edba paris-dauphine thesis alami aroussi -27 fevrier 2009

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1 Des ressources et des paradoxes inattendus dans le management et la performance des organisations: Cas des PME marocaines. Rapport de thésis dans le cadre de la soutenance du diplôme de l’Executive Doctorate in Business Adminisration de l’Université Paris Dauphine 27 Février 2009 Rachid Alami Executive Doctorate in Business Administration Paris Dauphine University [email protected]

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Des ressources et des paradoxes inattendus dans le

management et la performance des organisations: Cas des PME marocaines.

Rapport de thésis dans le cadre de la soutenance du diplôme de

l’Executive Doctorate in Business Adminisration de l’Université Paris Dauphine 27 Février 2009

Rachid Alami Executive Doctorate in Business Administration

Paris Dauphine University

[email protected]

Page 2: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

TABLE DES MATIERES

Résumé………………………………………………………………………………………. 2 Abstract ……………………………………………………………………………………… 2 Introduction ………………………………………………………………………………… 3

Partie I 1.1 Théories et concepts managériaux impliqués dans cette recherche ……….. 8 1.2 Culture et management des organisations ………………………………………. 9 1.2.1 La sociologie ………………………………………………………………… 12 1.2.2 La sociologie des organisations et les écoles de pensée …………… 15

1.3 L’école classique ………………………………………………………………………. 15

1.4 L’école des ressources humaines ………………………………………………….. 18

1.5 L’école de la contingence ……………………………………………………………. 22

2. Management, culture et organisation ……………………………………………….. 25

2.1 L’importance de la culture ………………………………………………….. 25 2.2 Approche des différences culturelles ……………………………………… 28

3. La culture intégrée aux organisations et au management ……………………….. 31 3.1 Fonction et enjeux de la culture d’entreprise …………………………….. 32 3.2 Le courant de gestion comparée ……………………………………………. 33 3.2.1 Les résultats des travaux d‘Hofstede ……………………………. 35 3.2.2 Cas du Maroc …………………………………………………………. 42 3.2.3 La relation au temps ………………………………………………… 51 3.2.4 L’influence culturelle selon D’Iribarne …………………………… 53 3.5. Avantages et inconvénients des travaux antérieurs ……………………. 55 3.6 Management et environnement islamique …………………………………. 57 3.7 La particularité de chaque modèle de management ……………………… 60 4. Le management au Maroc ……………………………………………………………….. 63 5. Islam et modernité ………………………………………………………………………… 65 6. L’histoire économique de l’aire musulmane …………………………………………. 68

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PARTIE II 1. Méthodologie de recherche, pertinence du sujet et hypothèses ………………… 75 2. Les hypothèses ……………………………………………………………………………. 76 3. La faisabilité ……………………………………………………………………………….. 78 4. Les outils de la recherche ………………………………………………………………. 78 5. Les variables étudiées …………………………………………………………………… 79 6. La méthode de collecte des données …………………………………………………. 84 7. Les problématiques rencontrées ……………………………………………………….. 86 8. Les échelles de mesure ………………………………………………………………….. 88 9. Les techniques statistiques utilisées ………………………………………………..... 89

Partie III 1. Résultats de l’étude ……………………………………………………………………… 90

1.1 Les fréquences des résultats principaux ……………………………………………. 90 1.2 Les analyses statistiques ………………………………………………………………. 93 1.3 La construction des facteurs d’analyse ……………………………………………… 95 2. Analyse explicative des phénomènes étudiés ……………………………………….. 96 3. Les variables explicatives de la performance ……………………………………….. 98 4. Conclusion de la partie analyse des données ……………………………………….. 102 5. Apports managériaux de l’étude ……………………………………………………….. 105 Discussion …………………………………………………………………………………….. 107 Conclusion …………………………………………………………………………………….. 108 References …………………………………………………………………………………….. 109

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Principes de l’école classique ……………………………………………… 16 Tableau 2 : Les différents systèmes de rémunération ……………………………….. 20 Tableau 3 : Principes de l’école de la contingence ……………………………………. 23 Tableau 4 : Approche managériale de la culture ………………………………………. 33 Tableau 5 : Caractéristiques des sociétés communautaires et individualistes….. 41 Table 6: Cultural dimensions variability according to Hofstede ……………………. 43 Tableau 7 : Logiques culturelles comparées……………………………………………. 53 Tableau 8 : Forces et faiblesse des modèles d’Hoftsede et de D’Iribarne ………… 56 Tableau 9 : Comparatif des dimensions managériales……………………………….. 61 Tableau 10 : Caractéristiques et contexte de l’objet de recherche…………………. 77 Tableau 11 : La faisabilité de l’étude et le cadre de travail…………………………… 78 Tableau 12 : Indicateurs de mesure des variables……………………………………… 82 Tableau 13: Avantages et inconvénients du Questionnaire auto-administré …….. 85 Tableau 14 : Avantages et inconvénients des questions fermées………………….. 86 Tableau 15 : Définition des variables indépendantes………………………………… 88 Tableau 16 : Définition des facteurs d’analyse…………………………………………. 95

LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Rappel l’évolution de l’histoire du management……………………………. 13 Figure 2: Les dimensions de la culture…………………………………………………… 26 Figure 3 : Comparaison des dimensions IDH et ICI……………………………………. 35 Figure 4 : Comparaison des dimensions Masculinité et ICI…………………………. 37 Figure 5 : Comparaison des dimensions Individualisme et IDH…………………….. 40 Figure 6 : Positionnement relatif des pays selon l’indice IDH……………………….. 44 Figure 7 : Positionnement des pays selon l’indice Individualisme/Collectivisme…47 Figure 8 : Positionnement relatif des pays selon l’indice ICI………………………… 49 Figure 9 : Positionnement relatif des pays selon la nature de la communication… 50 Figure 10 : Positionnement relatif des pays selon la relation au temps…………… 52 Figure 11 : Avantages compétitifs liés à l’environnement juridico-économique…. 64 Figure 12 : Evolution de l’effort relationnel du manager……………………………… 102

Figure 13 : Evolution de l’effort d’adaptation du manager…………………………… 106

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Remerciements

Je tiens à remercier en tout premier lieu Mr Jean-François CHANLAT qui a dirigé

cette thèsis. Tout au long de ces deux années de travail, il a su orienter mes

recherches aux bons moments en me faisant découvrir au travers de son regard

d’anthropologue et de sociologue, toute la richesse scientifique et humaine de

l’histoire des organisations. Mr CHANLAT a toujours été disponible pour d’intenses et

rationnelles discussions. Pour tout cela, sa confiance, son engagement et son

soutien moral, je le remercie vivement.

Je remercie Mr Michel KALIKA qui a su mettre sur pied l’Exécutive DBA, un

programme pertinent et de qualité. Cette formation été une expérience hors du

commun, intense et m’a permis d’ouvrir mon horizon de réflexion et de pensée.

Il y a certainement un « avant l’EDBA » et un « après l’EDBA ».

Je remercie également tous les professeurs, et en particulier Monsieur Eric CAMPOY

et Monsieur Pierre ROMELEAR, de leur contribution dans la qualité, la pertinence et

la profondeur de leur enseignement.

Enfin, ce travail de recherche passionnant n’a pu être possible qu’avec l’aide

soutenue de ma famille dont je ne pourrais jamais les remercier suffisamment pour

tous les sacrifices consenties tout au long de ces années de travail.

Un remerciement tout particulier à ma mère et à mon épouse qui ont continué à

croire en moi, même dans les moments les plus difficiles et qui a toujours apporté

leur soutien et leur amour.

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Résumé

Comment certaines entreprises marocaines arrivent-elles à être économiquement et

socialement performantes alors que leur propriétaire laissent le plus souvent imposer

une logique managériale basée sur l’émotionnel, les croyances religieuses et le

paternalisme au lieu du rationnel, la logique et de l’autonomie ? Comment, dans ces

conditions, les managers marocains ou étrangers, formés aux concepts classiques

du management occidental, arrivent-ils à gérer les défis managériaux au quotidien et

assurer la stabilité de leur entreprise? Cet article se propose, à travers l’analyse de

cas d’entreprises marocaines d’identifier les facteurs clés de succès et les leviers

inattendus de performance et de stabilité de ces entreprises et d’expliquer comment

les dimensions culturelles et religieuses sont incorporées aux notions telles que

l’amélioration continue, le travail d’équipe, la gestion des ressources humaines ou la

productivité dans un contexte de culture intense.

___________________________________________________________________

Keywords

Culture et management – Performance et productivité – Gestion des ressources

humaines – Religion et management

__________________________________________________________________

Abstract

How could some Moroccan companies be economically and socially efficient when

their owner leaves most often impose a managerial logic based on emotional,

religious beliefs and paternalism instead of rationality, logic and autonomy?

How, then, Moroccan and foreign managers, trained in the concepts of Western

management, come to manage the daily managerial challenges and ensure the

stability of their business? This article attempts, through case analysis of Moroccan

companies to identify key success factors and unexpected leverage that are used to

enhance performance and to maintain stability of these companies and it tries to

explain how cultural and religious dimensions are, in different cultural context,

incorporated into concepts such as continuous improvement, teamwork, human

resource management or productivity.

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Introduction

"L’Allemand vit en Allemagne, le Parisien vit à Paris, le Turc vit en Turquie, mais

l’Anglais vit chez lui" (Goring, 1909). Cette citation de Goring datant de 1909 nous

rappelle que chacun regarde le monde à travers les fenêtres d’un "chez soi" culturel;

chacun agit comme si ceux qui viennent d’autres pays avaient quelque chose de

spécial (un caractère national), la norme se trouvant chez soi (Bernard, 1994). D’un

autre coté, Fayol (1918) s’exprima ainsi: « si l’on pouvait faire abstraction du facteur

humain, il serait assez facile de constituer un organisme social ».

Serait-il donc impossible de concilier la diversité des cultures avec l’universalité des

valeurs? Le management multiculturel efficace si chère aux organisations serait-il

qu’un mythe auquel les dirigeants d’entreprise veulent nous faire croire pour mieux

nous contrôler et ainsi réduire les risques tout en améliorant la performance ?

Les frontières physiques et institutionnelles ayant tendance à disparaître, il est

normal que les cultures tendent à se rapprocher. On passe donc du domaine de

l’international à celui de la globalité du monde

Cette étude ne prêtant pas apporter des réponses radicales ou définitives aux

difficultés que peuvent rencontrer les entreprises dans un milieu culturel différent.

L’être humain est un ensemble complexe, imprévisible et qui porte en lui un héritage

culturel et social et se construit également à travers ses relations avec son

entourage. Chanlat (2008) nous rappelle à ce titre que « La présence d’autrui joue

également un rôle dans la genèse de l’identité socioculturelle. Tout groupe humain

se différence au contact d’autrui. Ce double rapport (individuel et collectif) à l’altérité

pénètre tous les niveaux de la vie sociale », qui plus est dans la vie des

organisations. Cette recherche veut apporter une lumière sur un phénomène

récurent qui est celui de l’adaptation culturelle des managers qui évoluent dans des

environnements différents de leur origine. La validation des hypothèses est restreinte

à un environnement particulier. Des recherches similaires à plus grande échelle

seront présentées afin de valider ou d’invalider les résultats trouvés.

Dans la littérature sur les organisations, Gouldner (1959) cité dans Maggi (2006)

avait distingué deux modèles principaux d’étude des organisations qui sont le

modèle rationnel et le système naturel (natural-system). Thompson (1967) cité dans

Hafsi (2008) avait ajouté à cette distinction le fait que le modèle rationnel découle

d’une stratégie de système fermé et le modèle de système naturel découle d’une

stratégie de système ouvert.

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Le premier occulte toute relation de l’organisation avec son environnement, alors que

le second en fait l’aspect principal. La première approche est foncièrement

déterministe alors que la seconde et non déterministe par excellence.

L’approche du modèle rationnel se base sur une stratégie de système fermé mettant

l’accent surtout sur la performance et l’efficacité. Dans un tel contexte l’incertitude est

occultée, toute action est opportune et son résultat est prévisible. L’organisation est

en quelque sorte autonome et indépendante de son environnement.

Dans une telle perspective, l’aspect social et culturel des ressources est occulté mais

toute l’attention est centrée sur l’utilisation et l’optimisation de ces ressources. C’est

le cas des premiers auteurs ou ce que l’on appelle les classiques comme Fayol,

Taylor, Ford ou Weber (le modèle bureaucratique). C’est encore le cas des

théoriciens du comportement comme Mayo, Fayol, Maslow, Herzberg ou McGregor

plus centrés sur des théories portant sur la motivation, le leadership et les

communications interpersonnelles.

Toutes portent sur l’utilisation des ressources, le but étant la maximisation de l’output

à partir des ressources qui sont considérées comme données et sur lesquels

l’environnement n’a aucune influence.

Dans le cadre de ce modèle, tous ces théoriciens des organisations ont abordé la

question du fonctionnement organisationnel à partir d’une multitude de points de vue

qui procèdent d’une approche déterministe où l’environnement culturel est occulté.

En définitive, durant la première moitié du siècle les théoriciens des organisations

dans leur recherche de principes universels relatifs aux structures, au contrôle et à la

performance ont ignoré d’une certaine façon l’environnement culturel. Ainsi dans leur

recherche du « one best way », des théoriciens comme Weber soutenaient que les

structures bureaucratiques étaient valables pour toute organisation et Taylor

considérait ses principes du management scientifique comme universels.

Dans les milieux de culture intense où notre étude se situe, le rôle de

l’environnement, des croyances et des traditions est déterminant. Les milieux de

culture intense dans lesquels opèrent les entreprises marocaines qui sont des

milieux caractérisés par la transcendance et l’omniprésence de la religion islamique

avec tout ce que cela comporte comme contraintes, et la conjoncture sociale et

politique dans laquelle ces organisations progressent, ont rendu complexe la

compréhension de leur fonctionnement, principalement pour des individus formés

dans les universités occidentales.

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Nous savons que la théorie de la contingence est venue réfuter l’approche du « one

best way » pour ce qui a trait à la structuration des organisations (Chanlat, 2005).

Elle met l’accent, en particulier, sur le fait que la relation organisation -

environnement privilégie le rôle prédominant de l’environnement tel que l’ont exposé

Chanlat (1999) et Thompson (1967).

L’objectif de cette recherche vise à déceler les facteurs clés de succès des

organisations dans un milieu de culture différente, qui sont des milieux caractérisés

par des contraintes majeures et où prédominent de fortes idéologies, religions,

croyances et cultures locales, parfois en opposition aux règles classiques du

management. En particulier, je vais essayer de démontrer comment les entreprises

marocaines arrivent à performer malgré des méthodes de gestion en porte-à-faux par

rapport aux concepts classiques du management et identifier les leviers de

croissance et de performance qui assurent leur pérennité et leur stabilité. Quels sont

les facteurs clés de succès et les leviers inattendues qui résonnent et ont des effets

positifs sur la performance des individus qui sont dirigés par des managers

occidentaux ou nationaux formé dans les écoles occidentales ?

Cette étude essayera de mettre en évidence le fait que les concepts managériaux et

les théories de gouvernance et d’amélioration de la performance et de la productivité

appris tout au long de mes années universitaires n’ont pas engendré les effets

espérés dans un contexte culturel différent comme celui du Maroc. Pourquoi les

méthodes de gestion traditionnellement acceptées et enseignées dans les écoles de

management occidentales et même locales ne fonctionnent pas quand il s’agit de les

appliquer dans un contexte culturel différent ?

Telle est la question à laquelle nous essayerons de répondre. Pour ce faire, ce travail

se divise en trois parties.

La première partie présente les écoles de pensée du management des

organisations et nous conduit à travers le chemin qui nous mène à comprendre

pourquoi les théoriciens en sont arrivés à considérer la dimension humaine (donc

culturelle) comme variable critique de la gestion des organisations. Chacune des

théories (théorie classique, théorie de la contingence et théorie des ressources

humaines) sera analysée selon ses objectifs, ses mécanismes et ses principaux

élements. Chaque théorie est présentée de façon à comprendre quels en étaient les

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enjeux, les points forts et les points faibles. Pousser par le désir continue d’améliorer

la performance des organisations, chaque théorie prend ses racines dans les

faiblesses de sa précédente pour apporter un nouveau regard sur les relations

travail-performance-individu. Parler de culture d’organisation nous impose de faire

une introduction sur la sociologie des organisations et sur les mécanismes qui

régissent les liens sociaux entre individus et comment les acteurs construisent et

coordonnent des activités organisées. Par la suite, nous essayerons de comprendre

les rapports qui régissent les relations entre gestion et culture et quels sont les

travaux qui ont été menés pour mesurer les écarts culturels entre nations et qui ont

fait naître des mots tels que « différence culturelle » ou « distance physique ». A

chaque étape, un comparatif avec, soit les concepts de l’Islam, soit l’expérience du

terrain, sera présenté afin de comprendre les enjeux de cette étude et la relation qui

peut exister entre religion et management. Différents courants d’analyse des

différences culturels seront présentés pour nous permettre de synthétiser à la fin de

cette première partie les concepts généraux de chaque modèle de management et

de les comparer. Tout au long de cette partie, nous exposerons comme éléments

comparatifs, les méthodes managériales appliquées au Maroc et les contradictions

qui peuvent en être déduites par rapport aux théories occidentales. Nous

présenterons également dans cette partie la question de l’Islam et du management

et de l’émergence d’un nouveau type de managers arabes qui tentent de concilier

valeurs managériales et valeurs éthiques islamiques afin de mieux comprendre le

phénomène nouveau d’incursion de l’Islam dans le management.

La deuxième partie sera consacrée à la présentation du cas de l’entreprise pour

laquelle j’ai travaillé pendant 4 ans laquelle a été le déclencheur du désir de faire ses

recherches sur les différences culturelles et les ressources inattendues à la base de

la performance des PME marocaines. Il sera question dans cette partie de décrire les

faits, les expériences et les anecdotes qui ont jalonnées toutes ces années de

pratique au Maroc. Il s’agit de présenter les difficultés de départ (relation

hiérarchique, difficulté de communication, pouvoir, notions classique de performance,

application des théories et modèles managériaux universels) et de résumer les

expériences locales d’autres managers à partir de questionnaire distribués.

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Nous établirons les hypothèses de recherche à valider ainsi que la perspective

théorique appliquée tout au long de ces travaux. Nous expliquerons comment les

données ont été établies et quelles sont les variables définies et étudiées.

La troisième partie sera consacrée aux résultats de la recherche et à la validation

ou non des hypothèses de départ. Il sera question de mettre en évidence les

ressources et leviers utilisés pour améliorer la performance dans les organisations

mais également dans la gestion des équipes. Par ailleurs, je vais tenter d’expliquer

comment, grâce à ma double culture, occidentale et arabe, à mon expérience

personnelle et aux études de terrain, les managers de type occidental ont su

adapter les concepts généraux occidentaux de management et de gouvernance aux

subtilités locales. En particulier, l’introduction dans le langage managérial standard

de concepts religieux et culturels tels que des notions d’éthique religieuse, de

récompense divine, de rassemblements familiaux autour d’un repas ou encore de

notion de chef de famille.

On verra enfin que la performance de certaines entreprises marocaines n’est pas

uniquement le résultat d’une stratégie de croissance ou de l’amélioration de la

productivité. Derrière cette performance, se cache en fait un conflit permanent ente

éthique universaliste (croyance religieuse, notion du bien et du mal, droits de

l’homme et de la femme) et éthique individualiste (comportement d’affaires,

corruption, fraudes, opportunisme). Pourquoi ce paradoxe existe-t-il entre sphère

privée et sphère publique et quel est son impact sur les méthodes de gestion?

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Partie 1

1.1 Théories et concepts managériaux impliqués dans cette recherche

Etudier l’influence de la culture sur la performance des organisations nécessite

d’aborder un ensemble de théories et de concepts managériaux afin de comprendre

pourquoi les chercheurs en sont arrivés à considérer les divergences cultuelles

comme une variable critique des organisations. En effet, aborder la culture induit de

parler de sociologie. Chanlat (2006) nous rappelle que « l’individu se construit par

rapport à l’autre ». Pour comprendre les relations individuelles et communautaires, il

faut comprendre le lien social et les valeurs qui poussent à agir. De là, on est amené

à présenter certaines contributions de la sociologie des organisations si l’on veut

comprendre comment les acteurs construisent et interagissent au sein des

organisations. N’oublions pas que l’objectif avoué des entreprises privées est d’être

rentable et productive. Les managers cherchent donc à maximiser les ressources

pour améliorer la performance de leur entreprise. Ce qui fût déjà le cas au début de

l’ère industrielle et l’invention de la théorie classique de l’organisation scientifique du

travail. Cette théorie est venue répondre, par la mise en place de méthodes

rationnelles de production de masse, à une forte demande. Les ingénieurs ont donc

répondu à leur façon aux contraintes du marché. Leurs réponses ont engendré de

nouvelles questions auxquelles la théorie de la contingence est venue répondre mais

tout en engendrant elle-même de nouvelles questions auxquelles la théorie des

ressources humaines a essayé d’y répondre. Cette spirale sans fin de questions-

réponse nous a mené de nos jours à apporter une petite pierre à l’édifice en

construction des sciences de gestion. Chaque théorie vient répondre aux défis de

son époque tout en se construisant sur les fondements de celles qui l’ont précédé.

Une sorte de fil conducteur nous guide tout au long de cette recherche pour

comprendre pourquoi en est on arrivé à disséquer les différences culturelles et en

faire une autre variable a prendre en considération si l’on veut « comme à

l’accoutumée » améliorer la performance des organisations.

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1.2 Culture et management des organisations

L’influence de la culture et des traditions sur le management et la performance des

organisations n’a pas été toujours considérée comme un facteur critique. Il a fallu

attendre l’apparition d’auteurs comme Durkheim, Marx, Weber, Mayo ou d’autres

socio-anthropologues pour comprendre les ressorts de l’action humaine, les

motivations qui se cachent derrière toute action individuelle ou encore les luttes de

pouvoir. Les socio-anthropologues ont compris l’importance de l’encastrement

culturel dans les sphères de la vie courante et en particulier dans les organisations et

la manière dont elles sont gérées.

Cependant, le chemin qui a mené à la reconnaissance de la culture comme un

élément clé de la performance des organisations a été long et laborieux. En effet,

plusieurs écoles de pensée ont pris le devant de la scène et ont constitué, chacune à

leur époque, le modèle à suivre comme le modèle du « one best way » très cher à

Ford et Taylor, même si Taylor s’est intéressé aux aspects administratifs et à la

structure organisationnelle comme moyen d’améliorer la performance. . On ne peut

donc pas introduire le management interculturel et l’influence des traditions et de la

culture sans introduire les différents courants de pensée qui se sont succédés depuis

le 18ieme siècle, en commençant par le fameux "Recherche sur la nature et les

causes de la richesse des nations" (Adam Smith, 1776) et qui ont permis

l’émergence de nouvelles idées et théories.

Adam Smith a été le précurseur des théories scientifiques des organisations en

proposant des schémas explicatifs rationnels et en mettant en évidence la possibilité

de réaliser des gains de productivité dans l'industrie grâce à la division du travail. Par

son fameux exemple d'une manufacture d'épingles, Smith montre les avantages de

la division du travail. Il cite entre autre, l’accroissement de l’habilité des ouvriers et

l’économie de temps pour passer d’une tâche à une autre (réduction des temps

morts, meilleure organisation des tâches). Il parle également de l’invention des

machines qui abrègeront le travail et permettront à un seul individu de faire le travail

de plusieurs. Force est de constater que ces principes sont toujours d’actualité.

Productivité, performance, rentabilité, gain de temps ou encore réduction des coûts

sont encore de nos jours les vecteurs de croissance et de gain de part de marché.

Les phénomènes de délocalisation en sont le parfait exemple. En délocalisant leur

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production, les entreprises occidentales ont considérablement réduit leurs coûts,

parfois de moitié. La réduction de ces coûts s’est faite non seulement par l’utilisation

d’une main d’œuvre moins chère (Inde, Chine, Vietnam, Afrique du Nord) mais

également grâce à l’optimisation des coûts de transport et de techniques de

production comme le Juste à Temps ou encore le fameux « Kaizen » inventé par les

japonais. Le travail en flux tendu, la réduction des stocks, l’informatisation des

processus de production par l’utilisation de logiciels comme les ERP (Entreprise

Resources Planning), les CRM (Customers Relationship Management), l’utilisation

des robots dans la production automobile ou encore l’Internet ont considérablement

participé à l’amélioration de la productivité et réduit de façon sensible les délais de

production. C’est ainsi qu’une entreprise de textile comme ZARA arrive à lancer de

nouveaux modèles sur le marché en 6 semaines là où il en faut plus de 12 pour ses

concurrents comme H&M ou GAP. Le gain de temps (déjà cité par Adam Smith) est

crucial pour attirer aujourd’hui des clients toujours plus avides de nouveauté.

La transformation des sociétés agricoles en société industrielle à travers les deux

siècles précédents et par la suite en multinationales durant notre époque a apporté

avec elles d’autres phénomènes inattendus ou tout au moins mal cernés par les

auteurs de la théorie classique des organisations. De nombreuses questions ont en

effet été soulevées suite à l’apparition de phénomènes sociaux comme la souffrance

au travail, les relations hiérarchiques, la motivation des ouvriers, le stress en milieu

professionnel, les relations de pouvoir et les différences culturelles.

Si les défenseurs de la théorie classique des organisations ont pour leur part

répondu à des questions d’efficacité au travail, de remplacement de l’artisanat par

des principes de gestion rigoureux et adaptés à la production de masse, de

remodelage des rapports sociaux entre direction et travailleurs, ils ont certainement

provoqué d’autres questions non moins importantes sans vraiment le vouloir. En effet

dans les années 60, un nouveau courant de pensée émerge en réaction à

l’apparition de critiques et de mouvements sociaux aux Etats-Unis. Issue des travaux

de Mayo, ce courant se veut être une réponse à la montée du mécontentement des

ouvriers (rappelons à cet effet le drame des usines de Rockefeller au Colorado où 16

personnes décédèrent suite à des manifestations sociales). Les industriels

américains de l’époque vont financer des recherches en diligentant ces travaux à des

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psychologues qui vont essayer de trouver des solutions afin de canaliser la colère et

les protestations et essayer de trouver les ressorts pour trouver des solutions au

malaise social. Ce qui conduit à l’émergence d’une nouvelle école de pensée

défendue par des auteurs comme Maslow, Herzberg ou McGregor. De cette école

surgira un aspect jusque là négligé : L’aspect social des organisations. Pour ces

auteurs, toute entreprise est constitué d’un double système : technique et social. De

nouvelles notions apparaissent alors comme l’équilibre individu-organisation, les

besoins des individus et des groupes. Autrement dit, l’homme n’est plus une

machine à produire mais une personne animée par une logique de sentiments et

des désirs d’accomplissement. Selon l’école des ressources humaines, la

productivité ne dépend pas uniquement de la division du travail et de l’efficacité des

machines. D’autres facteurs interviennent, comme la dimension humaine donc

psychologique de l’individu. A son tour, cette école de pensée va faire l’objet de

critiques intenses. Comment expliquer que certaines entreprises s'avèrent

incapables de survivre dans certaines circonstances malgré une GRH efficace. Il y

aurai donc d’autres facteurs influents la performance. C’est ainsi que des auteurs

comme Chandler, Minztberg ou encore Woodward postulent que l’efficacité d’une

organisation dépend de son environnement et de ses caractéristiques propres

(stratégie, taille, culture, technologie,..). Cette théorie est celle de la contingence.

Les auteurs appartenant à l’école de la contingence se sont posés un certain nombre

de questions. Comment expliquer la présence d'organisations performantes ne

répondant pas aux principes de Fayol et Taylor qui pourtant entendaient définir le

"one best way"? Comment expliquer que dans certains cas ces entreprises

répondant au "one best way" s'avèrent contre-productives et inefficientes? A partir

des travaux d’auteurs comme Woodward ou Mintzberg, les auteurs de cette théorie

ont montré que la structure d’une organisation est reliée à des facteurs, dis

contingents, contrairement à l’idée de l’école classique qui considère qu’il existe un

structure idéale indépendamment du contexte. Par exemple, Woodward a montré ni

l'histoire de l'entreprise, ni la branche d'industrie n’expliquaient les différences

constatées. Les différences provenaient plutôt essentiellement de la technologie

développée. Le grand intérêt de l’école de la contingence a été de montrer qu'il n'y

avait pas de structure qui soit la meilleure pour toutes les organisations, puisque

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cette structure dépend de la technologie employée et de l’environnement dans

lequel elle évolue (Woodward, …..)

La théorie de l’école de la contingence à son tour induit un certain nombre de

questions. En effet, jusqu'à présent, les écoles de pensée se sont surtout intéressées

aux aspects techniques et environnementaux des organisations. L’école des

relations humaines défendu par des

Afin de mieux comprendre les différents courants de pensée qui ont jalonné l’étude

des organisations, il serait intéressant de présenter plus en détails les différents

concepts sous-jacent à chaque école de pensée et de faire une analyse comparée

qui met en évidence les points forts et les questions soulevées par chaque théorie.

Cependant, une brève introduction sur la sociologie des organisations peut nous

aider à mieux comprendre ce qui fait le lien social dans une organisation et comment

celui-ci évolue et se transforme.

1.2.1 La sociologie

La sociologie est la science du social qui essaie de comprendre ce qui fait le lien

social. Elle essaie de comprendre les ressorts de l’action humaine et les valeurs qui

motivent l’action. D’une manière générale, la sociologie tente d’apporter des

réponses aux transformations sociales liées à l’apparition de phénomènes

particuliers tels que la souffrance, les relations interpersonnelles, les religions ou

encore l’organisation des individus rassemblés autour d’un objectif commun comme

pourrait l’être les organisations.

La sociologie prend ses racines dans le début de la modernité (Renaissance 15e –

16e siècle). A cette époque, l’homme cherche à se libérer des valeurs féodales du

Moyen-âge et de la pensée dominante de l’Eglise. La remise en question des valeurs

religieuses a permis l’affranchissement des individus. Les croyances séculaires ont

perdu de leur légitimité et l’Eglise a perdu de son pouvoir au profit d’organisations

politiques décentralisées. De ce point de vue, au cours des derniers siècles, l’Islam

comme religion dominante des pays du Maghreb et en particulier le Maroc, est venu

confirmé cette perte de légitimité des pouvoirs des lieux de prière a profit de la

science. En effet, l’Islam insiste sur le rôle des sciences comme moyen de

reconnaissance de Dieu. En découvrant les lois scientifiques qui régissent l’univers,

Page 17: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

13

le croyant devrait être amené à la conclusion de l’unicité de Dieu. C’est donc à partir

d’une recherche empirique, individuelle et entièrement basée sur des démonstrations

rationnelles que le croyant dans le monde musulman se libère de toute emprise des

dogmes religieux infondés. Dieu dit dans le Coran : « Seuls les savants me craignent

vraiment ». Newton n’a t’il pas bouleverser son siècle en découvrant la gravitation

universelle ? Si l'humanité était en mesure de révéler les lois de l'Univers, elle

pouvait espérer découvrir les lois propres à la nature et à la société humaine. La

liberté et la démocratie naissent donc avec la science et l’affranchissement de

l’homme du joug de la religion comme elle a été appliquée jusqu’alors. La séparation

de l’Eglise et de l’Etat a véritablement permis à la sociologie de voir le jour. La

naissance de la sociologie au XIXe siècle s'explique par l'ampleur des mutations

sociales et politiques et par la réflexion des fondateurs de la sociologie sur le devenir

de la société industrielle. Les principaux auteurs ayant donné forme à cette nouvelle

discipline sont principalement Auguste Conte, Alexis de Tocqueville et Karl Marx

mais ses véritables fondateurs furent Emile Durkheim et Max Weber ainsi que Marcel

Mauss. Il s'agit donc d'une discipline récente. Durkheim a formulé une célèbre

phrase pour résumer la sociologie : « la sociologie ne vaut pas une heure de peine si

elle ne sert à améliorer le sort des hommes » (Mauss, p.233.)

Figure 1 : Rappel l’évolution de l’histoire du management

Moyen-âge en Occident Autocratie, féodalisme, poids de l’église, souffrance, privilèges, centralisationdomination des seigneurs, la vie est régie par ordre, liberté limitéePaysan en tant qu’outil de production

Modernité XVII, XVIII- Remise en question des valeurs religieuses - Liberté et démocratie- Progrès- Révolution scientifique

Révolution industrielle XIX, XX- Capital- Organisation du travail - Application de la science àl’industrie- Fordisme

Nouvel ordre social, XX, XXI- Puissance des organisations- Mondialisation - Chocs culturels

SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS

SOCIOLOGIE

Auguste Conte, Marx, Durkheim, Weber, Pareto

Etzioni, Crozier, Sainsaulieu, Hofstede, D’Iribarne, Chanlat

Page 18: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

14

Ci-dessus, un schéma qui montre l’apparition de la sociologie vers la fin du 19eme et

le début du 20ieme principalement lorsque des auteurs comme Auguste Conte, Max

Weber et Karl Marx étudient les changements profonds que subit la société suite au

effets de la révolution industrielle. Il s’ensuit le courant de la sociologie des

organisations, initié par Crozier qui après une mission d’étude de la productivité aux

Etats-Unis, revient en France pour comprendre les changements que subissent les

organisations après la deuxième guerre mondiale. Crozier s’intéresse à la fonction du

management comme outil de modernité et aux phénomènes d’ajustement des

organisations. Il analyse le fonctionnement des grandes organisations

bureaucratiques en France. Il souhaite montrer que le système bureaucratique

français ne correspond pas au modèle d'organisation rationnelle que Max Weber

avait décrit dans « Economie et société ». D’autres auteurs, comme Ezioni, étudient

les transformations des organisations et de l’influence du management des écoles

américaines. Sortie grand vainqueur de la guerre, les Etats-Unis sont la plus grand

puissance. Des investissements massifs sont réalisés en Europe pour la

reconstruire. C’est le plan Marshall.

Dans les années 70 va apparaître la courant de la diversité culturelle à travers des

auteurs comme Hofstede, D’Iribarne ou Chanlat. Ces auteurs s’intéressent aux

problèmes éthiques et à l'influence des cultures nationales sur le fonctionnement des

organisations. La mondialisation des échanges et les phénomènes d’immigration

vont engendrer des chocs de culture. L’univers de sens est différent selon la culture

des individus.

Des trois niveaux de la sociologie - macrosociologie, méso-sociologie

microsociologie – c’est ce dernier qui nous intéresse pour cette étude. A travers les

comportements, les pratiques, les traditions et les habitudes des individus avec

lesquels ils tissent ou cherchent des liens sociaux, nous allons essayer de

démontrer le rôle important de la culture dans la performance des managers formés

aux écoles occidentales et qui exercent dans un milieu culturel et religieux intense et

différent.

Page 19: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

15

1.2.2 La sociologie des organisations et les écoles de pensée

La sociologie des organisations est une branche de la sociologie qui étudie comment

les acteurs différents d’une organisation construisent et coordonnent leurs activités

organisées. Le champ d’application est principalement le lien social qui se divise en

trois catégories :

• La coordination : comment les organisations structurent la cohésion

d’ensemble de leur fonctionnement malgré la complexité des

activités à mener et les contraintes externes qu'elles subissent

• La coopération : comment les acteurs de l’organisation parviennent

à tisser des relations de travail satisfaisantes malgré leurs intérêts

différents voir contradictoires

• L’adhésion : quelles sont les valeurs présentes dans l’organisation

et comment les acteurs s’y adhérent.

L’objectif d’une entreprise est l’optimisation des investissements, qu’ils soient

humains ou matériels afin de maximiser sa rentabilité. Pour arriver à l’optimum de

production, les trois aspects cités plus haut (coordination, coopération, adhésion) ont

tour à tour été exploités, parfois de façon individuelle, parfois en étant combiné,

comme de nos jours, grâce notamment à la sophistication des outils de travail et aux

techniques d’amélioration de la productivité humaine (Techniques de motivation, TIC,

cercle de qualité etc…). Voyons maintenant comment chaque école de pensée a

structuré sa démarche et quels ont été les principaux moteurs de leur

développement.

1.3 L’école classique

L’école classique a de toute évidence basée sa théorie sur une conception la

coordination et la spécialisation. Elle a vu l’organisation comme une machine

transformant les éléments reçus (inputs) en produits finis (outputs) de façon à

améliorer la performance. Toute aspect social ou biologique est secondaire. Le

système fonctionne indépendamment de son environnement. L’apparition de cette

école vient en réalité répondre à des besoins précis. Le contexte industriel du XIXe

siècle est marqué par des innovations technologies majeures comme l’électricité, le

Page 20: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

16

chemin de fer ou encore la chimie moderne. Cette révolution industrielle appelle les

organisations à s’adapter et à améliorer leur productivité. Apparais alors des

ingénieurs qui vont essayer de répondre à la question suivante : Comment appliquer

aux organisations la même rigueur scientifique que celle qui gouverne les

machines ?

Les réponses apportées par ces ingénieurs (Fayol, Taylor, Gilbreth) ont été presque

similaires des deux cotés de l’atlantique. Ces deux ingénieurs ont vu l’organisation

comme une totalité, une sorte de boite noire dans laquelle un certain nombre de

principes devront être respectés afin d’assurer une coordination parfaite et continue

des outils de production. Ces principes sont cités dans le tableau suivant :

Tableau 1 : Principes de l’école classique

Ecole classique Principes

Organisation Universalité : Communauté d’intérêts entre direction et travailleur

Souveraineté : Négation des besoins de l’homme

Science La science au service des besoins de l’organisation

La science nouvelle base de légitimité de la direction

La science non contestable, non réfutable

Démarche Observer

Décomposer/Classer

Formaliser et établir des principes scientifiques

La science est érigée comme valeur universelle et comme seule référence

légitime. Ce qui est scientifique est par définition irréfutable. On passe donc de la

science personnelle à la science organisationnelle.

Page 21: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

17

Fayol, du coté français, et Taylor, du coté américain, ont tous deux constitués les

piliers de l’école classique au même moment de l’histoire des organisations. Pour sa

part, Fayol militait pour remplacer un fonctionnement intuitif et arbitraire par une

mécanique organisationnelle dont chacun des rouages sont spécifiés et coordonnés.

Grâce à un repérage des fonctions clefs de l’organisation (production, recherche,

vente, finance..), Fayol estimait être capable de relier les différentes parties par des

règles de procédure et décomposer les missions en fonctions spécifiques, le tout

gérer par une hiérarchie très bien établie.

Taylor pour sa part a développé l’organisation scientifique du travail (OST). Le

principe de l’OST est de remplacer le savoir-faire et la connaissance personnelle du

travailleur par des principes scientifiques définissant le temps et les mouvements

mécaniques à accomplir le travail. La démarche consistait à observer ce que fait

l’ouvrier (détenteur du savoir-faire), à décomposer le travail en tâche élémentaire et

enfin à attribuer à chaque tâche un temps et un mouvement optimal. La mise en

œuvre d’une telle organisation nécessitait selon Taylor une division verticale du

travail en 3 niveaux qui sont : La conception qui était de la responsabilité des

bureaux des méthodes, le contrôle qui incombait aux contremaîtres et l’exécution qui

revenait à l’ouvrier spécialisé. Toute cette standardisation du travail allait permettre

de produire plus efficacement et de stimuler la consommation en stimulant le pouvoir

d’achat. Ford ira plus loin en mettant en place la chaîne de montage de ses

véhicules pour produire en grande série.

Les principes du management scientifique peuvent être résumés par :

- Utiliser la Science, pas les méthodes empiriques

- Chercher l'harmonie et non la discorde

- Chercher la coopération plutôt que l'individualisme

- Chercher le maximum de productivité

- Promouvoir le développement de chaque employé pour sa plus grande efficacité et prospérité

- Le prix de revient de fabrication diminuant grâce à une production améliorée,

l'industriel peut réaliser de meilleurs bénéfices.

Page 22: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

18

Les principales critiques à mettre sur le compte de la théorie classique des

organisations sont l’annihilation de l’homme en tant qu’être social, doté de

sentiments et interagissant avec d’autres membres de la communauté et la non prise

en compte de facteurs externes à l’entreprise (Chanlat, Séguin, 1983,1987).

L’environnement et l’homme social y sont absents. Fayol (1918) n’a-t-il pas dit : « si

l’on pouvait faire abstraction du facteur humain, il serait assez facile de constituer un

organisme social ». La critique de l’homme en tant qu’être social est venue des

travaux de l’école des ressources humaines. Celle de l’environnement est issue des

travaux de l’école de la contingence.

1.4 L’école des ressources humaines

La remise en cause du paradigme mécanique et du « one best way » est venue

d’auteurs comme Mayo et McGregor. Deux principaux courants ont constitué les

foncements de cette théorie : L’école des relations humaines proprement dit qui

prône de modifier le système social pour l’adapter au système technique (Mayo,

Herzberg) et l’école de la motivation qui insiste plutôt sur la nécessite de modifier le

système technique pour motiver le système social (Maslow). Dans les deux cas,

l’entreprise est vue comme une dualité technique et sociale. Autrement dit, la

ressource humaine doit être gérée au même titre que la ressource technique. Il en

résultera toute une panoplie d’outils de management pour améliorer la performance.

Ces outils toucheront la motivation des travailleurs, la formation des cadres, la GRH

(gestion des ressources humaines) etc… L’homme a donc des motivations

complexes et ne réagit pas uniquement à l’appât du gain et certaines motivations

peuvent conduire aux performances qualitatives et quantitatives supérieures à celles

qu’on obtient par la carotte et le bâton

Le mouvement des Relations Humaines est né des travaux qu'Elton Mayo a entrepris

à l'usine Western Electric de Hawthorne, près de Chicago. Sans rejeter le

Taylorisme, il cherche en effet a améliorer l’efficacité des équipes. Mayo va

complèter l'hypothèse taylorienne selon laquelle les conditions matérielles et

techniques, du travail influencent la productivité en y associant d’autres éléments.

Ceux-ci sont des salaires acceptables, un environnement agréable, des horaires bien

étudiés, une sécurité au poste et une sécurité de l'emploi. De ses expérimentations, il

déduit l'importance du climat psychologique sur le comportement des travailleurs.

Page 23: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

19

MAYO et le courant des RH dans son ensemble ont eu la conviction que les "bonnes

relations" horizontales et verticales avaient une influence capitale sur la satisfaction

globale apportée par le travail et sur la productivité personnelle.

Trois idées phares caractérisent la pensée du mouvement :

. Les individus ont naturellement besoin d'appartenir à un groupe. Ils recherchent

l'estime et l'amitié de ceux avec qui ils sont associés dans l'accomplissement de leur

tâche. Ils souhaitent en plus, pouvoir se montrer utiles et apporter une contribution

manifeste. Dans la mesure où ce besoin d'appartenance est satisfait, les individus

arrivent à travailler en coopération et à adhérer aux objectifs de l'entreprise. Il revient

alors à la hiérarchie de montrer au personnel qu'il est utile et joue un rôle non

négligeable dans la bonne marche de l'entreprise. Elle doit encourager ses

subordonnés à prendre des initiatives dans tout ce qui concerne la gestion courante,

en accord avec les objectifs connus et reconnus de tous.

. Un bon environnement et des avantages matériels permettent à un individu de

s'épanouir et de mieux s'intégrer à l'entreprise, d'y avoir une activité plus intense.

On retrouve avec quelques variantes près les besoins de l'homme au travail

identifiés par Maslow : besoins physiologiques, besoin de sécurité, besoin

d'appartenance, besoin d'estime et besoin d'accomplissement personnel. Mayo en

vient à la conclusion que les changements eux-mêmes n’expliquent pas tout. Il met

en évidence l’importance des phénomènes affectifs et surtout des phénomènes de

groupe et des interrelations humaines.

De nos jours, les principes de l’école des relations humaines sont largement connus

et appliqués. A la vue des investissements consentis par les organisations afin

d’améliorer le climat au travail, de gérer efficacement les équipes, de motiver les

troupes, de la gestion efficace des conflits et du stress ou encore de mettre à la

disposition des travailleurs des espaces fumeurs spécialement aménagés, on peut

aisément conclure que certaines idées de l’école des relations humaines ont été

retenues. Il en a même résulté des systèmes de rémunération complexes et adaptés

aux contraintes organisationnelles tant internes qu’externes. Le tableau ci-dessous

résume les différents systèmes existants :

Page 24: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

20

Tableau 2 : Les différents systèmes de rémunération

KERR 1995 GOMEZ – MEIJA 1992 SCHUSTER et ZINGHEIM 1992

LAWLER 2000

Basé sur la hiérarchie

Basé sur la performance

- Rémunération variable basée sur la performance collective et la position hiérarchique - Augmentation sur l’ancienneté - Avantage associé au statut hiérarchique - Promotion lié aux objectifs internes

- Performance individuelle, ancienneté et position hiérarchique - Augmentation, primes attribués objectivement - Avantages ne reflètent pas le statut - Promotion lié aux besoins de l’organisation

Adapté à une culture de clan

Adapté à une culture de marché

Système mécaniste

Système organique

- Salaire fixe + avantages sociaux - Salaire supérieur au marché - Basé sur poste et ancienneté - Politique salariale secrète et centralisée - Echange de court terme

- Salaire variable - Inférieur au marché - Basé sur le marché du travail et compétence - Politique communiqué et décentralisée - Echange long terme

Adapté à une stratégie de diversification reliée

Adapté à une stratégie non reliée

NEW PAY - Basé sur le marché du travail - Augmentation sur performance individuelle - Rémunération variable sur performance individuelle - Rémunération globale basée sur primes - Salaire de base inférieur au marché - Echange de court terme

HIGH INVOLVMENT

- Salaire total supérieur au marché - Rémunération variable sur performance collective - Rémunération de la performance individuelle - Basé sur les compétences - Echange long terme

Deux courants principaux résument les systèmes de rémunération:

1- Le courant universaliste qui veut que la rémunération se fasse sur le mérite

individuel, la performance individuelle et collective (Lawler, 2000)

2- Le courant stratégique qui prône une rémunération basée sur la stratégie de

l’entreprise, son mode de management et les attentes des salariés : Efficace

si les salariés sont incités à adopter des comportements qui favorisent la

stratégie de l’entreprise

L’approche "améliorez les relations humaines (et la rémunération) et la productivité

augmente" est un raccourci parfois trop rapide. L'amélioration des relations humaines

est une condition nécessaire mais pas suffisante à l’amélioration de productivité.

Morin (1994) écrit que la variable "relations de pouvoir" a été oubliée. Si l'approche

"Ecole des Relations Humaines" est présentée par la hiérarchie comme un modèle

idéal, la maîtrise peu ne plus oser intervenir de peur de faire chuter la productivité en

dégradant ses relations avec les subordonnés. La maîtrise a besoin de disposer d'un

pouvoir réel, faute de quoi on risque fort d'avoir de bonnes relations et une faible

productivité.

Page 25: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

21

L’école des relations humaines, comme toutes les autres écoles, a elle-même

entraîné d’autres questions suite à l’apparition de phénomènes jusque là inattendus

ou complètement nouveau. L’internationalisation des organisations, la migration des

cadres vers des pays de culture et de traditions différentes, le développement des

franchises et des joint-ventures ou les fusions-acquisitions ont amené de nouvelles

difficultés et érigé de nouveau obstacles à l’amélioration de la performance et à

l’atteinte des objectifs stratégiques. Il ne suffit plus de motiver les troupes ou de

mettre en place des systèmes de rémunération attrayants pour améliorer la

productivité et l’adhésion des équipes de travail. D’autres dimensions sont donc

apparues comme étant des variables déterminantes dans le management des

organisations. L’une de ces variables est la différence culturelle. La compréhension

des comportements humains à travers les traditions et la culture prend une

dimension historique. Pour la première fois, les auteurs vont s’intéresser à

comprendre les effets de la culture et donc de l’héritage culturel sur la performance

des organisations. Cette dimension prend une importance soudaine lorsque les

multinationales (principalement américaines) se rendent compte que le modèle de

management américain est difficilement exportable même en Europe. Il en résultera

des recherches approfondies comme celles de Trompenars, D’Iribarne ou d’Hofstede

qui, par leurs travaux, démontreront l’impact de la culture sur la performance et le

management des organisations. Sans remettre en question les écoles précédentes,

dont les principes sont toujours d’actualité, comme nous l’avons vu, ces auteurs vont

définir un nouveau paradigme et remettre au goût du jour l’influence de la culture

dans les organisations. Cette même culture qui a été « chassée » des organisations

et des institutions deux siècles auparavant revient à grands pas aujourd’hui nous

rappeler que l’homme reste fondamentalement un être vivant doué de capacités

sensorielles, sentimentales et émotionnelles et que l‘individu ne peut être en aucun

cas réduit à une simple fonction de production ou un levier d’amélioration de la

performance.

Page 26: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

22

1.5 L’école de la contingence

L’efficacité d’une organisation ne dépend pas uniquement de ses ressources

humaines ou de sa division du travail. Henry Mintzberg, Chandler ou encore

Woodward ont montré qu’il existe d'autres formes organisationnelles que celles

définies par Taylor et Fayol. Ces autres formes peuvent se révéler comme des

"better ways" dans certaines circonstances. Les adeptes de ce courant ont au départ,

et comme pour les autres écoles, posé un certain nombre de questions relatives à la

performance des organisations. Comment expliquer que certaines entreprises

répondant aux principes du "one best way" s'avèrent incapables de survivre dans

certaines circonstances? Quels sont les facteurs tant internes qu'externes aux

organisations influençant la forme et le fonctionnement des organisations?

Chandler a pour sa part réalisée une étude sur 4 grands groupes nord-américains

(Du Pont, General Motors, Standard Oil et Sears&Roebuck) et qui montre que les

paramètres de la "prospérité maximale" et de la productivité du travail sont loin d'être

les seules à guider la structuration et le fonctionnement des organisations. Les

paramètres de l’histoire, de "survie", de domination et d'adaptation du marché

apparaissent tout aussi, sinon plus déterminants du comportement organisationnel

des entreprises. La démonstration empirique de Chandler montre l’existence de

nouvelles formes d’organisation d’entreprise, notamment dans des domaines de

pointe. La métaphore la plus utilisée pour décrire l’école de la contingence est

l’évolution d’un organisme vivant dans son milieu naturel. L’interaction entre

l’organisme et son environnement, son adaptation aux conditions de survie,

l’influence de son environnement sur son développement définissent les lois relatives

à la bonne adéquation entre l’organisation et son milieu. De l'organisation comme

système fermé (étude de la mécanique interne et de son arrangement efficient), elle

passe à un système ouvert (étude de l'adaptation de l'organisation à son

environnement)

Il devient donc indispensable de prendre en compte l’environnement pour

comprendre la structure et le fonctionnement d’une organisation. Inversement, une

organisation doit tenir compte de son environnement pour optimiser son rendement.

Il en découle donc de cette théorie de la contingence que l'existence

d'environnements différents conduit à la présence d'espèces d'organisation

Page 27: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

23

différentes. Il n'existe plus un "one best way" organisationnel mais des "one best

ways" eu égard au type d'environnement auquel est confrontée l'organisation. La

remise en question du déterminisme mécanique par l’école de la contingence comme

seul moyen d’atteindre les objectifs stratégiques des organisations est certainement

un apport substantiel à la compréhension de l’interaction qu’ont les organisations

avec leur environnement. Voici résumé dans le tableau ci-dessous, les principes

majeurs de cette école énoncés par des auteurs comme Minztberg et Morgan.

Tableau 3 : Principes de l’école de la contingence

Ecole de la contingence Principes

Organisation Influencé par son environnement

Il n'existe pas un « one best way » mais des « one best ways » fonction du process et du produit de l'entreprise

Approche Déterministe : L’environnement est une réalité objective qui contraint l’organisation

Trouver par la raison et la comparaison (entre entreprises performantes/non performantes) des lois universelles d’adaptation du comportement de l’organisation -> Etudes normative

Raisonnement Constructiviste : l’environnement n’existe pas en dehors de la manière dont les décideurs le perçoivent

Les apports positifs de la théorie de la contingence peuvent se résumer ainsi :

• Ouverture de l’organisation à son contexte environnemental

• Identification des facteurs d’environnement pesant ou

contraignant les organisations et des routines dans l’étude de

ces influences

• Relativisme au niveau de la structuration et du fonctionnement

des organisations : plusieurs marches possibles en selon les

environnements

Page 28: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

24

L’innovation apportée par la théorie de la contingence vu par ailleurs entraîne

d’autres réflexions concernant la dynamique organisationnelle. En effet, cette école

présente l’environnement comme un tout où il impossible d’isoler une variable parmi

d’autres (culture, religion, traditions, concurrence,…). Ce qui nous mène à dire que

l’environnement n’est pas une donnée qui échappe à l’action de l’homme et donc

que l’environnement est aussi construit par l’homme. Il en découle donc que la

responsabilité des hommes est largement négligée au profit d’un discours qui met

l’accent sur la contrainte de l’environnement.

Page 29: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

25

2. Management, culture et organisation

La littérature sur le management des différences culturelles s’est intéressée depuis

une trentaine d’années à cerner et à comprendre les rapports qui régissent les

relations entre gestion et culture (Hofstede, 2001 ; D’Iribarne, 1989, 1998, Dupuis et

Chanlat, 2008). A travers certains travaux de gestion, on constate que le facteur

culturel semble être le plus souvent comme un problème plutôt que comme un

avantage dans l’entreprise. Il peut être à l’origine de difficultés, de

dysfonctionnements dans les organisations, y compris de conflits, ou encore de non

compréhension et de faible performance (Chanlat 2002).

2.1 L’importance de la culture

Le concept de culture est un concept important pour comprendre le comportement

humain. Les anthropologistes utilisent le mot « culture » dans deux sens différents.

D’un coté, la culture est en général l’ensemble de l‘héritage social d’un groupe

d’individus (héritage national). Ceci peut comprendre le système politique, la religion

ou les croyances. D’un autre coté, la culture est perçue comme un ensemble de

traditions, coutumes, de liens sociaux ou de style de vie partagés entre individus.

L’essence même de ce concept est que la plupart des comportements humains sont

des acquis ou des construits issus de la relation avec les autres individus du groupe.

Le comportement social est considéré comme l’héritage des anciens et non comme

un héritage génétique ou inné (Malefijt, 1968).

La culture est un construit à facettes multiples qui est relié à la religion et à l’éthique

(Hofstede, 2001). Il a été également souligné que la culture est un élément qui

affecte les comportements des individus quand ils doivent, par exemple, établir des

liens sociaux ou gérer des situations de conflit (David, 1991). La culture est vue alors

comme un outil puissant qui aide a former la perception des individus à travers le

prisme des croyances, des traditions et des coutumes (D’Iribarne, 1998).

Les travaux menés pour mesurer les écarts culturels entre nations ont fait naître des

mots tels que « différence culturelle » ou « distance psychique » (Evans, 2000). La

différence culturelle est la distance socioculturelle perçue entre la culture locale et

celle d’un autre pays ou région en terme de langage, de pratiques d’affaires, de

système politique et légale et d’éthique entre autres dimensions (Lee, 1998). Lane

(1996) a suggéré dans ses travaux que plus la distance entre deux nations est

grande, plus les adaptations nécessaires pour conduire les affaires seront également

Page 30: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

26

importantes. Ainsi, une compréhension solide de la culture est un pré-requis

indispensable pour comprendre les différences et les similarités qui peuvent amener

à des incompréhensions et des malentendus entre individus de culture différente.

Geoffrey (2002) a donné l’exemple de la signification de certains mots comme

« must » que les personnes de langue française utilisent pour traduire le mot

« devrait » au lieu de « »have to » alors qu’un anglophone comprend plutôt qu’il

s’agit plus d’un ordre que d’une suggestion. Comprendre la culture c’est aussi

connaître ses différentes dimensions. Plusieurs définitions ont été formulées pour

décrire la notion de culture. Ce concept semble peu clair et incertain à cerner. En

effet, il existe d’après Kroeber et Luchon cité dans Usunier (2005) plus de 160

définitions différentes de la culture. La culture est plus un processus que des

habitudes. Elle est composée, selon Usunier (2005), d’un ensemble de dimensions.

L’auteur affirme que la culture est complexe et les éléments qui la constitue sont

inter-reliés tels que la connaissance, la croyance, les valeurs, les arts, la morale ou

encore la religion. Ci-dessous un schéma des dimensions de la culture telles que

définis par Usunier.

Figure 2: Les dimensions de la culture

Source: Marketing across culture Usunier (2005)

Page 31: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

27

D’une manière globale, la culture est un outil qui permet de décrire et comprendre le

comportement passé, présent et à venir des populations étudiées (Aktouf, 1990). Elle

constitue la marque distinctive d’un groupe (identité collective). Elle s’acquière et se

transmet par le biais de la socialisation à travers un réseau d’institutions telles que

les écoles, la famille, les associations, la religion (Adler, 1994). Mais la culture peut

également se transformer en subissant soit des contraintes et des confrontations (les

périodes de colonisation en sont une des illustrations soit par l’apport de nouvelles

idées issues de la globalisation et l’intensification des échanges de biens, de

services et de capitaux. Le contact avec des immigrants la plupart expatriés a

également favorisé le brassage culturel. La chute des frontières économiques et

physiques ont permis le brassage de cultures parfois très différentes. Au Maroc par

exemple, les anciennes familles ont conservé des traditions séculaires. Les enfants

vivaient avec leur parents jusqu’au jour de leur mariage et parfois au-delà si la

situation financière ne permettait pas l’indépendance. Vivre en famille était la norme

et une fierté. De nos jours, principalement dans les villes, les jeunes, en contact avec

les influences culturelles occidentales, l’entrée au pays de nouvelles formes

d’organisation issue la plupart du modèle colonial, considèrent que vivre avec les

parents après un certain âge est une preuve d’échec. Gagner un salaire, avoir son

propre toit, être indépendant financièrement sont les signes extérieurs de la réussite,

devenus en quelques décennies plus important que la solidarité familiale. La venue

au Maroc de restaurants comme McDonald’s, Quick, Paul ou encore Pizza Hut, a

profondément bouleversé les habitudes alimentaires des Marocains habitant les

villes. De même que l’ouverture depuis le début des années 2000 de magasins de

mode a permis à une large frange de la classe moyenne de s’habiller selon les

tendances occidentales.

La culture structure la perception du monde et des relations entre individus non sans

excès parfois. Les attentats du 11 septembre ont engendré un malaise durable chez

les musulmans pacifistes. Les stéréotypes comme cadres mentaux utilisés pour juger

les autres, interpréter leurs comportements et programmer nos réactions, sont

parfois la source de conflits et de mauvaise interprétation. Cependant, culture ne

signifie pas automatiquement homogénéité et unité. D’autres facteurs importants

entre en jeu comme les sectes, les castes ou les croyances politiques qui peuvent

différer dans un même milieu culturel (D’Iribarne, 1998).

Page 32: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

28

2.2 Approche des différences culturelles

Pour les organisations, la diversité culturelle présente des avantages et des

inconvénients. Parmi les risques encourus par une organisation dans un milieu

culturel différent, on trouve l’ambiguïté et la complexité des échanges verbaux qui

peuvent porter à confusion. Cela rend difficile la convergence des orientations

stratégiques (Duchastel, Kirouac, 2007). Il devient difficile de faire l’unanimité autour

d’un objectif commun (améliorer la productivité par une réduction des temps morts –

le temps étant vu différemment selon la culture). La recherche systématique du juste

milieu peut devenir abusive et conduire à des résultats non espérés (consensus au

détriment du résultat).

D’un autre coté, évoluer dans un contexte culturel différent permet aux entreprises

d’élargir leur orientations et d’être ouverte à la diversification des idées, des

interprétations et des résolutions de problèmes (Duchastel, Kirouac, 2007). Cela

engendre selon les auteurs une meilleure créativité qui peut conduire à l’amélioration

de la productivité et à faciliter les échanges extérieurs ou l’implantation dans des

pays étrangers.

L’analyse des différences culturelles s’est faite selon des approches distinctes et des

niveaux différents. Il existe principalement trois niveaux d’analyse (Aktouf, 1990).

L’approche dite « ethnocentrique » ou esprit de clocher qui consiste à se référer aux

normes du système social auquel on appartient pour comprendre ou expliquer un

système social différent. Cette approche est basée sur l’esprit de supériorité où

l’autre est vu comme différent de ce qu’on est donc forcément inférieur. Les Indiens

de l’Amérique du Nord en sont l’exemple parfait. La Guerre de Sécession aux Etats

Unis et les années de ségrégation en Afrique du Sud témoignent douloureusement

de la forte présence de cette approche ethnocentrique de concevoir les différences

culturelles.

La logique ethnocentrique se retrouve également au niveau des organisations. Dans

cette logique, les différences sont souvent ignorées et l’organisation reste rigide au

niveau de ses processus de gestion et de production, sans effort d’adaptation.

McDonald’s ou encore Disney constituent deux exemples de management

ethnocentrique (Les Echos, 2007). La standardisation de l’offre de ces deux

compagnies présentent dans plusieurs pays constitue certes un capital perception

important vis-à-vis du consommateur mais offre peu de produits adaptés aux

Page 33: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

29

coutumes locales. D’autres comme Subway refuse toute adaptation de leur produit

Cette stratégie a conduit Subway à fermer le seul magasin ouvert au Maroc après

seulement 4 années d’activité (La Tribune, 2007)..

La deuxième logique d’approche des différences culturelles est dite

« polycentrique ». Elle consiste à la juxtaposition des différentes cultures sans réel

échange (cloisonnement). Les dernières recherches effectuées sur cette approche

émanent de Gérard Ayache dans son livre « Métaphores du politique » (2008 -

http://www.infometrie.net/fr/polycentrisme.html). Le polycentrisme désigne d’après

l’auteur « les sociétés dans lesquelles différentes sphères fonctionnelles coexistent

de façon autonome comme la politique, le droit, l'économie, l'art, la religion. Toutes

ces sphères sont autant de domaines qui possèdent une logique autonome et qui

préservent jalousement leur intégrité ». Rapporté au niveau des organisations, le

polycentrisme serait une approche plurielle pour s’adapter et tirer parti des

différences sans pour autant mettre en commun les ressources, les systèmes et les

capitaux (Lécrivain, 2008). Au Maroc, Procter&Gamble a parfaitement adopté cette

posture. Présent depuis plus de 30 ans, P&G a su adopter ses produits aux

consommateurs locaux mais l’entreprise reste cloisonnée. Si les middle managers

sont en majorité marocains, les échanges avec d’autres sphères économiques ou

sociales sont rares. Une fois entré dans la boite, les managers marocains doivent

s’adapter à la culture de P&G, aux méthodes de travail et aux processus

décisionnels. Peu de place est laissée aux différences culturelles locales. La seule

adaptation permise a été l’aménagement d’une salle de prière pour les ouvriers. Les

manuels sont en anglais et les distributeurs n’ont que très peu de contact avec

l’entreprise. Les échanges sont donc réduits et la synergie qui pourrait en découler

est faible. La culture P&G modèle les attitudes, renforce les convictions communes

et oriente les comportements. Elle minimise l’apport culturel extérieur et renforce le

sentiment d’appartenance. Mon frère a travaillé pour Procter et on lui a souvent

répété la phrase : « C’est comme ça qu’on fait ici ! ».

La troisième approche des différences culturelles est l’approche multiculturaliste ou

interculturaliste. Celle-ci consiste, dans les organisations, à reconnaître les

divergences culturelles en tant que variable à gérer et d’intégrer ces variables dans

le système de management pour en tirer le maximum de profit (Lécrivain, 2008). Un

Page 34: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

30

des multiples effets de la mondialisation tient à l’accroissement des relations entre

personnes ayant des référents culturels différents, dans des organisations, des

entreprises et des administrations. Souvent, des conflits ou des rivalités entre

individus sont interprétés uniquement sous l’angle ethnocentrique alors qu’il s’agit en

faite d’interprétation différente du vécu et du réel. L’approche multiculturaliste vise

justement à penser l’intégration des différences culturelles au sein des organisations

comme une réponse aux sensibilités culturelles. Le multiculturalisme se concrétise

par la reconnaissance des différences et la cohabitation et l’interaction régulière

entre individus de culture distincte.

Après avoir présenté les notions de différences culturelles en générale et les

approches que peuvent adopter les organisations pour les rejeter ou mieux les

appréhender, nous allons à présent présenter les différents composants de la culture

d’entreprise. Cette dernière évolue dans un contexte culturel précis. Elle devient

donc un corps social à part entière (Thévenet, 1991) disposant d’un patrimoine

culturel propre façonné par ses valeurs et ses méthodes de management. Le

chapitre suivant va introduire également la culture en tant que variable d’action et

d’ajustement des stratégies de management. Nous verrons également les limites de

la culture d’entreprise qui peut parfois se transformer et devenir un frein au

changement et à l’adaptation (cas de Subway cité auparavant). Nous présenterons

certains résultats de recherches réalisés sur les différences culturelles et leurs

impacts sur les organisations par des auteurs fondamentaux comme Hofstede et

D’Iribarne.

Page 35: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

31

3. La culture intégrée aux organisations et au management

Comme nous l’avons mentionné dans la section précédente, la notion de culture va

évoluer et se définir en intégrant différentes approches. D’un point de vue

anthropologique «La culture est une configuration générale des comportements

appris et de leurs résultats dont les éléments sont adoptés et transmis par les

membres d'une société donnée » (Linton, cité dans Lécrivain, 2008, page 2). D’un

point de vue sociologique, la culture apparaît comme l’ensemble des représentations,

des valeurs et des normes qui sont propres aux groupes sociaux, « tout ce qui n'est

pas la nature, tout ce qui est appris, le savoir, le savoir-faire, les mythes, etc., tout ce

qui est transmis de génération en génération» (Edgar Morin, cité dans Lécrivain,

2008 page 2).

La culture appliquée aux organisations et au management est définie comme «

l’ensemble des valeurs partagées, rites, mythes, symboles et histoire de

l’organisation» (Thévenet cité dans Lécrivain, 2008 page 13). Thévenet divise la

culture organisationnelle en différentes dimensions que nous présentons ci-dessous :

La dimension symbolique : ce sont des signes (logo, style, tenue vestimentaire,…)

chargés d’informations culturelles qui sont liés aux valeurs essentielles. Ils servent

aussi d’éléments de communication tant en interne qu’en externe- ex :

La dimension des valeurs : ce sont les codes comportementaux (valeurs opérantes)

qui ont forgé l’histoire de l’entreprise et ses pratiques de management et les valeurs

déclarées (celles qui transparaissent dans le discours de l’entreprise)- ex : le style

Décathlon avec ses valeurs sportives de jeunesse, de santé – Les valeurs de Toyota

qui sont la qualité, la robustesse et la fiabilité – L’encastrement des croyances

religieuses ou sociales dans les valeurs de l’entreprise (rapport au temps, pouvoir et

hiérarchie,…)

La dimension des mythes : histoires, anecdotes, récits imaginaires ou symboliques

qui circulent dans l’entreprise (ex : le mythe de l’ascension sociale)

Le mythe des héros : il s’agit le plus souvent des fondateurs, de dirigeants

charismatiques qui font partie des mythes de l’entreprise et qui servent de référence

aux salariés

La dimension des rites : comportements spécifiques issus des coutumes et des

pratiques développées dans l’entreprise

Page 36: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

32

La dimension des tabous : ce sont les interdits dans une organisation (évènements,

situations qu’il ne faut pas aborder,…).

Bien entendu, cette étude ne prétend pas aborder tous les aspects de la culture

d’entreprise. Un aspect dominant fera l’objet d’analyses approfondis et directement

relié à notre cas : celui des rites et des traditions. Ces deux dimensions regroupent

en elles-mêmes des sous-groupes tels que les croyances, les codes, la religion, le

rapport au temps, le rapport à la hiérarchie, la gestion des zones d’incertitudes ou

encore la relation homme-femme.

Afin de mieux comprendre les enjeux de la culture d’entreprise, nous allons présenter

un aperçu des travaux déjà réalisés résumant ce que les principaux auteurs ont

conclu sur la relation qui peut exister entre culture et management.

3.1 Fonction et enjeux de la culture d’entreprise

La culture d’entreprise présente deux fonctions principales : Les fonctions internes et

les fonctions externes. Cette étude s’intéressera spécifiquement aux fonctions

internes qui regroupent des facteurs sociologiques en rapport avec les individus et

leur socialisation dans les organisations. On trouve parmi ces facteurs (Dupuis,

2007) :

• Le facteur de socialisation : Intégration du personnel

• Le facteur de motivation : Implication individuelle et amélioration de

l’efficience des ressources

A titre d’exemple, il m’est apparu intéressant de parler ici des approches

managériales de la culture entre la vision américaine et française pour aborder la

problématique culturelle.

Aux Etats-Unis, la culture est introduite comme une variable interne à l'entreprise

et a pris les caractéristiques inhérentes du management américain avec tout ce que

cela implique (Nowotny, 1964).

Page 37: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

33

Tableau 4 : Approche managériale de la culture

Approche managériale américaine

Approche managériale Européenne

le futur la mobilité, la vitalité

l'organisation.

L'histoire L'identité

Conventions

Comportement = effet Comportement = cause = Culture construite = Culture effective et réelle

Source : Nowotny, American vs. European Management Philosophy, 1964

Aux Etats-Unis, le comportement répond à l'impératif d'avenir, tandis qu'en France, il

résulte de ce qui a été. Le comportement aux USA se fabrique au quotidien, selon

une orientation implicite. Un dysfonctionnement organisationnel sera expliqué par un

problème de coopération entre des acteurs au regard de leurs intérêts , de leurs

valeurs. C’est une vision constructiviste (Weber,…..). En France, la culture est

abordée sous l’angle causal. On construit le quotidien en se basant sur l’héritage

culturel, l’appartenance à un groupe (aristocratie, classe populaire,....).

3.2 Le courant de gestion comparée

Issu du relativisme culturel et orienté vers une sociologie statistique de la culture

(Pesqueux, 2004, p.52), le courant de gestion comparée (Hofstede, 1980) vise à

décrire les pratiques de gestion et les comportements au travail propres à chaque

pays. Hofstede (1980) a conduit un sondage auprès de plus de 116.000 employés

d’IBM répartis sur 72 pays. De par son ampleur, cette étude constitue une référence

en terme de mesure standard de validation des différences culturelles. Elle est

largement utilisée dans les recherches empiriques. Cette recherche a identifié 4

dimensions majeurs de la culture : L’individualisme, la masculinité, la distance au

pouvoir et le contrôle de l’incertitude. Une cinquième dimension qui est la relation au

temps a complété le modèle.

Le concept d’individualisme/Collectivisme renvoie au degré d’individualisme ou de

collectivisme qui caractérise chaque culture. Dans les cultures collectivistes, le

Page 38: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

34

groupe est plus important que l’individu. Les sociétés collectivistes mettent l’accent

sur la conformité et l’harmonie pour promouvoir le bien être du groupe. Les liens

familiaux sont plus forts et les obligations envers les plus âgés sont considérées

comme fondamentaux pour préserver l’harmonie. Dans les sociétés asiatiques, par

exemple, l’individualisme est simplement inacceptable en raison des effets néfastes

qu’il pourrait avoir sur l’harmonie du groupe (Hofstede, 1980). Dans des pays comme

les Etats-Unis, les droits individuels sont prééminents. Les liens sociaux entre

groupes sont plus fragiles et les individus tendent à faire passer en premier leurs

intérêts, leurs désirs et leurs motivations. Les enfants sont encouragés dès leur jeune

âge de penser par eux-mêmes. Il en résulte que les individus, issus de culture

individualiste, ont tendance à ne pas appliquer les normes sociales mais plutôt à

prendre des décisions indépendamment des autres membres du groupe

(Steenkamp, 1999).

La masculinité est basée sur les attributs du genre masculin ou féminin (Hofstede,

1980). Au niveau culturel, la masculinité est associée à toute société qui considère

l’ambition, la compétition et le succès matériel. Dans les cultures masculines, la

perception de la réussite sont basés sur le succès financier et matériel alors que les

individus de sexe féminin sont relégués à des tâches dites « secondaires » ou non

matériels comme l’éducation des enfants, la responsabilité du ménage et les tâches

dites « faibles ».

Les sociétés a tendance féminine sont caractérisées par le chevauchement des

tâches et la possibilité qu’un homme ou une femme puissent occuper les mêmes

fonctions. Dans ces sociétés, les individus sont moins intéressés par le succès

matériels et la reconnaissance que celles dites masculines. Hofstede considère que

la culture féminine est plus intéressée par les relations humaines proches que par le

succès matériel.

La distance hiérarchique ou « power distance » est définie comme « le niveau

auquel les individus membres d’institutions ou d’organisations d’un pays sont prêt à

accepter la distribution inégalitaire du pouvoir » (Hofstede, 2001). La distance

hiérarchique peut donc être définie comme le degré d’inégalité attendu et accepté

par les individus. La distance hiérarchique est donc mesurée à partir des systèmes

de valeur de ceux qui ont le moins de pouvoir. La répartition du pouvoir est

Page 39: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

35

également expliquée à partir du comportement de ceux qui ont le plus de pouvoir,

des leaders plutôt que des suiveurs. L'autorité ne se maintient que si elle rencontre la

soumission; la fonction d'encadrement n'existe que comme complément à une

situation de subordination (Bernard, 1994).

L’indice de contrôle d’incertitude ou « Uncertainty Avoidance » d’un pays est

l’expression du niveau d’anxiété qui existe dans une société donnée face à un avenir

incertain (Hofstede, 1980). Ce niveau d’anxiété fait partie de la programmation

mentale des membres de cette société appris dans leur famille, à l’école, puis dans

leur vie d’adulte. Le degré de contrôle d’incertitude d’un pays mesure donc le degré

d’inquiétude de ses habitants face aux situations inconnues ou incertaines (Bernard,

1994). Ce sentiment s’exprime, entre autres, par le stress et le besoin de prévisibilité.

3.2.1 Les résultats des travaux d‘Hofstede

Les résultats les plus pertinents de cette étude concernent la position qu’occupent

les pays arabes selon les cinq dimensions par rapport à d’autres pays européens,

américains ou asiatiques. Les graphiques ci-dessous présentent la position des

certains pays comparativement à deux dimensions à chaque fois. La plupart des

managers interrogés ont soit fait leurs études soit en France ou aux Etats-Unis, soit

ont vécu et travaillé dans ces pays. Il serait donc intéressant de comparer les

résultats de ces trois pays par rapport aux dimensions culturelles définis par

Hofstede.

Dans le premier graphique, les dimensions « contrôle de l’incertitude » et « distance

hiérarchique » sont opposés. Figure 3 : Comparaison des dimensions IDH et ICI

Source : Management interculturel – Dupuis (2005)

Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude

Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique++Pays ArabesPays Arabes

FranceFrance

EspagneEspagneItalieItalie

Pays scandinavesPays scandinaves

USAUSA

GrandeGrande--BretagneBretagne

AllemagneAllemagne

JaponJapon

Contrôle de l’incertitude +

Page 40: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

36

On note dans ce premier graphique que les pays arabes acceptent volontiers une

grande distance hiérarchique et donc intègrent facilement l’existence de niveaux

sociaux différents. L'inégalité dans une société est visible à travers l'existence de

classes sociales : supérieure, moyenne, ouvrière, qui n'ont pas les mêmes facilités

d'accès à certains avantages de la société dont l'éducation (Bernard, 1994). Les

chercheurs constatent que, dans la plupart des sociétés, classe sociale, niveau

d'étude et profession sont étroitement liés (Hofstede, 1980). Ces trois facteurs, cités

comme sources de programmation mentale, sont interdépendants. Hofstede

démontre que dans les pays à fort IDH, cela s'applique à toutes les catégories

d'emplois, quelque soit leur statut.

Dans le cadre de pays à forte distance hiérarchique, les supérieurs et les

subordonnés se considèrent comme inégaux par nature dans un système fondé sur

une inégalité existentielle (Bernard, 1994). Les relations entre subordonnés et

supérieurs sont souvent chargées d'affectivité. Philippe d'Iribarne dans "La logique

de l'honneur" écrit à ce sujet : "Le caractère souvent fortement émotionnel des

relations hiérarchiques en France est étonnant. La diversité des sentiments envers

les supérieurs est extrême : on peut les adorer ou les détester avec la même

intensité". De ce point de vue, France et pays arabes sont proches. Par contre, les

Etats-Unis ont un faible indice de distance hiérarchique, ce qui peut expliquer

pourquoi aux Etats-Unis les hommes politiques et les représentant du peuple sont

plus accessible et beaucoup moins distant. Dans les pays arabes, les

gouvernements entretiennent des relations très distancées avec leur peuple même

dans les pays riches comme les Emirats, l’Arabie Saoudite ou encore le Qatar. Dans

des pays plus pauvres, la distance hiérarchique est forte comme chez les Algériens,

Tunisiens et Marocains. Ce qui tend à contredire une des conclusions des

recherches sur les différences culturelles qui veut que plus un pays est riche plus son

IDH est faible (Bernard, 1994). Les cultures à fort IDH assoient l'autorité d'un patron

tandis que patrons et subordonnés se considèrent comme égaux par nature dans un

contexte à faible IDH où les rôles peuvent être modifiés : un subordonné peut

devenir demain un patron.

Notons par ailleurs que d’un point de vue religieux, l‘Islam reconnaît les classes

sociales et les différences selon la richesse, la connaissance et l’autorité. L’Islam

prône une hiérarchisation de la société et ses les membres sont invités à obéir à

Page 41: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

37

leurs supérieurs. Les enfants doivent obéissance quasi-absolue à leurs parents et à

leur professeur. Le châtiment corporel est conseillé, ce qui est une marque de

soumission. Cependant, l’Islam rejette tout intermédiaire pour s’adresser à Dieu et

tout croyant doit se soumettre uniquement à Dieu. Ce qui semble être un paradoxe

est en fait une complémentarité. Le musulman doit certes se soumettre à Dieu (Islam

en arabe veut dire soumission) par la prière, la reconnaissance et la pratique de sa

religion (soumission verticale) mais doit aussi s’astreindre à des règles qui régissent

la vie quotidienne comme la modestie, le respect des autres et de ses parents en

particulier (soumission horizontale). Il doit accepter sa situation comme étant une

décision divine pour autant qu’il ait fait les efforts nécessaires pour progresser

socialement et financièrement.

Dans le deuxième graphique ci-dessous, nous remarquons que la différence dans

l’indice de masculinité est moins marquée que pour celui de la distance hiérarchique

pour les pays étudiés (France, Etats-Unis et pays arabes). Figure 4 : Comparaison des dimensions Masculinité et ICI

Source : Management interculturel – Dupuis (2005)

Dans les cultures féminines, comme aux Pays Bas, on préfère venir à bout des

conflits par le compromis et la négociation; chaque pays a pour cela des outils

institutionnels différents (Chanlat, 2005). Dans une culture masculine, la famille

apprend aux enfants l’assurance, l’ambition, la compétition et les organisations

mettent l’accent sur les résultats. Dans une société féminine, la famille enseigne aux

enfants la modestie et la solidarité; les organisations préfèrent récompenser sur une

base égalitaire (Bernard, 1994).

Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude

Contrôle de lContrôle de l’’incertitudeincertitude++

MasculinitMasculinitéé MasculinitMasculinitéé++

Pays ArabesPays Arabes

FranceFrance

EspagneEspagne

ItalieItalie

Pays scandinavesPays scandinaves

USAUSA

GrandeGrande--BretagneBretagne

AllemagneAllemagne

JaponJapon

Page 42: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

38

Les pays arabes ont une valeur médiane de l’indice de masculinité. Ce qui pourrait

s’expliquer par le fait que pour ces pays, l’Islam prône la loi du talion (dent pour dent)

mais suggère fortement dans la mesure du possible et si le croyant en est capable,

de pardonner en cas de conflit, d’agression ou de faute grave. Les procès pour

diffamation, pour non respect des règles de commerce ou pour récupérer son droit

sont rares. Dans ces pays, on fait souvent appel à un intermédiaire où une

connaissance qui pourrait gérer et régler les conflits.

La différence dans l’indice de contrôle de l’incertitude est beaucoup plus marquée

que pour celui de la masculinité. Si aux Etats-Unis, les règles de travail sont moins

rigides qu’en France, c’est que les travailleurs américains sont moins à l’aise avec le

contrôle (Bernard, 1994). Les scandales financiers récents (Worldcom ,Enron) et la

crise des subprimes sont certainement l’expression la plus radicale de cette

propension qu’on les cadres américains à traiter les affaires dans le strict esprit de

liberté. Dans les pays à fort contrôle de l’incertitude, comme les pays latins, c’est

l’absence de règles qui est déstabilisante. En France, les règles de travail font l’objet

de textes de lois nettement plus rigides et plus contraignantes qu’aux Etats-Unis. De

nombreuses lois, formelles et informelles, contrôlent les droits et devoirs des

employeurs et des salariés (Bernard, 1994). De nombreux règlements internes

contrôlent le processus de travail. Les membres de ces sociétés ont été

programmés, depuis leur petite enfance, à se sentir à l’aise dans des

environnements structurés : ce qui se passe réellement est moins important que la

satisfaction de ce besoin. Philippe d’Iribarne remarque, que dans l’usine française il

existe "une règle rigide, une pratique molle". Par contre selon D’Iribarne, les pays à

faible ICI (indice de contrôle de l’incertitude) ont une aversion émotionnelle pour les

règles formelles. Les règlements ne sont établis qu’en cas d’absolue nécessité,

comme par exemple déterminer si on circule à droite ou à gauche de la chaussée. Le

comportement est fondé sur une habitude collective renforcée par le contrôle social.

Dans le monde du travail, le degré d’anxiété conduit à des différences notoires de

comportement. Dans les pays à fort ICI, les gens aiment travailler dur : on se presse

car le temps c’est de l’argent. Dans les pays à faible ICI, les gens sont capables de

travailler dur s’il le faut, mais ils aiment se détendre et le temps est le cadre qui

permet de s’orienter (Bernard, 1994).

Page 43: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

39

Dans les pays arabes, la notion de perte ou de gain de temps est toute relative. Pour

ces pays, on ne perd pas de temps mais on le partage. Un proverbe arabe dit que

« celui que veut aller vite prend du retard ». Autrement dit, les gens ne sont pas

pressés. Certes on travaille pour gagner sa vie mais surtout pour plaire à Dieu et à

ses proches. L’anxiété est plutôt faible dans les pays arabes car les musulmans

croient à la destinée. « Si mon avenir est déjà écrit, a quoi bon s’en inquiéter » disent

les Arabes. Ce qui explique la position médiane des pays arabes sur la courbe du

ICI.

Jacques Horovitz cité par Marie-Claude Bernard (1994) dans les fiches de lecture de

la Chaire D.S.O. du CNAM a réalisé une étude sur le contrôle exercé par la direction

générale dans les entreprises françaises, allemandes et britanniques. Les patrons

anglais se préoccupent plus de la stratégie que du fonctionnement quotidien, mais

c’est l’inverse en France et en Allemagne (Horovitz, 1980). Les problèmes

stratégiques, non structurés par définition, demandent une plus grande tolérance de

l’ambiguïté que les problèmes opérationnels. Dans la mesure où ils tolèrent plus

facilement les comportements déviants, les pays à faible ICI (indice de contrôle de

l’incertitude) sont un terrain plus propice aux innovations. Mais, ils semblent perdre

leur avantage lorsqu’il s’agit de développer ces innovations jusqu’à leur complète

réalisation (Bernard, 1994). La Grande-Bretagne a remporté plus de prix Nobel que

le Japon, mais ce dernier a mis plus de nouveaux produits sur le marché (Horovitz,

1980).

L’indice Individualise/Collectivisme est certainement celui où les différences sont le

plus marquées entre pays arabes et l’Occident. Le graphique ci-dessous, issu des

recherches d’Hofstede (1980) illustre bien l’écart entre les pays arabes où l'intérêt du

groupe prime l'intérêt individuel. La solidarité familiale bien connue des pays arabes

en est l’aspect le plus marquant, sachant que le premier groupe auquel nous

appartenons est la famille, ou famille élargie en anthropologie culturelle. Les enfants

restent dépendant de leurs parents jusqu'à un âge avancé et vivre en famille sous le

même toit est une marque de solidarité. Les filles en particulier ne quittent pas la

maison du père avant leur mariage et peuvent dans certains cas rester au-delà. Les

recherches d’Hofstede ont également montré que plus un pays est riche, plus ses

habitants ont tendance à se comporter de façon individualiste. Les cas particulier des

pays du Golf, riche en pétrole, montre bien l’incidence des racines culturelles arabes

Page 44: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

40

(Bernard, 1994). Cependant, des nuances doivent être apportés à ses conclusions.

Dans les pays colonisés comme le Maghreb, le brassage des cultures occidentales

et orientales, l’ouverture des frontières et l’augmentation exponentielle des échanges

commerciaux, ainsi que les flux migratoires ont fait, dans certaines couches de

population aisée des pays arabes pauvres, basculé la balance vers un individualisme

plus marquée. Figure 5 : Comparaison des dimensions Individualisme et IDH

Source : Management interculturel – Dupuis (2005)

Dans une culture collectiviste comme celles des pays arabes, embaucher une

personne de la famille ou qui appartient à un groupe ethnique plus ouvert est

courant, indépendamment des compétences (Bernard, 1994). Le lien familial

subordonne les aptitudes intellectuelles. L’embauche est considérée comme une

relation « familiale ». Souvent, les mauvaises performances d'un salarié ne sont pas

une raison suffisante pour licencier. Il devient alors très difficile dans ces conditions

pour un manager formé aux concepts occidentaux de gestion d’équipes (fixer des

objectifs quantifiables, contrôler l’exécution, évaluer les performances, décider des

sanctions ou des primes) d’établir sa crédibilité et son autorité. Les managers des

pays arabes forment alors un sous-groupe minoritaire emprunt d’une culture

managériale individualiste dans un milieu collectiviste. Dans les pays du Maghreb,

les élites du pays et les managers sont en grande majorité formés dans les pays

européens, aux Etats-Unis et au Canada. Les conflits culturels, les échecs de projet

ainsi que le stress et la souffrance au travail sont alors à craindre. Les techniques de

IndividualismeIndividualisme

IndividualismeIndividualisme++

Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique Distance hiDistance hiéérarchiquerarchique++

JaponJapon

FranceFrance

EspagneEspagne

ItalieItalie

Pays scandinavesPays scandinaves

USAUSAGrandeGrande--BretagneBretagne

Pays ArabesPays Arabes

AllemagneAllemagne

Page 45: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

41

management et les programmes de formation professionnelle sont presque

exclusivement élaborés dans des pays individualistes et les hypothèses risquent de

ne pas s'appliquer à des sociétés collectivistes (Bernard, 1994). Dans la culture

individualiste, on n'embauche que rarement dans la famille, cela peut engendrer du

népotisme. L'embauche est considérée comme une relation commerciale sur le

"marché du travail". Le management est individualisé, incitation et prime sont liées

aux performances. Ci-dessous un tableau résumant les relations qui existent dans

les différents types de société :

Tableau 5 : Caractéristiques des sociétés communautaires et individualistes

Société communautaire Société individualiste

relations sur base morale relations sur base économique

4 Employé est « protégé »

4 Employé loyal

4 Employeur doit former

l’employé

4 Relations personnalisées

4 Employés remplaçables,

interchangeables

4 Employé est moins

« loyal »

4 Employé doit être déjà

formé

4 Relations managériales

froides

Source : Management interculturel – Dupuis (2005)

Il est noté également que même entre pays arabes, les différences culturelles dans

la gestion des affaires entre des pays comme les Emirats, le Koweit d’un coté et le

Maroc de l’autre, engendrent des malentendus parfois désastreux. L’un des projets

les plus grands d’Afrique, actuellement en cours d’exécution au Maroc (le Projet

d’aménagement de la vallée de Bouregreg, (10 milliards de dirhams soit 1.4 Md$ US)

connaît des retards important en raison de désaccords sur la conduite du projet,

désaccords issus de la volonté des Emiratis de s’approprier rapidement les terrains

nécessaires et de construire des tours de plus de 50 étages. Or, au Maroc, construire

des édifices plus hauts que ceux du Palais Royal est strictement prohibé sauf pour

des cas exceptionnels. Par ailleurs, les Emiratis ont l’habitude de disposer de terres

sans difficultés dans leur pays d’origine où le désert ne demande qu’à être aménagé.

Au Maroc, le processus est long, très long et répond à des procédures strictes.

Page 46: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

42

Même le Roi ne peut s’approprier un terrain simplement à l’aide d’un simple coup de

fil. L’autre exemple frappant est celui des autres pays de l’Afrique du Nord. La

création de zones de libre échange (UE, NAFTA, ASEAN) ou d’organisations

internationales (ONU, Banque mondiale, FMI, etc…) ont atténué les différences

culturelles (Tobelem, 2007). Force est de constater encore une fois que même si

plusieurs pays partage la même langue, la même religion et parfois les mêmes

traditions (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye), la raison politique l’emporte sur la

similarité culturelle. Le projet du Grand Maghreb appelé aussi UMA (Union du

Maghreb Arabe) réunissant les pays musulmans de l’Afrique du Nord en est à sa

vingtième année d’existence sans qu’aucune avancée économique ou politique n’ait

vue le jour. Les Marocains et Algériens ont besoin de visa pour visiter leur pays

voisin. Les échanges entre les pays de l’UMA représentent moins de 0,5% de leur

PIB et les échanges culturels sont totalement absents (Kettani, 2008). 3.2.2 Cas du Maroc

A l’aide des travaux d’Hofstede, nous allons présenter la carte culturelle du Maroc

vue à travers les indicateurs définis dans le chapitre précèdent. Hofstede a classifié

les pays arabes comme collectivites (Tableau 6) possédant un système hiérarchique

qui maintient une inégalité des pouvoirs. La distribution du pouvoir telle qu’elle est

appliquée par ces pays est admise et comprise par ses citoyens. Les Marocains

tendent à maintenir un niveau moyen du contrôle de l’incertitude (UAI=68)

comparativement aux Etats-Unis (UAI=46). Les marocains cherchent la stabilité dans

leur travail et se sentent plus à l’aise avec des procédures plus ou moins formalisées.

Ils considèrent les compagnies pour lesquelles ils travaillent comme une continuation

du lien familial et regarde le « patron » comme un « père de famille » attentionné et

attentif. Le Maroc est défini comme une société « féminine » où l’important n’est pas

l’acquisition de biens matériels mais de maintenir des relations interpersonnelles

étroites et durables au sein de la famille et dans les lieux de travail. Cependant, le

profil du marocain type a changé durant les 10 dernières années. Sachant que plus

de 50% de la population à moins de 25 ans (Ministère Marocain de l’économie,

2007), que l’ouverture au monde s’est faite de façon assez brutale au cours des

années 90, que le Maroc accueille chaque année plus de franchises (120 au total,

Page 47: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

43

Fédération Française de la Franchise, 2007), la culture de la classe moyenne

marocaine s’est transformé en sous-groupe culturel en déphasage avec le reste du

pays. Le nombre de Marocains morts par noyade dans le détroit de Gibraltar en 2007

(10 morts par jour en moyenne et uniquement des jeunes de moins de 25 ans)

montre à quel point le clivage entre modernité et tradition s’élargit. Les jeunes ne se

reconnaissent plus dans cette société écartelée entre un système hyper-

bureaucratique hérité du Makhzen (système ancestral de gestion des magasins du

Palais Royal) et une modernité qui s’affiche dans les télévisions et dans les grands

boulevards. McDonald’s a ouvert son 20ieme magasin au Maroc. Pizza Hut,

Domino’s Pizza, Paul, le Nôtre ou encore Tex Mex ont ouverts des franchises dans

les principales villes du Royaume. Pour un pays où 50% de la population vit à la

campagne (Ministère de l’Habitat, 2006) et où l’alimentation de base reste le tagine

et le couscous, il est indéniable que l’influence des courants culturels occidentaux à

fortement modifier la carte culturelle du pays.

Table 6: Cultural dimensions variability according to Hofstede

Country PDI IDV MAS UAI

Arab World 80 38 52 68

China 80 20 66 40

Iran 58 41 43 59

Pakistan 55 14 50 70

Japan 54 46 95 92

United States 40 91 62 46

Source : http://www.geert-hofstede.com/hofstede_dimensions.php

Au Maroc, l’inégalité des individus est perçue comme naturelle. Le pouvoir est un

pouvoir moral issue soit de l’appartenance à une famille (le nom de famille reste une

marque d’appartenance très forte), soit d’une région. Les natifs de la ville de Fès ou

de Rabat occupent les postes les plus importants dans les sphères politiques et

économiques. Le premier ministre actuel du Maroc s’appelle Abbas El Fassi

(d’origine de Fès). Voici la composition des principaux portefeuilles du gouvernement

marocain actuel (Source : Wikipédia): Voici un positionnement plus précis du Maroc

par rapport à l’indice de distance hiérarchique.

Page 48: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

44

- M. Abbas El Fassi : Premier ministre originaire de la ville de Fès

- M. Mohamed El Yazghi : ministre d’Etat, originaire de la ville de Fès

- M. Chakib Benmoussa : ministre de l’Intérieur, originaire de la ville de Fès

- M. Abdelwahed Radi, ministre de la Justice, originaire de la ville de Rabat

- M. Taieb Fassi Fihri : ministre des Affaires étrangères, originaire de Casablanca

- M. Ahmed Toufiq : ministre des affaires islamiques, a fait ses études à Rabat

- M. Mohamed Saad Alami : ministre chargé des relations avec le Parlement, issue

d’une famille marocaine de Fès Figure 6 : Positionnement relatif des pays selon l’indice IDH

Source : Cours Management interculturel – Dupuis (2005)

L'entreprise marocaine ne peut se gérer sans comprendre la hiérarchie au sens

marocain du terme. Autant dans les petites structures que dans les sociétés

d’affaires, respecter l’âge et le rang est un aspect important de la « performance » et

de « l’efficacité » individuelle. Ce signe de soumission et de bonne conduite

contribue à garder l’harmonie au sein du groupe. Paradoxalement, le droit de

participation et de consultation dans la société islamique n’est pas lié directement au

droit de propriété ou à la position hiérarchique, mais plutôt au droit inaliénable

d’appartenance à un groupe social organique. On comprendra donc, qu’en Islam,

l’autorité, par exemple, n’est pas légitimée ou justifiée par l’idée de propriété ou

4L’INÉGALITÉ entre les individus est-elle perçue comme naturelle ?

Forte distance hiérarchiqueFaible distance hiérarchique

NON OUI

Scandinavie

États-Unis

FranceEspagne

SénégalMaroc Pérou

ThaïlandeRussie

Allemagne Mexique

Japon

ChineCanadaQuébec

1. Autorité statutaire2. Autorité morale

Maroc

Page 49: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

45

encore par la position hiérarchique, mais plutôt par un consensus continuel, que l’on

appelle la « Choura ».

De par la tradition orale qui caractérise la société islamique et la prédominance des

communications et des rapports directs, il émerge alors d’un système de

communication et de décision très informel court-circuitant les canaux officiels de

décision et définissant de nouveaux rapports de force entre les individus dans une

même organisation. C’est une relation non transitive (Crozier, 1977). Là encore, les

modèle classiques de pouvoir et de légitimité, enseignés dans les cours de

management que nous présentons rapidement ci-après s’avèrent inadaptés aux

contraintes locales. Le pouvoir est souvent dilué ou se bute à une barrière culturelle

forte et rend l’application des décisions managériales difficile à mettre en place.

Selon Crozier et Friedberg (1977), le pouvoir est la capacité d’influencer le

comportement d’autrui. Il est un phénomène social et caractérise des interactions

entre personnes ou entre groupes de personnes et entre organisations (Crozier,

Friedberg, 1977). C’est un rapport dynamique qui se modifie lorsque les situations et

les individus changent. Les sources du pouvoir selon Crozier et Friedberg (1977)

sont :

• Le pouvoir découlant de la maîtrise d’une compétence particulière

• Pouvoir de « l’expert » -

• Le pouvoir qui découle de l’existence de règles organisationnelles

• Pouvoir « hiérarchique »

• Le pouvoir qui découle de la maîtrise de la communication et des informations

• Pouvoir de « l’aiguilleur »

• Le pouvoir qui découle des relations entre l’organisation et son environnement

• Pouvoir du « marginal-sécant »

Selon Crozier, le pouvoir maximum va à ceux qui contrôlent les incertitudes les plus

cruciales pour l’organisation. L’expert est celui qui détient le savoir et donc de façon

induite possède les capacités à contrôler une certaine zone d’incertitude reliée à ses

compétences. Le pouvoir accordé par une organisation à un manager selon sa

position hiérarchique lui confère une légitimité pour gérer ses équipes et asseoir son

autorité. Il en va tout autrement dans les organisations marocaines. La légitimité du

Page 50: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

46

pouvoir prend ses racines soit dans un paternalisme issu de la structure même de

l’entreprise dont le capital est entièrement détenu par les membres de la famille

propriétaire où le chef de famille joue aussi le rôle de père et à qui les employés

doivent obéissance, soumission et dévouement, soit dans l’affiliation ou

l’appartenance du dirigeant. Tel patron ou manager sera respecté parce qu’il

appartient à une famille proche du palais royal ou d’une famille dite « grande

famille » marocaine comme c’est le cas pour les nominations gouvernementales (voir

page 42).

Pour Max Weber, l'organisation de la société correspond au modèle des machines

mécaniques de son siècle. Selon lui, dans un monde marqué par l'industrialisation,

dans lequel l'autorité repose essentiellement sur la compétence et la recherche de

l'efficacité, la division pyramidale du travail est le moyen idéal pour résoudre la

complexité sociale. Les grandes fonctions d'une société sont donc décomposées en

tâches partielles qui trouvent chacune leur place dans un échafaudage

hiérarchiquement structuré dont l'organisation bureaucratique est l’expression finale.

La bureaucratie représente pour Weber le modèle type de l'autorité à caractère

rationnel et légal. Cette forme d'organisation repose sur des règles abstraites,

formelles car écrites et impersonnelles. Les détenteurs de l'autorité sont choisis en

fonction de compétences rationnellement évaluées. Ils agissent dans le cadre d'une

hiérarchie fonctionnelle dans laquelle les contrôles et les voies de recours sont

précisément définis.

Ce modèle d'organisation fonctionne dans un certain type d'organisation sociale mais

s'applique mal à des systèmes dont les éléments sont à la fois entrelacés et disjoints.

Il s'applique encore moins quand l'efficacité de l'action menée sur certains problèmes

globaux exige la coopération harmonieuse de systèmes fonctionnels différents. Ce

qui est le cas pour les pays arabes. Paradoxalement, le poids de la bureaucratie (pas

au sens weberien du terme) au Maroc est telle qu’on pourrait penser que, selon la

théorie de Weber, le système public fonctionnerait de façon presque parfaite.

Seulement, cette bureaucratie s’applique en fait, comme nous l’avons vu

précédemment, sur des individus évoluant culturellement dans un espace peu

organisé et où ses membres ne sont pas choisis selon leur compétence, mais selon

leur appartenance. Au lieu d’avoir une structure formelle certes rigide mais

fonctionnelle comme le prévoit le modèle de Weber, le Maroc se retrouve avec une

Page 51: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

47

structure extrêmement rigide, informelle et inefficiente. Les détenteurs de la

légitimité et du pouvoir ne sont pas ceux qui détiennent le savoir ou les

compétences.

L’indice Individualisme/Collectivisme est celui où l’écart avec les cultures

américaines et françaises est le plus marqué. Le Maroc est profondément

communautariste. Les individus se conçoivent par rapport au groupe. Les relations

personnelles l’emportent sur les relations d’affaires. On fait des affaires si on a de

bonnes relations interpersonnelles et particulièrement s’il s’agit de personnes

proches. Les structures familiales d’entreprises représentent plus de 80% du tissu

industriel marocain (Ministère des affaires économiques, 2007). Dans ces petites

structures familiales, les syndicats ne sont que minoritairement représentés du fait

que les employés préfèrent régler les conflits directement avec les propriétaires,

signe d’une confiance et d’un devoir de loyauté. Parallèlement, les propriétaires se

sentent « liés » par une obligation de traiter leurs employés comme leurs « enfants ».

Le mot le plus souvent utilisé par lequel un patron appelle son employé est « Ouldi »

dont la traduction est « mon fils ». A plusieurs reprises, le roi Hassan II du Maroc

s’est adressé à ses sujets en utilisant le mot « Oulidati » qui veut dire « mes chères

enfants ». Dans le langage courant, lorsqu’un employé veut s’exprimer sur un sujet le

concernant directement, il utilise le plus souvent la troisième personne du pluriel,

faisant inconsciemment référence au groupe auquel il appartient. Figure 7 : Positionnement des pays selon l’indice Individualisme/Collectivisme

Source : Cours Management interculturel – Dupuis (2005)

4L’individu a-t-il DES OBLIGATIONS envers son groupe d’appartenance?

CommunautarismeIndividualisme

OUINON

ScandinavieÉtats-Unis

France

Espagne

Sénégal

MarocPérouThaïlandeRussie

Allemagne Mexique

Japon

Chine

CanadaQuébec

X1. Organisation

2. Famille3. Amis

4. Nation

Maroc

Page 52: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

48

Adam Smith était persuadé que la recherche par chacun de son intérêt personnel

conduirait à la richesse des nations. Mais, du fait des hypothèses individualistes sur

lesquelles elles sont fondées, les théories économiques occidentales ne s'appliquent

probablement pas dans les sociétés où l'intérêt collectif l'emporte sur l'intérêt

individuel (Bernard, 1994). La réalisation de soi-même figure en haut de la pyramide

de Maslow, ce qui reste la motivation suprême d'une société individualiste. C'est un

concept de personnalité familier à la pensée occidentale mais pas universelle. Dans

une société collectiviste comme le Maroc, on réalisera ce qui est dans l'intérêt du

clan ou du groupe, ce qui demandera un effacement de la part de nombreux

membres du clan

Du point de vue de l’indice de contrôle de l’incertitude, la différence entre le Maroc et

la France est faible mais plutôt forte avec les Etats-Unis. Le droit des affaires

marocain est très largement inspiré du droit français, dont il a retenu de nombreuses

solutions en matière de droit contractuel et de droit des sociétés. Les grands

principes de la formation et de l’exécution des contrats sont identiques mais les

investisseurs étrangers sont parfois confrontés à des difficultés d’application des

dispositions contractuelles (Chambre de commerce internationale - http://www.actu-

cci.com) liées principalement aux non-dits où l’interprétation que chaque partie peut

faire des clauses du contrat. La loi sur la constitution des sociétés, le code du travail

ou celui relatif aux assurances sont d’inspiration française. Des grands cabinets de

droit français tels que Lefèvre ou Gide sont installés au Maroc et ces derniers sont de

formation purement française et utilisent cette langue pour établir leurs consultations

juridiques et fiscale malgré que la justice marocaine légifère en arabe et que tous les

jugements sont établis dans cette langue. (http://www.marocentrepreneurs.com).

Les règles de travail sont donc nombreuses et précises. Paradoxalement, les

comportements déviants sont plutôt mal tolérés mais en réalité, l’investisseur

marocain adoptera une posture qui servira ses intérêts individuels en premier en

« oubliant » parfois d’appliquer certaines clauses du contrat. L’engagement écrit

n’est pas considéré comme définitif, il peut être sujet à révision. La gestion des sous-

traitants marocains du textile est certainement un des exemples les plus frappant.

Mon expérience dans la filiale marocaine m’a montré que la signature d’un contrat

avec le sous-traitant qui fixe les délais de livraison, les quantités, les conditions de

Page 53: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

49

règlements ainsi que la marge statistique des produits défaillants n’était en fait que le

début de dures négociations pour honorer les engagements pris. De son coté, le

sous-traitant trouvait « normal » que le paiement soit retardé de quelques jours. Figure 8 : Positionnement relatif des pays selon l’indice ICI

Source : cours Management interculturel – Dupuis (2005)

Un des exemples les plus frappants, pour moi, est “l’intention”. En Islam, ce qui

compte le plus, c’est l’intention. Selon le Hadith, Le prophète Mohamed (que la paix

soit sur lui) a dit : « Les intentions sont l’essence des actions ». Une mauvaise

intention ruinera travail et bonne action, une bonne intention sauvera son

propriétaire. En pratique, cela veut dire que si quelqu’un fait une faute, avec

l’intention de bien faire, il est moins coupable que s’il n’a simplement pas fait

attention. La principale difficulté ici est de rester objectif quand vient le temps

d’évaluer les performances des collaborateurs impliqués dans un projet. Le feed-

back est subjectif et dépend des premières intentions. L’employé marocain peut se

sentir lésé s’il considère que son intention de départ était bonne mais si les résultats

ne pas atteints. D’Iribarne (2001) souligne à ce sujet que « en Afrique, la critique et la

sanction sont « naturellement » interprétées comme un signe de « méchanceté » et

non comme une expression de l’objectivité des choses ». Dans ce cas, la réponse

habituelle à laquelle j’ai souvent du faire face est : « Dieu en a voulu ainsi, mes

intentions étaient bonnes, je suis sauf ». Le subjectif est donc fortement valorisé. La

4La société tolère-t-elle l’INCERTITUDE et les COMPORTEMENTS DÉVIANTS ?

OUI NON

Scandinavie

États-Unis

France

Espagne SénégalMaroc

PérouThaïlande

Russie

AllemagneMexique

Japon

ChineCanada Québec

Principes généraux

Diversité, faible contrôle

Règles précises et nombreuses

Homogénéitéfort contrôle

Maroc

Page 54: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

50

promesse orale reste une déclaration de bonne intention. La communication est

souvent ambiguë comme le montre le schéma ci-dessous. Au Maroc, on ne dit pas

« non ». Les Marocain utilisent très souvent le mot “Inch’Allah” qui peut signifier deux

choses bien distinctes et parfois opposées. Il peut s’agir d’un « oui » conditionnel.

Auquel cas, l’interlocuteur marocain attend des précisions ou tente de gagner du

temps pour renégocier plus tard. Il peut s’agir d’un « non » signe de refus de l’offre

ou du désir de clôturer les négociations. Dans le milieu professionnel ou j’ai évolué,

« Inch’Allah » pouvait signifié que mon collaborateur ne souhaitait pas réaliser une

tâche particulière ou qu’il pouvait éventuellement la faire mais dans un délai non fixé. Figure 9 : Positionnement relatif des pays selon la nature de la communication

Source : Cours Management interculturel – Dupuis (2005)

On ne dit pas non donc de la même façon qu’en France ou aux Etats-Unis. On ne

critique pas non plus. Le patron marocain peut se convulser dans tous les sens pour

faire parvenir un message critique afin de préserver la sensibilité et l’harmonie du

groupe. Critiquer ouvertement m’a souvent apporter des réactions inattendues

comme l’utilisation du mot « Inch’Allah » tous les trois mots comme signe de

mécontentement. Par contre, on trouvera toujours un compliment à faire, même sur

la plus insignifiante des choses. Le Marocain est très sensible aux compliments. Cela

lui donne confiance et préserve l’esprit de solidarité.

NON OUI

Scandinavie

États-Unis

France

Sénégal

MarocPérou

Thaïlande

RussieAllemagne

Mexique JaponChine

Canada Québec

Factuelle, froide Contextuelle, chaude

Espagne

4La communication est-elle RICHE et AMBIGUË ?

ABC

0010101

Maroc

Page 55: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

51

3.2.3 La relation au temps

Le management du temps (time management) est l’un des principaux champs

de la gestion où les dysfonctionnements et les interprétations sont le plus divergents

entre culture occidentale et africaine.

Pour un manager formé aux règles du management occidental, le temps est

gagné ou perdu alors que pour des managers africains, le temps de vit et se partage.

Alors que le temps est essentiellement investi dans les économies de production et à

l’amélioration de la productivité, il est consacré au développement des relatons

sociales, sans lesquelles, les entreprises et les managers africains ne peuvent

construire des relations durables et efficientes. En d’autre termes, le temps

appartient à chaque individu et il n’est jamais perdu pour un africain, surtout s’il est

investi dans la construction de relation d’amitié.

Les chercheurs Dass et Parker (1999) constatent d’ailleurs qu’il n’existe pas de

modèle unique de gestion ou de solution exceptionnelle pour le management de la

diversité.

La notion du temps est, pour les Marocains, sensiblement différente de celle

des européens : en effet, comme nous l’avons dit, les Marocains sont liés à la

religion islamique et par là même, se soucient plus du présent que de l’avenir.

L’avenir relève du domaine sacré et donc de l’intervention de Dieu, ce qui conduit à

une certaine apathie en ce qui concerne la prise de décisions. Il en découle des

problèmes de planification évidents. Le temps est élastique et n’est absolument pas

relié à l’argent comme il pourrait l’être dans les sociétés occidentales comme le

montre le graphique ci-dessous. Un rendez-vous d’affaires est d’abord un rendez-

vous d’amis et les négociations ne commencent jamais avec le début de la rencontre

mais sont laissées pour la fin. Un Occidental devrait donc gérer avec la plus grande

prudence son emploi du temps et ne pas prévoir de rendez-vous suivis dans la

même journée.

Page 56: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

52

Figure 10 : Positionnement relatif des pays selon la relation au temps

Source : Cour Management interculturel – Dupuis (2005)

En conclusion de cette présentation du Maroc selon les critères culturels classiques,

il semble que le Maroc, comme la plupart des pays arabes, présente un profil de

société collectiviste où les intérêts du groupe passent avant l’intérêt individuel (tout

au moins en apparence). L’inégalité et la concentration du pouvoir y sont largement

acceptés impliquant le maintien du respect et de la position hiérarchique même si

cette dernière n’est pas corrélée aux compétences et au savoir. Les comportements

déviant ne sont que peu tolérés mais l’ambiguïté dans les communications, la valeur

de la promesse orale et les différences culturelles des sous-groupes qui composent

la société marocaine commencent à remettre en questions le critère du contrôle de

l’incertitude. Le temps n’est pas gagné ou perdu, il est partagé et ne rentre pas en

compte dans les critères de performance.

De plus, la société marocaine est composée de souches culturelles différentes. Les

Marocains du sud appartiennent au groupe des nomades africains. Les marocains

du centre sont les descendants des Arabes venus du Moyen-orient. Ceux du nord

sont le résultat d’un métissage entre les Berbères du Rif et les Espagnols de

l’Andalousie. Il existe plus de 6 dialectes et le Maroc a été influencé par plusieurs

années de protectorat français et espagnol. Toutes ces agitations de l’histoire ont

laissé des marques indélébiles. Le Maroc est une mosaïque de peuples rassemblées

autour de la monarchie mais qui en réalité ne partagent que peu de traditions

culturelles.

4Le temps est-il PRÉCIEUX, tourné vers le FUTUR ?

Scandinavie

États-Unis

France

Sénégal

MarocPérou

Thaïlande

Russie

Allemagne Mexique

Japon

ChineCanada Québec

OUI NON

Le temps c’est de l’argent, planification, échéance, une

chose à la foisTemps élastique, un jour à la

fois, destin, tradition garante du futur

$$ $ $ ?

Espagne

Page 57: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

53

3.2.4. L’influence culturelle selon D’Iribarne

Le sociologue Philippe D’Iribarne a consacré de nombreuses recherches à

l'exploration des traditions nationales des relations professionnelles et des styles de

direction. D’après l’auteur, chaque pays possède son propre système de relations

sociales, sa manière de définir les droits et devoirs de chacun, sa façon de

commander, d'obéir, de coopérer et de s'affronter. Dès lors, il importe de prendre en

compte les spécificités culturelles pour définir un style de management. On ne peut

gérer les hommes au Japon comme en Suède ou en France (D’Iribarne, 1990). Ci-

dessous un tableau résumant les travaux de recherche sur la logique culturelle que

D’Iribarne a réalisé sur les modèles français et américains.

Tableau 7 : Logiques culturelles comparées

Usine Américaine Française

Culture Logique du contrat Logique de l’honneur

Opposition fondamentale Fort – Faible Noble – Vil

Fonctionnement de l’entreprise

Respect des règles du

contrat

Libre et fier de faire

Ensemble de devoirs à

accomplir

Honneur de le faire

Source : La logique d’honneur (D’Iribarne, 1989)

L’auteur s’est intéressé de façon générale à l’Influence du monde de fonctionnement

des sociétés (institutions et structures) principalement en faisant des études

comparatives de différentes structures, quelles soient occidentales (allemande,

française, américaine) ou orientales (marocaine, tunisienne et jordanienne) en regard

de l’influence de leurs institutions.

Pour D’Iribarne, une culture universaliste a été et est toujours une croyance ancrée

dans beaucoup d'esprits. Penser différemment, concevoir différemment ou réagir

différemment n’est pas concevable dans l’esprit de plusieurs managers (Chanlat,

1999). L’histoire est marquée d’événements plus ou moins tragiques qui mettent en

évidence la « peur de l’autre ». Depuis que les Grecs ont définis les barbares comme

Page 58: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

54

des individus qui ne parlent pas leur langue, en passant par la remise en question de

l’aspect humain des Indiens ou encore la traite des Noirs (Chanlat, 2008), et tout

récemment, le plombier polonais ou encore le maçon arabe, les hommes n’ont cesse

de voir dans la différence de l’autre une menace à leur propre identité.

Cette méfiance envers son voisin a développé au fil du temps une incompréhension

récurrente lorsque deux cultures doivent interragir. Dans le même temps, les

entreprises ne sont pas épargnées par ce dysfonctionnement sociétal. Bien au

contraire, elles sont l’expression et l’aboutissement d’un phénomène social qui prend

ses racines dans la genèse de l’individu et dont les branches poussent jusque dans

les processus de décisions managériales les plus stratégiques, comme l’embauche,

la gestion des équipes multiculturelles ou encore le leadership.

D’Iribarne a mis en évidence le lien qui existe entre performance et adaptation

culturelle des méthodes de gestion. L’auteur rappelle dans une entrevue que « la

recherche au Cameroun et a montré que le système de gestion ne convenait pas

bien à la culture du pays, à la manière dont on y concevait la coopération, les

relations hiérarchiques » (D’Iribarne, 1991 http://www.cybertribes.com/iribarne.html)

L’auteur ajoute que « pour comprendre comment l’économie fonctionne et comment

elle concerne les hommes, il fallait aller beaucoup plus loin et s’intéresser à des

phénomènes dont s’occupent classiquement la sociologie, l’anthropologie ou la

philosophie politique » (D’Iribarne, 1989). Les recherches de l’auteur l’ont mèné à

étudier dans ses derniers travaux quatre pays qui sont le Mexique, le Maroc, le

Cameroun, et l’Argentine qui tous illustrent la même problématique de « la rencontre

de l’universel et du local » (D’Iribarne, 2004). Toujours selon l’auteur, une première

attitude est de chercher à imposer les pratiques de management qui prévalent en

certains pays économiquement dominants ou émergents. Une seconde voie serait de

répertorier des "best practices", « en prêtant une grande attention à la délimitation

des aires culturelles au sein desquelles elles s’appliquent et aux conditions précises

de leur succès quand elles sont mises en oeuvre dans ces aires » (D’Iribarne, 2004).

Il ne suffit pas de connaître les points forts ou les points faibles afin de bâtir une

équipe multiculturelle efficace (D’Iribarne, 1989).

Page 59: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

55

L’exemple de SGS-Thomson au Maroc

Dans son livre culture et mondialisation, D’Iribarne (1998) présente le cas particulier

de la société SGS-Thomson qui a implanté une de ses usines au Maroc à

Casablanca. Surprise des excellentes performances de l'usine, l'entreprise met en

place une étude afin d'élucider les conditions de ce succès au de regard son

rendement exceptionnel. L'élément principal qui ressort de cette étude est

l'instauration de la démarche TQM (Total Quality Management) affectée à toutes les

composantes de l'usine. Jugée par les experts comme antinomique avec la mentalité

marocaine, le TQM s'avère être au contraire un succès florissant. Le TQM est avant

tout une nouvelle philosophie de travail. Elle repose sur la mise en place de valeurs

communes à l'entreprise regroupée sous le terme "culture d'entreprise". Les individus

s'investissent dans le travail car ils se sentent concernés par l'entreprise. On est

passé d'un système de commissariat et de "surveillance policière" à un monde

d'apprentissage, d'école où se mêlent communication, pédagogie, partage, respect,

confiance, égalité, responsabilité. Toutefois souligne l’auteur, le TQM ne fonctionne

pas que par son aspect formel. Les conditions du succès résident dans le

rapprochement entre les valeurs issues du TQM et les préceptes de l'Islam

(D’Iribarne, 1998). C'est cette identification au sacré qui pousse les Marocains à vivre

le TQM comme quelque chose de normal, de culturel et de religieux.

Nous allons démontrer dans cette étude qu’il existe d’autres ressorts capables

d’aider les entreprises et les managers de culture différentes à dépasser les clivages

culturels et les distorsions provoquée souvent par l’idée que le management est une

recette universelle qu’il suffit d’appliquer de façon standardiser.

3.5. Avantages et inconvénients des travaux antérieurs

Afin de conclure cette partie sur les travaux d’Hofstede et d’Iribarne, je présente un

tableau résumant les avantages et les inconvénients des deux méthodologies

d’approches des différences culturelles.

Page 60: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

56

Tableau 8 : Forces et faiblesse des modèles d’Hoftsede et de D’Iribarne

Hoftsede D’Iribarne

Avantages Inconvénients Avantages Inconvénients

Dimensions simples et

facilement comparables

Prétention universaliste

et Modèle éprouvé et

souvent reproduit

Quantitatif sur des

grands nombres

Approche micro qui

explique les

comportements

Prédictif, et guide

l’action

Logique binaire et

généralisante

Rapports de causes à

effets à déterminer

Ne dit pas le « pourquoi »

Mesures datées

Plusieurs pays non

mesurés

Effets parfois

contradictoires

La culture n’est pas la seule

cause de différence

Approche statique de la

culture

Riche et nuancé

Qualitatif

Explique le « pourquoi »

et induit les logiques de

structures

Intellectuellement

séduisant

Adaptatif

Approche macro

Étude de cas

Subjectif et anecdotique

Centrée sur le travail d’un

seul individu

Rapports de causes à

effets discutables

Effets de la culture à

nuancer

Source : Management interculturel – Dupuis (2005)

L’une des principales critiques des travaux de D’Iribarne est qu’ils apportent au

manager peu d’actions concrètes et d’outils directement applicables sur le terrain. En

d’autres termes, D’Iribarne explique le « pourquoi » mais pas le « comment ».

C’est ce que cette étude tentera de combler en partie en présentant des outils

simples mais efficaces d’amélioration de la performance.

En conclusion de cette présentation des fondements de la culture en tant que

dimension des organisations, on peut dire que la culture a oscillé entre l’importance

accordée à l’histoire (Weber, Hofstede, D’Iribarne) ,à la fonction (Malinowski) et à la

structure de la personnalité (Maslow, Durkheim). Pour certains anthropologues

(Chanlat, Weber), la culture implique la connaissance de son passée. D’autres ont

affirmé que la compréhension d’une culture passait par l’observation et le

déchiffrement minutieux des relations entre les différents individus qui la compose à

un moment donné et qu’il n’était pas nécessaire de connaître l’histoire pour saisir

comment une culture est construite et comment elle fonctionne (Malinowski).

Page 61: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

57

3.6 Management et environnement islamique

Le monde Occidental à l’aube de la révolution industrielle, invente le concept

d’individu qu’il a cultivé jusqu’à son paroxysme, grâce à l’interaction d’un certain

nombre de facteurs scientifiques (Galilée, Newton), politiques et économiques (Adam

Smith) sociaux et religieux (l’éthique protestante) et historiques (philosophie

grecque). Il a constitué la toile de fond sur laquelle allaient être tissés les fondements

de la société occidentale moderne, son économie, sa sociologie, sa politique, ses

institutions et son management. La doctrine islamique, où le temporel et le religieux

sont indissociables, met plutôt nettement l’accent sur la coopération, « l’esprit

communautaire », sur l’ensemble (le groupe) plutôt que les parties (les individus).

L’individualisme en Islam est un individualisme qui dans la vie quotidienne se

retrouve en coexistence avec une forte mentalité collective et une non moins forte

prédominance des relations sociales.

Selon la croyance religieuse musulmane, Il y a une exigence d’exploiter le talent, les

capacités reçues de Dieu à la naissance, ce qui induit une notion de responsabilité

individuelle. Paradoxalement, ce sens de la responsabilité individuelle est bien

souvent absent de la gestion quotidienne des entreprises marocaines. Lorsqu’un

problème d’organisation surgit ou lorsque apparaît une faille quelconque dans les

processus de travail, il est très difficile de cerner les responsabilités. Chaque acteur

du processus rejette la faute sur les autres, ou sur une supposée « main invisible »

(pas celle d’Adam Smith) qui n’aurait pas fait son travail au moment voulu. J’ai été

personnellement confronté à ce genre de situation stressante et déroutante à

plusieurs reprises. Les missions et les tâches sont mal définies au départ et donc la

responsabilité est diluée entre les différents acteurs du système de travail. La

solidarité jour ici son rôle à l’envers. Personne n’est vraiment responsable, tous les

acteurs sont « solidaires » de cette non responsabilité. Alors que paradoxalement, le

sens de la responsabilité individuelle est complété, selon les principes de l’Islam, par

l’appartenance à une communauté, impliquant des réflexes de solidarité sociale et

politique entre musulmans pour le bien d’autrui. La société musulmane repose dans

ses fondements même sur la coopération. Cette coopération, qu’Ibn Khaldoun

appelle solidarité, se retrouve à la base de la tribu et du clan en tant qu’organisations

Page 62: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

58

sociales. Dans la culture islamique l’homme a besoin d’appartenir à un groupe.

L’individu n’existe que par et pour le groupe à qui il appartient.

Les incitatifs en Islam sont de deux ordres : les incitatifs monétaires et/ ou matériels

et les incitatifs spirituels dont le plus recherché par le croyant est celui de plaire à

Dieu. Il peut s’avérer une source de motivation et une incitation à l’action aussi

puissante, sinon plus que les incitatifs matériels. Plaire à Dieu en Islam ne se limite

pas seulement aux actes religieux, mais aussi travailler fort, produire et utiliser

rationnellement les ressources que Dieu a mis à la disposition de l’homme, accroître

ses connaissances, contribuer à la science et au développement matériel et à la vie

morale sur terre. Cependant, nous verrons comment ses notions et ses croyances

apparemment très fortes sont diluées dans les contraintes économiques et

managériales au quotidien, faisant passer au second plan les motivations religieuses

et spirituelles.

L’organisation qui évolue dans un environnement intangible islamique fait face à des

contraintes beaucoup plus fortes encore. En effet, les stipulations, principes et

normes découlant du Coran et de la Sunna (ensemble de règles et de hadiths

énoncés par le prophète Mohammed) vont constituer de formidables contraintes pour

les organisations, car elles fixent les limites dans lesquelles l’organisation va opérer.

L’intégration des valeurs morales va se retrouver dans toute action économique et

managériale. Les valeurs morales sont le fondement et la composante principale

dans tous les aspects de l’économie.

L’Islam rejette toute forme de comportement économique, de contrat commercial ou

de production qui faussent les règles du marché et qui aboutissent à des situations

de collusions de producteurs, de monopole, de tarification imposée, de prix fixés

d’autorité etc. Toutes les activités spéculatives sont aussi interdites. L’Islam ne remet

pas en cause le système de marché, en tant que moyen d’allocation de ressources, il

émet, cependant, de sérieuses réserves, quant à ses carences en tant que moyen

de distribution des revenus et des richesses au sein de la société. Par ailleurs, la

coopération est un aspect essentiel de la doctrine islamique. La liberté économique

s’exerce plutôt dans le cadre de la coopération que de la concurrence. Nous verrons

que la réalité du terrain est sensiblement différente. Les applications de ces principes

islamiques cités plus haut ne sont pas toujours respectées. Les entreprises

Page 63: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

59

marocaines utilisent allègrement ces principes fondamentaux lorsque la situation s’y

prête mais n’hésitent pas à transgresser ces croyances lorsque les enjeux financiers

sont importants ou lorsqu’il s’agit de préserver ses intérêts individuels au détriment

des intérêts collectifs comme l’enseigne l’Islam. Nous allons démontrer que ces

transgressions ont une influence directe sur les méthodes de management et

déstabilisent les managers formés dans les écoles de management occidentales. Il

en découle souvent des échecs important dans les missions de ces cadres

supérieurs qui travaillent dans un environnement où se mélange à la fois des

principes comme la transparence, le marché de libre-concurrence, le bien-être

collectif et des comportements opportunistes, des actions de corruption et des

méthodes de gestion obscures. Malgré ses contradictions, les entreprises étudiées,

pour la plupart des PME, présentent des résultats et des bénéfices importants et

constants. Il existe donc des ressources inattendues qui expliqueraient la

performance paradoxale de ces entreprises. En résumé, l’approche islamique

reconnaît une réalité dans laquelle :

- la solidarité et le sentiment de groupe, comme valeur de base, dans laquelle

l’interdépendance est valorisée et préférée à l’indépendance comme meilleur moyen

pour résoudre les problèmes dans les organisations ;

- les intérêts et le bien de l’ensemble prennent le pas sur les intérêts et les

avantages individuels;

- l’accomplissement et le respect de soi proviennent de la participation et la

contribution à un processus social plutôt que d’un individualisme compétitif ou d’une

lutte personnelle agressive;

- la compétition fait place à la coopération et à l’harmonie pour le bien de tous

et de chacun;

- la notion de contrat fait place à l’idée de consensus comme base première

de la société ou de l’organisation

- l’égalité des opportunités fait place à des notions authentiques d’égalité et de

justice communautaire

D’ailleurs, si tous ces principes que nous venons d’expliquer peuvent constituer dans

le contexte actuel de formidables contraintes, Rodinson (2002) qui a étudié

l’influence de l’idéologie islamique sur le développement économique, technologique

et scientifique du monde musulman médiéval, a conclu que d’après les faits

Page 64: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

60

historiques, cette idéologie fut un puissant moteur de développement qui hissa le

monde musulman au faîte de la civilisation mondiale pendant plus de cinq siècles :

« Un niveau a été atteint là qui ne se trouve ni ailleurs, ni auparavant. La densité des

relations commerciales au sein du monde musulman formait une espèce de marché

mondial de dimensions encore jamais vues. Entendons que le développement des

échanges avait permis des spécialisations régionales dans l’industrie comme dans

l’agriculture. Un marché mondial du même type s’était constitué au sein de l’Empire

Romain. Mais le « marché commun » musulman était bien plus vaste.

3.7 La particularité de chaque modèle de management

Plusieurs auteurs, parmi lesquels Bouilloud (1995) pensent qu’il est impossible

d’établir des lois en matière de gestion. En revanche, ce que l’on peut chercher à

faire, c’est établir la compréhension d’une situation donnée, à en trouver la logique et

le mode de fonctionnement. Ainsi, par exemple, pour Adler (1987), il faut considérer

chaque situation particulière séparément dans son contexte culturel : depuis la

description de la situation de départ (situation description), lui donner une explication

liée à son contexte culturel (cultural interpretation) et seulement avec l’appui de ces

éléments, il est possible de créer de la coopération culturelle (cultural creativity).

Certes, mes études universitaires m’ont permis d’appréhender les changements et

les adaptations nécessaires qui doivent être mise en place dans un système de

valeur différent de celui auquel on est habitué à travailler. J’ai été amené à étudier et

analyser les différences culturelles et à évaluer les défis auxquels doivent s’attendre

les managers en milieu multiculturel. Mais rien de ce que j’ai pu entendre, analyser,

écouter ou appris ne m’avait préparé à ce que j’ai vécu à mon arrivée dans le milieu

professionnel marocain.

Page 65: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

61

Tableau 9 : Comparatif des dimensions managériales Dimensions

managériales Approche managériale

classique Valeurs islamiques

Le travail - Egalité des opportunités

- La réussite par le mérite

- Individualisme

- Exploiter les capacités et les talents reçus

(Don de Dieu) [1]

- Esprit communautaire, solidarité [2]

- Très fortes relations sociales

- La réussite par l’entraide sociale et la

bianfaisance [3]

Incitatifs à la performance - Rémunération

- Satisfaction au travail

- Avancement professionnel

- Réussite matériel

- Plaire à Dieu en travaillant fort [4]

- Plaire à ses parents [5]

- Utiliser rationnellement les ressources

- Recherche de la connaissance [6]

- Rémunération et épargne [7]

Pouvoir et prise de

décision

- Droit de propriété

- Pouvoir légitime

Expertise, Savoir

- Droit d’appartenance à un groupe

- Position familiale ou clanique

- la « Sunna »

- la « Choura »

Relations individuelles Egalité

Forte hiérarchie – Loi des sages – Respect de

son entourage

Relations de travail Contrat Consensus – Harmonie - Obéissance

Système économique Marché libre Marché libre

Responsabilité Individuelle Individuelle et collective

Relation au temps Gagné/Perdu Partager/Vécu

Valeurs sociales Travail en équipe

Performance individuelle

Responsabilité individuelle

Séparation du religieux et

des organisations

Appartenance à un groupe – Très forte

solidarité mais liberté dans la manière de

l’exprimer – L’interdépendance est valorisée

Communication Ecrite è Règles écrites et

donc applicables et

réfutables

Orale è Système de communication informel.

Règles non écrites, donc difficilement

réfutables

Compétences Qualités professionnelles Qualités professionnelles

[1] "Il y a sur terre des preuves pour ceux qui croient avec certitude, ainsi qu’en vous-mêmes. N’observez-vous donc pas ?" (Sourate 31, Luqmân, verset 20) [2] "Et donne au proche parent ce qui lui est dû ainsi qu'au pauvre et au voyageur (en détresse). Et ne gaspille pas indûment." (Sourate 17, "al-Isrâ'", Le voyage nocturne, v. 26)

Page 66: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

62

[3] "Certes, Dieu commande l'équité, la bienfaisance et l'assistance aux proches. Et Il interdit la turpitude, l'acte répréhensible et la rébellion. Il vous exhorte afin que vous vous souveniez." (Sourate 19, "an-Nahl", Les abeilles, v. 90) [4] « Le travail est aussi une forme d’adoration de Dieu » Hadith du prophète Muhammad [5] « … ne les brusque pas, mais adresse-leur des paroles respectueuses, et par miséricorde abaisse pour eux l'aile de l'humilité; et dis : "Ô mon Seigneur, fais-leur; à tous deux; miséricorde comme ils m'ont élevé tout petit" (Versets 23/ 24- Sourate 17) [6] « Si n'importe qui voyage sur une route à la recherche de la connaissance, Allah le fera voyager sur une des routes du paradis… La supériorité de l'homme instruit au-dessus du dévot est comme celle de la lune, la nuit quand elle est pleine, au-dessus du reste des étoiles ». [7] « Dieu accorde sa grâce à l’homme qui a gagné son pain avec honnêteté, dépensé avec sagesse et épargné en prévision de jours moins fastes » Hadith du prophète Muhammad

Page 67: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

63

4. Le management au Maroc Le management au Maroc n’est pas encore une discipline scientifique. En effet, si les

concepts et les méthodologies sont connus, ce n’est pas le cas de la philosophie du

management. Par conséquent, l’alchimie entre l’acte d’entreprendre et le concept

d’entreprise se heurte souvent à plusieurs obstacles, ce qui retarde leur progrès.

L’organisation de type « marocain » est diamétralement opposée à l’occidentale. En

effet, la notion de destin est importante au Maroc en raison de la religion musulmane,

dans laquelle cette notion prédomine. De ce fait, les Marocains font davantage

confiance à leur intuition, leurs pressentiments, et fondent leurs plans là-dessus. Ils

n’hésitent pas de ce fait à changer une stratégie si personne n’y adhère. Dans le

mécanisme de prise de décision, l’improvisation est appréciée : les décisions sont

davantage fondées sur des jugements personnels que sur des faits bien précis. L’art

de la rhétorique est de mise dans les négociations. Le rapport à la hiérarchie est lui

aussi différent ; à savoir que l’autorité est davantage fondée sur la confiance, l’origine

et le charisme des dirigeants qu’à leurs capacités réelles à diriger une entreprise. Le

processus de recrutement est basé sur les relations (D’Iribarne rapporte dans

« Culture et mondialisation » que les opératrices de Thomson sortent toutes avec le

responsable). En ce qui concerne le contrôle, les Marocains auront tendance à

imputer les erreurs au système et à partir de là en tirer des améliorations (« C’est

toujours la faute des autres ! » disent les Marocains quand il s’agit de délimiter les

responsabilités). Ils n’aiment pas particulièrement être surveillés par leurs supérieurs,

et les postes qu’ils occupent sont rarement précisément définis. La communication

emprunte plus souvent des voies informelles (le fameux téléphone arabe) que des

voies officielles et la vérité est à distinguer au milieu des autres faits. Bien que

l’évolution professionnelle soit souvent due à la compétence, on trouve encore au

Maroc beaucoup d’exemples de promotions liées aux relations. De même, le salaire

est souvent lié au statut et à l’ancienneté dans l’entreprise. Pour les managers,

motiver une équipe relève d’une bonne connaissance des données marocaines.

Par ailleurs, l’honneur demeure un moteur de motivation plus sûr que la notion

de devoir. La finalité du travail ne renvoie pas tant à une forme de réussite, mais plus

à une forme d’estime, les personnes ressentent de la fierté à l’égard de leur propre

statut Enfin, en négociant, chacune des parties doit ressortir des discussions avec le

sentiment d’avoir gagné. Dans ce type de transaction, le flair et la créativité sont de

Page 68: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

64

mise. En ce qui concerne le leadership, et en se basant en partie sur les grilles

d’analyse, en partie sur Culture et Mondialisation et le cas de Thomson avant la mise

en place du TQM, on peut brosser un portrait comme suit du leader marocain.

Les preneurs de décision gardent leurs distances avec le reste du personnel, il

donne l’impression d’appartenir à une caste, une entité à part ; ils sont craints et

imposent ainsi la volonté du groupe…Ils doivent, en toute circonstance, se montrer

intransigeants et forts. Tous les ordres viennent « d’en haut », l’information circule de

haut en bas mais pas de bas en haut : il n’y a pas de feed-back, car de toute manière

le point de vue d’un employé restera toujours inférieur à celui d’un manager. Les

exécutants fournissent cependant des informations, si on le leur demande. La

direction contrôle la mise en place des directives et leur application.

Force est de constater que les techniques de management au Maroc ne s’alignent

pas avec les préceptes de l’Islam qui prône une égalité des chances

Les managers marocains profitent d’un système de taxes avantageux et peu

regardant sur les droits des employés, d’une main d’œuvre abondante, très bon

marché et maniable à volonté. Ces avantages compétitifs attirent chaque année des

dizaines d’entreprises multinationales qui embauchent à tour de bras.

Comparativement, un salaire moyen au Maroc se situe aux environ de 400 euros

mensuel. Tous ces aspects techniques sont des avantages compétitifs (Porter, 1979)

suffisamment importants pour couvrir les distorsions culturelles.

Figure 11 : Avantages compétitifs liés à l’environnement juridico-économique

Main d’œuvre abondante et

peu chère

Système fiscal avantageux pour multinationales

Droit du travail faiblement appliqué

Coûts d’exploitation

réduits

Gain en productivité et rentabilité Problèmes culturels voilés par des

bénéfices substantiels

Page 69: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

65

Cependant, les modèles importés de l’Occident et implanter en Afrique ont engendré

des échecs retentissant. Certaines compagnies, n’ayant pas anticipé les effets des

cultures managériales différentes, ont payé un lourd tribut. Au Maroc, on trouve

l’exemple de Dairy Queen, de Subway ou encore de Benetton et de Naf Naf. Ces

entreprises n’ont pas anticipé les différences culturelles, jouant uniquement sur la

marque et le prestige acquis dans d’autres pays. Les managers de ces entreprises

n’ont pas réussi à s’adapter aux différences culturelles locales. L’une d’elle, Colas,

qui gèrent des équipes de plusieurs centaines d’employés, souvent analphabètes ou

très peu formés, ont eu beaucoup de difficultés à gérer leurs équipes (Directeur GTR

filiale de Colas au Maroc, 2007).

5. Islam et modernité

La relation qu’entretient l’Islam, comme religion, et le développement économique est

une question difficile qui divise de nombreux auteurs de sciences sociales (Facchini

2005). L’Islam a été tantôt présenté comme une religion favorisant le libre marché et

comme moteur de croissance et de développement économique, tantôt comme une

religion inadapté à la modernisation et freinant l’application de méthodes

contemporaines d’amélioration de la productivité et de la richesse (Pras, 2007).

D’autres auteurs comme Facchini (2005, p.7) ont soutenu des arguments pour

affirmer que il est possible que l’islam comme religion ait été moins favorable au

développement économique parce qu’elle a été plus hostile à la reconnaissance des

libertés et des droits individuels. ». Le sous-développement de l’aire musulmane

actuelle a été aussi source de thèses divergentes. Il s’explique, selon Timor Kuran

(1997) par une défaillance institutionnelle qui trouve ses origines dans le

développement historique de la civilisation islamique. Facchini (2005) affirme pour sa

part que « le sous-développement actuel de l’aire musulmane s’explique par

l’existence de régimes politiques qui sont favorables à l’activité des ‘entrepreneurs

politiques’ ». Une autre thèse serait qu’une culture fataliste nuit au développement

économique. Adelman et Morris (1973, p.38) ont aussi montré que les religions qui

conduisent les hommes à croire qu’ils contrôlent leur destin et sont responsables des

résultats de leurs actions produisent des attitudes plus favorables aux

développements que les religions où l’homme ne peut pas influer sur son destin.

Page 70: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

66

Etudiant les musulmans de Java, Tamney ( ) a trouvé que l’engagement religieux

y était positivement corrélé avec l’éducation et des situations de prestige. C’est-à-dire

qu’il y avait plus de chances pour que des gens qui ont été au collège ou occupé des

positions de haut standing prient cinq a fois par jour, donne des aumônes, jeûnent en

accord avec la pratique islamique orthodoxe que des musulmans de peu d’éducation

ou occupant des emplois de peu de prestige. Tamney a aussi trouvé que la pratique

musulmane augmentait avec la modernisation. Noland (2007) montre qu’à niveau de

développement économique donné, l’islam favoriserait la croissance au lieu de la

réduire. Les Etats-Unis, comme pays marqué par une forte pratique religieuse est

l’exemple même de la corrélation entre engagement religieux et développement

économique.

Tous ces avis contradictoires ne cachent pas cependant le rôle moteur que peut

jouer l’islam en tant que catalyseur de performance. Les recherches dans différents

pays musulmans ont montré que des valeurs islamiques pouvaient résonné avec des

valeurs de productivité et de performance. Nous avons vu l’exemple de l’entreprise

SGS-Thomson au Maroc. Le groupe Lafarge en Jordanie en est un autre exemple.

En effet, Héla Yousfi montre comment des valeurs islamiques associées et adaptées

à des traditions locales claniques ont permis de motiver le personnel de l’entreprise

étudiée et d’améliorer la performance des employés (Yousfi, 2007, p.157).

Analyser les relations entre Islam et management sans prendre en considération le

contexte et les cultures locales seraient une erreur (Arslan, 2001). D’Iribarne (2007)

le souligne bien dans son analyse du cas de l’usine SGS-Thomson de Casablanca.

Selon l’auteur, le succès de l’implantation d’un système TQM (Total Quality

Management) n’est pas uniquement le fruit de la résonance des valeurs islamiques

avec les concepts et les valeurs d’un programme TQM. L’adhésion des managers et

des employés s’expliquerai également par « l’existence dans la société marocaine de

formes morales hautement révérées » (D’Iribarne, 2007).

Religion et institutions ne peuvent être pris séparément dans un système séculaire.

Dans les pays à culture religieuse intense, la religion a un effet sur le développement

parce qu’elle prédispose les décideurs politiques à certains choix institutionnels.

Page 71: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

67

Facchini (2005) affirme que « la religion trace la route éthique des institutions de

chaque pays et les institutions sont le principal préalable à l’action entrepreneuriale

et au développement économique ». L’auteur soutient par ailleurs que la religion et la

culture peuvent être dans certains cas des obstacles au développement si elles

retardent le processus d’identification des bonnes institutions par les dirigeants

politiques. Lewis (1993) cité dans Facchini (2005), défend l’idée que le rejet des

institutions du marché et les échecs des démocraties dans les pays musulmans

s’expliquent à la fois par l’intérêt des classes dirigeantes qui souhaitent ne pas

perdre le contrôle de l’Etat et la rente fiscale et par le rejet de l’Occident. La montée

récente de l’islamisme pourrait s’expliquer ainsi. Le rejet des valeurs occidentales,

supposées antinomiques avec les valeurs de l’islam, est le terrain fertile pour bloquer

le développement et la modernisation auxquels l’islam en réalité encourage selon les

auteurs cités auparavant.

Il n’y a donc pas d’avis tranché sur le rôle que peut jouer la religion sur le

développement économique d’un pays ou sur la capacité des musulmans à s’adapter

aux changements et à la modernité même si le cas des banques islamiques nous

montre qu’appliquer la « chariaa » peut s’avérer en réalité une source de motivation

pour s’adapter à la concurrence. En effet, ces banques évoluent dans des pays où il

existe un système banquier et financier dual. Le premier est basé sur les principes

stricts de l’islam (pas d’intérêt, pas de vente ou d’achat à découvert, pas d’assurance

vie, pas de crédit sans fond propre, partage des profits et des pertes …). L’autre

système est le système classique appliqué par la majorité des banques mondiales.

L’expérience a montré qu’en Indonésie ou aux Emirats par exemple, les banques

islamiques ont rivalisé d’ingéniosité pour faire face à une concurrence établie et

internationale afin de créer des produits dits « Hallal ». Le succès que connaît par

exemple aujourd'hui la banque islamique en Indonésie est dû au fait que, ayant

constaté la performance positive des banques islamiques dans le pays, le

gouvernement indonésien a commencé à l'envisager en tant que solution de

rechange pour améliorer la situation économique de toutes les victimes de la crise de

1998 (Facchini, 2005). Certaines banques occidentales proposent désormais des

produits dit alternatifs (France) ou islamiques pour attirer une clientèle nouvelle,

pieuse et souhaitant faire fructifier son argent selon les lois du Coran.

Page 72: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

68

L’expérience marocaine s’est avérée être quand à elle un échec. En effet, il n’existe

pas de banque islamique à proprement dit. Les banques locales ont été autorisées à

vendre des produits « hallal » en parallèle avec les produits classiques. Craignant

certainement une cannibalisation des produits alternatifs, les banquiers ont décidé

que ces produits coûteraient en fin de compte plus chers que les produits classiques.

Très peu de communication ou de publicité ont été mené et les agents de comptoir

ne sont absolument pas formés pour vendre ces produits. Autant dire que les

produits islamiques ont été voués à l’échec dès le départ, les banques marocaines

préférant s’assurer des revenus substantiels avec un minimum de risques. «Cela

revient vraiment trop cher par rapport au crédit classique. Les gens n’ont tout

simplement pas les moyens» reconnaît un directeur d’une banque souhaitant garder

l’anonymat. En réalité, il en été voulu ainsi par les banques elles-mêmes. Le

paradoxe est frappant pour un pays dont il est écrit dans la constitution que la

religion officielle est l’Islam. Cet opportunisme d’affaire se retrouve à tous les

échelons des affaires au Maroc (pratiques d’affaires douteuses, classement du

Maroc parmi les pays les plus corrompus selon Transparency International). On

pourrait en conclure que la religion est plus souvent utilisée comme vitrine que

comme doctrine et que les rares expériences réussies de combinaison de valeurs

religieuses et managériales sont plutôt le fruit d’expériences très localisées et

ponctuelles. Les résultats de cette recherche pourraient confirmer ou infirmer cette

hypothèse.

6. L’histoire économique de l’aire musulmane

La civilisation musulmane commence réellement avec le départ, en l’an 622, du

prophète Mahomet vers Médine après qu’il eut quitté la Mecque où il était persécuté.

De là, il fonde un Etat islamique et après plusieurs conquêtes, retourne à la Mecque

en l’an 629, soit 7 après son départ, cette fois triomphant. L’Islam va connaître une

période faste d’expansion vers toutes les directions. A l’Ouest l’Egypte, Carthage,

l’Afrique du nord et l’Espagne (en l’an 712) sont conquis. A l’Est, l’Iran se convertit en

l’an 651. L’expansion continue en Asie du sud, en Indonésie et en Chine. L’empire

ottoman prend le relais à partir de l’an 1477, principalement dans les Balkans et

Constantinople en 1453. Au bout de huit siècles de conquêtes, le monde arabo-

musulman constituait une zone unifiée autour d’une religion et d’une langue (à

Page 73: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

69

quelques exceptions prés), avec des institutions de droit, des universités, des

bibliothèques, des institutions et des sociétés constitutionnellement avancées

Au Moyen âge, la civilisation islamique était à son apogée alors que l’Europe vivait

une des périodes les plus noirs de son histoire. Le déclin du monde arabo-musulman

correspond à l’essor de l’Europe et à,la chute du Califat de Grenade (Faccini, 2005,

p. 2)

Généralement, les travaux menés pour expliquer le déclin du monde arabo-muslman

ont orienté leurs résultats vers deux explications. La première, défendue par le

déterministe géographique affirme que les sociétés du Croissant fertile et de

Méditerranée orientale ont ainsi eu le malheur de voir le jour dans un environnement

écologiquement fragile. En détruisant leur base de ressources, elles ont accompli un

suicide écologique » (Diamond, 2000 cité dans Facchini). L’auteur affirme que « si le

développement s’est déplacé vers l’ouest ce n’est donc pas parce que ses habitants

étaient plus sages, mais parce qu’ils ont eu la chance de vivre dans un milieu plus

robustes, doté de pluies plus abondantes ». Il en conclu que le déclin du monde

musulman est identique à toutes les civilisations de la région.

L’autre thèse défendue par Hayek (1994), Buchanan (1980) et Zywicki (2000) et que

le monde arabo-musulman, basé sur le système de prédation et de conquêtes au

lieu de la production et de l’entreprenariat a permis à l’Europe de se constituer

progressivement en force d’opposition. Facchini (2006) va dans le même sens et

affirme « qu’en inventant le capitalisme, l’Europe a découvert un mode de contrôle

des prédateurs plus performant et s’est donné les moyens de financer une armée

puissante ». Il ajout que «l’histoire du déclin économique musulman est l’histoire

d’un modèle de gouvernement qui étouffe l’initiative entrepreneuriale, flatte l’égoïsme

des prédateurs, s’épuise dans l’extension militaire et limite ainsi ses conditions de

survie dés qu’une autre aire découvre un système institutionnel plus performant ».

Le même schéma a-t-il été répété depuis la décolonisation des pays arabes ? Il

semble que les faits vont dans ce sens.

Droz-Vincent (2004) cité dans Facchini postule que l’autoritarisme, la propriété

d’Etat, et la fiscalité de prédation sont les causes du sous-développement de l’aire

musulmane d’aujourd’hui. Le résultat du nationalisme musulman post-colonial a donc

été l’instauration de pays plutôt corrompus et peu libres économiquement, autrement

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70

dit d’Etats bureaucratiques à l’origine d’un secteur public hégémonique (appelé aussi

Makhzen au Maroc) et au service d’un système de redistribution caractérisé par le

clientélisme et la corruption. Les révolutions nationalistes plus ou moins socialistes

dans le monde arabe ont mis en place des modèles d’Etats mercantiles inadaptés à

un monde où règne la concurrence internationale et le libre échange (Facchini,

2006). Elles ont reconstitué des Etats contrôlés par de petits groupes : des familles

(famille Saoud en Arabie Saoudite, Chaykh Sa’ad au Koweit, famille Alaoui au

Maroc), des partis politiques uniques (Irak, Syrie et Algérie), des groupes de

militaires putschistes (nassériens en Egypte et en Libye) ou des systèmes politiques

instables (Mauritanie). La prédation a pris un nouveau visage. Au lieu de conquêtes

et de butins de guerre, les pays arabes ont instauré un système interne de prédation

et de redistribution des richesses aux privilégiés, comme c’était le cas du temps des

califes. L’ouverture récente de certains pays à la concurrence internationale a certes

permis une création de richesse supplémentaire mais uniquement par l’apport de

capitaux étrangers et beaucoup moins par une amélioration des conditions de

production internes et une meilleure redistribution des richesses. La dépendance

d’un pays comme le Maroc aux conditions climatiques (le PIB peut être divisé par

deux en cas d’année de sécheresse !) montre que le pays est encore profondément

sous industrialisé et dépendant de facteurs totalement incontrôlables.

Facchini conclue son étude par affirmer qu’ « une grande religiosité détourne les

hommes des biens de ce monde, leur fait douter des valeurs matérialistes

d’accumulation et les prédispose à prier plutôt qu’à produire. L’Etat le moins efficace

sur le plan économique est celui qui est là non pas pour protéger les droits

individuels, mais pour réaliser l’ordre de Dieu sur terre ». L’Islam serait fataliste pour

cet auteur et prédisposerait à la régression économique. A cela, le Coran répond :

« Ceux qui pratiquent l'intérêt usuraire ne se tiennent au Jour du jugement que

comme se tient celui que le toucher de Satan a bouleversé. Cela, parce qu'ils disent:

'Le commerce est tout à fait comme l'intérêt.' Alors qu'Allah a rendu licite le

commerce et illicite l'intérêt » (Sourate 2, "al-Baqara", La vache, v. 75). On en déduit

donc que théoriquement selon le Coran, les peuples croyants sont plutôt encouragés

à commercer donc à produire et à voyager afin de nouer des relations commerciales.

Ici la signification de l’usure prend plusieurs dimensions. Il ne s’agit pas simplement

de l’acte financier mais également tout ce qu’il implique chez l’individu qui serait tenté

Page 75: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

71

de se reposer sur ses revenus d’intérêts. L'argent accumulé dans les comptes en

banque sans être investi tire vers le bas les taux d'investissements et vers le haut

celui de l'inflation. Dieu interdit l'intérêt afin de préserver l'homme de la souffrance du

poids des dettes. N’est-ce pas le surendettement (subprime) qui a créé l’une des plus

grave crise financière, économique et sociale de tous les temps ? Le système de

prédation décrié dans plusieurs recherches n’est pas lié à la religion mais au désir de

possession de l’homme.

Les échecs des différentes tentatives de moderniser les pays musulmans (Iran avec

son système Chariaa, Egypte et le socialisme nassérien, certains pays arabes

comme le Jordanie, l’Algérie, le Maroc avec leur lutte contre le colonialisme

considéré comme la source du sous-développement) ont permis l’émergence d’un

fondamentaliste religieux supposé apporter la solution aux problèmes économiques

et sociaux. On a bien vu que cette dernière tentative n’a conduit en réalité qu’à plus

de régression et a permis aux gouvernements actuels des pays arabes de justifier

leur mode de gouvernance en se posant comme garant de la sécurité au mépris du

développement et de la création de richesse. Renforcés dans leurs prérogatives et

revigorés par l’extrémisme religieux, les gouvernements arabes ont vite fait de surfer

sur la vague sécuritaire pour s’auto-justifier.

Une quatrième voie se dessine peu à peu. Celle de l’Islam de marché (Haenni,

2005). L’islam de marché se veut une alternative à la crise des Etats Providence

autoritaires qui ont accaparé toutes les dimensions de la vie individuelle sans être

capables de répondre aux préoccupations concrètes de leur population. Pour les

tenants de l’islam de marché, la religion pourrait reprendre sa place en se chargeant

de la santé, de l’éducation et plus généralement de la solidarité. La solidarité au nom

de Dieu évincerait la solidarité contrainte des Etats. Cette solution permettrait de

limiter la prédation d’Etat. Elle empêcherait les hommes politiques et les

bureaucrates de justifier leur rente par le respect de la parole du prophète. L’islam de

marché se présente ainsi comme un modèle de développement qui respecte les

valeurs des institutions du marché sans nier les valeurs morales de l’islam.

L’Islam se cherche une voie pour s’encastrer dans la modernité. Le management

n’échappe pas à ce désir des musulmans à trouver une nouvelle voie de ressortir et

Page 76: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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d’appliquer les valeurs religieuses. Haenni et Tammâm (2007) souligne que depuis

que le management « vise l’intériorité, les croyances et les valeurs, le management

post-moderne multiplie, volontairement ou non, les incursions dans les espaces

religieux» (Revue française de gestion, n°33, page 175). L’incursion du management

dans le religieux a été tentée par Weber la première fois dans son livre « Capitalisme

et éthique protestante ». De nos jours, le management est devenu « évangélique ».

L’abondance de la littérature de comptoir prêchant la « voie à suivre » pour se

réaliser dans son travail en est probablement la meilleure preuve. Certains islamistes

et hommes de religion ont trouvé là une nouvelle voie d’expression de leur foi après

avoir pris leur distance avec les institutions politiques, principalement les frères

musulmans. Ces nouveaux évangélistes musulmans, dont l’un des premiers

représentants est Tariq al-Suwaydân, prêche un Islam ouvert, orienté vers

l’accomplissement (achievement) personnel et la réalisation de soi. De formation

ingénieur dans le pétrole, Tariq al-Suwaydan est vite déçu des messages creux et

sans avenir des frères musulmans. Après des études de management aux Etats-

Unis, il revient s’installer au Koweit, persuadé qu’il a trouvé dans les cours de

management américain, le moyen de « moderniser » l’application de la foi

musulmane. D’autres initiateurs ont suivi le même chemin après avoir été conquis

par les pensées managériales enseignées dans les business schools américaines

ou anglaises. On retrouve notamment Ahmed al-Râshid, Hishâm al-Tâlib, Mohamed

al-Takrîti, Najib al-Rifâî et Ameur Khalid (Haenni et Tammâm, 2007). Cet

engouement d’hommes de religion pour le management anglo-saxon prend

véritablement racine après la traduction en arabe, par Disuqî Amar en 1990, d’un

livre devenu best-seller (Haenni et Tammâm, 2007) et écrit par Steven Covey, «The

Seven Habits of Highly Effective People » (Covey, 1989). A partir des années 90,

l’islamiste barbu prêchant une religion rigide, le sacrifice suprême ou le rejet des

valeurs occidentales a été remplacé par le « winner pieux » (Haenni et Tammâm,

2007) qui cultive plutôt les valeurs de réussite professionnelle et de richesse. La libre

pensée gagne petit à petit du terrain. L’ambition, le succès, l’efficacité et le souci de

soi (Haenni, 2002) trouvent une résonance auprès de la jeunesse musulmane et des

élites. Ameur Khalid, dans ses discours religieux explique que la « richesse est un

cadeau du ciel et que le musulman fortuné est le favori de Dieu, car il va dépenser sa

fortune pour la cause de Dieu et dans les oeuvres de bienfaisance » (Sunâ-a al-

Hayat, 2007).

Page 77: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

73

Tous ces nouveaux managers-prêcheurs des pays du Golf ont trouvé dans cette

nouvelle voie une résonance forte des concepts managériaux avec les valeurs de

l’Islam. Ahmed Mohamed cité dans Haenni et Tammâm (2007) rappelle que son

émission s’intitule « Bien sûr nous le pouvons » mais qu’on fond de lui il se dit « Bien

sûr, nous le pouvons, si Dieu le veut ».Des mots comme « itquân » voulant dire

‘l’excellence’, « al Gawda » traduit comme ‘la qualité’, « al-Tanmiyâ » qui veut dire

‘développement’ ou encore « al-Taraquî » traduit par ‘l’ascension sociale’ sont des

incitations à l’action, à l’entrepreunariat et à la réalisation de soi. Toutes ces valeurs

résonnent avec une grande amplitude.

Certaines critiques n’ont pas manquées d’être soulevées sur cette nouvelle tendance

à associer le management à l’Islam. L’une d’entre elle, soulevée par Mohamed Adel-

Gawad cité dans Haenni et Tammâm (2007), est que le management américain

contiendrai des valeurs locales qu’il est nécessaire de reformuler, même si Akram

Reda, cité dans Haenni et Tammâm (2007) considère que les valeurs du

management occidental sont des « valeurs-cadre faiblement prescriptives et donc

facilement ‘formatable’ ». Abdel-Gawad cite l’exemple du rapport au temps. Le temps

est certes important dans le management mais il doit être adapté aux réalités locales.

Il fait tenir compte du « tarhîb », soit du devoir d’hospitalité qui est encore plus

important que le rendement financier. L’auteur reproche à certains nouveaux

prédicateurs convertis aux vertus du management américain de prendre les valeurs

jugées compatibles avec l’Islam sans réel effort d’adaptation. L’Islam devrait plutôt

avoir un rôle structurant en s’appuyant sur les recherches et la Science existante

pour créer un nouveau savoir. L’Islam passerait d’un rôle de contenu, enfermé dans

un carcan rigide et non évolutif, vers un rôle de contenant, capable de recevoir les

savoirs, de les intégrés et les faire évoluer.

Probablement que plusieurs années seront nécessaires pour dresser un bilan de

cette nouvelle tendance mais la remise en questions des privilèges de rentes, des

passe-droits et du clientélisme ne s’avouera pas vaincu. Par ailleurs, ces nouveaux

managers musulmans utilisent encore beaucoup de références religieuses à leur

discours, trahissant par là même leur souci constant de ne pas se mettre à dos les

frères musulmans. Il faudra également s’attendre à des réactions violentes de la

part des rentiers. L’Islam doit se libérer du joug des prédateurs et de ceux qui l’ont

Page 78: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

74

tourné en leur faveur pour des objectifs contradictoires de ceux enseignés par le

prophète. Rappelons tout de même que Mahomet était un excellent négociateur et

homme d’affaire avant d’être un chef de guerre et qu’il était riche avant de devenir

pauvre une fois converti à l’Islam non pas que la religion lui ait ordonné la pauvreté

mais par les embargos successifs appliqués par les habitants de la Mecque sur les

premiers musulmans convertis pour les punir ou les chasser. Rappelons enfin que

dans un de ses Hadith, le prophète Mahomet avait une fois remarqué qu’un croyant

passé son temps à prier, pensant bien faire. Le prophète Mahomet (que paix soit sur

Lui) ordonna au croyant d’aller plutôt travailler pour créer de la richesse au lieu d’être

inactif et improductif. Rappelons enfin que le premier message révélé par Dieu à

Mahomet n’était pas celui d’être un prédateur, un rentier ou encore un privilégié. Son

premier message fût : « Lis, par le nom de ton Seigneur qui a créé, qui a créé

l'homme d'un caillot de sang. Lis! Car ton Seigneur, le Très Noble, c'est Lui qui a

enseigné par la plume. Il a enseigné à l'homme ce qu'il ne savait pas ». Le Coran,

dans plusieurs versets, traite de certains aspects de la science, en tant que sujets

généraux. Ces versets, dans une ère où les individus et les sociétés ont foi en la

science devraient inciter les musulmans à entreprendre et innover. L’Islam et le

Coran considère que la force et la puissance des nations est évaluée par la science,

la technologie, la culture, la connaissance, l'innovation et les découvertes. La plume,

c'est-à-dire le premier instrument d'écriture, est la première chose sur laquelle Dieu

s’est adressé à son prophète. Je pense donc que l’Islam a été instrumentalisé à des

fins politiques, économiques et d’hégémonisme pour préserver certains intérêts

individuels ou détriment du vrai message révélé. Ce qui expliquerai pourquoi au

Maroc par exemple, les concepts religieux ne sont que faiblement appliqués

(corruption, usure, etc.) et que la recherche est atrophiée. A ce titre, le succès de

certaines chaînes de télévisons des pays du golf prêchant un Islam ouvert et

tolérant, prônant l’accomplissement de soi et le travail.

Page 79: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

75

PARTIE II

1. Méthodologie de recherche, pertinence du sujet et hypothèses

Le cadre théorique de mon travail de recherche (Legendre, 1993 ; Huberman et

Miles, 1991) prend racine à partir d’un constat et d’observations empiriques. Après

une expérience de 4 années au sein d’une PME marocaine et d’une année dans une

entreprise de textile, il m’est apparu au bout de 6 mois d’exercice que les résultats

escomptés en terme d’amélioration de la productivité, de la mise en place de

méthodes de planification et de gestion, les projets ne donnaient pas les résultats

attendus. L’intérêt de comprendre pourquoi les méthodes qui ont fait leur preuve

dans d’autres environnements de travail dans lesquels j’ai exercé comme au Canada

ou en Suisse par exemple ne fonctionnent pas dans un milieu professionnel de

culture différente, m’a conduit à rechercher les causes profondes du problème et

d’identifier les « écarts ressenti ou observés entre une situation actuelle et une

situation souhaitée (Lefrançois, 1991). L’objectif de la recherche selon l’approche de

Demers (1993) consiste à valider des réponses que j’avais trouvés avant même de

démarrer mes travaux de recherche. Il s’agit donc dans cette thèse de rendre

conscient les réponses aux questions que je me suis posé et de les présenter sous

une forme « scientifique ».

Il est question de décrire les faits, les expériences et les anecdotes qui ont jalonnée

toutes ces années de pratique au Maroc. Il s’agit de présenter les difficultés de

départ (relation hiérarchique, difficulté de communication, pouvoir, notions classique

de performance, application des théories et modèles managériaux universels) et de

résumer les expériences locales d’autres managers (questionnaires).

L’élaboration du cadre théorique consiste à identifier les variables principales

susceptibles d’exercer une influence sur le phénomène étudié. Pour ce faire, nous

établissons les hypothèses de recherche à valider ainsi que la perspective théorique

appliquée tout au long de ces travaux. Nous expliquons comment les données ont

été établies, quelle est la population cible, quelles sont les variables indépendantes,

dépendantes et modératrices que nous décomposons en indicateurs susceptibles de

mesurer de façon concrète la variabilité les concepts définis. Le choix des indicateurs

Page 80: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

76

est important car il conditionne les résultats obtenus. Des indicateurs différents pour

un même sujet d’étude peuvent donner des résultats contradictoires.

Par ailleurs, DeBruyne et Herman (1974) ont souligné que le chercheur peut occuper

une position très différente selon qu’il est, d’un coté, un observateur distant et

détaché du réel qu’il étudie ou, à l’autre extrême, qu’il y est impliqué personnellement

et l’aborde en quelque sorte de l’intérieur. Mon expérience sur le terrain pendant une

durée de 5 ans et ma participation de façon active, non pas à la recherche en tant

que tel mais à l’application des hypothèses énoncées ci-dessous, me positionne

tantôt comme un acteur actif dans la vie des sujets étudiés tantôt comme un élément

neutre utilisant des procédés de collectes de données auprès de l’échantillon

sélectionné. Mais la méthodologie de la recherche étant hypothético-déductive, la

position de « neutre » est celle qui représente le mieux mon mode d’investigation.

2. Les hypothèses

Ce travail consiste à confirmer ou infirmer deux affirmations provisoires (Mace,1989 ;

Lefrançois, 1991) sous forme de deux hypothèses principales qui sont de démontrer:

HYPOTHESE PRINCIPALE 1 : qu’un nombre important de managers marocains et

étrangers formés dans les écoles de management occidentales font face aux mêmes

difficultés d’adaptation culturelle

HYPOTHESE PRINCIPALE 2 : qu’il existe des ressources inattendues dans la

performance des PME marocaines en dehors des schémas classiques d’amélioration

de la performance appris dans les écoles de managements françaises et

américaines.

Le schéma ci-dessous résume le chemin qui m’a mené à entreprendre cette

recherche dans le but de répondre à la question suivante : Quels peuvent être les

ressorts à utiliser comme levier pour rendre intelligible les concepts classiques du

management et améliorer la performance de l’entreprise et de faire adhérer les

équipes autour de cet objectif ?

Page 81: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

77

Afin de mieux cerner l’objet de recherche, je tente de répondre aux questions

suivantes de façon la plus précise possible (Tableau ci-dessous) :

Tableau 10 : Caractéristiques et contexte de l’objet de recherche Quelle est l’ampleur de l’objet ? - PME marocaines représentent plus de 80%

des entreprises

- Très peu d’accès aux connaissances

universels de management

- Nombre de managers étrangers et

marocains formés à l’étranger exercent au

Maroc

- Politiques de modernisation toutes azimutes

lancées par le gouvernement marocain pour

améliorer les pratiques de gestion

- Ampleurs des prêts européens (programme

MEDA, Agence française de développement

…) d’aide aux entreprises marocaines pour

améliorer qualité, productivité et niveau de

formation professionnel

Quelle est la situation dans le champ des

connaissances ?

- Largement étudié depuis l’école des

ressources humaines jusqu’aux études les

plus récentes sur le management interculturel

- N’apportent que des réponses au « pourquoi »

mais peu de réponses au « comment »

Quelle est la signification sociale de l’objet ? Expliquer le phénomène de distorsion culturelle

dans une optique non moralisatrice ou

philosophique. Réduire la souffrance au travail

des travailleurs immigrés et améliorer leur

leadership

Quels sont les protagonistes et la population

étudiée ?

Managers marocains ou étrangers formés dans

les écoles de mangement occidentales et

exerçant dans des PME marocaines

Source : Basé sur les travaux de Jeannin (2003)

Page 82: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

78

3. La faisabilité

Par ailleurs, je tente à travers un certain nombre de questions de m’assurer de la

faisabilité de cette étude en terme de précisions, de pertinence et de clarté. Le

tableau ci-dessous présente les questions et les réponses les différentes dimensions

du problème ainsi que sa pertinence, son cadre et les théories qui s’y rattachent.

Tableau 11 : La faisabilité de l’étude et le cadre de travail Le sujet est-il pertinent ? Touche directement la performance des

managers et celles des PME marocaines

mais également les multinationales

implantées au Maroc

L’analyse du sujet permet-elle de

comprendre (valeur explicative) ?

La source des difficultés est bien identifiée.

Les conséquences sont vérifiables

Le sujet étudié donne la possibilité d’y

apporter une réponse ?

Les réponses aux questionnaires montrent

clairement que des solutions concrètes ont

été adoptées

Quelles sont les dimensions du problème

étudié ?

Sociologique, culturelle, économique et

organisationnelle

Quelles sont les théories managériales

associées au sujet étudié ?

OST – Théorie de la contingence – Théorie

des ressources humaines – Sociologie des

organisations – Culture et management

comparé

Source : Basé sur les travaux de Jeannin (2003)

4. Les outils de la recherche

La méthode de validation (Lefrançois, 1991) des hypothèses fait appel une récolte de

données au moyen de questionnaires composé de questions fermés et préformés

avec quelques questions ouvertes (Lefrançois, 1991). Les informations récoltées

sont de types quantitatives et qualitatives et le positionnement épistémologique est

un positionnement constructiviste. Compte tenu des informations nécessaires pour

l’étude, la population cible (Potvin, 1990) est constituée d’un échantillon représentatif

(Lefrançois, 1991) de managers exerçant au Maroc et ayant fait des études à

l’étranger. La zone géographie étudiée est limitée aux villes de Casablanca et Rabat.

Page 83: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

79

L’hypothèse est le fruit d'observations, d'expériences et de connaissances étendues.

Le chercheur est censé connaître tout ce qui a déjà été fait ou dit sur le sujet qui

l'intéresse. Et s'il est vrai que les moyens informatiques permettent aujourd'hui de

trouver plus facilement les ouvrages et les articles nécessaires à sa réflexion, la

prolifération de ces derniers, due à une pression aggravée sur les chercheurs pour

qu'ils publient beaucoup, fait contrepoids. Se documenter sur un sujet peut prendre

des mois. Et comme les publications paraissent sans cesse, ce travail de

documentation, où « veille scientifique », n'est jamais véritablement terminé (Le

Monde du 02 février 2009). Il est donc nécessaire de prendre en compte le fait qu’il

doit certainement y avoir des études comparables réalisées dans d’autres institutions

de recherche à travers le monde et qu’il est très difficile de cerner toutes les

connaissances qui jaillissent simultanément dans un domaine spécifique.

5. Les variables étudiées

Dans un premier temps, j’établie le type d’environnement dans lequel le manager

évolue à travers les variables indépendantes définis ci-dessous mais qui ont tout de

même une influence sur la performance des entreprises indépendamment du facteur

culturel étudié dans cette thèse.

Les variables indépendantes (Van der Maren, 1991) mais qui ont un effet sur la

performance :

• Organisation administrative défaillante

• Nature des entreprises étudiées

L’objectif ici est de montrer que les managers interrogés évoluent pour la plupart

dans des entreprises peu ou pas structurées, à forte concentration de main d’œuvre

peu ou pas qualifié et que cela ne facilite pas leur intégration.

La validation de l’hypothèse 1, celle qui veut que les managers rencontrent les

mêmes difficultés se fera par l’analyse des 4 variables suivantes :

• La compréhension : Elle est mesurée selon que le manager rencontre des

problèmes de langage, de traduction ou de niveau scolaire des membres

de son équipe. L’hypothèse retenue est que la compréhension des

concepts managériaux est faible

• La communication : Cette variable est mesurée selon que le manager

arrive à être proche des membres de son équipe, qu’il se rapproche des

Page 84: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

80

plus anciens. L’hypothèse est que la communication entre le manager est

les membres de son équipe est problématique, surtout avec les plus

anciens

• L’autorité du manager sur son équipe : Cette variable est mesurée selon

que l’entreprise permet au manager de sélectionner de nouveaux

candidats sans que la hiérarchie intervienne où qu’il puisse refuser un

recrutement dans son équipe. L’hypothèse est que la hiérarchie interfère

de façon directe dans le processus de recrutement mais également dans la

gestion quotidienne des équipes.

• L’autonomie et la marge de manœuvre du manager dans la gestion de son

équipe. Il est question ici de savoir si le manager dispose de l’autorité

suffisante pour diriger son équipe comme il le souhaite sans l’interférence

de la hiérarchie. L’hypothèse est que le manager ne dispose pas de

l’autonomie suffisante pour diriger son équipe comme il l’entend.

Chaque variable est mesurée par une série de questions présentée dans le tableau

des indicateurs de mesures.

Dans un deuxième temps, je définis les ressorts que les managers auraient utilisé

comme variable modératrice afin d’améliorer la performance de leur équipe.

Ci-dessous, les variables modératrices mesurées (Van der Maren, 1991) :

• Connecter les méthodes de management avec les concepts religieux : Cette

variable nous renseigne si les managers utilisent des références religieuses

pour faire comprendre les concepts de management. L’hypothèse est que les

notions religieuses ne sont que peu utilisées et qu’elles n’ont pas d’effets sur

la compréhension des notions de management.

• Ajuster le comportement (les échanges, communication, langage, la langue,

les méthodes de gestion, les références religieuses, l’embauche des jeunes) :

Cette variable devrait mettre en évidence le fait que le manager adapte ses

méthodes dans l’application des concepts classiques de management. Elle est

mesurée par des questions sur le changement de comportement du manager

comme par exemple de savoir si le manager a faciliter la communication ou

s’il s’est rapproché des membres de son équipe.

Page 85: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

81

Enfin, la variable dépendante (performance des équipes) représente les résultats

attendus par les managers une fois qu’ils auront agi sur les variables modératrices.

La variable dépendante (Lefrançois, 1991) mesurée est défini comme suit :

• Performance des équipes sous la responsabilité du manager.

Cette variable permet de vérifier si cette adaptation a eu un résultat positif sur la

performance des équipes et également de savoir comment les managers mesurent

la performance de leur équipe (production, Chiffre d’affaire, indicateurs de

performance) car l’outil de mesure n’est pas toujours mis en place.

Dans un troisième temps, il serait intéressant de chercher des corrélations entre les

différentes variables étudiées afin de répondre aux questions suivantes :

• Est-ce que l’âge ou l’ancienneté pourrait influencer sur les problèmes de

communication (le fait qu’un manager soit jeune, il peut être moins pris au

sérieux) ?

• Est-ce que les entreprises à forte concentration de main d’œuvre sont celles

où les managers font le plus face aux problèmes d’adaptation (textile,

industrie, travaux publics)

• Est-ce que les problèmes organisationnels sont corrélés avec la secteur

d’activité (ici les secteurs sont été regroupés en deux catégories que

présentera juste après) ?

• Quel est le facteur le plus déterminant du comportement des managers qui a

influencé la performance (est-ce l’adaptation de son comportement, le

rapprochement vers ses équipes, les références religieuses ou l’embauche

des jeune ?)

• Parmi les difficultés vécues par le manager, quelle est celle qui est la plus

importante ? (communication, autonomie, autorité, compréhension)

• Est-ce que l’expérience à un effet sur les difficultés rencontrées par les

managers ?

• Qu’elle est parmi les adaptations qu’a fait le manager, celle qui explique le

mieux l’amélioration de la performance ?

Page 86: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

82

Certainement que d’autres liens entre variables apparaîtront une fois l’analyse

des données réalisées sous le logiciel de statistiques utilisée pour cette étude qui

est SPSS.

Chaque variable est mesurée à l’aide d’un certain nombre d’indicateurs (Tableau

des indicateurs de mesure) que l‘on retrouvent sous forme de questions (voir

questionnaire en annexe). Afin d’éviter un effet de biais de la part du répondant, j’ai

volontairement éparpillé les questions associées à chacune des variables. Ainsi le

répondant ne pourra que difficilement associé une question à un thème particulier et

serait tenté de répondre da façon à orienter ses réponses selon un choix qu’il aurait

fait avant même de finir les questions liées à une variable particulière.

Tableau 12 : Indicateurs de mesure des variables

Variable Indicateurs Autorité du manager sur ses équipes è 4 questions

28. Vous avez eu de la difficulté à faire exécuter des tâches A inverser

24. Certains membres de votre équipe considèrent qu’ils n’ont pas de compte

à vous rendre

10. L’entreprise a tendance à imposer les décisions de la hiérarchie

supérieure

Organisation administrative è 6 questions

2. L’entreprise possède des départements et services clairement définis

6. L’entreprise possède des définitions de poste claires et précises

11. L’entreprise a un processus clair et précis pour le recrutement

14. L’entreprise fait respecter les procédures mises en place

17. L’entreprise organise de façon régulière des réunions de travail

20. L’entreprise considère la qualité comme une priorité Autonomie du manager è 3 questions

8. L’entreprise vous permet de sélectionner les membres de votre équipe

31. Vous avez toute la latitude pour refuser un recrutement dans votre équipe

29. Vous dirigez votre équipe sans l’intervention de vos supérieurs

hiérarchiques Communication

è 6 questions

23. Vous avez trouvé des difficultés à communiquer avec vos équipes

7. Vous arrivez à partager avec vos équipes les plans d’affaire et les objectifs

de vos projets

15. Vous utilisez le dialecte local pour expliquer vos méthodes de gestion

18. Vous arrivez à traduire de façon claire les concepts de management

19. Vous pensez que les membres de votre équipe communiquent avec

vous pour tout problème professionnel ?

Compréhension des Techniques managériales par les membres de

32. Vous arrivez à appliquer les méthodes de management apprises au cours

de votre formation

33. Votre équipe comprend facilement les méthodes de management que vous

Page 87: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

83

l’équipe è 3 questions

voulez utiliser

40. Vous pensez que vos équipes comprennent clairement des notions de

performance (productivité, optimisation, ..)

Adaptation è 9 questions

è Changement général de comportement

34. Vous cherchez à adapter vos méthodes de gestion aux contraintes de vos

équipes

43. Vous avez du changer de comportement envers vos équipes pour en

améliorer la performance

è Changement Communication

37. Vous facilitez la communication avec vos équipes

42. Pensez-vous que cette adaptation s’est faite sur le plan du langage que

vous utilisez ?

è Rapprochement

38. Vous essayez de vous rapprocher des membres de vos équipes les moins

favorables à vos méthodes de gestion

44. Vous essayer de partager plus de temps avec vos équipes

è Utilisation de références religieuses

35. Vous utilisez des références religieuses pour faire comprendre à vos

équipes des notions de management

47. Les membres de votre équipe sont plus attentifs lorsque vous présentez

un concept managérial et que vous y associez un devoir religieux ?

è Embauche des jeunes

46. Les jeunes membres de votre équipe appliquent plus facilement sur le

terrain les méthodes que vous voulez appliquer ?

45. Y a t’il d’autres aspects dans la manière dont vous gérez vos équipes qui

ont pu à un moment ou un autre améliorer la performance dans la réalisation

de vos projets ?

Si oui, laquelle ?

Performance des équipes sous la direction du manager è 6 questions

41. Jugeriez-vous que vous avez amélioré la performance de vos équipes en

adaptant vos méthodes de gestion

36. Jugeriez-vous que vos équipes appliquent vos méthodes de management

plus facilement ?

49. La performance de votre service s’est améliorée depuis que vous en avez

la responsabilité ? Si oui, comment l’avez-vous mesurez ?

52. Utilisez-vous un outil de mesure qui vous permet de mesurer le

rendement de vos équipes ? Si Oui, lequel ?

50. Les membres de votre équipe utilisent des outils de pilotage (tableaux de

bord, reporting, mémoire de projet, ..)?

53. Les membres de votre équipe se conforment aux exigences de productivité

Page 88: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

84

Notons par ailleurs que la validité de cette étude, basée sur l’homogénéité de la

population dont sont tirées les sujets, accroît la précision et le contrôle (DeBruyne et

Herman 1974) mais les résultats sont moins généralisables. Cependant, March (et

all., 1991) ou Mintzberg (1979) postulent le principe de l’unité de nature entre les

différentes organisations : « Tout phénomène observé dans une organisation à

vocation à se reproduire dans d’autres organisations, et chaque recherche sur

chaque organisation a potentiellement une portée générale » (Romelaer, 1994).

6. La méthode de collecte des données

La méthode de recueil de données choisie est celle du questionnaire auto-administré

(Lefrançois, 1992) avec des entretiens simultanément pour expliquer aux managers

des questions ou des points qu’ils n’auraient pas compris. Facile d’utilisation,

pratique par son coté neutre (le chercheur n’intervient pas de façon active sauf sur

demande pour éclaircissement de certaines questions), le questionnaire permet une

diffusion large, rapide et peu coûteuse. Le questionnaire permet d’atteindre des

managers dans d’autres villes qui seraient autrement inaccessibles. De plus, le

risque d’obtenir des « réponses de façade » (Fenneteau, 2002) est plus faible.

L’anonymat des questionnaires permet d’obtenir des informations parfois

confidentielles et peut être administré sous plusieurs formats (papier, électronique).

L’un des inconvénients majeur du questionnaire auto-administré est le risque

d’obtenir un taux de réponse faible (Fenneteau, 2002). Par ailleurs, les réponses

obtenues peuvent être partielles, ce qui invalide le questionnaire en totalité. Enfin, il

est impossible de savoir si la personne qui a répondu au questionnaire est celle que

l’on souhaiter réellement interroger (Fenneteau, 2002).

Les types de questions utilisées dans le questionnaire sont des questions fermées et

des questions ouvertes. Chacun catégorie de question est utilisée selon l’objectif

attendu de la question. Avec le type de question fermée, la collecte d’information est

simple et fiable (Fenneteau, 2002). Les informations ainsi obtenues sont

standardisées, facilement codifiables et statistiquement comparables. En fournissant

la liste des réponses possibles, les personnes ont plus de facilité à répondre sans

effort supplémentaire de mémorisation. De plus, les personnes qui craignent d’être

réprouvées en affichant leur opinion fournissent des réponses sincères quand la

Page 89: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

85

question est fermée (Fenneteau, 2002). La majorité des questions posées dans cette

étude sont des questions fermées qui utilisent l’échelle de Likert (5 échelons de

réponse) qui permet d’exprimer un certain degré d’accord ou de désaccord avec la

proposition énoncée.

L’utilisation des questions fermées s’accompagne de simplifications réductrices. En

effet, Feneeteau (2002) souligne que « cela ouvre la voie à différentes

déformations ». D’après l’auteur, la nature des mots utilisés et l’ordre de

présentations des modalités peuvent exercer une influence sur les réponses. Les

réponses aux questions fermées ne fournissent pas d’indication sur la façon dont la

question a été comprise. La répétition des questions fermées peut amener chez le

participant une certaine lassitude et le conduire à répondre de façon distraite aux

réponses suivantes. Par ailleurs, DeBruyne et Herman (1974) affirment que les

questions fermées sont sujettes à exclure des aspects souvent importants que le

chercheur ignore ou qu’il a négligé d’intégrer dans son choix de réponses.

Dans le cas présent, les questions fermées sont préférées car je souhaite déterminer

si les indicateurs que j’ai utilisés au cours de mon expérience d’amélioration de la

performance de mes équipes restent valables et applicables dans d’autres

entreprises similaires. Ci-dessous deux tableaux qui résume les avantages et les

inconvénients du questionnaire et des questions fermées.

Tableau 13: Avantages et inconvénients du Questionnaire auto-administré

Avantages Inconvénients

è Facile d’utilisation

è Pratique par son coté neutre (le

chercheur n’intervient pas de façon

active sauf sur demande pour

éclaircissement de certaines

questions)

è Permet une diffusion large, rapide et

peu coûteuse

è Cible plus large

è Taux de réponse faible (50%)

è Réponse partielle (60%)

è On ne sait pas qui répond au

questionnaire

è Réponses de convenance

Source : Feneeteau (2002)

Page 90: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

86

Tableau 14 : Avantages et inconvénients des questions fermées

Avantages Inconvénients

è La collecte d’information est simple et fiable

è Les informations ainsi obtenues sont

standardisées, facilement codifiables et

statistiquement comparables

è Plus de facilité à répondre sans effort

supplémentaire de mémorisation

è Intimité et sincérité

è Simplifications réductrices

è La nature des mots utilisés et l’ordre de

présentations des modalités peuvent exercer

une influence sur les réponses

è Pas d’indication sur la façon dont la

question a été comprise

è Peut exclure des aspects souvent

importants que le chercheur ignore ou qu’il a

négligé d’intégrer dans son choix de réponses.

Source : Feneeteau (2002)

7. Les problématiques rencontrées

La problématique comme le rappelle Legendre (1993) constitue « l’étape initiale

d’une démarche de recherche, où, à partir d’une prise de conscience générale de

lacunes, il s’agit de décrire les symptômes, les incidences déplorables et la genèse

d’une situation perfectible en vue d’en venir progressivement à identifier les causes».

Le désir de réaliser ses travaux de recherche prend ses racines dans mon

expérience professionnelle au Maroc après avoir travailler plusieurs années en

Amérique du Nord et en Europe. Je constate rapidement que les méthodes de

management apprises durant ma formation de manager et appliquées dans les

entreprises ne permettent pas d’obtenir les résultats escomptés en terme de

performance et de productivité. L’application des théories managériales classiques

en vue d’améliorer la performance globale des organisations (gestion scientifique et

rationnelle des processus, mise en place des indicateurs de performance,

planification, contrôle, reporting, programmation, performance des ressources

humaines, productivité, motivation) semblait se heurter à des obstacles culturels et

communicationnels importants. Ce décalage entre d’une part une approche

scientifique, rationnelle et orientée vers l’optimisation des ressources internes de

l’entreprise et la maximisation du retour sur investissement et d’autre part un milieu

professionnel insensible aux notions de productivité a engendré des frustrations et

Page 91: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

87

un stress professionnel intense qui ne s’est réellement résorbé qu’avec l’adaptation

des méthodes classiques de management aux sensibilités locales.

La première difficulté rencontrée était celle de la compréhension des concepts

managériaux modernes par les membres de mon équipe. La problématique du

linguocentrisme (Dupuis, 2007) (maîtrise de la langue condition nécessaire mais pas

suffisante) se posait de façon critique car des concepts comme rendement,

productivité, planification ou « just in time » n’avaient pas le même sens ou n’étaient

tout simplement pas compris. Il semblait également qu’il y est eu des problèmes de

traduction. Chaque mot spécifique utilisé renvoie vers une signification contextuelle

différente selon que je l’utilisais comme concept managérial ou comme outil de

travail. La plupart des membres de mon équipe ne voulaient pas reconnaître leur

ignorance. Ce n’est qu’une fois que l’individu est confronté aux difficultés que je

réalise le défaut de compréhension. A l’évidence, les objectifs pour lesquelles j’ai été

embauché n’allaient pas être atteins. Il a fallut donc « traduire » les notions

managériales en terme intelligible et assimilables. Parmi les méthodes que j’ai

utilisée est l’approche religieuse puisque j’évolue dans un contexte religieux intense.

La question était donc : « Comment les éléments mis en place peuvent résonné avec

l’univers religieux, et comment ces éléments peuvent constituer un facteur de

mobilisation, de performance et de satisfaction ? ». Il s’agissait de coordonner

compétence linguistique et managériale et compétence socioculturelle (Geoffroy,

2001). L‘adaptation du langage a été un élément important du succès de la nouvelle

stratégie de communication que j’ai mis en place. En utilisant des mots simples, des

exemples concrets de la vie quotidienne des employés, j’arrive à faire comprendre

des notions comme la qualité ou le contrôle de gestion.

Une autre difficulté majeure rencontrée dans la gestion d’équipe est l’interférence de

la hiérarchie dans les décisions de recrutement. Souvent, la direction générale

impose de recruter tel ou tel individu pour des raisons souvent plus politique

qu’économique. D’autres fois, la direction réembauche des individus que j’ai licenciés

quelques semaines auparavant pour des raisons d’incompétence. La seule

explication fournie par la hiérarchie est que la ressource est « indispensable » car la

compétence recherchée n’a pas été trouvée sur le marché du travail. Seulement, le

Page 92: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

88

plus souvent il s’agit de compétences basiques comme technicien de contrôle ou

même coursier.

En résumé, il est question dans ce travail de recherche d’identifier dans un premier

temps, les problèmes rencontrés par les managers marocains et étrangers formés

dans les écoles de management occidentales (principalement en Europe et EN

Amérique) et de vérifier que ces problèmes sont plutôt présents dans les entreprises

dont la main d’œuvre est peu qualifiée.

Dans un deuxième temps, l’étude se propose d’identifier quelles ont été les solutions

adoptées par les managers ayant rencontré ces difficultés. Il sera question de trouver

quelles sont les solutions qui ont eu effet sur la performance des équipes.

8. Les échelles de mesure

Afin de mieux comprendre quel rôle peuvent jouer des variables comme la taille de

l’entreprise, le nombre d’années d’expérience du manager, l’organisation des

entreprises interrogées, il sera procéder d’une part, à l’analyse de corrélation entre

ces différentes variables et la performance, et d’autre part l’influence que peuvent

avoir ces variables sur les difficultés rencontrées par les managers. Voici comment

sont définis ces variables :

Tableau 15 : Définition des variables indépendantes Variabes Intervalle Echelle

Taille Entreprise mois de 100 4entre 100 et 500 3entre 500 et 1000 2

taille forte plus de 1000 1

Taille Equipe mois de 10 4entre 10 et 50 3entre 50 et 100 2

taille forte plus de 100 1

Secteur Services (Fortement qualifiée) 1main d'œuvre faiblement qualifiée TP+Textiles+Industries 2

Experience au Maroc mois de 1 an 4entre 1 et 5 ans 3entre 5 et 10 ans 2

experience forte Plus de 10 ans 1

Les solutionsConnexion des concepts managériaux avec des valeurs religieuses

L�image de jeunes

Rapprochement des équipes

Adaptation de la communication

Adaptation comportementale

Les solutionsConnexion des concepts managériaux avec des valeurs religieuses

L�image de jeunes

Rapprochement des équipes

Adaptation de la communication

Adaptation comportementale

PERFORMANCE DES EQUIPES

IMPACT

Page 93: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

89

Afin de garder une cohérence dans la comparaison des variables, toutes les échelles

de mesure utilisées dans cette étude vont dans le sens que plus un score est élevé,

plus la variable est faible. Par exemple, un manager qui répond que son entreprise

évolue dans le secteur du textile, le score sera de 2 puisque c’est dans ce secteur

que l’on trouve la main d’œuvre la moins qualifiée. Il est en est de même pour les

difficultés du manager et l’organisation des entreprises étudiées. Si un manager

répond que son autorité est faible, alors le score associé est de 5 (sur une échelle de

1 à 5, 1 étant le score fort). Si une entreprise est mal organisée, le score pour cette

variable sera compris entre 1 et 5 (5 étant l’entreprise la moins organisée). L’objectif

de cette concordance des échelles et de pouvoir comparer facilement les variables

lorsqu’il sera question de les comparer et d’identifier dans quel sens chaque variable

influe sur une autre. Par exemple, il se peut que plus une entreprise est mal

structurée, plus le manager trouve des difficultés pour gérer ses équipes.

9. Les techniques statistiques utilisées

Les principales techniques d’analyse statistiques utilisées dans cette étude sont

l’analyse factorielle, la corrélation bivariée et la régression linéaire. L’analyse

factorielle va nous permettre d’identifier des facteurs regroupant plusieurs variables

et nous pourrons ainsi plus facilement comparer l’évolution simultanée de ces

facteurs et leur influence sur la principale variable dépendante (la performance des

équipes). Cette technique a pour but de condenser un grand nombre de variables ou

d’items d’un questionnaire quelques dimensions unificatrices. Ceci est possible en

analysant les corrélations entre toutes les variables et en faisant ressortir les «

paquets » d’items qui sont fortement corrélés entre eux. Afin d’analyser la cohérence

des variables regroupées, on utilisera l’alpha de Cronbach. Cette technique est

utilisée dans le but de vérifier l’homogénéité d’une échelle de mesure. Cette

consistance interne est une mesure de fidélité en psychométrie et est basée

directement sur la corrélation des items entre eux. Les résultats sont présentés dans

la partie 3.

Page 94: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

90

Partie 3 1. Résultats de l’étude

1.1 Les fréquences des résultats principaux

Dans un premier temps, il m’est apparu intéressant de regarder les résultats obtenus

à un niveau brut sans procéder aux transformations statistiques classiques. Cette

analyse plate nous renseigne sur la répartition des réponses obtenues et nous donne

un premier aperçu sur les résultats. Je rappelle que les réponses sont divisées selon

que le manager est « Tout à fait d’accord » (choix « 1 » dans l’échelle de Likert) ou

« Pas du tout d’accord » (choix « 5 »).

A la question de savoir si les répondants trouvent des difficultés à faire exécuter des

tâches au sein de leur équipe, voici la répartition des résultats :

Vous avez rencontré des difficultés à faire exécuter des tâches

% % cumulé Tout à fait d’accord 16,7 16,7

D’accord 50,0 66,7 Ni d’accord ni pas d’accord 16,7 83,3

Pas d’accord 15,0 98,3 Pas du tout

d’accord 1,7 100,0

Total 100,0

On constate que 66,7% des répondants ont trouvé des difficultés à faire exécuter des

tâches par les membres de leur équipe.

La question suivante mesure le degré d’accord du manager selon qu’il arrive à

appliquer les méthodes de management appris au cours de sa formation. Vous arrivez à appliquer les méthodes de management apprises au cours de votre formation

% % cumulé Tout à fait

d’accord 6,7 6,7

D’accord 16,7 23,3 Ni d’accord ni

pas d’accord 26,7 50,0

Pas d’accord 36,7 86,7 Pas du tout

d’accord 13,3 100,0

Total 100,0

Page 95: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

91

On constate aisément que les répondants ne sont que 23% à pouvoir appliquer ce

qu’ils ont appris au cours de leur formation de management.

Le tableau suivant nous renseigne sur la perception qu’a le manager de la

compréhension par son équipe des concepts managériaux classiques. On constate

que 56,7% ont le sentiment que leur équipe comprennent ces concepts mais que

seuls 23% des managers arrivent à les faire appliquer (tableau précédent).

Votre équipe comprend facilement les méthodes de management que vous voulez utiliser

% % Cumulé Tout à fait

d’accord 10,0 10,0

D’accord 46,7 56,7 Ni d’accord ni

pas d’accord 30,0 86,7

Pas d’accord 6,7 93,3 Pas du tout

d’accord 6,7 100,0

Total 100,0 Un premier sentiment se dégage de ces trois premiers résultats bruts. Il semble que

les managers trouvent des difficultés à faire appliquer les méthodes de gestion qu’ils

souhaitent et que même si les membres de son équipe arrivent à comprendre ces

méthodes, ils ne les appliquent pas. Il doit y avoir donc d’autres variables qui

expliquent ce phénomène.

Ces résultats bruts montrent qu’un nombre important de managers ont trouvé des

difficultés à communiquer avec leurs équipes. Le tableau ci-dessous met en

évidence que 70% des répondants affirment être tout à fait d’accord ou d’accord

avec le fait d’avoir des difficultés à communiquer avec leur équipe :

Vous avez trouvé des difficultés à communiquer avec vos équipes

Percent % cumulé Tout à fait

d’accord 18,3 18,3

D’accord 51,7 70,0 Ni d’accord ni

pas d’accord 16,7 86,7

Pas d’accord 10,0 96,7 Pas du tout

d’accord 3,3 100,0

Total 100,0

Page 96: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

92

Il est bien clair que des difficultés de communication existent et que ces problèmes

pourraient avoir un effet sur la performance. Cependant, afin d’isoler les variables qui

affectent la performance des équipes, des analyses statistiques plus approfondies

sont nécessaires.

Rappelons que les résultats statistiques obtenus dans cette étude vont montrer

qu’effectivement, il existe des liens de corrélation ou de régression entre les

différentes variables étudiées, avec des risques d’erreurs faibles s’il l’on prend

comme intervalle de confiance 5% (un intervalle de confiance de 10% serait

acceptable étant donné que l’échantillon étudié ne dépasse pas 60 managers).

Deux autres variables ont été mesurées pour bien comprendre le contexte dans

lequel les managers évoluent. La première est de savoir si les difficultés vécues par

les managers ont pour origine le manque de confiance ou de respect de la part de

leur équipe. Voici les résultats de fréquences obtenues pour ces deux variables :

Vous pensez que les membres de votre équipe ont confiance en vous

% % cumulé Tout à fait d’accord 53,3 53,3

D’accord 30,0 83,3 Ni d’accord, ni pas d’accord 16,7 100,0

Total 100,0

Votre équipe vous montre le respect auquel vous pensez avoir droit

% % cumulé Tout à fait d’accord 60,0 60,0

D’accord 40,0 100,0 Total 100,0

Il est clair que les managers n’ont pas l’impression que leur équipe leur manque de

respect ou ne lui fait pas confiance.

Le tableau ci-dessous nous montre que les managers ont fait face à des problèmes

d’autonomie dans la gestion de leurs équipes.

Page 97: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

93

Vous dirigez votre équipe sans l’intervention de la hiérarchie supérieure

% % Cumulé Tout à fait d’accord 20,0 20,0

D’accord 30,0 50,0 Ni d’accord ni pas d’accord 30,0 80,0

Pas d’accord 13,3 93,3

Pas du tout d’accord 6,7 100,0

Total 100,0

En conclusion, nous constatons que les managers questionnés trouvent des

difficultés auprès de leur équipe pour faire appliquer leurs méthodes de gestion. De

leur coté, les membres de l’équipe comprennent les concepts, respectent leur patron

et lui font confiance mais n’appliquent pas ses recommandations. Autrement dit « je

comprends, je te fais confiance, je te respecte, mais je n’applique pas ». Voila le

dilemme auquel j’ai été confronté et auquel il semble que les managers formés dans

les écoles occidentales font face également. On a ici une première validation de la

hypothèse H1.

1.2 Les analyses statistiques

La deuxième hypothèse, à savoir d’identifier certaines ressources pour améliorer la

performance, sera analysée à travers l’analyse factorielle. La démarche suivie pour

l’analyse factorielle (analyse de composants principales ou ACP) est présentée ci-

dessous pour une variable particulière comme exemple de la démarche suivie. La

même analyse est menée pour toutes les autres variables. La première étape est la

création d’une matrice de corrélation, vient ensuite l’extraction des facteurs et la

sélection des facteurs et éventuellement l’application d’une rotation autour des axes

factoriels si un seul facteur n’arrive pas à expliquer la majeur partie de la variance.

Dans un premier temps, je lance une analyse factorielle sur la première variable

étudiée : La compréhension des concepts managériaux par les membres de

l’équipe. Il s’agit de voir si les questions choisies (32, 33, 40) peuvent être

regroupées en un seul facteur et de vérifier par la suite l’homogénéité du facteur

choisi par l’alpha de Cronbach. Le but est d’expliquer le plus de variance possible

Page 98: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

94

dans un facteur avec un nombre de dimensions le plus restreint possible. Voici les

résultats obtenus en utilisant le logiciel SPSS pour la première variable étudiée :

Extraction des variables et distribution (méthode ACP)

Initial Extraction

Q32 1,000 ,765 Q33 1,000 ,645 Q40 1,000 ,840

On constate que la distribution du pourcentage de la variance de chaque question

est très convenable et donc qu’il est pertinent de faire une analyse factorielle autour

d’un facteur en perdant le minimum de variance. Le tableau ci-dessous donne les

résultats suivants :

Total de la variance expliquée

Valeur propre Facteur Total % de Variance % Cumulatif Total % de Variance Cumulative % 1 2,249 74,972 74,972 2,249 74,972 74,972 2 ,514 17,138 92,111 3 ,237 7,889 100,000

On constate qu’un seul facteur arrive à expliquer plus de 74% de la variance totale.

C’est un résultat très satisfaisant. Pour valider ce choix, l’alpha de Cronbach est

nécessaire. Les tableaux suivant montre que c’est bien le cas :

Alpha de Cronbach

Alpha de Cronbach Nbd d’items

,828 3

L’alpha obtenu est de 0,828 (très largement supérieur à 0,7). On considère donc

que le regroupement des questions 32, 33 et 44, qui mesurent la compréhension des

concepts de managements par les équipes étudiées est largement satisfaisant. Le

tableau suivant nous donne un aperçu sur la valeur de l’alpha dans le cas ou un des

items est supprimé :

Page 99: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

95

Alpha de Cronbach si un item est supprimé

Scale Mean if Item Deleted

Scale Variance if

Item Deleted

Corrected Item-Total Correlation

Cronbach's Alpha if Item

Deleted Question 32 5,4000 4,651 ,719 ,733 Question 33 6,2000 5,519 ,604 ,844 Question 40 5,8667 3,372 ,787 ,670

L’utilité de supprimer un item parmi ceux sélectionnés pour mesurer la

compréhension n’est pas nécessaire. On en déduite donc que cette variable est

correctement représentée par un seul facteur.

1.3 La construction des facteurs d’analyse

La même technique d’analyse factorielle est utilisée pour toutes les variables

étudiées. Les résultats obtenus sont les suivants :

Tableau 16 : Définition des facteurs d’analyse Facteurs Items Alpha de Cronbach

Pbrl_Autonomie Q8,Q29,Q31 0,793Prbl_Organisation Q2,Q11,Q14,Q20 0,929Prbl_Com Q23, Q19Prbl_Compreh Q32,Q33,Q40 0,828Prbl__Diffusion Q7,Q18,Q15 0,649Prbl__Autorité Q28,Q24 0,767Prbl_Manager Prbl_Compreh+Pbrl_Autonomie+Prbl__Diffusion 0,921Prbl_Manager82 Prbl__Autorité+Prbl_Com

Adapt_Comprt Q34,Q43 Adap_Com Q37,Q42 Adapt_Rapproch Q38,Q44 Adapt_Relig Q35, Q47Adapt_Jeune Q46

Perf_Global Q41Perf_Application Q36Perf_Outil_Mgt Q50,Q53

Certaines variables ont été divisées en deux facteurs. En effet, deux dimensions sont

apparues lors de l’analyse factorielle. Il s’agit en l’occurrence de la variable

« Communication ». Cette variable a été splittée en deux facteurs. La première garde

le même nom « Compréhension », représentée par la question 23 et 19, la

deuxième est intitulée « diffusion » et représente le degré de diffusion et de partage

de l’information par le manager avec ses équipes. La dimension « diffusion » reprend

Page 100: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

96

les difficultés de langage et d’utilisation du dialecte par le manager ainsi que du

partage de l’information.

Une fois les différents facteurs initiés et validés par les différents tests statistiques, il

est intéressant de regrouper les facteurs obtenus en un ou deux facteurs globaux qui

pourraient expliquer la variance totale de toutes les difficultés rencontrées par le

manager. Rappelons que l’objectif est de mesurer les difficultés du manager d’un

coté, d’identifier quelles solutions ont été adopté d’un autre et de voir quelles

solutions ont réellement ont eu un effet sur la performance. Afin de comparer ces

trois tendances, il serait intéressant de pouvoir regrouper chacune d’entre en elle en

un ou deux facteurs représentatifs. Nous appliquerons donc la même technique

d’analyse factorielle pour dans un premier temps essayer de regrouper toutes les

variables qui mesurent les difficultés du manager (Autonomie, Autorité,

Communication, Diffusion, compréhension). Le résultat de l’analyse factorielle

(tableau ci-dessous) montre qu’il est correct de regrouper les dimensions

« Compréhension », « Autonomie » et « Diffusion ». En effet, le pourcentage de

variance de chaque question expliqué par le facteur 1 est compris entre 89,2% et

94,7%. Ces trois dimensions sont regroupées sous le facteur « Prbl_Manager » que

l’on retrouve dans le tableau 16. Les deux autres dimensions « Communication » et

« Autorité » sont regroupées dans le facteur 2 appelé « Prbl_Manager2 » qui

explique au moins 80% de la variance pour chaque variable. Analyse factorielle des facteurs de difficultés du manager

Facteur

1 2 Prbl_Com ,802

Prbl_Compreh ,947 Prbl_Autonomie ,943 Prbl_Diffusion ,892 Pbrl_Autorite ,825

2. Analyse explicative des phénomènes étudiés

Après l’étape de consolidation et de regroupement des variables en un nombre plus

restreint de facteurs, nous allons établir les corrélations qui existent entre les

facteurs. La première information judicieuse est de savoir si les problèmes

rencontrés par les managers sont reliés au secteur dans lequel il évolue. Voici le

Page 101: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

97

tableau de corrélation entre le facteur « Prbl_Manager » et « Secteur » (variable

définie dans le tableau 16).

Correlations

1 ,314*,015

60 60,314* 1,015

60 60

Pearson CorrelationSig. (2-tailed)NPearson CorrelationSig. (2-tailed)N

Prbl_Manager

Secteur d'acticité

Prbl_ManagerSecteurd'acticité

Correlation is significant at the 0.05 level (2-tailed).*.

On conclue, d’après les résultats du tableau ci-dessus que les difficultés du manager

sont liés au secteur d’activité de l’entreprise. Mais ce tableau ne nous dit pas de quel

secteur il s’agit. Il faut donc procéder à une analyse « ANOVA one way » qui va nous

permettre d’identifier pour quel secteur le manager trouve plus de problèmes. C’est

ce que le tableau suivant nous montre :

On constate clairement que le secteur d’activité dans lequel le manager trouve le

plus de difficultés est celui où la main d’œuvre est la moins qualifiée (le résultat est

significatif puisque le Sig=0,015). En effet, la moyenne du secteur « Textiles -

Travaux publics - Industrie » est supérieure à celle des services. Toutes les variables

mesurées ont été orientées à ce qu’un résultat fort signifie que les difficultés sont

fortes également.

Par ailleurs, nous avons remarqué que les difficultés du manager sont fortement

corrélées avec les entreprises mal organisées. Voici les résultats de l’analyse de

corrélation :

N Moyenne Déviation standard

Service+Informatique+R&D+Conseil (main d’œuvre qualifiée)

41 2,3767 ,82323

Textile+Travaux Publics+Industrie (main d’oeuvre peu qualifiée)

19 2,9942 1,00443

Total 60 2,5722 ,92258

ANOVA One way descriptive

Page 102: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

98

Correlations

1 ,862**,000

60 60,862** 1,000

60 60

Pearson CorrelationSig. (2-tailed)NPearson CorrelationSig. (2-tailed)N

Prbl_Manager

Prbl_Organisation

Prbl_ManagerPrbl_

Organisation

Correlation is significant at the 0.01 level (2-tailed).**.

Notons que la relation est très significative. Voyons comment ces deux variables

évoluent et s’il est possible d’expliquer les difficultés du manager par l’organisation

de l’entreprise où il travaille :

Coefficientsa

1,364 ,351 3,881 ,000,598 ,045 ,868 13,400 ,000,072 ,083 ,057 ,863 ,392

-,130 ,078 -,115 -1,675 ,100-,143 ,071 -,140 -2,018 ,048

(Constant)Prbl_OrganisationTaille de l'équipeTaille de l'entrepriseNbr années d'experience

Model1

B Std. Error

UnstandardizedCoefficients

Beta

StandardizedCoefficients

t Sig.

Dependent Variable: Prbl_Managera.

Nous avons testé différentes facteurs pour essayer d’expliquer lequel influence le

plus les difficultés du manager. On constate facilement que les problèmes

d’organisations et les difficultés du manager évoluent dans le même sens. Autrement

dit, plus l’entreprise souffre de dysfonctionnement, plus le manager trouve des

difficultés avec son équipe (coefficient B= 0,598, Sig=0). Notons que les autres

variables, telles que la taille de l’entreprise (Sig=0,392 – Non significatif) ou la taille

de l’équipe (Sig=0,10, non significatif) n’ont pas réellement d’influence sur les

difficultés. Par contre, il est intéressant de noter que le nombre d’années

d’expérience tendrait à réduire les difficultés du manager. Autrement dit, plus le

manager a de l’expérience et moins il fera face aux difficultés dans la gestion de son

équipe (B=-0,143, Sig=0,048, significatif).

3. Les variables explicatives de la performance

Dans cette partie de l’analyse des résultats, nous allons essayer d’isoler les facteurs

parmi ceux qui identifient l’adaptation du manager (voir tableau 16), influencent le

plus la performance des équipes. Rappelons que la performance a été mesurée

Régression linéaire

Page 103: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

99

selon deux facteurs principaux : La « Perf_Globale » (ce que ressent le manager de

manière générale) et la « Perf_Outils_Mgt » (mesure le degré d’utilisation des outils

comme les tableaux de bord, le reporting, le pilotage, la productivité, …).

Dans un premier temps, nous essayerons de voir quel facteur explique le mieux la

performance et comment cette relation évolue. Les résultats sont donnés dans le

tableau ci-dessous :

Coefficientsa

1,332 ,723 1,843 ,072-,116 ,186 -,092 -,625 ,535,551 ,245 ,386 2,245 ,030,251 ,126 ,292 1,985 ,053

-,785 ,413 -,278 -1,900 ,064-,347 ,355 -,151 -,978 ,334

(Constant)Adapt_ComportAdapt_ComAdapt_RapprochAdapt_ReligAdapt_Jeunes

Model1

B Std. Error

UnstandardizedCoefficients

Beta

StandardizedCoefficients

t Sig.

Dependent Variable: Perf_Globala.

On tire de ce tableau que deux facteurs expliquent clairement la performance. Il

s’agit de de la communication l’adaptation (adaptation du langage et amélioration de

la communication - B=0,551 et Sig=0,030) et du rapprochement (le manager se

rapproche des membres de son équipe et partage plus de temps avec eux –

B=0,251, Sig=0,053). Le Béta standardisé du facteur « Adapt_Rapproch » nous

renseigne sur le fait que si le manager adapte son comportement et se rapproche de

ses équipes d’une unité supplémentaire • , la performance s’améliorera de • x29,2%

Par ailleurs, notons que l’adaptation religieuse évolue de façon à l’opposé de la

performance globale (B=-0,347 mais Sg=0,334 non significatif). Autrement dit,

l’utilisation de références religieuses n’explique pas l’amélioration de la performance.

En fait, l’analyse suggère même l’effet inverse. On en conclut donc que l’utilisation de

références religieuses pour expliquer des concepts managériaux ne semble pas une

solution adaptée par les managers pour améliorer la perception de la performance

globale.

Nous allons comparer le deuxième facteur mesurant la performance des équipes.

Rappelons que ce facteur mesure l’utilisation des outils classiques du management

par les membres de l’équipe du manager interrogé. Voici les résultats obtenus :

Régression linéaire

Page 104: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

100

Coefficientsa

,018 ,381 ,047 ,963,101 ,098 ,171 1,033 ,307

-,075 ,129 -,112 -,578 ,566,029 ,067 ,073 ,442 ,661,434 ,218 ,329 1,992 ,053,104 ,187 ,098 ,558 ,580

(Constant)Adapt_ComportAdapt_ComAdapt_RapprochAdapt_ReligAdapt_Jeunes

Model1

B Std. Error

UnstandardizedCoefficients

Beta

StandardizedCoefficients

t Sig.

Dependent Variable: Perf_Outil_Mgta.

Un seul facteur semble expliqué la performance dans l’utilisation des outils de

contrôle de gestion : le facteur religieux (B=0,434 Sig=0,053). Nous venons de

constater dans le tableau précédent que ce facteur n’expliquait pas la performance

globale. Notons par ailleurs que les jeunes ne semblent pas être un facteur dominant

dans l’amélioration de la performance (Perf_Outil_Mgt). Il semblerait donc qu’il y ait

une contradiction ave le tableau précédent. En réalité, ce paradoxe peut s’expliquer

de la manière suivante. En analysant la corrélation entre les deux facteurs qui

mesurent la performance, on constate qu’elle est négative.

Correlations

1 -,288*,026

60 60-,288* 1,026

60 60

Pearson CorrelationSig. (2-tailed)NPearson CorrelationSig. (2-tailed)N

Perf_Outil_Mgt

Perf_Global

Perf_Outil_Mgt Perf_Global

Correlation is significant at the 0.05 level (2-tailed).*.

Les résultats semblent être contradictoires. En réalité, cela vient confirmer une

attitude assez répandue dans les entreprises marocaines. Les employés peuvent

effectivement être plus enclin à utiliser les outils que les managers leur mettent à leur

disposition mais cela ne garantie en rien l’utilisation efficiente et correcte de ces

outils. Autrement dit, un employé peut utiliser un outil de gestion (tableau de pilotage,

un plan de projet, un outil informatique) mais ne pas s’en servir de façon pratique et

recourir plutôt aux anciennes méthodes. Un exemple concret est celui que j’ai mené

pour l’implantation de l’ISO. Une fois l’ISO 9001-2000 mis en place, les manuels de

qualité bien compris et les procédures respectées, les employés ont effectivement

utilisé les outils comme l’exige les manuels. Une des raisons pour lesquelles j’ai

souhaité implanter l’ISO est de structurer le service des achats pour comptabiliser et

Régression linéaire

Page 105: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

101

suivre tous les opérations avec les fournisseurs. Auparavant, les achats se faisaient

par téléphone et il n’y avait pas de contrôle de qualité à la réception. La mise en

place de la nouvelle procédure des achats avec tous les formulaires de contrôle de la

qualité, des délais de livraison et de la réception des documents associés à la

commande devait réduire les erreurs de comptabilité et de facturation. En réalité, les

personnes concernées ont continué à appliquer l’ancienne méthode et remplissaient

les documents à posteriori. Le taux d’erreur ne s’était donc pas amélioré.

De même, l’implémentation d’un système informatique de management de la chaîne

logistique qui devait contribuer à l’accroissement de la productivité par un meilleur

contrôle des transports et des livraisons n’a été que très peu adapté par les chefs de

projets. L’affichage fournis par ce système informatique permet une réaction rapide

et en temps réel à tout retard de livraison, à toute panne d’un camion de transport ou

à tout dépassement dans les quantités de marchandises initialement prévues.

Encore fallait-il faire établir un plan prévisionnel des livraisons pour pouvoir contrôle

les dépassements dans les livraisons. Ce qui devait conduire à une compétitivité

accrue de l’entreprise s’est simplement transformé à un simple outil de contrôle à

posteriori.

Un autre résultat semble émergé des données recueillies. On a constaté dans

l’analyse factorielle que les problèmes du manager forment deux groupes bien

distincts. En effet, les problèmes de communication et d’autorité restent

indépendants des autres difficultés. En retournant aux questions associées à chaque

variable (la communication et l’autorité), il n’y a apparemment pas de justification

logique à ce que les problèmes de communication et d’autorité n’intègrent pas les

autres problèmes dans le même facteur. En procédant à une analyse statistique

utilisant la méthode « ANOVA one way » afin de voir s’il y a un lien quelconque avec

une autre variable, voici les résultats obtenues pour la variable secteur d’activité

Page 106: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

102

N Moyenne Déviation standard

Pbrl_Autorite Service+Informatique+R&D+Conseil 41 3,7805 ,93574

Textile+Travaux Publics+Industrie 19 3,2632 ,83945

Total 60 3,6167 ,93140 Prbl_Com Service+Informatique+R&D

+Conseil 41 3,8780 ,55656

Textile+Travaux Publics+Industrie 19 3,3158 1,05686

Total 60 3,7000 ,78762

Le tableau ci-dessus met en évidence que les problèmes d’autorité et de

communication sont plus présents dans les secteurs des services (avec Sig=0,04

pour l’autorité et Sig=0,09 pour la communication donc très significatif) alors que

nous avons trouvé auparavant que les difficultés vécues par les managers sont plus

rencontrés dans les entreprises où la main d’œuvre est faiblement qualifiée. Ce

résultat paradoxal pourrait s’expliquer par le fait que dans les entreprises à main

d’œuvre plus qualifiée, les employés sont plus enclin à remettre en cause l’autorité

de leur patron du fait justement de leur niveau d’éducation. Ce qui pourrait être vu

par le manager comme des difficultés de communication également. Autrement dit,

lorsque le manager évolue dans une entreprise où la main d’œuvre est faiblement

qualifiée, les employés remettent moins en cause l’autorité du manager. Ceci est

peut-être du au fait que ce genre d’employés peu ou pas formés (l’analphabétisme

représente parfois 50% de la main d’œuvre dans les entreprises de travaux publics

et dans l’industrie) ne remettent pas en cause la « parole du chef ». L’affrontement

direct et la critique du chef ne sont pas culturellement acceptable dans un pays à fort

indice hiérarchique selon Hofstede.

4. Conclusion de la partie analyse des données

D’une manière générale, les managers interrogés ont le sentiment d’avoir surmonter

les difficultés de communication, de crédibilité et de performance en adaptant leur

méthode de gestion aux contraintes locales. On constate clairement que cette

adaptation s’est faite sur le plan relationnel et culturel plus que sur le plan technique

ou opérationnel. Autrement dit, le manager formé dans les écoles occidentales à

adapté son comportement en se rapprochant de son équipe, en partageant avec eux

plus de temps et d’informations et en ajustant son langage. Il est remarquable de

Page 107: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

103

noter ici que ce sont là les caractéristiques d’une faible distance hiérarchique alors

que le modèle développé par Hofstede (1980) suggère plutôt que le Maroc fait partie

des pays à forte distance hiérarchique. Cette forme d’adaptation est tout à fait

inattendue pour un manager comme moi à qui on a enseigné que le management

doit se pratiquer de façon impersonnelle et que l’amélioration de la productivité

dépendait presque exclusivement de l’ingénierie des processus de travail et de la

mise en place de procédures standardisées. Le management enseigné en Occident

nous apprend que le temps est l’ennemi à combattre et que pour optimiser toute la

chaîne de production et satisfaire le client qui exige toujours plus, il fallait réduire les

temps morts, investir dans les technologies, utiliser des matrices de responsabilités,

dessiner des Blue-Print, automatiser les tâches et gérer de façon efficace les

ressources humaines en les formant, en les motivant et en les contrôlant. Autrement

dit, les leviers de la performance sont a rechercher dans le gain de temps et la

réduction des coûts (« cost-killer »). Or, il semblerait que toutes ces voies

d’amélioration et d’optimisation des ressources et du rendement sont dépendantes

de l’adaptation culturelle des managers et de leurs capacités à composer avec un

environnement où le temps n’est pas gagné ou perdu mais vécu et partagé, où le

management n’est pas une science mais une relation entre des individus et où les

paradoxes peuvent parfois en dérouter plusieurs. La réussite d’un projet, d’un

programme, d’une entreprise ou simplement d’une mission dépend moins des

méthodes et des outils de gestion utilisés que de la façon dont le manager met en

place ces outils avec ses équipes. L’hypothèse 2 selon laquelle il existerait des

ressources inattendues pour des managers rationnels et orientés « processus » et

qui expliqueraient la performance, trouve là un premier élément de validation.

Le même phénomène de rapprochement est mentionné par D’Iribarne (1998) dans le

cas SGS-Thomson. Même si D’Iribarne met l’accent sur la résonance du facteur

religieux avec les valeurs du TQM, je pense que c’est plutôt le replacement des

individus au centre de l’organisation du projet, l’estime qui leur a été rendu et le

sentiment de ne pas être « inférieur » qui a fait du TQM un succès retissant. Certes

le facteur religieux a été un catalyseur mais en lisant le cas, on voit bien que le

remplacement du directeur du site de SGS-Thomson a fait toute la différence.

Notons par ailleurs que plus l’entreprise est constituée de main d’oeuvre faiblement

qualifiée, plus le manager trouve des difficultés d’adaptation et donc plus iI doit faire

Page 108: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

104

d’efforts pour améliorer la performance. Il en est de même pour l’organisation de

l’entreprise. Plus une entreprise est mal structurée, plus le manager fera face à des

difficultés d’adaptation. Notons également que le facteur religieux ne constitue pas

un levier de performance comme l’avait suggéré D’Iribarne (1998).

La question qui se pose à présent est de savoir comment se définit un bon chef

marocain à la lumière des résultats obtenus. Il semblerait qu’un bon chef est celui qui

montre à ses employés de l’estime, qui les place au centre de l’organisation et non

pas aux périphéries. Il semble que les employés attendent de leur chef qu’il soit

proche et qu’il partage des moments avec eux. On voit bien que le temps se partage,

se vit mais ne s’économise pas. Le style de management et implicitement la manière

de la prise des décisions, le niveau de formalisme, la structure d’organisation,

l’équilibre entre des relations professionnelles amicales et des relations amicales

dans un milieu professionnel (entre le manager et son équipe) peuvent influencer les

comportements des employés en vue de l’accomplissement des objectives.

Le tableau ci-dessous résume les principaux résultats trouvés dans cette étude.

è Catégorisation de Hofstede et les données du terrain (IDH)è Culture religieuse intense mais ne constitue pas un levier de motivation ni un ressort d�actionè Problèmes d�autorité dépendent de la nature de l�entrepriseè Utilisation des outils de contrôle de gestion ne garantie pas l�efficacité des processusè Confiance et respect ne garantissent nullement l�application des règles de travail

è Embauche des jeunesè Une gestion « rapprochée » des ressources humainesè Le succès ne s�explique pas uniquement par les méthodes de gestion ou la compétitivité de l�entreprise

ParadoxesRessources inattendues

è Catégorisation de Hofstede et les données du terrain (IDH)è Culture religieuse intense mais ne constitue pas un levier de motivation ni un ressort d�actionè Problèmes d�autorité dépendent de la nature de l�entrepriseè Utilisation des outils de contrôle de gestion ne garantie pas l�efficacité des processusè Confiance et respect ne garantissent nullement l�application des règles de travail

è Embauche des jeunesè Une gestion « rapprochée » des ressources humainesè Le succès ne s�explique pas uniquement par les méthodes de gestion ou la compétitivité de l�entreprise

ParadoxesRessources inattendues

Page 109: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

105

5. Apports managériaux de l’étude

Les recherches menées durant cette étude ont confirmés le rôle déterminant des

différences culturelles dans la gestion performante des organisations comme l’avait

souligné des auteurs comme Hofstede et D’Iribarne. L’étude montre que le

relationnel, l’éthique et l’estime sont essentiels dans la recherche de la performance

et de l‘implication des ressources humaines. La traduction des concepts selon

l’univers linguistique local (langage intelligible) semble également jouer un rôle

important. Il ne suffit pas de former les individus, il faut leur « parler » mais il faut

également qu’ils vous « parlent ». Paradoxalement, le référencement à des concepts

religieux dans un pays à culture religieuse intense n’est pas garant de la

compréhension ou de l’amélioration de la performance. L’élément essentiel qui

semble le plus contribuer à améliorer la performance est « redonner l’estime aux

individus ». Les difficultés culturelles ont tendance à se démultipliées dans les

organisation mal structurées.

La nature de l’entreprise semble être, à un certain degré, un facteur explicatif des

difficultés des managers à gérer leur équipe. Un manager qui travaille dans une

entreprise de textile ou de travaux publics et dont la main d’œuvre est faiblement

qualifiée, devra s’attacher plus à gérer son relationnel avec son équipe. Le graphe ci-

dessous résume ce phénomène :

Figure 12 : Evolution de l’effort relationnel du manager

Effort relationnel du manager

Faible Fort

Qualification de la main d’oeuvre

Fort

Faible

Page 110: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

106

Une relation similaire existe entre les efforts d’adaptation que le manager doit

concéder et l’organisation des entreprises comme nous l’avons vu.

Le graphe ci-dessous reprend ce résultat :

Figure 13 : Evolution de l’effort d’adaptation du manager

L’utilisation d’instruments prévisionnels dans la gestion de projets pose un problème

important pour les managers. En effet, « prévoir » est une notion qui à priori ne

semble pas bien être intégrée par les employés marocaines. Faire des prévisions

semble être confondu avec « Prédire l’avenir ». Ce qui est totalement impensable

pour un musulman. En effet, pour un musulman, l’avenir n’appartient qu’a Dieu et Lui

Seul peut dire de quoi l’avenir sera fait.

Dans le moment où les managers mettent en place un programme d’amélioration de

la productivité, ils doivent accordent la plus grande importance à la manière de

stimulation des employés pour atteindre les standards de performance. L’incitation

financière est certes importante mais l’«effort émotionnel » ou « l’effort relationnel »

est également déterminant dans le succès des projets comme nous le montre les

deux graphiques précédents.

Effort d’adaptation du manager

Faible Fort

Organisation de l’entreprise

Fort

Faible

Page 111: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

107

Discussion

Une recherche ne peut a elle seule faire le tour d’un domaine d’investigation. Un

certain nombre de question se posent dans cette recherche : Comment éviter la

paralysie induite par un regard trop analytique ? Comment éviter les biais possibles

du à la méthodologie utilisé pour la collecte des données ? Comment être sûr de la

sincérité des réponses ?

Toutes ces questions fixent des limites aux conclusions de cette recherche. Il est

certain que l’échantillon étudié devra être plus large pour asseoir la légitimité de ces

travaux de façon plus tranchante. De plus, ce travail est un regard de l’intérieur fait

un Marocain travaillant au Maroc. Il est possible que la même étude menée par une

personne étrangère du pays pourrait conduire à des résultats différents même si

l’étude D’Iribarne se rapproche quelque peu de mes conclusions.

Enfin, ce travail est une thèse professionnelle ayant pour objectif de comprendre les

mécanismes sous-jacents aux théories managériales et confronter les méthodes

classiques aux réalités du terrain en vue d’améliorer les pratiques des managers, ce

n’est pas un travail de recherche fondamentale. De plus, mes charges

professionnelles à plein temps ne me laissent en moyenne que 20% de mon temps

pour mes travaux de recherche et c’est probablement l’une des limites les plus

importantes de cette étude.

Page 112: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

108

Conclusion Les pratiques organisationnelles, les actions managériales, les outils et les indicateurs de

mesure de la productivité et de la performance ne sont transférables dans une autre culture

que si certaines variables, qui sont présentes dans la culture d’origine, résonnent dans la

culture réceptrice. Certains éléments de littérature et de recherches antérieures ont

clairement identifiés la diversité culturelle comme un élément déterminant dans la

performance des organisations. Cependant, il semblerait qu’un élément particulier soit

commun à toutes les cultures. Il s’agit de la place de l’individu dans l’organisation. Si

l’organisation scientifique du travail a permis une forte industrialisation et une création de

richesse, elle a considéré l’individu comme un simple outil de travail. Les défenseurs de

l’école des ressources humaines sont venues nous dire dans les années 40 que la

performance et la productivité dépendait plus de l’individu que des machines. Sainsaulieu

nous rappelle à cet effet dans son livre « Identité au travail » de 1977 que l’individu est un

être social, sentimental et que la culture ne s’arrête pas aux porte de l’usine. La

mondialisation des années 90 et 2000 et tous ses dérivés (globalisation, standardisation) a

essayé à sa manière de dépersonnaliser les relations au travail en créant des systèmes de

gestion standardisés. Les entreprises multinationales exportaient leur façon de faire, souvent

sans aucun effort d’adaptation. Il s’en est suivi des échecs retentissants. Le management

comparé est venu à son tour, dès le début des années 80, replacé l’individu au centre des

organisations pour mieux nous signaler que la performance et la productivité ne sont pas

qu’affaire de technologie, de processus et d’incitation financière.

Les éléments de cette étude tendent à identifier le même effet. Les bonnes pratiques de

gestion ne sont pas transférables sans un effort d’adaptation dépendamment de la culture

locale mais également de l’entreprise dans laquelle le manager évolue.

L’environnement culturel des PME marocaines est certes fortement imprégné des pratiques

managériales occidentales, des milliers de marocains partent étudier en Occident et

retournent pour exercer au Maroc. Des centaines d’entreprises internationales pratiquent

dans le pays et ce depuis plus de 40 ans. Cependant, il serait imprudent de croire que

l’environnement culturel évolue lui aussi dans le même sens que les valeurs managériales

classiques et qu’un simple « copier-coller » des méthodes managériales universelles suffirait

à assurer le succès. On pourrait certainement aujourd’hui répondre à Fayol (1918) qui

affirma que « si l’on pouvait faire abstraction du facteur humain, il serait assez facile de

constituer un organisme social » que « si l’on pouvait faire abstraction de nos convictions

dogmatiques sur le facteur humain, il serait assez facile de constituer une organisation

socialement et économiquement performante ». Autrement dit, réduire l’individu à un simple

levier d’ajustement ou à une simple courroie de transmission pour améliorer la performance

aurait paradoxalement l’effet inverse que celui recherché.

Page 113: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

109

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WEBER M (1905), L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, parution initiale en

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WOODWARD, J., Industrial organization: Theory and practice, Londen 1965

Page 116: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

Définitions des variables selon les indicateurs utilisés dans le questionnaire

Variable Indicateurs Autorité du manager sur ses équipes è 4 questions

28. Vous avez eu de la difficulté à faire exécuter des tâches

24. Certains membres de votre équipe considèrent qu’ils n’ont pas de compte

à vous rendre

10. L’entreprise a tendance à imposer les décisions de la hiérarchie

supérieure

Organisation administrative è 6 questions

2. L’entreprise possède des départements et services clairement définis

6. L’entreprise possède des définitions de poste claires et précises

11. L’entreprise a un processus clair et précis pour le recrutement

14. L’entreprise fait respecter les procédures mises en place

17. L’entreprise organise de façon régulière des réunions de travail

20. L’entreprise considère la qualité comme une priorité Autonomie du manager è 3 questions

8. L’entreprise vous permet de sélectionner les membres de votre équipe

31. Vous avez toute la latitude pour refuser un recrutement dans votre équipe

29. Vous dirigez votre équipe sans l’intervention de vos supérieurs

hiérarchiques Communication è 6 questions

23. Vous avez trouvé des difficultés à communiquer avec vos équipes

7. Vous arrivez à partager avec vos équipes les plans d’affaire et les objectifs

de vos projets

15. Vous utilisez le dialecte local pour expliquer vos méthodes de gestion

18. Vous arrivez à traduire de façon claire les concepts de management

19. Vous pensez que les membres de votre équipe communiquent avec

vous pour tout problème professionnel ?

Compréhension des Techniques managériales par les membres de l’équipe è 3 questions

32. Vous arrivez à appliquer les méthodes de management apprises au cours

de votre formation

33. Votre équipe comprend facilement les méthodes de management que vous

voulez utiliser

40. Vous pensez que vos équipes comprennent clairement des notions de

performance (productivité, optimisation, ..)

Adaptation è 9 questions

è Changement Comportement

34. Vous cherchez à adapter vos méthodes de gestion aux contraintes de vos

équipes

43. Vous avez du changer de comportement envers vos équipes pour en

améliorer la performance

è Changement Communication

37. Vous facilitez la communication avec vos équipes

42. Pensez-vous que cette adaptation s’est faite sur le plan du langage que

vous utilisez ?

Page 117: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

è Changement rapprochement

38. Vous essayez de vous rapprocher des membres de vos équipes les moins

favorables à vos méthodes de gestion

44. Vous essayer de partager plus de temps avec vos équipes

è Utilisation de références religieuses

35. Vous utilisez des références religieuses pour faire comprendre à vos

équipes des notions de management

47. Les membres de votre équipe sont plus attentifs lorsque vous présentez

un concept managérial et que vous y associez un devoir religieux ?

è Utilisation de l’embauche des jeunes

46. Les jeunes membres de votre équipe appliquent plus facilement sur le

terrain les méthodes que vous voulez appliquer ?

45. Y a t’il d’autres aspects dans la manière dont vous gérez vos équipes qui

ont pu à un moment ou un autre améliorer la performance dans la réalisation

de vos projets ?

Si oui, laquelle ?

Performance des équipes sous la direction du manager è 6 questions

41. Jugeriez-vous que vous avez amélioré la performance de vos équipes en

adaptant vos méthodes de gestion

36. Jugeriez-vous que vos équipes appliquent vos méthodes de management

plus facilement ?

« 49. La performance de votre service s’est améliorée depuis que vous en avez

la responsabilité ? Si oui, comment l’avez-vous mesurez ? »

52. Utilisez-vous un outil de mesure qui vous permet de mesurer le

rendement de vos équipes ? Si Oui, lequel ?

50. Les membres de votre équipe utilisent des outils de pilotage (tableaux de

bord, reporting, mémoire de projet, ..)?

53. Les membres de votre équipe se conforment aux exigences de productivité

Page 118: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

1

Management et cultureManagement et culture

Ressources inattendues et paradoxes Ressources inattendues et paradoxes dans le management des organisations : dans le management des organisations :

Cas des PME marocainesCas des PME marocaines

Travaux de recherches dans le cadre de l�Executive DBA Université Paris Daupine � London School of Economics

Thesis présentée par Rachid Alami

La problématiqueLa problématique

èè Pourquoi les méthodes classiques de managementPourquoi les méthodes classiques de managementèè ProductivitéProductivitéèè Concepts organisationnelsConcepts organisationnelsèè PlanificationPlanificationèè OptimisationOptimisationèè Logique rationnelleLogique rationnelle

Ne donnent pas les résultats prévus ?èè PerformancePerformanceèè CommunicationCommunicationèè RésultatsRésultats

ONE BEST WAY

Page 119: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

2

La problématiqueLa problématique

Améliorer la productivité

Mise à niveau des compétencesPiste infructueuse

La gestion comparéeLa gestion comparée

Source : HEC Montréal - Dupuis 2007

Quelles sont les conditions de

la gestion de projet ?

è Les évènements(pilotage, budget, risques, reporting)

è Les hommes (matrice de responsabilité, RBS)

è Le temps (« time ismoney » - échéances)

è Les tâches(systématisation, découpage, WBS)

Ces conditions ne sont pas toujours présentes au Maroc

FORTE VOLONTE DE CONTROLE

Page 120: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

3

motivation par objectifs ?

L’employé cherche à s’accomplir et à grandir dans

le travail

Le patron accorde sa confiance à l’employé

Bonne planification des tâches annuelles

Ces conditions ne sont pas toutes présentes en Indonésie !

Quelles sont les conditions de la

La gestion comparéeLa gestion comparée

Source : HEC Montréal - Dupuis 2007

La gestion comparéeLa gestion comparée

leadership participatif(coaching) ?

Faible distance hiérarchique entre patron

et employé

Forte autonomisation de l’employé

Excellente circulation de l’information

Ces conditions ne sont pas toutes présentes en Russie !

Quelles sont les conditions du

Source : HEC Montréal - Dupuis 2007

Page 121: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

4

La question de rechercheLa question de recherche

èè Comment les Comment les managersmanagers, formés aux, formés aux concepts concepts classiques du management occidentalclassiques du management occidental, arrivent, arrivent--ils à ils à gérer les défisgérer les défis managériaux dans un managériaux dans un contexte contexte culturel DIFFERENTculturel DIFFERENT ??

QUELS SONT LES RESSORTS A ACTIONNER POUR QUELS SONT LES RESSORTS A ACTIONNER POUR AMELIORER LA PERFORMANCE ?AMELIORER LA PERFORMANCE ?

1. Diversité culturelle1. Diversité culturelle

2. Valeurs managériales occidentales2. Valeurs managériales occidentales

Culture et managementCulture et managementFacteur critique : Depuis quand ?

• Les ressorts de l’action humaine• Les motivations qui se cachent derrière toute action individuelle• La lutte de pouvoir• Les croyances, traditions, religions, relations aux éléments

Encastrement culturel dans les organisationsDurkheim, Weber Mayo, Maslow, McGregor,Herzberg, Lewin, Likert, Crozier,Sainsaulieu, Hofstede, D’Iribarne

L’organisation et la gestion optimale des ressources (inputs) dans le but de maximiser la rentabilité (outputs)

Productivité, OST, bureaucratie, administrationSmith, Weber, Taylor, Gilbert, Gantt, Fayol, Emerson, Follett, Barnard, Simon

Page 122: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

5

Culture et managementCulture et managementMoyen-âge en Occident

Autocratie, féodalisme, poids de l’église, souffrance, privilèges, centralisationdomination des seigneurs, la vie est régie par ordre, liberté limitéePaysan en tant qu’outil de production

Modernité XVII, XVIII- Remise en question des valeurs religieuses - Liberté et démocratie- Progrès- Révolution scientifique

Révolution industrielle XIX, XX- Capital- Organisation du travail - Application de la science àl’industrie- Fordisme

Nouvel ordre social, XX, XXI- Puissance des organisations- Mondialisation - Chocs culturels

SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS

SOCIOLOGIE

Auguste Conte, Marx, Durkheim, Weber, Pareto

Etzioni, Crozier, Sainsaulieu, Hofstede, D’Iribarne, Chanlat

Évolution au MarocÉvolution au MarocCulture traditionnelle et tribale

Le Maroc du 18eme et 19eme siècle

ProtectoratForme d’introduction

de la modernité(source extérieure)Influence multiple

20eme siècle

Introduction des méthodes de management occidentales issues en partie des écoles américainesArrivée d’entreprises françaises et américaines (P&G,Unilever,…)

MondialisationConfrontation entre

logique d’efficacité et réalité marocaine

(différences culturelles - Transition)

Culture et management

au Maroc

Page 123: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

6

Evolution des théories

I. 1900-1930Organiser

pour produireefficacement

IV. 1970 - ...Mobiliser

par la culture

II. 1930-1960Motiver l�individu

Dynamique d�équipe

III. 1960-1970Adapter la structure

Contingence

Une approcherationnnelle

Uneapprochesociale

L’or

gani

satio

n- s

yst è

me

ferm

é

L’organisation- systèm

eouvert

« L’Allemand vit en Allemagnele Parisien vit à Paris,le Turc vit en Turquie, mais l’Anglais vit chez lui »

Goring (1909).

« Si l’on pouvait faire abstraction du facteur humain, il serait assez facile de constituer un organisme social »

Fayol (1918)

Universalité vs diversitéUniversalité vs diversité

?" Culture is more often a source of conflict thanof synergy. Cultural differences are a nuisance atbest and often a disaster."

Geert Hofstede.

Page 124: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

7

La gestion comparéeLa gestion comparéeLe modèle de gestion comparée : Issu du relativisme culturel, le courant de gestion comparée (Hofstede, 1976) vise à décrire les pratiques de gestion et les comportements au travail propres à chaque pays

CollectivismeCollectivismeMasculinité

Féminité

§POINTS FORTS§Simple et quantifié§Étude très large§183 questions, 50 pays et 3 régions, 5

langues§120 000 quest.

(73 267 exploitables)

§POINTS FAIBLES§Méthodologie contestable§Résultats vieux de 30 ans§Nombreux pays absents

Individualisme

Contrôle del’incertitude

Distancehiérarchique

CollectivismeCollectivismeIndividualisme

Dans les cultures collectivistes, le groupe est plus important que l’individu –Dépendance du groupe

La gestion comparéeLa gestion comparée

PourcentageCollectivisme

MarocEtats-Unis

Source : Dupuis (2005)

Page 125: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

8

Distancehiérarchique

La distance hiérarchique ou « power distance » est définit comme « le niveau auquel les individus membres d’institutions ou d’organisations d’un pays sont prêt à accepter la distribution inégalitaire du pouvoir » (Hofstede, 2001) 4L’INÉGALITÉ entre les individus est-elle perçue

comme naturelle ?

Forte distance hiérarchiqueFaible distance hiérarchique

NON OUI

Scandinavie

États-Unis

FranceEspagne

SénégalMaroc Pérou

ThaïlandeRussie

Allemagne Mexique

Japon

ChineCanadaQuébec

1. Autorité statutaire2. Autorité morale

Maroc

La gestion comparéeLa gestion comparée

États-unis

Source : Dupuis (2005)

Les Les éétudes sur les styles de leadershiptudes sur les styles de leadership

RRéésultat : le comportement dsultat : le comportement d’’un leader varie selon deux dimensionsun leader varie selon deux dimensions

un style orientun style orientéé vers la tâche VS un style orientvers la tâche VS un style orientéé vers lvers l’’employemployéé

OrientOrientééversvers

ll’’individuindividu

++

--++-- OrientOrientéé vers la tâchevers la tâche

OrientOrientéé vers lvers l’’individuindividu

LaisserLaisser--fairefaire

OrientOrientéé vers lvers l’’individu et la tâcheindividu et la tâche

OrientOrientéé vers la productionvers la production

Résultats de recherche de l’Université d’OHIO

Page 126: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

9

Contrôle del’incertitude

4La société tolère-t-elle l’INCERTITUDE et les COMPORTEMENTS DÉVIANTS ?

OUI NON

Scandinavie

États-Unis

France

Espagne SénégalMaroc

PérouThaïlande

Russie

AllemagneMexique

Japon

ChineCanada Québec

Principes généraux

Diversité, faible contrôle

Règles précises et nombreuses

Homogénéité fort contrôle

Maroc

La gestion comparéeLa gestion comparée

Etats-Unis

Source : Dupuis (2005)

MasculinitéFéminité

4Les RÔLES entre hommes et femmes sont-ils INTERCHANGEABLES ?

Scandinavie

États-Unis

France

Espagne Sénégal

MarocPérou

Thaïlande

Russie

AllemagneMexique

Japon

ChineCanadaQuébec

OUI NON

Mobilité des rôles, valeurs féminines dominantes

= •

Rôles traditionnels, valeurs masculines dominantes

Maroc

La gestion comparéeLa gestion comparée

Etats-Unis

Source : Dupuis (2005)

Page 127: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

10

NON OUI

Scandinavie

États-Unis

France

Sénégal

MarocPérou

Thaïlande

RussieAllemagne

Mexique JaponChine

Canada Québec

Factuelle, froide Contextuelle, chaude

Espagne

4La communication est-elle RICHE et AMBIGUË ?

ABC

0010101

CommunicationLa gestion comparéeLa gestion comparée

Maroc

Etats-Unis

Source : Dupuis (2005)

4Le temps est-il PRÉCIEUX, tourné vers le FUTUR ?

Scandinavie

États-Unis

France

Sénégal

MarocPérou

Thaïlande

Russie

Allemagne Mexique

Japon

ChineCanada Québec

OUI NON

Le temps c’est de l’argent, planification, échéance, une

chose à la foisTemps élastique, un jour à la

fois, destin, tradition garante du futur

$$ $ $ ?

Espagne

Relation au tempsRelation au tempsLa gestion comparéeLa gestion comparée

MarocEtats-Unis

Source : Dupuis (2005)

Page 128: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

11

Culture et managementCulture et management

CollectivismeCollectivisme

MasculinitéFéminité

Individualisme

Contrôle del’incertitude

Distancehiérarchique

Pays scandinaves �Canada � États-unis -France

Ségénal � Pérou �Thaïlande � Japon -Mexique

Pays scandinaves �Canada � États-unis -France

Ségénal � Pérou �Russie � Japon -Chine

Pays scandinaves �Canada � États-unis

Ségénal � Pérou �Japon - France

France � Canada �États-unis

Ségénal � Chine �Pérou � Japon

Les pays les plus éloignésLes pays les plus proches

Culture et managementCulture et management

Communication ambiguë

Relation au temps

États-unis � Pays scandinaves - Canada

Ségénal � Chine �Pérou � Thaïlande

Allemagne � États-unis � Pays scandinaves - Canada

Sénégal � Chine �Thaïlande - Espagne

Les pays les plus éloignésLes pays les plus proches

Les managers formés aux valeurs managériales occidentales : è Impersonnalité de la fonction (orienté vers la tâche)

è Mesurabilité du travail (indicateurs de performance)

è Optimisation des tâches (ingénierie des processus)

è Contractualisation de la relation (vs individualisation de la relation)

è Compétition individuelle (le « winner »)

risquent certainement de se confronter à des difficultés de mise en oeuvre

Page 129: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

12

Islam et managementIslam et managementTravail

Communication

Responsabilité

Incitatifs

- Exploiter les capacités et les talents reçus (Don de Dieu) [1]- Esprit communautaire, solidarité [2]- Très fortes relations sociales- La réussite par l’entraide sociale et la bienfaisance [3]

- Égalité des opportunités- La réussite par le mérite- Individualisme

Valeurs islamiquesApproche managériale classique

Orale è Système de communication informel. Règles non écrites, donc difficilement réfutables

Écrite è Règles écrites et donc applicables et réfutables

- Plaire à Dieu en travaillant fort [4]- Plaire à ses parents [5]- Utiliser rationnellement les ressources- Recherche de la connaissance [6]- Rémunération et épargne [7]

- Rémunération- Satisfaction au travail- Avancement professionnel- Réussite matérielle

Individuelle et collectiveIndividuelle

A priori, on devrait donc retrouver ces valeurs encastrées dans le quotidien des entreprises et des pratiques d’affaires

Conclusion

La gestion comparéeLa gestion comparée

Les pratiques organisationnelles, Les actions managériales,

Les comportements interpersonnels,

peuvent–ils être transférés dans une autre culture ?

Si oui, comment ?

è Quel style de management adopté ?

è Quel style de pouvoir appliqué ?

è Quel style de leadership?

èComment tirer le meilleur partie de la richesse culturelle ?

è Comment fixer les critères d’embauche ?

COMMENT DEPASSER OU CONTOURNER LES DIFFERENCES CULTURELLES ?

Page 130: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

13

Islam et managementIslam et management

è La culture est une dimension déterminante dans la performance des organisations dans un contexte religieux intense

è Les différences culturelles sont compatibles avec les concepts modernes de management s’il y a résonance et rapprochement des valeurs

è Il n’y a pas de « one best way » pour appréhender les différences culturelles

Faits et expérience du terrainFaits et expérience du terrain

6 années d’expérience au Maroc

Difficultés rencontrées au Maroc :

è Communication

è Application des concepts de management appris dans les écoles et universités occidentales (Canada, France)

è Gestion d’équipe et de performance

6 autres années en Europe et au Canada

Entreprise familialeMultinationaleEnseignant

Fond d’investissementBanqueCentre de recherche

Page 131: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

14

Les difficultés rencontréesLes difficultés rencontréesLa problématique du linguocentrisme (Geoffroy, 2002,Davel, Dupuis et Chanlat, 2008): Maîtrise de la langue

Signification des mots tels que :

• Rendement

• Productivité

• Succès « Al-Taraquî » ou « Al Najah »

• Qualité « Al Gawda » ou « Al Itquân »

• Temps « Al Tarhib »

• Réalisation « Bien sûr nous le pouvons » « Bien sûr, nous le pouvons…..si Dieu le veut ».

Décalage entre :

èApproche scientifique, rationnelle et orientée vers l’optimisation des ressources et la maximisation du retour sur investissement

è Insensibilité aux enjeux économiques et managériaux des organisations

Management interculturel et performance

T H E M E

S U J E T Amélioration de la performance

des PME marocaines

P R O B L E M E Inadéquation des méthodes de

management occidentales

QUESTION

Quels sont les ressorts à utiliser pour rendre intelligible les

concepts de management ?

Décalage

Univers de sens différents

Page 132: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

15

HYPOTHESE PRINCIPALE 1 : qu’un nombre important de managers marocains et étrangers formés dans les écoles de management occidentales font face aux mêmes difficultés d’adaptation culturelle

HYPOTHESE PRINCIPALE 2 : qu’il existe des ressources inattendues dans la performance des PME marocaines en dehors des schémas classiques d’amélioration de la performance appris dans les écoles de managements françaises et américaines.

(Mace,1989 ; Lefrançois, 1991)

Les hypothèsesLes hypothèses

Les solutionsConnexion des concepts managériaux avec des valeurs religieuses

L�image de jeunes

Rapprochement des équipes

Adaptation de la communication

Adaptation comportementale

PERFORMANCE DES EQUIPES

IMPACT

Les hypothèsesLes hypothèses

Page 133: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

16

Caractéristiques et contexte de l’objet de recherche

-PME marocaines représentent plus de 80% des entreprises-Très peu d’accès aux connaissances occidentales de management-Grand Nombre de managers étrangers et marocains formés àl’étranger qui exercent au Maroc ?????-Politiques de modernisation tout azimut lancées par le gouvernement marocain pour améliorer les pratiques de gestion-Ampleurs des prêts européens (programme MEDA, PAAP, Agence française de développement …) d’aide aux entreprises marocaines pour améliorer qualité, productivité et niveau de formation professionnelle

Quelle est l’ampleur de l’objet ?

Source : Jeannin (2000)

Perspective théoriquePerspective théorique

Managers marocains ou étrangers formés dans les écoles de mangement occidentales et exerçant dans des PME marocaines

Quels sont les protagonistes et la population étudiée ?

Expliquer le phénomène de distorsion culturelle dans une optique non moralisatrice ou philosophique. Réduire le décalage culturel des managers immigrés et améliorer leur rendement

Quelle est la signification sociale de l’objet ?

-Largement étudié depuis l’école des ressources humaines jusqu’aux études les plus récentes sur le management interculturel-N’apportent que des réponses au « pourquoi » mais peu de réponses au « comment »

Quelle est la situation dans le champ des connaissances ?

Caractéristiques et contexte de l’objet de recherche

Source : Jeannin (2000)

Perspective théoriquePerspective théorique

Page 134: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

17

è Recueil d’informations : Méthodologie quantitative et qualitative

è Positionnement épistémologique : Constructiviste

è Population cible (Potvin, 1990) échantillon représentatif d’entreprises marocaines où des managers ayant fait des études à l’étranger.

è La zone géographique étudiée est limitée aux villes de Casablanca et Rabat.

Approche paradigmatique

Limites de la recherche

è Étude exploratoire è Nombre de cas limités

è Un nombre assez restreint d’entreprise (échantillon de 60)

è Limite de temps (Executive DBA) – En moyenne 25% du temps consacré à la recherche (responsabilités professionnelles) è Impossibilitéd’interviewé 60 personnes è Questionnaire dirigé profitant de réunion d’association de professionnels (présentation du questionnaire et explication des questions) Limite du EDBA

Perspective théoriquePerspective théorique

è La méthode de recueil de données choisie est celle du questionnaire auto-administré (Lefrançois, 1992) accompagné d’un entretien semi-dirigé

Taux de réponse faible (50%)Réponse partielle (60%)Qui a répondu au questionnaireRéponses de convenance

Facile d�utilisation, pratique par son coté neutre (le chercheur n�intervient pas de façon active sauf sur demande pour éclaircissement de certaines questions), il permet une diffusion large, rapide et peu coûteuse � Cible plus large

InconvénientsAvantages

Fenneteau (2002)

Questionnaire auto-administré

Perspective théoriquePerspective théorique

Page 135: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

18

è Les types de questions utilisées dans le questionnaire sont des questions fermées (90%) et des questions ouverte

è Simplifications réductrices è La nature des mots utilisés et l�ordre de présentations des modalités peuvent exercer une influence sur les réponsesè Pas d�indication sur la façon dont la question a été compriseè Peut exclure des aspects souvent importants que le chercheur ignore ou qu�il a négligé d�intégrer dans son choix de réponses.

è La collecte d�information est simple et fiable è Les informations ainsi obtenues sont standardisées, facilement codifiables et statistiquement comparablesè Plus de facilité à répondre sans effort supplémentaire de mémorisationè Intimité et sincérité

InconvénientsAvantages

Fenneteau (2002)

Perspective théoriquePerspective théorique

è La méthode de recueil de données choisie est celle du questionnaire auto-administré (Lefrançois, 1992) accompagné d’un entretien semi-dirigé

InconvénientsAvantages

Fenneteau (2002)

Entretien semi-dirigé

Perspective théoriquePerspective théorique

Page 136: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

19

L’enquête : è Les managers interrogés vivent-ils les mêmes difficultés / différences culturelles ?

è La nature des entreprises est-elle un facteur qui favorise l’adaptation des managers aux différences culturelles ?

èLe manager : Qu’a fait le dirigeant face à ces difficultés de RH ?

è Les solutions : Quelles sont celles qui ont été implantées ? Quels sont les résultats obtenues ? Quel est l’impact sur la performance des équipes ?

Résumé de la démarche de recherche

La démarcheLa démarche

Les managers interrogés vivent-ils les mêmes difficultés / différences culturelles ?

Difficultés

100,0Total

100,01,7Pas du tout d’accord

98,315,0Pas d’accord

83,316,7Ni d’accord ni pas d’accord

66,750,0D’accord

16,716,7Tout à fait d’accord

% cumulé%

Vous avez rencontré des difficultés à faire exécuter des tâches

Votre équipe comprend facilement les méthodes de management que vous voulez utiliser

100,0Total

100,06,7Pas du tout d’accord

93,36,7Pas d’accord

86,730,0Ni d’accord ni pas d’accord

56,746,7D’accord

10,010,0Tout à fait d’accord

% Cumulé%

Page 137: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

20

Les managers interrogés vivent-ils les mêmes difficultés / différences culturelles ?

Vous arrivez à appliquer les méthodes de management apprises au cours de votre formation

100,0Total

100,013,3Pas du tout d’accord

86,736,7Pas d’accord

50,026,7Ni d’accord ni pas d’accord

23,316,7D’accord

6,76,7Tout à fait d’accord

% cumulé%

Difficultés

Vous avez trouvé des difficultés à communiquer avec vos équipes

100,0Total

100,03,3Pas du tout d’accord

96,710,0Pas d’accord

86,716,7Ni d’accord ni pas d’accord

70,051,7D’accord

18,318,3Tout à fait d’accord

% cumuléPercent

Les résultats de la recherche :

N Moyenne Déviation standard

Pbrl_Autorite Service+Informatique+R&D+Conseil 41 3,7805 ,93574

Textile+Travaux Publics+Industrie 19 3,2632 ,83945

Total 60 3,6167 ,93140Prbl_Com Service+Informatique+R&D

+Conseil 41 3,8780 ,55656

Textile+Travaux Publics+Industrie 19 3,3158 1,05686

Total 60 3,7000 ,78762

Difficultés

Problèmes d’autorité et de communication sont plus présents dans les secteurs des services

Page 138: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

21

Les managers interrogés vivent-ils les mêmes difficultés / différences culturelles ?

Vous dirigez votre équipe sans l’intervention de la hiérarchie supérieure

100,0Total

100,06,7Pas du tout d’accord

93,313,3Pas d’accord

80,030,0Ni d’accord ni pas d’accord

50,030,0D’accord

20,020,0Tout à fait d’accord

% Cumulé%

Difficultés

Communication (langage, traduction)

Autorité (crédibilité)

Autonomie (hiérarchie)

Autorité(hiérarchie)

Confiance

Respect Vous pensez que les membres de votre équipe ont confiance en vous

100,0Total

100,016,7Ni d’accord, ni pas d’accord

83,330,0D’accord

53,353,3Tout à fait d’accord

% cumulé%

Votre équipe vous montre le respect auquel vous pensez avoir droit

100,0Total

100,040,0D’accord

60,060,0Tout à fait d’accord

% cumulé%

Les managers interrogés vivent-ils les mêmes difficultés / différences culturelles ?

Page 139: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

22

Les résultats des travaux de recherche

Correlations

1 ,314*,015

60 60,314* 1,015

60 60

Pearson CorrelationSig. (2-tailed)NPearson CorrelationSig. (2-tailed)N

Prbl_Manager

Secteur d'acticité

Prbl_ManagerSecteurd'acticité

Correlation is significant at the 0.05 level (2-tailed).*.

les difficultés du manager sont liés au secteur d’activité de l’entreprise

N Moyenne

Déviation standard

Service+Informatique+R&D+Conseil (main d’œuvre qualifiée)

41 2,3767 ,82323

Textile+Travaux Publics+Industrie (main d’oeuvre peu qualifiée)

19 2,9942 1,00443

Total 60 2,5722 ,92258

Les résultats des travaux de recherche

les difficultés du manager sont fortement corrélées avec les entreprises mal organisées

les problèmes d’organisations et les difficultés du manager évoluent dans le même sens

Page 140: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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L’adaptation du manager

Adaptation de la communication et du rapprochement vers les équipes sont les deux facteurs explicatifs de l’amélioration de

la performance des équipes

Adapat_Com 551 0,03Adapat_Rapproch 251 0,58

Communication

Pensez-vous que cette adaptation s’est faite sur le plan du langage (dialecte) que vous utilisez ?

Vous essayez de vous rapprocher des membres de vos équipes les moins favorables à vos méthodes de gestion

L’adaptation du manager

Rapprochement

Vous essayer de partager plus de temps avec vos équipes

Vous facilitez la communication avec vos équipes

Page 141: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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Les résultats de la recherche :

Correlations

1 -,288*,026

60 60-,288* 1,026

60 60

Pearson CorrelationSig. (2-tailed)NPearson CorrelationSig. (2-tailed)N

Perf_Outil_Mgt

Perf_Global

Perf_Outil_Mgt Perf_Global

Correlation is significant at the 0.05 level (2-tailed).*.

Coefficients a

,018 ,381 ,047 ,963,101 ,098 ,171 1,033 ,307

-,075 ,129 -,112 -,578 ,566,029 ,067 ,073 ,442 ,661,434 ,218 ,329 1,992 ,053,104 ,187 ,098 ,558 ,580

(Constant)Adapt_ComportAdapt_ComAdapt_RapprochAdapt_ReligAdapt_Jeunes

Model1

B Std. Error

UnstandardizedCoefficients

Beta

StandardizedCoefficients

t Sig.

Dependent Variable: Perf_Outil_Mgta.

Le facteur religieux explique l’utilisation des outils de management mais les deux performances sont négativement corrélées ??

Les résultats de la recherche :

Adaptation Vous facilitez la communication avec vos équipes

Frequency Percent Valid Percent Cumulative

Percent 1,00 5 41,7 41,7 41,7 2,00 6 50,0 50,0 91,7 3,00 1 8,3 8,3 100,0

Valid

Total 12 100,0 100,0

Vous essayez de vous rapprocher des membres de vos équipes les moins favorables à vos méthodes de

gestion

Frequency Percent Valid Percent Cumulative

Percent 1,00 2 16,7 16,7 16,7 2,00 8 66,7 66,7 83,3 4,00 2 16,7 16,7 100,0

Valid

Total 12 100,0 100,0

Page 142: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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La gestion comparéeLa gestion comparéeLes travaux de P. DLes travaux de P. D’’IribarneIribarne sur lsur l’’adaptation culturelleadaptation culturelle

SGS-Thomson au Maroc à Casablanca.

è Excellentes performances de l'usine

è Élucider les conditions de ce succès au regard son rendement exceptionnel.

L'élément principal qui ressort de cette étude est l'instauration de la démarche TQM (Total Quality Management) affectée à toutes les

composantes de l'usine.

Oui, mais……

è TQM existe ailleurs sans donné des résultats aussi spectaculaires

è TQM orienté fortement optimisation du profit (orienté production)

TransparenceRétention d�information et manipulation

Responsabilisation et partage des objectifs

Climat de peur et de méfiance � Contrôle « policier »

Légitimité par l�action et non plus par la position ou l�appartenance

Discours non suivi d�effets (légitimité basée sur la position et l�appartenance non pas sur les compétences)

Directeur fait la queue comme tout le monde et mange à la cantine avec tous les salariés �Sentiment d�égalité et d�équité

Relation distancée et fort exercice de l�autorité

Remise en question des dirigeants et de leur rôle

Rigidité des cadres (pouvoir d�influence et de contrôle)

APRES LE TQMAVANT LE TQM

Pour l’auteur, Le TQM a résonné avec certaines valeurs culturelles religieuses comme : L’équité, l’égalité, la transparence, la compétence, la responsabilisation, l’exploitation des talents reçus par Dieu

La gestion comparéeLa gestion comparée

Page 143: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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La gestion comparéeLa gestion comparée

Rétention d�information et manipulation � Aucune initiative n�est permis

Climat de peur et de méfiance �Contrôle « policier »

Discours non suivi d�effets (légitimité basée sur la position et l�appartenance non pas sur les compétences)

Relation distancée et fort exercice de l�autorité

Rigidité des cadres (pouvoir d�influence et de contrôle)

AVANT LE TQM

Forte distance hiérarchique

Distribution inégalitaire du pouvoir

Contrôle de l’incertitude

Comportement déviant inacceptable

CHARACTERISTIQUE TYPIQUES DES PAYS A

FORTE DISTANCE HIERARCHIQUE

La gestion comparéeLa gestion comparée

Transparence

Responsabilisation et partage des objectifs

Légitimité par l�action et non plus par la position ou l�appartenance

Directeur fait la queue comme tout le monde et mange à la cantine avec tous les salariés �Sentiment d�égalité et d�équité

Remise en question des dirigeants et de leur rôle

APRES LE TQMRéduction de la distance

hiérarchique

Légitimité du pouvoir

Contrôle de l’incertitude

Comportement déviant acceptable

CHARACTERISTIQUE TYPIQUES DES PAYS A

FAIBLE DISTANCE HIERARCIQUE

Page 144: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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4L’INÉGALITÉ entre les individus est-elle perçue comme naturelle ?

Forte distance hiérarchiqueFaible distance hiérarchique

NON OUI

Scandinavie

États-Unis

FranceEspagne

SénégalMaroc Pérou

ThaïlandeRussie

Allemagne Mexique

Japon

ChineCanadaQuébec

1. Autorité statutaire2. Autorité morale

Maroc

La gestion comparéeLa gestion comparée

Source : Dupuis (2005)

Les résultats de la recherche :

Effort d’adaptation du manager

Faible Fort

Organisation de l’entreprise

Fort

Faible

Évolution de l’effort d’adaptation du manager

Page 145: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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Les résultats de la recherche :

Effort relationnel du manager

Faible Fort

Qualification de la main d’oeuvre

Fort

Faible

Évolution de l’effort relationnel du manager

Conclusion de la recherche terrain

è Les concepts religieux ne sont que modérément utilisé comme incitation à l’amélioration de la performance et de la productivité

è L’adaptation des méthodes de gestion par les managers a sensiblement amélioré la performance des équipes

è L’incitation matérielle reste la seule véritable variable qui influe la productivité dans les entreprises

è L’utilisation d’outils d’évaluation de la performance des équipes n’est que peu répandue rendant difficile la mesure des résultas et les concordance avec les objectifs

è Les managers ayant été formés dans les écoles occidentales rencontrent les mêmes difficultés dans la gestion de leur équipe

Page 146: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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èUne recherche ne peut a elle seule faire le tour d’un domaine d’investigation

è Comment éviter la paralysie induite par un regard trop analytique ?

èConcordance statistique ne veut pas dire forcément relation de causalité

è L’échantillon étudié devra être plus large pour asseoir la légitimitéde ces travaux de façon plus tranchante

èLes biais possibles du à la méthodologie utilisé pour la collecte des données

è Un regard de l’intérieur fait par un marocain travailler au Maroc (cependant il y a beaucoup d’étrangers parmi les répondants)

Discussion des résultats

Conclusion générale

è Si les concepts religieux ont certainement influencé le succès du TQM dans le cas étudié par D’Iribarne, je constate que le religieux n’est que très peu solliciter

è Il s’agirai selon moi plus d’un aspect éthique : Redonner l’estime aux travailleurs, les replacer au centre de l’organisation

èQu’est qu’un bon chef au Maroc?

• Celui qui se compote de façon équitable

• Qui respect ses subordonnés

• Qui se rapproche et qui s’intéresse à ses équipes

• Parle le même langage

Page 147: EDBA Paris-Dauphine Thesis Alami Aroussi -27 fevrier 2009

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Conclusion générale

è Catégorisation de Hofstede et les données du terrain (IDH)è Culture religieuse intense mais ne constitue pas un levier de motivation ni un ressort d�actionè Problèmes d�autorité dépendent de la nature de l�entrepriseè Utilisation des outils de contrôle de gestion ne garantie pas l�efficacité des processusè Confiance et respect ne garantissent nullement l�application des règles de travail

è Embauche des jeunesè Une gestion « rapprochée » des ressources humainesè Le succès ne s�explique pas uniquement par les méthodes de gestion ou la compétitivité de l�entreprise

ParadoxesRessources inattendues

Ressources inattendues et paradoxes dans le management Ressources inattendues et paradoxes dans le management des organisations : des organisations :

Cas des PME marocainesCas des PME marocaines

Apports managériaux de la recherche

è Oui, les différences culturelles sont un des facteurs déterminants dans la performance des organisations (D’Iribarne, Hofstede)

è Le relationnel est essentiel dans la recherche de la performance (rapprochement)

è Traduction des concepts selon l’univers linguistique local (langage intelligible) – Il ne suffit pas de former les individus, il faut leur « parler » mais il faut également qu’ils vous « parlent »

è Le référencement à des concepts religieux dans un pays à culture religieuse intense n’est pas garant de la compréhension ou de l’amélioration de la performance – Qu’est ce qui donne du sens à la parole?

è L’élément essentiel qui semble le plus contribuer à améliorer la performance est « redonner l’estime aux individus »

è Les difficultés culturelles ont tendance à se démultipliées dans les organisation mal structurées

è La performance est plurifactorielle

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Ouverture de la recherche

èLe Maroc est un pays influencé par 3 courants culturels bien différents :

• France (Centre) Zone étudiée

• Espagne (Nord)

• Berbères (sud)

Champs d’étude plus large – Ouverture de la recherche vers les

autres contextes culturelles

è Récolter les avis de l’autre partie : « Les employés », pour comparer les résultats (perception des managers)

è Il serait intéressant de comparer avec d’autres pays à culture et influences similaires (Algérie, Tunisie)

è Comprendre les mécanismes de réflexion « ce qui a du sens » -Pourquoi les individus n’appliquent pas les règles

Culture et managementCulture et management

Optimum de la performance

Valeurs managériales universelles

Spécificités culturelles locales

« Apprentissage» des concepts « Culturalisation » des concepts

Serait-il possible de concilier la diversité des cultures avec l’universalité des valeurs managériales ?