evaluation des capacités lors de la « toilette

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IFPEK Rennes Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes UE 6.5 S6 Evaluation de la pratique professionnelle et recherche Marine PATY Promotion 2016-2019 Evaluation des capacités lors de la « toilette » : L’influence du contexte sur le choix de l’observation comme support d’évaluation pour l’ergothérapeute en réadaptation gériatrique Conformément au code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur est illégale.

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Page 1: Evaluation des capacités lors de la « toilette

IFPEK Rennes

Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes

UE 6.5 S6 – Evaluation de la pratique professionnelle et recherche

Marine PATY

Promotion 2016-2019

Evaluation des capacités lors de la « toilette » :

L’influence du contexte sur le choix de l’observation

comme support d’évaluation pour l’ergothérapeute

en réadaptation gériatrique

Conformément au code de la propriété intellectuelle, toute reproduction intégrale ou

partielle faite sans le consentement de l’auteur est illégale.

Page 2: Evaluation des capacités lors de la « toilette

IFPEK Rennes

Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes

UE 6.5 S6 – Evaluation de la pratique professionnelle et recherche

Sous la direction de Madame PERON Véronique, formatrice à l’IFE de Rennes.

En vue de l’obtention du diplôme d’Etat d’ergothérapeute

Marine PATY

2019

Evaluation des capacités lors de la « toilette » :

L’influence du contexte sur le choix de l’observation

comme support d’évaluation pour l’ergothérapeute

en réadaptation gériatrique

Page 3: Evaluation des capacités lors de la « toilette

Remerciements

Je tiens à remercier Véronique Péron, ma directrice de mémoire pour sa patience, son accompagnement et ses conseils,

Les professionnels ayant participés aux entretiens,

Ma famille qui a su être présente, m’encourager et pour leurs relectures,

Ludivine et nos très longues soirées de travail,

Les ergothérapeutes de mon dernier stage pour leur soutien et leurs encouragements.

Merci à la promotion 2016 – 2019 et aux formateurs de l’IFE pour ces trois années.

Page 4: Evaluation des capacités lors de la « toilette

« Nous avons tous tendance à projeter sur les autres nos propres désirs,

nos propres besoins, sans trop nous préoccuper des leurs.

Or il ne s’agit pas d’appliquer des techniques particulières […] à des adultes un peu âgés,

mais d’adapter des soins et des techniques aux besoins

et aux désirs de telle personne âgée. »

Hélène Barrère (1993)

Page 5: Evaluation des capacités lors de la « toilette

Nom - Prénom : PATY Marine

« Evaluation des capacités lors de la « toilette » : L’influence du contexte sur le choix de

l’observation comme support d’évaluation pour l’ergothérapeute en réadaptation gériatrique »

Résumé :

Lors de son admission dans un établissement tels que les Soins de suite et de

Réadaptation (SSR), la personne âgée en situation de dépendance peut voir sa vie intime

dévoilée aux professionnels de santé incluant/dont l’ergothérapeute. Ce dernier peut être

amené à intervenir dans le cadre des soins d’hygiène : la « toilette », afin d’évaluer les

capacités de la personne dans ses activités de vie quotidienne.

Ce travail de recherche s’intéresse à l’observation de l’activité « toilette » par

l’ergothérapeute comme moyen d’évaluer la situation de dépendance chez la personne

âgée en SSR. L’objectif de cette étude est de mettre en évidence des éléments déterminant

le choix et la réalisation de cette mise en situation. Les apports théoriques ainsi que les

entretiens menés auprès d’ergothérapeutes et d’une aide-soignante ont permis de révéler

l’influence du cadre institutionnel et des représentations sociales des différents acteurs du

soin sur les conditions de réalisation de l’évaluation. Ce travail de recherche a permis de

faire émerger des pistes de réflexions quant à la manière dont est abordée l’évaluation, aux

alternatives pouvant être mises en place préalablement à l’observation de la toilette.

Mots-clés : Toilette – Ergothérapie – Vieillissement – Réadaptation – Evaluation

Abstract :

When elderly persons encounter limitations surrounding their daily living activities due

to a trauma or a disease, they often end up in care in a rehabilitation center. During this stay,

their intimacy can be exposed to health professionals including the occupational therapist.

Regarding their abilities, those professionals can assess functional and cognitive capacities

during daily living activities such as personal care.

This research had, as a focal point, the occupational therapist’s observation of personal care

as an assessment of the elderly persons’ abilities within rehabilitation centers. The aim of

the study is to investigate the factors affecting this assessment and how it is carried out. The

results of the interviews with several occupational therapists and a caregiver showed the

influence of the institutional framework and the health professionals’ social perceptions on

the assessment. This research work also lead to reflections about the alternative to the

observation as primary assessment tool of activities of daily living.

Keywords : Personal-care - Occupational therapy – Aging – Rehabilitation - Assessment

INSTITUT DE FORMATION EN ERGOTHERAPIE DE RENNES

12 rue Jean-Louis Bertrand, 35 000 RENNES

TRAVAIL ECRIT DE FIN D’ETUDES – Années 2018 - 2019

Page 6: Evaluation des capacités lors de la « toilette

Sommaire

Introduction ........................................................................................... 1

1 Problématique .................................................................................. 2

1.1 Situation d’appel ....................................................................................................... 2

1.2 Questions de départ ................................................................................................. 3

1.3 Développement ........................................................................................................ 3

1.3.1 Intimité. ......................................................................................................... 3

1.3.2 Les professionnels intervenant lors de la toilette ........................................... 4

1.3.3 Le professionnel et le soin face au corps du soigné ...................................... 5

1.3.4 Déficiences et incapacités, Autonomie et indépendance ............................... 7

1.3.5 La toilette : hygiène et propreté ..................................................................... 7

1.3.6 Analyse des entretiens exploratoires ............................................................. 8

1.4 Question de recherche et hypothèses ....................................................................... 8

2 Cadre théorique ............................................................................. 10

2.1 Le vieillissement ..................................................................................................... 10

2.1.1 D’un point de vue biologique ....................................................................... 10

2.1.2 D’un point de vue sociologique .................................................................... 11

2.1.3 D’un point de vue démographique ............................................................... 12

2.2 Les Soins de Suite et Réadaptation ........................................................................ 12

2.2.1 Rôle et fonctionnement des SSR ................................................................. 13

2.2.2 Selon un cadre institutionnel ........................................................................ 14

2.2.3 Professionnels de santé présents et projet de soin ...................................... 15

2.2.4 La relation soignant-soigné au sein de l’institution ....................................... 16

2.3 La toilette ................................................................................................................ 17

2.3.1 La toilette dans l’Histoire ............................................................................. 17

2.3.2 Le concept de représentation ...................................................................... 18

2.3.3 Les différentes représentations de la toilette ............................................... 19

2.3.4 La toilette comme un besoin ........................................................................ 20

2.3.5 Toilette et hospitalisation ............................................................................. 20

2.4 L’ergothérapie ......................................................................................................... 21

2.4.1 L’ergothérapie : une profession occupation-centrée .................................... 21

2.4.2 L’autonomie : un objectif majeur pour l’ergothérapeute ............................... 22

Page 7: Evaluation des capacités lors de la « toilette

2.4.3 Intervention ergothérapique auprès des personnes âgées .......................... 22

2.4.4 Evaluation des capacités fonctionnelles et cognitives en ergothérapie ........ 23

3 Cadre d’analyse : recueil de données et méthode ......................... 25

3.1 Rappel de la question de recherche........................................................................ 25

3.2 Choix de la méthode ............................................................................................... 25

3.3 Public cible ............................................................................................................. 25

3.4 Passation des entretiens ......................................................................................... 26

3.5 Analyse des données ............................................................................................. 27

3.5.1 Méthode d’analyse .................................................................................. 27

3.5.2 Professionnels interrogés ............................................................................ 27

3.5.3 Admissions et séjours en SSR gériatrique ................................................... 28

3.5.4 Représentations des soignants ................................................................... 28

3.5.5 La toilette lors du séjour en SSR ................................................................. 29

3.5.6 Intervention de l’ergothérapeute .................................................................. 30

3.5.7 Déroulé de l’évaluation de la toilette ............................................................ 32

3.5.8 Transmissions ............................................................................................. 32

3.6 Limites .................................................................................................................... 33

4 Discussion ..................................................................................... 34

4.1 Retour sur les hypothèses ...................................................................................... 34

4.2 Pistes de réflexion .................................................................................................. 37

4.2.1 Intimité et Soins de suite ............................................................................. 37

4.2.2 Recueil des habitudes de vie ....................................................................... 38

Conclusion .......................................................................................... 41

Bibliographie ....................................................................................... 42

Table des annexes ................................................................................. I

Page 8: Evaluation des capacités lors de la « toilette

1

Introduction

Lors de son admission dans un service de soins de suite et de réadaptation,

la personne âgée se retrouve plongée dans un nouvel environnement dont elle ne

sait rien si ce n’est que son séjour est temporaire. On lui fait faire un rapide tour

du service afin qu’elle essaie de prendre ses marques. « Le déjeuner est servi à

partir de 12h15, le dîner vers 18h30 ». Des professionnels se succèdent,

l’examinent, la questionnent, lui expliquent ce qu’ils peuvent lui apporter. « Etes-

vous capable de vous laver seul(e) ? de vous habiller seul(e) ? Si ce n’est pas la

cas, un(e) aide-soignant(e) pourra venir vous aider le matin à faire ce que vous ne

pouvez pas.

Subvenir à son hygiène personnelle, à ce qu’on appelle communément la toilette,

peut parfois devenir difficile et nécessiter l’aide d’un tiers. Lorsque la personne

âgée souhaite pouvoir réaliser seule tout ou partie de cette activité,

l’ergothérapeute peut être amené à intervenir et notamment à évaluer les

capacités de la personne grâce à l’observation lors d’une mise en situation de la

toilette. Des aménagements ou des compensations pourront être préconisés et

mis en place. Quels sont les facteurs qui influencent le choix de l’observation

comme support d’évaluation ? Dans quelles circonstances cette évaluation lors de

la toilette est-elle réalisée ?

Ce travail de recherche vise à interroger le choix systématique de l’observation

pour évaluer la situation de dépendance d’un personne âgée lors de l’activité

« toilette ».

Dans un premier temps, les circonstances et réflexions préliminaires ayant

menées à ce sujet seront présentées. Les principaux concepts relatifs au

questionnement que sont le vieillissement, l’institution que sont les soins de suite

et de réadaptation (SSR), la toilette ainsi que l’intervention de l’ergothérapeute,

seront abordés. Dans un second temps, les résultats de l’enquête de terrain qui a

été menée seront détaillés et analysés en lien avec les données théoriques

exposées précédemment. Enfin, les pistes de réflexion qui se sont dégagées de

l’ensemble de cette étude seront évoquées.

Page 9: Evaluation des capacités lors de la « toilette

2

1 Problématique

1.1 Situation d’appel

Lors de ma deuxième année de formation en ergothérapie, j’ai réalisé deux stages en

SSR (soins de suite et réadaptation) à orientation gériatrique. Pendant ces derniers, j’ai

souvent été sollicitée pour évaluer les capacités fonctionnelles et cognitives de patients sur le

temps de la toilette. Ces bilans sont parfois appelés « toilettes évaluatives ». Le support

d’évaluation était, dans les deux structures, un bilan « maison », c’est-à-dire créé par des

ergothérapeutes de l’établissement, détaillant les différentes tâches composant l’activité

« toilette » et spécifiant la cotation à utiliser selon le niveau de dépendance (« sans aide »,

« avec stimulation/surveillance », « avec aide », « fait par un tiers »).

C’est à l’occasion de l’une de ces évaluations que mes premiers questionnements sont

apparus. En effet, une femme âgée avait été admise dans la structure et la prescription du

médecin demandait une « évaluation de l’autonomie dans les AVQ ». A son entrée, j’avais

donc rencontré Madame afin de faire un point sur sa situation et d’établir un plan d’intervention.

Cette personne âgée avait fait une chute peu de temps après la pose de sa prothèse de

hanche. Ses principales plaintes concernaient ses douleurs à la mobilisation et la marche. Une

fois l’entretien terminé, je retournais dans le bureau pour faire un point avec une des

ergothérapeutes. Afin d’évaluer les répercussions de la douleur sur les mouvements pendant

la toilette et de répondre à la demande du médecin, une toilette évaluative avait donc été

programmée le lendemain matin. J’étais allée voir Madame pour l’avertir de ce bilan et recueillir

son consentement. Le matin suivant, je me présentais à la chambre et représentais le déroulé

de l’évaluation. Elle s’était dirigée vers la salle d’eau pour commencer sa toilette. Alors qu’elle

ôtait ses vêtements, elle m’a regardé dans le miroir et m’a dit : « Donc je me déshabille et vous

allez me regarder faire ma toilette ? ». Cette phrase, résumant pourtant assez bien la situation,

m’a gênée. J’avais l’impression qu’elle faisait de moi une observatrice passive, une

« voyeuse » en quelque sorte. C’était la première fois que je ressentais une telle gêne et que

je remettais en cause la pertinence de cette évaluation. L’évaluation a pourtant suivi son cours

et le fait que la patiente n’ait besoin d’aucune compensation humaine ou matérielle n’a fait que

renforcer mon malaise et mon incertitude face au choix du bilan. En effet, la patiente n’avait

jamais soulevé de difficultés survenant lors de la toilette, les aides-soignantes du service

n’étaient jamais intervenues pour l’aider et n’avaient jamais émis de doutes quant à ses

capacités à réaliser les soins d’hygiène.

Page 10: Evaluation des capacités lors de la « toilette

3

1.2 Questions de départ

Pourquoi m’étais-je immiscée dans son intimité ? Pour répondre à quel objectif ou à quel

besoin cette évaluation devait-elle être réalisée ? Je me suis également interrogée sur le fait

que c’était la première fois que je ressentais de la gêne pendant ce type d’évaluation et qu’un

patient manifestait, aussi clairement en tout cas, son malaise face à ma présence.

1.3 Développement

Mes recherches se sont en premier lieu tournées vers la notion d’intimité. Sur le respect

de l’autre, de sa pudeur et notre posture lorsque nous, soignants, sommes confrontés à la

nudité lors d’un soin ou d’une évaluation.

1.3.1 Intimité

Lors de la toilette, la personne expose sa nudité et doit en quelque sorte mettre de côté

sa pudeur. Cette dernière peut être définie comme « une disposition à éprouver de la gêne

devant ce qui peut blesser la décence, devant l’évocation de choses très personnelles »

(Larousse.fr). Cette définition soulève bien le côté subjectif et individuel de la pudeur. Elle est

« variable d’un être à l’autre » (Claude, 1992). Elle est dépendante des représentations et du

vécu de l’individu. La pudeur est une réaction émotive visant à préserver nos secrets. Elle

serait une protection de notre intimité, cette dernière caractérisant ce qui est intime, profond,

intérieur, ce qui est relatif à la vie privée (Larousse.fr). J’ai par la suite orienté mes recherches

vers l’intimité.

J’ai tout de suite associé « intimité » et « sphère intime ». Cette sphère intime s’inscrit dans la

notion de « proxémie ». Il s’agit notamment de l’analyse de la distance physique que deux

personnes établissent lors de leurs interactions (Hall, 1966). Cette distance dépend des

normes culturelles de chacun, de sa vision de soi mais aussi du contexte de l’interaction

(interlocuteur, lieu, type d’interaction, …). Il définit également quatre zones qu’il nomme :

publique, sociale, personnelle et intime, selon la possibilité qu’ont les interlocuteurs de se saisir

par les mains.

Ainsi, la distance publique se situe au-delà de sept mètres et la distance sociale s’estime à

environ deux bras tendus mis bout à bout. Elles n’impliquent aucun contact physique et les

interactions qui les induisent peuvent rester impersonnelles et détachées. La distance

personnelle est définie par un bras tendu, le contact est possible mais pas systématique si les

interlocuteurs bougent. Les détails de l’autre comme les expressions des yeux, les aspérités

de la peau sont visibles. C’est le dernier rempart avant que l’autre s’immisce dans notre

Page 11: Evaluation des capacités lors de la « toilette

4

« bulle », notre intimité. La distance intime se mesure à la longueur de l’avant-bras. On la

retrouve lors des accolades entre amis ou proches, elle relève d’un certain niveau de confiance

car le contact, s’il n’est pas présent, semble inévitable. Néanmoins, une dernière barrière nous

isole de l’autre : nos vêtements (Hall, 1966). Ce franchissement de la distance intime est

généralement admis lorsqu’il s’agit de soins nécessaires à la santé de l’individu même si ces

derniers imposent une nudité partielle et totale du patient.

Un médecin qui ausculte un patient, une infirmière qui fait un pansement, un soignant qui

réalise une toilette. Ce sont des gestes médicaux, des soins, qui relèvent d’une technique et

d’un apprentissage. Ils sont effectués par des professionnels ayant été formés, qui réalisent

ces même gestes à maintes reprises sur de nombreuses personnes différentes. Leurs objectifs

sont thérapeutiques et dans l’intérêt du patient. Pour autant, lorsqu’un soignant entre dans la

sphère intime d’une personne soignée, la réciproque s’applique et c’est aussi s’exposer à son

regard. Objectiver un soin reviendrait à ne mettre en pratique que la composante technique

du soin, à se détacher de la proximité humaine avec le patient et donc à ne plus s’impliquer

émotionnellement dans la relation soignant-soigné.

1.3.2 Les professionnels intervenant lors de la toilette

Trois professions complémentaires du fait de leur formation et leurs compétences

peuvent intervenir sur le temps de la toilette : les infirmiers, les aides-soignants et les

ergothérapeutes. Il s’agit ici de détailler leurs rôles dans l’accompagnement de la personne

pendant la réalisation de cette activité.

Le rôle de l’infirmier est de dispenser les soins nécessaires à l’entretien du corps et des

fonctions supérieures et de compenser partiellement ou totalement les éventuelles incapacités

et/ou la perte d’autonomie d’une personne. Il réalise également des actes infirmiers pour

assurer le confort de la personne et son éducation voire celle de son entourage. Cela

comprend notamment les soins d'hygiène et de propreté corporelle, la surveillance de

l'équilibre alimentaire, la vérification du suivi du traitement, … (infirmiers.com ; Ministère des

Solidarités et de la Santé, 2012). Lorsqu’un infirmier intervient pendant la toilette, il stimule les

capacités de la personne, compense ses déficiences fonctionnelles et/ou cognitives, surveille

l’état cutané et trophique du corps et veille à l’hygiène corporelle. Il s’agit aussi d’un temps

d’écoute, d’échange et d’observation (Soin infirmier sur rôle propre : décret 2004-802/2004

Article R. 4311-5).

L’aide-soignant quant à lui collabore et est sous la responsabilité de l’infirmier dans

l’accompagnement des personnes lors des activités de vie quotidienne. Il assure ce qu’on

appelle les soins de confort et d’hygiène c’est-à-dire l’accueil dans le service, l’installation dans

Page 12: Evaluation des capacités lors de la « toilette

5

la chambre, la toilette, la prise des repas et les transferts des personnes. L’aide-soignant veille

au bien-être des patients et au maintien voire à la récupération de leurs capacités en les

stimulant (infirmiers.com ; Ministère des Solidarités et de la Santé, 2012). Si la toilette est avant

tout un acte infirmier, il est souvent délégué aux aides-soignants. Ces derniers sont formés à

l’écoute et aux soins dits « de base ». Leurs cours contiennent également des précisions sur

le matériel à préparer, les étapes à suivre ainsi que les attitudes à adopter pendant ce soin

(Arrêté du 22 octobre 2005 relatif au DE d’aide-soignant modifié par arrêté du 28 septembre

2011-article 2 R. 4311-3 à R. 4311-5 du code de la santé publique).

Enfin, l’ergothérapeute, par une approche holistique, intervient auprès de personnes de tout

âge présentant des déficiences fonctionnelles et/ou cognitives, innées ou acquises, limitant la

réalisation d’activités de la vie quotidienne, les déplacements, la communication ou tout autre

activité importante pour ces personnes. Ce professionnel du paramédical se base sur des

entretiens, des bilans validés et des observations pour établir des objectifs adaptés aux

besoins et aux capacités de la personne. L’intervention ergothérapique vise à maintenir ou à

restaurer l’indépendance et l’autonomie de la personne en cherchant la récupération des

capacités antérieures grâce à des médias variés principalement orientés vers les activités

ayant du sens pour elle. Si cela n’est pas possible ou si des limitations subsistent,

l’ergothérapeute peut préconiser des compensations : aménagements de l’environnement

(domicile, voiture, …), aides techniques et/ou humaines (Référentiel d’activités, Arrêté du 5

juillet 2010, Ministère de la santé et des solidarités).

1.3.3 Le professionnel et le soin face au corps du soigné

La distanciation du professionnel lors du soin était une des hypothèses expliquant que

les autres toilettes évaluatives réalisées ne m’avaient pas fait ressentir ce malaise. Sur le

moment, je n’avais pas su l’expliquer autrement que par mon intrusion dans la sphère intime

de la personne. En effet, aucune autre toilette évaluative réalisée auparavant ne m’avait

perturbé comme celle-là. J’ai donc cherché des réponses dans les retours d’expériences de

professionnels ayant été confrontés à ce genre de situation. S. Le Moal (2007), une infirmière

a analysé des témoignages qu’elle a recueilli auprès de soignants réalisant des toilettes auprès

des personnes âgées. La gêne qu’ils ressentaient provenait de la projection de leur propre

avenir sur le corps de la personne et sur le fait que ce corps était abîmé, parfois décharné. Il

exposait la réalité de la vieillesse, une réalité qu’on n’est pas toujours prêt à accepter pour soi

et par extension pour les autres.

Ce chapitre m’a éclairé sur la perception que l’on a d’un corps. Le Moal (2007) a interrogé des

infirmières sur « ce que représentait pour elles le corps nu de la personne âgée, de façon

générale elles ont répondu « un corps comme les autres » et une infirmière a répondu

Page 13: Evaluation des capacités lors de la « toilette

6

« rien » ». Cette expression se veut générale et tend à mettre tous les corps à un même

niveau. Je me suis reconnue dans cette généralisation du corps nu. Lors de certains

accompagnements à la toilette, cette banalisation m’a permis de me détacher de mes

émotions car j’avais peur qu’elles impactent négativement mon intervention. Mais c’est là que

se trouve toute la nuance : « le corps est une entité liée à la personnalité et à l’identité de

l’individu, donc, par la même, propre à chacun » (Le Moal, 2007). Si le soignant reste

« professionnel », dans le sens commun du terme, dans la réalisation de son acte, c’est-à-dire

qu’il n’exprime ni désir, ni jugement envers le corps du soigné, celui-ci, de par son individualité

(son âge, ses antécédents, son vécu, sa personnalité) requiert une attention et une posture

adaptées à l’ensemble des composantes de sa personne. Dans les soins, les protocoles, les

dosages, les moyens de communication varient selon les caractéristiques des individus. Il

semble donc incorrect de ne pas reconnaître la spécificité de chaque corps.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette banalisation du corps par le professionnel. Avec

l’expérience le soignant peut être amené à ne considérer le patient que comme « un corps »

et ne plus voir que ses incapacités, à le considérer le corps comme un objet devant être réparé

(Le Moal, 2007). Ou bien le soignant pourrait chercher un moyen de se protéger, évitant ainsi

les contre-transferts et de ressentir de la sympathie et non de l’empathie. Lorsqu’un patient

effectue un transfert sur un soignant, il projette, par un processus psychologique inconscient,

des émotions personnelles influencées par son histoire et ses expériences personnelles. Le

terme « contre-transfert » définit ce même mécanisme chez un soignant (Natanson, 2001).

L’empathie peut être définie comme un phénomène descendant, autrement dit, dans un

premier temps, le soignant comprend ce que ressent le patient parce qu’il saisit ce qui arrive

au soigné, ce qu’il perçoit, son point de vue. Par la suite, en comprenant la situation, le soignant

peut ou pas ressentir les mêmes émotions. La sympathie que l’on éprouve pour un patient est,

quant à elle, d’abord basée sur un mimétisme des émotions, la recherche des raisons de ces

sentiments n’arrive que dans un second temps. C’est un processus ascendant (Jorland, 2006).

En repensant aux autres toilettes évaluatives que j’avais pu faire je me suis rendue compte

que je n’étais pas gênée par la nudité en elle-même ou en tout cas pas exclusivement. Ce

sentiment était plutôt induit par la sensation de ne pas avoir de raison légitime d’être là. J’en

suis donc revenue à la 2e question évoquée plus haut : Pour répondre à quel objectif ou à quel

besoin cette évaluation devait être réalisée ? Pourquoi avoir choisi ce type d’évaluation ?

L’indépendance et/ou l’autonomie de cette personne lors de la toilette était-elle réellement

remise en question ?

Page 14: Evaluation des capacités lors de la « toilette

7

1.3.4 Déficiences et incapacités, Autonomie et indépendance

Selon la Classification Internationale du Fonctionnement, les déficiences

correspondent « à toute perte ou altération d’une structure ou fonction psychologique,

physiologique ou anatomique » et les incapacités sont le résultat d’une déficience c’est-à-dire

« une réduction partielle ou totale de la capacité d’accomplir une activité dans les limites

considérées comme normales par un être humain ». Couramment, les termes « autonomie »

et « indépendance » sont utilisés, à tort, comme des synonymes. Cependant, là où être

indépendant implique d’avoir la capacité physique de se débrouiller seul, l’autonomie, du grec

« autos qui signifie « soi-même », sous-entend d’être en capacité de choisir par soi-même.

Une personne est autonome lorsqu’elle peut décider et gérer sa vie sans aide (dictionnaire

des soins infirmiers, 3e édition, Ed Masson, Belgique, 2007). On peut donc être autonome et

dépendant c’est-à-dire vouloir faire quelle chose et physiquement ne pas pouvoir le faire ou

être indépendant mais pas autonome, c’est-à-dire être en capacité physique de se laver mais

ne pas savoir comment faire (Winance 2007).

1.3.5 La toilette : hygiène et propreté

Pour répondre à mon questionnement sur le choix de la toilette comme support de

l’évaluation des capacités, ma première hypothèse reposait sur le fait que la toilette est acte

quotidien et essentiel. Pour être propre et en bonne santé, une certaine hygiène serait donc

nécessaire. Dans un premier temps, il a fallu définir hygiène et propreté. Ainsi, l’hygiène « du

grec hugienon qui veut dire santé, est une partie de la médecine qui vise à préserver ou

favoriser la santé. Elle est l’ensemble des soins apportés au corps pour le maintenir » (Le Petit

Larousse, 2005). Par propreté on entend ici ce qui est « net, sans trace de souillure »

(CNRTL).

Si on envisage la toilette comme un acte essentiel, lorsque qu’une déficience est responsable

d’une incapacité entraînant une perte d’indépendance et/ou d’autonomie, des professionnels

comme les infirmiers ou les aides-soignants interviennent pour accompagner la personne et

pallier les difficultés qu’elle rencontre. Il paraît donc intéressant de savoir comment ces

soignants qui agissent au cœur de la toilette et d’autres qui ne la réalisent pas (médecin,

kinésithérapeute par exemple) envisagent ce soin. Une aide-soignante l’évoque

l’enchaînement de ces actes et la charge de travail que cela demande. Une infirmière quant à

elle, exprime le manque de valorisation de ce soin, qui n’est parfois même pas considéré

comme tel. Il est d’ailleurs souvent attribué aux stagiaires et peut être vécu comme une

punition par certains soignants (Rajablat, 2007). Parmi les professionnels de santé qui ne

participent pas aux toilettes, un médecin présente la toilette comme un soin indispensable,

Page 15: Evaluation des capacités lors de la « toilette

8

faisant partie du traitement. Selon lui, ce soin permet la prévention d’infection et est un bon

outil médical pour surveiller l’état cutané et trophique du patient. Il est source de stimulations

motrices et d’échanges entre le soignant et le soigné. La toilette serait également une réponse

à un besoin : celui d’être accepté par les autres (Rajablat, 2007).

1.3.6 Analyse des entretiens exploratoires

Deux entretiens exploratoires ont été réalisés auprès d’un ergothérapeute et d’une

aide-soignante, tous les deux travaillant en SSR auprès d’adultes et personnes âgées. Les

informations générales issues de ces entretiens ont été retranscrites en annexe.

L’entretien avec l’ergothérapeute révèle sa représentation de la toilette comme étant une

« activité élémentaire », « universelle ». C’est cette idée qui, associée à la demande du

médecin, lui suggère que la toilette serait un bon support pour une évaluation des capacités

car « c’est un bilan complet, autant des capacités fonctionnelles que des capacités

cognitives ». Il s’agit également d’un choix pratique compte-tenu parfois du manque de

matériel pour réaliser d’autres mises en situation. Cette observation est réalisée en structure,

la plupart du temps selon des bilans qualifiés de « maison », car créé par le professionnel pour

son service, ou selon une partie d’un bilan plus complet comme « la MH1AVIE ». L’entretien

révèle la diversité des outils pouvant être utilisés et surtout le besoin des soignants de se créer

un outil qui réponde à leurs attentes. L’aide-soignante, quant à elle, valorise le travail de

l’ergothérapeute et met en avant le recul et « le temps » qu’il a pour observer différemment

ainsi que les « adaptations » qu’il met en place pour la personne. Elle évoque le fait que sa

pratique est plus centrée sur le « maintien des capacités » et la « compensation ».

1.4 Question de recherche et hypothèses

L’évaluation de la situation de dépendance d’une personne âgée par

l’ergothérapeute en SSR doit-elle être systématiquement réalisée par

l’observation de l’activité « toilette » ?

Les hypothèses ont été élaborées afin de chercher à répondre à la question sous trois

angles : l’environnement de l’évaluation, l’activité évaluée et l’approche du professionnel

pour évaluer.

1 MHAVIE : Mesure des Habitudes de VIE

Page 16: Evaluation des capacités lors de la « toilette

9

❖ Hypothèse 1 : Le cadre institutionnel conditionne l’évaluation de la toilette.

❖ Hypothèse 2 : Les représentations sociales de la toilette influencent le déroulement

et les critères de l’évaluation.

❖ Hypothèse 3 : L’évaluation de l’activité « toilette » est abordée de la même manière

que les autres activités de vie quotidienne.

Les concepts développés dans le cadre théorique auront pour objectif d’apporter un éclairage

grâce à des recherches bibliographiques afin d’approfondir ces hypothèses. Seront donc

abordés le vieillissement, l’institution que sont les Soins de suite et de réadaptation, la toilette

et l’intervention de l’ergothérapeute auprès des personnes âgées dans le cadre de la toilette.

Page 17: Evaluation des capacités lors de la « toilette

10

2 Cadre théorique

2.1 Le vieillissement

La vieillesse fait partie intégrante de la vie. Il s’agit de la dernière étape de ce voyage

pleins de rebondissements et d’incertitudes, de joies et de peines, de rencontres et de

découvertes. Mais qui sont vraiment ces « vieux » ? Ces « futurs nous » aux traits marqués,

témoins d’une vie d’expériences et reflets d’événements passés ?

2.1.1 D’un point de vue biologique

Au niveau biologique, le vieillissement est universel et inexorable. Il se caractérise par

une accumulation de dommages cellulaires tout au long de la vie. Pourtant les effets de ce

phénomène ne sont pas évidents dans un premier temps, ils n’apparaissent que lorsque que

le corps, grâce à la croissance, n’arrive plus à surpasser ou juste à compenser les pertes

(Trouvé, 2009). L’âge ne se mesure donc pas en année mais plutôt en regard de l’état

psychologique et de l’aptitude ou l’inaptitude à être relativement indépendant dans les activités

de vie quotidienne. Ainsi, les capacités cognitives et mentales déclinent progressivement et le

risque de maladie est majoré (Organisation Mondiale de la Santé, 2018). Si le vieillissement

n’est pas une maladie, il s’apparente pourtant à une polypathologie. En effet, lorsqu’une

personne souffre de polypathologie, plusieurs systèmes de son organisme sont touchés

(vasculaire, pulmonaire, musculaire, nerveux, …) (Trouvé, 2009). Quand un être humain vieillit

c’est l’ensemble de son corps qui est concerné, aussi bien fonctionnellement que

cognitivement. L’équilibre devient plus précaire, la marche est moins sûre, les gestes sont plus

ralentis, les sens et la mémoire s’altèrent (Trouvé, 2009). Ces troubles physiologiques vont

amener deux plaintes majeures : la douleur et la fatigue.

Avec le vieillissement, le corps humain est plus susceptible de développer des maladies

chroniques multiples. « Elles seraient soit la conséquence soit la manifestation clinique des

défaillances liées au vieillissement » (La fragilité des personnes, 2013). L’ensemble de ces

bouleversements physiologiques peuvent amener des limitations fonctionnelles. Elles peuvent

notamment concerner les déplacements, les changements de position (couché-assis, …).

Lorsque les compensations de ces déficiences ne sont plus possibles, « l’état de vieillesse »

s’implante (Boutinet, 2010). Dans l’avancée en âge, des états de santé dits complexes

n’entrant pas dans des catégories de maladies distinctes peuvent apparaître. « C’est ce qu’on

appelle couramment les syndromes gériatriques, parmi lesquels figurent la fragilité,

l’incontinence urinaire, les chutes, les délires et les escarres » (OMS, 2018). Si certains sont

clairement définis dans la littérature, le concept de fragilité, lui, est présenté comme un

Page 18: Evaluation des capacités lors de la « toilette

11

syndrome gériatrique multidimensionnel. La fragilité serait liée à un déclin fonctionnel et

rendrait la personne âgée plus vulnérable. Une approche phénotypique, relative à des traits

physiquement observables chez un individu, a été proposée par Fried et al. (2001). Ainsi, une

personne présentant au minimum trois manifestations physiques comme une vitesse de

marche plus lente, de l’épuisement ou une perte de poids non intentionnelle sera désignée

comme étant fragile. Une seconde approche plus holistique a été présentée par Rockwood et

al. (2011). Elle prend en compte, en plus de l’aspect physique, l’aspect cognitif,

l’environnement physique et social, les capacités et les comorbidités (La fragilité des

personnes). De cette deuxième approche, on apprend le grand nombre ainsi que la variété de

facteurs influençant la condition d’une personne âgée. Le vieillissement physiologique

s’exprime donc différemment selon les individus.

2.1.2 D’un point de vue sociologique

Le terme « personne âgée » se veut respectueux car neutre, impersonnel, lissant toutes

les différences inter-individuelles relatives aux histoires de vie. « Il s’agit en fait d’un

euphémisme qui désigne la vieillesse sans la nommer comme celui de mobilité réduite gomme

le [handicap] » (Heslon, 2008, p.2). Si initialement les adjectifs « vieux et vieille » sont définis

par le fait d’être très avancé en âge (Larousse.fr), ils ont aujourd’hui une connotation péjorative

(Heslon, 2008). En réalité, la vieillesse, tout comme la jeunesse, sont des concepts relatifs,

tout dépend du référentiel.

Dans le langage courant, on est plus jeune ou plus vieux que quelqu’un. C’est notamment pour

cette raison qu’il est difficile de définir les limites de la vieillesse. Si le paradoxe de Pareto

confirme cette idée en disant « qu’on ne sait pas à quel âge commence la vieillesse, comme

on ne sait pas où commence la richesse » (Bourdieu, 1978, p.1), sociologiquement, le passage

d’« adulte » à « personne âgée » est couramment marqué par le départ à la retraite. En effet

il s’agit d’un moment dans la vie d’un adulte où les rôles changent, c’est le « passage de

l’activité à l’inactivité, des enfants à la maison aux enfants installés et dispersés, d’un réseau

relationnel centré sur la profession à un autre centré sur le voisinage, puis sur la

descendance » (Ennuyer, 2011, p. 132). Cette assimilation peut aussi s’expliquer par le fait

qu’il y a 50 ans, l’espérance de vie ne dépassait pas 70 ans. Ainsi lorsqu’une personne, à 65

ans, passait d’active à retraitée, la proximité entre ces deux âges faisait automatiquement

d’elle une personne âgée. Si l’année de départ à la retraite sert de repère chronologique, le

changement de l’âge légal de la retraite influe donc sur les personnes à inclure dans la

population dite âgée. Ceci est également à mettre en parallèle avec l’augmentation de

l’espérance de vie. Celle-ci étant plus importante de nos jours, la vieillesse, comme période

de la vie, s’étale sur un plus grand nombre d’années. Le vieil homme d’avant est devenu le

Page 19: Evaluation des capacités lors de la « toilette

12

jeune retraité d’aujourd’hui. Celui qui avait 60 ans n’était qu’à quelques années de la mort et

représentait l’ancienne génération dans sa famille, le 3ème âge. A présent, il fait partie d’une

« génération pivot », il est sollicité par ses enfants, ses petits-enfants et ses parents très âgés

(Bourdelais, 1993). Il est encore très actif, ses centres d’intérêt et ses consommations ont

seulement évolué : loisirs, voyages, sorties. La vieillesse se retrouve donc scindée en deux :

le 3ème âge correspondant aux nouveaux retraités et le 4ème âge, celui de la dépendance. Ce

dernier mobilise de ressources notamment en services de soin et accompagnement social

(Grand et al., 2000).

2.1.3 D’un point de vue démographique

S’il est difficile de déterminer à partir de quel âge une personne est considérée comme

âgée pour estimer la part qu’occupent les personnes âgées dans la population, un âge seuil

doit être défini. Le rapport Laroque (1962) estimait qu’une personne était âgée à partir de 65

ans. L’OMS, qui indiquait le même chiffre, précise à présent que cette population concerne les

60 ans et plus. Cependant, même si un consensus semble avoir été établi, des rapports

statistiques récents, publiés notamment par l’Insee ou l’Observatoire des territoires, utilisent

encore les deux chiffres. Ainsi, leurs études démographiques récentes ont montré, qu’en 2015,

en France, les plus de 65 ans représentaient 18,8 % de la population (contre 14,9 % en 1995)

et aujourd’hui la proportion de personnes âgées continue encore de croître. Cela concorde

avec le fait que l’espérance de vie ait largement augmenté en France. En 2018, elle était, pour

les femmes et les hommes de plus de 65 ans, respectivement de 23,2 et 19,4 années. Pour

compléter l’estimation de l’espérance de vie (EV), d’autres statistiques de l’Insee concernant

cette fois le nombre d’années sans incapacité, aussi appelé EVSI, ont été publiées.

Actuellement, ces chiffres montrent qu’après 65 ans, l’augmentation de l’espérance de vie

sans incapacité se fait parallèlement à celle de l’EV et donc que le nombre d’années

d’incapacité reste stable. En effet, bien que 17% des 65 ans et plus aient des difficultés pour

les soins personnels et 44% pour les tâches domestiques, une tendance à l’équilibre entre

l’EV et l’EVSI est observée. Cela peut s’expliquer par le fait que les limitations fonctionnelles,

cognitives et sensorielles sont plus facilement compensées aujourd’hui et que par conséquent,

leur présence n’impacte plus ou alors peu la réalisation des activités de la vie quotidienne

(Sécurité sociale, 2014).

2.2 Les Soins de Suite et Réadaptation

La durée de la vie et la prise en charge des incapacités des personnes vieillissantes sont

interdépendantes. De fait, l’amélioration de l’accompagnement des personnes âgées

Page 20: Evaluation des capacités lors de la « toilette

13

(nouvelles techniques médicales, technologies, …) a contribué à l’allongement de l’espérance

de vie et ce, en préservant au maximum leur qualité de vie. Par conséquent, le nombre de

personnes âgées avec des déficiences est plus important et nécessite une meilleure

organisation des soins. Le SSR (Soins de Suite et de Réadaptation) à orientation gériatrique

s’inscrit dans cette démarche d’accompagnement et tend à rendre autant que possible la

personne actrice de son projet de vie.

2.2.1 Rôle et fonctionnement des SSR

Les Soins de Suite et de Réadaptation sont des structures accueillant des personnes

sortant de l’hôpital (intervention chirurgicale, affection aigue, …) pour une continuité des soins

ou bien des personnes débutant le parcours de rééducation. Leurs objectifs sont de « prévenir

ou de réduire les conséquences fonctionnelles, physiques, cognitives, psychologiques ou

sociales des déficiences et des limitations de capacité des patients et de promouvoir leur

réadaptation et leur réinsertion » (Art. R. 6123-118 CSP, légifrance.fr). Les soignants présents

dans ce type de structures administrent les traitements curatifs ou palliatifs, assurent les soins

médicaux ainsi qu’un suivi en rééducation et réadaptation, mettent en place des actions

d’éducation thérapeutique et de prévention. Les patients bénéficient d’un accompagnement

social et sont préparés et soutenus dans la reprise d’un emploi, dans le réinvestissement de

leurs rôles sociaux et plus généralement dans leur réinsertion dans la société (fhp-ssr.fr, n.d.).

On distingue plus précisément trois missions principales dans le parcours de soin de la

personne en SSR : la rééducation, la réadaptation et la réinsertion. La rééducation vise la

restauration au maximum des capacités antérieures qu’elles soient physiques, cognitives ou

psychologiques. Il s’agit donc de permettre au corps de la personne de fonctionner de façon

optimale. La réadaptation intervient lorsqu’il subsiste des incapacités limitant la réalisation de

toutes ou d’une partie des activités de la personne. Elle apprend donc à réinvestir ce nouveau

corps, à s’adapter à ses limites et à trouver des moyens de les contourner. La réinsertion va

au-delà des soins médicaux et permet à la personne de reprendre sa vie (professionnelle,

familiale, sociale, …), en s’approchant au maximum des conditions de vie antérieures ou bien

en transposant ses nouvelles compétences. C’est la dernière étape d’un processus de soin

personnalisé (Fiche descriptive de l’indicateur de qualité et de sécurité des soins, HAS, 2019).

Ces objectifs sont généraux et forment une ligne de conduite pour l’ensemble des soins de

suite et de réadaptation quelles que soient leurs spécialités. En effet, les SSR peuvent être

polyvalents c’est-à-dire accueillir des personnes de tout âge présentant tout type d’affections

ou bien ils peuvent être spécialisés. La catégorisation peut se faire en lien avec l’âge et/ou la

pathologie. On retrouve ainsi les SSR pédiatriques polyvalents pour les enfants et/ou les

adolescents et les SSR adultes polyvalents pour les personnes âgées. Ainsi certains

Page 21: Evaluation des capacités lors de la « toilette

14

établissements sont spécialisés en neurologie, dans le traitement des pathologies cardio-

vasculaires ou encore en « affections des personnes âgées polypathologiques, dépendantes

ou à risque de dépendance » (fhp-ssr.fr, ND). Les SSR orientés dans la prise en soin de cette

dernière catégorie d’affections correspond à ce qu’on appelle les SSR gériatriques.

Les personnes âgées qui sont orientées vers ce type de structures présentent un état de santé

complexe. Le vieillissement est souvent associé à l’apparition de comorbidités (hypertension,

diabète, …). La complexité peut s’expliquer par les pathologies dont souffrent les patients dans

ces SSR car plusieurs systèmes organiques peuvent être concernés, et par d’autres facteurs

comme une dépendance physique importante, une situation sociale instable, un état

psychologique fragilisé, … (Soins de suite et réadaptation, solidarites-sante.gouv.fr, 2017).

2.2.2 Selon un cadre institutionnel

Dans le cadre d’un séjour en hospitalisation complète ou de jour, les patients doivent

bénéficier d’au moins deux heures par jour de prise en soin pluriprofessionnelle avec différents

paramédicaux. Pour répondre à leurs objectifs d’intervention, les Soins de Suite et de

Réadaptation sont des structures qui nécessitent certains équipements et aménagements.

Ainsi dans le cahier des charges détaillé par la Fédération des Hôpitaux Privés, il est stipulé

que les locaux doivent être adaptés à la population accueillie : des chambre avec des lits

électriques à hauteur variable, des systèmes de transfert et des salles de bain avec des

douches à siphon de sol, accessibles aux personnes à mobilité réduite. Les couloirs et autres

espaces de circulation doivent être équipés de main courante. Un SSR gériatrique doit

également pouvoir disposer d’un plateau de rééducation équipé : escaliers, table de

verticalisation, barres mais aussi salle d’appareillage, etc. pour que les professionnels puissent

réaliser les actes nécessaires à la prise en soin des patients (circulaire n°DHOS/O1/2008/305).

Si tous ces éléments favorisent la rééducation, la réadaptation et la réinsertion, il est toutefois

difficile de déterminer le temps que durera la prise en soin. En effet, si la Haute Autorité de

Santé estime la durée moyenne de séjour à 35,6 jours, cela dépend du patient et de l’atteinte

des objectifs fixés. Cependant, le SSR est transitoire et l’objectif principal reste une sortie dans

les meilleures conditions. Les soignants doivent tout de même s’assurer que la personne âgée

puisse sortir en toute sécurité, le plus souvent pour retourner à son domicile où elle sera suivie

par d’autres services (équipes mobiles, hospitalisation à domicile). Cette valorisation de l’offre

de soin à domicile s’intègre dans une stratégie globale de « déshospitalisation » (atih.sante.fr,

2013) qui vise à écourter voire à éviter les séjours hospitaliers grâce au développement de

toutes les alternatives possibles comme les services à domicile, l’auto-rééducation ou bien

l’utilisation de la technologie (télémédecine). Il s’agit également de permettre aux personnes

d’être coupées moins longtemps de leur environnement (atih.sante.fr, 2013).

Page 22: Evaluation des capacités lors de la « toilette

15

2.2.3 Professionnels de santé présents et projet de soin

Au sein des SSR gériatriques, différents professionnels de santé exercent ensemble.

L’équipe pluriprofessionnelle au minimum composée d’un médecin gériatre et d’un certain

nombre de professionnels comme des infirmiers, des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes,

des psychologues, des diététiciens et des assistants des services sociaux, auxquels peuvent

s’ajouter un médecin formé en médecine physique et de réadaptation, des orthophonistes ou

des pédicures-podologues par exemple (article D6124-177-50 CSP, 2008). Généralement on

retrouve aussi des aides-soignants assistant les infirmiers pour l’accompagnement des

personnes âgées lors des actes de vie quotidienne (repas, toilette, …) (Ministère des

Solidarités et de la Santé, 2017).

Selon l’article D6124-177-1 (2008) du Code de la Santé Publique, « l'équipe pluridisciplinaire

réalise pour chaque patient un bilan initial et élabore avec lui un projet thérapeutique » qui est

personnalisé. A l’entrée du patient, les objectifs du séjour sont établis de même que sa durée

qui est estimée selon les informations dont disposent les professionnels à la suite de leurs

évaluations. La date de sortie ainsi que les objectifs pourront être ajustés en fonction de

l’avancée dans le processus de soin. Pour définir tous ces paramètres relatifs au parcours de

la personne dans le SSR, chaque soignant, dans le domaine de ses compétences, lui fait

passer des bilans pour dresser son profil aussi précisément que possible. Toutes ces

évaluations, une fois rassemblées, permettront de former une « évaluation gériatrique globale

(médicale, psychologique, sociale et fonctionnelle) » (circulaire N°DHOS/O1/2008/305).

Dans le cadre d’une prise en soin adaptée et d’une rééducation coordonnée, l’HAS (2009)

recommande que le projet thérapeutique soit basé sur un certain nombre d’éléments devant

être renseignés dans le dossier patient : « un examen médical d’entrée », « une évaluation de

l’autonomie », « une évaluation sociale », « une évaluation psychologique ». Doivent

également être retranscrits, les réunions pluridisciplinaires, le projet de soin en lui-même ainsi

que le projet de vie. Toujours selon l’HAS, le projet de soin comprend les objectifs en lien avec

la récupération des capacités de la personne âgée qu’elles soient cognitives, physiques ou

psychologiques. Il vise l’indépendance et l’autonomie du patient. Le projet de vie, quant à lui,

fait directement le lien avec la réinsertion de la personne âgée après son séjour. Il s’agit de

prendre en compte l’environnement dans lequel elle sera : entourage, lieu de résidence, ….

Cette prise en soin globale a pour objectif de permettre à la personne de retourner dans son

lieu de vie d’origine (circulaire N°DHOS/O1/2008/305).

Page 23: Evaluation des capacités lors de la « toilette

16

2.2.4 La relation soignant-soigné au sein de l’institution

Pendant son séjour aux soins de suite et de réadaptation, la personne âgée va être en

relation avec d’autres personnes en soin mais aussi et surtout des professionnels de santé.

Historiquement, en France, les relations soignant-soigné peuvent être assimilées à du

paternalisme. Ce terme se base initialement sur la notion de bienveillance et sur la volonté

qu’ont les professionnels de santé de protéger les personnes qu’ils soignent. Suzanne Rameix

illustre le paternalisme par l’exemple de la relation médecin-patient où « le patient est comme

un enfant que le médecin soutient et protège et qu’il décharge de la responsabilité de décision ;

le patient […] fait confiance au médecin comme l’enfant à ses parents […]. Il existe une forme

de contrat implicite où le bien voulu par le médecin est le même que celui qui est voulu par le

patient » (repris par Clavreul, 2019, p.35). Les connaissances dont dispose le médecin ou plus

largement les soignants les rendraient plus aptes à savoir ce qui est le mieux pour la personne

soignée. En 2008, Manoukian évoque d’ailleurs que « les diplômes sont les garants de

compétences et de savoirs » et que cela hiérarchise la relation entre le soignant et la personne

soignée. Lors d’une hospitalisation, les relations initiales établies entre la personne âgée et le

professionnel peuvent être qualifiées d’asymétriques. En effet, la personne âgée devient un

« patient ». Par ce terme, son rôle social change de même que son environnement. Elle est

dans cet établissement pour recevoir des soins, des conseils (Formarier, 2007). Elle doit

s’habituer aux nouvelles règles qui régissent la structure, à l’organisation des lieux, des

journées mais aussi à un autre langage. L’hospitalisation est, pour elle, synonyme de

bouleversement des habitudes de vie et de perte d’intimité : horaires de repas fixes, parfois

des chambres doubles, etc..

Le rôle des soignants est de favoriser l’adaptation à ce nouvel environnement et de

l’accompagner afin que ce nouveau rôle de patient ne le rende pas passif (Formarier, 2007).

De cet accompagnement, le professionnel de santé enrichit son expérience et il développe

ainsi des connaissances et des compétences qui s’étendent au-delà de l’évaluation des

capacités et des besoins de la personne. Mais même avec cette vision holistique, le soignant

peut rester dans une optique de « prise en charge » c’est-à-dire « de supporter […], d’assumer

[leur] devoir d’attention envers autrui », ici le patient (Favetta, Feuillebois-Martinez, 2011).

Prendre le temps d’écouter et de faire paraît contradictoire avec les objectifs d’économie et

d’efficacité qui sont demandés aux soignants en institution (Argoud, Puijalon, 2003). Pourtant,

dans les textes officiels concernant l’accompagnement et l’accueil de cette population et dans

les documents propres aux établissements, l’écoute des souhaits des personnes âgées en

leur laissant le choix est devenue redondante. Ces « libres choix » ont donc pris une grande

importance dans les prises en soin des personnes âgées en situation de handicap ou de

Page 24: Evaluation des capacités lors de la « toilette

17

dépendance. Cela se traduit notamment par la recherche systématique du consentement (Loi

du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, chap. 2, art. 11), et de l’implication de la

personne dans sa rééducation. Cependant, en pratique, lorsqu’un soignant soumet plusieurs

propositions qu’il a présélectionnées ou une suggestion que la personne âgée doit ou non

approuvée, le choix n’est pas vraiment entier. En effet une partie des possibilités a déjà été

écartée soit par le soignant qui souhaite orienter la réponse soit par le cadre institutionnel qui

de par son fonctionnement limite le nombre d’options envisageables (contraintes

organisationnelles, budgétaires, matérielles, …). Ces dernières impactent notamment

l’intervention des aides-soignants lors de la toilette. Les possibilités de l’institution rendent les

recommandations faites par l’ANESM (2009) difficiles à mettre en œuvre pour l’ensemble des

patients, puisqu’il est préconisé de permettre à la personne de décider du moment et des

modalités de la toilette.

2.3 La toilette

Chaque jour, nous respirons, mangeons, buvons, …. En bref, nous vivons. Chacune de

activités citées précédemment sont nécessaires pour survivre. D’autres activités non

physiologiques mais néanmoins importantes comme communiquer, être entouré, se déplacer

font partie intégrante de notre vie. Qu’en est-il de la toilette ?

2.3.1 La toilette dans l’Histoire

En 1995, Georges Vigarello exprime le fait que chaque civilisation se considère comme

propre. Pour lui, seuls les critères évoluent.

Dans l’Antiquité, les Grecs ont associé le besoin de santé à celui de la beauté et pratiquaient

un véritable culte du corps afin de se rapprocher de celui des Dieux. Pour eux, la beauté était

intimement liée à la santé. Ils ont donc commencé à se baigner après la pratique intensive du

sport afin de détendre leurs muscles après l’effort et de se purifier (Le centre d‘information de

l’eau, cieau.com, n.d.). On retrouve cette idée de la purification dans les ablutions religieuses

et ce, à travers les âges. L’eau, symbole de pureté, permet de se débarrasser de la saleté, de

la souillure (Braustein, 2015). C’est dans cette optique que des bains publics gérés par l’Eglise

ont été créés en Occident au VIIe siècle. Puis à la fin du Moyen Âge, l’eau publique a été

considérée comme vecteur de maladie avec l’apparition de graves maladies comme la peste.

L’accès aux bains a alors été restreint et préservé uniquement comme indication

thérapeutique. Les « non-malades » réalisaient alors une toilette sèche pour littéralement

assécher le corps : utilisation du parfum pour les odeurs, poudrage des cheveux. Seules les

parties visibles étaient nettoyées c’est-à-dire les mains et la bouche. Le visage était essuyé et

Page 25: Evaluation des capacités lors de la « toilette

18

fardé tout cela dans l’objectif d’empêcher la maladie d’entrer dans le corps. Au XIXe siècle,

avec la recherche de la compréhension du fonctionnement du corps, les vertus constrictrices

de l’eau froide et dilatatrices de l’eau chaude ont été découvertes. Les bains sont donc

redevenus populaires et des leçons sur l’hygiène corporelle sont enseignées à l’école. L’eau

est de nouveau utilisée massivement et on y ajouta du savon pour qu’il purifie. La toilette telle

qu’on la connaît, réalisée dans la salle de bain, est en fait assez récente (Batikhy, 2009).

Au-delà des notions de propreté et de bien-être physique que les bains publics apportaient, ils

étaient également un lieu de rencontre. Pour les Romains, ils occupaient un place

prépondérante dans leur vie sociale : c’était l’occasion de se retrouver et de se montrer (Le

centre d‘information de l’eau, n.d.). La toilette a donc très tôt été associée à l’image que la

personne renvoie, à son appartenance à un groupe et plus généralement à sa participation à

la société.

2.3.2 Le concept de représentation

Filion (2005) distingue différents types de représentations : individuelles, collectives et

sociales. Les représentations individuelles sont, comme leur dénomination l’indique, propres

à chaque individu et sont construites en interaction avec son environnement physique mais

aussi social, … (Piaget, 1947). Les représentations collectives ou culturelles définissent un

mode de pensée, un langage propre à un groupe social, basées sur des référentiels communs

à ce groupe (Durkheim, 1898). Elles ont une certaine constance puisqu’elles sont notamment

basées sur des valeurs transmises par les générations précédentes. Enfin les représentations

sociales, elles illustrent un processus dynamique d’échanges entre des individus et/ou

groupes. Les pratiques de ces individus participent à la création de ces représentations. Ces

dernières sont donc amenées à être modifiées avec l’apparition de nouveaux concepts ou de

nouvelles techniques impactant les pratiques. Selon Fischer (1999), les représentations

sociales sont « la construction sociale d’un savoir ordinaire élaboré à travers les valeurs et les

croyances partagées par un groupe social […] et donnant lieu à une vision commune des

choses, qui se manifeste au cours des interactions sociales. »

Pour qu’un terme soit considéré comme un objet de représentation sociale, il doit être un

référentiel communément admis et régulièrement utilisé dans le langage courant d’une

majeure partie de la population (Filion, 2005). Ainsi plusieurs facteurs tels que l’environnement

et l’appartenance à un groupe social influencent les représentations. En outre, l’âge d’une

personne est également un élément déterminant. De fait, les représentations des personnes

âgées d’aujourd’hui sont différentes de celles des plus jeunes car elles ne se basent pas sur

le même contexte. Certaines choses dont les nouvelles générations disposent couramment

Page 26: Evaluation des capacités lors de la « toilette

19

étaient beaucoup plus rares quelques décennies auparavant comme par exemple avoir de

l’eau courante à son domicile ou bien posséder une voiture (Bourdieu, 1978).

2.3.3 Les différentes représentations de la toilette

Les différentes représentations de la toilette sont donc grandement influencées par

l’historique de la toilette dont une partie est détaillé précédemment. Dans le cadre d’une

hospitalisation, plusieurs représentations se confrontent, notamment celle de la personne

âgée et celle des soignants. La première peut être qualifiée d’individuelle car établie d’après

sa propre expérience et ses interactions avec son environnement. Elle est tout de même basée

sur l’éducation que la personne a reçue (représentation collective). Malgré l’évolution des

méthodes et la démocratisation des équipements autrefois réservés à l’élite (eau courante,

douche, …), certaines personnes, et a fortiori, les personnes vieillissantes sont très attachées

à leurs pratiques et à leur routine adaptées à leur environnement d’origine. Cette volonté de

préserver les routines en place peut s’expliquer par le fait que le vieillissement limite la rapidité

d’apprentissage tout en confortant la personne dans ses compétences acquises et répétées

durant toute une vie (Boutinet, 2010). Concernant la représentation des soignants, elle est

logiquement différente de celle de la personne soignée. D’une part parce que chaque

professionnel a aussi sa propre représentation et qu’il a également été influencé par une

représentation collective transmise par son éducation. D’autre part parce qu’il a reçu une

formation incluant des connaissances médicales et techniques qui ont participé à remodeler

sa représentation de la toilette (Moscovici, Hewstone, 1983 ; Salès-Wuillemin et al, 2007).

Ainsi pour la majeure partie de la population, la représentation culturelle de la toilette renvoie

à l’hygiène corporelle. Cette dernière, de par les éléments culturels qui s’y rapportent dans

notre société occidentale, est associée à la propreté c’est-à-dire à l’absence de traces de

souillure (E. Salès-Wuillemin et al, 2007). Dans le corps soignant, chaque profession soignante

de par la spécificité de sa formation a également fait évoluer sa représentation de la toilette .

Ainsi, d’après E. Salès-Wuillemin (2007), les aides-soignants associent les actes d’hygiène

corporelle à la notion de propreté : « se laver correctement », « prendre sa douche tous les

jours », « mettre des habits propres ». Les infirmiers, eux, l’associent plutôt aux protocoles de

soins : « respecter les protocoles », « mettre des gants, « faire des toilettes ». Si des points

communs subsistent entre la représentation populaire et celle des professionnels de santé,

certains référentiels ont été modifiés. Leur représentation de la propreté n’est plus seulement

définie par ’absence de traces de souillure mais aussi par l’absence de microbes, la

désinfection, … (Moscovici, Hewstone, 1983 ; E. Salès-Wuillemin et al, 2007). Une troisième

représentation peut intervenir lors de la prise en soin : celle de l’entourage. Il peut s’agir du

conjoint ou bien de celle des enfants ou petits-enfants. L’environnement social de la personne

âgée peut être très varié tant au niveau de l’âge que du milieu de vie (ville ou campagne), de

Page 27: Evaluation des capacités lors de la « toilette

20

la profession ou de groupe social. Autant de facteurs qui influencent les représentations. Plus

le nombre d’acteurs impliqués est important plus les divergences entre les représentations

peuvent être importantes.

2.3.4 La toilette comme un besoin

Le besoin de se laver a été très tôt considéré comme un besoin fondamental pour

l’Homme (Maslow, 1956, 2008). D’après la pyramide de Maslow (annexe ?), il s’agit d’un

besoin physiologique, situé à la base de son schéma, qui doit être assouvi avant de pouvoir

répondre aux besoins situés aux niveaux supérieurs. Pols (2014, p46) évoque également sa

primauté en indiquant que « se laver et d’habiller sont des prérequis à la réalisation […] des

choses qui comptent vraiment ». Winance (2007, p89) reprend Pols en mettant en lien le

besoin d’hygiène avec celui d’indépendance et d’autonomie, « dans la mesure où pour pouvoir

réaliser des activités qui en valent la peine comme travailler, avoir des relations sociales, […]

pour ouvrir la possibilité d’activités plus valorisantes ». Malgré cette récurrente hiérarchisation

des besoins situant la toilette en bas de l’échelle, il est tout de même intéressant de noter que

Maslow la remet en question, du moins partiellement. En effet, il précise que selon les

individus, leur mode de vie, leur environnement, leur éducation, etc., les besoins prioritaires

peuvent ne pas être ceux situés en bas la pyramide. Par exemple pour une personne ayant

toujours été très entourée, le besoin d’appartenance sera primordial, donc situé à la base de

la pyramide, et devra être comblé pour lui permettre de s’épanouir. Faire sa toilette ne serait

donc pas nécessairement un besoin universellement priorisé.

2.3.5 Toilette et hospitalisation

Le besoin d’ « être propre, soigné et protéger ses téguments » est aussi évoqué dans le

soin par Henderson (1947). Lors d’une hospitalisation, le rôle du soignant est donc de subvenir

à ce besoin lorsque la personne n’en est plus capable (Winance, 2007). L’aide qui lui est

apportée est prodiguée par des professionnels de santé formés aux soins d’hygiène : aides-

soignants et infirmiers. Ces derniers ont appris à accompagner lors de la toilette selon un

protocole, un enchainement d’étapes et le matériel a utilisé est également précisé (Soins-

Infirmier.com, 2016). Dans une fiche consacrée à la toilette des patients, le centre de

coordination de la lutte contre les infections nosocomiales (CCLIN) Sud-Est considère la

toilette comme un soin d'hygiène répondant à des critères stricts et permettant de lutter contre

le risque d'infection, si les règles sont respectées. Au cours de leur formation, les aides-

soignants et les infirmiers apprennent également à prendre en compte les besoins de la

personne, ses habitudes de vie et à la stimuler. Toutefois, l’apport de cette aide est nuancé

par le fait que retirer à une personne, même momentanément, ses responsabilités et certaines

Page 28: Evaluation des capacités lors de la « toilette

21

activités le rend passif et favorise l’apparition d’incapacités. C’est ce qui peut se produire lors

d’une hospitalisation. Permettre à une personne de garder certaines occupations « basiques »

comme se laver la rendrait moins passive (Pols, 2014). L’objectif serait donc de rétablir ou

préserver l’indépendance de la personne, c’est-à-dire lui permettre de réaliser seule ses

activités quotidiennes. Favoriser l’autonomie, au sens de capacité à s’auto-déterminer et à

décider par soi-même, est également un objectif majeur récurent lors des hospitalisations.

Pour atteindre ce but, il s’agirait de laisser la personne choisir les modalités de la toilette (lieu,

moment, matériel, …) et cela « [supposerait] une certaine tolérance pour la saleté » (Winance,

2007, p88). Il y a cependant une limite à la reproductibilité des habitudes de vie de la personne

compte tenu des normes d’hygiène qui sont en vigueur au sein des institutions.

2.4 L’ergothérapie

Au carrefour des concepts développés précédemment, l’ergothérapeute, en tant que

professionnel travaillant à partir de l’activité humaine, se retrouve au carrefour de tous les

concepts développés précédemment. Il peut travailler au sein de soins de suite et réadaptation

à orientation gériatrique. Il peut également être amené à intervenir dans le cadre de la toilette

puisqu’il s’agit d’une activité.

2.4.1 L’ergothérapie : une profession occupation-centrée

L’ergothérapeute est un professionnel intervenant dans le domaine du sanitaire et social.

Il accompagne des personnes de tout âge présentant des incapacités qui les placent en

situation de handicap dans leur vie quotidienne (Portail pour les personnes âgées et leurs

proches, 2018). Il est un acteur à part entière de la prévention pour maintenir l’indépendance

et l’autonomie, et intervient dans la rééducation, la réadaptation et la réinsertion des usagers

au travers de leurs activités (Arrêté 5 juillet 2010 relatif au DE d’ergothérapeute). Il prend en

compte les habitudes de vie et fait le lien entre la personne accompagnée, son environnement

et ses activités. Ses actions visent à « maintenir, […] restaurer et […] permettre les activités

humaines de manière sécurisée, autonome et efficace » (ANFE, 2019). La traduction

anglosaxonne d’ergothérapeute, « occupational therapist », met en avant le concept central

de la profession que sont les occupations. Elles peuvent être définies comme « un groupe

d’activités, culturellement dénommées, qui ont une valeur personnelle et socioculturelle et qui

sont le support de la participation à la société » (Meyer, 2013). Elles englobent notamment les

soins personnels, les déplacements, les loisirs, le travail ainsi que toutes les tâches qui ont de

l’importance pour un individu et permettent sa participation dans la société. Ces activités

peuvent être qualifiées de signifiantes « lorsqu'[elles ont] un sens pour la personne » et de

significatives « lorsqu'[elles ont] un sens pour l'environnement social (Leontiev, cité par M.-C.

Morel, 2006). Elles sont un moyen et un objectif pour la pratique de l’ergothérapie.

Page 29: Evaluation des capacités lors de la « toilette

22

2.4.2 L’autonomie : un objectif majeur pour l’ergothérapeute

Comme dit précédemment, un des objectifs de l’ergothérapeute est de favoriser

l’autonomie de la personne. Il en est de même dans la prise en soin des personnes âgées en

soins de suite et réadaptation. Winance (2007) met en avant le fait que favoriser l’autonomie

d’un individu passe par la diminution de la dépendance. De fait, recouvrer les capacités de

faire une activité nous laisse le choix de la réaliser ou non. Si des déficiences empêchent la

réalisation de cette activité alors la personne n’a pas le choix : l’activité ne sera pas réalisée.

Viser l’indépendance d’une personne n’aurait pas seulement pour objectif de réaliser ses

activités seule mais également de maintenir son autonomie, ce qui est un objectif majeur de

l’intervention en ergothérapie auprès de la population âgée. La recherche de solutions face à

une ou des dépendances de la personne âgée demande une remise dans le contexte. Lorsque

la dépendance s’installe, on doit déterminer qui est dépendant de qui et/ou de quoi. La

dépendance est tout à fait relative selon le regard qu’on lui porte et est intégrée dans un

système où se côtoient la personne en demande, le moyen de compensation (humain et/ou

matériel) ainsi que l’objet de la compensation. Ce dernier fait le plus souvent référence à une

action ne pouvant être effectuée (Kalfat, dans Ergothérapie en gériatrie, 2009). Memmi définit

la dépendance comme « une relation contraignante plus ou moins acceptée, avec un être, un

objet, un groupe ou une institution […] et qui relève d’un besoin » (repris par Kalfat, dans

Ergothérapie en gériatrie, 2009, p89).

Identifier les éléments composant la relation de dépendance permet « une intervention sur la

dépendance tout en […] incitant à respecter d’autres dépendances, dont la résolution relève

plus d’une représentation du [tiers (professionnel, aidant)] que d’un besoin intrinsèque du

dépendant. Cette idée de connexions entre les dépendances nécessite de la part du

professionnel de santé de chercher plus loin et de prendre en compte les besoins exprimés

par la personne (Kalfat, dans Ergothérapie en gériatrie, 2009). Parfois l’intervention d’une

tierce personne pour l’habillage ou la toilette n’est peut-être plus pertinente car la dépendance

physique n’est plus d’actualité mais la personne âgée peut chercher à compenser un autre

besoin, celui de contact humain ou de valorisation par exemple. L’autonomie pourrait alors

être définie par « la capacité à se développer et à choisir son projet de vie, ce qui peut impliquer

de déléguer à d’autres la réalisation pratique de certaines activités nécessaires» et non par

« la capacité à faire-soi-même ce que l’on peut » (Winance, 2007, p89).

2.4.3 Intervention ergothérapique auprès des personnes âgées

La pratique de l’ergothérapie se base sur des modèles conceptuels. Qu’ils soient spécifiques

à cette profession ou non, ils orientent l’intervention des professionnels selon les concepts qui

les caractérisent et sont associés à des outils d’évaluation. Depuis quelques années, en

Page 30: Evaluation des capacités lors de la « toilette

23

France, l’ergothérapie s’est tournée vers des modèles systémiques permettant une vision

globale de la situation et tenant compte de l’impact des facteurs intrinsèques et extrinsèques

comme l’environnement (Clavreul, 2019). L’utilisation de ces modèles est d’autant plus

pertinente en gériatrie car « les personnes âgées ont des problématiques complexes,

multifactorielles et fortement contextualisées » (Margot-cattin dans Ergothérapie en gériatrie,

2009, p99). Les évaluations en ergothérapie permettent de mieux comprendre les difficultés

que l’usager rencontre lors de la réalisation de ses activités et de mettre en évidence les

ressources et les obstacles présents dans son environnement (Kalfat dans Ergothérapie en

gériatrie, 2009).

Un diagnostic ergothérapique est établi afin d’orienter la suite de l’accompagnement. Pour se

faire, un premier recueil de données indirectes est effectué. Les hypothèses qui en résultent

oriente le thérapeute dans le choix des évaluations à venir (Dubois et al, 2017). Afin de mieux

connaître la personne et ses caractéristiques identitaires, l’ergothérapeute la rencontre lors

d’un entretien. Il recueille les difficultés exprimées par l’usager ainsi que ses demandes et

celles de son entourage proche (Kalfat dans Ergothérapie en gériatrie, 2009). D’autres

évaluations sous forme de bilans ou d’observations sont ensuite réalisées. Les résultats

obtenus permettent l’établissement d’un diagnostic et d’un plan d’intervention personnalisé et

adapté à la personne.

2.4.4 Evaluation des capacités fonctionnelles et cognitives en

ergothérapie

Selon Margot-Cattin (2009), on peut classer les évaluations selon trois catégories : les bilans

standardisés, les bilans « maison » (c’est-à-dire créé par un professionnel pour sa propre

utilisation et son service) ainsi que les observations réalisées selon un protocole plus ou moins

précis. Quelles qu’elles soient, elles ont toujours pour objectif « d’identifier les problèmes de

l’usager, de les comprendre et de les expliquer, de les coter et les interpréter » (Margot-cattin

dans Ergothérapie en gériatrie, 2009, p99). Tout comme les modèles, ces outils évaluatifs

peuvent être, ou non, propres à l’ergothérapie. Afin de faciliter la communication entre les

ergothérapeutes et les autres professionnels de santé, l’utilisation de bilans fonctionnels

interdisciplinaires comme la Mesure de l’Indépendance Fonctionnelle (MIF) ou d’outils

ergothérapiques validés avec des cotations précises (Kalfat dans Ergothérapie en gériatrie,

2009). Mais peu importe l’outil utilisé il est toujours le reflet d’un contexte précis et d’un modèle

de pratique adopté par le professionnel qui l’utilise (Margot-cattin dans Ergothérapie en

gériatrie, 2009).

Les évaluations sélectionnées par l’ergothérapeute peuvent cibler la pathologie c’est-à-dire la

mise en évidence des déficiences et les incapacités qui en découlent. L’intervention visera la

Page 31: Evaluation des capacités lors de la « toilette

24

réduction des limitations repérées. Dans ce cas, l’objectif final sera de retrouver l’autonomie

et l’indépendance antérieures de la personne dans ses activités sans toutefois chercher à

transposer dans leur contexte de réalisation (Sorita, 2016). Nicole Sève-Ferrieu (1996) évoque

leur importance afin d’identifier un trouble précis mais cette spécificité limite également leur

utilisation. D’une part parce que des bilans pour l’ensemble des troubles devraient être réalisés

sans quoi une atteinte pourrait ne pas être décelée et d’autre part parce qu’ils sont conçus

pour certaines professions, l’interprétation des résultats peut donc être imprécise et aléatoire.

Les évaluations peuvent également cibler l’occupation, au sens de réalisation d’activités ayant

du sens pour la personne. Cette dernière déterminera selon ses plaintes, les activités évaluées

en priorité afin de repérer les obstacles en regard des interactions entre ses capacités, les

exigences de l’activité et celles de l’environnement, restreignant sa performance (Sorita,

2016).

Les mises en situation sont souvent utilisées par les ergothérapeutes et notamment comme

support d’évaluation parce qu’elles permettent une vision d’ensemble. Elles répondent au

même principe que celui évoqué précédemment. Autrement dit, cette observation peut avoir

pour objectif de mettre en évidence des troubles ou bien le retentissement sur la vie

quotidienne et les freins à la participation de la personne (Sorita, 2016). Lorsque l’occupation

est la cible de l’évaluation, les mises en situation permettent de rester centré sur des activités

qui ont du sens pour la personne et d’observer la personne en interaction avec

l’environnement. Il s’agit d’un bon moyen d’ « envisager concrètement les conséquences

fonctionnelles […] et offre un espace relationnel indispensable à toute prise en [soin] efficace »

(Sève-Ferrieu, 1996, p.19).

Lorsqu’une activité est observée par l’ergothérapeute, différentes composantes de l’activité

peuvent être observées : la planification, l’organisation (chronologie des étapes et leur durée),

les habiletés, les fonctions et structures physiologiques sollicitées. Ces éléments peuvent être

considérés comme stables c’est-à-dire indépendants des conditions de réalisation ou bien

situationnels. Par conséquent, seront également pris en compte le matériel utilisé,

l’environnement physique et l’environnement social. Les composantes observées sont celles

directement liées à la plainte exprimée par l’usager (Meyer, 2013).

Page 32: Evaluation des capacités lors de la « toilette

25

3 Cadre d’analyse : recueil de données et méthode

3.1 Rappel de la question de recherche

Le cadre théorique a permis de développer les principaux concepts relatifs à la question

de recherche par des recherches documentaires. Il s’agit à présent de confronter cette théorie

à la pratique, à la réalité du terrain. Afin de resituer le contexte, voici un rappel de la question

de recherche et des hypothèses.

L’évaluation de la situation de dépendance d’une personne âgée par

l’ergothérapeute doit-elle être systématiquement réalisée par l’observation de

l’activité toilette ?

❖ Hypothèse 1 : Le cadre institutionnel conditionne l’évaluation de la toilette.

❖ Hypothèse 2 : Les représentations sociales de la toilette influencent le déroulement

de l’évaluation.

❖ Hypothèse 3 : L’évaluation de l’activité « toilette » est abordée de la même manière

que les autres activités de vie quotidienne.

3.2 Choix de la méthode

Afin de recueillir les données qualitatives relatives à l’évaluation de la toilette par

l’ergothérapeute en Soins de Suite et Réadaptation gériatrique, des entretiens semi-directifs

ont été réalisés. La grille d’entretien utilisée est composée de questions ouvertes formulées

pour guider, sans suggérer, les personnes interrogées tout en leur laissant la liberté de

développer leurs réponses. Des idées complémentaires peuvent ainsi être évoquées et

approfondies lors de l’entretien selon leur lien avec le sujet.

3.3 Public cible

Les personnes interrogées sont des soignants intervenants sur le temps de la toilette en

SSR gériatrique : deux ergothérapeutes ainsi que deux aides-soignantes. Le critère se

rapportant au lieu d’exercice des professionnels a été défini en lien avec la problématique.

Une partie des compétences des ergothérapeutes peut les amener à évaluer les capacités

d’un patient lors de ses activités de vie quotidienne parmi lesquelles la toilette. Ils ont été inclus

dans la population cible afin d’en apprendre plus sur leurs pratiques en SSR et lors de la

toilette. Les aides-soignants étant formés dans l’accompagnement des personnes

Page 33: Evaluation des capacités lors de la « toilette

26

hospitalisées au quotidien, et notamment pendant la toilette, les interroger a notamment

permis d’apporter un éclairage sur leur intervention auprès des patients et sur le

fonctionnement de leur service.

Ces professionnels ont été sélectionnés pour leur métier, leur lieu d’exercice. Les

représentations étant interrogées, il semblait intéressant de choisir des soignants d’âges et

d’expériences différentes puisque ce sont des facteurs pouvant les influencer.

• E1 : ergothérapeute depuis 2011, avec une expérience principalement en gériatrie,

seule ergothérapeute travaillant dans ce SSR gériatrique depuis 1 an et demi.

• E2 : ergothérapeute dans ce SSR gériatrique depuis 12 ans et ayant exercé

principalement en rééducation et réadaptation adultes. Sur le site du SSR il y a d’autres

établissements (EHPAD, …), elles sont trois ergothérapeutes à y travailler. Elle a le

projet de se former au AMPS (Assessment of Motor and Process Skills).

• A1 : aide-soignante ayant travaillé depuis près de 30 ans en gériatrie, travaillant depuis

plus de 25 ans dans le même SSR gériatrique que E1.

3.4 Passation des entretiens

Les questions composant la grille d’entretien sont basées sur les hypothèses de

recherche ainsi que sur les concepts développés dans la partie théorique à savoir : le contexte

en lien avec le cadre institutionnel du SSR, leur représentation du vieillissement et de la

toilette. Des questions relatives à leurs pratiques respectives lors de la toilette et sur la

collaboration interprofessionnelle ont été posées. Le guide d’entretien avec l’ensemble des

questions posées est disponible en annexe.

Les entretiens ont été réalisés par téléphone pour des raisons d’organisation (temps de trajet,

emploi du temps). Les prises de contact initiales ont eu lieu grâce des professionnels

m’accompagnant ou m’ayant accompagné lors d’un stage ainsi qu’à des relations familiales.

Les entretiens ont été précédés de la signature d’un formulaire de consentement éclairé

envoyé par mail et a duré en moyenne trente minutes. Chaque appel a été enregistré avec le

consentement des interlocuteurs, retranscrit et est disponible en annexe.

Page 34: Evaluation des capacités lors de la « toilette

27

3.5 Analyse des données

3.5.1 Méthode d’analyse

Les données retranscrites à la suite des entretiens ont d’abord été analysés dans un tableau

en regroupant les réponses selon les questions. Cette méthode n’étant pas efficace puisque

les questions en elles-mêmes ont varié selon les dires des personnes interrogées. Les

différentes retranscriptions ont été imprimées et les données en lien avec un même thème ont

été surlignées d’une même couleur. Les thèmes explorés sont en lien avec les concepts

développés dans le cadre théorique. L’objectif de cette étude est de mettre en lumière tous les

éléments influant sur l’intervention de l’ergothérapeute dans le cadre de l’évaluation de

l’autonomie et de l’indépendance lors de la toilette en soins de suite et réadaptation gériatrique.

3.5.2 Professionnels interrogés

Afin de situer le contexte d’intervention des professionnels interrogés et les facteurs pouvant

influencer leurs représentations (âge, formation, expérience), voici un tableau récapitulatif

reprenant les informations les présentant :

ENTRETIEN N°1 ENTRETIEN N°2 ENTRETIEN N°3

Profession Ergothérapeute (E1) Ergothérapeute (E2) Aide-soignante (AS1)

Expérience En EHPAD pendant 6

mois de fin 2011 et

après de 2012 jusqu’à

fin 2017 en Equipe

Spécialisée Alzheimer

donc du domicile.

Plusieurs structures de

Médecine Physique et

Réadaptation

essentiellement, auprès

d’adultes

principalement, en

neurologie, en

orthopédie, en

traumatologie.

Début en faisant des

remplacements tant

qu’agent de service en

SSR gériatrique en

1986.

Obtention du diplôme

d’aide-soignante en

1989. Plusieurs

remplacements en

SSR gériatrique et en

maison de retraite,

ainsi qu’un emploi

dans un service à

domicile.

Structure SSR Gériatrique n°1 depuis fin 2017

SSR Gériatrique n°2 depuis 2007

SSR Gériatrique n°1 depuis plus de 25 ans

Page 35: Evaluation des capacités lors de la « toilette

28

3.5.3 Admissions et séjours en SSR gériatrique

Les personnes âgées accueillies dans les structures où travaillent les trois

professionnels interrogés, l’ont été pour de « multiples raisons » (E2). Les « chutes » semblent

être la cause principale d’admission dans le service de AS1 et d’E2. Elles peuvent avoir

provoqué un traumatisme physique nécessitant une prise en charge « orthopédique » ou être

le symptôme d’un « maintien à domicile difficile » et/ou de « troubles cognitifs » (E2, AS1). La

pose de « prothèse » (E1), le suivi oncologique (E1, AS1), les « décompensations » (E2, AS1)

ou bien les « accidents vasculaires cérébraux (AVC) » (E2) sont également des causes

d’admission au sein des SSR gériatriques.

Les séjours en SSR des personnes âgées durent entre « quinze jours et quatre mois » (AS1).

Ces variations de durée peuvent s’expliquer de plusieurs manières, notamment selon les

causes d’admissions (E1, E2, AS1). Ainsi après la pose d’une « prothèse de hanche », le

séjour dure « à peine 3 semaines » (E1) comme pour une « décompensation cardio-

respiratoire » (E2) alors que « ceux qui n’ont pas le droit à l’appui peuvent rester près de 6

semaines » (E1). Une personne ayant eu un « AVC » peut rester « trois-quatre mois » (E2).

La présence de « troubles cognitifs » (E1) peut également prolonger le séjour sur « plusieurs

mois » (E1) s’il faut trouver « une place en EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour

Personnes Âgées Dépendantes) » (E1). L’aide-soignante interrogée (AS1) a évoqué le

raccourcissement des séjours. Auparavant l’ensemble des soins étaient effectués pendant

l’hospitalisation complète dans le SSR et la sortie était prévue une fois qu’une « revalidation »

(AS1) confirmait que la personne n’avait plus besoin des soins fournis dans l’établissement. A

présent, « le séjour se raccourcit » car certains soins peuvent finir d’être prodigués « à domicile

ou en hospitalisation à temps partiel (HTP) » (AS1) et pour un aspect « financier » (AS1). La

sortie de la personne est prévue quand des aides nécessaires sont mises en place et que

cette dernière « peut rentrer chez elle en sécurité » (AS1).

3.5.4 Représentations des soignants

3.5.4.1 Représentations concernant les personnes âgées

Il n’y a pas de consensus concernant l’âge à partir duquel la personne peut être considérée

comme âgée : « vers 80 ans » pour AS1, « plus de 70 ans » pour E2 ou « plus de 65 ans »

pour E1 qui ajoute la notion de « fragilités ». L’aide-soignante soulève le fait que l’âge n’est

pas un déterminant suffisant, « on voit des gens de 90 ans qui sont très bien […] et d’autres à

70 ans qui peuvent être considérés comme des personnes âgées ». Il s’agirait alors de prendre

en compte « les difficultés dans l’autonomie globale » (AS1) s’illustrant par des « capacités

dans la vie quotidienne perturbées ou diminuées » (E1). Ces personnes « âgées » présentent

Page 36: Evaluation des capacités lors de la « toilette

29

souvent « des difficultés à se mouvoir » (AS1) ou une limitation cognitive avec « des pertes de

mémoire » (AS1).

3.5.4.2 Représentations concernant la toilette

La « toilette » peut être définie comme le fait de « subvenir à ses soins personnels,

réaliser ses soins personnels d’hygiène » (E2). E1 décrit les étapes de la toilette comme le

« lavage du visage », la « toilette du haut », la « toilette du bas », « les pieds si la personne le

peut » ainsi que « soins dentaires » et capillaires. AS1 met en lien « la propreté » avec « le

bien-être » et « une meilleure estime de soi ». Elle note aussi son influence sur le « regard des

autres ». Afin de réaliser ce soin d’hygiène, l’utilisation du « gant » devant le « lavabo » est le

premier élément qui est cité par l’ensemble des professionnels interrogés, puis vient « la

douche » (E1, E2, AS1) et « le bain » (E2, AS1). Des « aides techniques » (E1) peuvent

également être utilisées lorsque des compensations sont nécessaires.

La fréquence de la réalisation de la toilette dépend « des habitudes de vie de la personne »

(E1, E2). La pratique d’ « exercice physique » (E1), la « transpiration » (E1) et l’

« incontinence » (AS1) sont des raisons pour lesquelles une personne se lave « tous les

jours » (E1, AS1) voire plusieurs fois par jour (AS1).

Les personnes âgées ont des habitudes de vie variables qui dépendent notamment de « leur

contexte de vie » (E2). Certains se lavent « tous les jours ou d’autres non » (E2), certains

prennent « des douches » (E2), d’autres se lavent « au lavabo » (E2). Les professionnels

expriment généralement le fait que les « personnes âgées n’aiment pas trop la douche » (E1),

« se négligent […], ne vont pas se changer » (AS1). D’après leurs expériences, elles feraient

plutôt une « toilette au lavabo tôt le matin » (E1, E2), notamment dans un contexte rural (E2).

3.5.5 La toilette lors du séjour en SSR

3.5.5.1 Intervention des aides-soignants

Les aides-soignants « réalisent les soins d’hygiène de la personne » (E1) âgée

hospitalisée. Ils interviennent pour « aider », « faire », ou « amener la personne à faire » (AS1)

en la stimulant. L’accompagnement se fait selon « la personne, son handicap, […] ses

habitudes de vie » (AS1). Leur intervention se déroule selon « un protocole » (E1, E2) , une

manière de faire qui leur a été apprise pendant leur formation (E1, E2, AS1), laver « du plus

propre au plus sale » (AS1). « Les habitudes de vie étaient moins prises en compte » (AS1)

dans les anciennes formations, maintenant « c’est un peu moins technique » (AS1) et plus

adapté à la personne.

Page 37: Evaluation des capacités lors de la « toilette

30

3.5.5.2 Contexte de l’accompagnement

Chaque service au sein des SSR où travaillent les professionnels interrogés a une

capacité d’accueil de d’environ 20 lits. Leurs horaires de travail sont programmés selon un

roulement afin que les aides-soignants soient « deux le matin » (E1, AS1) et « une le soir »

(E1, AS1). Le premier commence à 6h30 et termine à 14h30, le deuxième travaille de 8h à

16h et le troisième de 13h30 à 21h (AS1).

La planification des accompagnements à la toilette se fait après un « entretien avec la

personne » (AS1), afin de connaître ses habitudes de vie et d’ « essayer de faire selon leur

rythme […] même si on est dans un établissement » (AS1). L’aide-soignante a cependant

relevé que les personnes ne pouvaient pas prendre de bain car le service ne possède « pas

de baignoire ». Le créneau est également adapté afin que les personnes « soient propres »

pour assister aux « séances de rééducation » prévues « le matin » (E1, AS1). Sont également

prioritaires les « gens déambulants qui se sont déshabillés pendant la nuit » (AS1) et ceux qui

se sont souillés. Si la personne peut se débrouiller seule, « elle va commencer par son visage,

son buste, ses bras, ses mains, […] puis la toilette intime, le lavage des dents » (AS1). Certains

accompagnements ne se font que « pour un dos » (AS1) ou pour une étape particulière, dans

ces cas-là les personnes « sonnent » (AS1) pour demander de l’aide. L’adhésion aux soins

serait conditionnée par le « comportement » (E1) de la personne et dépendrait de l’aide-

soignant(e) réalisant les soins. La participation de la personne serait également influencée par

la temporalité de la réalisation, « certains jours la personne âgée va faire un effort et d’autres,

elle va appuyer tout le temps sur la sonnette » (E1).

L’aide-soignante (AS1) met en avant le fait que ses collègues et elle disposent d’une variété

d’équipements (« gants », « verticalisateurs », « lève-malades », etc.) permettant

d’accompagner au mieux les personnes. Cependant, ils disposent de « très peu de temps »

(AS1) et de « personnel » (AS1), ce qui les oblige à agir avec « empressement » (AS1). Les

sonnettes qu’utilisent les personnes pour demander leur aide les accompagnent en chambre

ce qui les « envahit » (AS1) car elles « sonnent sans arrêt » (AS1).

A l’issue des accompagnements à la toilette, les aides-soignants inscrivent sur le logiciel de

transmissions si la personne a eu « besoin d’aide » (E1), les actes pour lesquels elles ont

aidés et si la compensation était totale ou « partielle » (E1).

3.5.6 Intervention de l’ergothérapeute

L’ergothérapeute intervient pour effectuer un bilan d’autonomie dans les activités de

vie quotidienne sur prescription (E1, E2, AS1). Cette dernière est faite par le médecin

« systématiquement à toutes les entrées » (E2). Il arrive que l’ergothérapeute elle-même en

Page 38: Evaluation des capacités lors de la « toilette

31

fasse la demande (E1) par exemple lorsqu’une personne présente des « troubles cognitifs »

(E1) ou des « pathologies » induisant une dépendance (E1).

Les objectifs de prise en soin sont établis « selon le projet de la personne » (E2) au cours d’un

« entretien » où sont questionnées les habitudes de vie selon une trame de questions propre

au service, cela peut être une récupération « de l’autonomie » dans l’objectif d’un « retour à

domicile » ou bien « dans une activité définie » par la personne (E2). Ce recueil de données

peut permettre à l’ergothérapeute d’estimer « si le lendemain il va y avoir besoin d’intervenir

ou pas » (E1). Différentes « mises en situation » peuvent être réalisées afin d’évaluer « les

activités élémentaires » telles que « la toilette », « les transferts, les déplacements et le

repas » (E2) ou alors un seul « bilan de la toilette » (E1) global, aussi appelé « bilan de

l’autonomie » (E1), comprenant toutes les activités citées précédemment sauf le repas. Selon

les besoins, des « bilans cognitifs et des visites à domicile » (E2) peuvent également être

prévus.

La toilette est choisie comme support d’évaluation car il s’agit « généralement » d’ « une

activité significative pour la personne » (E2), du « deuxième acte que l’on fait en se levant »

(E1). C’est « une activité de vie quotidienne » (E1, E2) qui entre donc dans le champ de

compétences de l’ergothérapeute (E1, E2). Elle est « facile à mettre en place dans le contexte

hospitalier » (E2) tout en se rapprochant le « plus possible du contexte de vie de la personne »

(E2).

L’intervention sur le temps de la toilette par l’ergothérapeute n’est pas systématique (E1, E2).

L’ergothérapeute E1 aimerait cependant « proposer une évaluation à la toilette pour chaque

personne qui arrive » mais cela n’est actuellement pas possible car elle est seule pour quatre

services.

L’évaluation lors de la toilette se fait lorsque l’ « entretien et les éléments fournis par le médecin

et l’entourage » (E2) suggère un besoin, qu’il y a un « décalage entre les capacités de la

personne » en rééducation et l’accompagnement en chambre (E1) car les soignants suppléent

plus que nécessaire (E1, AS1) notamment parce cela prend « moins de temps de faire à la

place » (AS1). Les aides-soignants peuvent solliciter l’ergothérapeute quand ils rencontrent

des difficultés (E1, AS1). Les personnes âgées sont rarement à l’origine de la demande pour

le bilan de la toilette (E1). En effet, s’il semble qu’elles demandent d’elles-mêmes de l’aide

pour des activités telles que « le repas ou les loisirs » (E1) ou « l’habillage » (E1), ce n’est pas

le cas pour la toilette. La plupart du temps se sont donc les soignants qui proposent à la

personne que l’ergothérapeute vienne (E1, AS1) ou bien cette dernière va « spontanément »

« tous les voir » (E2).

Page 39: Evaluation des capacités lors de la « toilette

32

3.5.7 Déroulé de l’évaluation de la toilette

Avant chaque bilan, un premier entretien est toujours réalisé (E1, E2) et le

« consentement » est recueilli (E2). Ce dernier est souvent obtenu car les personnes âgées

« sont là en rééducation » (E1), il n’y a « donc pas eu de refus » « pour l’instant » (E1).

L’évaluation se passe « dans la chambre de la personne » (E1, E2) pour « une demi-heure au

moins » (E2) voire « 45 minutes » minimum (E1) « le matin » (E1, E2) car c’est « plus

significatif » que l’ « après-midi » (E2). Les premières observations sont effectuées à l’arrivée

de l’ergothérapeute sur son lieu de travail soit « 9h » (E1, E2), « des fois ce n’est pas assez

tôt » (E1) pour les personnes âgées qui « préfèreraient vers 7h30 » (E1). Le professionnel est

souvent seul (E1, E2, AS1) pour évaluer ou alors accompagné de « stagiaires aides-soignants,

infirmiers ou ergothérapeutes » (E1, E2, AS1). Les aides-soignants n’y participent pas par

manque de temps (E2) et parce que leur présence pourrait influencer la participation de la

personne âgée (AS1) bien que « cela pourrait être intéressant » (AS1) pour leur pratique.

Pendant ce créneau, l’ergothérapeute se base sur « l’observation » (E1) et laisse la personne

faire selon « ses habitudes » (E2), identifie les erreurs et les éventuelles « stratégies de

compensation » (E1). Le professionnel peut aussi évaluer l’ « utilisation des aides

techniques » proposées (E1). Tout ce qui est observé peut être décrit dans un bilan narratif

(E1) selon différentes catégories telles que « déplacements, transferts, toilette du haut, toilette

du bas, habillage, chaussage, continence » en lien avec des grilles pluridisciplinaires type

« AGGIR2 ou ADL3 » (E1) afin que cela soit compréhensible « pour tout le monde médical,

médico-social » (E1). La « MHAVIE4 » peut également être utilisée en reprenant « les items »

« qui intéressent la personne » (E2) et les critères associés : « avec ou sans aide technique,

avec difficultés, sans difficultés, réalisé, non réalisé, … » (E2).

L’évaluation par l’ergothérapeute permet un gain de temps pour les aides-soignantes (E1)

parce que le créneau réservé à l’évaluation est long, temps que les AS n’ont pas (E1) et que

l’ergothérapeute va pouvoir « choisir un déroulé […] qui permette aux soignants de passer le

minimum de temps avec la personne » (E1). Il s’agit également d’un regard extérieur car les

aides-soignants n’ont parfois « plus de recul » (AS1) sur les capacités d’une personne.

3.5.8 Transmissions

« Quelques jours après », les aides-soignants transmettent si les préconisations

conviennent ou bien la personne est revue (E1).

2 Grille AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupes Iso Ressources) 3 Grille ADL (Activities of Daily Living) soit en français, « Activités de la vie quotidienne » 4 MHAVIE (Mesure des HAbitudes de VIE)

Page 40: Evaluation des capacités lors de la « toilette

33

Les aides-soignants prennent connaissance du résultat de l’évaluation sur le logiciel de

transmission (E1, AS1) ou grâce à un pictogramme qui est laissé en chambre. Ils n’ont

cependant « jamais été curieux » de savoir quel outil a mené à ces conclusions (AS1). Des

synthèses ont également lieu chaque semaine (E1, AS1) afin d’échanger sur les progrès de

la personne et les « résultats des bilans » (E1, E2, AS1) ainsi que pour déterminer si une

intervention sur la réalisation de la toilette a besoin d’être mise en place par l’ergothérapeute

(E2). Les échanges avec les aides-soignants sont très importants car ceux-ci voient les

personnes hospitalisées tous les jours et peuvent ainsi distinguer les évolutions (E1).

3.6 Limites

Malgré le grand nombre de ressources explorées, très peu de documents ayant un lien

direct avec le sujet, l’évaluation de la « toilette » en ergothérapie en rééducation/réadaptation,

ont pu être exploités. La plupart des références traitent donc pour la plupart d’une partie du

sujet, d’une notion abordée, comme l’évaluation en ergothérapie ou bien la toilette.

La population concernée par la recherche était les personnes âgées. Comme il l’a été

démontré dans la partie théorique, il n’y a pas de consensus déterminant précisément les

critères d’inclusion pour cette population. Afin de dépasser cette difficulté et ne pas faire

d’approximations, l’étude s’est concentrée sur les personnes âgées en séjour en soins de suite

et réadaptation gériatrique.

Les personnes âgées évaluées lors de la toilette par un ergothérapeute n’ont pas été

interrogées car le cadre juridique de la recherche aurait rendu complexe leur participation aux

entretiens. Il aurait cependant été pertinent de questionner leurs propres représentations du

vieillissement, de la toilette ainsi que leur ressenti concernant l’intervention des soignants

(aides-soignants, ergothérapeutes, …) lors de cette activité.

L’enquête réalisée était de type qualitatif restreignant, compte-tenu du temps imparti, le

nombre de personnes participantes. Les trois professionnels interviewés sont de deux corps

de métier différents, ergothérapeute et aide-soignant, et travaillent dans deux structures

distinctes afin d’exploiter au mieux le faible nombre d’entretiens réalisés. Aucune aide-

soignante du même établissement que E2 n’a pu être interrogée pour des raisons de

disponibilités. Il aurait été intéressant de pouvoir associer le point de vue d’une aide-soignante

à celui de la deuxième ergothérapeute et également de le comparer à celui de l’autre aide-

soignante.

Les aides-soignants reprenant une partie des compétences et tâches des infirmiers, interroger

ces derniers auraient pu permettre un point de vue complémentaire d’autant qu’ils peuvent

être amenés à accompagner lors de la toilette. Cependant ce soin n’étant pas celui qu’ils

Page 41: Evaluation des capacités lors de la « toilette

34

réalisent le plus, la participation des aides-soignants à l’enquête paraissait plus pertinente et

a donc été préférée.

Ayant peu d’expérience dans la passation d’entretiens, certains points évoqués par les

professionnels interrogés n’ont pas fait l’objet d’une reformulation ou d’un éclaircissement et

n’ont donc pas plus être pleinement exploités. Il est également important de préciser que les

données recueillies ne sont pas exhaustives ni généralisables même si elles apportent à

l’étude une vision plus concrète du sujet grâce à la pratique sur le terrain.

4 Discussion

4.1 Retour sur les hypothèses

La première hypothèse concernait le conditionnement de l’évaluation de la toilette par le

cadre institutionnel.

D’après les entretiens, il apparaît que différents facteurs en lien avec l’environnement

hospitalier ont un impact la réalisation de l’évaluation des capacités lors de la toilette. Les

professionnels ont évoqué le fait que si les horaires de cette dernière étaient,

assez logiquement, restreints à ceux où l’ergothérapeute travaille, un autre paramètre est pris

en compte comme lors de la réalisation de la toilette par les aides-soignantes. En effet, les

personnes âgées doivent suivre un certain nombre de séances de rééducation par jour lors de

leur séjour (cahier des charges de la FHP, fhp-ssr.fr) et les professionnels interrogés ont

évoqué un principe tacite selon lequel les personnes devraient être « propres » et donc avoir

fait leur toilette avant d’aller à ces rendez-vous. Ces dernières étant souvent le matin dans les

structures des professionnels interrogés, cela constitue une contrainte supplémentaire pour la

planification de l’évaluation.

Ces derniers ont d’ailleurs tous rapportés et soulignés l’importance de prendre en compte les

habitudes de vie dans la réalisation des soins des personnes hospitalisées (HAS, 2009), même

si le contexte institutionnel (organisation, collectivité, environnement…) ne permet pas toujours

de les appliquer pleinement. Le recueil de données concernant les habitudes de la personne

ne se base pas sur un outil validé mais sur une trame de questions établie en interne.

L’utilisation d’un support dédié aux habitudes de vie tel que la MHAVIE, qui est actuellement

utilisée comme outil d’analyse de l’observation par une des ergothérapeutes interrogées,

permettrait d’explorer l’ensemble des activités « courantes » de la vie quotidienne

(Fougeyrollas et al, 2004).

L’environnement physique n’est pas apparu comme étant une contrainte lors de la réalisation

de l’évaluation dans le cadre de la toilette. Le cadre était même favorisant pour une mise en

Page 42: Evaluation des capacités lors de la « toilette

35

situation de cette activité puisque chaque chambre est équipée d’une salle d’eau qui, selon

les représentations des professionnels interrogés, dispose de l’équipement nécessaire pour

reproduire au mieux les conditions naturelles de réalisation.

Concernant la durée de séjour en soins de suite et réadaptation, un raccourcissement a été

évoqué par l’aide-soignante retranscrivant la stratégie de « déshospitalisation » (atih.sante.fr,

2013). Elle a en effet expliqué que la sortie est prévue dès que les activités dites élémentaires,

telles que manger, boire, éliminer, se laver, s’habiller, etc., peuvent être assurées par la

personne elle-même ou un tiers (aidant naturel ou service d’aide domicile). Le reste des soins

de rééducation et/ou de réadaptation peuvent continuer à être prodigués en externe

(atih.sante.fr, 2013). Toutefois ce raccourcissement des séjours n’a été relevé que par l’aide-

soignante et ne semble donc pas avoir une influence significative sur la temporalité de

l’évaluation.

La deuxième hypothèse supposait que les représentations des soignants et plus

particulièrement celles de l’ergothérapeute influençaient l’évaluation de la toilette.

Les différents propos recueillis lors des entretiens montrent des liens entre les représentations

des soignants et une relative influence sur la réalisation de la toilette et son évaluation lors de

l’hospitalisation. Il en est ressorti une représentation culturelle commune concernant les

modalités de la toilette. Selon les professionnels interrogés, la toilette se ferait plutôt le matin

et aurait pour objectif d’être propre en se lavant grâce à l’eau. De nos jours, la quasi-totalité

des logements en France étant pourvus d’un accès à l’eau courante et ce, depuis quelques

dizaines d’années, cela peut expliquer la présence de l’eau dans les représentations de la

toilette. L’utilisation de l’eau lors de la toilette serait un phénomène culturel en France, établi

par la généralisation de l’eau courante et transmis de générations en générations (Bourdieu,

1978).

L’aide-soignante a, quant à elle, ajouté la notion d’estime de soi et le lien entre la propreté et

le regard des autres. Se laver selon les « normes » de la société actuelle correspondrait à une

représentation sociale de la toilette, c’est-à-dire pouvant être influencée par les pratiques de

la population (Filion, 2005) et aurait une réelle influence sur l’image que la personne renvoie

et par extension sur son intégration dans la société. Faire sa toilette répondrait donc à un

besoin d’estime de soi et aussi à un besoin d’appartenance (Maslow, 1956, 2008).

Les représentations sociales concernant les personnes âgées et leur manière d’assurer leurs

soins d’hygiène sont également sensiblement les mêmes d’un soignant interrogé à l’autre. En

effet, les données recueillies mettent en avant que la routine la plus courante serait, lorsque

la toilette est réalisée, de se laver au gant devant le lavabo. Ces représentations sociales

seraient issues de leurs représentations culturelles plutôt similaires de la toilette ayant été

Page 43: Evaluation des capacités lors de la « toilette

36

influencées par divers facteurs tels que : leur formation professionnalisante, qui n’avaient

certes pas exactement le même contenu mais visait tout de même à faire d’eux des

professionnels de santé ainsi que leurs expériences dans le cadre de leur travail en gériatrie

(Moscovici, Hewstone, 1983 ; Salès-Wuillemin et al, 2007).

Concernant leur vision de la personne âgée, les professionnels ne se sont pas accordés sur

un âge seuil, car le vieillissement affecterait différemment chacun. Une personne serait alors

considérée comme âgée, lorsque les effets délétères de la dégénérescence diminueraient les

capacités de déplacement et de réalisation des activités de vie quotidienne. Les

caractéristiques définissant cette population seraient donc très relatives et plutôt liées à des

atteintes physiologiques limitant la participation (Organisation Mondiale de la Santé, 2018). Du

fait de ces restrictions, les personnes âgées auraient besoin d’aménagements ou d’aide

extérieure, dont le SSR peut estimer les besoins (Art. R. 6123-118 CSP, légifrance.fr)

notamment grâce à l’intervention de l’ergothérapeute, afin de maintenir leur autonomie et leur

indépendance (ANFE, 2019).

La troisième hypothèse soutenait que l’évaluation de la toilette était abordée de la même

manière que les évaluations d’autres activités de vie quotidienne.

Une différence entre les autres évaluations des activités de vie quotidienne et celle réalisée

dans les cadre de la toilette concerne l’initiateur de la demande. Il a été relevé lors des

entretiens, l’intervention de l’ergothérapeute lors de la toilette se faisait principalement suite à

la demande d’un professionnel de santé (médecin, aide-soignant) ou à l’estimation des

besoins de la personne par l’ergothérapeute grâce à une recueil de données préliminaires

(Kalfat dans Ergothérapie en gériatrie, 2009). L’évaluation des capacités lors de la toilette

répondrait-elle donc à un besoin de la personne ou un besoin des soignants de se rassurer

quant à la « bonne » réalisation des soins d’hygiène ? Cette évaluation serait donc plutôt

effectuée dans une logique paternaliste, dans laquelle les soignants savent ce qui est le mieux

pour la personne hospitalisée (Rameix repris par Clavreul, 2019). Ce paternalisme serait donc

partagé par les professionnels de santé et la personne âgée.

Parfois l’évaluation révèle des réelles difficultés dont la personne a conscience, on peut alors

s’interroger sur les raisons qui ont empêché la personne de solliciter de l’aide pour trouver des

solutions pour la toilette puisque pour les autres activités, les demandes sont apparemment

fréquentes. La personne préfère-t-elle qu’un tiers l’accompagne ou bien n’ose-t-elle pas peut-

être parce que cela concerne sa vie intime ?

L’entrée dans l’intimité de la personne lors de cette évaluation n’a pas été soulevée, peut-être

parce qu’il n’y a jamais eu ou alors très peu de refus. Le consentement est évidemment

toujours recueilli (Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, chap. 2, art. 11) avant

Page 44: Evaluation des capacités lors de la « toilette

37

chaque évaluation cependant son obtention systématique pourrait être interrogée. Est-ce en

lien avec le paternalisme évoqué précédemment ? Le manque d’adhésion à d’autres soins a

été exprimé par une ergothérapeute cependant les causes de ces refus sont principalement

imputées au comportement de la personne hospitalisée ou bien à la relation du soignant avec

cette dernière. Une autre possibilité serait-elle que ces soins ne seraient pas en accord avec

le projet de vie de la personne ? Si l’initiative est majoritairement prise par un tiers, d’après les

entretiens, l’évaluation des capacités lors de la toilette quant à elle tendrait à respecter le plus

possible les habitudes de vie de la personne.

Concernant les conditions de réalisation, cette mise en situation d’une activité de la vie

quotidienne étant parfois la seule, il est impossible de la comparer à d’autres évaluations en

situation. Cependant son objectif exprimé par les professionnels interrogés était le retour à

l’autonomie c’est-à-dire la récupération des capacités, ce qui est le but principal d’un séjour

en soins de suite et réadaptation selon l’HAS (2009). La formulation de cet objectif tendrait à

illustrer une intervention plutôt basée sur les déficiences cependant, l’utilisation d’outils comme

la MHAVIE traduirait une évaluation s’orientant vers l’occupation c’est-à-dire prenant en

compte les interactions entre la personne âgée, l’activité et l’environnement (Sorita, 2016).

Les outils utilisés par les ergothérapeutes sont soit créés par les ergothérapeutes dans leur

service soit non spécifiques à l’ergothérapie (bilan descriptif de l’activité ou MHAVIE). Selon

les ergothérapeutes interrogées, ces choix ont été faits afin de répondre à leurs besoins et

pour faciliter la communication entre les professionnels intervenant auprès des personnes.

Cependant l’utilisation de la MHAVIE comme outil d’évaluation d’une observation soulève un

autre questionnement. Ce questionnaire relatifs aux habitudes de vie peut être rempli, quand

son état le permet, par la personne elle-même ou par un proche. L’observation de cette activité

doit-elle être faite entièrement et en première intention, autrement dit l’ergothérapeute doit-il

forcément en par là pour accompagner la personne dans une réalisation de l’activité « toilette »

satisfaisante pour elle ?

4.2 Pistes de réflexion

4.2.1 Intimité et Soins de suite

Dans sa pyramide des besoins, Maslow (1956,2008) évoque les besoins d’estime et

d’appartenance. Ce premier besoin est notamment dépendant de l’image que la personne a

d’elle-même et la valeur qu’elle y accorde. Le regard des autres a également une influence

sur la manière dont la personne se perçoit (Fiat dans Gérontologie et société n°122, 2007).

C’est pour cette raison qu’avoir de la considération pour le soigné lors des soins importe tant.

Le respect de la personne âgée commence par le respect de son corps et de toutes ses

Page 45: Evaluation des capacités lors de la « toilette

38

caractéristiques et ses singularités car il a été et reste le témoin de toute une vie (Fiat dans

Gérontologie et société n°122, 2007). Il s’agit d’un préalable à la bientraitance (Moulias et al.

dans Gérontologie et société n°133, 2010), Afin de répondre à son besoin d’appartenance, la

personne tend à s’intégrer dans un groupe. Cela implique d’établir des relations, lesquelles

reposent sur le partage. Être membre d’une communauté repose donc sur ce que l’on choisit

de dévoiler aux autres, c’est pour cette raison que l’on accorde généralement autant

d’importance à la manière dont on se présente à autrui, les vêtements pouvant servir à

dissimuler ce que l’on ne veut pas montrer (Fiat dans Gérontologie et société n°122, 2007).

Lorsque la dépendance apparaît et que la personne âgée n’est plus en capacité d’assurer

certains actes, elle se voit obliger de demander et d’accepter l’aide d’un tiers. Mais autoriser

l’entrée dans son intimité peut être un préalable indispensable pour l’accompagnement comme

pour« l’activité de nursing [qui] se distingue précisément par cette nécessité de

rapprochement » (Gardien, 2008, p.188). Dans le contexte de l’institution, que ce soit d’un lieu

de vie ou d’une structure de rééducation et/ou réadaptation, l’aide est fournie par des

professionnels de santé. La personne « doit [alors] accepter d’être touchée par tout soignant

ou rééducateur dans l’exercice de ses fonctions » (Gardien, 2008, p185) « sans pouvoir choisir

la personne qui [la] touchera, et encore moins maîtriser la façon dont il sera touché » (Gardien,

2008, p.187). Elle n’est plus en mesure de « contrôler l’accès à son intimité » (Gardien, 2008,

p.187) d’autant plus que le nombre d’intervenants est important et qu’ils sont partagés avec

d’autres personnes soignées (Gardien, 2008).

Le principe même de l’intervention des professionnels de santé dans ces établissement de

soins repose sur l’entrée dans l’intimité pour disposer de connaissances sur la personne pour

établir la relation thérapeutique, sur ses habitudes et ses données médicales pour mieux la

prendre en soin (Darnaud dans Gérontologie et société n°122, 2007). Cette intrusion, bien que

justifiable, n’en reste pas moins une nouvelle atteinte à la pudeur. Cette notion, souvent

associée à l’intimité, vient en fait du latin « pudere » signifiant honte (Fiat dans Gérontologie

et société n°122, 2007). Si ces deux notions sont distinctes, il suffit de peu de choses pour que

la pudeur devienne honte. Le regard d’autrui et son manque de considération peuvent être ce

déclencheur (Fiat dans Gérontologie et société n°122, 2007).

4.2.2 Recueil des habitudes de vie

L’utilité de l’observation a été mainte fois démontrée (Sorita, 2016). Elle est d’ailleurs un outil

très largement utilisé par les ergothérapeutes. Lors d’une mise en situation pendant la toilette,

l’ergothérapeute observe la réalisation et les interactions personne-activité-environnement

avec l’objectivité d’un professionnel de santé, cependant un élément non négligeable entre en

jeu : l’intimité. Si bon nombre d’activités de la vie quotidienne peuvent être réalisées en public,

Page 46: Evaluation des capacités lors de la « toilette

39

celle-ci fait partie de la sphère intime, c’est-à-dire qu’elle n’est pas partagée avec tout le monde

et le plus souvent est effectuée seul. L’entrée dans l’intimité de la personne hospitalisée ne

peut donc pas être prise à la légère et le recours à l’observation de la toilette ne devrait se

faire que lorsque cela est réellement nécessaire. La réflexion porte sur le recueil des habitudes

de vie comme première évaluation des capacités et préalable incontournable à la mise en

situation.

Bossaert (2009) a dit que « pour savoir ce que le patient est capable de faire lorsqu’il est à

l’hôpital, un entretien oral est insuffisant ». Il est vrai que les mises en situation permettent une

vision globale et d’étudier les facteurs situationnels influençant la réalisation de l’activité. Il

s’agit également d’un bon moyen pour trouver des leviers pour la rééducation et la

réadaptation, ainsi que pour élaborer des stratégies afin que la personne puisse réaliser ses

activités de vie quotidienne efficacement, en sécurité avec le minimum d’effort et peu d’aides

(Sorita, 2016). Mais certains outils utilisés au préalable pourraient permettre de recueillir les

demandes et d’estimer, à défaut d’évaluer, les capacités des personnes âgées hospitalisées

sans qu’une mise en situation de la toilette et de toutes ses étapes soit nécessaire. Il s’agirait

de s’assurer que l’objet de l’observation ne puisse être évalué autrement que par une mise en

situation.

L’une des ergothérapeutes interrogées a évoqué l’utilisation d’une partie du questionnaire de

la MHAVIE comme outil d’évaluation de l’observation. Cette mesure des habitudes de vie a

pour objectif de rassembler des informations sur les activités « courantes » réalisées par la

personne dans son quotidien au travers d’un questionnaire (Fougeyrollas et al, 2004).

Ce questionnaire s’adresse prioritairement à la personne mais peut également être rempli par

un de ses proches ou un professionnel de santé. L’intérêt de l’auto-questionnaire est que la

personne est, normalement, la plus apte à répondre à ces questions. Le niveau de satisfaction

qu’elle exprime permet de suggérer des leviers sur lequel l’ergothérapeute peut s’appuyer pour

son intervention et ainsi répondre à une demande émanant vraiment de la personne

hospitalisée.

Pour faire le lien avec la toilette, la section qui s’y réfère est dénommée « hygiène corporelle ».

Y sont détaillées les tâches suivantes : prendre un bain ou une douche, laver et essuyer le

bas du corps, laver et essuyer le haut du corps, se laver les cheveux, se sécher les cheveux,

se coiffer, se brosser les dents, se raser, se moucher, se nettoyer et se couper les ongles, se

maquiller, entretenir ses prothèses ou autres accessoires (lunettes, dentiers, appareils auditifs,

…) (Fougeyrollas et al, 2004). Cette évaluation vise l’occupation et non l’identification des

déficiences (Sorita, 2016). Les fonctions physiologiques ne sont donc pas détaillées puisque

ce ne sont pas les causes qui sont recherchées mais plutôt leur répercussion sur la

participation de la personne. Les critères d’évaluation de la participation sont le niveau de

Page 47: Evaluation des capacités lors de la « toilette

40

réalisation, le type d’aide requis ainsi que le niveau de satisfaction exprimé par la personne.

La limite de ce questionnaire serait que la personne âgée a été hospitalisée et donc que ces

habitudes ont été bouleversées par la cause de l’admission mais aussi par l’hospitalisation

elle-même. N’ayant pas pu reprendre toutes ses activités, elle ne serait donc pas forcément

consciente de ses « nouvelles » capacités. Concernant la toilette, la personne aura pu

réessayer de réaliser cette activité donc cette limite ne serait pas applicable.

Bien évidemment cet outil ne peut se substituer à une mise en situation, cependant les

informations recueillies permettent d’établir un premier état des lieux et d’orienter l’intervention

de l’ergothérapeute sur une ou plusieurs activités et sur une ou plusieurs tâches les

composant. En se basant sur les habitudes de vie de la personne afin d’établir avec elle ses

objectifs lors du séjour en SSR , l’ergothérapeute ne serait plus dans une pratique paternaliste

mais dans une relation plus horizontale et égalitaire (Clavreul, 2019).

Page 48: Evaluation des capacités lors de la « toilette

41

Conclusion

Avec la dégénérescence physiologique due au vieillissement, une personne se trouve

fragilisée. La survenue d’une chute ou d’une pathologie peut occasionner une perte

d’indépendance et/ou d’autonomie restreignant sa participation dans ses activités parmi

lesquelles la « toilette ». Il s’agit d’un acte ayant toujours été présent dans les pratiques des

populations, seules les modalités de réalisation évoluent. Dans le cadre d’un séjour un service

de soins de suite gériatrique, un projet de soins est établi et l’évaluation de l’indépendance et

de l’autonomie de la personne âgée fait partie des préalables à l’établissement d’objectifs

adaptés.

L’évaluation des capacités lors de l’activité « toilette » est dépendante d’un certain nombre de

facteurs liés aux modalités de réalisation. En effet, les concepts théoriques développés ainsi

que l’analyse des entretiens menés tendent à montrer que le contexte institutionnel oriente les

interventions des professionnels de santé vers cette évaluation pour des raisons pratiques

(environnement, horaires). Cependant ces même raisons conditionnent les modalités de

réalisation, contraignant parfois les ergothérapeutes à s’écarter des habitudes de vie de la

personne.

Les représentations en lien sur les pratiques liées à la toilette et sur la façon dont les personnes

âgées se lavent, ont également un impact sur les critères d’évaluation lors de l’observation.

La fréquence de l’activité, les étapes et leur ordre de même que le niveau de propreté attendu

sont basées sur des représentations propres à chaque individu. Lors de cette évaluation, il est

donc important, en tant qu’ergothérapeute, de se rappeler les objectifs de l’intervention qui est

de répondre aux demandes de la personne et de porter un regard objectif sur l’activité. En tant

que soignant intervenant dans l’intimité corporelle de la personne âgée, il s’agit également de

faire preuve de considération envers la confiance qu’elle nous accorde en nous laissant l’aider

et d’être conscient de ce qu’elle implique.

Un des apports personnels les plus importants de ce travail de recherche est l’absolue

conviction que sans la confiance de la personne, l’intervention des ergothérapeutes est vaine.

Cette affirmation semble évidente et pourtant, je pense que cette confiance peut être

facilement prise pour acquise et que nous, soignants, n’avons pas toujours conscience de ce

qu’elle implique, notamment lors d’interventions dans le cadre de la toilette où la personne se

met littéralement à nu.

Page 49: Evaluation des capacités lors de la « toilette

42

Bibliographie Aide-soignant. (2019) [En ligne] Ministère des Solidarités et de la Santé. Disponible sur : https://solidarites-

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Page 54: Evaluation des capacités lors de la « toilette

I

Table des annexes

Annexe 1 : Retranscriptions des entretiens exploratoires ....................................II

Annexe 2 : La pyramide des besoins de Maslow ................................................... III

Annexe 3 : Extraits de la MHAVIE .......................................................................... IV

Annexe 4 : Guides d’entretien ................................................................................ VI

Annexe 5 : Retranscriptions des entretiens ........................................................ VIII

Page 55: Evaluation des capacités lors de la « toilette

II

Annexe 1 : Retranscriptions des entretiens exploratoires

Entretien exploratoire 1 : Avec un ergothérapeute travaillant en SSR adulte

Questions/réponses

« Voyez-vous systématiquement les patients en évaluation à la toilette ? »

Oui

« Pourquoi faites-vous systématiquement une évaluation à la toilette ? »

Le fait que la toilette soit une activité universelle la désigne comme un bon moyen de médiation. Pendant

cette activité, une intimité est créée et la personne peut se confier sur ses difficultés, ses habitudes de

vie. C’est également pratique comme mise en situation à l’hôpital étant donné que chaque chambre

équipée d’une salle de bain. C’est une évaluation qui permet d’évaluer l’indépendance et/ou l’autonomie

selon les objectifs. C’est un bilan complet, autant des capacités fonctionnelles que des capacités

cognitives.

« Pour répondre à quel(s) besoin(s) cette évaluation est-elle réalisée ? Qui la demande ? »

Le plus souvent le médecin fait une prescription demandant une « évaluation des capacités de la

personne dans ses activités quotidiennes » ou bien il prescrit des séances d’ergothérapie. Dans les

deux cas, commencer par la toilette est cohérent car c’est une activité de base.

« Quels outils sont utilisés ? »

Le plus souvent des « bilans maison » créé par les professionnels d’une structure et commun à tous les

services mais d’autres bilans en ergothérapie peuvent être utilisés comme la MHAVIE (Mesure des

habitudes de vie) qui contient un encart sur cette activité de vie quotidienne.

Entretien exploratoire 2 : Avec une aide-soignante travaillant en SSR adulte

Questions/réponses

« Quel est l’intérêt que l’ergothérapeute réalise une évaluation à la toilette ? »

L’ergothérapeute a un regard extérieur car ce soin n’est pas une intervention prépondérante dans la

pratique de son métier. Il a le recul et le temps nécessaire pour laisser la personne faire et discuter plus

longuement avec elle.

Il est en capacité de trouver des adaptations ou autres techniques pour maximiser l’autonomie de la

personne. « Aujourd’hui, je ne me verrais pas travailler sans ergothérapeute ».

« Pour répondre à quel(s) besoin(s) cette évaluation est-elle réalisée ? Qui la demande ? »

Les aides-soignants manquent de temps pour réellement prendre le temps de laisser faire la personne.

Ils ont tendance à pallier ou à faire à la place car ils spéculent sur les difficultés de la personne. Il nous

donne des informations sur ce que la personne est en capacité de faire afin que les aides-soignants

puissent adapter au mieux leur soin.

Page 56: Evaluation des capacités lors de la « toilette

III

Annexe 2 : La pyramide des besoins de Maslow (1956)

Source : https://my-psychologie.com/2018/06/20/faut-il-oublier-la-pyramide-de-maslow/

Page 57: Evaluation des capacités lors de la « toilette

IV

Annexe 3 : Extraits de la MHAVIE

Page 58: Evaluation des capacités lors de la « toilette

V

Source : https://ripph.qc.ca/wp-content/uploads/2017/10/32_14-99_Formulaire-detaille_francais.pdf

Page 59: Evaluation des capacités lors de la « toilette

VI

Annexe 4 : Guides d’entretien

ENTRETIEN AVEC UN ERGOTHERAPEUTE

Contexte / SSR :

• Depuis combien de temps travaillez-vous dans cette structure ?

• Avez-vous exercé un autre poste avant celui-ci ? si oui dans quel type de structure ?

• Actuellement quelles sont vos amplitudes horaires lors de vos journées de travail ?

• De combien de lits dispose votre structure ? Combien d’ergothérapeutes y a-t-il ? D’aides-

soignants ?

• Quelles sont les causes d’admission dans la structure ?

• Quelle est la durée moyenne de séjour ?

Vieillissement :

• Selon vous, que vous évoque le terme de personne âgée ?

• Selon vous, comment les personnes âgées font leur toilette (rituel, modalités) ?

Toilette :

• Qu’est-ce que l’expression « faire sa toilette » vous évoque ?

• Pour vous, à quelle fréquence une personne doit-elle se laver et comment ?

(Pourriez-vous citer plusieurs moyens pour faire sa toilette ?)

• Quel lien est-ce que vous faites entre ergothérapie et toilette ?

Ergothérapeute :

• Concernant votre intervention au sein du SSR, comment définissez-vous vos objectifs ?

• Qui est ce qui initie les demandes de bilan d’autonomie dans les activités de vie quotidienne ?

• Pour vous quels sont les facteurs qui motivent le choix de la toilette plutôt qu’une activité de vie

quotidienne comme support d’évaluation de l‘indépendance ? Votre intervention sur le temps de

la toilette est-elle systématique ?

• Complétez-vous votre bilan de l’autonomie avec des évaluations d’autres activités de vie

quotidienne ? si oui lesquels ?

• Sur quels critères vous basez-vous pour définir qui a besoin d’être évalué à la toilette ?

• Quel support utilisez-vous lors de cette évaluation ?

• Dans quelles conditions réalisées ces évaluations (temps, lieux, autres professionnels) ?

Pourquoi ces conditions-là ? Que pensez-vous de ces conditions de réalisation ?

• Est-ce que vous intervenez aussi à la demande de la personne ?

Aide-soignant :

• Concernant les aides-soignants, pour vous, en quoi consiste l’intervention de l’aide-soignante

dans le cadre de la toilette (protocole) ?

• En quoi les interventions des ergothérapeutes et aides-soignantes sont complémentaires ?

Page 60: Evaluation des capacités lors de la « toilette

VII

ENTRETIEN AVEC UN AIDE-SOIGNANT

Contexte / SSR :

• Depuis combien de temps travaillez-vous dans cette structure ?

• Avez-vous exercé un autre poste avant celui-ci ? si oui dans quel type de structure ?

• Actuellement quelles sont vos amplitudes horaires lors de vos journées de travail ?

• De combien de lits dispose votre structure ? Combien d’ergothérapeutes y a-t-il ? D’aides-

soignants ?

• Quelles sont les causes d’admission dans la structure ?

• Quelle est la durée moyenne de séjour ?

Vieillissement :

• Selon vous, que vous évoque le terme de personne âgée ?

• Selon vous, comment les personnes âgées font leur toilette (rituel, modalités) ?

Toilette :

• Qu’est-ce que l’expression « faire sa toilette » vous évoque ?

• Pour vous, à quelle fréquence une personne doit-elle se laver et comment ?

(Pourriez-vous citer plusieurs moyens pour faire sa toilette ?)

Aide-soignant :

• Comment planifiez-vous les toilettes ?

• Comment accompagnez-vous une personne âgée lors de sa toilette ?

• Comment choisissez-vous la manière de l’accompagner à la toilette ?

• Comment déterminez-vous les étapes de la toilette et la chronologie ?

• Que pensez-vous des conditions de réalisation de la toilette dans le service ?

• Etes-vous, en tant qu’aide-soignante, formée pour réaliser les toilettes ? Si oui de quelle

manière ?

Ergothérapeute :

• Concernant l’ergothérapeute, selon vous quel est son rôle au sein du SSR ?

• Selon vous, qui demande l’intervention de l’ergothérapeute ?

• Savez-vous quels supports utilise l’ergothérapeute pendant son évaluation lors de la

toilette ?

• Vous communique-t-elle ces résultats ? Si oui, comment ?

• L’accompagnez-vous lors de ses évaluations ?

Page 61: Evaluation des capacités lors de la « toilette

VIII

Annexe 5 : Retranscriptions des entretiens

ENTRETIEN TELEPHONIQUE AVEC ERGOTHERAPEUTE 1 :

Etudiante en ergothérapie : Pour commencer je voudrais juste situer le contexte. Depuis

combien de temps travaillez-vous dans cette structure ?

Ergothérapeute : En SSR ça fait 1 an et demi, je suis là depuis décembre 2017

Dans quel autre type de structures avez-vous travaillé ?

En EHPAD pendant 6 mois de fin 2011 et après de 2012 jusqu’à fin 2017 en Equipe Spécialisée

Alzheimer donc du domicile.

Actuellement quelles sont vos amplitudes horaires lors de vos journées de travail ?

9h-12h30 et 13h15-16h45 les lundis, mardi, jeudis vendredi.

De combien de lits dispose votre structure ?

80 lits répartis sur 4 services.

Combien d’ergothérapeutes ?

1 seule

Combien d’aides-soignants ?

En roulement, elles sont deux par services donc entre 8-9. Le matin elles sont entre 8-9 aides-soignants.

Certains jours, elles sont autour de 10 ou 12, ça dépend de la répartition des horaires. L’après-midi, il y

a 1 aide-soignante avec 1 infirmière par service. Pareil pour la nuit.

Quelles sont les causes d’admission dans la structure ?

On a 4 services chacun avec sa spécialité : troubles cognitifs diagnostiqués ou en cours de diagnostic,

traumatologie/orthopédie (prothèses de hanche ou de genou), oncologie, soins palliatifs.

Concernant les deux premiers services, pouvez-vous m’indiquer la durée de séjour en

moyenne ?

C’est différent entre les deux. Troubles cognitifs cela peut durer plusieurs mois car c’est en attente d’une

place en EHPAD, donc ce sont des personnes qui vont rester facilement 3-4 mois. C’est une moyenne,

parfois c’est plus long, parfois on a des places plus facilement. En orthopédie, c’est différent car certains

n’ont pas le droit à l’appui, ils peuvent rester à peu près 6 semaines en moyenne entre ceux qui n’ont

pas le droit à l’appui et ceux qui viennent pour une prothèse de hanche où ça dure à peine 3 semaines.

Les prochaines questions vont concerner le vieillissement. Selon vous, que vous évoque le

terme de personne âgée ?

Personne âgée pour moi… c’est une personne de plus de 65 ans qui voit ses capacités dans la vie

quotidienne perturbées ou diminuées. Personne avec des fragilités.

Page 62: Evaluation des capacités lors de la « toilette

IX

Selon vous, comment les personnes âgées font leur toilette (rituel, modalités) ?

En général, les personnes âgées n’aiment pas trop la douche donc en général ça va être une à deux

douches par semaine. Ça va être beaucoup de toilette au lavabo le matin. C’est rare qu’il y ait une

toilette le soir, dans leurs habitudes j’entends. C’est ce que j’observe et puis beaucoup, en fonction de

l’état de sante de la personne, les personnes âgées font leur toilette de bonne heure.

Concernant la toilette, qu’est-ce que l’expression « faire sa toilette » vous évoque ?

Pour moi faire sa toilette, c’est réaliser le lavage du visage, du haut du corps, la toilette intime, les pieds

si la personne le peut. Ça englobe le visage, soins dentaires, soins au niveau des cheveux. Voilà toilette

du haut, toilette du bas, ce qu’on observe aussi.

Pourriez-vous me citer plusieurs moyens pour vous de faire sa toilette ?

Soit ça va être des personnes qui font leur toilette au lavabo donc elles vont plutôt utiliser les gants ou

les gants jetables, des fois des aides techniques qu’on apporte soit la douche.

Pour vous, à quelle fréquence une personne doit-elle se laver ?

En fonction des habitudes de la personne, en fonction de si c’est une personne qui transpire facilement,

qui fait de l’exercice physique, qui a des pansements, pour moi c’est tous les jours. Pour moi ça dépend

de son activité. Pour moi, faut respecter au maximum les habitudes de la personne, une personne qui

n’a pas l’habitude prendre des douches, on ne va pas travailler la douche.

Concernant l’ergothérapie, est-ce que vous intervenez sur le temps de la toilette ?

Oui.

Est-ce que c’est systématique ?

Non, l’intervention en soit n’est pas systématique. On fait le point avec les soignants, à l’entrée de la

personne les soignants font un recueil de données sur l’autonomie de la personne et ça me permet de

voir si le lendemain il va y avoir besoin d’intervenir ou pas. Mais en général, j’interviens surtout quand

les soignants aident complètement la personne et que j’ai remarqué qu’il y a un décalage entre ses

capacités en kiné. Mais non, je ne les vois pas systématiquement les personnes en bilan d’autonomie.

Quel lien est-ce que vous faites entre ergothérapie et toilette ?

Cela concerne la vie quotidienne et c’est le deuxième acte de la vie quotidienne qu’on fait en se levant,

le petit déjeuner puis la toilette . Pour moi c’est ça, vu que l’ergothérapeute travaille essentiellement

pour la vie quotidienne et assurer les gestes de la vie quotidienne.

Qui est ce qui initie les demandes de bilan d’indépendance dans les activités de vie

quotidienne ?

Le médecin du service peut faire une prescription de lui-même mais ça peut arriver que ce soit moi qui

demande une prescription.

Comment est-ce que vous définissez vos objectifs d’intervention ?

Pour moi, la toilette c’est une évaluation. Suite à l’évaluation je fais un descriptif du bilan entre les

Page 63: Evaluation des capacités lors de la « toilette

X

capacités et ce que la personne ne peut pas faire. Cela va aussi être un temps d’évaluation sur

l’utilisation des aides techniques et après soit je revois la personne quelques jours après ou bien souvent

je fais le lien avec les aides-soignantes qui me disent si ça convient ou pas.

Vous servez vous d’autres bilans que la toilette pour évaluer l’indépendance dans les AVQ ?

Non pas d’autres bilans. Les bilans de la toilette, on appelle ça des bilans de l’autonomie dans le sens

ou on ne voit pas que la toilette, on voit l’habillage, les transferts, les déplacements. Après c’est si ça

concerne un bilan que toilette, moi je suis plus sur un bilan narratif je pars de l’observation, j’observe si

la personne se trompe, je la laisse se tromper pour voir si elle met en place des stratégies de

compensation. C’est souvent toilette au gant, la sécurité quand la personne est devant le lavabo, quand

je vois la personne à la toilette c’est plus une question de mobilité de transfert, un fauteuil roulant devant

le lavabo ou plutôt une échelle.

Quel support utilisez-vous lors de cette évaluation ?

Mon support de base ça va être : autonomie, déplacement, transferts, toilette du haut, toilette du bas,

habillage, chaussage, continence, on utilise des grilles dans les logiciels de soin parce que ça parle à

tout le monde (médical, médico-social) utilisées pour pouvoir remplir la grille AGGIR ou ADL, si la

personne rentre à domicile par exemple ça parlera à l’assistante sociale.

Pour vous quels sont les facteurs qui motivent le choix de la toilette plutôt qu’une activité de vie

quotidienne comme support d’évaluation de l‘indépendance ?

Parce qu’ en général, au niveau de la cadence de l’activité des aides-soignants c’est-à-dire qu’une

évaluation de la toilette habillage ça va nous prendre plus de temps, ça va prendre du temps

globalement. Pour moi, vaut mieux que ce soit l’ergo qui prenne ce temps pour pouvoir dire aux

soignants vu qu’ils ne sont pas beaucoup, il faut le dire, pour choisir un déroulé de la toilette et de

l’habillage qui permette aux soignants de passer le minimum de temps avec la personne pour avoir

aussi du temps pour les autres. Et il y a aussi le fait que les personnes sont en rééducation/réadaptation

pour des soins infirmiers ou kinésithérapie, donc c’est vrai qu’il faut que les personne soient prêtes pour

aller en séances de kiné donc on pense tout de suite toilette et habillage et c’est que par la suite qu’on

va penser mise en situation pour le repas, pour le transfert dans la voiture, …

Dans quelles conditions réalisées ces évaluations (temps, lieux, autres professionnels) ?

En général c’est le matin dans la salle de bain de la chambre. C’est souvent le matin et même moi qui

commence à 9h le matin, des fois c’est pas assez tôt . Je me laisse facilement 45 min pour cette

évaluation avec la personne. Parfois avec des aides-soignants, des stagiaires aides-soignants ou

infirmiers qui s’occupent de cette personne. Dans les situations un peu délicates, j’ai un aide-soignant

avec moi, ou un stagiaire ergo.

Pourquoi ces conditions-là ?

Parce que les gens font leur toilette le matin. A 9h parce que je commence à 9h. Après ça peut être

plus tard, mais pour certains 9h c’est trop tard, ils préféreraient vers 7h30. Ça dépend aussi des

disponibilités des soignants qui vont m’accompagner. Mais ça dépend de la personne quand même.

Page 64: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XI

Qu’est-ce que vous pensez de ces conditions de réalisation ?

Dans l’idéal, si par exemple j’avais une autre collègue ergo, je pense que ce serait faisable de proposer

une évaluation à la toilette pour chaque personne qui arrive ici. Là pour l’instant, je n’ai pas le temps, je

ne me permets pas d’y consacrer tout mon temps car il y a d’autres choses à faire. Je prends le temps

de la faire avec la personne pour qui on a choisi de faire cette évaluation.

Concernant les aides-soignants, pour vous, en quoi consiste l’intervention de l’aide -soignante

dans le cadre de la toilette ?

Quand on va évaluer des personnes qui sont plus au lit, au début on ne sait pas trop comment gérer la

toilette pour les transferts. Les soignants demandent à être présent pour voir la manière de faire.

Que savez-vous de leur protocole pour la toilette ?

Sur le logiciel, elles ont tout le déroulé, par rapport à l’aide, je les aide à compléter tout ça . Elles notent

si y a besoin d’aide pour l’habillage, la toilette, si c’est partiel...

Par rapport à l’enchainement des étapes de la toilette, est ce que vous savez comment elles s’y

prennent ?

On en parle en synthèse où l’on parle souvent de l’autonomie de gens mais d’une aide-soignante à une

autre ça peut changer, ça dépend du comportement de la personne âgée des fois ça passe mieux avec

une aide-soignante qu’avec une autre. Certains jours la personne âgée va faire un effort et d’autres

jours, la personne va appuyer tout le temps sur la sonnette pour être aidée par l’aide-soignant.

En quoi les interventions des ergothérapeutes et aides-soignants sont complémentaires ?

L’aide-soignante a plus de connaissances dans le déroulé d’une toilette standard même si c’est pas les

habitudes de la dame, elles ont des protocoles qu’elles ont appris que nous, ergothérapeutes

apprenons, avec l’expérience ou avec elle. Nous on leur montre que la personne elle peut le faire avec

les bonnes aides techniques, c’est beaucoup sur les petites astuces du quotidien. Notamment pour les

personnes hémiplégiques. Elles pensent que la personne ne peut pas faire alors que si. C’est ce côté

qui peut leur manquer et qu’on leur apporte avec des petites astuces en faisant le bilan ou en discutant

avec nous. Après y a des choses qu’elles savent faire que moi non. Tout ce qui est sonde urinaire par

exemple, leur apporter des infos sur les soins dentaires. Je ne suis pas là tous les jours, les aides-

soignants la côtoient tous les jours alors que nous on les voit à un instant t alors c’est vrai que nous on

peut dire que la personne le fait et l’aide-soignante va pouvoir le travailler avec la personne à court

terme sauf si l’ergothérapeute a du temps pour tout le monde pour travailler tout ça. Les aides-

soignantes elles connaissent leur boulot aussi, nous on apporte aussi la stratégie par où commencer,

par où finir, pour gagner du temps, ne pas se faire mal au dos, … C’est ce qu’elles demandent aussi.

Sur quels critères vous basez-vous pour définir qui a besoin d’être évalué à la toilette ?

Pour moi, c’est notamment des personnes qui au début sont alités, avec toilette au lit et en discutant

avec la kinésithérapie je vois que la personne elle peut marcher avec une aide technique. Pour moi si

la personne peut faire quelques pas alors elle peut faire sa toilette intime debout au lavabo. C’est ça qui

va permettre de dire que des fois tout n‘est pas cohérent. Le bilan d’autonomie vient aussi remettre un

Page 65: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XII

peu de cohérence dans tout ça et permet d’avoir une continuité avec la rééducation, et permettre à la

personne de transposer dans une activité de vie quotidienne. Moi si je vois qu’une personne qui a fait

un AVC ou des troubles cognitifs, je vais demander à faire un bilan d’autonomie car les aides-soignants

ont tendance à « faire à la place de » alors qu’il pourrait suffire de stimuler. C’est compliqué pour un

soignant de rester à côté d’une personne et de ne rien faire physiquement alors qu’en la guidant on

permet à le personne de garder ses capacités gestuelles. L’aide-soignante a souvent l’impression de

rien faire alors qu’au contraire. Et le médecin prescrit souvent pour une personne avec des troubles

cognitifs important une évaluation de l’autonomie. Pour les pathologies où l’on sait que la personne va

forcément devenir dépendant, je les vois en toilette à l’entrée, en bilan intermédiaire et à la sortie pour

préparer le retour à la maison ou l’entrée en institution.

Est-ce que vous intervenez aussi à la demande de la personne ?

En général c’est plus les soignants qui disent aux personnes qu’il y a une ergo qui peut leur donner des

astuces et c’est là que les personne disent si elles sont d’accord ou pas. Mais j’ai rarement eu des

personnes ou alors pas pour la toilette pour les autres gestes de la vie quotidienne oui, les personnes

vont le demander d’elles-mêmes pour tout ce qui est repas ou activités de loisirs mais pas pour la

toilette, plus pour l’habillage, les personnes peuvent me demander : « je n’arrive pas à mettre mes

chaussettes et j’aimerais bien le faire parce qu’il n’y a que ça que je n’en peux pas faire ». C’est plutôt

les soignants ou les médecins qui demandent et qui ont proposé aux personnes. Elles sont là en

rééducation donc je n’ai jamais eu de refus pour l’instant. Je propose toujours aux personnes, je viens

la veille dans leur chambre pour leur dire que demain matin je viendrais, c’est moi qui serai là avec vous.

J’ai jamais eu de refus jusque-là.

Avant de faire cette évaluation il y a un bilan d’entrée de fait par l’ergo ?

Le bilan d’entrée est plus fait soit seule soit avec le kiné ou même en présence du médecin et on va

plus parler habitudes de vie, le logement comment il est fait, le matériel à domicile, les aides humaines

au domicile pour pallier certaines activités de la vie quotidienne. Après je fais un bilan en chambre pour

voir les transferts et les déplacements. On est en lien avec les kinés pour en parler, à l’entrée ? Ça peut

être… c’est pas toujours fait le jour même ça peut être le lendemain. L’évaluation à la toilette se fait

après.

Page 66: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XIII

ENTRETIEN TELEPHONIQUE AVEC ERGOTHERAPEUTE 2 :

Etudiante en ergothérapie : Depuis combien de temps travaillez-vous dans cette structure ?

Ergothérapeute : Depuis 2007 donc ça va faire douze ans.

Avez-vous exercé un autre poste avant celui-ci ? si oui dans quel type de structure ?

Oui j’en ai fait plusieurs structures de MPR essentiellement. Plutôt adultes, neuro, orthopédie,

traumato.

Actuellement quelles sont vos amplitudes horaires lors de vos journées de travail ?

9h-17h quatre jours par semaine.

De combien de lits dispose votre structure ?

Le SSR que nous on appelle PAPD a 20 mais on tourne à 19 généralement

Combien d’ergothérapeutes y a-t-il ?

Sur toute la structure en comptant les EHPAD, on est l’équivalent de 3,5 ETP onc 4 ergo. Sur les 3

SSR de l’hôpital on est 2 ergos. En gériatrie je suis seule.

D’aides-soignants ?

5 ou 6. En équivalent temps plein je peux pas vous dire mais ça vous donne une idée.

Quelles sont les causes d’admission dans la structure ?

Elles sont multiples. Y a de la décompensation, y a la chute, des maintiens à domicile difficiles sur

troubles cognitifs. Des AVC là on en a pas mal notamment. Donc chute, décompensation et puis

maintien à domicile difficile sur troubles cognitifs.

Au niveau de la durée moyenne de séjour ?

Ça varie. Du plus petit séjour ça va être de 2 à 3 semaines et ça peut aller jusqu’à 3-4 mois. Je vous

donne une amplitude plutôt qu’une moyenne. Une décompensation cardio respi ça va être deux trois

semaines, les AVC plutôt 3-4 mois.

Quelques questions sur le vieillissement. Selon vous, que vous évoque le terme de personne

âgée ?

Plus de 70 ans.

Selon vous, comment les personnes âgées font leur toilette (rituel, modalités) ?

Ça varie en fonction des personnes et de leur contexte de vie, y en a qui vont se laver tous les jours et

d’autres non, y en a qui vont prendre une douche une fois par semaine et d’autres qui vont se laver au

lavabo. Au SSR, sachant qu’on est dans un contexte rural, on a une population qui n’a pas forcement

l’habitude de faire des grandes toilettes tous les jours, même voire jamais de douche, c’est plutôt la

toilette au lavabo.

Page 67: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XIV

Qu’est-ce que l’expression « faire sa toilette » vous évoque ?

C’est subvenir à ses soins personnels, réaliser ses soins personnels d’hygiène.

Pour vous, à quelle fréquence une personne doit-elle se laver et comment ?

C’est compliqué comme question parce que tu ne peux pas donner une définition comme c’est chacun

qui fait comme il l’entend.

Pouvez-vous citer plusieurs moyens pour faire sa toilette ?

Y a la toilette au lavabo, la douche, le bain.

Quel lien est-ce que vous faites entre ergothérapie et toilette ?

Ben la toilette comme on s’est dit si on la définit comme un activité qui permet de subvenir à ses soins

personnels d’hygiène c’est une activité de vie quotidienne, une activité élémentaire et du coup en tant

qu’ergo on a un rôle si la personne est en difficulté.

Concernant votre intervention au sein du SSR, comment définissez-vous vos objectifs de prise

en soin ?

Selon le projet de la personne. Donc ça peut aller de permettre de retrouver une autonomie antérieure

pour avoir un retour à domicile, retrouver une autonomie, une indépendance juste pour une activité,

déplacements, une activité définie par la personne dans son projet.

Qui est ce qui initie les demandes de bilan d’autonomie dans les activités de vie quotidienne ?

C’est le médecin sur prescription médicale. C’est un médecin qui le fait systématiquement pour toutes

les entrées.

Pour vous quels sont les facteurs qui motivent le choix de la toilette plutôt qu’une activité de vie

quotidienne comme support d’évaluation de l‘indépendance ?

C’est une activité significative pour la personne généralement et dans le contexte hospitalier, c’est une

activité facile à mettre en place en essayant de se rapprocher le plus possible du contexte de vie de la

personne.

Votre intervention sur le temps de la toilette est-elle systématique ?

Non, fréquente mais pas systématique.

Complétez-vous votre bilan de l’autonomie avec des évaluations d’autres activités de vie

quotidienne ? si oui lesquels ?

Oui. Si on reste sur les activités élémentaires c’est tout ce qui est transferts déplacements et repas. Et

après si on est sur des activités instrumentales, MES, bilans cognitifs et je peux compléter par des

visites à domicile.

Sur quels critères vous basez-vous pour définir qui a besoin d’être évalué à la toilette ?

… Je me base sur les habitudes de vie de la personne en fait. Suite à un entretien et aux éléments

déjà fournis par le médecin et par l’entourage.

Page 68: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XV

Quel support utilisez-vous lors de cette évaluation ?

Moi du coup j’utilise les critères de la MHAVIE. Je prends juste les critères qui intéressent la personne

et que je peux évaluer. Disons que je reprends certains items et j’utilise la grille d’évaluation avec ou

sans aide technique, avec difficultés, sans difficultés, réalisé, non réalisé

Dans quelles conditions réalisées ces évaluations (temps, lieux, autres professionnels) ?

Généralement je suis toute seule avec la personne et ça se passe dans la chambre. Je fais ça le matin

et je compte une demi-heure au moins. La veille j’inscris pour les aides-soignantes les personnes que

je souhaite voir, dans quelle situation, dans quel contexte et puis le matin directement je vais voir la

personne.

Pourquoi ces conditions-là ?

Pour éviter que les aides-soignantes aillent voir la personne. Moi je fais vraiment la situation ou j’aide la

personne à se lever à se laver. C’est plus significatif de faire ça le matin avec la personne je vais pas

faire la toilette à quatre heures de l’après-midi généralement.

Qu’est-ce que vous pensez de ces conditions de réalisation ?

Ben après on s’adapte en fonction de l’environnement donc c’est pas toujours idéal mais après j’essaye

de voir avec la personne pour me rapprocher le plus possible de son contexte de vie après t’es jamais

à 100% dans la même situation, donc déjà t’essaye ... ne serait-ce que par rapport au côté du lever,

l’installation devant le lavabo donc t’essaie de te rapprocher le plus possible mais t’es jamais…. Dans

un contexte hospitalier, la personne est fragilisée donc ça peut être perturbant.

Est-ce que vous intervenez aussi à la demande de la personne ?

Disons qu’elles n’ont pas forcément à le faire puisque spontanément je vais déjà vers elles. Après je

recueille toujours le consentement. Disons que voilà … y a pas forcément de sollicitation, comme ils

sont tous prescrits, les personnes je vais forcément tous les voir.

Enfin quelques question concernant les aides-soignants. Pour vous, en quoi consiste

l’intervention de l’aide-soignante dans le cadre de la toilette ?

Disons qu’elles réalisent les soins d’hygiène de la personne. Elles ont des protocoles d’hygiène, des

façons de faire que moi je ne fais pas du tout.

En quoi les interventions des ergothérapeutes et aides-soignantes sont complémentaires ?

On a pas on a pas forcément le même objectif quand on fait l’activité. Moi je suis enfin elles elles sont

là pour accompagner et aider la personne à faire les soins d’hygiène que moi je suis plus dans un

échange j’ai envie de dire avec la personne.

Pouvez-vous développer ?

Les aides-soignantes elles ont un protocole, on leur apprit à faire, faire de cette façon et commencer

par là machin, faire ça comme ça, que moi je pars de la personne de ce qu’elle fait d’habitude souvent

je lui dis faites comme vous avez l’habitude de faire moi je vais pas vous changer vos habitudes, que

Page 69: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XVI

l’aide-soignante elle va plus être dans son protocole.

Une fois l’évaluation faite, il y a un retour qui leur est fait ?

On en discute et puis y a un pictogramme la salle de bain de la personne. Disons que moi en fonction

des modalités que j’ai vu avec la , de ses capacités, donc soit elle a besoin de rééducation et de

réadaptation et du coup je continue à voir ça avec elle soit on a retrouvé le niveau antérieur d’autonomie

qui correspond à ses habitudes de vie et dans ces cal la je valide pour que les aides-soignantes pour

qu’elles continuent à faire selon ce qui est défini avec la personne.

S’il y a besoin que vous interveniez à la toilette c’est vous qui prenez en charge la rééducation

sur ce temps-là ?

Oui

Est-ce que les aides-soignantes viennent parfois avec vous ?

Non

Comment l’expliquez-vous ?

Parce qu’elles sont occupées à autres choses, souvent les étudiants infirmier ou aides-soignants

viennent voir la personne avec moi mais mes collègues non parce qu’elles sont occupées à autre chose.

Page 70: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XVII

ENTRETIEN TELEPHONIQUE AVEC AIDE-SOIGNANTE 1 :

Etudiante en ergothérapie : Pour commencer je voudrais juste situer le contexte. Depuis

combien de temps travaillez-vous dans cette structure ?

Aide-soignante : J’ai commencé si vous voulez en 86 en tant que remplaçante j’ai commencé ce en

étant agent de service, donc à l’époque j’étais étudiante et je faisais des remplacements d’été entre

autres et après j’ai passé mon examen d’AS en 89 et donc j’ai refait des replacements dans la structure

où je suis. Entre deux j’avais fait un peu de domicile et autrement j’avais fait un peu de replacement en

maison de retraite. C’était plutôt des personnes âgées, même si actuellement dans la structure, la panel

de patients qu’on reçoit des patient de 18 à plus d’âge tout en sachant que les personnes sont plutôt

âgées mais a l’heure actuelle on reçoit des personnes un peu plus jeunes notamment dans le cadre de

la fin de vie de l’oncologie.

Actuellement quelles sont vos amplitudes horaires lors de vos journées de travail ?

Soit je suis du matin donc je fais 6h30-14h30 d’après midi c’est 13h30-21h et autrement je peux faire

8h-16h.

Pourquoi ces horaires changent-ils ?

Par étage on est comment dirais-je deux aides-soignantes voire trois c’est plutôt c’est rarement trois

donc y en a une commence à 6h30 il en faut une le matin et une l’après-midi et une de 8h à 16h parce

qu’on est deux le matin et une le soir donc c’est un peu pour ça et après c’est reparti entre c’est équilibré

entre nous, tant de matins par personne, tant de soir par personne, c’est équilibré quoi.

De combien de lits dispose votre service ?

22 lits en médecine / ortho.

Combien d’ergothérapeutes travaille dans la structure ?

Une seule ergo, elle fait tous les services.

Quelles sont les causes d’admission dans la structure, je veux dire autre que l’orthopédie ?

Il peut y avoir c’est vrai alors attendez ouais c’est quand même plus de l’ortho c’est souvent suite à des

chutes, une remobilisation suite à une chute, il y a pas de principalement de plâtre, ou d’opération, ça

peut être une revalidation suite à une chute donc c’est plutôt de l’ortho, on peut avoir aussi des maladies

d’Alzheimer mais ça, c’est aussi combiné avec une chute, la personne a chute et elle a en plus une

maladie d’Alzheimer. On peut avoir aussi de la fin de vie plutôt en rapport avec une chute parce qu’elle

glisse, elle glisse, elle glisse.

Concernant les deux premiers services, pouvez-vous m’indiquer la durée de séjour en

moyenne ?

Je dirais que les séjours se raccourcissent je dirais 15 jours après y a une personne ça fait 4 mois qu’on

l’a mais grosso modo 15 jours – 3 semaines.

Page 71: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XVIII

Qu’est-ce que vous voulez dire par « les séjours se raccourcissent » ?

Oui, on gardait les gens beaucoup plus longtemps avec une revalidation complète que maintenant on

entame la validation enfin elle est bien…, la revalidation est bien entamée mais elle se fait après, la fin

de revalidation se fait à domicile ou en htp (hospitalisation à temps partiel). Des fois la personne revient

en kiné des jours bien précis. Dès qu’il y a possibilité de lettres des aides en place à domicile et que la

personne peut rentrer chez elle en sécurité, le séjour se raccourcit chez nous.

Quelles en seraient les causes ?

Je pense que c’est financier, les médecins doivent avoir un cadre à respecter … quelque part ...

Selon vous, que vous évoque le terme de personne âgée, qu’est-ce qui la caractérise ?

Des difficultés dans son autonomie globale déjà des difficultés à se mouvoir, des difficultés entre

autres… oui à se mouvoir. C’est toujours dans le cadre du mouvement en particulier.

Donc cela serait une notion de limitation physique ?

Ça peut être mental aussi ça dépend, maintenant les gens vieillissant sont beaucoup perturbés et ça

peut aller jusqu’à la maladie d’Alzheimer, des fois ça peut être des pertes de mémoire, sans penser

forcément à la maladie d’Alzheimer, qui limitent. Elles viennent dans nos établissements parce que le

maintien à domicile est compliqué.

Pourriez-vous dire à partie de de quel âge considérez-vous une personne comme étant âgée ?

Ça c’est très variable selon la personne a l’heure actuelle les gens vieillissent beaucoup plus vieux on

voit des gens de 90 ans qui sont très bien que je pourrais même pas considérer comme personne âgée

qui sont sur leur tablette qui font plein de choses et d’autres à 70 ans qui peuvent être considéré comme

personne âgée. A l’heure actuelle la personne est âgée vers 80, le vieillissement est beaucoup plus

tard je trouve quand même.

Selon vous, comment les personnes âgées font leur toilette (rituel, modalités) ?

On a tout l’un tout l’autre on a des personnes âgées qui se négligent, beaucoup, qui font pas leur toilette

qui vont juste faire le bout du nez, qui vont pas se changer, changer leur linge. Et y en a d’autre qui

garde une propreté extrême qui vont se laver très bien ou alors qui nous demande on voit bien qu’ils

ont eu l’habitude de faire leur toilette correctement quoi.

Qu’est-ce que l’expression « faire sa toilette » vous évoque ?

La propreté, le bien-être, une meilleure estime de soi quelque part et puis un regard des autres différent

aussi.

A quelle fréquence une personne doit-elle se laver ?

Tous les jours ou plusieurs fois par jour s’il y a incontinence au niveau de la petite toilette s’il y a une

incontinence à chaque change.

Page 72: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XIX

Pourriez-vous citer plusieurs moyens pour faire sa toilette ?

La toilette au lavabo, la douche, le bain on en donne pas particulièrement on a pas de baignoire mais

ça peut être le bain si la personne est au domicile.

Comment planifiez-vous les toilettes ?

A l’arrivée déjà on a un entretien avec la personne si elle l’a fait seule si elle l’a fait pas seule, on lui

pose surtout ces questions-là et puis après on planifie dans notre établissement selon si elle a du kiné

le matin. A quelle heure elle se lève aussi parce qu’il y a des personnes qui dorment le matin. On va

pas les réveiller à 7h pour leur dire : « on fait la toilette », quoi on essaye de faire selon son rythme aussi

à la personne même si on est dans un établissement on essaye de voir quand elle est disponible.

C’est selon le patient, ses habitudes de vie, y en a qui sont levés très tôt qui ont besoin d’être levés très

tôt, on commence par leur toilette et on les lève. Les gens qui se souillent pour qu’ils soient propres

pour petit-déjeuner ou déjeuner. Les gens déambulants qui se sont déshabillés pendant la nuit, le matin

on les retrouve tous nus ou pas habillés correctement ou ils ont fait pipi alors on commence par ces

toilettes là pour qu’ils soient à l’aise pour manger , certains sont lavés après le petit-déjeuner parce

qu’ils désirent être levé plus tard. Et puis y a des gens qui peuvent aller tous seul au lavabo qui ont

seulement besoin de nous pour un dos ou l’habillage du bas, ils sonnent pour nous dire qu’ils ont besoin

de nous.

Comment accompagnez-vous une personne âgée lors de sa toilette ?

On est là pour l’aider, faire ce qu’elle ne peut pas faire ou l’aider ou l’amener à essayer de faire. Si elle

peut faire on la laisse faire. Les chose qu’elle ne peut pas faire soit on l’aide soit on fait à sa place mais

en général on essaye de la stimuler pour qu’elle le fasse.

Comment choisissez-vous la manière d’accompagner ?

Selon la personne, son handicap, c’est surtout ça. Selon ses habitudes de vie qu’elle avait auparavant,

je pense que c’est tout je pense pas à autre chose.

Comment déterminez-vous les étapes de la toilette et la chronologie ?

Selon son handicap aussi, une personne qui ne peut pas tenir debout, on va faire la toilette au lit, faire

l’habillage du bas, la lever et terminer au lavabo, si c’est une personne qui ne se lève pas du tout on fait

le toilette complète au lit, donc on commence pas le plus propre et on va vers le plus sale et si elle est

souillée on commence par là puis du plus propre au plus sale.

Et si la personne peut tenir debout ?

Si elle peut faire elle-même, elle va commencer par son visage, son buste, ses bras, ses mains, nous

on va faire le dos, puis la toilette intime, le lavage de dents ensuite et le maquillage ou une crème selon

et puis après l’habillage du haut.

Que pensez-vous des conditions de réalisation de la toilette dans le service ?

Souvent dans l’empressement, on a souvent très peu de temps, un temps limité, on a aussi le bip pour

répondre à nos sonnettes on est envahie par le bip qui sonne sans arrêt quand on est à faire la toilette

Page 73: Evaluation des capacités lors de la « toilette

XX

donc c’est pas des conditions idéales.

Et au niveau de l’environnement physique ?

On est pas si mal loties, on a des lits a hauteur variable, des verticalisateurs, des lève-malades, des

rails dans trois chambres donc ça c‘est le top du top pour une personne qui ne se lève pas du tout pour

nous au niveau ergonomique c’est mieux. On a des sièges de douches à hauteur variable, qui se

bascule. Au niveau matériel de toilette on a des gants à usage unique, des produits d’hygiène, des

changes. La seule chose le seul point noir c’est toujours le personnel, des fois pour faire une toilette

complète d’une personne lourde ben on est toute seule parce que la collègue fait autre chose et on peut

pas se retrouver à deux et on a plusieurs patients à faire à deux, et si on les fait vraiment à deux on va

manquer de temp pour faire les autres patients.

Etes-vous, en tant qu’aide-soignante, formée pour réaliser les toilettes ?

Oui mais c’est vieux hein 89 c’est vieux… on nous a appris d’ailleurs c’était très très strict la formation

était très stricte on prenait pas en compte vraiment comment vous dire le patient était pas au centre de

notre formation enfin c’est pas ce que je veux dire, c’était du plus propre au plus sale, les habitudes de

vie étaient moins prises en compte. C’était ça la priorité du plus propre au plus sale, on nous a vraiment

montré comment faire, pour la toilette intime on partait du pubis du plus propre vers le plus sale,

l’intérieur des cuisses, le plus propre, le haut du ventre, puis du pubis vers la vulve c’était vraiment très

technique. Maintenant les jeunes collègues c’est un peu moins technique y a plus d’adaptation je dirais.

Concernant l’ergothérapeute, selon vous quel est son rôle au sein du SSR ?

Par rapport à nous les aides-soignantes c’est un complément, elle vient en complément même des fois

elle a un autre regard que nous, vis-à-vis de, entre autre des soins d’hygiène, nous des fois on est

tellement dans les toilettes enfin entre autre parce qu’on fait beaucoup de choses mais surtout les

toilettes on a plus le recul, des fois on fait les choses, je vais pas dire à la chaine parce que j’aime pas

ça, mais on a plus de recul on est tellement dedans qu’on ne le laisse pas la personne faire c’est plus

de temps que de faire nous-même, c’est ça qui manque des fois. Ça c’est pas perçu dans notre

profession des fois, on a tant de toilette à faire donc faut faire donc vous vous débrouiller, y a des

personnes qu’on pourrait autonomiser plus rapidement, l’ergo avec ses bilans elle vient nous dire ; il est

capable de faire ça et ça. C’est plus un complément pour mettre en place du matériel, on va vers elle :

telle ou telle personne est mal installée, elle vient, elle corrige, par rapport à un positionnement dans le

lit, c’est un complément un outil.

On devrait bosser en collaboration même par rapport à une visite à domicile c’est vrai que l’ergo a des

études en fonction, elle a fait des études pour justement dans le handicap réadapter les chose, nous

qui connaissons les patients tous les jours ça pourrait être intéressant. Des fois ça pourrait être bien on

les voit tous les jours dans leurs difficultés, ça pourrait être positif. Si un service a domicile doit intervenir

aussi. L’ergo nous apporte énormément de choses elle a des idées de matériel des choses auxquelles

on pense pas, chacun est là pour aider l’autre.

Selon vous qui demande l’intervention de l’ergothérapeute ?

Des fois le médecin, ente autre un retour à domicile pour réadapter par rapport au handicap connu

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comment réadapter le domicile et nous, quand on a des difficultés pour telles ou telles choses. Et l’ergo

ici essaye de les voir à l’entrée, en systématique pour voir les pathologies, aller les voir même des fois

je pense aux enfiles-bas je pense aux personnes qui se débrouillent mais qui ne peuvent pas mettre

leurs bas : est ce que tu pourrais voir pour un enfile bas ça serait plus facile pour elle pour chez elle, ou

pour des fauteuils qu’on trouve trop bas, ...

Savez-vous quels supports utilise l’ergothérapeute pendant son évaluation lors de la toilette ?

Non on a jamais été curieux de lui demander c’est vrai.

Vous communique-t-elle ces résultats ? Si oui, comment ?

Oui, elle a dans les transmissions ciblées un petit item ergo et donc on peut aller voir dans les

transmissions ciblées ou alors on a des synthèses tous les lundis, et elle y est présente tous les lundis

bien souvent les bilan en ergo sont demandés pendant cette synthèse là.

L’accompagnez-vous lors de ses évaluations ?

Non, et ça, ça pourrait être intéressant. Parce que la personne elle nous connait nous l’aide-soignante,

l’ergo elle la connait moins, devant le fait accompli quand la personne ne la connait pas elle va peut-

être faire plus de choses que quand c’est nous. Pour réellement voir la réelle autonomie de la patiente

ça serait préférable que l’ergo soit seule et qu’elle nous redise après. Souvent quand elle intervient c’est

que nous on a un petit doute quoi, elle fait pas mais elle pourrait peut-être faire, je pense qu’il y a déjà

un questionnement sur la personne.

Il pourrait tout de même y avoir un côté positif ?

Pour nous oui pour la personne je sais pas mais pour nous oui certainement.