l’invitation aux musées six lieux d’art transforment le cn

39
L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN D en musée éphémère et vivant.

Upload: others

Post on 20-Jun-2022

3 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

L’invitation aux musées

Six lieux d’art transforment le CN D en musée éphémère et vivant.

Page 2: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

WEEK-END #1

10 & 11.11.2018

Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, Madridpages 8-15

Musée éphémère de la mode, Parispages 16-25

Art Institute of Chicagopages 26-31

WEEK-END #2

24 & 25.11.2018

Serralves – Museu de Arte Contemporãnea, Portopages 36-41

MAGASIN des horizons, Grenoblepages 42-53

WEEK-END #3

8 & 9.12.2018

Musée de la danse, Rennespages 58-69

Page 3: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

5

Assumant plus que jamais le projet d’être un centre d’art pour la danse, le CN D invite six lieuxd’art du monde entier à le transformer en un musée éphémère et vivant. Ouvert à tous leschamps de l’art, le CN D est devenu l’un des centres névralgiques du décloisonnement entre les disciplines grâce à une programmation hétéroclite (mêlant spectacles, performances,expositions, concerts, conférences d’artistes, projections, clubbing, show de cabaret) etl’aménagement d’une galerie d’exposition au sein de ses espaces. Cette nouvelle initiativeprolonge donc et appuie ce geste d’ouverture pour mieux en réaffirmer l’ambition : conjuguer la création au pluriel et se constituer en une scène pleinement hybride.

Il s’agit peut-être aussi de réparer une impolitesse. Si le siècle dernier s’était ouvert avecl’invitation des Ballets russes de Diaghilev lancée à Bakst, Matisse, Derain, Braque, Picasso ou de Chirico à collaborer avec les chorégraphes, le XXIe siècle a vu la tendance clairements’inverser et les musées se constituer en puissance invitante de la danse. Xavier Le Roy, BorisCharmatz, Anne Teresa De Keersmaeker, Jérôme Bel, Yvonne Rainer, La Ribot ou Simone Fortipour ne citer qu’eux, investissent ainsi régulièrement les espaces d’exposition à travers lemonde, conviés à réinventer les modalités du spectacle dans des dispositifs extra-scéniques. Il était donc grand temps de retourner cette invitation et de renouer avec la traditiond’hospitalité des arts vivants.

Les partenaires ont été choisis pour la singularité de leurs projets culturels, la richesse de leurscollections ou de leur action en direction de la performance, sans établir de hiérarchie entre des institutions d’envergure internationale (l’Institut d’Art de Chicago, le Musée national centred’Art Reina-Sofía, Serralves – Musée d’art contemporain), des centres d’art marqués par leuroriginalité (le MAGASIN des horizons) et d’autres projets aux profils plus singuliers (le Musée de la danse, le Musée éphémère de la mode). Chacun délègue son projet à un commissaire référent,reconnu pour son engagement dans le champ des arts performatifs – Hendrik Folkerts, BéatriceJosse, Cristina Grande, Laurence Rassel et Mar Villaespesa – et parfois déjà impliqué dans descollaborations antérieures avec le CN D – Olivier Saillard, Boris Charmatz. L’invitation aux muséesleur offre l’occasion de déranger leurs habitudes, de rompre avec les logiques de la conservation et de détourner les contraintes muséographiques du white cube. Proposition leur est ainsi faited’imaginer in situ, dans le bâtiment de Pantin, une forme d’exposition encore à inventer, à laquelledoivent s’ajouter un événement performatif et une intervention scientifique.

Prendre l’exposition d’art à bras-le-corps, donner à l’œuvre les moyens d’une incarnation vivanteet penser le partage de toutes les plasticités, tels seront les mots d’ordre de ces week-endsd’effervescence créative. Aux musées, à présent, d’entrer dans la danse.

Florian Gaité

L’invitation aux muséesSix lieux d’art transforment le CN D en musée éphémère et vivant.

Page 4: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

76

Art Institute of Chicago

EN CONTINU DE 14H À 20H

Cally SpoonerFailed British SilverPalier Est, Foyer des danseurs, Studio 2,Studio 3, Studio 4 – premier étage

Rendez-vous

pages 26-31

Musée éphémère de la mode

RENDEZ-VOUS 10 & 11 NOVEMBRE

15hOlivier SaillardPerformance pour 27 chaussuresGrand studio – rez-de-chaussée

16hOlivier SaillardL’atelier de coutureGrand studio – rez-de-chaussée

17hOlivier SaillardPerformance pour 27 chaussuresGrand studio – rez-de-chaussée

19hOlivier SaillardL’atelier de coutureGrand studio – rez-de-chaussée

EN CONTINU DE 14H À 20H

Olivier SaillardLes DoublesStudio 9 – deuxième étage

Zoé GuédardCarte blanche Studio 7 et 8 – deuxième étage

pages 16-25

Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía

EN CONTINU DE 14H À 20H

Esther FerrerTodas las variaciones son válidas, incluida estaAtrium, Galerie, Studio 1 et Studio 12 – rez-de-chaussée

pages 8-15

WEEK-END #1

10 & 11.11.2018

Page 5: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

9

Entretien avec LaurenceRassel et Mar Villaespesa,commissaires

Propos recueillis par Florian Gaité, septembre 2018

Florian Gaité — Votre proposition pour leCentre national de la danse est une variationde l’exposition présentée au Palacio Velazquezdu Musée Reina-Sofía dont vous avez ététoutes deux commissaires et dont elle reprendle titre : Esther Ferrer. Todas las variacionesson válidas, incluida esta. En quoi n’en est-elle pas une simple répétition ?

Laurence Rassel et Mar Villaespesa — Toutsimplement parce qu’il s’agit d’un autre lieu,d’un autre espace, d’une autre temporalité,d’autres dimensions. Il s’agit bien, commeénoncé, d’une « variation » que nous pour-rions tout autant considérer comme unfragment de cette première occurrence. Il nous a aussi paru intéressant de penser le travail d’Esther en regard de la répétition,dont elle dit elle-même qu’elle est impossible,nécessairement affectée par des facteurscomme le temps et l’espace qui modifient lesconditions de l’acte. Il n’existe alors que de la réitération et des variations. Le Studio 12est pensé, comme ce fut le cas pour le PalacioVelázquez, comme une table ou un terrain de jeux. Nous nous étions inspirées, entreautres, d’une œuvre d’Esther Ferrer réaliséepour un parc à Vitoria en Espagne, unProyecto espacial, installé au sol, au centre de l’espace. Les objets et les partitions desdifférentes actions (Parcourir un carré detoutes les manières possibles ; Traces, sons,espaces ; Silhouettes ; Un espace à traverser ;Performance pour 7 chaises) y sont disposés,déterminant ainsi l’espace de leur activation.L’exposition se transforme donc par l’usage,

elle se propose comme une partition enconstante écriture. Dans le Studio 1, l’objetest cette fois en place, dans un seul et mêmeespace, qui pourrait s’assimiler à une scène.Les instructions de l’action sont là. Il ne resteau public qu’à entrer et à agir.

FG — Dans l’œuvre d’Esther Ferrer, les produc-tions plastiques sont pensées en continuitéavec ses œuvres performatives, mais pas ausens où les premières documenteraient lessecondes. Comment penser l’articulationentre ses actions et ses installations ? 

LR & MV — L’idée centrale de notre propositiond’exposition était de réfléchir à la manièred’articuler un espace de « performance » à unautre d’« exposition », occupé par des œuvresplastiques, qui se transformerait au gré desactivations par le public. Il s’agit par ce dispo-sitif de faciliter la perception de la présence,du rythme, de la sérialité, du processus et dela fragilité, tant au niveau des actions quedans le travail plastique ou les œuvressonores. Son travail instaure un aller-retourcontinu de la performance à l’installation ou de la performance à l’objet, et vice versa. À la manière de ce que nous avons proposé auPalacio Velázquez, l’exposition qui se tientdans la galerie du CN D présente des dessinsissus des Poèmes des nombres premiers, ainsique des dessins et des maquettes provenantdes Proyectos espaciales, dont certains sontdevenus par ailleurs des installations à partentière. Ces productions forment ensembleun flux continu, elles se répondent sans cesseles unes aux autres. Compter, conter, mar-cher, recompter : ces œuvres (actions oudessins) se rencontrent autour de la questiondu temps, du rythme. Les installations plas-tiques ne constituent donc pas les lieux deperformance d’Esther Ferrer, mais plutôt desoccasions d’action pour les visiteurs.

8

Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía Samedi 10 et dimanche 11 novembreL’exposition se poursuit jusqu’au samedi 15 décembre 2018

Esther FerrerProyectos espaciales

Page 6: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

10

FG — Par son économie radicale, son refus des mesures de sécurité et des normes duspectacle, le travail d’Esther Ferrer déjouel’institutionnalisation de la performance :comment avez-vous négocié avec cettecontrainte ? A-t-elle opposé des résistances à vos propositions ? 

LR & MV — L’hospitalité des lieux est bien sûrimportante, ne serait-ce que pour donner de lalisibilité à l’exposition. Un lieu institutionneltel que le CN D nous permet de mettre à dispo-sition du public les objets tels qu’ils sont ettels qu’Esther Ferrer s’en saisirait, parce qu’ilest lui-même disposé à accueillir et à organi-ser le mouvement, la circulation. Elle n’aopposé aucune résistance. C’est même tout lecontraire. Depuis les premiers instants, nousavons travaillé avec elle dans la plus grandecomplicité, en respectant son désir.

FG — Le rapport entre le temps, l’espace et laprésence est une donnée centrale de l’esthé-tique d’Esther Ferrer qui la rapproche de l’artchorégraphique, je pense à toutes ses actionsqui consistent à tracer une route, à occuper unespace ou à organiser un déplacement. Jusqu’àquel point serait-il pertinent de rapprocher sontravail de la danse ? Et a fortiori de la danseexpérimentale ?

LR & MV — Nous n’avons jamais pensé le tra-vail d’Esther en termes de danse. S’il y a uneproximité dans les lieux, le champ de réfé-rences d’Esther, ses conditions de productionet de transmission sont tout autres. Il estpeut-être intéressant de se poser ici la ques-tion de la transmission, car pour EstherFerrer, tout le monde est libre de ses actions,et des variations qu’ils veulent en proposer, il n’y a d’ailleurs pas de maîtrise pré-requiseou de technique à acquérir. Les formes de sesperformances et de certaines pièces chorégra-phiques se rapprochent effectivement, maisle cadre est généralement différent… ou peut-être pas tant que ça. Le travail d’Esthers’inscrit quoi qu’il en soit dans une lignée duminimalisme (de Fluxus, de John Cage…), quenous pourrions penser en commun avec ladanse « conceptuelle » ou « expérimentale ».Sans doute cette thématique reste-t-elleencore à explorer.

FG — Les œuvres présentées comptent doncpour beaucoup sur la participation du public,peut-on aller jusqu’à dire que le spectateurdevient-il lui-même performeur ? 

LR & MV — La participation du public est effec-tivement importante dans les performancesd’Esther Ferrer, puisqu’il est libre de participerou pas à certaines actions. Et pourtant, defaçon assez paradoxale, Esther Ferrer ne pensepas cette participation lorsqu’elle conçoit l’action, pas plus qu’elle ne la cherche aumoment de la réalisation. Elle ne l’envisagepas vraiment comme une finalité. Elle créesimplement une situation qu’elle partageensuite avec le public, et qui ne se répéterajamais. Pour ce qui est des œuvres présentéesdans l’exposition, le spectateur s’envisagedavantage comme un lecteur, qui lit des instructions et qui peut choisir d’agir en fonction. L’action fait partie intégrante de lalecture, tout comme la lecture fait partie inté-grante de l’action. Ainsi en va-t-il par exempledu calcul du temps, qui renvoie simultanémentà une opération de déchiffrage et un acte per-formatif en soi. Quant à savoir si un lecteurpeut être considéré comme un performeur, laquestion est posée…

FG — Esther Ferrer est connue pour son enga-gement féministe, quelle place la question duféminin a-t-elle tenu dans votre réflexion ? 

LR & MV — Comme elle le dit elle-même,Esther est féministe 24 heures sur 24, mêmequand elle dort. Une de ses matièrespremières est son propre corps, son visagenotamment, cela se voit très clairement dansl’exposition. Les mouvements de libérationsexuelle et d’émancipation des femmes dansles années 1970 ont été par ailleurs trèsimportants dans sa vie, comme pour beau-coup d’entre nous. Sa série El Libro del Sexo,dont nous montrons deux œuvres, entémoigne particulièrement. Elles sont uneparfaite illustration de la devise féministe« Notre corps nous appartient », cette idéequ’il fallait se battre pour obtenir le droit à sedéfinir. Dans beaucoup d’autres œuvres, ilexiste des connotations féministes, explicite-ment ou pas, mais cela ne pose pas vraimentquestion. C’est simplement là.

11

Esther FerrerPoème des nombres premiers

Page 7: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

12 13

LE MUSÉE

Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía Depuis l’ouverture de son extension confiée à Jean Nouvel, le Musée national centre d’artReina-Sofía est l’un des plus vastes du monde,abritant plus de 20 000 pièces d’art moderneet contemporain, de 1900 à nos jours. Desti-née à revaloriser le travail et la visibilité desartistes espagnols, sa collection réunit lesœuvres des plus fameux d’entre eux (Miró,Dalí, Gris, Tàpies, Oteiza…), parmi lesquelles le célèbre Guernica de Picasso, son inestima-ble joyau. Elle inscrit ces derniers dans lepaysage plus global de la modernité et desavant-gardes, comptant également des piècesmajeures d’artistes internationaux, à l’instarde Picabia, Dubuffet, Bacon, Rothko, Flavinou encore Pistoletto. Le parcours qu’elle des-sine est sensiblement marqué par la volontéde penser ensemble création artistique etsentiment de révolte, ainsi articulé autour dethèmes cardinaux tels que l’utopie, la guerreou la critique postmoderne. Pour L’invitationaux musées, le CN D a proposé aux commis-saires Laurence Rassel et Mar Villaespesad’investir ses espaces. Connue et reconnuepour avoir placé la question des usages cri-tiques des technologies, des réseaux et desarchives au cœur de ses préoccupations, Laurence Rassel a notamment été commis-saire avec Mar Villaespesa de Todas lasvariaciones son válidas, incluida esta,rétrospective d’Esther Ferrer, pionnière de la performance espagnole, tenue dès 2017 au Palacio de Velázquez, sous l’égide dumusée Reina-Sofia. Elle est actuellementdirectrice de l’École de recherche graphiquede Bruxelles (ERG). Mar Villaespesa estconservatrice indépendante depuis lesannées 1980. Elle a fondé et édité différentsmagazines et publications. Elle organise desséminaires et expositions et a travaillé denombreuses années à l’université internatio-nale d’Andalousie.

L’EXPOSITION

Esther Ferrer. Todas las variaciones son válidas, incluida esta.Le travail artistique d’Esther Ferrer (1937) estinscrit dans les mutations survenues dans les années 1960, traversées par les pratiquesféministes, l’art minimal et l’art action. Dansune Biographie pour une exposition, elle écritsur une affiche tenue devant son corps que,depuis 1967, alors membre du groupe ZAJ,« elle fait des installations, travaille la photo,fait des objets, des projets, et surtout desactions et des performances », et depuis, ellen’a plus arrêté. Variation sur l’exposition Esther Ferrer. Todaslas variaciones son válidas, incluida esta pré-sentée au Palacio Velazquez du Musée ReinaSofia à Madrid (du 26 octobre 2017 au 25février 2018), la sélection d’œuvres proposéeau CN D explore les différentes formes abor-dées par l’artiste : actions, photographies,dessins, vidéo, œuvres sonores, entre autres.Des nombres premiers au nombre de pas, au rythme du temps, l’exposition invite à mar-cher, compter, écouter, calculer, à se mettre enmouvement suivant différentes combinatoires.Le public est invité à faire usage d’objets sim-ples : bâton, corde, chaises, pendule, mis à sadisposition, et selon les instructions conçuespar Esther Ferrer : toutes les versions sontvalables, y compris celles-ci.

Esther FerrerParcourir un carré de toutes les manièrespossibles

Esther FerrerSilhouettes

Page 8: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

15

LA LISTE DES ŒUVRES (sous réserve)

Atrium – rez-de-chaussée

Un espace à traverserannées 1990, 10’48’’vidéo

Questions aux Français et aux Françaises(version courte)2018, 5’20’’œuvre sonore

Questions aux Français et aux Françaises2018, 9’12’’œuvre sonore et retranscription du texte

Les mots du poème1984 (version 2018), 3’52’’œuvre sonore et retranscription du texte

Dans d'autres lieux1995 (version 2018), 1’56’’œuvre sonore et retranscription du texte

Pourquoi, comment, où, quand ?2005 (version 2018), 1’27’’œuvre sonore et retranscription du texte

18 juin 20002000 (version 2018), 6’30’’œuvre sonore et retranscription du texte

Un coup de dés...1968 (version française 1992), 7’œuvre sonore

Galerie – rez-de-chaussée

Poème des nombres premiersannées 1970-1990dessins et fil sur papier et papier calque

Proyectos espacialesannées 1980dessins sur papier millimétré et maquettes

Hommage à Boschannées 1980photographie

Le fil du temps1978photographie

Música Angelical (musique céleste)2002, 1983 /1991photographies

14

L’ARTISTE

Esther FerrerNée en 1937 à Saint-Sébastien (Espagne), ins-tallée à Paris depuis les années 1970, EstherFerrer est principalement reconnue pour sapratique de l’art corporel, qu’elle décline sousforme de performances, de photographies, de vidéos, d’installations, d’œuvres sonores,de poésies et de conférences. Artiste autodi-dacte, elle s’est d’abord formée aux sciencessociales et au journalisme, rédigeant des arti-cles sur l’art ou sur le féminisme, avant de seconsacrer à l’art performance dont elle estl’une des pionnières en Espagne. Après avoirmonté un « Atelier de libre expression enfan-tine » avec le peintre José Antonio Sistiara,elle rejoint en 1967 le groupe Zaj, collectif quirevendique l’héritage de Duchamp et de Cage,proche dans l’esprit de Gutaï et de Fluxus. En totale autonomie, elle y expérimente des actions radicales, en lien étroit avec lamusique (notamment celle des compositeursJuan Hidalago et Walter Marchetti), rencontreWolf Vostell et Joseph Beuys. Née pendant laguerre civile et ayant grandi sous la dictaturefranquiste, elle conserve de sa jeunesse ungoût féroce pour la liberté et la résistance,concevant l’art comme un moyen d’émanciperle sujet. Cet activisme se retrouve dans sontravail photographique, débuté dans lesannées 1970, des autoportraits cousus oubrodés par lesquels elle exprime notammentson plein engagement féministe.Son minimalisme, basé selon ses proprestermes « sur la rigueur de l’absurde », associehumour et force conceptuelle dans des dispo-sitifs dépouillés à l’extrême. Le détournementet l’ironie président en effet à l’élaboration de ses performances, où le corps est invité à manipuler des éléments élémentaires ou àexécuter des actions simples (compter, mesu-rer, marcher, porter sur la tête…). Privilégiantl’idée à la forme, et entretenant un rapportcritique à la production d’objets, elle refuse le spectaculaire comme le recours au pathos.Ses recherches portent une attention touteparticulière à la notion de temps, à la mise en scène de soi ou encore à la répétition.Représentante de l’Espagne à la Biennale deVenise de 1999, plusieurs fois primée dansson pays, Esther Ferrer a fait l’objet de nom-breuses expositions monographiques à travers

le monde, notamment au Musée national centre d’art Reina-Sofía (Espagne), au FracBretagne (Rennes), au MAC/VAL (Vitry-sur-Seine) ou au musée Guggenheim (Bilbao). Esther Ferrer est représentée en France par la Galerie Lara Vincy (Paris).

Ida y vuelta y vice-versa1981photo-collage

Identidad biografia1982photo-collage

Studio 1 – rez-de-chaussée

Au rythme du temps action avec un pendule créée à la fin desannées 1960partitionœuvre sonore, 1992, 30’

Studio 12 – rez-de-chaussée

Parcourir un carré de toutes les manièrespossiblescréée comme œuvre visuelle dans les années1980, développée comme performance audébut des années 1990figures, maquettes, dessins, carnets, photo-graphies, partitions (originaux et fac-similé) archive audio, 54’18’’

Traces, sons, espacesaction créée à la fin des années 1960photographies, bâtons avec support en bois,partitions

Un espace à traverseraction créée à la fin des années 1970photographies, chaises, partitions

Action pour 7 chaisesaction créée à la fin des années 1980photographies, partitions, chaises

Silhouettesaction créée à la fin des années 1960photographies, partitions, corde

Page 9: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

1716

Entretien avec Olivier Saillard, commissairePropos recueillis par Florian Gaité,août 2018

Florian Gaité — Le Musée éphémère de lamode que vous avez fondé est porté par unprojet singulier qui congédie toute mission de conservation. Est-il malgré tout un muséecomme les autres ?

Olivier Saillard — Le Musée éphémère de lamode a été fondé à l’occasion d’une expositionorganisée au Palazzo Pitti à Florence en 2017.Son statut est en revanche tout aussi éphémèreque son titre. Il ne répond à aucune démarcheadministrative, n’a pas de statut légal. Il estvulnérable, il appartient à tout le monde, c’est-à-dire à personne, et c’est peut-être même encela qu’il est le plus éloquent. Quand dans larue une chaussure est échouée sur un bancpublic, qu’un tee-shirt sert de pare-soleil,qu’une jupe est abandonnée au sol, le Muséeéphémère, sans billetterie officielle, est déjà là.Il s’impose sans s’annoncer, il se découvre. Le Musée éphémère n’est pas consacré qu’auxvêtements ou aux accessoires qui font et défontles modes. Il est aussi constitué d’images et detextes qui habillent les époques successives.

FG — Il se retrouve ici engagé aux côtés degrands musées internationaux : votre muséea-t-il l’ambition d’être aussi institutionnel queces établissements ?

OS — La proximité avec les autres grandes institutions nous flatte, mais en rien le Muséeéphémère ne peut s’enorgueillir de ce voisi-nage. Il ne possède aucune collection, n’estdirigé par aucun directeur et ne possède aucunconservateur à son service. Notre ambitionn’est d’ailleurs pas d’accéder à cette institution-nalisation, mais au contraire de lui tourner le

dos, de revenir aux musées tels qu’ils étaientavant l’ère des records (de fréquentations, demécénat, etc.). Je suppose aussi que ce muséeest très lié à mon parcours personnel. Il répondau souhait de trouver une zone de créationcomme au désir de formuler ma réponse aumilieu de la mode, après y avoir travaillé pen-dant vingt-cinq ans en qualité de conservateuret de directeur de musée. C’est en effet laconscience des limites de ces « musées entre-prises » qui m’a suggéré le projet d’un muséesans porte ni cimaise.« Nos voix résonnent à la gloire de ta venue.Statue nouvelleDans un musée rempli de courants d’air. Ta nuditéMenace notre sécurité. Nous t’entouronscomme des murs ébahis »(Sylvia Plath, Ariel, « Chant du matin », 1965)

FG — Au-delà du clientélisme et de l’injonctionà la rentabilité, le Musée éphémère de la modea-t-il une mission critique, par exemple de lamuséification ?

OS — Il incarne une réflexion critique sur lecorps et la facticité de sa restitution dans lesmusées de mode, où il s’assimile finalement à une nature morte. Les vêtements qu’onmuséifie sont alors des natures mortes plusmortes encore. Depuis une période assezrécente, les institutions muséales commen-cent à acquérir des vêtements sur commande,juste après le défilé, qui n’ont donc pas étéportés. Ces enveloppes molles, comme naufra-gées, peuvent laisser chez le visiteur uneimpression morbide, celle que les corps sesont évanouis. Ce constat ne se limite d’ail-leurs pas à la mode, je vois beaucoup de piècesd’art contemporain qu’on pourrait dire en étatde muséification dès leur création.

FG — Pour L’invitation aux musées, Zoé Guédard a choisi la forme d’un défilé, une

« Alors que les styles s’excluent l’un l’autre, lemusée se définit par la coexistence virtuellede tous les styles, par leur promiscuité dansune même superinstitution culturelle, mieux :par leur comparabilité en valeur sous le signedu grand étalon-or de la culture. La mode faitde même selon son cycle : elle commute et faitjouer entre eux tous les signes absolument. La temporalité des œuvres de musée est celledu “parfait”, de la perfection : c’est l’état trèsparticulier de ce qui a été, et jamais actuel.Mais la mode non plus n’est jamais de l’ac-tuel : elle joue sur la récurrence des formes à partir de leur mort et de leur stockage,comme signes, dans une réserve intemporelle.La mode bricole d’une année sur l’autre ce qui “a été”, avec une liberté combinatoire trèsgrande. D’où son effet de “perfection” instan-tanée. Perfection muséale elle aussi, mais de formes éphémères. Inversement il y a dudesign dans le musée, qui fait jouer les œuvresentre elles comme les valeurs d’un ensemble.Mode et musée sont contemporains, complices,et s’opposent ensemble à toutes cultures antérieures, faites de signes inéquivalents etde styles incompatibles. »

Jean Baudrillard, L’Échange symbolique et lamort, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèquedes Sciences humaines », 1976.

Musée éphémère de la mode Samedi 10 et dimanche 11 novembre

Page 10: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

18

forme chorégraphique qui a ici toute sa place.Vous avez de votre côté co-signé avec MathildeMonnier Performance pour 27 chaussures pré-sentée au Grand Palais en juin dernier, commeont pu le faire avant vous Jean-Paul Gaultier etRégine Chopinot. Comment envisagez-vousces collaborations entre danse et mode ?

OS — Pour ma part, je n’ai pas envisagé cettecollaboration avec le drapeau de la rencontre de la mode et de la danse. La rencontre avecMathilde Monnier en sa qualité de chorégrapheet d’interprète était au centre du sujet. Il s’agissait dans cette performance de mettreen scène des chaussures et d’organiser desmarches en les articulant à la forme du défilé,qui peut être de mode, militaire ou une simplepromenade. Le dialogue entre les deux disci-plines ne s’est donc pas exprimé en termes decostumes, mais bien plutôt de pas. Entre ladanse et la mode, l’impossibilité de conserverles corps au musée est une évidence.Les musées de mode peuvent tout au plusconserver les costumes, ces enveloppes qui ont permis aux arts vivants de prendre forme.

FG — Le projet comprend également une installation qui déconstruit les normes del’exposition muséale, dans la veine d’ailleursce que vous aviez proposé au Palazzo Pitti,quelle présentation allez-vous adopter ?

OS — Le projet du Musée éphémère consisteprécisément à s’émanciper des vitrines, socleset présentoirs qui forment le vocabulaire del’exposition muséale, à l’exception de ceux quenous rencontrons dans notre quotidien commeles portemanteaux, les cintres ou les dossiersde chaises. Les vêtements réunis (qui appar-tiennent tous à des personnes du milieu de lamode de mon entourage) sont échoués là, aban-donnés dans cette chambre qui est aussi unespace de retail, et avec eux, le souvenir desgestes qui les ont préemptés.

FG — Au vu des expositions, on a souvent l’impression que les musées de la mode seconcentrent davantage sur la couture que surle prêt-à-porter. Ici, c’est le contraire, Zoé Guédard observe d’abord la foule anonymepour réaliser ses silhouettes, était-il importantpour vous de documenter la mode ordinaire ?

OS — Permettez-moi de vous corriger, maistous les musées de la mode dans le mondeconservent la haute couture tout autant que le prêt-à-porter ou le vêtement ordinaire. C’estmême grâce au socle du musée que toutessortes de créations peuvent s’élever au niveaude la haute couture. Le Musée éphémère s’inté-resse lui aussi à tous les statuts du vêtement,du plus convenu au plus répandu, du plussophistiqué au plus négligé. Le projet de ZoéGuédard vient précisément porter un regarddescriptif sur ce vêtement de la rue, tel qu’il est porté et vu. 

FG — Elle présente donc une collection ano-nyme créée par les porteurs des vêtements, qui deviennent en somme des co-créateurs…

OS — Issey Miyake a pour habitude de direqu’un vêtement est en cours de finalisation à 70 % lorsqu’il sort de l’atelier de couture,mais qu’il n’est définitivement achevé qu’àpartir du moment où on le pose sur desépaules. Celui qui porte un vêtement est defait engagé dans la création. Dans les musées,les griffes de couturiers et de marques comp-tent d’ailleurs tout autant que ceux dont ilsportent l’empreinte. On ne peut jamais dissou-dre cette seconde peau. Les musées de modereçoivent beaucoup de donations, que ce soitsuite à une disparition ou parce qu’une per-sonne décide de se délester de son vivant d’unepartie de ses souvenirs. Dans les deux cas, levêtement est porteur de la mémoire de ceux àqui il a appartenu, celle de leurs corps bien sûrmais aussi celle des événements de la vie.

FG — Votre musée est confronté aux mêmesdifficultés de conservation que les institu-tions qui s’intéressent aux arts vivants, àsavoir l’impermanence des collections : lescent quarante looks réalisés ne seront doncpas conservés ?

OS — Le musée éphémère de la mode ne possède aucune collection. À l’issue de lamanifestation, les vêtements utilisés, simplesoutils, seront éparpillés et ceux qui sontexposés dans l’installation rendus à leurspropriétaires. La captation du défilé et lesnotations pourront être conservées, mais elles sont surtout là comme une matière elle-même éphémère.

Olivier SaillardPerformance pour 27 chaussures

Page 11: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

21

LA LISTE DES ŒUVRES

Grand studio rez-de-chaussée

Performance pour 27 chaussures(durée 40 minutes)Conception Olivier SaillardAvec Mathilde MonnierQu’ils s’agissent de mannequins ou de mili-taires, le défilé qu’ils ordonnent est undéplacement de troupe, une parade commé-morative ou strictement au service desapparences de la mode. Vêtue d’une chemiseblanche et gainée de collants noirs, MathildeMonnier s’approche nu-pieds. Autour d’elledes chaussures sombres comme des ombrespréfigurent les pas à venir. Tandis qu’ellechausse à tour de rôle les mocassins, les bot-tines, les Richelieu en nombre, sa progressionlente est un acheminement droit, rectiligneconformément aux défilés usuels. Pourtantseule sur scène, Mathilde Monnier défile engroupe. Ses semblables sont les pas de cuirencre qu’incarnent les chaussures. Ce sont les archétypes de carbone dont le soleffleuré garde l’empreinte poétique du pas-sage. Au fur et à mesure de sa déambulation,une marche silencieuse de souliers à terrel’accompagne, la devance ou la contredit. Les acteurs muets de cette randonnée mysté-rieuse épousent ses pas, glissent sur et sous ses pieds. Ils la forcent aux positionsordinaires ou rêvées du marcheur arpenteur.Courbée, allongée, debout, Mathilde Monnierpoursuit un chemin de solitude modifié àpeine par les humeurs d’un corps chaussé,érigé ou converti. Sans distraction aucune,comme les militaires droits dans leurs bottes,comme les mannequins plantées sur leurstalons aiguilles, Mathilde Monnier avance au ras du sol, tête haute. À plat, sur des« semelles de vent », elle donne au défilé destraits de jambes nouveaux. Ce costume dutemps arrêté et suspendu de la déambulationagit comme le souvenir d’une marche immo-bile et pourtant active, solitaire et pourtantcollective.

L’atelier de couture(durée 30 minutes environ)Conception Olivier SaillardAvec Axelle Doué et Martine LenoirSur scène, Axelle Doué, mannequin qui adébuté chez Madame Grès, et Martine Lenoir,ouvrière dépositaire de la mémoire des drapésde la célèbre couturière, réalisent à vue, àpartir de tee-shirt de fortune, des plissésd’épingles qui transforment un vêtementaujourd’hui traditionnel en œuvre de hautecouture. Sophistiqués ou abusivement simples, les drapés fixés à peine par le filspontané ou les épingles en transit soudentun défilé de vêtements qui se montrent aumoment même où ils se créent. 

Studio 9 – deuxième étage

Les DoublesLes vêtements exposés sont les carcassesinanimées de celles et ceux qui les ont portés.Abandonnés plus qu’installés sur les chaisesde cirque, un défilé singulier, silencieux estjoué. Chacune des tenues exposées appartientà un acteur du monde de la mode. Créateur,journaliste, professionnel, muses ou modèlesacceptent de se séparer d’un double d’euxmême, l’instant d’un défilé qui s’est éteint.Jusqu’aux mannequins eux-même dont il ne reste que les dépouilles échouées sur lepodium, cette sélection de vêtements racontela situation du corps déserté, du trouble quiémerge de ces natures mortes davantage quela description formelle et esthétique du vête-ment lui-même tel que les musées de modeconventionnels l’espèrent.

Studios 7 et 8 – deuxième étage

Carte blanche à Zoé GuédardConception Zoé GuédardAvec Romy Texier et Andrew Dusser« Ma carte blanche est un défilé de rue, dansune chambre, en rez de chaussée.Ce sont des notations de rue pour un défilé de chambre. Un défilé sans couturier que vous pouvezobserver.Je descends dans la rue pour regarder et noterles gens qui marchent.Une première fois en août 2018 dans le cadreestival, vacancier.

20

LE MUSÉE

Musée éphémère de la mode Récemment activé au sein du Palazzo Pitti àFlorence, à partir des collections de la Galeriedu costume et de la mode, le Musée éphémèrede la mode entend remédier à son niveau à la rareté des institutions dédiées à la créationtextile. Lancé à l’initiative d’Olivier Saillard,performeur, historien et ancien directeur duPalais Galliera, le projet se distingue par l’in-ventivité de son accrochage, pensé à reboursdes académismes de la muséographie institu-tionnelle. Sa présentation s’émancipe ainsi à la fois des hiérarchies et des chronologiespour penser une dramaturgie en prise directeavec le lieu qui l’accueille. Costumes et acces-soires sont non seulement associés selon desaffinités chromatiques ou la proximité desmatières, mais aussi et surtout de façon sou-vent intuitive, sans prétendre à une mise enordre raisonnée. Servi par une scénographieaussi élégante qu’inattendue, ce muséemobile invite à un parcours d’un tout nou-veau genre qui remodèle notre rapport auvêtement et le regard qu’on peut porter surlui. Le Musée éphémère de la mode installe en effet une temporalité d’exposition en complète rupture avec le rythme effréné desdéfilés, pour offrir aux pièces l’occasiond’une contemplation patiente, sinon atten-tionnée. Avec ce projet itinérant, unique enson genre, Olivier Saillard cherche à résoudrede façon originale l’équation entre le carac-tère fugitif de la mode et la pérennité descollections patrimoniales, à réaliser enquelque sorte la synthèse du fugace etde l’éternel.

L’ARTISTE

Olivier SaillardDirecteur artistique, image et culture de la maison JM Weston depuis janvier 2018, Olivier Saillard a la responsabilité des collections chaussures homme et femme, des collections accessoires et de l’image de la maison. Diplômé en histoire de l’art, il estnommé directeur du Musée de la mode deMarseille en 1995. En 2000, il devient respon-sable de la programmation des expositionsmode au Musée des arts décoratifs de Paris. À partir de 2010, il est nommé directeur duPalais Galliera, Musée de la mode de la villede Paris, où il mettra ses connaissances et son expertise au service des collections pen-dant huit ans. On lui doit plusieurs grandesexpositions comme Yohji Yamamoto juste des vêtements et Christian Lacroix, Histoirede vêtements aux Arts décoratifs, AzzedineAlaïa  puis Jeanne Lanvin au Palais Galliera,Madame Grès, La couture à l’œuvre et Balenciaga, L’œuvre au noir au Musée Bourdelle et plus récemment Le Musée éphémère de la mode au Palazzo Pitti de Florence. Il est auteur de plusieurs ouvragesdont une Histoire idéale de la mode contempo-raine aux Éditions Textuel. En 2005, OlivierSaillard a été lauréat de la Villa Kujoyama àKyoto. Depuis, il mène en parallèle de sontravail d’historien une réflexion poétiqueprésentée sous forme de performances. Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris,il crée avec Tilda Swinton The ImpossibleWardrobe (2012), Eternity Dress (2013)et Cloakroom (2014). En 2015 il présente àNew York puis au CN D et à Venise ModelsNever Talk créé sur les souvenirs de sept mannequins. En 2016, il présente au Muséed’Art moderne Sur-Exposition avec CharlotteRampling et Tilda Swinton. En 2017, il pré-sente Couture essentielle au CN D, précisantainsi une réflexion sensible où le vêtementet la mémoire sont toujours au cœur dusujet. En 2018, il créé sa première collectionde tee-shirts haute couture Moda Povera.

Page 12: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Olivier SaillardLes Doubles

Page 13: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

24

Une seconde fois en septembre 2018 dans lecadre urbain de la rentrée. Pendant sept jours, je fais l’inventaire du défiléde la foule. Je prélève et écris la partition de dixsilhouettes chaque jour. J’ai quelques soixante-dix figures à la fin d’une première semained’enquête. Et cent quarante looks possibles à lafin de ces deux semaines d’observation.Mes notations de rue sont la partition pourmon défilé de chambre présenté au CN D.J’utilise l’imprécision de mes notationscomme espace d’interprétation et de stylisme. Ce défilé et les notations sont présentés dansune installation, construite et mise au pointentre septembre et novembre 2018. Ce cadre,décor ou set se situe entre le lieu de l’intimitéd’une chambre et celui de l’objectivité d’unevitrine sur rue. J’y expose la somme de mesannotations et ma collection : une garde-robedu quotidien, des vêtements anonymes, lesoutils de ma performance.Ainsi, je présente un défilé de chambre sanssaison, sans âge et sans genre. J’en suis la modèle, une doublure me relaieparfois. En continu je m’habille, défile puis porte l’allure suivante. Des passages dont je ne suisni vraiment la styliste ni vraiment la modèle. Ce corpus est à nouveau noté, c’est-à-dire icifilmé puis diffusé en simultané, nouveaupoint de vue, nouvelle notation pour mondéfilé de chambre. »

25

Olivier SaillardLes Doubles

Page 14: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

27

L’EXPOSITION

Failed British SilverL’argent Britannia semble être l’une des mar-chandises les mieux protégées au monde. Desévaluations et des contrôles rigoureux sontmenés pour assurer une qualité optimale, péren-niser cet héritage et garantir ainsi sa valeur surle marché. Lorsque Cally Spooner, artiste etauteure, a présenté l’argent métal avec lequelelle souhaitait faire une sculpture au bureaud’évaluation de Londres, il a été rejeté puisqu’ilne répondait pas aux attentes en termes de qualité et de pureté. Il ne correspondait pas aux normes du secteur telles que définies parla doxa économique et monétaire de la Grande-Bretagne, elle-même renforcée par des siècles de capitalisme mondialisé et que l’on qualifieaujourd’hui de néolibéralisme ; une doctrine qui repose sur l’individualisme, des économiesperformantes et la spéculation de marché.Dans l’univers des métaux précieux, cetélément mis au rebut n’a donc pas la moindrevaleur. Son degré d’oxydation est nul et il n’apas les qualités requises pour circuler sur lemarché financier international. Cally Spoonerserait arrêtée si elle cherchait à le vendre en lefaisant passer pour de l’argent Britannia vérita-ble. Son argent n’est ni une action ni un titre dequelque sorte que ce soit destiné à sauvegarderla richesse accumulée. Il déstabiliserait le mar-ché et rendrait tout type de standard totalementsuperflu. Ce lingot d’argent n’est pas échangea-ble, il ne remplit aucune fonction et ne répond à aucune norme. Ses caractéristiques ne se défi-nissent que par le prisme de l’absence, celui qui n’est pas. Il échappe même au langage àproprement parler puisque rien ne peut êtrecomplètement défini par son contraire ou sadéliquescence. Cet argent Britannia mis aurebut est instable, radical et chaotique.Il peut ainsi devenir notre plus grand espoir.

Hendrik Folkerts, commissaire, juin 2018

26

Art Institute of Chicago Samedi 10 et dimanche 11 novembre

Cette exposition temporaire met en réson-nance les questions soulevées par le projet derecherche OFFSHORE (2016-2018) de CallySpooner avec A Major Deadline, une nouvelleinstallation dont la première aura lieu à l’ArtInstitute of Chicago en avril 2019. Avec FailedBritish Silver, Spooner documente son précé-dent projet de recherche tout en fabriquant de la matière pour le prochain.

Cally SpoonerBy all accounts this was a very ordinary man

Page 15: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

2928

[Début de l’enregistrement à 00:00:00]

Voix de femme: [00:00:16] (S’éclaircit la voix) (silence)[00:00:30] ([reniflement)] (s’éclaircit la voix) (reniflement) (s’éclaircit la voix)[00:01:00] (s’éclaircit la voix) (s’éclaircit la voix) (s’éclaircit la voix).[00:01:23] Um. Mmm. [00:01:30] (silence).[00:01:34] Mmm. [00:01:43]. Mmm, mmm, mmm.[00:01:52] Uh-hmm, uh-hmm, uh-hmm.[00:01:59] Mmm, mmm, mmm.[00:02:03] Mmmmm.[00:02:14] Um, um, mmm, uuuuhmmmmmmm.[00:02:28] Mmm.[00:02:30] Um.[00:02:30] Mmm.[00:02:33] Ummmmmm.[00:02:36] Ummmmmmmmmmmmmm (entremêlement).[00:02:46] Ummmmmmmmmmmmmmmm.[00:02:52] Mmm.[00:02:54] Mmmmmmmmmmmmm (entremêlement).[00:03:02] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:03:12] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:03:21] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:03:28] Uh-hmm, uh-hmm, uh-hmm.[00:03:29] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:03:34] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:03:35] (S’éclaircit la voix). Um, Um.[00:03:39] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm (voix aiguë).[00:03:49] (Soupir).[00:03:53] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:02] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:05] (Les voix s’entremêlent) Hmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:13] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:19] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:25] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:33] Uuummmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm (entremêlement de voix).mmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:04:41] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm[00:04:50] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm (voix encore plus aiguë).[00:05:00] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:05:08] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:05:16] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:05:24] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm.[00:05:31] Hmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm (le ton monte).[00:05:37] Hmmmmm.[00:05:38] Hmmmmmmmm (voix qui s’entremêlent).[00:05:45] Hmmmmmmmmmmm (ton qui monte).[00:05:52] HmmmmmmmmmmmuuuUHHHHHHH !!! (ton de plus en plus élevé) DEMI-TOUR !!!!(silence)[00:06:22] (S’éclaircit la voix).[Fin de l’enregistrement à 00:06:31]

Le plateau du CN D est un crime. Un meurtre. Cependant, un pouvoir étrange et autoréférentielest en jeu. Le témoin est la victime. L’auteur du crime est le témoin. Le tueur et la victime sontune seule et même personne, mais quel est ce corps ? Et où se trouve-t-il ? Les indices et les sus-pects sont dispersés dans le CN D, ils peuvent surgir à n’importe quel moment et dans n’importequel ordre : time-codes, sons, grattages, amendements, une mariée, une odeur, une femme fatale,un « drag » dialectique, un changement de plan, un atelier, un Homme Ordinaire ; un échauffe-ment rédempteur, un détective en herbe, et un lingot de Failed British Silver (argent Britannia).

Cally Spooner

Cally SpoonerWarm-up

Page 16: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

31

LA LISTE DES ŒUVRES

Palier Est – premier étage

Failed British Sivlerimpression, encre, stylo, papier2018

Foyer des danseurs – premier étage

And As the Medieval Cloisters ConnectSeamlessly with The Corridors of Power… I’m Quietly Confident… (U-Turn !)installation sonore2012

Bed Time Beatsréveil hotel2016

Studio 2 – premier étage

Warm-updanseur, étirement2016

Studio 3 – premier étage

OFFSHOREen continu2016-2018

Studio 4 – premier étage

MM7Hargent Britannia2018

Soundtrack for a trouble timeinstallation sonore2017

By all accounts this was a very ordinary manorateur, langue, savon2018

He wins everytime, on time and under budgetinstallation sonore2016

30

LE MUSÉE

Art Institute of Chicago Fondé en 1879, l’Art Institute of Chicagoaccueille, avec plus de 300 000 pièces, la plus importante collection permanente des États-Unis, mondialement reconnue pourses chefs-d’œuvre impressionnistes et post-impressionnistes (de Renoir, Van Gogh ouMonet). Parmi les plus vastes lieux culturelsdu pays, le musée a agrandi l’espace dévolu àses collections d’art moderne et contemporainen 2009, avec l’aménagement de son annexeThe Moderne Wing, confiée à Renzo Piano.Avec elle s’affirme la volonté pour le musée de porter son regard bien au-delà des artsplastiques, notamment en direction de laphotographie, de l’architecture, des artsdécoratifs, de la création textile et du design.Transhistorique et pluridisciplinaire, lacollection du musée fait dialoguer entre ellesles cultures du monde entier (africaine,américaine, amérindienne, européenne etasiatique), les traditions endémiques avec les objets vernaculaires, parmi lesquels desterres cuites Anasazi, des armures du Moyen-Orient, des sarcophages égyptiens, descéramiques de Chine, ou encore les fameusesminiatures de la salle Thorne. Commissairepour la Documenta 14 ou au StedelijkMuseum d’Amsterdam, où il a égalementcoordonné le programme De Appel, HendrikFolkerts a rejoint l’équipe de l’Art Institute ofChicago en 2017. Il a en charge l’organisationd’expositions et de cycles de performances,ainsi que la mise en place de partenariats etde projets internationaux.

L’ARTISTE

Cally SpoonerCally Spooner est une artiste et auteure quicrée un univers dans lequel s’entremêlent des références aux livres, des questionsthéoriques, des films, de la musique pop ou encore des émissions d’actualité. Sesinstallations sont de différentes natures :productions live, installations vidéo, sonores,chorégraphies. Elles peuvent égalementprendre la forme de fictions, de lectures et de scripts. Son travail commence telle uneleçon de philosophie pour aboutir dans unentre-deux, entre une création permanente et officielle et un processus fluctuant etincertain ; de quoi déstabiliser les équilibresentre ceux qui dirigent les organisations et la pensée et ceux qui ne détiennent pas ce pouvoir.Cally Spooner est née en 1983. Elle vit ettravaille à Athènes. Son travail a été présentélors d’expositions personnelles au Centred’art contemporain de Genève (2018), à laWhitechapel Gallery de Londres (2017), auNew Museum à New York et au StedelijkMuseum à Amsterdam (2016). Elle estprésente au Swiss Institute de New York et au Castello di Rivoli à Turin en 2018 et à l’ArtInstitute of Chicago en 2019. Elle a participéà des expositions collectives à la SerpentineGallerie de Londres et au Kunsthaus deZurich en 2017. Son livre Scripts a été publiéen 2016 aux éditions Slimvolume et sonroman Collapsing In Parts chez MoussePublishers en 2012. Spooner s’est vue décernerla bourse d’études Stanley Picker de laKingston University de Londres en 2018 et a gagné le Illy Present Future Prize en 2017.

Page 17: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Ismaïl BahriLigne

Page 18: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

3534

RENDEZ-VOUS 24 NOVEMBRE

14h30Romain Gandolphe Le peu qui m’appartientEspace de consultation – premier étage

15h Marianne Mispelaëre No Man’s LandStudio 6 premier étage

15h30Esther Ferrer Le chemin se fait en marchantHors les murs dans les rues de Pantin

16h30 Romain Gandolphe Le peu qui m’appartientEspace de consultation – premier étage

19h Romain Gandolphe Le peu qui m’appartientEspace de consultation – premier étage

RENDEZ-VOUS 25 NOVEMBRE

14hGuillaume Désanges Une histoire de la performance en 20 minutesStudio 6 – premier étage

14h30 Romain Gandolphe Le peu qui m’appartientEspace de consultation – premier étage

15h30Esther Ferrer Le chemin se fait en marchantHors les murs dans les rues de Pantin

16hMarianne Mispelaëre Le poids de l’actifStudio 6 – premier étage

17h30Romain Gandolphe Le peu qui m’appartientEspace de consultation – premier étage

pages 42-47

Serralves – Museu de ArteContemporãnea

EN CONTINU DE 14H À 20H

Francisco TropaGrand studio – rez-de-chausséeFoyer des danseurs, Studio 2 Studio 3, Palier Estpremier étage

RENDEZ-VOUS 24 & 25 NOVEMBRE

19hSofia Dias et Vítor Roriz Choses sans ombreStudio 2 – premier étage

pages 36-41

MAGASIN des horizons

EN CONTINU DE 14H À 20H

Ismaïl BahriLigneDénouementStudio 4 – premier étage

Nina Beier & Marie Lund The ImprintAtrium – rez-de-chaussée

Marie Cool Fabio Balducci Sans titre, 2003 – Ruban adhésif transparentSans titre, 2004 – 2 feuilles de papier format A4Sans titre, 2006 – Fil de coton, tableSans titre, 2016 – Fenêtre ouverte, bureau,lumière du soleil, 2 feuilles de papier format A4(aC.B) documenta 14Salle de conférence – premier étage

Audrey CottinPantin Clapping GroupAtrium – rez-de-chaussée & Premier étage

Adélaïde Feriot Regarder le soleilStudio 6 – premier étage

Yona Friedman Prototype improvisé de type de « nuage »Quelque part au CN D

Jirí Kovanda One above anotherAtrium – rez-de-chaussée

Maria Laet Notes on the limit of the seaSalle d’étude – premier étage

Marianne Mispelaëre Rencontre séparationStudio 5 – premier étage

Jean-Christophe Norman Ulysses, a long wayHors les murs dans les rues de Pantin

Aurélie Pertusot Hôte-Couture Hors les murs, rue Victor-Hugo

Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía

EN CONTINU DE 14H À 20H

Esther FerrerTodas las variaciones son válidas, incluida esta Atrium, Galerie, Studio 1 et Studio 12 – rez-de-chaussée

pages 8-15

WEEK-END #2

24 & 25.11.2018

Page 19: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

3736

Entretien avec CristinaGrande, commissairePropos recueillis par Florian Gaité, septembre 2018

Florian Gaité — Depuis plus de vingt ans, la Fondation Serralves collabore étroitementavec Francisco Tropa à l’occasion d’exposi-tions et de performances ; elle a égalementfait l’acquisition de cinq pièces pour sa collec-tion permanente et son parc de sculptures.Comment décririez-vous la relation deconfiance que vous avez nouée avec lui ?

Cristina Grande — Ma rencontre avec l’œuvreet l’artiste est antérieure à l’ouverture dumusée d’art contemporain, elle remonte auxannées 1990, mais elle s’est renforcée depuissa participation à des expositions et sa pré-sence dans la collection de Serralves. En tantque curatrice en arts vivants, collaborer avecun artiste visuel est complètement cohérentavec le projet de Serralves – Musée d’artcontemporain, qui a véritablement été pion-nière en matière de transdisciplinarité. Il fautdire aussi que le travail de Francisco Tropa seprête particulièrement à ce genre de rencon-tres. Notre complicité s’est donc établie sur labase d’une proposition, celle de venir travail-ler sur la scène de l’auditorium, dans le cadred’expositions ou au sein de projets collabora-tifs, impliquant d’autres artistes. Ce à quoi il a répondu par exemple avec Géant, perfor-mance durant laquelle il reconstitue morceaupar morceau un squelette géant, ici reprogram-mée pour L’invitation aux musées, ou la piècebasée sur l’œuvre de Raymond Roussel, TrêsMoscas, réalisée avec Pedro Morais, JorgeQueiroz et André Maranha, dans laquelledeux objets mis en comparaison dialoguaientavec un théâtre de marionnettes (les Bonecosde Santo Aleixo).

FG — Le rapport à l’espace a également joué un rôle déterminant dans votre choix d’inviter cet artiste, quelles opportunités l’architectureparticulière du Centre national de la danseoffre-t-elle pour exposer son travail ?

CG — L’architecture brutaliste du Centre m’aen effet convaincue d’y programmer l’œuvrede Francisco Tropa avec laquelle elle résonneassurément. Tout comme elle, elle est radicale,bien que chargée symboliquement, et mêmepolitiquement. Elle retourne à l’essentiel, tout comme Francisco Tropa cherche à saisirquelque chose de l’ordre de l’ancestral. Laseconde motivation tient à l’ouverture de cetespace, qui permet d’organiser la circulation,ou bien plutôt la traversée du parcours quenous avons pensé. Le projet se conçoit eneffet comme un chemin de traverse créant uneforme de « chorégraphie narrative », jalonnéede pièces à activer.

FG — Le programme que vous proposez, focalisé sur son travail de sculpture, met enlumière ses liens étroits et constants avec lesarts vivants. Pourrait-on parler d’une formede « dramaturgie plastique » pour qualifierson travail ? Francisco Tropa est-il par cer-tains aspects un metteur en scène ?

CG — À proprement parler, Francisco Tropareste avant tout un sculpteur, mais sa façonde concevoir ses expositions réside bien dans le fait de faire actionner ses pièces pard’autres (le public, des performeurs…), ce quipeut faire tendre son travail du côté de ladramaturgie. Il y a toujours un processusd’activation qui donne à ses projets la teneurd’une expérience éminemment temporelle etperformative. Francisco Tropa a consciencede cela, de produire des transformationsincessantes et de faire de ses expositions desévénements mutants, où l’espace et le tempssont toujours transitoires. C’est notamment

Serralves – Museu de Arte ContemporãneaSamedi 24 et dimanche 25 novembre

Page 20: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

38

le cas pour Lanterne, qui emprunte sondispositif au théâtre d’ombres, mais aussipour sa pièce avec l’escargot ou encoreScripta activée par un duo de performeurs.

FG — Justement, parlons de cette nouvelle pro-position. Si le théâtre constitue une influencemanifeste dans son travail, qu’en est-il de ladanse ? L’invitation aux musées est-elle l’occa-sion de penser et d’éprouver ses relations àl’art chorégraphique ?

CG — Depuis que j’ai lancé cette invitation àFrancisco Tropa, depuis le début de notre dia-logue, nous avons en tête l’idée d’une nouvellepièce qui rencontrerait une autre forme, undispositif chorégraphique. Choisis d’un com-mun accord avec l’artiste, nous avons faitappel à Sofia Dias et Vítor Roriz dont le travailrencontre à bien des endroits celui de Fran-cisco Tropa : du point de vue des matériaux,du rapport mouvement/son, de la transdisci-plinarité, de l’attention soutenue à la relationentre temps et espace. Cette invitation dansl’invitation constitue un point central du pro-jet qui concrétise notre volonté de faire secroiser le visuel et le performatif. Pour cettenouvelle pièce, Le Perchoir du Goéland, il nes’agit d’ailleurs pas à proprement parler d’uneinteraction, au sens où les danseurs active-raient, mais plutôt d’une coexistence. Corps et sculpture cohabitent de façon autonome, ilspartagent un espace où ils peuvent coïncider,être en résistance, en tension.

FG — Francisco Tropa expose également lasculpture comme une action en soi, par exem-ple Escargot qui constitue une sculpturevivante dans laquelle un gastéropode parcourtune feuille de papier annoté. À la sculpturecomme art de l’espace, Francisco Tropa ajouteune dimension temporelle. Comment un commissaire d’exposition négocie-t-il aveccette durée ?

CG — C’est bien sûr un défi en tant que cura-trice de devoir penser une exposition avec des pièces à activer, d’autant que si FranciscoTropa traite toujours le temps et l’espaceensemble, c’est à la manière d’un sculpteur et non d’un chorégraphe ou d’un metteur enscène. Chez lui, c’est l’espace et les objets quidynamisent le corps, plus que l’inverse.

On peut penser à cette pièce, Scripta, danslaquelle des performeurs manipulent desobjets en bronze disposées sur des plateauxconstruits de part et d’autre de l’espace. Leurgestuelle crée une forme infinie, un paysagequi change constamment. Cette pièce opèreainsi à différents niveaux d’action, le défic’est de savoir organiser ces passages entredifférentes situations, qui déterminent elles-mêmes différentes perceptions.

FG — Francisco Tropa semble au fond brouil-ler toutes les catégories, quitte à perdre lespectateur…

CG — L’œuvre de Francisco Tropa neutralisebien des distinctions, elle remet notamment enquestion le partage entre perspective et mouve-ment, permanence et mobilité, figuration etabstraction, physicalité et symbolisme, tempset suspension. Ces indistinctions concourent, il est vrai, à créer un imaginaire autonome plussuggestif que prescriptif, qui s’appréhende surun mode avant tout sensoriel et intuitif. Sansses grilles de lecture habituelles, le spectateurn’a plus qu’à retrouver lui-même le sens de cesmétaphores, à lui de construire sa lecture ausein de ces allégories.

39

Francisco TropaLanterne

Page 21: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

4140

Paris, la Verrière, Fondation d’entreprise Hermès, le Mrac de Sérignan ou le Grand Caféà Saint-Nazaire. Ses œuvres ont intégré diffé-rentes collections privées et publiques àtravers le monde.Francisco Tropa est représenté en France parla Galerie Jocelyn Wolff (Paris).

Sofia Dias & Vítor RorizPerformeurs et chorégraphes portugais, SofiaDias et Vítor Roriz ont initié leur travail deduo en 2006 et sont présentés aujourd’huidans toute l’Europe. Ils participent aux créa-tions de Catarina Dias, Lara Torres, MarcoMartins, Clara Andermatt, Mark Tompkins et Tiago Rodrigues. Leur travail parcourt des territoires inattendus du corps tout encherchant sa relation à la parole, au discours.À travers un découpage extrêmement précisde scènes dans lesquelles le langage parlé etmusical est partagé avec une gestuelle décou-pée au laser, ils créent une forme insolite etvirtuose. Dans le cadre de L’invitation auxmusées ils ont été invités par Francisco Tropa à activer sa sculpture Le Perchoir duGoëland avec leur pièce Choses sans ombre.

LA LISTE DES ŒUVRES

Francisco Tropa

Grand studio – rez-de-chaussée

Scriptasculpture, 2016bronzeperformance, 2018avec Ana Rita Teodoro, João dos SantosMartins, Bettina Blanc-Penther, Calixto Neto,Lucas Lagomarsino... (en alternance)

Studio 2 – premier étage

Le Perchoir du Goélandsculpture, 2018laiton, câbles d’acier

Choses sans ombrede et par Sofia Dias & Vítor Rorizau sein du Perchoir du Goéland de FranciscoTropa

Studio 3 – premier étage

Lanternesculpture, 2011

Foyer des danseurs – premier étage

Escargotsculpture, 2015escargot, sérigraphie, fil de soie, crochetmétallique

Palier est – premier étage

Géantsculpture, 2018bronze, patine, bois, métalperformance, 2018avec Ana Rita Teodoro, João dos SantosMartins, Bettina Blanc-Penther, Calixto Neto,Lucas Lagomarsino... (en alternance)

LE MUSÉE

Serralves – Museu de Arte ContemporãneaSerralves s’est donné pour mission de promou-voir l’art contemporain et de favoriser sonaccès au plus grand nombre. D’expositionstemporaires en itinérantes, de spectacles enconcerts, de lectures en projections, sonmusée présente depuis 1999 un large pano-rama de l’art contemporain depuis les années1960 jusqu’à la création actuelle, qu’elle soitémergente ou confirmée. Outre sa collection,réunissant plus de quatre mille pièces,ouverte sur tous les styles et techniques, ilassure également une importante missionpédagogique (par le biais de colloques, deprojets éditoriaux, etc.) et s’engage activementdans la diffusion de la danse contemporaine,de la musique et de la performance dans l’auditorium et les autres espaces du musée.Aménagé au cœur de la prestigieuse Casa deSerralves, il organise en effet la rencontre del’art, de l’architecture et des idées à traversune programmation aussi exigeante queconsciente des enjeux de l’époque. Son projetdéveloppe ainsi une réflexion critique où l’artest interrogé à travers le prisme de la globali-sation et de la pensée postcoloniale, luiassurant d’être solidement ancré au cœur del’actualité. La curatrice Cristina Grande, quiest chargée de la danse et de la performanceau sein du musée, a par ailleurs contribué àen faire un des foyers culturels les plus actifsdu paysage portugais dans le domaine desarts performatifs contemporains. Elle a fondéavec une équipe de curateurs le programmeannuel « The Museum as performance » etdéveloppe une plateforme qui depuis 2015organise la rencontre entre arts visuels etarts vivants.

LES ARTISTES

Francisco TropaFormé à l’Ar.Co, école d’art indépendante deLisbonne où il enseigne la sculpture entre1996 et 2007, Francisco Tropa a complété sesétudes au Royal College of Arts à Londres et à la Kunstakademie de Münster. Considérécomme l’un des plasticiens portugais les plusdoués de sa génération, il développe depuis ledébut des années 1990 une œuvre réticulaire,complexe et inventive qui interroge lamémoire, le temps, l’histoire, la mort ou lerapport de l’homme au cosmos. Principale-ment axée autour de la sculpture, son œuvrese décline également sous forme de peintures,de dessins, de photographies, de projectionset de performances, assemblés dans des ins-tallations polymorphes. Dans des œuvres deprime abord énigmatiques, à plusieursentrées, il se joue des systèmes de signes et desymboles pour mieux mettre en question lesreprésentations du monde qu’ils informent.Son imaginaire, aussi digressif que prolifé-rant, cherche ainsi à déconstruire les grandsrécits collectifs, qu’ils soient de l’ordre duscientifique, du politique ou du religieux, pour y substituer des hypothèses fantaisistesqui élargissent le champ des possibles. Nourri de littérature, d’histoire de l’art, dephilosophie et de sciences, Francisco Tropalivre une lecture critique des discours devérité, portée par une vision poétique et ungoût certain pour le faux-semblant. Il déploieainsi des narrations spéculatives dont lesens, auréolé de mystère, se dévoile plus qu’ilne se donne. Décliné en plusieurs volets, son cycle « TSAE (Trésors Submergés de l’Ancienne Égypte) » en est l’illustrationmême, conçue comme une vaste fresquearchéologique, support d’une cosmogoniefictive qui reconsidère le récit des origines.L’audace formelle de son œuvre en renforce lathéâtralité, l’aspect scénique sinon scénogra-phique par lequel il informe un monde entrompe-l’œil où la matière se transforme aumême rythme que ses évocations.Francisco Tropa a représenté le Portugal à la Biennale de Venise en 2011, a participé à la Biennale de São Paulo, à la Biennale d’Istanbul et à Manifesta. Depuis 2013, il estrégulièrement invité par des institutions enFrance, parmi lesquelles le Palais de Tokyo à

Page 22: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

43

Entretien avec BéatriceJosse, commissairePropos recueillis par Florian Gaité, août 2018

FG — Alors directrice du Frac Lorraine, vousavez été la première responsable institution-nelle en France à constituer une collectionimmatérielle de l’art. Alors que les invitationsdes musées aux performeurs (et inversementici à l’initiative du Centre national de la danse)se font de plus en plus courantes, pensez-vous que l’art vivant y trouve aujourd’hui sa place ?

BJ — La performance tout comme les autresformes d’œuvres protocolaires ont propre-ment été évincées de l’histoire de l’artacadémique et de ce fait des collectionsjusqu’à la fin du XXe siècle. Focalisées sur lesaspects matériels des œuvres, les collectionsmuséales en Occident ont évacué un large pande la création artistique, même si dans lesfaits, les artistes ont toujours pratiqué desperformances. À partir de la fin des années1990, j’ai effectivement œuvré, non sans mal,afin d’intégrer ces productions aux collec-tions du Frac Lorraine. Il me semblaitfondamental qu’une collection publique enté-rine cette pratique sous forme non seulementd’acquisitions de documents (photos, vidéos...),mais aussi de formes live à réactiver, à inter-préter. À dire vrai, c’est mon intérêt pour lesformes de discriminations sexistes et racialesqui m’a amenée à m’intéresser à ces œuvresimmatérielles qui se conjuguent souvent auféminin. Le regard féministe permet en effetde s’intéresser aux formes d’invisibilité au sens large, il change profondément la lecture du monde muséal. Il ébranle certaines certitudes, notamment celle que seule lamatérialité procure de la valeur.

FG — Depuis votre arrivée au MAGASIN deshorizons, centre d’art de Grenoble, vousmenez une réflexion critique sur les formestraditionnelles de l’exposition. Quelleslimites rencontrent-elles d’après vousaujourd’hui ?

BJ — De la même façon que j’ai tenté de repous-ser le plus loin possible les limites d’unecollection publique, mon souhait est doréna-vant d’interroger le modèle du centre d’art duXXe siècle, dont le MAGASIN des horizons estun témoin éclatant. Caractérisé par le gigan-tisme de son espace industriel, le MAGASIN a incarné le parangon de la contemporanéitédans les années 1980 et 1990 en invitant desartistes (le plus souvent masculins et blancs) à produire in situ. Or ce centre d’art imposeaujourd’hui une architecture et des conditionsde travail qui ne sont plus en phase avec lespratiques d’artistes qui œuvrent avec l’humain,qu’il s’agisse de performances ou de projets derecherche. Une nouvelle génération d’artistesne souhaite plus sublimer l’architecture post-industrielle, mais cherche au contraire àreconstruire à partir des ruines. Il nous fautdonc recouvrer des espaces de possibles ren-contres avec les différentes communautés pourque les artistes aient le sentiment d’êtreconnectés, et pas seulement instrumentaliséspour « remplir » des espaces. Dans la périodecharnière que nous vivons, les artistes ont unrôle majeur à jouer dans la transformation denos imaginaires. Un autre monde est possible,et les artistes, les chercheurs, les militantspeuvent ensemble nous aider à le concevoir, àle représenter comme à le réaliser. J’aime cetteidée qu’il a fallu que des générations et desgénérations d’êtres humains rêvent d’aller unjour sur la lune pour que ce rêve se réalise. Il nous faut plus que jamais rêver, et le centred’art doit être cet endroit où convergent lesrêves. Nous devons ouvrir des voies et non crieravec les loups.

42

MAGASIN des horizons Samedi 24 et dimanche 25 novembre

Marie Cool Fabio Balducci Sans titre, 2004 – 2 feuilles de papier format A4

Marie Cool Fabio Balducci Sans titre, 2006 – Fil de coton, table

Page 23: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

45

de dépasser les catégories. C’est nous quirefusions l’enchevêtrement en croyant voirclair. Réclamons l’obscurité, car elle nouspermet de rêver. Le rêve est essentiel, c’est lemoteur de toute action individuelle commecollective. Nous savons désormais ce qu’ilnous reste à faire…

44

FG — Votre proposition s’organise autour de la« ligne », un archétype commun à tous les arts(dessin, danse, musique, littérature…). Avez-vous choisi ce motif pour sa transversalité ?

BJ — Le souhait a été de prendre la ligne commefil conducteur entre différentes actions et performances. Il est bien sûr important detisser des liens entre les propositions, et laligne est pour cela l’une des meilleures thé-matiques. Elle peut rapprocher actionspolitiques et actions poétiques, comme nouerentre elles les actions projetées sous formesvidéo (Ismaïl Bahri, Marianne Mispelaëre,Maria Laet, Marie Cool et Fabio Balducci), des actions hors les murs (Aurélie Pertusot et Jean-Christophe Norman, Esther Ferrer) etdes actions live (Audrey Cottin, AdélaïdeFeriot, Romain Gandolfe, Marianne Mispelaëre,Guillaume Désanges, Jirí Kovanda). C’estaussi cela l’intérêt de cette invitation du Centre national de la danse : proposer un trèslarge aperçu de ce que l’on peut nommer performance.

FG — En ce que son tracé permet de faireapparaître une figure, d’incarner un geste oude circonscrire un espace, toute ligne n’est-elle pas par définition performative ?

BJ — J’aime bien cette idée effectivement quetoute ligne est par définition performative.Vous avez parfaitement raison, en cela lemoindre trait, la moindre ligne est une pré-sence au monde.

FG — La ligne peut également constituer un lien physique, entre les personnes notam-ment. En quoi vont constituer les actionsparticipatives ?

BJ — Les interventions d’Aurélie Pertusot etAudrey Cottin viennent déjouer les attendusde la performance spectaculaire. Dans un cas,l’artiste permet de créer du lien matérielentre les habitants du voisinage et le CN D.Elle leur propose de faire passer par leur fenêtre un épais fil rouge, ce qui constituevisuellement comme une ligne mathématiqueen façade, visible depuis l’atrium du Centre.Dans l’autre cas, Audrey Cottin, par l’entre-mise d’un groupe d’amateurs, vient ponctuerle week-end d’applaudissements sans objet.

Le son et le rythme sont les seuls enjeux decette performance qui « décontextualise » lafin de spectacle en rejouant ce moment d’ap-probation collective (coutume dont on ignorepar ailleurs l’origine).

FG — Inclusive et exclusive, la ligne permet dematérialiser une frontière, que vous proposezjustement de franchir. En quoi était-il impor-tant pour vous de sortir du lieu ?

BJ — La programmation se déroule effective-ment à l’intérieur et à l’extérieur des espacesdédiés. Ligne d’horizon oblige ! On peut penserà Esther Ferrer qui s’invite à la fois en dedanset en dehors avec cette très belle marche oùdeux personnes, chacune un rouleau de scotchen main, tracent des trajectoires qui vont serejoindre en un point donné, sur le perron duCentre national de la danse. Les pièces qui sedéroulent à l’extérieur sont comme des lignesde fuite ; elles proposent une échappée horsdes lieux formatés et renouent avec l’essencemême de la performance, avec ce qui laconstitue : un regroupement de personnes àun moment donné dans un espace donné. Lefameux ici et maintenant ! Elles constituentl’opportunité de nouer des liens avec une ouplusieurs communautés qui ne se sentent pas concernées par la recherche artistiquecontemporaine. C’est important pour moi detenter d’inclure et donner une place aux habi-tants du quartier durant ce week-end.

FG — L’affranchissement du lieu institution-nel ouvre sur la thématique de l’émancipation.Croyez-vous que la performance soit plus pro-pice à l’expression des minorités, notammentcelle des femmes qui représentent les deuxtiers de votre programmation ?

BJ — Plus généralement, c’est dans le rassem-blement des humains que je crois. Et le centred’art doit permettre ce croisement maximumde diversités, de personnes comme de formesartistiques. Il est nécessaire de décloisonnerles pratiques, de défaire les catégories et lesassignations. La pratique de la performancerend possible ces croisements entre spectaclevivant et arts visuels, entre anthropologie etsciences dures, entre pratiques académiqueset savoirs vernaculaires. Bref, faisonsconfiance aux artistes qui n’ont jamais cessé

Jean-Christophe Norman Ulysses, a long way

Page 24: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

47

Studio 4 – premier étage

Ismaïl Bahri Lignevidéo, 2011, 1’ Dénouementvidéo, 2011, 8’

Studio 5 – premier étage

Marianne Mispelaëre Rencontre séparation vidéo de l’action de dessin, 2015, 10’50’’

Studio 6 – premier étage

Guillaume Désanges Une histoire de la performance en 20 minutesavec Guillaume Désanges et Frédéric Cherbœuf lecture-performance, 2004

Adélaïde Feriot Regarder le soleil en collaboration avec le groupe Suzannecomposition musicale de Kerwin Rollandinstallation et performance, 2018

Marianne Mispelaëre Le poids de l’actif action performative, 2018No Man’s Landaction performative et collective, 2014-2015

Hors les murs dans les rues de Pantin

Esther FerrerLe chemin se fait en marchant performance, 2000

Jean-Christophe Norman Ulysses, a long wayperformance, 2011

Aurélie Pertusot Hôte-Couture installation, 2012

46

LE MUSÉE

MAGASIN des horizonsPlateforme de réflexion et d’échanges, leMAGASIN des horizons a réinventé la formedu centre d’art sous l’impulsion de sa nouvelledirectrice, Béatrice Josse. Privilégiant les évé-nements éphémères aux expositions, cettedernière a fait de l’élargissement des possibleset de l’expérimentation les lignes directricesde sa programmation. Le projet s’organiseavant tout autour de rencontres ponctuelles et de l’invitation lancée à des artistes (pourcertains associés), militants, commissaires,auteurs et chercheurs de tous horizons à nour-rir un dialogue continu, porté sur les enjeux de l’époque. Son soutien affiché aux combatsféministes ou aux luttes contre toute forme de discrimination traduit une conscience poli-tique aiguisée, plaçant l’art en regard directdes mutations actuelles de la société. Le lieuse dit ainsi volontiers « permaculturel » au sens où il se pose comme un incubateur d’initiatives collectives, pensées à l’aune d’unavenir durable. Ouvert sur le monde commesur son territoire, le MAGASIN des horizonsmultiplie également les partenariats locaux etinternationaux, et offre à travers les Ateliersdes horizons des formations professionnellesnovatrices, ouvrant le commissariat à de nou-velles pratiques participatives. Premièreactrice du monde de la culture à avoir lancé en France une collection immatérielle sur les pratiques performatives, Béatrice Josse,cheffe et meneuse de projets, a activementcontribué à placer le corps au centre de l’actiondu centre d’art.

LA LISTE DES ŒUVRES

Atrium – rez-de-chaussée

Nina Beier & Marie Lund The Imprintperformance, 2009

Audrey Cottin Pantin Clapping Groupperformance, 2018

Jirí Kovanda One Above Anotherperformance unique, 2011

Quelque part au CN D

Yona Friedman Prototype improvisé de type de « nuage »installation, 2009

Salle de conférence – premier étage

Marie Cool Fabio Balducci Sans titre, 2003 – Ruban adhésif transparentvidéo, 2003Sans titre, 2004 – 2 feuilles de papier format A4vidéo, 2004, 1’41’’Sans titre, 2006 – Fil de coton, tablevidéo, 2006, 2’31’’Sans titre, 2016 – Fenêtre ouverte, bureau,lumière du soleil, 2 feuilles de papier format A4(aC.B) documenta 14vidéo, 2016, 2’14’’

Espace de consultation – premier étage

Romain Gandolphe Le peu qui m’appartientperformance, 2018

Salle d’étude – premier étage

Maria Laet Notes on the limit of the seavidéo, 2012, 11’42’’vidéo, 2013, 3’46’’vidéo, 2015, 11’35’’

Page 25: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Guillaume Désanges Une histoire de la performance en 20 minutes

Page 26: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

5150

Maria Laet Notes on the limit of the sea

Marianne Mispelaëre Rencontre séparation

Ismaïl Bahri Dénouement

Page 27: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Maria Laet Notes on the limit of the sea

Page 28: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

5554

Musée de la danse – centre chorégraphiquenational de Rennes et de Bretagne

SAMEDI 8 DÉCEMBRE 16H À 22H30

Ruche pédagogiquepar Romain Bigé, Matthieu Burner, BorisCharmatz, Olga Dukhovnaya, EmmanuelleHuynh, Frank WillensAtrium rez-de-chaussée

Ateliers 10000 gestespar Boris Charmatz et Olga Dukhovnaya Studio 3 premier étage & Studio 8 deuxième étage

Pique Nique + (sans titre) (2000)Tino Sehgal Atrium rez-de-chaussée

Une (toute petite) philosophie du danseurRomain BigéMédiathèque rez-de-chaussée

Aatt enen tiononBoris Charmatz Grand studio rez-de-chaussée

Dance floorGrand studio rez-de-chaussée

boléro 2Odile Duboc, Boris Charmatz, EmmanuelleHuynhAtrium rez-de-chaussée

DIMANCHE 9 DÉCEMBRE 14H À 20H30

Ruche pédagogiquepar Romain Bigé, Matthieu Burner, BorisCharmatz, Olga Dukhovnaya, EmmanuelleHuynh, Frank WillensAtrium rez-de-chaussée

Ateliers 10000 gestespar Boris Charmatz et Olga DukhovnayaStudio 3 premier étage & Studio 8 deuxième étage

Pique Nique + (sans titre) (2000)Tino Sehgal Atrium rez-de-chaussée

Une (toute petite) philosophie du danseurRomain BigéMédiathèque rez-de-chaussée

Aatt enen tiononBoris Charmatz Grand studio rez-de-chaussée

Dance floorGrand studio rez-de-chaussée

boléro 2Odile Duboc, Boris Charmatz, EmmanuelleHuynhAtrium rez-de-chaussée

pages 58-69

Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía

EN CONTINU DE 14H À 20H

Esther FerrerTodas las variaciones son válidas, incluida esta Atrium, Galerie, Studio 1 et Studio 12 – rez-de-chaussée

pages 8-15

WEEK-END #3

8 & 9.12.2018

Nous vous conseillons de participer au programme de la journée dans son ensemble, mais vouspouvez nous rejoindre en cours, sous réserve de places disponibles.

Page 29: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Boris Charmatz / Musée de la danse A Dancer’s Day, sieste

Page 30: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

5958

Entretien avec Boris Charmatz, directeur du Musée de la danse

Propos recueillis par Gilles Amalvi, septembre 2018

Gilles Amalvi — Le projet A Dancer’s Days’inscrit dans une longue suite de formatsinventés par le Musée de la danse, nouantensemble des questions liées aux champschorégraphiques et artistiques – mais cettefois-ci centré sur le quotidien du danseur.Cet événement a été lancé au moment de lacréation de votre pièce, 10000 gestes, offrantdu même coup un autre regard sur cette piècepour vingt-trois danseurs. D’où est venuel’idée d’un événement suivant le temps de lajournée du danseur, et quel lien entretient-elle avec la genèse de cette pièce ?

Boris Charmatz — Au départ, A Dancer’s Dayn’était pas explicitement lié à 10000 gestes.C’était plutôt un protocole de travail du Muséede la danse, un peu comme d’autres projetscomme 20 danseurs pour le XXe siècle, expozéro ou Fous de danse, qui se transforment àchaque édition en fonction des intervenantset des lieux, tout en conservant la même lignedirectrice. Au moment où nous avons mis ceprojet en œuvre pour la première fois, j’étaiseffectivement en train de travailler sur 10000gestes, pièce qui se prêtait assez bien auxdifférentes activités qui scandent A Dancer’sDay. Du coup, nous avons fait un premier testà Rennes, avant de le faire grandeur nature à Berlin. Le fait que 10000 gestes soit le spectacle montré dans ce cadre a orienté toutle programme, qui est organisé autour de lajournée d’un danseur – avec l’échauffement,le travail de répétition, le repas, la sieste, la représentation, et la fête. De plus, 10000gestes comporte vingt-trois danseurs, du coup

nous avons profité de leur présence pour mettre en place une ruche pédagogique, cequi permettait aux visiteurs de rencontrer un danseur pendant quarante-cinq minutes.Durant l’atelier, nous avons travaillé sur cetteidée de produire une multitude de gestes – ce qui a permis également au public de com-prendre la difficulté qu’il y a à inventer ungeste à partir de rien, et de mettre le doigt surle chaos que cela génère. Tout cela a resserréles liens entre les activités de la journée et la pièce montrée, et multiplié les portes d’en-trées. Mais dans mon esprit, la pièce montréedurant A Dancer’s Day peut être 10000 gestes,mais aussi bien À bras-le-corps ou bien d’ail-leurs un spectacle qui ne soit pas de moi. Il s’agit d’un protocole d’exposition chorégra-phiée, divisé en plusieurs temps et enplusieurs activités.

GA — L’un des événements phare du Musée de la danse est Fous de danse, une sorte dehappening participatif qui prend place dansl’espace public, et dans lequel on retrouvecertains principes tels que l’échauffementcollectif, la transmission d’une pièce aupublic, ou le dance-floor, qui scandentA Dancer’s Day. Comment l’angle d’attaque de la journée du danseur et son découpagetemporel spécifique remodèle-t-il l’expériencede ces principes ?

BC — Il y a une parenté intellectuelle forteentre A Dancer’s Day et Fous de danse, ouavec le déroulé que nous avions conçu pour If Tate Modern was Musée de la danse ? Pource projet j’avais envie d’une exposition quiépouse le rythme du danseur, plutôt que deforcer le corps du danseur à s’adapter à latemporalité du musée. Ce qui est intéressantdans la vie d’un danseur, dans son travail,c’est que sa journée est faite de temporalitéset d’activités extrêmement variées. Il meparaissait intéressant d’essayer de penser, de

Musée de la danse Samedi 8 décembre et dimanche 9 décembre

boléro 2 d’Odile DubocBoris Charmatz, Emmanuelle Huynh

Page 31: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

61

de donner accès à leurs manières de faire.C’est quelque chose qui est important pourmoi depuis le début : que les interprètes, quiont souvent un travail propre, ne soient pascantonnés dans la position d’exécutants,mais que l’on puisse découvrir la variété de ce qu’ils font, de comment ils le font… Laseule direction pour cette ruche, c’est qu’il yait plusieurs « cours » en même temps – etdans l’idéal dans un même espace, et que ducoup, ces différents savoirs se disséminent,se mélangent, produisent une forme de« chaos organisé », produit en temps réel parces essaims de corps.

GA — A Dancer’s Day est donc construit autourdes différents temps de la journée du danseur.Comment ces temps vont-ils se reconfigurerdans les espaces du CN D ?

BC — La journée va commencer dans l’atriumpar un échauffement sous forme de ruchepédagogique, avec l’idée d’un mouvement,d’une transformation et d’un mélange dessavoirs, qui pourront prendre place dans toutl’espace. Tous les participants de la journéeseront là, chacun prenant en charge une par-tie du public. Ensuite je vais emmener lepublic dans l’un des studios pour donner unatelier autour de 10000 gestes – même si lapièce elle-même n’est pas montrée pendant la journée. C’est un des ateliers publics quej’aime bien faire, parce qu’il permet d’aborderdifférentes facettes du travail de danseur. Ceformat est à la frontière entre la transmissionet la performance : vécu de l’intérieur, c’est à lafois un cours et une transmission, la tentativepour le public d’incorporer très rapidementcertaines séquences de mouvements issues dece spectacle. Mais de l’extérieur, on peut aussile voir comme une performance, mettant entension la difficulté de cette chorégraphie, sa vitesse d’exécution et la rapidité de latransmission. Pendant le pique-nique, les visiteurs pourrontmanger en regardant le solo de Tino Sehgaldansé par Frank Willens. Le fait de remontercette pièce de Tino Sehgal qui traverse l’his-toire de la danse du XXe siècle nous tenaiténormément à cœur, et ça a été un des projetsimportants du Musée de la danse – c’est unesorte de Musée de la danse en miniature. Le faitde regarder défiler cette histoire, dansée nue,

tout en mangeant, produit une distorsion ducadre qui m’intéresse beaucoup. Ensuite, c’estle temps de la sieste, avec une interventionorale de Romain Bigé, philosophe et spécialistedu contact-improvisation : il avait déjà testéune prise de parole de ce type pendant Fous dedanse, sauf que là, il va pouvoir le faire dansun contexte un peu plus cadré. Romain vainvestir l’espace de la Médiathèque – espacedu chercheur par excellence – mais en détour-nant sa fonction. Sur et sous les tables, affaléssur les chaises, adossés aux étagères, les visi-teurs pourront l’écouter, se laisser porter –s’endormir s’ils le souhaitent. Je ne sais pasexactement sur quoi portera son discours, ni quelle forme il prendra – exposé, hypnose ? -mais je pense qu’il mettra en jeu ses connais-sances dans le domaine de la kinesthésie, durapport aux sensations. Ensuite il y aura laprésentation de Aatt enen tionon dans le grandstudio, suivi d’un dance floor. Enfin notre duoavec Emmanuelle Huynh – non pas étrangler le temps, la version étirée, mais boléro 2, laversion d’origine, pour clore la journée. Le duosera présenté dans l’atrium, et pourra du coupêtre regardé selon différents angles – en vuesurplombante du haut des escaliers, ou enproximité à côté de nous. Ça fait tout de mêmeun sacré programme !

GA — Aatt enen tionon a été créée en 1996, et tourne maintenant dans une nouvelle distribution. Quelle a été sa réception en1996, et comment le temps modifie-t-il la per-ception de cette pièce ?

BC — Déjà, c’est la première pièce que j’aisignée en mon nom, après À bras-le-corps etLes disparates, co-signées avec Dimitri Cham-blas. La réception de cette pièce a été un choc,choc lié à la nudité et à l’aspect très décidé,très radical de son principe de départ – lastructure de cette tour qui sépare les danseursles uns des autres. Il s’agit d’une pièce traver-sée par la coupure – des corps, du regard, duson : c’est un trio découpé, qui a lieu au seinde la coupure d’un album de Pj Harvey, créantun gouffre. Aujourd’hui, je pense que le choclié à la semi-nudité des interprètes n’est plusaussi fort, et que cela permet de la voir demanière plus dépassionnée, et de s’intéresserde plus près à la chorégraphie en tant que telle.

60

chorégraphier, de donner forme à ces temps.Dans Fous de danse, on passe par des momentsassez proches de ce que je décris : cela com-mence par un échauffement collectif, ensuite ily a un temps qui s’apparente à une répétition –par exemple lorsque je transmets des extraitsde Levée des conflits aux participants. Et puisla journée se termine par un dance floor. Par contre, il n’y a pas ces temps un peu à partque sont la sieste ou le repas. Cela faisaitlongtemps que je souhaitais intégrer desmoments interstitiels au sein d’un événementchorégraphique. Une autre différence impor-tante concerne le fait que Fous de danse estun événement pensé pour l’espace urbain,alors que A Dancer’s Day est davantagetourné vers l’espace d’exposition. Il s’agitd’une journée muséale qui est en réalité unejournée de danseur.

GA — La version de A Dancer’s Day présentéeau CN D donnera à voir une autre configura-tion, aussi bien au niveau des œuvresprésentées, du rapport à l’espace que desintervenants. Quelle sera sa particularité ?

BC — Au CN D, les choses seront nécessaire-ment un peu différentes. Il y a d’abord unequestion d’espace : à Berlin, nous avons puprofiter de l’immense espace ouvert d’unaéroport désaffecté. Au CN D, l’espace estbeaucoup plus fragmenté. Ce qui est intéres-sant avec A Dancer’s Day, c’est que ce protocoleest adaptable à différents types de lieux.Cette version ne sera pas articulée autourd’une pièce prenant beaucoup d’espace etformant la trame de toute la journée : chaquemoment de la journée aura sa particularité,en lien avec une pièce ou un projet spécifique.L’atrium du CN D, avec son immense escalier,formera le cœur de l’événement, qui se dépla-cera également dans la Médiathèque ou leGrand studio. Par le biais d’un projet plusresserré comme celui-ci, nous allons essayerde dessiner les orientations et le type d’expé-rimentation qui ont agité le Musée de la dansedepuis sa création – en mettant le danseur aucœur du projet. En effet, nous avons davantage travaillé avecles danseurs qu’avec les « chorégraphes » àproprement parler. Nous nous sommes davan-tage appuyés sur le « Musée de la danse » quereprésente chaque danseur – avec son archéo-

logie, ses archives personnelles, mentales ouphysiques. Là il s’agit de son « planning quoti-dien », aspect qui était d’ailleurs déjà présentpendant expo zéro, puisque certains danseursavaient choisi de s’installer dans un studio etde présenter leur journée de travail. Commesouvent avec les projets du Musée de ladanse, il y a des rebonds, des échos, des pistesqui se trament d’un projet à un autre.

GA — À propos des orientations du Musée de la danse, A Dancer’s Day comprend unedimension pédagogique forte, une forme detransmission par dissémination – un peucomme celle qui avait été testée avec le format des Sessions posters.

BC — Un des principes de A Dancer’s Day quej’aime beaucoup, c’est cette ruche pédago-gique, qui fonctionne comme une sorte decours donné par une multitude d’enseignants,et qui est en même temps un temps d’échauf-fement pour le public et les intervenants. Au CN D, il y aura Matthieu Burner, qui dansedans Aatt enen tionon, Emmanuelle Huynhqui danse avec moi boléro 2, le duo des troisBoléros d’Odile Duboc, Frank Willens quidanse (sans titre) (2000) de Tino Sehgal, OlgaDukhovnaya, qui danse dans Aatt enen tionon– ainsi que le chercheur et praticien decontact-improvisation Romain Bigé. Et peut-être moi-même. S’il y a plusieurs enseignants,ça permet de mettre en place une sorte debattle pédagogique. J’aime la transmission, mais j’aime toutautant le chaos, le brouillage. À travers cetteruche, il y a l’idée d’un échange tous azimuts :cela veut dire que chaque intervenant n’estpas cantonné à un rôle ; on peut découvrir letravail chorégraphique d’Emmanuelle Huynh,mais aussi son travail d’enseignante, cequ’elle a à dire sur ses gestes, comment elletrame la pratique et la transmission. J’aienvie que ces différentes dimensions s’entre-choquent, s’entremêlent. J’aime beaucoup le travail de Matthieu Burner en tant qu’inter-prète dans Aatt enen tionon, mais lorsqu’ildonne un échauffement, il n’est plus seule-ment l’interprète de Boris Charmatz, ilramène ses propres techniques ; peut-êtrequ’il va évoquer le projet qu’il a fait avec FelixRuckert sur le sado-masochisme, je ne saispas... L’idée est de permettre aux intervenants

Page 32: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

63

LE MUSÉE

Musée de la danse Né d’un croisement entre le musée, lieu deconservation et d’exposition, la danse, art dumouvement, et le centre chorégraphique deRennes, lieu de production et de résidence, leMusée de la danse est une institution-labora-toire dont le cadre se transforme en fonctiondes objets, des idées ou des corps qu’il abrite.Depuis 2009, les différents événements de cechantier dirigé par le danseur et chorégrapheBoris Charmatz forment un jeu de combina-toire, explorant les possibilités de croisemententre exposition, geste performatif et articu-lation d’un discours. Au fil d’expositionsexpérimentales et nomades comme expo zéro,brouillon, 20 danseurs pour le XXe siècle, etd’événements participatifs comme Fous dedanse ou A Dancer’s Day, le Musée de ladanse invente un nouage inédit entre vivantet réflexif, art et archive, création et trans-mission. Présenté dans des musées comme le MoMA ou la Tate Modern, mais aussi desécoles, des bibliothèques, des places, desthéâtres, c’est un musée qui expose le musée,se greffe sur l’espace urbain, contamine d’au-tres institutions. Si, comme l’affirme BorisCharmatz « le corps du danseur est le seulvéritable Musée de la danse », c’est un corpstour à tour archive, mouvement, discours,capable d’occuper l’espace et de le saturer deparoles et de gestes. Au sein de ce territoirephysique et imaginaire, propositions décaléeset collections fantasmées mettent sens dessus dessous les rapports établis entre lepublic, l’art et sa pratique, et permettent de repousser les frontières de ce phénomènequ’on appelle danse : d’élargir à partir d’elle le point de vue posé sur le monde.

LE PROJET

A Dancer’s DayÀ la croisée des problématiques du Musée dela danse et de l’œuvre chorégraphique deBoris Charmatz, A Dancer’s Day articule deuxquestions : de quoi est faite la journée d’undanseur en dehors du temps de la représenta-tion ? Comment s’organise son rapport autemps, au travail, à la dépense et à la récupé-ration, à la création et à la répétition ? Et comment déplier et élargir la perceptiond’une œuvre chorégraphique – la donner àvoir, à expérimenter autrement que sur lascène d’un théâtre ? Par un échauffement,des transmissions et des ateliers, une œuvre,qui peut varier en fonction des éditions, se dépose dans les corps et devient accessibleà tous, petits et grands.Danseur et chorégraphe, Boris Charmatz asigné une série de pièces qui ont fait date,d’Aatt enen tionon (1996) à 10000 gestes(2017). En parallèle, il poursuit ses activitésd’interprète et d’improvisateur, notammentavec Médéric Collignon, Anne Teresa DeKeersmaeker et Tino Sehgal. Il cosigne leslivres Entretenir/à propos d’une danse contem-poraine avec Isabelle Launay, Emails 2009-2010avec Jérôme Bel, et signe « Je suis une école»,ouvrage qui relate l’aventure que fut Bocal,école nomade et éphémère. Boris Charmatzdirige de 2009 à fin 2018, le Centre chorégra-phique national de Rennes et de Bretagne qu’iltransforme en un Musée de la danse d’un genrenouveau. Il prépare actuellement infini, créa-tion qui verra le jour à l’été 2019.

62

GA — Du coup, A Dancer’s Day permet detransformer le regard sur ces pièces, de lesdonner à voir autrement à travers le séquen-çage de la journée du danseur ?

BC — Oui, c’est ça qui est intéressant : le faitde présenter ces spectacles à l’intérieur d’uncadre spécifique, au milieu de tous ces visi-teurs en action, change la perspective sur ladanse elle-même. La dimension rituelle,presque ancestrale de ces temps – l’échauffe-ment, le repas collectif, la sieste – transformele point de vue. On ne regarde pas de la mêmemanière (sans titre) (2000) de Tino Sehgaltout en mangeant un pique-nique, ou Aattenen tionon après une journée d’activitéaussi intense.

GA — Est-ce que cet événement au CN D auraune valeur particulière pour vous, sachant quele projet Musée de la danse touche à sa fin ?

BC — Pour le Musée de la danse, ça va forcé-ment être un moment un peu particulier,puisque j’arrive à la fin de mon mandat aucentre chorégraphique de Rennes. Pourautant, dans le cadre de l’invitation que leCN D fait à différents musées, nous n’allonspas proposer une « rétrospective », ni un évé-nement de clôture. Cependant A Dancer’s Daypermet d’offrir un aperçu des modes d’inter-vention du Musée de la danse, sur un modeplus intime : le rapport à l’interprète, la placedu public, le fait de prendre en compte chaqueaspect de la création chorégraphique, et deles incorporer au sein d’un événement pluriel,mélangeant théorie et pratique. Le projet du Musée de la danse résonne avecles missions qui sont celles du CN D. C’est unlieu que j’aime beaucoup, mais qui est com-plexe à investir. L’atrium avec cet immenseescalier au milieu, le fait qu’il y ait beaucoupde petits studios. Au Musée de la danse, nousavons l’habitude d’occuper de grands espacesouverts, où l’on peut accumuler des stratesd’actions, des strates esthétiques très variées.Au CN D, il faudra trouver un moyen de seglisser dans les trous de ce grand gruyère. Ce sera un Dancer’s Day plus itinérant, qui sepromène d’espace en espace, plutôt que d’ac-cumuler toutes les actions au même endroit.Et comme lors de l’ouverture du Musée de ladanse, c’est Yves Godin qui s’occupera d’éclairer

les différents temps et les différents espacesde cet événement protéiforme.

GA — De son côté, le Musée de la danse s’insèrerégulièrement à l’intérieur d’autres musées.C’est une sorte de méta-musée, qui peut segreffer sur le MoMA à New York, la TateModern à Londres, mais aussi sur une école,une place publique, un festival de théâtre...

BC — Le CN D lui-même a une dimensionmuséale très forte, à la fois de part les archivesqu’il possède, et de part les nouvelles orienta-tions que lui a donnée Mathilde Monnier, en le renommant « Centre d’art pour la danse ».Après, institutionnellement, c’est un paque-bot, c’est énorme ! Le Musée de la danse estplus léger, plus mobile ; c’est sans doute pourcela que nous avons souvent eu l’occasion denous greffer sur d’autres institutions. J’aitoujours été intéressé par cette dynamiqueconsistant à occuper une institution, pour enrévéler certains aspects. Ça avait déjà été le cas de Bocal en un sens : ce projet d’écolenomade – dont certaines idées ont donnénaissance au Musée de la danse – avait étéaccueilli au CN D au moment de son ouver-ture. Avec Bocal, nous avons vraiment essayéde coloniser le CN D ; la question était dechercher comment une école pouvait avoirlieu dans ce contexte – et de quelle manière la présence de cette école pouvait transfor-mer l’institution de l’intérieur. Nous avionsd’ailleurs eu le désir de faire quelque choseavec les archives, mais elles étaient ferméespendant le temps du déménagement. Ça pour-rait faire l’objet d’une autre interventionpourquoi pas, dans le cadre d’un autre projet.

Page 33: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Boris Charmatz / Musée de la danseA Dancer’s Day, Dance floor

Page 34: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

67

Grand studio – rez-de-chaussée

Aatt enen tionon(durée 40 minutes)Chorégraphie Boris Charmatz Interprétation Boris Charmatz, MatthieuBurner et Olga DukhovnayaLumière Yves GodinVoix Hubertus BiermannSon Olivier RenoufMusique PJ HarveyEn 1996, Boris Charmatz crée Aatt enen tionon– un trio schizé, suspendu au bord du vide.Avec ce titre insolite – comme un étirement de la matière linguistique du mot attention –,il invente un dispositif scénique radical, iso-lant les trois interprètes les uns des autres :au lieu de les réunir à la surface de la scène,Boris Charmatz fait le choix de les superpo-ser sur une structure de métal verticale – tourde guet ou dispositif carcéral. Cette transfor-mation de la perception des corps dansl’espace se répercute à tous les niveaux de la représentation : entre les danseurs, sans possibilité de contact, mais aussi au niveau deleur appréhension sensible et des échos queproduisent leurs mouvements dans cette zonelimitée. Seulement vêtus d’un t-shirt quidécoupe leur corps, ils se tiennent sans cesse au bord : au bord du vide, au bord d’eux-mêmes.Corps coupés, découpés, isolés, contraints,ensemble-séparés, ils fabriquent une danseorganique et paradoxale, une chorégraphiede solitude et de silence.

Dance floorDJ set(durée 60 minutes)

66

LA LISTE DES ŒUVRES

Atrium – rez-de-chaussée

Ruche pédagogique (durée 40 minutes)Par Romain Bigé, Matthieu Burner, BorisCharmatz, Olga Dukhovnaya, EmmanuelleHuynh, Frank WillensLa vision d’une ruche en activité, avec sescentaines d’abeilles bourdonnantes, peut donner l’impression d’une activité frénétiqueet désordonnée. Reprenant cette métaphore,le principe de la ruche pédagogique placedanseurs et spectateurs dans une situationde transmission tous azimuts : mis en mouve-ment par les intervenants, les savoirs et lesdanses circulent, se disséminent de corps envoix et pollinisent l’assistance.

Pique Nique + (sans titre) (2000)(durée 50 minutes)Conception Tino Sehgal Interprétation Frank WillensPremière œuvre de Tino Sehgal, (sans titre)(2000) expose un performeur offrant unevision fragmentaire et personnelle de l’his-toire de la danse du XXe siècle – comme un« Musée de la danse » condensé en un seulcorps. Ce n’est donc pas un hasard si le Muséede la danse a repris cette œuvre pour l’incluredans ses collections. Dans le cadre de A Dancer’sDay, la juxtaposition de la pièce et du temps du pique-nique reconfigure l’expérience – entremoment réflexif et digestion de gestes, nourri-ture pour le corps et pour l’esprit…

boléro 2(durée 18 minutes)Interprétation Boris Charmatz, EmmanuelleHuynhConception Odile Duboc, Françoise MichelMatériaux sonores Boléro de Maurice Ravel(Orchestre symphonique de la RAI de Milansous la direction de Sergiu Celibidache)En 1996, après avoir signé le Projet de la matière,Odile Duboc crée trois boléros, œuvre sémi-nale, dont la structure sérielle et le jeu devariations sur un thème musical eu uneinfluence majeure sur la danse contemporainefrançaise. Utilisant toutes les possibilités rythmiques offertes par trois orchestrationsde l’œuvre de Ravel, Odile Duboc a conçu

trois ensembles : le premier basé sur l’accu-mulation de mouvements, le second sur uncorps-à-corps éperdu et le troisième sur unvaste mouvement choral pour vingt et un dan-seurs. C’est à Boris Charmatz et EmmanuelleHuynh qu’elle confie l’interprétation du duocentral : ensemble, ils vont élaborer cettelente étreinte où les deux corps s’appuientl’un sur l’autre, s’élèvent ou se fondent en unmême organisme en mouvement, suspenduhors du temps. Marqués par cette pièce quitient « de l’abandon et de la douceur, de l’attirance, du désir, de la fusion et de l’arra-chement » selon les mots d’Odile Duboc, BorisCharmatz et Emmanuelle Huynh ont continuéà danser ce duo avant de créer leur propre version étirée, étrangler le temps.

Médiathèque – rez-de-chaussée

Une (toute petite) philosophie du danseur (durée 30 minutes)Par Romain BigéUne invitation à mettre des mots sur ce quel’on ressent quand on danse afin d’en tirerquelques idées sur ce qu’on fait quand on dort.Philosophe et danseur, Romain Bigé est auteurde la thèse Le partage du mouvement, ancréedans sa pratique du contact-improvisation.

Studio 3 – premier étageet Studio 8 – deuxième étage

Ateliers 10000 gestes(durée 55 minutes)par Boris Charmatz et Olga Dukhovnaya

Page 35: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

Boris Charmatz Aatt enen tionon

Page 36: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

7170

Esther Ferrer. Todas las variaciones son válidas, incluida estaL’ensemble des œuvres présentées sont issues de la collection particulière d’Esther Ferrer, sauf Musica Angelical (musique céleste), 2002, Galerie Lara Vincy ; Musica Angelical (musiquecéleste), 1983/1991, collection particulière Nathalie Heidsieck ; Parcourir un carré de toutes les manières possibles, collection 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine.

Performance pour 27 chaussuresProduction Studio Olivier Saillard. Cette performance, présentée au Grand Palais à deuxreprises en juin 2018, a été produite à sa création grâce au soutien de JM Weston.

L’atelier de coutureProduction Studio Olivier Saillard.

Les œuvres de Nina Beier & Marie Lund, Marie Cool Fabio Balducci, Yona Friedman, Maria Laet,Ismaïl Bahri et Marianne Mispelaëre sont issues de la collection 49 Nord 6 Est – Frac Lorraine.L’œuvre de Jirí Kovanda, One Above Another est issue de la collection Jérôme Tordo, Paris, courtesy of the artist et gb agency, Paris.Pour l’œuvre de Marie Cool Fabio Balducci, Sans titre 2016, courtesy Marcelle Alix, Paris.

A Dancer’s DayProduction Musée de la danse / Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne. DirectionBoris Charmatz. Association subventionnée par le ministère de la Culture – Drac Bretagne, la villede Rennes, le conseil régional de Bretagne et le conseil départemental d’Ille-et-Vilaine. La première édition de A Dancer’s Day a étè créée le 14 septembre 2017 à Tempelhof, Volksbühne,Berlin. Direction de production Amélie-Anne Chapelain, Martina Hochmuth, Sandra Neuveut.Régie générale Fabrice Le Fur. Lumières Yves Godin.

Pique Nique + (sans titre) (2000)Production Musée de la danse.Coproduction Tanz im August (Berlin), Kaaitheater (Bruxelles), Les Spectacles vivants CentrePompidou – Paris, La Bâtie-Festival de Genève et Bonlieu Scène nationale Annecy dans le cadredu projet PACT bénéficiaire du FEDER avec le programme INTERREG IV A France-Suisse.

boléro 2Coproduction Contre Jour Centre chorégraphique national de Franche-Comté à Belfort, La Filature Scène nationale de Mulhouse, Théâtre de la Ville-Paris, Centre Jean-Renoir Scènenationale de Dieppe, La Coursive Scène nationale de La Rochelle. Créé en 1996.

Aatt enen tionon Production Musée de la danse.Coproduction La Halle aux Grains – Scène nationale de Blois, La Ferme du Buisson – Scènenationale de Marne-la-Vallée, La Bâtie – Festival de Genêve, Les Hivernales – Avignon.Ce spectacle a bénéficié d’une résidence au Centre chorégraphique national de Franche-Comté à Belfort, direction Odile Duboc.Créé le 9 février 1996 à La Halle aux Grains – Scène nationale de Blois dans le cadre du FestivalDansez Maintenant.

Partenaires

Le CN D est un établissement public à caractère industriel et commercial subventionné par le ministère de la Culture.

L’invitation aux musées a été conçue par Mathilde Monnier & Aymar Crosnier, Laurence Rassel &Mar Villaespesa, Olivier Saillard, Hendrik Folkerts, Cristina Grande, Béatrice Josse, Boris Charmatz.

L’invitation aux musées est présentée avec le Museo Nacional Centro de Arte Reina-Sofia, le Muséeéphémère de la mode, l’Art Institute of Chicago, le MAGASIN des horizons, Serralves – Museu de ArteContemporãnea, le Musée de la danse – Centre chorégraphique national de Rennes et de Bretagne.

Page 37: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

7372

Info

Réservations, informations pratiques, plan d’accèscnd.fr

CN D1, rue Victor-Hugo93507 Pantin Cedex

Métro 5 HocheRER E PantinT3b Delphine Seyrig

BilletterieDu lundi au vendredi de 10h à 19het les week-ends des 10 et 11 novembre, 24 et 25novembre, 8 et 9 décembre+ 33 (0)1 41 83 98 [email protected]

TarifsPass 1 jourAvec la carte CN D€ 15 tarif plein / € 10 tarif réduitSans la carte CN D € 20 tarif plein / € 15 tarif réduit

Nous vous conseillons de participer au programme de chaque journée dans son ensemble, mais vouspouvez nous rejoindre en cours, sous réserve de placesdisponibles.

Service de presseMyra – Yannick Dufour, Rémi Fort, Jeanne Clavel+ 33 (0)1 40 33 79 13 – [email protected]

Bar et restauration légèrepar Les PantinsLes week-ends des 10 et 11 novembre, 24 et 25novembre, 8 et 9 décembrelespantins.fr

Exposition Esther Ferrer

Ouverte et en entrée libre hors des week-ends L’invita-tion aux musées, du lundi 12 novembre au samedi 15 décembre.Lundi au vendredi 10h30 à 19hSamedi 14h à 20h

Exposition accessible avec le Pass 1 jour les week-endsdes 10 et 11 novembre, 24 et 25 novembre, 8 et 9 décembre.

Médiathèque

Les week-ends des 10 et 11 novembreet des 24 et 25 novembreDe 14h à 19h

Books on the Move

Les 10, 11, 24, 25 novembre et 9 décembre de 13h à 21hLe 8 décembre de 15h à 23h

Books on the Move, librairie itinérante pour lesdanseurs, penseurs et explorateurs du mouvement estrégulièrement l’invitée du CN D. Elle se pose, pourquelques jours, avec une large sélection d’ouvrages dedanse et performance et les conseils d’Agnès Benoit etStéphanie Pichon. Créée à Berlin en 2008, la librairieest installée à Bordeaux depuis 2013, mais continuede se déployer partout en France et en Europe.Nomade, internationale, Books on the Move construitdes ponts entre les artistes, les pédagogues, leschercheurs, le public et les lieux de spectacle. Lemultilinguisme, la mobilité et la diffusion des savoirssont au cœur de son action. booksonthemove.eu

Publication

DirectriceMathilde Monnier

ResponsablesChristophe Susset et Rachel Spengler

CoordinationValentine Jejcic

TextesGilles Amalvi p.59-67, Florian Gaité p.5, 9-10, 13 (Le Musée), 14, 17-18, 20 (Le Musée), 37-38, 40,43-46, les commissaires invités et les équipes du CN D.

RelectureGaëlle Vidal

TraductionDelphine Jejcic et Kelly Rivière

Conception graphiqueCasier / FieuwsTypographie EideticNeo & TradeGothicPapier Munken Lynx rough 120 gr/m2

Impression Graphius

Crédits photosCouverture Hommage à Bosch, années 1980 © EstherFerrer – p.8 © Esther Ferrer – p.11 © Esther Ferrer –p.12 en haut © Pietro Pellini ; en bas © Mathilde Ferrer– p.19 © Anne Rohart et Erwann Fichou – p.22, 25© Aurélien Mole – p.26 © Mathilda Olmi – p.29© Mathilda Olmi, performance avec Dina Khuseyn àl’occasion de DRAG DRAG SOLO, Centre d’Art Contem-porain, Genève, 2018 – p.32 © Ismaïl Bahri – p.39© Filipe Braga – p.42 © Marie Cool Fabio Balducci –p.45 © Jean-Christophe Norman – p.48 © Frac Lorraine /Work Method – p.50 © Maria Laet – p.51 en haut © Marianne Mispalaëre ; en bas © Ismaïl Bahri – p.52© Maria Laet – p.56, 58, 64, 68 © Ursula Kaufmann.

Page 38: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

75

CN DCentre national de la danse1, rue Victor-Hugo, 93507 Pantin Cedex – France40 ter, rue Vaubecour, 69002 Lyon – FranceLicences 1-1077965 / 2-1077966 / 3-1077967SIRET 417 822 632 000 10

Président du Conseil d’administrationRémi Babinet

Directrice généraleMathilde Monnier

Page 39: L’invitation aux musées Six lieux d’art transforment le CN

76

« Comme elle le dit elle-même, Esther est féministe 24 heures sur 24, même quand elle dort. » Laurence Rassel et Mar Villaespesa

« Quand dans la rue une chaussure est échouée sur un banc public, qu’un tee-shirt sert de pare-soleil,qu’une jupe est abandonnée au sol, le Musée éphémère,sans billetterie officielle, est déjà là. » Olivier Saillard

« Les indices et les suspects sont dispersés dans le CN D,ils peuvent surgir à n’importe quel moment et dansn’importe quel ordre. » Cally Spooner

« Corps et sculpture cohabitent de façon autonome, ils partagent un espace où ils peuvent coïncider, être en résistance, en tension. » Cristina Grande

« Nous devons ouvrir des voies et non crier avec les loups. »Béatrice Josse

« Le corps du danseur est le seul véritable Musée de la danse. » Boris Charmatz