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PENSEE RATIONNELLE ET ARGUMENTATION

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Clayton Peterson

Pensee rationnelle

et argumentation

Les Presses de l’Universite de Montreal

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Catalogage avant publication de Bibliotheque et Archivesnationales du Quebec et Bibliotheque et Archives Canada

Peterson, Clayton, 1985-

Pensee rationnelle et argumentation

Comprend des references bibliographiques.

ISBN 978-2-7606-3325-4

1. Pensee critique - Manuels d’enseignement superieur. 2. Logique-Manuels d’enseignement superieur. I. Titre.

BC177.P47 2013 160 C2013-941861-X

Depot legal : 3e trimestre 2013Bibliotheque et Archives nationales du Quebecc� Les Presses de l’Universite de Montreal, 2013

ISBN(papier) 978-2-7606-3325-4ISBN(epub) 978-2-7606-3327-8

ISBN(pdf) 978-2-7606-3326-1

Les Presses de l’Universite de Montreal reconnaissent l’aide financiere dugouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canadapour leurs activites d’edition.Les Presses de l’Universite de Montreal remercient de leur soutien finan-cier le Conseil des Arts du Canada et la Societe de developpement desentreprises culturelles du Quebec (SODEC).

IMPRIME AU CANADA

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Preface

Le cours Pensee rationnelle et argumentation ressemble a celui appeleCritical Thinking suivi par les etudiants de philosophie de premiere an-nee des universites americaines et du Canada anglais, mais il s’inscritegalement dans une tradition beaucoup plus ancienne qui remonte auxphilosophes grecs. Les fondateurs de la logique de la Grece ancienne laconsideraient en e↵et comme un outil et un instrument, bref comme une« propedeutique », c’est-a-dire une discipline preparatoire a laquelle ondoit se former en vue de l’acquisition optimale de connaissances dansd’autres domaines. A l’evidence, celui qui a recu une formation dans l’artdu raisonnement saura plus aisement departager les raisonnements validesdes arguments fallacieux que celui qui n’en a pas eue. Il sera egalementplus en mesure de reconnaıtre, parmi ses propres raisonnements, ceuxqui ne satisfont pas aux regles de validite. Les createurs de ce cours ontdonc voulu proposer un apprentissage des regles du raisonnement qui serevelera utile a tous les etudiants, quel que soit leur domaine.

Ce manuel concu par Clayton Peterson, qui termine actuellementun doctorat en logique au Departement de philosophie de l’Universitede Montreal, est le resultat conjugue de sa grande competence en lo-gique et de l’experience qu’il a acquise en donnant ce cours a plusieursreprises. J’ai aujourd’hui le plaisir de prefacer cet ouvrage qui provient,pour l’essentiel, des notes de cours et du materiel qu’il rassemble et metcontinuellement a jour depuis les dernieres annees. Son objectif est derendre cette matiere le plus accessible possible aux nouveaux etudiantsqui ne cherchent pas necessairement a se specialiser en philosophie ou enlogique. Mission accomplie : sur le plan de la rigueur, de la clarte et del’accessibilite, ce livre me paraıt tout a fait exemplaire : sa presentationdes notions de base est limpide, les exemples sont toujours choisis avecun grand souci pedagogique et les exercices qui completent chacun de ses

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vi Pens

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chapitres permettront a l’etudiant d’approfondir ses connaissances et deles mettre en pratique.

Je ne doute pas que ce manuel sera d’un precieux apport pourceux et celles qui ont l’ambition de reussir ce cours dans les meilleuresconditions possibles.

Louis-Andr

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e Dorion

Professeur titulaire,Directeur, Departement de philosophie

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Avant-propos

Ce manuel est principalement destine aux etudiants du cours Penseerationnelle et argumentation, o↵ert par le Departement de philosophiea l’Universite de Montreal. Il s’inspire de plusieurs ouvrages, dont lecontenu theorique a ete adapte pour les fins de notre propos.

L’objectif est d’outiller le lecteur a reconnaıtre et a evaluer lesarguments, de maniere a pouvoir distinguer les raisonnements qui sontacceptables de ceux qui ne le sont pas. Bien que l’argumentation visea convaincre, les arguments qui atteignent leur but ne sont pas neces-sairement des arguments qui devraient convaincre. Nous tacherons doncde determiner les criteres d’acceptabilite d’un argument, c’est-a-dire lesconditions dans lesquelles il est raisonnable, voire rationnel, d’accepter unargument. En plus des listes de questions que l’on trouve a la fin des cha-pitres afin d’orienter la lecture, on trouve aussi plusieurs exercices visanta approfondir la matiere.

Je tiens a remercier Mathieu Belanger pour avoir porte a mon at-tention les concepts fondamentaux qui ont guide la redaction de ce manuelet pour m’avoir donne acces a ses travaux sur le sujet. Un remerciementspecial a Jean-Pierre Marquis, qui malgre son horaire trouve toujours letemps de m’orienter, de me guider et de me conseiller. Merci au Departe-ment de philosophie de m’avoir donne l’opportunite de rediger ce manuel,et merci aussi a Louis-Andre Dorion de m’avoir apporte son soutien toutau long du processus. En dernier lieu, je tiens a remercier Antoine DelBusso ainsi que l’equipe des Presses de l’Universite de Montreal, qui m’ontpermis de realiser ce projet.

Clayton Peterson

[email protected]

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Chapitre 1

Le concept et la classification

Quiconque suit minimalement l’actualite est au fait de l’importance del’argumentation d’un point de vue social. Que ce soit par rapport audeveloppement de l’industrie du gaz de schiste, des sables bitumineuxet du Plan Nord, ou par rapport au suicide assiste, au mariage gai oumeme a la gratuite scolaire, la majorite des enjeux sociaux sont sujets acontroverse et ceux qui desirent qu’en tant que societe nous nous dirigionsvers une direction plutot qu’une autre se devront de convaincre la majoritede la population.

Que l’on pense aux independantistes qui militent en faveur de laseparation du Quebec ou a certains deputes qui tentent de ressusciter ledebat sur l’avortement, les enjeux sociaux font s’a↵ronter des positionssouvent irreconciliables ou chacun tente de convaincre l’autre en fournis-sant des raisons, qui selon lui apportent une justification appropriee a saposition.

Mais quiconque s’interesse minimalement aux enjeux sociaux auraaussi vite fait de remarquer que ce qui passe pour une justification ap-propriee laisse souvent a desirer. Est-ce que le fait que Justin Trudeauait enseigne le theatre nous donne une bonne raison de ne pas voter enfaveur du Parti liberal ? Est-ce que le fait que plusieurs etudiants aientdes iPhones devrait nous convaincre que l’Etat ne devrait pas realiserla gratuite scolaire ? Est-ce que la hausse des frais de scolarite impliqueun retour a une epoque ou les francophones et les femmes n’etaient paseduques ? Il n’est parfois pas evident pour celui qui s’interesse aux debatssociaux de mettre de l’ordre dans les arguments qui sont avances et d’eva-luer la pertinence ou encore l’acceptabilite des raisons qui sont invoqueesen faveur d’une position ou d’une autre.

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Le discours argumentatif se distingue des autres types de discours,notamment narratif, descriptif et explicatif. Le discours argumentatif apour objectif de convaincre : l’argumentation est une procedure discursivequi, par la presentation de raisons et de donnees pertinentes, tente dejustifier une a�rmation afin de convaincre qu’elle est vraie. Mais selonquels criteres peut-on juger de la valeur d’un argument ? Qu’est-ce qu’unbon argument ? Est-ce qu’un bon argument est un argument qui reussitsimplement a convaincre ?

L’actualite nous indique plutot le contraire : un argument convain-cant peut neanmoins etre un mauvais argument, soit un argument qui nedevrait pas convaincre et convainc de facon illegitime. La question estdonc de savoir ce qu’est un argument convaincant d’un point de vue ra-tionnel et de degager les conditions dans lesquelles un argument peut etdevrait, a juste titre, convaincre la raison. En ce sens, la theorie de l’argu-mentation est normative, c’est-a-dire qu’elle vise a determiner les criteresen fonction desquels il est possible de juger de la valeur d’un argument.Or, la coherence etant l’un des criteres de rationalite des plus importants,nous ne serons pas surpris qu’un bon argument doive repondre a certainscriteres logiques.

Un argument est caracterise par le fait que certains enonces sontapportes afin d’en justifier d’autres, tout cela dans le but de convaincreun auditoire d’une conclusion controversee. Pour repondre a la questionde savoir ce qu’est un bon argument sur le plan de la raison, il nousfaudra donc etudier les liens qui se trouvent entre la conclusion et lesenonces avances en guise de justification. En repondant a la questionqu’est-ce qu’un bon argument ?, nous repondrons donc par le fait meme ala question de savoir ce qu’est une bonne justification. Considerant que lesarguments sont composes de propositions, lesquelles sont composees deconcepts, attaquons-nous d’abord a cette derniere notion avant d’aborderles arguments en tant que tels.

Le concept

Le concept est general et s’applique a une classe d’objets du meme type.Par le fait meme, le concept est abstrait, c’est-a-dire qu’il isole les pro-prietes communes et essentielles d’une classe d’objets. Considerant cesdeux caracteristiques, il s’ensuit que la classe induite par le concept doitcontenir tous les objets qui tombent sous le concept. Lorsque la classe esttrop restreinte, il devient di�cile, voire impossible, d’abstraire les proprie-tes communes et essentielles qui appartiennent uniquement a ces objets.

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Le concept et la classification 11

En cherchant a definir un concept qui refere a une classe d’objets troprestreinte, on prend en compte des proprietes qui sont contingentes. Parexemple, il n’y a pas de concept du cercle suivant :

Il y a le concept de cercle, qui s’applique a tous les cercles, mais pouravoir un concept qui ne s’applique qu’au cercle susmentionne il faudraitprendre en compte plusieurs considerations arbitraires et contingentes,notamment le diametre du cercle, sa position, sa couleur, etc. Le conceptest beaucoup plus large et ne s’applique pas seulement a une classe res-treinte d’objets.

En isolant les proprietes communes et essentielles des objets, ons’assure un niveau de generalite assez eleve. Si la classe d’objets est troprestreinte, le concept devra prendre en compte des caracteristiques nonessentielles. En isolant les proprietes essentielles d’un objet, par opposi-tion avec des proprietes contingentes comme la couleur, le lieu, le temps,etc., on obtient par le fait meme les proprietes partagees par plusieursautres objets du meme type.

Le terme, qui est l’expression d’un concept, est utilise afin d’y re-ferer. L’utilisation d’un terme ou d’un autre depend de certaines conven-tions. Cela peut etre un mot ecrit comme « cercle », un mot prononce,ou meme un simple signe.

Le concept est la representation intellectuelle d’un objet empiriqueou mental. Or, il est important de ne pas confondre le concept avec l’imagementale ou avec le terme.

D’une part, le concept, qui est par nature abstrait, ne se reduitpas a une image mentale puisque celle-ci est l’image de quelque choseen particulier. L’image d’un objet particulier n’equivaut pas au conceptpuisqu’elle contiendra toujours des elements non essentiels. Ainsi, l’imagementale d’un cheval n’equivaut pas au concept cheval. L’image mentaleaura une couleur, alors que cela n’est pas essentiel au concept.

Afin de repondre a la question de savoir ce qu’est une caracte-ristique essentielle d’un concept, posons-nous la question suivante : Quefaudrait-il enlever a l’objet a afin que celui-ci ne soit plus un A ? Parexemple, que faudrait-il enlever a Jolly Jumper afin de pouvoir a�rmer

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que celui-ci n’est plus un cheval ? Est-ce que Jolly Jumper sans tete estun cheval ? Est-ce que Jolly Jumper a trois jambes est un cheval ? Est-ceque Jolly Jumper sans criniere est un cheval ? Si l’on repond « oui » aune telle question, alors la caracteristique n’est pas essentielle.

D’autre part, le concept ne se reduit pas au terme, lequel est utiliseafin de referer au concept. Cela peut etre mis en evidence par l’exemplesuivant : « Justice ». Est-ce que cela nous informe de ce que signifie leconcept de justice ? Le terme ne contient pas l’information du concept.Le concept, en quelque sorte, est quelque chose qui va « au-dela » duterme. Au meme titre que l’individu Socrate ne se reduit pas au mot« Socrate », le concept de Justice ne se reduit pas au mot « Justice ».Pour apprendre ce que signifie le concept de Justice, il ne su�t pas delire le terme « Justice ».

Le concept possede donc trois caracteristiques fondamentales :

1. il est abstrait (il isole les proprietes communes et essentielles d’uneclasse d’objets) ;

2. il est general (il s’applique a une classe d’objets d’un meme type) ;

3. il induit une classe d’objets.

La classe des objets induite par un concept correspond a son extension. Ils’agit de l’ensemble qui contient les objets qui tombent sous le concept1.

Laissons-nous tenter par une analogie. En un sens, le concept peutetre vu comme un chaudron au-dessus duquel se trouve un tamis (ou unfiltre). Le tamis doit etre assez fin pour ne pas laisser passer les objets quin’ont pas les proprietes essentielles du concept, et assez general afin delaisser passer tous les objets qui ont les proprietes essentielles. Si le tamisest approprie, le chaudron contiendra l’ensemble des objets qui tombentsous le concept. Le contenu du chaudron, c’est-a-dire les objets qui aurontpasse au travers du tamis, forme l’extension du concept. Le tamis adequatpour un concept correspond a sa definition. Toutefois, avant d’aborder lesquestions relatives a la definition d’un concept, il convient d’abord de voirquelques notions utiles de classification.

1 Le principe d’extensionnalite, a savoir que tout concept possede une extension,peut cependant mener a des resultats contradictoires, comme l’a montre le paradoxede Russell (1999).

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Le concept et la classification 13

La classification

Le niveau de generalite d’un concept depend de la largeur de son exten-sion. A supposer que deux concepts A et B sont commensurables, A estdit plus general que B a condition que l’extension de A contienne l’exten-sion de B, mais non l’inverse : tout objet qui est dans l’extension de Bse trouve dans l’extension de A, mais il y a certains objets de l’extensionde A qui ne sont pas dans l’extension de B.

A

B

Le concept A est plus general que B dans la mesure ou l’extension de Acontient tous les elements de l’extension de B et plus encore.

Exemple

Animal est plus general que mammifere, lequel est plus general que felin.Tout ce qui est un felin est un mammifere, et tout ce qui est un mam-mifere est un animal. Cependant, il existe des animaux qui ne sont pasdes mammiferes (p. ex., les poissons), et il existe des mammiferes qui nesont pas des felins (p. ex., les chevaux).

La classification consiste en la hierarchisation des objets apparte-nant a l’extension d’un concept en sous-classes. Considerant que certainsconcepts sont logiquement lies (p. ex., felin et animal), et donc sont com-mensurables, la classification permet de creer un ordre a l’interieur del’extension d’un concept. On trouve trois principales relations entre lesconcepts : l’independance, le chevauchement et l’inclusion.

L’independance : l’extension d’un concept A est independante decelle d’un concept B si et seulement si aucun objet n’est a la fois elementde l’extension de A et element de l’extension de B.

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A B

Exemples

A et B sont independants

1. Felin et Canin

2. Poisson et Oiseau

3. Nombre pair et Nombre impair

4. Automobile et Arbre

5. Homme et Tulipe

Le chevauchement : l’extension d’un concept A chevauche celled’un concept B si et seulement si certains elements de l’extension de Asont elements de l’extension de B.

A B

Exemples

A chevauche B

1. Automobile et Rouge

2. Felin et Mammifere

3. Nombre divisible par 2 et Nombre divisible par 8

4. Automobile et Moyen de deplacement

5. Tulipe et Objets qui sentent bon

L’inclusion : l’extension d’un concept A inclut celle d’un conceptB si et seulement si tous les elements de l’extension de B sont elementsde l’extension de A.

Le concept et la classification 15

A

B

Exemples

A inclut B

1. Mammifere et Felin

2. Animal et Homme

3. Nombre et Nombre premier

4. Vehicule et Automobile

5. Vegetal et Tulipe

Lors de la lecture des prochains chapitres, il faudra garder en teteles relations qui peuvent se trouver entre les concepts. En e↵et, celles-ci permettent non seulement d’identifier les erreurs de classification etsouvent meme d’argumentation, mais aussi de determiner les erreurs dedefinition et d’etudier les conditions de verite des enonces.

Remarques

Les relations susmentionnees se comportent selon certaines condi-tions. En voici quelques-unes.

1. Si deux concepts sont independants, alors ils ne se chevauchentpas.

2. Si deux concepts se chevauchent, alors ils ne sont pas inde-pendants.

3. Si un concept A inclut un concept B, alors A et B se che-vauchent.

La classification requiert que l’on distingue entre le genre et l’espece.Alors que le genre est plus general et englobe plusieurs especes (p. ex.,animal), l’espece est plus specifique et est propre a un genre (p. ex., mam-mifere). Dans une classification a plusieurs niveaux, un genre peut etrea la fois genre de plusieurs especes et espece d’un genre, au meme titre

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que l’espece d’un genre peut etre genre de plusieurs especes. Par exemple,mammifere est l’espece de animal mais est le genre de felin, tout commefelin est l’espece de mammifere mais est le genre de chat.

Une bonne classification doit respecter trois regles.

1. Une classification est complete a condition que l’extension du genresoit identique a la reunion de l’extension de toutes les especes. Au-trement dit, le genre et l’ensemble des especes renvoient exactementaux memes objets, c’est-a-dire que l’extension du genre inclut l’ex-tension de toutes les especes et l’extension de toutes les especesinclut celle du genre (les extensions sont identiques).

2. Une classification est coherente si aucun objet n’appartient a la foisa deux especes di↵erentes. Toutes les especes doivent etre indepen-dantes les unes des autres : il ne doit pas y avoir de chevauchemententre les especes.

3. Une classification doit utiliser un critere essentiel qui permet de sub-diviser le genre en plusieurs especes. Ce critere est relatif a l’objectifpoursuivi par la classification.

Remarques

1. Le critere essentiel dans une bonne classification depend del’objectif vise et du public auquel la classification s’adresse.Par exemple, classifier les couleurs en fonction des couleursprimaires, secondaires et tertiaires est pertinent pour celui quifait de la peinture, mais moins pour le physicien, qui prefereraclassifier les couleurs selon leur longueur d’onde.

2. Une proposition a�rme des relations entre des concepts. Ils’agit de sa structure interne. Dans certains cas, la valeurde verite d’une proposition peut etre determinee a l’aide dela structure interne d’autres propositions. Prenons la relationd’inclusion par exemple : le chat est un mammifere. Cela si-gnifie que l’extension du concept chat est un sous-ensemble decelle du concept mammifere. Autrement dit, l’ensemble induitpar le concept chat est inclus dans celui induit par le conceptmammifere. De fait, un objet qui appartient a l’extension dechat appartient aussi a l’extension de mammifere.

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Le concept et la classification 17

Exemple

Ainsi, a supposer que « Felix est un chat » et que « le chat est un mam-mifere », il nous est possible de conclure que la proposition « Felix est unmammifere » est vraie puisque l’objet designe par Felix est membre del’extension du concept chat, et donc par inclusion est aussi membre del’extension du concept de mammifere.

Representer les relations

Dans les chapitres qui suivent, notre objectif sera d’utiliser les relationsqui se trouvent entre les concepts afin d’etudier la validite des raisonne-ments. Pour ce faire, introduisons d’abord quelques regles pour la repre-sentation graphique des relations. Ces regles permettent de representervisuellement les relations exprimees par les enonces.

Soulignons cependant que cette methode de representation gra-phique ne s’applique qu’aux proprietes qui ne portent que sur un seulobjet. Par exemple, la propriete « etre bleu » porte sur un objet alorsque « etre le frere de » porte sur deux objets. Dans le premier cas, « xest bleu » est un enonce qui exprime que la propriete « bleu » s’appliquea l’objet x. Cela signifie que l’objet x est membre de l’ensemble des ob-jets qui ont la propriete d’etre bleu, c’est-a-dire membre de l’extensiondu concept bleu, laquelle inclut toutes les choses qui sont bleues. Dansle second cas, « x est le frere de y » est une relation qui porte sur deuxobjets (individus), soit x et y. La methode que nous proposons est res-treinte aux proprietes qui ne portent que sur un seul objet (c’est-a-direaux predicats monadiques)2.

En bref, l’objectif de cette section est d’etre en mesure de repre-senter graphiquement et semantiquement les conditions de verite d’unenonce. Pour ce faire, nous allons separer les enonces en quelques cas pa-radigmatiques qui nous indiqueront le schema qui permet de representerqu’un enonce d’un certain type est vrai ou faux.

Cela dit, nous allons avoir besoin de quelques conventions afin qu’iln’y ait pas de malentendu. Alors que nous utiliserons les lettres minusculesde la fin de l’alphabet comme variables qui referent a des objets (x, y, z),nous utiliserons les lettres majuscules C,D,E, F,G, ... afin de referer a desconcepts ou a des proprietes. Par exemple, l’enonce « x est un P » se lit« l’objet x possede la propriete P ». Autrement dit, l’objet x est membre

2 La principale raison de cette restriction est que le calcul des predicats monadiquesest decidable, alors que le calcul des predicats en general ne l’est pas (cf. Boolos 2007).

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de l’extension du concept P . Dans le meme ordre d’idees, l’enonce «C estun P » se lit tout membre de l’extension de C est membre de l’extensionde P.

Exemples

1. Socrate est un homme (x est un P ).

2. L’homme est mortel (H est M).

x est P

Le premier type d’enonce a analyser est celui de la forme x est P . Ilest a noter que dans un tel enonce, la variable x ne refere qu’a un objet(individuel), et non a un concept.

Exemples

Voici quelques exemples d’enonces de la forme x est P .

1. Le chat est beau.

2. Le ciel est bleu.

3. Jean Charest est un politicien.

4. C’est une belle journee.

5. L’examen est di�cile.

6. L’avortement est injuste.

7. La peine de mort est moralement condamnable.

Un enonce de la forme x est P marque une inclusion (plus preci-sement, une relation d’appartenance), et donc graphiquement un enoncede cette forme sera vrai lorsque l’objet est membre de l’extension de P .Notons que le meme graphique s’appliquera pour les cas ou une proposi-tion de la forme « x n’est pas P » est fausse. Comme nous le verrons plustard, « x n’est pas P » est faux lorsque « x est P » est vrai. Le graphiquequi suit vaut donc pour :

1. x est P = vrai ;

2. x n’est pas P = faux.P

x

Le concept et la classification 19

A l’inverse, si l’enonce est faux, alors x ne sera pas membre del’extension de P . Tel que susmentionne, ce graphique s’appliquera aussiaux propositions de la forme « x n’est pas P » qui sont vraies, puisque« x n’est pas P » est vrai lorsque « x est P » est faux. Le graphique quisuit vaut donc pour :

1. x est P = faux ;

2. x n’est pas P = vrai.

P

x

Il est toutefois a noter qu’une propriete peut etre exprimee parplusieurs concepts. Par exemple, l’enonce Jean est un politicien honneteest de la forme x est P , ou la propriete est « etre un politicien honnete ».Dans un tel cas, la propriete s’exprime par l’intersection de l’extensiondu concept politicien et du concept honnete.

Politicien honnete

Politicien Honnete

j

Tous les C sont des P

Le cas qui suit s’applique aux enonces qui stipulent qu’un concept estinclus dans un autre concept. En reprenant les termes de la classifica-tion, cela equivaudrait a parler des enonces de la forme « l’espece est ungenre ». A la di↵erence du cas precedent, la forme « C est un P » signifieque tous les membres de l’extension du concept C sont membres de l’ex-tension du concept P . En ce sens, cet enonce est equivalent a un enoncede la forme « tous les x qui sont des C sont des P ». Autrement dit, pour

Table des matieres

Preface v

Avant-propos vii

Chapitre 1Le concept et la classification

Le concept 10

La classification 13

Representer les relations 17

Semantique et valeurs de verite 23

Chapitre 2La definition

Definir 29

Regles et erreurs 32

Chapitre 3La proposition

L’enonce declaratif 39

Les equivalences 43

La classification des enonces 47

Chapitre 4Les connecteurs logiques

La structure des propositions 53

La negation 57

La conjonction 59

La disjonction 60

L’implication materielle 62

Connecteurs logiques et langue naturelle 66

Extrait de la publication

Chapitre 5Propositions et valeurs de verite

La structure interne d’une proposition 69

Les valeurs de verite 72

La consistance 76

La preuve par l’absurde 77

La methode des arbres 79

Les diagrammes 90

Chapitre 6L’analyse de l’argument

L’argument dans son sens large 97

L’argument dans son sens restreint 99

Forme normale 101

Premisses conjointes et independantes 102

Le schema d’argument 104

Les arguments complexes 106

Une analyse 107

Arguments deductifs et inductifs 112

Chapitre 7Validite et contre-exemple

Validite et consequence logique 119

Une analyse 121

Validite et valeurs de verite 123

Validite propositionnelle et validite interne 125

Le contre-exemple 127

Methodes de preuve 130

Validite et langue naturelle 132

Chapitre 8La force de l’argument

La force 141

Les limites de notre methode 143

L’acceptabilite des premisses 147

Necessite et suffisance 152

Chapitre 9Sophismes et erreurs de raisonnement

Les sophismes 163

Les erreurs de raisonnement 174

Bibliographie 177

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