une approche économique des compétences de la firme: vers

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HAL Id: hal-01177198 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01177198 Preprint submitted on 16 Jul 2015 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Une approche économique des compétences de la firme: vers une synthèse des théories néo-institutionnelles et évolutionnistes Alain Alcouffe, Souhaila Kammoun To cite this version: Alain Alcouffe, Souhaila Kammoun. Une approche économique des compétences de la firme: vers une synthèse des théories néo-institutionnelles et évolutionnistes. 2000. hal-01177198

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Page 1: Une approche économique des compétences de la firme: vers

HAL Id: hal-01177198https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01177198

Preprint submitted on 16 Jul 2015

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Une approche économique des compétences de la firme:vers une synthèse des théories néo-institutionnelles et

évolutionnistesAlain Alcouffe, Souhaila Kammoun

To cite this version:Alain Alcouffe, Souhaila Kammoun. Une approche économique des compétences de la firme: vers unesynthèse des théories néo-institutionnelles et évolutionnistes. 2000. �hal-01177198�

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l 1IRH£ Laboratoire l nterdisciplinaire de recherche sur les Ressources Humaines et l'E mploi

Une approche economique des competences de la firme:

vers une synthese des theories neo-institutionnelles et evolutionnistes

Alain Alcouff e

Souhaila Kammoun

Note 307 (00-7)

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Une approche économique des compétences de la firme:

vers une synthèse des théories néo-institutionnelles et évolutionnistes

Alain Alcouff e

Souhaila Kammoun

Note 307 (00-7) Février 2000

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Résumé

L'objectif de cet article est de situer la problématique des compétences au sein des théories de la firme. En foca li sant l'analyse sur la théorie néo-institutionnelle et la théorie évo lutionniste de la firme, il s'attache à montrer que l'économie des compétences est une synthèse de ce deux corpus, principalement quand on s'attaque à certaines questions comme l'innovation et l'apprentissage organisationnels. A cette fin , la réflexion s'est essentiellement cristallisée sur Je rôle des compétences dans la dynamique d'organisation et les interactions en tre compétence, innovation et performance.

Abstract

This paper proposes to set the problematic of competences within theories of the Finn. Focusing the analysis on the neo-institutional theory and the evolutionist theory of the firm, it tries to show that the economy of competence is a synthesis of these two corpus, mainly when we tackle on some questions such as innovation and organizational learning. So, further thought needs to be given to the role of competences in the organizational dynamics and interactions between competence, innovation and performance.

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Plan

1. Introduction

2. Economie de production ou d 'échange : deux approches de la coordination

3. Une vision de la firme basée sur les compétences 3. 1. Hypothèses de base 3.2. L'émergence de la question des compétences au sein des théories de la firme 3.3. Vers une théorie des compétences de la firme

4. Dynamique des compétences : une caractérisation comportementale de la firme 4. 1. Les mécanismes d'accumulation des connaissances et des compétences 4.1. l . Capacités d'apprentissage et d'absorption des connaissances 4. 1.2. Une vision évolutionniste de l'accumulation des connaissances 4.2. La base de compétences de la firme 4.2.1. Vers une typologie des compétences 4.2.2. Les processus d 'accumulation des compétences

5. Les interactions entre compétences et innovation 5. 1. Innovation. compétences et performance 5.2. Les compétences pour innover 5.3. La dynamique des compétences : processus de construction

6. Compétence, apprentissage et économie des coûts de transaction

7. Résumé et Conclusion

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1. Introduction

Aujourd ' h~i, la théorie de la fi rme est l'une des pistes de recherche les plus progressives en économie, et est probablement l'une des pistes faisant l 'objet d'études interdi sciplinaires. Pour justifier l 'existence de la firme, son organisation interne, ses relations avec des acteurs externes, la théorie économique étudie la firme. De nouveaux éclairages apportés par des formalisations sur la firme, en tant qu'agent économique, ont élargi le champ de réflexion des théories de la firme. Au départ, la théorie économique de l'équilibre général conçoit l'entreprise comme une boîte noire, un lieu de production, sans en distinguer le fonctionnement interne. Par la prise en compte des comportements des acteurs, l'entreprise devient une organisation avec des décideurs aux objectifs et aux comportements différents qu ' il faut intégrer. Ainsi J'analyse économique développe la théorie des coûts de transaction, à la suite de la théorie de l' agence, et assimile la firme à un nœud de contrats.

Dans cet article, un cas de la théorie moderne de la firme, réunissant d ifférentes disciplines (économie, gestion et sociologie), sera présenté. L'objectif est de situer la problématique de la compétence dans les référentiels conceptuels qu 'offrent les théories de la firme et d'apporter des éclairages complémentaires sur le débat. Quels sont donc les hypothèses de base de cette théorie. Quel type de concept de la firme suppose-elle, et partant, quels sont ses apports quant à la dynamique organisationnelle de la firme ?

2. Economie de production ou d'échange: deux approches de la coordination

Tant sur le marché des facteurs de production en amont que sur celu i des produits en aval. la firme est confrontée aux concurrents; elle s'y heurte aussi à d ' autres acteurs (Etat, syndicats , etc.) et d ' autres évolutions d'ordre technique, culturel et social jouant dans la soc iété ambiante avec laquelle le marché est en osmose. Néanmoins, le marché ne constitue pas à lui seul l'environnement de la fi rme; il n'en est qu'une composante. Ceci dit, c'est bien 1 'environnement lato sensu que la firme doit prendre en considération pour s'y adapter ou tenter de le modifier à son profit par l'élaboration de stratégies propre à lui fournir des avantages compétitifs.

Toute organisation est en effet consti tuée pour coordonner et réguler des activités diverses de nombreux acteurs en élaborant des règ les et des procédures qui doivent assurer l'ordre et la stabi lité du fonctionnement de l'organisation. La firme cherche en permanence à réduire ses coûts pour améliorer ses marges, sa rentabilité, gagner des parts de marché sur ses concurrents ; ses choix portent sur les évolutions de l'organisation interne autant que sur les produits et les marchés. On tient donc compte tout autant des variables du marché que celles de l' organisation.

La théorie néoclassique standard : la firme « boite noire»

La firme néoclassique apparaît comme une boite noire «que l'on a longtemps refusé d'ouvrir» (Rosenberg, 1982), elle est principalement vue comme une unité de production, plutôt qu'une organisation interne, un arrangement contractuel ou une institution. La firme constitue l'un ité d'analyse en micro-économie (Kreps, 1990), mais le niveau d'analyse est l' industrie. Les firmes au sein de la même industrie, sont donc vues comme essentiellement

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identiques; elles sont décrites comme ayant les mêmes courbes de demande, les mêmes courbes de coût.

Bien que cette approche néoclassique possède une grande valeur heuristique, elle ne nous apprend rien sur les mécanismes à la base de l'émergence de la firme, sur les modes d'organisation , ni sur certaines caractéristiques fondamentales de celle-ci. Face aux limites de J'analyse de la boite noire, l'élaboration d ' une théorie de la firme s'est progressivement imposée en se déployant dans plusieurs directions. Nous en retenons, pour l ' objet qui nous intéresse, deux approches à savoir la théorie néo-institutionnelle et la théorie évolutionniste.

Théorie des coûts de transaction : la firme « nœud de contrats »

Des interrogations sur l'ex istence et la nature de la firme ont donné lieu à d'autres esquisses « théoriques » rendant compte de la firme non plus en termes de fonction de production ou de fonct ion de coût mais en termes de « nœud de contrats». Avec cette approche, la firme est analysée comme une forme d 'organisation nécessaire pour suppléer aux coûts de transaction induits par la gestion du face-à-face d'individus ayant à échanger des prestations sur le marché. En regroupant et effectuant elle-même certaines activités, la firme réalise des économies sur les coûts de transaction (Coase, 37). La firme est ainsi une alternative nécessaire au marché en tant que mode d ' allocation des ressources et mécanisme de coordination des activités marchandes, sans Je supplanter complètement car, à l'inverse, des coüts organisationnels apparaissent. Remplacer le marché par l'organisation n'est a priori pertinent que lorsque l'économie sur les coûts de transaction reste supérieure aux coûts organisationnels. C'est là la base de départ de la théorie des coûts de transaction. Et comme le souligne Williamson, l'approche contractualiste tente de répondre à la question: « ( ... ) quels objectifs sont servis lorsqu'on remplace l'écha11ge classique du marché - où Le produit est ve11du à u11 prix u11ifor111e à tous sa11s restrictio11 - par des formes de contractualisation plus complexes (y compris des modes d 'orga11isatio11 économiques non-marché» (Williamson, 85).

L ' un ité de base de J' analyse est la transaction. Les difficultés sur lesquelles butent la coordination sont dues à l'incertitude qui environne la transaction et à l' opportun isme potentiel des agents économiques (Brousseau, 1989). C 'est donc pour palier ces difficultés que ces agents, dotés d'une rationalité limitée, créent des arrangements institutionnels : « rra11sacrio11s are assig11ed ro an orga11i:.ed within gouverna11ce structures in a discrimi11ati11g (transaction-cost economizing way) » (Williamson, 81). En l'absence totale d'incertitude, Je marché reste la forme de coordination la plus efficace. Pour un degré d'incertitude donné, Williamson montre que les combinaisons de deux paramètres essentiels vont déterminer les choix des formes contractuelles (du marché à l'organisation) : la fréquence des transactions et le degré de spécificité de l'investissement nécessaire pour réaliser l' offre.

Les hypothèses de rationalité limitée, d 'opportunisme et de spécificité des actifs sur lesquelles elle se fonde reviennent ainsi à faire entrer le temps dans l'ax iomatique du noyau dur de la théorie néoclassique. Admettant la « rationalité limitée» et les comportements opportunistes, la théorie des coûts de transaction met au cœur de son dispositif, à côté de l' incertitude et la régularité des transactions , la spécificité des actifs, y compri s des actifs humains de connaissances. Toutefois, cette approche se limite d 'emblée à comprendre le partage entre ce que fait la firme el ce que la firme fait faire. Ellen 'est donc pas une théorie

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de la productio (cf. tableau 1.). Pour reprendre une formule de Nelson, il s'agit typiquement d'une théorie des interactions qui se focalise sur les comportements des joueurs, et non sur le jeu de la firme contre « la nature». A l'opposé, la théorie de la cohérence prédit que les limites (verticales aussi bien qu'horizontales) des firmes sont, pour l'essentiel, déterminées par la nature des compétences qu 'elle incorpore et par les mécanismes de sélection dans lesquels la firme opère.

Donc, au rebours du modèle microéconomique standard qui ramène la firme à une fonct ion de production, les travaux de R.H. Coase et O.E. Williamson, en ne lisant la firme qu'à travers le prisme des prob lèmes posés par L'échange, ont tendance à négliger sa dimension technique qui n'est abordée que par le biais de la spécificité des actifs». En outre, le comportement de la firme et sa strncture organisationnelle sont simplement vues comme le résu ltat final d ' un processus qui ne peut pas être étudié explicitement. A ce sujet, la théorie évolutionniste (Nelson et Winter, 82) est l'une des théories fondées sur une « changed­oriented analysis » considérant la firme comme une entité qui ex iste dans le temps.

Contrairement à l'approche contractuelle qui considère un un ivers statique d'états de faits , qu i ont entre eux des relations contractuelles (la seule réalité est dans les contrats entre agents li bres), la théorie évolutionniste cons idère la firme comme un lieu où se dérou lent des processus spatio-temporels.

Théorie évolutionniste : la firme « a repository of knowledge »

L ' approche évolutionniste emploie la notion de portefeui lle de compétences des firmes pour étudier les phénomènes de variété des organisations et les mécanismes de sélection (Nelson & Wi nter, 1982). ). Les organisations évoluent et se transforment pour répondre aux soll ic itations et modifications externes et internes.

La notion de compétence constitue en effet l'une des catégories analytiques centrales de la théorie évolutionn iste. L ' organisation réagit à son environnement et s'adapte grâce à ses compétences et ses capacités d'apprentissage (Teece et al., 97; Marengo, 95). L'apprentissage est défini comme un processus fondé sur la répétition et l'expérience accumulée, qu i font que les tâches sont effectuées de mieux en mieux et de plus en plus vite. Ains i une organisation se qualifie et se différencie d'une autre, et notamment dev ient plus performante qu 'une autre, non pas en raison de la qualité intrinsèque de ses facteurs de production, mais par la manière qu 'elle a de les mettre en œuvre (savoir-faire et compétences organisationnell es) . La valeur et la qualité d'une organisation dépendront de sa facu lté à maîtriser ses apprentissages et à mettre en place des procédures (routines) organisationnelles (R.Nelson, S.G.Winter, 82) pour pérenniser ceux-ci .

A l'i nstar du courant standard, la firme évolutionniste est approchée comme une unité de production, mais adopte une perspective plutôt technologique que contractuelle. Sur ce, la firme est considérée comme une unité adaptative avec des capacités techniques et des compétences économiques limitées an matière de prise de décision. Dit autrement, les firmes ne sont pas capables de faire constamment des choix optimaux.

Néanmoins, ce qui fait principalement défaut ici a trait à l'absence de prise en compte des individus (et plus largement des agents économiques) dans J'analyse des

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propriétés des formes organisationnelles. La firme évolutionniste est un assemblage de compétences, pas d ' indiv idus et les accords entre firmes sont des réunions de compétences et pas d 'agents économiques. Mais, comment se matérialisent ces compétences?

Plus précisément, dans la terminologie évolutionniste, la firme est considérée comme un « mécanisme héréditaire » qui transmet ses routines et donc les connaissances accumulées - appréhendées comme ses capacités ou son aptitude à exécuter certaines tâches d ' une période à l ' autre. La firme est donc conçue comme un « bundle » de routines technique, organisationnelle et économique agissant comme un « repository » d'expériences et de connaissances accumulées par la firme tout au long de sa vie. Dans ce sens, le modèle évolutionniste rompt avec le modèle purement fonctionnel sur lequel se fonde la théorie des coûts de transaction , en modélisant explicitement la firme comme « une entité qui existe dans un temps donné et pas seulement comme le résultat efficient d'un tel processus ».

Cependant, bien qu' elle constitue le principal référentiel conceptuel de la notion de compétence individuelle ou organisationnelle, l ' approche évolutionniste définie la notion de compétence comme une capacité à produire la réponse adéquate; elle est à l ' individu tout comme à l ' organisation/ à la firme. Ainsi, on perd la possibilité de d iscerner et le sujet et l'organisation. En outre, cette approche n' accueille pas aisément l'idée d'un indiv idu capable de s' intégrer dans une autre organisation ou structure.

T ableau 1 . Les paradigmes contemporains dans les théories de la firme2 :

Economie Production Echa nge

Ra tiona lité

Economie "W.P. Non-limitée standard Onhodoxy"

Economie Economie des Limitée évolutionniste Coûts de

Economie des transaction compétences NEI

A l' appui de ces deux corpus, n'est-il pas nécessaire de compléter la perspective de production (ou « knowledge perspective») de l'approche évolutionn iste par la perspective d'échange de la théorie des coûts de transaction ? Comment réunir donc la « production ou knowledge perspective » et la perspective d'échange dans un même modèle?

3. Une vision de la firme basée sur les compétences

L' uni vers de cette approche s'était considérablement é largi, faisant l 'objet d'intérêt de différentes disciplines, qui abritent e lles-mêmes de nombreux courants, avec pour commun dénominateur l'étude des liens entre innovations et performances. En ce sens, le concept de compétence est porteur d'éclairages fruc tueux sur la compréhension des mécanismes au sein de l'organisation. Loin d'être exhaustive, cette investigation sur la compétence et les inten-ogations qui y sont liées se borne à l'étude de la nature des

2 Ce tableau se rélère aux travaux de Winter S.G. ( 1988).

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compétences, des processus de construction des compétences, des rapports entre compétence et organi sation , et ceux entre compétences et organisation innovante.

Quels sont les hypothèses de base de la théorie moderne « competence-based ou resource­based » ?

3.1. Hypothèses de base

A l'appui des deux approches néo- institutionnelle et évolutionniste, nous constatons un certain nombre d'hypothèses communes. La combinaison des hypothèses de rationalité limitée, d'incertitude, d'irréversibilité, de sélection débouche sur l'idée de dépendance de sentier et de pluralité des formes de coordination.

1) Rationalité limitée: La firme n 'est pas le siège d'une rationalité absolue, parfaite du type homo oeconomicus, mais d'une rationalité limitée. Limitée, au sens de Simon, par suite de la difficulté des acteurs à stocker et à traiter l'information de manière fiable en raison du niveau des connaissances et des techniques, de l ' insuffisance des moyens matériels et immatériels, de la restriction du champ des mémorisations et des anticipations et de la vitesse de réaction. Pour pre ndre des décis ions3

, les agents économiques retiennent l'option qui leur permet d 'atteindre un certain seuil de satisfaction au sein d'une gamme préexistante d'actions possibles (S imon, 47, 82).

Par rapport au modèle standard, on abandonne donc l'idée d 'optimisation. La décis ion est décrite comme un processus, dans lequel quelques options seront étudiées et une action sera entreprise lorsqu 'elle atteint à un niveau satisfaisant(« sarisfecing »). L'hypothèse comportementale principale de la théorie des compétences de la firme est donc basée sur le concept de rationalité limitée (Winter, 88). Bref, d'une vision statique de l ' organisation et d'une approche de l'optimisation quantitative, simple et rationnelle, il faut passer à une vision dynamique à rationalité limitée, avec des solu tions satisfaisantes, non répétitives.

2) Incertitude: Tous les paramètres de l'entreprise et de son environnement ne peuvent être connus parfaitement. Les entreprises prennent des décisions pour des actions futures sans une connaissance complète et certaine du présent et des évolutions possibles. Leur choix intègrent toujours des aléas, des incertitudes et donc des risques. Dans une telle situation d'incertitude, la mise en place de règles organisationnelles joue un rô le crucial dans la coordination permettant ainsi de réduire l'incertitude, de la gérer et d'en contrôler les conséquences.

3) Irréversibilité4: L'existence de l' irréversibilité contribue à expliquer les d ispositifs de

coordination. Cependant, elle ne joue pas le même rôle dans les deux approches, puisque leurs prob lématiques à ce sujet sont relativement différenciées. Dans la théorie néo­institutionnelle , l' irrévers ibili té se manifeste notamment à travers le notion d ' actif spécifique (Williamson , 75, 85). Il s' agit d ' investissements spécifiques, matériels ou non (confiance,

.~ R.M. Cyen et J.G. March ( 1963) font admellre que la firme n'est plus une firme-point, e lle constitue plutôt « une organisation me llant aux prises des groupes aux intérêts multiples, et dans laquelle les processus de prise de décision passent des séries de médiations. » (Weinstein et Corial, 1995). •1 Arro w et Fisher ( 1974).

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réputation), qu'il n'est pas possible de redéployer sans coûts dans d'autres usages alternatifs et les situations changent radicalement avant et après que ces investissements ont été réalisés. Dans lapproche évolutionniste, l'irréversibilité caractérise tout autant certains investissements que le système économique due aux connaissances. En effet, la création de nouvelles connaissances et leur diffusion présentent des caractéristiques d'irréversibilité, car il est impossible de désinventer et de désapprendre. Ces effets de création de connaissances et d'apprentissage(« leaming by doing, using », etc.) renforcent le coût d'un redéploiement de certains investissements.

4) Sélection : Les propriétés du système dépendent fondamentalement d'un mécan isme qui « sanctionne» les choix des agents . Les évolutionnistes analysent la manière dont les acteurs bénéficient au cours d ' un processus de sélection5 des leçons des étapes de sélection du passé. En ce sens, la firme est cons idérée comme un système d'apprentissage. A ce sujet, la théorie néo-institutionnelle adopte une conception d ifférente : un processus de sélection consiste à éliminer les formes de la coordination inefficaces, celles qui consomment trop de ressources. Les agents cherchent en effet à minimiser les coûts de transaction (et de production) et ce compte des caractéristiques des transactions qui représentent la nature des difficultés de coordination ; et l'environnement institutionnel, qui constitue à la fois des contraintes et des points d ' appu is pour la construction des structures de gouvernance.

5) Dépendance de sentier : L'idée de dépendance de sentier est au centre de l'analyse évolutionniste des processus de sélection et d'apprentissage. Dans la théorie insti tutionnelle, l'idée de dépendance de sentier découle des caractéristiques de l'environnement institutionnel affectant les choix des agents économiques. Les marges de manœuvre des agents économiques, de même que les poss ibilités d'évolution des systèmes, sont étroitement dépendantes de leur passé.

C'est donc sur ces hypothèses que s'appuie l' approche par les compétences.

Tableau 2. L'émergence de la compétence au sein des théories de la firme

Approche Unité Néoclassique Evolutionniste Néoinstitutionnelle Competence-based d 'analyse

Firme X X

Transaction X

Compétence X X

3.2. L'émergence de la question des compétences au sein des théories de la firme

5 Chaque organisation économique« implements a particular balance betwcen mcchanisms of variation and mechanisms of selection on what constitutes the organizational learning basis » (Cohendet et Llcrena, 98).

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En économie, la notion de compétence se rencontre dans de nombreux champs de l'analyse économique: approche évolutionniste, les travaux sur la fonction entrepreneuriale, les théories du capital humain et de la croissance endogène. Ces analyses offrent différentes lectures de la notion de compétence et font valoir la firme comme terrain privilégié d'étude. Les premières analyses économiques sur les compétences se sont positionnées par rapport au marché du travail, prenant notamment en considération la dimension individuelle des compétences: théorie du capital humain, l'approche par les marchés internes du travail , la théorie des conventions et les approches en termes de qualification collective.

L ' intégration de la compétence dans Je collectif, son incorporation dans des dispositifs organisationnels (Callon, 86) est au centre de cette étude. L 'analyse porte sur les questions de la coordination sous-jacente entre l'organisation et son environnement. Une approche des compétences collectives est associée à la considération de la firme (l'organisation) comme dépositaire et productrice de connaissances et ayant des compétences spécifiques.

L'approche de la firme fondée sur les compétences s' inscrit en effet dans un champ pluridisciplinaire. Trouvant ses origines dans les travaux de A. Marshall ( 1920) et ceux de E. Penrose ( 1959), cette approche peut être appréhendée comme une tentative de créer une synthèse de la théorie des coûts de transactions et de la théorie évolutionniste de la firme. Elle apparaît comme une tentative d'intégrer la perspective d'échange de la théorie des coûts de transaction avec la perspective de production de la théorie évolutionniste (S. Winter (l 988) et Dosi, Teece et Winter (1990) ). En tant qu'organisation complexe, la firme devrait être considérée comme une unité de production mais aussi analysée à partir de perspectives organisationnelle, contractuelle, et une « Knowledge perspective».

3.3. Vers une théorie des compétences de la firme

La notion de compétences remonte aux travaux de Selznick ( 1957) et Penrose ( 1959) respectivement sur la rel ation entre les « compétences distinctives» et la croissance de la firme. L' approche en termes de compétences a pris trois voies connexes : l ' approche évolutionniste de la firme, l' approche de la compétence économique et l'analyse des capacités dynamiques. Ces approches permettent d'envisager une théorie émergente des capacités dynamiques de lafinne (Teece, Pisano et Shuen, 97 ; Nelson , 91) ayant pour objet l'étude de la structure, la stratégie et les « core competencies ».

La théorie évolutionniste de la firme : Les évolutionnistes définissent les routines comme des sché mas de comportements réguliers, stables, des règles de décision spécifiques à la firme, ayant trait à des domaines techniques, productifs et stratégiques. Les routines déterminent les comportements des entreprises mais ne peuvent être comprises que par référence au processus (antérieur) qui les a modelées. Elles constituent la mémoire organisationnelle. L'accent est donc mis sur l'aspect différencié, spécifique des compétences à la firme (Nelson, 1992) voire à l'industrie. Les compétences combinent des aspects individuels et collectifs, technologiques et organisationnels et fournissent une mesure de la capacité de l'entreprise à résoudre des problèmes (Paulré, 97a; 97b).

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L 'analvse de la compétence économique où la firme est considérée comme un bloc de compétences (Peteraf, 93) , une équipe compétente (« competent team ») (Carlsson et Eli asson , 94; Pelikan, 89) ayant ses propres connaissances tacites, et exerçant un effet de levier sur la productivité de tous les fac teurs à partir de la sélection et de la répartition des moyens de production.

L'analvse des « organizational capabilities » où les économies d 'échelle et de variété sont de nature organisationnelle, elles sont fondées sur les connaissances, l'expérience qui permet d'exploiter Je potentiel de progrès technique. Ces capacités constituent des barrières à l'entrée et peuvent être à la base de nouvelles activités (Chandler, 92).

L'analvse resource-based: La firme fonde de plus en plus ses avantages compétitifs sur ses ressources de base (Barney J .W., 86; 91 ; Wernerfelt, 84) en management, en hommes , sur ses compétences foncières (Teece, 88), sur ses « core competencies » (Hamel et Prahalad, 90). Outre l ' information qui constitue la matière première primordiale de toute entreprise, une variable capitale pour se différencier, l'entreprise mise sur ses ressources techniques et humaines, source essentielle de créativité et d ' innovation.

L'approche contractualiste (NE!) : Cette approche reste muette sur la question de la dotation de la firme en compétences appropriées lui permettant de se différencier et de construire un avantage compétitif (Foss, 93). La firme est assimi lée à un nœud de contrats (Williamson, 90) qui se différencient des contrats ordinaires passés sur les marchés, par une continuité de la relation entre les propriétaires d ' inputs. Ne sont signifiées que des compétences individuelles et non des compétences partagées, socialisées, collectives.

En économie de l'innovation, le thème des compétences y figure en bonne place (Dosi, Freeman et al. , 88). Les compétences sont considérées comme des facteurs d ' innovation. Détenir des capacités d ' innovation permet à la firme d'être plus compétitive, d 'augmenter ses parts de marchés et partant de créer des emplois.

Cette modélisation vise à représenter la firme par ses activités, elles-mêmes constituées de relations, mais aussi par ses compétences. La coordination par activités et coordination par compétences cherchent à allouer les coûts non plus à des produits mais aussi aux activités et aux compétences de la firme. Le passage d ' une coordination par la hiérarchie à un coordination par les compétences (travai l en équipe) nécessite la mise en place de nouvelles organi sations / processus organ isationne ls. C'est la démarche qui émerge dans la littérature sur l' organisation apprenante.

Notons, / 'économie des compétences reste ancrée dans une économie de la production structurée par les références de la fonction de production. La notion de compétence dev ient un moyen analytique de rendre compte de la performance d ' organisation dans un environnement économique particulier. La compétence est le résultat d ' un apprentissage, elle est li ée à l ' activité exercée et au contexte organisationnel ; à l' organisation qui J' accueille. Dit autrement, un ensemble de connaissances qui , couplées à l ' apprentissage de la situation, produiront la compétence.

A l' ins tar du modèle évolutio nniste, la firme est conçue comme un «mécanisme héréditaire » qui accumule des « behavioral patterns » de plus en plus complexes pour une péri ode donnée du temps. Donc, la stmcture organisationnell e d ' une firme n'est plus déterminée par ses coûts de transaction, mais plutôt par ses compétences ou capacités

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accumulées ( qui ne devraient pas être considérées comme des données exogènes). Les connaissances ou compétences de la firme peuvent être accumulées tout au long de sa vie, à travers des processus d ' apprentissage. De tels processus d'apprentissage sont « path dependant » et irréversibles.

Comme l' innovation , les connaissances et les compétences de la firme devraient être considérées en tant que «flux à piloter et non pas en tant que stock à conserver » : i 1 s'agit d 'évaluer ses connaissances et ses compétences, les enrichir, les valoriser, les protéger et les développer. Une mesure de ces variables intrinsèques à la firme semble nécessaire afin de m ieux gérer les changements nécessaires dans la structure et la valeur de la production. Toutes ces actions et ces procédures doivent être organisées, coordonnées et gérées car e lles, génèrent de la valeur, des bénéfices, mais auss i des coûts.

4. Dynamique des compétences dans les firmes innovatrices

La réflexion s'est cristallisée sur le rapport entre compétences et innovation et performance. L 'objectif est d ' approfondir des questions ayant trait à la nature et aux mécanismes d'accumulation des connaissances et de construction des compétences. Par aill eurs, cette étude s'interroge sur le rôle des compétences dans la dynamique organisationnelle et les interactions entre compétences et innovation

4.1. Les mécanismes d'accumulation des connaissances et des compétences

Dans ce cadre, nous soulignons le rôle principal que jouent les compétences au sein de la firme ainsi que la nature et la dynamique d'accumulation des compétences. En effet, les « core competencies » sont considérées comme les compétences fondamentales de la firme (Prahalad & Hamel, 90) ; elles sont caractérisées par les d imensions suivantes :

La nature de compétence définie sur la base d ' un ensemble de critères des connaissances (Winter, 1987) : savoir tacite versus savoir codifié ; savoi r observable versus savoir non-observable, e t savoir articulé versus savoir non-articu lé.

Les types de compétence ( Carlsson & Eliasson, 1994) : compétences stratégique, organ isationnelle et fonctionnelle.

Bien que les sources de création indiquent l'ori gine des compétences, les processus qui peuvent m1t1er la création de nouvelles compétences constituent encore une «boîte noire» que certains ont tenté d ' ouvrir (Marengo, 94; March , 91).

4.1.1 Capacités d 'apprentissage et d'absorption des connaissances

La firme6 est conçue comme dépositaire et productrice de connai ssances et savoir­fa ire spéc ifiques. C'est une entité capable de collecter, d ' interpréter et d'exploiter les informations où l' information comporte un ensemble de savoirs et de savoir-faire hétérogènes, déjà mis en fo rme par les acteurs qui les ont produit. La fim1e n'étant plus ass imilée à une « boîte noire» qui absorbe l ' information et produit des outputs, elle cherche plutôt à organiser et gérer son environnement par le repérage d'informations pertinentes et

6 Fransman (94) considère la firme comme« a processor of knowledge ».

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l'association avec des acteurs externes. De tels processus d'interaction entre compétences internes de la firme et ses relations externes permettent d'acquérir et d'intégrer les apports extérieurs, par Je biais de processus d'apprentissage organisationnel mis en oeuvre.

Les compétences sont ainsi «des états de connaissances intégrées, souvent exposées à des changements» . D'où la nécessité de traiter ces compétences dans une perspective de changement. La notion de compétence permet ainsi de combiner Je degré élevé de changement à la complexité des interactions (Dierickx et Cool, 1989). Au-delà de la dynamique de développement des compétences, nous soulignons l'importance des savoirs et des règles qui gouvernent les relations de la firme avec son environnement. La compétence ne se restreint donc pas à la dotation en facteurs ou encore à la détention et à la capacité d 'accès à l 'information, mais c 'est le produit des efforts antérieurs accomplis par la firme pour se constituer un capital humain , informationnel et organisationnel lui permettant ainsi de se différencier sur Je marché et partant de se procurer un avantage compétitif sur ses concurrents.

Or, compte tenu de l'incertitude, la firme est amenée à construire une base de compétence flexible, lui permettant de baisser les temps de réponse et de s'orienter vers de nouveaux marchés. A défaut de ressources fondamentales, la firme se trouve astreinte de développer de nouvelles compétences et plus spécifiquement de nouveaux skills et de nouvelles connaissances pour survivre.

Ainsi , dans un contexte à géométrie variable, la firme ne peut se contenter d'utiliser et de maintenir ses connaissances et ses compétences actuelles ; elle cherche à progresser par un processus continu et permanent d'apprentissage, de formation et de collecte d'informations. L'apprentissage traduit l'ensemble des actions dans lesquelles s'engage la fim1e pour utiliser ou produire des connaissances. C'est un processus de renouvellement permanent des formes de compétences mobilisées dans une activité particulière: il s'agit tout autant d'abandonner certaines compétences que d ' en produire de nouvelles. L ' apprentissage en tant que processus permanent d 'expérimentation entraîne un engagement irréversible. Outre son aspect dynamique, la notion d'apprentissage souligne le délai entre les décisions de la firme et ses actions.

Sur cette base, la firme est une organisation dans laquelle le savoir se forme, se reproduit, se modifie mais aussi disparaît. la notion de compétence implique « non seulement un savoir-faire lors de la résolution de problèmes portant sur le rapport de la firme à son environnement, mais aussi un savoirJaire et des règles régissant les rapports internes à la firme» (Marengo, 1995). C'est une organisation qui apprend en s'inscrivant dans un processus d 'apprentissage y compris les processus de sélection des savoirs par lesquels la firme désapprend. Donc, outre les relations entre les acteurs, s'y ajoute le rô le des processus cognitifs dans la construction dynamique des connaissances et dans le développement des compétences.

A noter, par connaissances, on entend les informations construites par un ensemble d ' acteurs et des connaissances produites pour l'activité. Chaque activité produit et résout des problèmes, elle utilise pour se faire des informations prises dans l'environnement et en produit d'autres. Les acteurs doivent passer par des épreuves d'explicitation de leurs propres connaissances et d'incorporation de connaissances produites ou maîtrisées ailleurs. Les interactions entre compétences différentes se traduisent par une production de connaissances taci tes et codifiées, selon un processus de cristallisation (Nonaka et Takeuchi, 94,95). Les

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bénéficiaires de cette cristallisation sont à la fois les compétences ayant interagi mais aussi l ' organisation toute entière. En effet, les différents membres de la firme collaborent ensemble afin de drainer, mettre en forme et construire l ' information; les interactions entre les différentes compétences favorisent la formation , la reproduction et la distribution des connaissances au sein de l ' organisation. Ces connaissances s'incorporent et se cristallisent dans des procédures ou dans des relations.

Dans ce cadre, on suppose que c ' est l'organisation toute entière qui apprend. Sa capacité d ' apprentissage dépend de ses capacités à mettre en forme et à faire circuler les informations en son sein. Toutefois, l ' acquisition de savoirs à l'extérieur est contrainte par ses savoirs accumulés antérieurement ; néanmoins, c'est le savoir acquis à l'extérieur qui, à travers un processus de stratification et de mémorisation, a enrichi la base de savoirs (« knowledge base ») de la firme (Cohen & Levinthal , 1990).

Afin de faciliter l'acquisition des nouveaux savoirs, ces derniers doivent être liés a ses savoirs antérieurs. Bref, la firme doit combiner ce qu'elle peut acquérir de l'extérieur avec son capital technologique interne, afin de mener à bien le processus d'innovation. Les savoirs acquis antérieurement par la firme déterminent sa capacité d 'absorp t ion. On identifie ainsi deux propriétés de la capacité d ' absorption : son caractère cumulatif et son rôle dans la fonnation des anticipations quant à l'évolution des technologies. On retrouve ici le mécanisme de dépendance de sentier. Cependant, l'imperfection de l ' information combinée à la rationalité limitée des agents souligne la dimension sélective des capacités d'absorption et de production de l ' information de la firme.

Le rôle joué par les capacités organisationnelles accumulées dans le temps, et par l' accumulation des connaissances (Chandler, 1992) . Les compétences dynamiques combinent la capacité à œuvrer dans certains domaines (Teece & al., 1990) et le fait d'exceller dans les processus d ' apprentissage qui y sont relatifs. Les choix des agents dépendent de leur compétences . Elles sont de ce fait assimilées à des guides de l'action.

4.1.2. Une vision évolutionniste des mécanismes d'accum ulation des connaissances

L ' accumulation des compétences est liée à la création de nouvelles connaissances. L ' interrogation porte en effet sur la nature des connaissances requises. La firme se trouve ainsi face à un arbitrage entre : explorer de nouvelles opportunités et s'engager dans la création de nouvelles connaissances ou exploiter les opportunités existantes et combiner les certitudes de manière nouvelle (March , 91. Marengo, 93).

L ' accumulation des connaissances suit un cheminement (une trajectoire) : les connaissances sont produites par des processus de recherche et de sélection suivis d ' une adaptatio n à la base de connai ssances de la firme lui permettant ainsi de créer de nou velles compétences. La création de connaissances est fondée soit sur la producti on soit sur la reproduction. Au ni veau de l'accumulation des connaissances, la firme procède à un arbitrage entre : l' exploration, l 'exploitation des connaissances.

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1) Processus de search : L'objectif d ' un processus de recherche est d ' identifier les connaissances utiles ; ces dernières existent soit dans la base de connaissances de la firme soit à l'extérieur. Au niveau interne, le processus de recherche porte sur les routines , les compétences et connaissances existantes ; alors qu ' au niveau externe la recherche examine les connaissances produites et rendues disponibles par d'autres firmes.

2) Sélection et adaptation : Ayant cherché les alternatives, la firme doit choisir par ailleurs parmi des alternatives multiples et concurrentes, celle qui s'adapte le mieux à sa base de connaissances. Toutefois, la complexité et la variété des alternatives rend difficile l'évaluation du mécanisme de sélection (Nelson et Winter, 82) et le classement les options. Bref, le processus de search conduit à l'accumulation de nouvelles connaissances, celles-ci sont ensuite sélectionnées, triées, classées.

Cependant, le processus d ' accumulation des connaissances est cumulatif et « path dependant » . La dépendance de sentier contraint les options de la firme quant aux développements de sa base de connaissances.

L'arbitrage : Exploitation/ Exploration des connaissances

Selon March (9 1 ), l'exploitation exprime le raffinement, choix et sélection ; alors que l'exploration englobe la variation , prise de risque, expérimentation, découverte, innovation et la recherche. Et comme le sou ligne Marengo (93), «the trade-off between communality and diversity of knowledge is also strict/y connected to the trade-off between exploitation and exploration ». L 'exploitation et l'exploration (March, 91) représentent les divers résultats d ' accumulation de connaissances en termes de production ou bien de reproduction des connaissances (Kogur et Zander, 92).

Les résu ltats du processus de production de nouvelles connaissances basé sur la recherche externe est appelé «exploration » (concerne les nouvelles possibilités) alors que l'exploitation (concerne des certitudes anciennes) se réfère à la reproduction de sources de connaissances existant dans la base de connaissances propre à la firme. La reproduction est basée sur les connaissances existantes conduisant à des changements incrémentaux tandis que le processus de production conduit à des connaissances complètement nouvelles où le processus de search est un problème de découverte menant à la l 'expérimentation à cause de l'incertitude.

Si , dans le long terme, la firme s'appuie seulement sur des connaissances internes, la base du renouvellement et donc de su rvie de la firme disparaît dans le temps. Certes, la facilité d'adaptation assure des solutions rapides, certaines et à bas coûts , mais la ré­uti lisation des connaissances existantes induit un apprentissage routinisé (« routinised leaming » ), la firme introduit des changements mineurs et le rythme de renouvellement de sa base de connaissances est plutôt lent.

Sur le long terme, l'exploration conduit à la diversification et à des accroissements qualitatifs dans la base de compétence, et donc à des frontières plutôt fragiles de la base de connaissances. La production de connaissances élargit l'étendue des nouvelles activités de la firme et l'apprentissage est moins « routinisé » que l'exploitation. Néanmoins, l'exploration de nouvelles opportunités fondée sur l'apprentissage expérimental est un processus de recherche coûteux, incertain , et plus difficile à adapter au sein de l'organisation impliquant éventuellement une diversité dans les connaissances. Bref, la recherche continue de nouvelles

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opportunités externes entraîne un risque élevé et une base de connaissances dispersée, qui au cas extrême mettra en danger le fondement même de 1 'avantage compétitif.

Comparée à l'exploitation, l' exploration est systématiquement moins certaine, « time consuming »et moins faci le à adapter au sein de la firme : «exploitation is thus more certain, but exploration enables survival through variation and renewal » (March, 91 ).

En somme, l 'avantage de l 'exploration est la création de variation pour induire une performance plus élevée; comme opposé à l'exploitation qui réduit le risque de recherche mais peut également affaiblir la position compétitive de la firme dans le temps. C'est en parvenant à équilibrer entre exploitation / exploration, où risque et nécessité de renouvellement sont prises en considération que la firme renforce les liens entre connaissances internes et connaissances externes afin d'assurer la performance la plus élevée dans le long terme.

Mais, quels liens existent-ils entre la production de connaissances et l 'accumulation des compétences ?

4.2. La Base de Compétences de la firme

Comment les compétences sont-elles accumulées ? Pour répondre à cette interrogation , nous procédons à une combinaison des types de compétences aux processus d'accumulation des connaissances . Nous montrons, en effet, que chacun des processus de : search, sélection et adaptation peut être lié à un type particulier de compétence : stratégique, organ isationnelle, fonct ionnelle et adaptative.

4.2.1. Vers une typologie 7 des compétences :

Compétence stratégique (sélective) : Les choix devraient être effectués à tous les niveaux par la formulat ion de l'ensemble des «business strategies » (que produi re , où vendre, quelle technologie utiliser, etc.), par le développement d'une structure organ isationnelle, la sélection du personnel et de l' information, la formation e t les systèmes de motivation. La capac ité d ' innovation et de création de la firme comme «forme spécifique de sélection» traduit son aptitude à organiser pour produire et saisir les nouvelles opportunités. Autrement dit, la capacité d'innovation détermine « comment la firme réagit avec le jeu d'opportunisme ».

Cette catégorie de compétence soutient le processus de search et de sélection. Toutefois, ! ' initiation d ' un processus de recherche dépend de ! 'évaluation des besoins de la firme en matière de création de connaissances. Une fois les objectifs du projet de R&D sont identifiés, la firme compare les différentes opportunités de connaissances nouvelles. La sélection est donc basée sur ce tri. Plus précisément, le processus de recherche met un output qui sera évalué par la compétence stratégique, cette dernière décidera d'initier ou d'activer le processus de sélection. Néanmoins, l ' inertie organ isationnel le au sein de la firme peut rendre l' initiation des processus plus lente et la « dépendance de sentier » peut contraindre l' ensemble des opportunités.

7 Cette typologie des compétences est principalement fondée sur les travaux de Carlsson (1992) ; Carlsson et Eliasson ( 1994).

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Compétence organisationnelle: Cette compétence modifie les processus d'adaptation et de coordination. L 'adaptation assure la mise en place alors que la coordination organise les connaissances afin de réaliser une certaine synergie entre les connaissances ex istantes et les nouvelles connaissances.

Ces compétences sont largement tacites et difficiles à transférer à d'autres organisations. De telles compétences s'obtiennent par Je biais de processus d'apprentissage organ isationnel (Eliasson, 90). Leur existence et efficacité sont d ' une importance vitale pour les processus de création de connaissances. La compétence est améliorée par l ' apprentissage: elle dépend de la régularité de la compétence adaptative. Ainsi , tout renouvellement de la base de connaissances requiert non seulement des savoir-faire (skills) adaptatifs pour la mise en place de connaissances, mais également des skills pour la coordination du processus . En effet, bien que les connaissances requ ises soient créées, un « slack » au niveau des compétences de coord ination peut entraver l 'utilisation efficiente de ces connaissances.

Compétence technique (fonctionnelle) : Les capacités techniques incluent la compétence de la firme dans tous les domaines de son activité, qu'elle soit définie par fonction (R&D, engineering, production, marketing, service, finance et administration générale), par produit ou par marché. Celle compétence renvoie au management des opérations courantes (concernant Je contrôle de processus de production) au sein de la fi rme. Bref, e lle permet la réalisation des tâches dans les uni tés opérantes.

Une fois Je problème est identifié, les processus de search, sélection et adaptation sont activés. L ' une des barrières fondamentales quant à la résolution des problèmes dans les unités opératrices réside dans Je manque de communication entre celles qui découvrent le problème e t celles qui initient Je processus de création de connaissances.

Compétence a d a p tative pa r le bia is d e processus d ' apprentissa ge : La capacité d'apprentissage d ' une firme est une forme de compétence adaptative. Deux processus sont à la base de cette compétence. Le premier est la capacité à apprendre du succès comme de l 'échec, à identifier et à corriger les erreurs qui conduisent à l'amél ioration de la compétence adaptative e ll e-même. La capacité d'apprentissage sign ifie que les firmes «devraient, à titre d'expérience, être organisées» (Eliasson. 87). Le second, est l' aptitude à améliorer les autres types de compétence par feedback i.e. , l'aptitude à réaliser Je processus et l'aptitude à mieux Je faire. Ainsi. la compétence adaptative est non seulement étroitement liée aux unités opérantes mais surtout e lle permet de mettre à jour chacune des compétences.

Il est ainsi possible de schématiser le rapport entre les types de compétences et les processus d'accumulation des connaissances comme suit:

T bl a eau 3 N ature d es competences et d 1 ·r es processus qui y sont re at1 s

Nature de la compétence Types de processus

Compétence slratégique « Search »el sélec1ion

Compétence organisa1ionnelle Adaptation et coordination

Compétence fonctionnelle Apprentissage

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La firme se fonde donc non seulement sur sa base de connaissances internes (codification) mais aussi sur les connaissances externes (incorporation), mises en œuvre dans la résolution des çroblèmes et la préparation des décisions.

4.2.2. Les processus d'accumulation des compétences

L' accumulation de compétences consiste en deux processus à savoir « competence building » et « competence leveraging »,dérivant d ' une séquence de processus de création de connaissances.

Competence building : Cette compétence crée de nouvelles aptitudes à coordonner et déployer les capacités et les actifs nouveaux ou ex istants et créer ainsi de nouvelles options pour des actions futures permettant à la firme de poursuivre ses objectifs (Sanchez & al. , 97). Competence building est ainsi considérée comme une réponse à la pression du marché ainsi qu ' à la demande interne de nouvelles compétences.

Ce type d'accumulation de compétences est un processus proactif, incertain est très coûteux. L ' une des caractéristiques fondamenta les de la competence building est le degré d'incertitude « there is not necesarily a direct link between action and outcome in the creation of core competencies » (Eriksen et M ikkelson, 96). En somme, La firme doit être capable d'adapter les nouvelles compétences à la base de compétences et d'exploiter les compétences existantes.

Competence leveraging : Cette compétence consiste à appliquer les compétences ex istantes aux opportunités courantes ou nouvelles de marché. Elle requiert une adaptation continue aux changements de l'env ironnement à travers la reproduction de la base de connaissances existante. Il s ' agit d'un changement réactif de la base de compétence (Hunt, 98) . Ce type d ' accumulation de compétence conduit à la spécialisation de la base de connaissances. Cependant, de mu ltiples barrières (Paraest, 1998) peuvent entraver la dynamique d ' accumulation de compétences:

Time compression diseconomics : les firmes sont soumises aux press ions et aux turbulences externes, ce qui requiert de nouveaux skills et des ressources complémentaires. Asse! mass efficiencies : certaines compétences sont plus coûteuses à « build » lorsque le stock d ' actifs préexistant de la firme est faible. Développer de nouvelles compétences requiert de nouveaux savoirs et donc des dépenses élevées. Asset interconnectedness: s i une compétence complémentaire fait défaut au cours du processus d ' accumulation , alors tout l' effort de combinaison des compétences pourrait ê tre inutile . Causal ambiguity : se réfère à l ' incertitude quant à la recherche de facteurs et de processus spéc ifiques nécessaires à l'accumulation d ' une compétence spécifique .

Toutes ces barrières ont un effet sur les décisions de la firme quant à ses engagements dans la « competence building » et la « competence leveraging ».

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A ce niveau , la question serait de savoir si la décision d'explorer ou d ' exploiter est liée aux deux types de processus. Les différents types de compétences dépendent des sources de création de connaissances ; elles sont considérées comme des stratégies de la firme. Sur la base de ces dynamiques de compétence, la firme décide de s'appuyer sur une stratégie d 'exploitation , d ' exploration ou sur les deux types de stratégies. Chacune de ces décisions conduit à différents «behavioral patterns» des firmes : la combinaison des processus de création de connaissances et la dynamique de compétences permet de définir les stratégies comportementales de la firme.

En somme, la stratégie d ' exploration crée une base de compétences flexible et la stratégie d 'exploitation intervient dans les moments de changement et d ' instabilité. Seule une stratégie mixte permet à la firme d'équilibrer entre l'exploitation et l'exploration.

S. Les interactions entre compétences et innovation : les compétences pour innover

De nombreux travaux traitent des compétences en rapport avec l'innovation et le changement organisationnel. En économie, l' étude des compétences en relation avec l ' innovation fait principalement l' objet d ' intérêt de l'approche évolutionniste de la firme et ['approche de la concurrence schumpétér;enne.

Au rebours du paradigme standard dominant qui considère l'innovation ou le changement technologique comme exogènes dans le fonctionnement économique, plusieurs approches reconnaissent l'aspect dynamique des processus d'innovation et de création technologique en les posant comme des objets endogènes dans le fonctionnement économique. A ce propos, l' idée des évolutionnistes (Nelson et Winter, 82) consiste à endogénéiser l'innovation (perspective schumpétérienne), et à en faire le résultat de « processus par lesquels sollt exploüés certains potentiels technologiques » (Gaffard, 90). L ' innovation s ' incorpore dans des produits, des procédés, et est appréhendée comme une trajectoire, un processus.

Le constat est le suivant. L ' innovation dans sa double dimension, technologique et organisationnelle, joue un rôle crucial dans les économies modernes fondées sur les connaissances, elle requiert pour se faire des compétences. Plus précisément, la performance de la firme dépend des compétences mis en jeu dans l' activité d ' innovation. Quelles sont donc les compétences requi ses pour que l'innovation soit performante ?

Abordant tout particulièremen t l' innovation comme la propriété de la firme, ce travail examine la question des interactions entre compétences et innovation à savoir : les compétences requi ses dans un processus d ' innovation (« compétences pour innover ») e t le rô le de l'innovation dans le déve loppement de nouvelles compétences.

A u sein de la firme, l ' innovation se traduit par l' introduction de changements qui lui y sont util es te ls que : la mise e n place de nou vell es méthodes de producti on et des modes d'organisatio n des acti vités économiques qui contribuen t de façon déterminante à la croissance économique. Ces changements, qu ' ils soit délibérés (pour la conquête de nouveaux marchés) ou subis (pour répondre aux conditi ons concurre ntie lles) conduisent la filme à déterminer les compétences fondamentales req ui ses pour que l' innovation ex iste et soit rentable. C'est donc en s' inscri vant dans une s ituati on constante d'apprentissage que la

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firme peut détenir une capacité de création de nouveaux produits et de nouveaux marchés, c'est-à-dire « l'efficacité technologique dans le temps» ( Gaffard, 90) et que l ' innovation peut être considérée comme un output et comme le produit d ' une accumulation de compétences au sein del' organisa:ion.

Cette vision est pertinente pour les industries où l'innovation est une condition de survie de la firme, c'est-à-dire lorsqu 'elle évolue dans un contexte schumpétérien (destruction créatrice) où chaque position dominante sur un marché peut être remise en cause par les innovations concurrentes. L ' idée de création et de dynamique est associée à l'innovation. La création apparaît tout autant sur Je marché (Schumpeter (42) qu'au sein de la firme.

5.1. Innovation, compétences et performance

L'innovation, perçue comme une variable capitale, est devenue un facteur concurrentiel pour l'entreprise. Qu'elle soit de produit, de procédé, qu 'elle soit technique, organisationnelle ou sociale, l' innovation permet de se différencier des concurrents et de capter, temporairement une part de marché. Les entreprises cherchent à produire des innovations de toute sorte, de manière permanente, et non pas à développer aléatoirement des nouveautés plus ou moins applicables. L ' innovation devient un produit fini comme un autre, issu d'un processus de transformation intellectuelle qu ' il faut maîtriser.

L ' innovation requiert des recherches et donc la gestion de l'immatériel devient de plus en plus importante car elle nécessite des investissements lourds, des compétences et du temps, plus difficilement mesurables dans les moyens nécessaires comme dans les résultats, que les autres types de produits. On peut s'interroger sur le sens du déterminisme ; ces innovations obligent-elles les organisations à s'adapter ou bien les nécessaires évolutions des organisations poussent-elles les innovations technologiques? Les relations semblent réciproques et plus ou moins profondes selon le type d ' activité. En tout état de cause, même si une entreprise n' innove pas elle-même, elle est obligée aujourd'hui de gérer l ' introduction, la diffusion, l'utili sation de ces innovations tant au plan stratégique qu 'organisationnel , pour ne pas disparaître.

Ainsi , pour rester viable au milieu de multiples contraintes et sous l'action de différents acteurs aux objectifs parfois di vergents, l'entreprise doit être performante. Une entreprise est performante si e lle est simultanément efficace (qui réalise les objectifs qu'elle s'est fixé) et effic iente (cherche à minimiser l'emploi de ses moyens, elle gère au moindre coût ses ressources). Dans ce cadre, la compétence est une constituante intrinsèque de toute organi sation quelle que soit son acti vité, sa taille, elle est le maillon opérationnel de la pe1:forma11ce recherchée.

La recherche de la performance ne se limite pas à une approche produit-coût/part de marché-prix ; s i bien que la production quantitative d'un produit et les coûts de ce produit ne suffisent plus pour vendre et rentabiliser une activ ité, elle passe en revanche par le pilotage du couple valeur-coût. Ce renversement de la démarche oblige l'entreprise à évaluer et à gérer la valeur qu 'elle apporte dans chacune de ses activités pour aboutir au produit.

s Selon Schumpeter ( 1942), le marché est un lieu de création: à la fonction d' allocation de ressources s'y ajoute celle de création.

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En clair, la démarche n 'est plus de choisir une orientation et d'en déduire les moyens et compétences nécessaires mais d'asseoir des choix stratégiques sur des compétences reconnues et maîtrisées par l'entreprise, sur les connaissances, les savoirs et les savoir-faire qu i permettent de se spécifier sur le marché. Pour se différencier des concurrents, les entreprises utilisent leurs compétences distinctives fondées non seulement sur les coûts mais aussi sur la qualité, le délai, l'innovation pour dégager de la valeur. La valeur de chaque activ ité concerne tout autant les produits que la structure de la firme, ses procédures de fonctionnement, ses compétences.

5.2. Les compétences pour innover9

La capacité d ' innovation de la firme dépend tout autant de sa capac ité à exploiter ses connaissances internes que les connaissances technologiques externes . Sa capacité à recevoir, trier et utiliser des connaissances externes est «une fonction du ni veau technologique déjà atteint par la firme ou de sa capacité à maîtriser les (« funds of knowledge »). Ces connaissances relèvent donc des compétences de base, générales ou techniques, des connaissances scientifiques et technologiques les plus récentes de différents champs, et des capacités à communiquer (shared language) au sein de la firme.

En se référant à l'économie de l'i nnovation , l 'é tude des «compétences pour innover» porte à la fo is sur les aspects cumulatifs (forme d 'apprentissage, capitalisation , actuali sation des connaissances) des processus d 'innovation et d'élaboration des compétences, et sur leurs aspects interactifs (réseau d 'acteurs, espace d 'action, fréquence des échanges).

A ce niveau, il y a lieu de s' interroger sur les interactions qui permettent «la formation et la distribution d'un ensemble organisé de compétences capable de créer, mettre en fo rme et faire circuler l'informa tion ». Les compétences requises pour que l ' innovation soit rentable correspondent aux grandes fonctions du processus d'innovation (par exemple « savoir financer l'innovation », «savoir évaluer ex ante les coûts de l'innovation» , etc.). Mais , rares et coüteuses, complémentai res ou substituables, ces compétences font l'objet de choix stratégiques de l' entreprise, qui doit gérer au mieux son «portefeuille de compétences » .

Au sein de la firme, le processus d ' innovation est diffus faisant intervenir de multiples acteurs, qui y contribuent sur des modes d ifférents. La firme n 'est donc pas le seu l acteur dans l'i nnovation, bien qu'elle y joue un rôle important à savoir le rôle de diffusion et l'effort d ' appropriation qui s 'en suit, sur la base des capacités spécifiques, développées par la firme. Outre la firme, d ' autres acteurs tiennent une place centrale dans le processus d ' innovation tels que: d ' autres entreprises rivales ou non, des organ ismes publics et financiers , des laboratoires de recherche, des fournisseurs, des clients, etc .

S ' appuyant sur les travaux de Tushman et Anderson (86) sur les innovations, on en distingue deux types : celles qui développent des compétences et celles qui les« détruisent ». Les inno vations incrémentales sont « amélioratrices » en ce sens qu ' elles correspondent à la conception de l'accumulation continue des compétences, alors que les innovations radicales fondées sur une rupture avec les solutions connues, la prise de risque et l' exploitation de I' incen ain sont « destructrices » : le processus de destruction des compétences qui en résulte

9 Les« compétences pour innover » font J"objet d' une e nquête me née par le SESSI ( 1998).

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implique que la firme acquière des connaissances radicalement nouvelles au lieu de développer la trajectoire de connaissances exploitée jusqu'alors.

D ' où, les effets en boucle entre innovation et compétences : lors d ' un processus d ' innovation, la firme identifie les compétences requises pour mener à bien ce processus. Les processus de construction des compétences et les mécanismes de construction de connaissances productives s'appuient principalement sur l'apprentissage. Une fois construites et développées, ces compétences conduisent la firme à introduire de nouvelles techniques au sein de l'organisation. Par la même occasion, sur la base de ces nouvelles options, la firme se trouve quelques fois amenée à renoncer à certaines de ses anciennes compétences.

Ceci étant, la mise en rapport entre l 'accumulation des compétences et la capacité d ' innovation de la firme ne doit pas nous conduire à une conception « interna liste » de l' innovation. S'il est patent que les compétences tout comme les savoirs sont obsolètes et que les innovations ont un effet destructeur sur les connaissances, les techniques et les produits qu'elles peuvent déclasser, l'innovation est validée par les parts de marché qu'elle confère à l'entreprise (économie marchande).

5.3. La Dynamique des Compétences : P rocessus de construction

Comment se forment, d isparaissent ou s'i ncorporent ces compétences. La réponse à ces questions supposent la prise ne compte des mécanismes d 'apprentissage, la capacité d'absorption ou de formation des actifs spécifiques.

Pour étudier la question de la construction des compétences, nous rejoignons les théories sur l'apprentissage au sein de la firme (Nelson et Winter, 82; Cohen et Levinthal, 90). L'acquisition des compétences, leur transformation et leur développement font donc l' objet de processus d 'apprentissage. Les compétences des firmes sont accumulées à travers des investissements matériels et immatériels. Les processus dynamiques mis en œuvre dans la construction des compétences sont liés aux effets d'accumulation et à la capacité d ' absorption de la firme.

Aux gest ionnaires, nous empruntons l' idée de renouvellement / a ba ndon d es compétences dés lors que celles-ci s'articulent aux dimensions stratégiques de la firme. En effet, même si l' innovation conduit à la mise en place de nouveau x modes d'organisation, de nouveaux procédés de production, de nouveaux savoirs etc., elle implique par la même occasion des renoncements à des modes organisationnels ou même à des champs technologiques. C'est au sein de ces mécanismes de création-destruction (Schumpeter, 42) que s' insère la problématique des compétences : les compétences se forment, se développent, se renouvellent, e lles sont utili sées ou abandonnées.

Cette dynamique des compétences est « path dependent » : les choix actuels de la firme sont astreints par ceux passés et, de même, restreignent ses choix futur. Donc, outre le fait qu'i l est incrémental, le processus d'acquisition des compétences dépend de la structure atteinte par l'entreprise et est irréversible. Néanmoins, cette irréversibilité ne coïncide pas forcément avec une diminution des degrés de liberté du choix de l'agent, ce dernier peut saisir des occasions afin de « tordre » la trajectoire (Dosi & Metcalfe, 89).

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Figure 1. Les interactions : innovation, compétences, performance

Performance en t

Knowledge

Innovation ____ _,..,.,Avantage compétitif

Apprentissage

Organisationnel Abandon des compétences

Performance en t+l

La construction des compétences suit un processus dynamique, interactif et cumulatif. Dynamique: il s'agit d'un processus de construction et non d'un aboutissement ; interactif en ce sens que tous les acteurs contribuent dans un cadre coopératif et cumulatif : il s'agit d'accumulation et de destruction des connaissances sur un projet donné. Toutefois, les compétences sont difficiles à modifier, ce qui est une source d ' inertie (March, 91 ; Lazaric et Monnier, 95), ces effets d ' inertie organisationnelle conduisent à l ' incapacité pour une firme d'adopter de nouvelles alternatives technologiques en raison d ' une spécialisation excessive.

Deux phénomènes illustrent en effet le caractère cumulatif et interactif des compétences requ ises dans un processus d ' innovation à savoir: l'exploitation des connaissances existantes et 1 'exploration de nouvelles voies visant à renouveler le stock des poss ibles (March , 91 ). La compétence est clone non seulement un acquis mais aussi une capacité de renouvellement et de changement. La firme forme et distribue ses compétences dans un cadre organisé, lui permettant de traiter, explo iter, créer et faire circuler l ' information. La firme s ' appu ie non seu lement sur les informations dont elle dispose, mais surtout sur sa capacité à les explo iter e t à constru ire des compétences à travers ses apprentissages.

Par ail leurs, la construction des compétences dépend des apprentissages, des connaissances et des informations. Elle s'accompagne d'une sélection des savoirs et savoir­faire. Grâce à des représentations, des processus cogni tifs qui assurent la distribution des connaissances et des compétences, la firme peut capitaliser et incorporer les savoirs qui sont souve nt à l' œuvre dans des dispositifs organisationnels. Deux propriétés sont en effet inhérentes à la dynamique des compétences. Les compétences sont soumises à un processus de déconstruction. Pour cette raison les compétences sont soumises en permanence à une contrainte de renouvellement. L ' exigence de renouvellement varie selon les conjonctures. « Ainsi, il y a des moments où la formation des compétences est plus cruciale, où se réalise une sorte de «cristallisation » irréversible pour la dynamique à venir, des conjonctures imprévues qui poussent les agents à prendre des décisions et sont porteuses de connaissances nouvelles » (Foray et al. , 99) .

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6. Compétence, apprentissage et économie des coûts de transaction

Certes, chaque firme a tout intérêt à détenir le plus possible de compétences, toutes choses égales par ailleurs. Toutefois, l' acquisition de nouvelles compétences, le développement et le maintien de son «panier » de compétences impliquent des coûts : en effet, la détention de nouvelles compétences peut d ifficilement se faire sans de nouveaux investissements ou encore un renoncement à certaines des compétences déjà existantes. Ce qu i requ iert l' établissement d'une « hiérarchie du « panier » de compétences». Une telle hiérarchie faisant fond sur un calcul coût/avantage permet à la firme de déterminer les compétences qui lui sont préférables, celles qui sont complémentaires entre elles et celles qui sont substituables et donc redondantes.

Dans cette dynamique d'acquisition et de valorisation des compétences et ressources, l ' apprentissage (Argyris et Schon, 1978 ; Argyris, 1995) occupe une place centrale. Développer de nouvelles capacités d'apprentissage organisationnel et des routines organisationnelles pour garantir le rehaussement du "core competence" et souten ir l'avantage concurrentiel, sont des objectifs fondamentaux. Ce sont les "knowledge-based competencies" qui sont sujets à l'apprentissage et au changement; les connaissances de la firme sont stockées dans ses règles de comportement; ces règles sont formées , préservées et modifiées de façon constante ( Nelson & W inter, 1982). Ces compétences sont appliquées à la résolution des problèmes actuels de la firme. Elles sont de ce fait des actifs spécifiques à la firme. C'est donc à cause de cette spéc ificité ou « tacitness » des connaissances productives qu'une firme peut avoir des difficu ltés à appréhender les capacités d ' une autre firme.

Il s'agit ainsi d ' une organisation apprenante, capable d' intelligence (Senge, 9 1). "l'entreprise apprenante améliore non seulement les connaissances et les compétences de ses membres. mais se construit comme un système d'apprentissage collectif qui apprend en permanence et se transforme pour atteindre ses objectifs."

Ces débats sur l' organ isation apprenante se réfèrent simul tanément aux deux corpus théoriques fondant la théorie de la firme (évolutionniste et contractuelle). On distingue ainsi entre deux types d'entreprises: l'entreprise apprenante (où se constrn it les compétences) trouve ses origines dans la théorie évolutionniste de la firme. L' entreprise qualifiante (où se construit l'employabilité, i.e la capac ité à s'intégrer dans une autre organ isation, à se réadapter à une autre organisation) renvoie, quant à elle, à la théorie contractuelle de .la firme. L'idée de contractualisation sous-tend également la capacité d 'un même agent à conc lure un ou plus ieurs contrats simultanément.

Tableau 4. Théorie Théorie

évolutionniste contractuelle Entreprise Entreprise apprenante qualifiante

Compétences Employabilité

Bref, l'entreprise qualifiante procure des « core competencies » et l'entreprise apprenante développe les compétences. Ainsi, « une e ntrepri se qui ne serait pas apprenante, n'aurait pas de compétence et donc ne pourrait pas fonctionner». Donc, toute entreprise est à la fois qualifiante et apprenante.

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L'apprentissage est une « métacompétence » permettant le déploiement et le renouvell ement des autres compétences de la firme. Or, tout processus d'apprentissage (d'acqu is ition de connaissance et de renouvellement des compétences) implique des coûts : coûts d recherche de solutions, le coût d'un brevet ou le prix d'une acquisition. Ainsi , lorsqu'une firme cherche à acquérir une nouvelle compétence ou rehausser ses compétences actuelles, elle doit prendre en considération Je coût total d'une méthode particulière d'apprentissage. Le coût total CT inclut donc les coûts de transaction CT' (Williamson, 1975) et les coûts directs CD.

CT= CT' +CP

Les coûts de transaction reflètent les coûts associés au processus d'apprentissage; ces coûts déclineront dans le temps. Les coûts directs sont ceux qui peuvent être assignés spécifiquement aux connaissances acquises (i.e. Je prix d'un brevet ou Je reeingineering du temps dépensé pour une invention).

Cependant, en employant régulièrement la même ou les mêmes méthodes, les organisations développeront des routines, lui permettant ainsi de réduire les coûts d'apprentissage, ce qui , par conséquent, entraîne une baisse des coûts de transaction de ces méthodes et permet à l'organisation de "learn how to leam ". Néanmoins, bien qu'une organisation efficace utilise probablement différentes méthodes à différents temps; elle deviendra plus compétente dans une ou deux méthodes.

7. Résumé et Conclusion

Cette étude aboutit à deux conclusions. La première souligne la difficulté de mesure de la compétence. La seconde, d'ordre plus théorique, met l'accent sur la nécessité de repérer les complémentarités utiles entre la théorie des coûts de transactions et la théorie évolutionniste de la firme.

En étudiant la question de la performance à travers les compétences de la firme à s'adapter à son environnement, les approches contractualiste et évolutionniste ont contribué à la construction d'une théorie non structuraliste des compétences de la firme : le choix d'une structure de régulation réduisant les coûts de transaction , le développement d 'actifs spécifiques et la capacité à développer un portefeuille de compétences. Toutefois, en insistant sur la différenciation , la spécificité d' une firme par rapport à ses rivales sur Je marché, l'approche économique competellce-based considère la firme comme un acteur à part entière . Plus précisément, en mettant l'accent sur la production collective et le partage des connaissances. cette approche par les compétences ignore les caractéristiques différenciatrices et les asymétries entre les acteurs qui sont à la base de l'existence de la firme.

Sur ce, en cherchant à caractériser les compétences, on gagne certes en réalisme, néanmoins on bute sur des difficultés de mesure. Sachant que dans le modèle standard, la performance d'une fim1e est expliquée à travers les mécanismes d'allocation de ressources, elle est essentiellement mesurée par la productivité des facteurs.

Sur le plan théorique, ces deux programme de recherche (coûts de transaction et évolutionniste) butent sur des problèmes qui trouvent des éléments de réponse dans l'autre. En effet. ce qui fait crucialement défaut au néo-institutionnalisme a trait aux questions

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cognitives et dynamiques. Le néo-institutionnalisme repose sur une conception trop superficielle des processus de sélection et d' apprentissage et bute sur des questions liées aux facteurs de choix des « structures de gouvernance » par les agents économiques et à l'évolution de ses structures, tandis que la conception évolutionniste ne tient pas compte des motivations individuelles dans son analyse des formes organisationnelles. Donc, par ignorance de la gestion des intérêts individuels par les organisations a du mal à rendre compte des formes organisationnelles nécessaires à l'association des compétences et à l' innovation. Or, comme le montre l ' analyse néo-institutionnelle, la théorie de l'agence ou celle des incitations , les formes organisationnelles sont en large partie construites à partir de ces motivations et les dispositifs organisationnels sont principalement destinés à contrôler les motivations individuelles pour comrôler les comportements.

La démarche consiste à repérer, s'il existe, les intersections entre ces deux théories lorsqu'on aborde un certain nombre de questions, comme l'économie des dispositifs organisationnels (théorie évolutionniste) et l'analyse des changements organisationnels pour la théorie néo-institutionnelle. Ce qui requiert parfois l'articulation de ces deux corpus, tout en restant relativement autonomes, c'est ce qui fait précisément l'objet d'intérêt de l'économie des compétences. A ce stade, il y a lieu de s'interroger sur les possibilités qu'offre cette approche, i.e. sa capacité à expliquer les conditions d 'émergence et de développement des activités industrielles et appréhender la coordination de ces activités par des modes d 'organisation spécifiques. L 'approche en termes les compétences explique en effet l' émergence, la structure et les frontières de la firme par la présence de compétences individuelles et collectives, qui sont préservées et renforcées par l'organisation. La théorie évo lutionniste de la firme représente, dans ce cadre, un sous ensemble fondamenta l de r approche des compétences. Néanmoins, des travaux évolutionnistes récents sur la « cohérence de lafirme » (Avadikyan, Cohendet et Llerena,1995) font recours aux arguments contractual istes pour appréhender lorganisation des activités productives.

Au terme de cette anal yse, f'éco11omie des compétences dynamiques s'oriente donc vers une tentative de synthèse ou tout au moins une conciliation des apports de l'économie de coûts de transaction et de l'économie évolutionniste. Pour reprendre l' expression de Winter S.G. (88) l 'approche « competence-based ou resource-based » est une synthèse de la théorie des coûts de transaction et la théorie évolutionniste de la firme.

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