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UNE APPROCHE POSSIBLE POUR LA SEQUENCE « LA REVOLUTION, L’EMPIRE ET LA GUERRE »
AVANT-PROPOS
Cette séquence (programmée sur deux à trois heures) permet de traiter un des aspects du thème relatif à la Révolution et la guerre. L’objectif est de montrer comment l’armée et les valeurs qu’elle incarne, puisées pour l’esssentiel dans le discours révolutionnaire, finissent par s’intégrer à la société civile, jusqu’à devenir une des composantes de la définition de la citoyenneté sous la IIIe République. Il ne s’agit donc pas de retracer une histoire des batailles de la période révolutionnaire, mais de procéder à l’étude des mécanismes qui conduisent à l’élaboration d’un sentiment d’appartenance à la Nation au cours du 19e siècle. La période privilégiée est celle de la IIIe République. L’événement retenu est la bataille de Valmy. Celui-ci est replacé dans son contexte. Puis, il s’agit d’examiner pourquoi et comment cette bataille a imprégné la mémoire des Français dans la deuxième moitié du 19e siècle à partir d’un extrait de manuel scolaire, d’un panneau pédagogique et d’une planche extraite d’un livre d’histoire destiné à la jeunesse paru à la fin du siècle. Ces documents doivent permettre de montrer en quoi cet événement participe, sous la IIIe république, à la formation du sentiment national jusqu’en 1914. Il s’agit enfin de montrer comment un événement a pu être instrumentalisé à des fins politiques. Au-delà de la IIIe République, la dernière partie de la séquence examine la mémoire de l’événement dans la société actuelle.
E. Schoumacker
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SEQUENCE : VALMY ET LA MEMOIRE DES GUERRES DE LA REVOLUTION
Document 1 : Valmy, 1792
« Le 19 septembre, à la pointe du jour, poursuivant notre route, nous arrivâmes à Saint-Ménehould dans un camp considérable.Le général Dumouriez, qui commandait en chef, vint nous passer en revue ; il fit une petite harangue très énergique, et termina en nous engageant au respect, à l’obéissance, à n’avoir à l’avenir, la bouche ouverte que pour déchirer la cartouche. Nos tentes arrivèrent ainsi que la paille, et nous prîmes notre rang de bataille. De tous côtés, les troupes arrivaient et campaient de suite. De notre camp, on voyait une hauteur. Sur notre gauche, une armée, aux ordres du général Kellermann, occupait une plaine très vaste et faisait face à l’armée prussienne ; son camp portait le nom de « la Lune ». Le 20, à la point du jour, forte canonnade du côté de la Lune. L’amée de Kellermann était aux prises avec l’armée prussienne. Aussitôt la générale fit mettre notre camp sous les armes. Le général Dumouriez envoya plusieurs divisions pour renforcer Kellermann. Dans la matinée, le feu fut on ne peut plus vif ; une grande partie de nos troupes filèrent pour prendre position contre l’ennemi ; nous restâmes en réserve sur une hauteur. Dumouriez était au centre de notre colonne, surveillant le mouvement de l’ennemi, il donnait des ordres en conséquence.La bataille fut extrêmement sanglante et ne se terrmina qu’à la nuit. Cette journée fut honorable pour l’armée française ; l’ennemi fit une perte considérable en hommes et en chevaux ; les Français perdirent aussi beaucoup de monde. Deux caissons remplis de munitions, auxquels un obus de l’ennemi communiqua le feu, causèrent une grande perte en faisant explosion. Le 21, il y eut suspension d’armes. Le 22, on nous fit lever le camp ; la troupe resta en bataille une partie de la journée, sur une hauteur où nous reçûmes la pluie. Le soir, on donna l’ordre de rester dans nos tentes. Les 23 et 24, toute la troupe fut employée à faire des retranchements… Le 25, temps de pluie si affreux que l’on ne pouvait se retirer des boues… Le 26, à la pointe du jour, nous nous aperçûmes que la hauteur occupée par l’ennemi avait été abnandonnée pendant la nuit. Nous y trouvâmes quantité d’hommes et de chevaux enterrés derrière le camp, ce qu avait occasionné une contagion affreuse. Le 27, on fit assembler sur le front du camp toute la troupe……nous vîmes arriver, avec Dumouriez, deux commissaires de la Convention nationale. Ils annoncèrent aux troupes que la France venait d’abolir la royauté, et qu’un gouvernement républicain lui avait été substitué. Cette nouvelle fut reçue avec enthousisasme, aux cris mille fois répété de Vive la République ! Vive Dumouriez ! »
In « Journal du canonnier Bricard, » 1792-1802, Paris, Librairie CH. DELAGRAVE, 1891.
I) LES FAITS
Compétence 1 à développer : Relever des informations (questionnaire) Situer Valmy. Quand la bataille a-t-elle eu lieu ? Quelles sont les forces en présence ? Qui commande l’armée française ? A quoi se résume la bataille ? Quel épisode particulier a retenu le canonnier Bricard ? Est-il en mesure de décrire les phases de la bataille ? Pourquoi ? Comment qualifie-t-il la conduite des troupes françaises ? Pourquoi les Prussiens ont-ils abandonné leur camp ? Que dit le canonnier des pertes ? A quel évènement politique majeur associe-t-il la victoire militaire ?
Engagement des volontaires en 1792. Gouache de J.B Lesueur. Paris. Musée Carnavalet. Document 2 : Quels hommes forment les armées françaises ? - Ce sont des volontaires, donc des civils sans expérience militaire.Ils s’engagent pour la patrie en danger. L’enthousiasme prévaut (peut-être aidé par l’alcool, le versement de la solde et le travail des racoleurs - les sergents
Ce que ne dit pas le texte : Les Prussiens sont inférieurs en nombre, ils sont malades, pris de coliques aiguës, les pertes humaines n’excèdent pas 500 morts.
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recruteurs appartiennent à l’ancien régime- dont un est en uniforme de la Garde nationale, un autre est un racoleur) Compétence 2 à développer : Analyse et capacité à prendre du recul face à un document
Montrer que la bataille de Valmy fut considérée comme un événement majeur de la Révolution. - Une victoire contre la Prusse - L’envahisseur est repoussé - C’est une victoire de la République contre la royauté - C’est une victoire des volontaires contre une armée étrangère de métier - La royauté n’existe plus en France. Une nouvelle période s’ouvre. - Le témoignage du canonnier Bricard associe deux événements différents.
II) LA MEMOIRE DE L’EVENEMENT
(Sous la IIIe République)
Comment l’Histoire a-t-elle géré cet événement ? Montrer que la IIIe république a instrumentalisé à son profit la bataille de Valmy.
Document 3 : La bataille de Valmy dans les manuels scolaires de la IIIe République . Un exemple ici, page extraite d’un manuel : Gauthier-Deschamps, « Petits tableaux d’histoire de France par l’image », Paris, Hachette,1907.
Une iconographie patriotique
Un texte simple et bref
Des figures emblématiques
L’événement principal
Les acteurs de l’événement
Les volontaires Des figures
emblématiques
Un chant pour la patrie
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Compétence 3 à développer : ce que signifie ces images (quel message font-elle passer ? Montrer que la composition ne doit rien au hasard, que l’image a un rôle pédagogique et qu’elle n’est pas destinée à agrémenter un texte mais qu’elle en renforce la portée) Analyse : Quels sentiments cherche-t-on à développer chez les élèves ? Par quels procédés ? Comment sont présentés les volontaires de 1792 ? Leurs chefs ? En une phrase, dites quel est le but recherché par cette leçon d’histoire ? (le texte comprend une erreur historique voulue, c’est la France révolutionnaire qui déclare la guerre à l’Europe et non l’inverse)
La bataille donne lieu à la fabrication d’images stéréotypées destinées à la jeunesse (L’iconographie est pléthorique. Il n’a été retenu ici que deux exemples qui m’ont semblé significatifs).
Représenter Valmy.
Compétence 4 à développer : lire une image
Document 3 : Les troupes acclamant le général Dumouriez lors de la victoire de Valmy, le 20 septembre 1792.
Panneau pédagogique. Auteur : Hérouard. Coll. Part. La composition et lers différents éléments (personnages et indications topiques) sont identifiés par les élèves à l’oral, puis reportés sur le document.
A
B
C
D
E
F
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Document 4 : La bataille de Valmy. Les volontaires de 1792 acclament leur général. Jacques Onfray de Bréville, in « La Tour d’Auvergne », Grand in 4°, Paris, 1902. Coll. Part. Compétence 5 : Comparer deux images sur le mêm sujet. Les deux images reprennent les mêmes procédés : - les couleurs bleu/blanc et rouge dominent - les uniformes hétéroclites - les coiffes militaires au bout des baïonnettes - Dumouriez acclamé et menant ses troupes - Le moulin - L’enthousiasme des volontaires - L’exaltation patriotique
SYNTHESE : Les images valorisent une armée composée de citoyens habités d’un sentiment patriotique et républicain très fort. Il ne s’agit surtout pas d’en faire des révolutionnaires. Les textes accompagnant les images ont pour but d’ imprégner les élèves des valeurs et des principes défendus par les volontaires de 1792 : - Liberté, Egallité, Fraternité - Le devoir de défendre le territoire national - Le sens de la discipline Un même élan soulève les civils, l’image d’une armée populaire formée de héros de tous âges et de toutes conditions, venus de toute la France. Ils sont des hommes exemplaires. Ils incarnent l’unité autour du drapeau. Valmy, c’est la mobilisation de toutes les énergies d’un peuple en armes où les chefs donnent l’exemple. C’est le triomphe de l’ardeur combative sur la science militaire apprise. Par conséquent : une armée démocratique aura toujours raison d’une armée de métier (penser au service militaire depuis 1905)
Ces objectifs ont-ils été atteints ?
Il semble que oui d’après la photographie. Procéder à la lecture de la photographie. Certaines « poses » rappellent les volontaires de 1792.
Document 5 : Paris, août 1914. Les troupes défilent. Départ pour la guerre.
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Travail personnel pouvant être donné à l’élève: Pourquoi ? (déclaration de guerre de l’Allemagne, les provinces perdues etc….), cela permet de renforcer la contextualité de « la leçon d’histoire » (document 3).L’objectif est de faire des citoyens de soldats dévoués à la patrie.
III) VALMY AUJOURD’HUI
La mémoire de Valmy aujourd’hui. Quels enjeux ?
Document 5 : JOURNAL LES ECHOS DOMINIQUE CHARTON DE NOTRE CORRESPONDANT À REIMS.
Valmy : une révolution touristique en Argonne le 19/07/2010.
La roue tourne pour Valmy. Après la reconstruction du moulin abattu par la tempête de décembre 1999, un centre d'interprétation historique assez high-tech de 2 millions d'euros doit ouvrir ses portes en 2012. De là, les visiteurs se verront proposer une palette d'équipements, de la base de canoë-kayak au centre de remise forme. Comme toute révolution, le chantier a débuté par une démolition en règle. A quelques centaines de mètres du moulin, la modeste maison du meunier a disparu en juin dernier pour faire place à un ambitieux projet de 2 millions d'euros : la construction, en souterrain pour préserver l'intégrité du plateau, d'un centre d'interprétation historique. « L'objectif est de faire revivre l'émotion de Valmy grâce aux nouvelles technologies du son et de la lumière », explique Bertrand Courot, maire de Sainte-Ménéhould et président de la communauté de communes. « Du Paris de la Révolution jusqu'à la bataille de Valmy, les visiteurs déambuleront dans les couloirs du temps sous parois vitrées. Un système d'hologrammes s'activera à leur passage. Une projection d'azote simulera même le brouillard de la bataille », poursuit le premier magistrat, qui ne nie pas
« l'inspiration Futuroscope » du projet, conçu par l'architecte parisien Pierre-Louis Faloci. « Le visiteur pourra se dire : Valmy, j'y étais », promet Bertrand Courot. … « Valmy est un site inexploité. Nous voulons passer d'un tourisme de cueillette à un tourisme de produits consommables », explique le maire, tablant sur une fréquentation d'environ 20.000 personnes par an, nécessaire à l'équilibre financier du projet. « Je suis assez optimiste. Il y a déjà beaucoup de monde à Valmy, alors qu'il n'y a rien ». Le 220e anniversaire de la bataille de Valmy en 2012 fournit la date idéale pour inaugurer cet ensemble d'équipements touristiques sur lesquels les élus argonnais fondent beaucoup de leurs espoirs économiques. Bertrand Courot arpente les réseaux d'affaires de Champagne-Ardenne pour promouvoir Valmy, espérant attirer dans la foulée quelques entrepreneurs sur les zones d‘activités que la Communauté de communes de Sainte-Ménéhould aménage le long de l'autoroute de l'Est. Le moulin de Valmy, entièrement détruit pendant la tempête de 1999, a été reconstruit en 2005, plus conforme encore à celui d'origine. – DR
Document 6 : 1er Bataillon de Gardes Nationales Volontaires du Haut-Rhin (de 1988 à 1994) Groupe de reconstituants à Valmy en 1992
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Les élèves s’interrogent sur la gestion du patrimoine historique. Valmy : un lieu de mémoire ? Un fait historique revisité : - La mise en valeur du patrimoine - Une opération commerciale - Valmy intégré dans un circuit touristique - La dimension spectaculaire est privilégiée : faire revivre l’événement aux visiteurs, il faut donner au visiteur le sentiment d’y être. - Le côté spectaculaire et pédagogique à la fois sont privilégiés par des reconstitutions dynamiques.
Un certain nombre de questions peuvent être posées puis débattues à partir des expressions suivantes (en tenant compte du niveau général de la classe) :
« Un centre d'interprétation historique assez high-tech »
« Passer à un tourisme de produits consommables »
« Un site historique intégré à une série d’équipements touristiques »
Les élèves peuvent s’interroger sur les aspects positifs ou néfastes du projet annoncé.
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Cartographie militaire.
Source : cartes 1 et 2, W. Sernam- J.P Bertaud : « Nouvelle histoire militaire de la France (1789-1919) », Fayard, Paris, 1998. Le moulin de Valmy restauré. (Ressource numérique)
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Une conclusion possible.
Eté 1792 Eté 1914
Eté 1992
BIBLIOGRAPHIE
Christian Amalvi : « Les héros de l’Histoire de France-recherche iconographique sur le panthéon scolaire de la troisième République »,Regard/Histoire Coll., Paris, 1979 Christian Amalvi : « De l’art et la manière d’accommoder les héros de l’Histoire de France- De Vercingétorix à la Révolution », Albin Michel, Paris, 1988 Claude Billard Pierre Guibert : « Histoire mythologique des Français », éditions Galilée, Paris, 1976. W. Sernam- J.P Bertaud : « Nouvelle histoire militaire de la France (1789-1919) », Fayard, Paris, 1998. « Atlas historique de la Révolution française », Paris, EHESS, 1989. Gauthier-Deschamps, « Petits tableaux d’histoire de France par l’image », Paris, Hachette,1907. « La Tour d’Auvergne, premier grenadier de France » par Montorgueil. Collection d'Albums Historiques. Editions Boivin et Cie: 1902.
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