the evolution of the health expenditures in morocco: a
TRANSCRIPT
Munich Personal RePEc Archive
The Evolution of the Health
Expenditures in Morocco: A
Demographics and Macroeconomics
Determinants Analysis
Y. TAMSAMANI, Yasser
OFCE, Sciences-Po Paris, DIAL, Université Paris Dauphine
19 May 2017
Online at https://mpra.ub.uni-muenchen.de/83996/
MPRA Paper No. 83996, posted 20 Jan 2018 05:18 UTC
1
LâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© au Maroc :
Une analyse des déterminants démographiques et macro-économiques
Yasser Y. TAMSAMANI1,2
19 January 2018
Résumé
La dynamique des dépenses de santé au Maroc est en perte de vitesse depuis 2010, passant
dâun rythme dâaccroissement annuel moyen de 7,9% entre 1996 et 2009 Ă 4,4% sur la pĂ©riode
récente.
Ce papier propose dâidentifier les dĂ©terminants dĂ©mographiques et macroĂ©conomiques du comportement des dĂ©penses de santĂ© au Maroc et dâĂ©valuer leurs contributions respectives au changement de rĂ©gime de croissance de ces dĂ©penses. Il en ressort que les facteurs
démographiques réunis (accroissement de population et transition démographique)
expliquent 14% du recul du taux de croissance des dépenses de santé.
Pour ce qui est des déterminants macroéconomiques, les estimations économétriques
concluent Ă une Ă©lasticitĂ©-revenu des dĂ©penses de santĂ© infĂ©rieure Ă lâunitĂ© et comprise entre
0,5 et 0,8, une semi-Ă©lasticitĂ©-prix positive dâune valeur de 0,02 et une sensibilitĂ© au poids du
financement public (versus privĂ©) de lâordre de 0,01 (-0,01). De ce fait et en termes de
contributions à la décélération des dépenses de santé depuis 2010, la baisse des prix relatifs
des services de santé en est responsable à hauteur de 45%, suivi de celles relatives à la baisse
de la part de financement public (20%) et du taux de croissance Ă©conomique (11%). Le reste
des contributions (10%) est contenu dans le résidu du modÚle estimé.
Mots clés : Dépenses de santé, démographie, déterminants macroéconomiques, élasticités,
Maroc
The Evolution of the Health Expenditures in Morocco:
A Demographics and Macroeconomics Determinants Analysis
Abstract
Moroccoâs healthcare expenditures regime growth has been in decline since 2010. The
average annual growth rate went from 7.9% over the period of 1996 to 2009 to 4.4% in the
recent years. The objective of this paper is to identify the demographic and macroeconomic
determinants that shape healthcare expenditures behavior in Morocco, and to evaluate their
respective contributions to the shift observed in the trajectory of healthcare expenditures
growth.
1 OFCE, Sciences-Po Paris ; DIAL, Université Paris-Dauphine. Email : [email protected] 2 Mes remerciements vont à Hicham Masmoudi et Mohamed Jihad de leurs précieuses aides.
2
On the one hand, results show that the combined demographic factors of population growth
and demographic transition account for a 14% growth rate decline in healthcare expenditures.
On the other hand, the evaluation of macroeconomic determinants based on econometric
modeling, shows that the income elasticity of healthcare expenditures is less than a unit
ranging from 0.5 to 0.8. It also yields a positive price semi-elasticity with an estimated value
of 0.02, and a 0.01 (-0.01) sensitivity coefficient to the variation of the weight of public (versus
private) funding in total healthcare expenditures. Therefore, as of 2010 the contributing
factors to the slowing down in healthcare expenditures growth can be presented as follows:
45% is due to declining healthcare relative prices, 20 % is due to a shrinking share of public
funding, and 11% is due to a decelerating economic growth. The estimated modelsâ residual contains the remainder (10%) shares of contributions.
Keywords: Healthcare expenditures, demography, macroeconomic determinants, elasticities,
Morocco
JEL Classification: H51, I12, I15, I18
Table des matiĂšres
I. Introduction ................................................................................................................................ 2
II. Les dépenses de santé au Maroc : un état des lieux .................................................................. 4
III. Les déterminants classiques des dépenses de santé : une revue des écrits .............................. 9
IV. Démographie et dépenses de santé au Maroc......................................................................... 11
V. Les déterminants macroéconomiques de la dynamique des dépenses de santé au Maroc ... 18
a. Une (brÚve) discussion des déterminants macroéconomiques des dépenses de santé .......... 19
b. Modélisation économétrique .................................................................................................... 23
c. Interprétation des résultats des modÚles ................................................................................. 25
d. Les causes du ralentissement du taux de croissance des dépenses de santé par
habitant depuis 2010 ? .............................................................................................................. 29
VI. Conclusion ................................................................................................................................ 32
VII. Bibliographie ............................................................................................................................. 33
VIII. Annexes .................................................................................................................................... 34
I. Introduction
Le développement étant un processus évolutif spécifique à chaque pays (Lin, 2012), sa
trajectoire se dessine selon les expériences historiques et les particularités socio-économiques
et culturelles des pays. Le nombre des trajectoires et des expériences de développement est
alors au nombre de pays Ă©tudiĂ©s. Cela dit, Ces trajectoires partagent tout de mĂȘme une finalitĂ©
ultime qui est lâĂ©lĂ©vation du bien-ĂȘtre social. En pratique, une telle finalitĂ© se dĂ©cline en
3
amĂ©lioration des libertĂ©s et des capabilitĂ©s des individus (au sens dâAmartya Sen) dont lâĂ©tat
de leur santĂ© que lâon retrouve dans le calcul de nombreux indicateurs synthĂ©tiques de
développement.
A ce stade, deux points mĂ©ritent dâĂȘtre soulevĂ©s. Dâun cĂŽtĂ©, il importe de souligner que dans
un processus de dĂ©veloppement centrĂ© sur lâamĂ©lioration du bien-ĂȘtre social et en lien avec
le domaine de la santĂ©, ce qui compte rĂ©ellement est davantage lâĂ©tat sanitaire de la
population que le volume des dĂ©penses de santĂ©. Si lâĂ©tat de santĂ© Ă©tant bel et bien corrĂ©lĂ©
aux dĂ©penses de santĂ©, ce lien ne peut en aucun cas ĂȘtre linĂ©aire. Car, il est fonction des
éléments multidimensionnels dépassant le seul volume des dépenses engagées pour la
production des biens et services de santĂ©. Le mode de vie ainsi que les mĆurs et les coutumes locales, par exemple, ont une incidence sur lâĂ©tat de santĂ© ambiant.
A titre illustratif, la comparaison des dépenses de santé par habitant aux Etats-Unis et en
Europe met en exergue ce caractÚre non linéaire des performances de leur systÚme respectif
en termes dâamĂ©lioration des services des soins et de lâĂ©tat de santĂ© de leur population : alors
quâaux Etats-Unis les dĂ©penses totales et par tĂȘte sont largement plus Ă©levĂ©es quâen Europe,
ses indicateurs standards de mesure dâĂ©tat effectif de santĂ© sont moins bons.
NĂ©anmoins, Ă dĂ©faut dâun indicateur synthĂ©tique englobant lâensemble des aspects rĂ©els de
lâĂ©volution de la situation de santĂ© dans un pays, le volume des dĂ©penses de santĂ© reste un
« bon » proxy pour cette derniĂšre. Ainsi, le prĂ©sent travail ne se focalisera que sur lâanalyse du volume des dĂ©penses de santĂ© (totales et par habitant), mais sans perdre de vue la finalitĂ©
derriĂšre qui est lâĂ©tat de santĂ© effectif de la population.
Dâun autre cĂŽtĂ©, la relation entre le dĂ©veloppement Ă©conomique et lâĂ©tat de santĂ© sâappuie
sur un raisonnement circulaire provenant dâune causalitĂ© bidirectionnelle qui a pour
conséquence le renforcement de ce lien. Cependant, ce dernier perd de sa ténacité à des
niveaux de dĂ©veloppement Ă©levĂ©s. Les travaux appliquĂ©s aux pays avancĂ©s se limitent Ă
lâĂ©tude du seul effet du dĂ©veloppement Ă©conomique sur la trajectoire des dĂ©penses de santĂ©
en rĂ©duisant la portĂ©e dâune Ă©ventuelle causalitĂ© inverse3. Pour cause, lâĂ©tat gĂ©nĂ©ral de santĂ©
dans ces pays avancĂ©s a atteint dĂ©jĂ , dâune part, un niveau satisfaisant rendant toute
augmentation de dépenses de santé couteuse par rapport aux gains espérés en termes
dâamĂ©lioration de lâĂ©tat de santĂ©. Dâautre part, les marges des gains de productivitĂ© liĂ©es Ă
une amĂ©lioration de lâĂ©tat de santĂ© y sont minimes. Cela justifie pourquoi lâĂ©tude du
comportement des dĂ©penses de santĂ© dans les pays avancĂ©s sâest rĂ©duit Ă lâĂ©laboration des scĂ©narii dâĂ©volution future de ces dĂ©penses dans une perspective de recherche dâun Ă©quilibre respectant la contrainte budgĂ©taire et maintenant au moins, pour chacun de leurs citoyens,
le volume et la qualité des services de soins requis (ce qui est une contrainte démocratique).
Ainsi, poursuivant cette logique, le rythme dâaccroissement des dĂ©penses de santĂ© devrait suivre une courbe en cloche, qui sâaccĂ©lĂšre dans la pĂ©riode de rattrapage Ă©conomique et se
3 Le lecteur pourrait se rapporter Ă lâarticle de Piabuo et Tieguhong (2017) pour une revue de littĂ©rature rĂ©cente sur le lien entre la croissance Ă©conomique et les dĂ©penses de santĂ©.
4
dĂ©cĂ©lĂšre, par la suite, Ă un niveau de dĂ©veloppement avancĂ© pour se stabiliser autour dâun taux de croissance proche de celui de lâĂ©conomie.
A lâinstar de ce qui a Ă©tĂ© observĂ© dans les pays avancĂ©s, le Maroc semble reproduire le mĂȘme
profil dâĂ©volution de ses dĂ©penses de santĂ©, alors que le volume ces derniĂšres ainsi que lâĂ©tat de santĂ© rĂ©el de sa population ne sont guĂšre comparables. Si le ralentissement que connaĂźt la
dynamique des dépenses de santé depuis 20104 se poursuit dans les prochaines années, la
concavité prématurée de la courbe des dépenses de santé se confirmera et le Maroc sera en
train dâĂ©touffer dans lâĆuf les conditions de sa croissance potentielle.
Partant de ce constat, lâobjectif premier de ce papier est de dĂ©terminer les facteurs explicatifs du ralentissement des dĂ©penses de santĂ© (totales et par habitant) au Maroc sur la pĂ©riode
récente et leurs contributions respectives5. Quel le rÎle joue-t-elle la transition
démographique dans cette décélération du rythme de croissance des dépenses de santé ?
Sâexplique-t-elle par un retournement au niveau de ses principaux dĂ©terminants classiques, Ă
savoir : niveau de vie, prix relatifs et structure de financement ? Est-elle la rĂ©sultante dâune politique budgĂ©taire restrictive ? Et si oui, dans quelle mesure ? Ou sâagit-il, simplement, dâun effet de saturation « naturel » tel que lâon peut observer chez les pays avancĂ©s Ă partir dâun certain niveau de dĂ©penses par tĂȘte ?
La suite du papier contient trois parties et sera organisé comme suit : la premiÚre sera dédiée
Ă dresser un Ă©tat des lieux de lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© au Maroc et prĂ©sentera Ă la fin un argumentaire rĂ©futant lâhypothĂšse dâun Ă©ventuel effet de saturation comme un facteur
explicatif du ralentissement de la croissance des dépenses de santé sur la période récente. La
deuxiÚme partie sera consacrée à la mesure du poids des facteurs démographiques dans
lâinclinaison de la trajectoire dâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ©. Quant Ă la troisiĂšme partie,
elle sâĂ©talera sur le pouvoir explicatif des dĂ©terminants macroĂ©conomiques de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© corrigĂ©e des effets de la dĂ©mographie et leur rĂŽle dans le changement
de comportement qui sâest produit depuis 2010.
II. Les dépenses de santé au Maroc : un état des lieux
Les dépenses annuelles totales de santé au Maroc ont connu, sur les vingt derniÚres années,
une progression constante. Elles ont été multipliées par un facteur de 4,8 en passant de 11,1
milliards en dirham courant en 1995 Ă 54,2 milliards en 20146. En Ă©liminant lâeffet de
4 LâannĂ©e 2010 reprĂ©sente un point de flexion dans la courbe traçant lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ©. Câest une annĂ©e de changement du rĂ©gime de croissance si lâon se fie au rĂ©sultat du test de Wald (cf. section II). 5 Lâaccent est mis uniquement sur lâeffet du dĂ©veloppement Ă©conomique sur lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© et ne considĂšre pas la causalitĂ© inverse. Ce choix est dictĂ© par lâobjectif mĂȘme du papier qui se limite Ă une analyse du comportement Ă court terme, sachant que lâeffet des dĂ©penses de santĂ© sur la croissance relĂšve de la thĂ©orie de croissance de long terme. En outre, cette causalitĂ© inverse a Ă©tĂ© rejetĂ©e statistiquement Ă court terme au regard du test de causalitĂ© au sens de Granger. Un rĂ©sultat similaire est dĂ©montrĂ© pour un panel de pays en dĂ©veloppement par Elmi et Sadeghih (2012). 6 LâannĂ©e 2014 reprĂ©sente le dernier point disponible sur la base de donnĂ©es World Development Indicators (2018).
5
lâinflation, lâaccroissement des dĂ©penses reste tout de mĂȘme significatif avec un facteur multiplicateur de 3,5.
La mĂȘme tendance est observĂ©e au niveau des dĂ©penses de santĂ© en point de PIB et par
habitant. En effet, en point du PIB, elles ont cru de 1,5 point entre 1995 et 2014, en se
stabilisant autour de 6% (Tableau 1). Les dépenses par habitant, quant à elles, ont également
augmentĂ© sur cette mĂȘme pĂ©riode. Elles ont Ă©tĂ© multipliĂ©es par 2,8.
Tableau 1 Les dépenses annuelles moyennes de santé au Maroc entre 1995 et 2014
Sources : Banque Mondiale, Fond MonĂ©taire International, calculs de lâauteur
En revanche, la dynamique dâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© (totales, en point de PIB et par
habitant) prĂ©sente un signe dâessoufflement sur la pĂ©riode rĂ©cente Ă partir de 2010. En effet,
un changement de rĂ©gime de croissance des dĂ©penses de santĂ© semble sâinstaller depuis 2010 (Tableau 1): la dynamique des dĂ©penses totales et par habitant a perdu de son allure en
passant des taux de croissance, respectivement, de 7,9% et 6,7% en moyenne annuelle sur la
période entre 1995 et 2009, à des taux plus faibles de 4,4% et 3% à partir de 2010, soit un
ralentissement de 3,5 points en moyenne annuelle. En point de PIB, le rythme de croissance
des dĂ©penses de santĂ© se tasse Ă©galement et se stabilise autour dâun taux de 1% en moyenne
annuelle entre 2010 et 2014.
Sur un plan purement statistique, lâhypothĂšse dâun changement de rĂ©gime de croissance des dĂ©penses de santĂ© au Maroc se vĂ©rifie. Une rĂ©gression simple des taux de croissance des
dépenses de santé totales et par habitant sur un trend et sur une variable muette dont les
valeurs sont fixĂ©es Ă lâunitĂ© entre 2010 et 2014 et Ă zĂ©ro avant cette pĂ©riode conclut quâun changement de rĂ©gime a bien eu lieu Ă partir de 20107. En effet, les coefficients estimĂ©s liĂ©s Ă
la variable muette pour les deux sĂ©ries (dĂ©penses totales et par tĂȘte) sont nĂ©gatifs et
significativement différents de zéro (Tableau 10 en annexe). Les tests de Wald sur ces
coefficients ne rejettent pas cette hypothÚse de changement de régime de croissance.
7 LâhypothĂšse dâun changement de rĂ©gime a Ă©tĂ© Ă©galement testĂ©e pour des dates diffĂ©rentes de 2010, mais les rĂ©sultats des estimations ainsi que les tests de Wald ne lâont pas validĂ©e.
...en millions de MAD constant ...en % Pib ..par tĂȘte en MAD constant
1995-2014 31706 5 1023
1995-2009 26025 4,7 872
2010-2014 48749 6 1476
1995-2014 7 2,8 5,7
1995-2009 7,9 3,5 6,7
2010-2014 4,4 1 3
⊠en taux de croissance annuel réel
Années
Dépenses moyennes de santé...
6
Au cas oĂč le ralentissement de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© se confirme dans les
quelques années à venir, sa courbe prendra une allure concave similaire à celle observée dans
les pays avancĂ©s8 condamnant la croissance future du Maroc. Sâagissant des pays avancĂ©s, Il semble comprĂ©hensible que la croissance de leurs dĂ©penses de santĂ© suit une telle trajectoire
étant donné les performances de leur systÚme de soins mis en place et le niveau déjà élevé
des dĂ©penses par tĂȘte qui dĂ©passe en moyenne annuelle 3000 dollars en paritĂ© de pouvoir
dâachat9 (PPA). Ce phĂ©nomĂšne sâexplique, dâune part, par un effet de saturation « naturelle »
qui rend couteuse toute amĂ©lioration de lâĂ©tat rĂ©el de santĂ© au-delĂ dâun certain seuil. Dâautre part, dans un contexte de restriction budgĂ©taire et de faibles gains de productivitĂ© attendus
dâune hausse des dĂ©penses de santĂ©, ces derniĂšres sont assimilĂ©es Ă de la consommation finale dont la dynamique haussiĂšre ne peut ĂȘtre maintenue infiniment de point de vue de la
contrainte budgétaire.
En revanche, la situation au Maroc est différente et ce à plusieurs égards : le niveau des
dépenses de santé par habitant est faible à seulement 250 dollars PPA en moyenne annuelle,
la marge des gains potentiels de productivitĂ© est encore importante, et lâĂ©tat de santĂ© de la
population est tel que lâeffet de saturation ne peut ĂȘtre Ă lâorigine dâun retournement Ă la baisse de la dynamique des dĂ©penses de santĂ©. Cette hypothĂšse dâun Ă©ventuel effet de saturation nâest mĂȘme pas envisageable dans un marchĂ© de santĂ© caractĂ©risĂ© par un dĂ©ficit
structurel de lâoffre tel que le cas au Maroc au point oĂč la pĂ©nurie des soins sâest traduit, au niveau microĂ©conomique, par des files dâattente interminables et des comportements
indécents de corruption et de favoritisme.
En comparaison avec des pays voisins de sud de la Méditerrané ayant des niveaux de
développement proches, le Maroc ne ressort pas le plus dépensier sur les biens et services de
santé. En niveau, les dépenses totales en point de PIB au Maroc sont en moyenne inférieures
de 1 point de pourcentage de celles de la Tunisie et comparables Ă celles de lâEgypte. LâĂ©cart avec lâAlgĂ©rie est faible : cette derniĂšre a consacrĂ© en moyenne annuelle sur les vingt
derniÚres années 4,3 points de PIB aux dépenses de santé contre 5 points au Maroc.
Par ailleurs, en se rapportant aux dépenses de santé par habitant en PPA10 (Tableau 2), le
Maroc ne ressort pas mieux classer que ses voisins. En effet, ces dépenses sont de deux fois
supérieures en Algérie par rapport au Maroc, de 1,7 fois en Tunisie et de 1,3 fois en Egypte.
Elargissant la comparaison Ă lâensemble du groupe des pays Ă revenu intermĂ©diaire dont le
8 Le taux de croissance annuel moyens dĂ©penses de santĂ© par habitant en PPA dans les pays de lâOCDE a baissĂ© Ă 2,9% entre 2010 et 2014, alors quâil Ă©tait de 5,7% avant 2010. Le mĂȘme constat sâapplique au taux de croissance des dĂ©penses en point de PIB. Ce dernier a cru Ă un rythme annuel de 2% avant 2010 et stagne en moyenne aprĂšs cette date. Le Tableau 9 en annexe prĂ©sente lâĂ©volution des taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© par tĂȘte pour les principaux pays de lâOCDE durant environ un demi-siĂšcle. 9 En toute rigueur, le facteur de conversion en PPA qui devrait ĂȘtre retenu dans la comparaison des dĂ©penses de santĂ© est celui qui garantit la paritĂ© liĂ©e Ă un panier composĂ© uniquement des biens et services de la santĂ©. 10 Dans les comparaisons inter-pays, se rĂ©fĂ©rer aux dĂ©penses par tĂȘte et en PPA est plus adaptĂ©, du moment oĂč les disparitĂ©s au niveau des coĂ»ts de la vie sont corrigĂ©es et les spĂ©cificitĂ©s des trajectoires nationales dâaccroissement dĂ©mographique sont prises en considĂ©ration
7
Maroc fait partie, lâĂ©cart se creuse et les dĂ©penses de santĂ© par habitant en PPA sont de 18%
plus basses que le niveau moyen au sein de ce groupement de pays.
Tableau 2 DĂ©penses de santĂ© annuelles moyennes par tĂȘte au Maroc et en comparaison avec ses voisins de sud de la MĂ©diterranĂ©e (en dollars constants et en PPA)
Source : Banque Mondiale
Le Maroc ne fait pas seulement moins bien que ses voisins de sud de la Méditerranée en
termes de dépenses de santé, mais pire encore, il ne semble engager aucune dynamique de
rattrapage et les écarts se sont creusés davantage sur la période récente. Entre 1995-2009 et
2010-2014, lâĂ©cart annuel moyen entre le Maroc et lâAlgĂ©rie est passĂ© de 208 dollars de dĂ©penses de santĂ© par habitant Ă 392, soit une hausse de 88%. LâĂ©cart avec les autres pays voisins du Maroc sâest Ă©galement creusĂ© mais Ă un rythme moins accĂ©lĂ©rĂ© quâavec lâAlgĂ©rie.
LâĂ©cart a Ă©tĂ© portĂ© Ă 61% avec la Tunisie et restĂ© quasi inchangĂ© avec Egypte avec une lĂ©gĂšre
hausse de 2%.
Lâune des explications que lâon trouve dans la littĂ©rature des Ă©carts de volume des dĂ©penses
de santé entre pays renvoie aux différentiels de productivité dans le secteur de la santé. Ainsi,
dans un secteur aussi intensif en main dâĆuvre que le secteur de la santĂ©, un volume des
dĂ©penses de santĂ© faible dans un pays pourrait rĂ©sulter dâune productivitĂ© plus Ă©levĂ©e dans ce pays.
Cette explication a Ă©tĂ© empruntĂ©e dâun argumentaire dĂ©veloppĂ© Ă la base par Baumol et
Bowen (1965) pour décrire la hausse des coûts de production dans les métiers du spectacle
vivant, avant dâĂȘtre repris rĂ©cemment par plusieurs auteurs en Ă©conomie de la santĂ© (Hartwig,
2008; Erixon, F. et E. V. D. Marel, 2011). NĂ©anmoins, elle se heurte Ă deux principales limites
la fragilisant et réduisant sa capacité à cerner les disparités des dépenses de santé entre pays,
et particuliÚrement dans le cas des pays en développement :
i/ La mesure de la productivité est un exercice délicat dans un secteur comme la santé dont
les effets externes positifs dâune unitĂ© de dĂ©penses supplĂ©mentaire sont Ă©talĂ©s dans le temps
et dispersĂ©s Ă lâensemble de lâĂ©conomie. Si lâon ajoute Ă cela le fait quâune partie non
Maroc Algérie Tunisie Egypte
1995 - 2014 253 461 470 392
1995 - 2009 205 352 378 343
2010 - 2014 396 789 746 537
1995 - 2014 -208 -217 -139
1995 - 2009 -147 -173 -138
2010 - 2014 -392 -350 -141
Evolution des Ă©carts des dĂ©penses de santĂ© par tĂȘte au Maroc par rapport aux pays
voisins
8
nĂ©gligeable de lâĂ©conomie des pays en dĂ©veloppement exerce dans lâinformel et que lâappareil
statistique y est moins performant, la difficulté de mesure de la productivité dans le secteur
de la santé se double et sa portée à pouvoir expliquer les disparités au niveau des dépenses
de santé se réduit davantage ;
ii/le paradigme qui fait adosser le coût du travail à la productivité ne peut se vérifier, du moins
à court terme, avec toutes les « rigidités » nominales et institutionnelles existantes sur le
marchĂ© du travail. Il devient quasiment une fiction dans le cas des pays en dĂ©veloppement oĂč
la corruption et lâĂ©conomie de la rente rendent caduque tout lien entre la rĂ©munĂ©ration du
travail et sa productivité.
Si lâon accepte ce paradigme en dĂ©pit de ses limites pratiques, cela revient Ă supposer que les
médecins, les aides-soignants, et les autres personnels de santé sont plus productifs au Maroc
que chez ses voisins de sud de la MĂ©diterranĂ©e. Cette assertion ne peut ĂȘtre fondĂ©e sur des
Ă©lĂ©ments factuels dâautant plus que la population de toute cette rĂ©gion est plus ou moins
homogĂšne sur le plan des mĆurs et face aux risques de contamination. De surcroĂźt,
lâobservation des indicateurs sanitaires non monĂ©taires dĂ©cline lâhypothĂšse dâune
surperformance du systÚme de santé marocain par rapport à celui de ses voisins de sud.
Les principaux indicateurs11 habituellement retenues dans les comparaisons internationales
sur lâefficacitĂ© des systĂšmes de santĂ© sont rĂ©sumĂ©s dans le Tableau 3. Il en ressort que le
systĂšme de santĂ© marocain est de fait le moins performant dans la rĂ©gion dâAfrique du Nord.
Cette conclusion nous conduit Ă rejeter lâargumentaire mobilisant les Ă©carts de productivitĂ©
entre pays pour expliquer lâorigine des disparitĂ©s des dĂ©penses de santĂ©.
Tableau 3 Comparaison de quelques indicateurs de santé dans les pays sud de la Méditerranée
Source : Organisation Mondiale de la Santé, "Statistiques sanitaire mondiale 2014"
11Certes, le recours Ă un indicateur synthĂ©tique, comme celui conçu par lâOrganisation Mondiale de la SantĂ©,
agrégeant les différents aspects liés à la santé (physique, psychique et social) dans un seul chiffre permet de
gagner en lisibilité et facilite la comparaison des performances des systÚmes de santé. Mais, ce choix se base sur
un vecteur de pondĂ©rations relevant dâun parti pris qui nâest pas censĂ© ĂȘtre partagĂ© forcement par tous les pays. Pour Ă©viter cette part de subjectivitĂ© dans la comparaison de lâefficacitĂ© du systĂšme de santĂ© marocaine avec les autres pays voisins, il serait plus judicieux de prĂ©senter les indicateurs sanitaires sous forme dâun tableau de bord.
Maroc Algérie Tunisie Egypte
Espérence de vie à la naissance (ans) 71 72 76 71
Espérence de vie à la naissance en bonne santé (ans)
61 62 66 61
Taux de mortalité néonatale (pour 1000) 18,2 15,6 8,5 13,3
Taux de mortalité infantile (pour 1000) 24,6 22 12,6 21
9
En comparaison toujours avec ses pays voisins, ce retard du Maroc dans le domaine de la santé
sâexplique, au moins en partie, par un ralentissement de lâengagement de lâEtat dans des
politiques sociales qui persiste depuis lâadoption du programme dâajustement structurel au milieu des annĂ©es 80 (cf. section IV). Sur les vingt derniĂšres annĂ©es, le poids des dĂ©penses
publiques de santĂ© au Maroc dans le budget global de lâEtat Ă©tait, en moyenne annuelle, de
5,6% contre 6,2%, 8,7% et 12,5% respectivement en Egypte, en AlgĂ©rie et en Tunisie. Quant Ă
la part des dépenses publiques de santé dans les dépenses totales, le Maroc enregistre
Ă©galement la proportion la plus faible avec un taux moyen annuel de 32% contre 40%, 73% et
54% pour, respectivement, lâEgypte, lâAlgĂ©rie et la Tunisie.
III. Les déterminants classiques des dépenses de santé : une revue des écrits
En Ă©cartant lâexplication du ralentissement de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© au Maroc
par un Ă©ventuel effet de saturation, il reste Ă chercher lâorigine de ce changement de cap dans
les facteurs explicatifs classiques. Ces derniers sont nombreux et théoriquement
interdĂ©pendants. Ils sont de nature quantitative mesurable rendant possible lâĂ©valuation de la contribution de chacun de ces facteurs dans la dynamique dâensemble, comme ils peuvent relever des choix sociĂ©taux ancestraux difficilement chiffrables. Globalement, les travaux
empiriques sur la question dâidentification des dĂ©terminants de la dynamique des dĂ©penses
de santĂ© et dâĂ©valuation de leur contribution respective (Bac, C. et G., Cornilleau, 2002; Dreger
C. et H.E. Reimers, 2005; L'Horty Y., A. Quinet et F. Rupprecht, 1997; Xu, K., P. Saksena et A.
Holly, 2011) renvoient aux quelques facteurs explicatifs suivants :
i) la dĂ©mographie est lâun des principaux facteurs explicatifs, mais elle agit plutĂŽt sur
la tendance de moyen et long termes des dĂ©penses de santĂ©. Elle se manifeste Ă
travers deux dynamiques affectant séparément la trajectoire des dépenses de
santĂ© : lâaccroissement mĂ©canique de la population totale et la dĂ©formation de sa
structure pyramidale ;
ii) le niveau de vie de la population assimilé, pour un besoin de chiffrage et de
simplification, au revenu national ;
iii) la dynamique des prix des biens et services de santé comparativement à celle
dâautres biens et services, captant les comportements de substitution potentielle
que pourraient induire un choc modifiant ce rapport des prix ;
iv) la structure de financement des dépenses de santé reflÚte la nature du contrat
social autour du droit dâune vie en bonne santĂ© que devrait assurer la sociĂ©tĂ© Ă
tous les citoyens. Ce contrat social reflĂšte plus ou moins le poids de certains
principes comme la justice sociale et lâĂ©galitĂ© des chances dans lâimaginaire
collectif et dont lâaccĂšs aux soins en quantitĂ© et en qualitĂ© suffisantes nâest que lâun de leurs leviers fondamentaux. Deux visions antagonistes sur la perception des
10
services de soins (des services marchands ordinaires versus un droit irréductible et
un levier contre les injustices) se déclinent en opposant le financement privé au
financement public. La rĂ©alitĂ© est nuancĂ©e et se situe entre les deux extrĂȘmes selon
la nature du projet social auquel la société aspire ;
v) un facteur rĂ©siduel regroupant lâensemble des autres dĂ©terminants potentiels tels que le progrĂšs technique, lâeffet qualitĂ©, lâorganisation du systĂšme des soins (un
systĂšme intĂ©grĂ© versus fragmentĂ©), les mĆurs, etc.
La littĂ©rature empirique sur cette thĂ©matique est trĂšs abondante. Toutefois, les cas dâapplication se limitent souvent Ă des pays dits avancĂ©s et un nombre trĂšs limitĂ© seulement de ces travaux qui sâintĂ©ressent aux cas des pays en dĂ©veloppement. Ce peu dâintĂ©rĂȘt portĂ© aux comportements des dĂ©penses de santĂ© dans ces derniers pays pourrait sâexpliquer, dâune part, par des obstacles liĂ©s Ă la disponibilitĂ© de lâinformation statistique et Ă sa fiabilitĂ©. Dâautre part, le recours assez souvent dans ces travaux Ă des techniques de modĂ©lisation sur des donnĂ©es de panel, justifiĂ© par le souci dâobtenir des rĂ©sultats robustes Ă©manant dâune large base de donnĂ©es, limite les possibilitĂ©s de considĂ©rer le cas des pays en dĂ©veloppement prĂ©sentant peu dâhomogĂ©nĂ©itĂ© avec les pays avancĂ©s requise par le panel. En outre, lâĂ©largissement du panel Ă des pays en dĂ©veloppement risque de poser un problĂšme technique dâendogĂ©nĂ©itĂ© biaisant les rĂ©sultats des estimations. Ce biais traduit un effet du retour que pourrait avoir les dĂ©penses de santĂ© sur le revenu national conduisant, dans le cas des pays en dĂ©veloppement, Ă un raisonnement circulaire quâil faut absolument le traiter Ă lâaide des techniques de modĂ©lisations spĂ©cifiques diffĂ©rentes de celles utilisĂ©es dans le cas des pays avancĂ©s oĂč ce biais dâendogĂ©nĂ©itĂ© est peu probable. Il y est effectivement peu probable de fait que la productivitĂ© dans ces pays avancĂ©s Ă©tant dĂ©jĂ Ă©levĂ©e rend la croissance de long terme peu sensible Ă la variation des dĂ©penses de santĂ© (hormis le cas des dĂ©penses dâinvestissements dans lâindustrie de la santĂ©). Certains auteurs (Xu, K., P. Saksena et A. Holly, 2011) ont trouvĂ© un moyen pour contourner ce type de problĂšme en regroupant les pays en sous panels plus ou moins homogĂšnes eu Ă©gard Ă leur revenu national. Bien que la modĂ©lisation des comportements dans le sous-panel de pays avancĂ©s soit valide, celle portant sur le sous-panel de pays ayant des niveaux de productivitĂ© bas reste biaisĂ©e dâautant plus que les estimations portent sur des comportements de long terme (effet du retour se manifeste Ă cet horizon) et elles nâont pas eu recours Ă des estimateurs Ă©conomĂ©triques adaptĂ©s corrigeant ce biais. Aussi, un traitement diffĂ©renciĂ© des pays selon leur niveau de dĂ©veloppement est nĂ©cessaire
dĂšs lors que les finalitĂ©s de lâĂ©tude du comportement des dĂ©penses de santĂ© divergent selon lâĂ©tat dâavancement de chacun des pays sur sa propre trajectoire de dĂ©veloppement. Dans un
cas, les pays avancés vont se trouver face à au dilemme suivant : le vieillissement de la
population et le dĂ©sir dâamĂ©lioration en continue du bien-ĂȘtre social liĂ© aux services de la santĂ©
doivent tirer vers le haut les dépenses de santé, alors que le resserrement de la contrainte
budgĂ©taire et le risque dâinstallation dâun rĂ©gime de croissance atone sur une longue pĂ©riode dans ces pays invitent Ă un ralentissement de ces dĂ©penses. Ainsi, la plupart des travaux
appliquĂ©s Ă ces pays sâefforcent dâĂ©tablir des projections sur lâĂ©volution future des dĂ©penses
11
de santĂ© et de simuler les diffĂ©rents scĂ©narii pour un jeu plausible dâhypothĂšses afin de dĂ©gager une trajectoire dâĂ©quilibre respectant la contrainte de la soutenabilitĂ© budgĂ©taire
sans pour autant nuire au niveau bien-ĂȘtre dĂ©jĂ acquis des citoyens.
Dans le cas des pays en dĂ©veloppement, la logique sous-jacente doit ĂȘtre diffĂ©rente Ă celle qui
anime les travaux portant sur les pays avancés. Si dans les pays avancés les dépenses de santé
sont appréhendées comme de la consommation finale sans aucun effet du retour sur la
croissance de long terme craignant de creuser davantage leur dĂ©ficit public, il nâen reste pas moins que dans les pays en dĂ©veloppement ces dĂ©penses doivent ĂȘtre assimilĂ©es Ă de
lâinvestissement dont le coĂ»t supportĂ© aujourdâhui serait compensĂ© par une amĂ©lioration de la productivitĂ© de demain.
IV. Démographie et dépenses de santé au Maroc
Le rÎle que joue la démographie dans la dynamique des dépenses de santé est indéniable. Il
se décline en deux effets : un premier effet mécanique reliant, de moins à court terme en
lâabsence dâinnovation majeure dans le secteur de la santĂ©, lâaccroissement de la population
dâun pays Ă la montĂ©e de ses dĂ©penses de santĂ© ; et un deuxiĂšme effet qui passe par la
déformation de la structure par ùge de la population rendue possible avec la dynamique de la
transition démographique. Cet effet affecte le volume global des dépenses de santé dÚs lors
que la distribution de ces dépenses par tranche ùge est asymétrique et évolutive dans le temps
(Grossman, 1972).
En Ă©tant rĂ©parties dâune maniĂšre inĂ©galitaire entre les diffĂ©rentes tranches dâĂąge, les dĂ©penses de santĂ© sont relativement Ă©levĂ©es chez les jeunes12 et baissent durant la pĂ©riode
dâĂąge adulte avant de repartir Ă la hausse. Elles deviennent par la suite plus Ă©levĂ©es pour les
seniors ayant 65 ans et plus, avec une dynamique croissante par rapport Ă lâĂąge. En fin de vie
certaines interventions médicales ne sont plus possibles et les dépenses de santé fléchissent
lĂ©gĂšrement13. Ainsi, La courbe traçant la rĂ©partition des dĂ©penses de santĂ© par tranche dâĂąge prendrait la forme de la lettre « N » inversĂ©e.
En mobilisant les donnĂ©es relatives Ă lâensemble des pays de lâOCDE, Martins et De La
Maisonneuve (2006) estiment que les dépenses de santé par habitant des personnes agées
12 Un léger pic est observé chez les enfants les plus jeunes dans la répartition des dépenses de santé par tranche
dâĂąge (au niveau de lâextrĂ©mitĂ© droite de la courbe des dĂ©penses de santĂ©) est dĂ» au coĂ»t des traitements post-
natals.
13 Le flĂ©chissement des dĂ©penses de santĂ© pour les tranches dâĂąge les plus avancĂ©es dĂ©pend Ă©galement dâautres Ă©lĂ©ments organisationnels et Ă©pidĂ©miologiques outre la dimension technique liĂ©e Ă la difficultĂ© dâintervenir avec des traitements lourds Ă partir dâun certain Ăąge. LâĂ©largissement de la couverture mĂ©dical des personnes ĂągĂ©es, le bon fonctionnement du systĂšme de prĂ©vention, lâabsence de propagation des maladies contagieuses, lâusage de la technologie de pointe sont autant dâĂ©lĂ©ments qui peuvent accentuer lâinclinaison de la courbe des dĂ©penses de santĂ© pour les tranches dâĂąge supĂ©rieures. Seshamani et Gray (2004) lâexpliquent, quant Ă eux, par le fait que les dĂ©penses de fin de vie engagĂ©es juste avant le dĂ©cĂšs dâune personne sont plus importantes chez les adultes que chez les seniors. Pour le cas français par exemple, le lecteur pourrait consulter la note du haut conseil pour lâavenir de lâassurance maladie (2010) qui sâĂ©tale sur cette question prĂ©cisĂ©ment.
12
sont en moyenne quatre fois plus importantes que celles des adultes. Et elles sont de six Ă
neuf fois supĂ©rieurs pour les tranches dâĂąge les plus Ă©levĂ©es. Dans le mĂȘme ordre dâidĂ©e, Tchoe, B. et S. Nam (2010) mettent en avant des rĂ©sultats similaires dans le cas de la CorĂ©e de
Sud et concluent à une courbe des dépenses de santé par ùge sous forme de « N » inversée.
De ce fait, les travaux qui sâinteressent au comportement macroĂ©conomique des dĂ©penses de
santé dans les pays avancés incluent souvent dans leurs analyses cette dimension liée à la
distribution inĂ©galitaire des dĂ©penses par tranche dâĂąge. Du cĂŽtĂ© des pays en dĂ©veloppement,
les Ă©tudes avec un tel niveau de dĂ©tails se font rares et se contentent, lorsquâelles existent, Ă
mesurer la sensibilitĂ© des dĂ©penses de santĂ© par rapport Ă lâĂ©volution de la propotion des
personnes agées de plus de 65 ans uniquement (Murthya, V. N. R. et A. A. Okunadeb, 2009;
Omotor, 2009). Cela pourrait sâexpliquer par, dâune part, le manque de donnĂ©es dĂ©sagrĂ©gĂ©es
et fiables, et dâautre part, le fait que les dĂ©penses de santĂ© engagĂ©es dans ces pays sont
souvent des réponses à la prolifération des épidimies et des maladies contagieuses (fiÚvre
jaune, virus Ebola, cholera, malaria, etc.) qui frappent, par définition, toute la population sans
diffĂ©renciation liĂ©e Ă lâĂąge. Une analyse fine du comportement des dĂ©penses de santĂ© par
tranche dâĂąge devient en lâoccurrence sans intĂ©rĂȘt.
En tout état de cause, les deux mécanismes de la démographie (accroissement de la
population et déformation de la structure des ùges) sont censées tirer les dépenses de santé
vers le haut bien quâils interviennent Ă des pĂ©riodes dĂ©calĂ©es. Durant toute la phase de la
transition démographique, la population totale augmente en continue avec un rythme
accéléré au début de la transition mais qui perd de son allure en avancant vers sa fin.
ParallĂ©lement, les dĂ©penses de santĂ© reproduisent la mĂȘme dynamique Ă un solde de flux
migratoires inchangé. Dans la phase qui suit la transition démographique, la population totale
stagne et câest la dĂ©formation de la pyramide des Ăąges en faveur des tranches dâĂąge supĂ©rieures qui exerce une pression Ă la hausse sur les dĂ©penses de santĂ©.
Le Maroc Ă©tant un pays qui nâa pas encore achevĂ© sa transition dĂ©mographique, les dĂ©penses
de santĂ© y devraient ĂȘtre tirĂ©es, ceteris paribus, par le premier mĂ©canisme de la dĂ©mographie
qui est la dynamique dâaccroissement de la population. Depuis la fin des annĂ©es 70, le Maroc
sâest inscrit dans la phase avancĂ©e de la transition dĂ©mographique (EncadrĂ© 1), caractĂ©risĂ©e
par une baisse tendancielle du taux dâaccroissement dĂ©mographique. Au dernier recensement
de la population en 2014, Le taux annuel moyen dâaccroissement de la population est Ă©valuĂ©
Ă 1,2 % contre 1,4 %, 2 % et 2,6% en 2004, 1994 et 1982. Au long de cette phase,
lâaccroissement du volume de la population devrait certes continuer Ă agir Ă la hausse sur les
dĂ©penses de santĂ© mais sa contribution serait amenĂ©e Ă sâamenuiser et câest celle de la
déformation de la structure des ùges et particuliÚrement le phénomÚne du vieillissement qui
prendrait le relais.
Encadré 1 La transition démographique au Maroc
13
La thÚse de la transition démographique est largement admise comme une explication
plausible du passage dâune population caractĂ©risĂ©e par des taux de natalitĂ© et de mortalitĂ©
Ă©levĂ©s Ă une population dont ces taux sont faibles. Pour schĂ©matiser, la pĂ©riode qui sâĂ©tale entre le dĂ©but et la fin de la transition est gĂ©nĂ©ralement scindĂ©e enux phases : dans un
premier temps, le taux de mortalité décroit fortement alors que le taux de natalité reste plus
ou moins stable ; ensuite, dans un deuxiÚme temps, la baisse du taux de mortalité se ralentit
et câest au tour du taux de natalitĂ© de baisser sensiblement.
Ces changements de régime de croissance des taux de natalité et de mortalité dans le temps
se rĂ©percutent sur le rythme dâaccroissement naturel de la population qui, Ă son tour,
dĂ©termine le profil dâĂ©volution du taux de croissance dĂ©mographique Ă un solde migratoire
prĂšs. Le taux dâaccroissement naturel de la population Ă©tant Ă©gal au taux de natalitĂ© diminuĂ© du taux de mortalitĂ©, la croissance de la population sâaccĂ©lĂšre ainsi lors de la premiĂšre phase de la transition dĂ©mographique avant de dĂ©cĂ©lĂ©rer pendant la deuxiĂšme.
Le Maroc semble bel et bien sâengager dans la deuxiĂšme phase de son processus de transition
dĂ©mographique. Le taux dâaccroissement naturel est en perte de vitesse continue depuis les annĂ©es soixante du siĂšcle prĂ©cĂ©dent. Il a Ă©tĂ© divisĂ© par deux en passant de 32â° Ă 15â° entre 1960 et 2014. Du cĂŽtĂ© de la dynamique de croissance de la population totale, le pic a Ă©tĂ©
atteint en 1960 avec un taux de croissance de 3,3% (cf. Graphique 1), et depuis ce taux sâest inscrit dans une dynamique baissiĂšre. En se rapportant au dernier recensement de 2014, le
taux de croissance annuel de la population totale est de 1,25%. Il devrait continuer Ă baisser
jusquâĂ atteindre 0,3% Ă lâhorizon 2050 selon le scĂ©nario central des projections de lâONU.
Graphique 1 Evolution des taux dâaccroissement naturel et de croissance de la population au Maroc entre 1960 et 2014
Source : Banque Mondiale
0.5
1
1.5
2
2.5
3
3.5
5
10
15
20
25
30
35
19
60
19
63
19
66
19
69
19
72
19
75
19
78
19
81
19
84
19
87
19
90
19
93
19
96
19
99
20
02
20
05
20
08
20
11
20
14
Taux d'accroissement naturel (en â°),Ă©ch. gauche
Taux de croissance de la population (en %), Ă©ch. droit
14
Dans lâesprit de la transition dĂ©mographique, la baisse tendancielle du taux de croissance de la population rĂ©sulte dâune dĂ©cĂ©lĂ©ration du taux de natalitĂ© plus accentuĂ©e que celle du taux
de mortalitĂ©. TransposĂ© au cas du Maroc, la dynamique de la transition semble sâessouffler depuis le dĂ©but des annĂ©es 2000, avec un taux dâaccroissement naturel qui stagne autour de 15 â° et sa dynamique baissiĂšre atteint son paroxysme Ă la fin des annĂ©es 90 (avec un taux de
dĂ©croissance de 4% en rythme annuel) avant dâentamer une nouvelle phase de baisse
modĂ©rĂ©e ponctuĂ©e mĂȘme par une courte pĂ©riode de hausse entre 2005 et 2011 (Graphique
2). Pour cause, un ralentissement progressif de la dynamique de baisse du taux de natalité
conjugué à une stagnation du taux de décroissance du taux de mortalité à un niveau
historiquement bas (Graphique 2).
Graphique 2 La dynamique entre 1960 et 2014 duâŠ
Source : Banque Mondiale
DÚs lors, quelle est la contribution, présente et passée, de la démographie au Maroc dans la
dynamique des dépenses de santé ? Quelle est la contribution de chacun des deux
mécanismes de la démographie pris séparément (accroissement du volume de la population
et déformation de la pyramide des ùges) dans cette dynamique ? Dans quelle mesure
justifient-ils le ralentissement du rythme de croissance des dépenses de santé depuis 2010 ?
La réponse à ces questions passe par une décomposition du taux de croissance des dépenses
de santé au Maroc en trois composantes, à savoir : une composante qui mesure la
contribution lâaccroissement du volume de la population totale, une deuxiĂšme qui permet de
capter lâeffet de la dĂ©formation de la structure des Ăąges et une derniĂšre, rĂ©siduelle, qui rĂ©sume
le rÎle des autres facteurs agissant sur la dynamique des dépenses de santé au Maroc.
-4,5
-3,5
-2,5
-1,5
-0,5
0,5
1961
1962
1963
1964
1965
1966
1967
1968
1969
1970
1971
1972
1973
1974
1975
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
...taux de natalité
...taux de mortalité
...taux d'accroissement naturel de la population
15
Afin dâĂ©valuer les effets sĂ©parĂ©s des facteurs dĂ©mographiques sur la dynamique des dĂ©penses
de santĂ©, nous partons dâune dĂ©composition simple de ces dĂ©penses par tranche dâĂąge đ·đĄđ14 qui sâĂ©crit sous forme dâun produit de trois termes quantifiables et ayant, chacun, sĂ©parĂ©ment,
un sens Ă©conomique. đđĄđ et đđĄ Ă©tant respectivement la population par tranche dâĂąge et la
population totale, les dĂ©penses de santĂ© par tranche dâĂąge et les dĂ©penses totales de santĂ© đ·đĄ sâĂ©crivent comme suit :
đ·đĄđ = đ·đĄđđđĄđ đđĄđđđĄ đđĄ 1
đ·đĄ = đđĄ â đ·đĄđđđĄđ đđĄđđđĄđ 2
Le rapport đđĄđ/đđĄ reprĂ©sente le poids des personnes appartenant Ă la tranche dâĂąge « a » dans
la population totale. Ce terme reflĂšte la structure par Ăąge de la population et permet de capter
lâeffet de la transition dĂ©mographique sur les dĂ©penses de santĂ©. Le ratio đ·đĄđ/đđĄđ reprĂ©sente
les dĂ©penses moyennes par habitant et par tranche dâĂąge. Il est plus Ă©levĂ© chez les seniors que
chez les jeunes qui est, à son tour, estimé à un niveau supérieur de celui des adultes. En
absence de données précises sur la nature de la déformation de la courbe de répartition des
dépenses par ùge au cours du temps, il ne semble guÚre aberrant de supposer que cette
courbe reste inchangée du moins à court terme et que, donc, le ratio des dépenses par
habitant croit au mĂȘme rythme pour toutes les tranches dâĂąge. Autrement dit, suite Ă un choc positif (une hausse des revenus par exemple) la courbe de rĂ©partition des dĂ©penses par
tranches dâĂąges (la courbe en « N » inversĂ©e) se dĂ©place vers le haut, sans pour autant quâelle change dâallure. Ainsi, ce qui va diffĂ©rencier les dĂ©penses par habitant selon lâĂąge est leurs
niveaux initiaux Ă une date de rĂ©fĂ©rence qui est, en lâoccurrence, le premier point dans la base
de données construite pour ce travail.
LâĂ©quation de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© par habitant et par tranche dâĂąge
sâĂ©crit ainsi 15:
đ·đĄđđđĄđ = đ·0đđ0đ (1 + đđĄ)đĄ 3
14 Dans le reste de lâarticle lâexposant « a » et lâindice « t » indiquent respectivement la tranche dâĂąge et le temps. Pour une raison de simplification, les diffĂ©rentes tranches dâĂąge sont regroupĂ©es sous trois catĂ©gories : les jeunes ĂągĂ©s de moins de 15 ans, les adultes entre 15 et 65 ans et les seniors qui ont plus de 65 ans. 15 Notant « na » le taux de croissance de la population appartenant Ă la tranche dâĂąge « a », les Ă©quations de la
dynamique par tranche dâĂąge des dĂ©penses totales de santĂ© et de la population peuvent sâĂ©crire comme suit : đ·đĄđ = đ·đĄâ1đ (1 + đđĄđ)(1 + đđĄ) đđĄđ = đđĄâ1đ (1 + đđĄđ)
16
Ï dĂ©signe le taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© par habitant commun pour toutes les
tranches dâĂąge. Il rĂ©sume lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© Ă partir du moment oĂč les effets
de la démographie sont exclus.
En insĂ©rant lâĂ©quation 3 dans lâĂ©quation 2 et divisant par les dĂ©penses totales de santĂ©
retardĂ©es, lâindice des dĂ©penses totales de santĂ© (Ă©quation 4) sâĂ©crit alors sous forme de produit de trois termes : lâindice de croissance de la population totale (1+n), lâindice de croissance des dĂ©penses par habitant dues uniquement Ă des facteurs macroĂ©conomiques
(1+Ï) et lâindice de la dĂ©formation au cours du temps de la structure par Ăąge (k) pour des
dĂ©penses par habitant et par tranche dâĂąge inchangĂ©es đ·0đ/đ0đ:
đ·đĄđ·đĄâ1 = (1 + đđĄ)(1 + đđĄ) â đ·0đđ0đđđĄđđđĄđâ đ·0đđ0đđđĄâ1đđđĄâ1đâ đđĄ 4
Il est dĂšs lors possible de mesurer lâeffet dĂ©mographique sĂ©parĂ©ment des autres dĂ©terminants de dĂ©penses de santĂ© et de pouvoir le scinder, Ă son tour, enux effets dissociĂ©s : un effet volume dâaccroissement de la population totale et un effet de changement de la structure dâĂąge de la population. Les contributions de ces effets au taux de croissance des dĂ©penses totale de santĂ© (dt) sont calculĂ©es approximativement Ă partir de la relation linĂ©aire suivante :
dt= nt + Ït + Ln (kt) 5
En simulant cette derniÚre relation sur des données marocaines couvrant la période entre
1995 et 2014 (Tableau 5), il en ressort que la démographie contribue en moyenne à hauteur
de 24% à la dynamique des dépenses totales de santé. En point de pourcentage, elle contribue
à hauteur de 1,7 point en moyenne annuelle au taux de croissance moyens dépenses de santé
de 7%. Cela dit, cette contribution a chuté rapidement à la fin des années 90 en passant de
3,7 point de pourcentage en 1996 Ă 1,8 en 2000, avant quâelle sâinscrive dans une tendance
baissiĂšre relativement lente.
Bien que, dans lâabsolu, la contribution de la dĂ©mographie ait connu une baisse, elle a Ă©tĂ© moins prononcĂ©e que celle des autres dĂ©terminants classiques de dĂ©penses de santĂ© (cf. Tableau 4). En effet, entre 2010 et 2014, 30% de lâaugmentation des dĂ©penses totales de santĂ© sont dues Ă la dĂ©mographie contre 24% auparavant. La raison en est que le recul du taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© Ă©tait plus rapide que celui de la contribution des facteurs dĂ©mographique. De ce fait, la dĂ©mographie ne peut ĂȘtre seule Ă lâorigine de la dĂ©cĂ©lĂ©ration du taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© depuis 2010. Elle est responsable dâune perte de
17
0,5 point de pourcentage sur un recul de 3,5 points du taux de croissance annuel moyens dépenses de santé, soit à peine 14%.
Tableau 5 contribution de la démographie à la dynamique des dépenses totales de santé au
Maroc et son évolution sur la période 1996 - 2014
Source : BM, FMI, calculs de lâauteur
Au niveau désagrégé, sur toute la période entre 1995 et 2014, la contribution de
lâaccroissement de la population, premiĂšre composante de lâeffet de la dĂ©mographie sur les dĂ©penses de santĂ©, Ă©tait de 1,2 point de pourcentage contre 0,5 point pour la deuxiĂšme
composante qui est la transition démographique16.
La contribution relativement modĂ©rĂ©e de la transition dĂ©mographique dans la dynamique des dĂ©penses de santĂ© est due en partie Ă la nature mĂȘme du processus de dĂ©formation de la pyramide des Ăąges. Ce processus commence, dans un premier temps, par un rĂ©trĂ©cissement de la base de la pyramide au profit de la tranche dâĂąge des adultes avant que ça profite, Ă la fin de ce processus, Ă la tranche dâĂąge des seniors. Ainsi, les adultes au Maroc ont vu leur poids dans la population totale passer de 57% Ă 67% entre 1995 et 2014, alors que celui des seniors nâa augmentĂ©, sur la mĂȘme pĂ©riode, que de 1,5 point en atteignant 6% de la population totale.
16Au niveau des dĂ©penses de santĂ© par habitant, le coĂ»t de la transition dĂ©mographique est insignifiant. Il est de lâordre de 4,5 MAD par an et par personne.
effet total
n + Ln k
effet volume
n
effet transition
Ln k
1996 8,1 3,7 1,5 2,2 4,4
1997 5,0 2,2 1,4 0,9 2,7
1998 11,0 2,1 1,3 0,8 8,9
1999 2,4 1,9 1,2 0,7 0,5
2000 4,0 1,8 1,1 0,7 2,2
2001 14,3 1,8 1,1 0,7 12,5
2002 21,6 1,7 1,0 0,7 19,9
2003 4,7 1,7 1,0 0,7 3,1
2004 3,6 1,7 1,0 0,7 1,9
2005 0,3 1,6 0,9 0,7 -1,3
2006 9,7 1,5 1,0 0,5 8,2
2007 9,4 1,5 1,1 0,4 7,9
2008 6,6 1,5 1,1 0,4 5,1
2009 10,1 1,4 1,2 0,2 8,7
2010 6,8 1,3 1,3 0,1 5,4
2011 6,4 1,3 1,3 0,0 5,1
2012 4,5 1,3 1,4 -0,1 3,2
2013 0,0 1,4 1,4 -0,1 -1,4
2014 4,1 1,7 1,4 0,3 2,4
1996 - 2014 7,0 1,7 1,2 0,5 5,2
1996 - 2009 7,9 1,9 1,1 0,7 6,1
2010 - 2014 4,4 1,4 1,4 0,0 3,0
Années
Taux de croissance
des dépenses
totales de santé
d = n + Lnk + Ï
Contribution
d'autres
détérminants
Ï
Contribution de la démographie
18
Ayant des dĂ©penses de santĂ© par habitant les plus faibles, les adultes minimisent ainsi lâeffet que puisse avoir la transition dĂ©mographique sur la dynamique des dĂ©penses de santĂ©. Au bout de ce processus de transition, qui est au point mort depuis 2009, il faudrait sâattendre Ă des pressions Ă la hausse sur les dĂ©penses de santĂ© avec le vieillissement de la population.
Par ailleurs, en comparant la contribution de chacun des composants de lâeffet de la
dĂ©mographie durant la pĂ©riode dâaprĂšs 2010 avec ce qui prĂ©valait avant cette date, on observe une hausse de la contribution de lâeffet de lâaccroissement de la population de 0,3 point sur la pĂ©riode rĂ©cente et une annulation de celle de lâeffet de la transition. La lĂ©gĂšre
hausse quâa connu le taux naturel dâaccroissement de la population depuis 2010, qui vient
succĂ©der Ă une pĂ©riode plus au moins longue de stagnation, marque une Ăšre dâessoufflement de la dynamique de la transition dĂ©mographique en faisant disparaitre sa contribution dans la
dynamique des dépenses de santé durant la période récente. Tandis que, théoriquement, le
taux naturel dâaccroissement de la population devrait sâinscrire sur une trajectoire dĂ©croissante permettant Ă la dynamique de la transition dâarriver Ă son terme.
Des travaux appliqués aux pays avancés trouvent des ordres de grandeur proches des résultats obtenus pour le Maroc concernant la contribution de la transition démographie et précisément, dans ces pays, du phénomÚne de vieillissement à la dynamique des dépenses totales de santé. Elle a été estimée à 0,3 point pour un taux de croissance annuel moyen 3,6% (Martins, J. O. et C. De La Maisonneuve, 2006). Il importe de signaler à la fin de cette section que la courbe retraçant le profil des dépenses
de santĂ© par tranche dâĂąge au Maroc nâĂ©tant pas disponible, lâanalyse prĂ©cĂ©dente sâest basĂ©e
sur une hypothĂšse centrale selon laquelle les dĂ©penses dâun senior sont de deux fois supĂ©rieures de celles dâun adulte. Câest une hypothĂšse calĂ©e sur la distribution que lâon trouve dans les pays avancĂ©s et qui suppose que le rapport des dĂ©penses de santĂ© entre un adulte et
un « jeune » senior ùgé entre 65 et 69 ans est de 2. Dans ces pays, ce rapport est une fonction
croissante avec lâavancement dans la tranche dâĂąge des seniors : les «moins jeunes» des
seniors ayant entre 85 et 89 ans, par exemple, ont un ratio qui monte jusquâau 6 (Productivity
Commission, 2005).
Afin dâĂ©valuer la robustesse de nos rĂ©sultats par rapport au choix ad-hoc du profil de
distribution des dĂ©penses de santĂ© par tranche dâĂąge au Maroc, nous Ă©tions amenĂ© Ă faire des tests de sensibilitĂ© (Tableau 11 en annexe). Ces derniers consistent Ă mesurer la sensibilitĂ© des
résultats suite à un changement à la hausse, comme à la baisse, des ratios des dépenses entre
les diffĂ©rentes tranches dâĂąge. Il en rĂ©sulte que la contribution de lâeffet de la transition Ă la dynamique des dĂ©penses de santĂ© ne varie quâĂ la marge en rĂ©action Ă la variation de ces ratios. Les rĂ©sultats rapportĂ©s dans le Tableau 5 sont donc robustes.
V. Les déterminants macroéconomiques de la dynamique des dépenses de santé au
Maroc
19
Lâanalyse dans la section prĂ©cĂ©dente portant sur le rĂŽle de la dĂ©mographie dans le
ralentissement récent de la dynamique des dépenses de santé au Maroc conclue à une
contribution limitĂ©e de ce facteur de lâordre de 0,5 point de pourcentage pour une perte de vitesse Ă©valuĂ©e Ă 3,5 points, soit Ă peine 14% du recul du taux de croissance des dĂ©penses sur
la pĂ©riode rĂ©cente (Tableau 5). Ainsi, cette section a pour objectif dâĂ©largir lâanalyse Ă des
dĂ©terminants macroĂ©conomiques en mesure de clarifier la dynamique sous-jacente Ă
lâinclinaison quâa connu la croissance des dĂ©penses de santĂ© depuis 2010.
Les déterminants explicatifs outre les effets de la démographie ont contribué à hauteur de
75% à la dynamique des dépenses de santé au Maroc sur les vingt derniÚres années et ils sont
responsables de 86% de baisse du taux de croissance des dépenses de santé depuis 2010.
Entre 1996 et 2009, leur contribution sâest portĂ©e Ă 6,1 points pour un taux de croissance
annuel moyens dépenses de santé de 7,9%, avant de baisser de 3 points à partir de 2010
entrainant un recul net du taux de croissance annuel moyens dépenses qui se stabilise autour
de 4,4%.
AprÚs une brÚve revue des écrits sur les principaux déterminants des dépenses de santé, la
suite de cette section va porter sur lâidentification des Ă©lĂ©ments macroĂ©conomiques agissant
sur le comportement de ces dĂ©penses au Maroc et lâĂ©valuation de la contribution de chacun de ces Ă©lĂ©ments Ă la dynamique dâensemble en mobilisant (in-sample) les diffĂ©rents modĂšles
économétriques validés. Ensuite, afin de déterminer les facteurs qui ont agi à la baisse sur la
dynamique des dĂ©penses de santĂ© Ă partir de 2010, des simulations Ă lâintĂ©rieur de lâĂ©chantillon (in-sample) des modĂšles retenus pour les deux sous pĂ©riodes prises sĂ©parĂ©ment
seront comparées.
a. Une (brÚve) discussion des déterminants macroéconomiques des dépenses de santé
Les travaux sur lâanalyse du comportement macroĂ©conomique des dĂ©penses de santĂ© sont
abondants et recensent de nombreux facteurs explicatifs de la dynamique des dépenses17.
Parmi les facteurs les plus récurrents, on trouve le revenu national comme un proxy du niveau
de vie, les prix relatifs et la structure de financement du systÚme de santé. Les travaux qui
visent Ă Ă©tablir des scĂ©narii dâĂ©volution future des dĂ©penses de santĂ© introduisent souvent un
quatriÚme facteur qui est le progrÚs technologique (Encadré 2).
A lâĂ©chelle macroĂ©conomique18, les dĂ©penses de santĂ© rĂ©agissent positivement au
dĂ©veloppement Ă©conomique et Ă lâĂ©lĂ©vation du niveau de vie approchĂ© par le taux de
croissance du PIB en volume par habitant. Ce constat fait lâunanimitĂ© dans la littĂ©rature
17 Lâarticle de Xu et al. (2011) fait un tour dâhorizon assez exhaustif des dĂ©terminants du comportement des dĂ©penses de santĂ© et couvre Ă©galement un panel assez large de pays Ă la fois avancĂ©s et en dĂ©veloppement. 18 Au niveau microĂ©conomique, les dĂ©penses de santĂ© des mĂ©nages nâont aucune raison de suivre mĂ©caniquement lâaccroissement en continue des revenus. A un niveau de couverture mĂ©dicale assez large ou une situation Ă©pidĂ©miologique amĂ©liorĂ©e, lâaugmentation des revenus ne peut se traduire indĂ©finiment par une hausse des dĂ©penses individuelles de santĂ©. Pour une discussion des comportements microĂ©conomiques pour le cas français, le lecteur pourrait consulter le travail de Pichetti et al. (2009).
20
empirique et la question qui y reste non tranchĂ©e est plutĂŽt celle de lâampleur de la rĂ©action de ces dĂ©penses Ă la variation du revenu national. Autrement dit, la valeur que prendrait
lâĂ©lasticitĂ©-revenu. La valeur de cette Ă©lasticitĂ© permet de classer les biens et services de santĂ©
en produits supĂ©rieurs, normaux ou infĂ©rieurs selon quâelle soit, respectivement, supĂ©rieure
Ă lâunitĂ©, comprise entre 0 et 1 ou nĂ©gative.
Les estimations empiriques de lâĂ©lasticitĂ©-revenu oscillent gĂ©nĂ©ralement autour dâune valeur
proche de lâunitĂ©, comprise entre 0,3 et 1,5. Sa valeur est tributaire des modalitĂ©s de
lâestimation. Elle sâapproche de plus en plus de la borne supĂ©rieure de lâintervalle (1,5) selon
que les estimations économétriques recourent aux techniques du panel avec des niveaux
dâagrĂ©gation de plus en plus Ă©levĂ©s (Xu, K., P. Saksena et A. Holly, 2011).
Par ailleurs, en lien avec le positionnement de chaque pays sur sa propre trajectoire de
dĂ©veloppement, on sâattend Ă ce que la valeur de lâĂ©lasticitĂ©-revenu soit proche ou supĂ©rieure
Ă lâunitĂ© dans les pays en dĂ©veloppement et les dĂ©penses de santĂ© y soient donc plus sensibles
Ă lâĂ©lĂ©vation du niveau de vie.
La raison en est que, dans cette catégorie de pays en particulier, la causalité entre dépenses
de santĂ© et revenu national a plus de chance dâĂȘtre bidirectionnelle. La croissance
Ă©conomique cause les dĂ©penses de santĂ© qui, elles-mĂȘmes, agissant sur la croissance
renferment la boucle et créent un cercle vertueux qui se renforce tendanciellement rendant
les dĂ©penses de santĂ© plus sensibles au revenu. Cette boucle renforce ainsi Ă terme lâeffet direct de la variation du revenu national sur la dynamique des dĂ©penses de santĂ©.
Si lâeffet positif de la variation de revenu sur les dĂ©penses de santĂ© est intuitif, lâeffet du retour des dĂ©penses sur le revenu est tributaire de la situation Ă©pidĂ©miologique de la population et
du niveau de la productivitĂ© du pays. Plus lâĂ©tat gĂ©nĂ©ral de santĂ© est critique, plus la hausse
des dépenses de santé, absorbant au moins en partie le déficit au niveau des services des
soins, aurait de chances de se traduire par une amélioration de la situation épidémiologique
ambiante ; et plus le niveau de productivitĂ© est faible, plus lâamĂ©lioration de lâĂ©tat de santĂ© de
la population faciliterait des gains de productivitĂ© et plus lâeffet du retour des dĂ©penses de santĂ© sur le revenu est avĂ©rĂ©.
En revanche, la valeur de lâĂ©lasticitĂ©-revenu devient de plus en plus faible avec lâavancement des pays dans leur processus de dĂ©veloppement et lâĂ©puisement de lâeffet du retour des dĂ©penses de santĂ© sur la croissance. Cela pourrait expliquer le fait que la plupart des Ă©tudes
appliquées à des pays avancés considÚrent les dépenses de santé comme étant de la
consommation finale qui risquent, si elles continuent de croitre, de fragiliser leur situation
budgĂ©taire. Le seul cas oĂč lâaccroissement des dĂ©penses agrĂ©gĂ©es de santĂ© dans ces pays ne
reprĂ©sente pas un risque de dĂ©sĂ©quilibre budgĂ©taire câest lorsquâil est orienter au financement
dâune industrie technico-mĂ©dicale innovante. Dans ce cas, les dĂ©penses de santĂ© sont
assimilées plutÎt à des investissements productifs.
Dans le mĂȘme ordre dâidĂ©es, le faible taux de couverture mĂ©dicale dans les pays en
dĂ©veloppement, voire mĂȘme lâabsence de toute couverture dans certains cas, devrait rendre
21
les dépenses individuelles de santé trÚs sensibles à toute augmentation des revenus des
ménages.
Empiriquement, rares sont les travaux qui étudient le comportement des dépenses de santé
selon le niveau de développement. Parmi ces travaux, celui de Xu et al. (2011) est le plus large
en termes de nombre de pays retenus dans le panel et le plus Ă©quilibrĂ© avec autant de pays Ă
faible revenu que de pays avancĂ©s. Ils concluent que globalement lâĂ©lasticitĂ©-revenu est plus
Ă©levĂ©e dans les pays Ă faibles revenus et ce indĂ©pendamment du niveau dâagrĂ©gation de la variable explicative retenue (dĂ©penses totales de santĂ© versus dĂ©penses publiques ou privĂ©es)
et du type du modÚle mobilisé (statique versus dynamique).
Outre lâĂ©lasticitĂ©-revenu, lâĂ©lasticitĂ©-prix est Ă©galement estimĂ©e dâune maniĂšre rĂ©currente dans la littĂ©rature empirique analysant le comportement des dĂ©penses de santĂ©. Elle mesure
la sensibilitĂ© du volume des dĂ©penses de santĂ© Ă la variation de lâĂ©cart entre un indice des prix des soins et lâindice des prix Ă la consommation (effet prix relatifs). Elle est estimĂ©e souvent Ă
une valeur, en valeur absolue, oscillant autour de lâunitĂ© (Bac et Cornilleau, 2002 ; Albouy et
al., 2009). ThĂ©oriquement, lâĂ©lasticitĂ©-prix est nĂ©gative, mais elle peut prendre une valeur
positive si elle reflÚte un changement au niveau de la qualité des services de soins rendus. Une
substitution en faveur des biens et services de santé suite à une augmentation de leurs prix
nâest pas Ă©cartĂ©e dĂšs lors que ces biens et services sont perçus comme Ă©tant plus
indispensables que les autres produits sacrifiés19.
Dans le cadre de ce papier, Il sera introduit, Ă©galement, comme variable explicative lâeffet que pourrait avoir la structure du financement (public versus privĂ©) du systĂšme de santĂ© au Maroc
sur le comportement des dĂ©penses. Lâestimation du signe et de la valeur de cet effet permet
de confirmer ou dâinfirmer lâhypothĂšse dâun effet dâentrainement (versus effet dissuasif) des dĂ©penses publiques (versus dĂ©penses privĂ©es) sur les dĂ©penses totales. Ainsi, il est question
dâĂ©valuer la responsabilitĂ© des pouvoirs publics dans le ralentissement quâa connu la dynamique dâaccroissement des dĂ©penses de santĂ©.
Enrnier lieu, il sera également testé la sensibilité de la dynamique des dépenses de santé par
rapport à la temporalité du paiement des frais des soins par les ménages. En fait, il y a aucune
raison de considérer que les ménages bénéficiant des biens et services de santé sont amenés
Ă adopter le mĂȘme comportement de demande selon que les frais de ces biens et services
soient Ă leurs charges et dont le paiement est exigĂ© au moment mĂȘme de lâacte de « consommation », ou quâils adhĂšrent Ă un systĂšme prĂ©payĂ© dâassurance ou de financement via lâimpĂŽt. ConcrĂštement, le ratio des dĂ©penses de santĂ© Ă la charge des mĂ©nages payable
instantanément sur les dépenses totales de santé (Out Of Pocket) sera introduit dans les
rĂ©gressions afin de capter lâimpact du changement des modalitĂ©s de payement (paiement
instantanĂ© versus prĂ©paiement) sur lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ©.
19 Pour une explication formalisĂ©e dâune valeur positive de lâĂ©lasticitĂ©s-prix, le lecteur intĂ©ressĂ© pourrait se reporter au travail de RĂ©ynĂšs et Tamsamani (2009)
22
Encadré 2 ProgrÚs technique et dépenses de santé
Le progrÚs technique est identifié depuis le modÚle de Solow (1956) comme un moteur de
croissance économique et de prospérité des nations. A ce titre, il est censé induire une
augmentation des dépenses totales dont celles destinées à la consommation des biens et
services de santé. Le progrÚs technique médical, en particulier, consiste soit à élargir la palette
des soins dispensés en développant des nouveaux remÚdes à des maladies non encore
traitées, soit à améliorer les protocoles et les traitements existants. Le progrÚs technique est
ainsi un facteur agissant Ă la fois sur lâoffre lorsquâil porte sur la technologie mĂ©dicale et sur la
demande sâil se traduit par des gains de productivitĂ© favorables Ă une croissance Ă©conomique
de long terme.
Le progrĂšs technique est lâun des facteurs explicatifs les plus rĂ©currents dans la littĂ©rature
Ă©conomique sur le comportement des dĂ©penses de santĂ© dans les pays avancĂ©s au mĂȘme titre
que les autres déterminants macroéconomiques (revenu, prix relatifs, etc.). Dans le cadre du
prĂ©sent travail, il ne sera pas introduit dans lâexercice de modĂ©lisation du comportement des dĂ©penses de santĂ© pour les raisons suivantes :
le progrĂšs technique concerne le long terme, et il est pris en compte souvent dans des
Ă©tudes appliquĂ©es aux pays avancĂ©s afin dâĂ©valuer la soutenabilitĂ© budgĂ©taire et celle des
systÚmes de santé en place sur la base des hypothÚses réalistes censées inclure les progrÚs
Ă venir. Tandis que, lâobjectif premier du prĂ©sent travail est plutĂŽt tournĂ© vers le
comportement de court terme des dépenses de santé et se focalise notamment sur les
raisons du ralentissement de la dynamique des dépenses de santé au Maroc sur les cinq
derniÚres années.
le progrÚs technique pose un grand problÚme de mesure et de choix du « bon » indicateur
qui reste, dâailleurs, insoluble. La mesure du progrĂšs technique dans le domaine de la
santé, en particulier, est encore plus difficile du fait que les externalités positives liées aux
services de santĂ© sont Ă©talĂ©es dans le temps (la bonne santĂ© dâun enfant le prĂ©dispose Ă
mener une vie Ă©panouie et le rendre plus tard plus « productif ») et dispersĂ©es Ă
lâensemble des acteurs Ă©conomiques. Cette difficultĂ© de mesure se double dans le cas des pays en dĂ©veloppement oĂč lâinformel, qui est par dĂ©finition difficilement mesurable, est
omniprésent.
En pratique, dans les modÚles économétriques décrivant le comportement des dépenses de
santĂ©, le progrĂšs technique prend une forme simple dâune tendance temporelle souvent linĂ©aire (Gerdtham, U.G. et Lothgren, M., 2000). Cette dĂ©marche est insuffisante et ne peut
cerner toute la complexitĂ© des processus aboutissant Ă des avancĂ©es en termes dâamĂ©lioration de la qualitĂ© des soins dispensĂ©s ou de dĂ©couvert de nouveaux traitements thĂ©rapeutiques.
Pour remédier à cette limite, certains auteurs ont eu recours à des indicateurs un peu plus
sophistiquĂ©s : Dreger et Reimers (2005) Ă titre dâexemple ont fait des rĂ©gressions par rapport
à des variables proxy de progrÚs technique en recourant aux indicateurs de santé tels que
lâespĂ©rance de vie, la mortalitĂ© infantile ou la part des personnes ĂągĂ©es dans la population
totale. L'Horty Y. et al. (1997), en sâefforçant dâinclure un proxy pour le progrĂšs technique,
23
utilisent des statistiques de dépenses en appareils thérapeutiques rapportées au nombre de
lits dâhĂŽpitaux ou du nombre de mĂ©decins. Mathieu (2002), quant Ă lui, a fait dĂ©pendre les
dépenses de santé à un indicateur synthétique plus large composé des taux de dialyses
rĂ©nales, de greffes du cĆur et dâĂ©quipements en scanner. Il lâa construit spĂ©cifiquement pour
remédier aux faiblesses des statistiques unidimensionnelles afin de représenter plus ou moins
fidÚlement le progrÚs technique médical.
Bien que ces mesures soient plus fines que le simple trend, elles restent insuffisantes dĂšs lors
quâelles sont soumises Ă des logiques autres que seules celles liĂ©es aux avancĂ©es
technologiques.
Comme il a Ă©tĂ© indiquĂ© plus haut, lâĂ©tude des dĂ©terminants du comportement des dĂ©penses de santĂ© au Maroc dans ce papier exclut le rĂŽle que pourrait jouer le progrĂšs technique
mĂ©dical. Cela dit, cet effet, sâil se traduit par une baisse des coĂ»ts des soins, serait captĂ© par
la variable des prix relatifs. Les rĂ©sidus Ă©manant des estimations peuvent ĂȘtre Ă©galement
assimilés à des avancées technologiques.
b. Modélisation économétrique
Les déterminants macroéconomiques de la dynamique des dépenses de santé par habitant au
Maroc sont identifiĂ©s Ă lâaide de lâestimation Ă©conomĂ©trique de plusieurs variantes de lâĂ©quation 6 ci-aprĂšs. Cinq modĂšles sont finalement retenus ayant des propriĂ©tĂ©s statistiques
satisfaisantes. Ces modĂšles vont permettre dâĂ©valuer la contribution de chaque dĂ©terminant et sa responsabilitĂ© dans lâinclinaison quâa connue la dynamique des dĂ©penses de santĂ© Ă
partir 2010.
La variable Ă expliquer commune Ă lâensemble de ces modĂšles est le taux de croissance des
dĂ©penses de santĂ© par habitant corrigĂ© de lâeffet de la transition dĂ©mographique. Ce choix
dâexclure en amont lâeffet de la dĂ©mographie de la variable endogĂšne se justifie, tout dâabord,
par lâhorizon temporel court dont lequel sâinscrit ce travail alors que les facteurs
démographiques sont plus ou moins stables sur cet horizon et agissent plutÎt sur la
dynamique de long terme. Ensuite, sur un plan purement statistique, le nombre
dâobservations Ă©tant limitĂ©, la rĂ©duction du nombre de variables explicatives permet de
gagner en termes de degrĂ© de libertĂ© et dâamĂ©liorer la qualitĂ© des rĂ©gressions. En effet, les
paramĂštres de sensibilitĂ© obtenus des cinq rĂ©gressions sont tous stables et contenues Ă
lâintĂ©rieur de leur intervalle de confiance respectif et sur toute la pĂ©riode dâestimation.
LâĂ©quation estimĂ©e contient, dans sa version la plus complĂšte, trois facteurs explicatifs du taux
de croissance des dépenses de santé par habitant corrigé de l'effet de la transition
dĂ©mographique(đ„đđđ (đ·đĄđđĄ)). Elle sâĂ©crit comme suit :
24
đ„đđđ (đ·đĄđđĄ) = đ + đ·đąđđđŠ + đŒ1. đ„đđđ (đđŒđ”đĄđđĄ )â đđđđđĄ đđđŁđđđą + đŒ2. (đŒđđ¶đđĄđŒđđ¶đĄ )â đđđđđĄ đđđđ„ đđđđđĄđđđ +đŒ3. đ„ (đ·đșđĄđ·đĄ ) + đŒ4. đ„ (đ·đđĄđ·đĄ ) + đŒ5. đ„ (đđđđĄđ·đĄ )â đđđđđĄ đ đĄđđąđđĄđąđđ đđ đđđđđđđđđđđĄ+ đđĄâđ Ă©đ đđđą đđą đđ đđđđĄđđ đđ đđ đđŠđđđđđđąđ đđđ đđđđĄĂ©đ đđđ đđ đđđĂšđđ
6
OĂč c Ă©tant la constance; la variable Dummy reprĂ©sente une variable indicatrice qui prend la
valeur 1 en 2002 et 0 ailleurs20; Îlog (PIBtNt ) est le taux de croissance du PIB par habitant en
volume ; (đŒđđ¶đđĄđŒđđ¶đĄ ) est le ratio de lâindice des prix Ă la santĂ© rapportĂ© Ă l'indice des prix Ă la
consommation ; đ„ (đ·đșđĄđ·đĄ ) , đ„ (đ·đđĄđ·đĄ ) đđĄ đ„ (đđđđĄđ·đĄ ) reprĂ©sentent respectivement la variation de la
part des dépenses publiques, privées et celles à la charge des ménages payés au moment
mĂȘme de la « consommation » des services des soins (Out Of Pocket) dans les dĂ©penses
totales de santé.
Les estimations présentent globalement des propriétés statistiques satisfaisantes validant les
cinq modÚles (voir la partie inférieure du tableau 1), sachant que le nombre limité
dâobservations incite Ă une certaine prudence dans lâinterprĂ©tation des rĂ©sultats qui en
découlent. Les paramÚtres de sensibilité estimés sont tous significativement différents de zéro
et ont globalement les signes attendus ou du moins intuitifs.
Tableau 6 les modÚles explicatifs du comportement macroéconomique des dépenses de santé par habitant au Maroc21
20 En 2002, le volume des dĂ©penses totales de santĂ©, les dĂ©penses en point de PIB et les dĂ©penses par tĂȘte ont bondi brusquement, dans lâordre, de 22%, 20% et 20%. Ce saut exceptionnel vient suite Ă lâextension de la couverture mĂ©dicale en favorisant la part des mĂ©canismes collectifs dans le financement du systĂšme de santĂ©. 21 Lâestimateur des moindres carrĂ©s ordinaires (MCO) mobilisĂ© pour lâestimation des cinq modĂšles est valide, dĂšs lors que les deux conditions indispensables de validitĂ©, Ă savoir lâexogĂ©nĂ©itĂ© des variables explicatives et leur stationnaritĂ©, sont vĂ©rifiĂ©es. Bien quâIl soit fort probable, notamment dans un pays en dĂ©veloppement comme le Maroc, dâavoir une causalitĂ© bidirectionnelle entre les dĂ©penses de santĂ© et le revenu compromettant ainsi lâhypothĂšse dâexogĂ©nĂ©itĂ© des variables explicatives, le test de causalitĂ© au sens de Granger rejette tout impact Ă court terme du taux de croissance du PIB par habitant sur le taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© par habitant. LâexogĂ©nĂ©itĂ© a Ă©tĂ© testĂ©e Ă©galement vis Ă vis des trois variables de structure de financement des dĂ©penses de santĂ© et admise au regard du test de causalitĂ© au sens de Granger. Dans ce cas prĂ©cis, le recours aux techniques de lâĂ©conomĂ©trie des variables instrumentales conduit Ă des estimations biaisĂ©es et moins efficaces que celles Ă©manant de la mĂ©thode des MCO (Angrist D. J. et A. B. Krueger,, 2001). Les tests de racine unitaire, quant Ă eux, ne rejettent pas lâhypothĂšse de stationnaritĂ© pour lâensemble des variables telles quâelles sont introduites dans les cinq modĂšles (pour allĂ©ger le texte, lâensemble de ces tests sont disponibles sur demande auprĂšs de lâauteur).
25
c. Interprétation des résultats des modÚles
Dans les cinq modĂšles estimĂ©s, lâimpact de la variation du PIB par habitant sur la dynamique
des dĂ©penses de santĂ© par habitant sâavĂšre persistant et significativement positif. Il est
toutefois infĂ©rieur Ă lâunitĂ© et varie entre 0,5 et 0,8 selon quâon prenne en compte ou non les autres dĂ©terminants. En effet, inclure une variable captant lâĂ©volution de la structure de financement des dĂ©penses (modĂšles 3, 4 et 5) rend les dĂ©penses de santĂ© moins sensibles Ă
la variation du revenu et la valeur de lâĂ©lasticitĂ©-revenu sâestime alors Ă environ 0,5.
Ces rĂ©sultats sont comparables Ă ce quâon trouve dans la littĂ©rature rĂ©cente. Xu et al. (2011)
ont estimĂ© lâĂ©lasticitĂ©-revenu Ă 0,8 pour un panel de pays Ă revenu intermĂ©diaire dont le
Maroc fait partie.
En termes de contribution, lâeffet revenu permet dâexpliquer environ un tiers de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© par habitant au Maroc. Une contribution lĂ©gĂšrement plus faible Ă ce
ModĂšle 1 ModĂšle 2 ModĂšle 3 ModĂšle 4 ModĂšle 5
0,60 0,81 0,48 0,48 0,51
0,04 0,01 0,06 0,06 0,08
0,02 0,02 0,02 0,02
0,04 0,02 0,02 0,02
0,01
0,00
-0,01
0,00
-0,02
0,00
0,15 0,16 0,23 0,23 0,30
0,00 0,00 0,00 0,00 0,00
0,03
0,03
RÂČ ajustĂ© 0,54 0,49 0,66 0,59 0,60
Jarque-Bera test 0, 96 0,53 0,52 0,51 0,55
LM test 0,54 0,81 0,20 0,20 0,17
White test 0,75 0,57 0,94 0,94 0,50
Reset test 0,93 0,20 0,75 0,75 0,45
* les propriétés statitiques des 5 modÚles sont satisfaisantes: les résidus des
modĂšles suivent une loi normale, selon le test de Bera Jarque. les tests LM conduisent
au rejet de lâhypothĂšse dâauto-corrĂ©lation des rĂ©sidus. Ces derniers sont homoscĂ©dastiques au regard du test de White. Enfin, les formes fonctionnelles des
équations sont validées par le test Reset.
Méthode d'estimation : Moindres carrés ordinaires
PĂ©riode d'estimation : 1995 - 2014
les chiffres en italique représentent les p-value
c
propriétés statistiques des modÚles*
Dummy
α1
α2
α3
α4
α5
26
qui a Ă©tĂ© estimĂ©e pour les pays avancĂ©s. Dans le cas de la France, Ă titre dâexemple, L'Horty et
al. (1997) lâĂ©valuent Ă 41%. Sur les vingt derniĂšres annĂ©es, les dĂ©penses de santĂ© au Maroc
par habitant corrigĂ©es de lâeffet de la transition dĂ©mographique ont cru de 5,2% en moyenne annuelle dont la contribution de lâeffet revenu est comprise entre 1,5 et 2,8 points de
pourcentage (cf. Tableau 7).
Tableau 7 La contribution moyenne annuelle des déterminants macroéconomiques à la
dynamique des dĂ©penses de santĂ© par habitant sur la pĂ©riode 1995 â 2014 (en point de
pourcentage et en pourcentage)
Le deuxiĂšme facteur explicatif introduit dans les modĂšles est lâeffet prix-relatifs. Par rapport Ă
ce facteur, les cinq modĂšles considĂ©rĂ©s retiennent une forme fonctionnelle permettant dâen dĂ©duire une semi-Ă©lasticitĂ©-prix. Sa valeur estimĂ©e Ă 0,02 ressort, certes, stable et
significative, mais quasi nulle concluant à une trÚs faible sensibilité de la dynamique des
dĂ©penses de santĂ© vis-Ă -vis de lâĂ©cart de lâĂ©volution des prix Ă la santĂ© par rapport Ă celle des
prix Ă la consommation (cf. Tableau 6).
Cette trĂšs faible sensibilitĂ© du volume des dĂ©penses de santĂ© aux prix sâexplique par la conjugaison de plusieurs Ă©lĂ©ments caractĂ©risant le systĂšme de santĂ© marocain. Elle est due en
partie au fait que la production des biens et services de santé au Maroc est contrainte par
lâoffre et cette derniĂšre est relativement rigide. La demande y Ă©tant excĂ©dentaire et loin dâĂȘtre
totalement satisfaite, une hausse des prix des soins, par exemple, reste sans effet sur lâoffre
de court terme, car la baisse de demande, quâelle est censĂ©e induire et, en consĂ©quence,
lâĂ©rosion dâune partie des revenus des producteurs qui en dĂ©coule, serait compensĂ©e par une
demande non encore absorbée jusque-là .
En revanche, supposons, cette fois-ci, une baisse des prix des services des soins suite Ă une
dĂ©cision gouvernementale, lâoffre va se buter rapidement sur la frontiĂšre de production Ă©tant
donné le contexte caractérisé par une demande structurellement excédentaire et les
professionnels de santĂ© ne peuvent maintenir leurs revenus Ă leur niveau initial (dâavant le
choc) en augmentant le volume de production Ă court terme. Dans ce contexte, Il faudrait
Taux de croissance des
dĂ©penses de santĂ© par tĂȘte
corrigé de l'effet transition
Effet revenuEffet prix
relatifs
Effet structure de
financement RĂ©sidu
1,81 3,39
34,89 65,11
2,46 1,41 1,33
47,22 27,15 25,63
1,46 2,04 0,03 1,67
28,10 39,16 0,57 32,18
1,46 2,04 0,03 1,67
28,10 39,15 0,57 32,18
1,54 2,05 -0,51 2,13
29,53 39,34 -9,78 40,90
ModĂšle 1
ModĂšle 2
ModĂšle 3
ModĂšle 4
ModĂšle 5
5,2
100%
27
quâils attendent le prochain cycle de production pour pouvoir augmenter leurs offres et
compenser ainsi lâeffet de la baisse des prix sur leurs revenus.
Autrement dit, avec un marchĂ© de santĂ© dĂ©ficitaire au regard de la raretĂ© de lâoffre, les
professionnels de la santĂ© nâont pas dâincitations particuliĂšres Ă altĂ©rer leur offre en cas dâaugmentation des prix et ne sont pas en mesure non plus dâĂ©largir rapidement leur production potentielle en rĂ©action Ă une baisse des prix. Ainsi, lâoffre Ă©tant relativement rigide Ă court terme, les dĂ©penses de santĂ© sont peu sensibles Ă la variation des prix.
De cÎté de la demande, le caractÚre indispensable des biens et services de santé dans le panier
de consommation des ménages pourrait expliquer également une telle faible sensibilité aux
prix.
Cette décorrélation entre les prix et le volume des dépenses en biens et services de santé
pourrait provenir également du poids des dépenses publiques dans les dépenses totales de
santĂ©. Ainsi, sur les vingt derniĂšres annĂ©es, lâEtat assure Ă hauteur de 32% (en moyenne annuelle) le financement du systĂšme de santĂ©. Le volume de ces dĂ©penses est dĂ©fini Ă lâavance dans le cadre dâune loi de finances indĂ©pendamment de lâĂ©volution future des rapports des prix. Son Ă©laboration est rĂ©gie par des considĂ©rations politiques couplĂ©es au respect dâune
contrainte budgétaire loin de toute dynamique des prix des biens et services de la santé.
Dans le mĂȘme ordre dâidĂ©es, on pourrait penser que lâextension de la couverture mĂ©dicale rĂ©duit la sensibilitĂ© des dĂ©penses de santĂ© aux prix. En permettant Ă une demande latente de
se manifester car les coûts sont désormais mutualisés, les dépenses de santé réagissent en
consĂ©quence Ă la hausse indĂ©pendamment de la trajectoire dâĂ©volution des prix. Ce
raisonnement qui se tient Ă lâĂ©chelle individuelle, ne peut se transposer au niveau
macroĂ©conomique car lâĂ©largissement de la couverture mĂ©dicale a un coĂ»t qui est calculĂ© sur
la base des prix des biens et services de santé. Les dépenses de santé seraient davantage
sensibles (positivement) Ă la variation des prix que le taux de couverture sâĂ©largisse. A un taux
de couverture élevé, une hausse des prix des biens et services de santé alourdissant le coût
de la couverture mĂ©dicale que ce soit Ă la charge des mĂ©nages ou de lâadministration publique
se traduit in fine par une augmentation des dépenses agrégées de santé.
Cette relation croissante entre les prix et le volume des dépenses qui passe par le coût de la
couverture mĂ©dicale peut ĂȘtre donc Ă lâorigine, en conjugaison avec dâautres Ă©lĂ©ments citĂ©s
plus bas, du signe positif de la semi-Ă©lasticitĂ©-prix que lâon trouve pour le Maroc (Tableau 6).
Certes, une Ă©lasticitĂ©s-prix positive semble ĂȘtre contre-intuitive par rapport Ă lâanalyse
microéconomique standards portée sur les biens et services « normaux », et en divergence
également avec les résultats des estimations empiriques appliquées aux pays avancés qui la
trouvent plutĂŽt nĂ©gative. Mais, un signe positif de lâĂ©lasticitĂ©-prix nâest pas Ă©trange de la littĂ©rature Ă©conomique portant sur la sensibilitĂ© aux prix des biens et services outre ceux de
la santĂ© (facteurs de production, biens et services de luxe, et bien dâautres) ( (RĂ©ynĂšs, F. et Y.
Y. Tamsamani, 2009). Il peut ĂȘtre dĂ», en plus du rĂŽle de lâextension de la couverture mĂ©dicale,
à un changement au niveau de la qualité qui peut conjointement justifier, par exemple, une
28
hausse des prix des soins et susciter des dĂ©penses supplĂ©mentaires22. De mĂȘme, Une
élasticité-prix positive pourrait traduire un phénomÚne de substitution qui profite, en cas
dâune hausse des prix par exemple, Ă la demande des biens et services de santĂ© en sacrifiant
celle des produits moins indispensables. Câest le cas dâailleurs des dĂ©penses catastrophiques23.
En se rapportant au Tableau 7, la contribution de lâeffet prix-relatifs Ă la dynamique des
dĂ©penses de santĂ© par habitant sâĂ©lĂšve Ă 18% dans le cas du modĂšle 2 et 26% dans les modĂšles les plus complets (modĂšles 3, 4 et 5), soit presque trois fois le pouvoir explicatif attribuĂ© Ă
lâeffet revenu. Il sâagit dâun ordre de grandeur trĂšs proche de ce que lâon peut trouver dans la
littérature (L'Horty et al., 1997). La semi-élasticité étant proche de zéro, la variabilité du ratio
de lâindice des prix Ă la santĂ© sur lâindice des prix Ă la consommation est telle que lâeffet des prix relatifs est le dĂ©tĂ©rminant macroĂ©conomique qui explique le plus la dynamique des
dépenses de santé au Maroc sur les vingt derniÚres années, devancé seulement par la somme
des facteurs non explicités dans les modÚles (les résidus).
Les modĂšles 3 et 4 (Tableau 6) sont symĂ©triques et testent lâeffet de la rĂ©partition de la structure de financement des dĂ©penses de santĂ© au Maroc entre les dĂ©penses publiques et
privées sur la dynamique des dépenses totales. Ils en ressortent que les dépenses de santé
publiques exercent un effet dâentrainement sur les dĂ©penses de santĂ© totales par habitant et,
symétriquement, les dépenses privées ont un effet dissuasif. En effet, une hausse de la part
des dépenses publiques (ou privées) dans les dépenses totales accélÚre (ou décélÚre) la
dynamique de croissance des dĂ©penses par tĂȘte.
Cela dit, la sensibilité du taux de croissance des dépenses de santé par habitant à la
déformation de la structure de financement durant les vingt derniÚres années est trÚs faible.
Le coefficient de sensibilité est estimé (modÚles 3 et 4) à 0,01 en valeur absolue. En termes de
contribution, la structure de financement nâexplique quâĂ peine 0,5% de lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© par habitant, soit 0,03 point de pourcentage pour un taux de croissance
annuel moyen 5,2 points (Tableau 7).
La comparaison avec la littérature est délicate et les résultats des travaux empiriques sur cette
question de la nature et de lâampleur de lâimpact de la structure de financement sur le comportement des dĂ©penses de santĂ© restent mitigĂ©s. Sur des donnĂ©es françaises, L'Horty et
al. (1997) trouvent des rĂ©sultats comparables Ă ce quâon obtient pour le Maroc. Ils dĂ©montrent
que lâaugmentation du poids des dĂ©penses publiques dans les dĂ©penses totales a bel et bien un effet dâentrainement, mais trĂšs faible, avec un coefficient de sensibilitĂ© estimĂ© Ă 0,02. A
lâopposĂ©, Wagstaf (2009), pour un panel regroupant les pays de lâOCDE, dĂ©montre que la
transition dâun systĂšme de santĂ© financĂ© par lâadministration publique vers un systĂšme basĂ© sur lâassurance maladie privĂ©e augmente les dĂ©penses de santĂ© par habitant dâenviron 3% Ă
22 Afin de mesurer correctement la sensibilitĂ© des dĂ©penses de santĂ© aux prix, il est plus appropriĂ© de les corriger de lâeffet de lâĂ©volution de la qualitĂ© des prestations dans le secteur de la santĂ©. Des mĂ©thodologies rĂ©centes de correction de lâeffet qualitĂ© existent et ont Ă©tĂ© appliquĂ©es dans le domaine dâĂ©valuation des prix immobiliers (Clarenc, P. et Al., 2014). 23 Les dĂ©penses de santĂ© sont dites catastrophiques quand, pour payer les services de soins et biens mĂ©dicaux, les mĂ©nages se trouvent sous la contrainte de devoir s'acquitter des frais supĂ©rieurs Ă ce que permettent leurs revenus. Pour sâadapter, ils rĂ©duisent leurs consommations dâautres produits.
29
4%. Xu et al. (2011), quant à eux, déclinent tout impact de la structure de financement du
systÚme de santé sur le comportement des dépenses totales de santé.
En lien avec les modalitĂ©s de paiement, le modĂšle 5 introduit lâeffet de la temporalitĂ© de survenance du paiement des frais des biens et services de santĂ© par les mĂ©nages. Il conclut Ă
un effet nĂ©gatif et faible (-0,02) quâexerce lâaugmentation de la part des frais des soins restante Ă la charge des mĂ©nages et payable instantanĂ©ment sur lâĂ©volution des dĂ©penses de santĂ© par habitant (Tableau 6). Sur la pĂ©riode Ă©talant entre 1995 et 2014, la hausse de la part
des frais supportĂ©s directement par les mĂ©nages est responsable dâun ralentissement du taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© de 0,5 point en moyenne chaque annĂ©e (Tableau 7).
Il n'enmeure pas moins quâenviron un tiers de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© par
habitant nâest pas expliquĂ© par les dĂ©terminants classiques considĂ©rĂ©s dans les cinq modĂšles.
Le rĂ©sidu est en lâoccurrence un facteur explicatif non nĂ©gligeable regroupant des
dĂ©terminants soit difficilement chiffrables (progrĂšs technique, mĆurs et mentalitĂ©s) soit
quâils relĂšvent des conditions de vie et du fonctionnement des services de lâEtat affectant
indirectement lâĂ©volution du volume des dĂ©penses de santĂ© (qualitĂ© des aliments, conditions
dâhabitat, efficacitĂ© des services du contrĂŽle sanitaire, etc.).
d. Les causes du ralentissement du taux de croissance des dépenses de santé par habitant depuis 2010 ?
Il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ©, plus haut dans le papier, que la dynamique dâaccroissement des dĂ©penses totales de santĂ© est en perte de vitesse sur les cinq derniĂšres annĂ©es. En effet, son taux de
croissance annuel moyen est revenu de 7,9% Ă 4,4% entre 1995-2009 et 2010-2014, soit un
recul de 3,5 points. En éliminant les effets de la démographie, responsables de 0,5 point de ce
recul, le ralentissement des dĂ©penses de santĂ© par habitant, corrigĂ©es de lâeffet de la dĂ©formation de la structure des Ăąges, sâĂ©lĂšve Ă 3 points. Comment en est-on arrivĂ© lĂ ? Les
facteurs macroéconomiques expliquent-ils ce changement de cap ? Et dans quelle mesure ?
Le graphique 3 retrace lâĂ©cart en termes de contribution de chacun des dĂ©terminants
macroéconomiques introduits dans les modÚles 3 et 524 entre les sous-périodes avant et aprÚs
2010. Cela nous éclaire ne serait-ce que sur une partie (celle captée par les variables
explicatives des modĂšles) des mĂ©canismes sous-jacents Ă lâaplatissement rĂ©cent de la courbe
des dĂ©penses de santĂ© par habitant au Maroc. Ainsi, lâeffet revenu est responsable dâune perte de dynamique des dĂ©penses de santĂ© de lâordre de 0,4 point (sur 3 points), expliquĂ©e par la
dĂ©cĂ©lĂ©ration quâa connu la croissance annuelle du PIB par tĂȘte sur la pĂ©riode rĂ©cente en
passant de 3,5% en moyenne annuelle entre 1995 et 2009 Ă 2,4% Ă partir de 2010 (Tableau
8).
24 On se limite aux seuls modĂšles 3 et 5 car ils ont, sur le plan statistique, les coefficients de dĂ©termination ajustĂ© (RÂČ) les plus Ă©levĂ©s et dont les rĂ©gressions permettent dâinclure lâensemble des dĂ©terminants testĂ©s.
30
Graphique 3 LâĂ©cart des contributions annuelles moyennes des facteurs explicatifs entre deux sous-pĂ©riodes 1995-2009 et 2010-2014 en se rapportant aux modĂšles 3 et 5
Tableau 8 lâĂ©volution moyenne annuelle des dĂ©terminants macroĂ©conomiques des dĂ©penses de santĂ©
Sources : Banque Mondiale, Bank Al Maghrib
Quant Ă lâeffet prix-relatifs, la baisse de sa contribution au taux de croissance des dĂ©penses de
santé par habitant de 1,5 point le rend responsable de la moitié du recul de la dynamique des
dĂ©penses de santĂ© par tĂȘte. Pour cause, une baisse consĂ©quente des prix des produits de la
santĂ© au Maroc depuis 2012, qui a fait passer le ratio de lâindice des prix Ă la santĂ© sur lâindice des prix Ă la consommation de 1,07 Ă 0,36, conjuguĂ©e avec une valeur positive , bien que
faible, de la semi-Ă©lasticitĂ© prix. Ce rĂŽle que joue lâeffet prix-relatifs permet dâattĂ©nuer les craintes quâon pourrait dĂ©velopper sur une Ă©ventuelle dĂ©rive dangereuse au niveau de la
dynamique des dépenses de santé au Maroc.
Lâintervention publique nâest pas sans impact sur la dynamique des dĂ©penses de santĂ©. ReprĂ©sentant environ 32% en moyenne des dĂ©penses totales sur les vingt derniĂšres annĂ©es,
les dĂ©penses publiques y exercent au contraire un effet dâentrainement. Alors que leur part
-0,39 -0,41
-1,46 -1,46
-0,69
-0,30
-0,46
-0,82
-3,5
-3
-2,5
-2
-1,5
-1
-0,5
0
ModĂšle 3 ModĂšle 5
Effet revenu Effet prix relatifs Effet organisation RĂ©sidu
Taux de croissance
par habitantprix relatifs
Variation du poids
des dépenses
publiques
Variation du
poids des frais
Out Of Pocket
1995-2014 3,2% 0,88 0,03 0,34
1995-2009 3,5% 1,07 0,20 0,30
2010-2014 2,4% 0,36 -0,45 0,46
31
sâinscrivait sur une trajectoire croissante dâen moyenne 0,02 (en point de variation du ratio)
par an entre 1994 et 2009 (Tableau 8), elle sâest retournĂ©e Ă la baisse Ă partir de 2010 au rythme annuel de -0,45, entrainant ainsi un recul du taux de croissance des dĂ©penses de santĂ©
par habitant Ă hauteur de 0,7 point par an (modĂšle 3, graphique 3). Finalement, la baisse de
la part des dépenses publiques dans les dépenses totales de santé entre 2010 et 2014 est
responsable du ralentissement des dépenses de santé par habitant à hauteur de 22% et cela
est due soit Ă lâesprit comptable (doctrinal) qui rĂšgne sur lâĂ©laboration de la politique budgĂ©taire au Maroc (encadrĂ© 3), soit Ă des choix publics non appropriĂ©s qui profitent Ă des
secteurs ayant des effets dâentrainement faibles (Tamsamani, 2016).
Encadré 3 La politique budgétaire au Maroc : le grand malentendu !
Les dĂ©penses sociales publiques dont celles dĂ©diĂ©es Ă la santĂ© semblent ĂȘtre prises au piĂšge
du simple jeu politique. La politique budgétaire au Maroc connait une « mauvaise »
rĂ©cupĂ©ration politique qui lâĂ©vacue de sa raison dâĂȘtre initiale25 et tout le dĂ©bat autour de
cette politique se trouve cantonner dans seulement le suivi dâun indicateur unique qui est le
dĂ©ficit public en point du PIB. Du cĂŽtĂ© du gouvernement, la doctrine de lâĂ©quilibre budgĂ©taire Ă tout prix se dresse comme le socle de son action au dĂ©triment des principes de justice sociale
et de progrĂšs. Lâopposition, quant Ă elle, qui un jour Ă son tour aurait les manettes de la politique budgĂ©taire, juge et critique le travail du gouvernement en reliant Ă tort le
creusement du déficit public à une potentielle perte de la souveraineté nationale et à la
légÚreté des politiques mises en place.
En rĂ©alitĂ©, le creusement du dĂ©ficit public nâest en soi ni bien ni mal mais ce qui importe câest plutĂŽt lâusage que lâon en fait. Cette rĂ©cupĂ©ration politique inappropriĂ©e du concept de dĂ©ficit public incite, en continu, quel que soit le parti politique au pouvoir, Ă une course aveugle de
restriction budgĂ©taire indĂ©pendamment du positionnement de lâĂ©conomie sur son cycle et de
lâĂ©tat des inĂ©galitĂ©s sociales.
Au final, la dynamique des dĂ©penses de santĂ©, Ă lâinstar des autres dĂ©penses sociales, pourrait en subir les consĂ©quences et ĂȘtre revue Ă la baisse, ce qui risque dâalourdir davantage les dĂ©penses privĂ©es des mĂ©nages en biens et services de santĂ©. Cette dĂ©formation de la structure
de financement de la santé au Maroc conduit inéluctablement à un creusement des inégalités
fragilisant encore plus la frange de population la plus vulnérable économiquement et qui est
au mĂȘme temps la plus exposĂ©e aux dĂ©gradations de leur situation sanitaire26 (MinistĂšre de
25La politique budgĂ©taire a Ă©tĂ© conçue Ă la base comme un instrument de politique contra-cyclique de rĂ©gulation Ă court terme de la conjoncture servant Ă lisser le cycle Ă©conomique et rĂ©duire sa volatilitĂ©. A moyen et long termes, elle nâest pas sans effets sur les grandeurs macroĂ©conomiques Ă cause des phĂ©nomĂšnes dâhystĂ©rĂ©sis, dâautant plus que dans les pays moins avancĂ©s le retour Ă lâĂ©quilibre initial nâest ni souhaitable ni soutenable. 26 Par exemple, les taux de mortalitĂ© infantile et de mortalitĂ© infanto-juvĂ©nile en 2011 sont, respectivement, supĂ©rieurs de 15,2 et 14,5 points chez le quintile le plus dĂ©favorisĂ© de la population par rapport au quintile le plus favorisĂ©.
32
la santé, 2012). Cette question sur les répercussions en termes de creusement des inégalités
et de dĂ©gradation du bien-ĂȘtre social suite Ă ce ralentissement des dĂ©penses de santĂ©, bien
quâelle soit importante, ne fait pas lâobjet dâanalyse dans cet article.
Dâune maniĂšre quasi mĂ©canique, le ralentissement du financement public sâest compensĂ© par
une hausse des frais supportés par les ménages lors de la consommation des services de santé
(Out Of Pocket) qui ont vu leur part dans les dépenses totales augmenter plus rapidement sur
la période récente. En passant à 0,46 entre 2010 et 2014 contre 0,3 en moyenne durant la
pĂ©riode 1995-2009, lâaccĂ©lĂ©ration de lâaccroissement de la part de «Out Of Pocket » dans les
dĂ©penses totales de santĂ© est source dâune baisse de 0,3 point du taux de croissance des dĂ©penses de santĂ© par habitant.
VI. Conclusion
A lâĂ©chelle des pays avancĂ©s, les dĂ©penses de santĂ© ont cru rapidement et en continu dans un premier temps avant que leur rythme dâaccroissement ne se stabilise Ă un taux proche de celui de lâĂ©conomie. A lâissue de ce processus, le niveau des dĂ©penses par habitant est tel que les
biens et services de santé sont disponibles en quantité et en qualité suffisantes. Au Maroc, le
comportement des dépenses de santé se cale curieusement sur le schéma suivi par les pays
avancĂ©s. Bien quâelles continuent de croitre en niveau, les dĂ©penses totales de santĂ© y sont
en perte de vitesse depuis 2010, passant dâun taux de croissance annuel moyen 7,9% entre
1996 et 2009 à 4,4% sur la période récente, soit un recul de 3,5 points de pourcentage.
Le papier propose dâidentifier les dĂ©terminants dĂ©mographiques et macroĂ©conomiques du
comportement des dépenses de santé au Maroc, afin de pouvoir évaluer, séparément, leur
contribution au ralentissement quâont connu ces dĂ©penses depuis 2010. Nos calculs dĂ©montrent que les facteurs dĂ©mographiques rĂ©unis expliquent 14% du recul du taux de
croissance des dĂ©penses de santĂ©. Bien que lâaccroissement de la population (1er facteur
démographique) continue de contribuer positivement à la dynamique des dépenses de santé
Ă hauteur de 1,4 point depuis 2010 contre 1,1 point durant la pĂ©riode prĂ©cĂ©dente, lâeffet de la transition dĂ©mographique (2eme facteur), marquĂ©e par un arrĂȘt dans la dynamique de
vieillissement de la population, sâefface Ă partir de 2010 en entrainant un recul de la contribution des facteurs dĂ©mographiques de 0,5 point.
Concernant les facteurs explicatifs macroéconomiques, les estimations montrent que le
revenu national explique 11% (soit 0,4 point sur 3,5 points) du recul du taux de croissance des
dépenses de santé. La forte baisse des prix des biens et services de santé en est responsable
à hauteur de 45% (soit 1,5 point) du fait que la semi-élasticité prix ressorte positive. Cet effet
prix permet dâattĂ©nuer les craintes sur une Ă©ventuelle dĂ©rive dangereuse au niveau de la dynamique des dĂ©penses de santĂ© au Maroc. Enfin, le retournement Ă la baisse de la
dynamique du ratio des dépenses publiques sur les dépenses totales de santé depuis 2010 a
entrainĂ© dans son sillage celle des dĂ©penses de santĂ© de lâordre de 20% (soit 0,7 point).
33
VII. Bibliographie
Albouy, V., E. Bretin, N. Carnot, M. Deprez. (2009). Les dépenses de santé en France : déterminants
et impact du vieillissement Ă lâhorizon 2050. Les Cahiers de la DGTPE(2009/11).
Angrist D. J. et A. B. Krueger,. (2001). Instrumental Variables and the Search for Identification: From
Supply and Demand to Natural Experiments. Journal of Economic Perspectives, 15(4).
Bac, C. et G., Cornilleau. (2002). Comparaison internationale des dépenses de santé : une analyse des
Ă©volutions dans sept pays depuis 1970. Etudes et RĂ©sultats, Drees(175).
Baumol, W. J. et W. G. Bowen. (1965). On The Performing Arts : The Anatomy Of Their Economic
Problems. The Amirecan Economic Review, 55(1/2).
Clarenc, P. et Al. (2014). Les indices notaires-INSEE de prix des logements anciens. INSEE
MĂ©thodes(128).
Cornilleau, G. (2012). Crise et dépenses de santé : financement et politiques à court-moyen terme.
Notes de l'OFCE(12).
Dreger C. et H.E. Reimers. (2005). Health Care Expenditures in OECD Countries:A Panel Unit Root and
Cointegration Analysis. IZA Discussion Paper(1469 ).
Elmi Z.M. et Sadeghi S. . (2012). Health care expenditures and economic growth in developing
countries: panel co-integration and causality. Middle-East Journal of Scientific Research,
1(12).
Erixon, F. et E. V. D. Marel. (2011). What Is Driving The Rise In Health Care Expenditure? An Inquiry
into the Nature and Causes of the Cost Disease. ECIPE WORKING PAPER(5).
Gerdtham, U.G. et Lothgren, M. (2000). On stationarity and cointegration of international health
expenditure and GDP. Journal of Health Economics, 19(4).
Grossman, M. (1972). On the Concept of Health Capital and the Demand for Health. Journal of
Political Economy, 80(2).
Hartwig, J. (2008). What drives health care expenditure? Baumol's model of âunbalanced growthâ revisited. Journal of Health Economics, 27(3).
Haut conseil pour lâavenir de lâassurance maladie. (2010). Vieillissement, longĂ©vitĂ© et assurance maladie. Note.
L'Horty Y., A. Quinet et F. Rupprecht. (1997). Expliquer la croissance des dépenses de santé: le rÎle du
niveau de vie et du progrĂšs technique. Ăconomie et PrĂ©vision, 3-4(129-130).
Lin, J. Y. (2012). New Structural Economics: A Framework for Rethinking Development. Washington
DC: The World Bank.
Mahieu, R. (2002). Les déterminants des dépenses de santé : une approche macroéconomique
économique. Santé, Société et Solidarité(1).
Martins, J. O. et C. De La Maisonneuve. (2006). Les détérminants des dépenses publiques de santé et
de soins de longue durée: une méthode de projection intégrée. Revue économique de
l'OCDE(43).
34
MinistÚre de la santé. (2012). Etat de santé de la population marocaine.
Murthya, V. N. R. et A. A. Okunadeb. (2009). The core determinants of health expenditure in the
African context : Some econometric evidence for policy. Health Policy, 91.
Omotor, D. (2009). Determinants of Federal Government Health Expenditures in Nigeria.
International Journal of Economic Perspectives, 3(1).
Piabuo, S. M. et J. C., Tieguhong. (2017). Health expenditure and economic growth - a review of the
literature and an analysis between the economic community for central African states
(CEMAC) and selected African countries. Health Economics Review(7).
Pichetti S., D. Raynaud et G. Vidal. (2009). Les déterminants individuels des dépenses de santé. (P. d.
(P.F.N.S.P.), Ăd.) Paris.
Productivity Commission. (2005). Economic Implications of an Ageing Australia. Research Report,
Canberra.
RĂ©ynĂšs, F. et Y. Y. Tamsamani. (2009). SubstituabilitĂ© des facteurs et rendements dâĂ©chelle sectoriels en France : une estimation par une fonction de coĂ»t flexible. Document du travail de
l'OFCE(37).
Seshamani, M. et A.M. Gray. (2004). A Longitudinal Study of the Effects of Age and Time to Death on
Hospital Costs. Journal of Health Economics, 23(2).
Tamsamani, Y. Y. (2016, DĂ©cembre). Les Ă©nergies renouvelables au Maroc : un choix discutable? .
Revue Afrique DĂ©fense.
Tchoe, B. et S. Nam. (2010). Aging Risk and Health Care Expenditure in Korea. International Journal of
Environmental Research and Public Health(7).
Wagstaff, A. (2009). Social Health Insurance vs. Tax-Financed : Health SystemsâEvidence from the
OECD. Policy Research Working Paper, The World Bank(4821).
Xu, K., P. Saksena et A. Holly. (2011). The determinants of health expenditure. Results For
Developement Working Paper.
VIII. Annexes
Tableau 9 Taux de croissance des dĂ©penses totales de santĂ© par tĂȘte aux prix et en PPA constants
35
Tableau 10 Tests de changement de régime des taux de croissances des dépenses de santé totales et par habitant à partir de 2010
Tableau 11 Evolution de lâeffet de la transition dĂ©mographique sur les dĂ©penses de santĂ© au Maroc selon le rapport (D3/D2) des dĂ©penses des seniors sur celles des adultes
1970-1989 1990-2009 2010-2015
Canada 3,54 2,61 0,51 France 2,76 0,85
Allemagne 4,32 2,24 2,02 Italie 2,34 0,64 -
Japon 5,28 3,13 4,55 Pays-Bas 3,09 3,95 1,20 Espagne 6,00 4,09 0,11 -
Royaume-Uni 3,82 4,33 3,59 Ătats-Unis 5,25 3,61 1,92
Moyenne 4,47 3,23 1,54
Source: OCDE
Dependent Variable: DLOG(dépenses totales) Dependent Variable: DLOG(dépenses par habitant)
Method: Least Squares Method: Least Squares
Sample (adjusted): 1996 2014 Sample (adjusted): 1996 2014
Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob.
Dummy -0.153395 0.047249 -3.246549 0.0047 Dummy -0.082560 0.034094 -2.421502 0.0269
@TREND 0.011665 0.002364 4.934844 0.0001 @TREND 0.006559 0.001672 3.921706 0.0011
1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014
ActualFitted
1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014
ActualFitted
36
Tableau 12 La contribution des diffĂ©rents facteurs explicatifs Ă la dynamique des dĂ©penses de santĂ© par habitant sur la pĂ©riode 1995 â 2009 en moyenne annuelle et en point de
pourcentage
Années
Ln k
D3/D2* = 2
Ln k
D3/D2 = 4
Ln k
D3/D2 = 6
1 996 2,20 2,21 2,24
1 997 0,86 0,83 0,82
1 998 0,75 0,69 0,67
1 999 0,69 0,63 0,61
2 000 0,67 0,61 0,59
2 001 0,75 0,70 0,69
2 002 0,73 0,70 0,69
2 003 0,72 0,70 0,69
2 004 0,70 0,68 0,68
2 005 0,66 0,68 0,68
2 006 0,49 0,44 0,43
2 007 0,43 0,39 0,37
2 008 0,35 0,31 0,29
2 009 0,23 0,18 0,16
2 010 0,10 0,04 0,02
2 011 -0,01 -0,06 -0,08
2 012 -0,13 -0,19 -0,21
2 013 -0,05 -0,09 -0,11
2 014 0,28 0,29 0,30
1996 - 2014 0,55 0,51 0,50
1996 - 2009 0,73 0,70 0,69
2010 - 2014 0,04 0,00 -0,02
* D1, D2 et D3 représentent respectivement les dépenses de santé des jeunes, des
adultes et des seniors.
Sources: BM, FMI, calculs de lâauteur
1995-2009
Taux de croissance des
dĂ©penses de santĂ© par tĂȘte
corrigé de l'effet transition
Effet revenuEffet prix
relatifs
Effet
organisationRĂ©sidu
1,98 4,12
32,48 67,52
2,68 1,71 1,70
43,95 28,11 27,94
1,60 2,47 0,20 1,8326,15 40,54 3,31 30,00
1,60 2,47 0,20 1,83
26,15 40,54 3,31 30,00
1,68 2,48 -0,45 2,39
27,48 40,74 -7,33 39,11
ModĂšle 1
6,1
100%
ModĂšle 2
ModĂšle 3
ModĂšle 4
ModĂšle 5
37
Tableau 13 La contribution des diffĂ©rents facteurs explicatifs Ă la dynamique des dĂ©penses de santĂ© par habitant sur la pĂ©riode 2010 â 2014 en moyenne annuelle et en point de
pourcentage
2010-2014
Taux de croissance des
dĂ©penses de santĂ© par tĂȘte
corrigé de l'effet transition
Effet revenuEffet prix
relatifs
Effet
organisationRĂ©sidu
1,50 1,50
49,85 50,15
2,02 0,64 0,34
67,46 21,20 11,34
1,20 0,92 -0,49 1,37
40,14 30,58 -16,38 45,66
1,20 0,92 -0,49 1,37
40,14 30,58 -16,38 45,66
1,27 0,92 -0,75 1,56
42,19 30,73 -24,94 52,02
ModĂšle 1
3
100%
ModĂšle 2
ModĂšle 3
ModĂšle 4
ModĂšle 5