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XOOANG CHOI XOOANG CHOI

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XOOANG CHOIXOOANG CHOI

Solo Exhibitions

2014The Blind for the Blind - Galerie AlbertBenamou. Paris

2013 Fake Plastic Trees, SPACE CAN & Old House, Seoul

2010 ISLETS OF ASPERGERS, DOOSAN Gallery, Seoul

2009 The human emotion unveiled, galerie Albert Benamou, Paris

The Pruritus, Dukwon gallery, Seoul

2008 Solo Show, Gallery LVS, Seoul

2009 Solo Show, Galerie Albert Benamou

2010 Solo Show, Galerie Albert Benamou

Group Exhibitions & Art Fairs

2015«Illusion and Fantasy» Musée National d’Art Modern et Contemporain, Séoul

10 Février - 6 Mai 2015

2008 From Korea, ArtSeasons, Beijing

55 Contemporary Artsits selected by the Critic, Hangaram Art Museum, SeoulFrom Korea, ArtSeasons, Singapore

The Battle of Taste, Part II, Sangsangmadang, Seoul

2007 BBEULJIT, Alternative Space ChungJeongGak, Seoul

The Vegetative State, Gallery LM, SeoulCritical Mass, KwanHoon Gallery, SeoulNeo Utopia, KwanHoon Gallery, Seoul

Berlin Art Fair, Alexander Oak Gallery, Berlin, Germany

2006 The Vanitas, Espacesol, Seoul

The Shopping, Alternative space Kyul, Che-juMedia Scene in Seoul - Merz’s Room., Seoul Museum of Art, Seoul

Lilliput in me, Mushrom Arts, New YorkThe Power Of Imagenation, Korea University Museum, Seoul

Speaking Of Young Artists, Suggestion Of Critics, Project Space Zip, Seoul

2005 City_net Asia 2005, Seoul Museum of Art, Seoul

The Magic Of Art, Gallery Chosunilbo, SeoulFunny Sculpture and Funny Painting, Gallery Sejul, Seoul

The Five Senses + α, University Museum of Fine Art, Hong-ik National University, Seoul O’pink, Space Phil, Seoul

Nano in young artist, Alternative space LOOP, Gallery Ssamji, SeoulDistructive characters (6artists & 1intruder), Kwan Hoon gallery, Seoul

Meseum of Fine Art, Seoul University, Seoul

2004 Preview, Team_preview, Seoul

Phototaxis_mania Space cell, SeoulArt_Capsule, University Museum of Fine Art, YonSei National University, Seoul

Parti_tion, Insa Art Plaza Gallery, Seoul

2003 Rikkiko under the black sun, Small Space One, Seoul

Maitreya, Jeonju National Museum, Jeonju36.5, Gallery BODA, Seoul

Awards

2009 Artists of Tomorrow 2010, Sungkok Museum Award, Korea

2008Fund from Seoul Foundation for Art and Cultuer (NART), Korea

2007Fund from Seoul Foundation for Art and Cultuer (NART), Korea

Public Collection

2009National Museum of Contemporary Art. Korea

Condition for Ordinary, Oil on Resin, Wood

À travers cette galerie de personnages presque mutants il parvient avec peu de narration à exprimer et à re-constituer avec une force inouïe les émotions humaines les plus intenses comme la peur ou la tristesse, le désir, les tensions érotiques et la confusion des sentiments, la complexité des relations entre les individus. Nulle anecdote ne vient perturber ses Adam et Eve dans leur déréliction et livrés à l’atroce réalité de leur destin d’hu-mains. Ses créatures existentialistes dans les tourments de leurs chairs et leurs contradictions deviennent nos doubles muets et désemparés. L’artiste déclare que les émotions sont les seules choses données à un homme ou une femme hormis leur statut social dans le fonctionnement capitaliste d’une société. Choi Xooang ne nous livre pas ses propres sentiments mais tente d’extraire une âme collective, un organigramme de toutes les souffrances et les joies éprouvées par chacun. Le spectateur se trouve ainsi entraîné dans une pièce muette où il prend indirectement parti comme au théâtre et au cinéma et s’imprègne par compassion ou empathie des tourments de ses semblables; la nudité des modèles accroît en plus cet enveloppement des spectateurs dont le regard sert de vêtement moral et protecteur. Il se réfère directement à l’œuvre occidentale du peintre Edouard Manet en particulier à son ‘Olympia’ scandaleuse courtisane bravant la morale et livrant son corps dénudé à la concupiscence des bourgeois libidineux du 19ème siècle. Selon sa théorie l’artiste ne doit pas tout livrer mais laisser la place à celui qui la regarde et entre à son tour dans l’œuvre et dans son histoire. Tant de combinaisons possibles au déroulement de chaque histoire, pourquoi la jalousie, la mélancolie, la séduction ? Que reste t-il de ses étreintes éphémères et passionnées ? La nudité dans l’art en particulier dans la sculpture hyper réaliste et sans sublimation agit comme un accélérateur de particules : les créatures offertes de John di Andrea dans les années 70, les mutants dégénérés des frères Chapman et de l’australienne Patricia Piccini ou les géants de Ron Mueck ont créé à des époques différentes par leur spectaculaire et notre voyeurisme des scandales retentissants.Loin du sensationnalisme, l’artiste exprime une vision humaniste du monde. Comme Egon Schiele au moment de la première guerre tordait les corps pour exprimer la souffrance d’un peuple opprimé et des damnés de son époque, Choi aspire à donner une portée universelle et expressionniste à ses héros livrés à eux-mêmes et à la violence de leurs passions. Etrangement, les personnages sont représentés sexués mais sans cheveux, ce qui crée un malaise, comme une part d’ombre et de mort sur une société malade de ses excès. On ne peut balayer de notre esprit les images de cancéreux ou d’irradiés dans ces autres ‘nous-mêmes’ saisis dans leur nudité absolue qui nous rappellent notre fragilité et notre vulnérabilité.

Reflection 2012(detail), Oil on Resin, Solid Wood

Xooang Choi a acquis sa reconnaisance dès le début des années 2000 pour ses sculptures figuratives miniatures en argile polymère peinte. A partir de 2007, il a produit des oeuvres plus volumineuses, qui ont magnifié son travail et l’ont rendu plus vivant une fois mis en scène dans l’espace.

Le travail de Choi se distingue par l’utilisation d’une technique hyperréaliste qui lui permet de représenter des corps humains doublés de la puissance métaphorique qu’ils véhiculent par une structure sociale homogène et uniforme. Remarquablement délicates dans le détail, mais en même temps dérangeantes, voir macabres, ses représentations expriment une métaphore incarnée par des corps humains. Les attitudes et les regards qui frappent immédiatement par leur réalisme et leur surréalisme reflètent les observations et le commentaire acerbes de l‘artiste sur la société. Il révèle ainsi les maladies mentales de ses contemporains - perte de repères ; faiblesse ; paranoïa ; absence de libre arbitre ainsi que la violence cachée sous le rationalisme de la société. Ses sculptures se développent jusqu’à explorer les questions ontologiques sur l’existence et l’identité de l’homme.

Isometric_Male 2013(back), Oil on Resin

L’Art Contemporain, la photographie, le cinéma, à travers des parcours singuliers, dissèquent avec une férocité jamais atteinte le Théâtre de la Cruauté. Tyrannies, massacres sériels et répétés, désastres de la guerre, traumatismes psychiques, et leurs exorcismes ....Le 20 ème siècle a ouvert un champ plus large au langage du corps pour les artistes. Il devient une expression plastique, un spec-tacle, une prospection sensorielle où se déclinent toutes les souffrances et le refoulé d’une société. A chaque génération se suc-cèdent des guides, des acteurs qui tentent d’illustrer des conflits, entrainent leur propre chair, leur «moi peau» à des facéties plus ou moins morbides. Le Surréalisme et le Dadaïsme tournent le corps en dérision, le parodient, le machinisent, le «nihilisent». Puis il devient l’œuvre, pour le créateur comme pour le spectateur. L’actionnisme viennois à travers des rituels barbares, orgiaques, de sangs et d’excréments va s’employer à dénazifier une nation toute entière. Le Body Art propulse sur la scène des happenings sado masochistes: Marina Abramovic, Gina Pane, Ana Mandieta s’immolent dans des auto flagellations extrêmes qui oscillent entre la meurtrissure physique et l’automutilation.Après le sacrifice, l’immolation, une certaine forme de maniérisme et d’ironie s’insinue. L’enveloppe s’échappe, se déforme, et des marionnettistes du bricolage d’identité instaurent un «ordre anatomique nouveau». Matthew Barney met en image une huma-nité hybride, les Cyborgs, dans son cycle de films Cremaster. Patricia Piccinini accouche des créatures mutantes, les frères Chap-man des enfants androgynes hypersexués. Ron Mueck, Evan Penny, Gullivers méga-réalistes fabriquent des géants mélancoliques, Maurizio Cattelan des «mini me», un garçonnet Hitler. Duane Hanson expurge les anti-héros de la société américaine, tandis que Marc Quinn ampute, Louise Bourgeois tronque, Orlan greffe.Chacun s’accorde à exploiter les dernières découvertes de la chirurgie esthétique, de la biologie à la génétique, et à penser diffé-remment les codes et les tabous.Le cinéma n’est pas en reste. David Cronenberg (Existenz) ou Pedro Almodovar (Dans ma peau) déclinent les désordres de scien-tistes qui expérimentent leur folie de démiurges sur des innocentes ou des consentants cobayes. Frankenstein en est le père légitime, monstre douloureux sorti du laboratoire d’un savant hanté. Suivi par les créateurs des films gore qui rivalisent en hémo-globine de prouesses techniques et d’effets très spéciaux.Choi n’échappe pas à cette esthétique du spectaculaire. Après les créatures autistes de son «syndrome d’Asperger» il a repeuplé de damnés égarés une antichambre crépusculaire, un Festin nu : scarifications, tatouages, greffes, mutilations, transsexualisme, difformités, rien n’est épargné à ces enfants d’un nouveau Genre . « Le corps est comparable à une phrase qui vous inviterait à la désarticuler pour que se recompose à travers une série d’anagrammes sans fin, ses contenus véritables » Hans Bellmer.

L’originalité de Choi Xooang est de s’intéresser au lien, dans tous les sens, - le couple, ou plutôt son impossible - qui tisse par la couture, la ligature, le nœud, tout ce qui exprime l’attachement mais surtout l’arrachement. Son vocabulaire dissocie ses figures autour du double, mais de doubles contrariés: pas de fusion, pas de séparation, des unions siamoises, zoomorphes, homophiles.Des Jeunes filles désemparées, dupliquées, se cherchent un reflet dans un miroir flou. Etreintes par derrière, pénétration au poing, répression du désir, imbrications, vampirisations mentales (comme chez Edvard Munch). La pulsion morbide solitaire, l’empêche-ment, se substituent à la douceur et aux grandes espérances. Nul ne se regarde sauf pour se contraindre. Ces corps à corps, contre - corps, deviennent des allégories d’amours contrariés. Les personnages, s’aveuglent, se violentent avec une désespérance aigüe.Les chairs, traitées avec une éblouissante technique, se superposent comme les pelures d’un oignon. Livides, tourmentées, bleuies, obscènes, comme celles de Lucian Freud dont il admire les oeuvres. L’épiderme devient sur-derme, armure fragile corsetant ces fragiles silhouettes. Des rubans suturent les torses, les chevilles, cousus avec la grâce d’un Watteau travaillant les bas et les taffetas, mais la férocité d’un Laclos dans les liaisons dangereuses. Les blessures stylisées sont aussi incurables que celle d’Amfortas dans l’opéra de Wagner ou le grec Philoctète abandonné sur son île.Son humanité est jeune et les premiers balbutiements de ces égarés se font dans la douleur et la convulsion. Les adolescents s’en-trechoquent, mains crispées, os contre os, œil pour œil, dent pour dent... se muent en chiens, autruches, et l’animalité transgressive de chacun affleure dans ce combat à tue et à toi. On y retrouve l’influence de Francis Bacon, toujours en fond de ring.Les prothèses monstrueuses, complètent et appareillent sa collection de freaks. «Le corps comme la prothèse du moi» déclare David Le Breton. Comme Cronenberg dans son film «Crash», Choi accentue l’érotisation perverse fondée sur la fascination et la répulsion. Un fétichisme du handicap. Au delà, il raconte aussi en la symbolisant, la part mutilée de chacun. «Le manque rend hu-main» disait Michel Journiac.Des dessins anatomiques contrebalancent en études délicates l’impact mortifère de ses sculptures. Lavis, aquarelles aux couleurs tendres, érotiques, comme ceux de Rodin ou de Klimt, traits légers de crayons, larmes laiteuses dans des yeux gorgés, sexes mêlés, pro-thèses-jambes de chaise, crânes habillant les visages comme des masques de carnaval. Auto-sensualité d’un enfant autiste qui se cherche des jouets, des objets transitionnels et des consolations, pour ne pas s’effondrer. La tendresse affleure à travers ce regard mouillé, un œil unique tacheté, planète solitaire. Les grands yeux des enfants dans les mangas coréens (manhwas).Pour cet écorcheur de suppliciés du sentiment, ces «carcasses potentielles», le corps devient un symptôme, une somatisation des conflits psychiques, sociaux, institutionnels. Cet artiste écartelé, dans un pays déjà divisé, incarne le paradigme de l’altérité. Dans ces figures miniatures qui deviennent des doubles d’autoportrait il modifie notre perception des limites de l’humain et établit une identification au blessé, à l’incomplet, au mutilé. Une passerelle de compassion, de réhabilitation du lien social, émotionnel.

Véronique Maxé

Reflection 2012, Oil on Resin, Solid Wood

The blind for the blindEn 2007, Xooang Choi a présenté une exposition personnelle intitulée «L’Etat Végétatif». Son étude se porte sur une population ordinaire à l’inté-rieur d’un milieu social ou plus exactement la manière dont les systèmes so-ciaux progressent (simultanément avec les centres urbains qui s’étendent) et se standardisent pour accélérer un processus efficace de contrôle et de direction des individus. La plupart d’entre eux n’ont pas d’autre choix que l’adaptation à ces changements. Certains, à leur insu, sont conduits à une forme d’immobilité (d’impuissance), que Choi nomme l’état végétatif. Penchées presque sans vie, inertes et résignées, comme anéanties par une puissance incontrôlable, ses sculptures incarnent cet “état”.

En 2009, deux œuvres, «The Wings» (2009) et «The Heroes» (2009) révèlent son intérêt pour la question du “microfascisme”. L’analyse du capitalisme et du fascisme faite par le philosophe français Félix Guattari a souligné que, dans une société capitaliste, les figures de l’autorité essaient de contrôler le peuple et d’amener les masses à intérioriser leurs valeurs. Les désirs de la société deviennent implicites et les masses à leur tour exécutent volon-tairement les actes attendus. Il semble que si certains semblent obéir à une autorité extérieure, leurs désirs peuvent en fait rester personnels.

Le régime militaire qui a gouverné la Corée pendant les années 60 et 70 a privilégié la valeur du collectif avant celle de l’individu, sous le prétexte de développer l’industrie et l’économie. Les gens de cette génération ont suivi la direction donnée par les représentants de l’autorité et se sont considérés comme les protagonistes et les héros du progrès de la société coréenne. Cependant, au fil du temps, cette époque héroïque a été redéfi-nie. Cette génération était-elle vraiment héroïque, ou les citoyens avaient ils été manipulés par le parti au pouvoir? «The Heroes» et «The Wings» questionnent précisément cette problématique de longue date.Dans ces œuvres, Xooang Choi entreprend l’examen de la relation entre le collectif et l’individuel, et explore les problèmes de génération, d’idéologie et d’histoire. Plus tard, Il s’est focalisé sur l’observation des relations entre différents groupes sociaux plutôt que le classement d’un individu à l’intérieur d’une collectivité. Après une étude des postmodernistes français comme Félix Guattari et Michel Foucault, Choi s’est forgé une vision personnelle selon laquelle le collectif rejette la personnalité d’un individu en tentant de l’intégrer dans un moule unique. Dans ce contexte de fascisme, tout ce qui ne suit pas cette voie peut être considéré comme subversif. C’est cette tension qui l’a poussé à isoler deux corpus distincts, «The Islet of Asperger» (2009), et «Speaker et Listener» (2011).

Dans un premier cas, Choi s’est intéressé aux minorités sociales. Dans sa série «Islets of Aspergers», il s’est penché sur certaines personnes atteintes du syndrome d’Asperger. Cette pathologie concerne des individus inaptes à une intégration dans la société dominante, incapables d’une communication basique, malgré un développement linguistique et cognitif normal. Ces sujets, parfois sensibles à des stimuli sensoriels tels que bruit, lumière, odeur et goût, peuvent aussi se concentrer intensément sur des sujets idiosyncrasiques. Ils se montrent parfois extraordinairement doués pour une discipline spécifique. Parmi toutes ses observations, Choi pose la question suivante : Est-il possible que certains humains décrits comme extérieurs à la norme souffrent d’un état psychologique fondé uniquement sur leur conduite hors norme ? N’importe qui peut se fixer sur un domaine particulier, avec plus ou moins de force et d’application .Mais si cette différence de comportement éloigne de la norme sociale, elle ne constitue pas la base d’une pathologie.

Dans la série suivante, Choi explore la question de la perspective, du point de vue, à travers les deux rôles de «Speaker» et de «Listener». Exposées comme un couple, ses sculptures figurent un homme «Speaker» la main levée, en train de parler, tandis que la femme

«Listener» est assise passivement et l’écoute. L’artiste a accentué à dessein la main et la bouche du caractère masculin et les oreilles du personnage féminin, alors que le reste de leur corps a été modelé de manière imprécise. De plus, ils sont habillés, détail inhabituel dans son oeuvre.

L’orateur sur un socle supérieur, semble dominer son auditrice assise en contrebas. A première vue l’homme détient le pouvoir. Cependant, l’interprétation peut diverger. Alors que la femme porte une tenue confortable, l’homme semble en équilibre, raide dans ses jeans étroits. La plupart des spectateurs pourraient considérer que les parties du corps clairement façonnées définissent un sens de lecture. Mais le reste du corps traité avec moins de détails accentue le caractère posé et calme de la jeune fille.En tant que tel, le pouvoir peut prendre un autre signifiant selon l’angle de vue. Pour Choi, l’analyse des minorités sociales dépend de cet arbitraire.

Xooang Choi a entrepris d’explorer explicitement des sujets “ordinaires”. Même si les thèmes de société, les structures collectives et culturelles sont primordiaux, il est toujours question d’individualités. Ses sculptures privilégient le contexte humain en examinant la connaissance de soi et les conflits intérieurs des gens ordinaires. En intervenant sur la posture physique de ses modèles, il en révèle les sentiments. Dans la confrontation simultanée de deux corps, l’artiste rend visible la subtilité de la psychologie et des attitudes de chacun à travers les dichotomies sujet / objet, actif / passif, dominant / dominé, exposé / caché, variable / constant.

Les deux personnages féminins qui constituent l’œuvre «Reflection» (2012) abordent le problème de “la conscience de soi”. Une femme regarde dans un miroir le reflet de la forme de son corps. Le traitement de l’une est précis, l’autre indistinct. L’on pourrait penser que la forme clairement définie incarne l’original et que la forme floue n’est que la représentation de son reflet, cependant l’inverse est aussi vrai. Comme le confirment les tatouages sur le bras, la cheville et la taille. Le modèle a du souvent voir sa propre image inversée dans le miroir, mais elle ne s’est probablement jamais vue en trois dimensions. Un miroir nous renvoie une copie exacte, mais c’est néanmoins toujours une image inversée, différente de notre apparence véritable. Les humains ont peine à percevoir clairement leur corps et leur personnalité. Ils se découvrent à travers autrui, plus que par leur propre regard. Le modèle de « Reflection » a légèrement tourné la tête et son visage exprime en fait la circonspection, la curiosité et la surprise.

Il reprend ce procédé dans «Isometric Male» (2013) et «Isometric Female» (2013) avec des personnages dupliqués. Les deux hommes d’«Isometric Male» posent chacun leur main sur la tête de l’autre. Celui qui est nu couvre sa bouche, tandis que son homologue en slip lui dissimule les parties génitales. Les deux femmes d’ «Isometric Female» font a peu près les mêmes gestes… L’une, en culotte, masque les yeux de son alter ego, tandis que celle-ci introduit sa main dans le sous-vêtement de sa compagne.

Ces sculptures nous rappellent un spectacle de marionnettes parce que la main des protagonistes s’enfonce dans la tête de l’autre comme pour la diriger. Mais puisqu’ils agissent de manière identique, il est difficile de discerner lequel est l’humain, et lequel est la marionnette. L’un des hommes veut s’exprimer mais il ne le peut pas car sa bouche est contrainte. L’autre veut s’exhiber mais son sexe est camouflé. Dire quelque chose et se fermer la bouche, s’exhiber et être couvert en même temps, ces deux contradictions révèlent le conflit intérieur inhérent à l’individu.

«Settlement» (2012) et «Colonization» (2013) réfléchissent à la “variabilité du corps”. Malgré la détermination historique en un corps humain immuable, inviolable, les récents développements de la médecine et la chirurgie plastique ont permis d’en transformer une partie ou même de se faire transplanter l’organe d’un autre. Ces changements ont revolutionné à la fois les attitudes et la conscience aussi bien que la définition de la notion d’être humain. A présent, le corps devient modifiable à l’infini. Dans le futur, pourront se combiner des organes artificiels, des machines et même une intelligence artificielle. A ce stade, les définitions de l’anatomie du sujet, et de la conscience seront aussi complètement transformées.

La sculpture «Settlement» associe des éléments associant humains animaux et objets. Le visage, en particulier, est troublant; si le personnage portait un masque en forme de crâne, il ne serait alors pas possible que les dents fixées au crâne apparaissent plus en arrière que la lèvre inférieure. Si le crâne était le sujet, alors la peau aurait été transplantée dessus. Il devient très complique de déterminer si ce personnage hybride, raffiné et surréel est un être vivant ou si le crâne en est le sujet original.

Le dos de la pièce « Colonization» est aussi dérangeant à cause de son laçage à la manière d’un corset. Cette peau ressemble à un vêtement, mais est indiscutablement attachée à l’abdomen. La figure est sculptée avec des chaussures, mais leur extrémité se termine en orteils véritables. Une fois de plus la distinction devient confuse entre corps humain et objet. Il est donc difficile de séparer le sujet de l’objet.

Han-seung RyuArt Critic & Curator at the National Museum of Contemporary Art, Korea