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Editorial Décembre 2006 14 la lettre des marais atlantiques el un sentiment impressionniste, le battement d’aile d’un papillon bleu azuré survolant l’ouest londonien fait écho à l’effort significatif de la province chinoise du Shandong riveraine de la mer Jaune en faveur de la protection des zones humides. Au moment où le musée d’Orsay célèbre à Paris la mémoire du peintre « nabi » Maurice Denis, ces aplats d’informations colorées dessinent un tableau environnementaliste riche de sens. Ainsi, le retour de l’Adonis bleu, 40 ans après sa disparition de la région anglaise des Costwolds, signe-t-il l’im- portance du maintien de l’activité d’élevage dans les prairies pour assurer leur bon fonctionnement écologique. La réapparition de ce lépidoptère est en effet le résultat de la recréation de zones de pâturages pour bovins favorisant le retour d’insectes. La surprise est moindre suite au colloque national sur l’éle- vage en prairies naturelles humides qui a démontré de manière magistrale et pédagogique en septembre dernier à Fontenay-Le-Comte le lien étroit associant élevage et biodiversité. En réponse au cri d’alarme des éleveurs sur le devenir de leur profession, le ministre de l’Agriculture et de la Pêche, Dominique Busse- reau, a annoncé la création, à titre expérimental, d’une mesure spéciale « prairie humide » pour soutenir l’élevage dans les marais de l’Ouest. Le ministre a pré- cisé par courrier « qu’un bilan sera effectué la seconde année et si la mesure remporte le succès escompté, elle sera étendue aux autres régions de France ». D’ici là, nous ne pouvons qu’exprimer la parfaite solidarité du Forum des Marais Atlantiques avec les autres territoires concernés qui restent dans l’attente d’une mesure nationale équitable reconnaissant la spécificité des zones humides. Si tous les marais sont des zones humides, la réciproque n’est pas vraie et la richesse de ces milieux tient avant tout à leur diversité au plan national. C’est l’enjeu majeur du projet de création d'une Indemnité Spéciale Zones Humides (ISZH) que d’instaurer une mesure constituée d’un socle national permettant des ajustements territoriaux rendant compte des spécificités locales. Parce que les zones humides sont au cœur des politiques de territoires, nous nourris- sons l’espoir que l’ISZH puisse prendre corps dans le cadre d’un nouveau plan d’action gouvernemental en faveur des zones humides pour la définition du- quel le Forum des Marais Atlantiques est d’ores et déjà mobilisé. Véritables infrastructures naturelles rendant de précieux services à la société, tant au plan socio-économique qu’écologique ou paysager, les zones humides jouent un rôle citoyen insuffisamment reconnu. La province du Shandong dans l’est de la Chine vient d’informer par voie de presse qu’elle est fière de posséder 1,78 millions d’hectares de zones humides, soit 11,4% de son territoire, et qu’elle va continuer à investir significativement dans leur protection. Depuis les rives du fleuve Jaune où vivent des millions de chinois, et à l’heure du réchauffement cli- matique, l’observation du retour en Europe de l’Adonis bleu rappelle que, dans le monde grec, le culte à Adonis symbolisait de manière poétique la fragilité de la destinée humaine. Yves LE MAÎTRE, Directeur du Forum des Marais Atlantiques Le retour d’Adonis > Pages 2 à 5 n Le Forum en action • Une nouvelle mesure expérimentale pour soutenir l’élevage en prairies humides • Revalorisation de l’identité des marais salants de l’Atlantique Equal : combattre les discriminations, réduire les inégalités pour une meilleure cohésion sociale > Pages 6 à 7 n Acteurs en marais 6 ème Conseil des Marais bilan de cinq ans d'action de la mission "pôle-relais" Haut : Marais salants d'Atlantique. Bas : Claire ostréicole en Seudre > T > Pages 8 à 11 n Brèves des Marais • Actu juridique • Les dessous du marais

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Page 1: Editorial Le retour d’Adonis T - Forum zones humides · 1997-03-06  · cisé par courrier « qu’un bilan sera effectué la seconde année et si la mesure remporte le succès

Editorial

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la lettre des marais atlantiques

el un sentiment impressionniste, le battement d’aile d’un papillon bleu azuré survolant l’ouest londonien fait écho à l’effort significatif de la province chinoise du Shandong riveraine de la mer Jaune en faveur de la protection des zones humides. Au moment où le musée d’Orsay célèbre à Paris la mémoire du peintre « nabi » Maurice Denis, ces aplats d’informations colorées dessinent un tableau environnementaliste riche de sens. Ainsi, le retour de l’Adonis bleu, 40 ans après sa disparition de la région anglaise des Costwolds, signe-t-il l’im-portance du maintien de l’activité d’élevage dans les prairies pour assurer leur bon fonctionnement écologique. La réapparition de ce lépidoptère est en effet le résultat de la recréation de zones de pâturages pour bovins favorisant le retour d’insectes. La surprise est moindre suite au colloque national sur l’éle-vage en prairies naturelles humides qui a démontré de manière magistrale et pédagogique en septembre dernier à Fontenay-Le-Comte le lien étroit associant élevage et biodiversité. En réponse au cri d’alarme des éleveurs sur le devenir de leur profession, le ministre de l’Agriculture et de la Pêche, Dominique Busse-reau, a annoncé la création, à titre expérimental, d’une mesure spéciale « prairie humide » pour soutenir l’élevage dans les marais de l’Ouest. Le ministre a pré-cisé par courrier « qu’un bilan sera effectué la seconde année et si la mesure remporte le succès escompté, elle sera étendue aux autres régions de France ». D’ici là, nous ne pouvons qu’exprimer la parfaite solidarité du Forum des Marais Atlantiques avec les autres territoires concernés qui restent dans l’attente d’une mesure nationale équitable reconnaissant la spécificité des zones humides.

Si tous les marais sont des zones humides, la réciproque n’est pas vraie et la richesse de ces milieux tient avant tout à leur diversité au plan national. C’est l’enjeu majeur du projet de création d'une Indemnité Spéciale Zones Humides (ISZH) que d’instaurer une mesure constituée d’un socle national permettant des ajustements territoriaux rendant compte des spécificités locales. Parce que les zones humides sont au cœur des politiques de territoires, nous nourris-sons l’espoir que l’ISZH puisse prendre corps dans le cadre d’un nouveau plan d’action gouvernemental en faveur des zones humides pour la définition du-quel le Forum des Marais Atlantiques est d’ores et déjà mobilisé. Véritables infrastructures naturelles rendant de précieux services à la société, tant au plan socio-économique qu’écologique ou paysager, les zones humides jouent un rôle citoyen insuffisamment reconnu. La province du Shandong dans l’est de la Chine vient d’informer par voie de presse qu’elle est fière de posséder 1,78 millions d’hectares de zones humides, soit 11,4% de son territoire, et qu’elle va continuer à investir significativement dans leur protection. Depuis les rives du fleuve Jaune où vivent des millions de chinois, et à l’heure du réchauffement cli-matique, l’observation du retour en Europe de l’Adonis bleu rappelle que, dans le monde grec, le culte à Adonis symbolisait de manière poétique la fragilité de la destinée humaine.

Yves LE MAÎTRE, Directeur du Forum des Marais Atlantiques

Le retour d’Adonis> Pages 2 à 5n Le Forum en action • Une nouvelle mesure

expérimentale pour soutenir l’élevage en prairies humides

• Revalorisation de l’identité des marais salants de l’Atlantique

• Equal : combattre les discriminations, réduire les inégalités pour une meilleure cohésion sociale

> Pages 6 à 7n Acteurs en marais • 6 ème Conseil des Marais

bilan de cinq ans d'action de la mission "pôle-relais"

Haut : Marais salants d'Atlantique.Bas : Claire ostréicole en Seudre

>

T

> Pages 8 à 11n Brèves des Marais • Actu juridique • Les dessous du marais

Page 2: Editorial Le retour d’Adonis T - Forum zones humides · 1997-03-06  · cisé par courrier « qu’un bilan sera effectué la seconde année et si la mesure remporte le succès

Photo : PNR du Cotentin-Bessin.>

Le Forum en action

L’élevage en prairies humidesUne nouvelle mesure expérimentale pour soutenir

e 23 novembre dernier, près de 200 éleveurs sont venus à Saint-Sauveur d’Aunis afin de prendre connaissance de la prochaine mesure expé-rimentale « prairie humide », destinée à soutenir l’élevage dans les

marais de Poitou-Charentes et des Pays de la Loire. Organisée de façon conjointe par le Député-Maire de Chatelaillon, M. Jean-Louis LEONARD et le Président de la Chambre d’Agriculture de Charente-Maritime, M. Jacques MAROTEIX, cette rencontre a permis aux représentants du Ministère de l’Agriculture d’apporter des précisions quant à la mise en œuvre de ce dispositif.La mesure prairie humide (MPH) s’inscrit dans le nouveau programme de déve-loppement rural qui s’étend de 2007 à 2013. Cela permet d’envisager un dispositif stable pour cette période, rompant ainsi avec la succession des contrats observés ces 5 dernières années. Cette aide spécifique reste dans le cadre des mesures agri-environnementales (MAE) : l’exploitant s’engagera dans un contrat de 5 ans où figure le respect d’un cahier des charges et une rémunération de 150 €/ha.

Le cahier des charges de la MPH reprend globalement le premier niveau des engagements agri-environnementaux mis en œuvre ces dernières années.

Il s’articule autour de 6 points : enregistrement des interventions mécaniques et des pratiques d’élevage (calendrier de pâturage, date de fauche, date et niveau de fertilisation) ;

interdiction de labour des prairies ; interdiction de nivellement et de drainage ; limitation de la fertilisation à 60 U d’azote ; interdiction de traitements phytosanitaires, sauf de façon localisée ; ajustement de la pression de pâturage (taux de chargement moyen annuel à respecter) OU retard de fauche au 1er juin .

Les modalités concernant les taux de chargement ou la date de fauche seront déterminées localement.L’une des grandes avancées réside dans la détermination, chaque année, d’une enveloppe spécifique en fonction des besoins, évaluée en tenant compte des contrats agri-environnementaux arrivant à échéance. Pour l’année 2007, ce sont près de 8 millions d’euros qui seront nécessaires pour prendre le relais des contrats qui se termineront. Ce mode de calcul permet de prévoir les enveloppes nécessaires. Le risque de « dérapage budgétaire » étant limité (les surfaces bénéficiant de contrats depuis 1991 sont connues), le Ministère de l’Agriculture préconise de ne pas appliquer de plafond pour cette mesure. Toutefois, comme pour l’ensemble des MAE, la décision de plafonnement pourra être prise au niveau local.

De nombreuses questions ont porté sur l’articulation entre la MPH et les autres mesures présentes sur ces surfaces. Le tableau ci-dessous reprend les points présentés lors de la rencontre.

L

>TexTes eT Tableau : sébastien Mériau, Chambre d’Agriculture de Charente-Maritime.>ConTaCT au foruM : Gilbert Miossec, [email protected]

Articulation avec les autres

MAE territorialisées

Le programme de développement rural hexagonal prévoit la possi-bilité de proposer deux mesures au maximum par type de couvert. Aussi, pour une même parcelle, les exploitants auront le choix entre la MPH (mesure de «base» à 150 €/ha) et une mesure «biologique» (mesure reprenant les plus forts engagements des MAE, et d’une rémunération de 300 €/ha).

Cumul avec l’ICHN

La MPH sera cumulable avec l’ICHN «zone défavorisée simple» (d’un montant de 49 €/ha). Par contre, elle ne sera pas cumulable avec la majoration de l’ICHN établie pour le Marais Poitevin.

Cumul avec EAE,

CTE ou CAD

Un exploitant bénéficiant déjà d’un contrat EAE, CTE ou CAD pourra conserver son contrat jusqu’à sa fin. Dans le cas de parcelles nou-vellement acquises, l’exploitant aura le choix entre la résiliation de son ancien contrat pour souscrire un contrat MPH sur l’ensemble de ses surfaces, ou la signature d’un contrat MPH complémentaire sur les nouvelles parcelles à contractualiser.

Bonus NATURA 2000

La possibilité d’un bonus NATURA 2000 n’a pas été retenue dans le Programme de Développement Rural Hexagonal pour la période 2007-2013. Aussi la majoration de 20% n’interviendra plus sur l’en-semble des MAE pour cette nouvelle période (MPH y compris).

En conclusion, les représentants du Ministère de l’Agriculture ont souligné la volonté du Ministre de l’Agriculture de mettre en place un dispositif simple, avec des enveloppes adaptées, et facilement mobilisable. Ainsi, la demande de contrat devrait se faire en même temps que la déclaration PAC en avril de chaque année. Cela implique une date unique pour la prise d’effet des contrats (le 1er mai).

liste des abréviations MAE : Mesure Agri-EnvironnementaleEAE : Engagement Agri-EnvironnementalCTE : Contrat Territorial d’ExploitationCAD : Contrat d’Agriculture Durable

MPH : Mesure « Prairie Humide »ICHN : Indemnité Compensatrice au Handicap Naturel

Perspectives de contractualisation en Charente-MaritimeLa mise en œuvre de la MPH devrait se faire de façon progressive au fur et à mesure des contrats arrivant à échéance. Le graphique ci-contre présente les surfaces dont les contrats se terminent pour chaque année. Il faut prévoir également la contractualisation de nouvelles surfaces qui avaient été écartées des dispo-sitifs précédents, soit pour des raisons de conditions d’accès ou de plafonnement. Les trois prochaines années devraient donc voir de larges surfaces souscrites dans le nouveau cadre de la MPH. En 2012, ce sont près de 25 000 ha qui devraient être concernés à l’échelle des zones humides de Charente-Maritime.

2007 2008 2009 2010 2011 2012

150

30532797

6926

8540

2114

Surface des contrats arrivant à échéance chaque année (ha) MAE "marais" en Charente-Maritime

Source : DDAF 17

2 “forum” n°14 Décembre 2006

Photo : Philippe Deschamps>

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“forum” n°14 Décembre 2006 3

Revalorisation de l’identité des marais salants de l’Atlantique

Récupération et promotion des potentiels biologiques, économiques et culturels des zones humides côtières

Si l'année 2005 était centrée sur l’état des lieux des sites et l’harmonisation des objectifs entre les différents partenaires (cf. « forum » n°11), 2006 a donné la priorité aux opérations de terrain et à la production de dossiers d’analyse. Pour le Forum des Marais Atlantiques, responsable de l’action 5c (SIG « marais salés ») la principale action de terrain a été menée sur le site pilote l’île de Ré en partenariat avec de nombreux acteurs locaux (dont la Communauté de communes de l’île de Ré, la Coopérative des Sauniers de l’île de Ré, la Chambre d’Agriculture de la Charente-Maritime, la DDE, l’EID, l’UNIMA, l’AEMA et l’Université de La Rochelle) afin de collecter les données nécessaires à la constitution du référentiel « marais » et de développer des outils d’exploitation de ces données.Lors du Conseil des Marais qui s’est tenu dans les locaux du Forum des Marais Atlantiques à Rochefort le 14 décembre, Monsieur François Patsouris, Conseiller Régional Poitou-Charentes en charge des dossiers européens, a présenté les orientations du prochain programme (Interreg IV) et la volonté de la Région Poitou-Charentes de s’y impliquer fortement, notamment dans les projets sur la thématique « EAU ».

Seul point noir au tableau, le décret reconnaissant le caractère alimentaire du sel marin artisanal de l’Atlantique, annoncé depuis plus d’un an, est toujours retardé. Suite à la présentation de ce dossier par la Fédération des Producteurs de Sel de l’Atlantique, une motion a été soumise à l’assemblée qui l’a validée à l’unanimité (cf. encadré ci-dessous).

> Par conséquent, il apparaît indispensable que le projet de décret, préparé conjointement entre les professionnels et les services de l’Etat, soit transmis sans délai supplémentaire au Conseil d’Etat afin de pouvoir mettre un terme à cette anomalie administrative et don-ner aux professionnels les moyens règlementaires indispensables à la pérennité de leurs exploitations et à leur nécessaire développement économique.

Le comité d’orientation du projet Interreg « SAL » qui s’est tenu à Aveiro (Portugal) en novembre 2006 a été l’occasion de faire le point sur l’avance-ment des nombreuses actions de ce programme (cf. « forum » n°9) puisqu’il entre, en 2007, dans sa phase finale.

>ConTaCT au foruM :Philippe boudeau - [email protected]

Photo : FMA >

L’activité salicole traditionnelle contribue à l’entretien et à la valorisation des ma-rais maritimes de la façade atlantique qui, pour la plupart d’origine anthropique, sont reconnus pour leurs richesses biologiques et paysagères exceptionnelles, tant au ni-veau européen (NATURA 2000, Directive Cadre sur l’Eau) qu’au niveau international (RAMSAR). Conformément à ses engagements internationaux, la France se doit donc de soutenir et d’encourager les activités traditionnelles qui s’y développent en harmo-nie avec la préservation de leur patrimoine naturel, ce qui est le cas de la saliculture.

Pourtant, depuis la publication de l’arrêté du 28 mai 1997 (JO du 03-06-97), l’activité salicole doit faire face à une situation qui nuit gravement à son développement. En effet, ce texte, publié à la demande des industriels du sel, sans avoir consulté les producteurs de sel marin artisanal, fixe à 97 % le taux minimal de chlorure de sodium pour définir l’alimentarité du sel alors que ce pourcentage est souvent inférieur pour le sel non raffiné. Il a exclu de fait, le sel marin artisanal récolté manuellement par les producteurs de l’île de Ré, de l’île de Noirmoutier et de Guérande. En effet, la spéci-ficité du sel récolté manuellement par rapport au sel industriel est justement sa ri-chesse en chlorures (magnésium, potassium, calcium), sa moindre teneur en chlorure de sodium et sa richesse en oligo-éléments. Aujourd’hui, l’application rigoureuse de cet arrêté devrait interdire la vente des sels de Guérande, de Ré et de Noirmoutier ! Cette situation anormale et non justifiée crée une situation dommageable sur le plan concurrentiel dont cherchent à profiter les industriels du sel français.

La Fédération des Coopératives de Producteurs de sel marin de l’Atlantique a engagé des démarches depuis 2001 pour obtenir la modification de cet arrêté. Elle demande de porter la teneur minimale de NaCl à 94 %. Cette demande a été approuvée scientifi-quement et l’AFSSA a émis un avis favorable en juillet 2002 confirmé en 2006.

La « non alimentarité réglementaire » du sel marin de l’Atlantique rend impossible en l’état la protection de ce produit, par les signes de qualité et d’origine français et européens (Certification de Conformité Produit, Label Rouge, Indication Géogra-phique Protégée et Attestation de Spécificité) - ceux-ci étant réservés aux produits alimentaires et agricoles. De ce fait les producteurs de sel de l’Ouest ont plusieurs dossiers de demande de cahier des charges en attente depuis plusieurs années.

Malgré ces demandes répétées, l’avis favorable de l’AFSSA et la notification faite à la commission européenne en juillet 2003, la légitime demande des producteurs est bloquée depuis 5 années.

Pourtant, Monsieur Thierry BRETON, Ministre de l’Economie, des Finances et de l’In-dustrie, par un courrier en date du 7 septembre 2005 ainsi que Monsieur Dominique BUSSEREAU, Ministre de l’Agriculture et de la Pêche, par différents courriers (en date des 23, 27 septembre 2005, puis du 4 mai 2006), s’étaient engagés, compte tenu de l’avis favorable de l’AFSSA et de la Commission européenne, à ce que les procédures nécessaires soient effectuées dans les meilleurs délais pour que le projet de décret puisse être rapidement transmis au Conseil d’Etat afin de permettre sa publication durant l’été 2006.Le Conseil des Marais, réuni en assemblée à Rochefort le 14 décembre 2006, demande au Ministre de l’Agriculture d’intervenir dans les meilleurs délais pour que l’Etat puisse mettre un terme à une situation de plus en plus préoccupante pour le devenir de la profession salicole. Rappelons si besoin était que depuis la Loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006, « le gouvernement s’attache à soutenir le maintien des activités traditionnelles et économiques dans les zones humides qui contribuent à l’entretien des milieux sensibles, notamment les prairies naturelles et les marais salants ».

Motion validée à l’unanimité par l’assemblée du Conseil des Marais du 14 décembre 2006MoTIon en faVeur De la reConnaIssanCe Du CaraCTere alIMenTaIre Du sel MarIn arTIsanal

OFFICIEL

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>ConTaCT au foruM : Gilbert Miossec - [email protected]

Les objectifsSous l’intitulé « Transfert de savoir-faire et responsabilité sociale des entreprises », le programme equal – Transares, auquel le Forum des Marais Atlantiques collabore , a pour objectifs :

d’organiser la transmission des savoir-faire entre les générations,

de renforcer les organisations locales agricoles et les réseaux,

d’accompagner l’intégration de nouveaux professionnels, l’apprentissage des responsabilités, les projets communautaires et sociétaires,

d’expérimenter des solutions collectives pour soutenir des projets innovants,

de développer une pratique d’échanges et une vision transnatio-nale de la responsabilité sociale des entreprises.

Cette action s’inscrit dans la mesure « F » du Programme d’Initiative Communautaire (PIC) Equal financé par le Fonds Social Européen (F.S.E.), sur les thèmes de l’égalité des chances et de l’emploi avec pour objectif de com-battre les discrimination, réduire les inégalités pour une meilleure cohésion sociale.

Le contexte du projet equaL et La nature du probLème traitéLa période actuelle de mutation profonde des mécanismes économiques comme des repères sociaux, affaiblit les entreprises rurales de petite taille, (exploitations agricoles, GAEC, etc.) et par là-même les territoires et l’em-ploi. L’isolement de ces entreprises en milieu rural, leur insuffisance de taille pour conduire les nécessaires adaptations, leur dépendance décisionnaire, le développement de l’individualisme ou le sentiment d’impuissance vis-à-vis de la mécanique de la globalisation, sont autant de facteurs qui accentuent le découragement, accroît le ressentiment d’« assistanat », renforce le recul de l’emploi et du dynamisme local.

Cela induit une recomposition économique, spatiale et réglementaire, sociale et culturelle qui concerne, à de multiples niveaux, les entreprises, les actifs et les territoires :

au plan de la production agricole, la baisse tendantielle des cours sur les grands marchés et l’inégale répartition de la valeur ajoutée en faveur de l’aval se traduit par des revenus faibles ou incertains, dépendant fortement des aides publiques (par exemple en viande bovine, les aides directes sont en moyenne supérieures au revenu) ;

du point de vue de la société, l’activité agricole est plutôt mal connue ; son potentiel d’emploi est sous-estimé, ainsi que la diversité des com-pétences recherchées (productions multiples, fonction commerciale ou admnistrative, …) ;

au niveau géographique, la décentralisation et l’accélération de l’intercommunalité conduisent à un changement d’échelle et à une redistribution des compétences entre la commune, la communauté de communes et les autres niveaux d’organisation territoriale ;

au stade de la famille, le nombre d’épouses d’agriculteurs tra-vaillant en dehors de l’exploitation a des effets directs et indirects sur les formes sociétaires, sur les besoins de protection sociale et de remplacement en cas d’absence, notamment liée à un arrêt de travail et probablement aussi sur les aspirations des femmes agricultrices ;

de plus, sur les aspects de réglementations sociales, sanitaires, environnementales, les très petites entreprises rurales doivent inventer des nouvelles réponses, économiquement et humaine-ment viables, pour “être aux normes” et prendre en compte les attentes de la société. Les savoir-faire, les techniques et les inves-tissements à mettre en œuvre sont limitants pour une entreprise isolée ; les démarches collectives peuvent permettre de dépasser la difficulté.

eqUAl : combattre les discriminations, réduire les inégalités pour une meilleure cohésion sociale

Le Forum en action

Photo : Thierry Delottier - "Petits marais de Blaye">

Les chantiers d u F o r u m

4 “forum” n°14 Décembre 2006Photo : Philippe Deschamps>

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Dans un contexte économique et social où se développent le consumérisme, l’in-dividualisme et la dépendance aux aides publiques, les organisations collectives de proximité peuvent apporter des réponses plus économes, plus autonomes et durables. Le renforcement des organisations locales et des réseaux contribue à l’émergence de solutions innovantes dans différents domaines (compétitivité, maîtrise des procédures d’adaptation) et apporte des éléments de réponse (taille critique, consolidation des savoir-faire, « rassurance » psychologique, …).

Les bénéficiaires du programme Equal - Transares sont les actifs des très petites entreprises rurales et leurs groupements, exploitants et salariés, hommes et femmes.

les projets doivent s’inscrire dans les problématiques suivantes :

démarche collective centrée sur le transfert de compétences et d’intégration de nouveaux arrivants,

consolidation de l’emploi, prise en compte des dimensions de “responsabilité écono-mique et sociale de l’entreprise” et/ou d’égalité des chances sociales entre hommes et femmes et entre générations,

lien au territoire (contribution au dévelopement local), production de méthodes (solutions adéquates aux problèmes posés),

originalité, innovation et transférabilité des résultats de l’expérience envisagée.

Dans le cadre d’Equal, le Forum des Marais Atlantiques a ini-tié au printemps 2005, sur l’une des rives de l’estuaire de la Gironde, une démarchedont l’objet est « le renforcement des synergies entre les acteurs locaux d’une zone humide estuarienne autour d’un projet qui vise à restaurer l’identité profession-nelle et sociale des éleveurs de ce territoire en y développant une production de terroir ».

Cinq éleveurs d’ovins, valorisant les prairies des marais bordiers de la rive droite de l’estuaire de la Gironde, entre Blaye et Royan, se sont ainsi regroupés en une association « Les moutonniers de l’estuaire », dans l’objectif d’atteindre une masse critique et d’élaborer un projet partagé. Ils ont engagé une démar-che d’obtention d’une marque collective, « Agneau de l’estuaire », obtenue fin 2005. Avec le soutien des collectivités locales (Départements de Charente-Maritime et Gironde), des EPCI (Etablissements Publics de Coopération Intercommunale), du Syndicat Mixte de Développement Durable de l’Estuaire de la Gironde (SMIDDEST), des Chambres Consulaires et de l’ensemble des structures intervenant sur le territoire (Conservatoire du littoral, Fédérations de chasse, associations syndicales de propriétaires, associations de protection de la nature, bouchers, restaurateurs et autres acteurs économiques), cette opération s’inscrit dans une démarche de consolidation de l’activité d’élevage et de l’emploi, et, souhaitons-le, d’intégration de nouveaux arrivants afin de contribuer au développement local des territoires de zones humides.

La Chambre d’Agriculture, la Fédération des CUMA, la Fédération des asso-ciations de remplacement du département de la Loire-Atlantique ainsi que le Centre régional Pays de la Loire du Conservatoire des Arts et Métiers et le Forum des Marais Atlantiques sont les cinq partenaires du programme Equal - Transares.

“forum” n°14 Décembre 2006 5

>ConTaCT au foruM : Gilbert Miossec - [email protected]

L'expo "Portraits de prairies" est disponible en prêt

Marais de Mortagne-sur-Gironde : terrain du Conservatoire du Littoral exploité par des éleveurs

>

> ConTaCT au foruM :[email protected]

Photo : Philippe Deschamps>

Page 6: Editorial Le retour d’Adonis T - Forum zones humides · 1997-03-06  · cisé par courrier « qu’un bilan sera effectué la seconde année et si la mesure remporte le succès

acteurs en marais

Photo : FMA>

6ème Conseil des Marais : Bilan de cinq ans d’action de la mission « pôle-relais » en faveur des zones humides littorales des façades Atlantique, Manche et Mer du Nord.

e 6ème Conseil des Marais s’est tenu à rochefort le 14 décembre 2006 et a une nouvelle fois fait salle comble au forum

des Marais atlantiques, témoignant ainsi de l’inté-rêt soutenu porté à ces espaces originaux que sont les zones humides. l’accent a été mis en première partie de réunion sur le bilan de l’action du forum des Marais atlantiques dans le cadre de sa mission « pôle-relais » en faveur des zones humides litto-rales. Ce fut l’occasion de rappeler le contexte du Plan national d’action en faveur des Zones Humides (PnaZH) dans lequel s’inscrit cette mission d’etat.

Genèse de La mission pôLe-reLais : Le pnaZHEn 1991, face au constat d’une régression rapide des zones humides, l’Etat confie au préfet Paul BERNARD le soin de conduire une mission d’éva-luation des politiques publiques en matière de zones humides. Son rapport, publié en 1994, met en évidence :• la régression continue des zones humides en

France ;• les incidences des différentes législations et aides

publiques de l’Etat et des collectivités sur la dispa-rition de ces zones ; on peut citer à titre d’exemple les effets de différents aménagements : drainage, remembrement, aménagements hydroélectriques, extractions de granulats, boisements, remblaie-ments, gros travaux d’infrastructures, recalibrage des cours d’eau…

Le 22 mars 1995, le Conseil des ministres adopte un Plan National d’Action gouvernemental de sau-vegarde et de reconquête des Zones Humides : le PNAZH. Ce plan décennal (1995-2005), coordonné par Paul BARON, se fixe 4 objectifs :• arrêter la dégradation des zones humides en

général ;• garantir leur préservation durable par une bonne

gestion ;• favoriser la restauration des zones humides

importantes ;• reconquérir les sites d’intérêt national.

Les 4 axes d’intervention du pnaZH• Inventorier les zones humides et renforcer les

outils de suivi et d’évaluation : il s’agit de mieux caractériser les zones humides, espaces terra-qués, faits de terre et d’eau qui restent trop souvent mal identifiés. Deux éléments vont y participer : le lancement en 1997 d’un Programme National de Recherche sur les Zones Humides

(PNRZH) associant sur 3 ans plusieurs centaines de chercheurs, et la création au sein de l’IFEN d’un Observatoire National des Zones Humides (ONZH) qui éditera un atlas.

• Assurer la cohérence des politiques publiques par des actions de :

– correction des législations et réglementations défavorables aux zones humides,

– modification de la fiscalité sur le foncier, – utilisation des mesures agri-environnementa-

les pour sauvegarder les zones humides, – respect de la fonctionnalité naturelle des

zones humides dans les aménagements, – prise en compte des zones humides dans les

documents d'urbanisme.

• Engager la reconquête des zones humides : dans le cadre du réseau NATURA 2000 (directives européennes oiseaux et Habitats), plusieurs zones humides ont été classées en zones de protection spéciale (ZPS) ; depuis 1995, une vingtaine de sites ont été inscrits au titre de la convention de RAMSAR relative aux zones humides d’importance internationale. Citons pour ce qui concerne les marais littoraux : le golfe du Morbihan, le lac de Grand-lieu, la baie de Somme, la baie du Mont-Saint-Michel, ou plus près de nous le Fier d’Ars.

• Lancer un programme d’information et de sensibi-lisation grâce notamment à la création de 5 pôles-relais nationaux destinés à relayer le plan d’action gouvernemental vers les gestionnaires de terrain et, vice-versa, à faire remonter les besoins locaux auprès du national.

Au moment où le Forum des Marais Atlantiques évolue en syndicat mixte après deux années de gestation passées au sein du Conservatoire du Littoral, l’Etat lui confie en 2000 une mission de préfiguration du pôle-relais pour les marais lit-toraux de l’Atlantique, de la Manche et de la mer du Nord. Les objectifs du pôle relais se déclinent en 3 axes :• recueil et mise à disposition des connaissances ;• promotion d’une gestion durable par une mutua-

lisation des bonnes pratiques ;• évaluation des résultats et collaboration aux

mesures de niveau national du PNAZH.Pour mener à bien ces missions, le Forum des Marais Atlantiques s’est doté de deux outils struc-turants : un centre de ressources documentai-res spécialisées et un système d’informations « acteurs-actions ».

un centre de documentation spéciaLisé avec pLus de 3 500 documents référencés

Actuellement, le fonds documentaire se compose de 3 500 documents qui sont référencés dans une base de données et indexés avec des mots clés thématiques et géographiques. Une veille per-manente sur des sites Internet spécialisés permet de collecter de la littérature grise téléchargeable. L’évolution du Système d’Information a permis de rendre accessible à distance cette base de données sur le site Internet du Forum des Marais Atlantiques à l’adresse suivante : http://www.forum-marais-atl.com/documentation_presentation.htmlLes demandes ne cessent d’augmenter auprès du centre de documentation, tant pour des consulta-tions sur place (sur rendez-vous) que des prêts à domicile.

Pour les seules données externes, elles ont doublé entre 2002 et 2005, passant de 83 dossiers traités à 155. Parmi les questions les plus souvent posées, on peut citer : la lutte contre les espèces nuisibles en marais, l’agriculture en marais, les syndicats de marais, la documentation générale sur un marais précis.

Un fonds documentaire dynamiqueLes sujets d’actualité, tel que l’élevage en marais par exemple, font l’objet d’un traitement spécifique avec la réalisation d’un dossier approfondi compre-nant : synthèse documentaire et réglementaire, textes de référence, liens utiles, références de documents disponibles.

Le fonds documentaire est consultable en dynami-que sur le site Internet du Forum où sont accessi-bles de nombreux dossiers thématiques tels que : NATURA 2000, les espèces envahissantes, MAE

“forum” n°14 Décembre 20066

L

Contact au Forum :[email protected]

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Après une phase-test menée de 2001 à 2002 sur quelques marais, un véritable Système de Gestion de Bases de Données est vite apparu nécessaire. Interconnecté avec le site Internet du Forum des Marais Atlantiques, il permet les interrogations dynamiques en ligne et facilite l’ensemble des circuits de mise à jour tant en interne que vis à vis des partenaires extérieurs. Le système permet également d’effectuer des recherches par mots-clés et termes géographi-ques.

Il s’agit d’un système d’Information et non de gestion locale, qui permet d’établir des fiches d’informations sur les acteurs en marais et répondre ainsi à la question “Qui fait quoi ?” dans les zones humides littorales. Son objectif est de mettre en évidence la diversité et le mode de fonctionnement des marais en vue d’une reconnaissance et d’une mutualisation des bon-nes pratiques de gestion.

Au final, cela se traduit par la réalisation d’an-nuaires de gestionnaires de l’eau référençant plus de 250 gestionnaires de marais littoraux de la Gironde à la baie de Somme. Un travail spéci-fique a été entrepris au niveau des marais acquis et gérés à des fins environnementales par des acteurs publics. L’opération « Marais Acquis » menée depuis 2003 a ainsi permis d’inventorier 300 sites couvrant plus de 36 000 hectares des Pyrénées-Atlantiques au Nord-Pas-de-Calais.

Le bilan en chiffres est éloquent puisque c’est plus de 2 200 structures concernées par les marais qui ont été inventoriées depuis l’an 2000, ce qui concerne 4 300 personnes, et le travail d’identification est loin d’être achevé.

• concLusion • Il apparaît clairement, et la récente Loi relative au Développement des Terri-toires Ruraux (Loi n°2005-157 du 23 février 2005), présentée par le Ministre de l’Agricul-ture le confirme, qu’il ne s’agit plus aujourd’hui « d’assécher les marais » (les articles du Code Rural y faisant référence ont été abrogés) mais bien de s’organiser pour la « préservation, la res-tauration et la valorisation des zones humides ».

Le « désir d’avenir » des zones humides est d’ailleurs clairement exprimé dans le Code de l’Environnement qui s’est enrichi d’un article novateur par son exigence d’intégration des caractéristiques biologiques, sociales et écono-miques pour le devenir des marais :

L. 211-1-1 « La préservation et la gestion durable des zones humides […] sont d’intérêt général. Les politiques nationales, régionales et locales d’aménagement des territoires ruraux et l’attri-bution des aides publiques tiennent compte des difficultés particulières de conservation, d’exploi-tation et de gestion durable des zones humides et de leur contribution aux politiques de préservation de la diversité biologique, du paysage, de ges-tion des ressources en eau et de prévention des inondations notamment par une agriculture, un pastoralisme, une sylviculture, une chasse, une pêche et un tourisme adaptés. A cet effet, l’Etat et ses établissements publics, les régions, les départements, les communes et leurs groupements veillent, chacun dans son domaine de compétence, à la cohérence des diverses politiques publiques sur ces territoires. Pour l’application de l’article L. 212-l, l’Etat veille à la prise en compte de cette cohérence dans les schémas d’aménagement et de gestion des eaux ».

Fin 1999, le bilan du PNAZH montre, certes, des avancées notables mais inégales selon les axes, et le besoin apparaît-il de susciter et d’accompagner les initiatives locales en faveur de la gestion durable des zones humides tout en poursuivant les mesures nationales qui demeurent nécessaires. Ainsi voit le jour au sein du MATE l’idée de créer des pôles-relais afin de démultiplier et de relayer le plan d’action vers les gestionnaires de terrain.

5 pôles-relais ont été créés pour chacun des types de zones humides suivants :

• Lagunes méditerranéennes (Tour du Valat), Station Biologique de la Tour du Valat> ConTaCT : Valérie-Claude sourrIbes - Tél : 04 90 97 29 56 - [email protected]

www.pole-lagunes.org• Zones humides continentales dites intérieures, Fédération des Parcs Naturels Régionaux de France.

> ConTaCT : Julie le bIHan - Tél : 01 44 90 80 15 [email protected] www.parcs-naturels-regionaux.tm.fr/zones_humides

• Tourbières (fédération des CREN), Espaces Naturels de France> ConTaCT : francis Muller - Tél : 03 81 81 78 64 - [email protected]

www.pole-tourbieres.org• Mares et mouillères (CNRS), Maison de l'Environnement de Seine-et-Marne

> ConTaCT : olivier lIMoGes - Tél : 01 64 22 62 66 - [email protected] www.polerelaismares-iedd.org

• Marais littoraux de l’Atlantique, de la Manche et de la mer du Nord (Forum des Marais Atlantiques)> ConTaCT : Yves le MaITre - Tél : 05 46 87 08 00 - [email protected]

www.forum-marais-atl.com “forum” n°14 Décembre 2006 7

Qu'est-ce que la Journée mondiale

des zones humides?Chaque année le 2 février, nous célébrons

la Journée mondiale des zones humi-des pour commémorer la signature de la

Convention sur les zones humides, le 2 février 1971, dans la ville iranienne de RAMSAR, au

bord de la mer Caspienne. Chaque année depuis 1997, des organismes gouvernemen-

taux, des organisations non gouvernementales et des groupes de citoyens à tous les niveaux de

la société profitent de l'occasion pour lancer des actions de sensibilisation du public aux valeurs

et aux avantages des zones humides en général, et de la Convention de Ramsar en particulier.

(source : http://www.ramsar.org/wwd/wwd_index_f.htm)

et élevage en prairies humides, SIG en zones humides, marais acquis à des fins de protection, le sel Atlantique, etc.

La diffusion de l’information, menée en concer-tation avec les autres centres de documentation (pôles-relais, ORE, IFREE, ATEN, LPO, DIREN…), s’effectue à travers différents supports accessi-bles sur Internet : Bulletin signalétique mensuel, Panorama de presse signalétique hebdomadaire, sélection documentaire, lettre d’information électronique « Esc@le ».

Contribuer au développement du fonds doCumentaire

Une veille permanente est nécessaire pour repérer les productions écrites sur les marais littoraux. Vous pouvez nous y aider en :• signalant la parution d'un nouveau document ;• envoyant des documents si vous produisez

des études sur nos thématiques.

déveLoppement d’un système d’informations « acteurs-actions » sur Les marais Littoraux

Dans le cadre de sa mission de recueil et mise à disposition des connaissances, le Forum des Marais Atlantiques a élaboré un Système d’In-formation qui regroupe bases de données docu-mentaires, bases de données cartographiques (SIG), et bases de données « acteurs-actions ». Ce système de gestion de l’information permet depuis 1999 de :• référencer les organismes concernés par les marais littoraux des façades Atlantique, Manche et mer du Nord ;

• sélectionner les organismes en fonction de problématiques spécifiques (réunions, confé-rences, séminaires, colloques…) ;

• envoyer des documents (courriers, fascicules, guides, ouvrages…) ;

• relayer l’information entre ses différentes structures…

L’invention des pôles-relais

>ConTaCT au foruM : Yves le Maître [email protected]

Photo : FMA>

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Comment le droit peut-il venir en aideaux éleveurs en marais ?

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Brèves des marais

ASSéCHER uNE ZoNE HuMidE N’EST PLuS AuSSi AiSéE

>>> Suite à l’intervention de l’association « Eau et Rivières de Bretagne », partie civile pour dénoncer le drainage d’une zone humide de la commune de Plouvien dans le Finistère, la cour d’appel de Rennes a rendu un arrêt le 3 novembre 2006 (n°1810/2006) qui confirme que les travaux de drainage, conduisant à assécher une zone humide, relèvent bien de la rubrique 4.1.0 du décret 93-742 du 29 mars 1993, sont soumis à déclaration préalable à partir de 1000 m². La déclaration préalable permet ainsi au préfet d’obliger le demandeur à mettre en œuvre des mesures compensa-toires vis-à-vis du milieu naturel, voire de s’opposer à ces travaux (cf. ordonnance 2005-805 du 18 juillet 2005, portant simplification, harmonisation, et adaptation de la police de l’eau) depuis le 1er octobre 2006.

Source : « Eau et rivières de Bretagne », info de la semaine 46bis de 2006, [email protected], http://www.eau-et-rivieres.asso.

Jurisprudence

Actu

juridiquesuivie et commentée par Jean-Marie Gilardeau,Maître de conférences en droit rural, université de Poitiers

Photo : Philippe Deschamps>

Photo : © Jean-Pierre Camuzard>

Photo : © Jean-Pierre Camuzard>

La Faculté de Droit de Poitiers démarre une étude transversale des diverses règles applicables à l’ac-tivité agricole et à l’espace rural dans les zones de marais. Cette étude fait suite aux multiples réfor-mes juridiques intervenues dans le domaine, tant à l’échelon européen (découplage des aides agricoles de l’acte de production, soutien au développement rural…) que national (Ordonnance de juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, Loi relative au développement des territoires ruraux de février 2005, Loi d’orientation agricole de janvier 2006, Loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006).La montée en puissance des préoccupations en-vironnementales, tout particulièrement dans les zones humides (gestion et préservation de la qualité de la ressource en eau, protection de la fau-ne et de la flore…), ainsi qu’en atteste notammment la mise en place du réseau NATURA 2000, conduit en effet à s’interroger sur le rôle des principaux acteurs que sont les agriculteurs dans les secteurs de marais. Une agriculture intensive, caractérisée par le drainage et l’irrigation, est peu compatible avec la conservation des zones humides.

Au contraire, l’élevage est une pratique garante du maintien des équilibres existants.Un tel travail est destiné à vérifier la cohérence ou l’incohérence des divers dispositifs applicables, et de mesurer à moyen et long termes les consé-quences au regard des exi-gences environnementales sur les secteurs considérés. Plus généralement, le droit peut aider au maintien de l’élevage dans les zones humides par le biais de la multiplication de mesures incita-tives (rémunération en contrepartie de prestations de services ; versement d’aides ; dégrèvement d’impôts…) ou cœrcitives (mesures de police ; servitudes …).

>ConTaCT : Jean-Marie Gilardeau, [email protected]

Après une phase de concertation et de débats qui a duré près de deux ans, la loi n°2006-1772 sur l’eau et les mi-lieux aquatiques a été promulguée le 30 décembre 2006 (J.O. du 31/12/2006). Cette loi a deux objectifs fondamentaux :

Donner les outils à l’administration, aux collectivités territoriales et aux acteurs de l’eau en général pour reconquérir la qualité des eaux et atteindre en 2015 les objectifs de bon état écologique fixés par la directive cadre européenne (DCE) du 22 décembre 2000, trans-posée en droit français par la loi du 21 avril 2004) et

retrouver une meilleure adéquation entre ressources en eau et besoins dans une perspective de développement durable des activités économiques utilisatrices d’eau et en favorisant le dialogue au plus près du terrain ; Donner aux collectivités territoriales les moyens d’adapter les services publics d’eau potable et d’as-sainissement aux nouveaux enjeux en terme de trans-parence vis à vis des usagers, de solidarité en faveur des plus démunis et d’efficacité environnementale.

Nous ne manquerons pas de revenir sur cette loi pour la commenter plus en détails.

Un outil prometteur pour les gestionnaires de zones humides : l'Office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA)Extrait de l'article 88 de la Loi sur l'eau :« Art. L. 213-2. − L’Office national de l’eau et des milieux aquatiques est un établissement public de l’Etat à caractère administratif. Il a pour mission de mener et de soutenir au niveau national des actions destinées à favoriser une gestion globale, durable et équilibrée de la ressource en eau, des éco-systèmes aquatiques, de la pêche et du patrimoine piscicole.«A ces fins, il participe à la connaissance, la protection et la sur-veillance de l’eau et des milieux aquatiques ainsi que de leur faune et de leur flore, et contribue à la prévention des inondations.«Il apporte son appui aux services de l’Etat, aux agences de l’eau et aux offices de l’eau dans la mise en œuvre de leurs politiques.«Il assure la mise en place et la coordination technique d’un système d’information visant au recueil, à la conservation et

à la diffusion des données sur l’eau, les milieux aquatiques, leurs usages et les services publics de distribution d’eau et d’assainissement. Les collectivités territoriales ou leurs grou-pements sont associés à leur demande à la constitution de ce système d’information.«L’office garantit une solidarité financière entre les bassins, notamment vis-à-vis de ceux des départements et collectivi-tés d’outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. Il conduit ou soutient des programmes de recherche et d’études qui sont communs à tous les bassins ou revêtent un intérêt général, en particulier sous la forme de concours financiers à des person-nes publiques ou privées.«Il mène et soutient des actions nationales de communication et de formation.

Source : www.ecologie.gouv.ex

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"Sortie d'eau" du texte de la Loi sur l'eauet les milieux aquatiques, adoptée le 30 décembre 2006 !

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9“forum” n°14 Décembre 2006

Les faits soumis à l’appréciation des juges étaient exemplaires. L’adhérent d’une association chargée de l’entretien d’un canal prétendait que l’absence d’approvisionnement en eau dont il avait été victime justifiait le dégrèvement de la cotisation dont il était redevable.

Ce à quoi il lui a été répondu que « si le défaut d’accomplissement par une association de ses missions peut être de nature à entrai-ner la décharge de taxes syndicales, la circonstance qu’une telle association n’accomplirait qu’incomplètement ses missions ou les accomplirait de manière défectueuse ne saurait conduire à accorder la décharge des taxes réclamées à un membre de l’as-sociation ». Il en résulte qu’une distinction doit être opérée selon que l’association manque à tous ses engagements ou ne commet qu’un péché véniel. Ce n’est que dans l’hypothèse d’une totale inaction qu’est envisageable, à titre de représailles, la rétention du montant des redevances.

Dans les autres cas, l’acquittement de la dette est obligatoire. Une chose est de ne rien faire ; autre chose est de mal faire ou de ne pas faire assez. Concrètement, dès lors que sont entrepris des travaux de curage et de nettoyage des chenaux et des fossés, l’association est en droit d’exiger le versement annuel des taxes alors même que certains fonds ne seraient pas régulièrement alimentés en eau. Plus que le résultat, c’est l’intention qui compte. Toutefois, il ne faut pas se réjouir trop vite dans la mesure où le Conseil d’Etat a cru bon d’ajouter «qu’une faute commise par l’association syndicale dans l’exécution de ses obligations peut être utilement invoquée au soutien d’une demande indemnitaire».

Dans le domaine des appels de cotisations, la négligence ou la médiocrité des actions réalisées n’est pas source de privation de recettes.

En revanche, le terrain de la responsabilité pourrait être celui de tous les dangers. De manière traditionnelle, la victime d’un préjudice est fondée à deman-der réparation à la personne dont le comportement est à l’origine de la perte enregistrée. Le succès d’une éventuelle requête néces-site la conjonction d’une faute, d’un dommage et d’une relation de cause à effet entre la première et le second. Ajoutons qu’il revient au plaignant qui souhaite être indemnisé de prouver l’existence simultanée des trois ingrédients ci-dessus énumérés.

A supposer l’excès ou le défaut d’eau provoqué par la défectuosité des ouvrages d’amenée ou de la gestion des niveaux, l’association aura des comptes à rendre. Une fois établie l’influence du man-quement à ses obligations sur le sinistre subi par un ou plusieurs adhérents (perte de récoltes ou d’animaux), il ne restera plus à l’association qu’à assumer les conséquences de ses actes ou de sa carence sous forme du versement de dommages-intérêts. Si l’association est elle-même dépendante de décisions prises par d’autres (syndicat mixte, département, Etat, union d’associa-tions…) en matière de fourniture d’eau, une cascade de responsa-bilité n’est pas à exclure.

La mise au point faite par les juges a le mérite de préciser claire-ment que la piètre qualité des prestations fournies par une asso-ciation ne saurait engendrer une diminution des recettes mais peut provoquer une augmentation des dépenses.

A chacun de tirer profit de l’information afin de s’éviter des désa-gréments.

J-M Gilardeau.

TAxe SyndiCAleSyndicats de marais : la taxe syndicale résiste à la pénurie d’eauEn contrepartie des travaux qu’elles réalisent, les associations syndicales autorisées sont admises à exiger de leurs membres le versement de redevances. L’une des questions que peuvent légitimement se poser les associés est celle de savoir si, en cas de défaillance de l’association, faculté leur est offerte de demander à être exonérés de tout paiement.

La réponse vient d’être fournie par une décision du Conseil d’Etat en date du 2 octobre 2006 (n° 278676).

Photo : © Jean-Pierre Camuzard>

Photo : Philippe Deschamps - Elevage en prairies naturelles humides>

Photo : Philippe Deschamps>

droit d'eau & asa : un livre à commander sans tarderFrançois-Xavier Cadart, juriste spécialisé du droit des ASP nous livre ici un condensé de ce qu'il faut savoir sur le cadre légal qui entoure vos prises d'eau. Fragilités, moyens de défense, intérêt général, continuité du ser-vice, police...Pour aider les ASA dans la poursuite de leur mission de service public, l'ouvrage s'appuie sur de nombreuses jurisprudences et sur les textes de référence.Le site ASAinfo vous permet de visualiser la couverture ou le sommaire et d’imprimer le bon de commande.> Pour commander : www.asainfo.net

A pArAItrE

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“forum” n°14 Décembre 200610

Brèves des marais

CoMPlexITé De la DYnaMIQue Des MaraIs aTlanTIQuesL’existence de flux hydriques constitue le premier des facteurs à prendre en compte dans la dynamique des marais : le fonctionnement hydrologique des bassins versants côtiers qui alimentent les marais en eaux continentales est conditionné par l’existence d’un potentiel gravitaire assurant l’écoulement de l’eau de l’amont vers l’aval. Or ce dernier est contrarié par l’envasement des baies et des différents exutoires. A l’exception de quelques zones en érosion, le colmatage progresse rapidement, dans un espace couvrant globalement le terri-toire littoral compris entre Loire et Gironde. On observe deux origines principales à cet envasement :

la présence abondante de matières en suspension apportées par les fleuves (Gironde et Charente principalement) qui se déposent, au large, dans les vasières situées sur le plateau continental ;

une dynamique marine dont les facteurs se conjuguent pour assurer la reprise et transporter ces stocks sédimentaires vers les systèmes côtiers.

Dans ce contexte, l’énergie de la marée montante (le flux), toujours supérieur à celui du jusant explique que la mer laisse des dépôts, d’ailleurs rapidement colonisés par le cortège végétal des halophytes qui viendront rapidement accroître l’étendue des schorres déjà pré-sents. La progression du schorre au devant de la digue du polder 1965, à Saint-Michel-en-l’Herm, depuis une décennie, devient spectaculaire (alors que la digue a souffert de l’érosion de 1975 à 1995).

Le déficit sédimentaire (ou déficit de matière) résultant de l’endigue-ment comparé à l’excès de sédiments parvenant en limite de territoire maritime se traduit par une accentuation du déséquilibre morphodyna-mique de l’ensemble des territoires de marais :

en zone subcontinentale (type « marais mouillés » du Marais poitevin), du fait de la modification du régime des pluies ou de la construction de retenues, les eaux continentales n’inondent plus, depuis des décennies, un territoire qui bénéficiait de l’apport sédi-mentaire résultant du dépôt des matières en suspension prélevées au continent ;

toujours en zone subcontinentale on enregistre des pertes consi-dérables de matière organique (tourbe au sens large) du fait de son oxydation suite à la raréfaction des inondations et d’un recul de l’hydromorphie provoqué par la baisse généralisée des niveaux hydriques estivaux ;

en zone de polders (de marais desséchés) certaines pratiques ances-trales ont privé les sols de la matière organique qui leur était néces-saire (exemple la pratique de l’utilisation des bousas, qui, bien que marginale, a néanmoins joué un rôle non négligeable dans l’évolution pédogénétique des sols de bri) ; toujours en zone de polders (notamment pour les plus récents) la pratique du drainage a entraîné une diminution importante de matières minérales (sodium puis carbonates), comparée au stock existant au niveau du sédiment initial.

Il y a d’abord l’apparence des choses qui composent ou structurent notre environnement. Subordonnée à l’incertitude de nos interprétations, à la prégnance de nos modèles culturels et économiques, cette apparence est souvent trompeuse, illusoire, éloignée des faits objectifs.En deçà, il y a la réalité des choses, ou plutôt son approche, complexe, multiple, mouvante, subordonnée à l’avancement de la connaissance.Les marais littoraux et l’ensemble des zones humides de la façade atlantique sont l’objet de cette double approche, à la fois sensible et objective. Lieux de l’irréel, de l’incertain (Bata et al., 2002), « régions amphibies où la terre et la mer s’associent en une respiration aux rythmes variés…» (Verger, 2005) ils sont devenus au cours de l’histoire, des zones d’intérêt économique majeures. Les marais jouent à ce titre un double rôle.

En tant qu’écosystèmes épurateurs et régulateurs les scientifiques leur reconnaissent une fonction écologique. Il s’y superpose également une fonction de production, salicole et surtout agricole. Les marais représentent des milieux évolutifs, très fortement anthropisés, aménagés par l’homme, généralement situés « entre deux eaux » (Le Quellec et al.) ,: l’eau continentale (l’amont) dont il convient de maîtriser l’abondance ou de gérer la rareté et l’eau marine (l’aval) dont il est obligatoire de se protéger.

Leur dynamique évolutive, complexe, objet de processus cachés, est sous l’influence directe d’un certain nombre de facteurs particulièrement délicats à mettre en évidence : la difficulté de leur caractérisation est liée soit au niveau d’échelle envisagé (qui dépasse celui de la parcelle), soit au niveau des pas de temps considérés (qui dépassent ceux d’une génération).

humidesRecherche en zones

Attention à la vulnérabilité des sols de marais !

Photo : © Jean-Pierre Camuzard>

les dessous du Marais…

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Ce déficit de matières s’accompagne d’une évolution pédogénétique singu-lière propre au sols de marais.> le premier effet est celui du tassement généralisé, perceptible dans la topographie dissymétrique des polders des marais desséchés et qui s’amortit de façon asymptotique au cours du temps (quelques siècles). Ce tassement, provoqué par la fuite des ions et la déshydratation des argiles induit des phénomènes de déstructuration que les pratiques agronomiques compensent difficilement.> le deuxième effet est celui de l’alcalinisation des profils, particulièrement importante dans les sols de marais anciennement desséchés (bri ancien) : elle est due au tassement et par conséquent à la remontée de la nappe salée. Celle-ci s’accompagne de la formation de bases entraînant la dispersion des argiles et la prise en masse du substrat : là encore les techniques agronomi-ques (apport de gypse et enrichissement en matière organique) permettent localement de remédier à ce phénomène. Mais nous ne sommes pas, pour autant, convaincu de la pérennité du processus. L’isolation hydraulique des exploitations, conséquence des nécessaires opérations d’améliorations fon-cières constituées par le drainage, (dans la mesure où elles se généralisent), aggrave ce problème. Il s’agit d’une évolution morphodynamique généralisée des marais tendant à l’enfoncement. En d’autres termes ce qui est intéressant à l’échelle individuelle le devient beaucoup moins dès lors que les aménagements fonciers s’étendent à l’échelle d’un territoire.

le MaraIs PoITeVIn : une "Ile à l'enVers"Jacques Dupuis, auteur de la carte pédologique des sols du Marais poitevin a

qualifié ce milieu : « d’ île à l’envers » . A l’inverse d’une île, en effet, où la circulation des flux, notamment

hydriques, s’exerce de façon divergente vers un exutoire extérieur, les marais côtiers en général et le Marais poitevin en particulier constituent des unités géomorphologiques où l’ensemble des processus va converger vers l’intérieur du système, conséquence de la réalité des

processus géologiques, pédologiques ou éda-phiques. Déstructuration et tassement, déficit

sédimentaire, déficit de matière organique, inten-sité des exportations agronomiques sont autant de fac-

teurs contribuant à inverser le sens des potentiels naturels par formation d’une vaste zone privée d’apports à l’inverse des marges (schorres à l’ouest et Marais mouillés au nord) sans cesse nourries des sédiments marins ou continentaux. C’est une conséquence de l’aménagement et nous irons même jusqu’à déceler un certain parallélisme entre l’existence de différents niveaux d’organisation sociale, de structuration des sols et de différenciation des paysages. Dans un autre ordre d’idées et à une autre échelle, on est en droit de se deman-der si les prélèvements intensifs d’eau à des fins d’irrigation n’aggravent pas encore davantage ce problème dans la mesure où le bilan apports/prélève-ments est négatif et dans la mesure également où la recharge des nappes exploitées s’inscrit dans le long terme.

Enfin il apparaît nécessaire de se placer à des échelles de considération de plus en plus vastes aussi bien dans le temps que dans l’espace :

dans le temps, parce que les aménagements anciens voire la succession des systèmes sociaux ne sont pas sans conséquence sur l’équilibre des écosys-tèmes actuels : les travaux réalisés dans les marais par les moines issus de différents ordres, dès le XIe siècle, en constitue un exemple ;

dans l’espace, parce que l’enchaînement des causes est tel qu’il faille considérer des facteurs en apparence fort éloignés des sujets immédiats de préoccupation : la sédimentation côtière et l’accélération relative du com-blement de la baie de l’Aiguillon pourrait être une conséquence de l’évolu-tion de la morphologie de l’estuaire de la Gironde (Camuzard, à paraître).

elarGIsseMenT Du ProPosEn élargissant notre propos nous dirons qu’il est intéressant de considérer les marais comme un système, une forme d’organisation structurée par des flux (matière, information et énergie). Les systèmes, qui constituent notre environnement et les marais littoraux en particulier, sont morphologiquement, dans un état métastable où flux entrant et sortant s’équilibrent. L’équilibre des flux est une condition de la perma-nence morphologique du système. Les atteintes portées à ces équilibres sont incessantes : les systèmes sont alors contraints de s’adapter aux nouvelles conditions du milieu en modifiant leurs structures, donc en faisant évoluer leur organisation, sous peine de disparaître. C’est exactement ce qui se passe lorsque l'intensification agricole ou la pres-sion de l’aménagement devient prépondérant.Tout aménagement va dans le sens d’une différenciation ; celle-ci requiert que les systèmes impliqués dissipent davantage d'entropie, qu'ils n'en produisent afin d'accéder à des niveaux supérieurs d'organisation : il s’agit d’une loi ther-modynamique qui illustre avec réalisme que tout à un coût. Les modifications apportées à nos marais par nos sociétés ont pour conséquence indubitable l’accroissement de la complexité y compris bien sûr, en parallèle, celle des systèmes sociaux ou économiques. En d’autres termes, ne s’agit-il pas de contribuer au développement durable des marais, mis à l’épreuve d’une manière immédiate dans ces milieux fragiles : ils constituent, en effet, un territoire exemplaire avec lequel on ne peut pas tricher et qui pose avec acuité le problème du rapport de l’homme à son envi-ronnement. Les marais sont une construction humaine dont on ne peut accepter qu’ils soient « sanctuarisés » au même titre qu’un monument historique car cette construction est en perpétuel mouvement à l’image de la mouvance de nos paysages et de celle de nos sociétés. L’empreinte sociale est très forte dans les marais parce qu’ils sont avant tout nés de convergences sociales qui puisent leurs racines dans les profondeurs des civilisations établies en terre et eaux. Gageons que l’exemplarité de la considération somme toute récente que l’on éprouve à leur égard soit à la hauteur de nos engagements en terme de déve-loppement durable vis-à-vis de ce patrimoine écologique.

>ConTaCT : Jean-Pierre Camuzard, Ingénieur en chef du GREF, Ouistreham - Décembre 2006

définition du terme "entropie" :

Ce terme, forgé en 1865 par le physicien allemand Clausius à partir de la racine grecque tropi, évoque l'idée de transformation. Cette notion est liée à celle d’ordre ou de désordre. L'interprétation dominante est celle d'une loi physique stricte, ce qui impliquerait qu'un gain d'ordre d'un côté doit se payer par un désordre plus grand de l'autre. Si l’on admet qu’un accroissement du niveau d’orga-nisation est associé à une diminution de l’entropie du système, la différenciation des écosystèmes (de même que celle des organismes vivants) requiert qu’ils dissipent davantage d’entropie qu’ils n’en produisent. Autrement dit, schématiquement, les systèmes maintiennent leur organisation et leur structure en dérobant de l’ordre à leur milieu, ce qui laisse à réfléchir.

Photo : © Jean-Pierre Camuzard>

Photo : FMA - "Fossé curé dans le marais poitevin">

> in CAMUZARD J.-P. (2000) – Les sols, marqueurs de la dynamique des systèmes géomorphologiques continentaux, thèse Univ. Caen. Réed. (2006) en cours de parution, Paris, publications de l’ENGREF.A

lire !

Page 12: Editorial Le retour d’Adonis T - Forum zones humides · 1997-03-06  · cisé par courrier « qu’un bilan sera effectué la seconde année et si la mesure remporte le succès

Forum des Marais AtlantiquesA

gen

da Journée mondiale

des zones humides (JMZH) le 2 février

• rapport de stage de sergiv ilchenko sur les techniques de restauration et pro-tection des berges en étiers de marais salés, Université de La Rochelle, 2006.Le caractère en par-tie artificiel et la spé-

cificité des étiers nécessitent une réflexion technique afin de trouver la meilleure solution pour optimiser le rapport durabilité/coût/valeur pay-sagère.

• estuaria - N° spécial consacré aux zones humidesCo-édition : Estuarium et PNR de Bruyère

Conférence inaugurale du Professeur Jean-Claude Lefeuvre au Parc Naturel Régional de Bruyère le vend. 2 février 2007 à 9h30 à la salle Ste Anne de St-Lyphard (44).

Inscription au : 02 40 91 68 68Pour commander : 02 40 57 71 80 [email protected]

• actes du 5ème conseil des marais

Téléchargeables sur le site Internet du Forumwww.forum-marais-atl.com

Parutions récentes du Forum

des montagnes d’huîtres, «descendues» par des moines au Moyen Age !

Nous ne sommes pas au pays de Gulliver mais au cœur du Marais poitevin occidental, dans « le Pays né de la Mer », à partir de l'ancien rivage de Lairoux, de Luçon, des Magnils-Reigniers et de la pres-qu'île de Saint-Denis-du-Payré, là où des milliards de coquilles d’huîtres forment des montagnes qui, pendant des siècles, ont nourri l'énigme des buttes coquillières de Saint-Michel-en-l'Herm. Depuis le XVIème siècle, les querelles scientifiques provoquées par les tentatives d’explication ont fait perdre leur latin à plus d’un savant. L’origine anthropique et médiévale (XIème siècle) de ces énormes buttes d’huîtres a fini par être attestée au cours du XXème siècle. D’après le professeur Fernand Verger, « il s’agit d’huîtres destinées à la consommation qui devaient être écaillées par les moines de l’impor-tante abbaye de Saint-Michel-en-l’Herm, pour être exportées, salées ou en saumure, forme courante d’utilisation des huîtres au Moyen Age. »

!le marais

insoLite

le thème de l’année 2007 est celui des pêcheries, pour tenir compte :

• des besoins d'un milliard d'êtres humains pour qui le poisson est la principale source de protéi-nes animales ;

• de l'état des pêcheries de la planète où 75 % des stocks de poissons marins et la plupart des stocks d'eau douce d'importance commerciale font déjà l'objet d'une surpêche ou sont pêchés jusqu'à leurs limites biologiques, et où les effets de pratiques d'aquaculture non durables sur les écosystèmes des zones humides sont de plus en plus préoccupants ;

• du rôle important que jouent les zones humides continentales et côtières pour le maintien des poissons et des pêcheries à tous les niveaux, des grandes pêcheries commerciales aux pêcheries de subsistance et des poissons sauvages aux poissons d'élevage ;

• du rôle critique que jouent les zones humi-des côtières en tant que frayères et zones d'alevinage pour de nombreuses espèces marines ;

et de la nécessité de mettre en place, de toute urgence, une gestion efficace des pêcheries et des écosystèmes des zones humides dont

elles dépendent ; • de l'adoption en novembre 2005, par la Convention

de Ramsar, d'une résolution et de ses lignes directrices sur la conservation, la production et l'utilisation durable des pêcheries, qui engage les 152 Parties contractantes à la Convention à jouer leur rôle en établissant et en maintenant des pêcheries durables dans les zones humides.

est éditée par le Forum des Marais Atlantiques,B.P - 40214Quai aux Vivres17304 Rochefort Cedex

Tél. : 05.46.87.08.00 Fax : 05.46.87.69.90

Internet : www.forum-marais-atl.comE.Mail : [email protected]

Directeur publication : Bernard Grasset.

Rédacteur en chef : Yves Le Maître

Dépôt légal : à parution

Commission paritaire :ISSN : 1769-0013

Conception et réalisation :Diagraphe - Tél. : 05 46 34 02 46

Crédit photo : FMA sauf mentions spécifiques.

L a l e t t r e

COIn LECturE

>ConTaCT au foruM : Christelle boucard Tél : 05 46 87 80 36>ConTaCT : fernand Verger et Jean-Pierre Camuzard,

Conseil scientifique du forum des Marais atlantiques.

• MANCERON V. 2005. une terre en partage : Liens et rivalités dans une société rurale. Paris : Editions de la Maison des sciences de l’homme. 260 p.

• POITOU-CHARENTES NATURE, TERRISSE J. (coord. Ed). 2006. Catalogue des habitats naturels du Poitou-Charentes. Cahiers techniques du Poitou-Charentes, Poitiers : Poitou-Charentes Nature. 68 p.

stuariacultures et développement durable

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thnopôle

Pour une gestion durable des zones humides :

l’exemple des parcs naturels régionaux

Collection

Les Dossiers d’Ethnopôle

ISBN 978-2-9528512-1-3 Prix : 30 €

stuaria

est éditée

par Estuarium

Les zones humides constituent un patrimoine unique. Elles figurent parmi les

milieux naturels les plus riches du monde et jouent un important rôle éco-

nomique renforcé, de nos jours, par leur attrait touristique. Elles sont indis-

pensables à l’équilibre écologique de la planète par l’importance des fonctions

naturelles qu’elles remplissent et des services naturels qu’elles rendent aux

hommes, que ces services soit de prélèvement, de régulation, culturels ou d’auto-

régularisation.

Leur préservation est un enjeu essentiel en termes de richesse naturelle, de biodi-

versité biologique, de paysage et d’héritage culturel et identitaire des populations

mais encore, par exemple, en terme de régularisation du régime des eaux : elles sont

des bassins naturels d’expansion des crues et des milieux épurateurs.

Pourtant, les zones humides sont en régression. Il ne subsiste en Europe que la moi-

tié des marécages existant au début du XXe siècle. En France, 10000 à 15000ha dis-

paraissent chaque année ; en Bretagne, la moitié des zones humides a été perdue en

30ans.

L’ouvrage rassemble vingt-trois contributions de scientifiques et de chercheurs de

disciplines différentes, mais également de gestionnaires de parcs naturels régionaux

français et de Parcs étrangers, qui livrent autant d’études de cas.

Ces « regards croisés» se proposent de revenir sur la question de l’importance des

zones humides et sur les expériences menées dans les Parcs dans un objectif de

reconquête et d’une gestion durable des zones humides.

L’ouvrage, qui bénéficie du soutien de la fédération des parcs naturels régionaux,

est coordonné par le parc naturel régional de Brière, et s’appuie en partie sur la

réflexion des membres du conseil scientifique et des gestionnaires du parc naturel

régional de Brière.Collection

Les Dossiers

d’Ethnopôle

La lettre "Forum" s'enrichit toujours de vos témoignages, suggestions et remarques.

> ConTaCT : Jean-Michel Derex, [email protected]

Photo : FMA>

Zones humides et climatC’est le thème de la 4ème journée d’étude du Groupe d’Histoire sur les Zones Humides, organisée le 17 mars 2007 à la Maison du parc

naturel régional des Caps et marais d’Opale, en présence du grand spécialiste de l’Histoire du

climat, le professeur Emmanuel Le Roy Ladurie. Venez nombreux car ça chauffe dur pour la planète !

Photo : University of Texas Center for Space Research et NASA. >

Cette lettre est imprimée sur du papier recyclé.

> ConTaCT : www.ramsar.orgListe des manifestations sur le site Internet

du Forum des Marais Atlantiques