de l'erreur humaine à la faute managériale: la

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HAL Id: hal-01870827 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01870827 Submitted on 9 Sep 2018 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Copyright De l’erreur humaine à la faute managériale : la responsabilité et la pérennité organisationnelle en question Gilles Teneau, Nicolas Dufour, Max Moulin To cite this version: Gilles Teneau, Nicolas Dufour, Max Moulin. De l’erreur humaine à la faute managériale : la respons- abilité et la pérennité organisationnelle en question. Management & Sciences Sociales, Kedge Business School, 2012, Risque : éthique et Gouvernance, pp.27-43. hal-01870827

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Page 1: De l'erreur humaine à la faute managériale: la

HAL Id: hal-01870827https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01870827

Submitted on 9 Sep 2018

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Copyright

De l’erreur humaine à la faute managériale : laresponsabilité et la pérennité organisationnelle en

questionGilles Teneau, Nicolas Dufour, Max Moulin

To cite this version:Gilles Teneau, Nicolas Dufour, Max Moulin. De l’erreur humaine à la faute managériale : la respons-abilité et la pérennité organisationnelle en question. Management & Sciences Sociales, Kedge BusinessSchool, 2012, Risque : éthique et Gouvernance, pp.27-43. �hal-01870827�

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De l’erreur humaine

à la faute managériale :

la responsabilité et la

pérennité organisationnelle

en question

Gilles Teneauprofesseur associé ISC, consultant, directeur de la collection PerspectivesOrganisationnelles (L’Harmattan), Docteur d’État en Sciences de [email protected]

Max Moulinofficier de marine (R), ingénieur INSTN, conseilleur de l’état-major (ministère de la Défense)[email protected]

Nicolas Dufourdoctorant en sciences de gestion Cnam-Lirsa(option comptabilité contrôle audit),enseignant [email protected]

L’objet de cet article est de mettre en exergue le caractère de persévération dans l’er-reur comme facteur d’irréversibilité dans la remise en cause de la pérennité de l’organi-sation. Cette erreur est alors constitutive d’une faute, forme particulière d’erreur ausens de J. reason (2003), dès lors qu’il s’agit de persévérer dans cette dernière une foisque l’on en a connaissance. Au travers de 3 études de cas menées en recherche-actiondans des secteurs d’activité différents et d’entretiens complémentaires, l’apport de l’ar-ticle est de mettre en lumière le caractère de persévération dans les choix stratégiquesdes dirigeants. Cette dimension de persévération liée à la surconfiance est caractéris-tique d’une faute de gestion. Les auteurs proposent alors d’appréhender le rôle dudirigeant au travers d’un principe de responsabilité se déclinant en une approche ges-tionnaire de risque.

Mots clés : Faute, erreur, risque, management, organisation, responsabilité.

Introduction

« Au monde où nous sommes, nul nesaurait se passer des autres » disait àjuste titre Sully Prudhomme. A notre

époque marquée par l’importance des

notions de confiance et de responsabilité,

l’action suppose nécessairement le

rapport à l’autre. Là où Anthony Giddens

définit la confiance comme la situation

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dans laquelle on n’a d’autre choix que de s’enremettre à autrui (Giddens, 1994), Hans Jonasappréhende la responsabilité comme uneéthique en lien avec autrui, nécessairementtournée vers le futur (Jonas, 1990). Dansnotre période marquée par la tourmente deplusieurs entités dont la pérennité fut remiseen cause (Enron, Worldcom, LehmanBrothers, Dexia…), les organisations tiennentun discours de responsabilité et depérennisation, preuve s’il en est d’unedimension « esthétique » du management.On cherche ainsi à responsabiliser autrui touten se responsabilisant.

La période actuelle est donc marquée par lepassage du « tout est sous contrôle » au « le risque zéro n’existe pas » (Guilhou etLagadec, 2002). Cette période moderneaccorde un rôle clé au risque (Beck, 1986 ;Giddens 1994). Plus récemment, le facteurhumain a fait l’objet de nombreusesrecherches comme source majeure de risque.L’importance croissante du rôle accordé aufacteur humain a alors centré l’analyse sur lanotion d’erreur humaine, que certainsauteurs ont formalisée plus particulièrementsous l’angle de la faute (Reason, 2003).

Invoquer les notions d’erreur et de faute pourmieux éclairer le fonctionnement desorganisations, c’est tenter d’introduire laphilosophie morale (ou science de la naturehumaine) dans des systèmes souventcomplexes que sont les organisations enaccordant une place central à l’individu. En cesens, saisir l’entendement humain c’estintroduire le doute et le scepticisme pourreprendre les propos de Hume (1748), cemême doute qui force parfois l’individu àpoursuivre dans une voie prédéterminée sansadmettre que l’on se situe dans l’erreur.Toutefois, dans certains cas, il arrive que lesindividus se rendent compte des erreurs maisqu’ils décident de poursuivre dans cette voiepour des raisons spécifiques. Cette formeactive de l’erreur, envisagée sous l’angle de lafaute (Reason, 2003) est généralementassociée à la performance et conduitl’individu à poursuivre dans une voie ayant unimpact sur le système plus global.

Cet article a pour but de mettre en exergue lecaractère de persévération dans l’erreurcomme facteur d’irréversibilité et de remiseen cause de la pérennité de l’organisation.Cette erreur est alors constitutive d’unefaute, forme particulière d’erreur au sens deJ. Reason (2003), dès lors qu’il s’agit depersévérer dans la mauvaise solution une foisque l’on en a connaissance.

Perspective théorique : de la société du risque et du contrôle à la société de la responsabilité ?

L’époque moderne a mis le risque et sesconséquences au centre des attentions à lafois au niveau politique et social (Beck, 1986),mais également au niveau managérial(Power, 1999). Les dernières décennies ontainsi vu s’institutionnaliser des fonctionstelles que l’audit et le contrôle interne(Cappelletti, 2006) ou encore la gestion desrisques (Véret et Mékouar, 2005). La diffusiond’une culture du risque devient unecomposante essentielle dans notre époquemarquée par l’avènement de politiques durisque (Douglas et Wildavsky, 1983 ; Borraz,2008) et du principe de précaution (Ewald,2009). Dans ce contexte, le principe deresponsabilité d’Hans Jonas (1990) trouvetoute son actualité.

L’Irresponsabilité implique plus la faute que l’erreur

L’évolution de l’erreur humaine, lamédiatisation des cas de risque et lasaturation de l’espace mental

Pour Slovic et al. (1982), les médias ont uneinfluence majeure sur la disponibilité mentaleet sur la perception que l’on peut avoir desrisques. L’influence de ces médias est telleque l’on se concentre sur les risques mis enlumière en laissant de côté les autressemblant peu vraisemblables (Kermisch,2010). Le lien entre perception des risques et

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couverture médiatique a fait l’objet denombreuses études au sein desquellesl’erreur humaine prend une place croissanteet évolutive (Weick, 1979 ; Kouabenan et al.,2006). La saturation de l’espace mental face àune multitude de faits potentiellementgénérateurs de risques induit unereprésentation erronée d’une situation. Il endécoule des erreurs de représentation liées àune rationalité limitée inhérente au facteurhumain (March et Simon, 1965). L’erreur dereprésentation face au risque est l’un deségarements de notre époque, dite de sociétédu risque. Cette société du risque est pour U.Beck (1986, p.132) une « ère spéculative » oùl’attention du public concernant les risques etles crises implique des confusions entrecauses (faits générateurs) et conséquences(sinistres et catastrophes survenant). Cesconfusions induisent des erreurs dereprésentation pouvant obscurcir lediscernement du manager et saresponsabilisation.

De l’erreur de représentation à la faute managériale

Pour Reason (2003), explicitant les travaux deRasmussen menés dans les années 1980, leserreurs ont un caractère persistant. Ces « erreurs » supposent la défaillance dessystèmes socio-techniques et une placemajeure du facteur humain. Toutes lesinformations qui pourraient signaler àl’individu que son image mentale estincorrecte sont ignorées ou interprétées dansle sens confirmant la justesse de l'imageappréhendée a priori. Il est alors impossiblede redresser l'erreur par les moyensclassiques d'alarmes et d'avertissements quisont eux aussi ignorés ou mal interprétés.L'opérateur persiste dans son erreur. « Errarehumanum est, perseverare diabolicum ». Cetype d'erreur est connu sous le nom d'erreurdiabolique (Wanner, 2009). Dans ce typed’erreur, un élément important émerge, ils’agit de la notion de persévération1. Il a étédémontré que les individus sont trèsconservatifs dans leurs décisions, surtoutlorsque celles-ci impliquent l'abandon d'une

conviction antérieure. A l’origine décrite entant que symptôme chez certains patientsqui, par exemple, répétaient une mêmeréponse à différentes questions (Gross, 1902,in Luchins et Luchins, 1959), la persévérationa ensuite été étudiée lors de tâches derésolution de problèmes où le sujet persiste àappliquer une solution inefficace (Luchins etLuchins, 1959), puis dans le cadre de l’analysedes prises de décision en situation de travailoù l’opérateur maintient un plan d’actionsalors que la situation a changé (Wiegmann,Goh, et O'Hare, 2002). Dans leur revue delittérature sur l’étude de la rigidité ducomportement, Luchins et Luchins (1959)proposent une revue historique desexpérimentations relatives à lapersévération. Ils rappellent que c’estNeisser, un psychiatre allemand, qui introduitpour la première fois ce terme en 1894 pourdécrire des comportements observés auprèsde patients. Il définit la persévération comme« une répétition ou une continuationpersistante anormale d’une activité aprèsque celle-ci ait déjà commencé ou qu’elle aitété récemment terminée » (Luchins etLuchins, 1959, notre traduction).

Les erreurs humaines ne se produisent passans avertissement et constituent une limitede l’expertise humaine qui suppose lacapacité à clarifier une situation face àl’ambiguïté et à l’incertitude. Les erreurshumaines peuvent parfois s’inscrire dans unschéma de surconfiance induisant la faute, etsont le symptôme d’un problème plus gravequi s’inscrit dans le schéma suivant lié à lanotion de confiance.

→ Surconfiance → faute et persévération→vulnérabilité → défaillance+menace = risque.

1. La persévération correspond à la répétition d’uneaction ou d’une réponse à une situation donnée, cettedernière prenant un caractère incontrôlable au-delà d’uncertain seuil. Elle implique l’incapacité d’un individu àréaliser des changements mentaux ou comportementauxet engendre un manque d’attitude critique. Elle sedistingue de la persévérance qui, bien qu’elle impliqueégalement une constance dans l’action, suppose l’autoritéde la conscience et un jugement raisonné.

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La faute peut être considérée comme l’unedes formes de l’erreur d’activation ou depossession de connaissances (Reason, 2003).Ces erreurs face à la connaissance sontparfois qualifiées de « surconfiance ». Laconfiance évoquée par Anthony Giddenscomme ce sentiment de sécurité ontologiquese caractérise par « la conscience que desrésultats imprévus peuvent résulter de nospropres activités ou décisions » (Giddens,1994, p.37). Elle implique la croyance en lafiabilité d’une personne ou d’un systèmeabstrait (Pesqueux, 2007) et se traduitdavantage par l’engagement que par unesimple compréhension cognitive. Laconfiance, nous dit Anthony Giddens,s’examine comme un élément continu, diffus,ce qui va au-delà de l’approche de Luhmann(1993) pour qui cette notion suppose laconscience active dans l’agir. La confiancepeut induire en erreur et l’excès de confiance,envers autrui ou envers un système abstrait,peut être constitutif d’une forme particulièred’erreur qu’est la faute (au sens de Reason,2003). Cette surconfiance implique alors uneerreur de représentation, laquelle rendvulnérable l’individu en l’exposant à unemenace externe qui engendre un risquepotentiel ou avéré. Là où l’on envisageait lafiabilité consciemment ou non, du fait d’uneinformation nécessairement parcellaire, onse retrouve face à la défaillance, à lavulnérabilité.

Une telle vision pose encore la question de laprévisibilité de l’erreur. Cette approche peuts’envisager selon la théorie de lastructuration (Giddens, 1984) comme uncadre de prise en compte des approchesprobabilistes face à la défaillance humaine.

Modernité, imprévisibilité et principe de responsabilité

Modernité et risque

Notre époque est souvent perçue commecelle d’une société où l’information est pluscomplète et plus facilement accessible

(Pesqueux et Ferrary, 2006). Le paradoxe decette société de la connaissance est qu’ellene prend pas suffisamment en compte le faitque l’information soit plus complexe etdifficilement exploitable. Cette complexitéinduit en erreur et peut être à l’origine defaute par la mauvaise possession ou lamauvaise activation des connaissances.

A cela s’ajoute ce que certains qualifient « d’accélération du temps » (Rosa et Renault,2010). Ce « culte de l’urgence » (Aubert,2009) est porteur de crises latentes dont lesphases sont en accélération. Cetteaccélération du temps se conjugue à lanécessité de repenser la dimension spatialeen une approche réflexive où les situations decoprésence sont accrues. L’accélération dutemps et l’essor des phénomènes derégionalisation et de coprésence setraduisent par un accroissement des menacesexternes et des vulnérabilités internes,rendant plus compliquée la probabilisationde l’erreur humaine.

L’évaluation du risque se structure demanière subjective (Drott-Sjoberg, 1991). Elleest liée à certaines caractéristiques mettantle facteur humain au centre de l’analyse tellesque sa familiarité ou son utilité perçue.D’autres caractéristiques, semblant a prioriplus « objectives » posent encore desdifficultés dans le cas de l’erreur humaine :comment probabiliser l’erreur humaine ? Ils’agira d’avoir recours à des probabilitésconditionnelles (ou probabilités subjectives)quand les modèles mathématiquesn’apporteront pas de solution satisfaisante. Le potentiel catastrophique d’un risque, saprobabilité de survenance, sa quantification,sa contrôlabilité sont autant d’élémentsempreints de subjectivité. Ils peuventprovoquer des erreurs soit subies, soitvolontaires, car ils font suite à une décisionprise consciemment sur la base d’élémentstronqués ou partiellement avérés. Les erreursliées au facteur humain s’inscrivent souventdans un paradoxe de non-prise en compte dumilieu « situé de l’action » (Giddens, 1984,p.163) malgré son extrême proximité avec les

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individus. Il est très difficile de prédire ceserreurs car elles s’inscrivent à la fois dans unexcès de confiance et dans un biais d’ancrageempêchant l’individu de se représenter cesdernières (Kermisch, 2010) et allant dans lesens de la thèse de Slovic pour qui « ce qui esthors champ de vision est hors champ del’esprit » (Slovic, 1982, p.470). Il existe alorsun fossé, envisagé comme une absence deréflexivité du savoir entre la consciencepratique, lieu de matérialisation des biaisd’ancrage et la conscience discursive,capacité qu’a une personne d’exprimer cequ’elle fait (Giddens, 1984, p.90).

Les études de sûreté probabilistes ontégalement permis d’identifier de manièreplus précise les risques d’erreur humaine.Toutefois, cette inclinaison naturelle del’homo faber à la technique (Jonas, 1990,p.63) pose la question de la dichotomie entresavoir idéal et savoir réel. L’heuristique de lapeur, pour laquelle le risque est un véhiculecommode, introduit la nécessaire prise encompte d’un savoir factuel et relatif quantaux effets lointains de notre savoir technique.Une telle question introduit la notiond’imprévisibilité comme corollaire à laquestion de la responsabilité.

La notion d’imprévisibilité et la difficile appréhension de l’erreur humaine

Il est en pratique difficile de pouvoir sepréparer aux évènements à faible probabilitéde survenance dans un environnement où la contrainte de temps est forte (Grossetti,2004). Le facteur humain en tant que sourced’erreur est à la fois cause et conséquence decette dimension imprévisible. On tentedésespérément de ramener l’imprévisibledans le champ de l’incertitude (probabilitésubjective sur la base d’avis d’experts) voiredu risque (probabilité objective sur la based’une récurrence d’évènements passés).Toutefois, en situation dynamique, une telleapproche apparaît souvent comme restrictivepour appréhender le risque face à la « pression temporelle » (Amalberti, 1996,p.50). Saisir la complexité humaine de même

que saisir la complexité des organisationsdans un environnement dynamique est unecombinatoire induisant des risques d’erreursdifficiles à saisir. Dans cette optique, ouvrir lavoie à la responsabilisation supposeraitd’introduire les notions de vigilance(Chateauraynaud, 2006) et d’éthique del’avenir (Jonas, 1990, p.63).

Méthodologie et résultats de la recherche-action

Cette partie vise à expliciter notreméthodologie de recherche ainsi que lesrésultats issus de nos études de cas.

La méthodologie de recherche employée

Nous avons choisi d’analyser trois casd’entreprises. Nous avons mis en œuvre,dans une triangulation méthodologique(Todd, 1979) les diverses méthodes d’analysede données utilisées.

L’analyse de contenu

Nous avons recueilli des informationsconcernant nos « cas d’entreprise » dansdiverses sources (documents internes,articles, interviews, rapports déposés surl’intranet). Ces contenus de rapports, denotes, d’articles, d’interviews venaientcorroborer nos observations personnelles ounos entretiens.

Le recours aux méthodologies de type recherche-action

Les méthodologies de type recherche-actiontrouvent toute leur pertinence pour révélerdes éléments a priori difficilementperceptibles au travers de démarchesquantitatives ou d’entretiens. Nous nousproposons donc de valoriser des études decas réalisées dans une démarche derecherche-action s’inscrivant dans lacontinuité de travaux mêlant recherche etconseil (Cappelletti et al., 2009). La

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recherche-action est une méthodologie issuedu monde anglo-saxon (années 1950) etfondée sur l’idée qu’un ancrage dans lapratique courante d’une activité peutpermettre d’établir des constats à portéegénérale sous des conditions de rigueur etavec un objectif de recherche clairementidentifié au sein d’une organisation (Barbier,1996).

Les études de cas mobilisées

Notre recherche-action se centre autour des3 études de cas, s’étalant de 2008 à 2011. Lapremière a eu lieu au sein d’une société deservice informatique (SSII) en 2010, laseconde au sein d’une grande banque ayantconnu des difficultés récentes en 2011 et latroisième au sein d’un groupement d’intérêtéconomique (GIE) ayant rassemblé deuxmutuelles en 2008. Dans ces trois cas, lesorganisations soit ont disparu et ont étédémantelées, soit n’existent plus sous leurforme actuelle. Ces trois études de cas secaractérisent par l’entêtement de leurdirigeant dans une stratégie ayant conduit àremettre en cause la pérennité de cesstructures. La question de la faute dudirigeant et de sa responsabilité est en causedans ces trois études de cas du fait d’unepersévération, d’un entêtement desdirigeants. Dans ces 3 exemples, les erreursétaient connues, les dirigeants savaient cequ'ils faisaient, mais ils persévéraientvolontairement dans leur erreur, croyantqu'ils étaient "invulnérables".

Une telle méthodologie apparaît commepertinente quant à la thématique de la fautecar elle permet d’être présent sur unepériode suffisamment longue pour bienanalyser ce qui ne l’est que difficilement avecun regard extérieur. En outre, la question dela faute, souvent intangible, ne s’analyse quedifficilement par des entretiens où une largepart d’inexprimé perdure. La recherche-action, par ses observations participantes,permet alors d’en apprendre davantage sur lamanière dont est perçue la pratique de

persévération dans l’erreur, envisagéecomme une faute si la prise de décisionconsciente la caractérise (par l’activationerronée des connaissances dans la décision).

Les entretiens

Nous avons réalisé des entretiens ouvertspour les managers, les cadres moyens, lesingénieurs techniciens et les employés, puisavons lancé des entretiens semi-directifspour les directeurs. Des entretiens directifsavec des consultants en stratégie (externes àl’entreprise) ont également été réalisés. Lesquestions portaient sur l’ambiance dansl’entreprise, les échanges entre les services,le challenge entre les employés, le poste, lesrôles et responsabilités, les non-dits et autressources informelles. Au total 47 entretiensont été réalisés (voir tableau ci-après). Cesentretiens visaient à compléter lesobservations participantes et nonparticipantes constatées dans notrethématique de recherche.

Pour traiter les données recueillies dans lesentretiens directifs, nous avons utilisé uneéchelle de mesure à 5 postes, de « tout à faitd’accord » à « tout à fait en désaccord »,selon le type Lickert, qui consiste en unénoncé affirmatif suivi de l’indication par lerépondant de son degré d’accord ou dedésaccord avec le jugement proposé. Nousavons intégré dans notre questionnaire unecolonne « commentaire » puis les donnéesont été analysées après codage manuel viades outils informatiques (Excel et Word).

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Détail des entretiens

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Résultats de la recherche

Les propos tenus par les consultants externescorroboraient les propos tenus par leséquipes opérationnelles. En revanche, lesentretiens avec les directions n’étaient pas enphase avec ceux des autres parties prenantes(exagérations, mensonges). Les élémentsrelevés dans les médias (articles concernantles crises) correspondaient aux entretiens des"consultants externes et des collaborateurs".Ils ne correspondaient pas aux discours tenuspar la direction. Pourtant cette mêmedirection était consciente de la dimensionpotentiellement « catastrophique » desdécisions prises.

Ainsi, dans ces trois cas, on retrouve leséléments suivants :

- Pour la société de service informatique, bien que prometteuse, elle a été rachetéepar une autre SSII. La direction étaitdéconnectée des autres membres del’entité jusqu'au jour où l'entêtement desdirigeants a engendré d’importantesdifficultés financières.

- L’établissement de crédit analysé a également été démantelé suite à la crisedes subprimes. Au sein de cet établissementen pleine ascension, de nombreusesdécisions ont remis en cause la pérennité del’entité : des prêts importants contractés,une comptabilité manquant de rigueur, desdépenses inconsidérées eu égard à lasituation financière de l’entité. Le directeurgénéral et son adjoint ont été les premierslicenciés.

- Le GIE étudié a été démantelé et n’aura existé que quatre années. Les deuxdirecteurs des systèmes d’information desdeux mutuelles membres du GIE nepouvaient pas s'entendre. Tout le mondeappréhendait le fait que le GIE ne tiendraitpas, malgré l'entêtement des deuxresponsables.

Structure n° 1, société de service informatique

• Descriptif du contexteAu moment de la recherche-action,l’entreprise subit des difficultés financières eta été contrainte de se séparer d’une partie deson personnel. Les responsables ontnéanmoins gardé la même orientationstratégique. Les pertes récurrentes se sontaccumulées et l’entité a connu une situationde crise financière. Des salariés ont étécontraints de quitter l’entreprise, la perte deconfiance dans la structure caractérisa lafirme. Verbatim collaborateur « Il y avait tropde distance entre les employés et lesresponsables. La crise a fait prendreconscience de cela, mais trop tard pourpermettre un rebond ». Le choix de cettesociété est lié à l’importance de sa crise demi-2008 à mi-2009. En avril 2009, elle estpassée de 2 000 salariés, au moment de lamise en redressement judiciaire, à 1 150salariés. Licenciements en masse, départ,absentéisme, stress et angoisse du lendemainont constitué le pain quotidien pendant cetteforte période de crise. In fine, cetteentreprise pendant longtemps présentéecomme un fleuron dans son secteur futcontrainte de revendre plusieurs de ses pôlesd’activité représentant des parts importantesde son chiffre d’affaires (à peine un tiers del’activité totale fut sauvegardé). En pleinecrise, certaines des décisions ayant affectél’organisation furent maintenues malgré descontestations, preuve du fossé séparant lesresponsables des opérationnels. L’entité futfinalement déclarée en cessation depaiement puis rachetée par une firmeconcurrente.

•Analyse de la structurePlusieurs points flagrants dans cette étude decas sont directement en lien avec les pointsabordés dans notre partie théorique.

Erreur de diagnostic sur le risque : Toutd’abord, en interne, un point importantconcerne l’erreur de diagnostic sur le risque.Ainsi, le risque envisagé au sein de cette

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structure par le management était celui durisque de pertes financières consécutif à ladécision stratégique, ce type de perte étantjugé comme normal et circonscrit en termesde montant.

Les autres risques relatifs aux décisionsstratégiques affectant la solidité de lastructure ne furent pas pris en compte. Lesrisques humains n’ont pas été appréhendésen tant que tels. Les licenciements et lesdémissions n’ont pas été envisagés comme lacause de maladies et de l’accroissement dustress. Les risques financiers ont ensuite étésous-estimés : à partir de simples pertesjugées acceptables, on en arrivait à despertes financières importantes pourl’entreprise et surpassant sa capacité à les absorber. In fine, le risque futorganisationnel : le risque de faillite del’organisation. Un tel risque se matérialisa eteut pour conséquence le démantèlementpuis le rachat de cette entité par une sociétéconcurrente. Verbatim Directeur : « Lasociété ne s'est jamais vraiment relevée de lacrise des années 2002-2004 ». Verbatimmanager : « Inutile de nous voiler la face,nous savons bien que très bientôt l’entreprisefera faillite, mais la question du quand reste àdéterminer ».

Erreur de représentation du risque et fautemanagériale : Dans cette étude de cas unsecond point d’attention concerne l’erreur dereprésentation quant à ces risques. Leschéma de surconfiance des managers ainduit une faute de gestion s’étant traduitepar la vulnérabilité de la structure quiaccumulait les pertes. Cette faute de gestionse matérialisa au travers des mensonges des dirigeants vis-à-vis de leurs équipes. Les risques humains, financiers etorganisationnels n’ont pas été appréhendéscomme tels, c'est-à-dire comme de vraisrisques, mais simplement comme desdysfonctionnements diffus aux conséquenceslointaines voire improbables. VerbatimDirecteur : « Nous ferons face à cette crise,comme par le passé, il faut avoir confiance ».Verbatim manager : « Pour le directeur toutallait très bien dans cette entreprise ».

La notion d’imprévisibilité et la difficileappréhension de l’erreur humaine :Nonobstant leur caractère diffus, ce qui asurpris dans l’organisation est le caractèreimprévisible de ces risques lié à la difficileprise en compte de l’erreur des dirigeants entant que faute de gestion. Bien que critiquéesdans l’organisation, aucune de ces décisionsn’était envisagée ex ante sous l’angle d’unefaute susceptible de mener l’entreprise à lafaillite. Pour les risques humains, seuls lesmanagers étaient informés mais ils étaientloin d’appréhender l’ampleur des risquespsychosociaux suscités par la situation endégradation lente de l’entreprise. Les pertes financières furent rapidement trèsimportantes et personne ne se doutait queles réserves de fonds accumulées pendant lapériode de prospérité de l’entreprise avaientété consommées en quelques mois. Enfin,concernant les risques organisationnels : denombreux licenciements ont eu lieu trèsrapidement. Personne ne pouvait envisagerune telle situation, dissimulée par la direction(sur 2 000 salariés, les personnes informéesde la situation se résumaient à une dizaine).

Défaut de responsabilité et enjeu total :L’absence de réunion entre la direction et lesmanagers est un point d’attention. Lemanque de communication de la directionest révélateur de barrières dressées entrecelle-ci et les managers et cadres subalternesqui souhaitaient des précisions voire desexplications quand les premières difficultésfurent perçues. Tout avait été cachéconcernant l’avenir de l’entreprise. Verbatimemployé : « Tout était caché, rien n’était dit.Au contraire, les patrons faisaient croire quetout allait bien, et que nôtre société sortiraitbientôt des difficultés. Pire, un haut directeurd’une grande société de service informatique(numéro 3 de cette société) démissionna desa société pour intégrer la notre parce qu’onlui avait fait miroiter monts et merveilles ».Une telle situation est révélatrice du manquede responsabilité assumée par la directionqui n’a pas permis à ses collaborateursd’anticiper une telle situation face à l’enjeutotal de faillite de leur entreprise. Verbatim

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employé : « Je ne sais pas quoi dire sur montype de management, la situation est tropbouleversante, ce qui est sûr, c'est qu'il y a eubeaucoup d'erreurs commises par le hautmanagement ».

Structure n° 2, GIE, regroupement entre deux mutuelles

• Descriptif du contexteLe groupement d’intérêt économique étudiéest issu d’une volonté de rapprochemententre deux mutuelles spécialisées chacunesur des segments de clientèles affinitairesspécifiques (agents territoriaux, fonctionpublique, etc.). Les deux mutuelles sont axéessur la couverture des risques liés à la santé.Ces deux structures déjà en collaborationdécident de franchir un nouveau cap dansleur coopération par la constitution d’ungroupe au sein d'une Union de GroupeMutualiste. Ce groupement leur permetd’acquérir une place importante sur lemarché très concurrentiel des mutuelles etde bénéficier d’effets d’expérience communset d’économies d’échelles notammentconcernant les systèmes d’information. L’idéeétait de renforcer le modèle économique dechaque mutuelle tout en préservant lesidentités et les valeurs.

Toutefois, les principes de travail des deuxmutuelles étaient en opposition et difficiles àconcilier. A cela s’ajoutait la réorganisationinterne de l’une des deux structures,renforçant les difficultés opérationnellesrencontrées et limitant la pertinence de cettealliance stratégique. Les services communsles plus impactés furent le service dessystèmes d’information et principalement leservice de la production, servicecommanditaire du projet de réorganisation.Ce service composé de près de 100personnes subissait les contrecoups duchangement (absences, collaborateursarrêtés pour maladies, stress, lenteur de laréorganisation), emportant la remise encause de la pérennité du GIE après quatreannées de fonctionnement difficile.

• Analyse de la structureDans cette structure, tout comme pour lapremière entreprise analysée, on retrouvedifférents profils de risques.

Erreur de diagnostic sur le risque : Dans lecadre de ce groupement d’intérêtéconomique, les risques envisagés étaientprincipalement des manques à gagnertemporaires du fait de cette fusion demoyens. Des désorganisations légères ettemporaires étaient encore anticipées. Un teldiagnostic des risques du GIE était alorsréducteur. En effet, la complexité de cegroupement fut mal perçue et lesnombreuses réorganisations provoquèrentun stress récurrent et des maladies. Lecaractère imposé, le manque de conciliationdans le cadre du rapprochement etl’entêtement des dirigeants contribuaient àl’incompréhension collective. Les risquesfinanciers étaient en outre plus importantsqu’anticipés. Le conflit entre les dirigeants dechacune des deux mutuelles en charge durapprochement fut sous-estimé. Ce conflit demanagers est très rapidement devenuingérable et a soumis le GIE à un risqueorganisationnel important. Comme évoqué,le GIE n’a pas tenu longtemps car un telrapprochement fut avant tout source deconflits au plus haut niveau. VerbatimDirecteur de la Production : « Moi ce quim’intéresse c’est de reprendre ma positiond’avant, ce GIE ça ne m’intéresse pas dutout ». Verbatim Directeur des SI : « Ce GIEc’est une bonne chose, nous allons vers unegrande mutuelle, pleine de promesse ».Verbatim manager : « Mon directeurcherchait en toute conviction les meilleuressolutions pour éviter la crise, plusieurs fois jelui ai proposé des idées nouvelles, il ne les ajamais pris en compte, il ne faisait pasconfiance à ses collaborateurs ».

Erreur de représentation quant au risque : Lesdémotivations en interne n’étaient pasperçues comme telles par les dirigeants qui sous-estimaient l’absence d’implicationde leurs collaborateurs. Les risquesorganisationnels liés au changement de

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structure n’ont quant à eux pas été pris encompte. Les risques de mise à l’écart desemployés ou de perte de sens et demotivation sont quant à eux sous-estimés. Laréorganisation doit être menée à marcheforcée et les risques qui sont inhérents nerentrent pas dans le cadre des variables clés.Un tel projet de réorganisation auraitnécessité davantage de communication pourlimiter les démotivations. Verbatim employé :« Nous ne comprenions pas ce que voulaitfaire l’entreprise face à cette crise. Un jour onnous disait, nous sommes sortis de la crise, etla semaine suivante, il était question delicencier du personnel ». Verbatim manager :« Les décisions prises par nos dirigeantsétaient absurdes. Ils ont fait venir un expertpour faire sortir de la crise l’entreprise, mais ilétait trop tard, ils ont payé une fortune cespécialiste ».

La notion d’imprévisibilité et la difficileappréhension de l’erreur humaine : Personnene pouvait imaginer que le GIE entre les deuxmutuelles ne tiendrait pas plus de 3 ans.Cette nouvelle structure avait été présentéecomme permettant de créer la plusimportante mutuelle de France. Si dans lesfaits le manque de motivation était la règle,de manière macro, la structure semblaitsolide. Un tel schéma ne prenait pas encompte les conflits entre les dirigeants desdeux mutuelles, chacun voulant asseoir sonautorité sur l’autre. Verbatim employé : « Iln’y avait plus de règles dans ce GIE, tout lemonde faisait à sa guise, les procéduresn’étaient plus suivies, les normestransgressées. Il n’y avait plus decommunication entre les services ». Verbatimemployé : « Le comportement desresponsables était sans doute logique, il étaitsystématiquement lié aux caractéristiquesdes méthodes dont ils disposaient, des tâchesqui leur incombaient et de l’environnementdans lequel ils se trouvaient ».

Défaut de responsabilité et enjeu total :Quand il parut clair que ce rapprochementn’apportait pas les bénéfices et synergiesescomptés, la décision fut prise de faire

marche arrière. Il n’y eu que peu delicenciements, hormis les différentsprestataires dont les missions furentstoppées. Y compris dans cette phase dedésorganisation totale, les dirigeants ontcontinué à sous-estimer les conséquencespour leurs entités respectives et notammentvis-à-vis de la motivation des salariés.Verbatim employé : « Nous rencontrons degrandes difficultés avec le responsable del’une des deux mutuelles, il est très dur etsévère avec les employés, voire incorrect, il secroit tout permis, jamais ce GIE ne pourrafonctionner avec des conditions aussimauvaises. » Verbatim Manager : « Lors desréunions avec mon directeur, je lui disais qu’illaisse de côté ses convictions, parce qu’il setrompait, il ne m’écoutait pas, je suis certainqu’il savait parfaitement ce qu’il faisait ».Verbatim Manager : « Mon directeurpersistait dans son erreur, pourtant il savaitce qu’il faisait, je ne comprenais pas où ilvoulait en venir ». Verbatim Directeur : « Quevouliez-vous que je fasse, si les employés sedonnaient un peu plus de mal, nous sortirionsde cette situation. J’ai fait tout ce que jepouvais pour cette entreprise, je n’ai rien àme reprocher »

Structure n°3, établissement de crédit

Nous sommes intervenus dans cettestructure au début des années 2000, périodeoù celle-ci était en plein essor, puis sur lapériode de 2008 suite à la crise dessubprimes. Cette recherche-action a étél’occasion de rencontrer de nombreuxcollaborateurs dont des directeurs ayant desfonctions de décision au niveau stratégique.

Les difficultés rencontrées par cetétablissement de crédit furent la résultantede choix stratégiques aux conséquencesnégatives pourtant visibles mais ayant faitl’objet d’un entêtement des équipesdirigeantes sur plusieurs années. Ces choix stratégiques concernaient desinvestissements dans des actifs douteux etune politique d’alliance avec d’autresstructures pourtant en difficulté. Dans ce cas

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précis, les entretiens et observationsparticipantes et non participantes liées à larecherche-action permettent de faireremonter des difficultés de communicationentre les équipes opérationnelles et lesdirigeants de l’établissement bancaire. On estdonc passé en quelques années d’unestructure mettant tout en œuvre pour semunir d’une forte stratégie à une entités’obstinant dans des choix stratégiques malcompris et ayant remis en cause sa pérennité.Les difficultés rencontrées ont engendré unesituation de crise, causant pour les employésdes départs, des arrêts de stages, des fins desmissions de prestations et de projets.

• Analyse de la structurePour cet établissement bancaire, des traitscommuns avec les études de cas précédentespeuvent être mis en avant.

Erreur de diagnostic sur le risque : Dans lapériode de tourments que connut cetétablissement bancaire, les risques pris encompte étaient principalement ceuxrésultant d’une gestion d’actifs et d’unepolitique financière inadéquate. Les pertesfinancières ont toutefois été sous-estiméesdans leur ampleur. Les risques humainsn’étaient pas appréhendés comme tels. Lediagnostic des risques ne prenait pas encompte les risques liés au stress des salariés,ayant engendré des démissions ainsi que lesrisques liés à l’arrêt brutal des missions desdifférents prestataires sur des projets parfoisde longue durée. La déstructuration et laperte d’identité de l’organisation n’ont pasété envisagées au moment des difficultés.Verbatim managers : « Je suis certain que nosdirecteurs étaient dans l’impossibilité deprévoir le résultat de toutes les erreurscommises ». « Nos responsables ont voulumettre en place une solution pour venir gérerla crise et pourtant tout le monde savait trèsbien que cette solution ne marcheraitjamais ». Verbatim Employés : « Ce qui étaitdit dans les journaux ne correspondait pas dutout avec la réalité », « Les erreurs àrépétition commises par nos responsablesétaient inadmissibles, face à cela nousn’avions aucune action ».

Erreur de représentation quant au risque :Même si des démotivations ont pu un tempsêtre prises en compte, la peur des différentssalariés et l’incertitude dans laquelle setrouvait l’entreprise n’ont pas été envisagéescomme telles. On ne pensait également pas,ex ante, que les pertes financières seraientd’une ampleur telle qu’elles remettraient encause la pérennité de l’organisation. Enfin,face aux difficultés, les risques dedésorganisation n’ont pas été anticipés(risques liés au changement d’organisation,au renouvellement de la structure, à lanouvelle hiérarchie envisagée). Verbatimmanager : « Quand je mettais en avant lesdifficultés à venir, on m’a peu écouté et aufinal j’avais peu d’action, je savais bien que jene pouvais pas être d’une grande aide pourles équipes, alors je pense que j’ai joué le jeude la direction ».

La notion d’imprévisibilité et la difficileappréhension de l’erreur humaine : Même siles pertes financières avaient fait l’objet desimulations et de scénarios de survenance,l’importance de ces pertes et lesconséquences en termes de démantèlementde la structure ont été sous-estimées.Verbatim employé : « Un an avant la crise,tout le monde avait confiance en cettebanque, l’information circulait malgré tout,pas bien, mais les grandes lignes étaientconnues ». Les difficultés étaient connuesmais largement sous-estimées, ce quiexplique que personne dans cette structuren’a anticipé l’accumulation des difficultés surles différentes années résultant de choixd’investissement inopportuns.

Défaut de responsabilité et enjeu total : Danscette étude de cas, ce qui apparaît estl’absence de communication des dirigeantssur des éléments affectant directement lasituation des différents collaborateurs. Lesnombreux licenciements sont survenusrapidement pour pallier les difficultésrésultant d’une politique d’investissementinadaptée et pour laquelle les managers etdirigeants se sont entêtés tant que celle-ciétait source de profits. Le personnel de

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l’entité est passé au second plan quand lesdifficultés se sont accumulées. Verbatimdirecteur : « Cette société rencontre degrosses perturbations financières, noussommes en pleine crise. Les syndicatsessayent de sauver les meubles. Actuellementl'entreprise doit licencier une grande partie deson personnel, et les licenciements ont étégérés avec les syndicats, cela dépendra d'uncertain nombre de critères : marié, ou non,avec des enfants ou pas, le niveau d'étude, letype de poste, l'âge... Par exemple lescomptables vont être presque tous rayés de lacarte ». Verbatim employés : « Notredirection comportait des personnes trèsdifficiles d’accès, très rigides », « Nosmanagers nous cachaient la vérité, pour euxtout allait bien. Ils se cachaient la vérité entreeux. Seulement le comité de direction étaitinformé de ce qui se passait réellement,l’entreprise n’était que mensonge ».

Discussions

De ces études de cas en recherche-action etdes entretiens, on peut constater uneabsence de responsabilité des dirigeants dansles décisions prises. Celle-ci est à comprendrecomme un entêtement des managers dansleur décision arrêtée à un instant donné, neprenant en compte ni les conséquences surl’organisation et sa pérennité, ni les salariés.Une telle approche est constitutive d’unefaute qu’il nous faut envisager sous l’angle dece qui serait qualifié de « faute diabolique ».

Cette approche traduit encore une absencede gouvernance efficace, une non-conciliation des intérêts des différentesparties prenantes de l’organisation etl’absence d’écoute sur le terrain desdirigeants et managers vis-à-vis descollaborateurs. Cette approche amène às’interroger sur la nécessité d’un principe deresponsabilité dans la prise de décisionsengageant l’avenir d’une organisation.

La faute managériale et la persévération, vers une « faute diabolique » ?

Ces différentes études de cas permettent detenter la définition de ce que serait « la fautediabolique » en gestion des organisations.Tout comme l’erreur diabolique issue detravaux de « situation awareness » (Wanner,2003) qui suppose une erreur dereprésentation avec une idée depersévération dans l’erreur (alorsinconsciente), la faute dite diabolique seraitcette forme de faute de gestion où ledécideur est pleinement conscient desconséquences potentiellement négativespour son organisation mais décide depersévérer dans le choix arrêté. Laconscience de la situation et de sesconséquences négatives caractérise la fautemanagériale. Le caractère de persévération,central dans nos études de cas, exprime cette idée d’absence de responsabiliténotamment à l’égard de l’organisation et descollaborateurs qui la composent.

Dans cette notion de « faute diabolique », lecaractère de transgression2 est à nuancer ence sens que le dirigeant a la possibilité defaire marche arrière (la transgression nepermet pas de retour en arrière). Il y acependant transgression à un momentdonné, du fait de la persévération, del’entêtement dans une décision donnée avecun point de non-retour qui se caractérise parla remise en cause de la pérennité del’organisation. Cette transgression marqueune rupture liée à la surconfiance dudirigeant en lui-même et en la capacité del’organisation à évoluer dans un contexterisqué. Cette surconfiance matérialisel’approche de la « faute diabolique ».

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2. La transgression implique de passer au-delà d’une règleou une loi. On observe une violation de préceptesdéterminés, le fait de contrevenir explicitement à une loi.Le transgresseur s’attaque à la règle et se définit en tantqu’acteur contre celle dont il a connaissance.

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L'exemple de la séparation des deuxmutuelles et de la fin du GIE, sans que lesdeux mutuelles se soient écroulées, illustreune « faute diabolique » sans transgression.Alors qu'avec l’établissement bancaire et lasociété de service informatique, noussommes dans la faute suivie d'unetransgression.

On a pleinement conscience que l’on soumetl’entreprise à un risque donné alors que lafonction même de dirigeant supposerait deprendre en compte la variable risque dans lapoursuite des décisions stratégiques. Cetteidée de transgression est bien exprimée dans« la faute de gestion » issue du mondejuridique. La faute de gestion bien que nondéfinie par la loi est laissée à l’appréciationdes juges. Ladite faute est source d’angoissepour le manager d’entreprise, lequel est jugéresponsable des fautes issues de la gestion del’entreprise dont il a la responsabilité. Auregard de la jurisprudence, la faute degestion est constituée par tout acte ou touteomission commis par un dirigeant de sociétéet envisagé comme une erreur dans l’actionde direction de l’entreprise. Il peutégalement s’agir d’une imprudence, d’unenégligence ou d’une transgression desobligations légales ou des dispositionsstatutaires. Au titre des fautes de gestion ontrouve notamment la poursuite d’une activitédéficitaire, le défaut de surveillance dupersonnel ou encore la création d’une sociétésans étude préalable3.

La « faute diabolique » prend donc la formed’une faute de gestion avec un caractèred’entêtement ou de persévération dudirigeant. Le système de valeur du dirigeantpermet cependant d’expliquer la question dela persévération ou non dans la décisionengageant l’avenir de l’organisation. Au titrede ces valeurs figure la responsabilité quel’on peut envisager comme une réponse faceà la tentation d’une transgression ou d’unepersévération dans une décisioninopportune.

L’analyse comparative des entreprisesétudiées nous amène à constater qu’il existedifférents degrés de faute managériale,correspondant à des niveaux croissants desurconfiance et de persévération.

Ainsi, dans le cas du GIE entre deuxmutuelles, la surconfiance et la persévérationdes managers se sont traduites par le fait quel’organisation n’existe plus sous sa formeactuelle mais que les emplois ontmajoritairement pu être sauvegardés. Cetype de faute non souhaité s’apparentedavantage à une faute simple au sens dudroit.

Concernant l’établissement bancaire étudié,bien que l’entité perdure encore à ce jour,celle-ci a été largement réorganisée et desemplois ont été supprimés. Ce type de fautes’inscrit dans le cadre d’une démarched’auto-persuasion des dirigeants qui, face àune situation complexe, ont cherché lesmoyens de concilier les différentescontraintes propres à la crise vécues au seinde leur organisation. Cette faute est àrapprocher de la théorie de la dissonancecognitive (Festinger, 1957) selon laquellel’individu en présence de choix multiples nepouvant s’accorder fera en sorte de trouverle meilleur compromis. Une fois le choixréalisé, on trouve l’alternative choisie encoreplus attirante qu’au préalable.

Enfin, dernier stade en termes deconséquences négatives liées à la fautemanagériale, la société de serviceinformatique a été démantelée, elle n’existeplus à ce jour et l’ensemble des emplois a étésupprimé. Ce type de faute s’apparente à unefaute lourde au sens du droit car elle impliquela responsabilité au niveau d’un centreunique de décision, celui du dirigeant, quis’est entêté dans un sens et a dissimulé unensemble d’informations au détriment de sescollaborateurs.

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3. de nombreux cas de jurisprudence ont cependantcaractérisé cette faute de gestion.

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Face à la faute managériale,le principe de responsabilité

Le principe de responsabilité, concilier connaissance dans l’action,décision et responsabilité

La question de la responsabilité suppose demettre l’analyse de la rationalité au centredes attentions (Chauveau, Rosé, 2003). Cetteanalyse de la rationalité trouve une limiteclaire quant à la thématique del’imprévisibilité affectant un comportementd’erreur. Si la faute fait s’estomper l’aléa, nepermettant pas alors de parler de risque, lasurvenance d’une telle faute reste cependantdifficile à prévoir et s’inscrit dans ce queMandelbrot qualifie de « multiplicité desétats du hasard » (1997, p.57). C’est cecaractère d’imprévisibilité qui rend difficile lamise en œuvre de la responsabilité au sens de principe d’accountability. Ce principecorrespond au fait de « rendre des comptes »pour un dirigeant d’entreprise, au sensfoucaldien de pouvoir issu du savoir. « Il s’agitde mesurer ce qui compte, d’être en mesured’exercer le pouvoir lié au fait de savoir »(Pesqueux, 2007, p. 74). La responsabilité àl’égard des membres de l’organisationdécoule de ce pouvoir d’information.

La connaissance de son action caractériseparticulièrement la faute. La faute supposel’entêtement dans l’erreur clairementappréhendée et admise comme telle. Il s’agitbien de persévérer dans le « mauvais choix ».La crise est à terme consécutive de la fautebien que restant difficile à prévoir, ce qui meten lumière le caractère situé d’une crisecomme anticipée en tant qu’éventualité(même si celle-ci n’était pas nécessairementsouhaitée).

Le principe de responsabilité et l’obligation à l’avenir

Pour Hans Jonas, face à cette imprévisibilité,l’éthique du futur suppose comme « première obligation » de se poser la

question des effets lointains de l’actionprésente. Notre savoir factuel des effetslointains de l’action présente renforce cetteheuristique de la peur (Jonas, 1990, p.67).L’individu dans l’organisation est confronté àce caractère incertain des projectionsd’avenir. Pour Hans Jonas, la vision court-termiste n’est pas suffisante et le pronosticde l’avenir s’impose comme exigenceéthique.

Le pari dans l’agir etla dialectique de l’enjeu total

Les développements d’Hans Jonas trouventun intérêt particulier quant à la thématiquede l’erreur envisagée comme faute. Ainsi, sepose la question centrale de la manièresuivante : ai-je droit de mettre en jeul’intégralité des intérêts des autres dans monpari ? Hans Jonas y répond par la négative(1990, p.82) : ce n’est que l’empêchement duplus grand mal et non l’avènement du plusgrand bien qui justifie cet enjeu total mobilisédans un pari donné. A défaut, on se placedavantage sous le signe de l’arrogance que dela nécessité, nous dit encore Hans Jonas. Laprotection du provisoire est en soiinsuffisante et l’agir du manager responsabledoit donc consister à ne pas mettre en jeul’intérêt total de l’organisation.

Cette approche de l’agir conçu comme uneéthique du futur résume ainsi le lien fortexistant entre la pérennisation de l’activité etla question de la responsabilité.

Conclusion : La responsabilité,pérenniser l’organisation

La responsabilité consisterait, dans uneapproche visant à empêcher le plus grand malplus que de permettre un plus grand bien, àagir pour sauvegarder la pérennité del’organisation au lieu de rechercher avanttout sa croissance. Pourquoi une telle prisede position dans cette « éthique du futur » ?Tout simplement car un tel raisonnement,même s’il n’est pas satisfaisant pour un

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décideur, vise à soustraire l’organisation aurisque, ce « lieu de nulle part ». Une telleapproche apparaît toutefois comme limitéedans ce que Giddens qualifie de « sociétéentrepreneuriale » où le risque est uncorollaire de la notion de confiance (Giddens,1994). Si le risque est incontournable pour ledécideur soucieux de voir son entreprise sedévelopper, un risque bien identifié etmesuré est indispensable pour pérennisercelle-ci. Le principe de responsabilité (Jonas,1990) doit s’inscrire dans une logique degestion globale du risque pour êtreapplicable. A cette condition, on peut alorsconcilier responsabilité, pérennité del’organisation et nécessaire prise de risque.

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