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SESSIONS ÉDUCATIVES N° 54 - Décembre 99 43 Traitement de l’Eau pour Hémodialyse Bilan sur la désinfection intégrale chaleur Jean PRINTZ* et Luc MARCHAL** (contrôle des tubulures) * GAMBRO France, 92 COLOMBES ** Faculté de Médecine, Laboratoire de Microscopie Electronique, 54 VANDOEUVRE LES NANCY RÉSUMÉ La majorité des centres de dialyse sont actuellement équipés de systèmes de trai- tement de l'eau basés sur l'utilisation de l'osmose inverse avec un ou deux étages en série. Des investigations de contrôle au micro- scope à balayage ou avec des milieux de culture spécifiques pour les germes de l'eau montrent généralement des biofilms très importants dans ces réseaux de distri- bution et encore plus importants dans les tubulures d'alimentation des générateurs de dialyse et le circuit primaire du généra- teur. Le biofilm dans le circuit primaire du générateur est systématiquement constaté lorsque la désinfection intégrale n'est pas possible ou difficile à mettre en oeuvre car non automatique. Il en résulte un relargage d'endotoxines et des différents constituants du biofilm (bac- téries, moisissures, champignons) pendant toute la séance de dialyse alors que le générateur vient d'être désinfecté ou stéri- lisé. Le système de défense du patient est ainsi constamment activité entraînant de nombreuses pathologies largement décrites dans la littérature médicale. Les méthodes standards de culture des bactéries ne permettent pas de mettre en évidence ce chaînon manquant de la chaî- ne d'hygiène globale d'un centre de dialy- se, nous proposons donc une autre métho- de avec le milieu de culture TGEA. OBJECTIF QUALITÉ EN HEMODIALYSE. Hygiène totale : éviter le biofilm ! INTRODUCTION Le Concept 1.1 Ce concept global étudié par un grou- pe de travail spécifique animé par le Docteur NYSTRAND (Microbiologiste Ph, D) en Suède dans les années 1980, a été inspiré par le Professeur MURISASCO et l'équipe de Marseille qui, très tôt, ont travaillé et mis en forme ce concept de désinfection intégrale chaleur dès 1977. L'originalité du concept est basée sur le maintien permanent de la boucle de dis- tribution par une circulation d'eau osmo- sée à une température de 90° C en dehors des dialyses ; par le démarrage automatique des générateurs dans leur propre mode de désinfection chaleur

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SESSIONS ÉDUCATIVES

N° 54 - Décembre 99 43

Traitement de l’Eau pour HémodialyseBilan sur la désinfection intégrale chaleurJean PRINTZ* et Luc MARCHAL** (contrôle des tubulures)* GAMBRO France, 92 COLOMBES** Faculté de Médecine, Laboratoire de Microscopie Electronique, 54 VANDŒUVRE LES NANCY

RÉSUMÉLa majorité des centres de dialyse sontactuellement équipés de systèmes de trai-tement de l'eau basés sur l'utilisation del'osmose inverse avec un ou deux étagesen série.

Des investigations de contrôle au micro-scope à balayage ou avec des milieux deculture spécifiques pour les germes del'eau montrent généralement des biofilmstrès importants dans ces réseaux de distri-bution et encore plus importants dans lestubulures d'alimentation des générateursde dialyse et le circuit primaire du généra-teur.

Le biofilm dans le circuit primaire dugénérateur est systématiquement constatélorsque la désinfection intégrale n'est paspossible ou difficile à mettre en œuvre carnon automatique.Il en résulte un relargage d'endotoxines etdes différents constituants du biofilm (bac-téries, moisissures, champignons) pendanttoute la séance de dialyse alors que legénérateur vient d'être désinfecté ou stéri-lisé. Le système de défense du patient estainsi constamment activité entraînant denombreuses pathologies largementdécrites dans la littérature médicale.

Les méthodes standards de culture desbactéries ne permettent pas de mettre enévidence ce chaînon manquant de la chaî-ne d'hygiène globale d'un centre de dialy-se, nous proposons donc une autre métho-de avec le milieu de culture TGEA.

OBJECTIF QUALITÉEN HEMODIALYSE.

Hygiène totale :éviter le biofilm !

INTRODUCTIONLe Concept1.1 Ce concept global étudié par un grou-pe de travail spécifique animé par leDocteur NYSTRAND (MicrobiologistePh, D) en Suède dans les années 1980, aété inspiré par le Professeur MURISASCOet l'équipe de Marseille qui, très tôt, onttravaillé et mis en forme ce concept dedésinfection intégrale chaleur dès 1977.

L'originalité du concept est basée sur lemaintien permanent de la boucle de dis-tribution par une circulation d'eau osmo-sée à une température de 90° C endehors des dialyses ; par le démarrageautomatique des générateurs dans leurpropre mode de désinfection chaleur

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chaque matin, généralement 1 heureavant l'arrivée du personnel dans leservice.

Les générateurs consomment l'eauosmosée chaude circulant dans laboucle ce qui permet d'une part ladésinfection de la liaisonboucle/générateur mais surtout ladésinfection du circuit primaire dugénérateur (circuit primaire = circuitd'alimentation d'eau du générateurnon concerné par ses propres modesde désinfection chimique ou chaleur).

Le circuit primaire est souvent trèscomplexe avec entre autres : électro-vannes, détendeur d'eau, échangeurthermique, raccords, tubulures, etc...

L'état du circuit primaire "oublié"dans le processus de désinfectionclassique (non intégrale) suivra lesvues que nous vous présentons sur lebiofilm "traditionnel" d'un centrede dialyse non équipé d'une désinfec-tion intégrale.

Les composés du biofilm : bactérieset lipopolysaccharides, lipides A,peptidoglycans (non détectables auLAL), peptides muramiques (nondétectables au LAL) ; champignons,moisissures, etc... pourront être relar-gués pendant toute la séance de dia-lyse rendant caduques les effortsmenés par les constructeurs sur ladésinfection/stérilisation du généra-teur lui-même.

LA CHAINE DES FLUIDESDANS UN CENTRE

LA QUALITÉ D'UNE CHAINEDÉPEND DE SON MAILLON

DE PLUS FAIBLE.

Le développement du concept et le fonctionnement : quali-té/sécurité1.2 La première centrale CWP 100chaleur a été installée en Suède en1988 ; environ 75 % des unités dedialyse du pays sont actuellementéquipées de ce système. La Suèdeétant la référence citée (Peter Livesey- Dialysis and Transplantation Mars1998 (Réf. 1)), encore récemment enmatière de norme et contrôle pourl'eau pour hémodialyse et le liquidede dialyse.

Validation de la désinfection cha-leur :Dans le domaine de l'hygiène, il fauttoujours s'interroger sur le nombred'heures laissées libres à la multipli-

cation des bactéries, ce qui nous aamené, dans un premier temps, auconcept CWP 100 chaleur : désin-fection permanente du réseau endehors des dialyses.

La désinfection à la chaleur desgénérateurs Gambro est validéepour un temps de 40 minutes. Celleréalisée par le CWP 100 chaleur estde 54 à 138h par semaine selon lefonctionnement du service.

La durée hebdomadaire de désinfec-tion chaleur pour un centre moyensera donc de 80 à 140 fois supérieu-re en temps, à une désinfection cha-leur validée sur nos générateurs(base 40 minutes).

Dans un 2ème temps, en 1994, nousavons développé le concept"Chimique" CWP 100 Chem répon-dant aux exigences nécessaires à l'ef-ficacité du désinfectant.

1.3 Bien entendu, il ne servirait à riend'avoir une boucle de distributiondésinfectée ou même parfaitementstérile uniquement le temps de lastérilisation, c'est pourquoi les auto-matismes de nettoyage et de désin-fection chimique de l'osmoseur sontprévus sur le CWP 100 chaleur avecla consigne de les lancer au minimumune fois par semaine afin de fournirsur le réseau de distribution une eauosmosée ou bi-osmosée de parfaitequalité.

1.4 Malgré notre importante liste deréférences et les résultats remar-quables enregistrés en routine surtous nos équipement "chaleur",certains doutent parfois de l'efficaci-té de la désinfection chaleur à 90° C... : voir les textes suivants...

1.5 Concernant l'efficacité de ladésinfection chaleur 90° C : la 1èrequestion à se poser est la suivante :La désinfection chaleur des généra-teurs Gambro AK 95 / AK 100 / AK200 a-t-elle été validée en tant quematériel médical et marquage CE ?La réponse est : OUI... alors consul-

eau d'entréeprétraitement

osmose inverseboucle de distribution

bras mortgénérateur de dialyse

concentrésévacuationDESINFECTION

MAINTENANCESURVEILLANCE

Opinion on Fluid Quality in Dialysis/HS/HC E-10898:20

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tez à nouveau le paragraphe 1.2 et lesvalidations en sachant qu'à ce stadede l'installation, il n'y a que de l'eaupure...

1.6 Vous voulez une boucle d'eaustérile et validée ?Alors consultez le paragraphe 1.3, ensachant qu'un osmoseur ne produitpas une eau stérile mais "pauvre engermes" et bien souvent "riche engermes" si l'appareil n'est pas doté denos automatismes de désinfection /nettoyage ou laissé plus d'une semai-ne sans désinfection, et consultez nosdocuments en référence 5 et 6, vouspourrez en déduire qu'à ce stade de"propreté", le nombre de CFUdénombrables sera probablementinférieur à 1 pour 10l, et que lesendotoxines seront absentes ; (globa-lement une eau de qualité PPI pro-duite sans contrainte).

1.7 Le point sur la désinfection et lastérilisation.Parfois, nos interlocuteurs laissententendre préférer “la chimie” à ladésinfection chaleur 90° C, comme siétait ancrée la notion de stérilisationavec une désinfection chimique.

1.8 Rappelons quelques définitionsd’après la norme NF T 72-101 :● La décontamination : les micro-organismes sont éliminés, tués ouinhibés ; l’action peut être seulementbactériostatique (des virus fragilescomme le V.I.H. sont inactivés).● La désinfection : les micro-orga-nismes sont tués ; les virus sont inac-tivés. L’action est nécessairementbactéricide, fongicide et virucide.Le résultat de ces deux opérations estmomentané et limité aux micro-organismes présents pendant l’opéra-tion. La condition de mise en œuvreest importante.

La réduction de germes est de “5log” (facteur 100 000) sur une surfa-ce polluée par 10 000 micro-orga-nismes banaux par cm2 ➞ il ne sub-sistera que 0,1 germe par cm2 soit1 000 germes par m2 (un endoscopecontaminé à 106 bactéries par ml ne

sera donc pas correctement désinfec-té : revivification possible de 10 bac-téries par ml...).● La stérilisation : Ensemble deméthodes et moyens visant à éliminertous les micro-organismes vivantsportés par un objet parfaitement net-toyé (la notion de décontaminationpréalable est importante).“ON NE STERILISE BIEN QUECE QUI EST PROPRE”.La réduction de germes est de “6log”. Le matériel est conservé enétat de stérilité (clos). Le décret du16 janvier 1981 oblige toute person-ne “conduisant” un autoclave àvapeur d’eau, à suivre une formationspécifique avec justificatif.● La dépyrogénation : elle est obte-nue par chauffage en chaleur sèchede 4h à 180 °C.

1.9 Adoptons-nous l’eau surchauf-fée ou la vapeur ?La réponse est NON car :Comment allez-vous stériliser (dansce cas) la liaison boucle / générateuret le circuit primaire du générateur ?Ils se contamineront obligatoirementen mode “production d’eau pendantla dialyse”.L’osmoseur accompagnant ce pro-cess de stérilisation a-t-il de bonsautomatismes de désinfection chi-mique ? Une portion du circuit départboucle n’est-elle pas “oubliée” pen-dant la stérilisation ?Sachez qu’une présence humainespécialisée est nécessaire avec ces“process”.Vous allez tomber dans le piègedécrit au paragraphe 1-3 (c’est-à-direboucle “propre” uniquement pendantla stérilisation).

LE TRAITEMENT DE L’EAU n’estpas un système clos mais un CIR-CUIT OUVERT !Et dernière question : A quelle fré-quence cette stérilisation sera-t-ellepossible ?

1.10 Quel "espace de vie" gardons-nous à nos bactéries ?Je prépare pour mon centre de dia-lyse :

- Une désinfection de 3h par semai-ne : il reste 165h libres pour les bac-téries...- Une désinfection de 8h par mois : ilreste 712h libres pour les bactéries...- Une désinfection de 10h par tri-mestre : il reste 2150h libres pour lesbactéries...- Une désinfection de 24h par an : ilreste 8736h de paix pour mes bacté-ries.

La durée de désinfection chaleur dela boucle de distribution pour unCWP 100 H/ROH est de 54 à 138heures par semaine (selon le fonc-tionnement du Centre), le reste dutemps, vous êtes en dialyse...

Vitesse de génération en log desbactéries genre pseudomonasmême dans l'eau distillée

1.11 Le schéma de principe de ladésinfection chaleur montre sa gran-de simplicité. De nombreuses fonc-tions de supervision sont intégréesdans l'appareil (simple osmose cha-leur ou double osmose chaleur).

La désinfection chaleur est effec-tuée à l'eau osmosée (CWP 100WRO-H) et bi-osmosée chaude(WRO ROH).

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1.12 Si vous pouvez, chaque matin,utiliser le "Process" figuré ci-dessousautomatiquement avant l'arrivée dupersonnel, vous possédez sans aucundoute un centre de dialyse à l'hygièneglobale parfaite et exemplaire.

1.14 Le schéma ci-dessous vousmontre le WRO ROH en opération (=dialyse). Tous les débits, températu-re de retour boucle et la conducti-vité, sont supervisés par capteurs.Mémorisation des alarmes avec horo-datage. L'eau bi-osmosée de l'unitéchaleur parfaitement isolée thermi-quement est maintenue à 65° C(réglage de 60 à 95° C). Cette eau estrenouvelée partiellement chaquematin. Le nettoyant et le désinfectantsont bien entendu disconnectés.

1.15 Vue du programme de nettoyage/ désinfection du WRO ROH pendantla circulation du nettoyant des mem-branes du 1er étage d'osmose, cecipermettra une réelle efficacité de laphase de désinfection qui suivra lerinçage n°1 (élimination des princi-paux dépôts organiques).

Pour assurer une qualité d'eauparfaite, ce "process" automatiquedoit être démarré au minimum unefois par semaine, code d'accès audépart et contrôle de traces dedésinfectant au retour du person-nel.

LA DÉSINFECTIONINTÉGRALE EN ROUTINE

● Une chaîne d'hygiène totale

- L'osmoseur est automatisé en net-toyage et désinfection.- La boucle est en désinfection perma-nente toutes les heures sans dialyse.

- Le générateur est intégrédans le "process" global.

POURQUOILES CONTRÔLESNE DÉTECTENT

PASCES BACTÉRIESDU BIOFILM ?

● Les conditions de prélè-vement entraînent souventdes faux négatifs.● La durée du prélèvementest courte.

● Les bactéries planctoniques nereprésentent en régime normal que0,04 % de la biomasse.● Les bactéries cultivées ne sont doncque les bactéries cultivables ! (nousperdons les bactéries stressées).● Le milieu de culture et la tempéra-ture d'incubation sont généralementinadaptés aux bactéries de l'eau.

● Un milieu spéci-fique enrichi avec2 % de NaCI estnécessaire pour exa-miner le dialysat(Harding et al).● Un milieu T4(TGEA + 4 % NaHCO3) est nécessairepour cultiver le"bicar" (Nystrand)

2.1 Les limites des tests bactériolo-giques ordinaires

De bons résultats(avec une méthoded'analyse classique)sont courants et ceci

sans désinfection régulièredu traitement de l'eau.

Les incertitudes sont multiples com-parativement à l'analyse chimique.

2.1 a Premièrement : Le dénom-brementStatistiquement, nous limitons ledénombrement des bactéries (moisis-sures et champignons) par le volumedu prélèvement (10 à 100 ml rare-ment 1 litre) et le temps de prélève-ment (10 à 30 secondes) en sachantque les bactéries circulantes ditesplanctoniques (en régime d'utilisa-tion normale) ne représentent qu'unepartie extrêmement faible de lapopulation totale fixée : 0,02 à0,04 % d'après Leclerc et al.Nous n'évoquerons pas ici les fauxnégatifs classiques : aspersion dedésinfectant et mauvais rinçage de lavanne de prélèvement, absence deneutralisation du chlore résiduel,milieu de culture non refroidi, etc...Le nombre de bactéries circulantesaugmente à l'occasion d'une modifi-cation du régime hydraulique, coupde bélier, etc... Ou à l'occasion d'unnettoyage / désinfection du réseauépisodique (voir à ce sujet le pointsuivant n° 2.2).Pour ces raisons les distributeursd'eau potable adoptent progressive-ment des stratégies d'échantillon-nage régulier ce qui permet d'éviter

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le faux positif (de ne pas en tenircompte) dû à la contamination localed'une vanne de prélèvement, le résul-tat devant être corrélable à une série(on prélève en amont et en aval de lazone suspecte dans ce cas).

2.1 b Deuxièmement : Les bactériescultivablesLe dénombrement des bactéries cir-culantes par culture sur un milieuadapté ne permet justement de necultiver que les bactéries culti-vables... Formant donc des CFU.

Vont échapper au contrôle :Les bactéries stressées (injury), lesbactéries stressées par carence ali-mentaire (starvation) qui adoptentun mode de vie ralenti d'après C.Haslay et nombreuse littérature ; leurreviviscence (regrowth) ou réparationinterviendra d'une manière aléatoirelorsque l'environnement deviendraplus favorable.Notre méthode préconisée par R.Nystrand (culture sur 7 jours à 20°C) permet de dénombrer plus deCFU qu'un temps de culture de 48 à72 heures (à bien examiner car lesCFU "supplémentaires" sont beau-coup plus petites).

2.1 c Troisièmement : Le milieu deculture et la température d'incuba-tionUne littérature plus modeste traite dece sujet et R. Nystrand a très biendocumenté la question ainsi que G.Davies et al et G.B. Harding et al(essentiellement des auteurs concer-nés par l'eau pour hémodialyse).

Le constat est pourtant simple et évi-

dent :Nous avons vu au 2ème point que lesbactéries, souvent stressées dans nosréseaux d'eau, s'adaptent doucementet parfois difficilement au change-ment de milieu écologique.

Si vous utilisez un milieu de cultureriche (type hémoculture) et une tem-pérature d'incubation de 37° C,vous allez "perdre" de 10 à 99 %du peu de bactéries "libres" car cesdernières ont comme écosystème unmilieu pauvre (l'eau osmosée) géné-ralement à une température de 12 à22° C.L'étude complète de R. Nystrand esten référence. L'étude de Harding(également en référence) montre clai-rement la nécessité d'utiliser desmilieux différents pour l'eau et leliquide de dialyse.

Résumé des contrôles comparatifsde R. Nystrand

Bactériologie : tableaux de synthèse

STATUT : QUALITÉ DULIQUIDE DE DIALYSE

2.2 Doit-on désinfecter un réseaujamais traité ?Ne vous y risquez pas...L'expérience montre que le remèdeest pire que le mal car la couchesuperficielle du biofilm est certesattaquée, mais il en résulte une dis-persion d'un grand nombre de bacté-ries et une augmentation considé-rable des endotoxines ; la colonisa-tion devenant identique 7 à 15 joursaprès la désinfection.

En tout cas, ne suivez pas ceux quiconfondent mauvais remède et traite-ment préventif et prônent ou prô-naient encore récemment l'absencede désinfection préventive systéma-tique amenant à ce triste tableau :

2.3 Pourquoi dans de nombreux"process" agro-alimentaires, phar-maceutiques, industriels, trouve-t-on des équipements en inox avecdes composants aseptiques ?Ces industries travaillent générale-ment en lot de fabrication sur un"process" fermé (il n'y a pas d'an-tennes hétérogènes comme nos géné-

Les gentssont convaincusque leur liquide

est conforme

Cultivésde façon adéquate,

les fluides présententun grand nombre

de bactéries

méthodes de testmicrobiologiques

▼sous estimation dunbr. de bactéries

▼fausse sécurité

STATUT : QUALITÉ DU LIQUIDE DE DIALYSE

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rateurs de dialyse). Le "batch" defabrication fini, il faut désinfecter /stériliser très rapidement (désinfec-tant, vapeur, etc...) ; cette opérationétant souvent précédée de différentestechniques de nettoyage en place(NIP).Un personnel entraîné conduit lesopérations d'entretien. La grandevariété de composants aseptiques eninox conduit la majorité des utilisa-teurs à ce matériau, qui a l'avantaged'être solide, tout un chacun connais-sant les limites de l'inox (état de sur-face, adhésion facile des bactéries,etc...) malgré des Ra de 0,2µm (voir2.4, 2.5, 2.6).

Fréquemment, l'eau purifiée estconservée à 80° C dans ces indus-tries.

Nos deux concepts de désinfectionintégrale ressemblent beaucoup àces pratiques... Toutefois, sans per-sonnel spécifiquement entraînépour la conduite du "process"...

2.4 Pourquoi dans l'industrie élec-tronique, les "process" d'eau ultrapure sont généralement réalisés enmatériaux "nobles" comme lePVDF, le PTFE, etc...Ici c'est la pureté maximale quiprime, la solidité venant en second ;les composants aseptiques étant peunombreux, beaucoup de fabricationsspéciales sont réalisées.

Les utilisateurs ont bien compris l'in-térêt de ces matériaux qui présententune surface parfaitement hydropho-be* limitant l'adhésion des bactériescomme l'ont étudié U. Husmark et R.Andersson à notre demande en 1990(réf. 9). * Ce qui n'est pas le cas de l'inox.A la mise en service, un nettoyagepoussé est pratiqué afin d'éliminer enparticulier le C.O.A. (CarboneOrganique Assimilable (par les bac-téries)).

2.5 Une désinformation classiqueOn pourra s'étonner de la désinfor-mation pratiquée parfois au sujet des

matériaux ; qui conseille l'inox sur un"process chimique" pour son état desurface "pouvant aller jusqu'à l'élec-tropolissage" ; déconseillant le PEXet les tuyauteries en matière synthé-tique (amalgame général) et parlantde dégradation, fissures, crevasses...Un tableau apocalyptique...Nous montrons des résultats inversesdans nos photos en référence.

2.6 Extrait du rapport U. Husmark etR. AnderssonLa mouillabilité des différents maté-riaux a été déterminée en mesurantl'angle de contact d'une goutted'eau par rapport à la surface. Lesrésultats du tableau ci-dessous indi-quent que le Téflon et le PEX sontles matériaux les plus hydrophobes,le verre le moins hydrophobe alorsque les surfaces en acier inoxydableont une mouillabilité intermédiaire.

Nous ne conseillons l'inox que pourun projet désinfection chaleur

2.7 Avec une distribution en PVDF,PEX ou PTFE, est-il possible d'es-pacer les désinfections ?Absolument pas*.Le bon matériau contribue seulementà limiter l'adhésion et surtout, l'ab-sence de fissures facilitera grande-ment le nettoyage et la désinfectionen pratique préventive systématique.* C. Haslay explique les "méca-nismes" de l'adhésion en troisstades :1) L'adhésion ou adsorption estextrêmement rapide : moins d'uneminute ; elle est réversible cardépendante de phénomènes phy-siques variés et liés au support (voirfigure précédente sur les caractères ±hydrophobes des matériaux).2) La fixation proprement dite estplus lente, elle implique la synthèsedes chaînes polysaccharidiques

(Glycocalyx, Slime).3) La colonisation ou développe-ment du biofilm sur le support s'ef-fectuera ensuite, l'épaisseur variantselon de nombreux facteurs (érosion,nutriments, etc...).U. Husmark et R. Andersson ontégalement remarqué pendant leurétude sur l'adhésion que certaines bac-téries "plongées" dans l'eau ultra pure(donc en stress par carence alimen-taire (Starvation)), adhéraientextrêmement rapidement et en grandnombre au matériau testé ; probable-ment comme un mécanisme de survie.Nos réseaux d'eau osmosée sontdonc dans cette situation...

Tube PVC standardL'état de surface est parsemé de trousqui seront les premières niches ser-vant de refuge aux bactéries.Pour nos réalisations, nous utilisonsune qualité supérieure mais sansobtenir l'état de surface parfait denotre Clean PEX.

Tube PVDF* souvent présentécomme référence en matière d'étatde surface.L'état de surface, type "pâte écrasée",est très supérieur au PCV* mais onconstate toujours des infractuosités.Le tube Clean PEX* fabriqué pourGambro est ultra lisse.* PVDF = Polyfluorure de vinylidène.* PVC = Polychlorure de vinyle.* PEX = Polyéthylène réticulé.TUBE Clean-PEX pour GambroCe tube est utilisé dans les généra-teurs Gambro et les boucles d'eau.L'état de surface est parfait comparé àla référence qu'est le PVDF.2 tubes inox de haute qualité

Matériau Angle de Contact (degrés)

Acier inoxydable 46 ± 4

Acier inoxydable Electro-poli Idem acier inoxydable

PEX 85 ± 7

Verre 22 ± 3

Téflon 95 ± 6

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Tube alimentaire de norme NFA 49249. Les infractuosités risquent de ser-vir de niches aux bactéries si unedésinfection journalière est impos-sible.

Probablement l'une des meilleuresqualités disponible actuellement avecélectro-polissage. Des trous subsistentmais en moins grand nombre.Photos : Microscopie Electronique FacultéNancy - L. Marchal

CONCLUSIONLa désinfection intégrale chaleur selonle concept décrit précédemment est àce jour le moyen unique de conserverintacte la chaîne d'hygiène du centrede dialyse. Des protocoles rigoureuxdoivent être prévus lorsqu'un généra-teur sort d'une opération de mainte-nance et réintègre le circuit de traite-ment du patient ; il en est de mêmepour le(s) générateur(s) de secours quine devrai(en)t plus séjourner dans lescouloirs des centres de dialyse denombreuses heures en attente d'uneéventuelle utilisation thérapeutique ; jevous laisse imaginer l'état du circuitprimaire et interne du générateur dansce cas. Cette contamination situéejuste en amont du circuit de prépara-tion du dialysat rend caduque lesefforts menés par les constructeurs surle circuit fluide désinfectable ou stéri-lisable du générateur.

PROTOCOLE DE PRÉLÈVEMENT DE TUBULURE

PAR GAMBRO- L'extérieur du tube est nettoyé à l'al-cool à 70° sur compresse- Le tube est coupé à la pince coupetube avec une lame nettoyée, la lon-gueur est adaptée de manière à remplirtout le flacon.- Le tube est placé dans un flacon sté-rile préalablement étiqueté.- Le flacon est ensuite rempli de fixa-teur (décrit à la suite), bouché et gardéimmobile pendant 15 à 30 minutes.- L'échantillon est ensuite expédié àMonsieur MARCHAL.

UNIVERSITÉ HENRI-POINCARÉNANCY 1 - FAC. DE MÉDECINE

Service de Microscopie ElectroniqueLuc MARCHAL - Ingénieur CNRS

MÉTHODE DE PRÉPARATIONDES ÉCHANTILLONS(boucle d'eau osmosée)

Les échantillons de tuyaux sont fixéspendant 12 heures à 4° C dans du glu-taraldéhyde à 2,5 % dans du tamponcacodylate 0,1 M pH7,2. Après un rin-çage de 30 mn dans le même tamponadditionné de 7 % de saccharose, lesprélèvements sont déshydratés dansdes bains successifs d'alcool de 5 mn à30°, 50°, 70°, 80°, 90° et 100° 2 fois.Sous hotte aspirante, les échantillonssont passés dans un dernier baind'hexaméthyldisilazane (HMDS) deformule C6H19NSi2 pendant 10 mnavant séchage à l'air. Après collage sursupports et métallisation à l'or de leursurface (couche d'or de 20 nm d'épais-seur), les échantillons sont observés aumicroscope électronique à balayageCAMBRIDGE STEREOSCAN S 240et les photos prises sur film ILFORDFP4 120.

LA RÉALITÉ DU SERVICEDE DIALYSE.

MAINTIEN DE LA CHAINEDE QUALITÉ OU PAS ?

● Situation des générateurs desecours ?● Situation du générateur sortant demaintenance ?● Solution : la désinfection intégrale.NOUS VENONS DE CONSTRUI-RE UNE CHAINE D'HYGIÈNE,

NOTRE OBJECTIF QUALITÉEST ATTEINT !

N'oubliez pas les 2 maillons les plusfaibles !

A/ Liste des documents en référencedisponibles auprès de Gambro :Dr Y. BERLAND - Dialysat et biocompa-tibilité en hémodialyse. Néphrologie Vol19 n° 6/1998P. Livesey - Dialysis & Transplantation -March 1998E. Tykesson - Test report Q-94059 -Disinfection in AK 100L. Nurbo - Test report Q-90023 - HeatDisinfection in AK 100Vues de biofilm et matériaux, L. Marchalet J. PrintzR. Nystrand - Protocole de contrôle bacté-riologique de l'eauG.B. Harding et al - BacterialContamination of Hemodialysis Fluids11 et 13 avril 1990, I.S.B.P. ParmaEtude SIK : U. Husmark and R. Andersson

B/ Bibliographie :- G. Davies et al - Analyse microbiolo-gique du liquide de dialyse - Janvier 1992- EDTNA-ERCA - Journal XVIII n° 1.- Guide pratique : décontamination, bio-nettoyage, désinfection, stérilisationJ.P. Guignard et al. - Conseil Scientifique :Pr J.C. Darbord - Editions Hospitalières1994- Hygiène Hospitalière Pratique - A.Dauphin, J.C. Darbord - APHIF / EMI- Microbiologie appliquée - H. Leclerc etal., Doin éditeurs - 1977- Microbiologie des eaux d'alimentation -C. Haslay, H. Leclerc - Tech et Doch,Lavoisier 1993- La qualité du liquide de dialyse "un pro-blème de contamination", Service

Formation Gambro AB - 1987

C/ Renseignements divers :- Dialox® est une marque déposée d'AIRLIQUIDE SANTÉ- Milieu de culture TGEA : TryptoneGlucose Extract Agar disponible chez :Oxoid® Réf. : CM 127MEA : Malt Extract Agar - Oxoid® CM 59(Milieu pour champignons et moisissures).