vitale (20 secondes à 20 cm H2O) sous contrôle visuel par la sternotomie sont nécessaires à ré-expandre le parenchyme pulmonaire.

Fonction pulmonaire

Il n’y a pas de protection spécifique pour les poumons à part une prise en charge judicieuse de la ventilation : - Ventilation à volume courant réduit (6-8 mL/kg) avec PEEP (5-10 cm H2O) - Débit d’O2/air non pulsé pendant la CEC - Expansion pulmonaire par des manœuvres de capacité vitale à la fin de la CEC

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 78

Pharmacologie de la CEC La CEC interfère avec la pharmacocinétique et la pharmacodynamique des médicaments par plusieurs phénomènes: hémodilution, hypothermie, séquestration tissulaire, modifications des flux dans les organes, dépulsation, absorption par les plastiques, modification de la fixation protéique par l'héparine, modifications métaboliques, réaction inflammatoire systémique [144]. Ces effets sont variables selon les substances et la température ; la traduction clinique est la résultante des diverses modifications (Tableau 7.4).

Tableau 7.4

Effets pharmacologiques de la CEC hypothermique ↑ volume de distribution (Vd)

↓ concentration plasmatique en début de CEC (hémodilution) ↓ concentration par séquestration: poumons, circuit de CEC

↓ clairance par le foie ↓ clairance par les reins ↓ biotransformation (P450) ↓ activité estérases plasmatiques ↑ concentration plasmatique ↑ tβ1/2 ↓ affinité pour les récepteurs ↓ perfusion tissulaire

Prise en charge anesthésique:

Agents intraveineux ↑ dosage Opiacés ↑ dosage en début de CEC

↓ dosage en hypothermie et post-reventilation Halogénés Fi ↑ parce que solubilité ↑

MAC ↓ en hypothermie, effet prolongé Curares Effet et durée ↑; dosage doit être ↓ en hypothermie

Début de CEC: hémodilution et risque de décurarisation soudaine

Pharmacocinétique Tout au début de la CEC, l'hémodilution diminue brusquement la concentration des substances en solution dans le compartiment central. Ceci entraîne deux phénomènes:

La diminution soudaine de la concentration libre des substances, qui est responsable des effets cliniques et commande la diffusion/élimination: cela implique un risque de réveil et de décurarisation (Figure 7.27) [93,162]; les variations de concentration sont de l'ordre de 10-35% selon les substances et selon leurs volumes de distribution [63,301].

La diminution de 30-40% de la concentration d'albumine et d'alpha-glycoprotéine acide, qui transportent respectivement les substances acides et alcalines. L'effet clinique va dépendre de l'importance de cette liaison protéique. Le taux libre des substances fortement liées (fentanyl 84%, midazolam 94%, par exemple) augmente significativement, alors que celui des substances faiblement liées (vecuronium 30%, morphine 35%) se modifie peu [301].

Ces deux effets peuvent se compenser partiellement, n'ont pas la même cinétique et sont transitoires ; ils durent le temps nécessaire à la redistribution à partir des tissus, qui va rééquilibrer les gradients de concentration [161]. En effet, le volume de distribution (Vd) des agents d'anesthésie, qui sont des

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substances lipophiles, est beaucoup plus grand que le volume de la CEC, et tient lieu de réservoir. Pour les curares, qui sont des substances hydrophiles, le Vd est moins important, la liaison protéique faible, et la dilution soudaine plus importante. Ces modifications de concentration ne durent que quelques minutes et dépendent du rapport entre le volume de la CEC et le volume circulant du patient; elles sont d'autant plus importantes que ce dernier est petit [63]. Pratiquement, cela signifie que les enfants peuvent se réveiller et/ou se décurariser subitement pendant les premières minutes de CEC si la concentration de la substance n'est pas maintenue par un ajout dans le liquide d'amorçage de la CEC ou dans le malade. Les adultes peuvent se décurariser. L'hypothermie freine la résorption digestive, sous-cutanée et intramusculaire, ralentit la distribution des substances entre les différents compartiments, inhibe leur biotransformation, et réduit leur clearance par le foie et par les reins. Par exemple, l'inhibition des rhodanases hépatiques retarde la métabolisation du nitroprussiate. L'affinité pour les récepteurs est diminuée lorsque la température baisse. Ainsi l'effet des curares est augmenté pendant une CEC hypothermique à 28°C [64,101]. La vasoconstriction induite par le froid réduit le volume de distribution des substances qui ont un faible Vd; c'est le cas pour les curares, dont le taux augmente en CEC hypothermique. De plus, l'hypothermie augmente graduellement l'eau intracellulaire et diminue le volume plasmatique [384]. La solubilité des gaz augmentant à basse température, l'hypothermie accroît la dilution des halogénés dans le sang et baisse leur pression partielle tissulaire; il faut donc en augmenter la concentration pour obtenir le même effet (augmentation de la MAC apparente). Toutefois, les besoins en agents d'anesthésie sont réduits par l'hypothermie, puisqu'il n'y a plus d'activité consciente en dessous d'une température cérébrale de 30-32°. La MAC réelle des halogénés diminue linéairement entre 37° et 20°, où elle devient nulle [13]. Les poumons servent de réservoir aux substances liposolubles basiques comme le fentanyl, le sufentanil, le propofol ou la lidocaïne; elles y restent stockées pendant la CEC puisqu'il n'y a plus de circulation pulmonaire. Elles seront relarguées au moment du déclampage et de la reventilation, ce qui cause une augmentation du taux plasmatique et un approfondissement momentané de l'anesthésie (Figure 7.28) [32,268,351]. La captation de la dopamine et de nor-adrénaline par les poumons cesse lorsque ces derniers sont exclus; les taux sériques augmentent pendant la période de clampage. Le flux hépatique diminue en CEC à cause de l'hypothermie et de la dépulsation. Ceci a un effet significatif sur la métabolisation des substances qui ont un coefficient d'extraction hépatique important (fentanyl, vecuronium) ou moyen (alfentanil) [230]. La clearance du lactate est diminuée de 30% par

100

30

20

10

Temps (minutes) 0 0.5 1.0 1.5 2.0 5.0

Conc (ng/ml)

Début CEC

Risque de réveil

Figure 7.27: Profil de concentration plasmatique du fentanyl au début d'une CEC. La chute du taux est brêve; l'équilibre est rétabli en 2 minutes [162].

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la CEC [256]. D'autre part, les baisses de débit dues aux contingences chirurgicales, l'hypothermie, la vasoconstriction périphérique et la dépulsation entraînent une hypoperfusion qui mène de nombreuses cellules à l'hypoxie et à l'acidose; lors de la reperfusion et du réchauffement, les substances basiques qui se sont accumulées dans les tissus acides seront relarguées dans la circulation. L'hypotension et la dépulsation du flux artériel diminuent le débit périphérique dans les muscles et dans les organes, ce qui restreint le volume de distribution et prolonge la demi-vie. Les reins interprètent la dépulsation artérielle comme une hypotension et déclencent le système rénine-angiotensine. Les composants des circuits de CEC, particulièrement les oxygénateurs, absorbent certaines substances lipophiles comme le fentanyl, l'alfentanil, le midazolam ou le propofol [163]. Toutefois, cet effet est d'une portée réduite à cause du grand volume de distribution de ces substances et de la rééquilibration entre les compartiments. L'hémofiltration, par contre, est efficace pour soustraire un grand nombre de substances au compartiment central de la circulation, puisqu'elle extrait les molécules jusqu'à 20'000 Dalton. L'héparine en forte concentration (≥ 300 UI/kg) induit une libération de lipoprotéine-lipase et de lipase hépatique, ce qui hydrolyse les triglycérides plasmatiques en acides gras non-estérifiés (FFA: free fatty acids) qui augmentent de 15-20% [146]. Ces acides gras libres se lient aux protéines plasmatiques et déplacent les substances qui y sont fixées, ce qui en augmente la concentration libre. Ce processus a lieu en quelques minutes [301].

Pharmacologie en CEC (I)

A cause de l’hémodilution et des variations de température, la CEC a une influence majeure sur la pharmacocinétique des agents d’anesthésie. Ces effets sont variables selon les substances et la température ; la traduction clinique est la résultante des diverses modifications : - ↓ brusque concentration en début de CEC (risque de réveil et de décurarisation) - ↑ volume de distribution

- ↓ concentration par séquestration (poumons, circuits de CEC) - ↑ concentration effective et ↑ durée d’action par: ↓ clairance, ↓ biotransformation ↓ activité des estérases, ↓ affinité pour les récepteurs

Temps (minutes)

Artère pulmonaire

Conc (ng/ml)

0

10

Artère radiale

20

5

2.0 5.0 10 0.5

Déclampage Ventilation

Figure 7.28 : Modifications du taux plasmatique de fentanyl lors de la recirculation pulmonaire [32].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 81

La réaction inflammatoire systémique et la libération d'endotoxines inhibent la fonction du cytochrome P450 et réduisent le métabolisme de nombreuses substances; cet effet est prolongé au-delà du temps de CEC. Le cytochrome P450 cérébral subit la même inhibition, ce qui se traduit par un ralentissement du métabobolisme local des médicaments à effet neuroleptique et hypnogène [292]. Toutes ces modifications ont relativement peu d'impact dans les situations habituelles, mais prennent de l'importance chez les personnes de faible poids (< 50 kg, enfants), chez les personnes âgées (masse cellulaire et taux de protéines plasmatiques diminués), et chez les malades débilités (insuffisance cardiaque chronique). Agents spécifiques Les halogénés sont très utilisés en CEC, mais leur cinétique est sensiblement modifiée dans cette situation. La vitesse d'augmentation de la concentration du gaz est plus faible en CEC hypothermique à cause de l'augmentation de solubilité à froid; par contre, l'extraction du gaz est aussi rapide que dans les conditions standards. Pour le desflurane, par exemple, on atteint la moitié de la concentration inspirée (6%) en 5 minutes, puis un plafonnement à 68% après 32 minutes [237]. Pour le clinicien, cela signifie qu'on n'atteint pas les concentrations habituelles de gaz lors d'une CEC hypothermique. Pour obtenir l'effet désiré, il faut donc augmenter la concentration inspirée et prendre davantage de temps. On doit attendre en moyenne 5 - 10 minutes pour réaliser le plein effet hémodynamique de l'halogéné. Si l'halogéné est l'agent d'anesthésie utilisé avant la CEC, sa concentration va baisser au moment du départ en pompe et du refroidissement; il faut donc augmenter sa concentration sur l'oxygénateur par rapport à celle de l'appareil d'anesthésie. A cela s'ajoute l'effet de l'hémodilution, qui diminue la solubilité des halogénés mais augmente leur volume de répartition. Heureusement, les besoins de l'organisme diminuent avec le froid. Ainsi la MAC de l'isoflurane baisse de 5% par degré de température jusqu'à 20° [13]. Etant liposolubles, les halogénés sont aussi absorbés dans les plastiques et les oxygénateurs; certains modèles ont une capacité pour l'isoflurane équivalente à 17 litres de sang [340]. Si l'on recherche une concentration prédéterminée d'un agent intraveineux par perfusion continue (TCI: target concentration infusion), on voit que l'hémodilution, l'augmentation du volume de distribution, la baisse de clearance et la séquestration dans l'appareillage de CEC et les poumons réduisent l'effet escompté par rapport à la dose administrée. La demi-vie d'élimination est allongée. Pour le propofol, la variation de concentration est de 10-20% [23]. Pour le midazolam et le sufentanil, les concentrations obtenues sont respectivement 13% et 42% inférieures aux concentrations calculées [22]. La demi-vie du midazolam après CEC est significativement allongée [219]. Le lieu d'injection a son importance; pour un traceur injecté en voie centrale, il faut 5 minutes pour que la moitié de la dose apparaisse dans la voie artérielle. Si l'on injecte directement dans l'entrée de l'oxygénateur, le 95% de la dose est distribué en un seul temps circulatoire. Pour les opiacés, on assiste à une brusque mais brève réduction des concentrations circulantes en début de CEC (fentanyl 53%, sufentanil 34%), suivie d'une rééquilibration des taux par redistribution depuis les tissus [48,117,293]. Les concentrations augmentent au moment du déclampage et de la reperfusion pulmonaire, car les poumons non-perfusés, qui avaient séquestré les fentanils, les relarguent au moment de la recirculation. La demi-vie d'élimination est allongée de 25% après CEC, parce que le volume de distribution total est agrandi et la clearance diminuée (Figure 7.29). L'adsorption d'opiacés par les circuits de CEC ne contribue qu'à la chute initiale, mais est sans autre portée clinique. Elle est proportionnelle à la liposolubilité des agents: sufentanil > fentanyl > alfentanil > remifentanil [301]. L'hypothermie affecte l'affinité et la fixation des curares sur la plaque neuro-musculaire et diminue la clearance hépatique du vecuronium. Il en résulte une réduction de plus de 80% de la vitesse de perfusion nécessaire pour maintenir le bloc en CEC hypothermique, une fois passé l'épisode de dilution initiale [382]. Les estérases plasmatiques sont diluées en CEC et partiellement inhibées par le froid. La clearance de l'atracurium, du mivacurium, de l'esmolol et du remifentanil, tous quatre

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métabolisés par les estérases plasmatiques, est donc significativement abaissée. Pour l'atracurium, la réaction d'Hoffman est diminuée de 43% à 28° [118]. Les rhodanases hépatiques responsables de la biotransformation du nitroprussiate ont une activité si faible que le risque d'intoxication au thiocyanate est élevé [243]. La dose de xylocaïne administrée pendant la CEC doit être augmentée de 1.5 à 2.5 mg/kg pour assurer les taux thérapeutiques habituels [198]. Une chute de concentration de 36% est enregistrée pour la nitroglycérine pendant la CEC à cause de la captation importante du produit par les circuits [89]. La fixation de la milrinone sur le circuit de CEC est de 20% [21].

Pharmacologie en CEC (II) Prise en charge anesthésique:

- Agents intraveineux: ↑ dosage - Opiacés: ↑ dosage en début de CEC, ↓ dosage en hypothermie et post-reventilation - Halogénés: ↑ Fi à cause de l’augmentation de solubilité, mais ↓ MAC en hypothermie - Curares: ↑ effet et durée par ↓ affinité pour les récepteurs, risque de décurarisation en début de CEC

Effets tβ1/2

Temps

Postop Début CEC

Fin CEC

Re- ventil

Figure 7.29 : Représentation schématique des variations du taux plasmatique d'un fentanyl en cours de CEC [22].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 83

Déroulement de la CEC La CEC est une situation de collaboration pluridisciplinaire intense au cours de laquelle une bonne communication est essentielle au sein de l'équipe. Le chirurgien, le perfusionniste et l'anesthésiste doivent en permanence échanger les informations importantes concernant les manoeuvres chirurgicales, l'hémodynamique et l'administration médicamenteuse. Un groupe de praticiens expérimentés et habiles, habitués à travailler ensemble, réalise des performances excellentes grâce à un team work intégré. Les résultats cliniques dépendent davantage de la qualité de ce travail d'équipe que des techniques utilisées [244]. L'anesthésiste a un rôle capital, car il est stratégiquement positionné pour surveiller à la fois le champ opératoire, la machine d'anesthésie, l'échocardiographe et la machine de CEC. Il centralise les informations sur l'administration liquidienne; il participe aux décisions concernant la transfusion, la gestion hémodynamique et la mise en charge. Pendant l'insertion de la canule artérielle dans l'aorte ascendante, l'anesthésiste abaisse momentanément la pression artérielle (PAM 50 mmHg) pour éviter toute déchirure de l'aorte. A cet effet, on peut utiliser un halogéné (isoflurane 5%) ou un dilatateur artériel (phentolamine, bolus 1 mg). Le chirurgien procède ensuite à la mise en place de la canule de cardioplégie dans la racine de l'aorte. Enfin, une ou deux canules sont introduites dans l'oreillette droite (Figure 7.30). Cette dernière manoeuvre est souvent mal tolérée hémodynamiquement par le patient: hypotension, baisse brutale du retour veineux, tachy-arythmies sus-jonctionnelles. Pour rétablir la volémie, le plus simple est de perfuser des aliquots de 100 mL de la solution d'amorçage par la canule aortique. Les arythmies cessent dès la cardioplégie. Démarrage de la CEC La CEC peut débuter lorsque l'ACT a dépassé 400 secondes. Avec des circuits pré-héparinés, la valeur recherchée est plus basse: 250 secondes [10]. Ces valeurs s'obtiennent par l'administration d'héparine intraveineuse ou intra-auriculaire à raison de 300 U/kg ou de 100 U/kg, respectivement. Le

Aorte

VD

OD AP

2

3

4

5 1

A

V Ao

© Chassot 2012

IA 100-150 mmHg

Canule artérielle de CEC

Coronaires Clamp aortique

Canule de cardioplégie

Aorte

B

Figure 7.30 : Canulations de CEC. A : canulations dans le champ opératoire vu par l’anesthésiste. 1: canule artérielle dans l'aorte ascendante. 2: canule de cardioplégie. 3: canule de VCS. 4: canule de VCI. 5: fixation de la canule aortique. B : représentation du clampage et de la ligne de cardioplégie ; en cas d’insuffisance aortique (IA), la solution de cardioplégie fuit dans le VG et le dilate puisqu’il n’éjecte plus.

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perfusionniste commence par ouvrir progressivement la canule veineuse pour drainer le sang de l'OD et augmente ensuite le débit de la pompe artérielle jusqu'au débit théorique du malade (2.4 L/min/m2). Ce débit doit être atteint en 2-3 minutes afin d'éviter de perfuser les organes avec un sang très dilué par le liquidie d'amorçage, ce qui provoque une hypotension et entraîne un risque ischémique momentané [25]. A ce moment, tout le sang est dérivé dans la machine, qui assure le débit artériel à elle seule. Le début de la CEC est le moment où la vigilance doit être maximale, car c'est la période où les incidents sont les plus fréquents et les plus graves: défauts de matériel, erreur de montage, déconnexion, malposition de canules, "air-lock", hypotension, hypoxémie, dissection de l'aorte, etc. En CEC, les causes d'accidents les plus graves sont l'hypotension artérielle, l'embolie gazeuse et le dysfonctionnement de l'oxygénateur. Elles sont suivies par les déconnexions et les inadvertances dans les clampages [196]. La présence d'air dans la canule artérielle ou dans la canule de cardioplégie est une menace d'embolie cérébrale catastrophique entraînant un AVC massif ou le décès. L'air provient le plus souvent d'une inattention au niveau du réservoir veineux ou d'une inversion entre les circuits veineux et artériel. Une attention particulière est portée à la couleur des canules veineuses (sang rouge foncé) et artérielle (sang rouge vif). Un sang veineux très foncé ("noir") signe une désaturation veineuse centrale et un bas débit; une désaturation artérielle est caractéristique d'un problème d'oxygénateur. Des saturomètres placés sur ces circuits permettent d'objectiver et de quantifier les observations visuelles. La saturométrie artérielle du circuit de CEC ne surveille que la performance de l'oxygénateur, non celle du patient; cette dernière est évaluée par la SpO2 du moniteur d'anesthésie, pour autant que le flux artériel soit suffisamment pulsatile. Le renseignement le plus important est apporté par la SvO2 située sur le circuit veineux de retour de la CEC. Si les veines caves ne sont pas correctement drainées, une stase s'installe très rapidement : hépatomégalie, oedème de la face, œdème conjonctival. Une hypotension passagère est habituelle en début de pompe à cause de l'hémodilution, qui abaisse soudainement la viscosité sanguine et la pression colloïdo-osmotique. Lorsqu'elle était présente dans la solution d'amorçage, l'aprotinine pouvait déclencher une réaction anaphylactique. La pression se rétablit lorsque l'hypothermie augmente la viscosité et provoque une stimulation sympathique. Une hypotension sévère (PAM < 25 mmHg) doit faire rechercher immédiatement un incident grave.

Dissection de l'aorte: disparition de l'onde de pression sur le cathéter artériel alors que la pression est élevée sur la canule artérielle de CEC, et faible retour veineux vers la machine ; l'aorte ascendante se boursouffle et devient violacée ;

Shunt resté ouvert entre la ligne artérielle et la ligne veineuse ; Evacuation du filtre artériel resté ouvert à trop haut débit ; Obstacle persistant de la ligne artérielle ; Asservissement inadéquat du débit de la pompe maîtresse.

Comme le patient est encore normotherme et que son coeur n'est pas arrêté, le traitement d'urgence est un retour en charge immédiat et un arrêt de la CEC. La dilution brusque des substances en circulation et la stimulation sympathique de l'hypothermie peuvent réveiller malade. Comme le débit pulmonaire devient minime, seuls les médicaments intraveineux administrés dans la CEC sont efficaces. Selon le type de canulation, les substances introduites par la voie veineuse centrale peuvent mettre jusqu'à 5 minutes pour atteindre leur objectif. L'halogéné est vaporisé dans le circuit de l'oxygénateur de CEC. Pour l'anesthésiste, le passage en CEC s'accompagne d'un certain nombre de manoeuvres et de contrôles (Tableau 7.5):

Arrêt de la ventilation mécanique, remplacée par un débit continu d'O2/air de 1 L/min (Fi O2 1.0 si haut risque d’embolie gazeuse) et une CPAP ≤ 5 cm H2O; pas de N2O . Ceci a lieu dès que le perfusionniste annonce qu'il est à plein débit et qu'il commence à refroidir. La

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ventilation n'est pas interrompue en CEC partielle, ni si un problème empêche de tenir le débit sur la pompe.

Retrait du cathéter de Swan-Ganz de 5-10 cm pour éviter qu'il ne perfore le vaisseau pulmonaire lorsque les poumons collabent et lorsqu'il se rigidifie avec l'hypothermie.

Arrêt des sons et des alarmes sur le moniteur; réglages des alarmes sur un "programme CEC". Maintien de l'anesthésie par un halogéné (sur l'oxygénateur de CEC) ou un agent intraveineux

en bolus (midazolam) ou en perfusion (propofol). L’administration médicamenteuse dans le circuit de CEC est plus précise que par la voie centrale ; ne pas utiliser les voies veineuses périphériques dont le débit est aléatoire. Un halogéné est un choix préférable lors de revascularisation coronarienne à cause de la protection ischémique offerte par le préconditionnement (voir Chapitre 5 Préconditionnement).

Arrêt des perfusions en cours, sauf celle de propofol si c'est l’agent d'anesthésie choisi. Curarisation en cas de frissons (hypothermie).

Tableau 7.5 : Contrôles au démarrage de la CEC Patient

Patient endormi: isoflurane 1-2% ou sevoflurane 1.5-2% sur l'oxygénateur de CEC, propofol en perfusion ou midazolam 5-15 mg (dans le circuit de CEC) Face: couleur, asymétrie (canule artérielle sélective), œdème et chemosis (canulation VCS) Contrôle des pupilles PAM 50-80 mmHg, PVC < 5 mmHg, PAP < 15 mmHg SpO2 100% (artéfacts fréquents), SaO2 100% (circuit artériel de CEC, contrôle l'oxygénateur, non le patient), couleur du malade et du champ opératoire ScO2 > 60% (des deux côtés) SvO2 > 70% (retour veineux CEC) Différence de couleur bien visible entre les canules artérielles et veineuses Si hypotension ou désaturation sévères: retour en charge immédiat Si air dans la canule artérielle: clampage immédiat et retour en charge

Médicaments Arrêt des perfusions Arrêt des catécholamine(s), anti-arythmiques, dérivés nitrés, etc Analgésie assurée (fentanyl) Curarisation selon besoins Vasoconstricteur (néosynéphrine) à disposition

Machine d'anesthésie Ventilation: stoppée dès que le débit de CEC est 100% et refroidissement en cours Flux 0.5 - 1 L/min, Fi O2 0.3-1.0 (Fi O2 1.0 si haut risque d’embolie gazeuse), pas de N2O CPAP < 5 cm H2O si nécessaire Maintenir la ventilation en cas de désaturation ou de CEC partielle ; en cas d'utilisation d'un halogéné, maintenir la même Fi sur l'oxygénateur et le respirateur tant que celui-ci est en fonction

Moniteur Zéro des capteurs vérifiés, températures oesophagienne et rectale en place Alarmes stoppées, volume sonore à zéro Retrait de la Swan-Ganz de 5 cm (maintien en AP), ballonnet dégonflé Si cardioplégie rétrograde, branchement sur une ligne de pression Si double canulation cave: mesure de la pression sur le bras latéral de l'introducteur ou le canal proximal du cathéter de PVC (pression veineuse cérébrale)

Hypotension (PAM < 40 mmHg) au démarrage de CEC Baisse de viscosité (démarrage trop brusque, hémodilution importante) Vasoplégie Insuffisance aortique (dilatation VG) ; ne pas administrer de vascoconstricteur, qui augmenterait l’IA Débit insuffisant, mauvais retour veineux Shunt resté ouvert, aspiration excessive (canule cardioplégie, filtre artériel) Dissection de l'aorte (pression élevée sur la ligne artérielle de CEC)

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Commencement de la CEC

Démarrage dès que l’ACT est > 400 sec Arrêt de la ventilation et des perfusions lorsque le plein débit est atteint Maintien de l’anesthésie par un agent intraveineux (dans le circuit de CEC) ou par un halogéné (sur l’oxygénateur) Hypotension et risque de réveil/décuraristion sur hémodilution par le liquide d’amorçage Surveillance du retour veineux (canules OD et/ou veines caves) et de la canule artérielle (risque de dissection aortique)

Surveillance anesthésique Bien que la gestion de la CEC soit de la responsabilité du perfusioniste, l'anesthésiste a de nombreuses tâches de surveillance et de collaboration à effectuer en cours de pompe (Tableau 7.6).

Tableau 7.6 : Contrôles en cours de CEC

Surveillance patient

Sommeil assuré (T° oesophagienne > 30°C) par halogéné (revascularisation coronarienne), propofol ou midazolam Curarisation si: ouverture cavités gauches, frissons, mouvements, SvO2 < 60% PAM 50-80 mmHg PaO2 100-150 mmHg, PaCO2 40 mmHg (en normothermie) SpO2 et SaO2 98-100%, SvO2 ≥ 70%, couleur du malade et du champ opératoire ScO2 > 60% (des deux côtés) Ht, glycémie, status acido-basique, K+ Gradient de température (ΔT°) < 10°C entre températures rectale et oesophagienne Silence électrique sur l'ECG

Surveillance machine de CEC Pression sur la ligne artérielle (max: 3 x PAM) SaO2 (patient) SvO2 (retour veineux de CEC) FiO2, Fi halogéné, débit de gaz frais Niveau du réservoir veineux ACT > 480 sec (circuits pré-héparinés: > 250 sec) Gradient de température (ΔT°) < 10°C entre échangeur thermique et sang

Surveillance machine d'anesthésie FiO2 0.3-1.0 (Fi O2 1.0 si haut risque d’embolie gazeuse), pas de N2O Débit de gaz 0.5-1.0 L/min P ventil < 5 cm H2O Ballon du circuit respiratoire dégonflé

Surveillance moniteur Températures (rectale, oesophagienne ou cérébrale, Swan-Ganz) Gradient de température (ΔT°) < 10°C entre températures rectale et oesophagienne ECG: silence électrique ; en cas d’activité, administrer une dose de cardioplégie

Gestion de l'anesthésie ; halogéné à 1.0-1.5 MAC (vaporisateur sur l'oxygénateur de CEC), propofol en perfusion, midazolam au réchauffement. Les médicaments sont injectés directement dans le circuit de la CEC. Les perfusions sont montées sur la voie centrale ou sur la voie auriculaire du cathéter de Swan-Ganz, parce que leur branchement sur le circuit ne peut se faire que par un robinet monté à l'avance sur la voie veineuse. Le branchement sur le réservoir veineux est techniquement simple, mais il n'assure pas un débit continu parce que le

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niveau du réservoir oscille constamment. La meilleure solution consiste donc à adjoindre un robinet sur la ligne veineuse à la sortie du réservoir. Selon la position de la voie centrale par rapport aux canules veineuses, le délai d'action peut être de plusieurs minutes.

Maintien du sommeil ; c'est un point capital et délicat pendant la CEC. La dilution des substances en circulation par le perfusat de la CEC et la stimulation sympathique du refroidissement peuvent facilement réveiller le malade en début de pompe. Les critères cliniques d'anesthésie ne s'appliquent plus pendant cette phase de l'intervention: l'hémodynamique est réglée par la pompe, le coeur est arrêté, la transpiration est liée au réchauffement, les pupilles sont en miosis à cause du fentanyl ou en mydriase à cause du froid; de plus, on ne s'aperçoit pas que le malade se réveille momentanément s'il est profondément curarisé. Il est donc important de pouvoir observer les petits mouvements qui précèdent le réveil et de n'administrer un curare que dans les situations où cela est nécessaire (voir ci-dessous), ou d'utiliser un monitorage du sommeil comme le BIS™ ; malheureusement, ce dernier défaille à basse température. Le monitorage de l'activité cérébrale indique que 9% à 20% des patients, selon la technique d'investigation utilisée, présente une valeur compatible avec un sommeil insuffisant [357]. Une observation attentive de la saturation veineuse en oxygène (chute de la SvO2) renseigne également sur un éventuel réveil. Un vaporisateur d'halogéné (isoflurane ou sevoflurane) permet d'assurer le sommeil en diffusant en permanence 1.0-1.5 MAC de la substance sur le circuit de gaz de l'oxygénateur; c'est la meilleure routine pour la chirurgie de revascularisation coronarienne (bénéfice du préconditionnement). Le propofol ou le midazolam peuvent remplacer l'halogéné dans les autres types de chirurgie. En dessous de 30-32°C, l’hypothermie assure à elle seule la perte de conscience.

Curarisation ; elle est de préférence réservée aux situations suivantes: cardiotomie gauche, mouvements diaphragmatiques spontanés, hypothermie profonde avec arrêt circulatoire, bas débit accompagné de désaturation veineuse, frissons au réchauffement.

Maintien de la PAM à 60-80 mmHg (voir Hémodynamique page 51). La régulation de la pression ne doit pas se faire au détriment du débit [254]. La PAM peut être momentanément abaissée jusqu'à 30-40 mmHg en hypothermie (≤ 28°). La vasodilatation permet de meilleurs échanges thermiques au réchauffement. Cependant, un certain degré de vasoplégie est fréquent en pompe, et l'hypotension qu'il entraîne peut devenir dangereuse si elle se prolonge parce que le perfusioniste ne peut pas compenser par une augmentation du débit. Si des bolus de néosynéphrine de 100 mcg sont insuffisants pour corriger la situation, on met en route une perfusion de noradrénaline sur la voie centrale ou sur la voie auriculaire droite de la Swan-Ganz. Une poussée hypertensive est réglée par l'isoflurane à 5% et/ou par des bolus de phentolamine (1 mg par bolus).

Surveillance du débit: 2.4 L/min/m2 en normothermie, abaissé jusqu'à 1.8 L/min/m2 à 28° et 1.5 L/min/m2 à 25°C (voir Hémodynamique). La fréquence des oscillations dues aux galets de la pompe sur la courbe artérielle renseigne sur le débit de la pompe. La SvO2 mesurée dans le circuit veineux de la CEC renseigne sur l'adéquation du débit aux besoins de l'organisme (SvO2 ≥ 70%). Le maintien du débit est prioritaire par rapport à celui de la pression.

Saturométries : o SaO2, surveille l’oxygénateur ; o SpO2, habituellement illisible à cause de la vasoconstriction, artéfacts fréquents ; o SvO2 sur le retour veineux de la CEC, mesure l’adéquation entre apport et

consommation d'O2, perfusion tissulaire ; o ScO2, évalue l’apport d’O2 au cerveau et reflète le DO2 tissulaire de l’organisme ;

baisse de > 20% de la valeur de base : risque de souffrance neurologique ; o SvO2 du cathéter de Swan-Ganz, sans intérêt parce que le débit pulmonaire est

minime ou nul. Surveillance de la face et des pupilles. Surveilance de l’ECG ; la reprise d’une activité électrique, souvent désordonnée, implique

l’administration d’une dose de cardioplégie. Surveillance de l'échocardiographie transoesophagienne (ETO) (voir Place de l’ETO page 91).

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Transfusions ; l'augmentation de viscosité à froid conditionne l'Ht recherché, qui doit idéalement avoir la même valeur en % que la température en °C. Il est préférable d’éviter un Ht < 24% (voir Amorçage page 7).

Le débit urinaire est très variable en CEC et n'est pas corrélé à la fonction rénale postopératoire; les éléments les plus prédictifs sont la durée de CEC et la fonction rénale préopératoire.

Surveillance en CEC

Patient : - Sommeil assuré - PAM 50-80 mmHg - SpO2 et SaO2 98-100%, SvO2 ≥ 70%, ScO2 > 60% - PaO2 > 100 mmHg, PaCO2 40 mmHg, pas d’acidose - ΔT° < 10°C entre oesophage et rectum/vessie - ECG isoélectrique - Glycémie 6-10 mmol/L Machine de CEC : - ACT > 450 sec - SaO2 (ligne artérielle) 98-100%, SvO2 (canule veineuse) ≥ 70% - ΔT° < 10°C entre échangeur thermique et sang - Débits de gaz réglés pour PaO2 > 100 mmHg et PaCO2 40 mmHg - Débit: 2.4 L/min/m2 > 35°, 1.8 L/min/m2 à 28° et 1.5 L/min/m2 à 25°C

Réchauffement Quelle que soit la température en hypothermie, le réchauffement doit être progressif. Le gradient de température entre l'eau du circuit de l'échangeur thermique et le sang du patient ne doit pas dépasser 10°C; la différence entre les températures oesophagienne et rectale ne doit pas excéder 10°C. La température maximale du sang est 37°C [134,323]. Un réchauffement trop rapide présente quatre risques majeurs.

Inhomogénéité de température au sein des tissus; certaines zones restent froides à cause d'une vasoconstriction artériolaire intense ;

Hyperthermie cérébrale entraînant une aggravation des troubles neurologiques ; Embolies gazeuses dues à la diminution de solubilité des gaz lorsque le sang se réchauffe ; Dénaturation des protéines sériques.

Cette période de la CEC est l'occasion d'activités majeures pour l'anesthésiste.

Dès que commence le réchauffement, il faut prévoir un approfondissement de l'anesthésie. En effet, l'activité corticale consciente, absente < 30-32°C, reprend lorsque la température cérébrale dépasse ce seuil. Or cette température évolue plus rapidement que celle mesurée dans l’œsophage ; l’inconscience doit donc être assurée dès le début du réchauffement. Si l'on ne dispose pas de moyen de mesurer l'activité électrique cérébrale (EEG, BIS™, Entropy™), on ne peut savoir si le malade est adéquatement endormi, car les critères habituels d'anesthésie sont absents en CEC: l'hémodynamique dépend de la machine, la transpiration est occasionnée par le réchauffement du sang, et les pupilles restent en miosis à cause des hautes doses d'opiacés. Il est donc recommandé d'assurer le sommeil par du midazolam (5-15 mg), du

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propofol (5 mg/kg/heure) ou un halogéné (1-2 MAC). La veinodilatation centrale causée par le propofol oblige en général le perfusionniste à ajouter 500 mL de cristalloïde dans le circuit pour compenser la chute du retour veineux. Il est rarement utile de donner du fentanyl ou un autre opiacé à ce moment, sauf si l'on veut bloquer toute réaction sympathique responsable d'une hypertension artérielle pulmonaire.

L'administration d'un curare évite les frissons et diminue la consommation d'O2 musculaire, mais élimine le seul critère de réveil que sont les mouvements spontanés.

Les malades en insuffisance congestive avec dilatation ventriculaire ou hypertension artérielle pulmonaire, chez lesquels l’inodilatation est profitable, bénéficient d’une dose de milrinone (Corotrop®) en bolus lent (50 mcg/kg) dans la CEC au moment du réchauffement [104]; une baisse de la pression systémique est habituelle pendant cette administration.

Au déclampage de l'aorte, la perfusion coronarienne est rétablie et le coeur recommence à battre le plus souvent spontanément. La ventilation est reprise lorsque l'activité cardiaque est rétablie, si cela ne gène pas l’opérateur. Elle est précédée d'une manoeuvre de capacité vitale (insufflation de 20 cm H2O pendant 20 sec); la FiO2 est de 100% jusqu'à la première gazométrie [217]. La PetCO2 lue sur le respirateur est basse, puisque les échanges gazeux ont lieu principalement dans l’oxygénateur. Néanmoins, la Fi de l’halogéné doit être identique sur les deux machines pour éviter que le gaz ne rentre par l’une et ne sorte par l’autre.

En cas de dysfonction ventriculaire, le gaz halogéné est momentanément interrompu; il sera repris sur le respirateur en cas de revascularisation coronarienne (effet de préconditionnement) lorsque la fonction ventriculaire sera satisfaisante.

Si le coeur fibrille, on procède à une ou plusieurs défibrillation(s) avec les palettes internes; on commence avec 5-10 J selon la taille du coeur, et on augmente si nécessaire. L’énergie maximale possible avec le système interne est 50 J. En cas de défibrillations répétées, il est habituel d'ajouter de la lidocaïne (2 mg/kg iv) et du magnésium (5-10 mmoles).

L'hyperkaliémie (> 6 mmol/L) est fréquente à cause de la haute teneur en K+ des solutions de cardioplégie qui sont réaspirées dans le circuit de CEC. On peut forcer la kaliurie avec du mannitol ou du furosémide. Chez l'insuffisant rénal, la cardioplégie est évacuée par une aspiration "perdue" ou par hémofiltration. La solution de Ringer doit être remplacée par du NaCl 0.9%. En l'absence d'altérations à l'ECG, la situation est sans risque.

Les catécholamines à effet béta ne doivent pas être administrées trop tôt avant la mise en charge parce qu'elles augmentent la mVO2 à un moment ou l'utilisation de l'O2 par la cellule myocardique est encore altérée. Une dizaine de minutes avant la mise en charge suffisent en général à obtenir un taux sérique optimal au moment de celle-ci.

Réchauffement

Assurer le sommeil et la curarisation si nécessaire Reventiler dès la reprise d’une activité cardiaque (si cela ne gène pas l’opérateur) Manœuvre de capacité vitale (PEEP manuel à 20 cm H2O pendant 20 sec, à répéter si nécessaire) Réchauffement lent pour atteindre T° rectale ≥ 35°, T° oesophagienne ≥ 36° - Augmentation de température ≤ 1°C / 5 min - T° sang ≤ 37°C Si FV ou TV: défibrillation(s) (5-50 J), xylocaïne 2 mg/kg, Mg2+ 2 gm. Si FA: cardioversion (5-20 J)

Incidents critiques et accidents en CEC Les problèmes aigus surviennent dans 0.4 – 1% des CEC [99,195,233]. Les accidents les plus dangereux sont la dissection aortique, l'embolie gazeuse, le défaut d'oxygénation et la thrombose du circuit (voir aussi Que faire en cas de problème aigu ? page 132).

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La dissection de l'aorte survient au démarrage de la CEC; elle est due à une canulation

accidentellement intrapariétale. On assiste à une disparition immédiate de l'onde de pression sur le cathéter artériel alors que la pression est élevée sur la canule artérielle de CEC, et à un très mauvais retour veineux vers la machine; l'aorte ascendante se boursouffle et devient violacée. Le traitement est une remise en charge immédiate. On prévient cet accident en contrôlant que la courbe de pression est normale et bien pulsatile sur la canule artérielle de CEC avant la mise en marche.

L'inversion des canulations artérielle et veineuse: l'aorte est vidée de son sang alors que l'OD est gonflée sous pression. Le risque majeur est l'accumulation d'air dans l'aorte, qui embolisera lorsque la circulatioin sera rétablie. Il faut immédiatement arrêter la machine, mettre le malade en position de Trendelenburg, drainer l'aorte et procéder comme lors d'embolie gazeuse.

L'embolie gazeuse peut survenir à tout moment. L'air pénètre dans le circuit par le réservoir veineux, les aspirations, la cardioplégie, l'oxygénateur, les filtres ou des déconnexions; les bulles se forment localement lorsque la pression baisse brusquement à un endroit du circuit (cavitation), ou lorsque la température du sang augmente (baisse de solubilité des gaz). Des poches d'air se constituent dans les cavités cardiaques gauches lorsque celles-ci sont ouvertes dans le champ opératoire. L'air peut passer de l'OD à l'OG par un foramen ovale perméable. L'air ambiant est aspiré dans le coeur gauche si le patient a des mouvements diaphragmatiques pendant que le VG ou l'OG sont ouverts.

La présence d'air dans la canule artérielle commande des mesures immédiates: o Arrêt de la pompe ; o Position de Trendelenburg forcée pour diminuer les risque de progression de l'air dans

les carotides ; o Débullage de l'aorte, perfusion rétrograde (1-2 L/min) hypothermique (20-24°) par la

veine cave supérieure pour perfuser le cerveau a retro et vidanger l'air qui s'est infiltré du côté artériel ;

o Reprise de la CEC normale après vidange complète de l'air ; o Administration de mannitol et de stéroïdes ; o Scanner ou IRM dès que possible.

L'hypoxémie est liée à un défaut d'alimentation en O2 (mélangeur, déconnexion), à un défaut de l'oxygénateur, ou à une désaturation excessive du sang veineux (bas débit, hématocrite trop bas, consommation excessive, hyperthermie). La curarisation permet de diminuer la consommation d'O2 musculaire de 30% lorsque la SvO2 et/ou la ScO2 sont trop basses [166].

L'obstruction du retour veineux ne laisse que le temps de vider le réservoir pour se trouver face à une machine stoppée automatiquement par l’asservissment de la pompe au niveau de sang du réservoir. Le blocage veineux est du à l'infiltration d'air dans les canules veineuses ("air lock"), à un positionnement inadéquat des canules, à des manipulations du cœur ou à une obstruction de la canule par la paroi auriculaire en cas d’aspiration (vacuum-assisted venous return). Il faut immédiatement réduire le débit de pompe pour éviter l'arrêt, remplir le réservoir de Ringer-lactate et repositionner les canules.

Une panne de la pompe principale commande le clampage immédiat du circuit artériel et veineux, et le passage sur une pompe de secours. La reprise en manuel est possible en cas de défaut d'alimentation électrique, mais elle est exténuante et ne permet pas de tenir le débit très longtemps.

La thrombose du circuit est un événement catastrophique qui oblige à interrompre la CEC pour changer immédiatement le réservoir, l'oxygénateur et les filtres. Elle est due à une héparinisation insuffisante, à une administration intempestive de protamine, ou à l'utilisation des aspirations de cardiotomie après neutralisation de l'héparine par la protamine. C'est la raison pour laquelle on aspire par le CellSaver™ dès que l'on débute la protamine après la CEC, car la machine doit demeurer fonctionnelle au cas où il faut repartir en pompe.

Il existe encore un long catalogue de toutes les pannes et accidents qui peuvent survenir au cours d'une circulation extracorporelle: défaillance mécanique de pompe, panne électrique, déconnexions, occlusion de filtre, etc.

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Incidents et accidents en CEC

Incidents fréquents : hypotension, obstruction du retour veineux, hypoxémie, bulles dans le circuit, air dans les cavités gauches Accidents : dissection aortique, embolie gazeuse massive, thrombose dans le circuit, déconnexion

Place de l'échocardiographie transoesophagienne (ETO) La place de l'ETO en chirurgie cardiaque est bien établie. Elle poursuit plusieurs buts.

Evaluation de la fonction systolique et diastolique de chaque ventricule; Evaluation de la volémie; Diagnostic de l'ischémie; Diagnostic différentiel de l'hypotension réfractaire; Evaluation de la pathologie cardiaque avant la CEC; Evaluation de la correction chirurgicale après la CEC; Aide technique aux gestes chirurgicaux.

Des modifications thérapeutiques pharmacologiques basées sur l'interprétation de l'ETO surviennent dans 10-21% des cas, des modifications chirurgicales dans 7-11% des cas, et des décisions vitales immédiates dans 4-21% des situations d'urgence [35,36,52,177]. L'examen de routine pratiqué avant la CEC apporte de nouveaux diagnostics chez 10-15% des patients, ce qui modifie l'opération prévue dans 7-11% des cas ; après la CEC, l’ETO justifie une reprise dans 2-3% des opérations [109,239]. Dans notre série lausannoise (12’986 examens), le taux de modifications dans la stratégie chirurgicale est de 6% avant CEC et de 3% après CEC [74].

A côté de ces données générales, l'ETO est très utile dans une série de situations en rapport direct avec la CEC. Ce sont notamment:

Placement de guides et de canules ; Placement d’endoprothèses ; Evaluation de l'athéromatose de l'aorte ; Dissection de l'aorte ; Diagnostic de malformations anatomiques: FOP, VCSG ; Dilatation du VG en cas d'insuffisance aortique ; Débullage en fin de CEC ; Découverte de thrombus intracardiaque ; Sevrage de pompe.

Positionnement de cathéters et de canules Comme l'anesthésiste prend l'habitude de contrôler à l'ETO la localisation du mandrin dans l'OD lorsqu'il pose une voie centrale (Figure 7.31), il peut de la même manière guider le placement de canules particulières dont la position doit être précise. Par exemple, les canules veineuses placées dans l'OD et la veine cave supérieure (VCS) depuis une insertion fémorale vont facilement buter contre la membrane de la fosse ovale, ou passer dans l'OG par un foramen ovale perméable (FOP); les ultrasons permettent de guider l'opérateur dans ses manoeuvres pour viser la VCS (Figure 7.32). Certaines

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 92

canules artérielles souples sont introduite sur un guide dans l’aorte ascendante ou la sous-clavière droite ; l’ETO permet de contrôler la position de leur extrémité distale dans la crosse. Figure 7.31 : Localisation du mandrin de voie centrale à l'ETO. A: Mandrin en bonne position dans l'oreillette droite. B: Mandrin situé dans l'aorte ascendante. APD: artère pulmonaire droite. VCS: veine cave supérieure. AP: tronc de l'artère pulmonaire. L'examen de l'aorte descendante permet de décider si l'athéromatose est telle qu'elle contre-indique le placement d'une contre-pulsion intra-aortique (CPIA) (Figure 7.33). Le cas échéant, elle offre la possibilité de positionner la CPIA à la bonne hauteur sans l'interruption opératoire que nécessite un contrôle radiologique: l'extrémité du cathéter doit se trouver 1 cm en dessous du départ de la sous-clavière gauche. Si le guide n'est pas visible dans l'aorte descendante, il faut se méfier d'un problème grave sur le trajet depuis l'artère fémorale: dissection, enroulement dans un anévrysme abdominal, fausse-route. Lors de la mise en place d'une assistance ventriculaire, on peut contrôler la position des canules et y mesurer le flux (Figure 7.34) [311]. Il est possible de visualiser la canule dans le sinus coronaire lors de cardioplégie rétrograde [207]. Il faut retirer le mandrin métallique, qui est très échogène, pour pouvoir visualiser correctement la canule ou le cathéter.

B A

OG

OD

Ao

Canule

Figure 7.32 : Canule veineuse montée depuis la veine fémorale jusque dans l'OD où l'ETO découvre qu'elle butte dans l'angle entre le septum interauriculaire et la racine de l'aorte au lieu de s'enfiler dans la veine cave supérieure.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 93

Figure 7.33 : Deux images ETO d'athéromatose de l'aorte descendante. A: Les masses athéromateuses sont protubérantes dans la lumière et la surface endovasculaire complètement irrégulière ; la double flèche rouge en indique l’épaisseur B: Un athérome pédiculé flotte dans la lumière comme un grelot; cette situation est hautement emboligène. La flèche rouge indique le sens du flux. Figure 7.34 : Canules d’assistance bi-ventriculaire (Thoratek™). A : les 4 canules sur la face antérieure du cœur ; 1 : canule venant de l’OD ; 2 : canule allant dans l’aorte ; 3 : canule allant dans l’AP ; 4 : canule apicale dans le VG. B : canule dans l’OD ; cette canule est trop profonde et appuie fortement contre le septum interauriculaire. C : canule anastomosée à l’artère pulmonaire (AP). D : en vue transgastrique, on suit la canule d'assistance du VD jusque dans la chambre de chasse droite. D'une manière générale, on repère plus facilement un cathéter dans un vaisseau lorsqu'on utilise un plan de coupe perpendiculaire à l'axe de ce dernier. En effet, l'ETO est une imagerie bidimensionnelle

B A

A

VD VG

1

2 3

4

B

VD

VG

OD

C AP

D

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 94

qui correspond à une tomographie; un cathéter peut être parallèle au plan longitudinal (long axe du vaisseau), et donc échapper à l'observateur parce que le champ de vision de l'ultrason ne le coupe jamais. Pour contrôler le positionnement exact d'un objet, il faut utiliser deux plans de coupe perpendiculaires. Athéromatose de l'aorte Comme l'oesophage et l'aorte descendante cheminent côte à côte dans le thorax, l'ETO est un examen privilégié de cette partie de l'aorte (Figure 7.33). Par contre, l'interposition de la bronche-souche droite entre l'oesophage et l'aorte ascendante limite la visibilité aux 5-6 premiers centimètres de cette dernière (Figure 7.35) et à la partie distale de la crosse [350]. La palpation chirurgicale étant peu fiable, l'échographie épi-aortique est le seul moyen d'investiguer la totalité de l'aorte ascendante, de choisir le site de canulation, et de diminuer l'incidence d'embolies cérébrales (voir Chapitre 27 Echographie épi-aortique et Figure 27.70) [252,291]. L'ETO permet de poser l'indication à un examen épi-aortique en fonction du degré d'atteinte de l'aorte descendante [189]. En cas de lésions étendues et épaissies (stade III), protubérantes (stade IV) ou friables (stade V, lésions pendulaires, aorte "porcelaine"), il est recommandé de changer de stratégie chirurgicale [235].

Canulation par l’artère sous-clavière droite ; Canulation par une artère fémorale ; cette option présente deux risque majeurs :

o Embolisation cérébrale par du matériel athéromateux de l’aorte descendante puisque le flux est rétrograde ;

o Dissection aiguë par infiltration du flux au travers des plaques ; Utilisation d'une canule aortique avec filtre déployable (Embol-X™) ; Occlusion avec un ballon intravasculaire monté depuis la fémorale (Heartport™) ; Pas de canulation de cardioplégie ni de clampage aortique: opération à coeur battant ou en

fibrillation ventriculaire si cela est concevable ; Pour les pontages aorto-coronariens: greffes artérielles multiples à partir des artères

mammaires ou de l’aorte descendante ; Dans les cas extrêmes, remplacement de l’aorte ascendante par une prothèse.

Ballon intra-aortique Pour éviter de de clamper une aorte trop fragile, il arrive que l'on utilise un ballon gonflé dans l'aorte ascendante en guise de clampage. Cette technique implique certaines surveillances, parce que ce

APD

Aorte

Figure 7.35 : Athéromatose de l'aorte ascendante; présence d'une longue plaque d'athéromatose sur la face antérieure de l'aorte en vue longitudinale, dans la zone utilisée pour la canulation de CEC.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 95

ballon a tendance à se déplacer soit distalement vers la valve aortique soit proximalement vers les vaisseaux de la crosse [367].

Position du ballon au niveau de la jonction sino-tubulaire ; Eventuelle protrusion du ballon entre les valvules aortiques ; Eventuel déplacement distal du ballon (disparition de la vue ETO sur la racine de l’aorte) ; Absence d'insuffisance aortique ; Présence d'un pouls périphérique (SpO2) au membre supérieur droit (risque d'occlusion du

tronc brachio-céphalique par le ballon s'il est trop distal) ; Débit de la cardioplégie dans la partie proximale de l'aorte.

Dissection de l'aorte La dissection de la paroi aortique par la canule artérielle est une complication iatrogène dramatique qui survient en début de CEC; le même phénomène peut arriver avec la canule de cardioplégie ou lors de canulation périphérique fémorale ou sous-clavière. L'évènement se caractérise par une hypotension soudaine et par une surpression dans la ligne artérielle. L'ETO permet de poser le diagnostic immédiatement [238]. En cas de dissection aortique A ou B, l'analyse du flux au Doppler couleur donne l'assurance que la canule perfuse la vraie lumière. De même lors de la mise en place d'endoprothèses, l'image échocardiographique permet de contrôler que le guide va acheminer la prothèse dans la vraie lumière et non dans le cul-de-sac de la dissection ou de l'anévrysme. Une image trompeuse peut survenir en début de CEC lors de canulation artérielle fémorale et faire croire à une dissection rétrograde de l'aorte descendante [371]. Le perfusat de CEC, qui est plus froid et plus fluide que le sang, ne se mélange pas immédiatement avec ce dernier; il se forme momentanément deux couches parallèles dans l'aorte qui peuvent donner l'impression qu'elles sont séparées en une vraie et une fausse lumière. Cet effet se résout en 30-40 secondes. Diagnostic de malformations anatomiques Certaines malformations congénitales bénignes passent inaperçues au cours de l'existence, mais peuvent causer des problèmes dans la situation particulière de la chirurgie cardiaque. C'est le fait par exemple du foramen ovale perméable (FOP), de la communication interauriculaire (CIA), ou de la veine cave supérieure gauche (VCSG). La présence d'une communication transatriale n'est pas dangereuse tant que la pression dans l'OG reste supérieure à celle de l'OD et que les oreillettes sont étanches. Si la POD augmente (PEEP, hypertension pulmonaire, défaillance droite), le shunt s'inverse et crée une hypoxémie par shunt droit-gauche. Lorsqu'une des deux oreillettes est ouverte à l'air ambiant par l'opérateur, des bulles peuvent pénétrer dans l'autre. Lors d’intervention dans le cœur gauche (opération sur la valve mitrale, par exemple), le FOP ou la CIA sont une source d’hémorragie continue depuis l’OD qui noye le champ opératoire. La chirurgie du coeur droit (plastie tricuspidienne, résection de chambre de chasse droite, par exemple) est possible à coeur battant pour autant que le septum interauriculaire soit étanche, sans quoi de l'air peut s'intoduire dans l'OG et emboliser dans le circuit artériel (embolie paradoxale). Il est donc important d'explorer le septum interauriculaire à l'ETO et, si nécessaire, de pratiquer un test aux microbulles (Figure 7.36). Un FOP est une découverte courante dans la population normale; son incidence varie de 5-10% à l'échocardiographie bidimensionnelle, à 24% lors d'autopsie ou 27% à l'inspection directe peropératoire, où il se présente comme une fente d’environ 20 mm [9,74,313]. La découverte d'une CIA inconnue est plus rare. La veine cave supérieure gauche (VCSG) se jette dans la grande majorité des cas dans le sinus coronaire; ce dernier est dilaté à cause de l'augmentation de débit. En l'absence d'insuffisance ventriculaire droite et d'insuffisance tricuspidienne majeure, la découverte d'une dilatation du sinus coronaire doit faire suspecter le diagnostic (Figure 7.37). La veine cave supérieure droite peut être présente ou absente. La présence d'une VCSG pose deux problèmes au chirurgien.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 96

La cardioplégie rétrograde est impossible parce que le perfusat fuit dans la circulation

systémique sans perfuser le cœur ; Le débit de la VCSG alimente l'OD en permanence lors de canulations caves séparées et met

l’OD sous tension. La VCSG pose aussi deux problèmes à l'anesthésiste: le risque de thrombose du sinus coronaire contre-indique l'utilisation d'une PVC à long terme, et l'introduction de Swan-Ganz est impossible par voie jugulaire ou sous-clavière gauches. Figure 7.36 : Foramen ovale perméable (FOP). A : flux gauche-droit à travers le FOP tel qu'on le voit au Dopper couleur. B : Test aux microbulles. L'injection par voie centrale de 10 ml NaCl 0.9% au préalablement agité pour créer des microbulles par cavitation remplit toute l'OD et met en évidence le passage de bulles dans l'OG. La première image démontre le passage G-D, alors que la seconde illustre le passage D-G, dans la mesure où il existe. Chacune des deux suffit à poser le diagnostic de FOP. Figure 7.37 : Veine cave supérieure gauche (VCSG). A : représentation schématique de la dilatation du sinus coronaire (SC) (≥ 1.5 cm) en vue 4-cavités. B : injection de microbulles dans une veine du membre supérieur gauche ; elles apparaissent dans le sinus coronaire (flèche) avant d’arriver dans l’OD.

Passage dans l'OG

Microbulles dans l'OD

B A

A

© Chassot 2012

OG OD

VD VG

SC

SC

OD

VD

B

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 97

Insuffisance aortique Même sans traduction clinique, une insuffisance aortique (IA) est potentiellement dangereuse dans le contexte de la CEC. En effet, dès que la fréquence cardiaque se ralentit pendant le refroidissement, la valve aortique fuit dans le VG sous la pression que génère la pompe et le dilate. D'autre part, la cardioplégie administrée par la racine de l'aorte après le clampage de celle-ci s'écoule en bonne partie dans le ventricule par la fuite aortique ; le VG est mis sous tension et se dilate puisqu’il ne se contracte plus et ne peut plus éjecter ce qu’il reçoit. Le taux de découverte fortuite d'IA par l'ETO avant la CEC est de 5% (Figure 7.38) [74]. Il est capital de surveiller le VG en début de CEC et pendant la cardioplégie pour signaler toute dilatation à l'opérateur qui peut interrompre la perfusion, comprimer le ventricule à la main, ou le drainer. On porte la même attention au VG lorsqu'on réalise une opération en fibrillation ventriculaire continue. Figure 7.38 : Insuffisance aortique (IA). A : vue long-axe de la racine de l’aorte ; le jet couleur dans la chambre de chasse du VG en diastole indique la présence d’une IA. B : en cours de cardioplégie, la valve aortique fuit en permanence dans le VG, comme en témoigne le flux bleu (flèche) qui s’écoule dans la chambre de chasse gauche (vue 4-cavités). Thrombus intracavitaire La présence d'un thrombus est suspectée dans l'appendice auriculaire gauche en cas de stase ou de fibrillation auriculaire (sténose mitrale, insuffisance ventriculaire gauche) lorsqu'on remarque du contraste spontané dans l'OG à l'examen de routine (Figure 7.39). En cas d'akinésie apicale et de dysfonction gauche (FE < 0.35), on peut trouver un thrombus à l'apex du VG (Figure 7.40). Ces informations sont capitales pour le chirurgien, qui doit éviter de déloger ces thrombi en manipulant le cœur, vu le risque d’embolisation. La décision d'explorer la cavité concernée pour en extraire le thrombus est fonction de sa mobilité; elle le fruit d'un consilium entre l'anesthésiste, le chirurgien et éventuellement le cardiologue. On peut aussi découvrir un thrombus dans une cavité gauche en fin d'opération, lorsque l'anticoagulation peropératoire a été insuffisante (Figure 7.41). Dans ce cas, la mobilité et le risque embolique commandent un retour immédiat en CEC pour extraire le thrombus. L'invagination accidentelle de l'appendice auriculaire gauche au cours de la chirurgie peut ressembler à un thrombus dans l'OG. Débullage en fin de CEC L'air s'introduit dans les cavités gauches lors de cardiotomie et s'accumule dans les endroits qui se trouvent au zénith des chambres cardiaques en décubitus dorsal: la veine pulmonaire supérieure droite,

OG

Ao

A OG

VG VD

B

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 98

le haut du septum interauriculaire dans l'OG, l'angle mitro-aortique, le septum antéro-apical dans le VG, et le sinus de Valsalva droit (Figure 7.42). Le 75% des malades opérés pour des valvulopathies gauches présente des embolies gazeuses [356]. Mais l'air peut également s'introduire lors des anastomoses proximales des pontages aorto-coronariens. Les bulles d'air sont très échogènes et apparaissent sous deux formes différentes [74].

Miliaire de microbulles, minuscules et peu contrastées ; elles sont sans incidence sur le status neurologique postopératoire.

Petites navettes brillantes qui dansent dans les chambres cardiaques et s’accumulent en larges nappes dans les endroits en surplomb. Leur identification et leur localisation à l'ETO permettent une vidange plus adéquate, et, de ce fait, peuvent améliorer le pronostic neurologique des patients.

Figure 7.39 : Stase et thrombus dans l'appendice auriculaire gauche (AAG). A: contraste spontané dans l'AAG. B: Petit thrombus découvert fortuitement dans l'AAG chez un malade dont la prothèse valvulaire mitrale (valve mécanique, RVM) est dysfonctionnelle. Figure 7.40 : Thrombus pariétal dans le VG. A : thombus apical dans un cas d'akinésie apicale 10 jours après infarctus ; ce thrombus est faiblement implanté et peut facilement emboliser. B : thrombus mural laminaire recouvrant une zone akinétique antéro-septale. Ce type de thrombus est solidement ancré dans les trabéculations ; il est préférable de le laisser en place, car son extraction va le fragmenter et augmenter les risques emboliques.

A

OG

AAG VG

B

AAG

RVM

OG

VG

A B

OG

VG

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 99

Figure 7.41 : Thrombus dans l'OG en fin de CEC (découverte fortuite). A: le thrombus flotte vers l'abouchement de la veine pulmonaire supérieure gauche. B: le thrombus flotte dans le VG. Un retour immédiat en CEC est impératif pour le récupérer avant qu'il n'embolise en périphérie. Sa taille en fait un bon candidat pour obstruer une carotide. De nombreuses bulles flottent dans l'OG et le VG. Figure 7.42 : Accumulation d’air dans le cœur gauche en fin de CEC. A : l’air provient de la cardiotomie gauche et des veines pulmonaires droite (VPD) et gauches (VPG) ; il a tendance à s’accumuler aux endroits les plus surélevés : angle entre le septum interauriculaire et le toit de l’OG, angle mitro-aortique, septum interventriculaire antéro-apical (en position de Trendelenburg). B : vue 4 cavités avec d’innonbrables bulles dans l’OG et le VG, ainsi que deux zones d’accumulation contre le septum interauriculaire et dans les trabéculations du septum interventriculaire antéro-apical. C : embolisation d’ait dans le muscle papillaire postérieur (territoire de la coronaire droite).

OG OG

VG VG

A B

© Chassot 2012

Aorte

Ant Post

OG

VPD VPG

VG

A B

C

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Noyer la cavité péricardique sous un flux constant de CO2 (1-2 L/min) permet de remplacer l’air par un gaz plus soluble dans le sang et diminue ainsi le risque de bulles. Sevrage de la pompe Enfin, l'ETO est un outil indispensable pour élucider les problèmes qui se posent en sortant de CEC: hypovolémie, dysfonction du VG ou du VD, ischémie aiguë d'un territoire coronarien, dysfonction d'une valve prosthétique, problème sur une correction chirurgicale, etc.

ETO pendant la CEC

L’échocardiographie transoesophagienne (ETO) a plusieurs points d’impact en rapport avec la CEC : - Identification de risques (athérome aortique, insuffisance aortique, thrombus intracardiaque) - Identification de lésions iatrogènes (dissection aortique, CIV) - Anomalie anatomique (FOP, CIA, veine cave supérieur gauche) - Positionnement de canules (canule veineuse cave, cathéter dans le sinus coronaire, CPIA) - Débullage de l’air - Evaluation de la volémie et de la fonction ventriculaire avant la mise en charge - Evaluation de la contractilité segmentaire (réfection de pontage)

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 101

Sevrage de la CEC La sortie de CEC est le deuxième temps critique où surviennent la majorité des incidents et les problèmes. Comme cet évènement est précédé d'une assez longue période calme, l'équipe d'anesthésie dispose de tout le temps nécessaire pour s'y préparer (Tableau 7.7). Après les manipulations, l'ischémie, la cardioplégie et le réchauffement, la cellule myocardique est fragilisée. La reperfusion myocardique s'accompagne d'un risque de surcharge calcique intracellulaire, d'une libération de radicaux libres et d'une intoxication par les médiateurs inflammatoires. Comme l'utilisation de l'O2 par la cellule est altérée pendant 15-20 minutes après le déclampage, il est important d'offrir un temps de récupération adéquat avant la mise en charge, notamment en évitant l'administration trop précoce d'amines à effet béta. A priori, il faut considérer que le coeur est en état de dysfonction systolique et diastolique momentanée lorsqu'on sort de pompe.

Tableau 7.7 : Contrôles avant la mise en charge Patient

Patient uniformément réchauffé: T° rectale ≥ 35°, T° oesophagienne ≥ 36° Ventilation efficace, poumons réexpandus (manœuvres de capacité vitale et contrôle visuel dans le champ opératoire) SpO2 et SaO2 98-100%, SvO2 ≥ 70%, ScO2 ≥ 70%, couleur du malade et du champ opératoire Interruption momentanée du gaz halogéné en cas de dysfonction ventriculaire Rythme sinusal à 70-90 batt/min Fils de pace-maker ventriculaires et auriculaires en place et fonctionnels PAM > 60 mmHg et < 120 mmHg PAP: valeurs normales ou correspondant à l'HTAP préopératoire Pas d'hémorragie active ETO: débullage efficace; fonction ventriculaire, volume des cavités et éventuelle insuffisance valvulaire correspondant aux images attendues en fonction de la pathologie

Médicaments Catécholamine(s) choisie(s) administrée(s) sur voie centrale (ou OD de la Swan-Ganz) Sommeil assuré (midazolam dans la pompe, propofol en perfusion, halogéné à Fi identique sur l’oxygénateur et sur le respirateur) Analgésie assurée (fentanyl) Poches de sang à disposition Si nécessaire: PFC, plaquettes, facteurs de coagulation (ROTEM™)

Machine d'anesthésie Ventilation: volume courant normal, pressions de ventilation normales Ventilation à 100% O2 Pas d'agents volatils halogénés si dysfonction ventriculaire Reprise de l’halogéné en cas de revascularisation coronarienne lorsque la fonction du VG le permet

Moniteur Cathéter de Swan-Ganz: courbe de pression artérielle pulmonaire (ballonnet dégonflé); retirer le cathéter jusqu'à obtention de la PAP si présence d'une courbe de pression bloquée Zéro des capteurs vérifiés Alarmes fonctionnelles Volume sonore rétabli

Purge des cavités gauches Avant que le coeur ne reprenne une activité mécanique de perfusion, il est capital de débarrasser les cavités gauches (veines pulmonaires, oreillette gauche, ventricule gauche, racine de l'aorte) des bulles d'air qui ont pu s'y accumuler lors de l'ouverture de ces cavités ou lors des phénomènes de cavitation et de variations thermiques. L'air va se loger dans les endroits en surplomb: veines pulmonaires, surtout droites, haut du septum interauriculaire, angle mitro-aortique dans l’OG, partie apicale du septum

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interventriculaire (surtout lors de Trendelenburg), sinus de Valsalva droit. L'échocardiographie transoesophagienne est très utile pour localiser les poches d'air résiduelles et apprécier leur importance (Figure 7.42, page 99). L'aspiration dans la racine aortique (canule de cardioplégie) est maintenue en place jusqu'après la mise en charge. On dispose de plusieurs techniques pour "débuller" les cavités cardiaques.

Position de Trendelenburg accentuée (prévention d’embols cérébraux) ; Roulis à droite (favorise le passage OG-VG), roulis à gauche (favorise le passage VG-aorte) ; Aspiration continue (100-500 mL/min) par la canule de cardioplégie dans la racine de l’aorte ; Hyperinflation pulmonaire ; Vidange par ponction directe de la cavité à l’aiguille ; Secousses et manipulations du cœur ; Stimulation inotrope et pression de perfusion élevée (≥ 80 mmHg) ; Retour en CEC.

L’air qui se bloque dans le siphon des veines pulmonaires n’est chassé que lorsque le flux veineux pulmonaire devient suffisant, c’est-à-dire au cours de la mise en charge. L'embolie gazeuse systémique se manifeste surtout par une ischémie (susdécalage ST) dans le territoire de la coronaire droite ou des pontages veineux réimplantés dans l'aorte, parce que ces vaisseaux s'abouchent à la face antérieure de l'aorte ascendante chez un malade en décubitus dorsal. Si le débullage est insuffisant, des poches d’aire peuvent emboliser au moment de la mise au lit du patient à cause des mouvements du corps dans plusieurs directions. Préparation à la mise en charge Un certain nombre de conditions sont requises pour sevrer le patient de la CEC (Figure 7.43 et Tableau 7.7).

Patient uniformément réchauffé; la T° rectale doit être ≥ 35°. Poumons ré-expandus par une manoeuvre de capacité vitale (PEEP manuel à 20 cm H2O

pendant 20 secondes) [217]. Ventilation efficace; FiO2 1.0 jusqu'à la première gazométrie. La ventilation est reprise lorsque

le coeur est reperfusé, c'est-à-dire après déclampage de l'aorte et la reprise d'un rythme cardiaque spontané, ou après la revascularisation par les pontages aorto-coronariens. La ventilation doit parfois être interrompue parce que les poumons envahissent le champ opératoire et gènent le chirurgien.

Au début de la reventilation, la pression dans les voies aériennes peut être momentanément élevée et la bronchoconstriction conduire à un air-trapping. Ceci est lié au collapsus pulmonaire, aux atélectasies et au relargage de substances actives. Il est important de reventiler assez tôt pour que ce phénomène se soit dissipé au moment de la mise en charge.

Sommeil assuré par un agent intraveineux et arrêt des halogénés si la fonction ventriculaire est réduite. Même une faible concentration d'halogéné peut avoir des effets néfastes au moment critique de la mise en charge. L'halogéné utilisé en CEC devrait être arrêté 10-15 minutes avant la mise en charge pour être certain que son effet vasodilatateur a disparu [25].

L’administration de 10 mg de morphine en fin de CEC assure une analgésie pour le début de la phase postopératoire et minimise les risques de dépression respiratoire par rapport à une injection plus proche du réveil.

Rythme sinusal à 75-90 batt/min; cardioversion (10 joules) en cas de fibrillation auriculaire. Fils de pace-maker ventriculaires en place et fonctionnels (pace-maker testé). PAM > 50 mmHg et < 120 mmHg; dans le cas contraire, régler d'abord le problème

hémodynamique. En utilisant la formule du calcul des résistances (PAM – PVC) • 80 / DC, on peut facilement

évaluer si le malade est vasoconstricté ou vasoplégique, puisque la PVC est la pression

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 103

ambiante (PVC = 0) et le débit cardiaque est celui de la pompe (DP = débit de pompe). Donc : RAS = (PAM • 80) / DP.

Catécholamine(s) choisie(s) administrée(s) sur voie centrale (ou OD de la Swan-Ganz) 5-10 minutes avant la mise en charge.

Courbe d'AP sur le tracé du cathéter de Swan-Ganz; il est impératif de ne jamais gonfler le ballonnet du cathéter sans avoir une courbe claire d’artère pulmonaire. Le gonfler alors que l'extrémité du cathéter est en position bloquée provoquerait une rupture artérielle et une hémorragie pulmonaire massive chez un patient encore hépariné.

Volémie adéquate (volume dans le réservoir de CEC). Vidange adéquate de l'air qui a pu s'introduire dans le coeur gauche. Contrôle de la kaliémie; un bolus de Ca2+ contrecarre les effets de l'hyperkaliémie, mais peut

induire un spasme artériel, notamment du greffon mammaire. Contrôle de l'équilibre acido-basique et du taux d'Hb; traiter selon besoin avant la mise en

charge.

Contrôles avant la mise en charge

Patient normotherme (T° rectale ≥ 35°, T° oeso ≥ 36°) et ventilé (FiO2 1.0), poumons ré-expandus Sommeil, analgésie et curarisation assurés Activité cardiaque spontanée, rythme sinusal ou électro-entraîné ECG satisfaisant Cavités gauches débullées ETO : fonction ventriculaire, insuffisance mitrale/tricuspide, contractilité segmentaire, volémie Pace-maker (fils ventriculaires) en place et testé Agent(s) inotrope(s) choisi(s) : perfusion en marche Retrait du cathéter de Swan-Ganz pour obtenir une courbe d’AP avant de gonfler le ballonnet PAM, PAP, RAS, SvO2, Ht, lactate, électrolytes, glycémie : dans les limites acceptables selon le cas Zéro des lignes de pression vérifié, alarmes rétablies sur le moniteur

Figure 7.43 ; Enchaînement des évènements et des actions anesthésiques conduisant à la mise en charge. Les éléments de monitorage sont cadrés en jaune et les évènements chirurgicaux en bleu.

ECG

Mise en

charge

T°rect > 35°

Déclampage de l’aorte

Défibrillation

Reventilation

Catécholamines

Pacemaker

CEC: assistance,

réchauffement

Vidange de l’air

Anastomoses proximales Chirurgie du coeur droit

Artère: dP/dt, pression ETO: FE, dimension VG, IM,

ETO + vision: taille VD, IT Swan/PiCCO: VS, DC

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 104

Mise en charge Le perfusionniste occlut progressivement la lumière du tuyau de retour veineux et diminue parallèlement le débit de la pompe par paliers. Plus la fonction myocardique est déficiente, plus la mise en charge doit être lente et procéder par étapes, en assistant le coeur pendant 5-10 minutes à chaque palier de 0.5-1 L/min. La forme de la courbe artérielle renseigne sur l'augmentation progressive de la prise en charge du débit par le coeur (Figure 7.44); elle renseigne également sur la fonction inotrope (dP/dt) et la volémie (surface sous la courbe) (Figure 7.45). La pression mesurée au cathéter artériel radial peut être très inférieure à la pression artérielle aortique à cause de l'intense vasoconstriction secondaire à l'hypothermie et à la dépulsation. La valeur affichée de la radiale, qui est une artère musculaire, peut être 40% plus basse que celle de l'artère fémorale, qui est une artère élastique (Figure 7.46). Le cathéter fémoral donne des renseignements beaucoup plus fiables dans ces conditions hémodynamiques particulières. L'ETO est évidemment la voie royale pour l'évaluation de la fonction ventriculaire. Figure 7.45 : Illustrations schématiques de la courbe de pression artérielle dans différentes circonstances. Le trait bleu est la pente ascentionnelle de la courbe de pression, qui est proportionnelle au dP/dt ventriculaire. En hypovolémie, la courbe est étroite et pointue ; la surface sous la courbe, qui est proportionnelle au volume systolique, est très faible. En cas de dysfonctioin ventriculaire, la pente ascentionnelle est faible, la courbe est arrondie et aplatie. Ces données analogiques sont indépendantes de la valeur de pression mesurée. Il va sans dire que ces morphologies ne sont visibles sur le scope que si l'amplification est correcte.

Plein débit de CEC Activité systolique spontanée Frein sur le retour veineux Retour OD ↑ Clampage du retour veineux Débit de CEC ↓↓ DC > D pompe

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Figure 7.44 : Illustration schématique de la courbe artérielle lors de la mise en charge. Au début, la débit est assuré par la CEC, le coeur ne fait apparaître que quelques augmentations systoliques. Lorsque le retour veineux vers la machine est freiné, la précharge du ventricule augmente, ce qui lui permet de commencer à éjecter. Au fur et à mesure que le débit de la pompe diminue, le coeur assure une part grandissante du débit cardiaque, jusqu'à l'arrêt complet de la pompe de CEC. DC: débit cardiaque.

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Situation normale Hypovolémie Insuffisance ventriculaire

dP/dt dP/dt

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 105

Figure 7.46 : Passage d'un enregistrement de la courbe artérielle dans l'aorte ascendante à celui dans l'artère radiale. Une chute de la valeur de > 40% s'explique par l'intense vasoconstriction artérielle périphérique après hypothermie profonde. L'artère fémorale, qui est une artère élastique au même titre que l'aorte, n'est pas influencée par ce phénomène propre aux artères musculaires. Echelle en mmHg. Il n'est pas rare que le segment ST présente des élévations soudaines. Elles relèvent de plusieurs étiologies et impliquent différents traitements (Figure 7.47):

Embolies: bulles d'air (altérations transitoires), fragments athéromateux (particulièrement en cas de thrombendarterectomie). Augmenter la pression de perfusion coronarienne et l'effet inotrope de manière à fragmenter et éliminer l'air; les embolies athéromateuses ont de fortes chances d'être définitives.

Problème technique avec un greffon, revascularisation incomplète; il faut retourner en CEC et refaire ou compléter les pontages; l’ETO est essentielle pour objectiver les altérations de la cinétique segmentaire.

Infarcissement, le plus souvent secondaire à une thrombendarectomie. Spasme artériel (artère mammaire sur l'IVA); le traitement est une perfusion de diltiazem.

Aorte ascendante Artère radiale 120 80 40

A B

C

Figure 7.47 : Modifications du segment ST lors de la sortie de CEC (dérivations DII et V5). A : sus-décalage du segment ST secondaire à une embolie gazeuse coronarienne. B et C : normalisation progressive du segment ST au fur et à mesure de la fragmentation et de l'élimination des bulles.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 106

Un sous-décalage ST indique plutôt une souffrance sous-endocardique; il commande l'augmentation de la pression de perfusion (nor-adrénaline) et l'administration de dérivés nitrés.

Mise en charge

Frein progressif au retour veineux vers le réservoir de CEC et diminution simultanée du débit de pompe Plus la fonction ventriculaire est affaiblie, plus la mise en charge doit être lente et procéder par paliers. Soutien en assistance autant que nécessaire Surveillance particulière : PAM, VS (Swan-Ganz, PiCCO), PAP, SpO2, SvO2, ETO Période post-CEC

Quelle que soit sa valeur initiale, la fonction ventriculaire systolo-diastolique est anormale en sortant de CEC. Dans cette situation fragile, le but est de maintenir un équilibre entre quatre éléments.

La consommation myocardique en oxygène ; Les capacités fonctionnelles du cœur ; Le débit cardiaque et la pression artérielle systémique et pulmonaire ; Les besoins de l’organisme.

Dans le contexte de la dysfonction diastolique, la fréquence cardiaque ne doit pas être inférieure à 65 battements par minute; sa valeur est un bon marqueur de l'imprégnation en béta-bloqueurs versus en béta-stimulants. Les besoins en agents inotropes se modifient constamment au cours de la période post-CEC. Aucune "vitesse de croisière" ne peut être envisagée ; il faut au contraire ré-évaluer les besoins en permanence. Le Tableau 7.8 est un exemple d’algorithme pour guider l’anesthésiste dans cette situation instable. Mais il existe presque autant de protocoles différents que de centres de chirurgie cardiaque ! Tous sont performants lorsqu’ils sont correctement mis en pratique. La meilleure routine est celle avec laquelle on est le plus à l’aise (voir Insuffisance ventriculaire page 113).

La dopamine est très pratique pour les cas simples qui ont besoin d’un appoint momentané ; peu onéreuse, son effet béta est accompagné d’une stimulation alpha pratique pour le maintien des RAS. Dosage maximal recommandé : 5 mcg/kg/min.

La combinaison dobutamine + noradrénaline permet de doser de manière indépendante les effets alpha et beta. C’est habituellement le premier choix en cas de dysfonction ventriculaire importante.

L’adrénaline est indiquée chez les malades présentant une insuffisance ventriculaire chronique (perte de récepteurs béta). Il est judicieux de maintenir les doses minimales nécessaires, et de contrôler fréquemment la glycémie et l'équilibre acido-basique.

Si la défaillance du VG persiste ou si elle est accompagnée d’une défaillance droite et d’une hypertension pulmonaire, la préférence est une association d’adrénaline et de milrinone.

Dans les cas réfractaires, le levosimendan peut être indiqué. Même pour quelques heures, la contrepulsion intra-aortique (CPIA) est une assistance rapide

et facile à installer en salle d’opération ; elle est particulièrement indiquée après revascularisation coronarienne ou en présence d’une dilatation ventriculaire et d’une insuffisance mitrale.

Les catécholamines sont administrées de manière impérative par une voie centrale (cathéter 2-lumières ou voie auriculaire droite de la Swan-Ganz); une perfusion d'entraînement sur pompe-goutte rince en permanence cette voie de manière à supprimer l’effet "espace-mort" de la tubulure (débit 30-60

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 107

mL/heure). Une défaillance cardiaque en sortant de pompe demande une assistance temporaire par la machine de CEC et une mise en charge très progressive par paliers. Pendant les premières 20 minutes suivant la CEC, les modifications rapides de température dans l'artère pulmonaire conduisent à une sous-estimation substantielle du débit cardiaque par thermodilution [26]. Des épisodes prolongés de vasoplégie postopératoire sont liés aux nombreux mécanismes mis en jeu par la réaction inflammatoire diffuse et par l’endotoxémie. L'adéquation de l'anesthésie est très difficile à évaluer si le malade est curarisé; des mouvements spontanés sont le seul critère sûr d'éveil dans cette période hémodynamiquement instable. Il est donc préférable de ne curariser les patients que lorsque cela est nécessaire: frissons (augmentation de la consommation d'O2), mouvements, respiration spontanée, choc cardiogène avec désaturaion veineuse

Perfusion adrénaline + perfusion milrinone Dobu / Nor selon besoin Maintenir adrénaline au minimum nécessaire Surveiller et corriger acidose/glycémie

Si insuffisant: Contrepulsion intra-aortique (CPIA) Retour en CEC

Mise en charge sans amines A reconsidérer en permanence selon l’évolution (normalement la fonction ventriculaire baisse pendant les 5-6 heures post-CEC)

Fréquence > 70 et < 100/min PAM > 80 mmHg FE > 0.6 ECG ok ETO: anat.+ fonction normales

Dopamine 3-5 mcg/kg/min

Si insuffisant: remplacement par dobutamine → 10 mcg/kg/min

Réponse positive: Adrénaline 0.03 – 0.5 mcg/kg/min

FIN DE LA CEC T°rectale > 35° Ventilation ok

Activité cardiaque spontanée

Bloc AV Fréquence < 60/min

Pace-maker Isuprel 10 mcg bolus

PAM < 80 mmHg Fréquence inadéquate FE < 0.6 ETO: anat. et/ou fonction anormales Dysfonction systolique ou diastolique Diurèse < 1 mL/kg/h Inadéquation hémodynamique

Si RAS basses ou vasoplégie: - Néosynéphrine 100 mcg bolus (max: 1 mg) - Noradrénaline 0.1-1.5 mcg/kg/min - Si néc : Vasopressine 1-4 U/h

Insuffisance hémodynamique sévère Insuffisance cardiaque congestive préopératoire Dysfonction / dilatation du VG Valvulopathie sévère Acidose métabolique Dopa/dobu insuffisants

Adrénaline 20-50 mcg en bolus

Si RAP élevées ou HTAP: - Dobutamine → 10 mcg/min - Milrinone 50 mcg/kg; 1-2 mg/h - Noradrénaline 0.1-0.5 mcg/kg/min - NO 4-20 ppm

Tableau 7.8 Exemple d’algorithme d'utilisation des catécholamines après CEC

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 108

centrale. Tout mouvement doit d'abord commander un approfondissement de l'anesthésie. La première stimulation douloureuse est le relâchement de l'écarteur sternal; l'antalgie doit être assurée par l'agent choisi pour l'anesthésie (fentanyl, sufentanil, etc). L'adéquation de la ventilation est contrôlée par des gazométries artérielles. Si les échanges gazeux sont insatisfaisants, il faut procéder à quelques mesures d'amélioration.

Contrôler la bilatéralité de la ventilation (visible par la sternotomie) ; Aspirer les sécrétions ; Gonfler manuellement les poumons avec une ou plusieurs manoeuvres de capacité vitale

(insufflations de 20 secondes à 20 cm H2O) ; Ventiler avec 5-8 cm H2O de PEEP (peut géner l’opérateur) ; Un diurétique est indiqué (Lasix 5-10 mg) si le bilan hydrique est très positif.

Les gazométries fournissent également des données sur l'équilibre acido-basique et hydro-électrolytique et leur éventuelle correction. L'acidose métabolique cause une hypertension pulmonaire et une dépression myocardique toutes deux délétères au moment critique de la mise en charge. L'hyperkaliémie est fréquente à cause de la cardioplégie; il est nécessaire de la traiter en cas d'arythmies ou de modifications à l'ECG par l’administration de Ca2+, ou par une perfusion d'insuline et de glucose. Si elle est asymptomatique, la reprise de la diurèse apporte la correction. Une élévation du taux de lactate peut avoir plusieurs origines.

Bas débit cardiaque et acidose métabolique ; Dysfonction hépatique liée à la CEC ; Hypoperfusion hépato-splanchnique ; Ischémie digestive ; Utilisation de Lactasol® pour le remplissage liquidien.

L'apport d'O2 doit être correctement assuré en fonction des besoins (réchauffement, frissons, catécholamines) et du transport (dysfonction cardiaque, échanges gazeux pulmonaires). Les critères de transfusion varient donc selon l'état du patient. Pour autant que le malade soit normovolémique, on peut émettre les recommandations suivantes (voir Chapitre 28 Recommandations) [115].

En cas de bonne fonction myocardique, de revascularisation coronarienne complète et en l'absence de valvulopathie sévère ou d'hémorragie, le seuil de transfusion est de 70-80 g/L;

Chez les personnes âgées ou débilitées, en cas de revascularisation coronarienne incomplète, de cardiopathie valvulaire sévère ou d'insuffisance ventriculaire, le seuil transfusionnel est entre 80-90 g/L;

Chez les patients qui ont un bas débit pulmonaire (shunt cyanogène, HTAP sévère), le seuil est relevé à 100 g/L.

Le but de la transfusion érythrocytaire est d’améliorer le DO2 tissulaire, non de corriger le taux d’Hb. Les recommandations officielles spécifient que l’indication à la transfusion ne devrait pas se poser sur la valeur de l’Hb, mais sur les critères d’une oxygénation tissulaire insuffisante et d’un déséquilibre hémodynamique [337].

SaO2 < 90%; ScO2 diminuée de > 20% (sur les 2 hémisphères cérébraux); SvO2 < 50%; Coefficient d’extraction d’O2 > 50%; Sous-décalage ST, bloc de conduction intermittent (ECG), anomalies de la contraction

segmentaire (ETO); Tachycardie et hypotension (le plus souvent marqueurs d’hypovolémie; critères peu fiables

lors de la mise en charge); Acidose métabolique, faibles réserves cardiopulmonaires;

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 109

Lors d’hémorragie aiguë, le critère principal est la stabilité hémodynamique; le taux d’Hb devient plus utile dans cette circonstance.

Le volume que le perfusionniste récupère dans les circuits après la CEC est un perfusat contenant de l'héparine et du potassium, dont l'hématocrite est le même que celui de la CEC, donc inférieur à 30%. Il représente un bon volume de remplissage, mais ne permet pas de compenser une anémie aiguë. Pour le concentrer, il est pratique de le passer dans un système de lavage (CellSaver), mais les plaquettes et les facteurs de coagulation sont en grande partie perdus. L’hémofiltration modifiée (voir Hémofiltration) conserve ces éléments. Si l'intervention se prolonge, il est recommandé d'administrer une nouvelle dose d'antibiotique 6 heures après celle donnée au début de l'opération.

Période post-CEC

C’est une phase d’équilibre précaire entre les besoins de l’organisme et les performances myocardiques, sensiblement diminuées par la chirurgie, la CEC, la cardioplégie, l’hypothermie et l’œdème interstitiel (dysfonction systolique et diastolique). A l’exception du RVA pour sténose aortique serrée ou de la cure de CIA/CIV simple, la situation est plus difficile après la CEC qu’avant pour les ventricules. La fonction ventriculaire diminue progressivement pendant 5 heures après la CEC avant de se normaliser vers 24 heures. Les besoins en agent inotrope sont variables et très évolutifs. Il faut donc adopter une attitude proactive et administrer un soutien inotrope assez tôt pour éviter la défaillance ventriculaire. Conrôler les échanges gazeux, les électrolytes (hyperkalémie), la glycémie, l’équilibre acido-basique. Seuils de transfusion (sauf en cas d’hémorragie aiguë) : - Cas standard Hb 70-80 g/L - Dysfonction, ischémie, malade âgé Hb 80-90 g/L - Bas débit pulmonaire (cyanose, HTAP) Hb 100 g/L Arythmies et entraînement électro-systolique Au moment de la mise en charge, le rythme cardiaque est très souvent instable pour plusieurs raisons (voir Chapitre 20 Types d’arythmies) [78].

L’hyperkaliémie résiduelle de la cardioplégie est la cause de blocs de conduction variables ; L’inhomogénéité du retour à une conduction normale après cardioplégie et hypothermie est le

terreau pour des arythmies de réentrée (FA, TV) ; L’ischémie aiguë (embolie coronarienne d’air ou de fragments athéromateux) entraîne

diverses formes d’arythmies ventriculaires ; Après revascularisation coronarienne adéquate, les arythmies de reperfusion peuvent être

particulièrement rebelles au traitement ; Les lésions chirurgicales du tissu de conduction conduisent à des blocs momentanés ou

permanents ; leur incidence est de 1% après fermeture de CIV et jusqu’à 10% après remplacement de la valve aortique [80] ;

La stimulation béta par des agents inotropes est arythmogène. Ces conditions rendent souvent nécessaire un entraînement électro-systolique. Comme les arythmies peuvent se déclencher de manière soudaine à n’importe quel moment dans le postopératoire, il est de routine de placer des électrodes épicardiques connectées à un pace-maker après toute opération

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 110

cardiaque. Les électrodes sont fixées sur l’épicarde en évitant les amas graisseux. Elles sont montées selon deux possibilités.

Système unipolaire : l’anode (pôle négatif) est fixée à l’épicarde et la cathode dans le tissu sous-cutané ;

Système bipolaire : anode et cathode sont placées très proches sur l’épicarde ; ce système demande moins d’énergie de stimulation ; il est moins sensible aux interférences électriques.

L’électrode épicardique est implantée sur la chambre de chasse droite (CCVD) parce que le résultat hémodynamique est supérieur par rapport au placement apical : amélioration de la FE, normalisation de l’axe du QRS, préservation du mouvement de torsion du VG [94]. La seule exception est la cardiomyopathie hypertrophique obstructive (CMO) où la stimulation de la chambre de chasse peut entraîner une obstruction dynamique en systole. En cas de dilatation ventriculaire et de retard de conduction, la mise en place de deux électrodes de stimulation, une sur la CCVD et une en position postéro-basale sur le VG, permet une resynchronisation des deux ventricules, mais les pace-makers externes provisoires n’ont pas les capacités régulatrices des boîtiers implantés (voir Chapitre 20 Resynchronisation). Réglage du pace-maker Les réglages du pace-maker sont variables de cas en cas, mais oscillent en général autour des mêmes valeurs de base (voir Chapitre 20 Réglages) (Tableau 7.9) [80].

Tableau 7.9 : Modes d’électro-entraînement les plus fréquents

AAI Entraînement auriculaire sur demande, inhibé par la détection d’une activité auriculaire Indications : bradycardie sinusale avec conduction AV intacte VVI Entraînement ventriculaire sur demande, inhibé par la détection d’une activité ventriculaire Indications : épisodes intermittents de bradycardie, synchronisation AV non maintenue,

FA chronique avec bradycardie VDD Entraînement ventriculaire, détection auriculaire et ventriculaire ; stimule de ventricule

après un délai préfixé, en synchronisation avec l’activité auriculaire Indications : bradycardie par bloc AV avec fonction sinusale conservée ; si bradycardie

sinusale, correspond à VVI DDI Entraînement et détection auriculaire et ventriculaire ; la seule réponse à une

détection auriculaire ou ventriculaire est l’inhibition ; évite une entraînement trop rapide du ventricule en cas de tachycardie auriculaire

Indications : dysrythmie auriculaire ; synchronisation AV seulement lorsque le pace-maker entraîne l’oreillette

DDD Entraînement et détection auriculaire et ventriculaire ; stimule le ventricule après un délai préfixé, en synchronisation avec l’activité auriculaire

Indications : tout type de bradycardie, synchronisation AV assurée DVI Inhibition de la stimulation ventriculaire en cas d’activité ventriculaire, pas de sensing

auriculaire Indications : interruption d’une tachycardie induite par le pace-maker (réentrée AV)

AOO Entraînement auriculaire asynchrone à fréquence fixe ; n’est utilisé que lors de pacing temporaire avec une conduction AV normale

VOO Entraînement ventriculaire asynchrone à fréquence fixe ; n’est utilisé que lors de pacing temporaire

DOO Entraînements auriculaire et ventriculaire asynchrones à fréquence fixe ; le délai AV est fixe risque de R-sur-T comme avec tous les modes asynchrones

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 111

Fréquence : 80 batt/min ; en cas de rythme spontané, 10 batt/min au dessus de la fréquence intrinsèque ;

Intervalle AV : 150 ms ; 100-225 ms selon la meilleure augmentation de précharge par la contraction auriculaire ;

Energie d’activation (output) au double du seuil de stimulation observé ; max : 15 mA ; Sensibilité (sensing) à la moitié du seuil, ou à 2 mV ; Modes de stimulation habituels des pace-makers externes temporaires (Tableau 7.9) :

o DOO (entraînements auriculaire et ventriculaire asynchrones à fréquence fixe) ; o VOO (entraînement ventriculaire asynchrone à fréquence fixe) ; o DVI (inhibition de la stimulation ventriculaire en cas d’activité ventriculaire, pas de

sensing auriculaire) ; o VVI (entraînement ventriculaire sur demande, inhibé par la détection d’une activité

ventriculaire) ; o DDD (entraînement et détection auriculaire et ventriculaire ; stimule le ventricule

après un délai préfixé, en synchronisation avec l’activité auriculaire). Le rythme sinusal est toujours préférable à un rythme ventriculaire, car la contraction auriculaire augmente le volume systolique de 20-45% (Figure 7.48). En mesurant l’importance de la composante A du flux mitral (surface sous la courbe), l’échocardiographie trans-oesophagienne est très utile pour juger de l’efficacité de la contraction auriculaire et pour établir le meilleur délai AV. Si la contraction auriculaire est hémodynamiquement inefficace (dissociation électro-mécanique auriculaire), il n’y a pas lieu d’insister sur le maintien du rythme sinusal, sauf pour la stabilité électrique et l’absence d’anticoagulation. Figure 7.48 : Flux mitral tel qu’il apparaît à l’ETO. Le flux protodiastolique E est lié à la relaxation active du VG, le flux A est dû à la contraction auriculaire. La surface sous la courbe de chaque composante E et A est proportionnelle à la quantité de sang qui passe à travers la mitrale. Normalement, le flux A n’apporte que 20% du remplissage ventriculaire (E > A). En cas de dysfonction diastolique par défaut de relaxation, la composante E diminue et la composante auriculaire prend davantage d’importance ; elle apporte 30-45% du remplissage télédiastolique du VG ; le flux A est plus important que le flux E (E < A). Les patients qui présentent ce type de dysfonction diastolique bénéficient grandement du rythme sinusal. L’ETO est donc très utile pour juger de l’adéquation hémodynamique du rythme cardiaque et pour guider le réglage du pace-maker (mode de stimulation, délai AV). Pour tester les seuils de stimulation (output), on règle la fréquence à ≥ 10 batt/min au dessus de la fréquence propre du patient et la sensibilité à sa valeur maximale. On augmente progressivement la puissance de stimulation (mA) jusqu’à ce que la cavité concernée capture la stimulation et affiche un complexe QRS sur l’ECG. Lorsqu’on teste une sonde auriculaire, le tracé affiche une configuration QRS fine de type sinusal, alors que l’image est celle d’un QRS large (type ESV) lorsqu’on teste une sonde ventriculaire. Dans les deux cas, le rythme cardiaque subit un brusque saut de fréquence de ≥ 10 batt/min. Si les seuils sont trop élevés, on inverse les électrodes. La puissance de stimulation est ensuite fixée au double du seuil observé, mais pas > 15 mA.

E A A E

Flux mitral normal Défaut de relaxation

E > A E < A

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 112

La sensibilité (sensing) est le réglage qui permet au pace-maker de capter le plus faible signal électrique possible en provenance du cœur. Un seuil bas correspond à une haute sensibilité. Pour la tester, la fréquence est réglée 10 batt/min en dessous de la fréquence propre du malade, le réglage de l’émission (mA) est placé au minimum et le réglage de la sensibilité est placé à sa plus haute valeur (10-12 mV) ; le pace-maker, qui est en mode VVI, AAI ou DDD, ne stimule pas. Lorsqu’on diminue progressivement la sensibilité, le voyant correspondant commence à clignoter pour chaque onde R. La sensibilité est ensuite fixée à la moitié du seuil observé. Si le patient n’a pas de rythme propre, la sensibilité est réglée d’office à 2 mV. Une autre manière de procéder est de démarrer par la valeur de sensing la plus basse et de l’augmenter progressivement, donc de rendre le pace-maker moins sensible, jusqu’à ce que le voyant lumineux cesse de clignoter et que le pace-maker stimule de manière asynchrone [80].

Réglage du pace-maker

Electrodes épicardiques et boîtier externe temporaire après toute opération de chirurgie cardiaque. Electrode monopolaire (anode active sur l’épicarde, cathode dans le sous-cutané) ou bipolaire (anode et cathode à 1-2 cm sur l’électrode) Seuil : valeur de puissance minimale (output) à laquelle le pace-maker entraîne la cavité concernée (< 15 mA) Sensibilité (sensing) : amplitude minimale des signaux que le pace-maker reconnaît comme une activité électrique cardiaque (réglage par défaut : 2 mV) Fréquence : 70-80 batt/min Synchronisation AV : stimulations successives de l’oreillette et du ventricule ; délai moyen : 150 msec

Administration de protamine

Après avoir décanulé l'oreillette droite, on commence l'administration de protamine. Habituellement, on injecte la première moitié de la dose lentement (maximum 50 mg/min) par une voie veineuse périphérique, puis on enlève la canule aortique et l'on donne la deuxième moitié de la protamine. Cette manière de faire permet de diminuer l'hémorragie lors de la décanulation artérielle et d'éviter la formation de thrombus dans l'aorte. Si la canule artérielle est en position fémorale ou sous-clavière, on ne commence la protamine qu'après rétablissement complet de la circulation dans l'artère. Dès que l'administration de protamine a débuté, on arrête les aspirations de la machine de CEC pour passer aux aspirations perdes et au CellSaver™. En effet, des caillots peuvent se former dans le réservoir et l'oxygénateur, ce qui oblige à changer le circuit au cas où l'on doit repartir en pompe pour un problème aigu. La protamine, extraite du sperme de saumon, est une molécule polycationique chargée positivement qui forme des complexes stables avec l'héparine, qui est chargée négativement. Un mg de protamine (100 UI) neutralise 1 mg d'héparine (100 UI). Habituellement, on administre une dose de protamine correspondant aux 80% de la dose d'héparine. Un ACT fait 5 minutes après la fin de la protamine doit être dans une limite de ± 10% par rapport à la valeur de départ. La protamine présente plusieurs effets secondaires immédiats, dont l’incidence varie de 1 à 13% des cas (moyenne 2.6%) [186,212].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 113

Libération d'histamine, qui se caractérise par une vasodilatation importante avec baisse de précharge et de postcharge; elle est directement proportionnelle à la vitesse d'administration (réaction de type I). Il est très fréquemment nécessaire d'accélérer les perfusions et de donner un vasoconstricteur (néosynéphrine ou nor-adrénaline) pour contrecarrer cet effet.

Hypertension pulmonaire ; le complexe héparine-protamine déclenche la libération de thromboxane A2, qui est un vasoconstricteur pulmonaire ; la PAP s’élève de 25-50%.

Réaction antigène – anticorps (IgG et IgE) (réaction de type II); plus rare, celle-ci se rencontre chez les diabétiques traités par une insuline stabilisée avec de la protamine (protamine-Zn), chez les malades réopérés qui ont déjà reçu de la protamine, chez les patients allergiques aux poissons, et chez les hommes vasectomiés.

Réaction anaphylactoïde déclenchée par le complexe héparine-protamine en activant directement la voie classique du complément (C4a) sans l'intermédiaire d'une réaction antigène-anticorps (réaction de type III, qui survient dans 1.5% des cas). Le tableau clinique est celui d'une réaction anaphylactique majeure; la libération massive de thomboxane, déclenche une hypertension pulmonaire et une bronchoconstriction qui peuvent être foudroyantes.

La protamine a un effet cardiotoxique direct qui va jusqu'à une diminution des performances systoliques de 75% [279]. Les patients allergiques aux poissons peuvent être opérés avec des circuits héparinés, une héparinisation systémique réduite (100 UI/kg), et sans administration de protamine [246]. Il est recommandé d'attendre l'effet de la protamine pour administrer les autres agents destinés à améliorer la coagulation sanguine: facteurs de coagulation, plaquettes, sang autologue de l'hémodilution peropératoire.

Protamine

La protamine neutralise l’héparine 1 U : 1 U. La dose administrée correspond à 80% de la dose d'héparine. Un ACT fait 5 minutes après la fin de la protamine doit être dans une limite de ± 10% par rapport à la valeur de départ. Effets secondaires de la protamine: - Vasoplégie systémique - Vasoconstriction pulmonaire - Réaction antigène-anticorps si patient déjà en contact ou allergique aux poissons - Réaction anaphylactoïde avec état de choc

Insuffisance ventriculaire après CEC

Caractéristiques Toute intervention en CEC porte transitoirement atteinte à la fonction myocardique systolique et diastolique; cette dysfonction sera d'autant plus sévère que la fonction préopératoire est abaissée et que l'opération pratiquée est à risque. La dysfonction post-CEC présente une évolution très particulière: elle s'améliore spontanément pendant la première heure après la mise en charge, puis s'aggrave pour atteindre le nadir entre la 4ème et la 6ème heure (Figure 7.49) [304]. C'est la période à laquelle les médiateurs libérés (fraction C5a du complément, interleukine-6 et -8, TNF, etc) sont les plus élevés. Cette situation contre-indique l'usage de β-bloqueurs pour régulariser une tachycardie, car ils révèlent brusquement la dysfonction sous-jacente et entraînent un effondrement hémodynamique. La

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 114

récupération prend en général 8 à 24 heures, mais parfois plusieurs jours; elle est d'autant plus lente que la fonction préopératoire était moins bonne. D'autre part, la CEC diminue de 30% l'activité des récepteurs β1-myocardiques, et augmente proportionnellement celle des récepteurs α dans la réponse sympathique aux catécholamines [334]. Cette activité diminue encore de 25% dans la période postopératoire immédiate [317]. Ceci explique la résistance aux amines de type β1 que l'on peut rencontrer en sortant de pompe, et l'efficacité de l'adrénaline, qui a des effets mixtes β et α. De nombreux facteurs participent à la genèse de l'insuffisance cardiaque post-CEC. Les facteurs de risque sont liés au patient, à la CEC et à l’opération (Tableau 7.10). La dysfonction systolique du VG se manifeste par une hypotension artérielle, un bas débit cardiaque (index < 2.2 L/min/m2), une augmentation de la différence artério-veineuse en O2 (> 5.5 ml/L), une désaturation veineuse centrale (SvO2 < 55%), une PAPO élevée (> 18 mmHg), une pression télédiastolique du VD > 10 mmHg, et souvent une bradycardie. Le ventricule est hypokinétique et dilaté à l'examen échocardiographique. Alors qu’elle est est de 1-2% lorsque la FE est > 0.4, la mortalité opératoire des PAC est de 9-12% en cas de dysfonction gauche après CEC [370]. La fonction du VD est un meilleur critère pronostique que la valeur de la PAP ; lorsqu’elle est associée à une défaillance gauche, l’insuffisance ventriculaire droite entraîne une mortalité de 44-86% dans le postopératoire [227]. La présence ou l'aggravation d'une insuffisance mitrale (IM) est un signe pathognomonique, et un bon marqueur du degré de la dilatation ventriculaire (Figure 7.50, page 116). Toutefois, l'IM apparaissant après CEC ou l'aggravation d'une IM préalable, peuvent être l'indice de plusieurs pathologies dont la thérapeutique est différente et dont le diagnostic différentiel est important (voir Chapitre 11, Figure 11.53).

Dilatation du VG: ventricule agrandi et dysfonctionnel, IM centrale de degré ≥ II. Traitement: catécholamines, inodilatateurs, soutien hémodynamique en CEC, contre-pulsion intra-aortique (CPIA).

Excès de postcharge: IM centrale. Traitement: vasodilatateur. Ischémie segmentaire causant la dysfonction d'un pilier mitral. Traitement: nitroglycérine et

noradrénaline, soutien hémodynamique en CEC, CPIA, réfection de pontage; anticalcique (Dilzem®) si spasme coronarien sur mammaire interne.

Prolapsus mitral: IM excentrique avec bascule d'un feuillet dans l'OG. Traitement: réparation chirurgicale, baisse de la postcharge.

Obstruction dynamique de la CCVG: aspiration du feuillet antérieur de la valve mitrale dans la chambre de chasse du VG par hypovolémie, baisse de postcharge et sur-stimulation

100%

50%

Pré-op CEC 0 1 h 5 h 12 h 24 h

Figure 7.49 : Evolution de la fonction cardiaque après pontage aorto-coronarien en CEC [304]. Cette courbe est construite à partir de plusieurs références; pour cette raison, la performance myocar-dique, évaluée de manière différente et à des temps différents selon les études, n'est pas exprimée en unités mais en pourcentage de la valeur préopératoire.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 115

sympathique chez un malade souffrant d'hypertrophie concentrique du VG. Traitement: arrêt des catécholamines, hypervolémie, vasoconstriction, béta-blocage.

Après plastie mitrale: juger de l'utilité d'une nouvelle reconstruction; seule une IM de degré I est acceptable.

Tableau 7.10 Facteurs de risque pour l’insuffisance ventriculaire post-CEC

Facteurs liés au patient

Défaillance du VG préexistante (FE < 0.3), dilatation du VG Ischémie active, infarctus récent, mauvaise distalité des vaisseaux coronariens Pathologie mitrale, opérations combinées Hypertension pulmonaire Dysfonction du VD Age > 70 ans, sexe féminin, diabète, insuffisance rénale

Facteurs liés à la CEC Cardioplégie peropératoire inadéquate (lésions coronariennes proximales, HVG) Lésions de reperfusion Long clampage aortique (> 120 minutes), long temps de CEC Oedème myocardique Embolies gazeuses Hypothermie profonde Réaction inflammatoire systémique massive (SIRS) Hyperkaliémie, hypomagnésémie, hypocalcémie, acidose

Facteurs liés à l'opération Opération en urgence, réopération Revascularisation coronarienne incomplète, infarctus peropératoire, embolisation coronarienne (air, athéromes), sidération myocardique Inadéquation des conditions de charge après remplacement mitral Traumatisme du muscle cardiaque (ventriculotomie, résection d’anévrysme, fermeture de CIV) Hypertension pulmonaire postopératoire (PAPs > 50 mmHg) En transplantation: état du greffon, durée de l'ischémie > 4 heures Lors de la fermeture: tamponnade péricardique, pneumothorax

Il est essentiel d'élucider le mécanisme de l'IM pour mettre en route le traitement correct. Après des pontages aorto-coronariens, l'IM et la dysfonction ventriculaire doivent faire suspecter une ischémie aiguë, qui se traduira à l'ETO par des akinésies segmentaires et à l'ECG par des surélévations du segment ST (voir Figure 7.47, page 105). Une dysfonction diastolique accompagne ces évènements dans la moitié des cas; elle est parfois seule présente si la fonction systolique est satisfaisante. Son incidence oscille entre 10% et 54% des cas, ce qui représente une prévalence 5-7 fois plus élevée qu’en préopératoire [326]. Elle se traduit par des pressions de remplissage augmentées par rapport à la volémie réelle et une variation respiratoire très accentuée de la pression artérielle [61]. Son intensité a une valeur pronostique pour l'évolution fonctionnelle immédiate [33]. Cette baisse de compliance est due à plusieurs phénomènes.

Œdème myocardique (accumulation liquidienne en CEC, absence de drainage lymphatique en

flux dépulsé) ; Cardioplégie, hypothermie ; Manipulations du cœur ; Ischémie myocardique, syndrome de reperfusion, sidération myocardique ; Syndrome inflammatoire systémique ; Péjoration d’une dysfonction diastolique préalable : HVG, ischémie, cardiomyopathie. Compression externe (péricarde, poumons, pneumothorax).

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 116

A ces phénomènes s'ajoutent les conséquences hémodynamiques accompagnant la mise en charge et la fermeture de la paroi thoracique.

Ventilation en pression positive (la compliance pulmonaire est abaissée en fin de CEC par oedème alvéolo-capillaire) ;

Variations volémiques (hémorragies, hypovolémie) ; Fermeture du péricarde et du sternum (compression externe provoquant un "effet

tamponnade") ; Réchauffement (augmentation de la consommation d'O2, frissons).

Dans les corrections de valvulopathies, l'aggravation hémodynamique momentanée dépend du type de pathologie. Les lésions ayant entraîné une dilatation ventriculaire (insuffisance aortique ou mitrale) induisent des dysfonctions sévères. Après correction d'une insuffisance mitrale, le VG est dans une situation difficile à cause de l'augmentation brusque de sa postcharge due à la suppression de la "soupape de pression" que représentait l'insuffisance valvulaire ; il souffre également d’une baisse de précharge (recul sur la courbe se Starling) secondaire à la disparition du retour diastolique du volume de la régurgitation. Une insuffisance mitrale sévère peut survenir ou s'aggraver en sortant de CEC: c'est un excellent marqueur de la dysfonction aiguë du VG. Dans le cas de sténose mitrale, le problème est lié au petit volume ventriculaire gauche, dont la distensibilité est diminuée. Par contre, la baisse immédiate de la postcharge après correction de sténose aortique assure une récupération fonctionnelle rapide, dans la mesure où l'hypertrophie ventriculaire n'a pas gêné la préservation myocardique. Le RVA pour sténose serrée et la cure de CIA sont pratiquement les seules circonstances où le VG est dans une meilleure situation immédiatement après la CEC qu’avant l’opération. Traitement de l'insuffisance ventriculaire gauche La thérapeutique de l'insuffisance cardiaque post-CEC porte sur plusieurs points d'impact interdépendants : précharge, postcharge (systémique et pulmonaire), rythme cardiaque, fonction inotrope [131,211].

© Chassot 2012

Normal Dilatation VG + IM

IM

OG

VG

OG

VG

Figure 7.50 : Normalement, les feuillets mitraux s’affrontent par leurs bords libres sur une certaine hauteur (8-10 mm) : leur étanchéité est assurée par la pression intraventriculaire qui les plaquent l’un contre l’autre (flèches vertes). L’insuffisance du VG conduit à 3 phénomènes : la sphéricisation du VG, sa dilatation, et la dilatation de l’anneau mitral. L’écartement des piliers ne donne plus une course suffisante aux cordages pour permettre l'affrontement des feuillets mitraux; ces derniers sont alors retenus en dessous du plan de l'anneau mitral (trait pointillé blanc) pendant la systole, et la valve fuit; l'insuffisance mitrale est dite restrictive. L'importance et la variation de l'insuffisance mitrale (IM) sont un bon critère du degré d'insuffisance ventriculaire gauche.

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Précharge : l'insuffisance diastolique courante après CEC modifie la courbe de compliance des cavités cardiaques; les pressions de remplissage (PVC, PAPO) sont plus élevées pour le même volume intracavitaire. La courbe de Starling de l'insuffisance diastolique étant très redressée, le volume systolique est très dépendant de la précharge, et la tolérance à l'hypovolémie est très faible (Figure 7.51). L’augmentation de précharge est limitée par le risque de dilatation ventriculaire, situation particulièrement dangereuse parce qu'elle augmente la mVO2, menace le flux sous-endocardique et effondre le débit cardiaque.

Postcharge basse : une chute des RAS est fréquente après CEC (réchauffement, vasoplégie, protamine, longue CEC, IEC préopératoire, diabète, etc). Bien qu'elle soit bénéfique pour le VG, cette baisse de postcharge doit rester limitée car elle compromet la perfusion dans les coronaires et dans tous les organes. Traitement habituel :

o Phényléphrine (Néosynéphrine®): bolus 100 mcg ; la dose maximale recommandée hors-CEC est de 1 mg ; la raison est l’absence totale d’effet inotrope béta de la substance qui ne fait qu’augmenter les RAS et la postcharge du VG, d’où le risque de défaillance gauche.

o Nor-adrénaline (Artérénol®): perfusion 0.03-0.5 mcg/kg/min ; la stimulation des récepteurs α myocardiques (inotropes positifs) et le faible effet β1 assurent un appoint inotrope qui aident le VG lorsque sa postcharge augmente.

o Vasopressine (Pitressin®): en cas de choc distributif réfractaire (PAM < 55 mmHg, RAS < 600 dynes•s•cm-5), la vasopressine (1-4 U/h) peut améliorer la situation [208]; à ces doses, la vasopressine provoque moins de vasoconstriction coronarienne, rénale et splanchnique que la noradrénaline pour le même résultat sur la pression systémique ; elle n’augmente pas la RAP [275]. D’autre part, elle conserve ses propriétés vasoconstrictrices malgré l’hypoxie et l’acidose.

o Bleu de méthylène (0.5 mg/kg iv) : il peut aider à rétablir le tonus vasculaire en situation extrême, mais présente des risques : hypertension pulmonaire, neurotoxicité, vascoconstriction coronarienne et rénale [202].

Postcharge élevée : le risque est une dilatation du VG, un disruption des sutures aortiques et une augmentation des pertes sanguines. La baisse d'impédance augmente l'éjection du VG lorsque celui-ci est dysfonctionnel. Les vasodilatateurs utilisés en première ligne sont à prédominance artériolaire.

o Isoflurane 5%; o Phentolamine en bolus (Régitine® 1-2 mg iv); o Nitroprussiate en perfusion (Nipruss® 0.1-5 mcg/kg/min); o Nitroglycérine (0.5-5.0 mcg/kg/min) si l'hypertension est associée à une élévation de

précharge ou à une HTAP; o Un inodilatateur comme un inhibiteur de la phosphodiestérase-3 (milrinone) ou le

levosimandan est indiqué lorsque l'HTA est associée à une dilatation ventriculaire. Contrôle du rythme : Les arythmies doivent être traitées électriquement le plus rapidemnent

possible. Le rythme idéal en sortant de CEC est un entraînement sinusal de 75-80 batt/minute. o En cas de dissociation AV: pace-maker bicaméral, isoprénaline (bolus de 10 mcg). La

synchronisation de la contraction auriculaire est d'autant plus importante qu'il existe des altérations de la compliance ventriculaire.

o FA ou tachyarythmie sus-jonctionnelle: cardioversion peropératoire (2-10 J par palettes internes); la cardioversion mérite d'être tentée, y compris chez un patient en FA chronique, car le rythme sinusal, même temporaire, améliore l'hémodynamique pendant les heures où elle est la plus compromise. La substance de première intention est l'amiodarone (Cordarone®), en perfusion de 10-15 mg/kg/24h; on débute par 150 mg/20 minutes iv, à répéter selon besoin. L'esmolol (Brevibloc®) est le seul β-bloqueur envisageable en postopératoire à cause de la briéveté de sa demi-vie (9 minutes); il faut néanmoins l'utiliser avec précaution, et seulement lorsque la tachycardie est excessive ou dangereuse.

o Torsade de pointe, TV, spasme coronarien: défibrillation interne (5-50 J) ou externe (100-360 J), xylocaïne (1 mg/kg), magnésium (charge: 1-2 gm iv).

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 118

Stimulation inotrope : si l'index cardiaque est inférieur à 2.2 l/min/m2 et la PAPO supérieure à 18 mm Hg, ou la fraction d'éjection inférieure à 0.5, il est nécessaire d'assurer un support inotrope. Le choix des agents cardiostimulateurs est décrit ci-dessous ainsi que dans les Tableaux 7.11, 7.12 et 7.13 (pages 119, 120 et 121).

En salle d'opération, il est facile de compléter les traitements médicamenteux par un système d'assistance ventriculaire dont le but est de maintenir la circulation en déchargeant le ou les ventricules pour leur offrir une possibilité de récupération (voir Chapitre 12 Assistance ventriculaire).

Contrepulsion intra-aortique (CPIA) : elle diminue la postcharge du VG et augmente la pression diastolique, donc la perfusion coronarienne. C’est la technique de premier choix pour soutenir un VG défaillant par dilatation (présence d'une IM degré > II/IV) ou par ischémie, mais elle ne fonctionne correctement que si le rythme est régulier et inférieur à 120 batt/min, et que si les résistances systémiques sont maintenues. Elle est contre-indiquée en cas d'insuffisance aortique, de dissection, ou d'athéromatose grave de l'aorte thoracique descendante.

ECMO (Extra-Corporeal Membrane Oxygenation): une pompe centrifuge (voir Pompes, page 16) couplée à un oxygénateur et branchée sur les vaisseaux fémoraux assure une assistance à la fonction ventriculaire et aux échanges gazeux ; elle est indiquée pour 3-5 jours en cas de défaillance cardio-respiratoire.

A

Volume télédiastolique

Volume systolique

Dysfonction systolique

Dysfonction diastolique

V V’’

Normal

ΔP

ΔVS

VD

Pression

Compliance diminuée

Volume

Compliance normale

V’

V’’

B

© Chassot 2012

P’

P’’

Figure 7.51 : Hémo-dynamique. A : Courbes de Frank-Starling du VG illustrant la relation entre la précharge et la performance systolique. Courbe normale (en jaune), courbe en cas de dysfonction systolique (en rouge), et en cas de dysfonction diastolique (en bleu). La courbe de Starling du VD (en pointillé) est très plate, ce qui signifie que le débit du VD normal ne dépend que très peu de la précharge. B : Courbe de compliance normale du VG (en jaune) et lors de dysfonction diastolique (en rouge). Dans ce deuxième cas, la pression P correspond un volume ventriculaire plus petit (V’) que la norme (V) ; le sujet peut être hypovolémique avec une POD (PVC) ou une POG (PAPO) normale. La normovolémie d’un sujet souffrant de dysfonction diastolique (V’’ rouge) est une pression de remplissage (P’) qui correspond à une hypervolémie (V’’ jaune) chez un sujet normal.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 119

Assistance ventriculaire externe par un système à court terme, comme par exemple l'Abiomed BVS 5000i™ (flux pulsatile), l’Impella™ (flux continu) ou le TandemHeart™ (flux continu) ; les deux derniers sont introduits par voie percutanée sous repérage fluroscopique et/ou échocardiographique (voir Assistance percutanée, page 139).

Quel qu’en soit le type, une assistance ventriculaire n’est pas un substitut aux agents inotropes ni au maintien de la précharge. En effet, la défaillance droite est fréquente en cas d’assistance gauche isolée, d’où la nécessité de NO, milrinone, adrénaline, etc ; d’autre part, le VD fournit la précharge du système d’assistance, dont le fonctionnement dépent directement du remplissage ventriculaire [211].

Tableau 7.11 : Effets comparatifs des catécholamines

Substances Fréquence α1 α2 β1 β2 δ

Adrénaline ↑ +++ +++ ++ ++ - < 0.03 mcg/kg/min ↑ + + + + 0.03-0.15 mcg/kg/min ↑ ++ + ++ + > 0.15 mcg/kg/min ↑↑ ++++ + +++ + Dopamine ↑↑ ++ + ++ + +++ 1-3 mcg/kg/min + +++ 3-8 mcg/kg/min ↑↑ + ++ + +++ > 8 mcg/kg/min ↑↑ +++ ++ + (+) Dobutamine ↑ - - +++ ++ - Dopexamine ↑↑ - - (+) +++ ++ Noradrénaline ↓ +++ +++ + - - Isoprénaline ↑↑↑ - - +++ +++ - Ephédrine ↑ + + + + -

Stimulation inotrope L’insuffisance ventriculaire chronique et le stress prolongé (longue CEC, instabilité hémodynamique continue en soins intensifs) conduisent à un remaniement des récepteurs myocardiques : baisse des récepteurs β1, augmentation des récepteurs β2 et α1 (inotropes positifs) [125,317]. Ces données ont des impacts majeurs sur la thérapeutique catécholaminergique.

La réponse aux amines β1 est diminuée ; la dopamine et la dobutamine atteignent rapidement leur plafond d’activité. L'adrénaline, qui stimule les récepteurs β1, β2 et α1, est la seule catécholamine efficace pour le traitement de la décompensation aiguë d'une insuffisance cardiaque chronique ou dans les situations critiques après CEC. La noradrénaline (effet α1 majeur et β1 secondaire) a davantage d’effet inotrope positif que sur un coeur normal.

La déplétion chronique en nor-adrénaline du myocarde diminue l'efficacité des amines indirectes telles la dopamine ou l'éphédrine.

Les inhibiteurs des phosphodiestérases-3 (amrinone, milrinone) sont efficaces lors d’insuffisance ventriculaire ou de β-blocage parce qu'ils agissent par une voie indépendante des récepteurs β ; il en est de même de la noradrénaline.

La combinaison adrénaline + milrinone est le stimulant inotrope le plus efficace sur le ventricule défaillant, qu’il soit gauche ou droit.

Indépendamment de leur dosage, l'efficacité des catécholamines dépend donc de plusieurs éléments :

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La densité et la sensibilité des récepteurs membranaires ; La répartition des types de récepteurs ; L’activité de recapture synaptique ; La disponibilité du Ca2+ sarcoplasmique ; L'équilibre acido-basique (l’acidose inhibe leur action) ; La concentration locale de la substance, variable selon l’hémodynamique et le site

d’administration (voie périphérique versus voie centrale) ; La durée de l’insuffisance cardiaque ou du choc cardiogène.

Les agents inotropes sont très largement utilisés, souvent de manière routinière et "prophylactique". En réalité, ils sont indiqués en fonction des probabilités de dysfonction en sortant de CEC. Cette probabilité varie entre 35% (CEC < 60 minutes, FE > 0.65) et 100% (CEC > 150 minutes, FE < 0.35). Si, après la mise en charge, l'index cardiaque est inférieur à 2.5 l/min/m2 et la PAPO supérieure à 18 mm Hg, ou la fraction d'éjection inférieure à 0.5, il est nécessaire d'assurer un support inotrope.

Tableau 7.12 : Effets comparatifs des agents vaso-actifs Substances Précharge RAS RAP Fréquence Contractilité Conduction Adrénaline

< 0.03 mcg/kg/min ↓ ↑ ↑ ↑ 0.03-0.15 mcg/kg/min ↓ ↑ ↑ ↑↑ ↑

> 0.15 mcg/kg/min ↓↓ ↑↑↑ ↑↑ ↑↑↑ ↑ Dopamine

1-3 mcg/kg/min ↓(δ) ↑ 3-10 mcg/kg/min ↓ ↑ ↑ ↑↑ ↑↑ ↑ > 10 mcg/kg/min ↓ ↑↑↑ ↑ ↑↑ ↑↑ ↑

Dobutamine ↓ ↓ ↓ ↑↑ ↑↑ ↑ Dopexamine ↓↓ ↓ ↑ ↑ ↑ Noradrénaline ↑↑↑ ↑ (↓) ↑ Isoprénaline ↓ ↓↓ ↓↓ ↑↑↑ ↑↑ ↑↑↑ Ephédrine ↑ ↑ ↑ ↑ IPDE-3 ↓↓ ↓↓ ↓↓ ↑↑ Levosimandan ↓ ↓↓ ↓↓ ↑ ↑↑ Phényléphrine ↑↑↑ ↑ (↓) Vasopressine ↑↑↑ (↓) Calcium ↑↑ ± ↓ Phentolamine ↓↓↓ ↓ ↑↑ Nitroglycérine ↓↓↓ ↓↓ ↓ (↑) Nitroprussiate ↓↓ ↓↓↓ ↓ (↑) NO• ↓↓↓ Tolazoline ↓↓ ↓↓ (↑) Clonidine ↓↓ Fenoldopam ↓↓↓ ↓ Anticalciques ↓↓ ↑ - ↓ ↓ - ↓↓ ↓ Neseritide ↓ ↓↓ ↓↓

RAS : résistance artérielle systémique. RAP : résistance artérielle pulmonaire. Les parenthèses indiquent une activité réflexe non liée à l’action de la substance. - : selon les substances. IPDE-3: inhibiteurs des phospho-diestérases.

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Tableau 7.13 Dosages des principales substances utilisées dans le traitement de la défaillance ventriculaire

Substance Dose de charge Perfusion

Dopamine 1-3 mcg/kg/min : effet δ

3-8 mcg/kg/min : effet β > α ≥ 10 mcg/kg/min : effet α > β

Dobutamine 1-10 mcg/kg/min Adrénaline 0.01-0.1 mcg/kg/min Isoprénaline bolus 10 mcg 0.01-0.05 mcg/kg/min Noradrénaline 0.01-1 mcg/kg/min Dopexamine 3-5 mcg/kg/min Amrinone 1,5 – 2.0 mg / kg 5 – 30 mcg/kg/min Milrinone 50 - 75 mcg / kg iv 0.4-0.75 mcg/kg/min

5 mg en inhalation Enoximone 0.5 – 1.0 mg / kg 5 – 10 mcg/kg/min Levosimendan 12 mcg/kg 0.1-0.2 mcg/kg/min Neseritide 2 mcg/kg 0.01-0.03 mcg/kg/min Thyroxine 0.03-0.5 mg/kg/min Vasopressine 1-5 U/h Nitroprussiate de Na 1 - 10 mcg/kg/min Nitroglycérine 20 mcg 10 - 100 mcg/min Epoprosténol 2-5 ng/kg/min Treprostinil 1.25-2.5 ng/kg sous-cutané Iloprost 10-20 mcg en 20 min en inhalation Nifédipine 15 mcg/kg/heure Diltiazem 0.1 mg/kg/heure Clevidipine 1-2 mg/heure jusqu’à 32 mg/heure (maximum)

Catécholamines Les catécholamines ne sont pas toutes équivalentes, car elles présentent des différences dans la sélectivité de leurs actions au niveau des récepteurs (Tableaux 7.8, 7.11 et 7.12, pages 107, 119 et 120).

Dopamine: agent idéal pour les sorties de pompe simples à cause de l'effet β1, du léger effet α (maintien des RAS) et de l'effet δ (augmentation du flux splanchnique et rénal) si le dosage reste < 5 mcg/kg/min. Au-delà de 5 mcg/kg/min, la vasoconstriction α augmente davantage que l'effet β et la dopamine devient essentiellement un vasopresseur. La dopamine est bon marché, mais relativement tachycardisante aux faibles dosages.

Dobutamine: stimulant exclusivement β, elle tend à baisser les RAS; les effets ne se modifient pas avec le dosage, mais obligent en général à adjoindre une perfusion de nor-adrénaline au-delà de 5 mcg/kg/min. La dobutamine est plus onéreuse.

Adrénaline: effet équilibré α et β, très bon marché. Nor-adrénaline: effet essentiellement α vasoconstricteur artériolaire systémique; peu d'effet

vasoconstricteur pulmonaire car les récepteurs α sont rares dans le lit pulmonaire. La noradrénaline présente un effet inotrope positif en cas d'insuffisance ventriculaire à cause de la prépondérance de récepteurs α dans le myocarde dysfonctionnel.

Isoprénaline: le plus puissant stimulant β1 et β2; tachycardisant et vasodilatateur artériel, l'isoprénaline est indiquée essentiellement dans les blocs AV et les bronchospasmes.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 122

Les substances qui ont plusieurs actions, comme la dopamine, ne permettent pas de différencier les effets entre eux, surtout lorsque leur proportion varie selon le dosage. Les catécholamines à effet "pur" (dobutamine, noradrénaline) sont plus aisées à ajuster en fonction du paramètre hémodynamique sur lequel on veut agir. L'effet β2 (dobutamine, adrénaline) est responsable d'une vasodilatation, d’une hyperglycémie et d'une acidose métabolique. Quelle que soit la substance utilisée, l'augmentation de la contractilité se solde toujours par une augmentation de la mVO2. Seules les techniques d'assistance ventriculaire augmentent le débit sans élever le travail cardiaque. Autres substances Un inhibiteur des phosphodiestérases-3 (IPDE-3), qui catabolisent l’AMPc, augmente le taux cytoplasmique de cette dernière, donc conduit à une stimulation inotrope par augmentation de la [Ca2+]i systolique. Cette voie ne passe pas par les récepteurs β. Les IPDE sont des inodilatateurs : ils présentent un effet inotrope positif, et un effet vasodilatateur sur les vaisseaux de résistance (artères systémiques et pulmonaires) et de capacitance (grandes veines centrales). Ils ne provoquent pas de tachycardie (absence d’effet chronotrope). Les indications essentielles sont [183].

La dysfonction gauche sévère avec dilatation ventriculaire pouvant profiter d’une baisse de postcharge ;

L’insuffisance ventriculaire droite avec hypertension pulmonaire ; Les coeurs sévèrement déplétés en récepteurs β tels les insuffisances ventriculaires de longue

durée, les greffons cardiaques, et les cas après une CEC prolongée ; Les patients β-bloqués.

La milrinone (Corotrop®) s'administre en perfusion (0.4-0.75 mcg/kg/min) précédée d'une dose de charge (50 mcg/kg). Cette dernière provoque une hypotension significative; une manière de procéder est d'injecter la dose de charge dans la CEC en cours de réchauffement, car l'hypotension est facile à maîtriser à ce moment. La combinaison adrénaline + milrinone est particulièrement efficace en cas d'insuffisance ventriculaire chronique, réfractaire ou accompagnée d'HTAP. Le levosimendan (Simdax®) possède une activité anti-phosphodiestérase et une action de sensibilisation de la troponine C au calcium; c'est un vasodilatateur artériel parce qu’il ouvre les canaux KATP des cellules musculaires lisses des artérioles. Le levosimendan n’entraîne pas de tachycardie ni d’augmentation de la mVO2 [271]. Il reste efficace chez les patients β-bloqués. Il s’administre en perfusion sur une seule période de 24 heures (0.1-0.2 mcg/kg/min), après une dose de charge de 12-24 mcg/kg ; le traitement pour un adulte nécessite environ 12 mg (coût : environ 700 €). Les essais cliniques ne démontrent pas de réduction de mortalité à long terme par rapport à la dobutamine mais une diminution de morbidité [231]. La thyroxine (T3) (tri-iodo-thyronine) améliore la performance ventriculaire par stimulation de l’adénylyl-cyclase (augmentation de l’AMPc) et par des voies différentes de l’AMPc ; elle est utile chez les malades dont le système neuro-humoral est épuisé, comme les malades de soins intensifs, les donneurs d'organe ou après les longues CEC [263]. Son action est contre-carrée par les anti-calciques. Les doses sont de 0.03-0.5 mcg/kg/min, ou de 0.0275 mcg/kg en 4 doses [188]. La solution Glucose-Insuline-Potassium (GIK) semble profitable essentiellement aux patients ischémiques avec dysfonction ventriculaire sévère et diminution de récepteurs β myocardiques [366]. Elle pourrait diminuer la souffrance myocardique (baisse des CK-MB et des troponines postopératoires), mais ne semble pas avoir d’impact sur la performance contractile [326a]. Le régime peropératoire conseillé est : insuline 2-4 U/h, K+ 10-20 mmol/h, glucose 20% 10-15 g/h (50-75 ml/h). Le but est de maintenir une glycémie peropératoire de 6-8 mmole/L.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 123

Le calcium (dose: 2-4 mg/kg) élève la concentration de Ca2+ extracellulaire et antagonise les effets de l'hyperkaliémie intra-myocardique après cardioplégie, mais n'améliore la fonction cardiaque que chez les patients hypocalcémiques (transfusion rapide de sang citraté) ou sous anticalciques. Il présente un antagonisme avec les stimulants béta et un synergisme avec les stimulants α (augmentation de la pression, mais pas d'effet inotrope). Une hypercalcémie aiguë lors de la revascularisation peut provoquer une surcharge intracellulaire aggravant les lésions ischémiques et la dysfonction diastolique, rigidifiant le myocarde (stone heart), et induisant une vasoconstriction des greffons artériels [368]. En cas de normocalcémie, les risques sont supérieurs aux bénéfices escomptés: bradycardie sinusale, ralentissement de la conduction AV, antagonisme avec les stimulants de l’AMPc (β-agonistes), spasme artériel, augmentation de la toxicité de la digitale. En sortant de CEC, la seule indication au calcium est le renversement d’une hyperkaliémie résiduelle. La conjonction d'une hypovolémie et d'une perfusion de catécholamines à effet β lors d'hypertorphie ventriculaire gauche concentrique peut induire un "effet CMO": comme dans la cardiomyopathie obstructive, la constriction de la chambre de chasse en systole crée un obstacle à l'éjection. Cette obstruction sous-aortique dynamique est fréquente après remplacement de la valve aortique pour sténose. Le diagnostic se pose à l'échocardiographie. Plus on augmente les amines, plus la situation de bas débit empire ! La seule thérapeutique est une baisse des amines β, une augmentation des RAS (amines α), un remplissage volumique et éventuellement un β-blocage. Thérapeutique de l'insuffisance ventriculaire droite L’insuffisance droite est secondaire à une affection propre du VD (infarctus, cardiomyopathie) ou à une augmentation de sa postcharge, ce qui est le plus fréquent. Cette hypertension pulmonaire a de nombreuses causes après une CEC :

Péjoration d’une HTAP préexistante ; Stase sur une dysfonction du VG, une valvulopathie mitrale résiduelle ou une inadéquation de

la prothèse mitrale ; Hypoventilation, hypoxie, hypercapnie, acidose respiratoire ; Syndrome inflammatoire pulmonaire ; Administration de protamine ; IPPV et PEEP excessives ; Compression mécanique des vaisseaux pulmonaires (tamponnade, pneumothorax, écarteur).

Le traitement de l'insuffisance ventriculaire droite comprend plusieurs points (Tableau 7.14):

Optimisation de la précharge ; le VD dysfonctionnel peut nécessiter une PVC jusqu’à 15 mmHg pour assurer son débit systolique. En revanche, si la défaillance a déjà entraîné une dilatation ventriculaire et une stase en amont, il faut au contraire diminuer la précharge : dérivés nitrés, diurétiques, position de contre-Trendelenburg.

Baisse de la postcharge (Tableau 7.15 page 125) : comme le VD est très sensible à la postcharge, la diminution de l'impédance augmente efficacement le volume éjecté ; on utilise à cet effet les substances qui présentent un effet vasodilatateur pulmonaire majeur. A l'exception de l'hyperventilation normobarique et du NO, les hypotenseurs pulmonaires s'accompagnent d'une hypotension systémique qui peut diminuer la pression de perfusion coronarienne et potentialiser le risque ischémique.

Stimulation de la contractilité : amines sympathicomimétiques (dobutamine, adrénaline, isoprénaline), inhibiteurs de la phosphodiestérase-3 (amrinone, milrinone), sensibilisateur calcique (levosimandan). La dopamine et la digitale sont contre-indiquées parce qu’elles augmentent les RAP.

Maintien de la perfusion coronaire droite : une perfusion de nor-adrénaline et/ou de vasopressine est indiquée afin de maintenir un gradient suffisant entre la pression aortique et

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 124

la pression systolique du VD ; la faible population de récepteurs α pulmonaires et l’absence de récepteurs à la vasopressine dans les poumons font que la pression systémique s’élève mais non la pression pulmonaire.

Assistance ventriculaire externe par un ventricule artificiel ou par une contrepulsion intra-pulmonaire ; la contre-pulsion intra-aortique peut être utile pour maintenir la pression de perfusion coronarienne.

Non fermeture du péricarde et du sternum, ou réouverture en postopératoire. Lorsque la Ptd du VD est ≥ 15 mmHg, la paroi ventriculaire est en butée contre le péricarde ; l’ouverture de celui-ci augmente la compliance du VD et relâche la compression opérée sur le VG par le bascule du septum interventriculaire ; cette technique permet de tolérer la dilatation due à la dysfonction droite sans augmentation de pression.

Tableau 7.14 Traitement de l'insuffisance ventriculaire droite aiguë

Hyperventilation normobarique

Hypocapnie : PaCO2 = 30 mmHg, alcalose: pH = 7.5 FiO2 = 1.0 V courant 6-8 ml/kg, pression ventilatoire (Pmoy) 6-10 cm H2O

NO• : 10 – 30 ppm dans le circuit inspiratoire du ventilateur Optimalisation de la précharge

↑ PVC 15 mmHg si dimensions normales du VD ↓ PVC si dilatation du VD, insuffisance tricuspidienne et stase droite

Stimulation β1 + β2 Dobutamine (Dobutrex®) 3-10 mcg/kg/min Isoprénaline (Isuprel®) bolus 10 mcg, perfusion 0.01 à 0.1 mcg/kg/min Adrénaline 0.01 – 0.1 mcg/kg/min (associée à la milrinone)

Anti-phosphodiestérases-3 Milrinone (Corotrop®) ; charge 50 mcg/kg, perfusion 0.5-0.75 mcg/kg/min

Prostaglandines: Iloprost® en spray nasal (9-15 mcg) à répéter toutes les 3-4 heures nébulisation 20 mcg/2 heures Epoprosténol (Flolan®): 2-5 ng/kg/min en perfusion Treprostinil (1.25-2.5 ng/kg/min) sous-cutané

Nitroglycérine (0.5-5 mcg/kg/min) si PVC haute Maintien de la pression de perfusion coronaire

Nor-adrénaline (0.1-0-5 mcg/kg/min) si hypotension systémique Vasopressine (0.1-0.4 U/h) CPIA si bas débit systémique

Non-fermeture ou réouverture du péricarde et du sternum. Assistance ventriculaire droite.

Magnésium

Le Mg2+ est le deuxième ion intracellulaire le plus abondant. Malheureusement, les taux sériques reflètent mal la magnésémie totale, puisque seul 1% du Mg total est sous forme ionisée dans le sérum. Le Mg2+ est nécessaire au fonctionnement de plusieurs ATPases; il participe au maintien du taux de K+ et de Ca2+ intracellulaires. L'hypomagnésémie est très courante chez les insuffisants cardiaques, chez les diabétiques, chez les malades recevant des diurétiques ou de la digitale, et à la fin de la CEC [5]. Du point de vue thérapeutique, le magnésium agit comme un bloqueur calcique: il diminue l'excès de Ca2+ sarcoplasmique et de radicaux libres lié à l'ischémie; il diminue l'incidence des arythmies ventriculaires et provoque une vasodilatation artérielle systémique et pulmonaire. Administré avant ou immédiatement au moment de la reperfusion après une période d'ischémie, il a tendance à diminuer la

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taille de l'infarctus, améliorer la fonction systolique, et diminuer la mortalité des patients dont la fonction gauche est conservée [385]. L'effet est perdu si l'administration a lieu ultérieurement [50]. Les effets secondaires, peu fréquents aux doses habituelles, sont une sédation, une paralysie musculaire, une baisse des résistances artérielles et une inhibition de la fonction plaquettaire [130]. Eliminé par les reins, le magnésium présente ces effets surtout chez les insuffisants rénaux. Un synergisme avec les dérivés nitrés et les inhibiteurs de l'enzyme de conversion peut conduire à des hypotensions sévères [133]. Vu son inocuité et son coût très faible, le magnésium (MgSO4 ou MgCl2, 2 gm iv chez l'adulte) est indiqué sans restriction en cas de troubles du rythme ventriculaire ou lors de défibrillations répétées; il peut être bénéfique en cas de vasoconstriction artérielle et en cours d'ischémie. L'administration de routine n'est pas pour autant justifiée.

Tableau 7.15: Traitement de l'hypertension pulmonaire

Approfondissement de l'anesthésie (fentanyl, sufentanil, remifentanil), réchauffement du patient, curarisation, sédation si anxiété (benzodiazépines à dose sans dépression respiratoire)

Hyperventilation: PaCO2 30 mmHg, pH > 7.45 Hyperoxie: FiO2 1.0 IPPV avec basse P intrathoracique (Pmoy: 6-10 mmHg) NO: 10-30 ppm dans le circuit inspiratoire Aérosol de prostanoïde (iloprost 20 mcg en 15 min) Sulfate de magnesium (5-10 mmol)

Catécholamines β: dobutamine, isoprénaline Anti-phosphodiesterases-3: milrinone (0.5 mcg/kg/min) Noradrénaline (↑ pression de perfusion coronarienne) Adaptation de la précharge du VD (PVC) Ouverture/non-fermeture du péricarde et du sternum Contrepulsion intra-aortique (↑ pression coronarienne) Perfusion d'époprostenol (2-5 ng/kg/min) Adénosine (6-12 mg iv) Anti-phosphodiesterases-5:

sildénafil (50-100 mg/j per os) + L-arginine Anti-endothéline: bosentan (125-250 mg/j per os) Anti-angiotensine: losartan (50-100 mg/j per os) Sont à éviter: desflurane, propofol, digitale, dopamine.

Dysfonction ventriculaire post-CEC (I) Une intervention cardiaque en CEC porte transitoirement atteinte à la fonction ventriculaire. La fonction systolique et la fonction diastolique baissent progressivement pour atteindre leur nadir vers 5-6 heures après la CEC ; la récupération prend 8 à 24 heures. Cette dysfonction est d’autant plus sévère que l’atteinte ventriculaire était préexistante et que l’opération était longue et complexe.

Traitement aigu sans effet vasodilatateur sur les RAS

Traitement de l'insuffisance du VD

Traitement aigu et chronique avec effet vasodilatateur sur les RAS

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Dysfonction ventriculaire post-CEC (II) Thérapeutique de l’insuffisance gauche par ordre croissant d’importance : - Optimalisation de la précharge, de la postcharge, de la fréquence et du rythme - Dopamine jusqu’à 5 µg/kg/’ - Dobutamine (5-20 µg/kg/’) + noradrénaline (0.05 – 0.5 µg/kg/’) - Adrénaline (0.01-0.3 µg/kg/’) + milrinone (0.5 µg/kg/’) - CPIA - Levosimendan (0.1-0.2 µg/kg/min) - ECMO, assistance ventriculaire Thérapeutique de l’insuffisance droite : - Optimalisation de la précharge du VD - Dobutamine (5-20 µg/kg/’) - Milrinone (0.5 µg/kg/’) + adrénaline (0.01-0.3 µg/kg/’) - Vasodilatateur pulmonaire : NO•, iloprost (inhalation), nitroglycérine (0.1-5.0 µg/kg/’) - Maintien de la perfusion coronarienne : noradrénaline (0.05 – 0.5 µg/kg/’), CPIA - Levosimendan (0.1-0.2 µg/kg/min) - Non-fermeture du péricarde et du sternum - Assistance ventriculaire

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Protection myocardique en chirurgie cardiaque La protection des organes est traitée en détail dans le Chapitre 24 (voir Protection myocardique). Le lecteur est donc renvoyé à ce chapitre pour davantage de détails, car nous ne donnerons ici que des lignes générales.

Arrêt et protection cardiaques par cardioplégie La consommation en oxygène du coeur se contractant à son rythme de base est de 10-15 mL/100 gm/min; lorsqu'il fibrille, elle descend à 8 mL/100 gm/min (75% de la consommation de base); lorsqu'il bat sans produire de travail éjectionnel pendant la CEC, le coeur ne consomme que le 50% de ce qu'il utilise normalement (Figure 7.52) [302]. L'arrêt en diastole par le potassium réduit la consommation d'O2 à environ 1 mL/100 gm/min en normothermie, et à 0.3 mL/100 gm/min en hypothermie. Il persiste donc un faible besoin en oxygène dans le coeur arrêté. La solution de cardioplégie doit permettre d'arrêter le coeur, de le protéger, et de lui fournir les éléments de sa survie jusqu'à la reprise de son activité. Elle doit prévenir la formation de radicaux libres et la surcharge calcique. Elle est basée sur deux éléments [296].

L’hyperkaliémie arrête le coeur en diastole. Les concentrations en K+ utilisées dans les solutions de cardioplégie varient entre 18-20 mmol/L et 20-25 mmol/L pour les solutions froides et chaudes, respectivement.

L'hypothermie est un élément majeur dans la protection myocardique. La température est de 5-10° pour les solutions de cardioplégie froide.

Comme le coeur continue à consommer un peu d'énergie par glycolyse anaérobe, l’acidose intra-cellulaire est tamponnées avec du bicarbonate de Na, du trometamol (Tris ou THAM), ou d'autres agents (histidine, acétate, phosphate). L'adjonction de bicarbonate à des solutions froides est un non-sens puisque ce dernier perd son pouvoir tampon à froid; seule la fonction imidazole de l'histidine des

mVO2

Rythme de base

Fibrill ventricul

Battant en CEC

Hyper-K + arrêt

2

4

6

8

10

12

Figure 7.52 : Consommation du coeur en oxygène (mVO2 en mL/100gm/min) dans différentes situations [302]. Rythme de base : débit normal en rythme sinusal. Fibrillation ventriculaire : consommation moyenne en fibrillation venriculaire. Battant en CEC : rythme spontané en décharge totale, la circulation étant assurée par la CEC. Hyper-K + arrêt : arrêt en diastole par une cardioplégie riche en potassium.

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protéines conserve le même degré de dissociation quelle que soit la température, donc conserve son pouvoir tampon en hypothermie profonde. C'est un des avantages de la cardioplégie au sang. Plusieurs voies d'administration sont possibles pour que la solution atteigne le myocarde. Une approche combinée est donc souvent nécessaire.

Canule dans la racine aortique; c'est la voie classique; elle n'assure pas une perfusion adéquate en cas d'insuffisance aortique (IA); même minime, une IA peut entraîner une dilatation aiguë du VG. Pression de perfusion: 70-150 mmHg.

Canulation coronarienne directe par des canules de Spencer; technique utilisée en cas d'IA majeure, elle présente le risque d'embolisation distale de plaques athéromateuses lorsque la canule pénètre l'ostium coronarien. Pression de perfusion: 70-150 mmHg.

Cardioplégie rétrograde par le sinus coronaire; elle a l'avantage d'atteindre les territoires distaux en cas de sténoses proximales serrées peu collatéralisées et d'éviter la fuite aortique, mais elle ne protège pas le ventricule droit dont le drainage se fait par les veines de Thébésius et non par le sinus coronaire. La canule est mise en place par une ponction de l'OD; elle possède un ballonnet semi-occlusif. La pression de perfusion doit rester située entre 30 et 40 mmHg; elle est mesurée par un capteur de pression séparé. Le débit est de 100-200 ml/min.

Perfusion des greffons veineux dès que l'anastomose distale est réalisée.

Solutions de cardioplégie

La cardioplégie doit arrêter le cœur, le protéger pendant l’absence de perfusion, limiter les lésions ischémiques et prévenir les lésions de reperfusion. Le cœur est arrêté en diastole par une solution hyperkaliémique (K+ 18-25 mmol/L) et hypothermique (5-10°C), dans laquelle peuvent être ajoutées diverses substances. La solution peut être cristalloïde ou à base de sang de la CEC. Débit de perfusion : 300 mL/min pour l’arrêt, 150 mL/min pour l’entretien. Quatre voies d’abord sont possibles : la racine de l’aorte (voie classique), les troncs coronaires (canulation directe), le sinus coronaire (voie rétrograde) ou les greffons veineux (après anastomose distale).

Techniques de cardioplégie

Malgré un demi-siècle de recherche sur la cardioplégie, la solution idéale n’est toujours pas trouvée. Il existe donc de nombreuses variations dans ces perfusats.

Solution cristalloïde hyperkalémique et hypotherme (5-10°) ; Sang additionné de solution potassique ; Cardioplégie au sang hypotherme ou normotherme ; Perfusion intermittente ou continue ; Pompe et circuit séparés sur la machine de CEC ou distribution sous manchette à pression ; Addition de substrat métabolique: glucose, acides aminés, ATP ; Addition d’agents protecteurs.

Le but d’une cardioplégie est de remplir six exigences physiologiques: l'arrêt cardiaque immédiat, le frein du métabolisme, l'apport de substrat, le maintien du pH, la prévention de l'oedème, et la prévention des lésions de reperfusion [62].

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Solutions cristalloïdes La solution de cardioplégie cristalloïde est la plus simple et la moins coûteuse ; elle est efficace dans les cas standards. Les solutions les plus utilisées sont de type extracellulaire enrichies en potassium et pauvres en calcium, comme la solution de St. Thomas (Tableau 7.16) [71]. D’autres solutions miment la composition intracellulaire (basses en sodium et sans calcium), comme la solution de Bretschneider ou la solution HKT Custodiol™ ; elles sont aussi utilisées pour la préservation d'organes en transplantation. On ajoute habituellement du magnésium pour diminuer l'augmentation de [Ca2+]i que provoque l'hyperkaliémie. L'avantage de la cardioplégie cristalloïde est la clarté du champ opératoire pour le chirurgien et la rhéologie favorable pour atteindre des zones distales à des obstructions coronariennes serrées, mais le désavantage est l'impossibilité de transporter de l'oxygène et le risque d'hémodilution [12]. Elle est de plus en plus remplacée par la cardioplégie au sang.

Tableau 7.16

Composition des solutions de cardioplégie cristalloïdes

Composant Bretschneider St. Thomas No 2

Na+ (mmol/L) 12 110 K+ (mmol/L) 10 16 Ca2+ (mmol/L) 0 2.4 Mg2+ (mmol/L) 4 32 pH 7.4 (histidine) 7.8 (bicarbonate) Osm (mosm) 320 324 Autre procaïne 0.2% ± procaïne (1 mEq)

mannitol 239 mmol/L ± O2

Les solutions sont administrées par une pompe séparée du circuit de CEC (Figure 7.13, page 25) sous une pression d'environ 70-150 mmHg et un débit de 200-300 mL/min pendant au moins 2 minutes, car il faut 2 mL de solution par gramme de coeur, soit environ 500 mL pour un adulte. Pour l’entretien de l’arrêt, il suffit de répéter la perfusion toutes les 30 minutes avec un débit de 150 mL/min pendant 1-2 minutes. La température est de 5-10°. Par voie rétrograde, la pression de perfusion est de 20-30 mmHg environ, avec une valeur maximale de 40 mmHg. Une modification de la cardioplégie cristalloïde consiste à administrer un petit volume d'une solution hautement concentrée [7]. Ces très fortes concentrations, notamment en en K+, sont possibles parce que la quantité perfusée représente approximativement le volume de l'arbre coronarien; la majeure partie de la solution reste donc dans le cœur et ne se déverse pas dans la circulation générale. Ce petit volume ne permet pas des échanges thermiques significatifs; la protection, d'une durée de 30-60 minutes, est assurée par la composition de la solution mais non par l'hypothermie.

Custodiol™, solution hyperkaliémique pauvre en Na+ et en Ca2+ mais additionnée d’histidine, de kéto-glutarate et de mannitol, administrée en une seule dose de 5 mL/kg en 7-10 minutes ;

Cardioplexol™, solution hyperkaliémique (100 mmol/L) et hypermagnésémique (162 mmol/L) additionnée de xylitol et de procaïne; elle se donne en un bolus de 100 mL, ce qui représente 10 mmol de K+, 16.2 mmol de Mg2+ et 300 mg de procaïne; elle protège le cœur pour 45 minutes, quelle que soit la température.

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Cardioplégie au sang Le sang artériel prélevé sur le circuit de CEC par une pompe séparée est additionné d'une solution électrolytique riche en potassium dans une proportion solution/sang de 1/5. Il traverse un échangeur thermique indépendant (Figure 7.13). C’est un perfusat alcalin (pH ≥ 7.6) et hyperosmolaire (≥ 330 mOsm), contenant 20-25 mmol/L de potassium et peu de calcium (≤ 1 mmol/L) (Tableau 7.17). On profite ainsi de la capacité du sang à transporter de l'oxygène, de son pouvoir tampon, et de ses qualités rhéologiques, oncotiques et antagonistes des radicaux libres. L'histidine des protéines du plasma fournit la majeure partie du pouvoir tampon, efficace quelle que soit la température.

Tableau 7.17

Composition des solutions de cardioplégie au sang

Composant Cardioplégie froide "Hot shot"

Na+ (mmol/L) 118 120 K+ (mmol/L) 18 9 Ca2+ (mmol/L) 0.3-0.5 0.2 Mg2+ (mmol/L) 1.6 1.6 pH (THAM) 7.6-7.8 7.5-7.6 Osm (mosm) 320-340 340-360 Autre glucose, O2 glucose, O2

glutamate, aspartate Comparée à la solution cristalloïde, la cardioplégie au sang donne de meilleurs résultats, notamment dans les cas à risque élevé: meilleure reprise fonctionnelle, diminution des lésions ischémiques, reprise du rythme sinusal spontané plus fréquente, meilleure préservation des réserves d'ATP [95]. Une variation dans la proportion solution/sang consiste à injecter par une pompe-seringue (à 45 mL/h) une solution cardioplégique concentrée contenant 16 mmol/L de KCl et 3 mmol/L de Mg2+ dans un débit de sang pris sur la ligne artérielle de CEC, dont la température est > 30°C (52). Cette technique dite de Calafiore limite le degré d’hémodilution [66]. La cardioplégie au sang peut être administrée sous trois températures différentes [1,95,111].

L'arrêt est en général induit par une perfusion froide (5-10°C) de 2-4 minutes à 200-300 mL/min et sous une pression de 60-150 mmHg; le maintien de l'immobilité mécanique est assuré par des perfusions itératives à 150 mL/min. Les températures basses améliorent la protection et permettent un temps d'arrêt entre les perfusions (30-40 minutes), mais les lésions de reperfusion restent très importantes.

On peut utiliser exclusivement une perfusion de cardioplégie au sang normothermique, mais elle doit rester continue ou réitérée toutes les 10 minutes. Si la distribution intramyocardique est inadéquate (cardiopathie hypertrophique, coronaropathie sévère), le coeur est alors exposé à des lésions ischémiques parce que le métabolisme n'est pas freiné. Par rapport à la cardioplégie froide, la cardioplégie "chaude" tend à améliorer la fonction ventriculaire postopératoire et à diminuer les marqueurs ischémiques (troponines, CK-MB), essentiellement dans les cas où elle peut rester continue pendant toute l'intervention.

Un compromis est recherché dans une température intermédiaire tiède (27-30°C), qui s'est révélée efficace pour la protection myocardique et qui atténue les lésions de reperfusion.

Avant la revascularisation, une perfusion de cardioplégie normothermique (hot shot) pendant 2-3 minutes à 60 mmHg, diminue les lésions de reperfusion.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 131

Substances ajoutées Les solutions de cardioplégie doivent être légèrement hyperosmolaires pour diminuer l'oedème, légèrement alcalines pour freiner l'acidose lactique, et contenir peu de calcium pour minimiser l'accumulation calcique intra-mitochondriale. De nombreux additifs sont utilisés pour remplir ces fonctions.

Tampon : Tris, THAM, histidine (le bicarbonate perd son effet tampon à froid) ; Agents hyperosomolaires (mannitol, albumine, colloïde) ; Magnésium, stéroïde, procaïne ; ATP, glucose ; Agents anti-oxydants.

Le préconditionnement par les agents halogénés (isoflurane, sevoflurane et desflurane à 1-2 MAC) pendant la durée de l’opération améliorent la tolérance du myocarde à l'ischémie.

Techniques de cardioplégie

Les techniques de cardioplégie peuvent être réparties en deux groupes : - Solutions cristalloïdes hyperkaliémique et hypothermes - Cardioplégie au sang, avec addition de K+ ; avantages : apport d’O2 et d’ATP, tampon (valences histidine) L’arrêt est provoqué par une hyperkaliémie, en général froide (5-10°C). Une solution de sang normotherme permet de réduire les lésions de reperfusion mais doit être continue. De nombreuses substances peuvent être ajoutées selon les protocoles.

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Incidents et accidents

La CEC est un système complexe (Figure 7.3, page 6) où les incidents critiques sont fréquents, malgré tous les garde-fous que la technologie a mis au point. Les problèmes aigus surviennent dans 0.4 – 1% des CEC [99,195,233]. Ils peuvent présenter un danger vital pour le malade et prennent souvent l'équipe médicale au dépourvu. Il est bon d'en connaître les plus importants, afin d'avoir une réaction adéquate lorsqu'ils surviennent en salle d'opération.

Que faire en cas de problème aigu ?

Hypotension au départ en CEC

L'hémodilution, la baisse de la viscosité sanguine et la perte du régime pulsatile diminuent la pression artérielle au démarrage en pompe. En général, la PAM est voisine de 50 mmHg à ce moment. Si elle se maintient à seulement 30 mmHg, le problème est sérieux.

Vérifier le capteur de pression, le zéro de l'artère, aspirer et purger la ligne. Insuffisance aortique inconnue; contrôler la régurgitation dans le VG à l'ETO; le clampage de

l'aorte rétablit la pression. Shunt gauche-droit par un canal artériel inconnu ou par un shunt G-D (Blalock, collatérales

aorto-pulmonaires); clamper le shunt. Vasoplégie extrême; choc anaphylactique (aprotinine, colloïde), choc septique (endocardite);

augmenter le débit, néosynéphrine, perfusion de nor-adrénaline. Dissection de l'aorte: disparition de l'onde de pression sur le cathéter artériel alors que la

pression est élevée sur la canule artérielle de CEC; l'aorte ascendante se boursouffle et devient violacée; stop machine et remise en charge immédiate.

Branchement inversé des canules de CEC; le sang est aspiré de l'aorte par la canule veineuse; clamper les tuyaux et stopper la machine.

Embolie gazeuse massive

L'air pénètre massivement, le plus souvent via le réservoir veineux, par désamorçage du retour veineux. En moindre quantité, il peut aussi provenir des aspirations, de la cardioplégie, de l'oxygénateur ou de déconnexions; l'air peut aussi passer de l'OD à l'OG par un foramen ovale perméable ou être aspiré dans le coeur gauche si le patient a des mouvements diaphragmatiques pendant que le VG ou l'OG sont ouverts.

Air dans la ligne artérielle et dans l'aorte; signes d'ischémie cérébrale et myocardique; résevoir vide.

Arrêt de la CEC, position de Trendelenburg forcée, débullage de l'aorte, ventilation à 100% O2.

Perfusion rétrograde (1-2 L/min) hypothermique (20-24°) par la veine cave supérieure pour perfuser le cerveau a retro et vidanger l'air qui s'est infiltré du côté artériel.

Reprise de la CEC normale après vidange complète de l'air; maintien d'une pression de perfusion élevée et d'une hypothermie à 20-24°C.

Protection cérébrale: thiopental, mannitol, méthylprednisolone, magnésium. Scan cérébral ou IRM dès que possible.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 133

Air dans les cavités gauches

Lorsqu'on a ouvert les cavités gauches, l'air provient des aspirations, d'une purge incomplète des cavités gauches avant le déclampage de l'aorte, du passage de l'OD à l'OG par un foramen ovale perméable, d'inspirium diaphragmatique pendant que les cavités gauches sont ouvertes. La cavitation (baisse de pression dans les vortex) et les variations de température diminuent la solubilité des gaz dans le sang, qui passent ainsi en phase gazeuse et forment des minibulles qui s'accumulent sous les surplombs.

Position de Trendelenburg accentuée, roulis de la table d’opération. Hyperinflation pulmonaire pour chasser l'air accumulé dans les veines pulmonaires. Aspiration continue (100-500 mL/min) par la canule de cardioplégie dans la racine de l’aorte. Vidange par ponction directe de la cavité (OG, VD) au trocart. Secousses et manipulations du cœur. Stimulation inotrope et pression de perfusion élevée (≥ 80 mmHg). Si débullage impossible: retour en CEC.

Embolie coronarienne

La CD (et les pontages) partant au zénith de l'aorte en décubitus dorsal, l'air y embolise fréquemment.

Sus- ou sous-décalage du segment ST en D II; dysfonction aiguë du VD à l'ETO et dans le champ opératoire; PVC élevée et hypotension.

Ponction directe de l'air dans les vaisseaux à l'aiguille fine. Différer la protamine. Si dysfonction majeure (akinésie droite), retour en CEC après administration de l'héparine. Un

soutien de 15-20 minutes est en général suffisant pour normaliser la situation. Si la défaillance droite est modérée, augmenter la pression de perfusion coronarienne:

perfusion de nor-adrénaline et de dobutamine.

Hypoxémie en CEC

L'hypoxémie est liée à un défaut d'alimentation en O2 (mélangeur, déconnexion), à un défaut de l'oxygénateur, ou à une désaturation excessive du sang veineux (bas débit, hématocrite trop bas, consommation excessive, hyperthermie). Une héparinisation insuffisante peut conduire à une thrombose partielle de l'oxygénateur.

Sang artériel de couleur foncée dans la canule aortique; PaO2 < 100 mmHg, SvO2 < 55%. Contrôle des connexions de l'oxygénateur (prise murale, tuyaux, fixation, fuite) et de la FiO2

du circuit. En début de CEC: ventilation à 100% O2 et sortie immédiate de pompe. En cours de CEC: refroidir à 20°C pour pouvoir interrompre la CEC et changer d'oxygénateur. Appeler de l'aide pour préparer un nouveau circuit. Curarisation profonde pour diminuer la consommation d'O2 musculaire.

Thrombose du circuit

La thrombose du circuit est un événement catastrophique qui oblige à interrompre la CEC pour changer immédiatement le réservoir, l'oxygénateur et les filtres. Elle est due à une héparinisation insuffisante, à une administration intempestive de protamine, ou à l'utilisation des aspirations de cardiotomie après neutralisation de l'héparine par la protamine.

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En début de CEC: ventilation à 100% O2 et sortie immédiate de pompe. En cours de CEC: refroidir à 20°C pour pouvoir interrompre la CEC et changer d'oxygénateur. Clamper les canules veineuses et artérielles. Appeler de l'aide pour préparer un nouveau circuit.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 135

CEC en chirurgie non-cardiaque Prendre en charge l'hémodynamique et les échanges gazeux par une CEC de soutien est une possibilité qui permet de travailler à l'aise dans un champ opératoire qui comprend des organes cruciaux pour la survie. De plus, une CEC permet de refroidir ou de réchauffer le patient. Il existe plusieurs domaines d'application de la CEC en-dehors de la chirurgie cardiaque.

Neurochirurgie: excision d'anévrysmes sous hypothermie; Chirurgie de la veine cave inférieure: tumeur rénale, transplantation hépatique; Chirurgie de l'arbre trachéo-bronchique, transplantation pulmonaire; Chirurgie de l'aorte thoraco-abdominale; Soutien hémodynamique en cas de défaillance ou d'intoxication aiguës; Réchauffement d'accidentés hypothermes; Perfusion isolée de membre en oncologie.

La possibilité d'induire une hypothermie modérée (30-34°C) par une CEC fémoro-fémorale a séduit les neurochirurgiens dans les années soixante déjà, notamment pour le traitement d'anévrysmes intracrâniens très grands ou stratégiquement mal placés, et d'hémangioblastomes situés dans le tronc cérébral. Malheureusement, la mortalité est restée élevée et la technique est peu utilisée. Outre les difficultés propres à la neurochirurgie, la CEC et l'hypothermie dans ces conditions présentent des risques majeurs de fibrillation ventriculaire dès que la température est inférieure à 30°C et de dilatation du VG à cause de l’absence de drainage du ventricule. De plus, elle augmente considérablement l'incidence d'acidose, d'hémorragies profuses et d'oedème cérébral [255]. Certaines tumeurs rénales peuvent s'étendre dans la veine cave inférieure (VCI) et remonter jusqu'à l'OD. La CEC permet d'occlure la VCI et de limiter le risque d'embolisation tumorale [209]. L'échocardiographie trans-oesophagienne (ETO) peropératoire permet de diagnostiquer la position des masses tumorales dans la VCI et de monitorer le risque d'embols en continu. En transplantation hépatique, il s'agit de réaliser un shunt veino-veineux pour maintenir le flux de la VCI vers l'OD lorsque le chirurgien est obligé de clamper la veine cave et la veine porte pendant l'hépatectomie du receveur, ce qui entraîne l'effondrement du débit cardiaque accompagné d'une stase mésentérique et rénale massive. Dans ce cas, on utilise en général un circuit veino-veineux pré-hépariné et une pompe centrifuge, mais pas d'oxygénateur ni de réservoir; le débit ne doit pas descendre au dessous de 1 L/min, sans quoi la précharge du coeur n'est plus maintenue et le circuit risque de thromboser. Le risque d'embolie et de décanulation accidentelle n'est pas négligeable. Les développements de la chirurgie hépatique ont rendu cette technique plus ou moins caduque. Il arrive que des tumeurs ou des traumatismes trachéo-bronchiques nécessitent une reconstruction empêchant toute ventilation pendant plus d'une heure. Une CEC (canulation fémoro-fémorale, ou aorte ascendante et OD de façon habituelle) permet de maintenir les échanges gazeux pendant cette période et d'opérer une trachée débarrassée du tube oro-trachéal. En transplantation pulmonaire, il n'existe malheureusement pas de test préopératoire fiable qui permette de prédire le besoin de CEC, si bien que c'est le test de clampage de l'artère pulmonaire dans le champ opératoire qui permet seul de décider. Dans les syndromes restrictifs, une faible tolérance à l'effort et un abaissement de la fraction d'éjection du VD ont une certaine valeur pronostique [97]. Si le clampage de l'artère pulmonaire engendre une défaillance ventriculaire droite avec ou sans poussée hypertensive pulmonaire et si la situation n'est pas contrôlable pharmacologiquement, il est nécessaire de recourir à une CEC pour maintenir le débit cardiaque. La CEC donne aussi beaucoup plus de latitude à l'opérateur pour manipuler le coeur, et permet de réaliser les anastomoses des veines pulmonaires dans de meilleures conditions. De lourdes comorbidités associées à des sténoses très proximales des troncs coronariens et à une dysfonction ventriculaire (FE < 0.25) peuvent être une contre-indication aux pontages aorto-

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 136

coronariens. Toutefois, le risque de fibrillation ventriculaire et de collapsus circulatoire est trop élevé pour procéder à une dilatation et pose de stents par intervention coronaire percutanée (PCI percutaneous coronary intervention). On peut alors procéder à une PCI sous assistance circulatoire par une CEC fémoro-fémorale en salle de cathétérisme. La tendance actuelle est plutôt d'utiliser une contre-pulsion intra-aortique. Le soutien par une CEC pendant 5-10 heures peut suffire à maintenir en vie un patient présentant une intoxication médicamenteuse, notamment avec des anti-arythmiques comme la flécaïnide ou la digitale. Une hémofiltration accélère la clairance du produit. La miniaturisation de circuits héparinés (Mini-CEC, voir Figure 7.16 page 28) et les possibilités de ponction fémorale percutanée (au lieu de canulation à ciel ouvert) ont récemment permis d'exporter la CEC de soutien en-dehors du bloc opératoire comme support hémodynamique d'urgence chez des patients en choc cardiogène ou en arrêt cardio-pulmonaire (voir Chapitre 12 Dispositifs à court terme) [38]. Les résultats sont encourageants: dans une série de 46 patients, on relève 61% de réussites permettant le sevrage de la CEC et 28% de survie à long terme; la CEC n'a pas permis d'atteindre un débit satisfaisant dans 11% des cas seulement [316]. L'application à la chirurgie de l'aorte thoraco-abdominale est traitée dans le chapitre de la chirurgie de l'aorte (voir Chapitre 18 Protection médullaire); le soutien de l'hémodynamique et des échanges gazeux (ECMO) est envisagé dans le chapitre de l'insuffisance cardiaque (voir Chapitre 12 Assistance ventriculaire). Technique de la CEC de soutien Montage du circuit Ce type de circuit comprend tous les éléments habituels d'une CEC de chirurgie cardiaque: réservoir veineux, pompe à galet ou centrifuge, oxygénateur, échangeur thermique, aspirations, filtres, éventuellement hémofiltration. L'important volume d'amorçage (1200-1500 mL) est responsable d'une hémodilution significative du patient; la technique présente également tous les inconvénients d'une CEC classique: encombrement de la salle d'opération, hémorragies, risques d'embolies gazeuses, syndrome inflammatoire systémique, troubles hématologiques et neurologiques. On peut réduire ces phénomènes en utilisant des systèmes de Mini-CEC qui ne disposent pas de réservoir veineux et fonctionnent avec une pompe centrifuge (volume d'amorçage: 400-800 mL) (voir Mini-CEC et Figure 7.16). Le plus souvent, on canule les vaisseaux fémoraux: le sang est drainé par une canule veineuse placée dans la VCI depuis la veine fémorale; certaines longues canules permettent de remonter jusqu'à l'OD pour avoir un meilleur drainage. Le sang artérialisé est renvoyé dans l'aorte abdominale par une canule artérielle introduite dans l'artère fémorale jusque dans l'artère iliaque primitive. Le sang circule donc de manière rétrograde dans l'aorte, ce qui augmente le risque d'embolies cérébrales en cas d'athéromatose importante de l'aorte thoraco-abdominale. Un anévrysme ou un syndrome de Leriche sont évidemment des contre-indications. Ce système ne permet habituellement pas un débit supérieur à 5 L/min; la moyenne est 2-4.5 L/min selon la résistance sur la canule artérielle (voir Chapitre 12 Dispositifs à court terme). Au lieu de disséquer les vaisseaux fémoraux et de placer les canules à ciel ouvert, on dispose maintenant d'une technique de canulation percutanée par méthode de Seldinger (canule artérielle 15F-19F, canule veineuse 17F-23F) [316]; il est possible de disposer d'une canule distale (5F) pour la perfusion continue simultanée du membre inférieur. On peut encore concevoir un circuit veino-veineux entre la veine fémorale et un retour de sang oxygéné dans l'oreillette droite par une deuxième longue canule veineuse. Outre la technique fémoro-fémorale, il existe une pléiade de possibilités de

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 137

montage variant selon les problèmes chirurgicaux: canulation classique dans l'aorte ascendante et l'OD, canulations abdominales, canulation de l'artère sous-clavière droite, etc. L'incidence de complications locales sur l'axe fémoral artériel et veineux est de 26%, le plus grave étant l'ischémie du membre inférieur dont l'artère fémorale est obstruée par la canule. Le taux d'embolisation systémique (cérébral et mésentérique) est de 3-5% [316]. En cas d'insuffisance de la valve aortique, il est prudent de monitorer la dimension du VG avec l'ETO. La plupart du temps, on utilise des circuits pré-héparinés permettant de réduire la quantité d'héparine systémique: alors que la dose normale est 300 UI/kg, on peut administrer seulement 100 UI/kg d'héparine et rechercher un ACT de 250 secondes au lieu de 450 secondes. L'héparine est administrée avant d'introduire les canules et l'ACT contrôlé 2-3 minutes plus tard. Quel qu'en soit le dosage, l'héparinisation aggrave immédiatement l'hémorragie dans le champ opératoire. C'est la raison pour laquelle on essaie de procéder à toute la dissection de l'intervention chirurgicale avant de canuler les vaisseaux. Avec une basse héparinisation, on ne peut plus interrompre le débit de la machine une fois que le circuit est rempli de sang à cause du risque de thrombose, qui a lieu en général dans l'oxygénateur. Il existe donc un système de shunt permettant de maintenir une circulation minimale au sein de la machine en cas d'interruption du débit dans le malade. En chirurgie oncologique, il est habituel de ne pas utiliser de CellSaver™ à cause du risque d'embolisation systémique de fragments tumoraux, bien que ce risque ne soit probablement réel que pour les tumeurs à métastatisation hématologique. De toute manière, l'utilisation quasi systématique des aspirations de la CEC est déjà responsable d'une autotransfusion; il n'existe aucune preuve que les filtres du circuit veineux et artériel soient suffisants pour intercepter toute embolisation tumorale. Monitorage Pour l'anesthésiste, la mise en place d'un circuit de CEC impose le monitorage invasif habituel.

Cathéter artériel: la voie radiale est en général préférable en cas de CEC fémoro-fémorale, mais le choix de la position du cathéter dépend de la stratégie chirurgicale.

Voie veineuse centrale: elle est nécessaire pour l'administration des substances vasoactives et des agents d'anesthésie pendant la CEC, le débit des veines périphériques étant aléatoire.

Cathéter pulmonaire de Swan-Ganz: il est surtout utile dans le postopératoire pour gérer l'administration liquidienne et surveiller l'hémodynamique; en peropératoire, il renseigne sur la part du débit assuré par le coeur, et permet de monitorer la SvO2.

ETO: très utile pour contrôler la mise en place des canules intrathoraciques (positionnement en OD), elle assure une surveillance optimale de la performance des ventricules et de la volémie; l'ETO est nécessaire pour exclure ou monitorer une insuffisance aortique (risque de dilatation ventriculaire) et un FOP (risque d'embolie paradoxale).

Comme le risque hémorragique est élevé, il est bon de disposer de voies veineuses périphériques de gros calibre. Lors d'une CEC de soutien, les échanges gazeux sont assurés à la fois par l'oxygénateur de la CEC et par les poumons du malade, en fonction du débit relatif de chacun des deux composants. Pour évaluer l'oxygénation, on dispose de quatre données.

SpO2: la saturométrie périphérique traduit la quantité d'O2 circulant effectivement en périphérie, mais elle est sujette à beaucoup d'artéfacts à cause des variations de résistance artérielle périphérique et de température. Elle n'est fiable que si le moniteur affiche une courbe correctement pulsée.

SvO2: la saturation veineuse centrale est mesurée en continu dans le retour veineux de la machine de CEC; elle est le meilleur indice de l'adéquation de l'apport d'O2 (DO2) par rapport

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 138

aux besoins de l'organisme (VO2). Sa précision est fonction de l'endroit où est capté le sang par la canule veineuse (OD, VCI, veine iliaque). En dessous de 60%, le patient rentre dans la zone à risque; en dessous de 50%, le DO2 effectif est insuffisant: le débit cardiaque et la ventilation doivent être améliorés. L'équivalent d'une gazométrie veineuse centrale est obtenu en effectuant un prélèvement au niveau du réservoir veineux.

SaO2: placé sur le circuit artériel de la CEC, le capteur de SaO2 ne mesure que l'efficacité de l'oxygénateur de cette dernière; pour l'anesthésiste, il est une fausse sécurité parce que sa valeur voisine normalement 100%.

Gazométrie artérielle: elle doit être effectuée au niveau du cathéter artériel périphérique, et non dans le circuit de CEC, où elle ne contrôlerait que le fonctionnement de l'oxygénateur.

Il n'est pas rare que les différents capteurs de SO2 donnent des valeurs différentes. Il faut toujours être alerté par la valeur la plus basse et ne pas se consoler avec la SaO2 fournie par le perfusioniste. Dans le doute, il faut effectuer une gazométrie artérielle périphérique (idéalement dans l'artère radiale) et relever la SvO2 du retour veineux de CEC. La pertinence de la SvO2 mesurée au niveau du cathéter pulmonaire de Swan-Ganz est fonction du débit sanguin effectif à travers les poumons, c'est-à-dire du rapport entre le débit du coeur et celui de la pompe. Anesthésie Le démarrage d'une CEC partielle représente toujours un moment d'instabilité à cause de l'hémodilution soudaine par le volume d'amorçage de la pompe, et du risque de vider le malade en captant trop de sang dans le retour veineux vers le réservoir. La CEC de soutien présente des caractéristiques bien particulières.

Deux pompes artérielles distinctes: le coeur du patient et la machine de CEC; Une précharge commune: le volume de l'OD ou de la VCI; Deux systèmes de ventilation parallèles: les poumons et l'oxygénateur.

Le résultat est un équilibre plus ou moins stable entre le système-patient (coeur et poumons) et le système-machine (pompe et oxygénateur). Il dépend de la contribution proportionnelle de chacun au débit artériel et à la ventilation. Cela va de la décharge complète du coeur à l'assistance partielle pour normaliser la température ou l'oxygénation, et se traduit par une courbe de pression artérielle quasi-dépulsée dans un cas ou une simple augmentation de la diastolique dans l'autre. Il est prudent de maintenir une éjection ventriculaire résiduelle pour prévenir la formation de thrombus intraventriculaire. Une décharge insuffisante du VG se traduit par une dilatation ventriculaire qui met en danger la survie. Le partage de la précharge conduit à des transvasages liquidiens massifs et des échanges médicamenteux constants entre les deux circuits, alors que les pressions artérielles sont assurées par deux pompes séparées et indépendantes. Il faut admettre un certain degré de "roulis rythmique" entre les pressions mesurées en artère radiale et en artère fémorale, et éviter toute sur-correction qui aggrave ce balancement. La méthode la plus fiable est de jouer sur la capacité de la CEC à stocker du sang: le perfusionniste augmente son retour veineux et emmagasine provisoirement du volume dans le réservoir en cas d'hypertension, ce qui diminue la précharge du coeur. Au contraire, il freine son retour en cas d'hypotension, ce qui augmente la précharge du coeur; il rajoute du volume dans la machine pour maintenir le débit de celle-ci. La précharge de la CEC est réglée par le débit de sortie du réservoir veineux. La postcharge (résistance artérielle systémique) est commune aux deux systèmes, mais la pression générée est fonction de la participation respective du coeur et de la pompe. L'administration d'agent hypo- ou hypertenseurs intraveineux n'intervient que lorsque la pression ne peut pas être équilibrée par le jeu du réservoir veineux ou l'adjonction de volume. En général, le débit-machine ne doit pas descendre en dessous de 1.0 L/min à cause du risque de thrombose dans l'oxygénateur. L'adéquation

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 139

du débit global est jugée par la SpO2, la gazométrie artérielle périphérique, la SvO2 et la diurèse, qui doit être idéalement de 0.5-1 mL/kg/heure. Le malade est ventilé à la fois par l'oxygénateur de la CEC et par le respirateur, la proportion de chaque système étant fonction du débit relatif de la CEC et de l'artère pulmonaire. Lorsqu'on utilise un halogéné comme agent d'anesthésie, il est important d'en régler une concentration inspirée identique sur l'oxygénateur et sur le respirateur, sans quoi le gaz qui entre par un système va ressortir par l'autre. Il est prudent d'avoir une réserve de sang et de facteurs de coagulation suffisante parce qu'une hémorragie profuse est courante lorsqu'on anticoagule un patient au cours d'une intervention chirurgicale majeure ou pendant un soutien circulatoire de plus de 24 heures. Des hémorragies jusqu'à 1000 mL/h peuvent survenir dans 20% des cas [316].

CEC de soutien

Un circuit de CEC peut être nécessaire pour maintenir l’hémodynamique et/ou la ventilation pendant des interventions non-cardiaques mettant momentanément hors-circuit le cœur ou les poumons. Particularités : - Deux pompes : le cœur et la machine de CEC (concurrence potentielle) - Une seule précharge : retour veineux cave - Deux système ventilatoires : les poumons et l’oxygénateur - Température minimale 32°C (risque de fibrillation ventriculaire < 32°C) - Monitorage comme en chirurgie cardiaque - Surveiller SpO2 et SvO2 - Fi des gaz identique sur le respirateur et l’oxygénateur - Gérer la pression artérielle en variant la précharge par le réservoir veineux de la CEC

Assistance ventriculaire percutanée Au lieu de monter tout un circuit de CEC pour soutenir le VG dans un passage critique, il est possible de recourir à un système d’assistance ventriculaire externe plus simple (voir Chapitre 12 Dispositifs à court terme). Cette assistance est monoventriculaire et permet de maintenir la perfusion des organes pendant un épisode de choc cardiogène, ou de procéder à des interventions percutanées à haut risque sous couvert d’une prothèse circulatoire [259]. Ces systèmes sont conçus pour fonctionner pendant une courte durée, au maximum 2 semaines [282]. Ils sont implantables par canulation fémorale, mais peuvent aussi être placés dans d’autres vaisseaux selon les circonstances (sortie de CEC, par exemple). Le débit pulmonaire et les échanges gazeux sont en général assurés par le VD et les poumons du patient. Ces dispositifs sont indiqués dans des circonstances où le cœur gauche ne peut plus assurer la survie.

Choc cardiogène : infarctus massif, sortie de CEC impossible (stunning), myocardite aiguë, intoxication médicamenteuse, contusion cardiaque traumatique ;

PCI complexe (tronc commun) en cas de dysfonction gauche sévère ; Stabilisation avant chirurgie cardiaque : ischémie active, CIV, IM degré IV ; Attente d’une solution à long terme comme une transplantation d’urgence ou une assistance

implantée. La mise en place a lieu sous contrôle fluoroscopique et échocardiographique. Ces systèmes demandent une anticoagulation complète avec de l’héparine (ACT > 300 secondes). Leur performance dépend de plusieurs conditions [282].

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VD fonctionnel ; un support inotrope est souvent nécessaire en continu pour soutenir le VD ; Echanges gazeux satisfaisants ; Absence d’insuffisance aortique (IA degré > I) (risque de dilatation aiguë du VG) ; Vaisseaux fémoraux de bonne taille (risque d’ischémie du membre canulé).

En assistance monovenriculaire gauche, ces systèmes fournissent seulement une pression aortique moyenne ; dans ce cas, l’absence de PAs peut compromettre la perfusion coronarienne systolique du VD, notamment en présence de dysfonction droite et/ou d’hypertension pulmonaire (Figure 7.53).

L’Impella™ (Abiomed, USA) consiste en une vis d’Archimède montée dans un cathéter placé à travers la valve aortique qui aspire le sang dans le VG et le renvoie dans l’aorte ascendante. Le système est aussi utilisable en assistance monoventriculaire droite entre le VD et l’artère pulmonaire. Le placement de la canule à cheval sur la valve aortique est très précis, sinon la valve peut devenir insuffisante ou le débit de la pompe peut dilater le VG ; l’échocardiographie transoesophagienne est très utile pour en contrôler l’adéquation.

Le TandemHeart™ (Cardiac Assist Technologies, USA) draine le sang veineux de l’OG par une canule trans-septale (21F) introduite par voie fémorale et le renvoie dans l’artère fémorale (canule 15-17F) au moyen d’une pompe centrifuge qui débite jusqu’à 4 L/min à 7'500 tours/min.

A B

C

E

D

OD

OG

Figure 7.53 : Assistance ventriculaire gauche percutanée. A: système Impella™ (Abiomed, Danvers, MA, USA); la canule introduite par l’artère fémorale ou l’aorte ascendante (en cas de sternotomie) est à cheval sur la valve aortique. La vis d’Archimède qui tourne à l’intérieur (B) aspire le sang dans le VG et le renvoie dans l’aorte ascendante. C: système TandemHeart™ (Cardiac Assist Technologies, Pittsburgh, USA); la canule veineuse introduite par voie fémorale prélève le sang dans l’OG en traversant le septum interauriculaire (D); le sang est renvoyé par une pompe centrifuge (E) dans l’artère fémorale.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 141

Le Lifebridge™ (Medizintechnik GmbH, Allemagne) est un nouveau système modulaire semi-automatique comprenant un oxygénateur et une pompe centrifuge permettant un débit de 4 L/min par canulation périphérique ou 6 L/min par canulation centrale. Le système est portable, muni de batteries, et peut fonctionner en extra-opératoire.

La possibilité de prendre en charge un arrêt circulatoire réfractaire par une assistance ventriculaire aisée à installer pose un problème majeur : comment évaluer les chances de récupération à long terme de la fonction cardiaque et de la fonction neurologique ? Deux critères sont à prendre en compte : 1) la durée de débit cardiaque nul (no-flow), et 2) la durée de bas débit cardiaque (low-flow). On peut considérer les éléments suivants comme une indication possible à l’assistance circulatoire [297] :

Durée de débit cardiaque nul < 5 minutes ; Durée de bas débit cardiaque (en réanimation) < 100 minutes et PeCO2 > 10 mmHg.

Il est évident que ces critères simples sont à mettre en balance avec les circonstances de l’arrêt cardiaque (âge, traumatisme, hypothermie, etc). Implications pour l’anesthésie Bien que certains systèmes percutanés puissent être théoriquement implantés sous sédation, une anesthésie générale est requise pour la mise en place d’une assistance (voir Chapitre 12 Anesthésie et assistance ventriculaire). Un cathéter artériel est obligatoire, puisque les pompes rotatives ou axiales fournissent une pression dépulsée, équivalente à la PAM. Le site de canulation artérielle est choisi en fonction des canulations de l’assistance. Une voie veineuse centrale est également nécessaire pour la surveillance de l’éventuelle dysfonction droite (PVC > 12 mmHg) et pour l’administration d’agents inotropes ; un cathéter de Swan-Ganz est très utile, mais il n’est pas toujours possible de le mettre en place dans les conditions difficiles de l’urgence et du choc cardiogène profond. Dans les situations où les minutes comptent, on est souvent contraint à un monitorage minimal. L’échocardiographie transoesophagienne (ETO), par contre, est aisée à installer ; elle fournit des renseignements indispensables sur la valve aortique (absence d’IA), sur la position des canules, sur la décharge du VG et sur la fonction du VD.

Systèmes d’assistance ventriculaire percutanée Systèmes d’assistance gauche percutanés (voie fémorale): - Impella® : vis d’Archimède à cheval sur la valve aortique (2.5 – 5.0 L/min), pompe le sang dans le VG et le propulse dans l’aorte ascendante - TandemHeart® : pompe le sang dans l’OG par une canule trans-septale et le propulse dans l’artère fémorale - Lifebridge® : système modulaire semi-automatique avec pompe et oxygénateur La mise en route d’une asistance gauche peut précipiter une défaillance droite. La mise en route d’une assistance monoventriculaire gauche peut toujours conduire à une défaillance droite aiguë parce que la dysfonction du VD était masquée par celle du VG et parce que la pompe augmente soudainement le retour veineux systémique à droite ; d’autre part, la décompression du VG modifie la géométrie du septum interventriculaire et annule sa participation à l’éjection droite. Cette menace de défaillance droite implique de prendre les mesures nécessaires au soutien du VD avant que ne se manifeste un choc cardiogène.

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 142

Hyperventilation avec maintien d’une Pit moyenne aussi basse que possible ; Perfusion d’agent inotrope (milrinone + adrénaline) ; Perfusion de noradrénaline ou de vasopressine pour maintenir la pression de perfusion

coronarienne ; Vasodilatateur pulmonaire : NO, prostacyclines, nitroglycérine.

CEC de réchauffement Les capacités d'échange thermique de la CEC en font une excellente solution pour réchauffer rapidement les accidentés hypothermes. L'idée en revient à Kugelberg qui a le premier ramené à la normothermie un patient dont la température centrale était de 21.7°C [192]. Outre un réchauffement homogène, la CEC offre un support qui écarte le risque d'effondrement hémodynamique sur fibrillation ventriculaire (seuil de FV: ≤ 28°C) et qui améliore la perfusion tissulaire par hémodilution. Le coeur est réchauffé avant le reste de l'organisme, et le débit peut être augmenté lors de la vasodilatation périphérique qui s'installe avec la normothermie. Indications La CEC est le traitement de choix pour tous les patients dont la température centrale est inférieure à 28°C, quel que soit leur état hémodynamique, et pour ceux qui sont en collapsus circulatoire. Au-dessus de 32°C, un réchauffement par voies externe (couverture chauffante, pièce chaude) et interne (lavage gastrique, perfusions chauffées, dialyse péritonéale) est suffisant. Entre 28° et 32°C, le réchauffement non invasif est recommandé si le rythme cardiaque est sinusal et la pression maintenue. Chez les accidentés, le problème majeur est l'association de polytraumatismes et d'hypoxie préalable. Les chances de survie sont meilleures si le refroidissement a eu lieu sans étouffement, ou plus rapidement que l'installation de l'hypoxie. La situation idéale pour la victime d'avalanche, par exemple, est d'être peu habillée, peu profonde, et d'avoir une poche d'air devant le visage. Si le refroidissement est rapide, la demande en O2 baisse avant que la suffocation et/ou le collapsus circulatoire n'effondrent l'apport d'O2, et la survie est bonne. En cas de noyade en eau froide, la survie est pénalisée à cause de l'asphyxie concomitante par l'eau, sauf si la tête n’a pas été immergée. La présence de lésions traumatiques (fractures, lésions viscérales, TCC) aggrave dramatiquement le pronostic; lors du réchauffement, le risque d'hémorragie massive et de crush syndrome est très élevé. Les chances de succès sont également différentes selon les circonstances. Les victimes d'avalanche ou d'accidents nautiques sont en général des sportifs en bonne santé, alors que les hypothermes rencontrés en milieu urbain ou dans la campagne sont souvent sans-abris, alcooliques ou drogués. La jeunesse ne semble toutefois plus être un avantage en dessous de 26°C. Livide, hypertonique, sans pouls, en mydriase et en apnée, un patient froid n'est pas un patient mort, mais il lui ressemble furieusement ! En extra-hospitalier, si les voies aériennes sont libres, on procède à une réanimation cardio-respiratoire selon les recommandations habituelles, avec massage cardiaque selon le rythme standard en cas d'asystolie, et défibrillation en cas de fibrillation ventriculaire. On ne déclare le décès que si les voies aériennes sont obstruées et le patient en asystolie. Au déchocage, il faut des critères de viabilité pour démarrer des procédures de réchauffement invasives, car on ne peut pas savoir si une asphyxie a précédé l'hypothermie, ou si cette dernière a protégé l'organisme pendant le collapsus circulatoire et l'arrêt ou la fibrillation ventriculaire. La FA est courante lorsque la température centrale est < 32°C ; la fibrillation ventriculaire survient en général < 28°C. La T° centrale se mesure dans le tiers inférieur de l’oesophage. Selon les recommandations suisses pour la prise en charge des accidents de montagne, l’hypothermie est classée en 4 stades [105].

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Précis d’anesthésie cardiaque 2013 – 07 Circulation extracorporelle 143

Stade I : 32-35°C, patient conscient et frissonnant ; Stade II : 28-32°C, état de conscience altéré, pas de frissons ; Stade III : 24-28°C, patient inconscient, mais signes vitaux présents ; Stade IV : < 24°C, signes vitaux absents.

La CEC de réchauffement est clairement indiquée au stade IV, et au stade III si l’hémodynamique est instable ou le réchauffement non-invasif inefficace. Par régression logistique, on a pu faire ressortir trois critères qui sont indépendamment associés à la survie [328] :

Kaliémie < 12 mmol/L ; PaCO2 < 80 mmHg ; Absence de traumatisme sévère.

Au-delà de ces valeurs, les chances de survie sont nulles parce que des dégâts irréversibles ont eu lieu avant que le malade ne soit refroidi. En deçà de ces valeurs ou en leur absence, il faut réanimer activement en se souvenant que "No one is dead until warm and dead". Toutefois, ces critères ne semblent pas s'appliquer aux enfants; en effet, dans une série de 12 enfants de 2 à 12 ans réchauffés en CEC après noyade en eau froide et température corporelle inférieure à 25°C, ni le pH, ni le potassium, ni la PaCO2 ne se sont révélés être des facteurs discriminants entre les survivants et les non-survivants. Chez les adultes, un potassium > 12 mmol/L est le critère déterminant de lésions irréversibles. Aucun patient n’a survécu au réchauffement à ce niveau d’hyperkaliémie, alors que ceux qui ont une T° centrale abaissée jusqu’à 14°C n’ont présenté aucune séquelle neurologique après réanimation [58]. Technique Actuellement, l’ECMO (voir Chapitre 12 Dispositifs à court terme) est préférée à une CEC standard car les résultats sont sensiblement meilleurs, surtout parce que le SDRA qui survient très fréquemment après la réanimation est mieux pris en charge par une ECMO dans les heures qui suivent [58]. La canulation de l'artère et de la veine fémorale permet de mettre rapidement en route la CEC sans interférer avec les mesures de réanimation (MCE, intubation, etc); elle assure un débit de 4 L/minute chez l'adulte, ce qui autorise à monter la température de 1°C par 5 minutes. Le gradient de température entre le sang du patient et l'échangeur thermique ne doit pas dépasser 10°C. La température du sang ne doit en aucun cas être supérieure à 37°C. L'utilisation de circuits héparinés permet de réduire la dose d'héparine systémique, donc les hémorragies secondaires. Chez les enfants, les vaisseaux fémoraux sont souvent trop fins pour permettre un débit satisfaisant; une sternotomie est alors nécessaire pour procéder à une canulation conventionnelle. En général, le rythme cardiaque se rétablit entre 25° et 30°C, mais souvent le coeur commence par fibriller; cette fibrillation est habituellement réfractaire aux chocs électriques en dessous de 30°C. Si aucune activité cardiaque n’a repris à 32°C, l’arrêt est définitif [58]. Les patients manifestent des signes de réveil lorsque la température centrale dépasse 32°C. Les altérations des facteurs de coagulation et de l'adhésivité plaquettaire au froid rendent l'hémostase difficile et demandent des perfusions de facteurs de coagulation et de plaquettes. Dans le postopératoire, le SDRA (42%), la pneumonie (22%) et l'insuffisance rénale (20%) sont courants [369]. Résultats La littérature comprend essentiellement des rapports de cas isolés. Les quelques séries publiées donnent un taux de succès sans séquelles neurologiques d'environ 55% [58,328,369,373]. Une étude hélvétique a rapporté un taux de survie de 47% (15 patients sortis vivants de l'hôpital sur 32 accidentés hypothermes avec une température moyenne de 21.8°C); le status neurologique est normal

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chez 14 patients, un seul présentant un léger handicap [373]. Les causes de l'hypothermie étaient l'avalanche, la chute en crevasse, l'immersion en eau froide ou le suicide. Tous étaient en arrêt circulatoire et en mydriase fixe à l'arrivée. La durée moyenne entre la découverte des blessés et la CEC était de 141 minutes, et la durée de CEC de 98 minutes. Un groupe finlandais a publié une étude groupant 75 patients hypothermes, dont 42 ont pu être réchauffés par des moyens non invasifs parce qu'hémodynamiquement stables [328]. Sur les 25 patients en collapsus cardio-circulatoire, un seul présentait un TCC sévère et un autre une asphyxie préalable; les autres souffrait d'une exposition à l'air froid ou d'une immersion en eau froide. Ces 23 patients, arrivés à l'hôpital sous MCE, avaient une température moyenne de 24°C et ont été massés pendant 106 minutes avant le début de la CEC; celle-ci a duré en moyenne 137 minutes. Quatorze (61%) sont sortis vivants de l'hôpital. Il n'y a pas de corrélation entre le taux de survie à long terme et le délai depuis l'accident jusqu'au réchauffement ou la température à l'arrivée pour autant qu'elle soit supérieure à 12°C. Comme la récupération fonctionnelle des survivants est excellente, il y a tout lieu d'être agressif dans la prise en charge des hypothermes profonds.

CEC de réchauffement

Indications : hypothermie accidentelle avec T° centrale < 24°C et instabilité hémodynamique ou arrêt circulatoire. Survie sans séquelles neurologiques dans 55% des cas. Conditions de succès : - Refroidissement survenu sans asphyxie préalable ni traumatisme majeur - Kaliémie < 12 mmol/L - PaCO2 < 80 mmHg Technique de CEC ou d’ECMO fémoro-fémorale artério-veineuse

- Réchauffer de 1°C par 5 minutes - Gradient maximal entre T° du sang et de l’échangeur thermique : 10°C - Température du sang jamais > 37°C Comme la récupération fonctionnelle des survivants est excellente, il y a tout lieu d'être agressif dans la prise en charge des hypothermes profonds, dont on ne peut pas savoir s’ils sont décédés avant d’avoir été réchauffés Perfusion isolée de membre Introduction La perfusion isolée d’un membre (ILP : Isolated Limb Perfusion) permet d’y administrer des quantités importantes d’antimitotiques tout en réduisant la toxicité systémique de ces substances. Cette technique autorise également le maintien du membre en hyperthermie (environ 40 °C), ce qui augmente l'efficacité cytolytique des agents. Elle s'adresse à des malades présentant des métastases en transit de mélanome ou de sarcome, isolées à un membre, sans dissémination systémique. La survie de ces patients est en général inférieure à 6 mois, même après désarticulation du membre. Le traitement permet le sauvetage du membre dans 80% des cas, avec une survie moyenne de 3 à 5 ans [203]. La machine de CEC est connectée aux vaisseaux iliaques ou fémoraux (respectivement axillaires pour le membre supérieur); elle comprend pompe, oxygénateur et réservoir comme une CEC standard, mais n'alimente que le membre isolé de la circulation générale de l'organisme (Figure 7.54).

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Les substances utilisées dans l’ILP varient selon les indications. Ce sont :

Pour les mélanomes : TNFα + Interféron-gamma (IFN) + melphalan ; Pour les mélanomes très distaux chez des personnes âgées : melphalan seul ; Pour les sarcomes : TNFα + melphalan.

Figure 7.54 : Système de circulation extracorporelle pour une perfusion isolée du membre inférieur selon la technique de Lejeune [203]. Les fuites systémiques à partir du membre isolé sont inévitables, mais leur importance dépend de la relative surpression créée dans le membre par le débit de la CEC ; elles sont peu significatives lorsque ce débit est maintenu à 45 mL/min par litre de volume du membre. Ces fuites se soldent par des effets secondaires dont l’intensité est proportionnelle à leur importance et à la toxicité systémique de la substance utilisée, le plus violent étant le TNF.

Echanges liquidiens entre le patient et la CEC ; Hyperthermie systémique ; Choc distributif par vasoplégie massive, en général accompagné d’hypertension pulmonaire ; Fuite capillaire interstitielle (Capillary Leak Syndrome) ; SDRA (survient entre 6 et 24 heures post-op) ; Altérations hématologiques dues à la chimiothérapie ; Dysfonctions organiques (insuffisance rénale, hépatique) dues au TNF.

Température du sang

Contrôle de pression

Oxygénateur

Eau 41-43°C

Pompe Débitmètre

Trappe à bulles

O2

Air

Echangeur thermique

Températures cutanée et musculaire

Matelas chauffant

enveloppant le membre

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Technique d'anesthésie La technique est superposable à celle utilisée pour la chirurgie cardiaque mais le patient est en général endormi avant d’être équipé, sauf en cas de cardiopathie associée. Le monitorage et la prise en charge diffèrent selon que la perfusion contient du TNF ou non, car le risque de choc distributif et son intensité sont très différents dans les deux situations.

Le monitorage comprend un cathéter artériel radial (très éventuellement fémoral contro-latéral) et un cathéter pulmonaire de Swan-Ganz pour les cas avec peprfusion de TNF, ou un cathéter artériel et une voie veineuse centrale pour les cas avec melphalan seul ; voies veineuses de gros calibre.

Antibiothérapie prophylactique. Induction : propofol ou etomidate selon le status cardiovasculaire. Entretion de l’anesthésie : sevoflurane, fentanyl, midazolam en appoint. Mise en route de la CEC ; le débit de pompe est de 45 mL/min par litre de volume du membre

(mesuré en préopératoire) ; des échanges liquidiens entre la CEC et le patient sont fréquents pendant cette phase, obligeant à remplir ou à vasodilater le malade à la demande ; le perfusionniste peut tempérer ces variations en réglant le niveau de son réservoir veineux. Le liquide d’amorçage contient 200 mL de Ringer-lactate, 200 mL de colloïde et 50 mg héparine.

Chauffage du membre à 40 °C (20-45 min), le patient étant posé sur le matelas à circulation d’eau à 42 °C et le membre recouvert par le matelas Bair-Hugger™ à 42 °C . Les températures monitorées sont : peau distale, muscle distal, peau proximale, muscle proximal, ligne artérielle de la CEC, rectum, œsophage, sang de l’artère pulmonaire en cas de Swan-Ganz ; la CEC est débutée lorsque la température-seuil de 38°C tissulaire est atteinte.

Injection de sérum-albumine marquée au Technécium par voie systémique (10 mCi) et dans la CEC (4 mCi) ; après équilibration (10-15 min), la caméra placée sur la région précordiale estime les fuites entre le membre et la circulation systémique ; on doit obtenir un plateau stable dans le comptage des isotopes, prouvant que ces fuites sont inférieures à 1 %, pour être autorisé à injecter le TNF.

Injection dans le réservoir de CEC des substances selon le protocole choisi : TNF et ou melphalan. Circulation pendant 60 minutes (melphalan) ou 90 minutes (TNF).

En fin de pompe, remplacement et rinçage du volume de CEC par 2000 mL de Rhéomacrodex-saline® et de Ringer-lactate vierges de tout produit (jusqu’à 6000 mL lors de perfusion avec TNF) ; lavage du membre par exsanguination jusqu’à ce que le liquide de rinçage soit clair.

Fin de la CEC ; décanulation, protamine selon ACT, reconstruction vasculaire et réveil du patient.

Problèmes hémodynamiques L’intervention chirurgicale présente un risque hémorragique important, nécessitant la plupart du temps des transfusions sanguines. Pendant la CEC, des échanges liquidiens interviennent entre le membre perfusé et la circulation systémique ; ils aboutissent à des surcharges ou à des spoliations de la circulation-patient. D’autre part, la toxicité propre des substances utilisées provoque un état de choc distributif caractérisé par un syndrome inflammatoire systémique massif (SIRS), une extravasation liquidienne interstitielle importante (Capillary Leak Syndrome) et une diminution sévère des résistances systémiques conduisant à une hypotension artérielle (choc distributif). Elle s’accompagne en général d’une hypertension pulmonaire et d’un haut débit cardiaque. Le relâchement du garrot en fin de CEC est le moment des plus grandes perturbations hémodynamiques, même pour les cas sans TNF. Toutefois, il est évident que le TNF est le principal responsable des effets hémodynamiques, car l’importance du choc distributif est proportionnel aux taux de TNF circulant, les résistances systémiques sont bien plus basses dans les cas avec TNF que lors du simple relâchement du garrot (effet tourniquet), et le débit cardiaque est significativement plus élevé [79]. Le rinçage du membre contribue également à la spoliation sanguine. Bien que les taux de TNF enregistrés aient pu être

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10'000 fois supérieurs à ceux observés dans les chocs septiques létaux, tous les épisodes de choc distributif, quelle qu’en soit l’importance, ont été entièrement réversibles [106]. Une tachycardie soutenue est souvent le premier signe du choc distributif ; la vasodilatation survient en général en fin d’intervention, après la CEC ; elle peut s’installer de manière très brusque. L’administration de stimulant alpha (bolus de phényléphrine, perfusion de noradrénaline) doit commencer dès les premiers symptômes. Une diurèse forcée est recommandée pendant plusieurs heures (Vu > 1 mL/kg/heure). Des ESV multifocales peuvent êtres induites par le TNF et/ou par l’hypokaliémie ; elles répondent à la lidocaïne. Le traitement est fonction de l’intensité des symptômes :

Remplissage : cristalloïdes et colloïdes, sang (maintenir Hb > 80 g/L) ; les besoins peuvent être considérables (4-10 litres);

Noradrénaline : perfusion 2-5 mcg/min ou plus, à titrer selon les RAS ; maintenir une PAM de 70-80 mm Hg pour un patient normotendu ;

Dobutamine : 3-15 mcg/kg/min si défaillance ventriculaire ; maintenir un index cardiaque > 3.0 L/min/m2;

Maintenir un débit urinaire supérieur à 1mL/kg/heure (perfusions, mannitol, éventuellement furosemide si normovolémie).

Soins postopératoires L’évolution postopératoire est simple s’il n’y a pas eu de relargage significatif de substance. Cependant, il a été montré que, malgré un lavage extensif, une recirculation du TNF se produit dans la plupart des cas. On observe un état fébrile et un état circulatoire hyperdynamique modéré, avec élévation des besoins liquidiens. Lorsque le relargage est important, l’évolution est caractérisée par la persistance ou l’apparition dans les 12 premières heures d’un choc distributif, d’une augmentation généralisée de la perméabilité capillaire et d’un SDRA. Les patients peuvent également développer une insuffisance rénale, une CIVD et des surinfections (baisse des résistances immunitaires) [203]. Ces symptômes ne se manifestent que dans les cas d’administration de TNF. Le membre perfusé doit faire l’objet d’une surveillance attentive, vu les risques de syndrome de loge, d’ischémie ou de thrombose vasculaire.

Perfusion isolée de membres

Une CEC à volume réduit permet de perfuser un membre en circuit fermé avec de hautes concentrations d’antimitotique (TNF-α, melphalan) et en le réchauffant à 38-40°C. Indications : mélanomes et sarcomes envahissant un membre mais sans métastases à distance. Malgré les clamps et le garrottage du membre, des fuites systémiques se produisent, entraînant : - Vasoplégie massive (premier signe : tachycardie réfractaire) - Syndrome inflammatoire massif - Syndrome de détresse respiratoire (capillary leak syndrome) Les effets hémodynamiques sont maximaux au relâchement du garrot.

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Conclusions Depuis le premier cas en 1953, la CEC a progressé à pas de géant au point de devenir une technique banalisée. En grande partie à usage unique, elle comprend de nombreux systèmes de sécurité qui n'existaient pas sur les premiers modèles: moniteur de bulles, filtres artériels et veineux, monitorage de SaO2 et de SvO2, asservissement de la pompe au niveau du réservoir, etc. La chirurgie à coeur battant (off-pump) a démontré que la CEC n’est pas responsable à elle seule de toute la morbidité qu’on lui a attribuée: SIRS, complications neurologiques, rénales et pulmonaires, etc. Une partie de ses inconvénients vient de l’anticoagulation, mais les nouveaux systèmes biocompatibles permettent de réduire l’importance de l’héparinisation. Actuellement, les travaux portent essentiellement sur la biocompatibilité des surfaces de contact, sur la réduction de la réaction inflammatoire et sur la miniaturisation de tout le système. L’introduction de nouvelles technologies informatiques vise une gestion plus fine de l’hémodynamique et une sophistication plus poussée des systèmes de contrôle. En simplifiant la tâche du perfusioniste, la CEC étend son domaine d’application en-dehors de la chirurgie cardiaque, comme lors de réanimation ou lors de certaines opérations thoraciques et vasculaires invasives. Mais la prise en charge de systèmes compacts sans réservoir veineux demande une vigilance accrue, parce que ces appareils sont moins compliants et travaillent à flux tendu.

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Auteurs Pierre-Guy CHASSOT Ancien Privat-Docent, Maître d’enseignement et de recherche, Faculté

de Biologie et de Médecine, Université de Lausanne (UNIL), CH - 1005 Lausanne Ancien responsable de l’Anesthésie Cardiovasculaire, Service d’Anesthésiologie, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV), CH - 1011 Lausanne

Carlo MARCUCCI Responsable de l’Anesthésie Cardiovasculaire, Service

d’Anesthésiologie, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV), CH - 1011 Lausanne Former Assistant Professor of Anesthesiology, Duke University, Durham (NC, USA)

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